UNIVERSITE CATHOLIQUE D'AFRIQUE CENTRALE
INSTITUT CATHOLIQUE DE YAOUNDE
(UCAC/ICY)
FACULTE DE SCIENCES SOCIALES ET DE GESTION
ASSOCIATION POUR LA PROMOTION DES DROITS DE L'HOMME EN
AFRIQUE CENTRALE
(APDHAC)
LA MISE EN OEUVRE DES NORMES INTERNATIONALES DE
PROTECTION DES DEFENSEURS DES DROITS DE L'HOMME AU CAMEROUN
Mémoire présenté et soutenu
publiquement en vue de l'obtention du diplôme de MASTER DROITS DE L'HOMME
ET ACTION HUMANITAIRE
Par :
SAME TOY François
Licence en sciences juridiques et politiques
Sous la direction du :
Pr. GUIMDO DONGMO Bernard-Raymond
Agrégé des facultés de droit
Année Académique 2012-2013
DEDICACES
A tous ceux qui de par le monde, ne ménagent aucun
effort et n'hésitent pas à payer le plus lourd tribut, pour
l'avènement d'un ordre véritablement juste et équitable,
au sein duquel la dignité intrinsèque à chacun des membres
de la société humaine, trouvera sa plus parfaite expression.
Qu'ils voient dans ce travail, l'expression de notre profonde admiration.
REMERCIEMENTS
La confection de cet ouvrage, n'aurait pas été
possible sans le concours des personnes suivantes, auxquelles nous voudrions en
cette occasion, rendre hommage et témoigner notre profonde
gratitude :
· Notre directeur de mémoire le Pr GUIMDO, pour sa
grande disposition, ses précieux conseils et observations, ainsi que
pour la compréhension dont il a su faire montre inconditionnellement,
à notre égard tout au long de la collaboration qui nous a
liés ;
· L'ensemble du corps professoral de l'APDHAC, pour les
nombreux enseignements qu'ils nous ont prodigué mais surtout, pour la
culture de l'effort et l'éthique de la performance qu'ils ont su nous
inculquer ;
· Nos parents Monsieur et Madame TOY, pour la confiance
qu'ils ont su mettre en nous et le soutien multiforme et indéfectible
qu'ils nous ont apporté. Qu'ils trouvent en ce travail, le
témoignage de notre affection et le gage de notre reconnaissance pour
les sacrifices consentis ;
· Enfin, tous nos familiers, amis, camarades et
connaissances pour les moments uniques partagés, pour leurs conseils et
leur soutien permanent, et pour chaque instant de joie et de peine vécu
ensemble. Qu'il nous soit permis d'adresser en particulier, nos sincères
remerciements de manière solennelle aux personnes suivantes : M.
EPITE Jacques, M. KAMDEM Franck, M. KPORON Pierre-Marie, M. SOULE, Mme KOFANE
Rosine, Mme MEGNANG A BIDIAS Mariam et Mlle MATHIO Lydienne.
LISTE DES TABLEAUX
Tableau n°1 : Tableau récapitulatif des
résultats obtenus à la question 3........................93
Tableau n°2 : Typologie et fréquence des
menaces rencontrées par la population de défenseurs des droits de
l'Homme
enquêtée.........................................................127
Tableau n° 3 : Les auteurs présumés et
allégués des violations subies par les défenseurs
locaux.....................................................................................................127
LEXIQUE DES ABREVIATIONS ET SIGLES
ADEFHO : Association pour la défense des droits
des homosexuels
AI : Amnesty International
AG/NU : Assemblée Générale des
Nations Unies
AHJUCAF : Association des hautes juridictions de
cassation des pays ayant en partage l'usage du français
APDHAC : Association pour la promotion des droits de
l'Homme en Afrique Centrale
Cadh : Convention américaine relative aux droits
de l'Homme
CADH : Commission Africaine des Droits de l'Homme et des
Peuples
CADHP : Charte Africaine des Droits de l'Homme et des
Peuples
CAMFAIDS : Cameroonian Foundation for Acquired Immune
Deficiency Syndrome
CDH : Conseil des droits de l'Homme de l'Organisation des
Nations Unies
CEDH : Convention européenne des droits de
l'Homme
CIADH : Commission Interaméricaine des Droits de
l'Homme
CIJ : Cour Internationale de Justice
CNDHL : Commission Nationale des droits de l'Homme et des
libertés
CoNDHL : Comité National des droits de l'Homme et
des libertés
CSP : Centrale syndicale du secteur public
DUDH : Déclaration Universelle des Droits de
l'Homme
EHAHRDP: East and Horn of Africa Human Rights Project/ Projet
des défenseurs des droits humains de l'est de la corne de l'Afrique
FIDH : Fédération Internationale des ligues
des droits de l'Homme
FIG: Finders Initiative Group
INDH : Institution Nationale de droits de l'Homme
LGBTI: lesbiennes, gays, bisexuels, transgenre ou
intersexués
MBOCSUDA : Mbororo social and cultural development
association
MDDHL : Mouvement pour la défense des droits de
l'Homme et des libertés
NU : Nations Unies
OBS : Observatoire pour la protection des
défenseurs des droits de l'Homme
OEA : Organisation des Etats Américains
OMCT : Organisation Mondiale de lutte contre la
torture
ONG : Organisation Non Gouvernementale
ONU : Organisation des Nations Unies
OSC : Organisation de la Société Civile
OUA : Organisation de l'Unité Africaine
PIDCP : Pacte international relatif aux droits civils et
politiques
PIDESC : Pacte international relatif aux droits sociaux,
économiques et culturels
PNG : Programme National de Gouvernance
PNUD : Programme des Nations Unies pour le
développement
RECODH : Réseau Camerounais des Organisations des
droits de l'Homme
REDHAC : Réseau des défenseurs des droits
humains en Afrique Centrale
TPI : Tribunal de première instance
UA : Union Africaine
UCAC : Université Catholique d'Afrique Centrale
UE : Union Européenne
RESUME
A la suite des deux guerres mondiales, la communauté
internationale consternée par les atrocités commises, a voulu
oublier ces travers. Dans le cadre de cette dynamique sociale de
reconstruction, les droits de l'Homme ont fédéré toutes
les aspirations, incarnant l'idéal à atteindre et la promesse
d'une société plus juste et humaine. L'essentiel de la
rhétorique relative à ces derniers, s'est très souvent
articulée autour de l'Organisation des Nations Unies, des grandes
institutions des systèmes régionaux et des Etats. Ceci, au
détriment de cette catégorie d'individus, profondément
touchée par les convictions humanitaires, qui oeuvre sans relâche
pour la matérialisation du monde meilleur promis par les droits de
l'Homme. Il s'agit de tous ceux que l'on appelle désormais les
défenseurs des droits de l'Homme, véritables bastions sur
lesquels s'appuie au quotidien, l'implémentation dans la
réalité sociale, des instruments proclamés et
ratifiés, au sein des hautes sphères des institutions
internationales. Pourtant, si la communauté internationale commence
à appréhender le rôle important joué par ces
derniers, l'actualité les concernant, se trouve quant à elle
ailleurs. En effet, ce qui fait écho, c'est la croissance des violations
commises à l'endroit de ces derniers. Pascal KABUNGULU KIBEMBI,
Floribert CHEBEYA, GUIME DJIME ou encore Eric LEMBEMBE, les exemples macabres
se multiplient, attestant de la dangerosité extrêmement
prégnante de l'activité, de ce que défendre les droits de
l'Homme implique être prêt à payer le prix lourd. Pourtant,
cet essor de la dangerosité intervient dans un contexte où un
cadre juridique organisant la protection, a été mis sur pied par
les législateurs internationaux. Dès lors, comment expliquer ce
chevauchement aux allures de paradoxe, entre l'existence de la loi et la
permanence des outrages perpétrés à son encontre ? Le
cadre développé est-il est réellement adapté au
contexte et apte à sécuriser l'action des militants des droits de
l'Homme ? Il s'agit là d'interrogations auxquelles, cette
étude se propose d'apporter des tentatives de réponses, à
la lumière de l'examen du cas particulier d'un pays : le Cameroun.
Elle s'inscrit de plein pied, dans la droite ligne d'une question aux enjeux
des plus actuels et importants : celle de la protection des
défenseurs des droits et des libertés fondamentales, de tous les
hommes.
Mots clés : Cameroun -
défenseur des droits de l'Homme - droits de l'Homme -
effectivité - internalisation - mise en oeuvre - norme juridique -
norme internationale - protection - soft law.
I.
ABSTRACT
After the terrible world wars' episodes, the international
community dismayed by the carnage committed, was resolved to forget about the
terrible remembering. In the mechanic of social reconstruction engaged, human
rights gathered all the attentions, becoming the main ideal to reach and the
surest way to a more just and rightful society. Through its large media
coverage, it's obvious to notice that those who are always shown as the main
actor of the movement are the United Nations, the regional systems major
institutions and the States. It seems that everything is done to drive the
attention far away from those who, deeply impressed by the human dignity's
discourse, beaver away for the materialization of the dreamful world promised
by human rights. These are the so called human rights defenders, real levers
that ensure the implementation in the social reality, of the texts proclaimed
and ratified in the higher realms of the international institutions. However,
if the universal community comes to understand the important role played by
these ones, they break the news for other reasons. In fact, what is driving the
attention about the human rights professionals is the increasing of attacks
committed against them. Pascal KABUNGULU KIBEMBI, Floribert CHEBEYA, GUIME
DJIME or Eric OHENA LEMBEMBE, the dark examples are growing in number,
attesting the fact that defending human rights nowadays also systematically
involves getting ready to pay the highest price. But the reality is a little
bit more complex than that. The real point is about how to explain the increase
of human rights working's endangering, where as the international legislators
have created specific laws in order to protect the activity? Are those laws
really effective enough to ensure the protection of human rights defenders?
This study tries to bring out leads of solutions, to those questions, through
the analysis of a specific country's internalization of the international
protecting defenders norms: Cameroon. It's all about a very important and
topical issue: the protection of all human beings' fundamental rights and
freedoms defenders.
Key words: Cameroon - effectiveness -
implementation - internalization - international norm - human rights - human
rights defender - legal norm - protection - soft law.
EPIGRAPHE
« Lorsqu'il s'agit des droits de l'Homme, nous
oublions souvent notre devoir envers les autres - les centaines de milliers de
héros méconnus, qui se distinguent en tant que défenseurs
des droits de l'Homme.
Ils changent l'histoire, s'attaquant aux injustices et aux
discriminations partout où ils les rencontrent.
[...] Aucune formation spéciale n'est
nécessaire. Nous pouvons tous et devrions tous être des
défenseurs des droits de l'Homme. Tout ce qu'il faut, c'est s'engager et
avoir du courage.
[...] Notre devoir est de défendre leurs droits de
manière qu'ils puissent continuer à défendre les
nôtres. »
Navanethem PILLAY, Haut-commissaire des Nations Unies aux droits
de l'Homme
Message à l'occasion de la journée
internationale des droits de l'Homme,
10 décembre 2010.
