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Dégradation des routes de desserte agricole et production agricole dans la chefferie des Bafuliiru en territoire d'Uvira


par Yohana Patience MIRUHO Mutayubara
Institut Supérieur de Développement Rural d'Uvira - Licence en Relations Internationales 0000
  

Disponible en mode multipage

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* MIRUHO MutayubaraYohana Patience, Chercheur indépendant et Chef de Bureau à l'ISDR-Uvira.

REVUE DE L'IRSA NUMERO 25, JUIN 2019 169

Dégradation des routes de desserte agricole et production agricole dans la
Chefferie des Bafuliiru en Territoire d'Uvira

MIRUHO MutayubaraYohana Patience*

Résumé

Dans la Chefferie des Bafuliiru, en Territoire d'Uvira, Province du Sud-Kivu en République Démocratique du Congo, le secteur agricole reste l'activité dominante. Cependant l'activité agricole souffre étant donné que les routes pour assurer l'écoulement de la production sont quasi inexistantes. Les effets de cet état de chose se font sentir à la base : non seulement il y a baisse de la production, mais aussi la misère de la population et la famine dans les centres de consommation. L'agriculture qui devrait se développer au même rythme que la croissance démographique de la chefferie et ainsi accroitre ses revenus est au contraire négligée et délaissée.

Mots-clés : Routes, desserte agricole, produits agricoles, Bafuliiru, Agriculture.

Abstract

In the Bafuliiru Chiefdom in Uvira Territory, Province of South Kivu in the Democratic Republic of Congo, the agricultral sector remains the dominant activity. It is full of a great diversity of culture with sufficient productions. However, agricultural activity suffers as roads to ensure the flow of production are almost non-existent. The effects of this state of affairs are felt not only at the base of decline in agricultural production, but also at the proverty of the population and the famine in the centers of consumption. Agriculture, which should grow at the same pace as the population growth of the chieftaincy and thus increase its income, is on the contrary neglected and neglected.

Keywords: Roads, agricultural service, agricultural products, Bafuliiru, Agriculture. Introduction

Le réseau routier comme un ensemble des routes interconnectées et entrecroisées permettant le passage des personnes et des biens, constitue un secteur important dans une économie. Il participe et contribue au processus de création des richesses dans un pays.

Les routes comme secteur porteur de croissance dans une économie, agissent efficacement en amont et en aval sur le secteur agricole, l'industrie manufacturière et les échanges en permettant l'acheminement de l'input agricole vers les zones agricoles,

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l'évacuation de l'output des zones productrices vers l'industrie manufacturière considérée comme le centre de transformation de celui-ci en produit fini ou semi fini (octroi de la valeur ajoutée) ainsi qu'en favorisant le démarrage du processus des échanges (naissance du commerce).

Pour le cas sous étude, la réalité est tout autre, c'est-à-dire le réseau routier congolais est dans un état qui ne lui permet pas de jouer convenablement son rôle. Concrètement, les routes en République démocratique du Congo ne semblent pas constituer un réseau effectif parce qu'elles ne sont pas interconnectées, ne permettent pas l'intégration et même la liaison de l`arrière-pays considérée comme la zone de production et les villes, comme le centre de consommation. Cet état de choses prouve l'absence ou mieux la faible participation du réseau routier dans le processus de création des richesses en République démocratique du Congo.

Malgré la faible production agricole qu'offrent les zones rurales, les voies de desserte agricole ne permettent pas l'évacuation de cette production vers les centres de consommation (villes). Aussi, ce réseau ne facilite-t-il pas l'acheminement des moyens de production et des produits finis des villes vers les agriculteurs ruraux.

Plusieurs études ont déjà abordé cette problématique. HertinceNtomba 1 qui s'est préoccupé de la compréhension et de l'analyse de l'état des routes d'intérêt général et celles de desserte agricole considérées comme pièce maîtresse de la faible contribution de ce secteur dans le processus de création des richesses en République démocratique du Congo, a conclu que le réseau routier congolais ne joue pas convenablement son rôle, il accuse des difficultés d'ordre conjoncturel et structurel, et cela tant sur le plan économique, technique, politique que social.

Justin Bitakwira, Ministre National de développement Rural de la République démocratique du Congo, lors d'une audition devant la Commission Aménagement du Territoire et Infrastructures de l'Assemblée Nationale sur l'Etat des lieux des routes de desserte agricole a affirmé qu' « il n'y a pas de développement sans les voies d'évacuation des produits agricoles ou des produits de pêche ou d'élevage ».2 Ainsi, il a déploré le fait que le financement est très maigre dans le secteur. Et que cela fait plus d'une dizaine de mois que la Direction des Voies de Desserte Agricole (DVDA) ne reçoit aucun franc, ni du budget de l'Etat, ni du FONER (Fonds National d'Entretien Routier).

Pour leur part, Jimmy LinguleKayomba et Issomalambe Mbombo3 ont établi un état des lieux de routes en Province Orientale, les pesanteurs qui ont concouru à cet état de

1NtombaHertince, Le rôle du réseau routier dans l'intégration et la croissance économique : l'impact des RING et des routes de desserte agricole dans la création des richesses en RDC,Mémoire de Licence en sciences économiques, Université de Kinshasa, 2010.

