Mémoire de Master - Histoire
Contemporaine
1
LES RELATIONS
POLITIQUES IRAN-ETATS
UNIS D'AMERIQUE
(1979-2002)
Doumbia Ali
Université Felix Houphouët Boigny
Alidoumbia11@yahoo.fr
2
A la mémoire de mon défunt père Doumbia
Drissa et à l'honneur de ma vaillante mère LOGBO Dahoua
Odette.
3
REMERCIEMENTS
Que l'honneur nous soit concédé de dire merci
à tous ceux, de prêt ou de loin, qui ont contribué à
la rédaction de ce travail de recherche.
Mes remerciements sincères à notre directeur de
recherche Professeur Kouassi Yao
A notre encadreur Dr Guessan Kouadio, Maitre-Assistant, pour
sa disponibilité et ses conseils bien avisés et constructifs.
A mes grands-parents, le Colonel Gbetibouo
Digbeu Jules et à son épouse Madame Gbetibouo Bertine pour leur
affection et leur soutien de toujours.
A mon oncle, Dr Doumbia Mamadou et à son épouse
Moussoukro Doumbia pour leurs prières et soutiens divers.
A mes frères et soeurs pour leur contribution
financière, morale et technique, avec une mention spéciale
Doumbia Yacouba (New York).
A Monsieur MEHMET Targal, Président de l'ONG
Association Ihsane pour le Développement et l'Education, pour
l'opportunité de voyage d'étude en Turquie qu'il nous a
accordé.
Nous n'oublions pas nos condisciples des départements
d'Histoire et de Communication : Messieurs Diakité Ibrahim,
Lanzaré Koffi, Touré Ladji, Bamba Ladji, et Blé Zouzoua
Clément, pour leur soutien moral.
Merci au Président National de l'Association des
Elèves et Etudiants Musulmans de Côte d'Ivoire (AEEMCI), Monsieur
Koné Mamadou et à tous ses collaborateurs du CE.
A Messieurs Kamagaté Vahama, Massamba Touré, Pr
Tiemoman Koné, Dr Bamba Siriki, et à mes amis Soré
Boukary, Koné Oumar, Koumba Diarrassouba, Diarra Ibrahim, Sonogo Ahmed
(Capitaine) et bien d'autres, pour leur soutien et leur apport fort bien
apprécié à la rédaction de ce travail de recherche.
Merci infiniment à tous.
4
SIGLES ET ABREVIATIONS
APOC : Anglo-PersianOilCompany
SAVAK : Sâzmân-e
Ettelâ'ât va Amniyat-e Keshvar, (Organisation pour le
renseignement et la sécurité nationale, Iran)
CIA : Central Intelligence Agency, (Agence
centrale de renseignement)
AEEMCI : Association des Elèves et
Etudiants Musulmans de Côte d'Ivoire
URSS : Union des Républiques Socialistes
Soviétiques
USA : Unit state of America(les Etats Unis
d'Amérique)
ONG : Organisation Non Gouvernementale
CICR : Comité International de la
Croix-Rouge
ONU : Organisation des Nations Unies
IS : International Studies (Relations
Internationales)
QG : Quartier Général
TNP : Traité de
Non-prolifération
AIEA : Agence Internationale de l'Energie
Atomique
MI6 : Military Intelligence, section 6 (Le
Secret Intelligence Service)
5
SOMMAIRE
INTRODUCTION GENERALE 7 PARTIE I : A L'AVENEMENT DE LA
REPUBLIQUE ISLAMIQUE D'IRAN :
RUPTURE AVEC LE PASSE AMERICAIN (1979-1981)
|
.38
|
Chapitre I : LES FONDEMENTS DE LA RUPTURE AMERICANO-IRANIENNE
|
.40
|
I- L'IMPOPULARITE DU REGIME DE TEHERAN AVANT 1979
|
40
|
II- DE LA REVOLUTION A LA CHUTE DU SHAH
48
|
|
|
Chapitre II- L'AVENEMENT DE LA REPUBLIQUE ISLAMIQUE D'IRAN 1979-
1981 60
I- LA MONTEE DU NATIONALISME ANTI-AMERICAIN 60
II- LES INSTITUTIONS POLITIQUES ET RELIGIEUSES A LA SOLDE DE LA
REVOLUTION...69
PARTIE II : LES ETAPES DE LA RUPTURE : DE LA PRISE DES
OTAGES
AMERICAINS A LA CRISE NUCLEAIRE (1980-2002) 78
Chapitre I : LA CRISE DES OTAGES AMERICAINS 1979-1981 ...81
I- DE LA PRISE DES OTAGES AMERICAINS A LEUR LIBERATION 81
II- D'IMPORTANTES REPERCUSIONS POUR LES BELLIGERANTS . 88
Chapitre II : LA REMISE EN CAUSE DES INTERETS AMERICAINS DANS LE
GOLFE
PAR LA MONTEE EN PUISSANCE DE L'IRAN 92
I- LA REVOLUTION IRANIENNE : UNE MENACE IDEOLOGOQUE ET
CULTURELLE CONTRE
LES ALLIES AMERICAINS DU MOYEN ORIENT 92
II- LA GUERRE IRAK-IRAN (1980-1988) COMME UNE GUERRE DE
POSITIONNEMENT DES
OCCIDENTAUX 99
CHAPITRE III : LES AMBITIONS NUCLEAIRES DE L'IRAN COMME
UNE POMME DE
DISCORDE . 108
I- LES CRAINTES DES ALLIES DE WASHINGTON AU MOYEN ORIENT 108
II- LES GRANDES QUESTIONS GEO-POLITIQUES ET STRATEGIQUES AUTOUR
DU
NUCLEAIRE IRANIEN .119
CONCLUSION GENERALE 126
6
INTRODUCTION
GENERALE
7
Presque tous les jours, les medias nous parlent du Moyen
Orient1 et du monde arabo-musulman2, certainement les
zones les plus instables du monde, une région aux allures de
poudrières, les causes des incessants conflits internes ou entre Etats
ne sont jamais faciles à cerner. Car politique et religion,
rivalités ancestrales et géostratégies
s'interprètent sans fin : Guerres civiles en Syrie et en Irak,
transition politique douloureuse en Égypte, conflit interminable entre
la Palestine et l'Israël, tensions récurrentes au Liban,
destruction et l'incertitude en Lybie. Ce sont autant d'exemples d'un
état de violence qui a la particularité de s'exporter autrement
sur d'autres continents.
Partant de ce constat dans cet espace géopolitique
majeur, que les actions politiques des grandes puissances et des gouvernants de
la région font souvent sombrer dans le chaos à travers des
conflits d'intérêts, des guerres ultra idéologiques et
religieuses, il est important de revenir sur un événement qui a
joué un rôle fondamental dans cette région: il s'agit bien
de la révolution islamique d'Iran de 1979.
Il y a plus d'un quart de siècle, en 1978, l'Iran
était miné par des grèves, des manifestations et des
émeutes quasi-quotidiennes. Dans cette atmosphère, le Shah
perdait peu à peu la main. Au début du mois de janvier, alors que
sous la pression populaire, le peuple demandait le départ du Roi, ce
dernier a préféré se contenter de nommer un nouveau
Premier ministre. Il quitta par la suite son pays, de source officielle
iranienne, pour les vacances. Mais la réalité est que jamais il
ne put revenir en Iran. Affaibli par un cancer, il devait d'abord aller se
faire soigner3.
1Il s'agit d' une expression d'origine
anglo-saxonne (Middle East en anglais) qui désigne, pour les
Européens, les Américains et les Africains, une région
comprise entre la rive orientale de la mer Méditerranée et la
ligne tracée par la frontière entre l'Iran d'une part, le
Pakistan et l'Afghanistan d'autre part. Cette région se trouve
essentiellement en Asie mais est parfois étendue à l'Afrique du
Nord.
2 Il désigne la zone géographique
couverte par la conquête musulmane, et s'identifie par conséquent
à la civilisation arabe de la période dite arabe classique
(antiquité tardive), jusqu'à la chute des califats abbasside de
Bagdad à l'est et almohade à l'ouest, soit, en termes de
datations, 1258 et 1269.
3Le Shah fut hospitalisé le 22 octobre au
célèbre centre médical de la Cornel University. Un examen
de la vésicule biliaire devait mettre en évidence simplement la
présence de calculs vésiculaires et intracholédociens
responsables de la jaunisse, après presque le tour des continents, son
admission au Usa pour les soins a été très mal
perçue par les révolutionnaires iraniens.
8
Quelques jours plus tard, l'Ayatollah Khomeiny4,
qui avait orchestré la révolution depuis son exil français
de Neauphle-le-Château, débarquait en Iran où il fut
accueilli dans la liesse populaire. C'est la fin d'une monarchie qui a
duré deux mille cinq cents ans. Peu après, la révolution
va se durcir. Et c'est un régime islamiste et antioccidental qui
s'installe en Iran sous la férule de Khomeiny.
En effet, avant 1979, le pouvoir de Téhéran
était un grand allié des Etats Unis d'Amérique, qui
intervenait dans les orientations majeures du royaume. Après la chute du
pouvoir impérial du Shah5, les nouveaux dirigeants du pays
ont entrepris des réformes en profondeur6. Du coup, les Etats
Unis d'Amérique cesse d'être le partenaire
privilégié de l'Iran. Ainsi, il importe d'appréhender
l'évolution des rapports entre les deux pays, d'où notre
thème : « Les relations politiques Iran- Etats Unis
d'Amérique 1979-2002 », dont la justification est
liée à l'intérêt du sujet.
A- JUSTIFICATION ET INTERET DU SUJET
Le choix de ce sujet de recherche s'inscrit dans le
prolongement de notre thème de Master I de recherche. Thème
inscrit dans le vaste domaine de l'histoire des relations internationales.
Ainsi, comme dans tout travail de recherche, nous mettons en
évidence les deux raisons majeures qui ont favorisé le choix de
notre thème de recherche : Elles sont d'abord d'ordre subjectif et
ensuite objectif.
4De son vrai nom Rouhollah Mousavi Khomeiny
(1902-1989) a été persécuté pour son activisme du
temps du SHAH, et contraint à l'exil en France. Principal leader de la
révolution islamique de 1979, il a occupé la fonction de guide
suprême du pays jusqu'à sa mort.
5Souverain de Perse puis d'Iran, avant l'instauration
dans ce pays d'une République islamique en 1979.
6 Les relations entre les États-Unis et
l'Iran ont toujours existé depuis l'envoi officiel de son premier
ambassadeur, Nassereddin Shah Qajar, à Washington à la fin du
XIXe siècle. Cependant, une succession de conflits et
d'incidents entre les deux nations a engendré une tension dans leur
relation. Avant la Révolution contre le Shah, les États-Unis
étaient le premier partenaire économique et militaire de l'Iran
et contribuaient ainsi grandement à la modernisation rapide de ses
infrastructures et de son industrie. L'Iran a compté jusqu'à
trente mille expatriés américains qui y ont exercé des
fonctions techniques, de conseil ou encore d'enseignement.
9
En ce qui concerne la première raison, personnellement
la politique et la géopolitique au Moyen-Orient en particulier la
question iranienne, nous ont toujours passionné et attiré notre
curiosité. Ajouté à cela, la question de civilisation au
Moyen-Orient7, la mentalité des peuples dans cette
région du monde et ce qui les détermine. De même, la
curiosité de comprendre les incertitudes et perturbations politiques
dans cet espace pétrolifère.
Aussi avons-nous cherché à comprendre de
façon objective comment les intérêts économiques et
géopolitiques peuvent bouleverser la situation intérieure d'un
pays.
Depuis les années 1970, l'histoire du Moyen-Orient se
confond presque avec celle de ses guerres et de ses conflits : guerre
soviétique en Afghanistan (1979-1989)8, guerre Iran-Irak
(1980-1988)9, guerre du Liban (1975-1991)10, guerre du
Golfe (1991)11, guerres américaines en Afghanistan (2001) et
en Irak (2003),12 sans oublier l'interminable conflit
israélo-palestinien. Si ces années furent celles d'une «
grande guerre pour la civilisation», c'est en raison du rôle
persistant que les puissances occidentales - la France et le Royaume-Uni dans
la première moitié du XXe siècle, puis et
surtout les États-Unis - n'ont jamais cessé de jouer dans une
région qu'ils considèrent comme leur zone d'influence. Aux
entreprises coloniales succéda l'ère des manoeuvres
diplomatiques, des jeux d'alliances complexes et secrètes, des coups de
force et des trafics d'armes, le tout dans une indifférence quasi
complète de la communauté internationale et cela au
détriment d'innombrables victimes de cette histoire
dramatique13.
7Chaque civilisation porte la marque du sol, des
paysages qui l'ont vu naître, elle tire d'eux son identité, son
originalité. Elle est l'héritière d'un long, très
long passé, au cours duquel chaque homme, chaque parcelle d'un vaste
territoire a apporté une unique contribution. Depuis des siècles
elle est religieusement divisée entre les fois Juive, chrétienne
et musulmane : la troisième très majoritaire dans la
région. Politiquement elle est le nid des pouvoirs impériaux, des
monarchies et des dictatures aussi.
8 François HEISBOURG, la fin de
l'Occident ? L'Amérique, l'Europe et le Moyen Orient, Paris,
Amazon, 2005. P.100-105.
9Pierre RAZOUX, La guerre Iran-Irak 1980-1988 :
première guerre du Golfe, Paris, Perrin, 2013, 616p.
10 Eric NGUYEN, 100 évènements du
XXe siècle, Paris, Studyrama, 2006. P 211-220.
11 Henry GUILLEMIN, La guerre du Golfe
(1991), Éditions. d' Utovie, 2013. P 112.
12 Robert FISK, La grande guerre pour la
civilisation: l'Occident à la conquête du Moyen-Orient, 1979-2005,
Editions La Découverte, 2007, P 423.
13Jean PERROT, « Aux origines
de la civilisation orientale », Bulletin du Centre de recherche
français à Jérusalem 12 | 2003, mis en ligne le 20
septembre 2007, Consulté le 03 octobre 2015. Disponible sur :
http://bcrfj.revues.org/214
10
Notre sujet de recherche revêt un intérêt
capital ce qui fait que nous sommes en mesure d'affirmer que la présence
de la question iranienne a quasiment dominée les rencontres
internationales. En effet de la révolution islamique de 1979
jusqu'aujourd'hui, sa relation avec l'Occident, et en particulier les
États-Unis d'Amérique est au centre de toutes les grandes
rencontres inter-états.
Les réalités politiques à
l'intérieur de l'Iran n'étaient plus les mêmes. Cette
rupture a modifié tous les autres liens extérieurs au pays :
c'est la révolution islamique d'Iran. Cette révolution vue par
plus d'un, comme une phase de la « grande guerre » pour la
civilisation : La résistance iranienne face à la conquête
du Moyen-Orient.
Il est très souvent fait mention du
néo-colonialiste14 dans cette région pour refuser une
quelconque domination occidentale. Ce qui pourrait illustrer les efforts
actuels de résistance du Moyen-Orient face à ce que l'on pourrait
appeler la « colonisation civilisationnelle » de la région par
les grandes puissances. Et l'Iran en est un bel exemple.
Nous avons évidemment eu recours à beaucoup
d'écrits qui évoquent le sujet, la question de la relation
américano-iranienne. Mais notre observation, contrairement aux autres
documents et écrits qui s'appesantissent sur la question du simple
départ ou la chute du Shah d'Iran, qui aurait modifié le
dérouler de la relation politique entre l'Iran et les Etats Unis
d'Amériques, nous allons pour notre part analyser la dégradation
de cette relation par la mise en place des nouvelles autorités et des
institutions qu'elles se sont données pour étendre
l'hégémonie iranienne.
14Les mots changent, mais les
réalités demeurent. « Après avoir pris du ventre
», selon l'expression de Werner Sombart, le capitalisme s'est
transfiguré. Il en résulte, entre autres conséquences, une
nouvelle manière d'entrer en rapport avec les pays économiquement
moins développés, mais cette relation reste toujours
fondamentalement asymétrique. Cela n'est sans doute pas, d'ailleurs,
l'apanage d'un système, mais plutôt la logique des rapports
inégaux entre les sociétés industrielles (quelle que soit
l'idéologie qu'elles revendiquent) et les sociétés qui ne
le sont pas. Même si l'analyse et le verbalisme (qui caractérise
souvent les études consacrées au néo-colonialisme) ont
été accaparés d'une manière manichéenne par
les tenants de telle orthodoxie doctrinale, les faits montrent que les
puissances économiques abusent, d'une manière ou d'une autre, de
leur pouvoir de négociation lorsqu'elles traitent avec les nations les
moins puissantes. Pour le montrer, nous évoquerons deux aspects
essentiels de cet échange inégal : le
néo-colonialisme économique et le néo-colonialisme
culturel.
11
B- DELIMITATION DU SUJET
La délimitation de notre sujet de recherche s'articule
autour de deux aspects : dans un premier temps, nous allons préciser le
cadre spatial (1), dans un second temps situer sa dimension
temporelle (2).
1- Délimitation spatiale
Notre sujet de recherche prend en compte un espace
géographique bien défini : les deux États
qui font l'objet de notre étude sont les États-Unis
d'Amérique et la République islamique d'Iran. L'un sur le
continent américain et l'autre en Asie, précisément dans
la région du Moyen Orient.
Pays du continent américain, les États-Unis
s'étendent sur une superficie de 9.363.000 Km2 où vit
une population de plus de 260.000.000 d'habitants, repartie entre ses 52 Etats.
Ils sont situés entre le Canada, l'Océan atlantique, le Mexique
et l'Océan pacifique. Le 4 juillet 1776, les Américains
s'émancipent de la domination anglaise. La déclaration
d'indépendance américaine fondait aussi la première nation
décolonisée du monde, bien que l'indépendance ne fût
officiellement reconnue qu'en 1783 avec le Traité de Versailles, elle
influença les rédacteurs de la déclaration des droits de
l'homme et du citoyen de 1789.
Les États-Unis d'Amérique constituent une
République fédérale présidentielle
bicamériste15. La forme du gouvernement est celle de la
démocratie représentative : le droit de vote est accordé
aux citoyens américains de plus de 18 ans ; il n'est pas obligatoire. La
vie politique est dominée par deux partis : le parti républicain
et le parti démocrate.
15 Système politique comportant un parlement
à deux chambres.
12
Image 1 : Carte des Etats Unis
d'Amérique
Pour ce qui est de l'Iran, géographiquement, il est
bordé au nord par l'Arménie, l'Azerbaïdjan, la mer Caspienne
et le Turkménistan, à l'est par l'Afghanistan et le Pakistan, au
sud-est par le golfe d'Oman, à l'ouest par le golfe arabo-persique, par
l'Irak et le nord-ouest par la Turquie. L'Iran s'étend sur une
superficie de 16.648.000 km2 sur laquelle vit une population de plus
de 70.000.000 habitants.
Ce pays autrefois appelé Perse change d'appellation le
jour de Noruz16 où Reza Shah Pahlavi publie le 21 Mars 1935
un décret demandant à toutes les relations
étrangères du pays de designer son pays sous le nom d'Iran dans
les correspondances en
16Le mot Noruz signifie nouveau jour en Persan,
c'est une fête traditionnelle iranienne célébrant le nouvel
an du calendrier iranien, premier jour du printemps. Elle est
célébrée par certaines communautés le 21 mars et
par d'autres, le jour de l'équinoxe vernale qui a lieu le 20, 21 ou 22
mars.
13
accord avec le fait que Perse est un terme utilisé pour
un pays appelé Iran en Persan, c'est à dire le pays des
aryens.
L'Iran occupe une position stratégique dans le
Moyen-Orient, devient un enjeu international après la découverte
du pétrole en 1908. Le pays est baptisé République
islamique d'Iran après la révolution de Khomeiny en 1979. La
religion officielle de la république est l'islam chiite.
Image 2 : La carte de l'Iran
14
Il est judicieux pour notre travail d'associer à la
présentation de ces deux espaces géographiques, le Moyen Orient.
La définition de cet espace représente un facteur essentiel dans
la compréhension de notre sujet.
Région comprise entre la rive orientale de la mer
Méditerranée et la ligne tracée par la frontière
entre l'Iran d'une part, le Pakistan et l'Afghanistan d'autre part, elle se
trouve essentiellement en Asie mais est parfois étendue à
l'Afrique du Nord et une légère partie en Europe. Contrairement
à une idée répandue, Proche-Orient et Moyen-Orient ne
désignent pas deux entités géographiques clairement
séparées, comme si, en allant vers l'est, on voyait se
succéder le Proche et le Moyen-Orient avant d'atteindre
l'Extrême-Orient. Ces termes désignent un même espace
défini, au tournant des XIXe et XXe
siècles, par le Foreign Office britannique comme le Middle
East, et par le Quai d'Orsay français comme le Proche-Orient.
Avec une superficie de 7 272 793 km2, le
Moyen-Orient est quasiment couvert d'eau. Les pays qui le composent sont pour
le Croissant fertile (Iran, Israël, Palestine, Jordanie,
Irak, Syrie, Liban)17, la péninsule
arabique18 (Arabie saoudite, Yémen, Oman,
Émirats arabes unis, Qatar, Bahreïn, Koweït) et la
vallée du Nil (Égypte). On y ajoute souvent la Turquie,
parfois même le Pakistan et l'Afghanistan. Les États-Unis
n'hésitent pas à y inclure les États du Maghreb
(Mauritanie, Maroc, Algérie, Tunisie, Libye), comme le montre le projet
de « Grand Moyen-Orient »19. Cet espace abrite plusieurs
groupes culturels et ethniques, incluant la culture perse, turque, arabe, kurde
et juive. Les trois principaux groupes linguistiques sont les langues
iraniennes, les langues turques et les langues sémitiques (dont l'arabe
et l'hébreu).
17Entité géographique assez
imprécise du Moyen-Orient. L'expression de Croissant Fertile, qui a
surtout un intérêt historique, a été forgée
par l'archéologue américain Breasted, au début du
XXe siècle, pour désigner la région
peuplée de sédentaires qui s'étend en fer à cheval
autour de l'avancée du désert syro-arabique ou Badiaech-Cham
(Chamiyé) : en gros Israël, le Liban, la côte, l'ouest et le
nord de la Syrie et les plaines de Mésopotamie.
18 La péninsule Arabique ou simplifié
Arabie est une vaste péninsule au sud-ouest de l'Asie, à la
jonction entre ce continent et l'Afrique. Cette région fait partie du
Moyen-Orient et joue un rôle géopolitique fondamental, du fait de
ses importantes réserves en pétrole et en gaz naturel. Selon les
estimations, la population de l'Arabie s'élevait à 77 983 936
habitants en 2008. De nombreux résidents des États du golfe
Persique n'ont pas la nationalité de ces pays : on compte 20 %
d'étrangers en Arabie saoudite et 89 % dans les Émirats arabes
unis.
19Alfred MAHAN l'employa dans un article de la
National Review, publiée à Londres.
15
Image 3 : La carte du Moyen-Orient
2- La délimitation chronologique du sujet
Cette partie a pour but essentiel de justifier l'importance du
choix des bornes chronologiques de notre sujet de recherche que sont les
années 1979 et 2002.
En effet, 1979 marque la fin du long règne du pouvoir
impérial en Iran, celui du dernier Shah et la naissance d'une nouvelle
République (la République Islamique d'Iran), après la
révolution islamique de l'Ayatollah Khomeiny. C'est à cette
période que les
16
nouveaux dirigeants prennent leurs distances vis-à-vis
des États-Unis d'Amérique, leurs anciens alliés.
Elle marque le début d'une toute autre forme de
relations entre partenaires d'hier. Le départ pour une nouvelle forme de
gestion des affaires d'État : le pouvoir du clergé. De même
que l'amorce d'une nouvelle politique intérieure et extérieure :
le nationalisme et le reniement de l'Occident, en particulier des
Américains. Il est inimaginable d'évoquer l'histoire
récente de ce peuple sans tenir compte ou se référer
à cette importante date.
Quant à l'année 2002 elle a aussi tout son sens
dans notre travail. Le 11 Septembre 2001 marque le changement de la phase du
globe en modifiant la stratégie militaire et politique des
Américains dans le monde. Elle a sonné le réveil de leur
politique étrangère. Bien avant, le 09 Septembre 2001, le
commandant Afghan Ahmad Shah Massoud est assassiné par deux faut
journalistes. Le Pakistan, les Talibans Afghan et Oussama Ben Laden sont
immédiatement dénoncés comme commanditaires. Deux jours
après des avions civils Nord-Américains sont
détournés et certains lancés contre les
américains.
Dans la foulé le 13 septembre 2001, Georges. W. Bush
désigne Oussama Ben Laden comme le responsable et promet une «
croisade »contre le réseau Al Qaida et tous les pays qui le
soutiennent. Alors sept (7) Etats dont l'Iran sont qualifiés «
d'Etat voyous » pour leur soutien prétendu au
terrorisme.20
Elle marque la prise de conscience de Washington du danger
international que représente l'Iran. En effet, lors du discours sur
l'état de l'Union du 29 janvier 200221, le président
George W. Bush22 a épinglé l'Iran comme faisant partie
des pays de « l'axe du mal », ce groupe de pays qui
menacerait la paix mondiale par sa tentative d'acquérir des
20Emmanuel MOURLON-DRUOL, La stratégie
Nord-Americaine après le 11 septembre : un réel renouveau ?,
Paris, L'Harmattan, 2005. P 22.
21Le discours sur l'état de l'Union
(State of the Union address) est un évènement annuel
où le président des États-Unis présente son
programme pour l'année en cours. Ce discours est prononcé
à Washington au Capitole, où les deux chambres (la Chambre des
représentants et le Sénat) sont réunies.
22 Homme d'Etat américain, 43ème
Président des Etats-Unis, deuxième président de
père en fils.
17
armes de destructions massives, associé à lui
l'Irak et la Corée du Nord23. S'ouvre alors un réel
ballet diplomatique : l'Iran contre les États Unis d'Amérique ou
vice versa.
En somme, ces deux dates qui bornent la période
étudiée marquent des tournants importants dans la
compréhension de notre sujet, afin de mieux cerner ces orientations.
C- APPROCHE DEFINITIONNELLE
L'analyse définitionnelle des termes de notre sujet
prend en compte deux termes essentiels que sont « relations » et
« politique ».
Evoquant le premier, selon le dictionnaire Larousse, la
relation est l'ensemble des rapports et des liens existants entre personnes qui
se rencontrent, se fréquentent, communiquent entre elles : Relation de
bon voisinage. Aussi les rapports officiels qu'entretiennent les Etats ou
certaines collectivités : Rompre les relations diplomatiques avec un
autres Etat.24
Le second mot « la politique ». L'évolution
de la notion de la politique part de la Grèce antique où la
politique est une science qui cherche à imaginer le régime
idéal. Au Moyen Age : la politique est réservée au prince
de haut et est constituée de leurs intérêts particuliers.
Machiavel (1469-1525) : Comment accroitre l'influence et le pouvoir des Clans
en place.
Au XVII siècle, dans les Etats modernes, la politique
du Prince se fait théoriquement dans l'intérêt du pays. Au
XVIIIe siècle, le monarque perd le monopole de l'autorité tandis
que la politique se généralise à l'ensemble des affaires
publiques.
Avec la révolution française l'action politique
s'accomplie au nom de la nation. Et ensuite au XIXe siècle :
introduction de partis politiques, fin du droit héréditaire et
démocratisation des institutions.
La politique est appréhendée à travers des
repères méthodologiques rationnels. La
23Agence Internationale de l'Energie Atomique
(AIEA) enquêtant depuis 2002 sur la nature du programme nucléaire.
Elle s'intéresse aussi à d'autres crises aux retombés
politiques, économiques et géostratégiques importants.
24
http://www.larousse.fr /
dictionnaires/ Français/Relation/ 67845, consulté le 30 Septembre
2016.
18
« science » ou « la sociologie » politique
constitue en effet un ensemble d'outils d'observations et d'études des
faits politiques. Mais le caractère polysémique de la
locution« politique » pose une problématique fondamentale
liée à la définition du terme lui-même et
également à l'objet de la discipline, notamment la « science
politique » ou « sociologie politique ».
Alors le terme politique comporte plusieurs définitions
et significations. Étymologiquement, il est issu du mot « polis
» c'est-à-dire « cité »25 dans la
Grèce antique, voire du terme « politeia »,
c'est-à-dire la manière dont la cité est organisée
et le pouvoir en son sein. Une autre difficulté se dégage de
l'usage du terme « politique » de nature androgyne,
c'est-à-dire qui peut être fait au masculin comme au
féminin.26
Elle peut prendre en compte tout simplement un sens neutre,
celui de « gestion », c'est-à-dire un ensemble de mesures
techniques juridiques et financiers en vue d'agir sur un secteur
déterminé ou de traiter un problème précis.
En somme, la politique recouvre tout ce qui a trait au
gouvernement d'une communauté ou d'un Etat : l'art et la manière
de gouverner ; l'organisation des pouvoirs ; la conduite des affaires publiques
; les actions prévues ou mises en oeuvre par une institution, une
organisation, un parti, un Etat, une entreprise, un individu... en vue
d'atteindre un objectif préalablement fixé. Dans une
démocratie, l'action politique est légitimée par le vote
des citoyens. Elle concerne tous les domaines de la société :
relations extérieures, organisation et sécurité
intérieures, défense, finances publiques, économiques,
justice, éducation, culture... ainsi que tous les niveaux de son champs
d'Acton : International, supranational, (Ex : Union Européenne)
national, régional, départemental, municipal.
25DEBBACSH Ch, POINTIER J.M., Introduction de la
politique, DALLOZ, Paris, 1982, page2.
26 Au masculin, le politique signifie tout d'abord
l'homme politique. Mais ce n'est pas cette assertion du thème qui
l'oppose à l'expression considérée au féminin. Le
politique signifie aussi l'image que la société avait
d'elle-même. Au féminin, « la politique » signifie en
premier lieu l'ensemble des actions que les gouvernements ou les autres acteurs
sociaux entreprennent en vue de prendre des décisions, d'influencer le
processus de prise de décision ou d'occuper des postes de
responsabilités, c'est-à-dire « la tradition dynamique de
tous les phénomènes impliqués par la conquête et
l'exercice du pouvoir »
19
Quand on évoque les « Relations politiques »
entre deux pays on s'inscrire directement dans les grands champs des Relations
Internationales. Ce qui nous permettra d'évoquer leurs
coopérations diverses, d'élucider les rapports politiques entre
Washington et Téhéran de 1979-2002. Antoine GAZANO a
défini les relations Internationales comme étant tous les
rapports et flux transfrontaliers matériels et immatériels qui
peuvent s'établir entre deux ou plusieurs individus groupe ou
collectivités.27
Selon l'éditeur Armand Colin, il y a ce qu'on pourrait
appeler les « Relations Internationales illicites »28
continue de bouleverser le champ de la légalité et de la morale
internationale. Aujourd'hui le phénomène apparait plus que jamais
comme une composante majeure, source de trouble non négligeable, des
Relations Internationales. D'entrée, la définition du sujet
révèle la difficulté d'une approche globale. Les Relations
Internationales illicites ne se militent pas à la seule
criminalité internationale et la multiplicité des facteurs de
développement rend le phénomène de plus en plus difficile
cerner. La fin de la guerre froide, la défaillance des structures
Etatiques de certains pays, l'émergence de nouveaux acteurs,
l'apparition de « zones crises » contribue à l'expansion de ce
nouveau fléau. Et si les dangers qu'il représente pour
l'équilibre mondial sont depuis longtemps avérés, il
appartient désormais aux Etats de se mobiliser et d'oeuvrer pour une
véritable moralisation de l'ordre international.
Pour Emmanuel TAWIL, les Relations Internationales sont plus
que les relations diplomatiques. Les Relations diplomatiques sont des relations
officielles que les Etats ont entre eux par le biais d'agents diplomatique
(corps diplomatique, chefs d'Etat et de gouvernement, Ministres des Affaires
étrangère). Limiter les relations internationales aux relations
diplomatiques donnerait une image déformée de la
réalité. Les relations diplomatiques sont une forme très
codifiée des rapports en Etats : la réalité des
rapports
27Antoine GAZANO., Les relations
Internationales, éditons, Guardiano, Paris, 2001 extraits
tirés du syllabus du cours d'IRI, G1 RT 2001.
28 Armand Colin, « Les Relations Internationales
illicites », revue internationale et stratégique, Paris, Armand
Colin, 2001 /3 (N°43).
20
internationaux contemporains est le dépassement des
formes diplomatiques, notamment par la multiplication des rapports directe
entre dirigeants. La forme n'a plus qu'un poids marginal. Par ailleurs, les
relations diplomatiques sont par nature avant tout
bilatérales.29
Ainsi les Relations Internationales prises dans sa conception
autre qu'une discipline scientifique appréhendant les
phénomènes liant les rapports interétatiques, englobant
les rapports pacifique ou belliqueux entre les Etats, de rôle des
organisations internationales et l'ensemble des échanges ou des
activités étatiques. Elles ont eu une évolution
historique.30On pourra aussi relever les événements
depuis 1945 à nos jours, qui ont caractérisé les relations
internationales entendue comme l'ensemble des actions et interactions des
acteurs privilégiés de la vie internationale que sont les Etats
constitués ou en formation.
En somme, les relations internationales appartiennent
historiquement au domaine de la science politique. Les relations politiques
entre Téhéran et Washington de 1979 jusqu'à 2002 sont
restées tendues et elles ont empoisonné tous les aspects de leurs
coopérations. Elles désigneraient en général,
l'étude de leurs affaires étrangères et des grandes
questions de leurs systèmes internationaux. Elles peuvent être
étudiées soit dans une optique positiviste soit dans une optique
normative, toutes deux cherchant tant à analyser qu'à formuler
les politiques internationales des pays.
29Emmanuel TAWIL, relations Internationales, Paris,
Vuibert, 2014, p15
30 Relater l'histoire des rapports qu'entretiennent
des acteurs des systèmes internationaux constitue une tâche
difficile en ce début du XXIe siècle, d'autant plus qu'ils
revêtent un caractère complexe, consécutif du
développement de la technologie sur la scène internationale.
Etant donné que les relations internationales s'étendent tant
à toutes les relations de groupes ou d'individu à individu par
rapport à une frontière étatique, que les organisations
internationales privées ou publiques et les sociétés
multinationales. Il serait impérieux pour nous de faire une
démarcation entre la politique internationale (relations entre
unité politique des Etats) et la vie internationale (toutes les
manifestations ne comportant pas les relations d'existence entre Etats). Ces
événements seront regroupés en trois grandes
périodes : Une première période allant de 1945 à
1947 parlant des directoires de grandes puissances et de l'échec de
compromis. Une deuxième période de 1947 à 1953
consacrée à la guerre froide et de l'émergence du tiers
monde. Enfin une troisième période traitant de l'aspect actuel
des relations internationales. On pourra aussi relever les
événements depuis 1945 à nos jours, qui ont
caractérisé les relations internationales entendue comme
l'ensemble des actions et interactions des acteurs privilégiés de
la vie internationale que sont les Etats constitués ou en formation.
21
D- ETAT DE LA QUESTION
Le premier réflexe qui habite la conscience d'un
chercheur débutant soit-il, est de faire naturellement l'état des
lieux des connaissances disponibles sur son thème d'étude, avant
d'apporter humblement sa modeste contribution. Sur ce point, la question des
relations entre l'Iran et les Etats Unis d'Amérique a été
largement évoquée dans les écrits.
Plusieurs auteurs et chercheurs (philosophes, historiens,
sociologues, journalistes, hommes de foi...) ont abordé les questions
liées à l'Amérique et à l'Iran avant comme
après la révolution islamique menée par l'Ayatollah
Khomeiny et dans des domaines divers. Il s'agit en effet de deux pays assez
réputés dans le monde aujourd'hui de par leur relation
belliqueuse31, leurs histoires, leurs civilisations et leurs
attitudes hégémoniques, qui sont bien des aspects importants dans
leurs différentes évolutions.
