Autonomisation de la femme malienne face à la tradition: mythe ou espoir ? Etude de cas en commune IV du district de Bamako( Télécharger le fichier original )par Issa DOUMBIA Institut National de Formation des Travailleurs Sociaux - Diplome Supérieur en Travail Social 2016 |
QUESTIONS DE RECHERCHE :-Quel a été le rôle joué par le district de Bamako dans l'émancipation de la femme malienne ? -Que représente la femme de Bamako sur l'échiquier national ? Et quel genre d'autonomie réclame-elle ? -Quelles sont les contraintes de la tradition sur les femmes maliennes dans leur quête d'autonomie ? OBJECTIFS DE RECHERCHE :Objectif Général :-Souligner le rôle joué par le District de Bamako dans l'émancipation de la femme malienne, la place de la femme de Bamako sur l'échiquier national, préciser le genre d'autonomie qu'elle réclame pour les autres femmes et analyser les contraintes de la tradition pesant sur elles dans sa quête d'autonomie. Objectifs spécifiques :-Déterminer le rôle joué par le District de Bamako dans l'émancipation de la femme malienne. -Déterminer ce que représente la femme de Bamako sur l'échiquier national et le genre d'autonomie qu'elle réclame. -Analyser le poids de la tradition sur la femme malienne dans sa quête d'autonomie. HYPOTHESES DE RECHERCHE-Le District de Bamako a joué un grand rôle dans l'émancipation de la femme malienne. -Incarnant les facteurs de changement, les femmes du District de Bamako réclament une autonomie sur les plans économique, politique et social. -Les contraintes exercées par la tradition sur la femme malienne dans sa quête d'autonomie sont nombreuses et complexes. Dans la présente recherche, nous allons présenter dans un premier temps, la problématique, la méthodologiqueet dans un second temps, les différentes parties du travail seront abordées. La première partie comporte deux(2) chapitres : -le premier abordela présentation du district de Bamako et de la commune IV ; -le deuxième est axé sur l'historique de l'émancipation de la femme malienne à partir de Bamako. La deuxième partie examine la femme du district de Bamako et sa quête d'autonomie en deux(2) chapitres. Elle est structurée de la manière suivante : - chapitre trois porte sur la femme du district de Bamako ; -chapitre quatre analysela quête d'autonomie de la femme du district de Bamako ; Quant à la troisième partie, elle étudie le poids de la tradition face à l'autonomie de la femme. Elle est contient également deux(2) chapitres agencés comme suit : -le chapitre cinq présentesle poids de la tradition sur la femme malienne ; -le chapitre six développe une analyse de la situation. Une conclusion termine ce travail. PROBLEMATIQUE :Au Mali, les femmes représentent 50,4%2(*)de la population. Cette frange importante reste malheureusement confrontée à d'énormes difficultés telles que : les violences conjugales, les violences domestiques, le mariage précoce, les inégalités..., et la dépendance. Les femmes sont faiblement représentées dans les instances de prises de décisions. Les opportunités permettant l'épanouissement de la gente féminine restent encore minimes. Au préscolaire, le taux de scolarisation reste faible. Selon les données du Ministère de l'Éducation Nationale, les taux bruts de scolarisation au premier cycle passent de 75,0% (65,1% pour les filles) en 2005/2006 à 77,6% (68,0% pour les filles) en 2006-2007 et à 72.3% pour les filles en 2008-20093(*) ; ces chiffres bien qu'ils soient en légère amélioration, sont loin de celui des garçons. Le taux de réussite au Diplôme d'études fondamentales (DEF) en 2006 était de 59,24% pour les filles et 68,82% pour les garçons. En 2008-2009, le taux d'achèvement au premier cycle fondamental est de 63.8% pour les garçons et 46.8% pour les filles. Ce taux se réduit à la fin du second cycle où le taux d'achèvement est de 39.0% pour les garçons et seulement de 24.1% pour les filles. Il ressort clairement que très peu de filles complètent les 9 années de scolarité au Mali. Les abandons des filles avant la fin des 9 années de scolarité sont majoritairement liés à l'éloignement des écoles (surtout le second cycle), aux mariages et grossesses précoces. Les parents sont encore réticents à envoyer la fille loin de la famille pour les études4(*). La faible présence de femmes / filles est également remarquable au niveau secondaire (dans les lycées) et dans les facultés. Dans la fonction la fonction publique, les femmes ne représentent que 15% de la catégorie A, 27% de la catégorie B2, 20% de la catégorie B1, 13% de la catégorie C et seulement 24% des contractuels5(*). Selon EPAM 2007, 70% des femmes actives occupées ont un revenu inférieur au SMIG contre 30% pour les hommes. En milieu rural, 74% de femmes ont un revenu de 29 000 FCFA contre 60% dans les autres villes et 52% à Bamako. Selon la même source, 1,7% de femmes ne gagnent rien en termes de revenu à Bamako, 