2www.mediacongo.net, consulté le 19 janvier 2019.

3LinguleKayomba Jimmy et IssomalambeMbombo, « Altération des routes en Province Orientale », In Revue de l'IRSA, Numéro 23, Octobre, 2016, pp. 91-111.

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fait ainsi que les conséquences qui en découlent. Cette recherche a montré qu'en dépit des travaux de réhabilitation tant vantée par les autorités depuis l'avènement de la troisième République, les routes de la Province Orientale sont pour leur grande part dans un état de détérioration et le travail ne semble pas véritablement commencer. Les contraintes politiques, techniques, financières et sociales sont des facteurs ayant déterminé la détérioration de ces infrastructures. Cycliquement, les conséquences de la détérioration de ces routes impactent significativement les domaines politique, économique, socioculturel et influence sensiblement le temps des voyages, etc.

Dans son étude sur la contribution de l'agriculture dans l'amélioration des conditions sociales de l'homme, Claude Aubert soutient que l'agriculture a été dans le monde entier jusqu'au 15e Siècle la principale activité productrice et la seule source de revenus de l'homme. Il ajoute que promouvoir l'agriculture, est une mesure de préserver les revenus et la santé de l'homme rural.

Dans ce travail, notre préoccupation est centrée sur la dégradation des routes de desserte agricole et ses effets sur la production agricole dans la Collectivité Chefferie des Bafuliiru, en Territoire d'Uvira dans la Province du Sud-Kivu.

Cette Chefferie regorge d'une grande diversité de culture à des productions importantes, mais a assez de difficultés liées à l'écoulement, parmi lesquelles nous signalons l'insuffisance des marchés des produits agricoles et le mauvais état des routes de desserte agricole. Les seuls grands marchés sont : le marché de Lubarika, Luvungi, Rubanga et Runingu. Tous ces marchés sont opérationnels, chacun, une fois par semaine. Pour les atteindre, certains habitants sont obligés de parcourir de très longues distances à pied, panier au dos, sac sur la tête pour écouler leurs produits.

De ce fait, des localités entières sont enclavées ; il n'y a ni route, ni marché. La production pourrit dans les champs ou dans des greniers. Comme le fait observer Fernand Vincent4 : « il est difficile sinon impossible de gérer ou de stocker au village certains produits périssables. Mais on peut le faire avec d'autres produits, d'où il suffit de s'organiser ».

Etant donné que les paysans éprouvent d'énormes difficultés d'écoulement et de stockage des produits agricoles dans la Chefferie des Bafuliiru, ce sont des clients qui viennent imposer les prix aux pauvres agriculteurs. En plus de cela, l'agriculteur ne cesse d'être victime de plusieurs contributions en nature de leurs produits, soumis à des multiples taxes, des tracasseries policières et rationnement des militaires. Ainsi, l'homme rural n'est considéré que comme source de ravitaillement.

4 VincentFernand, Manuel de gestion pratique des associations de développement rural du tiers monde, Tome 1, Paris, L'Harmattan,1987, pp.48-49.

5Defour Georges cité par Cibalinda, Problématique de la prospérité du marché des légumes dans la chefferie de Ngweshe, Mémoire de Licence, ISDR-BUKAVU, 1999, p. 1 (Inédit).

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Partant de cette situation, George Defour5 essaie de valoriser la vie du paysan en ces termes : « on a parfois voulu réduire le rural au rôle de simple fournisseur des denrées vivrières aux populations urbaines, sans prendre conscience qu'il a lui-même ses objectifs, sa propre volonté d'épanouissement et le mieux-être qu'il n'acceptera pas de jouer éternellement le rôle de fournisseurs qu'il n'est pas lui-même satisfait ni n'étant qu'un simple exécutant, sa dignité personnelle et collective n'est pas reconnue, s'il ne dispose pas dans ses conditions appropriées à son mode de vie, des établissements de crédits,... qui lui permettent de vivre à l'aise ».

De ce qui précède, notre préoccupation consiste à relever l'impact de la dégradation des routes de desserte agricole sur la production agricole dans la Collectivité Chefferie des Bafuliiru.

Les questions suivantes méritent d'être posées :

- Pourquoi les routes de desserte agricole ne sont-elles pas un atout pour la production agricole dans la Chefferie deBafuliiru ?

- Quels sont les facteurs explicatifs de la dégradation des routes de desserte agricole dans cette Chefferie ?

- Quelles en sont les conséquences sur les activités agricoles ?

Nous partons des hypothèses selon lesquelles les routes de desserte agricole constitueraient un frein à la production agricole dans la Chefferie de Bafuliiru du fait de leur état de dégradation très avancée. L'absence des cantonniers, l'insécurité, le conflit de pouvoir, l'incompétence et le manque de volonté des autorités locales seraient les facteurs explicatifs de la dégradation des routes dans la Collectivité Chefferie des Bafuliiru. Cette situation aurait des conséquences néfastes sur la quantité à produire et l'écoulement des produits agricoles.