Mais dans l'impossibilité de passer en revue toutes les
connaissances en rapport avec la question étudiée, seules
quelques thématiques qui permettent d'éclairer notre thème
de recherche ont été retenues.
1) Sur la chute du Shah
La chute du Shah est un événement essentiel dans
l'histoire de l'Iran qui marque le départ des malentendus dans une
relation particulièrement longue et chaleureuse. Dans son ouvrage
William Shawcross32, nous permet de mieux appréhender
l'histoire du règne du Shah et les raisons de sa chute.
31Sadr. BANI, Le complot des Ayatollahs,
Paris, Editions La Découverte, 1989, p. 217.
32william SHAWCROSS, Le Shah : exil et mort d'un
personnage encombrant, Paris, Éditions Stock, 1989, p 55135.
22
Dans un documentaire intitulé le Shah d'Iran Un
homme à abattre33, Reynold Ismard retrace le long
règne de Mohammad Reza Pahlavi dernier Shah d'Iran qui régna
pendant 37 ans, du 16septembre1941 au 11février1979. Ce film mentionne
également les dérives du pouvoir du régime du Shah et le
désir pour les Iraniens de mettre fin à ce pouvoir qui n'est plus
l'émanation de la volonté populaire.
Dans une chronique, Catherine et Jacques Legrand nous
retracent l'histoire du Shah, de sa naissance jusqu'à sa chute et sa
mort34.Dans cette chronique il est mentionné l'accession du
fils de Reza Khan (1878-1944), fondateur de la dynastie Pahlavi sous le titre
de Reza Shah. De même, les réformes du Shah y sont
mentionnées et enfin les auteurs nous expliquent la chute du Shah et son
exil. Cette chute causée par la politique impopulaire et liberticide du
Roi.
Des auteurs ont dénoncé ou mis en lumière
le recul de l'administration américaine face à la révolte
contre le Souverain impérial. Dans un article intitulé «
Comment les Etats-Unis ont raté leur coup en Iran ? » Armin AREFI
soutient que, si Rober Huyser a bel et bien été
secrètement envoyé par la Maison-Blanche en mission
secrète en Iran, c'était uniquement dans le but d'empêcher
l'armée impériale de mener un coup d'Etat pour faire barrage
à l'arrivée des islamistes au pouvoir. Et Washington s'est
trompé sur toute la ligne. 35
Abordant dans la même veine, Charles Phylippe DAVID dans
un article intitulé « Au sein de la Maison Blanche » affirme
que Carter a déclaré lors de sa visite à
Téhéran en Décembre 1977 que l'Iran représentait un
« exemple de stabilité » dans la région. Alors que le
Shah au pouvoir depuis 1941 était renversé par la
révolution d'Ayatollah Khomeiny. La politique américaine durant
cette période de tumulte en Iran contribua largement à exacerber
les problèmes des Etats-Unis avec Khomeiny pendant la crise des
33 Reynold ISMARD« Le shah d'Iran, un
homme à abattre », France 5/Dargaud-Marina/INA Entreprise,
2004,visualisé en Janvier 2014.
34Chroniques de l'histoire: Le Shah d'Iran.
Jacques Legrand SA Éditions Chronique - Hachette Distribution, 1998.
35Amin ARIFI, « Comment les Etats Unis ont raté leur
coup en Iran »,
http://www.lepoint.fr/monde/comment-les-etats-unis-ont-raté-leur-coup-en-Iran-12-02-2015-1904392,
consulté le 05 octobre 2016.
23
otages. L'Equipe Carter fut d'abord surprise puis inapte
à formuler une réponse cohérente devant la chute du
Shah.
2) Sur la révolution Khomeyniste et l'organisation
de la République Islamique d'Iran
Les jeunes proches du « Guide » ont
énormément contribué à la prise d'otage des
ressortissants américains à Téhéran. Alain
Chaoulli36 nous définit, qui sont exactement les Bassidji
37 . Ces jeunes Bassidji sont entrés dans une
organisation de la force paramilitaire iranienne. Le Bassidji a
été fondé par l'Ayatollah Khomeiny en novembre 1979. Ce
sont des "jusqu'au-boutistes" très déterminés. Ils ont
constitué l'essentiel des combattants de la guerre Iran-Irak
(1980-1988).
Quant à Yara Khoury, il explique comment après
cette crise des otages va s'installer en Iran un régime qui prendra une
coloration exclusivement religieuse : il est fondé sur le pouvoir des
docteurs de la loi islamique. Les institutions de la République
islamique sont subordonnées au clergé chiite, situation d'autant
plus inédite que la ligne de conduite qui prévaut avec Khomeiny
est minoritaire dans le monde chiite. C'est ce que l'on pourrait lire dans cet
article en prélude des trente ans d'anniversaire de la révolution
iranienne sanctionnée par la proclamation de la République
islamique38.
L'ouvrage de
NouchineYavari-d'Hellencourt39évoque aussi
pertinemment la crise des otages en général et la portée
de cette prise des otages en particulier. Pour lui, le soutien de l'Ayatollah
Khomeiny à l'occupation de l'ambassade des Etats Unis
36Alain CHAOULLI ,L'avènement des jeunes
Bassidji de la République islamique d'Iran, Paris, l'Harmattan,
2013, p 218.
37Ce sont des adolescents faisant partie d'un
groupe spécifique de jeunes âgés de 12 à 16 ans. Ce
sont des enfants déstructurés, révoltés et
impatients de voir se réaliser leur utopie, après le
déclenchement du Mouvement révolutionnaire en Iran, en 1979.
38
http://www.lesclesdumoyenorient.com/La-revolution-iranienne-a-trente.html,
publié le 24/03/2009 consulté le 22/05/2014.
39NouchineYAVARI-d'HELLENCOURT, Les otages
américains à Téhéran, Paris, La documentation
Française,
1992,108 p.
24
d'Amérique et à la prise d'otage se comprend
comme l'échec du « grand Satan », les Etats-Unis
d'Amérique, face à la détermination
révolutionnaire.
Aussi, Michel Potocki évoque l'Islam, la
République, Dieu et le peuple. La révolution islamique d'Iran a
réinventé l'islam politique en 1979, en le traduisant en termes
politiques, juridiques et constitutionnels40. Le texte
intégral de la Constitution iranienne de 1979 tel qu'il résulte
de sa révision en 1989, après la mort de l'Ayatollah Khomeiny,
est ici présenté dans une traduction nouvelle, à partir du
texte persan, commenté et annoté du point de vue historique et
juridique. Ce texte permet de comprendre les blocages, mais aussi les
dynamiques d'une République qui a voulu associer les forces religieuses
et populaires. Cette constitution contient les germes de la division entre
l'Iran nouveau et l'Occident.
Hassan Diab El Haraké nous propose une analyse du
fondement religieux du pouvoir politique iranien et met en lumière les
compétences du Guide suprême iranien dans le monde chiite,
notamment dans sa relation avec le Hezbollah libanais.41
On peut également citer l'ouvrage de Pierre
Salinger42. Dans cet ouvrage trois éléments
essentiels ont attiré notre attention : les enjeux iraniens et
américains de la prise d'otage, le déroulement de la crise, et le
dénouement de la crise. Pour l'auteur, l'enthousiasme
révolutionnaire était retombé et l'Iran semblait
être ravivé par cette prise d'otage.
L'arrivée de Khomeiny sur le trône Iranien n'a
pas été managée seulement par l'homme lui-même.
C'est la position de certains auteurs qui pensent que le « Guide de la
Révolution » s'est approprié la révolution populaire.
En exemple nous citerons Denis COLLIN qui dans un article intitulé
« La chute du Shah. Révolution et contre-
40Michel POTOCKI, Constitution de la
République Islamique d'Iran 1979-1989, Traduction,
introduction, Paris, Le Harmattan, 2004.
41Hassan DIAB EL HARAKE, Les fondements
religieux du pouvoir politique dans la République islamique d'Iran,
Paris, L'Harmattan, 2012, 206 p.
42Pierre SALINGER, Otages, les négociations
secrètes de Téhéran, Paris, Buchet/Chastel, 1981, 308
p.
25
révolution » dépeint cette
réalité.
Pour lui dès lors le régime des mollahs va se
mettre en place, à travers encore de nombreux mois de crises et de
batailles entre les fractions de la nouvelle caste dirigeante, reflétant
la pression des masses qui n'acceptent pas passivement de suivre les «
guides suprêmes ». Les grèves vont se poursuivre. Les
ouvriers vont créer dans les entreprises des organes de combat, les
« chouras » qui sont des sortes de conseils ouvriers ou de soviets.
Bref, la révolution de 1979 n'est pas une révolution khomeyniste,
mais une révolution confisquée, brisée par Khomeiny et la
hiérarchie religieuse qui reconstruit à son propre l'appareil
d'Etat démantelé au départ de Pahlavi43
En plus de Denis COLLIN et avec un titre plus précis
l'auteur Robin CLAPP dans son article intitulé « Iran 1978-79 : une
révolution volée à la classe ouvrière » il
explique comment Khomeiny a profité de la prouesse des ouvriers. Il
pense pour sa part qu'il est important de savoir comment ce régime est
arrivé au pouvoir. Le mouvement révolutionnaire Iranien de
1978-79 a constitué une force puissante que personne n'attendait et qui
a réussi à mettre fin au régime dictatorial et
particulièrement répressif du Shah, Monarque absolu et
pro-occidental. La classe ouvrière s'était soulevée, mais
faute de direction politique claire, la révolution a été
volée aux travailleurs par les forces religieuses conservatistes
groupées autour de l'Ayatollah Khomeiny. Revenir sur ces
événements révolutionnaires de 1978-79 est aussi d'un
immense intérêt pour le mouvement actuel.44
3) Sur le Nucléaire Iranien et les relations
diplomatiques
En la matière l'aspect le plus dominant dans cette
relation reste la diplomatie, qui pour notre part est arrivée à
s'étendre à tous les autres domaines de coopération. Comme
ouvrage de référence nous avons eu recours à la chronique
géopolitique
43 Denis COLIN, « la chute du Shah.
Révolution et contre révolution » source :
http://la-sociale.
44 Robin CLAPP, « Iran 1978-79 : Une
révolution volée à la classe ouvrière »
publié le 19 juin 2009
26
d'Alexandre Alaoui45. Dans cette publication
l'auteur nous étale le contexte général de la relation
politique en iraniens et américains- depuis 1979 et évoque
également les enjeux sécuritaire et géopolitique de cette
crise.
Une fois le régime théocratique installé,
Khomeiny a un autre rêve, celui d'étendre sa révolution sur
les territoires des voisins immédiats. Ainsi, le contentieux frontalier
qui oppose l'Iran à son voisin l'Irak au sujet du partage des rives du
golfe arabo tourne au conflit armé en septembre 1980. Pierre Razouk,
Directeur de recherches à l'Institut de recherche stratégique de
l'Ecole militaire (IRSEM), spécialiste reconnu du Moyen-Orient, nous
enseigne comment la guerre Iran-Irak a marqué un tournant dans
l'histoire du Moyen-Orient. Terriblement meurtrière 46 , elle
a frappé à jamais l'imaginaire des protagonistes, mais aussi des
Occidentaux.
Alors que pour les États-Unis d'Amérique, toute
domination iranienne du Golfe serait un revers pour eux, ils vont militer
à empêcher l'Iran de se doter d'armement solide qui va le rendre
"intouchable". La question de son enrichissement nucléaire est
évoquée et suivie de près par les Américains,
compte tenu de son caractère déterminant et de son enjeu
politique spécial. C'est ce qu'évoque Georges Le
Guelte47 dans son dossier sur la crise nucléaire iranienne.
Pour lui, l'enjeu de la crise nucléaire Iranienne dépasse de
beaucoup le cadre purement régional, pour devenir un problème
international.
Contrairement aux auteurs qui voient à la
démarche nucléaire Iranienne un danger mondial, des auteurs comme
Ali RASBEEN voit la question autrement. En effet l'observateur pense que l'Iran
est dans la légalité dès lors qu'il n'est pas
démontré que son programme a des visées militaires, que ce
sont en conséquence les résolutions du conseil de
sécurité de l'ONU qui sont hors l'égalité. Pour lui
« la question de (la liberté d'accès) des pays en voie de
développement à l'énergie nucléaire se pose
désormais de
45Alexandre ALAOUI, « Les relations entre les
États-Unis et l'Iran depuis 1979 », publié08 janvier
2013sur
https://dandurand.uqam.ca/publication/les-relations-entre-les-etats-unis-et-liran
consulté le 15 Novembre 2014. 46Pierre RAZOUK La guerre
Iran-Irak, Paris, Perrin, 2013, p 248-312.
47 Directeur de recherche à l'institut des
relations internationales et stratégiques en France
27
moins en moins et est (remplacer par la préoccupation
de prévenir ce qui pouvait devenir des armes de destruction massive
» c'est en cela que les négociations butent.48
La volonté occidentale est Américaine a obtenir
l'arrêt du programme nucléaire Iranien s'oppose à la
volonté Iranienne sur un plan politique. Coté Iranien, dit Nader
BARZIN, le souhait est de développer une industrie électro
nucléaire civile permettant d'accéder rapidement à la
fabrication et à la mise en oeuvre opérationnelle d'un nombre
limité d'arme nucléaire, tout en faisant apparaitre ce qui n'est
pas le monde intérêt, d'une manière résolument
incertaine mais suffisamment assurée, que le pays se trouve dans cette
position du possible.49
De même, François GERE directeur de l'institut
Français d'analyse stratégique, affirme « L'Iran est
signataire du TNP et a donc parfaitement le droit de développer son
activité civile » et ajoute que « d'un point de vue juridique,
la position de Téhéran est assez forte ». La
rhétorique du droit au nucléaire se développe avec la
remise en cause du monopole de l'Energie nucléaire des grandes
puissances traditionnelles. Ce phénomène est récent car
jusqu'alors, rares étaient les pays capables de produire de
l'électricité nucléaire, couteuse et délicate
à maitriser50
En somme toutes ses études auxquelles nous avons fait
allusion sont d'un apport inestimable car permettant de comprendre non
seulement les source de la rupture entre Téhéran et Washington
mais surtout de voir comment de façon manifeste le ton est resté
houleux entre les partenaire d'hier de 1979 à 2002.
La plupart des productions scientifique antérieures
à notre étude et portant sur les relations politiques entre Iran
et les Etats Unis d'Amérique se sont d'une manière ou d'une autre
appesantir sur la chute du Shah et les reformes politiques de Khomeiny pour
justifier cet éloignement de ces deux anciens pays amis.
48 Ali RASBEEN, « Droit et
légitimité du nucléaire Iranien »,
Géostratégique, N°13, juillet 2006, P.18
49 Nader BARZIN, l'Iran nucléaire, Paris,
l'Harmattan 2005, P.2014
50 François GERE « Téhéran a
le droit de développer son activité civile »,
Libération, mercredi 3 Aout 2005, p8
28
Ce faisant, il s'agit pour nous d'essayer d'enrichir tous ses
travaux sur la question notre travail s'articulera alors à
apprécier les réformes institutionnelles majeures entreprises par
Khomeiny dans un monde où l'on parle de plus en plus de nouvel ordre
mondial, basculât au profit des grandes puissances économiques et
techniques. Voir un Etat s'islamiser dans toutes sa structuration
représenterait un danger réel. Mieux quand celui-ci aspire
à l'arme nucléaire. Alors que toutes les grandes diplomaties sont
unanimes que la sécurité intérieur d'un pays par de sa
protection extérieure. Dire claire, comment le rêve au
nucléaire de la République Islamique a empoisonné et
maintenu houleux la relations entre Washington et Téhéran.
Il convient donc de dire que notre travail en plus de
l'approche historique, consiste à mieux apprécier
l'évolution des relations politiques entre Iran et les Etats Unis
d'Amérique de 1979 à 2002.
Il s'agira de revisiter les thèses et productions de
nos devanciers avec de nouvelles interrogations, comme le souligne à
juste titre l'historien Serges BERSTEIN ; « ...le regard porté
sur l'évènement, se modifie en fonction de la
société à laquelle appartient l'historien. Il est
évident que chaque époque apporte son lot de nouveau
questionnement qui ajoutant des points de vu à l'éclairage
historique »51
Mieux l'historien est reconnaissant envers les travaux
laissés à la postérité, il renchérit dans le
même élan ; « les hypothèses
élaborées par les historiens d'hier demeurent valables, mais
elles exigent d'être enrichies, complétées, rendues
signifiantes par de nouveaux travaux qui approfondissent l'histoire des
sociétés Humaines et de leur évolution »52
En somme, notre étude se propose d'expliquer
comment les ambitions régionales du pouvoir islamique de
Téhéran constituent une menace pour les intérêts
Américains dans la zones.
51 Serges BERSTEIN, « Histoire, domaine et champs
», in encyclopédisa Universalis corpus 11, Paris, Encyclopediq
universalis, P 829
52 Idem
29
E- IDENTIFICATION DE LA PROBLEMATIQUE DU SUJET
Les relations politiques entre l'Iran et les Etats Unis
d'Amérique ont toujours existé depuis le début du
XIXème siècle. Et cela à travers diverse échelle de
collaboration. L'hégémonie iranienne dans la région s'est
réalisée en partie grâce à cette relation. Tout
simplement parce que les relations entre les deux pays étaient au beau
fixe.
Les Américains intervenaient beaucoup dans la politique
intérieure de l'Iran et proposaient très souvent des plans
stratégiques pour son équilibre régional. La
présence américaine trouva une autre grande source de profits,
avec la mise sur pied de l'armée du Shah. Officiellement, cette
armée était nécessaire pour protéger le monde dit
libre contre l'URSS. En fait, comme l'a écrit un célèbre
journaliste Américain, Walter Lipmann, « (..)La raison majeure
de notre soutien de l'Iran n'est pas son importance stratégique lors
d'une guerre mondiale éventuelle, son seul but est de maintenir le
gouvernement du Chah qui nous est favorable »53
Lassé par un pouvoir impérial jugé liberticide, avec un
dirigeant aux ordres des Américains, le peuple iranien au mépris
de voir sa culture, sa religion, en un mot sa richesse spoliée,
mène une révolution avec pour chef de fil Ayatollah
Khomeiny54.
Le 04 Novembre 1979, le pouvoir du Shah est vaincu par la
révolution, laissant place à la gouvernance théologique
avec la naissance de l'Islam politique, le pouvoir appartenant aux
clergés. Les ambitions de la révolution sont énormes,
aller au-delà de ses frontières fixes et naturelles, et cela ne
va pas sans conséquences. Depuis lors les deux pays, alliés
d'hier, ont un autre type de rapport, où les Américains sont
maintenus très loin de la gestion des affaires politiques,
économiques et stratégiques de l'Iran.
53Cercle Leon TROTSKY, Iran : de la dictature du
Chah à celle de Khomeiny, la révolution escamotée, du
30/04/1987, consulté sur
www.lutte-ouvriere.org/,
le 14/10/2014
30
A partir des faits susmentionnés, il convient
de nous poser la question de savoir, pourquoi les relations politiques entre
les Etats Unis d'Amérique et l'Iran sont-elles tendues de 1979 - 2002
?
Comment l'ambition de Khomeiny a rendu tendue les relations
politiques entre l'Iran et les Etats Unis d'Amérique de 1979-2002 ? En
quoi est ce que l'Iran de Khomeiny représenterait une menace pour les
intérêts de Washington dans le Moyen Orient ?
F- LA METHODOLOGIE
La méthodologie d'un travail de recherche
désigne l'ensemble des réflexions qui portent sur les
procédés, les moyens, les règles suivies et les contextes
des travaux des historiens. Ainsi donc aucun travail scientifique ne peut
objectivement se réaliser sans une méthode de travail
préalablement établie. Ainsi nous procèderons à la
présentation et à l'ana lyse critiques des sources ensuite la
démarche utilisée et enfin nous évoquerons les sources
orales.
Cette partie sera conclue par une synthèse de toutes
les données utilisées. L'histoire est une mode de connaissance
par trace. Ces traces, soumises aux questionnements de l'historien deviennent
des sources, dont les documents écrits sont certes plus connus, mais ne
constituent une des multiple variétés. Tout est source à
qui sait l'interroger. Ses sources il faut encore les étudier, les
confronter en mettant en place une procédure de vérité, la
démarche critique.
Nous avons dans un premier temps faire appel aux sources
écrites. À cet effet plusieurs ouvrages, revues et
mémoires ont été consulté pour l'élaboration
de notre travail de recherche. Tous ces documents nous ont été
d'un apport capital dans la mesure où ils ont de voir troubles concours
dans la relations politique entre Washington et Téhéran de
1979-2002.
L'internet et l'audiovisuel ont été nos
principaux compagnons dans la rédaction de notre travail de recherche.
Puisque les faits évoqués sont d'actualités. Pour le
premier
31
« l'environnement numérique de travail » est
devenu une réalité quotidienne de la pratique historienne.
L'internet s'est imposé comme un outil indispensable. Les innovations
documentaires communicationnelles et informationnelles de cet outil ont
révolutionné ces aspects du métier de
l'historien55.
Les livres numériques sont disponibles dont accessibles
à tout moment. Nous pouvons les lire n'importe où, sur tous les
différents appareils de lecture. Elle se lit très rapidement avec
aisance nous avons les informations à notre disposition. L'essentiel des
médias qui est l'internet nous a permis de voir largement toutes les
grandes publications et analyses autour de la question. Mais nous avons
accordé la priorité aux sites comme : le site du monde
diplomatique (
www.mondediplomatique.fr),
des clés du Moyen-Orient
(
www.lesclésdumoyenorient.com),
le site du courrier international (
www.courrierinternational.com).
Pour les articles et publications en ligne, nous avons pris le
soin de vérifier leurs authenticités en examinant
l'identité et la spécialité de l'auteur avant de les
recouper. Egalement en ligne sur
www.yutub.com nous avons
trouvés des films, sur la crise des otages Américains à
Téhéran. Nous avons aussi consultés l'encyclopedia
universalis disponible sur htt://
www.universalis.fr/encyclopedie/guerre-irak-ran/.
S'agissant des productions audiovisuelle, elle est d'une rechercher remarquable
pour l'enseignement de l'histoire du XXI e siècle et pour l'historien.
Des spécialistes de l'époque contemporaine comme Marc
Ferro56 ou Pierre Sorlin57 ont exploité des
oeuvres cinématographiques pour une partie de leurs travaux
scientifiques.
Les documents audiovisuels regroupent les enregistrements
sonores et/ou les images animées, et/ou des images fixes. Longtemps
méconnus et peu favorisés dans les bibliothèques
universitaires et de lectures publiques. Le document audiovisuel est
aujourd'hui considéré comme objet d'étude, plus facile
d'accès pour le chercheur que nous sommes. A Travers le site
Youtub, les chaines de télévision comme France
24 et la
55 DACOS M, « les lendemains électroniques
de l'Edition historique. Pour un nouveau modèle de publication
périodique » Revue d'histoire du XIXe siècle, 2000,
N°20/21.
56 Auteur de cinéma et histoire (Anglais),
poche-26 octobre 1993
57 Historien et sociologue auteur d'introduction
à une sociologie du cinéma, Paris, Klincksieck, coo,
d'Esthétique, 2015, 256 pages.
32
chaine de radio RFI, nous avons pu visualiser ou
écouter des enregistrements portant sur notre sujet.
Nous avons pu visualiser également les films
documentaire dur le sujet « le Shah d'Iran : un homme à abattre
», un téléfilm documentaire français
réalisé par Reynauld Ismad et diffusé pour la
première fois le 04 décembre 2004 sur France 5 et mis sur
www.youtub.com,
également les films du journaliste Français T. Meyssan : «
Indépendance énergétique de l'Iran/ occidentaux et les
Etats Unis n'attaqueront pas un Iran apte à se défendre
», mettre en évidence l'enjeu géostratégique de
la possession de l'arme nucléaire. « Mystère d'archive-
1971, les fastes du Shah d'Iran Persépolis », il constitue une
série de documentaire de Serge Viallé. Des Images prises d'avant
la révolution et celle prise d'après la révolution ont
aussi permis de mieux appréhender le sujet. Nous pouvons citer les
sélections de David CHAPOSNIKOV « L'Iran avant 1979
».
Aussi avons-nous également fait référence
à des rapports des Nations Unies sur la résolution de la crise
entre l'Iran et l'Irak. Ils sont nombreux, le plus décisif est : la
Résolution 598 (1987) du Conseil de Sécurité des Nations
Unies et les efforts de paix entre l'Iran et l'Irak.58 Nous nous
sommes également référés à la
deuxième constitution iranienne, celle établie sous le pouvoir
islamique. L'esprit du texte met en lumière les grands axes de discordes
entre Téhéran et Washington, voire l'Occident toute entier. Il
faut à ce niveau mentionner que l''Iran a eu deux constitutions. La
première date de 1906, la seconde de 1979 et révisée en
1989. Adoptée le 24 octobre 1979, la constitution a été
modifiée le 28 juillet 1989. Elle nous a permis de comprendre la
composition complexe et le statut de chacune des entités du pouvoir, de
mieux appréhender la nouvelle politique étrangère du pays
et les points focaux de leur relation avec l'Occident.
Compte tenu du fait que notre analyse du sujet se veut
historique, la démarche l'a été aussi, ainsi nous avons
privilégié la démarche chronologique. Cette
démarche a permis de suivre étapes par étapes,
l'évolution des relations politiques entre l'Iran et les Etats
58Annuaire français de droit
international, volume 34, 1988. pp. 63-90.
33
Unis d'Amérique, de l'ère de la rupture et de la
remise en cause de Washington en 1979, à l'explosion du débat
autour du nucléaire iranien en 2002. Cette démarche constitue
pour nous, la voie pour aboutir à l'objectif de la recherche.
A côté des écrits historiques, l'historien
use sans arrêt d'autres sources littéraires : poètes,
philosophes, moralistes, et apologistes, rhétoriciens, romancier,
géographe, mathématiciens, médecins, juristes, sans parler
des innombrables exégèses et paraphrases bibliques qui furent au
Moyen Âge une des branches principales de la littérature, voire
les textes coraniques dans ce cas-ci pour mieux comprendre certains
déterministes.
L'Histoire se faisant alors dans le temps, mais aussi dans
l'espace, nous nous sommes tournés vers la branche de la
Géographie physique, celle chargée « de
l'établissement, du dessin et de l'édition des cartes et plans
»59 pour la réalisation de nos cartes, à
savoir : la cartographie. Pour notre étude, les cartes permettent de se
faire une idée précise des aspects de la question qui sont
abordés.
En Outre, il nous est apparu bien important de nous
référer à l'origine de la pomme de discorde, de la crise
entre Chiites et Sunnites. Un aspect important de notre étude, puisqu'il
s'invite dans le débat d'occupation territoriale. Alors la question du
droit international. A cet effet, nous n'avons pas manqué d'exploiter
les ouvrages théologiques et nous nous sommes également
intéressé à l'opinion de chaque partie.
Chemin faisant, nous avons aussi eu recours à quelques
entretiens avec des personnes bien avisées pour mieux comprendre des
aspects de notre sujet de recherche. Le premier fut avec le Pr CAMARA
Moritié, le 16 Mars 2014 entre 10h05 et 11h 10. L'Enseignant Chercheur
à l'Université Alassane Ouattara de Bouaké nous a
reçu à l'Ambassade de la République Islamique d'Iran
à Abidjan où il occupe un poste. Et ce, pour sa maîtrise
des questions iraniennes et pour avoir faire un mémoire de
Maîtrise sur la question.60
59 Paul REY (dir), Le Grand Robert ,6eme
édition, Paris, CD-ROM, 2006.
60Moritié CAMARA, L'évolution des
relations entre les Etats-Unis et l'Iran 1953-1996 : du mariage de raison
à la
haine réciproque, Mémoire de
Maîtrise, Université de Cocody, 1998, p.110.
34
Egalement, en tant que secrétaire national
chargé de la communication et des relations extérieures au Bureau
Exécutif de l'AEEMCI,61nous avons
bénéficié d'un voyage de formation en leadership et
management d'éducation et de gestion des apprenants à Istanbul
62du 15 Août au 5 septembre 2015. Au cours de ce voyage sur la
terre d'un rival de l'Iran, nos échanges avec les étudiants turcs
et des administrateurs ont montré cette distance entre le Chiisme et le
Sunnisme. Ahmet IHAZE63, nous disait que « le chiisme et
l'Iran représentent un danger pour notre communauté [Il fait
référence à la communauté musulmane Sunnite]
»
Ces échanges ont été faits directement
sans questionnaire préalablement établis, donc la méthode
non-directive. Cette méthode nous a permis d'évoquer plusieurs
aspects liés à la relation politique entre les Etats Unis et
l'Iran, sans toutefois nous imposer de barrière. Elle a surtout permit
de créer un climat d'empathie et de respect nous permettant d'une part
à extérioriser l'authenticité de ce que nous ressentons et
d'autres part aux interlocuteurs d'exprimer aussi leurs propres avis.
Nonobstant sa pluralité elles ont manqué de
diversité parfois, les ouvrages de édités en occident et
écrits par eux ont très souvent dominés les productions
iraniennes, créant du coup le déséquilibre.
Avec l'usage de l'internet nous avons constaté
également qu'il a favorisé la mise en ligne de sites par des
<< historiens amateurs >> et des associations. La question de la
validation scientifique des informations mises en ligne nous est maintes fois
revenue. Cette interrogation se retrouve aussi pour les encyclopédies en
ligne, rédigées par les internautes, comme Wikipédia dont
la qualité éditoriale fait débat au sein de la
communauté historienne. C'est donc à juste titre qu'en 2006,
l'historien américain Roy
61 L'AEEMCI : c'est l'Association des Elèves
et Etudiants Musulmans de Côte d'Ivoire ; créée en 1975
à l'Université de Cocody Abidjan. Le premier regroupement de
jeunesse musulmane en CI, elle est apolitique et intervient dans l'encadrement
académique, moral et religieux des Elèves et Etudiants Musulmans
de Cote d'Ivoire. Son siège se trouve à Abidjan à la
Riviera 2 et elle compte aujourd'hui 65000 adhérents.
62 Istanbul, la capitale de la République
turque.
63 Un étudiant en Droit à
l'Université Francophone de Turquie.
35
Rosenzweig64 préconisait une
véritable implication des historiens professionnels dans
l'écriture afin d'améliorer les articles en ligne. L'internet
constitue donc un véritable fourre-tout, d'où le risque
d'être submergé par le flot de matériaux et d'information.
Nous y avons été confrontés.
Comme elles toutes, les sources audiovisuelles notent aussi
des critiques : comme l'authenticité des images et sons, la
crédibilité ou la scientificité des commentaires et
analyses. Le travail journalistique est loin de celui de l'historien qui se
défaire de la subjectivité.
Nous avons essayé de faire la synthèse de nos
différentes lectures et écoutes audio-phoniques, après nos
prises de notes. Aussi, partout où la question des relations
américano-iraniennes est évoquée nous y trouvons de
l'intérêt et des éléments de documentation. C'est
fort de tout ceci que nous avons pu sortir un plan et amorcer la
rédaction proprement dite de notre travail de recherche.
G- LE PLAN DE L'ETUDE
Pour mener à bien notre réflexion, notre travail
d'étude et de recherche est subdivisé en deux grandes parties.
La première partie de notre étude est
intitulée : L'avènement de la République islamique
d'Iran (1979-1981) : rupture avec le passé américain.
Dans cette partie il s'agit d'abord de montrer les fondements de la
rupture entre les deux pays (Chapitre I). Ensuite, dans le
second chapitre nous nous penchons sur la question de l'avènement de la
République Islamique d'Iran (Chapitre II).
64 Roy Alan Rosenzweig, né le 6 aout 1950
à New York et mort le 11 octobre 2007 à Arlington, est un
historien américain, professeur à l'université George
Mason en Virginie. Après des travaux sur le monde ouvrier, il se
spécialise dans l'histoire numérique et fonde le Center for
History and New Media en 1994.
36
La deuxième partie de notre étude porte sur
les étapes de la rupture : de la prise des otages
américains à l'explosion de la crise nucléaire
(1980-2002). À ce niveau nous avons trois chapitres.
Le premier évoque la question de la confrontation
en élucidant un aspect majeur, celui de la prise des
otages américains à Téhéran. Ensuite,
l'accent est mis sur la révolution iranienne et la menace des
intérêts américains dans la région de Golfe Persique
(Chapitre II) et enfin le dernier chapitre de notre étude met
en évidence la question du nucléaire iranien (Chapitre
III)
PARTIE I:
L'AVENEMENT DE LA REPUBLIQUE
ISLAMIQUE D'IRAN (1979-1981) :
RUPTURE AVEC LE PASSE AMERICAIN
|
38
Après de longues années de chaleureuses
coopérations économiques, politiques et militaires entre
Washington et Téhéran, la révolution iranienne de 1979
dépossède du pouvoir le Shah d'Iran, de son vrai nom Mohamed
Pahlavi Reza. Menée par L'Ayatollah Khomeiny cette révolution
était d'abord le fruit des mécontentements populaires contre le
pouvoir « sanguinaire » et occidental du Shah.
L'Ayatollah Khomeiny devient donc le nouveau chef du pouvoir
en Iran et peu de temps après s'amorce une violente rhétorique
contre les États-Unis d'Amérique décrivant ce pays comme
le Grand Satan et également comme une nation
d'infidèles.
L'éloignement devient de plus en plus grandissant quand
l'Iran bascule d'une République ouverte à un Etat
théologique (Islamique). Les institutions, les hommes et l'ambition du
nouvel Etat constituent également des motifs de division majeurs.
Dans cette partie qui comporte deux chapitres
nous allons dans le premier temps évoquer les fondements de la rupture
entre Téhéran et Washington (Chapitre I).
Lesquels fondements trouvent leurs sources dans l'indésirable pouvoir du
Shah par les Iraniens. Celui-ci perd son pouvoir fort d'une révolution
et s'instaure en Iran une République Islamique (Chapitre
II).
39
Chapitre I : LES FONDEMENTS DE LA RUPTURE
AMERICANO-IRANIENNE
Après près d'un siècle d'amitié
cordiale, les alliés d'hier, l'Iran et les Etats Unis d'Amérique,
allaient rentrer dans une autre phase de leur relation. Devant une population
de plus en plus opposées aux autorités de Téhéran,
et une opposition plus que déterminée à mettre fin au long
règne de Mohammed Riza Shah Pahlavi.
Il s'agit pour nous d'apprécier comment les iraniens
ont agir face au pouvoir impopulaire et impérial de
Téhéran et évoquer ensuite la chute du roi, ce qui met fin
à l'amitié avec Washington.
I-L' IMPOPULARITE DU REGIME DE TEHERAN AVANT 1979
La politique de Téhéran n'adhère pas aux
aspirations populaires. Les iraniens rêvent d'une autre orientation des
affaires publiques. Leur culture, leur foi et leurs valeurs sociétales
se trouvent niées par un pouvoir occidentalisé qui ne propose que
la violence.
1- La contestation de la politique impopulaire du Shah
1977
Né le 26 octobre 1919 à Téhéran et
mort le 27juillet1 980 au Caire, Mohammad Reza Shah Pahlavi ou
Muhammad Rizâ Shâh Pahlevi, était le
deuxième et dernier monarque de la dynastie des Pahlavi Homayouni de la
monarchie iranienne65 et le dernier Shah d'Iran qui régna du
16 septembre 1941 au 11 février 1979. En 1925, bénéficiant
d'une éducation stricte à la fois militaire et occidentale,
Mohammad Reza Pahlavi gagna le prytanée Nezam, deux jours après
qu'une loi lui eut conféré le titre de prince héritier.
65 Avant 1906, l'Iran était un empire
gouverné par un régime de monarchie absolue. L'unificateur de
l'État iranien et le fondateur de l'Empire perse, Cyrus le Grand, avait
fait une déclaration lors de sa conquête de Babylone (vers 530 av.