SOMMAIRE
DEDICACES
i
REMERCIEMENTS
ii
LISTE DES TABLEAUX
iii
LEXIQUE DES ABREVIATIONS ET SIGLES
iv
RESUME
vi
ABSTRACT
vii
EPIGRAPHE
viii
INTRODUCTION GENERALE
1
PREMIERE PARTIE : L'ARTICULATION DE LA MISE EN
OEUVRE
45
CHAPITRE 1 : L'INTERNALISATION DES NORMES
INTERNATIONALES
47
SECTION 1 : LA RATIFICATION DES NORMES
PROTECTRICES DES DEFENSEURS
47
SECTION 2 : LA RECONNAISSANCE INTERNE DES
NORMES PROTEGEANT LES DEFENSEURS
70
CONCLUSION DU PREMIER CHAPRITRE
76
CHAPITRE 2 : LA MISE EN PLACE DE MECANISMES
INSTITUTIONNELS GARANTISSANT L'EFFECTIVITE DES NORMES PROTEGEANT LES
DEFENSEURS
77
SECTION 1 : LES INSTITUTIONS
JURIDICTIONNELLES
77
SECTION 2 : LES INSTITUTIONS NON
JURIDICTIONNELLES
79
CONSLUSION DU DEUXIEME CHAPITRE
87
CONSLUSION DE LA PREMIERE PARTIE
88
SECONDE PARTIE : LA LIMITATION DE LA MISE EN
OEUVRE
90
CHAPITRE 3 : LA CONSISTANCE DE LA
LIMITATION
91
SECTION 1 : LES LIMITES SOCIO-JURIDIQUES
91
SECTION 2 : LES LIMITES INSTITUTIONNELLES
106
CONCLUSION DU TROISIEME CHAPITRE
131
CHAPITRE 4 : LA REVERESIBILITE DE LA
LIMITATION
132
SECTION 1 : LES MESURES CORRECTIVES AU NIVEAU
INTERNE
132
SECTION 2 : LES MESURES CORRECTIVES SUR LE
PLAN INTERNATIONAL
149
CONSLUSION DU QUATRIEME CHAPITRE
156
CONSLUSION DE LA SECONDE PARTIE
157
CONCLUSION GENERALE
158
BIBLIOGRAPHIE
160
ANNEXES
172
TABLE DES MATIERES
192
II. INTRODUCTION GENERALE
« L'Afrique se présente à l'aube
du 21ème siècle comme un immense brasier recouvert tout entier
par une épaisse flamme rouge de sang et de la chaleur des larmes
répandues par des manifestations de violence de tous ordres et de tout
acabit. »1(*)
Cette affirmation paraît encore de nos jours bien des plus pertinentes.
Ce notamment dans la mesure où, « il peut paraître
superfétatoire de parler d'une effectivité des droits de l'Homme
en Afrique au regard des réalités
quotidiennes. »2(*) En effet, une observation brève et
superficielle de la scène internationale permet de s'imprégner de
cette réalité communément partagée, selon laquelle
le continent africain se caractérise généralement par la
multiplicité des violations massives des droits de l'homme. Le
désordre politique et les revendications houleuses de populations
mécontentes alimentent la prolifération de conflits et tensions
diverses. Les guerres pour le pouvoir, les attaques et répressions
violentes lancées contre les civils, sont très souvent le terreau
d'abus perpétrés en marge des droits fondamentaux (viols,
meurtres à grande échelle, génocides, ...) Toutefois, si
les nombreux conflits armés africains constituent les principaux
facteurs de remise en cause des droits humains, il faut y associer
également la conjoncture politique et économique. Le
développement demeure en effet « un défi
considérable en Afrique, peut-être plus considérable que
n'importe où ailleurs dans le monde. »3(*) De ce fait, les Etats africains
à forte majorité pauvres et en voie de développement,
peinent à réaliser les droits économiques, sociaux et
culturels des individus. De plus ces Etats abritent, pour la plupart de forts
régimes présidentialistes, négateurs des libertés
publiques essentielles.
Dans un tel contexte marqué de façon
générale, par la difficulté des Etats ou, plus souvent
encore, leur manque de volonté avéré, à
réaliser les prérogatives fondamentales des populations, une
classe déterminée de personne joue désormais un rôle
crucial indéniable dans la mise en oeuvre des conventions
internationales : il s'agit des défenseurs des droits de l'Homme.
Ces derniers représentent la tranche de la société civile
qui milite en faveur du respect et de la protection des droits consacrés
par les textes internationaux. Leur oeuvre de dénonciation renseigne la
communauté internationale sur la réalité effective et
factuelle, inhérente à la situation des droits fondamentaux au
sein des Etats. Ils exercent de ce fait, une énorme pression sur ces
derniers relativement à l'exécution de leurs obligations
internationales. Les défenseurs constituent réellement de ce
fait, un maillon essentiel de la chaîne d'application des instruments
universels et c'est en ces termes, que se pose la nécessité de
leur protection. Dans la mesure où la protection des défenseurs a
un effet multiplicateur sur la protection des droits de l'homme4(*), l'enjeu consiste ici en fait,
à assurer l'implémentation des principaux instruments, garants de
la promotion et de la protection des droits de l'homme.
Toutefois force est de constater d'autre part, l'essor
à l'échelle du continent, des exactions commises à
l'endroit des défenseurs des droits de l'Homme. Dans les faits, une
proportion croissante de militants des droits humains fait désormais
l'objet d'agressions, de harcèlement, de menaces et de campagnes de
diffamation de toutes sortes et dans certains cas, en arrive à payer
le prix fort dans la lutte pour la cause du respect de la dignité
humaine. Si les défenseurs sont donc souvent la cible d'agents non
étatiques, la violence à leur encontre est bien souvent
tolérée, encouragée ou directement perpétrée
par des agents étatiques, au premier rang desquels les forces de
sécurité censées les protéger.5(*) Il semble nécessaire de
relever donc, qu'en dépit du caractère crucial de l'action des
défenseurs pour la préservation des droits fondamentaux, leur
activité de militantisme est en proie à une dangerosité
croissante, exposant inexorablement et systématiquement, tous ceux qui
s'y adonnent. L'ampleur grandissante des risques auxquels se retrouvent
confrontés les activistes des droits de l'Homme, semble constituer un
paradoxe à part entière, d'autant plus qu'elle intervient dans un
contexte ou l'oeuvre de ces derniers est des plus salutaires. C'est en ces
termes, que se pose l'opportunité d'une réflexion sur la
protection interne des professionnels des droits de l'Homme, dans le cadre
particulier d'un Etat africain, le Cameroun. Une telle analyse motivée
par les constats et opinions détaillés supra, pourrait être
engagée sur la base du questionnement suivant : d'abord existe-t-il
des normes internationales consacrées à la protection des
défenseurs applicables au Cameroun ? Et encore, en quoi la
situation des défenseurs des droits de l'Homme camerounais donne t-elle
lieu à poser le problème d'une nécessaire protection de
leur activité ?
III. CONTEXTE DE L'ETUDE
Il semble opportun ici au regard des interrogations
soulevées par la problématique de départ, d'examiner les
aspects juridique (A) et social (B), du contexte dans lequel s'insère
cette étude.
A. Contexte
juridique
« Il est temps d'assurer une véritable
protection des défenseurs des droits de
l'Homme. »6(*) C'est essentiellement en ces termes que ce pose le
débat actuel relatif à la problématique des militants pour
la cause des droits universels. « Aujourd'hui, la promotion et la
protection du droit de défendre les droits de l'Homme constitue un
intérêt croissant à travers le monde entier. [Traduit de
l'anglais] »7(*) En effet, la communauté internationale semble
de plus en plus, s'imprégner de l'idée selon laquelle il devient
pressant, voire même salutaire, d'apporter un soutien effectif à
l'oeuvre des défenseurs. Cette préoccupation n'est bien
évidemment pas née ex nihilo. Deux facteurs apportent de
façon logique, une explication à l'essor de cette
dernière.
Il s'agit d'une part, du fait que les différents
acteurs se soient rendus compte de l'importance de l'oeuvre des
défenseurs, pour la protection des droits universels. A cet effet, l'ex
Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies
(ONU) Koffi ATA ANAN, déclarait de façon fort éloquente,
in extenso que : « les défenseurs des droits de l'homme
sont au coeur du mouvement de défense des droits de l'homme partout dans
le monde. Ils oeuvrent en faveur d'une transformation démocratique
destinée à accroître la participation des individus aux
décisions qui affectent leur existence. Les défenseurs des droits
de l'homme contribuent à l'amélioration des conditions sociales,
politiques et économiques et à la réduction des tensions
sociales et politiques, et s'emploient à promouvoir, aux plans national
et international, un climat de paix et des conditions favorisant la
sensibilisation aux droits de l'homme. Ils constituent la base sur laquelle
s'appuient les organisations et les mécanismes régionaux et
internationaux de défense des droits de l'homme, notamment ceux des
Nations Unies, pour promouvoir et protéger les droits de l'homme.
»8(*) Cette
affirmation traduit la prise de conscience, par les décideurs du
système universel de protection des droits de l'Homme, de ce que les
activités des défenseurs sont fondamentales aussi bien pour
l'exercice universel des droits humains, que pour le plein exercice de la
démocratie et de l'État de droit. La vérité selon
laquelle le travail qu'ils réalisent inlassablement est crucial pour le
renforcement des démocraties.9(*)
D'un autre côté, l'intérêt pour la
protection des défenseurs est né aussi du constat macabre de
l'accroissement des risques auxquels ceux-ci se trouvaient exposés, dans
l'exercice de leur mission. En effet, il devenait aisé de remarquer fort
à propos qu' « aujourd'hui encore, dans des
sociétés démocratiques, les défenseurs des droits
humains continuent d'être victimes d'exécutions extrajudiciaires
et de disparitions forcées, d'agressions, de menaces et de
harcèlements, de campagnes de diffamation et d'actions judiciaires
intentées à leur encontre, de restrictions au droit
d'accès aux informations détenues par l'État, de
contrôles administratifs et financiers abusifs, et de l'impunité
dont jouissent les auteurs de ces violations. »10(*) Ces réalités
avaient un impact fort conséquent et gênaient
considérablement l'action des militants, pourtant vitale pour la
promotion des droits de l'Homme. La communauté internationale a donc
conçu non seulement l'opportunité, mais aussi la
nécessité de doter les défenseurs d'une protection
spécifique efficace et d'un cadre réglementaire leur permettant
de travailler librement et sans entrave, harcèlement ou menace.11(*)
Cette reconnaissance s'est faite par le droit. La Commission
des droits de l'homme de l'ONU12(*) a mis en lumière l'importance des travailleurs
des droits humains dans la Déclaration des Nations Unies sur les
défenseurs des droits de l'homme.13(*) En effet, en réponse à la situation
critique traversée par les défenseurs, par sa résolution
53/144 du 9 Décembre 1998, l'Assemblée Générale des
Nations Unies a unanimement adopté la Déclaration sur le
droit et la responsabilité des individus, groupes et organes de la
société de promouvoir et protéger les droits de l'homme et
les libertés fondamentales universellement reconnus. Ce
après, plus d'une décennie de campagnes et de
négociations.14(*)
Il s'agit du premier instrument de droit international portant de façon
spécifique sur la protection des défenseurs. En avril 2000, soit
moins de deux ans après l'adoption de la Déclaration, la
Commission des droits de l'Homme des Nations Unies a adopté la
résolution E/CN.4/RES/2000/61, qui crée le mandat du
représentant spécial du Secrétaire Général
des Nations Unies sur la situation des défenseurs des droits de
l'Homme. Il s'agit du premier mécanisme créé à
l'échelle internationale, destiné à protéger les
défenseurs des droits de l'Homme conformément à la
déclaration de 1998.15(*) La nécessité de protéger les
défenseurs, a également été reconnue par les
différents systèmes régionaux de protection des
défenseurs des droits de l'Homme. En Décembre 2001, par la
résolution AG/RES.1818, l'Assemblée générale des
Etats de l'Organisation des Etats américains (OEA) crée
l'Unité des défenseurs des droits humains de la Commission
Interaméricaine des droits de l'Homme.16(*) En 2004, le Conseil de l'Union européenne (UE)
a mis au point les « orientations de l'Union européenne
concernant les défenseurs des droits de
l'Homme ».17(*) En 2004, la Commission africaine des droits de
l'Homme et des peuples adopte la première résolution sur la
protection des défenseurs africains, la résolution ACHPR/Res.