Les voies méthodologiques (analytique, historico-comparative et descriptive), nous ont servi à découvrir la véracité scientifique des données récoltées en analysant la situation des agriculteurs, en comparant l'évolution de la production et l'écoulement après la descriptionde l'état des routes de desserte agricole de la Chefferie des Bafuliiru. Ce qui permet de dégager les problèmes auxquels les agriculteurs font face dans leur activité principale. L'observation participative, l'interview et la technique documentaire nous ont permis d'être en contact avec la population cible, palper leur vécu quotidien, participer aux échanges, achats et ventes des produits agricoles dans différents marchés, recueillir et obtenir des renseignements fiables par témoignage de nos interlocuteurs et consulter et exploité les écrits des doctrinaires pour trouver des éléments pouvant enrichir cette réflexion.

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Pour apprécier les conséquences de la dégradation des routes sur la production agricole, nous avonschoisi un échantillon de 101 habitants pour une population estimée à 390 979 âmes. Cet échantillon est tiré de cinq groupementsqui composent la Chefferie des Bafuliiru, à savoir Lemera, Itara, Kigoma, Runingu et Muhungu. L'échantillon a respecté la proportion de deux sexes et tranches d'âge adulte. Le groupement d'Itara a représenté un grand nombre d'enquêtés, suivi des groupements de Lemera, de Kigoma, de Runingu et de Muhungu.

L'échantillon à choix raisonné était composé de 80 agriculteurs, 8 enseignants, 9 élèves et étudiants et 4 infirmiers. Etant majoritaire par rapport aux autres composantes, les agriculteurs nous ont permis de saisir multiples difficultés auxquelles ils font face pendant le processus de la production agricole.

Hormis l'introduction et la conclusion, la présente investigation présente l'état des lieux des routes de desserte agricole dans la Collectivité Chefferie des Bafuliiru (I), analyse les facteurs explicatifs de la dégradation de ces routes (II) et décrit les conséquences qui découlent de cette dégradation sur les activités agricoles (III).

1. Etat des lieux des routes de desserte agricole dans la Chefferie des Bafuliiru

La Chefferie des Bafuliiru6 est située en territoire d'Uvira dans la Province du Sud-Kivu en République démocratique du Congo. Elle est l'une des trois Chefferies (Chefferies de la Plaine de la Ruzizi, des Bavira et celle des Bafuliiru) qui composent le territoire jadis appelé Territoire de Bafuliiru. Elle est approximativement située entre 2°42' de l'altitude sud entre 29°24' longitude Est, elle a une superficie de 1514,270 Km27.

L'agriculture est l'activité dominante dans la Chefferie des Bafuliiru. Ses habitants. Ils pratiquent la culture vivrière dont le manioc et le haricot sont les plus rependus, les céréales (maïs, sorgho, blé...), les oléagineux tels que : l'arachide et le soja. On y pratique également la culture des arbres fruitiers de diverses variétés (les orangers, les manguiers, les mandariniers, les goyaviers, les avocatiers, ...). Les cultures maraichères sont aussi pratiquées dans certaines parties de la chefferie. La culture de manioc est très importante et est pratiquée presque sur toute l'étendue de la chefferie sauf sur les hauts-plateaux, qui sont les domaines de pommes de terre et de maïs. La culture de maïs et d'arachide sont plus rentables dans la plaine, plus précisément à Luvungi et Lubarika. Le haricot est produit à Lemera et ses environs. La culture du café, l'une des cultures industrielles, est pratiquée à Ndolera, Buheba, Lemera, Katala et Mugule. Bafuliiruproduit également le riz à Luvungi et Rubanga.

6MusobwaMugorogo, La modernité et dot chez les Bafuliiru, Cahiers du CERUKI, Nouvelle série, Numéro 52, 2017. p. 187.

7 Monographie de la Chefferie des Bafuliru, in http://www.africmemoire.com, consulté le 23 mars 2019 ; Rapport annuel de la Chefferie, 2004, p. 2.

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Dans cette Chefferie, les paysans, qui vivent principalement de l'agriculture, éprouvent d'énormes difficultés liées à la production agricole, car les routes de desserte agricole se trouvent dans un état de délabrement très avancé.

Dans le processus de création des richesses dans une économie, les routes permettent les transactions et les échanges commerciaux entre les régions en accordant une sorte de valeur ajoutée sur toutes les productions agricoles locales dans les milieux urbains.

Les routes de desserte agricole de la Chefferie des Bafuliiru peuvent être décrites selon leur praticabilité et selon leur importance dans l'écoulement des produits agricoles dans le tableau ci-après.