J.-C.). Cette Charte repose sur les valeurs du zoroastrisme et impose à
l'empereur le respect des populations conquises. Elle est un des principaux
documents qu'il importe d'étudier dans l'histoire des droits de l'homme.
Cyrus y proclame il y a deux mille cinq cents ans, alors qu'il était au
pinacle du pouvoir, qu'il « ne régnerait sur aucun des peuples
conquis si celui-ci ne le désirait pas ». Il y promet de ne forcer
aucun peuple à
changer de foi religieuse et de garantie la liberté de
chacun et le droit de propriété des peuples vaincus. Depuis le
règne de Cyrus au VIe siècle av. J.-C., l'Iran est
dirigé par une série de monarques absolus. Le Chah ou empereur
est à la tête de l'empire. Même les dirigeants musulmans des
dynasties Séfévides et Qadjars au pouvoir du XVIe
siècle aux années 1920, se considèrent comme l'«
Ombre de Dieu ». Descendants d'une famille sainte, les
Séfévides bénéficient d'une autorité
spirituelle plus importante que les Qadjars.
40
Une fois son certificat d'étude obtenu, à la fin
de l'été 1931, Mohammad Reza Pahlavi quitta l'Iran afin de
poursuivre son instruction en Suisse, dans le canton de Vaud.
En 1936, au terme des cinq années passées au
collège du Rosey, à Rolle, le jeune prince revint au pays et
acheva son apprentissage à l'École des officiers. Il reçut
le diplôme des mains de son père le 28 septembre 1938, avec le
grade de sous-lieutenant66. Mohammad Reza succéda à
son père, Reza Shah, lorsque ce dernier fut contraint d'abdiquer en
septembre 1941, peu après l'invasion anglo-soviétique.
C'est à l'automne 1967, le 26 octobre, qu'eurent lieu
les cérémonies du sacre de Mohammad Reza Pahlavi. Durant les
vingt-six années qui s'étaient écoulées depuis sa
prestation de serment, en septembre 1941, le Shah jugé orgueilleux
n'avait pas envisagé de perdre la couronne
impériale.67 Il n'éprouvait aucune fierté
à être couronné devant un peuple encore pauvre et en partie
illettré68.
Pour les deux mille cinq cents ans de l'Empire perse, le Shah
a organisé du 12 au 16 octobre 1971 une fête spectaculaire, sur le
site de Persépolis, siège des rois d'Iran depuis des
siècles. Monarques et présidents du monde entier ont fait le
déplacement pour assister à cette folie destinée à
célébrer la prodigieuse modernisation de l'Iran ainsi que son
glorieux passé. Les Iraniens sont censés prendre conscience du
prestige de leur pays dans le monde, défendait-il. Mais ce qu'ils
virent, c'est que le Shah a dépensé trois cents millions de
dollars en tentes de soie équipées de toilettes en marbre et en
mets et vins pour vingt-cinq mille personnes, venus en avion depuis Paris.
L'Ayatollah Khomeiny condamna ces excès depuis
Nadjaf69, évoquant les millions d'iraniens pauvres qui, selon
lui, réclamaient l'aide du clergé pour la construction de bains
publics: "Les crimes des rois d'Iran ont noirci les pages de l'histoire...
Que sont devenues ces belles promesses, ces allégations
prétentieuses selon lesquelles le peuple serait
66Chroniques de l'histoire : Le Chah d'Iran,
Ed. Chronique, 1998, pp. 140-142
68Mémoires de Farah PAHLAVI, Ed. XO,
2003, p. 156
69Nadjaf : Nadjaf est une ville d'Irak et la capitale
de la province de Nadjaf. Elle est située à environ 160 km au sud
de Bagdad, là Koumëny avait trouvé refuge.
prospère et heureux?" s'interrogeait -il.
Khomeiny et les conservateurs religieux iraniens blâmaient et
condamnaient le régime impérial du Shah, perçu comme trop
autoritaire et trop occidentalisé, qui foulait au pied les vraies
valeurs de la nation iranienne.
Image 4 : Mohamed Pahlavi Shah (1919-1980),
dernier monarque iranien.
41
Source :
commons.wikimedia.org -
Consulté le 15 Mars 2014
42
2- L'économie iranienne: symbole de la
disparité sociale
La politique volontariste du Shah améliore
considérablement le niveau de vie des iraniens et permet au pays une
modernisation rapide dans les années 1960 et 1970. Il avait voulu faire
de l'Iran une grande puissance mondiale et le sortir rapidement du
sous-développement. Pour ce faire, il entreprit plusieurs reformes parmi
lesquelles : la mise sur place d'une politique de modernisation de la
production et la diversification des infrastructures.
Le début du règne du Shah fut marqué par
de lourds investissements en infrastructure, dont l'ambitieux Trans-Iranian
Railway70- long de 1394 km, et comptant 4700 ponts et 240 tunnels -
qui relient Bandar-e Torkaman sur la Caspienne à Bandar-e Emam Khomeiny
sur le Golfe Persique. Malheureusement, presque aucune grande ville (à
l'exception de Téhéran) n'était desservie par cet
impressionnant chemin de fer. Cet ouvrage entraîna également (ce
qu'on appelle un spillover en jargon économique) la
construction de nombreuses routes locales.
Il développa les transports (autoroutes, routes
secondaires, chemins de fer, installations portuaires et
aéroportuaires), le domaine de la santé n'a pas été
négligé. Il investit dans les équipements sanitaires
(hôpitaux), l'accès aux soins de santé et les campagnes de
vaccination. La lutte contre l'analphabétisme, car pour lui la formation
et l'éducation restent le moteur de tout développement. Pour ce
faire, il arrive à scolariser 10 millions d'écoliers, le nombre
d'étudiant tournait autour de 200 000 en 1966 pour 20 universités
et 136 instituts ont également été créés.
Il arriva à élever le niveau de vie de la
population au-dessus de celui de la plupart des pays du Moyen-Orient et du
Tiers monde et cela à cause de son engagement en
70En 1939, le chemin de fer Trans-iranien a
été ouvert, construit entièrement par des capitaux locaux.
Il est 1.392 km de long et relie Bandar-E-Torkaman (anciennement Bandar-E-Shah)
sur la mer Caspienne à Bandar-e-EmamKhomeyni (anciennement
Bandar-E-Shahpur) sur le golfe Persique. Du sud au nord ce chemin de fer tout
important traverse et relie les villes de Ahvaz, Dezful, Arak, Qom,
Téhéran, Garmsar, Firuzkuh, QaemShahr (anciennement Shahi) et
Behshahr.A cette époque, l'Iran avait 146 kilomètres de chemin de
fer entre Tabriz et Jolfa (construit en 1916), 53 km entre Sufiyan et
SharafKhaneh (construit en 1916), et 92 km reliant Mir Javeh à Zahedan,
achevé en 1920.
43
faveur des réformes en profondeur, Parmi lesquelles
nous pouvons citer la réforme agraire en 196271, qui favorise
la participation des ouvriers aux bénéfices des grosses
entreprises, droit de vote des femmes et amélioration de la condition
féminine.
Ces réformes sont d'inspiration américaine. Les
Etats Unis d'Amérique, échaudés par les révolutions
cubaines et chinoises, ne voulaient pas que ses alliés basculent dans le
camp communiste. John Fitzgerald Kennedy, dès son arrivée
à la Maison-Blanche en 1961, déclara clairement ses intentions
vis-à-vis de l'Iran72.
Pour mener à bien ces réformes, Kennedy demanda
au Shah de nommer le Dr Ali Amini, un aristocrate Kadjar, au poste de Premier
Ministre, ce qui fut fait. Et l'impérialisme américain fut bien
servi. Son premier soin avait été de mettre la main sur le
pétrole. En 1954, un consortium de compagnies pétrolières
fut mis sur pied, en privilégiant les compagnies américaines qui
prenaient 40 %. Nelson Rockefeller put affirmer à Eisenhower en 1962 :
« Nous avons pu nous assurer le contrôle total du pétrole
iranien... A l'heure actuelle, le Chah ne saurait entreprendre le moindre
changement dans la composition de son gouvernement sans consulter notre
ambassadeur accrédité auprès de lui
»73.
Mais, les handicaps antérieurs continuaient à
subsister. L'Iran subissait toujours le régime de libre-échange
imposé par les Anglais et les Russes. La Banque Impériale de
Perse - aux mains des anglais - continuait d'avoir le monopole sur la
création de pièces et billets, et le secteur pétrolier
était aux mains de l'Anglo-Persian Oïl Company (APOC), depuis la
concession accordée par Mozaffared-Dinh Shah à William Knox
d'Arcy.
71Cette réforme agraire a vula
nationalisation de certaines terres, moyennant compensation à leurs
propriétaires, et les redistribue aux paysans. En clair, la loi de
réforme agraire (Loi du 09 janvier 1962) comportait 3 dispositions
principales: 1- Abolition du système agraire antérieur et de ses
corollaires, féodalisme et servage. 2 Chaque propriétaire dispose
néanmoins de la possibilité de posséder soit un village de
6 dongs, soit 6 dongs répartis sur plusieurs villages
- à condition qu'il mette ces terres en valeur. Le dong est une
unité de mesure agricole basée sur la fréquence
d'irrigation: 6 dongs correspondent à une fréquence de 6
ou 12 distributions d'eau par 24 heures. Notez donc l'astuce: on ne permet pas
aux propriétaires de conserver un
72 Un envoyé spécial, Averell
Harriman (NDLR: je suis toujours fasciné qu'on ait envoyé un type
appelé Harriman, sachant qu'Harriman est un Dieu Zoroastrien! Un
hasard?) pour demander une plus grande démocratisation, une
réforme agraire, une lutte active contre la corruption,
73Cercle Léon Trotsky, Iran : de la
dictature du Chah à celle de Khomeiny, la révolution
escamotée, du 30/04/1987, consulté sur
www.lutte-ouvriere.org/,
le 14/10/2014
44
Le développement économique de l'Iran avant la
Révolution était rapide. La société était
traditionnellement agricole, mais dans les années 1970, l'Iran avait
accompli une industrialisation significative et une modernisation
économique dans le cadre de la révolution blanche voulue par le
Shah d'Iran. Cependant, le rythme de croissance a connu un énorme
ralentissement en 1978, juste avant la révolution Islamique.
Son renversement est aussi l'échec d'une politique
d'industrialisation et de modernisation trop ambitieuse, imposée
à une société traditionnelle qui n'y était pas
préparée. Elle contribua à élargir le fossé
économique, social et culturel entre une élite fortement
occidentalisée et une classe populaire sensible au discours religieux
prêché par Khomeiny.
Le développement capitaliste était non
maîtrisé et fondé avant tout sur la manne
pétrolière, marqué par la corruption et la gabegie et par
une indifférence aveugle aux aspirations de la société. Ce
développement s'accompagna de l'écrasement de la moindre forme de
contestation et d'une toute-puissance de la police politique. Un contexte
où le droit et la justice ne sont pas de mise. Cela nous permet
d'apprécier le droit et la justice sur le pouvoir impérialiste du
Shah.
3- Une justice aux ordres du pouvoir impérial
Le long règne du Shah ne s'exerce sans dommage pour son
peuple. En politique il est généralement dit qu'aucune
liberté ne saurait se faire "sous un pouvoir remplir de pouvoir". Le
Shah évolue cependant vers une conception nationaliste,
réformiste et autoritaire du pouvoir et de la politique. Avec, par
exemple, la répression de l'opposition par la police politique. Les
opposants au régime du Shah affirmaient que ce dernier détenait
plus de 100.000 prisonniers politiques ("la prise de la Bastille" de
l'époque !)74. Sachant qu'une grande prison comme
Fleury-Mérogis a une capacité de l'ordre de 3500 détenus,
il y aurait eu donc une trentaine de centres de détention politique
à l'époque du
74 Cette situation est comparable à celle de
la prise de la bastille en 1798 lors de la révolution Française,
des révolutionnaires avaient été faits prisonniers. La
prise de la Bastille à Paris, le 14 juillet 1789, est la première
intervention du peuple parisien dans le déroulement de la
Révolution française. L'intervention populaire met provisoirement
fin aux tentatives du roi Louis XVI de reprendre le pouvoir absolu qu'il a
perdu en juin 1789.
45
Shah, soit un par ville de grande ou moyenne importance. Pour
la seule prison d'Evine située à Téhéran qui avait
une capacité maximale de 3000 prisonniers. Selon ses opposants, à
la libération de tous les prisonniers politiques quelques mois avant la
chute du régime impérial, on n'en dénombra que 240. Soit
des milliers tués
Mohsen Makhmalbaf, ex-prisonnier et cinéaste officiel
du régime des Mollahs et porte-parole du Mouvement Vert75,
déclarait dans une interview que le Shah en personne venait en prison
pour le torturer. Les grèves et autres manifestations de protestation
sont foncièrement interdites.
Pour rappel, pendant plusieurs siècles, la
charia76 a régi la vie juridique en Iran, jusqu'à la
révolution constitutionnelle de 1906. Le système juridique
traditionnel à partir de là est transformé en profondeur
avec le règne de la dynastie Pahlavi (1926-1979) qui se détache
de la charia, celle-ci jugée limitée et incapable de régir
la vie juridique du pays. Mohammed Reza Shah Palavi introduit un droit moderne
où les principes des droits de l'homme sont partiellement
présents.
La monarchie militaire allait fonctionner pour le compte
lié de l'impérialisme américain et du despote Pahlavi.
D'emblée, elle mit sur pied un instrument de répression durable,
avec l'aide de la CIA et la MI6: la police politique, la Savak,
75 Les origines lointaines du Mouvement vert
remontent aux années 1990. Le Mouvement vert, issu des classes moyennes,
voulait occuper le vote pour obtenir un gouvernement réformateur.
L'affrontement cesse d'être jovial quand un vote truqué met au
pouvoir pour un second mandat Ahmadinejad qui réprime violement
manifestations et leaders. Plus de cent morts, des milliers de personnes
arrêtées et torturées. Dans l'après coup, pourtant,
le Mouvement vert demeure comme esprit revendicatif qui désire sans
fin
76 La charia désigne l'ensemble des
prescriptions et lois morales et juridiques autour desquelles s'organise la vie
des musulmans. La charia se fonde sur le Coran et la Sunna du Prophète,
la seconde source écrite de l'islam, La charia concerne aussi bien la
vie cultuelle que les relations sociales et touche à ce titre à
la fois à la dimension individuelle du croyant qu'à la dimension
collective de la société réunissant les croyants.
Créée le 18 octobre 1957 par Washington, son
rôle était de lutter contre la subversion, les américains
l'utilisent jusque pour surveiller le Shah, définitivement, elle est
reprise en main par le monarque qui nomme à sa tête
Nematollah77.
Les 15 000 agents SAVAK disposent de pleins pouvoirs pour
infiltrer et surveiller le pays et la diaspora. Ils peuvent arrêter et
emprisonner indéfiniment toute personne, sans aucun contrôle. Le
Shah lui-même se méfie d'eux au point de créer une autre
police, le SIB, juste pour surveiller la SAVAK. La brutalité et le
sadisme des tortionnaires SAVAK, formés par des instructeurs du Mossad
et de la CIA, sont légendaires.
Son nom finit par suffire à inspirer la terreur et le
meurtre. Au bout de quelques années, elle se mit à pratiquer
systématiquement la torture. Le Shah mit beaucoup de soin à
empêcher l'apparition de rivaux possibles. Les généraux
eux-mêmes ne pouvaient se rencontrer, ou venir à
Téhéran s'ils n'y étaient pas en poste, sans son
autorisation personnelle expresse.
Au vu de tout ce qui précède, à savoir la
politique impopulaire et contestée du Shah, sa vision de
l'économie iranienne ignorant la majeure partie de ses concitoyens et
enfin son pouvoir impérial sanguinaire et liberticide en plus de
l'hostilité au soutien des Etats Union vont créer chez les
iraniens un sentiment de révolte et occasionner la chute du Roi.
46
77Nassiri. Est l'ami d'enfance du Shah, Celui-ci est
un entrepreneur israélien, membre du Mossad.
47
II-DE LA REVOLUTION A LA CHUTE DU SHAH 1978-1979
Dans cette partie nous allons apprécier la
révolution et la chute du Shah. Dans cet élan, l'image d'un
homme, celle de l'Ayatollah Khomeiny, leader emblématique de la
révolution sera présentée, ensuite la révolution du
peuple iranien et enfin la chute du Shah.
1- L'AYATOLLAH KHOMEINY : le précurseur de la
révolution
Qui est l'homme qui a opéré l'un des plus grands
bouleversements de son temps dans le Moyen Orient ?
Ruhollah Al-Moussawi Al-Khomeiny est une personnalité
religieuse et politique en Iran. Il est né le 24 septembre 1902 dans une
famille d'intellectuels chiites à Khomeiny, un village situé
près de Téhéran78. Il fut à l'origine de
la révolution islamique de 1979 qui renversa le Shah Mohammad Reza
Pahlavi. Khomeiny installa en Iran une République Islamique qu'il
gouverna jusqu'à son décès au titre de « Guide
suprême ». Son père, Seyyed Moustafa Al-Moussawi, qui est
compté parmi les grands oulémas79 de son
époque, meurt six mois après la naissance de Ruhollah. L'enfant
est ainsi élevé par sa mère et sa tante, dans une modestie
totale80.
Parlant de la formation du « Guide », elle a
été foncièrement théologique. En quittant le
lycée où il avait appris l'arabe, il entra à l'âge
de 18 ans à l'école théologique
78 Il est né à Machhad, lieu
considéré comme saint par ses partisans
79Ouléma Plutôt qu'oulémas, ou
encore « ulémas », on devrait écrire : oulamas. Le mot
n'est en effet que la transposition en français de l'arabe
`ulamâ', pluriel de `âlim, « savant ».
Déjà présent dans le Coran en un sens
général, ce terme a progressivement reçu dans l'islam une
acception technique, il désigne l'homme qui a acquis le « savoir
» fondamental dans la communauté musulmane, c'est-à-dire la
connaissance matérielle du Coran et des traditions prophétiques.
Le « savant » est alors distingué du faqîh,
l'homme capable de pénétrer, apprécier et appliquer
judicieusement ces données du « savoir »
80 Il décrit ici son environnement de vie
modeste : « La maison dans laquelle je suis né et j'ai vécu
jusqu'à l'âge de cinq ans, raconte-t-il, se trouvait dans un
quartier très moyen de Machhad et faisait à peine 70
mètres carrés. En fait, cette maison n'avait que deux
pièces, si l'on compte la cave, qui se trouvait au sous-sol! Un peu plus
tard, des gens du quartier, dévoués à mon père
achetèrent un petit terrain qui se trouvait derrière notre maison
et c'est ainsi que la maison fut agrandie et que nous eûmes trois
chambres » site officiel du Guide de la révolution,
http://www.leader.ir/langs/fr/index.php?p=bio
48
pour entamer ses études auprès de son
père et d'autres professeurs, à l'Ecole théologique de
Nadjaf, il se donne fortement à la compréhension de l'islam avec
des maitres81.
Comme son père, après avoir terminé ses
études de théologie, Khomeiny fait une carrière
académique d'expert en théologie. En 1927, il enseigne à
Qom et est ensuite nommé Ayatollah82 dans les années
1950. L'Imam Khomeiny est l'auteur d'une trentaine d'ouvrages répartis
dans les différentes branches des sciences islamiques.
Khomeiny s'intéresse très tôt à la
politique intérieure et extérieure de son pays. En 1953, une
opération militaire menée par la CIA83 renverse le
régime de Mohammad Mossadegh et permet au Shah, Mohammad Reza Pahlavi de
remonter sur le trône malgré l'opposition violente du peuple
à son retour. Un climat d'insécurité et d'oppression
s'installent en Iran, Khomeiny s'engage dans l'opposition au régime
dictatorial de Mohammad Reza. Il dénonce la « révolution
blanche » qui désigne l'ensemble des réformes menées
par le Shah en vue de moderniser la société iranienne, incluant
le droit de vote des femmes, dans un Etat où la charia devrait selon lui
guider les pas.
Dans une posture révolutionnaire, Khomeiny proteste
ouvertement en 1962 contre la torture et les emprisonnements dictés par
le Shah, dont le régime est vu comme garant des intérêts
des Etats-Unis d'Amérique. Le 3 juin 1963, Khomeiny fait un discours
historique contre la subordination du Shah aux pouvoirs étrangers et
dénonce son soutien à Israël. L'arrestation immédiate
de l'Ayatollah occasionne de violentes manifestations populaires. Il est
aussitôt libéré par le Gouvernement conscient de son
influence. Reconnu comme « Guide religieux suprême », Khomeiny
devient l'un des chefs de la communauté chiite.
81 Les oustaz ou maitres théologiques du
Khomeiny Sayed Mohammad Hakim, Sayed Mahmoud Chahroudi, Mirza BagherZanjani,
Sayed YahyaYazdi, ou encore Mirza Hassan Bojnourd
82 Titre donné aux membres du haut
clergé chiite (Aller plus loin dans l'explication)
83L'opération Ajax (officiellement TP-AJAX)
était une opération secrète menée par le
Royaume-Uni et les États-Unis en 1953, exécutée par la
CIA, pour mettre un terme à la politique nationaliste du Premier
ministre d'Iran, Mohammad Mossadegh, et consolider le pouvoir du Chah, Mohammed
Reza Pahlavi, ceci afin de préserver les intérêts
occidentaux dans l'exploitation des gisements pétrolifères
iraniens. (Phrase trop longue).
49
L'Ayatollah Khomeiny est expulsé d'Iran en 1964, Il
part d'abord en Turquie, puis en Irak, à Nadjaf et à Kerbala, la
ville sainte du chiisme, où son discours se radicalise davantage. Son
activisme pro-chiite indispose le pouvoir irakien et en 1978, il regagne la
France précisément à Neauphle-le-Château.
Depuis son exil, la pensée de Khomeiny se forge autour
d'une conviction selon laquelle la démocratie n'est pas un modèle
approprié pour l'Iran. Selon lui, c'est aux mollahs84,
héritiers du Prophète, que revient l'autorité religieuse
et politique. Aux dignitaires religieux est reconnu le pouvoir de
désigner le plus savant d'entre eux pour centraliser
l'autorité.
A la fin de l'année 1978, sous son leadership, des
manifestations violentes faisant plusieurs milliers de victimes poussent le
Shah à abdiquer et à fuir vers l'Egypte le 16 janvier 1979. Le
1er février 1979, Khomeiny revient avec triomphe à
Téhéran après 14 ans d'exil. Le 11 février, il
accède le pouvoir en tant que Guide suprême ou Guide de la
Révolution islamique et fonde une République islamique.
Après près d'un siècle de vie, soit 89
ans dominé par la lutte politique, il meurt le 3 juin 1989, après
onze jours passés à l'hôpital en raison d'une
hémorragie interne. Son fils Ahmad Khomeiny écrit le
communiqué de décès de son père, en ces termes :
« L'esprit supérieur du chef des musulmans et
des hommes libres à travers le monde, Son Excellence l'imam Khomeiny,
est monté au ciel, et son coeur, débordant d'amour pour Dieu et
l'humanité opprimée, a cessé de battre. Mais des coeurs
emplis d'amour pour lui battront toujours et le soleil de la direction de
l'imam brillera sur l'univers et les hommes, plus lumineux que jamais...
»85
84Mollah est un théologien de l'islam, mais
cet appellation est chiite. Dans le monde sunnite, on parle plutôt
d'ouléma.
85 Le message est lu sur les antennes de la Radio
Téhéran dimanche 4 juin 1989 à 7 heures du matin que les
Iraniens apprennent la mort de l'imam Ruhollah Moussavi Khomeiny,
décédé sept heures plus tôt, à l'âge de
89 ans
50
Les discours révolutionnaires du Guide ne pouvaient
qu'avoir une adhésion collective chez les iraniens qui se voyaient
depuis des décennies oubliés par la classe politique.
Image 5 : GUIDE DE LA REVOLUTION IRANIENNE DE
1979 L'Ayatollah Khomeiny (1902-1989)
Source:
www.vikidia.org, Consulter
le 12 Mars 2014
51
2- La révolution populaire
Les incriminations faites à l'endroit du pouvoir
impérial sont nombreuses et le pays présente de vraies
contradictions sociales.
L'envol du prix du pétrole eut des retombées en
Iran mais aucune répercussion sur la condition de vie de la masse
populaire. Autour de l'État, des cadres de l'armée, bien
placés auprès des multinationales, des hautes administrations
censées répartir la manne pétrolière sont
complètement corrompus.
La famille du Shah provoquait en quelque sorte cette
révolution populaire : elle amassa une fortune énorme. Lorsque le
Shah fut chassé, en 1979, on a parlé de vingt milliards de
dollars86. Une importante partie des revenus du pétrole, par
exemple, avait ainsi disparu des comptes de la trésorerie de
l'État pour les comptes personnels.
Par la même occasion, ce fut une époque
prospère pour les industriels des pays occidentaux. L'Iran devenait un
centre propice d'échange et de coopération, voire un «
paradis » d'affaire. Fort de tout cela, la capitale Téhéran,
présentait pourtant des contradictions sociales très importantes.
Au nord, à l'ombre d'un pouvoir mégalomane qui cultivait la
nostalgie impériale et imposait le culte du Shah, des palais, des villas
somptueuses, des voitures et des vêtements de luxe. On se transportait
pour une réception de Noël à Nice, ou pour un
déjeuner à Munich. Pour les Iraniens, le bon sens aurait voulu
qu'on n'exhibe pas sa richesse et qu'on ne rivalise pas avec ostentation dans
l'imitation du mode de vie et des moeurs de la grande bourgeoisie
occidentale.
Mais toute cette bourgeoisie se faisait dans un pays
socialement fragile. Depuis l'année 1950, la population totale de l'Iran
avait doublé, dont la moitié désormais dans les villes.
Téhéran, avec environ cinq million d'habitants, avait
pratiquement quintuplé sa
86Claude JULIEN, « La
démocratie et l'argent », Le Monde Diplomatique,
avril 1986, p. 6.
52
population en vingt ans. Les paysans chassés des
campagnes par la misère, l'endettement ou l'absence de tout travail y
avaient massivement afflué.
Et le sud, c'était d'abord des zones de logements
précaires pour les plus favorisés, des zones entières de
bidonvilles proliférant jusque sur le désert, sans eau, sans
électricité, où survivait dans l'espoir d'un emploi
occasionnel une population déracinée.
De ce que les dirigeants appelaient la modernisation de
l'Iran, les masses populaires ne pouvaient voir que le mépris et
l'arrogance des privilégiés, quand ce n'était pas la
brutalité et la contrainte. L'Occident et le Shah se retrouvent ainsi
associés dans la même haine, ainsi que, tous ceux qui se
réclamaient du modernisme.
Le 7 janvier 1978, le quotidien pro-gouvernemental
Ettela'at publie un article d'insultes contre Khomeiny. Cela met le
feu aux poudres dans la ville religieuse de Qom, où les étudiants
en théologie sont souvent persécutés. Ces
événements sanglants de Qom marquent le début d'un cycle
de soulèvements et de répression rythmée par les
cérémonies commémoratives particulières au culte
chiite. En 1978, ces rituels se transforment en actes de protestation
politique. Des manifestations secouent plusieurs villes, notamment Tabriz.
L'armée tire et de nouveau les morts se comptent par dizaines.
Mais la foule n'a cessé de crier « A bas le Shah !
». Jusqu'au milieu de 1978, les manifestations de rue rassemblent surtout
les étudiants, les bazaris87, les
séminaristes, et d'autres mouvements de soutien. Désormais la
population pauvre des villes entre en scène, y compris les ouvriers
d'usines et du bâtiment, et les manifestations deviennent massives. Les
10 et 11 août, Ispahan se soulève. Malgré la loi martiale
instaurée, on déplorait une centaine de morts, il a fallu deux
jours à l'armée pour en reprendre le contrôle.
.
87Bazar, poumon économique de la capitale,
n'a pas suivi. Véritable poumon de l'activité économique
iranienne, le grand bazar de Téhéran demeure un acteur clef de la
République islamique, que personne ne peut ignorer. « Quand le
bazar gronde, le pouvoir tremble »
53
Le 19 Aout 1978, eut lieu le drame d'Abadan, capitale de
l'industrie du pétrole. L'incendie d'un cinéma en pleine
après-midi fait cinq cents morts. Le Shah accuse les religieux
intégristes. Mais toute la population attribue cette horreur à la
police locale et au régime de Téhéran88. Dans
l'émoi général, le gouvernement affiche quelques
concessions en direction des milieux religieux et promet des élections
libres pour l'année suivante. Mais cela ne pourra empêcher les
manifestations. Désormais, les manifestations sont dominées par
un cri unanime : « Mort au Shah ! ».
Les 11 et 12 décembre 1978, trois millions de personnes
défilent à Téhéran avec le même slogan «
à bas le Shah ». La dictature de Pahlavi a perdu toute assise.
Même si l'ambassadeur soviétique s'empresse d'affirmer que son
pays préfère le Shah au chaos89. De son
côté, la Chine, dont le dirigeant Hua Kuo Feng (Maréchal
YeJianying 1976-1983) a rendu visite au Shah en août, ne ménage
pas son soutien au régime. Les tentatives d'aller vers une monarchie
constitutionnelle se multiplient, en vain. Le peuple reste ferme sur sa
position, pour lui, plus de chance ni de temps supplémentaire au Shah.
De son exil, Khomeiny exige le départ du Shah. Le Tudeh 90
qui, jusque-là restait« constitutionnaliste » réclame,
lui aussi, la fin de la monarchie. En décembre 1978, Bakhtiar est
nommé premier ministre91.
Le bilan fut lourd, plus de 17 000 personnes sont tuées
et 50 000 sont blessées ou torturées. Les émeutes et
manifestations populaires vont introduire une étape décisive dans
cette crise : c'est celle de la chute du Shah.
88 Grand article publié par
Encyclopédisa Universalis France 2016 « l'histoire de l'Iran
moderne » p 1976-1982 89Denis COLLIN, « La chute du Shah.
Révolution et contre-révolution »
http://www.gauchemip.org,
consulté le 15/ 10/2014
90 Le Tudehtraduit par « Parti des Masses
d'Iran » est un parti communiste iranien fondé en 1941. Il a eu des
relations étroites avec le Parti communiste de l'Union
soviétique. C'était un parti politique majeur en Iran avant les
purges ayant eu lieu au début de l'existence de la République
islamique d'Iran sous la direction de Khomeini.
91À la fin de l'année 1978, alors que le pouvoir
du chah s'effondrait, et parce que Bakhtiar avait été un
dirigeant de la dissidence, il fut choisi pour aider à la
création d'un gouvernement civil à la place du gouvernement de
salut public qui avait existé jusqu'alors. Il fut nommé Premier
ministre par le chah, faisant ainsi une concession à ses opposants, Il a
été le dernier Premier ministre d'Iran sous le ShahMohammad Reza
Pahlavi.
54
3- La chute du pouvoir impérial du shah 1979.
Sans aucun doute, la politique du Shah a donné lieu
à une croissance économique très forte durant les
années 1960 et 1970. Cependant, devant la brutalité des
méthodes de la SAVAK, l'orgueil des plus riches et de la famille
impériale et une parodie démocratique, le Shah se voit affaibli
et les alliés ne sont plus trop regardant sur son maintien et sa
sécurité.
C'est Khomeiny qui exprime avec intransigeance la
volonté de lutter jusqu'au renversement du régime d'oppression et
de dictature du Shah. Pour lui, l'heure n'est plus à la
conciliation avec le régime sanguinaire et liberticide du Shah, alors il
demande sa démission sans condition. Dans cet élan il parvient
à fédérer autour de lui, dans le mouvement Islamique,
l'opposition92 et arrive à garantir son contrôle
et son hégémonie sur la masse populaire. Il déclarait
à cet effet : « Le mouvement islamique (...)a été
fondé par le clergé avec le soutien de la grande nation
iranienne. C'est au clergé qu'il revient de le diriger, à
l'exclusion de tout parti, front ou personnalité politique
»93
Khomeiny menaçait les partis et groupes opposés
au Shah qui « avaient rejoint le peuple, uniquement par souci de leur
intérêt ». Ainsi toute l'opposition se réunie
solidement autour du Guide de la révolution tenant sur serment les
dispositions inaliénables suivantes : « 1. La
nécessité de l'union de toutes les forces contre la dictature. 2.
Tous les slogans doivent être antidictatoriaux. 3. Le devoir de toutes
les forces progressistes est d'éviter et d'empêcher les divisions.
4. Souligner les cas de désaccord, c'est amener de l'eau au moulin du
régime. »Et enfin : « 5. Il faut insister sur
92Toudeh, Modjahedines et Fedayins, des partis
politiques opposés au Shah, loin de contester politiquement ou
pratiquement à Khomeiny son emprise sur les masses, sous le couvert
d'unité, s'emploient au contraire à lui faire allégeance
et à se mettre à son service
93Cercle Léon TROTSKY,
« Iran : de la dictature du Chah à celle de Khomeiny, la
révolution escamotée » ,30/04/1987 consulté le 25 /
12/2014
55
le leadership de l'Ayatollah Khomeiny en insistant pour
que toute négociation en son absence soit condamnée
».94
Contre toute attente et comme un symbole, au moment où
en début de l'an 1979, le Shah trouve un grand bourgeois, Chapour
Bakhtiar, en rupture de ban avec le Front National, pour former un gouvernement
civil et que lui se préparait pour un séjour médical hors
du pays, c'est Washington qui annonce le 11 janvier, que le Shah va prendre des
vacances à l'étranger. Il part effectivement le 16 Janvier au
Caire. Le Shah voyait dans sa déposition, une trahison non seulement de
son peuple qu'il aurait servi avec patriotisme mais aussi trahison du
coté de ses alliés : les Américains, le pouvoir de Carter,
qui pour lui et plusieurs observateurs n'ont pas joué franc jeu pour
l'aider à vaincre la révolution95. Le Shah laissa donc
le trône avec une image dégradée. Il était
refoulé par tous les chefs d'Etat, même aux Etats Unis
d'Amérique l'accueil fut difficile. Et l'Iran va vivre deux semaines
dans l'attente du retour de Khomeiny.
Le 19 janvier, Khomeiny ordonne une grande manifestation qui
réclame le départ de Bakhtiar96 et
l'établissement d'une République islamique. Ce n'est que, le 22
janvier 1979, que les Fedayins97 organisent une manifestation
indépendante. Auparavant, ils avaient toujours défilé
derrière les portraits de Khomeiny. Cette manifestation rassemble dix
mille personnes dans les rues de Téhéran avec pour slogan bien
significatif de « Il n'y a pas d'autre parti que le parti de Dieu
».
94Cercle Léon TROTSKY, «
Iran : de la dictature du Chah à celle de Khomeiny, la révolution
escamotée », 30/04/1987 consulté le 25 / 12/2014.
95Kouassi Roger DJANGO, Relations
politiques Iran-Etats Unis : 1979-1988, (Mémoire de Licence,
Université de Bouake), 2007, p 45.
96 Le premier ministre gestionnaire du pouvoir
auprès du Shah.
97 Le mot fedayin, qui signifie
littéralement "prêt à se sacrifier", fut
utilisé à l'époque médiévale pour
désigner les membres de la célèbre secte des Assassins. Il
faut ensuite attendre les années 1890 pour que le mot soit
utilisé pour désigner les commandos arméniens faisant des
raids contre les turcs en Anatolie. Le mot a ensuite été
utilisé durant la révolution iranienne de 1905 pour
désigner les troupes du Mouvement libéral constitutionnel et sera
ensuite repris dans ce pays par divers groupes tout au long du XXe
siècle.