11,6% dans les autres villes et 10% en milieu rural6(*). Dans l'emploi du secteur privé, la situation de la femme malienne est assez précaire car 47,9% d'entre elles déclarent ne percevoir aucune forme de rémunération en 2006 et seulement 4,6% ont un emploi régulier. Sur l'ensemble des emplois déclarés en 2006, seulement 7,32% sont occupés par les femmes. Cette faible représentativité s'explique d'une part, par le fait que certains travaux restent réservés uniquement aux hommes selon la tradition et d'autre part, par les dispositions du Code du travail qui interdisent le travail de nuit des femmes7(*). Au niveau de l'accès à la terre, on constate que des inégalités persistent, dans la mesure où moins de 20% des responsables de parcelles agricoles sont des femmes (Recensement agricole, 2007)8(*). Faute de données actualisées, nous avions dans les services militaires et paramilitaires, en 2000, il y avait trois (3) femmes lieutenant-colonel et deux (2) commandants dans l'armée. Dans la police il y avait trois (3) contrôleurs généraux de police sur 39 hommes. Dans les ambassades et services consulaires, en 2000, il y avait deux (2) femmes ambassadeurs sur 20, sur six (6) consuls généraux, il n'y avait aucune femme et il y avait 5 conseillères d'ambassades sur 46. En 2005, le nombre de femme ambassadeur est passé à deux9(*). L'augmentation de la participation des femmes à la vie politique, le contrôle des ressources, dont la terre, l'accès à l'emploi, aux crédits et à l'éducation sont cruciaux pour promouvoir un développement durable. Il faut ajouter ensuite qu'au Mali, le comportement reproductif obéit à des références et à des valeurs culturelles. La femme est reconnue socialement à travers la procréation et l'éducation des enfants. Elle contribue ainsi à assurer la survie de la famille et des communautés villageoises. La fonction biologique et le rôle socio-économique de la femme définissent son statut social que l'environnement pro nataliste et religieux lui imprime. La fécondité reste très élevéepuisqu'une femme donne naissance, en moyenne, à 6,8 enfants. Selon EDS III (en 2001), un tiers (1 /3) des jeunes femmes de moins de 20 ans ont déjà donné naissance à au moins un enfant et plus d'une femme de 20-24 ans sur quatre a déjà eu trois enfants ou plus. Les adolescentes (15-19 ans) contribuent pour près de 14% à la fécondité totale des femmes. A 17 ans, 38% des femmes ont déjà un enfant et à 19 ans, elles sont mères à 61%. Cette précocité est plus forte en milieu rural (49%) qu'en milieu urbain (28%), notamment chez les adolescentes sans instruction. Des femmes pouvant se prendre plus en charge seront plus susceptibles d'avoir moins d'enfants, d'avoir accès aux services de santé et de contrôler les ressources de santé tout en subissant moins de violence domestique. Leurs enfants auront plus de chances de survivre. Dans le même temps, un meilleur état de santé des femmes peut les aider à se prendre davantage en charge et à gagner en autonomie. Sur le plan politique, aux élections présidentielles de 2007, il n'y avait qu'une seule femme candidate sur 11 (soit 9,09%). Les législatives 2009 ont enregistrés 203 femmes sur 1312 (soit 15,48%) tandis que les municipales de la même année notaient 13537 (soit 16%) des candidatures. Quant au taux d'élues, ils n'ont pas suivi la même progression que celui du taux de candidature car les femmes sont seulement 15/147 des Députés de l'Assemblée Nationale (soit 10%), 928/10772 des conseillers communaux (soit 8,66%) et seules 08 communes sont dirigées par des maires femmes. Quant aux législatives 2013, elles enregistrent une régression par rapport à 2007 (15,48%) avec un taux de 13,73%10(*). Ces statistiques montrent à combien la situation des femmes est inquiétante dans notre pays, combien elles sont absentes du processus de développement national et à quel degré l'accent doit leur être mis afin qu'elles aient le contrôle de leurs potentialités, qu'elles s'épanouissent. Depuis la proclamation, à Mexico en 1975, de l'année internationale de la femme, suivie de la décennie des Nations Unies pour la femme (1976-1985), la conférence de Beijing en 1994 l'amélioration du statut des femmes et de leurs conditions d'existence, l'égalité entre homme et femme, l'équité, la parité, le genre, etc. sont devenus des volets incontournables de tous les discours, de déclarations politiques et programmes de développement économique social et culturel. L'O.N.U, à travers les objectifs du Millénaire pour le développement lancés en 2000, pour éradiquer la pauvreté dans le monde, a inclue la promotion de l'égalité des sexes et l'autonomisation des femmes dans son objectifs 3 reconduit par les nouveaux objectifs de développement durable adoptés le 25 septembre 2015 à travers son objectifs 5 consistant à « parvenir à l'égalité des sexes et autonomiser toutes les femmes et les filles.» Cet