Tableau 1 : Les routes de desserte agricole dans la chefferie des Bafuliiru en rapport avec leur praticabilité

N° Axes routiers Etat actuel Comité de

maintenance

Distance en Km

nce en

Nombre de ponts

de re

Nombre de caniveaux

de re

Partenaire financier

01 Kawizi-Muhungu NR NR NR En chantier Population locale IRC-Tuungane

02 Katogota-Lubarika 7 0 1 Praticable Inexistant ADRA

03 Luvungi-Lubarika 9 1 1 Non entretenue Inexistant GIZ/ASCU

04 Luvungi-Ndolera 15 3 11 Impraticable Inexistant -

05 Nyamutiri-Ndolera 11 3 5 Non entretenue Inexistant AFPDE

06 Bwegera-Lemera 24 4 9 Praticable CLER ADEPAE

07 Ndolera-Lubumba 1 1 0 Praticable - AFPDE

08 Lubarika-Ndolera 3 1 4 Impraticable Inexistant -

09 Rubanga-Lemera 10 2 NR Praticable Inexistant -

10 Rubanga-Kidote 10 4 NR Praticable Inexistant -

11 Kidote-Mulenge 20 7 NR Praticable CLER -

12 Mulenge-Mashuba 5 1 NR Mauvais état Inexistant NR

13 Ndolera-Buheba 14 2 15 Impraticable Inexistant -

14 Mashuba-Katobo 5 0 NR Impraticable Inexistant NR

15 Katobo-Runingu 35 2 NR Mauvais état Inexistant NR

16 Runingu-Marungu 53 4 NR Impraticable Inexistant -

17 Mulenge-Kahololo 20 3 NR Impraticable Inexistant NR

18 Sange-Rukobero 5 1 NR Praticable CLER NR

19 Sange-Kahungwe 7 - NR Praticable CLER NR

20 Sange-Kigoma 9 1 NR Praticable CLER NR

Source : Rapport annuel cumulé de l'Inspection de développement rural du Territoire d'Uvira, exercice 2016-2017. Données actualisées à la fin de l'année 2018, pp.19-20.

De l'analyse de ce tableau, il ressort que sur plus de 263 km de réseau routier repartis en 20 axes dans la Chefferie des Bafuliiru, 170 km, soit plus ou moins 65%

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représente le réseau routier dégradé 110 km, soit 42% de routes impraticables, 40 km, soit 15% des axes routiers en mauvais état et 20 km, soit 8% d'axes non entretenus et 93 km, soit plus ou moins 35% représente le réseau routier praticable. L'axe routier Kawizi-Muhungu, dont la distance n'est pas encore connue, reste inachevé (en chantier) par manque de partenaires financiers.

Certains axes routiers dégradés et praticables sont dans l'état actuel grâce aux travaux communautaires de la population locale et des comités locaux d'entretien routier. D'autres avaient bénéficié des financements de partenaires financiers, notamment IRC-Tuungane, ADRA, GIZ/ASCU, AFPDE, ADEPAE et AFPDE. Il s'agit des axes routiers suivants : Katogota-Lubarika réhabilité sans délégué à pied d'oeuvre (agent de l'Etat pour surveiller les travaux) en 2013 par l'ONG ADRA dans son projet JENGA II, Luvungi-Lubarika réhabilité en 2013 par l'organisation GIZ/ASCU, Nyamutiri-Ndolera où l'ONGD locale AFPDE avait réhabilité deux ponts et l'axe routier Runingu-Marungu où le projet ASCU de la GIZ avait réhabilité un kilomètre entre Katobo et Ndegu sur la route Runingu-Katobo.

Signalons en définitive que même parmi les axes routiers déclarés `'praticables», certains ne les sont pas par véhicules, à l'exception de l'axe qui va de Bwegera à Lemera, Chef-lieu de la collectivité. A cause de l'état actuel de ces routes, les opérateurs craignent d'y engager leurs véhicules. Le tableau 2 ci-après présente les différentes routes selon leur importance.

Tableau 2 : Les routes de desserte agricole suivant leur importance.

Axe routier

Km

Etat actuel

Production et considérations

diverses

01

Luvungi-Rugobagoba

5

Mauvais état

Vivres et élevage

02

Katobo-Mashuba-Kaholoholo

48

Impraticable

Vivres et élevage

03

Mimo-Rubarika-Luvungi

12

En réhabilitation

Marché, vivres et élevage

04

Lemera-Katobo-Runingu

28

A réhabiliter

Café, marché et élevage

05

Rubanga-Ndolera

12

Praticable

Café et marché

06

Itara-Kakumbakumbu

-

Mauvais état

Café et vivres

07

Lubarika-Kamonyi-Mimo

24

A réhabiliter

Café et vivres

08

Kiringye-Kanigo-Ndolera

10

Praticable

Café et vivres

Source : Rapport annuel de l'Inspection de l'Agriculture, Pêche et Elevage du Territoire d'Uvira de l'année 2018, pp. 56, 57.

De ce tableau, il ressort que l'Inspection de l'Agriculture, Pêche et Elevage a retenu huit axes routiers, qui sont les principales voies d'évacuation de produits vers le marché.

8Rapportage de Lucien Kanana, Journaliste à la radio le Messager du Peuple émettant depuis la ville d'Uvira sur 105.3 FM.

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Il sied de signaler que seuls les axes routiers Kiringye-Kanigo-Ndolera et Rubanga-Ndolera sont praticables pendant que les autres sont, soit en mauvais état, soit impraticables ou à réhabiliter.