69(XXXV)04, dans laquelle est créée la fonction de Rapporteur
spécial sur les défenseurs des droits humains en
Afrique.18(*)
De manière générale, « les
instruments relatifs aux droits de l'homme consacrent des droits que les
États sont tenus de respecter et de garantir à toutes les
personnes relevant de leur juridiction. »19(*) Aussi, dans cette mesure, la
politique prise à l'international a inexorablement des
répercussions au niveau interne des pays. Le Cameroun étant
membre des Nations Unies et de l'Union africaine, a été
également concerné par la dynamique impulsée au sein de
ces institutions, relativement à la protection des défenseurs.
L'engagement de ce pays en matière de promotion et de protection des
droits de l'Homme en général et des prérogatives des
militants de ces derniers en particulier, se traduit au niveau juridique, par
deux processus corolaires à savoir : la constitutionnalisation des
droits de l'Homme et leur encadrement législatif. Relativement au
premier point, il faut observer que « la proclamation des
droits fondamentaux est une constante dans les différents textes
constitutionnels camerounais. »20(*) C'est dire que d'une part, le Cameroun marque
son attachement aux valeurs prônées par les textes internationaux
des droits de l'Homme, en intégrant dans sa constitution, les droits
qu'ils consacrent. D'autre part, la législation interne consacre et
protège les droits et libertés fondamentaux de la personne
humaine. Aussi, certaines lois disposent sur l'exercice de prérogatives
individuelles et collectives cruciales pour l'opérationnalisation de
l'oeuvre des défenseurs. Il s'agit par exemple de la loi n° 90/53
du 19 décembre 1990 portant liberté d'association et de la loi
n° 90/52 relative à la liberté sociale, adoptée
également le 19 décembre 1990. Ces deux textes consacrent dans
l'ordre interne, des libertés dont l'existence est primordiale pour la
défense efficiente des droits de l'Homme. Il faut donc dire que la
protection des défenseurs représente une nécessité
prise en compte par le Cameroun, notamment sur le plan juridique.
B. Contexte social
Cependant si la protection des défenseurs des droits de
l'Homme est consacrée par l'ordre juridique interne camerounais, il faut
relever que la réalité factuelle est toute autre. Dans les faits,
les défenseurs des droits de l'Homme constituent la cible d'atteintes
diverses et, doivent mener leurs activités dans un contexte
d'hostilité et d'insécurité entretenu par les
gouvernants.21(*)
A la base, il faut dire que le Cameroun est une
république dominée par un régime présidentiel fort
et les violations des droits de l'Homme y sont récurrentes.22(*) Parmi les plus importantes,
l'on peut relever les exactions des forces de sécurité, le
déni de procès équitable, les restrictions imposées
à la liberté de réunion, les conditions de vie
délétères dans les prisons, les arrestations et
détentions arbitraires, ainsi que les atteintes à la vie
privée. Le gouvernement harcèle et emprisonne les journalistes,
limite les libertés d'expression, de la presse et d'association, et fait
obstacle à la liberté de mouvement. La corruption gangrène
l'essentiel des institutions publiques.23(*)
Dans un tel environnement, les militants des droits de l'Homme
évoluent dans des conditions très précaires et
risquées. Leur action de dénonciation les inscrit à
l'encontre des intérêts des autorités en place et les
expose de ce fait, à de multiples dangers. En effet, « le
plus souvent chaque fois qu'un défenseur des droits de l'Homme prend
position dans une violation des droits de l'Homme, le gouvernement a tendance
à le considérer plus comme un adversaire politique et un fauteur
de troubles. »24(*) Par conséquent, les autorités usent
d'un arsenal de méthodes de plus en plus discrètes, dans le but
de torturer et de décourager les défenseurs des droits de
l'Homme.25(*) Ces derniers
subissent fréquemment en rapport avec l'exercice de leur fonction,
toutes sortes de violations de leurs droits. Assassinats26(*), harcèlement
judiciaire27(*), menaces
et intimidations28(*),
vols, arrestations et détentions arbitraires29(*), oppression,
enlèvements30(*),
filatures, appels anonymes... Cette liste non exhaustive étoffe le
tableau noir des exactions commises à l'endroit des défenseurs et
de leurs proches, par les agents ou les sympathisants du gouvernement.31(*) Encore, les atteintes peuvent
également cibler des défenseurs évoluant dans des secteurs
précis. Fort à propos, AMNESTY INTERNATIONAL relate dans son
rapport 2013 que : « comme les années
précédentes, les autorités ont continué de
restreindre les activités des opposants politiques et des
journalistes. [...] Les défenseurs des droits des lesbiennes, des gays
et des personnes bisexuelles, transgenres ou intersexuées (LGBTI) ont
fait l'objet de harcèlement et de mauvais traitements. Les
autorités n'ont pris aucune mesure pour les protéger contre ces
agressions. »32(*) Cette affirmation traduit la réalité de
la situation précaire dans laquelle évoluent les
défenseurs des droits de l'Homme camerounais. Ces derniers travaillent
dans un contexte hostile, marqué par l'impunité des nombreuses
atteintes perpétrées à leur encontre. Cette analyse se
proposera de discuter du rapport entre la réalité factuelle ainsi
dépeinte et, les considérations normatives théoriques
élaborées. Etant donné qu'elle ne peut rendre compte de
l'exhaustivité du réel, il importe de la circonscrire.
IV. DELIMITATION DE L'ETUDE
« Pour ne pas avoir le sentiment de vouloir tout
dire ou tout expliquer sur un sujet, il convient de mieux le
limiter. »33(*) Etant donné que cette étude sur la mise
en oeuvre des normes internationales de protection des défenseurs des
droits de l'Homme n'a pas la prétention de décrire la
totalité de la réalité, il faut la délimiter. Cette
opération se fait sur la base de trois critères distincts. Dans
un premier lieu, la délimitation spatiale permettra de borner la zone
géographique de l'analyse (A). Ensuite, la délimitation
temporelle déterminera les références périodiques
dans lesquelles elle se situe (B). Et enfin, l'on usera de la
délimitation matérielle pour spécifier les ressorts
scientifiques qu'elle mobilisera (C).
A. Délimitation
spatiale
L'espace géographique directement concerné par
cette étude est l'ensemble du territoire camerounais, comme clairement
défini par le thème de l'analyse. L'on cherche effectivement,
à rendre compte de la mise en oeuvre interne des normes internationales
de protection des défenseurs des droits de l'Homme, opérée
par le Cameroun. Ce dernier représente un support intéressant
pour l'étude dans la mesure où malgré qu'il soit
signataire des instruments majeurs du droit international des droits de l'Homme
et sujet par ricochet, de l'essentiel de la législation propre aux
défenseurs, la réalité quotidienne y dépeint la
récurrence de violations aux droits de ces derniers.
B. Délimitation
temporelle
La protection juridique internationale des défenseurs
des droits de l'Homme commence véritablement en 1998. Et, plus
précisément le 9 décembre, avec l'adoption du premier
texte de droit international traitant spécifiquement de la protection
des défenseurs des droits de l'Homme. Il s'agit de la Résolution
n° 53/144 de l'Assemblée Générale des Nations Unies
portant Déclaration sur le droit et la responsabilité des
individus, groupes et organes de la société de promouvoir et
protéger les droits de l'homme et les libertés fondamentales
universellement reconnus. Cet instrument est d'ailleurs communément
appelé Déclaration des Nations Unies sur les
défenseurs. Aussi, l'espace temporel sur lequel l'étude
s'appuiera partira donc de l'année 1998, jusqu'à l'année
2013, celle de la soutenance de ce travail de mémoire. 1998 parce qu'il
s'agit du moment où la protection des défenseurs des droits de
l'Homme est devenue un élément juridique vérifiable et
consacré. Et 2013 en raison de ce qu'elle constitue l'année de la
soutenance, celle de clôture de cette recherche. Elle ne pourra suivant
le contexte de travail de mémoire dans lequel elle s'insère,
exploiter des éléments survenus au-delà de cette limite
temporelle.
C. Délimitation
matérielle
Cette étude vise à rendre compte, de
l'internalisation faite par le Cameroun, des normes internationales de
protection des défenseurs des droits de l'Homme. Elle se propose en
fait, d'examiner la nature et la portée des mesures
déployées par l'Etat, afin d'assurer l'implémentation et
la réalisation de ces instruments, à l'intérieur de son
territoire. Aussi, les différents textes du droit international positif
relatif à la protection des défenseurs opposables au Cameroun,
constituent donc l'objet sur lequel l'analyse porte particulièrement.
Cela étant, pour bien être mené, ce travail devra s'appuyer
sur diverses disciplines scientifiques, sélectionnées chacune
précisément, relativement aux enjeux spécifiques de la
recherche.
Dans un premier temps, l'étude mobilisera certaines
branches du droit international et du droit interne camerounais. Il s'agit
d'abord du droit international public, « l'ensemble des
règles juridiques régissant les relations entre les Etats et les
autres sujets de la société
internationale »34(*). Il sera fondamental pour l'examen aussi bien des
instruments, que des mécanismes juridiques internationaux
déployés dans le but d'assurer la défense des activistes.
Cependant, ce droit au caractère fort général n'apportera
que des considérations d'ensemble. C'est pourquoi il faudra y associer
le droit international des droits de l'Homme. Ce dernier représente
« la branche du droit international public qui garantit la
protection des droits de l'Homme au moyen d'instruments internationaux
invocables devant le juge interne et devant les instances
internationales. »35(*) Il complètera l'analyse des
procédés juridiques internationaux normatifs et institutionnels
relatifs à la protection des défenseurs et permettra aussi
d'étudier leur articulation avec le droit camerounais. A ce niveau, il
faudra pouvoir analyser l'organisation juridique interne camerounaise afin
d'appréhender aussi bien les techniques nationales d'internalisation des
textes internationaux, que leurs rapports avec les lois internes. C'est le
domaine du droit constitutionnel, l'« ensemble des règles
juridiques relatives aux institutions grâce auxquelles l'autorité
s'établit, se transmet ou s'exerce dans
l'Etat. »36(*) Le droit constitutionnel camerounais sera donc
nécessaire ici. A la suite, il faudra étudier les
modalités définissant l'application, la justiciabilité et
le contentieux des traités incorporés dans l'arsenal interne.
Pour ce faire, il faudra mobiliser le droit public, le droit privé et le
droit judiciaire camerounais.
Dans un second moment, il convient de relever que la recherche
ici ne se limite pas qu'au domaine du droit. L'étude prend en effet en
compte, des aspects extra-juridiques qu'il faudra nécessairement
analyser. Aussi, dans le contexte de ce travail il faudra également
s'intéresser d'une part, aux interactions liant les acteurs du
système de protection des défenseurs à savoir : les
militants et les autorités. Mais il est important encore d'autre part,
de pouvoir mesurer l'influence de la législation internationale sur la
progression et la mise en oeuvre, du travail quotidien des défenseurs. A
ce niveau, il faudra inévitablement, faire appel à la sociologie.