56
Le retour de Khomeiny en Iran donne lieu à un immense
déferlement humain de plusieurs millions de personnes, de
l'aéroport jusqu'au grand cimetière au sud de la ville, où
l'Ayatollah prononce un long discours dans lequel il s'adresse
particulièrement aux sommets de l'armée : « Nous voulons
que vous soyez indépendants, Monsieur le général, Monsieur
le colonel... préférez-vous être des valets ? Nous avons
dit à votre place que nous ne voulions pas que l'armée soit
dominée par les Américains, que nous voulions que vous soyez
maîtres chez vous... Qui a dit que nous allions vous supprimer ? Nous
voulons garder l'armée, mais une armée qui soit au service du
peuple, pas des autres»98.
Khomeiny voulait effectivement arriver au pouvoir avec
l'accord des chefs de l'armée. Significativement, il avait attendu le
feu vert de l'armée pour revenir en Iran. En effet depuis les
manifestations populaires l'armée avait assiégé
l'aéroport. Il avait fallu des manifestations populaires, mais Khomeiny
avait attendu le temps nécessaire. Jamais il n'a été
question pour lui de porter atteinte à l'armée. Quand
l'état-major ordonnait des massacres à répétition,
c'est les mains nues qu'il envoyait la population contre une armada de
blindés.
Après le départ du Shah, le « Conseil de
Régence » qu'il a laissé ne représentait absolument
rien. Les manifestants s'exaspèrent et commencent parfois à
réclamer des armes. Khomeiny et son entourage sont en contact avec des
représentants des États-Unis d'Amérique et les chefs de
l'armée pour négocier une passation de pouvoir en douceur.
L'impatience de la population donne naissance à une insurrection
à Téhéran. L'intervention des masses va mettre un terme
à ces négociations secrètes. Elle contraint finalement
Bakhtiar à céder la place au contre-gouvernement khomeyniste
présidé par Bazargan.
98Khomeiny, le 1er février
1979 : «La dynastie régnante est illégale» ,
http://bibliobs.nouvelobs.com
Publié le 15 juillet 2009 et consulté le 25/06/2014
57
Le soir du 9 février, les soldats d'élite de la
Garde Impériale, baptisés les « Immortels », lancent
une expédition punitive contre une base de l'Armée de l'Air, dont
un millier de militaires se sont la veille ralliés publiquement à
Khomeiny. La population alertée arrive en masse au secours de ceux-ci.
C'est le point de départ de l'insurrection. Toute la ville se
soulève.
Alors que les « Allah est le plus grand
»99 emplissent l'air, la foule prend d'assaut les
dépôts d'armes, les bâtiments publics, les commissariats,
les casernes, les unes après les autres. Des barricades surgissent un
peu partout. Des enfants attaquent des chars avec des cocktails Molotov.
Très souvent, Fédayins100 et
Moudjahidines101 sont à l'avant-garde, voire à
l'initiative des différentes actions. Le peuple insurgé se rend
enfin ma ître de Téhéran.
Le 11 février, les chefs suprêmes de
l'armée annoncent leur neutralité. Bazargan déclare
à la télévision : « Le chef d'État- Major,
dans un entretien personnel, a affirmé sa collaboration avec mon
gouvernement ». C'est de l'État-major que l'équipe de
Khomeiny entendait en effet de voir venir la décision. Bazargan demande
aux citoyens d'accueillir les « frères soldats et officiers ».
Le lundi 12 février 1979, la monarchie est abolie en Iran. Bazargan
s'installe dans le palais du Premier Ministre. La République islamique
d'Iran est proclamée le 1er avril 1979 par Khomeiny tournant
définitivement la page au pouvoir impérial du Shah.
99 Allah Akbar ou Allah est le plus Grand,
expression très présente dans les prières musulmanes. Elle
représente souvent une source de motivation pour les engagés
à un projet.
100Lors de la révolution de 1978-1979, les
Fedayins (Organisation des Guérilleros Fedayins du Peuple d'Iran) est
une des plus influentes organisations iraniennes se réclamant de la
classe ouvrière et du marxisme. Lors des premières
élections après la chute du Shah, les Fedayins obtiennent 10% des
voix.
101 L'Organisation des moudjahiddines du peuple iranien (OMPI)
est un mouvement de résistance armée au régime de la
République islamique d'Iran. Fondée en opposition au Shah, l'OMPI
est demeurée active en Iran et à l'extérieur, durant et
après la Révolution islamique de 1979. Elle a été
notamment dirigée par Massoud Radjavi et demeure conduite en exil par
son épouse, MaryamRadjavi.L'organisation était placée sur
la liste des organisations terroristes par les États-Unis de 1997
à septembre 2012, par le Conseil de l'Union européenne de 2002
à janvier 20091
La position américaine face à cette
révolution populaire qui emportait leurs alliés de longue date a
été jugé inappropriée. En effet, Washington inapte.
Selon Armin AFERI, Robert HUYSER a bel et bien été
secrètement envoyé par la maison blanche en mission
secrète en Iran, sa feuille de route était essentiellement
d'empêcher l'arme impérial de faire coup d'état pour faire
barrage à l'arrivée des islamiste au pouvoir102. Et
plusieurs observateurs s'accordent pour dire que Carter a payé pour ca
légèreté dans le dossier Iranien. Cette position peut
être discutée, mais la réalité est que
l'administration Carter n'a pu sauver le pouvoir d'un allié
stratégie des Etat Unis d'Amérique.
Ainsi donc comme un sauveur Ayatollah Khomeiny, à
travers une rude révolution populaire met fin au règne de celui
qui sera le dernier empereur du trône en Iran, du Shah. C'est dans la
satisfaction généralisé que les Iraniens accueil leur
nouveau chef, moment pour eux d'oublier les affres du régime totalitaire
du Shah. Khomeiny a donc le champ pour faire de l'Iran une République
Islamique qu'il prononce en Avril 1979.
58
102 Armin AFERI << comment les Etats Unie ont
ratés leur coup en Iran>>
http://
www.lepoint.fr/monde/comment-les-etats-unis-ont-rate-leur-coup-en-iran-12-02-2015-1904392,
consulté le 5 octobre 25016
59
Chapitre II- L'AVENEMENT DE LA REPUBLIQUE ISLAMIQUE
D'IRAN (1979- 1981)
Le Shah prétendit restaurer la grandeur de l'Empire
Perse en s'appuyant sur trente mille conseillers américains dont la
présence constituait pour la masse iranienne une insulte aux sentiments
nationaux. La chute du pouvoir impérial du Shah d'Iran donna
automatiquement naissance à un bouleversement très important et
de tous ordres. Ici nous allons apprécier la marque du nationalisme
iranien et les institutions politiques et religieuses de la nouvelle
République.
I- LA MONTEE DU NATIONALISME ANTI AMERICAIN
Les origines du nationalisme iranien et ses manifestions, la
révolution culturelle à partir de 1980 et l'arrivée de
l'Union soviétique dans l'arène politique et économique de
la République Islamique vont nous permettre d'élucider cette
partie.
1- Les origines du nationalisme iranien et ses
manifestations
Le nationalisme iranien est une révolte contre
l'Occident et en particulier les Etats Unis d'Amérique. La haine pour
les Américains est née depuis que ceux-ci et les Anglais ont
opéré le coup d'Etat contre Mossadegh en 1953. Il fut le premier
chef de gouvernement élu démocratiquement en Iran et occupe le
poste jusqu'en 1953, date du renversement de son gouvernement par un coup
d'État.
Son gouvernement introduit un ensemble de réformes
sociales et politiques progressistes telles que la mise en place d'une
sécurité sociale, le contrôle des loyers ou l'initiation de
réformes agraires significatives. La décision la plus notable
prise sous son administration reste toutefois la nationalisation de l'industrie
pétrolière iranienne, alors sous contrôle britannique
depuis 1913.
Il tente d'instaurer une démocratie laïque et de
conserver une relative indépendance du pays face aux puissances
étrangères. Chassé du pouvoir par le coup d'État du
19 août 1953 car portant atteinte aux intérêts occidentaux
en Iran, il est
60
remplacé par le général Fazlollah
Zahedi103 et est placé en résidence forcée pour
le restant de ses jours. Par son opposition farouche à l'intervention
des puissances occidentales dans les affaires intérieures iraniennes,
Mossadegh est généralement considéré comme l'une
des figures du nationalisme au XXe siècle.
Après ce coup d'Etat le Shah se proclame roi des rois,
ainsi il organise le développement économique du pays, suscitant
un choc culturel qui est perçu comme une occidentalisation. En effet, il
interdit le port du voile, donne le droit de vote aux femmes, ce qui va
susciter le mécontentement des autorités religieuses,
orchestré par les hauts dignitaires chiites y compris l'Ayatollah
Khomeiny qui est en exil. La "révolution blanche"104 du Shah
engendre aussi une modernisation pseudo-européenne qui aboutit à
la destruction d'une partie du patrimoine culturel iranien. Ce sentiment
anti-américain sera plus accentué après la création
de la République Islamique d'Iran avec à sa tête
Khomeiny.
Le Guide de la révolution mettait dans l'esprit de ses
concitoyens que les Américains étaient la cause de leur ruine et
qu'ils profanaient les moeurs avec notamment l'alcool, les tenues
vestimentaires, la musique pop, les boîtes de nuit, les cinémas
dancings, bains mixtes et les vidéos et productions pornographiques. Il
reproche tous ces maux aux Américains en ajoutant qu'ils ont
installé la corruption et l'égoïsme. Ils ont
substitué la vie communautaire fondamentale de la société
iranienne à la vie privée.
Le premier novembre 1979, l'Ayatollah Khomeiny qualifie les
Etats-Unis d'Amérique de "grand Satan" par décret qui interdit
toute négociation directe avec ce pays. Il les considère comme,
le pays à la base de tous les malheurs du temps. Cette grande haine
contre ce pays va faire naitre des crises diplomatiques entre ces deux pays.
Le nationalisme iranien reste aussi fondé sur le
sentiment obsidional d'être une île encerclée de forces
hostiles, mais une dynamique nouvelle est également nourrie par le
103Mohammad Fazlollah ZAHEDI (1897-1963) est un
général et homme politique iranien. Il a occupé le poste
de Premier ministre d'Iran entre 1953 et 1955, après la chute de
Mohammad Mossadegh.
104La Révolution Blanche est une série
de réformes à grande portée lancée en 1963 par le
dernier Shah d'Iran, Mohammad Reza Pahlavi.
61
sentiment que ce pays a d'immenses potentialités et
qu'il est en mesure de jouer un rôle international de premier plan. Cette
conviction nationaliste nouvelle est alimentée par la différence
croissante entre le niveau d'éducation et d'information de la
population, notamment des nouvelles générations et la
médiocrité économique et l'isolement culturel de la grande
majorité des habitants, dans les provinces. Les revendications sont
dirigées contre un système gouvernemental contesté, mais
aussi contre une communauté internationale qui semble ne pas voir les
changements et ne regarde que les élites au pouvoir.
2- La révolution culturelle
Le nationalisme, la recherche d'une identité
après cette longue période de pouvoir impérial aux
couleurs culturelles occidentales, va occasionner d'importants bouleversements
en Iran. En 1979, la question du statut de la culture et de l'art en Iran a
participé de manière prépondérante à la
dynamique révolutionnaire, avec notamment les mots d'ordre d'une «
culture indépendante » et d'une « islamisation de la culture
»105. Le 21 mars 1980, l'Ayatollah Khomeiny avait
déclaré :
« Il faut briser les idoles intellectuelles qui
viennent d'ailleurs. Quand un pays veut envahir un autre pays, il commence par
la culture. [...] L'université islamique signifie qu'elle doit
être indépendante, dissociée de l'Ouest et de l'Est. Il
nous faut une nation,
une université et une culture indépendantes.
Nous n'avons pas peur d'une invasion militaire ni d'un blocus
économique, mais nous redoutons la dépendance culturelle
».106
Le mois suivant, le 18 avril 1980, la Révolution
culturelle était proclamée. L'État-major de la
Révolution culturelle (Setad-e enqelab-e farhangi) a alors
entamé une refonte des programmes et une purge des universités,
fermées de 1980 à 1983. Etant donné la difficulté
à se prononcer sur le contenu des nouveaux programmes d'enseignement
105 Agnès DEVICTOR, Politique du cinéma
iranien, CNRS Editions, Paris, 2004, p.8. 106Ruhollah KHOMEINY,
Jomhuri-e eslami, Tehran, 2 ordibehesht 1359/22 avril 1980, p.12.
62
artistique, la dernière faculté à
reprendre une activité a été celle des Beaux-arts, au bout
de deux ans et demi.
De nouveaux codes vestimentaires et moraux ont
été imposés mais les matières sont restées
dans l'ensemble les mêmes sauf le dessin sur la nudité.
Centrée sur l'université dans un premier temps, la
révolution culturelle a gagné dès 1982 une part importante
du secteur culturel et social, de sorte que l'Ayatollah Khomeiny a
pérennisé l'État-major de la Révolution culturelle
en créant en 1984 le Haut Conseil de la Révolution Culturelle
(Shora-ye `ali-eenqelab-e farhangi). Ce nouvel organe institutionnel
est devenu le chef d'orchestre de la politique culturelle au sein du
régime islamique (un texte de loi fondamental intitulé «
Base de la politique culturelle du pays » a été
publié par ce Haut Conseil en 1992)107 qui a joué un
rôle important ces dix dernières années jusqu'à
entrer en concurrence avec le Musée d'Art Contemporain de
Téhéran, lieu-phare de la vie culturelle officielle iranienne
depuis 1977.
Le changement le plus important concerne cependant la
population féminine. L'abolition du Code de la famille en 1979 et
l'obligation faite aux femmes d'adopter les principes islamistes, en
particulier le port du voile, ont justement attiré l'attention sur la
contradiction qui existe entre ces règles imposées. On observe
aussi la forte dynamique de socialisation marquée par la scolarisation
massive et la chute généralisée de la
fécondité même en zone rurale.
L'ordre nouveau et la « révolution culturelle
» : l'instauration de l'ordre et de la morale islamique a
entraîné une série de mesures restrictives et
répressives: fermeture de salles de spectacles, de cinémas, de
musées ; renvoi dans les réserves des musées des
collections et installations d'art moderne et contemporain (La
République islamique s'est retrouvée détenir une des plus
importantes collections d'art contemporain du Moyen-Orient, réunie
à l'initiative de banou Farah Dibah au Musée d'art contemporain
de Téhéran, construit entre 1970 et 1977) ; interdiction des
concerts de musique profane ;
107 Agnès DEVICTOR, Politique du cinéma
iranien, CNRS Editions, Paris, 2004, p 15-16 et 40.
63
interdiction du théâtre, à l'exception des
pièces classiques du tazieh 108 rappelant
annuellement le martyre d'Ali et de Hussein109 lors du mois de
muharram110; interdiction du chant féminin ;
interdiction des dessins et peinture; dans les films, interdiction de toute
apparition de femmes non voilées, et de tout contact physique entre
hommes et femmes; censure de toutes les créations artistiques et
diffusions et publications d'oeuvres littéraires, etc.
Dans la même perspective de « révolution
culturelle islamique », les universités ont été
fermées pour presque deux ans, le temps d'épurer le corps
enseignant, la communauté étudiante (très
politisée), et de réviser les programmes pour y introduire les
principes islamiques dans toutes les disciplines. Le changement fut radical et
effectif.
La promotion d'un art islamique national, dans lequel le
martyre révolutionnaire, en particulier sur le front contre l'Irak,
occupe une place centrale, donne naissance, par exemple, à de
gigantesques portraits muraux de martyrs entourés de colombes et des
tulipes de la résurrection; ou à des peintures sur pignons
stigmatisant les ennemis réels ou supposés de la
révolution et de la République islamique. Mais l'iconographie et
les thématiques du nouveau régime sont également lisibles
sur des supports de plus petite taille: timbres-poste ou billets de banque, par
exemple.
Dans ce contexte de censure, de limitation, d'oppression et de
répression, nombreux sont les artistes, les universitaires et
étudiants qui ont été contraints et forcés vers les
chemins de l'exil, pour mieux se promouvoir.
108 Le Ta'zieh désigne en Iran un
genre théâtral particulier, commémorant le martyre de
l'imam Husayn, qui est joué uniquement pendant le mois de muharram et
lors de l'Achoura.
109 La Passion d'al-Husayn est le récit du martyre en
680 à Kerbala d'Al-Hussein ibn Ali, second fils d'Ali ibn Abi Talib et
de Fatima, fille de Mahomet. Husayn fut décapité le 10 octobre
680 lors de la bataille de Kerbala, et sa tête fut rapportée au
calife omeyyade Yazîd Ier. La théologie chiite a
développé un martyrologe à partir de cet
événement qui est commémoré annuellement par une
fête le 10 mouharram. Cette fête est l'occasion de manifestations
de mortification, en particulier l'autoflagellation avec les mains, parfois
avec des chaînes ou des lames de rasoir.
110 Le mois de mouharram est le premier mois
du calendrier musulman et un des plus importants, notamment pour les chiites.
C'est l'un des quatre mois sacrés de l'islam avec rajab,
dhou al qi`da et dhou al-hijja et il n'est pas rare de lire
que c'est le plus sacré (haram voulant dire illicite).
64
Certains films d'acteurs iraniens, parfois
récompensés dans les principaux festivals internationaux, n'ont
pourtant jamais été reconnus et distribués en Iran, ou ont
été sévèrement censurés. D'autres films
peuvent pratiquement être qualifiés d'oeuvres de commande du
régime : là encore parfois non distribués en Iran
même, ils tendent à montrer une réalité
édulcorée, en particulier en ce qui concerne le statut et le sort
des iraniennes.
La politique culturelle, particulièrement contraignante
jusqu'en 1989, a été mise en oeuvre par le ministère de la
Culture et de l'Orientation islamique, dont le titulaire a été le
futur président réformateur Mohammad Khatami (de 1980-1986, puis
de 19891992).
3- Les tentatives de soviétisation de
l'économie et la politique iranienne.
Le revenu par habitant diminua très fortement (baisse
annuelle de 2,5 % de 1979 à 1992). L'économie connaissait une
véritable soviétisation avec nationalisation et création
de «fondations» L'Iran dérive vers l'orbite soviétique.
Alors que l'Ayatollah Ruhollah Khomeiny a souvent fustigé haut et fort
le "grand Satan", les américains, il n'a que rarement condamné
l'invasion soviétique en Afghanistan. Son soutien au maintien en
captivité des 53 otages Américains a conduit les pays occidentaux
à couper les ponts économiques avec l'Iran, poussant le pays
à dépendre davantage de ses échanges avec l'Union
soviétique.
Plusieurs observations autour de cette relation entre
Téhéran et Moscou se demandaient pourquoi Khomeiny rejette-t-il
les États-Unis d'Amérique, pour l'Union soviétique ?
Quelles valeurs pouvaient-ils avoir de cette relation ? Les Occidentaux
relativement impuissants déclarent que Khomeiny n'a pas toute sa
raison.
Du point de vue occidental, les États-Unis
d'Amérique constituent pour l'Iran une menace bien moindre que celle de
l'Union soviétique, qui partage une longue frontière commune avec
l'Iran et prône une doctrine athéiste incompatible avec l'islam et
avec de
65
nombreux piliers de la vie iranienne, comme la
propriété privée ou la famille considérée
comme l'unité sociale idéale.
Mais, pour l'Ayatollah, les Américains
représentent le plus grand danger. Il croit en effet qu'après
1953, le gouvernement des États-Unis d'Amérique contrôla le
Shah, son régime et le peuple iranien. Il croit également que
Washington rêve de le renverser et de reconquérir son pouvoir
perdu. L'échec de la mission de sauvetage des otages Américains
à Téhéran a confirmé ces craintes de Khomeiny.
Ainsi si l'on essaie de comprendre Khomeiny et ses partisans,
on pourra déduire que c'est la culture américaine, et non
soviétique, qui pervertit l'Iran et horrifie l'Ayatollah Khomeiny en
menaçant le mode de vie islamique. Lui et ses partisans aspirent avec
ferveur à un Iran exempt de toute domination étrangère.
Aussi longtemps qu'ils perçoivent l'Amérique comme la pire menace
pour leur pays, rien ne les empêchent de miser sur l'Union
soviétique. Bien que partageant avec les Américains le respect
envers la religion, la propriété privée et l'unité
familiale, le régime des Ayatollahs a préféré
s'allier aux marxistes contre l'Occident.
Leur aversion instinctive contre l'Occident les unit. Le
gouvernement soviétique, tout comme Khomeiny, craint l'influence des
charmes de la culture occidentale et tente par tous les moyens de la maintenir
à distance.
Avec une similitude peu troublante, l'islam prétend
remplacer la chrétienté au rang de révélation
divine ultime comme le communisme prétend succéder au capitalisme
en tant qu'étape suprême de l'évolution économique.
Ils répondent en lui opposant un dénigrement absolu. De
même que, quelques décennies plus tôt, ils menèrent
campagne contre l'impérialisme européen, l'Union
soviétique et les membres musulmans de l'organisation des pays
exportateurs de pétrole (OPEP) constituent la principale opposition
à la puissance politique et économique de l'Occident.
L'activisme islamique et le marxisme placent la
solidarité internationale avant le nationalisme, les besoins de la
communauté avant ceux de l'individu, l'égalitarisme avant
66
la liberté. Mais tous deux manipulent les masses
sociales, et c'est-là l'aspect crucial. Méprisant les objectifs
et les attentes du libéralisme, les activistes musulmans et marxistes
poursuivent des idées de société. Par exemple, l'Islam
interdit la perception d'intérêts sur les prêts et le
communisme dénonce le profit. Enfin, parce que l'Islam et le marxisme
traitent de tous les aspects de l'existence, leurs gouvernements penchent vers
le totalitarisme.
En fait, Khomeiny partage des éléments
idéologiques communs tant avec les États-Unis d'Amérique
qu'avec l'Union soviétique. Mais, en fervent Musulman, il croit en la
supériorité de son propre credo et reste méfiant.
Néanmoins, dans la pratique, les idéologies se
neutralisent et Khomeiny dirige les relations étrangères
iraniennes en fonction de ses espoirs et de ses craintes, et non sur la base
d'affinités théoriques.
Khomeiny a donc plus peur des États-Unis
d'Amérique que de l'Union soviétique: les Russes sont proches,
mais pour lui, l'Amérique se trouve déjà au coeur de
l'Iran. À son avis, c'est la culture américaine, et non celle des
Russes, qui a perverti le mode de vie des iraniens durant des décennies.
Et aussi longtemps que ces craintes restent prédominantes, il faut
s'attendre à ce que l'Ayatollah Khomeiny et ses partisans guident leur
pays plutôt vers l'Union soviétique, car son idéologie ne
leur semble pas pire que la nôtre, défendait le
soviétologue Américain Daniel Pipe111.
Trois semaines après le départ du Shah, la
presse soviétique vire soudain de bord et se met à soutenir le
mouvement révolutionnaire islamique. Le lendemain de l'insurrection du
11 février 1979, l'U.R.S.S. annonce avec une hâte tout à
fait inhabituelle qu'elle reconnaît le gouvernement provisoire de M.
Bazargan.
111Khomeiny, les
Soviétiques et les États-Unis. Pourquoi les ayatollahs craignent
l'Amérique, par Daniel Pipes NewYork Times 27 mai 1980 Version
originale anglaise: Khomeini, the Soviets and U.S. Adaptation
française: Alain Jean-Mairet.
Léonid Brejnev112 déclare en
début mars 1979: « Nous saluons le triomphe de cette
révolution qui a mis fin à un régime despotique et
d'oppression qui avait fait de l'Iran un objet d'exploitation et une base
d'appui de l'impérialisme étranger
»113.Désormais le ton est donné : la presse
du parti Toudeh. Ne manque pas une occasion de dénoncer les
"manoeuvres de l'impérialisme américain" en Iran et les
responsables soviétiques de déclarer qu'ils offrent leur soutien
aux gouvernants islamiques dans leur combat contre les Etats-Unis
d'Amérique. Mais en vain : les déclarations de Moscou ne sont que
rarement citées dans les grands organes d'information iraniens - si ce
n'est dans la presse du parti Toudeh (communiste prosoviétique) - et
l'appui qui leur est offert est accueilli par les nouvelles autorités de
Téhéran avec une franche hostilité.
Certes méfiant à l'endroit du nouveau
partenaire, l'Iran sait se souvenir de la vieille expérience de
l'hégémonisme russe, remontant à la fin du
dix-huitième siècle, lorsqu'il devint le point de mire des
rivalités russo-anglaises en Asie, Khomeiny préfère
relativement cet allié. Ils signent le 20 juin 1980avec l'U.R.S.S., un
protocole de coopération économique à Moscou. Et ce
après l'éloignement d'avec les Etats Unis d'Amérique et
les sanctions économiques décrétées par
l'Occident114.
112 Homme d'État soviétique (Kamenskoïe,
aujourd'hui Dniprodzerjynsk, 1906-Moscou 1982). L. Brejnev assume la direction
collégiale de l'État soviétique, aux côtés
d'Alekseï Kossyguine, chef du gouvernement, et de A. Mikoïan puis de
Nikolaï Podgornyï, président du Praesidium du Soviet
suprême depuis 1965. Toutefois son rôle personnel devient peu
à peu prépondérant : il préside à l'adoption
de la nouvelle Constitution de l'URSS (1977) ; fait maréchal en 1976, il
évince Podgornyï à la tête du Praesidium du Soviet
suprême en 1977. Il conclut avec le président Jimmy Carter le
traité SALT II signé à Vienne en 1979. Cependant, cette
politique de détente est compromise par l'intervention militaire
soviétique en Afghanistan en décembre 1979.
113Ahmad FAROUGHY « L'U.R.S.S. et la
révolution iranienne »,, Le Monde diplomatique, juillet
1980, p 2
67
114Idem
68
II- LES INSTITUTIONS POLITIQUES ET RELIGIEUSES A LA
SOLDE DE
LA REVOLUTION
Après la chute du Shah, le changement gagne tous les
autres secteurs de la société iranienne. Des modèles
d'institutions et d'organisations sont mis en place. Une nouvelle
République avec une peau toute neuve pourtourner définitivement
la page américaine.
1- L'organisation de la République Islamique
d'Iran
Il est difficile pour un observateur lambda de bien saisir et
cerner le fonctionnement du pouvoir iranien. La multiplicité des
acteurs, le dédoublement des institutions à tous les niveaux de
responsabilité et le rôle relatif du Président de la
République. Alors même que celui-ci est doté d'une
légitimité démocratique. Une description des institutions
iraniennes s'impose à nous et la place de chacun des acteurs de la
politique extérieure doit être précisée.
L'Iran, depuis l'instauration de la République
islamique, présente un système institutionnel très
singulier. L'Iran est le seul État officiellement chiite et un des rares
pays à être une théocratie ; c'est-à-dire que le
pouvoir, censé émaner de Dieu, réside dans les mains du
clergé. Cette théocratie découle du concept de
velayat-e faqih, théorisé dans les années 1960
par l'Ayatollah Rouhollah Khomeiny, premier « Guide de la
Révolution ». Le chef suprême de la religion a droit de veto
sur tout. Quand le chef religieux contrôle le pays, il choisit ce qui est
bon ou non en fonction de sa religion. Cependant, il existe aussi une dimension
représentative dans ce système, puisque la souveraineté
populaire est reconnue et qu'un processus électoral permet
l'élection du président de la République, des
députés et des membres de l'assemblée des experts. Ce
système électoral s'inspire des démocraties populaires,
mais le pluralisme politique n'existe pas ; les candidats appartiennent aux
diverses factions islamiques.
Le système politique de la République islamique
est basé sur la Constitution de 1979 à 1980 appelée
Qânun-e Asasi (« Loi Fondamentale »). Le
système comprend plusieurs corps gouvernants intimement reliés,
dont la plupart est nommée par le guide
69
(seul le Président, les membres du parlement, et les
membres de l'assemblée des experts sont élus au suffrage
universel). Alors voyons comment se fait l'exercice des pouvoirs
exécutif, législatif et judiciaire :
Le pouvoir exécutif est en Iran comme dans la plupart
des pays démocratiques, l'affaire du Président et des
ministres.
Le Guide de la révolution ? aussi appelé «
Guide suprême » ? est responsable de la supervision des «
politiques générales de la République islamique d'Iran
». Le guide de la révolution est élu par l'Assemblée
des experts pour une durée indéterminée. Le guide de la
révolution est commandant en chef des forces armées ; il
contrôle le renseignement militaire et les opérations liées
à la sécurité ; lui seul a le pouvoir de déclarer
la guerre et de proclamer la paix.
C'est aussi la seule personne des institutions d'État
obligatoirement religieuse. Il peut démettre le Président de la
République de ses fonctions, après que la cour suprême ait
reconnu ce dernier coupable de violation de ses devoirs constitutionnels, ou
après un vote du Parlement témoignant de son incapacité
sur la base du principe 89 de la constitution. L'Assemblée des experts
est responsable de la supervision du guide suprême dans le cadre de
l'exécution de ses devoirs légaux. Le guide suprême actuel
est l'Ayatollah Ali Hossein Khamenei115.
2- Etat bureaucratique et la Maison du Guide : Etat moderne
et institutions religieuses
Cette partie nous permet d'apprécier, le pouvoir du
président et celui du Guide de la révolution
Du pouvoir du Président de la République :
deuxième personnage de l'Etat derrière le Guide suprême qui
détient le véritable pouvoir en Iran, Le Président de la
République détient la plus haute fonction officielle du pays
après celle du Guide. Il est responsable de
115 L'Ayatollah Ali Hossein Khamenei est Guide suprême de
la république islamique depuis 1989, son pouvoir à une
durée illimitée.
70
l'application de la Constitution et assume la direction du
pouvoir exécutif, sauf dans les affaires relevant directement du
Guide116.
Le président de la République dispose
néanmoins de prérogatives qui lui donnent une certaine marge de
manoeuvre. En d'autres termes, le président de la République est
quant à lui responsable de «l'application de la Constitution et de
l'exécutif, à l'exception des affaires qui concernent directement
le Guide suprême». Le président doit aussi tenir compte du
Parlement qui vote la confiance à ses ministres et adopte le budget. Le
Président de la République doit être élu parmi les
dignitaires religieux et politiques remplissant les conditions suivantes :
Il devra être d'origine iranienne, et être de
nationalité iranienne, administrateur avisé, pourvu de bons
antécédents, digne de confiance, vertueux, pieux et
attaché aux fondements de la République Islamique d'Iran et
à la religion officielle du pays, c'est-à dire le
chiisme117. A sa prise de fonction il prête serment de
garantir la pérennité de la République Islamique d'Iran.
Il prête serment à l'Assemblée Consultative Islamique, lors
d'une séance qui a lieu en présence du Chef du pouvoir judiciaire
et des membres du Conseil des Gardiens, et signe l'acte de serment :
"Au Nom de Dieu Clément et
Miséricordieux
Moi, en tant que Président de la République,
en présence du Coran Généreux et devant la nation
iranienne, je prête serment au Dieu Tout-puissant d'être le gardien
de la religion officielle et du régime de la République Islamique
et de la Constitution de l'Etat ; d'user de toutes mes capacités et ma
compétence pour m'acquitter des responsabilités que j'assume ; et
de me vouer à servir le peuple et à la grandeur du pays, à
l'expansion de la religion et de la morale, au soutien du droit et à
l'extension de la justice, de m'abstenir de tout despotisme, et de
protéger la liberté, le respect des personnes et les droits que
la Constitution reconnaît à la Nation. De n'épargner
aucun
116Constitution iranienne de 1980, Cent
treizième Principe 117Idem, Cent quinzième Principe
71
effort dans la préservation des frontières
et l'indépendance politique, économique et culturelle du pays ;
et, en demandant aide à Dieu et en suivant le Prophète de l'Islam
et les Saints Imams. Que la paix soit avec eux, d'être le gardien du
pouvoir que la Nation m'a confié, en tant que dépôt
sacré, comme un dépositaire honnête et
dévoué, et de le transmettre au prochain élu de la
Nation".118
Pour terminer, nous disons que, la marge de manoeuvre du
Président est infiniment très faible, un pouvoir presque sans
pouvoir. L'essentiel du pouvoir est tenu en Iran par les mollahs et les
gardiens de la révolution. C'est le Guide suprême qui reste le
maître du jeu.
Du pouvoir du Guide : Selon la Constitution, le Guide
suprême «définit les grandes politiques du régime
de la République islamique et (...) les supervise». Il
détient notamment le pouvoir d'organiser un référendum, de
déclarer la guerre ou d'annoncer la paix. C'est également lui qui
nomme les membres du Conseil des gardiens de la Constitution, le chef de
l'autorité judiciaire et le patron de la radio et la
télévision d'Etat. Ses pouvoirs en matière militaire sont
particulièrement importants.
Chef des armées, il décrète la
mobilisation générale, nomme les principaux responsables
militaires -notamment des Gardiens de la révolution, l'armée
d'élite du pays et du Bassidj (milice islamique)- ainsi que de la
police. Il est aussi chargé de «régler tout
problème insoluble du régime». Il peut aussi
«démettre le président en tenant compte des
intérêts du pays après un avis de la Cour suprême ou
d'un vote de défiance du Parlement».
Le Guide s'appuie également sur le Conseil
suprême de sécurité nationale chargé des questions
stratégiques du pays. Il est officiellement présidé par le
Président de la République, mais le véritable responsable
est son "secrétaire", choisi parmi ses deux représentants. Le
poste est actuellement occupé par Saïd Jalili, candidat malheureux
face à Hassan Rohani, élu dernièrement à la
Présidence. Ce conseil rassemble les principaux
118Constitution
iranienne 1980.Cent vingt et unième Principe.
72
ministres --Défense, Renseignement, Intérieur et
Affaires étrangères-- ainsi que le Président du Parlement,
le chef du pouvoir judiciaire et les commandants des forces armées. Le
Guide peut déléguer certains de ses attributions et pouvoirs
à une autre personne 119
3- Les structures islamiques d'encadrement institutionnel
en Iran
L'armée et le corps des Gardiens de la
révolution : l'armée de la République Islamique d'Iran est
chargée de préserver l'indépendance du pays,
l'intégrité territoriale et la forme républicaine et
islamique du pays. L'armée de la République Islamique d'Iran doit
être une armée islamique, qui est une armée
idéologique et populaire. Elle doit prendre à son service des
personnes dignes ayant foi dans les objectifs de la Révolution islamique
et dévouées dans la voie d'une réalisation. Aucun
ressortissant étranger n'est admis au sein de l'armée et des
forces de l'ordre du pays. L'installation de toute base militaire
étrangère dans le pays, même à des fins pacifiques
est purement et simplement interdite120.
Quant aux corps des gardiens de la Révolution Islamique
qui a été constitué dans les premiers jours de la victoire
de cette révolution, il est maintenu dans la poursuite de son rôle
pour la sauvegarde de la révolution et de ses acquis. La limite des
fonctions et l'étendue de la responsabilité de ce corps sont
déterminées par la loi, en relation avec les fonctions et
l'étendue de la responsabilité des forces armées, en
insistant sur la coopération et l'harmonisation fraternelle entre
elles.
Le Conseil des gardiens de la Constitution est
composé de 12 membres désignés pour six ans, 6 religieux
(clercs) nommés par le Guide et 6 juristes élus par le
Majlis121sur
119 La constitution de la république islamique d'Iran,
http://www.jurispolis.com/dt/mat/dr_ir_constit1979/dt_ir_constit1979_chap08.htm#_Toc96573856
120 Constitution iranienne 1980, session deuxième.
121Majlis : LeMajles était la chambre
basse de la législature iranienne de 1906 à 1979, la chambre
haute étant le Sénat.Après la révolution islamique,
quand la législature iranienne devient monocaméral,
73
proposition du pouvoir judiciaire (dépendant du guide),
sa principale fonction est de veiller à la compatibilité des lois
à la Constitution et à l'islam. Ce dernier aspect -
compatibilité avec l'Islam- est exclusivement assuré par les 6
membres religieux, l'autre étant exercé par les 12 membres
collégialement. Toutes les lois votées par l'Assemblée
doivent obtenir l'approbation du Conseil des gardiens. Toutefois, si ce dernier
conclut à une incompatibilité (avec l'islam ou avec la
Constitution), il ne peut, de lui-même, procéder à une
annulation : il revient à une autre instance, le Conseil de discernement
de l'intérêt supérieur du Régime, d'arbitrer le
différend.