2. Facteurs de la dégradation des routes de desserte agricole dans la Chefferie des Bafuliiru

Dans cette partie de notre réflexion, nous analysons les facteurs explicatifs de délabrement des routes dans la Chefferie des Bafuliiru. L'absence des cantonniers, l'insécurité, le confit de pouvoir, l'incompétence et le manque de volonté des autorités locales sont les facteurs explicatifs qui ont été retenus dans ce travail.

2.1. Absence des cantonniers

Dans la Chefferie des Bafuliiru, les routes de desserte agricole ne sont pas régulièrement entretenues étant donné que les cantonniers qui devaient faire ce travail d'une manière permanente par le remblayage des nids de poules et la canalisation des eaux de ruissellement pour prévenir les érosions n'existent pas.

Au tableau 1, il a été démontré clairement que seuls les axes Kawizi-Muhungu, Bwegera-Lemera, Kidote-Mulenge, Katobo-Runingu, Runingu-Marungu, Sange-Rukobero, Sange-Kahungwe et Sange-Kigoma sont périodiquement entretenues soit par la population locale, soit par les comités locaux d'entretien.

Selon Monsieur Mahire Medekero,8 responsable des jeunes volontaires de la localité de Bulindwe, les jeunes volontaires se sont mobilisés pour boucher certains trous à leur frais afin de permettre le passage des véhicules. La population de ces localités continue d'appeler les autorités territoriales à réhabiliter cette route de desserte agricole d'une importance capitale qui relie Katobo à Runingu, en passant par plusieurs localités et qui permet le désenclavement de ces villages des hauts et moyens plateaux d'Uvira.

2.2. Insécurité

La collectivité Chefferie des Bafuliiru comme toutes autres entités du Territoire d'Uvira, souffre de la recrudescence de l'insécurité. Des cas des vols, viols, dépouillement des passagers dans certains axes routiers, braquages, cambriolages, enlèvements et tueries sont perpétrées dans cette région par des hommes armés. Dans cette collectivité, les combats entre les groupes armés locaux (Maï-Maï, FDLR, FNL) et les FARDC sont réguliers.

Les affrontements entre les miliciens Maï-Maï, FDLR, FNL, les forces étrangères,... qui se pourchassent dans les collines de Lemera depuis le début de la guerre de l'Alliance des Forces Démocratiques pour la libération du Congo (AFDL) en 1996,

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continuent de provoquer les déplacements des paysans. Les localités de Mulenge, Rushama, Kibungu, Kidote, Mushegereza, Katala, Butole, Narunanga, Bushuju, Mahungubwe, Kibungu, Nyawera, Rubanga, Langala, Kahange, Bulaga, Kibunga, Nyamutiri, Bubamba, Kahanda, Kigoma, Lungutu, Rukobera, Kahungwe, Mubere, Rugeje, Kibenga se sont vus vider d'une grande partie de ses habitants, voire de tous ses habitants àKigenge, Rudaga et Kasima selon les informations qui nous ont été livrées par Monsieur ButiyeRukika Ephrem.9

Cette situation est l'une des causes de la dégradation des routes, étant donné qu'il est difficile d'assurer leur entretien dans les villages vidés de leurs habitants. Même là où il serait possible de le faire, les enlèvements, les kidnappings, les tueries perpétrées par les forces négatives sèment la terreur chez les cantonniers, les comités locaux d'entretien routier, les bienfaiteurs et les agents des services techniques de l'Etat.

2.3. Conflit de pouvoir coutumier

Le tenant du pouvoir dans la Chefferie des Bafuliiru est le Chef de la collectivité communément appelé Mwami. Il est le Chef de l'exécutif et le représentant de l'ordre et garant de la coutume. Sa personne est sacrée.

A partir des données récoltées, il sied de préciser que la Chefferie des Bafuliiru connaît un certain nombre de problèmes sur le plan politique, économique, socioculturel et organisationnel.

Sur le plan politique, il y a lieu de dire que cette Chefferie traverse une crise de légitimité qui date de longtemps et affecte son développement. Les différents documents administratifs et les rapports qui remontent à l'époque Belge en République démocratique du Congo montrent que cette Chefferie a connu des conflits de succession au pouvoir coutumier. L'étude de BashendeBweyo René10 sur « L'administration et les conflits de succession au pouvoir coutumier dans la Chefferie des Bafuliiru » révèle que les causes de ces conflits sont la polyginie des Bami, la course au pouvoir des princes, la confusion entre la règle coutumière et la légalité moderne, l'incompréhension de la légitimité du choix du Mwami entre les sages et les Banjoga, mais aussi entre les princes. Ils se battent pour le pouvoir. Premièrement, chacun se considère comme un potentiel successeur après la mort du père; d'où des conflits de succession. Deuxièmement, les princes en conflit recourent à l'administration pour être départagés et investis. Deux sources de légitimité apparaissent : la coutume et la loi. Cette dualité donne lieu à une confusion qui ne devrait pas exister en principe, entre le droit coutumier et le droit moderne. Troisièmement, il crée

9ButiyeRukika Ephrem, Assistant de pratique professionnelle à l'ISDR-Uvira, originaire du village de Butole dans la Chefferie des Bavira.

10BashendeBweyo René, L'administration et les conflits de succession au pouvoir coutumier dans la Chefferie des Bafuliiru, Annales de l'UEA, Numéro 5, Volume 4, Bukavu, Mai 2015.