Le cadre de l'analyse ainsi défini, il faut maintenant, préciser
le contenu des concepts auxquels elle fera recours.
V. DEFINITION DES
CONCEPTS
Le concept est une construction abstraite visant à
rendre compte de certains aspects précis du réel et, permettant
d'orienter la recherche.37(*) Il importe de définir les concepts sur
lesquels s'appuie l'analyse dans la mesure où ces derniers constituent
en fait des représentations contextuelles de la réalité,
dont le sens peut changer en fonction de la position selon laquelle on les
considère.38(*) La
définition du concept doit donc pouvoir aussi bien en décrire la
substance, mais également en révéler les critères
distinctifs.39(*) Alors,
afin de mieux appréhender la démarche que l'on s'engage à
suivre dans le cadre de cette étude, il importe de préciser les
concepts importants qu'elle mobilisera à savoir : mise en oeuvre
(A), norme internationale (B), protection (C) et défenseur des droits de
l'Homme (D).
A. Mise en oeuvre
De manière sommaire, on pourrait se contenter de dire
que la mise en oeuvre couvre toutes les mesures qui doivent être prises
pour assurer le plein respect des règles de droit.40(*) Mais il s'agit là d'une
conception simpliste, dont on ne peut se satisfaire pour une étude d'une
telle envergure. Relativement à la question, Laurence BOISSON DE
CHAZOURNES pose que : « toute analyse de la mise en oeuvre
du droit international ou d'un principe de droit international comme dans le
contexte de l'étude, c'est-à-dire des méthodes et moyens
visant à assurer l'application effective de ses règles tente de
prendre en compte l'ensemble des efforts qui sont déployés pour
faire en sorte que les normes juridiques soient
respectées. »41(*) Cette définition même si elle est
plus précise en ce qu'elle présente le rapport liant la mise en
oeuvre à l'effectivité de la norme, est encore peu consistante et
vague quant aux moyens que celle-ci déploie. Pour Jean COMBACAU,
« par mise en oeuvre, on entendra les procédés
juridiques à la disposition des sujets de droit international pour
remplir leurs engagements, exercer leurs droits ou assumer leurs
obligations. »42(*) Il apporte plus d'éclaircissements quant
aux outils sur lesquels s'appuie la mise en oeuvre, ainsi qu'aux buts qu'elle
vise. Cependant, Sandrine MALJEAN DUBOIS va plus loin. Elle expose que la
« mise en oeuvre s'appréhende dans l'édiction des
lois et la création des mécanismes garantissant à la fois
l'effectivité et l'efficacité du droit de l'environnement ainsi
que leur respect permanent. »43(*) Cette définition semble assez
satisfaisante. Elle précise la mise en oeuvre comme un ensemble de
mesures pouvant être législatives ou non, visant à garantir
l'implémentation de la norme juridique. C'est d'ailleurs dans ce sens,
que va Janvier OWONO. Pour lui, « une mise en oeuvre de la
règle de droit ou d'une théorie se fait à travers
l'adoption des lois et la mise en place des mécanismes garantissant
l'effectivité et l'efficacité du droit ou de cette théorie
dans le temps et dans l'espace. »44(*) L'on entendra par mise en
oeuvre, suivant le sens de cette acception, le corpus des mesures
légales rationnelles et des mécanismes pris par l'Etat pour
assurer d'abord, l'incorporation des normes internationales dans son ordre
interne et ensuite, l'application de ces dernières sur son
territoire.
B. Norme
internationale
Pour définir aisément ce que c'est qu'une norme
internationale (2), il faut d'abord comprendre ce qu'est une norme (1).
1. Norme
Pour Raymond GUILLIEN, la norme est « un
synonyme de règle de droit, de règle juridique, obligatoire,
générale et impersonnelle. » 45(*) Cette acception sert
l'intérêt de la recherche dans la mesure où, elle a le
mérite d'établir d'emblée un parallèle entre la
norme et le droit, en assimilant la norme à la règle juridique,
« la règle de conduite dans les rapports sociaux,
générale, abstraite et obligatoire, dont la sanction est
assumée par la puissance publique. »46(*) Cependant, si l'on ne
distinguera pas la norme de la règle de droit, il est nécessaire
de relever que le domaine de la norme ne se limite pas qu'au champ du droit. En
effet, « identifier la règle juridique, c'est d'abord
observer que la normativité n'est pas une propriété
spécifiquement et exclusivement juridique. La règle de Droit
c'est avant tout une règle, une « norme ». Or
l'univers des normes excède celui du Droit. A dire vrai, le Droit
n'occupe même qu'une parcelle assez restreinte à
l'intérieur de cet univers : celui des normes de type
éthique, pour dire très vite, où il coexiste avec la
religion, la morale, l'éthique proprement dite, les moeurs latissimo
sensu ; bref, tout ce qui, en gros, régule l'ordre humain sous
forme d'obligation. »47(*)
Cette précision apportée, il faut rechercher le
sens véritable de la norme. Denys DE BECHILLON détaille de
façon fort éloquente que : « [...] la
règle, tel que nos sociétés la produisent et se la
représentent, au premier plan, demeure, quoi qu'on en dise,
imprégnée d'abord par l'idée d'obligation,
d'autorité, de prescription, de hiérarchie et de contrainte.
[...] L'objet des règles réside d'emblée dans la
« mesure » que l'humanité se donne à
elle-même pour réguler ses affaires relationnelles. [...] Alors,
suivant une ligne d'inspiration plutôt kelsénienne, hasardons que
la norme pourrait se définir comme la signification d'une proposition
indiquant aux hommes ou aux institutions un modèle auquel se
conformer. »48(*) C'est dans ce sens que Hans KELSEN appréhende
la chose. Pour lui, « la norme désigne une prescription ou
un ordre [...] c'est la signification d'une volonté, d'un acte de
volonté et la signification d'un acte, qui est dirigé vers le
comportement d'autrui, d'un acte dont la signification est qu'une autre
personne (ou d'autres personnes) doit se comporter d'une manière
déterminée. »49(*) Cette définition apporte plus de clarté
quant au but et à la cible de la norme. En effet selon elle, la norme
exprime l'idée qu'un Homme doit se conduire d'une certaine
façon50(*),
entendu qu'elle vise systématiquement à provoquer la conduite
d'autrui. La norme juridique prescrit donc toujours des modèles
comportementaux51(*),
c'est sa raison d'être et sa fin. Elle vise à influencer l'agir
d'un ou de plusieurs membres de la société : aussi peut-elle
avoir un caractère individuel ou général52(*). Néanmoins, cette
définition ne satisfait pas totalement aux besoins de l'analyse, en ce
qu'elle n'expose pas totalement les caractères de la norme.
Xavier LABEE certes va dans le sens des
précédents auteurs, mais dépasse leur pensée en
introduisant un nouvel élément. Pour lui :
« une règle de droit est donc une règle
obligatoire, contraignante, assortie d'une sanction
étatique. »53(*) Cette pensée étend la
critériologie de la norme ; elle ajoute comme
caractéristique de la norme, la manifestation de la puissance publique.
L'auteur dont émane la règle doit être investi du pouvoir
règlementaire de la créer.54(*) Aussi, la norme doit donc pouvoir émaner d'un
locuteur habilité à l'exercice du pouvoir juridique, de la
qualité duquel sa propre force dépend.55(*) La conséquence est
qu'il existe une hiérarchie des normes, correspondant à celle des
organes habilités à produire le droit.56(*) Forts de ces
différents éléments, l'on appréhendera la norme
dans le contexte de cette étude, suivant une acception essentiellement
objective. Elle sera comprise, comme tout énoncé sous forme de
langage doué d'obligatoriété, de portée
générale et impersonnelle, incorporé à un ordre
juridique donné, dont l'objectif est de réguler la conduite
sociale et dont le non respect est sanctionné par la contrainte
étatique. C'est sur la base de cette conception, qu'il faudra envisager
la norme internationale.
2. Norme
internationale
La conception de la norme varie selon que l'on se situe en
droit interne ou en droit international. Si en droit interne, la norme est le
produit exclusif de la seule puissance publique souveraine, son
appréhension est différente à l'échelle
internationale. Ceci essentiellement du moment où le champ du droit
international englobe la diversité et la totalité des
différentes entités souveraines. En effet, le droit international
est le droit produit par le concours de deux ou plusieurs Etats [...] il
émane des Etats agissant ensemble, et non d'un Etat seul comme le droit
« national » ou
« interne ».57(*) Par conséquent, la formation de la norme
internationale diffère de celle de la norme interne : elle tient au
positivisme volontariste.58(*)
Le système juridique international se
caractérise par la production de la norme par l'inexistence du
type-loi.59(*) A cet
effet, les doyens Jean COMBACAU et Serge SUR soulignent qu'en droit
international : « les techniques normatives alternent ou
associent l'unilatéral et le concerté60(*), et qu'en dernière
analyse le critère de l'existence d'une norme internationale
réside dans l'engagement international de
l'Etat. »61(*) En d'autres termes, les normes
internationales sont relatives et ne lient que chacun des Etats qui se les sont
rendues opposables : leur validité et leurs effets reposant sur la
volonté des Etats pour qui elles font droit.62(*) Aussi, les normes
internationales sont le produit du processus de formation du droit
international et le contenu des actes juridiques internationaux, qui
développent et enrichissent la substance du droit
international.63(*)
Il faut donc retenir d'une part, le fait que les normes
internationales, constituent des manifestations de la volonté des sujets
de droit international. Ces normes résultent donc de l'action des
entités possédant la personnalité juridique
internationale. A ce titre, elles peuvent donc émaner aussi bien des
Etats, sujets principaux du droit international que des organisations
internationales, sujets dérivés du droit international. D'autre
part, il convient de relever que les normes dérivent des sources du
droit international. A ce titre, « par normes, on entend le
contenu, la substance des règles élaborées selon les
exigences procédurales de telle ou telle source formelle. Une même
norme peut être issue de plusieurs sources [...] Inversement, une
même source peut donner naissance à de nombreuses règles de
contenu très varié. »64(*) Par conséquent, en
droit international il n'existe pas de système dans lequel les normes
sont hiérarchisées selon leur fondement ou leur source formelle
comme en droit interne.65(*)
En outre, la norme internationale se distingue de la norme
interne, en ce qu'elle ne revêt pas toujours un caractère
d'obligatoriété, elle peut ne pas s'imposer aux sujets qu'elle
vise. Jusqu'à une date assez récente, la norme juridique
s'imposait catégoriquement et là où l'Etat disait du
droit, régnait une normativité hard, inconditionnelle et dure. Le
langage du droit était contraignant par essence, sans états
d'âme.66(*) Pourtant
le droit international contemporain s'est enrichi de formes de
normativité juridique plus soft, adoucies et compréhensives, ne
produisant pas d'obligation ou de prohibition inconditionnelle. Le conseil et
l'ordre appartiennent tous deux désormais à l'arsenal juridique
et, le droit entend réguler la vie sociale sans interdire ni
obliger.67(*) Les
caractéristiques propres de la norme internationale ainsi
présentées, il faut en appréhender la substance.