Le Conseil de discernement de l'intérêt
supérieur du régime : Cette institution a été
créée en 1988, par décret de l'imam Khomeiny, pour
arbitrer les litiges apparus entre le Majlis et le Conseil des gardiens. Il est
composé de membres de droit et de membres nommés par le Guide. Il
comprend notamment les six membres religieux du Conseil des gardiens, les chefs
des pouvoirs législatif, judiciaire et exécutif (le
Président de la République), du ministre concerné par la
question à l'ordre du jour auxquels s'ajoute une dizaine d'autres
personnalités. Sa fonction originelle s'est cependant peu à peu
élargie et le Conseil de discernement, en cas de circonstances
exceptionnelles, s'est reconnu le droit d'ajouter des clauses à une
législation contestée entre le Conseil des gardiens et le
Majlis.
Ainsi dispose-t-il également, depuis la période
de guerre Iran-Irak, du droit d'édicter « des solutions pour les
difficultés insurmontables du régime ». Cette
disposition donne ainsi une sorte de compétence législative
extraordinaire à un organe qui n'en est pas légitimement ou
légalement investi et qui, de par sa procédure de nomination,
reflète de façon prééminente, la faction
idéologique liée au Guide de la Révolution-Chef de
l'État, au détriment, dans la configuration politique actuelle,
de celle représentée par le Président de la
République ou par la nouvelle majorité parlementaire.
Et enfin l'Assemblée des experts ; Elle se compose de
près de 80 membres élus pour 8 ans au suffrage universel direct,
et a pour rôle d'élire ou révoquer le Guide de la
74
Révolution. L'élection de cette Assemblée
rencontre généralement un fort taux d'abstention, sans
comparaison avec les autres consultations électorale.
4- Les universités modernes et l'enseignement
religieux.
Le roi héritier Mohammad Reza Shah a tenté
d'élargir l'accès à l'instruction et encourage notamment
le développement de l'enseignement supérieur. Il entreprend la
création de nombreuses universités à partir des
années 1950 et crée le ministère des Sciences et de
l'Enseignement Supérieur en 1968, si bien que l'Iran compte dix-neuf
universités nationales en 1978. L'enseignement est aussi
encouragé, à un autre niveau, par la mise en place d'efficaces
politiques d'alphabétisation et d'accès à l'instruction
pour les femmes
Au lendemain de la Révolution islamique de 1979, le
système éducatif iranien est ouvertement critiqué par le
nouveau gouvernement et de nombreux conseils d'experts sont créés
pour agir sur ce terrain prioritaire. Khomeiny initie une « islamisation
» de l'éducation, mais il n'aspire pas pour autant à un
retour vers les établissements religieux traditionnels. Il a l'ambition
d'une école à la fois moderne et religieuse, non pervertie par la
culture « occidentale » et « coloniale »122.
Face à une école dite inspirée des modèles
étrangers, il fait de l'islam la source originelle et légitime de
la réflexion sur l'éducation. L'islam est présenté
comme la voie de la résistance à la « colonisation »
des esprits causée par la politique des rois pahlavis. Les premiers
changements passent par la révision des manuels, l'épuration du
personnel scolaire, l'abolition de la mixité, la mise en place de
nouveaux codes vestimentaires selon les préceptes islamiques (port du
voile pour les filles), ou encore l'imposition de pratiques religieuses telles
que les prières à midi ou les chants révolutionnaires et
religieux dans la journée.
Le pouvoir lance ensuite une « révolution
culturelle » placée sous la responsabilité du Quartier
Général (QG) de la révolution culturelle
créé par Khomeiny en juin 1980. Celle-ci touche en particulier
les universités, qui sont fermées. Huit mille professeurs,
122 Discours de Khomeiny en 1983, vol. 12, p.177 in PAIVANDI, S.,
Islam et éducation en Iran. Echec de l'islamisation de
l'école en Iran. Paris : L'Harmattan, 2006, p. 72.
75
soit la moitié des effectifs du personnel universitaire
en activité à l'époque, sont démis de leurs
fonctions et de nouveaux centres de formation sont créés pour
former les nouveaux professeurs d'université aux ordres du nouveau
système. De nouveaux responsables sont nommés à la
tête des universités qui sont rouvertes à la rentrée
1981.
Les orientations majeures du système éducatif de
la République islamique sont énoncées dans la loi de 1987
qui décrit le projet de la formation du nouvel homme musulman. «
Elle explicite la place de l'homme dans ce monde, le sens de son existence et
de son action [...] le rôle de l'école dans la formation
religieuse et la socialisation des élèves ».123
Dans son premier article, cette loi revendique une instruction qui repose
ouvertement sur le Coran et les textes sacrés de l'islam. Dans l'article
suivant, elle envisage aussi le rôle politique et de socialisation de
l'école. Puis dans l'article 4, elle affirme la primauté de la
purification sur l'enseignement dans les écoles de la République
islamique.
Image 5 :LES INSTITUTIONS ELUES ET NON ELUES DE
LA REPUBLIQUE ISLAMIQUE D'IRAN
Source : Schéma_gvt_iran.pn
123 PAIVANDI S.: Islam et éducation en Iran. Echec de
l'islamisation de l'école en Iran. Paris, Le Harmattan, 2006.
76
En guise de conclusion partielle à cette
première partie on retiendra qu'en Avril 1979 le pouvoir du Shah prend
fin au profil de celui d'Ayatollah Khomeiny, symbole de l'opposition au
régime du Shah. Il représente la puissante caste des religieux
chiistes mais il n'est pas l'unique meneur du peuple qui défile dans les
rues du Téhéran. Le puissant parti communiste Tudeh et la
mouvance de la gauche iranienne sont des forces avec lesquelles il va devoir
compter.
Le long règne du Shah largement conteste par la
population iranienne parte avec toute ces accointances, avec les Etats Unie
d'Amérique et laisse place à une république Islamique. Le
nouveau chef d'Iran se donne tous les moyens institutionnels et
organisationnels pour tourner la page d'Iran occidental.
Les hommes et les femmes, les jeunes et les enfants sont tous
formés à cet effet. La politique intérieur
étrangère de la nouvelle république porte les emprunts de
cette volonté nouvelle des autorités. C'est donc l'amorce d'une
longue série d'incompréhension de belligérance entre
l'Iran et son ancien partenaire d'une part et d'autre part entre la
république Islamique et ces voisins du Golfe. La rupture est donc
consommée, la deuxième partie de notre travail de recherche nous
permettra d'élucider les étapes de cette rupture.
PARTIE II
LES ETAPES DE LA RUPTURE : LA
PRISE DES OTAGES AMERICAINS A LA
CRISE SUR LE NUCLEAIRE IRANIEN
(1980-2002)
|
78
Dans cette partie il sera question de la mise en
évidence des grandes manifestations de la rupture entre les Etats Unis
d'Amérique et la République Islamique d'Iran. En effet,
après la chute du Shah d'Iran et l'installation des institutions du
pouvoir révolutionnaire de l'Ayatollah Khomeiny, nous allons aborder
deux faits, qui pour notre part constituent des éléments
essentiels ayant créé une distance considérable entre
partenaires d'hier.
La crise des otages américains à
Téhéran est la première manifestation de la rupture. En
effet le 4 novembre 1979, des militants révolutionnaires iraniens,
essentiellement des étudiants envahissent l'Ambassade des
États-Unis d'Amérique à Téhéran avec le
soutien des autorités de la révolution. Cinquante-deux (52)
Américains sont alors retenus en otage pendant 444 jours, ce qui
révolta terriblement Washington. Le 7 avril 1980 les États-Unis
d'Amérique rompent toute relation diplomatique avec l'Iran. Et s'en ai
suivi diverses crises diplomatiques directes ou indirectes avec Washington.
Ainsi depuis la découverte en 2002, du site
d'enrichissement nucléaire de Natanz et Arak avec la complicité
d'un groupe d'opposants en exil, le Conseil national de la résistance
iranienne qui dénonçait l'existence de sites nucléaires
clandestins d'enrichissement de l'uranium.
La crise diplomatique entre Téhéran et
Washington prend ainsi une toute autre dimension. La possession par l'Iran
d'une telle infrastructure militaire serait aux yeux de l'Occident un revers
total. Pourtant, les iraniens rassurent de leur bonne intention d'enrichir leur
uranium qu'à des fins purement civiles.
Comportant trois (3) chapitres, cette partie met en relief
dans un premier temps la crise des otages américains à
Téhéran (Chapitre I), il s'agit d'évoquer
les origines et manifestations de cette crise ainsi que les
conséquences. Ensuite la menace des intérêts
américains dans le Golfe (Chapitre II). Nous y verrons
comment Khomeiny compte « sauver » le monde musulman. La guerre entre
Iran et l'Irak, une guerre de positionnement avec une mobilisation des
Américains et des pays Sunnites au côté
79
Saddam Hussein. Et enfin dans un dernier chapitre
évoquer la question épineuse du nucléaire
(Chapitre III), et faire ressortir les grands enjeux
géostratégie du nucléaire iranien.
80
Chapitre I : LA CRISE DES OTAGE SAMERICAINS
1979-1981
La crise des otages Américains à
Téhéran a été un tournant très
décisif dans les rapports entre les Etats Unis d'Amérique et
l'Iran. L'une de ses conséquences majeures fut la rupture diplomatique
entre les deux pays. Dans ce chapitre il sera question d'abord de montrer les
origines et manifestions de la prise des otages et ensuite ses
conséquences tant pour Washington que pour Téhéran.
I- DE LA PRISE DES OTAGES AMERICAINS A LEUR
LIBERATION
La crise des otages Américains en Iran correspond
à un épisode de tension internationale entre l'Iran et les
États-Unis d'Amérique survenue du 4 novembre1979 au 20
janvier1981. Pendant 444 jours, cinquante-deux diplomates et civils
Américains ont été retenus en otage par des
étudiants iraniens dans l'Ambassade des États-Unis
d'Amérique à Téhéran, d'analyser les causes, les
enjeux et le dénouement dans cette partie.
1- Les causes de la prise des otages et le rôle des
étudiants
La dignité des Iraniens et de leur Etat devrait
s'affirmer à travers de grandes actions qui doivent montrer aux
alliés d'hier surtout aux Américains leur détermination
à tourner réellement la page du Shah et de l'Iran des
occidentaux.
Josette Alia et Pierre Blanchet, explique «Pourquoi
Khomeiny défie Carter» évoquent cette crise en ces termes :
«...Entre le souverain traqué et le peuple prosterné sur
le trottoir, il y a une épaisseur de haine que les États-Unis,
semble-t-il, ont complètement sous-estimée. «Le chah ? Il a
été pour nous pire que Hitler», dit Abol Hassan BaniSadr,
membre du Conseil de la Révolution islamique. Alors, fallait-il
l'accueillir et le soigner ? Les Américains l'ont fait sans
hésiter, en un geste humanitaire que la conscience occidentale tout
entière approuve. Mais, en Iran, il en va autrement.
États-Unis-chah, chah-États-Unis : la conjonction frappe
l'imagination populaire iranienne. Pendant des décennies, les
Américains ont, dans l'ombre, conforté le pouvoir et tiré
les ficelles de la tyrannie Pahlavi. Pendant des décennies, le petit
peuple d'Iran a confondu dans la même
81
haine le chah, «Satan», et son suppôt,
l'Amérique, symbole d'un Occident aujourd'hui détesté,
rejeté. Alors... Alors, le dimanche 4 novembre, l'irréparable se
produit. »124.
Cette envie d'en découdre avec les Américains
fait naître une haine très poussée dans le rang du nouveau
régime envers leur allié d'hier. Ainsi, des mouvements populaires
s'organisent dans le pays sous l'impulsion de l'Ayatollah qui appelle à
la désobéissance des Américains. Toutes ces manifestations
entrainent la prise des otages de l'Ambassade des Etats-Unis d'Amérique
à Téhéran, ouvrant ainsi officiellement la
belligérance entre alliés d'hier.
Alors que les Etats-Unis d'Amérique accueillent depuis
le 22 octobre le Shah, exilé au Mexique après la
révolution islamique de janvier 1979, 400 étudiants s'attaquent
à l'Ambassade américaine de Téhéran. Retenus dans
un premier temps par les Marines, ils investissent rapidement les lieux et
prennent 63 personnes en otage ainsi que des membres de l'administration. Leurs
revendications sont claires, que la libération des otages se fasse en
échange de la livraison du Shah pour qu'il soit jugé en Iran, et
qu'il soit puni conformément à la loi islamique. Mais les
Etats-Unis d'Amérique ne souhaitent ni livrer leur ancien allié
qu'ils reçoivent officiellement pour raisons médicales, ni
céder devant Khomeiny, soupçonné d'être responsable
de cette opération. Jimmy Carter pour riposter décide de faire le
choix des rétorsions économiques et suspend notamment les
importations de pétrole en provenance d'Iran. Mais en vain, alors que
seulement treize otages sont libérés dans les premières
semaines, cinquante-deux devront attendre 444 jours et l'élection de
Reagan pour retrouver la liberté.
2- Les enjeux iraniens de la prise des otages
En Iran, l'enthousiasme révolutionnaire qui
était retombé semble ravivé par cette prise d'otage. En
effet, certains dirigeants de la révolution n'étaient pas pour
cette prise des otages. C'est d'ailleurs ce qui explique le professeur
d'histoire américaine moderne, David Farber. Pour lui, pendant cette
période postrévolutionnaire, l'Iran se trouve dans
124Josette ALIA et Pierre BLANCHET « Pourquoi
Khomeiny défie Carter » Le Nouvel Observateur, 12 novembre
1979, p. 56.
« un état de chaos révolutionnaire ou le
pouvoir n'était pas encore sécurisé125. C'est
donc autour de l'affaire des otages que s'organise la lutte entre radicaux et
modérés, religieux et laïcs, donc entre le conseil de la
Révolution126et le gouvernement. Alors que les
modérés, tels que le Premier ministre Medhi Bazargan et le
ministre des Affaires étrangères Ibrahim Yazdi, étaient
opposés à la prise d'otage, ils se résignent face à
la pression des radicaux. Ainsi, le radical Ayatollah Behesti, membre du
conseil de la Révolution, met en évidence la
nécessité d'épurer l'administration des
modérés.
L'un des arguments principaux de la prise étant les
documents découverts à l'Ambassade américaine justifiant
des liens entre des iraniens modérés et les Etats-Unis
d'Amérique. La lutte feutrée entre le gouvernement
modéré de Téhéran et le conseil de la
révolution à Qom prend fin avec la résolution de la crise.
Le pouvoir du clergé radical, dorénavant sans partage,
débute le 21 juin 1981 avec la destitution du président
modéré de la République islamique, BaniSadr.
En effet, la prise d'otage permet de mettre en évidence
que le pouvoir iranien provient de Dieu et non du gouvernement
américain. La forte critique de l'impérialisme occidental sert de
pilier unificateur et s'accentue lorsqu'un plan américain visant
à la déstabilisation de l'Iran est découvert dans les
documents trouvés dans l'Ambassade.
Le guide est sans détour sur la question de la prise
des otages, pour l'Ayatollah Khomeiny: « le grand Satan, c'est
l'Amérique... Le centre que nos jeunes ont pris était un centre
d'espionnage et de complots127 ». En effet, selon Bheza
Nabavi, responsable Iranien lors des négociations qui mettent fin
à la crise, « la prise d'otages du nid d'espions avait comme
signification symbolique de démontrer la faiblesse des Etats-Unis et de
dévoiler au monde entier leur vulnérabilité en envoyant
des espions à la place des
125Iran was in a state of revolutionary chaos in which
power was a prize not yet secured by anyone » in David Farber, The
Iran hostage crisis and America's first encounter with radical Islam : taken
Hostage, p141
126Le conseil de la Révolution ou conseil des
gardiens de la Révolution se trouve sous la direction du guide
suprême. Il détermine la direction politique du pays en consacrant
la prédominance du religieux sur le politique.
82
127Journal iranien Kayhan, 6 novembre 1979
83
diplomates128». Cette crise permet
ainsi à l'Iran de faire plier les Etats-Unis d'Amérique et de
leur « faire payer » leur soutien au régime du Shah. Elle a
également pour conséquence d'isoler diplomatiquement le pays.
Cette prise d'otages des Américains dans leur «
nid d'espions », comme disaient les khomeynistes ; une Ambassade
protégée telle une véritable forteresse dans un pays
ennemi, apparut comme un défi spectaculaire. La crise, qui se prolongea
pendant l'année 1980, vit des grandes manifestations
anti-américaines à travers l'Iran. Par conséquent les
groupes démocratiques, progressistes, de gauche, refirent acte
d'allégeance à Khomeiny, sous le prétexte que la crise
était l'expression de l'anti-impérialisme.
Pour leur part, les Etats-Unis d'Amérique comprennent
tout d'abord difficilement l'insistance iranienne à mettre en
évidence des actions passées et selon eux dénuées
de pertinence. De plus, le président Carter ne souhaitait pas que la
crise mette en lumière le soutien de la Maison blanche au régime
du Shah d'Iran. C'est ainsi que « l'incompréhension est totale
entre le peuple américain agressé et le peuple iranien
persuadé de la justesse de sa cause 129» analyse
Nouchine Yavari-d'Hellencourt. Ce conflit politique est en outre vécu
comme une humiliation, les Américains ayant dût se soumettre aux
conditions iraniennes. La crise a également pour conséquence la
rupture des relations diplomatiques et la fermeture de l'Ambassade
américaine en Iran. Enfin, sur le plan énergétique, les
importations de pétrole en provenance d'Iran vers les Etats unis
d'Amérique cessent.
128Pierre SALINGER, Otages, les
négociations secrètes de Téhéran, Paris,
Buchet/Chastel, 1981, p125.
129Nouchine YAVARI-D'HELLENCOURT, Les otages
américains à Téhéran, Paris, La Documentation
Française, 1992, p.24.
84
3- Des négociations à la libération
des otages.
La crise prit d'autres tournures non prévues par les
deux camps. Les deux pays belligérants, ont porté leur choix sur
l'Algérie pour la médiation de la crise. L'intermédiaire
qui est Alger sait qu'il doit être plus qu'un simple canal de
communication entre les deux pays en conflit. Il se doit de préparer la
voie à une solution qui soit susceptible d'être acceptée
par les deux antagonistes en circonscrivant le champ de la négociation
et en réduisant les différences entre les positions des uns et
des autres.
Pour ce faire, le gouvernement algérien met en place
une « cellule volante » d'experts de haut rang, qui vont, à
partir d'Alger, assurer la communication entre le gouvernement américain
et le gouvernement iranien, en se rendant selon les besoins, tantôt
à Washington, tantôt à Téhéran.
Le choix des négociateurs est en l'occurrence
très important. Les médiateurs doivent remplir des conditions
précises : se situer à un niveau élevé de leur
hiérarchie respective (qu'ils soient investis d'une autorité
suffisante aux yeux de leurs futurs interlocuteurs), avoir une grande
expérience en négociation internationale pour faire face, de
manière immédiate, aux situations imprévues et
posséder des connaissances techniques en divers domaines pour trouver
des solutions adaptées à des problèmes de nature
différente.
Le choix s'est donc porté sur trois
personnalités : Abdelkrim Gheraïeb, Ambassadeur d'Algérie
à Téhéran, Redha Malek, Ambassadeur d'Algérie aux
Etats-Unis et Seghi Mostefaï, directeur de la Banque d'Algérie,
avec pour responsable (négociateur en chef) le ministre des Affaires
Etrangère, Mohamed-SeddikBenyahia.
Les trois médiateurs commencent leur travail. D'abord,
faire l'inventaire des points d'accord et des points de désaccord pour
délimiter de façon réduite le champ de la
négociation. Puis, examiner les propositions des deux parties et
éliminer si besoin les éléments qui poseraient
problème d'un côté ou de l'autre. Enfin, trouver les moyens
d'une relance lorsque la négociation butte face à des obstacles
qui semblent
85
insurmontables. Et justement, les négociations bloquent
sur un point précis, lié au « chiffrage » financier des
avoirs iraniens saisis par les Etats Unis d'Amérique. En effet, en
septembre 1980, l'Ayatollah Khomeiny pose quatre conditions à la
libération des otages : le retour de la fortune du Shah, le dégel
des avoirs iraniens aux Etats-Unis d'Amérique, l'annulation des demandes
de dommages à l'Iran par les Américains et leur engagement
à la non-ingérence en Iran.
Le 20 novembre, l'acceptation de principe des quatre
conditions est confirmée comme base de résolution de la crise. En
échange de la libération des otages, l'Iran annonce dans le
même élan que les Etats-Unis d'Amérique doivent
déposer en Algérie l'équivalent de 24 milliards de dollars
en espèces et en or, représentant l'estimation de la fortune du
Shah et des avoirs gelés. Le secrétaire d'Etat Edmund Muskie
estime que cette exigence est « déraisonnable », Washington
avertissant alors l'Iran que les Etats-Unis d'Amérique ne modifient pas
leur position fondamentale sur les conditions de libération des
otages.130
Alors que la réaction immédiate de Washington
est très réservée, le Premier ministre iranien Mohammad
Ali Radjai, en poste depuis août 1980, déclare lors d'une
conférence de presse le 18 octobre que la décision de
libérer les otages n'est « plus très lointaine »
131 . En effet, l'embargo américain commence à peser sur
le pays et les populations iraniennes en souffraient déjà. Pour
sa part, le président Carter se dit prêt le 20 octobre à
lever les sanctions contre l'Iran si les otages sont libérés.
Les médiateurs algériens proposent alors
l'idée d'une déclaration algérienne qui exposerait les
« obligations indépendantes » des Etats-Unis d'Amérique
et de l'Iran et qui se substituerait à la forme classique de l'accord
bilatéral. L'Iran accepte et quelques jours plus tard revient à
de meilleurs sentiments pour ce qui est du « chiffrage » de ses
avoirs.
130 En effet l'avènement des terroristes, les Etats Unis
ont décidé de ne pas payer un moindre à des agresseurs.
131Clément Guillemot « Crise des otages
américains en Iran 4 novembre 1979-20 janvier 1981 », les
clés du Moyen Orient, publié le 13/08/2012,
http://www.lesclesdumoyenorient.com/Crise-des-otages-americains-en.html
consulté le 20 Novembre 2014
86
Cependant le 10 janvier 1981, les Etats-Unis d'Amérique
informent l'Iran que, dans un délai de quelques jours suivant la
libération des otages, l'Iran pourra récupérer 70 % des
milliards de dollars gelés dans les banques américaines. Le 16
janvier 1981, parvenus à un accord général sur les
conditions de la libération, les deux pays rédigent le protocole
d'un accord définitif officiellement approuvé le 19 janvier 1981
par la déclaration d'Alger. Cette déclaration prévoit cinq
points : la libération des 52 otages ; le déblocage par les
Etats-Unis d'Amérique des avoirs Iraniens gelés 132;
l'abandon de toutes les plaintes résultant de la capture des otages et
du gel des avoirs par l'Iran ; le remboursement des emprunts iraniens à
des prêteurs américains.
L'Algérie règle aussi les modalités du
transport des otages américains et le 18 janvier sont signés les
Accords d'Alger. Le 20 janvier 1981, la libération des otages a eu lieu,
après 444 jours de détention et quelques dizaines de minutes
après le premier discours présidentiel du républicain
Ronald Reagan élu en remplacement du démocrate Jimmy Carter,
quelques mois auparavant. Les otages sont libérés une demi-heure
après que Ronald Reagan soit officiellement devenu président des
Etats-Unis d'Amérique.
Le président Reagan assure alors que les Etats-Unis
affirment le droit du peuple iranien à décider de son avenir
politique et assure du désir américain de voir s'établir
des relations normales entre les deux Etats, basées sur le respect
mutuel, l'égalité et les principes du droit international. Les
otages rejoignent leur pays le 27 janvier 1981 après un tour à la
base aérienne de Wiesbaden en Allemagne.
132La déclaration d'Alger prévoit :
« Quand la banque centrale d'Algérie aura certifié qu'une
somme au moins égale à 7,955 milliards de dollars aura
été placée sur le compte de garantie par les Etats-Unis,
l'Iran assurera immédiatement le départ des 52 ressortissants
américains détenus en Iran ».
87
Le monde a appris plus tard le rôle secret que les
Canadiens avaient joué dans cette crise des otages133. Cette
crise directe entre l'Iran et les Etats Unis d' Amérique ne va pas sans
conséquences.
II-D'IMPORTANTE REPERCUTION POUR LES BELIGERANTS
Plus d'une année de détention soit exactement
444 jours, voici le temps que les citoyens américains ont passé
en fermé dans leur ambassade à Téhéran, ce qui
reste de même spectaculaire. Alors que pour les étudiants,
à l'origine, qui considéraient cette étape comme une
partie de jeu, allait plutôt se transformer en une crise réelle de
quatre cent quarante-quatre jours avec des conséquences énormes
de part et d'autres.
1- L'hégémonie américaine
écornée
La crise des otages a humilié, discrédité
les Etats-Unis d'Amérique au niveau national et international. Cela a
mis en mal la puissance Américaine tous les pays en relations avec les
Etats-Unis d'Amérique considérés comme étant la
première puissance mondiale. Ils ont perdu toute confiance de leurs
alliés au Moyen-Orient.
Jean-François Revel, met en relief le ridicule qu'a
subit Washington, «...Susceptible d'être plus
ou moins tragique sur le plan humanitaire, le dénouement de la prise
d'otages à l'ambassade américaine de Téhéran ne
pouvait, dès le départ, quoi qu'il arrivât, être pour
Washington qu'une débâcle politique. Pire : le signe
révélateur d'une déchéance plus prononcée
encore qu'on ne l'imaginait. Car il ne s'agit pas d'un simple accident, d'une
de ces malchances auxquelles les États, même les plus forts, ne
peuvent totalement échapper. Cette lugubre et ridicule affaire est bien
plutôt la démonstration spectaculaire, sur un cas limite, presque
sur une hypothèse d'école, du recul
généralisé de l'influence américaine dans le monde,
et même de la perte par l'Amérique de sa stature de
première
133 Après son implication dans la prise d'otage, l Dans
la confusion de la prise d'otage, six Américains ont tout simplement
quitté l'ambassade à pied. Ils se sont cachés pendant
quatre jours avant de trouver refuge à l'ambassade du Canada. La
situation à Téhéran était très tendue.
L'ambassadeur du Canada, Ken Taylor, savait que si les Iraniens apprenaient
qu'il cachait des Américains, ils considéreraient le Canada comme
un ennemi et son ambassade serait attaquée. Il a communiqué avec
les autorités à Ottawa pour leur exposer la situation. Ottawa a
approuvé la décision de Taylor de donner refuge aux
Américains et a immédiatement élaboré un plan pour
les évacuer. Il a fallu obtenir de faux passeports canadiens et attendre
79 jours car les Américains se faisaient passer pour des visiteurs.
88
grande puissance. Réduite à choisir, ou
à ne pas choisir, entre la prudence d'une négociation incertaine
et le quitte ou double d'un commando aventureux ? Dans les deux cas,
l'Amérique sortait de son rôle de puissance
planétaire.»134
Au plan interne, il faut souligner que cette crise a agi sur
l'avenir politique du président Carter135. Il a perdu toute
popularité aux yeux de ses compatriotes. Cela lui a valu son
échec aux élections de novembre 1980 au profit Ronald Reagan. Il
a rencontré des difficultés au sein même de sa propre
formation politique, divergences liées à sa politique
intérieure qu'extérieure. Venant compliquer les choses, une
opération militaire menée en avril 1980 pour sauver les otages se
termina par un fiasco. Sur les huit hélicoptères envoyés,
trois tombèrent en panne, et la mission fut annulée. Mais, alors
que les avions de transport évacuaient la zone, l'un d'entre eux entra
en collision avec l'un des hélicoptères, causant la mort de huit
soldats américains dans le désert iranien136.
Tous les jours, de par les medias, les Américains
suivaient le sort de leurs diplomates. Cette crise des otages prit rapidement
la dimension d'un traumatisme national qui facilita la victoire de Ronald
Reagan sur M. Carter à l'élection présidentielle de
novembre 1980. Qu'un pays en développement du Proche-Orient inflige aux
Etats-Unis d'Amérique une telle humiliation était chose rare. Une
indignation réciproque monta alors. Le conflit géopolitique, qui
s'annonçait déjà pendant les dernières
années du règne du Shah, acquit une forte dimension
émotionnelle.
2- L'isolement de l'Iran
En réponse à la prise d'otages, le
Président des États-Unis d'Amérique Jimmy Carter applique
immédiatement des pressions d'ordre économique et diplomatique
à l'égard de l'Iran : les importations de pétrole iranien
sont stoppées le 12 novembre, un grand nombre de ressortissants iraniens
sont expulsés des États-Unis d'Amérique et
134 Jean-François REVEL, «Hors la loi
?» publié le 24 novembre 1979 sur
http://perspective.usherbrooke.ca/bilan/servlet/BMEve?codeEve=128,
consulté le 25 Septembre 2015
135 Il se disait que la prise des 'otage est la marque de son
incompétence et son laxisme quant à la gestion des affaires
d'Etat. Les arguments de Ronald Reagan ont valu sur lui. Il a donc
échoué à l'élection présidentielle.
136
http://www.monde-diplomatique.fr/2015/03/PARSI/52708
89
d'importants fonds iraniens se trouvant dans les banques
américaines sont gelés le 14 novembre.
Le 15 novembre, moins de dix jours après la
démission du premier ministre Mehdi Bazargan, qui s'était plaint
des « comités Khomeiny », Khomeiny fait adopter par
l'Assemblée des experts le texte de la nouvelle Constitution de l'Iran.
En janvier 1980, les partisans modérés de l'Ayatollah Chariat
Madari sont arrêtés et fusillés : Khomeiny détient
dorénavant tous les pouvoirs.
Le régime de Khomeiny partageait l'ambition du Shah de
faire du pays un leader régional. Mais il voulait parvenir à cet
objectif en se servant de l'islam politique pour s'assurer un soutien populaire
dans le monde musulman. S'opposant à une alliance avec les Etats-Unis
d'Amérique ou l'Israël, Téhéran se plaçait sur
une trajectoire directe de collision avec Washington. Ce qui joua en sa
défaveur. Les iraniens devraient dans une perspective immédiate
s'attendre à une réplique de la part des Etats Unis
d'Amérique. Le gouvernement Reagan chercha à vaincre et à
punir les révolutionnaires iraniens, pour les humiliations subites.
Ainsi, il est définitivement mis fin à leur coopération
économique et stratégique et à leur relation diplomatique
et politique ?
L'évènement majeur ayant déclenché
d'adoption d'un ensemble de sanction économique appliqué de
façon durable reste cette prise d'otage réalisé au sein de
l'ambassade américaine en Iran par un groupe d'étudiant musulman
partisan de la ligne de l'imam Khomeiny le 4 novembre 1979. Cette crise des
otages, entraina le gel de 4 milliard d'avoir iranien incluant notamment de
nombreux dépôt bancaire et de l'or137.
En soutien à leur allié enfin dans les domaines
qui suivent la prise des otages plusieurs pays amis des Etats Unis prennent
contre l'Iran des mesures analogues à celles d'adoptés par
Washington. Les 9 étapes alors membres de la communauté
économique européen en décide ainsi le 18 mai 1980, alors
d'une réunion de leur ministre des affaires d'extérieur à
Naples.
137 Plusieurs pays européens et non européens comme
le Japon ont également exprimé leur souhait de limiter leurs
échanges commerciaux avec l'Iran.
Les États-Unis d'Amérique et l'Iran
n'entretiennent plus de relation diplomatique formelle depuis le 7 avril 1980.
Washington y poursuit néanmoins indirectement sa représentation
par l'entremise de l'Ambassade suisse en Iran depuis le 24 avril
1981138. De son côté, Téhéran entretient
une délégation à l'Ambassade pakistanaise à
Washington depuis 1993 au sein de la division des intérêts
iraniens alors qu'avant cette année, l'Iran était
représenté par l'Algérie avant qu'Alger ne cesse ses
relations formelles avec la République islamique. De plus, l'Iran
maintient une délégation au siège de l'ONU à New
York.
Cette prise d'otages avait notamment été,
motivé par une volonté de manifester un soutien à l'imam
Khomeiny, ainsi qu'à la suite de l'indignation soulevée par le
départ du Shat aux Etats Unis enfin de soigner son cancer, alors que
certains groupes souhaitaient qu'il reste en Iran pour y être
jugé. La situation n'en reste pas moins bloquée et c'est
seulement le 19 juin 1981, à la veuille de la prise de fonction du
Président Reagan et à la suite d'une longue négociation
menée à l'aide du gouvernement Algérien, un accord
intervient à Alger entre l'Iran et les Etats Unis en vue de la
libération des otages et du règlement de l'ensemble des
contentieux existant entre les deux pays. Au total la crise a duré plus
d'un an. Cette situation a mis en exergue combien la révolution
Iranienne est déterminée à atteindre le rêve du
« Guide Khomeiny ». Comment conquérir la région du Golf
et s'imposer voilà le prochain combat de Khomeiny
90
138 U.S. Department of State, Iran (02/01/12), mis en ligne le
1er février 2012,
http://www.state.gov/outofdate/bgn/iran/196733.htm,
consulté le 20 novembre 2012.
91
Chapitre II : LA REMISE EN CAUSE DES INTERETS
AMERICAINS DANS LE GOLFE PAR LA MONTEE EN PUISSANCE DE L'IRAN
La surface économique d'un pays qui se veut puissant et
imposant ne se limite pas à ses frontières naturelles et fixes,
elle va au-delà. Khomeiny avait très bien cerné cette
assertion. L'émancipation de Khomeiny des Américains touche
directement les intérêts économiques et
géopolitiques de Washington, dans la région du Golfe Persique. Le
Guide rêve très grand, étendre son champ
hégémonique au-delà de ses frontières propres et la
guerre avec l'Irak intervient dans ce contexte.
I-LA REVOLUTION IRANIENNE : UNE MENACE IDEOLOGIQUE ET
CULTURELLE CONTRE LES ALLIES AMERICAINS DU MOYEN-ORIENT
Les voisins iraniens du Golfe sont les premières
victimes de l'ambition expansionniste de Khomeiny, notre l'analyse portera sur
le rêve du Guide : les moyens techniques et idéologiques mis en
jeu et la frayeur que cette `'folle» ambition va occasionner dans toute la
région.
1- L'ambition régionale de Khomeiny
Khomeiny a pris le pouvoir sous le double signe du
nationalisme et de la religion. Sa force a été de pouvoir
utiliser tout un réseau qui servait, depuis des siècles, de force
conservatrice au service d'une société d'oppression et
d'exploitation, celui du clergé chiite139, pour encadrer une
mobilisation massive et profonde des couches populaires lancées à
l'assaut de la dictature. Dès l'instauration de la République
islamique en 1979,
139Définition par Professeur Konin Severin,
Département d'histoire Université de Cocody. Le chiisme (ou
chî?isme) constitue l'une des trois principales branches de l'islam avec
le sunnisme et le kharidjisme. Il regroupe environ 10 à 15 % des
musulmans, dont 90 % de la population iranienne. Les chiites sont souvent
appelés péjorativement sous le nom de Râfidhites. Les
religieux chiites, qui forment une hiérarchie
décentralisée, se sont organisés en Iran avec l'adoption
de l'Islam chiite comme religion d'Etat au XVIème
92
François Thual fait remarquer que le clergé
iranien cesse d'être le contre-pouvoir qu'il était au cours du
19e siècle. « Il n'est plus en recul, comme sous la
dynastie des Pavlavi ; il est au sommet de l'Etat. Il sera bientôt un
pouvoir absolu »,140
Sa force a été de pouvoir utiliser une
idéologie réactionnaire, moyenâgeuse, comme drapeau d'une
révolte populaire contre l'oppression, l'injustice et la tyrannie. Il a
joué sur les préjugés religieux largement répandus
et anciens. Mais il a joué aussi sur les aspirations à la
liberté et à la justice.