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une compétition entre l'élite traditionnelle et l'élite moderne qui nourrit un projet de transformer la Chefferie en Secteur pour mettre un terme au conflit de succession.

Dans son étude, BashendeBweyo Renésoutient que huit conflits de pouvoir ont déjà eu lieu : les conflits entre Kirunga et Nyamogira, Nyamogira II Shengeroet Ruguduka, pendant le règne de Mukogabwe II Mahina, Muhogo et Matakambo, André Muzima et SimbaNyamogira, SimbaNyamogira et Musa Marandura, SimbaNyamogira et KayambaKabuya ainsi qu'entre Ndare et Albert MuzimawaSimba.

Le conflit entre Albert MuzimawaSimba et Adam Kalingishi tire ses origines dans la succession de Simon NdareSimba, Chef de collectivité décédé depuis le 22 décembre 2012, le premier étant son petit-frère et le second son fils Aîné. Ce conflit a divisé les notables des Bafuliiru, notamment les gardiens de la coutume, BulangalireMajagira Espoir,

BitakwiraBihonaHayi, MasumbukoRubota, Mubengwa, MishoniowaRusati,

KwigwasaNakahuga, BitijulaMahimba, KanyegereLwaboshi, BalibwaNdezi,

MwambaRugendusa, MatendoBagezi, MasineKinenwa, Monseigneur
KuyeNdondowaMulemera et les sages fuliiru (SelemaniBujaga, Mujuguvya, Kawawa, MashimangoKateranya, DugaMuke, Lungwe Diallo, MuchepeKirugira).

Ce conflit qui engage plusieurs acteurs a créé deux tendances : le groupe de sages de « Lubunga » constitué des Bafuliiru d'Uvira qui soutenaient Adam KalingishiNdare, Chef de collectivité, pendant que les Banjoga (gardiens de la coutume) insistaient qu'il aille d'abord étudier et qu'Albert MuzimawaSimba dirige et assure l'Administration de la Collectivité. Quelques élus du territoire et certains notables des Bafuliiru voudraient bien que Monsieur Albert Muzima Wa Simba soit investi au pouvoir et assure l'administration de la collectivité même si c'était Adam KalingishiNdare qui détenait le pouvoir jusqu'à ce jour.

La persistance de ce conflit impacte négativement le développement de la Chefferie des Bafuliiru. L'argent affecté par le gouvernement central en termes de rétrocession pour la réhabilitation des infrastructures et le fonctionnement, sert de peau de vin que le Chef utilise pour se maintenir au pouvoir au lieu de s'occuper du développement de son entité.

2.4. Incompétence et manque de volonté des autorités locales

La Chefferie des Bafuliiru est une entité territoriale décentralisée, qui perçoit plusieurs taxes parmi lesquelles la taxe journalière, qui est obligatoire dans la chefferie des Bafuliiru pour promouvoir le fonctionnement et contribuer à la satisfaction des besoins ménagers des autorités de la chefferie. Elle est payée sur chaque achat et vente d'une marchandise). Il y a aussi la taxe unique instituée par le Décret-loi n°089 du 10 juillet 1998 portant fixation de la nomenclature des taxes, autorisées aux entités administratives décentralisées, des recettes administratives d'intérêt commun et des recettes fiscales cédées par l'Etat aux entités.

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Bien que cette Chefferie, comme toutes autres entités, souffre de problèmes de la modicité du budget alloué par l'Etat au secteur routier, (la non-exécution des crédits alloués à ce secteur, les mauvaises affectations des ressources suite aux mauvais diagnostics dans les travaux des routes, l'existence de la hausse généralisée des prix entrainant la perte du pouvoir d'achat des crédits prévus, les décaissements irréguliers pour les dotations en matériels, les influences politiques dans la gestion de la chose publique, la mauvaise gestion et détournements des fonds alloués dans ce secteur suite au manque de contrôle d'évaluation et de la présence des protections de familles politiques), la charge d'exécution du budget de la chefferie des Bafuliiru revient premièrement aux autorités locales.

En ce qui concerne la gestion financière de recettes locales, les citoyens ne sont pas satisfaits de la manière dont les finances publiques sont gérées. Non seulement la rétrocession de 18 000 dollars accordée à cette Chefferie ne participe pas à la réalisation des ouvrages publics, mais aussi, il y a lieu de s'accorder sur le fait que les prévisions en termes de rétrocession de la Province à la Chefferie (dont le montant ne nous a pas été révélé) sont gérées de manière discrétionnaire au détriment de la satisfaction de la population. A ce niveau, il s'observe un écart entre les prévisions et les réalisations de l'ordre de 234 543 762 00 FC.11

Par rapport à cette gestion, il ressort de nos entretiens avec la population, que les allocations financières accordées à la Chefferie sont inférieures aux recettes collectées par cette entité à travers les marchés et les autres services générateurs des recettes oeuvrant au niveau de la chefferie. Dans cette entité, tout en étant considérée comme poumon du Territoire d'Uvira en termes de recettes, les services générateurs des recettes sont négligés. Il s'agit principalement des marchés de Runingu et Rubanga où l'on ne parvient pas à mobiliser et à canaliser les recettes faute de contrôle. S'agissant de la production agricole, tout en soulignant la quasi-inexistence des routes de desserte agricole, la production pourrit au niveau local faute d'atteindre le milieu de consommation.