En ce sens, le doyen Pierre-Marie DUPUY rappelle
qu' « un texte est juridiquement normatif s'il crée
un ensemble de droits et d'obligations, et il ne l'est pas si cette condition
n'est pas réalisée. »68(*) Cette définition
même si elle est insuffisante, met l'emphase sur la
nécessité pour la norme internationale de régir les
rapports sociaux. Jean COMBACAU qui se situe dans cette logique, est bien plus
précis. Pour lui, les normes internationales sont des
« énoncés qui ont pour fonction, soit de
déterminer les conduites de ceux qui entrent dans leur champ
d'application, soit de permettre après coup d'apprécier ces
conduites et d'en déterminer les conséquences ; les
premières s'adressent plutôt aux sujets, les secondes plutôt
aux organes et agents chargés au sein du système de la bonne
application du droit ; en réalité moyens et
déterminations des conduites à suivre et étalons de mesure
des conduites suivies s'étayent mutuellement et se confondent dans une
large mesure. »69(*)
En somme, dans le cadre de cette étude, l'on
considérera la norme internationale comme tout acte émanant d'un
sujet doué de la personnalité juridique internationale,
élaboré conformément aux exigences inhérentes
à une ou plusieurs sources formelles de droit international, dans
l'objectif de réguler les rapports sociaux au sein des
communautés relevant du rayonnement de l'acte et dont, le non respect
peut ne pas être sanctionné.
C. Protection
Gérard CORNU appréhende la protection comme une
« précaution qui, répondant au besoin réel
de celui qu'elle couvre, et répondant en général à
un devoir pour celui qui l'assume, consiste à prémunir une
personne ou un bien contre un risque, à garantir sa
sécurité, son intégrité, etc. par des moyens
juridiques ou matériels. »70(*) Cette conception a le mérite d'introduire
dans le champ de la réflexion, le lien juridique personnel existant
entre le débiteur et le créancier de l'obligation de protection.
Si pourtant elle pose les bases de la compréhension juridique du terme,
elle reste encore beaucoup trop dépendante du sens courant. Jean SALMON
s'avance un peu plus loin de ce dernier. Pour lui la protection c'est
l'« action de prendre soin des intérêts d'une
personne ou d'une institution ou encore [l'] action prise pour préserver
certaines catégories de personnes ou de biens contre les attaques et
d'autres actes préjudiciables. »71(*) Il précise en
outre que la protection adopte des formes et revêt des modes distincts,
en fonction de la personne ou de l'objet protégé. C'est dans ce
sens qu'il appréhende le protection des droits de l'Homme comme
l'ensemble des mesures destinées à assurer le respect réel
et effectif de ces droits, par des garanties politiques ou juridiques,
notamment en assurant des voies de recours efficaces en cas de violation, sur
le plan interne comme sur le plan international.72(*)
Dans ce sillage, Kéba MBAYE apporte une analyse
beaucoup plus fine de la protection, qu'il distingue par la même occasion
d'un concept que l'on tend très souvent à lui rapprocher :
la promotion. Aussi, selon lui : « est protection des droits
de l'Homme tout système comportant, à l'occasion d'une
allégation d'une ou de plusieurs violations d'un principe ou d'une
règle relative aux droits de l'Homme et édictés en faveur
d'une personne ou d'un groupe de personnes, la possibilité pour tout
intéressé de soumettre une réclamation, de
déclencher l'examen de cette réclamation et éventuellement
de provoquer une mesure tendant à faire cesser la ou les violations,
à assurer aux victimes une réparation jugée
équitable. Ainsi on met en lumière les notions qui font
apparaître qu'il ne s'agit plus seulement de promouvoir le respect des
droits de l'Homme, mais d'apporter une solution médicinale à une
situation qui fait apparaître une entorse aux règles
régissant ces droits. »73(*) Cette acception met un accent sur le volet curatif de
la protection. Elle expose le fait que cette dernière
« s'intéresse plutôt à ce qui s'est fait ou
est en train de se faire. Elle est donc ancrée dans le présent et
regarde vers le passé. Son objectif est de restituer l'ordre des choses
quand il est dérangé par un acte attentatoire des droits de
l'Homme. [...] Elle apporte un remède à une situation qui s'est
produite ou qui se produit et qui n'est pas conforme aux règles
régissant les droits de l'Homme. »74(*) C'est cette
interprétation de la protection que l'on retiendra pour le compte de
cette de cette étude.
D. Défenseur
des droits de l'Homme
Avant d'appréhender ce que c'est qu'un défenseur
des droits de l'Homme (2), il est logique de d'abord rechercher la substance de
la notion de droits de l'Homme (1).
1. Droits de
l'Homme
Les droits de l'Homme représentent un concept qu'il
n'est pas aisé à enfermer dans une définition
conventionnelle, unanime et rigide. Jean MORANGE théorise parfaitement
cet état de fait quand il pose que : « les droits de
l'Homme ont incontestablement acquis une importance fondamentale dans les
sociétés contemporaines. Ils n'ont pas pour autant une
définition et une signification uniques et certaines. Ils sont l'objet
de convergences mais aussi l'enjeu de débats. »75(*) Dès lors, la
difficulté ici, consiste à appréhender un concept tout
aussi polysémique que communément partagé. G. HERMET ouvre
dans ce sens, une première piste à la compréhension de
cette notion. Pour lui, il s'agit d' « un corps de droits et
de devoirs fondamentaux, inspirés à l'origine, par la philosophie
des lumières et attribuées à l'ensemble de
l'humanité sans distinction de sexe, de race, de religion, de statut, de
croyance ou de nationalité. »76(*) Cette acception a le
mérite d'exposer le fait que les droits humains constituent des
prérogatives universelles, reconnues à tous les hommes. Il s'agit
là d'une conception que partage bon nombre d'auteurs comme André
POUILLE. Pour ce dernier : « les droits de l'Homme sont un
ensemble de droits qui conditionnent à la fois la liberté de
l'homme, sa dignité et l'épanouissement de sa personnalité
en tendant vers un idéal sans cesse inassouvi. »77(*) Si cette définition
épouse le sens de la première, elle met en plus en exergue, le
rapport liant les droits humains aux valeurs élevées engageant
l'essence de l'homme. Cependant, si elle ressort le substrat sur lequel repose
la notion, elle n'en dit pas plus sur la substance.
Jacques MOURGEON propose une formule qui prend en compte cette
orientation. Selon lui, « les droits de l'Homme se
définissent comme étant des prérogatives gouvernées
par des règles que la personne [...] détient en propre dans ses
relations avec d'autres personnes [...] ou avec le
peuple. »78(*) Sa définition malgré qu'on puisse lui
faire le grief d'être assez simpliste et superficielle, propose une
catégorisation des droits de l'Homme qui peuvent donc être,
individuels ou collectifs. Dominique KAMWANGA se veut plus exhaustif :
« les droits de l'Homme sont des facultés qu'un être
humain ou un individu possède en toute liberté et dont les
violations ou tout refus à y satisfaire sont considérées
comme illégaux parce que reconnus par la collectivité. Ce sont
aussi des standards fondamentaux, des prérogatives morales ou des
règles que la nature confère à l'Homme en tant
qu'être doué d'intelligence auxquels doivent se conformer la
coexistence des sociétés et des individus ; qui sont la
manifestation de sa personnalité et qui lui permettent d'agir, de vivre,
de se protéger. Les droits de l'Homme sont le fondement de la
liberté, de la justice, de la paix et dont le respect permet à
l'homme de se développer. »79(*) Les droits de l'Homme
constituent donc au sens de cette affirmation, à la fois les
facultés et les principes reconnus à tout individu,
déterminant son mieux-être. Toutefois, l'on appréhendera le
concept de droits de l'Homme dans cette analyse, à la lumière de
la définition synthétique proposée par Kéba MBAYE.
Alors, au sens de cette étude : « les droits de
l'Homme se présentent donc comme un ensemble cohérent de
principes juridiques fondamentaux qui s'appliquent partout dans le monde tant
aux individus qu'aux peuples et qui ont pour but de protéger les
prérogatives inhérentes à tout homme et à tous les
hommes pris collectivement en raison de l'existence d'une dignité
attachée à leur personne et justifiée par leur condition
humaine. »80(*) Il s'agit des prérogatives dont la protection
juridique internationale porte généralement sur les droits civils
et politiques, les droits économiques et sociaux et, des droits relevant
de la troisième génération, dits de la
solidarité.81(*)
C'est sur la base de ces droits, que porte l'action des défenseurs des
droits de l'Homme.
2. Défenseur
des droits de l'Homme
La catégorie d'individus intervenant dans le contexte
de la défense des droits de l'Homme est si hétéroclite
qu'il n'est pas aisé d'établir une formule parfaite pour
homogénéiser ces personnes de natures et de fonctions diverses.
Navanethem PILLAY, haut-commissaire des Nations Unies aux droits de l'Homme,
synthétise parfaitement cette vérité lorsqu'elle dit au
sujet du métier de défenseur des droits de l'Homme que :
« c'est un titre que chacun d'entre nous peut mériter. Ce
n'est pas un rôle qui demande une formation professionnelle. Pour
être défenseur des droits de l'Homme, il faut tenir compte de son
prochain et comprendre que nous avons tous le droit de bénéficier
de l'ensemble des droits de l'Homme et que nous devons oeuvrer pour que cet
idéal devienne une réalité. »82(*) Toutefois, l'Observatoire
pour la protection des défenseurs propose face à cette
difficulté, une définition opérationnelle destinée
à identifier ce qu'est distinctement un protecteur des droits de
l'Homme. Il s'agit selon elle, de « toute personne qui risque ou
qui est victime de représailles, de harcèlement ou de violations
en raison de son engagement, conformément aux instruments internationaux
de protection des droits de l'Homme, individuellement ou en association avec
d'autres, en faveur de la promotion et de la mise en oeuvre des droits reconnus
par la Déclaration universelle des droits de l'Homme et garantis par les
divers instruments internationaux. »83(*) La déclaration des Nations Unies de 98
dans ce sens, invite en son article 1, à appréhender le
défenseur comme toute personne qui, individuellement ou en
association avec d'autres, promeut par des moyens pacifiques, la
protection et la réalisation des droits de l'Homme et des
libertés fondamentales aux niveaux national et
international.84(*)
En fait, « l'expression «défenseur des droits de
l'Homme» désigne toute personne qui, individuellement ou en
association avec d'autres, oeuvre à la promotion ou à la
protection des droits de l'Homme. Un défenseur des droits de l'Homme est
quelqu'un qui défend n'importe quel droit fondamental au nom d'une
personne ou d'un groupe de personnes. Les défenseurs des droits de
l'Homme cherchent à promouvoir et protéger les droits civils et
politiques ainsi qu'à promouvoir, protéger et mettre en oeuvre
les droits économiques, sociaux et culturels. »85(*) L'on retiendra donc pour
les besoins de cette analyse, que les défenseurs des droits de l'Homme
sont tous les individus qui, à travers le monde, luttent sans violence,
individuellement ou collectivement, pour le respect des droits et des
libertés fondamentaux universellement reconnus. Cette étude
construite sur un tel objet d'étude, revêt un intérêt
particulier pour la société.
VI. INTERET DU SUJET
Le débat actuel au sujet de la question des
défenseurs des droits de l'Homme porte essentiellement sur la
nécessité de leur protection. Dans un contexte marqué par
l'évolution de la dangerosité de cette activité, les
différents acteurs internationaux, conscients de la prime importance de
celle-ci pour l'implémentation d'une culture de respect des droits
humains, ont pris l'engagement solennel d'assurer un cadre propice à la
défense des droits universels proclamés. Cette étude tire
son actualité de cette tendance et revêt de ce fait, un
intérêt double, à la fois scientifique (A) et social
(B).
