CHAPITRE VIII- DISCUSSIONS
VIII-1- SUR LA MISE EN JACHERE DES SOLS
Les paysans aiment changer de champs et/ou terrains de
culture, surtout pour les cultures de tanety. On peut dire que cela
est causé par leur mauvaise habitude, qui n'est autre que la pratique
traditionnelle du tavy (défrichement-coupe non
sélective-brûlis). Certes, cette exploitation traditionnelle des
ressources naturelles « sols » peut porter atteinte tant au sol et
à ses constituants (physiques, chimiques et biologiques), qu'aux autres
ressources naturelles. Ce qui joue un rôle important dans la perte de la
biodiversité et de la fertilité du sol : modification des
habitats naturels ainsi que des paysages, disparitions progressives
d'espèces, apparition d'espèces envahissantes, changement de la
structure du sol, diminution de la superficie forestière, et certains
éléments du sol.
Les paysans sont naturellement obligés de laisser les
champs de culture se reposer ou bien de changer de culture après une
année de culture du riz. A Betamotamo, c'est le manioc qui est le
premier occupant du terrain après la culture du riz, ou lors de la mise
en jachère et y reste jusqu'à la fin de celle-ci.
Le temps de la mise en jachère varie de deux à
cinq ans. Pourtant, les paysans n'ont pas de moyens pour connaître la
régénération du sol à part leur connaissance
empirique. Cultivés pendant une ou deux année(s), puis
laissés en jachère avant d'être recultivés, les
champs sont pris en possession par Rubus mollucanus (takohoka),
Trema orientalis (tsivakimbaratra), Aframomum
angustifolium (longoza), Lantana camara
(radriaka), Valiha diffusa (vologasy),
Ravenala madagascariensis (ravinala ou arbre du voyageur), et
des herbacées. Ces plantes sont considérées par les
paysans comme indicatrices de régénération du sol.
Selon SOME (1996), les champs de culture «en repos»
n'enregistrent aucune activité du paysan qui tend à contribuer
à l'effort « d'auto-reconstitution» de la jachère ; ils
supportent au contraire, en plus du passage quasi annuel des feux, des
activités de prélèvement de paille et de récoltes
diverses de plantes (bois pour la construction des cases, bois pour la
fabrication des matériels de pêche et d'utilisations diverses,
etc.) pour des usages variés, dont Ravenala madagascariensis,
Valiha diffusa, Trema orientalis.
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SEBILLOTTE et al. (1993) dans un dossier de
l'environnement (n°27) qu'ils ont sorti avec INRA) mentionnent parmi les
intérêts de la jachère : le contrôle des adventices,
principalement annuelles, l'amélioration des états structuraux et
des teneurs en matières organiques du sol. On peut attendre de ces
effets une meilleure efficience des intrants. C'est aussi, dans certaines
conditions, un bon moyen de remettre en « état » des
parcelles.
VIII-2- PERCEPTION PAYSANNE DES
PLANTES-BIO-INDICATRICES DE FERTILITE DES SOLS
En plus des analyses de sols, des enquêtes sont faites
et nous font savoir que certaines plantes sont dites bio-indicatrices d'un bon
sol (fertile) ou d'un mauvais sol (stérile) selon leur abondance.
Tany mamy ou tany tsara désignent un bon sol, tandis
qu'un mauvais sol est appelé tany masina. Alors, selon la
perception paysanne, certaines plantes sont caractéristiques des sols
dégradés et d'autres des sols fertiles. Certaines espèces
sont utilisées par les paysans pour définir un itinéraire
technique à appliquer aux parcelles de culture. L'abandon et la remise
en culture d'une parcelle dépendraient de la germination de certaines
plantes qui, pour le paysan, marquent des seuils dans l'évolution
progressive ou régressive des terres. En effet, la connaissance et la
reconnaissance paysanne des qualités d'un sol se traduisent par les
notions de « bonne» ou « mauvaise» terre (SOMÉ,
ALEXANDRE et HIEN, 1998). On peut classer dans le tableau suivant quelques
espèces selon la perception paysanne à Betamotamo.
Tableau n°9 : Espèces caractéristiques de la
fertilité d'un sol
Sols dégradés
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Sols fertiles
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Albizia gummifera (sambalahy)
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Ageratum conyzoïdes (bemaimbo)
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Pteridium aquilinium (tananampanga)
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Waltheria indica (sandaory mena)
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Lygodium lanceolatum (famalotrakanga)
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Eleusine indica
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Phyllanthus amarus (ambanivony)
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Lantana camara (radriaka)
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Harungana madagascariensis (harongana)
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Ludwigia sp. (taladiagna)
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Albizia gummifera, Pteridium aquilinum, Lygodium
lanceolatum sont des espèces indicatrices d'un sol
dégradé, alors qu'Ageratum conyzoïdes, Waltheria
indica.
Lantana camara.....montrent que le sol est
relativement riche (fertile). En outre, le manuel SCV de GSDM Annexe 1, a
précisé que Phyllanthus amarus qui est une plante
annuelle est indicatrice d'un sol relativement riche et Panicum
trichoïdes (volonondry) est fréquente sur des sols pauvres
(dégradés).
Cependant, un extrait du livre de DUCERF et THIRY
intitulé les plantes bio-indicatrices - guide de diagnostic des
sols, a rappelé que pour être considérée comme
indicatrice, une plante doit être en nombre suffisant (de 5 à 10
pieds par mètre carré), elle doit être dominante par
rapport aux autres espèces présentes. Alors, l'existence d'une
espèce considérée comme bio-indicatrice, dans un milieu
donné, ne suffit pas de la dire mais en même temps elle est
dominante par rapport autres.
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