Malgré la rétrocession accordée chaque année à la Chefferie de Bafuliiru évaluée à 18 000 dollars, la réalisation des programmes de la chefferie est critiquée par les habitants.

En effet, les fonds rétrocédés sont destinés à la construction et à la réhabilitation des centres de santé, des écoles, des routes, des marchés. Mais, il se fait remarquer que la population est victime de l'absence de volonté politique étant donné que la Chefferie des Bafuliiru n'a pas réalisé son programme dans différents domaines pour son développement.

Il sied de signaler quelques réalisations, notamment :

? l'achat de fournitures de bureau pour l'administration de la Chefferie (ordinateurs, imprimantes), et de quarante chaises plastiques, qui n'existaient pas suite à la mauvaise gestion et les conflits de pouvoir après la mort de Mwami NdareSimba ;

11http// www.budget.gouv.fr/2009.

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· la réhabilitation des axes routiers Bwegera-Lemera et Lemera-Mulenge pour faciliter l'écoulement de produits agricoles de zones de production ;

· le recrutement de taxateurs qui ont comme rôle d'assurer la collecte de taxes au bénéfice de la Chefferie des Bafuliiru ;

· l'achat des motos pour le suivi dans différents marchés ;

· la contribution de 10% de la construction d'une salle polyvalente ;

· la réhabilitation d'un marché de Mirungu, un projet datant de Mwami NdareSimba,

· la construction des ponts en planches, à savoir les ponts Munyovwe I et II, Kanabe I et II, II et Luberizi.

Cependant, la Chefferie de Bafuliiru n'a pas d'infrastructures adéquates pouvant faciliter le commerce ou l'échange des biens avec d'autres Chefferies du Territoire d'Uvira, en particulier et avec d'autres territoires de la République démocratique du Congo, en général. Ce qui fait que la rétrocession accordée à cette entité ne soit pas perçue par la population ou les habitants du milieu comme la solution aux problèmes qui entravent son développement.

3. Conséquences de la dégradation des routes de desserte agricole sur la production agricole

Six axes ont orienté notre recherche pour mesurer les conséquences : la satisfaction relativeà la production, la destination de la production, l'écoulement de la production, l'organisation de ventes, l'existence des marchés d'écoulement dans les milieux et l'arrivée des véhicules dans ces marchés. Ci-après, le tableau 3 qui présente le sentiment des enquêtés par rapport à la production locale.

Tableau 3 : Sentiment des enquêtés par rapport à la production

Réponses

f

%

Satisfaits

60

59,40

Non satisfaits

41

40,59

Total

101

100

Dans l'ensemble, 59,4% de nos enquêtés sont satisfaits de la production. Ceci s'explique par l'introduction des nouvelles variétés des boutures et semences qui résistent aux maladies. Il sied de signaler que la fertilité du sol surtout dans les villages proches des hauts plateaux et dans les hauts plateaux eux-mêmes est à la base de cette satisfaction. Les images qui suivent illustrent la diversité de la production dans notre milieu d'étude.

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Quelques produits agricoles vendus dans le marché de Kawizi

Néanmoins, dans certains endroits les cultures sont attaquées par diverses maladies. La population étant incapable d'utiliser les produits phytosanitaires, produit moins. Raison pour laquelle certains de nos enquêtés (40,59%) ont exprimé leur sentiment d'insatisfaction par la production. Le tableau qui suit montre comment les paysans utilisent leur production.

Tableau 4 : Utilisation de la production

 
 

Réponses

f

%

Alimentation

38

37,63

Vente

36

35,64

Semences

27

26,73

Total

101

100

De la totalité de la production, 37,63% d'agriculteurs alimentent leurs familles, mais aussi ils vendent une autre partie pour subvenir à d'autres besoins sociaux (35,64%), tout en réservant une quantité aux semences pour la saison culturale suivante (26,73%) du fait qu'il n'y a pas de marché de semences. Quant au moyen de transport pour la recherche de débouché, le tableau ci-après nous fournit des précisions.

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Tableau 5 : Moyen de transport pour l'écoulement des produits agricoles

Réponses Effectifs %

La tête ou le dos 93 92,07

Pas de transport 5 4,95

Le vélo 3 2,97

Total 101 100

Pour écouler les produits agricoles, les agriculteurs éprouvent beaucoup de difficultés liées au transport dans la mesure où la majorité des enquêtés transportent leurs produits sur la tête et/ou au dos (92,07%), moins nombreux sont ceux qui utilisent les vélos (2,97%) et les autres ne supportent pas de transport, car ils vendent à la maison.

