3.3 LA
MÉDICALISATION
Quand un enfant est diagnostiqué comme en
difficulté, plusieurs moyens peuvent être mis en action par les
spécialistes. D'un côté, il peut y avoir un suivi
thérapeutique, qu'il soit dans le courant psychanalytique,
systémique ou comportementaliste. En tant qu'éducateur, nous
travaillons en collaboration avec ses différents psychologues en suivant
leurs recommandations, ce qui nous permet de pouvoir agir avec l'enfant dans le
quotidien.
En plus de ces thérapies, certains enfants sont
également suivis médicalement. Nous pouvons constater que de plus
en plus d'enfants ayant des difficultés se retrouvent
« médicalisés ».
Cette médicalisation est liée au DSM III
(dictionnaire statistique des maladies) en 1980. Cette
3ème édition a été créée
suite aux critiques apparues au sujet des versions précédentes du
DSM.
Il était reproché au dictionnaire statistique
des maladies :
Ø difficulté d'obtenir des dialogues fiables et
valides indépendant des différentes théories psycho-
pathologiques (comment mettre tout le monde d'accord ?)
Ø manque de validité dans les maladies mentales
(diversité des causes et des pathologies). Différentes
théories sur l'origine du trouble. Pas de recherche sur la cause de la
maladie.
Ø Peur de la diversité, pas d'accord suffisant
entre les différentes disciplines
La construction d'un langage commun est la seule solution afin
de mettre d'accord le neuroscientifique et le psychanalyste. Pour cela, il y
aura la suppression de la notion de cause et un consensus sur les syndromes
sera établi. Cet accord sera officiel avec le DSM III : ce langage
commun est construit sur la notion de syndrome faute de consensus sur les
causes.
Le DSM sert de repérage comportemental : on va
observer, questionner la personne, afin de remplir un questionnaire
précis. « La coche » sert à évaluer et
diagnostiquer la maladie dont souffre le patient. Suivant le résultat de
« la coche », le médecin ou le thérapeute,
par exemple, pourra prescrire un traitement médical pour combattre le
trouble.
Les neurosciences prennent leur essor. On traque la maladie
mentale du côté du gène, de la structure du cerveau, des
cellules ...
Face aux problèmes rencontrés dans
l'éducation, la solution qui semble la plus souvent prescrite est la
médication. Puisqu'un enfant ne peut pas rester calme, ce n'est pas
grave, on a un cachet qui le calmera qu'il le veuille ou non.
Evidemment, les grands gagnants dans cette course à la
sagesse sont les industries pharmaceutiques, qui disposent comme par magie du
remède miracle : le sauveur des parents.
Même si il n'y a pas assez de recul, par rapport
à l'usage de ses médicaments, le résultat immédiat
est primordial. C'est ce résultat qui compte, les gens sont satisfaits.
Mais qu'en est-il des effets à longs termes de ces traitements ?
Pouvons-nous assurer qu'ils n'auront aucun impact sur la santé mentale
ou physique de l'enfant ayant suivi un tel traitement pendant plusieurs
années ?
Oui, on parle bien d'années. Oui, car l'enfant
difficile a sûrement, à la base, une raison d'être
difficile, de se révolter. Avec les médicaments, on masque sa
souffrance intérieure en masquant les symptômes, mais on ne fait
pas disparaître son problème initial. Arrêter le traitement
revient à la situation de départ, où l'enfant a quelque
chose à partager, à extérioriser, mais qu'il ne peut pas
le faire ou n'en a pas l'occasion. Sa seule solution, même
inconsciemment, est de redevenir cet enfant difficile.
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