A.
Intérêt scientifique
Le travail porte sur l'application par le Cameroun, des
règles internationales de protection des défenseurs des droits de
l'Homme. Il se propose donc d'exposer et d'analyser les diverses politiques
déployées par le Cameroun dans le sens de la protection des
défenseurs, conformément aux standards universels définis
en la matière.
La plus-value théorique de cette recherche porte sur ce
qu'elle permettra de faire l'état de la législation
internationale positive relative à la protection des défenseurs.
Cet apport technique réside précisément en ce que
l'analyse ne se contentera pas d'une plate description du droit, mais
procèdera à une confrontation de ce dernier aux faits. Aussi,
à la lumière de l'examen critique d'un cas de mise en oeuvre
interne des normes de protection des défenseurs des droits de l'Homme,
l'on pourra apprécier l'impact empirique réel du droit
international en vigueur relatif aux défenseurs, tel qu'il est
actuellement défini. Cette appréciation de l'impact du droit,
pourra permettre de le repenser et de l'amender, afin d'assurer une protection
plus efficace des militants.
Cette analyse est encore intéressante sur le plan
scientifique à plus d'un titre. Ceci dans la mesure où le cadre
juridique international de protection des droits spécifiques aux
défenseurs, ne se limite qu'à un dispositif non contraignant
essentiellement axé sur des déclarations. Cette étude
permettra d'analyser le comportement d'un Etat membre du système
onusien, dans un contexte marqué par la forte prégnance des
droits de l'Homme sur le jeu des relations internationales, face à des
dispositions de soft law, qui par définition, ne l'obligent
pas. Elle permettra ainsi d'autre part en toile de fond, de mesurer
l'attractivité que peuvent exercer des normes de portée non
contraignante relatives aux droits de l'Homme, sur les Etats.
L'opportunité ici, réside en fait dans l'idée d'examiner
l'attitude des gouvernements, d'étudier au moyen d'un cas de figure, la
façon dont ils usent de leur souveraineté, face aux contingences
posées par le nouvel ordre international, dominé par la cause des
droits de l'Homme.
B.
Intérêt social
L'étude a une portée sociale indéniable
du moment où elle se penche sur la règlementation d'une
activité sociale ayant un retentissement important sur la vie et la
sécurité des individus : la défense des droits de
l'Homme. Elle permettra de connaître avec précision les
mécanismes de protection des défenseurs des droits de l'Homme
existant au Cameroun, ainsi que les principes encadrant la sécurisation
de l'activité de ces derniers, de façon à agir dans le but
d'une amélioration de celle-ci, conforme aux prescriptions du droit
international positif. L'intérêt social de cette analyse consiste
dans sa propension à conscientiser et amener la société,
à réfléchir sur la nécessité de
sécuriser les professionnels des droits humains, dans leurs
activités de dénonciation, dont l'importance est capitale pour le
respect des droits individuels et collectifs des populations.
A cette effet, différentes couches de la
société bénéficieront de ce travail de recherche.
Il s'agit d'abord des autorités et des organisations de défense
des droits de l'Homme qui en profiteront de manière directe.
Relativement aux décideurs, ces derniers pourront y puiser une base
fiable destinée à les accompagner dans la définition de
leurs politiques, afin d'assurer la protection efficace des prérogatives
des militants des droits de l'Homme. Ceci revêt encore plus de sens,
quand on sait que ces derniers constituent -lorsqu'ils jouent leur rôle
dans les meilleures conditions-, un partenaire de choix éclairant et
assistant l'action du gouvernement, dans l'exécution de ses obligations
internationales relatives à la mise en oeuvre des droits de l'Homme. Les
préconisations suggérées sur la base des carences
relevées, pourront donc servir à la restructuration du
système interne de protection des droits de l'Homme, pour la mise en
place d'un cadre propice à l'action épanouie des professionnels
des droits de l'Homme.
Pour ce qui est des défenseurs camerounais des droits
de l'Homme, ils trouveront avant tout en cette analyse, un état des
lieux en ce qui concerne l'aménagement normatif et institutionnel de
leur protection. Après la lecture de ce travail ils auront une vision
claire et critique de l'effectivité des prérogatives qui leur
sont reconnues par la loi positive, et pourront efficacement définir
leurs itinéraires de façon éclairée.
Il faut dire en somme que, c'est la population dans son
ensemble qui jouira de façon indirecte, de cette recherche. Etant
donné que les défenseurs constituent un maillon essentiel de la
chaîne de protection des droits humains, définir des
modalités destinées à assurer leur protection, c'est en
même temps élaborer des mesures garantissant par ricochet, la
protection des droits du plus grand nombre. Ceci dans la mesure où, la
protection des défenseurs a un effet multiplicateur sur la protection
des droits de l'Homme.
VII. REVUE DE LA LITTERATURE
La question de la protection des droits de l'Homme en
général, et des défenseurs de ces derniers en particulier,
est un domaine sensible ayant motivé la production de nombreuses
études. Il faut dire qu'une observation minutieuse de ces
dernières pourrait laisser transparaître la coexistence de deux
courants de pensée, définissant les lignes de recherche
exploitées par les auteurs. Alors, si un premier courant analyse le
phénomène de la défense des droits de l'Homme en
général, le second s'intéresse directement à
l'étude des défenseurs en eux-mêmes.
A. La première
tendance : la défense des droits de l'Homme
appréhendée comme phénomène social objectivement
étudiable.
La première famille de recherche étudie la
question générale de la défense et de la protection
internationale des droits de l'Homme. Comme premier auteur s'inscrivant dans ce
champ de réflexion, l'on peut faire intervenir Jean-Luc MATHIEU86(*). Celui-ci envisage la
défense des droits de l'Homme comme un phénomène
obéissant aux dynamiques essentiellement contextuelles et contingentes.
En effet, pour l'auteur à la base, le concept des droits de l'Homme
transcende les cultures et il n'existe pas à son sujet,
d'appréhension véritablement exacte et commune partagée
par tous. A côté de la morale internationale
officielle87(*)
secrétée par l'ONU, il subsiste des codes de compréhension
et des façons de faire relativement aux droits de l'Homme propres
à toutes les logiques culturelles de pensée. La défense
internationale des droits de l'Homme se calque donc bien évidemment sur
ce schéma, laissant transparaître un corpus de protection à
vocation universelle dicté par le droit international onusien et, des
systèmes régionaux de protection (européen,
américain et africain). L'auteur analyse avant de s'étendre sur
ces divers systèmes, un mode moins conventionnel de protection des
droits de l'Homme : celui de l'opinion publique. Il expose à ce
niveau, sur les associations de défense des droits de l'Homme, luttant
à travers le monde, pour l'application et le respect des principes de la
déclaration universelle. Au travers d'une analyse concise de l'exemple
de deux d'entre elles (la Fédération Internationale des ligues
des droits de l'Homme et Amnesty International), l'auteur révèle
le caractère précaire et risqué de leur action, en raison
du risque important de représailles qu'elles courent, en
dénonçant les exactions des gouvernements qui n'ont de
démocratique, que le discours officiel.88(*) Pour MATHIEU en somme, la situation des associations
de défense des droits de l'Homme ainsi que les fruits de leurs actions
varient en fonction de l'attachement des Etats aux valeurs et principes de la
dignité humaine.89(*)
Etienne JAUDEL90(*) dans la même ligne de pensée, expose la
dangerosité de l'activité de défense des droits de
l'Homme. Pour lui, l'action des militants des droits de l'Homme aide à
limiter les violations des droits des citoyens perpétrées par
l'autorité. En effet, « sans doute continue t-on à
prendre, à fusiller, à frapper, à enfermer des hommes et
des femmes dans le monde, parfois même, comme en Afrique du Sud, des
enfants. Mais il est de plus en plus difficile de le reconnaitre publiquement
[...] L'action des O.N.G [...] y contribue d'une manière
irremplaçable. »91(*) Les activistes sont donc des gêneurs que l'Etat
doit pouvoir museler et annihiler dans l'optique de la réalisation de
ses projets politiques. De son expérience à lui, il ressort un
certain nombre de stratagèmes que les gouvernements mettent en place
pour y parvenir. La tendance générale dans ce sens, est au
règne de l'apparence. Les gouvernants pour compliquer la tâche des
activistes et la conception mondiale, font croire ce qui n'est pas. La
soumission de l'Etat aux règles protectrices des droits humains n'est
donc que du domaine de l'apparence. Ceux-ci d'autre part, agissent
assurément et en toute impunité, tant ils contrôlent
l'ensemble des moyens de communication, le pouvoir judiciaire dont ils
orientent l'activité de répression, et l'opposition. Le pouvoir
arrête et détient tous ceux qui s'opposent à lui. Il
n'hésite pas à tuer ou déstabiliser les défenseurs
si besoin est. Dans ces pays de crainte le seul fait d'être vu avec les
activistes est compromettant. Force étant d'admettre
que : « faire disparaitre les gêneurs et les
embastiller est une méthode pour désorganiser l'opposition et
décourager les sympathisants. »92(*)
Guy AURENCHE s'inscrit dans le même ordre
d'idées. L'auteur développe deux logiques de pensées
différentes et complémentaires. Selon lui, la défense des
droits de l'Homme constitue d'abord un attribut de la dignité
humaine.93(*) C'est la
raison pour laquelle d'autre part, elle est légitime et requiert une
protection juridique.94(*)
Pour AURENCHE d'une part, tout le monde a le pouvoir et le
devoir de devenir un ardent défenseur des droits de l'Homme. Dans la
mesure où chacun de nous détient un peu de la réponse
à la question que pose le respect des droits de l'Homme95(*), il ne suffit pas de regarder
les militants défiler, il faut les rejoindre.96(*) Il est même urgent
d'agir dans le sens de la défense des droits humains :
« les violations des droits de l'Homme s'étalent devant
nous. Discours et bavardages ont pris une telle place dans nos vies qu'ils
suffisent parfois à les remplir. Il en est de même pour les droits
de l'Homme. Les proclamations ont été faites et les conventions
signées ; Il ne nous reste qu'à les appliquer dans la
réalité quotidienne. »97(*) Il envisage la question de la
protection des droits de l'Homme comme une mission ouverte à tout le
monde et pas seulement à une caste de spécialistes. En tant que
citoyens du monde, nous avons tous la responsabilité
personnelle de réclamer nos droits et de réaliser nos
devoirs car « ceux qui dans la revendication de leurs droits
oublient leurs devoirs ou ne les remplissent qu'imparfaitement, risquent de
démolir d'une main ce qu'ils constituent de
l'autre. »98(*)
L'auteur démontre ensuite par ailleurs, la
légitimité de la protection des droits de l'Homme.