Khomeiny a aussi triomphé parce qu'il a apporté
aux pauvres un sentiment de revanche sociale. Le régime a mis ceux qu'il
appelle les « déshérités » au premier plan de sa
propagande. C'est parmi les chômeurs, les misérables, qu'il a
recruté ses miliciens, les militants de ses comités. Ce n'est
certes pas pour autant que la population détenait le moindre pouvoir,
mais ces positions ont apporté sans doute, en tout cas à une
partie d'entre elle, la satisfaction d'être au moins
considérée.
Aux pauvres, il a apporté aussi un sentiment de
revanche politique. Il est devenu l'incarnation du défi des masses
populaires d'Iran à la première puissance mondiale ; les
États-Unis d'Amérique. Alors le Guide espérait
étendre davantage la Ouma141 et sa domination sur toute la
péninsule arabique.
De plus, Carter promulgua ce qui est couramment appelé
la doctrine Carter lors du discours sur l'état de l'Union du 23 janvier
1980 en affirmant qu'une « tentative par une force extérieure
pour prendre le contrôle de la région du golfe Persique sera
considérée comme une attaque contre les intérêts
vitaux des États-Unis »142. Même si ici, le
discours vise clairement l'Union Soviétique, mais aucun autre
prétendant à cette partie du monde ne doit être
toléré par les Américain, dont l'Iran.
140 François THUAL Géopolitique du
chiisme, Paris, Arléa, 1995, p.41
141 C'est la communauté des musulmans, la nation
islamique, mais là, Khomeiny ne prend pas en compte toute la
communauté musulmane, mais les Chiites, groupe opposé aux
sunnites.
142 Jimmy CARTER Library, Jimmy CARTER State of the Union Address
1980, 23 janvier 1980, en ligne,
http://www.jimmycarterlibrary.gov/documents/speeches/su80jec.phtml,
consulté le 27 novembre 2012.
93
Mais la réorientation de la politique
étrangère iranienne ne concerne pas seulement, loin de là,
les relations avec Washington. Téhéran en a depuis longtemps
défini les axes stratégiques, dictés par ses
intérêts régionaux et par la prise en compte des rapports
de forces plus que par l'idéologie.
Les progrès militaires de l'Iran sur la scène
régionale depuis dix ans sont impressionnants. Il a agi avec beaucoup
d'habileté et de réalisme dans ce domaine, le deuxième en
importance aux yeux des dirigeants après le domaine militaire. Plusieurs
centres de recherche spécialisés se sont créés
autour du Conseil de discernement des intérêts supérieurs
du régime et du ministère des affaires étrangères.
Depuis 1997, le Centre des recherches stratégiques, fondé en 1989
sous la tutelle de ce conseil, produit en permanence des rapports
destinés aux dirigeants sur des questions-clés. Très
éloignées du ton de la propagande officielle, les analyses qui y
sont développées relèvent de la stratégie
plutôt traditionnelle, et la revue n'hésite pas à faire
appel à des spécialistes étrangers.
L'Iran manoeuvre dans un environnement compliqué en
faisant preuve d'une grande souplesse. Sur le front oriental, le Pakistan est
sa principale source d'inquiétude143. Son rôle en
Afghanistan, son alliance avec les Etats-Unis d'Amérique, l'abri qu'il
offre aux islamistes les plus radicaux, sans parler de son arme
nucléaire, le préoccupent, de même que l'instabilité
née de ses engagements hégémoniques.
2- Les moyens de lutte de la révolution.
Le premier des moyens sur lequel compte le Guide pour
étendre son hégémonie reste la religion. Et cela est bien
mentionné dans l'article 152 de la Constitution iranienne, montrant
ainsi la voie d'une action en direction de l'ensemble des fidèles du
monde musulman : la République islamique d'Iran se doit de
défendre « les droits de tous les musulmans ». Dans cette
optique, la théocratie iranienne s'est très vite
lancée,
143 Le Pakistan procède l'arme nucléaire et a de
très bons rapports avec les américains, il devient dès
lors ennemis de la République Islamique d'Iran.
94
dans une politique qui visait à faire de l'Iran le
leader du monde musulman ou tout au moins de plaire au plus grand
nombre de musulmans possibles. Déjà, le 14 février 1989,
par la fatwa condamnant à mort Salman Rushdie 144 ,
l'Ayatollah Khomeiny avait contribué à frapper l'esprit des
masses musulmanes. Alors que les religieux sunnites restaient
étonnamment silencieux, l'Iran se drapait dans le rôle de
défenseur de l'Islam offensé.
En effet, il se croyait doté d'une mission divine celle
de rependre la religion musulmane, l'islam. Il sait pouvoir compter avec le
Moyen Orient, car la majorité de la population est musulmane. Ensuite,
il va se baser sur les différentes tendances de l'Islam pour la
progression de son mouvement notamment sur les Chiites, population majoritaire
en Iran (99 %). Il érige une propagande sur la division du monde
musulman. En effet, l'influence de l'Iran et son interprétation
révolutionnaire du Chiisme au sein du monde arabe peut se comprendre par
l'histoire de ce courant au Moyen-Orient. Les descendants de l'imam Ali et
dernier Calife, gendre de Mahomet ont toujours été
marginalisés et exclus de la succession du
prophète145.
Ainsi, la domination Sunnite contraint les chiites à se
soumettre au pouvoir Kalifal et parfois même à se réfugier
dans les enclaves montagneuses. Un tel isolement ne fit que renforcer la
doctrine religieuse du chiisme. La théorie de ?l'imam caché"
(imam Zaman), lequel apparaîtra à la fin des temps afin de
délivrer les déshérités (Mostazafin), agit comme
référence symbolique contre le monde des dominants
assimilés au monde sunnite.146 L'Iran en établissant
cette doctrine religieuse, au moyen de la révolution islamique se
présente comme une alternative. Alors pour l'exportation, Khomeiny, va
donc utiliser les symboles du chiisme comme celui des martyres par exemple pour
servir sa cause.
144Ahmed Salman RUSHDIE est un essayiste et
romancier britannique d'origine indienne, né à Bombay le 19 juin
1947. Son style narratif, mêlant mythe et fantaisie avec la vie
réelle, a été qualifié de réalisme magique.
Objet d'une fatwa de l'Ayatollah Rouhollah Khomeiny à la suite de la
publication de l'ouvrage Les Versets sataniques, il est devenu un
symbole de la lutte pour la liberté d'expression et contre
l'obscurantisme religieux (dans les médias occidentaux principalement,
la personnalité étant critiquée dans de nombreux pays).
145 Selon les chiites Ali devaient être le successeur
direct du Prophète de l'Islam, Mohamed, mais celui-ci fut exclu
injustement. Mais Ali devient 24 ans après le quatrième Calife de
l'islam, il mourût en 661.
146Kouassi Roger DJANGO, les relations
politiques Iran-Usa 1979 -1998, Mémoire de Licence 2007.
95
Grand pédagogue il jouait bien sur la conscience des
citoyens, l'Imam s'est dit qu'il devait revivifier les réalités
oubliées de l'Islam, il brandit sur ses bras l'esprit de la justice de
la sainte religion, il rappela aux esprits le refus de l'Islam de la
discrimination, de l'aristocratie et de la différence dans les couches
sociales. Pour lui il n'y avait pas de distinction possible entre la religion
et l'Etat, car pour lui, pour pouvoir renforcer leur hégémonie
sur les nations musulmanes et faire main basse sur leurs richesses naturelles,
les puissances occidentales se sont vues obligées de séparer de
l'Islam sa dimension politique, et de définir l'Islam dans le sens de
soumission devant les événements, devant les occupants et devant
l'ennemi tyrannique et puissant.
La jeunesse iranienne était aussi à sa solde,
comme tout bon leader, le Guide avait une popularité très
précieuse chez les jeunes. Il leur inculquait la voie
révolutionnaire, pour lui c'est par cette seule voie que la
révolution peut être exportée. En clair, pour exporter la
révolution, Khomeiny ne néglige aucun moyen. C'est ce dernier
moyen qui inquiète les voisins abritant des communautés chiites
comme l'Irak, le Liban, le Bahreïn, le Koweït etc.... alliés
des Américains. En ce qui concerne le peuple, la plus grande oeuvre de
l'imam Khomeiny a été de lui montrer la notion de la
démocratie contrairement à celle de l'occident.
Les Occidentaux essayaient de suggérer que la
démocratie n'était pas compatible avec la théocratie et la
religion. Tous ces agissements et planifications de Khomeiny créent chez
ses voisins des inquiétudes.
3- L'inquiétude des alliés américains
du Golfe
Le golfe Persique est un golfe de l'océan Indien qui
sépare l'Iran (l'ancienne Perse) de la péninsule Arabique et
s'étend sur une superficie d'environ 251 000
km2.147 Les pays qui bordent le golfe Persique sont :
l'Iran au nord-est, l'Irak, le Koweït, l'Arabie saoudite,
147Brigitte DUMORTIER, Philippe CADENE, PUPS/RFI
Atlas des Pays du Golfe, , 2011 Le Golfe Persique : introduction
bibliographique, Mohammad Reza Djalili, Institut universitaire de hautes
études internationales, Centre asiatique, Genève, 1979.
96
à l'ouest, Bahreïn, le Qatar et les Émirats
arabes unis au sud et à l'est. Ces pays sont tous de grands producteurs
du pétrole.148
Khomeiny lance une campagne pour « exporter » la
révolution dans les pays musulmans environnants. Sa provocation à
l'égard de l'Irak en plus à sa prétention sur certaines
régions pétrolifères de la région, poussent le
Président de l'Irak, Saddam Hussein à prendre des
précautions de défense. Depuis la révolution islamique
Khomeyniste contre le Shah en 1979, l'Iran est perçu par la plupart des
pays du Moyen Orient allié des Etats-Unis d'Amérique comme une
menace, surtout l'Arabie Saoudite.
En effet, le régime des Mollahs effectivement
installés149inquiète les monarchies
pétrolières du Golfe notamment les pays comme l'Arabie-Saoudite,
le Koweït, le Bahreïn, l'Irak. C'est pourquoi Saddam Hussein,
redoutant l'ascension de Khomeiny et son regain de popularité dans le
monde musulman va commencer à se méfier. Khomeiny qui aurait
selon eux pour ambition de déstabiliser ces pays à cause de leur
collaboration avec les Etats-Unis d'Amérique.
C'est ainsi que les monarchies du golfe vont consolider la
stabilité de leur régime sur la base de leur amitié avec
les Etats-Unis d'Amérique. Mais il faut remarquer que le Shah leur
faisait obstacle pendant son règne .Après sa chute, les
Américains ont intensifié leurs relations avec ses monarchies,
afin de mieux veiller sur leurs intérêts dans la région.
Car si l'Iran arrive à prendre le dessus, ce serait la fin
hégémonique des Américains dans la zone. Ils vont donc
développer des relations très poussées avec ces
monarchies. Ces monarchies sont victimes de la trop grande haine de Khomeiny
contre les sunnites. C'est pour toutes ces raisons que ceux-ci soutiennent
l'Irak. Dès cet instant il devient l'ennemis pour le pouvoir chiite de
Téhéran.
148 La ressource quasi exclusive du golfe Persique est le
pétrole. Les plus grands pays du golfe Persique sont regroupés
dans l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) et
contrôlent l'acheminement grâce aux pétroliers
géants, ou par des oléoducs en liaison avec la
Méditerranée et la mer Rouge, permettant d'éviter le
passage par le détroit d'Ormuz et le canal de Suez. Cela entraine une
forte pollution, on estime en 2000 à 1,14 millions de tonnes de
pétrole par an déversé par 40 % des 6 000
pétroliers qui transitent chaque année par le détroit
d'Ormuz.
149 Pouvoir du clergé : pouvoir en Iran, l'affaire des
guides religieux.
97
Il va menacer tous ces régimes d'exporter sa
révolution et même remettre en cause la monarchie sunnite
Saoudienne garante des terres saintes de l'Islam .Par la peur de voir leurs
jeunesses se laisser pénétrer par la « haine » et les
idéaux de Khomeiny, ceux-ci pour leur défense mettent en place le
Conseil de Coopération du Golfe (CCG), en 1981 pour combattre
Téhéran. Khomeiny accentue alors sa critique contre ces pays, il
leur reprocha de s'être trop éloignés des préceptes
de l'Islam et d'être des alliés des Américains et
d'Israël : source de malheur et de perdition pour le peuple musulman.
C'est pour manifester et décrire toutes ces pratiques
que le pèlerinage à la Mecque de 1987 a connu un « sort
» dramatique. Sous la conduite des gardiens de la révolution, les
pèlerins iraniens organisent une manifestation à Médine le
27 Juillet 1987 et occupent l'une des avenues principales menant à la
grande mosquée de la Mecque 4 jours plus tard. Brandissant des
banderoles, criant des slogans, agitant des portraits du guide de la
révolution islamique et dont certains seraient munis de couteaux, les
iraniens foncent sur la garde nationale saoudienne postée aux abords
immédiats de la grande mosquée. Celle-ci cède à la
panique et fait usage d'armes anti-émeute pour disperser les
manifestants.
Le bilan est lourd 402 morts dont 235 Iraniens et (650
blessés) les blessés atteignant pour leur part le nombre de 650,
selon les sources officielles Saoudiennes. Les autres morts sont des Saoudiens
85 et 42 pèlerins pour d'autres pays. Les iraniens quant à eux
dénotent 600 morts : 350 morts iraniens et 5000 blessés. Suite
à tous ces événements, les saoudiens ont rompu toute
relation diplomatique avec l'Iran le 26 Avril 1988. Le Bahreïn et le
Koweït ont échappé à leur tour à un
renversement de leur régime par Khomeiny. Celui du Bahreïn en 1981
et celui du Koweït en 1985.150
150 Blandine LACAIN « A la Mecque, la série des
drames de pèlerinage avait cessé depuis 2006 » Paris, figaro
2015, p 8
98
II-LA GUERRE IRAN-IRAK (1980-1988) : COMME UNE GUERRE
DE
POSITIONNEMENT DES AMERICANS.
Le 22 septembre 1980, l'Irak laïc du Saddam Hussein
attaque l'Iran islamique de l'imam Khomeiny, avec les encouragements
des Occidentaux et bien sûr des autres pays arabes. Les uns et les autres
veulent profiter de l'affaiblissement apparent du régime khomeyniste
pour lui donner le coup de grâce. La guerre dure huit ans et fait un
million de morts. Elle a pour principal effet de ressouder le peuple iranien
autour des mollahs ainsi que de relancer le conflit pluriséculaire entre
Perses et Arabes, chiites et sunnites.
1- Les causes de la guerre : l'expression du containment
arabe contre la révolution islamique d'Iran
Les incriminations des pays arabes contre le pouvoir de
Téhéran sont plurielles. Se référant à ses
discours révolutionnaires et sa politique en Irak, au Liban et en
Palestine, certains dirigeants arabes accusent la République islamique
d'ingérence dans les affaires arabes. D'autres soupçonnent l'Iran
d'oeuvrer à la formation d'un « Arc chiite » qui menace les
pouvoirs sunnites. Cette guerre ouverte par l'Irak représente en quelque
sorte pour ces pays voisins, le symbole du rejet et du mécontentent avec
le pouvoir Chiite de Téhéran.
Les raisons lointaines de cette guerre prennent leur source
dans les tracées de la frontière entre l'Iran et l'Irak. Cette
frontière est le fleuve Chatt-Al-Arab qui les sépare. Ce fleuve
prend sa source en Turquie et borde sur une distance de 90 kilomètres
l'Iran. Ce fleuve qui était un lieu d'échanges pendant
l'époque islamique est devenue au XXe siècle le grand
fleuve pétrolier du monde. Il représente pour l'Irak, la seule
ouverture sur la mer. C'est pour cela que le partage de ce fleuve ne satisfait
pas les deux pays. Depuis le début du XXe siècle,
plusieurs traités ont été signés entre les deux
pays pour leur différend. Au
99
titre des traités, nous notons celui de Constantinople
en 1913 qui avait divisé le fleuve par les eaux basses de la Perse. Ce
traité favorise l'Iran.
Outre les revendications territoriales, des différends
politiques sont également à l'origine du déclenchement de
la guerre Iran-Irak. Dans une perspective régionale, les pays arabes
producteurs de pétrole voient d'un mauvais oeil la révolution
islamique iranienne de 1979 qu'ils considèrent comme un facteur de
déstabilisation économique, politique et social de la
région. À cela s'ajoute la méfiance de Bagdad envers son
voisin iranien qui appuie le groupe irakien chiite Al-Dawa, opposé au
gouvernement bassiste de Saddam Hussein
Dans un article intitulé « Un nouveau calife
à Bagdad », l`écrivain et journaliste
Français François Schlosser, nous retrace les
motivations qui ont poussé Saddam Hussein à s'attaquer à
Téhéran « ...Prudent, avisé et calculateur,
pourquoi a-t-il (Hussein) pris le risque de cette guerre ? D'abord, parce qu'il
fallait, de toute manière, pour restaurer l'Irak dans ses dimensions
historiques, lui rendre ces petits bouts de territoire que le chah d'Iran,
quand il était au sommet de sa puissance, lui avait arrachés.
Ensuite, parce que le nouveau régime islamique de Téhéran,
depuis des mois, appelait les chiites irakiens à la révolte.
C'était pour l'Irak, dont la majorité de la population est de
rite chiite, un danger mortel. Et sur cette question, Saddam Hussein ne badine
pas (...) En prenant ces objectifs à son compte, Saddam Hussein se
taille, à coups de canons, un profil de grand dirigeant arabe, tout en
réalisant sur le terrain son propre dessein national. Reste à
savoir si les dirigeants irakiens n'ont pas sous-estimé la
capacité de résistance de l'ancien géant militaire
iranien. Et si la fortune des armes finit par sourire vraiment à Saddam
Hussein, beaucoup dépendra de la manière dont il saura se
dégager de cette guerre, c'est-à-dire la
terminer.»151
Les rivalités entre le chiisme et le sunnisme ont
créé depuis des siècles, une guerre froide persistante
entre l'Iran et son voisin du sud, l'Arabie saoudite. En effet, la religion
Musulmane se compose de plusieurs courants. Les deux principaux sont le
sunnisme
151Josette ALIA, Pierre BLANCHET, « Pourquoi
Khomeiny défie Carter» Le Nouvel Observateur, 29 septembre
1980, p. 24.
100
(80% des fidèles) et le chiisme (15%)152. La
majorité des pays arabes est sunnite tandis que les chiites sont
majoritaires en Iran, en Irak ainsi qu'au Yémen. L'Iran et l'Arabie
saoudite représentent des leaders de ces courants.
Dans les années 1980, le royaume avait soutenu
ouvertement le régime de Saddam Hussein dans sa guerre contre l'Iran, et
en 1987 à la Mecque, la police avait ouvert le feu sur des
pèlerins qui manifestaient contre les Etats-Unis d'Amérique et
l'Israël, tuant plus de quatre cents d'entre eux, dont deux cent cinquante
Iraniens.
En 1979, la chute du Shah d'Iran et l'embargo américain
sur les livraisons d'armes, causé par la crise des otages, affaiblissent
considérablement l'armée iranienne. À l'opposé,
l'Irak est à l'apogée de sa puissance politique et militaire. La
situation se dégrade le 17 septembre 1980 lorsque Saddam Hussein
dénonce l'accord d'Alger de 1975, prévoyant la libre navigation
sur le Chatt al-Arab153. Cette position ravive un vieux
différend territorial entre les deux pays. En effet, le tracé de
la frontière a fait l'objet d'innombrables accords ou arrangements entre
l'Empire ottoman et la Perse puis entre l'Iraq et l'Iran. Le dernier en date
est l'accord d'Alger (1975)154 élaboré sous la
houlette de Houari Boumediene. Cet accord spectaculaire veut marquer une
réconciliation entre monde persan et monde arabe. La délimitation
reprend les tracés antérieurs (sur le Chatt, le tracé de
la frontière est celui du talweg)155. Bagdad accepte car dans
le même temps l'Iraq rencontre des difficultés avec les Kurdes, et
le Shah, en contrepartie, doit cesser toute aide aux Kurdes irakiens.
En fait l'accord n'a jamais été vraiment
accepté par l'Iraq, Il fut contesté en 1980 par l'Iraq, qui
déclara la guerre à l'Iran le 22 septembre 1980, le
président Saddam Hussein décide alors de porter un coup
décisif à l'ennemi iranien en envahissant le
152La répartition entre ces deux courants
apparaît clairement sur la carte du Moyen-Orient
153Le Chatt el-Arab, ou « rivière des
Arabes », suit la frontière Iran-Iraq sur 90 km. C'est depuis
toujours une frontière politique, historique et culturelle entre deux
empires (l'ottoman et le perse) et deux mondes (l'arabe et l'aryen) avec deux
légitimités de l'islam, l'une sunnite, l'autre chiite. Le
pétrole l'a transformée en voie d'eau essentielle dans les
échanges internationaux.
154le 6 mars 1975, à l'issue d'une
conférence de l'O.P.E.P. à Alger, Saddam Hussein, alors
vice-président irakien, signa un accord avec le Shah par lequel l'Irak
accédait aux revendications iraniennes en abandonnant sa
souveraineté sur le Chatt al-Arab
155 Encyclopédie Larousse, en ligne,
http://www.larousse.fr/encyclopedie/riviere-lac/Chatt_al-Arab/113108
101
Khouzistan156. Cette région riche en
pétrole est le théâtre d'affrontements violents entre
l'aviation et l'artillerie lourde des deux belligérants.
Pour les occidentaux ; le bloc Américain et
alliés, inquiets de la naissance de la République islamique
iranienne, voyaient en l'Irak un pays qui pourrait évoluer vers la
laïcité et le modernisme et faire contrepoids à l'Iran.
C'est pourquoi ils ne s'opposent pas dans un premier temps à l'offensive
irakienne, allant jusqu'à la soutenir ensuite. C'est en particulier le
cas de l'URSS, de la France et des États-Unis d'Amérique.
2- Les manifestations du conflit : le rôle
joué par les Américains
Quand Saddam Hussein lançait son offensive il n'avait
jamais pensé qu'elle durera 8 ans. Il a estimé que l'Iran est
affaibli sur le plan militaire en raison de la révolution islamique de
1979, et que la guerre sera que plus rapide et limitée. Le 22 septembre
1980 : l'Irak déclenche une invasion de l'Iran. Des attaques
aériennes simultanées sont menées sur 10 bases
aériennes en Iran. Cependant, l'objectif n'est pas atteint, puisque
l'aviation aérienne n'est pas complètement détruite comme
escompté. Les irakiens envahissent l'Iran sur trois fronts terrestres,
sans engager toutes leurs forces car ils pensent que la guerre sera de courte
durée. Au nord, ils occupent Qasr-e Shirin. Plus au sud, ils visent des
points stratégiques dans le Khuzestan : Mehran, Dezful, Khorramshahr et
Abadan dans la région du Chatt al-Arab tombent en octobre.
En réalité, l'attaque de l'Irak galvanise la
population iranienne de toutes souches et classes sociales, qui s'engage dans
l'armée. Saddam Hussein doit ainsi réviser ses prévisions
de succès rapide, d'autant plus que la guerre s'enlise. Le 28 septembre
1980 : le Conseil de Sécurité des Nations-Unies appelle les deux
Etats à ne plus faire usage de la force d'où la résolution
479.
Cette résolution était très mal vue des
Iraniens, car elle ne demandait pas le retrait des troupes Irakiennes du
territoire ennemis. Là les Iraniens y voient une main
156Est une des 30 provinces d'Iran. Elle est
située au sud-ouest du pays, aux confins de l'Irak et du Golfe Persique.
Sa capitale est Ahvaz et elle couvre une surface de 62 238 km2
102
occidentale surtout celle des américains à
vouloir à tout prix évincer le pouvoir de Téhéran.
L'Irak se dit prêt à négocier en échange de la
reconnaissance de ses revendications territoriales. Mais après une
année de guerre de décembre 1980 à décembre 1981,
les positions des deux armées n'évoluent pas, et les Iraniens
refusent de négocier avec l'Irak a la fin des combats.
Les irakiens ne connaissent pas le succès face à
la forte résistance des iraniens. De plus, les erreurs tactiques du
commandement et les difficultés rencontrées pour se servir de
systèmes d'armes nouveaux expliquent aussi le succès en
demi-teinte de l'invasion irakienne. Fin 1981, l'armée iranienne
réussit à reprendre Abadan et ce succès se poursuit par la
reprise en mars 1982 du centre du pays. L'armée irakienne fuit et des
milliers de soldats sont faits prisonniers. Fin mai, la ville de Khorramchahr
est reprise par les Iraniens. En revanche, l'armée irakienne maintient
ses positions dans le nord. Saddam Hussein décide alors de respecter la
demande de cessez-le-feu votée le 12 juillet par le Conseil de
sécurité des Nations unies tandis que les Iraniens le refusent et
poursuivent les combats : à l'été 1982, l'armée
iranienne mène des incursions en Irak.
Saddam Hussein pouvait compter sur l'aide Américaine.
Pour le commun des iraniens, surtout la classe dirigeante pense que le
président irakien a attaqué l'Iran sur ordre de la Maison
Blanche. Les 19-20 décembre 1983 : visite de Donald Rumsfeld à
Bagdad. Cette visite est un premier pas des Américains afin de restaurer
des relations diplomatiques normales entre les Etats-Unis d'Amérique et
l'Irak. Après cette date, les américains augmentent leur soutien
à l'effort de guerre irakien. La CIA vend ou facilite la vente d'armes
aux irakiens via la Jordanie, le Koweït, l'Arabie Saoudite ou l'Egypte.
Par la suite, les États-Unis d'Amérique ont
fourni des données opérationnelles afin d'aider à la
planification des attaques irakiennes, en somme Washington a soutenu l'effort
de guerre contre l'Iran. Cet appui s'est intensifié au fil des
années. En 1986, non seulement les États-Unis d'Amérique
fournissaient aux Irakiens des renseignements de première importance.
103
A partir de cette période, l'Irak bloque les
installations pétrolières d'Iran : en août 1982 l'île
de Kharg comportant le terminal pétrolier le plus important d'Iran est
bloqué et les pétroliers iraniens sont également
attaqués. De son côté, l'Iran poursuit la guerre terrestre,
notamment vers Bassorah, ville d'Irak située sur le Chatt al-Arab. En
1984, l'Irak menace de bombarder des villes iraniennes si les forces
armées de Téhéran lancent de nouvelles offensives. Le
gouvernement de Téhéran n'est pas impressionné et lance de
nouvelles offensives, qui vont déclencher la période
appelée « Guerre des Villes », durant
laquelle les deux parties lancent des attaques aériennes et des missiles
sol-sol sur leurs villes frontalières respectives. Les pertes civiles
sont très nombreuses des deux côtés pendant cet
épisode de la guerre.
Cette même année, les Iraniens lancent la guerre
des pétroliers et arraisonnent plusieurs tankers koweïtiens, le
Koweït ayant apporté son soutien à l'Irak dans cette guerre
contre l'Iran. Les attaques contre les pétroliers provoquent la demande
d'aide du Koweït auprès des grandes puissances, dont les
États-Unis d'Amérique, qui refusent dans un premier temps. La
demande d'aide à l'Union Soviétique provoque cependant en mai
1987 l'intervention des États-Unis d'Amérique, qui assurent la
protection des navires koweïtiens en les plaçant sous pavillon
américain.
Le 25 avril 1985 : le conseil de sécurité des
Nations Unies se déclare « consterné » de l'utilisation
d'armes chimiques contre les forces armées iraniennes en mars 1985. En,
1987 : l'Iran se retrouve de plus en plus isolé sur la scène
internationale à cause de son attitude offensive. La même
année, le soutien des Américains aux irakiens s'intensifie : des
conseillers militaires sont envoyés à Bagdad pour aider à
la planification des attaques irakiennes ; des navires américains
supplémentaires sont engagés dans le Golfe
Persique157
157 Frédéric JORDAN
«L'écho du champ de bataille» publié samedi 7 avril 2012
http://lechoduchampdebataille.blogspot.com/2012/04/guerre-conventionnelle-retour-sur-le.html,
, consulté le 30 Avril 2013.
104
Le Conseil de Sécurité des Nations Unies adopte
la résolution 598 du 20 juillet 1987, appelant entre-autres, à un
cessez-le-feu immédiat. L'Irak approuve la résolution. L'Iran ne
la rejette pas, mais ne l'approuve pas non plus. Ils demandent le changement de
l'ordre des articles de celle-ci. Dans les points 3 et 4 de la
résolution, l'organisation mondiale exprime son inquiétude «
Profondément préoccupé de ce que, en dépit de
ses appels à un cessez-le-feu, le conflit entre l'Iran et l'Irak se
poursuit sans diminuer d'intensité et continue d'entraîner de
lourdes pertes en vies humaines et des destructions matérielles,
» « Déplorant le déclenchement et la poursuite du
conflit ».158
Mieux, l'ONU déplore les crimes injustifiés et la
montée de la violence :
« Déplorant également le bombardement
de centres de peuplement exclusivement civils, les attaques contre des navires
neutres ou des avions civils, les violations du droit humanitaire international
et d'autres règles relatives aux conflits armés et notamment
l'utilisation d'armes chimiques en contravention des obligations
découlant du protocole de Genève de 1925 ».
En dépit de tous ces appels à la retenue, les
actions de guerre ne s'arrêtent pas pour autant, mais se font moins
nombreuses et au sol. En 1988, l'Irak reprend l'offensive terrestre et
récupère plusieurs positions détenues par les Iraniens :
Fao en avril, la région de Bassorah159 en mai, le Kurdistan
en juin.160L'Iran accepte finalement la résolution 598 de
l'ONU.
Devant ces échecs militaires, en raison de la
montée des tensions et de la présence américaine dans le
Golfe, le 18 juillet 1988, Ali Khamenei, président de la
République iranienne (actuellement Guide de la Révolution),
accepte la résolution 598 du Conseil de Sécurité de l'ONU.
L'Iran est isolé internationalement, se retrouve à court d'armes
et a
158S/RES/ 598 du Conseil de
sécurité du 20 juillet 1987 relative à la fin des
hostilités entre belligérants.
159Bassorah est la seconde ville d'Irak,
après Bagdad, la capitale, avec une population estimée en 2008
à environ 2 300 000 habitants. C'est la capitale de la province
d'Al-Basra. Principal port du pays, la ville est située sur le
Chattel-Arab, estuaire commun des fleuves Tigre et Euphrate, à 55 km en
amont du golfe Persique et à 550 km de Bagdad 160 Philippe RONDOT,
« Guerre Iran-Irak 1980-1988 », Encyclopédie Universalis
2009.
105
subi des attaques lourdes de conséquences, et accepte
donc le cessez-le-feu. La situation interne de l'Iran a également
changé, et les protestations contre la guerre se font plus nombreuses,
menaçant le régime islamique de Téhéran. Le
cessez-le-feu prend effet le 8 août 1988 et les combats cessent le 20
août.
3- Le bilan de la guerre
Cette fois ci, l'Iran est en guerre, non pas directement avec
les États-Unis d'Amérique, mais avec l'Irak, un autre pays
musulman, un autre pays pillé par l'impérialisme. Cette guerre a
eu pour effet de stabiliser le régime ; le front, les diverses milices,
la bureaucratie de l'État emploient de larges fractions de la population
et les religieux. Par ailleurs en répartissant un minimum de moyens de
subsistance, ont renforcé le réseau d'assistance sociale autour
des mosquées. Mais elle a eu aussi certainement pour effet
d'accroître les difficultés et les misères du peuple
iranien.
Lorsque les canons se "taisent" enfin Iran et Irak se
retrouvent également épuisé. Les pertes économiques
cumulées des deux pays se sont évaluées à plusieurs
centaines de milliards de dollars. Le bilan humain est lui aussi terrifiant,
300 000 morts pour l'Irak, environ un million pour
l'Iran161.Politiquement Saddam Hussein est largement
perdant, car non seulement il n'est pas parvenu à faire pilier
Téhéran et à faire de l'Irak un hégémon
Moyen-Oriental. Mais d'autres part, il est désormais largement
débiteur des pétromonarchies du Golfe. Son prestige auprès
de la population est alors au plus bas. Sur le plan extérieur en
revanche, Saddam Hussein apparaît comme le défenseur des sunnites
du Moyen-Orient, et l'Irak se positionne comme une puissance
régionale
Le régime iranien lui est ressorti largement
renforcé de la guerre avec une légitimation aux yeux de sa propre
population (réunie dans un grand élan patriotique) mais aussi
auprès des régimes et de groupes politiques militaires favorables
à sa thèse. Les Iraniens faisant bloc autour de leur gouvernement
et de leur armée face à l'ennemi
161Paul BALTA, Iran-Irak : une guerre de 5000
ans, 1999, Amazon, Paris, 315 p.
106
héréditaire : les Arabes sunnites. La
Présidence américaine de Ronald Reagan est au passage
affecté par le scandale de l'Irangate,162 une
livraison illicite d'armes à l'Iran, en dépit de l'embargo sur ce
pays. Cela ne fatigue renforcer son rôle de grande puissance
perturbatrice dans la zone. Cette guerre déclenchée a
suscité en Iran un profond réflexe nationaliste.
Au total, les dépenses militaires, pertes en produit
intérieur brut et capitaux non investis ont dépassé 500
milliards de dollars pour les deux pays. L'Iran estime officiellement à
300 milliards de dollars le prix de la reconstruction de son économie.
L'Irak, pour sa part, l'évalue entre cinquante et soixante milliards de
dollars.
Le conflit a duré huit ans en faisant plusieurs
centaines de milliers de morts .Un bilan sans commune mesure avec tout autre
conflit du Moyen-Orient, y compris le conflit israélo-palestinien.
En somme Saddam Hussein a tablé sur une offensive
fulgurante, sur une guerre courte qui fera de son Irak bassiste la
première puissance du Moyen-Orient. Cette ambition ne résiste pas
à la dure réalité d'un conflit acharné, l'un des
plus dévastateurs du XXème siècle, qui ne dure que 8 ans.
Guerre complexe par ses enjeux et ses acteurs. La guerre Iran-Irak qui
transcende le cadre classique de la guerre froide, aura un impact profond sur
toute la région du Golfe Persique et au-delà.
162L'affaire Iran-Contra ou
Irangate, nommée ainsi en souvenir du scandale
du Watergate) est un scandale politique survenu aux États-Unis dans les
années 1980.L'affaire est toujours voilée de secrets et il est
difficile de découvrir les faits. Plusieurs membres de l'administration
Reagan ont vendu illégalement des armes à l'Iran, qui
était un ennemi avoué des États-Unis, utilisant les
profits pour financer secrètement, et malgré l'opposition du
Congrès des États-Unis1,2, les Contras, un mouvement
contre-révolutionnaire nicaraguayen de lutte armée regroupant les
opposants au gouvernement sandiniste de Daniel Ortega. Dans le cadre de la
Guerre froide, il s'agit pour l'administration Reagan de renverser un
régime considéré comme communiste3 et
situé dans ce que les États-Unis considèrent comme leur
zone d'influence.
107
CHAPITRE III : LES AMBITIONS NUCLEAIRE DE L'IRAN : UNE
POMME DE
DESCORDE
La volonté de l'Iran de se doter de l'arme
nucléaire est avant tout le résultat de la guerre contre l'Irak
(1980-1988), qui a beaucoup marqué le nouveau régime iranien issu
de la révolution islamique de 1979. La montée en puissance
militaire d'Israël filleul des Etat Unis d'Amérique, son grand
ennemi, motive également Téhéran et ses alliés, la
Syrie et la Libye, à se doter de l'arme nucléaire, à
partir de 1985. Cette ambition de l'Iran peut aussi se voir comme une
volonté de se hisser dans la « cour des grands
»163, celles des pays dotés de la puissance
nucléaire, afin de peser davantage sur les scènes
régionales et mondiales.