Il existe des marchés d'écoulement des produits agricoles qui sont parfois éloignés des centres de production. Ils sont inégalement répartis dans les groupements au point que certains villages de la Chefferie n'ont pas de marché. Ceci étant, les agriculteurs éprouvent d'énormes difficultés pour écouler leurs produits agricoles. Certains font trois heures de marche à pieds pour atteindre certains marchés qu'ils disent proches d'eux, d'autres marchent pendant cinq heures pour les marchés dits éloignés. C'est le cas d'un agriculteur de la Localité de Mulenge qui parcoure avec peine quarante kilomètres à pieds en aller et quarante kilomètres au retour pour aller vendre ses produits agricoles dans le marché de Rubanga. Il en est de même pour un agriculteur de Namuziba/Ndolera qui est contraint de parcourir vingt-cinq kilomètres à pieds avec ses produits sur la tête pour les écouler au marché de Mirungu/Luvungi, comme en témoignent les images suivantes:

Figure 2.Images des paysans dont trois femmes originaires de la localité de Mugutu transportant les paniers de maniocs aux dos. Ils font six heures de marche pour atteindre ce marché de Kawizi.

Fig 3 Arrivée des paysans au marché deKawizi

 

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La plupart des marchés de la Chefferie des Bafuliiru ne sont pas accessibles par véhicules, situation qui crée des difficultés à l'écoulement des produits agricoles. Chacun de ces dix-huit marchés est opérationnel une fois par semaine.

Toutefois, la majorité de nos enquêtés manifestent l'insatisfaction de la manière dont les ventes sont organisées sur les marchés. Les prix des produits agricoles ne sont pas fixes. Ils varient d'un marché à l'autre. Ils évoquent le fait qu'il n'y a pas d'instrument de mesure appropriés et souvent, ce sont les acheteurs qui viennent imposer leurs prix sur le marché. N'ayant pas de choix, les agriculteurs décident de vendre aux mêmes prix qui leur sont imposés par les acheteurs de peur qu'ils ne rentrent pas mains vides ou bien que leurs produits ne pourrissent.

L'état des routes nous a préoccupé, le tableau 6 ci-après présente les avis des enquêtés sur l'entretien de ces routes.

Tableau 6 : Existence de travaux communautaires d'entretien des routes

Réponses

f

%

Oui

9

8,91

Non

92

91,08

Total

101

100

La quasi-totalité des enquêtés de la Chefferie des Bafuliiru confirment l'existence de travaux communautaires d'entretien routier. Pour désenclaver cette Collectivité, les enquêtés ont proposé quelques pistes consignées dans le tableau 7.

Tableau 7 : Stratégies à mettre en place pour promouvoir la production agricole

Réponses Effectifs Pourcentages

Réhabiliter les routes existantes et créer d'autres 31 30,69

Créer de nouveaux marchés 26 25,74

Organiser les ventes des produits agricoles sur le marché 44 43,56

Total 101 100

Nos enquêtés ont proposé la réhabilitation des routes existantes (30,69%), la création de nouveaux marchés (25,74%) et l'organisation des ventes de produits agricoles sur le marché (43,56%) comme stratégies à mettre en place pour promouvoir la production agricole dans la Chefferie des Bafuliiru. En fait, il est question de financer la Direction des voies de desserte agricole (DVDA) par le FONER en vue de matérialiser ces stratégies.

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Conclusion

Montrer les effets de la dégradation des routes de desserte agricole sur la production agricole dans la Chefferie des Bafuliiru a été la préoccupation de cette étude.

Les résultats de nos enquêtes suggèrent que les agriculteurs éprouvent beaucoup des difficultés de transport. Faute de conditionnement et la mauvaise conservation, les récoltes pourrissent dans des greniers ; ceci décourage le paysan à tel point qu'il ne souhaite plus beaucoup produire.

L'état de délabrements des routes tient à l'absence des cantonniers pour entretenir les routes, l'insécurité, le confit de pouvoir, l'incompétence et le manque de volonté des autorités.

La production agricole étant assez suffisante dans cette Chefferie, la mise en place de plusieurs stratégies est une nécessité. Il faudrait l'engagement des cantonniers appelés à entretenir régulièrement les routes de desserte agricole tout en créant les conditions nécessaires pouvant leur permettre un bon climat de travail.

Sur le plan sécuritaire, il serait nécessaire de :

? soutenir les actions communautaires et populaires pour faire échouer les groupes armés et dénoncer leurs complices ;

? former les groupes d'acteurs de transformation sociale ;

? rechercher la vraie information afin de prévenir la population contre les manipulations visant la déstabilisation de la chefferie ;

? encourager et faire l'extension des clubs des réflexions des jeunes sur la paix dans tous les groupements et localités qui composent la chefferie ;

? former les leaders locaux qui doivent maintenir en éveil la population sur son destin et ses responsabilités dans la participation à la lutte contre l'insécurité.

Pour mettre fin aux conflits de pouvoir coutumier, il serait envisageable de réorganiser les comités de différentes élites et la politique traditionnelle des Bafuliiru, créer un bureau de consultation des gardiens de la coutume, instaurer un système d'éducation à la culture fuliiru et à la paix, adopter les coutumes aux lois du pays.

La mise en route de ces pistes de solutions exige une véritable volonté politique tant au niveau national, provincial que local.






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"Il faudrait pour le bonheur des états que les philosophes fussent roi ou que les rois fussent philosophes"   Platon