« Parce que les droits de l'Homme sont des promesses juridiques
faites par des Etats devant la communauté internationale, l'opinion
publique mondiale doit pouvoir alors exiger des
comptes. »99(*) Le militantisme intègre des défenseurs
des droits de l'Homme est nécessaire pour contrôler l'action du
politique et le conformer aux exigences humanitaires. Il ne saurait être
considéré comme une ingérence dans les affaires
intérieures de l'Etat. Est normale l'ingérence des citoyens
membres d'associations, qui rappellent aux responsables leurs devoirs
légaux, sur la base des textes juridiques ratifiés par leurs
pays.100(*)
« Il y a la matière à une
« ingérence consentie » par l'Etat, puisque, en
signant un document juridique avec d'autres nations, le pays donne aux autres
le droit -le devoir- d'examiner la manière dont il respecte son
engagement [...] Les mécanismes créés pour
contrôler, ou parfois juger, les manquements aux textes internationaux
permettent une interpellation normale mutuelle qui ne peut être
assimilée à une ingérence
abusive. »101(*) L'action des associations de défense des
droits de l'Homme est donc nécessaire, malgré qu'elle n'attire
pas la sympathie des gouvernements.102(*) C'est en ce sens qu'elle nécessite une
protection spécifique du droit international.
Il faut remarquer au regard de ces développements, que
les auteurs du premier courant s'ils apportent des informations essentielles
sur les réalités inhérentes au vécu des
défenseurs, n'abordent pas spécifiquement la question de leur
protection qui intéresse cette étude. De plus, ces derniers se
limitent en effet, à l'analyse du phénomène
générique de la défense des droits de l'Homme et
n'étudient donc les professionnels en eux-mêmes, que de
façon périphérique. Dans leurs analyses, ils envisagent le
concept de défenseur des droits de l'Homme de façon très
restrictive en ce qu'ils ne le limitent qu'aux seuls cas des associations de
défense des droits de l'Homme.
B. La seconde
tendance : la défense des droits de l'Homme analysée du
point de vue des acteurs.
Sans s'opposer au premier courant, le second le
complète. Les auteurs de ce dernier, traitent de la défense des
droits de l'Homme du point de vue des personnes103(*) agissantes. Ils
étudient en effet, de manière particulière, les acteurs
institutionnels de la protection internationale des droits de l'Homme. Marie
Thérèse MENGUE104(*) dans ce sens, s'intéresse à la
société civile. Elle recherche l'impact de la
société civile sur la promotion d'une culture des droits de
l'Homme au Cameroun. Pour elle, « la société civile
joue un rôle important dans la protection et défense des droits
des citoyens ».105(*) Ce rôle est soutenu en majorité
par l'efficacité et l'engagement des Organisations Non Gouvernementales
(O.N.G) impliquées dans la promotion des droits des populations. Cette
optique la conduit à étudier l'action des ces dernières,
étant donné que : « le sort des droits de
l'homme dépend dans une large mesure des activités des
organisations non gouvernementales chargées de la défendre,
beaucoup plus que l'Etat qui n'accorde que très peu d'importance
à la question en terme d'action. »106(*) De cette analyse,
il ressort que l'oeuvre de ces militants des droits de l'Homme se heurte
à de nombreux problèmes, qui en entravent l'efficacité.
Elle relève entre autres : la corruption, le manque de moyens et de
formation des populations sur les droits humains, ainsi que les pesanteurs
administratives. La sensibilisation menée par ces O.N.G ne produit donc,
qu'un faible impact sur les populations cibles. Elles nécessitent le
recours à des moyens plus forts pour amener les populations à
intégrer l'idée et le respect des droits de l'Homme dans leur
habitus.
Arthur de MONTALEMBERT107(*) et Aimé LEAUD108(*) dans le même sens,
restent dans le cadre de la protection des droits de l'Homme par l'opinion
publique. Ils étudient tous les deux le cas particulier d'une ONG
internationale de défense des droits de l'Homme : Amnesty
International. Le choix loin d'être hasardeux, se porte sur cette
institution en raison de son impact universel important. Ceci en ce sens
que : « tout se passe comme si Amnesty International jouait
le rôle de fer de lance de la Communauté internationale en
matière de respect des droits civils et politiques [...] Autrement dit,
Amnesty International, par le poids et la dimension humaine qu'elle apporte
à la lutte pour le respect des Droits de l'Homme, indépendamment
de toute considération politique, économique ou
stratégique, constitue le complément indispensable à
l'action de la Communauté internationale. »109(*) Les auteurs au moyen d'un
exemple précis, font une présentation globale des
réalités auxquelles sont rompues la plupart des organisations de
société civile, oeuvrant dans le domaine de la protection des
droits humains. Ils décrivent les éléments qui font le
succès de l'organisation de renom, dans le but d'exposer les attitudes
à avoir et aussi les mises en garde à savoir, pour assurer un
militantisme efficace des droits de l'Homme. Par ailleurs, il est important que
l'opinion publique continue de se mobiliser, afin d'orienter l'action des
gouvernements dans le sens de la mise en oeuvre des prérogatives
universelles. Ceci étant donné d'une part, que les Etats
démocratiques ne mesurent pas toujours les responsabilités qui
sont les leurs en matière de protection internationale des droits de
l'Homme110(*) et
que d'un autre côté, même dans les pays qui sont,
à juste titre, considérés comme des modèles d'Etat
de droit, de graves atteintes aux droits de l'Homme se
produisent.111(*)
W. OFUATEY-KODJOE112(*) s'intéresse pour sa part, à un autre
acteur institutionnel intervenant dans la protection des droits de
l'Homme : l'Organisation des Nations Unies (ONU). Il fait remarquer
d'emblée le rôle essentiel joué pour cette institution
depuis sa création, dans la protection des droits humains. En effet,
« depuis 1945, la défense des droits individuels et
collectifs a fait des progrès véritablement spectaculaire sur le
plan international. [...] Cette évolution spectaculaire est due en
grande partie à l'action de l'ONU. Il est même difficile
d'imaginer pareille avancée sans elle. C'est avant tout à l'ONU
que la politique internationale des droits de l'Homme a trouvé son
expression : c'est dans le cadre de l'ONU qu'ont été
établis les normes internationales relatives aux droits individuels et
collectifs et les institutions et mécanismes qui leur donnent un contenu
concret. »113(*) Selon l'auteur, l'action de l'ONU en faveur des
droits individuels et collectifs peut être directe ou
indirecte.114(*) L''action est indirecte lorsque l'ONU essaie
d'amener les Etats à promouvoir et défendre les droits de
l'Homme. Elle s'appuie principalement sur les organes créés au
fil des ans par l'institution. A l'opposé, « la
défense directe des droits de l'Homme suppose que l'ONU intervienne dans
Etat pour y protéger les droits individuels ou collectifs par des
mesures visant à prévenir les violations ou à y
remédier. »115(*) Elle peut se réaliser soit au moyen d'une
assistance technique faite sur une invitation ou avec le concours du
gouvernement concerné, soit dans le cadre d'une intervention
humanitaire. L'auteur fait remarquer que la plupart des actions menées
jusqu'ici par l'ONU ont été principalement indirectes. Autrement
dit, qu'elle s'en est essentiellement remise aux Etats pour qu'ils
défendent les droits des individus et des groupes, soumis à leur
autorité, conformément aux obligations que leur imposent les
instruments juridiques internationaux.116(*) Pour lui en définitive, l'impact de l'action
de l'ONU en faveur de la protection directe ou indirecte des droits de l'Homme
est mixte : si l'institution a une activité législative
très productive, les résultats sont sur le plan pratique, loin
d'être satisfaisants. « Les raisons de ce bilan
mitigé sont au nombre de cinq : la politisation de la question des
droits de l'Homme ; le peu d'empressement des Etats à se soumettre
aux enquêtes internationales ; l'insuffisance des moyens
institutionnels dont l'Organisation dispose ; la tendance des
mécanismes créés à ne pas fonctionner au maximum de
leur capacité et la timidité des responsables de l'Organisation
dans le domaine des droits de l'Homme. »117(*)
Il convient de dire en guise de conclusion, que les auteurs du
second courant dans leur approche, à la différence de celle
utilisée par leurs pairs du premier, s'intéressent beaucoup plus
particulièrement aux défenseurs. Par conséquent, ils
rendent donc plus compte des réalités proprement
inhérentes à l'action de ces derniers. Cependant, il faut
remarquer encore ici à la vue de leurs développements, que s'ils
posent les jalons d'une étude sur la protection des militants, ils ne
traitent pas vraiment de la question. Ceci en définitive motive
l'originalité du positionnement méthodologique que cette
étude se propose d'adopter. Elle va donc se consacrer exclusivement
à l'analyse de la protection internationale des défenseurs. Elle
en recherchera la portée et l'impact, à la lumière du cas
particulier d'un Etat d'Afrique subsaharienne : le Cameroun.
VIII.
PROBLEMATIQUE
« La problématique est l'approche ou la
perspective théorique qu'on décide d'adopter pour traiter le
problème posé par la question de départ. Elle est l'angle
sous lequel les phénomènes vont être étudiés,
la manière dont on va les interroger. [...] Elle va souvent conduire
à reformuler la question de départ qui,
réélaborée en cours de travail, deviendra progressivement
la question effective de la recherche. »118(*) Elle constitue en fait, le
construit qui explicite la façon dont, la question de départ
spontanée et bourrée de préjugés, est
éclairée par les produits de la phase d'exploration et
transformée en question de recherche.
De plus, la question générique de la protection
des droits de l'Homme a déjà intéressé des auteurs
de doctrine. Ces derniers font état de la précarité des
conditions de travail des défenseurs, malgré l'importance de leur
activité. Ils expliquent ce paradoxe, par l'antipathie des
autorités politiques. Porte-étendards apparents de la cause des
droits de l'Homme en théorie, et principaux violateurs des normes en
pratique, les gouvernements sont les cibles privilégiées de
l'action de dénonciations des militants. Ils s'en sentent menacés
et usent de tous les moyens que leur offre leur souveraineté, pour
dissuader et empêcher ces derniers, d'accomplir leur mission. C'est dans
ce sens que s'inscrivent la pertinence et l'originalité d'une
étude articulée sur la protection des défenseurs des
droits de l'Homme.
Le contexte camerounais offre des prises au mûrissement
d'une telle réflexion. Ceci pour deux raisons paradoxales qu'il faut
encore ressortir ici. En effet, dans la mesure où d'une part, le
Cameroun est sujet à la législation internationale relative
à la protection des défenseurs.119(*) Alors que d'un autre côté, la
réalité sociale démontre la récurrence d'atteintes
ciblant les militants, perpétrées de plus impunément, par
des agents de la force publique. Dès lors, il faut rechercher comment
expliquer l'écart existant entre le discours de la loi et la
réalité sociale. Quelle analyse faire de ce que l'accroissement
de la dangerosité de l'activité de défense des droits de
l'Homme dans un contexte où le droit international astreignant à
sa protection se déploie ? C'est le lieu d'étudier ici
l'effectivité du droit. Toutefois, avant d'expliciter la question de
recherche, il importe d'appréhender le concept si polysémique
d'effectivité, afin de situer et de définir la manière
dont il sera mobilisé dans cette analyse.
De façon générale, « la
notion d'effectivité est complexe. Elle n'a aucune définition
arrêtée et son usage est fluctuant. »120(*) L'on l'appréhendera
dans le cadre de cette analyse, sous le prisme de l'approche utilisée
par l'école de l'APDHAC à laquelle l'on appartient. Suivant cette
dernière : « le concept
« effectivité » entendu au sens large évoque
l'effectivité dans un sens étroit, mais aussi
l'efficacité, l'efficience et la validité des droits de l'Homme.