I- LES CRAINTES DES ALLIES DE WASHINGTON AU MOYEN
ORIENT
Dans cette partie nous aborderons dans un premier lieu,
l'historique du nucléaire iranien ensuite ce qui forge cette ambition de
l'Iran à se doter d'une arme nucléaire et enfin les atouts et
visée géopolitiques du nucléaire iranien.
1- L'ambition nucléaire de l'Iran
En Iran, l'énergie nucléaire est
considérée comme nécessaire pour une nation où
l'industrialisation est croissante et une population à forte croissance
démographique (la population a plus que doublé en vingt ans).
L'Iran aussi souhaite diversifier ses sources
énergétiques, les réserves fossiles devant se tarir un
jour. Les ressources pétrolières de l'Iran sont actuellement
estimées à 133 milliards de barils. Cela représente une
consommation de 74 à 89 ans au rythme courant d'extraction de 1,5
à 1,8 milliard de barils par an si aucune nouvelle réserve n'est
découverte. L'Iran soulève aussi la question financière,
soutenant que développer la
163 Posséder cette arme serait pour l'Iran de rivaliser
avec les grandes puissances, et s'imposer dans la région comme une
puissance militaire et économique.
108
capacité de son industrie pétrolière
coûterait 40 milliards de dollars, sans compter le prix des centrales
pétro-électriques. Développer une énergie
nucléaire coûte seulement une fraction de cette somme. La question
de l'indépendance énergétique (le pays importe
régulièrement de l'essence et de l'électricité) est
aussi à prendre en compte, l'Iran possédant ses propres
réserves de minerai d'uranium.
Le DrWilliam O. Beeman, professeur pour le
programme d'études du Moyen-Orient de l'Université Brown, qui a
passé des années en Iran, dit que la question du nucléaire
est centrale dans le discours politique iranien :« Les Iraniens veulent
être connus et vus comme un État moderne, en développement,
possédant une base industrielle moderne et en pleine croissance. Pendant
les derniers siècles, l'histoire des relations entre l'Iran et
l'occident a inclus le développement par l'Iran de plusieurs sortes
d'avancées technologiques et industrielles afin qu'ils se prouvent
à eux-mêmes -et dans un effort pour le prouver au monde entier-
qu'ils sont en fait un pays moderne en pleine croissance. »164
La question de l'énergie nucléaire
s'insère dans ce contexte. Pour les Iraniens, les États-Unis
d'Amérique, essaient tout simplement de les réprimer ; de les
garder en retrait et en retard, de faire d'eux une nation de seconde classe.
Pour eux, la haine des Américains est liée à leur croyance
et foi et surtout au refus de l'ambition impérialiste de Washington. Et
cela rend une partie du peuple iranien furieux - pas seulement le clergé
au pouvoir, mais aussi la masse populaire. C'est un sujet tellement
émotionnel qu'aucun politicien n'osera revoir ses exigences à la
baisse.
Dans un long discours à la fois d'hommage au
père de la République islamique d'Iran et dénonciateur de
l'Occident et ses alliés, le Guide suprême de la Révolution
islamique disait ceci « ....Les hommes démunis de toute
perspicacité sont rapidement trompés. Même aujourd'hui, il
y a dans le monde, des gens sincères qui ont été
dupés, qui
164Armes de destruction massive : TOUT SUR LE
PROGRAMME NUCLEAIRE CIVIL IRANIEN,17fév, 2010
autrefraternite.com/2010/02/17/armes-de-destruction-massive-tout-sur-le-programme-nucleaire-civil-iranien/,
consulté le 16 Février 2015
109
n'ont pas pu connaître l'ennemi et qui n'ont pas pu
discerner le rang. En Iran, notre vénérable Imam, grâce
à la lucidité du peuple sur le fond de son endurance et de sa
résistance, a traversé ce chemin et a réussi.
Lui-même, il a été le facteur le plus efficace dans la
lucidité et la perspicacité du peuple. Là où dans
le monde, se passait une lutte, un mouvement, l'homme sincère et
dévoué qui avance pour émanciper les masses, doit savoir
que cette route ne sera franchie qu'avec la vigilance, la perspicacité,
l'endurance et la résistance.
La seconde vérité est que le facteur qui a
pu faire réussir le vénérable Imam et notre peuple
courageux sur la voie de cette grandiose lutte, furent la perspicacité
et l'endurance, comme l'avait dit l'Emir des croyants - béni soit-il -
et la raison réside dans le fait qu'aujourd'hui le combat ne s'accomplit
pas contre la mécréance absolue et l'associationnisme absolu et
que la question n'est pas clair, les rangs ne sont pas bien
séparés. Aujourd'hui, la lutte se fait contre l'hypocrisie, la
machination, la perfidie, des slogans creux, des mensonges et des fanfaronnades
que les haut-parleurs de l'Arrogance répercutent partout dans le monde.
Nombreux sont ceux qui posent en avocat des droits de l'Homme et qu'ils
mentent. Nombreux sont ceux qui parlent de l'Islam et qu'ils mentent. Leur
Islam est celui que préfèrent les leaders de l'Arrogance.
Nombreux sont ceux qui parlent de l'égalité et de
l'équité parmi les hommes et qu'ils mentent. Par
conséquent, le combat en une telle époque est un combat
difficile, aussi bien en raison de la puissance de l'argent et la tyrannie de
l'Arrogance que pour la puissance propagandiste et justificatrice des mensonges
et de l'hypocrisie de l'arrogance et de ses pions.
La troisième vérité est que le monde
entier - aussi bien les masses musulmanes et déshéritées
que le camp de l'Arrogance - a discerné, a compris que le foyer et l'axe
de ce mouvement qui avance aujourd'hui dans le sens des idéaux
islamiques, est la République islamique. Par conséquent, en
premier lieu, toutes les hostilités se convergent vers nous. Nous
distinguons parmi les propos chaleureux et apparemment amicaux, les signes de
l'hostilité et de l'inimitié. Nous sommes conscients dans quelle
mesure
110
l'Arrogance hait la République islamique, vous la
nation et ce vénérable Imam. Puisqu'ils le considèrent
comme vivant, ils n'ont pas renoncé même d'un iota de leur
animosité. Si le camp de l'Arrogance et ses médias et les ennemis
de l'Imam pensaient que l'Imam est mort, deux après son douloureux
décès, ils ne seraient pas si hostiles envers son nom et
lui-même qu'aujourd'hui.
L'Iran islamique, l'Iran de l'Imam, l'Iran de la
Révolution est l'axe et le centre du mouvement grandiose des musulmans
et dans ce même sens l'axe des animosités. Un tel constat, au lieu
de nous affecter, nous rend heureux. Au lieu de nous terrifier nous comble
d'espoir, puisqu'il montre que nous sommes puissants et que nous sommes une
menace contre les intérêts de l'arrogance, les
intérêts des voleurs et des pilleurs. L'animosité de
l'arrogance nous assure plus que jamais, le chemin progressiste de la
Révolution et constructeur du pays et de la société que
nous avons choisi, est juste et correcte. Si nous nous étions
engagés, dans notre mouvement contre les intérêts des
ennemis de l'humanité et dans le sens des intérêts de la
Révolution et du pays, sur un chemin faux, l'ennemi n'aurait pas fait
preuve autant d'animosité à notre encontre.
Aujourd'hui toutes les propagandes mondiales, sous
différentes formes, nous visent. Il se pourrait que certaines radios,
certains appareils médiatiques et propagandistes ne soient pas
explicitement contre nous, mais cela ne signifie pas non plus qu'ils soient nos
amis. Ils sont conscients que leurs injures explicites à notre encontre
ne feraient que nous rapprocher davantage le coeur des nations. C'est pour
cette même raison qu'au lieu d'injures explicites, ils portent des
accusations. Ils essaient de nous approcher et obtenir notre optimisme ! Ce ne
sont que de machinations et de trahisons. »165
Ici « l'arrogant » dont il est question n'est rien
d'autre que l'Occident avec pour chef de fil les Etats Unis d'Amérique.
Aussi parle-t-il de « leur islam », il fait référence
au sunnisme et l'Arabie Saoudite allié des Américains. Pour
Khomeiny et la majorité des
165Des extraits des propos du Guide suprême de
la Révolution islamique aux cérémonies marquant le
deuxième anniversaire du décès de l'Imam Khomeiny
(Référence incomplètes).
111
Iraniens, l'Arabie Saoudite de par sa relation avec Washington
dessert la religion musulmane, pour s'être lié au diable.
Le Dr William O. Beeman souligne aussi le fait que
la politique des États-Unis vis-à-vis du programme
nucléaire iranien a beaucoup changé depuis les années 1970
: "les membres de l'équipe de la Maison Blanche, qui sont en train
d'empêcher l'Iran de développer sa propre capacité
nucléaire et qui refusent de retirer le sujet d'une action militaire
contre l'Iran, oublient continuellement que ce sont les États-Unis qui
furent la maîtresse du programme nucléaire iranien il y a 30
ans"166. Le journal basé en Iran
Bastab167a récemment rapporté que les
États-Unis avaient fourni à l'Iran 5 kg d'uranium enrichi
à 19,7 % avant la révolution.
L'Iran estime aussi qu'elle a le droit légal d'enrichir
l'uranium pour des utilisations pacifiques. Les politiciens iraniens comparent
leur traitement en tant que signataire du TNP avec trois autres nations qui
n'ont pas signé le TNP168 : Israël, Inde et Pakistan.
Chacune de ces nations a développé une capacité
nucléaire militaire nationale : Israël en 1967, l'Inde en 1974 et
le Pakistan en 1990. Il est reproché à l'Iran de vouloir, bien
qu'il ait signé le traité de Non-Prolifération d'Arme
Nucléaire, se doter de cette arme. L'Iran ne pourra donc pas dans une
disposition juridique se fier à l'Israël, à l'Inde et
à la Pakistan, pays non signataires.
Relativement au traité de non-prolifération,
l'Iran évoque des aspects légaux leur donnant le droit. Selon eux
: rien dans ce traité ne devrait être interprété
comme affectant le droit inaliénable de toutes les parties du
traité à développer la recherche, la production
166Armes de destruction massive :
TOUT SUR LE PROGRAMME NUCLEAIRE CIVIL IRANIEN,17fév, 2010
autrefraternite.com/2010/02/17/armes-de-destruction-massive-tout-sur-le-programme-nucleaire-civil-iranien/,
consulté le 16 Février 2015
167Idem
168 Le traité sur la non-prolifération des armes
nucléaires (TNP) est un traité international conclu en 1968 et
signé
par un grand nombre de pays. Il vise à réduire
le risque que l'arme nucléaire se répande à travers le
monde, et son application est garantie par l'Agence internationale de
l'énergie atomique (AIEA).
112
et l'utilisation d'énergie nucléaire à
buts pacifiques sans discrimination et en conformité avec les articles I
et II de ce traité.
Toutes les parties du traité entendent faciliter et
avoir le droit de participer à l'échange d'équipement, de
matériel, d'information technologique et scientifique le plus large
possible afin d'utiliser pacifiquement l'énergie nucléaire. Les
parties au traité en position de le faire devront aussi coopérer
en contribuant seules, avec d'autres pays ou des organisations internationales
au développement ultérieur d'applications de l'énergie
nucléaire pacifique, particulièrement sur les territoires des
Etats membres du traité ne possédant pas l'arme nucléaire,
avec une considération particulière pour les besoins des
régions du monde en développement.
Le régime iranien nie donc vouloir fabriquer des armes
nucléaires. Les rigoristes iraniens se posent la question de savoir :
pourquoi l'Iran ne serait pas permis d'avoir une arme nucléaire ? Pour
eux, il y a une réelle hypocrisie de la part des États-Unis
à vouloir empêcher leur pays d'accéder à cette arme,
alors que plusieurs États voisins, le Pakistan, l'Inde et Israël,
disposent de cette technologie et des armes atomiques. C'est le droit du plus
fort que les États-Unis imposent en interdisant à l'Iran de
posséder la technologie nucléaire, alors qu'ils sont eux les
seuls à s'être servis de la bombe atomique jusqu'à
présent, défendent-ils.
En fait, les pressions occidentales sur ce sujet ont pour
objectif d'accentuer la dépendance de l'État iranien en le
privant d'une industrie nucléaire. D'autre part, l'Iran cherche à
s'affirmer comme puissance régionale en établissant des liens
avec les pays voisins, ce qui déplait profondément aux
États-Unis dans la mesure où le régime est fier de tenir
tête aux Occidentaux et refuse de se plier sous toutes ses formes aux
exigences américaines.
113
2- La réaction de la communauté
internationale.
Le nucléaire iranien a bien une histoire. La crainte
d'une arme nucléaire iranienne est antérieure à la
Révolution Islamique de 1979, lorsque le Shah Mohammad Reza Pahlavi
menait d'intenses négociations avec les Etats-Unis d'Amérique, la
France et l'Allemagne de l'Ouest concernant un projet d'investissement
énergétique devant aboutir à la construction de 20
réacteurs. Dès 1953, un programme nucléaire iranien est
développé par le Shah Mohammad Reza Pahlavi avec l'aide des
Etats-Unis d'Amérique dont le président Eisenhower a lancé
en 1953 le programme "Atomes contre paix". Un programme qui donne lieu à
la création, en 1957, de l'Agence internationale de l'énergie
atomique (AIEA)169.
Devenu membre de l'AIEA, le 16 septembre 1959, l'Iran signe,
en juillet 1968,le traité de non-prolifération nucléaire
(TNP), adopté par les Nations unies le 12 juin 1968 et devenu effectif
le 5 mars 1970. Toutefois, l'Iran, de même qu'Israël et le Pakistan
dans la région, n'ont pas paraphé le texte qui impose à
ses signataires des restrictions en matière de recherches dans le
domaine de l'armement nucléaire170. En Fin d'année
1970, les Etats-Unis d'Amérique reçoivent des renseignements de
la CIA selon lesquels le Shah aurait "mis en place un programme clandestin de
développement d'armes nucléaires".
En 1979 le Shah est renversé par la révolution
iranienne avec pour tête de file l'Ayatollah Khomeiny qui aboutit
à l'avènement de la République Islamique. Après le
renversement du Shah, les Etats-Unis d'Amérique ont cessé de
fournir de l'uranium hautement enrichi (UHE) à l'Iran.
En 1984, peu de temps après que des ingénieurs
ouest-allemands aient visité le réacteur nucléaire
inachevé de Bushehr171, la revue militaire Jane DefenseWeekly
publie
169www.lemonde.fr/. «
L'évolution du programme nucléaire iranien depuis 1953 »
publié 15. Novembre.2013,
consulté le 05 Février 2014. 170 Idem
171Bouchehr est située sur le golfe
Persique, à environ 1 215 km au sud de Téhéran. Bouchehr
est située à 12 kilomètres du site d'une centrale
nucléaire qui est construite en coopération avec la Russie. Les
travaux avaient été
114
des propos émanant des services de renseignement
allemands expliquant que la production par l'Iran d'une bombe "est dans sa
phase finale." Le sénateur américain Alan Cranston affirme que
l'Iran aura sa bombe dans sept ans.
C'est dans ce contexte que l'Israël dépeint l'Iran
comme son ennemi n°1 en 1992comme une nouvelle menace à son
l'existence de l'état hébreux. Le parlementaire israélien,
Benjamin Netanyahu172, annonce en 1992 à ses collègues
que l'Iran sera dans 3 à 5 ans en mesure de produire une arme
nucléaire et que cette menace doit être enrayée « par
un front international » dirigé par les Etats-Unis
d'Amérique
En cette même 1992, le ministre israélien des
affaire étrangères Shimon Peres173 déclare sur
une chaine de télévision française que l'Iran sera
doté de têtes nucléaires d'ici 1999. "L'Iran est la
plus grande menace et le plus grand problème au Moyen-Orient", a
averti M. Peres, «parce qu'il vise l'option nucléaire tout en
maintenant une position très dangereuse de militantisme religieux
extrême».
Joseph Alpher, un ancien fonctionnaire du
Mossad174, déclare 1992 que « l'Iran doit être
identifié comme l'ennemi n ° 1. » Le programme
nucléaire iranien naissant, a-t-il déclaré au New York
Times, « donne vraiment la frousse à Israël
».
Les Etats-Unis d'Amérique se joignent aux
avertissements de 1992 à 1997. La sonnette d'alarme a retenti à
Washington quant au début de 1992 un groupe de travail du House
Republican Research Committee affirme qu'il y a «98 % de certitude que
l'Iran a déjà tous (ou presque tous) les éléments
nécessaires pour deux ou trois armes nucléaires
opérationnelles. » Des prédictions similaires sont
émises par le chef de la CIA de l'époque, Robert Gates, selon qui
le programme nucléaire iranien pourrait être un
«problème grave» dans cinq ans ou moins. Cependant, la
bureaucratie a pris un certain
bouchehr est située sur le golfe persique, a environ
1215 km au sud de Téhéran. Bouchehr est située à
12km du site d'une centrale nucléaire qui est construite en
coopération avec la Russie. Les travaux avaient été
commencés par l'entreprise allemande Kraftwerk Union A.G., une filiale
de Siemens AG, qui avait signé en 1975 un contrat pour construire deux
réacteurs nucléaires pour 4 à 6 milliards de dollars
172 Actuel premier ministre de l'Etat Hébreux (Son
parcours et les infos utiles. Exemple son parti)
173 Actuel président de l'Israël
174Mossad, Institut pour les renseignements et les
affaires spéciales, est l'une des trois agences de renseignement
d'Israël, avec le Shabak (plus connu sous le nom de « Shin Beth
», qui est le service de sécurité intérieure) et
l'Aman (chargé de la sécurité militaire).
115
temps pour intégrer la rhétorique menaçante
sur l'Iran.
Une fuite d'un rapport du Pentagone « Stratégie de
défense pour les années 1990 » fait peu
référence à l'Iran, bien qu'il envisage sept
scénarios de futurs conflits potentiels qui s'étendent de l'Irak
à la Corée du Nord.
Le New York Times exprime publiquement en 1995, les
craintes des responsables Américains et Israéliens affirmant que
"l'Iran est beaucoup plus proche de la production d'armes nucléaires
qu'on ne le pensait" (environ cinq ans seulement) et que la bombe
nucléaire de l'Iran est « en tête de liste » des dangers
dans la décennie à venir. Le rapport parle d'une
«accélération du programme nucléaire iranien" et
affirme que l'Iran "a commencé une campagne intensive pour
développer et acquérir des armes nucléaires» en 1987
et aurait recruté des scientifiques de l'ex-Union soviétique et
du Pakistan pour le conseiller.175
En 1997, le Christian Science Monitor rapporte que
les pressions américaines sur les fournisseurs nucléaires de
l'Iran ont forcé l'Iran à adapter son calendrier
présumé pour une bombe. Aujourd'hui, les experts disent que
l'Iran a peu de chances d'acquérir des armes nucléaires avant
huit ou 10 ans.
Nous sommes dans un contexte de rhétorique contre
« l'axe du mal » qui tire sa source dans le discours de Donald
Rumsfeld176 1998. Un satellite espion
américain détecte le lancement d'un missile Iranien de moyenne
portée, suscitant des spéculations sur le danger posé
à Israël. L'Etat Hébreu se sent moins en
sécurité à la suite du lancement, même s'il est le
seul pays au Moyen-Orient à posséder à la fois l'arme
nucléaire et les missiles à longue portée, la
détention par l'Iran d'une arme nucléaire créera la peur
certaine. Cet essai montre que l'Iran est résolu à
acquérir des armes nucléaires, parce qu'il est difficile de
comprendre qu'on construise un missile d'une portée de 1200 km pour
envoyer des ogives conventionnelles. Très logiquement la principale
réaction à ce qui se passe viendra d'Israël, et les Iraniens
devront craindre des
175
http://www.alterinfo.net/Menace-nucleaire-imminente-de-l-Iran-Une-chronologie-des-avertissements-depuis-1979,
28 Septembre 2012, consulté le Mars 2014.
176 Ancien Secrétaire d'État Américain.
116
mesures que les israéliens pourraient prendre. En 1998,
la même semaine, l'ancien secrétaire à la Défense
Donald Rumsfeld présente un rapport au Congrès affirmant que
l'Iran aura la capacité de construire un missile balistique
intercontinental pouvant atteindre les Etats-Unis d'ici cinq ans. La CIA a
donné quant à elle un délai de 12 ans.
La CIA avertit en 2002 que le danger de missiles à
tête nucléaire, en particulier ceux de l'Iran et de la
Corée du Nord, est plus élevé que pendant la guerre
froide. Robert Walpole, et la CIA, racontent devant une commission du
Sénat que la capacité de missiles de l'Iran a augmenté
plus rapidement que prévu dans les deux années
précédentes et qu'il sera bientôt à
égalité avec la Corée du Nord. Cela représente une
grande menace pour les Américains et leurs intérêts si
leurs adversaires continuent à croître les capacités
militaires. En cette même année : Le président George W.
Bush ajoute l'Iran à la liste des pays faisant partie de « l'axe du
mal » avec l'Irak et la Corée du Nord.
3- Les atouts et visées géopolitiques
Au point de départ : les relations entre Washington et
Téhéran furent cordiales par le passé. Le premier
Ambassadeur iranien se rend à Washington à la fin du
XIXème siècle. Conformément à la doctrine
Monroe177, les Etats-Unis regardent peu du côté de
l'Iran durant la première moitié du XXème siècle
La toute première inquiétude américaine
à voir l'Iran se doter de l'arme nucléaire vient du fait que les
États-Unis accusent l'Iran de soutenir le terrorisme international.
L'administration américaine estime que l'Iran n'a pas besoin
d'énergie nucléaire puisque possédant d'abondantes
réserves de pétrole, ce serait bien moins cher de fabriquer de
l'énergie à partir de pétrole plutôt que de
fabriquer de l'énergie nucléaire. En fin 2002, les
177La doctrine de Monroe (Le 2décembre1823)
a caractérisé la politique étrangère des
États-Unis durant le XIXe et le début du
XXe siècle. Tirée du nom d'un président
républicain des États-Unis, James Monroe, elle condamne toute
intervention européenne dans les affaires « des Amériques
» (tout le continent) comme celle des États-Unis dans les affaires
européennes.
117
États-Unis déclarent que Téhéran
s'est « rendu responsable » d'avoir cherché à fabriquer
des armes nucléaires en violation des accords signés. Depuis
lors, le programme de développement nucléaire iranien occupe une
place de choix sur la scène de la politique internationale et du
Moyen-Orient.
Une raison essentielle de l'opposition américaine
réside aussi dans la géopolitique du Moyen-Orient. Doit-on
rappeler, que le Moyen-Orient revêt une importance géopolitique
majeure. Cette région détient la moitié des
réserves d'hydrocarbures mondiales, abrite les lieux saints des trois
religions monothéistes et se situe au carrefour des principales routes
du commerce mondial. Essentiellement, les États-Unis éprouvent la
nécessité de prévenir toute possibilité pour l'Iran
d'avoir la capacité de s'armer avec le nucléaire. Une partie de
la technologie nucléaire est à double usage, c'est-à-dire
qu'elle peut servir à fabriquer de l'énergie pacifique mais peut
aussi, selon les pays s'opposant à son programme, servir à
fabriquer des armes nucléaires. Ce cas de figure a déjà eu
lieu dans les années 1960 lorsque l'Inde s'est dotée de son
propre programme d'armement nucléaire.
Un Iran nucléaire dans cette configuration politique
affaiblirait considérablement l'emprise de l'Occident. Mieux cela ne
représente plus un secret que l'Iran, a très souvent
apporté son soutien au Hamas et surtout à Hezbollah, toutes deux
considérés par Washington comme des organisations terroristes.
118
II-LES GRANDES QUESTIONS GEO-POLITIQUES ET STRATEGIQUES
AUTOUR DU NUCLEAIRE IRANIEN
1- Les fondements géostratégiques de la
position américaine
Le Moyen-Orient est l'ensemble d'une superficie de 7,5
millions de km2 et une population de 350 millions d'habitants (2005).
Superficie et population équivalent aux deux tiers de l'Europe (de
l'Atlantique à l'Oural). D'où un espace très important.
Dans cette région sont nées il y a plusieurs millénaires
les grandes inventions qui ont permis à l'humanité de sortir de
l'Âge de pierre : l'écriture, l'urbanisation, l'agriculture, les
sciences physiques et mathématiques...
La possession par l'Iran de l'arme nucléaire n'aura
d'autres fin, selon les Etats Unis d'Amérique, que de vouloir s'imposer
comme une puissance indiscutable dans la région, c'est à dire
comme un moyen de coercition à leur endroit pour leur imposer ses vues.
Cela sera un coup dur pour les Américains. Alors stratégiquement
le risque est particulièrement élevé qu'un jour puissent
être utilisées des armes nucléaires au Moyen-Orient,
où le seul pays qui les possèderaient serait l'Israël qui,
à la différence de l'Iran, n'ont pas ratifié au
Traité de non-prolifération. Selon les estimations, les forces
armées israéliennes possèdent 100 à 400 têtes
nucléaires, y compris des bombes H, avec une puissance
équivalente à presque 4 000 bombes d'Hiroshima. Les vecteurs
comprennent plus de 300 chasseurs étasuniens F-16 et F-15, armés
aussi de missiles israélo-étasuniens Popeye à tête
nucléaire, et environ 50 missiles balistiques Jericho II sur rampes de
lancement mobiles. Israël possède en outre 4 sous-marins Dolphin,
modifiés pour l'attaque nucléaire, fournis par
l'Allemagne.178
Tandis qu'il surveille de près l'Iran, qui ne
possède pas d'armes nucléaires, l'appareil
politico-médiatique laisse dans l'ombre le fait qu'Israël
possède un puissant arsenal nucléaire, hors de tout
contrôle, et que les États-Unis ont signé des accords
pour
178Pierre RAZOUX, Tsahal : nouvelle histoire de
l'armée israélienne, Éditions Perrin, 2008, p.
577.
119
la fourniture à l'Arabie Saoudite, au Bahreïn et
aux Émirats arabes de technologies nucléaires et de
matériau fissile avec quoi ils peuvent se doter, dans l'avenir, d'armes
nucléaires.
Il faut également rappeler que depuis la mise en oeuvre
du Traité de Non-prolifération nucléaire de 1970, quatre
pays - Israël, l'Inde, le Pakistan et la Corée du Nord - ont acquis
l'arme nucléaire. Les trois derniers furent d'ailleurs soumis à
d'importantes sanctions de la part des Etats-Unis avant que, devant le fait
accompli, ils n'entrent dans le club des puissances nucléaires. Ces
précédents soulignent donc que les sanctions économiques
n'ont jamais empêché la prolifération ; les pressions des
puissances occidentales n'ayant souvent réussi qu'à retarder
l'aboutissement d'activités d'enrichissement débouchant tôt
ou tard sur l'acquisition de la bombe.
Les relations internationales se font et se défont au
prix des intérêts. Souvent discutée mais rarement
définie, la politique étrangère iranienne telle
définit dans les textes fondamentaux de la République s'articule
autour de deux axes majeurs : garantir l'indépendance de l'Iran et la
préservation du régime islamique - de constituer autour de l'Iran
une sphère d'influence protectrice. Or la poursuite de ces deux
objectifs a des retombées majeures tant pour le dossier nucléaire
que pour le dossier `'américain au moyen orient».
Malgré tout ce qui est dit sur ses aspects techniques,
le programme nucléaire iranien répond aux mêmes types de
préoccupations géopolitiques. Il faut comprendre que le
nucléaire n'est pas une fin en soi mais un moyen au service de ses deux
objectifs stratégiques - la protection du régime et la promotion
de son influence régionale. L'acquisition de la puissance
nucléaire supporte ces deux impératifs en offrant à
Téhéran : une assurance-vie garantissant la
pérennité du régime islamique et l'indépendance du
pays ; et une source de prestige permettant, en outre, de développer
120
autour de l'Iran et de ses alliés un dôme
protecteur.179 Partant de là, nous pouvons tout simplement
désespérer par rapport à une accalmie dans cette relation,
car les positions sont et restent diamétralement opposées.
Depuis plus d'un quart de siècle, les responsables
occidentaux ont affirmé à plusieurs reprises que l'Iran
était proche de rejoindre le club des pays détenteurs de l'arme
nucléaire. Une telle possibilité a toujours été
considérée comme «inacceptable» et la raison possible
pour une action militaire avec « toutes les options envisageables»
dans le but d'empêcher l'Iran de perturber l'équilibre
stratégique au Moyen-Orient dominé par les Etats-Unis et
Israël.
2- La position des pays du Golfe
L'intervention irakienne en Iran, leur sert d'exemple pour
mesurer la capacité de nuisance de l'Iran non seulement vis-à-vis
de ses voisins, mais également dans la région. En cas de conflit
militaire ouvert avec les Etats-Unis, qui ne sera pas de l'avis
général un conflit limité, tous les pays de la
région en subiront les retombées. Même la solution
pacifique n'arrange guerre les pays arabes voisins, étant donné
que l'Iran s'arrogera le rôle dirigeant dans les affaires
régionales, notamment dans les dossiers phares palestiniens et
irakiens.
Les pays arabes craignent en effet que l'objectif iranien,
d'avoir une capacité nucléaire ne soit pas seulement de faire
face à Israël, mais surtout de s'imposer comme une puissance
indiscutable dans la région. C'est dire combien l'Iran continue à
faire peur d'une manière exagérée ses voisins arabes.
Ryad s'est toujours senti menacé par l'Iran en raison
de sa position géographique mais également à cause du
déséquilibre démographique. L'Iran fait près de 80
millions
179 Pierre PAHLAVI, « Iran - Occident : quels obstacles
géopolitiques ? » , publié le 6 février 2015 sur
http://www.diploweb.com/Iran-Occident-quels-obstacles.html,
consulté le 22 Avril 2014.
121
d'habitants, contre une trentaine pour l'Arabie Saoudite. Par
ailleurs, l'Iran dispose d'une armée beaucoup plus opérationnelle
que sa rivale. Le pays a deux armées : une armée
régulière et les gardiens de la révolution180.
Enfin, Téhéran n'a pas renoncé à sa volonté
d'étendre son influence au Moyen-Orient, c'est là que
réside la plus grande crainte de Ryad. Que ce soit au Liban, en Syrie,
en Irak ou au Yémen, l'Arabie saoudite sent son influence menacée
partout dans la région.
Le Royaume d'Arabie Saoudite, craint également pour le
sunnisme, depuis maintenant des siècles la guerre de positionnement
entre le Sunnisme et le Chiisme fait rage. Alors stratégiquement la
possession de l'arme nucléaire par l'Iran, lui donnera non seulement une
influence politique dans la région mais assurera la conquête de
nouvel espace en vue d'étendre son hégémonie et sa
croyance. La Turquie, le Yémen, le Qatar des Etats proche des Etats Unis
d'Amérique sont du même avis. Ils s'inquiètent de la
possible acquisition de l'arme atomique par "un régime relativement
imprévisible et instable".
3- L'Iran à l'épreuve de l'embargo occidental
: impact sur l'économie iranienne
Les relations diplomatiques entre l'Iran et les Etats-Unis
sont rompues au moment de la prise d'otages de 1979 181 . Les
procédés d'isolation économique mais aussi
rhétorique de l'Iran employés sous Clinton et Bush, rappellent
étrangement les années de Guerre froide. Bien que souvent
spectaculaires, les échanges entre les deux pays paraissent tout au
moins anachroniques, tout au plus une démonstration de mauvaise foi.
Les années 1990 correspondent à la doctrine de
dual containment. Formulée dans les années 1993-1994,
elle correspond à l'endiguement (containement) de l'Iran et de
l'Irak, principaux adversaires d'Israël dans la région. Clinton
décrète 182 un embargo sur l'Iran de Rafsanjani
(1995), accusé de développer un arsenal nucléaire et
d'être une base
180Dont on constate encore la force aujourd'hui en
Irak contre Daesh
181 Les intérêts américains sont depuis
représentés par l'Ambassade suisse
182 Executive Order 12959,
http://www.iranwatch.org/library/government/united-states/executive-branch/white-house/executive-order-1295
122
arrière pour l'entraînement de terroristes.
L'année suivante, le Congrès adopte l'Iran and Lybia
Sanctions Act (ILSA) qui pénalise les entreprises dans ces deux
pays.
Pour les occidentaux l'alternative la plus sérieuse au
problème posé par l'acquisition de l'arme nucléaire par
l'Iran reste la mise en place de sanctions internationales par l'ONU. Les
États-Unis appliquent déjà des sanctions vis-à-vis
de la République Islamique.
Cependant, les sanctions appliquées dès les
premières années de la Révolution islamique ont
renforcé la volonté de l'Iran d'atteindre l'autosuffisance
économique, synonyme d'indépendance vis-à-vis des
puissances étrangères. Malgré des obstacles
conséquents - les huit années de guerre contre l'Irak, le
doublement de la population en l'espace d'une génération, l'Iran
est parvenu à développer certains secteurs d'activité tels
que l'industrie pétrochimique, l'automobile, ainsi que les technologies
de l'information et de la communication, tout en demeurant cependant loin
d'atteindre l'intégralité des buts fixés. L'Iran reste un
gros importateur de produits alimentaires et son économie n'a pu se
maintenir que grâce au flux constant des revenus du pétrole, qui
représentent la première source de richesse du pays.
En outre, les sanctions n'ont pas empêché l'Iran
de maintenir - et même parfois d'augmenter- le volume de ses
échanges avec l'extérieur, notamment ses exportations de produits
"traditionnels" liés à l'artisanat tels que les tapis et les
céramiques, ou encore alimentaires tels que le safran et les pistaches.
Le pays a également mis en place de nombreux partenariats
économiques et techniques avec l'Inde, la Chine, la Corée du
Nord, le Venezuela et la Syrie, et a considérablement
développé ses échanges avec des pays frontaliers comme la
Turquie ou le Pakistan.
Ces efforts ont été de pair avec
l'ébauche de divers projets commerciaux intra zone, notamment au travers
de la fondation de l'Organisation Economique de
123
Coopération183 en 1985 qui prévoit
à terme la création d'une zone de libre-échange entre
l'Iran, le Pakistan, la Turquie, l'Afghanistan et l'Asie centrale
Même si toute évaluation précise de
l'effet des sanctions sur l'économie dans son ensemble s'avère
difficile, certaines études réalisées sur ce sujet
s'accordent à dire que les sanctions ne portant pas sur l'industrie
pétrolière n'ont eu aucun effet notoire sur l'économie
iranienne. Cela reste un débat La conclusion est différente
concernant cette dernière. On peut ainsi supposer et cela peut
être une évidence, qu'en l'absence de sanctions, de nombreuses
compagnies étrangères et notamment américaines auraient
investi en Iran, améliorant ainsi la compétitivité de ce
secteur et notamment ses capacités d'extraction et de raffinage.
Selon d'autre observateurs l'embargo commercial des
États-Unis d'Amérique constitue un handicap tous les jours, plus
grand pour les entreprises non américaines travaillant en Iran qui ont
besoin de brevets ou de pièces venant d'Outre-Atlantique. La loi d'Amato
qui « interdit », (en contradiction avec les règles de
l'Organisation Mondiale du Commerce), les investissements pétroliers en
Iran reste une menace pour les rares entreprises qui travaillent dans ce pays.
Le groupe Total est le premier à être passé outre
dès 1995.
Outre leurs effets économiques incertains, force est de
constater que ces mesures n'ont pas atteint leurs objectifs politiques et
diplomatiques : la ligne politique iranienne est restée la même,
et les activités d'enrichissement de l'uranium se sont poursuivies sans
discontinuer. Des assassinats de scientifiques nucléaires iraniens ont
eu lieu, et proviendraient d'Israël. Selon l'Iran, quatre scientifiques
nucléaires iraniens, qui travaillaient à la centrale de Natanz,
ont été assassinés en deux ans.