objectif énonce de façon claire que sans l'égalité entre les sexes, il est impossible de réellement diminuer la pauvreté, la faim et la maladie. Il mentionne que les femmes doivent avoir des pouvoirs décisionnels sur leur vie équivalents à ceux des hommes pour leur permettre d'accéder à une autonomie complète. Sachant que le taux de scolarisation est beaucoup plus faible chez les jeunes filles que chez les garçons, l'ONU considère qu'il fallait se fixer des cibles dans ce domaine. La cible proposée en l'an 2000 visait à éliminer les disparités entre les sexes dans les enseignements primaires et secondaires pour 2005 si possible, et à tous les niveaux de l'enseignement en 2015 au plus tard. L'ONU propose de mesurer cette cible à l'aide de trois indicateurs. « Le premier étant le calcul du nombre de garçon versus le nombre de filles dans les systèmes d'éducation primaire, secondaire et tertiaire. Le second indicateur propose de calculer le nombre de femmes ayant une rémunération dans le secteur non agricole. Le dernier porte sur la proportion de femmes détenant des sièges dans les parlements nationaux11(*)». Par ailleurs, plusieurs journées internationales telles que la Journée Internationale de la femme(le 08 mars) et la Panafricaine des femmes (31 juillet), des droits et d'égalité des femmes sont manifestées dans notre pays. Au Mali, plusieurs groupements de sociétés civiles et d'O.N.G nationales et Internationales militent et travaillent pour la défense des droits des femmes, l'égalité des sexes et pour l'autonomisation de la femme. Malgré les visions mondiales à autonomiser les femmes à divers niveau de la vie; les journées recommandant plus d'égalité, plus d'implication des femmes, plus d'autonomie à la femme dans notre pays, le concept ou du moins la mise en oeuvre de cette autonomisation de la femme est confrontée à la tradition, notre coutume qui voit en la femme un être subalterne, cantonnée, limitée aux seules activités ménagères et de reproduction au service de l'homme. Cette pesanteur sociale (accompagnée très souvent de stéréotypes) constitue un blocus à toutes possibilités d'autonomisation pour les femmes. Cet état des choses se manifeste à l'égard de la femme au foyer, au niveau de leur instruction, dans ses pouvoirs/ facultés à exercer des A.G.R. et dans les instances de prise de décisions... ; elle souffre d'une discrimination et d'une inégalité flagrante par rapport aux hommes. Cette situation est malheureusement justifiée par des mythes que regorgent notre société ; des tares qui témoignent notre état idéologique et qui astreignent encore de nos jours les femmes au joug « marital ». Face à cette situant préoccupante de la femme malienne, force est de constater qu'il n'existe pas de stratégie nationale spécifique pour le genre. Les orientations du gouvernement s'inscrivent essentiellement dans le Cadre Stratégique de Lutte contre la Pauvreté (CSLP) qui visent à contrecarrer les obstacles constatés : (i) l'analphabétisme comme obstacle à la promotion des femmes, (ii) la santé de la femme qui demeure préoccupante, (iii) le statut juridique et social de la femme qui reste inchangé en raison de la persistance des pesanteurs socio culturelles, (iv) le poids démographique qui ne permet pas à la femme d'assurer une puissance dans la gestion de la vie publique12(*). Sur le site Internet de l'ONU où l'on retrouve l'information sur les OMD, une mention fait état du fait que les femmes sont peu rémunérées pour leur travail, qu'elles travaillent dans de nombreux secteurs non officiels et que la pauvreté est un obstacle sérieux par rapport à l'éducation des filles, ce qui est un frein majeur à l'autonomisation des femmes. II- METHODOLODIELa recherche universitaire exige l'utilisation des procédés scientifiques précis, opératoires, rigoureux, transmissibles, susceptibles d'être adaptés et appliqués à l'étude d'un problème donné. Ces procédés sont appelés « méthode de recherche ». La méthode de recherche est une démarche intellectuelle qui vise à établir ou à mener un raisonnement rigoureux portant sur un sujet d'étude. * 2RGPH, 2009 * 3PNG 2011 ; P-23 * 4PNG 2011 ; p-24 * 5La femme et l'enfant en chiffres au Mali, CNDIFE ; Octobre 2015, p-24 * 6PNG 2011 ; p-31 * 7ibid * 8ibid ; P-33 * 9Rapport Final ; Etude sur la Participation des Femmes à la Vie Publique au Mali : Contraintes et stratégies pour améliorer la situation ; MPFEF, RECOFEM ; Bamako ; Février 2006, p-34 * 10Rapport du Mali, mise en oeuvre de la déclaration et du programme d'action de Beijing (1995) et des textes issus de la vingt-troisième session extraordinaire de l'assemblée générale (2000); MPFEF ; Juin 2014 ; p-8 * 11 WWW.UNESCO.COMConsulté le 12 mars 2016. * 12Rapport de la Banque Mondiale au Mali, Évaluation stratégique des Enjeux en matière de Genre au Mali, 2005, P-50 |
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