L'influence du milieu criminogène sur la personnalité du délinquant: L'exemple de la ville de Dschang( Télécharger le fichier original )par Edmond Rostand Nsheuko Université de Dschang - Maitrise en droit et carrières judiciaires 1998 |
D- La valeur de la famille.
La formation de la conscience morale et du « sur moi » est l'oeuvre des la famille à travers sa fonction d'être le premier milieu d'accoutumance aux contraintes de la coexistence en groupe23(*). Elle doit apporter un mélange de tendresse et de fermeté qui permet à l'enfant d'accepter les premiers interdits du groupe. Mais tel n'est pas toujours le cas, car on constate parfois dans les familles, des carences affective (1) et éducative (2) qui peuvent entraver ce processus. 1- La carence affective.La carence affective peut consister en la privation ou la déviation de l'amour parental dont pâtit soit toute la lignée soit un enfant24(*). Pour les délinquants de notre groupe, en ce qui concerne l'affection de leurs parents à l'égard des enfants, 17 d'entre eux soit 26,1% les estiment très affectueux, 22 soit 33,8% les estiment tout simplement affectueux, 16 soit 24,6% les estiment pas très affectueux et 10 soit 15,3% pas du tout affectueux. Les affections paternelles et maternelles, qu'elles soient extériorisées ou qu'elles soient discretes, aident l'enfant à franchir les étapes successives du processus de socialisation. Cette affection lorsqu'elle existe ne doit pas être trop débordante car le père trop protecteur ou la mère prête à tout pour éviter une larme ou une bouderie, contribuent à « gâter » l'enfant. Dans sa manière de jouer l'enfant trop protégé, le fils ou la fille devient trop exigeant. Trop facilement révolté, capricieux, privé de volonté, l'enfant devenu adulte conserve ensuite des travers qui l'exposent plus que d'autres à rejeté les impératifs de la loi pénale. De l'autre côté, l'absence d'affection (15,3%) ou l'insuffisance de celle-ci (24,6%) peuvent aussi être dangereuses. Lorsqu'elles frisent l'hostilité, elles font prendre conscience à l'enfant de la méchanceté agressive dont il est victime. S'il se plie aux normes de l'environnement, c'est par pure contrainte. Résigné ou déjà révolté, les réprimandes et punitions des parents défaillants deviennent inacceptables. Aimant mal, ceux-ci châtient mal aux yeux de l'enfant, et celui-ci se cabre. Au lieu de constituer l'apprentissage des règles sociales, la famille devient l'école des oppositions25(*). Cette carence affective crée ainsi des lacunes auxquelles peut alors s'ajouter une carence éducative. 2- La carence éducative.Elle concerne la manière dont les parents s'y prennent pour procéder à l'éducation de base des enfants. Elle peut se présenter sous trois aspects: D'abord l'absence de surveillance jointe à l'absence d'éducation, ensuite l'incohérence des attitudes éducatives et enfin l'excès de sévérité26(*). Pour pouvoir transmettre un certain nombre de connaissances aux enfants, les parents doivent au préalable pouvoir accéder à celles-ci. De là, découle la nécessité de prendre en compte le niveau éducatif des parents. Dans notre enquête nous avons pris en compte le fait que les parents savent lire et écrire ou pas, d'où les tableaux suivants:
Tableau 10 : Niveau d'éducation du père Tableau 11 : Niveau d'éducation de la mère D'après ces statistiques, nous remarquons que l'analphabétisme est très accru chez les parents des délinquants du groupe, avec une prédominance des mères analphabètes (61,5%) par rapport aux pères (36,9%). Cette situation est assez inquiétante car cet analphabétisme rend la plupart de ces parents, incapables de maîtriser certaines données de la vie scolaire des enfants et ce faisant, entrave la fonction de surveillant des parents dans ce domaine. Ce manque de surveillance augmente alors la probabilité pour les enfants de retomber dans le monde des analphabètes qu'est celui de leur parents. Ce faisant, il se crée comme "un cercle vicieux de l'analphabétisme" avec tout ce que cela comporte pour la formation de la personnalité criminelle. Mais, ceci pourra être atténué si les parents font preuve d'une certaine rigueur dans l'éducation de leurs enfants. Nous avons alors noté en ce qui concerne la rigueur des pères des délinquants du groupe, car ceux-ci jouent un rôle important dans la formation du « sur-moi » de l'enfant, que 27,6% soit 18 cas, le trouvent très rigoureux, 20% soit 13 cas le trouvent assez rigoureux, 35,3% soit 23 cas le trouvent pas très rigoureux et 16,9% soit 11 cas le trouvent pas du tout rigoureux. L'absence de rigueur fait en sorte que, lors de la formation du « sur-moi » de l'individu, la règle n'acquiert pas le caractère intimement obligatoire qui favorise son respect. Le caractère de l'individu ne se façonne pas alors dans le sens du respect des normes établies par la société. L'excès de rigueur compromet l'épanouissement de l'enfant. La crainte des reproches, la peur des punitions, l'excès de révérence filiale peut paralyser. L'on assiste à un étiolement de la personnalité et l'adaptation au monde devient difficile. * 23 J. LEAUTE, op. cit, p. 536 * 24 J. LEAUTE, Ibidem.. * 25 J. LEAUTE, op.cit, p. 537. * 26 J. LEAUTE, p. 538-539. |
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