L'autre conséquence de l'embargo est que la plupart des
anciens gardiens de la Révolution qui accèdent depuis peu
à des responsabilités de haut niveau n'ont en effet aucune
connaissance du monde extérieur à l'Iran. Plus grave encore, leur
seule
183Economic Cooperation Organization, ou ECO
124
expérience a été celle de la guerre
Irak-Iran. L'isolement du pays depuis vingt-cinq ans et la politique officielle
de « lutte contre l'agression culturelle occidentale » ne leur a pas
permis d'aller à l'étranger si bien qu'ils ne parlent pas ou peu
les langues étrangères et surtout qu'ils n'ont pas
d'expérience personnelle des cultures du monde. On est loin des conseils
donnés aux premiers étudiants boursiers iraniens se rendant en
Europe en 1927 à qui on demandait de « devenir français
» tout en leur apprenant à nouer une cravate.184
En guise de conclusion partielle à cette partie, nous
pouvons mentionner que la crise des otages américains dans leur
Ambassade à Téhéran ouvre officiellement la
belligérance entre Washington et Téhéran. Cet
événement a montré à toute la communauté
internationale jusqu'où les nouvelles autorités de
Téhéran étaient déterminées à tourner
la page de l'Iran occidental. Cette crise eu donc des conséquences
énormes sur les relations Américano-iraniennes
184 Bernard HOURCADE, « Iran : l'illusion réformiste
», publié en février 2006 sur
https://transcontinentales.revues.org,
consulté le 13 Mars 2015
125
CONCLUSION GENERALE
126
Les Etats Unis d'Amérique et l'Iran ont longuement
entretenu des relations très cordiales qui permirent à l'Iran de
s'imposer dans la région du Golfe Persique, comme une puissance
économique et militaire. Mais lassée par un pouvoir
impérial et sanguinaire qui n'a que trop duré, avec son alliance
impopulaire voire indésirable avec l'Occident, mieux avec les
Américains, la population iranienne exprime son désir
d'alternance.
Sous le leadership de l'Ayatollah Khomeiny, une grande et
longue révolution met fin au pourvoir du Shah en 1979. Cette
révolution va marquer un tournant important dans la politique
américaine en Iran, justifiée par un gouvernement iranien devenu
plus fondamentaliste et anti occidental. C'est la naissance de la
République Islamique d'Iran.
On assiste d'abord à une montée du nationalisme
chez les iraniens et ensuite à la naissance de l'islam politique, avec
les Ayatollah au pouvoir, une théocratie ; un système dans lequel
le pouvoir est censé émaner de Dieu, réside dans les mains
du clergé. Dans ce système deux types d'institutions se dessinent
: une première catégorie fruit d'élection, moins
importante et l'autre non élue, mais de pouvoir presque divin.
Khomeiny réussit un grand coup : s'imposer comme leader
incontestable de la
République Islamique. Aussi, sa force a
été de pouvoir utiliser une
idéologie réactionnaire, d'inspiration divine, comme drapeau
d'une révolte populaire contre l'oppression, l'injustice et la tyrannie.
Khomeiny a également triomphé parce qu'il a apporté aux
pauvres un sentiment de revanche sociale.
Élevé dans la foi musulmane chiite, Khomeiny se
voit chargé d'une mission divine. Sa volonté de s'imposer dans le
Moyen-Orient est vue par les Américains comme une réelle menace
pour leurs intérêts dans la région. Déjà, la
perte de leur influence en Iran a été un regret historique, ainsi
aucune autre perte d'espace ne saura être envisagée par
Washington. La guerre Irak-Iran de 1980 à 1988, manifeste en quelque
sorte la colère contre Téhéran. La guerre prend fin en
1988 avec des centaines de milliers de morts, mais sans régler
efficacement le compte à Téhéran.
127
Après la révolution de 1979, l'Iran de Khomeiny
a informé l'AIEA* de ses plans pour redémarrer son
programme nucléaire en utilisant du combustible produit nationalement,
et en 1983, l'AIEA avait même prévu d'aider l'Iran via son
programme d'assistance technique afin de produire de l'uranium enrichi.
Le but de l'AIEA en Iran était de contribuer à
la formation d'une expertise locale et de la main-d'oeuvre nécessaire
pour soutenir un programme ambitieux dans le domaine de la technologie des
réacteurs nucléaires et du cycle du combustible. Cependant,
l'AIEA a été forcée de terminer ce programme sous la
pression américaine qui pense que l'Iran n'a d'autre intention que de
fabriquer l'arme fatale.
L'accession de l'Iran au rang de puissance militaire
nucléaire est vue comme un cauchemar pour beaucoup en Occident et
surtout pour les américains et leurs alliés. Instabilité
au Moyen-Orient, prix du pétrole plus haut, risques terroristes
persistants : la crise nucléaire iranienne est un nouveau facteur de
tension, l'un des plus menaçants de notre siècle. Cette crise a
longuement dominé les échanges internationaux et apporter un plus
à l'étude des Relations internationales en tant que
discipline.
Le refus des Usa de voir l'Iran se doter d'armes
nucléaires, se justifie à plus d'un tire. La République
Islamique d'Iran est vue comme un Etat imprévisible et violent qui
pourrait dans un angle géostratégique déranger la
quiétude des Américains dans la zone. Déjà les
menaces iraniennes à l'endroit d'Israël, les prises de position des
leaders iraniens, ne laissent pas Washington indifférent. La crise
s'enlise, l'Iran fait preuve de résistance face aux embargos
imposés par les occidentaux.
En somme, de la révolution Islamique d'Iran à la
crise du nucléaire iranien, en passant par la guerre Iran-Irak, l'on eut
droit à une période très favorable à
l'appréciation et à l'étude des Relations Internationales
: non seulement comme discipline de l'histoire, mais aussi comme
réalité d'étude des faits qui lient deux nations.
Aujourd'hui encore, ces deux nations de par leur position
hégémonique et leur ambition diamétralement opposée
jouent un rôle de choix dans les relations internationales.
128
En revanche notre étude comporte quelques
insuffisances. Une des difficultés majeures à laquelle nous avons
été admis est la fermeture pour réhabilitation de la
bibliothèque de l'université Felix Houphouët Boigny. Pour y
palier nous nous sommes oriente vers d'autre en dehors de l'Université.
Ensuite une autre difficulté que nous avons connue est la question des
sources iraniennes. Elles se font rares dans nos bibliothèques. D'autre
part, du côté occidental plusieurs ouvrages ont été
publié sur le sujet, laissant voir un réel
déséquilibre. De même nous n'avons pas trop eu de
références bibliographiques sur le nucléaire iranien, en
raison du manque de documents sur la question du a sa
spécificité.
Parlant toujours de difficultés, nous avons aussi
remarqué le grand manque de document imprimé sur la question
irano-américaine. Cet obstacle nous a amené à nous
référer aux bibliothèques électroniques (Lecture
d'ouvrage en ligne), souvent, à travers des amis étudiants
résidents hors du pays.
Par ailleurs, que pouvons-nous dire des résultats de cette
étude ?
Pour répondre à notre problématique nous
pouvons dire que la chute du Shah d'Iran en 1979 et l'instauration du pouvoir
révolutionnaire de l'Ayatollah Khomeiny dans une République
théologique ont constitué des facteurs essentiels de rupture
entre Washington et Téhéran. Par ailleurs, l'ambition
impérialiste de l'Iran dans la région du Golfe, grande zones
géostratégique des Américains a favorisé la
recomposition stratégique de la région avec des jeux
d'alliance.
Cette étude nous a permis de déduire que le
Golfe n'est pas seulement une route vitale pour le grand commerce
international, il est, depuis des siècles, un réservoir de
richesses de perles. Il est aujourd'hui le plus grand réservoir
énergétique de la planète qui concentre, à lui
seul, plus de 60 % des réserves mondiales de pétrole. En fait
celui qui contrôle le Golfe, contrôlent aussi le besoin
énergétique des pays industrialisés, les nations d'Europe
et le Japon, et de ceux qui sont en passe de le devenir, comme la Chine.
129
Alors notre étude montre pleinement pourquoi la
relation politique entre les Etats Unis d'Amérique et
Téhéran est restée en tendue de 1979 à 2002. L'Iran
ne désarme pas de son projet de pays leader de la zone et affiche
constamment son mépris pour l'Israël qu'il ne reconnait même
pas comme pays, mieux qui devrait être « raillé » de la
carte du monde. Son soutien ouvert aux mouvements Chiite libanais, Hisboullah,
considéré comme organisation terroriste par Washington n'est pas
du gout de celui.
Nous sommes conscients que la réponse à notre
problématique va inéluctablement donner vie à plusieurs
autres aspects d'analyse. Notre sujet, lancé dans l'explication les
fondements de la dégradation des relations entre les Américains
et les Iraniens, pourrait s'étendre pour mieux appréhender les
questions liées à la résistance économique
iranienne durant cette période de rupture diplomatique avec son
corollaire de privation, d'embargo et de sanction.
Aussi pourrions-nous aborder dans une autre perspective la
question de la relation diplomatique et économique entre la
république Islamique d'Iran et l'Afrique durant cette période de
belligérance avec Washington.
130
ANNEXES
131
LISTE DES ANNEXES
Annexe 1 : RÉSOLUTION 598 SUR LE CONFLIT ENTRE
L'IRAN ET
L'IRAK P113
Annexe 2 : LA CONSTITUTION DE LA REPUBLIQUE
ISLAMIQUE
D'IRAN .P116
132
Annexe 1
Date: 20 juillet 1987
Un conflit meurtrier éclate entre l'Irak et l'Iran
le 22 septembre 1980. Plusieurs initiatives diplomatiques sont tentées
pour y mettre fin. Le Conseil de sécurité des Nations unies
adopte des résolutions favorisant la tenue d'un cessez-le-feu. Celle qui
suit date du 20 juillet 1987. Il faudra cependant attendre le 20 août
1988 avant que les hostilités ne cessent, quelques semaines après
l'adoption d'une autre résolution des
Nations unies.
Sélection et mise en page par l'équipe de
Perspective Monde
The Security Council,
Reaffirming its resolution 582 (1986)
Deeply concerned that, despite its calls for a cease-fire, the
conflict between Iran and Iraq continues unabated, with further heavy loss of
human life and material destruction,
Deploring the initiation and continuation of the conflict,
Deploring also the bombing of purely civilian population
centers, attacks on neutral shipping or civilian aircraft, the violation of
international humanitarian law and other laws of armed conflict, and, in
particular, the use of chemical weapons contrary to
obligations under the 1925 Geneva Protocol,
Deeply concerned that further escalation and widening of the
conflict may take place, Determined to bring to an end all military actions
between Iran and Iraq,
Convinced that a comprehensive, just, honourable and durable
settlement should be
achieved between Iran and Iraq,
Recalling the provisions of the Charter of the United Nations
and in particular the
133
obligation of all member states to settle their international
disputes by peaceful means in such a manner that international peace and
security and justice are not endangered,
Determining that there exists a breach of the peace as regards
the conflict between Iran
and Iraq,
Acting under Articles 39 and 40 of the Charter of the United
Nations,
1. Demands that, as a first step towards a negotiated
settlement, Iran and Iraq observe an immediate cease-fire, discontinue all
military actions on land, at sea and in the air, and withdraw all forces to the
internationally recognized boundaries without delay;
2. Requests the Secretary-General to dispatch a team of
United Nations Observers to verify, confirm and supervise the cease-fire and
withdrawal and further requests the Secretary-General to make the necessary
arrangements in consultation with the Parties and to submit a report thereon to
the Security Council;
3. Urges that prisoners of war be released and repatriated
without delay after the cessation of active hostilities in accordance with the
Third Geneva Convention of 12
August 1949;
4. Calls upon Iran and Iraq to cooperate with the Secretary-
General in implementing this resolution and in mediation efforts to achieve a
comprehensive, just and honourable settlement, acceptable to both sides, of all
outstanding issues in accordance with the principles contained in the Charter
of the United Nations;
5. Calls upon all other States to exercise the utmost
restraint and to refrain from any act which may lead to further escalation and
widening of the conflict and thus to facilitate the
implementation of the present resolution;
6. Requests the Secretary-General to explore, in consultation
with Iran and Iraq, the question of entrusting an impartial body with inquiring
into responsibility for the conflict and to report to the Security Council as
soon as possible;
7. Recognizes the magnitude of the damage inflicted during
the conflict and the need for reconstruction efforts, with appropriate
international assistance, once the conflict is ended and, in this regard,
requests the Secretary-General to assign a team of experts to study the
question of reconstruction and to report to the Security Council;
8.
134
Further requests the Secretary-General to examine in consultation
with Iran and Iraq and with other states of the region measures to enhance the
security and stability of the region;
9. Requests the Secretary-General to keep the Security Council
informed on the
implementation of this resolution;
10. Decides to meet again as necessary to consider further steps
to insure compliance with this resolution.
Source:
http://www.persee.fr/doc/afdi_0066-3085_1988_num_34_1_2828
135
Annexe 2
Un extrait de la Constitution de la République
Islamique d'Iran, 1979
Adoptée le 24 Octobre 1979
Entrée en vigueur depuis le 3 Décembre
1979 Révisée le 28 Juillet 1989
FREAMBULE
La Constitution de la République Islamique d'Iran est
l'expression des institutions culturelles, sociales, politiques et
économiques de la société iranienne basées sur les
principes et préceptes islamiques qui sont le reflet de l'aspiration de
la communauté islamique. La nature de la grande Révolution
Islamique de l'Iran, et le processus de lutte du peuple musulman du
début jusqu'à la victoire qui se cristallisaient dans les slogans
de toutes les couches du peuple, ont exprimé cette aspiration
fondamentale ; et à présent, à l'aube de cette grande
victoire, notre nation réclame avec force son accomplissement.
La particularité fondamentale de cette
révolution par rapport aux autres mouvements en Iran au cours du
siècle dernier, est d'être idéologique et islamique.
La Nation musulmane de l'Iran, après avoir
traversé le mouvement constitutionnel anti-despotique et le mouvement
anti-colonial de la nationalisation du pétrole, a acquis cette lourde
expérience que la raison fondamentale et caractérisée de
l'absence de réussite de ces mouvements, était l'absence
d'idéologie dans ces luttes. Bien que, dans les derniers mouvements, la
ligne de pensée islamique et la direction du clergé combattant
aient eu une part essentielle et fondamentale, mais en raison de
l'éloignement de ces luttes des positions islamiques traditionnelles,
les mouvements ont été très vite entraînés
vers l'immobilisme.
A partir de là, la conscience éveillée de
la nation, sous la direction de son éminence le Grand Ayatollah Imam
Khomeiny, s'est aperçue de la nécessité de poursuivre la
voie du mouvement idéologique et islamique traditionnel ; et cette fois,
le clergé combattant du pays, qui était constamment en
première ligne des mouvements populaires, et les écrivains et
intellectuels engagés, ont trouvé un nouveau dynamisme sous Sa
direction (le début du récent mouvement de la nation iranienne
date de l'année 1382 du calendrier lunaire, correspondant à
l'année 1341 du calendrier solaire (1962).
136
L'aube du mouvement
La protestation fracassante de l'Imam Khomeiny contre le
complot américain de la "Révolution Blanche", qui était un
pas vers la consolidation des piliers du règne du despotisme et le
renforcement des dépendances politiques, culturelles et
économique de l'Iran à l'égard de l'impérialisme
mondial, devint le facteur du mouvement unanime de la nation et aboutit
à la révolution grandiose et sanglante de la communauté
islamique au mois de Khordad 1342 (mai 1963), qui était
en réalité le point de départ de l'épanouissement
de ce soulèvement glorieux et étendu, consolida et
renforça le rôle central de l'Imam en qualité de guide
islamique, et malgré son exil hors de l'Iran à la suite de la
protestation à l'encontre de la loi honteuse de Capitulation
(immunité des conseillers américains) l'union solide de la
communauté avec l'Imam devint permanente, et le peuple musulman, et en
particulier les intellectuels engagés et le clergé combattant
poursuivirent leur voie au travers de l'exil et de la prison, de la torture et
des exécutions.
Entre temps, la couche consciente et responsable de la
société, sous l'abri des mosquées, des centres
d'instruction et de l'université, s'est mise à éclairer
l'opinion, et, en s'inspirant de l'idéologie révolutionnaire et
riche de l'Islam, entreprit un effort continu et fructueux pour
l'élévation du niveau de connaissance et de vigilance combative
et idéologique de la nation musulmane. Le régime despote, qui
avait engagé la répression du mouvement islamique par une attaque
barbare de l'école théologique de "Feyzieh" et de
l'université, et de tous les foyers d'agitation de la révolution,
se livra inutilement à des actes odieux en vue d'échapper
à la colère révolutionnaire du peuple et, entre temps, les
pelotons d'exécution, les tortures moyenâgeuses et les peines
d'emprisonnement de longue durée étaient le prix que la nation
musulmane payait en signe de sa détermination à poursuivre la
lutte. Le sang de centaines de jeunes femmes et hommes croyants qui, à
l'aube, scandaient des cris de "Allah Akbar" ("dieu est grand") dans les places
sous les tirs croisés, ou qui, à travers les rues et les bazars,
devenaient la cible des balles ennemies, assura la continuité de la
révolution islamique d'Iran. Les déclarations et messages
successifs de l'Imam ont donné à différentes occasions
davantage d'acuité et d'essor à la conscience et à la
détermination de la communauté islamique.
Le Régime Islamique
Le projet du régime islamique basé sur
l'autorité du Faghih(Jurisconsulte religieux) qui, à
l'apogée de l'oppression et de la répression du régime
despotique, a été présenté par
l'Imam Khomeiny, a créé un nouvel espoir clair
et défini au sein du peuple musulman, et a ouvert la voie réelle
de la lutte idéologique de l'Islam intensifiant l'effort des combattants
musulmans et engagés à l'intérieur et à
l'extérieur du pays.
Le mouvement se poursuivit dans cette voie jusqu'à ce
que, enfin, le mécontentement et l'excès de colère du
peuple, sous l'effet de la pression et de l'oppression croissante à
l'intérieur, le dévoilement et le retentissement de la lutte au
niveau mondial grâce au clergé et aux étudiants
combattants, aient fortement ébranlé les fondements de la
souveraineté du régime ; et par la force des choses, le
régime et ses maîtres furent contraints de réduire la
pression et l'oppression et de procéder à la prétendue
ouverture politique du pays, croyant ouvrir une soupape de
sécurité afin de prévenir leur chute certaine. Mais le
peuple agité, conscient et déterminé, sous la direction
décisive et ferme de l'Imam, commença sa révolte
victorieuse et unanime de manière étendue, d'un bout à
l'autre du pays.
La colère du peuple
La publication d'une lettre injurieuse vis-à-vis du
fondement sacré du clergé et en particulier de l'Imam Khomeiny le
17 Dey 1356 (7 janvier 1978), par le régime au pouvoir
accéléra le mouvement et provoqua l'explosion de la colère
du peuple à travers tout le pays ; et le régime tenta, pour
maîtriser le volcan provoqué par la colère du peuple,
d'éteindre cette révolte contestataire en la traînant dans
la boue et le sang. Mais cela fit même circuler encore plus de sang dans
les veines de la révolution et les pulsations successives de la
révolution lors des commémorations hebdomadaires et du
quarantième jour en souvenir des martyrs de la révolution,
offrirent un souffle, une chaleur et une effervescence unanime et de plus en
plus accrue à ce mouvement dans l'ensemble du pays ; et dans la
poursuite et la persistance du mouvement de la population, avec leurs
grèves unanimes et la participation dans les manifestations de rue,
toutes les organisations du pays ont pris une part active dans la chute du
régime despotique. La large solidarité des hommes et des femmes
de toutes les couches ou tendances religieuses et politiques était
remarquablement déterminante dans cette lutte ; et les femmes en
particulier avaient manifestement une présence active et étendue
dans toutes les scènes de ce grand Djihad (guerre
sainte) ; des scènes comme celles montrant une mère avec un
enfant dans les bras, se dirigeant avec empressement vers le champ de combat et
les canons des mitraillettes, exprimaient la part essentielle et
déterminante de cette grande couche de la société, dans la
lutte.
137
Le prix payé par le peuple
138
L'arbrisseau de la révolution, après plus d'un
an de lutte continue et constante, abreuvé par le sang de plus de
soixante mille martyrs et de cent mille blessés et invalides, et en
causant des milliards de tomans de dommages matériels, porta ses fruits
au milieu des cris "d'indépendance, de liberté, de gouvernement
islamique" ; et ce mouvement immense qui aboutit à la victoire en
s'appuyant sur la foi, l'unité et la fermeté du dirigeant dans
les phases sensibles et exaltantes du mouvement ainsi que sur le sacrifice du
peuple, réussit à défaire toutes les supputations, les
liens et les institutions impérialistes, et constitua dans son genre un
nouveau chapitre sur les vastes révolutions populaires dans le monde.
Les 21 et 22 Bahman de l'an mille trois cent cinquante-sept
(10 et Il février 1979) furent les jours de l'effondrement du fondement
de la royauté, brisant le despotisme intérieur et la domination
étrangère s'appuyant sur lui ; et avec cette grande victoire,
l'aube du gouvernement islamique, qui est un souhait de longue date du peuple
musulman, a annoncé la bonne nouvelle de la victoire finale.
Le peuple iranien a proclamé, de manière unanime
et avec la participation des autorités religieuses, des ulémas de
l'Islam et du Guide, au cours du référendum sur la
République Islamique, sa décision finale et irrévocable
d'instaurer le nouveau régime de la République Islamique, et a
voté à la majorité de 98,2%, en faveur du régime de
la République Islamique.
Actuellement, la Constitution de la République
Islamique d'Iran, en tant qu'expression des institutions et des rapports
politiques, sociaux, culturels et économiques de la
société, doit ouvrir la voie à la consolidation des
fondements du régime islamique et être à l'origine d'un
nouveau projet de système de gouvernement sur les ruines de l'ancien
régime démoniaque.
La manière de gouverner en Islam
Le pouvoir, du point de vue de l'Islam, n'est pas issu de la
position des classes ou de la domination d'un individu ou d'un groupe ; mais,
c'est une cristallisation de l'idéal politique d'un peuple de même
religion et de même mentalité qui s'organise pour que, dans le
processus de l'évolution intellectuelle et idéologique, il dirige
sa voie vers l'objectif final (la marche vers Allah). Notre peuple, dans le
courant de son évolution révolutionnaire, s'est
débarrassé des poussières et des impuretés
démoniaques et s'est purifié des infiltrations de la
mentalité étrangère, en revenant aux positions
intellectuelles et à la vision mondiale traditionnelle de l'Islam ; et
actuellement, il s'apprête à édifier, à partir des
principes islamiques, sa société exemplaire. Sur un tel
fondement, la mission de la Constitution consiste à édifier le
terrain des croyances du mouvement et à créer les
139
conditions dans lesquelles l'Homme devra être
éduqué avec de hautes valeurs islamiques universelles.
La Constitution, tenant compte de la teneur islamique de la
révolution iranienne qui était un mouvement pour la victoire de
tous les déshérités (Mostaz'afin) sur les
puissants (Mostak'berin) , prépare la voie de la
continuité de cette révolution à l'intérieur et
à l'extérieur du pays, en particulier dans le
développement des relations internationales avec d'autres mouvements
islamiques et populaires ; elle s'efforce d'aplanir la voie pour la
constitution d'une communauté universelle unique [-Jet pour que la
poursuite de la lutte pour la délivrance des peuples démunis et
opprimés soit renforcée dans le monde entier.
Considérant la nature même de ce grand mouvement,
la Constitution est le garant du rejet de toute Conne de despotisme
intellectuel et social et de monopole économique, tend à se
départir du système despotique, et à déposer le
sort du peuple entre ses propres mains.
Dans la création des organes et des institutions
politiques qui sont elles-mêmes le fondement de l'organisation de la
société sur la base des préceptes religieux, des personnes
qualifiées seront chargées de gouverner et d'administrer le pays
et le vote des lois, qui est l'expression des critères de la gestion
sociale, suit son cours dans l'axe du Coran et de la tradition coranique. Par
conséquent, cette observation précise et sérieuse de la
part des islamologues justes, vertueux et engagés (les jurisconsultes
religieux, justes) est une prescription inévitable et nécessaire
; et, en gouvernant l'objectif est de développer l'Etre dans un
mouvement vers l'ordre divin, afin que le terrain soit préparé
pour la révélation et l'épanouissement des
capacités dans l'intention de faire apparaître les dimensions de
l'Homme; cela ne peut être réalisé autrement que par la
participation
active. et générale de
l'ensemble des composants de la communauté, dans le processus
d'évolution de la société.
En considération de cet objectif, la Constitution
prépare le terrain d'une telle participation à tous les
échelons des prises de décisions politiques et
déterminantes pour l'avenir, pour tous les individus de la
société afin que dans la voie de l'évolution de l'Homme,
chaque individu participe et soit responsable du progrès, de
l'élévation et de la direction, ce qui aura
précisément pour effet le renforcement du gouvernement des
déshérités dans le monde.
140
L'autorité du "Faghih" juste
Sur le fondement de l'autorité du Commandement de Dieu
et de l'Imamat éternel, la Constitution prépare le terrain pour
l'instauration d'une direction théologique réunissant toutes les
qualités requises pour être reconnu en qualité de Guide par
le peuple, afin qu'il soit le garant du respect par les différentes
organisations, durs devoirs islamiques traditionnels.
L'économie est un moyen, non un but
Dans la consolidation des fondements économiques, le
principe est la satisfaction des besoins de l'Homme dans le cours de son
progrès et de son développement et non, comme dans les autres
systèmes économiques, la concentration et l'accroissement des
richesses et la quête du profit. Car, dans les écoles de
pensée matérialistes, l'économie est en soi un but, et
pour cette raison, dans les étapes de la croissance, l'économie
devient un facteur de destruction, de perversion et de corruption. Mais dans
l'Islam, l'économie est un moyen ; l'on ne peut attendre d'un moyen
autre chose qu'un apport meilleur dans la voie d'accès au but.
De ce point de vue, le programme de l'économie
islamique est de préparer un terrain propice à la
révélation des différentes forces créatives
humaines, et partant, de garantir des traitements égaux et
proportionnels, la création d'emplois pour tous ainsi que la
satisfaction des besoins indispensables à la continuité de son
mouvement évolutif, qui sont à la charge du gouvernement
islamique.
La Femme dans la Constitution
Dans l'établissement des fondements sociaux islamiques,
les forces humaines qui étaient jusqu'à présent au service
de l'exploitation étrangère de toute part, retrouvent leur
véritable identité et leurs droits humains, et dans cette
retrouvaille, il est naturel que les femmes, qui avaient jusque-là subi
plus d'injustice de la part du régime despotique, doivent être
davantage protégées dans leurs droits.
La famille est l'unité de base de la
société et le foyer principal de la croissance et de
l'élévation de l'homme ; et l'entente idéologique dans la
recherche de l'idéal est un principe fondamental dans la fondation de la
famille, qui est le principal facteur constructif du mouvement évolutif
et progressif de l'homme ; fournir des moyens destinés à
atteindre cet objectif fait partie des tâches du gouvernement
islamique.
141
La femme, dans cette conception de l'unité familiale,
quitte son état "d'objet" ou "d'instrument de travail" au service du
développement de la consommation et de l'exploitation, et tout en
retrouvant son devoir précieux et estimable de mère dans
l'éducation des êtres pieux d'avant-garde, elle combat aux
côtés des hommes dans les domaines actifs de l'existence ; en
conséquence, elle assumera une responsabilité plus noble et une
valeur et une munificence plus grande lui seront reconnues du point de vue
islamique.
L'armée idéologique
Dans l'organisation et l'équipement des forces
défensives du pays, l'attention se porte sur la foi et
l'idéologie de façon à ce qu'elles soient le fondement et
la règle. Pour cette raison, l'armée de la République
Islamique et le corps des Gardiens de la Révolution sont
organisés en conformité avec cet objectif et seront
chargés, non seulement de la sauvegarde et de la protection des
frontières, mais également du fardeau de la mission
idéologique, c'est-à-dire le Djihad dans la voie de Dieu et la
lutte dans la voie de l'expansion de la souveraineté de la loi de Dieu
dans le monde.
La Justice dans la Constitution
La question de la Justice, en rapport avec la sauvegarde des
droits du peuple dans la ligne du mouvement islamique et dans le but de
prévenir les écarts de positions au sein de la communauté
islamique, est un impératif vital. De ce fait, t'instauration d'un
système judiciaire sur la base de la justice islamique, et
composé de magistrats justes et familiers avec tes préceptes
religieux précis, a été prévue. Ce système,
en raison de son caractère fondamentalement sensible et de l'attention
portée à son caractère religieux, doit
nécessairement être à l'écart de toute sorte de
rapports et de liens malsains.
Le Pouvoir Exécutif
Le pouvoir exécutif, en raison de l'importance
particulière qui lui est accordée en relation avec l'application
des commandements et des règlements islamiques, pour parvenir aux
rapports et aux relations équitables qui doivent régir la
société, ainsi que de la nécessité que
présentera cette question vitale dans la préparation du terrain
en vue de l'accession à l'objectif final de l'existence, doit ouvrir la
voie pour la création d'une société islamique. En
conséquence, le fait de s'enfermer dans toute sorte de système
complexe et embarrassant qui ralentirait ou enrayerait l'accession à cet
objectif, sera, du point de vue islamique, proscrit. Pour cette raison, le
système bureaucratique qui est le produit et le résultat des
régimes démoniaques, sera vigoureusement rejeté, afin
qu'un système
142
exécutif plus efficace et plus rapide dans
l'exécution des engagements administratifs, soit créé.
Les moyens de communication de masse
Les moyens de communication de masse (radio -
télévision) doivent être mis au service de la diffusion de
la culture islamique dans l'optique du processus d'évolution de la
révolution islamique ; et dans ce domaine, ils doivent
bénéficier de la rencontre saine de réflexions diverses,
et s'abstenir sérieusement de divulguer et de répandre des moeurs
destructeurs et anti-islamiques.
L'obéissance aux principes d'une telle loi, qui
considère la liberté et la générosité du
genre humain comme le premier de ses objectifs, et qui ouvre la voie au
progrès et à l'évolution de l'homme, incombe à tous
; et il est nécessaire que la communauté musulmane, par le choix
des responsables qualifiés et croyants, et par une surveillance
constante duur travail, participe de façon active à la
construction d'une société islamique, dans l'espoir qu'elle
réussisse dans l'édification de la société
islamique exemplaire qui puisse être un modèle et un
témoignage pour tous les peuples du monde.
Les Représentants
L'Assemblée des Experts, composée des
représentants du peuple, a achevé, sur la base d'un examen du
projet proposé par le gouvernement et de l'ensemble des propositions
émanant des différents groupes du peuple, la rédaction de
la Constitution avec les objectifs et les aspirations énoncés
ci-dessus, et cela en quatorze chapitres qui contiennent cent soixante-dix-sept
principes, à l'aube du XVème siècle de l'Hégire du
Généreux Prophète (Que le salut soit avec lui), fondateur
du culte libérateur de l'Islam ; dans l'espoir que ce siècle
devienne le siècle du gouvernement universel des
déshérités et de la défaite de tous les
oppresseurs.
(Pour une traduction annotée, suivie de commentaires en
français de Michel POTOCKI)
144
I- SOURCES
1- Sources orales
- Echange avec Dr Camara Moritié, à son bureau
à l'Ambassade de la République Islamique d'Iran, proche
collaborateur de l'Ambassade, le 16/5/2014de 15h à 15h 36.
- Entretien avec Cheick Nourri Osman Tobas, écrivain
et Guide religieux à Istanbul, Président de la Fondation HUDDAYI,
le 23/07/ 2015, au siège de l'institution à Istanbul.
- Echange sur les grandes questions politiques de la Turquie
et du monde Arabo-musulman avec des étudiants Turcs résidant dans
la cité universitaire d'IHLAN, le 2 Septembre à Usküdar.
2- Sources imprimées
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Adoptée le 24 Octobre 1979 entrée en vigueur depuis le 3
Décembre 1979 et révisée le 28 Juillet 1989,
(consulté le 15 /02/2015), disponible sur le
http://www.jurispolis.com/dt/mat/dr_ir_constit1979/dt_ir_constit1979_index.htm
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entre l'Iran et l'Irak, (consulté le
12/05/2015), disponible sur le
www.un.org/fr/sc/documents/resolutions/1987.shtml
3- Sources audio-visuelles
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abattre, France 5/Dargaud-Marina/INA Entreprise, 2004,
visualisé sur Youtube le 08/ 08/2014.
- MITTERAND (F.), Destins - Le chah d'Iran -,
TF1, 1987, visualisé Youtube le 20/11/2014.
145
- TIM (K.), The last shah of Iran, BBC/Arts &
Entertainment Network
coproduction, 1996, écouté sur les antennes de BBC
le 25/10/2014.
II-BIBLIOGRAPHIE
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EncyclopædiaUniversalis (consulté le 29 /9/ 2015,
disponible sur, URL :
http://www.universalis.fr/encyclopedie/guerre-irak-iran/
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Larousse, Paris, Larousse, 1968, 1664 p.
- Dictionnaire Hachette, Paris, Hachette, 2002, 1858p.
- Encyclopédie Universalis, Corpus 18, Paris, (EU), 1985,
1279p.
- DUBOIS (J.) (dir.), Lexis : dictionnaire de la langue
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d'Iran
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d'Iran, Paris, Hachette, 1998.159 p
146
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encombrant, Paris Éditions Stock, 1989, 507 p.
3- Ouvrages relatifs à la révolution
khomeyniste et l'organisation de la République Islamique
d'Iran
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1989, 240 p.
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Paris, Economica, 1982, 1574p.
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De la Perse à l'Iran, de Cyrus à Ahmadinejad, les
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otages.
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Oxford, Princeton University Press, 2005, 212 p.
- JUILLIARD (P.), Le rôle joué par la
République populaire et démocratique d'Algérie dans le
règlement du contentieux entre les Etats-Unis d'Amérique et la
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- SALINGER (P.), Otages, les négociations
secrètes de Téhéran, Paris, Buchet/Chastel, 1981, 308
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- YAVARI-D'HELLENCOURT(N.), Les otages américains
à Téhéran, Paris, La Documentation Française,
1992, 128 p.
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relations diplomatiques.
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L'Harmattan, 2005, 302p.
- DENOEL (Y.) ,1979 - Guerres secrètes au
Moyen-Orient, Paris, Nouveau Monde
Editions, 2008, 253 p.
- LAURENS (H.), Le grand jeu, Orient arabe et
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148
- NICOLAS (F.), Le conflit irako-iranien,
Paris, Edition du Monde Arabe, 1982, 323p.
- YAKEMTCHOUK (R.), L'Iran face aux puissances,
Paris, L'Harmattan, 2007, 401 p.
6- Articles de périodique et
mémoires
a) Articles de presse et revue
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relations antagonistes en Iran », Le Monde Diplomatique,
février 1980, p 1-12.
- GREST (A.) « Tempêtes sur l'Iran
», Le Monde diplomatique, bimestriel no 93, juin-juillet
2007, p 2-10.
- JULIEN (C.) , « Fanatisme », Le Monde
Diplomatique, décembre 1979, p2-3.
b) Mémoires
- BOCCAS (F.), « Le programme nucléaire
iranien au regard du système international de non-prolifération
», Mémoire de séminaire, droit international public,
Science Po Lyon, 104 p.
- CAMARA (M.), L'évolution des relations entre les
Etats-Unis et l'Iran 19531996 : du mariage de raison à la haine
réciproque, Mémoire de Maîtrise d'Histoire, 1998, 240
p.
- DJANGO (K.R.), Relations politiques Iran - Etats - Unis:
1979 - 1988, Mémoire de licence d'Histoire,
118p.
149
150
|