Cette orientation doctrinale est la clé de lecture des travaux qui se
conduisent au sein de cette école. On peut ainsi
considérer : qu'est effectif le droit consacré qui est
observé et appliqué par ses destinataires, les éventuels
écarts étant sanctionnés selon les modalités
procédurales prévues ; qu'est efficace le droit qui produit
l'effet recherché ; qu'est efficient le droit qui permet d'obtenir
les résultats recherchés au coût optimal ; qu'est
valide un droit consacré par une autorité compétente,
selon les procédures constitutionnelles et légales
préalablement établies, qui ne contrevient pas aux normes
impératives et coutumes internationalement établies
protégeant la dignité humaine et qui répond aux exigences
d'une société démocratique. »121(*) Interroger
l'effectivité d'un droit de l'Homme, c'est donc interroger sa mise en
oeuvre concrète. C'est rechercher concrètement, les écarts
éventuels d'une part entre le droit et sa réalisation et, d'autre
part entre les comportements prescrits par les normes et les comportements
réels des acteurs.122(*)
Il appartient à chaque Etat, d'appliquer pour son
compte et par ses moyens, les règles internationales par lesquelles il
est lié.123(*) Le
Cameroun, reconnaissant avec la communauté internationale, le droit et
la responsabilité pour tout un chacun de promouvoir le respect des
libertés fondamentales124(*), s'est engagé à prendre toutes les
mesures, pour réaliser au niveau national, les orientations
définies dans le sens de la protection des défenseurs des droits
de l'Homme. Pourtant la réalité factuelle, rend compte d'une
insécurité généralisée de l'activité
de défense des droits de l'Homme, de la récurrence des atteintes
portées à l'encontre des droits fondamentaux des professionnels
qui s'y adonnent. L'on peut donc dire a priori, que le problème
réside dans ce contexte, en ce qu'il existe un écart entre le
droit et les faits. C'est dans cette perspective, que la question de recherche
qui anime la présente étude, est relative à
l'effectivité de la mise en oeuvre des normes internationales de
protection des défenseurs des droits de l'Homme au Cameroun. En d'autres
termes, comment et jusqu'où les normes internationales de protection des
défenseurs des droits de l'Homme sont mises en oeuvre au Cameroun ?
IX. HYPOTHESE DE RECHERCHE
L'hypothèse est une explication provisoire de la nature
des relations entre deux ou plusieurs phénomènes.125(*) C'est une tentative de
réponse au problème posé par la question de recherche. Le
problème relevé dans le contexte de cette analyse, se rapporte
à l'effectivité et précisément, au degré
d'effectivité, de la mise en oeuvre des normes internationales de
protection des défenseurs des droits de l'Homme au Cameroun. Aussi, le
postulat sur lequel l'on s'appuiera pour traiter ce problème, se base
sur le principe selon lequel le devoir de protection des droits fondamentaux
des personnes relevant de leur souveraineté, est une obligation
juridique à laquelle doivent se soumettre tous les Etats membres des
systèmes onusien et africain de protection des droits de l'Homme. Alors,
au regard de ce fait avéré, l'on peut sans doute logiquement
envisager que, la mise en oeuvre des normes internationales de protection des
défenseurs est effective au Cameroun.
Néanmoins, l'on remarque plus loin que, malgré
que la protection des défenseurs soit une obligation juridique des
Etats, elle ne parvient pas à produire dans une large mesure, les effets
recherchés. Il faut encore ajouter comme tentative partielle
d'explication de ce point de vue, que la réalisation de ce devoir n'est
pas coercitive, et n'expose pas en cas de manquement ou d'inexécution,
les autorités débitrices à des sanctions strictes. Compte
tenu de cet état des choses, l'on peut donc rationnellement penser que
si l'Etat s'exposait à la force punitive en cas d'écarts, il
aurait un comportement plus responsable et mettrait un point d'honneur à
assurer efficacement la protection des militants. Au regard de cette
réalité, l'on est en droit de stipuler que, si l'obligation
juridique des Etats de protéger les surveillants des droits de l'Homme
n'est pas consolidée par l'application de sanctions internationales en
cas d'inobservation, elle ne saurait véritablement constituer un facteur
de préservation des intérêts des militants, et de
sécurisation de l'activité de défense des droits de
l'Homme.
Au regard donc de ces développements issus d'une
brève et inexhaustive observation de la pratique, l'on peut donc
formuler l'hypothèse selon laquelle la mise en oeuvre des normes
internationales de protection des défenseurs des droits de l'Homme est
effective au Cameroun. Toutefois, elle se heurte à des
difficultés, auxquelles il faut apporter des solutions.
X. CADRE
METHODOLOGIQUE
Une fois le cadre conceptuel de la recherche défini, il
importe de réfléchir sur les modalités de sa
réalisation pratique. Dès lors en effet, que l'on a
attribué à celle-ci, un objet d'étude et qu'on a
modélisé ce dernier, il convient de déterminer le principe
directeur qui permettra de l'atteindre. C'est le domaine de la
méthodologie. L'on pourrait la définir comme étant
l'étude du bon usage des méthodes et techniques. Elle permet
de savoir utiliser ces dernières comme il se doit, c'est-à-dire
savoir comment les adapter, le plus rigoureusement possible, d'une part
à l'objet précis de la recherche ou de l'étude
envisagée, et d'autre part aux objectifs poursuivis.126(*) « Autrement
dit, les méthodes et techniques retenues dans une recherche
donnée doivent être les plus aptes à rendre compte du sujet
étudié et à mener le chercheur vers les buts qu'il s'est
fixés en termes d'aboutissement de son travail. Il est inutile de
préciser que cela doit faire l'objet de justifications et
d'argumentations serrées de la part du chercheur : pourquoi choisir
telle méthode, telles techniques, tels
instruments... »127(*) Dans ce sillage, afin de mener à bien le
travail de recherche défini ici, l'on usera de méthodes d'analyse
bien choisies et adaptées (A). Lesquelles méthodes nous
conduisent à recourir à un certain nombre précis de
techniques d'investigation (B).
A. Les
méthodes d'analyse
La méthode peut se comprendre comme l'ensemble des
opérations intellectuelles par lesquelles une discipline cherche
à atteindre les vérités qu'elle poursuit, les
démontre et les vérifie.128(*) C'est la procédure logique d'une science,
c'est-à-dire l'ensemble des pratiques particulières qu'elle met
en oeuvre pour que le cheminement de ses démonstrations et de ses
théorisations soit clair, évident et
irréfutable.129(*)En se référant à cette
définition, on considèrera la méthode d'une recherche
comme la démarche logique, l'ensemble des opérations
intellectuelles permettant d'analyser, de comprendre et d'expliquer la
réalité étudiée. 130(*) Elle constitue donc l'ensemble des actions
intelligibles et abstraites, particulières à une science
donnée, qui permettent d'arriver au résultat recherché.
Cette étude axée sur l'effectivité, s'insère dans
le domaine commun des sciences juridiques et sociologiques et c'est la raison
pour laquelle, elle mobilisera des méthodes propres à ces
disciplines. En effet, si la méthode juridique (1) vise à donner
une meilleure interprétation des textes juridiques relatifs aux droits
de l'Homme, ce sont les méthodes sociologiques (2), qui permettent, de
vérifier l'impact social des droits garantis par le texte
juridique.131(*)
1. La
méthode juridique
La méthode juridique encore appelée normativisme
ou dogmatique juridique, a été développée par le
positiviste Hans KELSEN, dans son ouvrage Théorie pure du
droit. Cette méthode d'étude du droit, met l'accent sur la
conformité au droit positif. Elle est pertinente dans le contexte de
cette analyse, dans la mesure où l'effectivité constituant un
concept d'abord juridique, son appréhension impose nécessairement
au préalable, une étude du droit.
Le normativisme rattache la description du droit à son
interprétation et, repose sur deux composantes : la dogmatique et
la casuistique.132(*) La
première consiste en l'analyse des textes et des conditions de leur
édiction. En d'autres termes, il s'agit principalement de l'étude
du droit écrit, de la norme juridique au sens strict, du droit positif
tel qu'il ressort de l'analyse des textes juridiques. Elle fait donc appel
à l'interprétation critique, l'explication des textes des
normes juridiques existantes.133(*) La casuistique pour sa part, opère
par le moyen du principe du syllogisme, une confrontation du droit à la
réalité. C'est l'étude de la mise en oeuvre du droit, de
son application à des situations concrètes et réelles. Le
raisonnement juridique opère donc, une confrontation continuelle entre
le droit et faits, dans le but de dégager la solution juridique
adéquate aux problèmes posés par la vie sociale.
La méthode juridique repose sur une large gamme de
méthodes canoniques d'interprétation du droit, reconnues en la
matière. L'on choisit ici d'avoir recours à l'approche
exégétique. Cette dernière consiste à rechercher la
signification et la portée de la loi, par la seule analyse du texte
lui-même. Elle sera utilisée afin d'analyser les instruments
internationaux de protection des défenseurs et, les textes
législatifs et règlementaires adoptés au niveau
camerounais, pour remplir les engagements pris par l'Etat. Cette confrontation
permettra de rendre compte de l'adéquation de l'esprit des
autorités internes à la volonté recherchée, par le
législateur international. La démarche casuistique permettra
ensuite d'étudier d'une part, les conditions d'édiction des
textes internationaux et internes mais aussi d'autre part, les
interprétations et l'application qu'en font, les destinataires de ces
règles de droit.
Toutefois malgré sa grande rigueur, son
caractère très pointilleux et systématique, cette
méthode en ce qu'elle ne se limite qu'à la sphère du
droit, ne nous permettra pas de rendre compte des dimensions extra-juridiques
de l'étude. C'est la raison pour laquelle l'on estime opportun de la
compléter d'autres méthodes sociologiques, qui pourront permettre
d'étudier les dimensions notamment sociales et sociétales, de
l'effectivité des textes de protection des défenseurs.
2. Les
méthodes sociologiques
L'effectivité, en ce qu'elle mesure les
écarts entre la pratique et le droit134(*)et par là,
recouvre les effets sociaux (juridiques et non juridiques) directement
assignables à une règle de droit135(*), est un concept qui tend
à échapper à la sphère du Droit. Afin de pouvoir
l'appréhender et d'en rendre justement compte, il est nécessaire
de compléter la science du droit, par la sociologie. C'est la raison
pour laquelle, en plus de la méthode juridique, cette recherche
s'appuiera sur les méthodes fonctionnaliste et stratégique.
Le paradigme fonctionnaliste est un courant holiste
créé par Bronislaw MALINOWSKI, dans son ouvrage
célèbre Théorie scientifique de la culture. Selon
cette conception, toute société repose sur une structure stable
et équilibrée, composée d'éléments bien
intégrés et interdépendants les uns des autres. Chaque
élément social est important et possède une fonction
précise. Il répond donc forcément à un besoin
donné et assure par là, la cohésion du système. Le
fonctionnalisme sera utile dans cette étude, pour étudier la
façon dont marche le système socio-juridique camerounais de
protection des défenseurs des droits de l'Homme. Il nous apportera une
connaissance claire des fonctions et des rôles joués par les
différents acteurs et, nous aidera à identifier les facteurs
susceptibles d'entraver l'efficacité du système.
Néanmoins, la méthode fonctionnaliste pourrait être
limitative en ce qu'elle met l'accent sur le tout social et ne renseigne pas
sur l'action individuelle. En tant que courant holiste, elle ignore la
capacité de l'individu à agir, à exister et à se
définir en dehors des institutions sociales. Elle ne serait donc pas en
mesure de rendre compte de la façon dont les acteurs sociaux
réceptionnent les règles de protection des défenseurs.
C'est en ce sens qu'il faut lui associer, pour combler cette carence la
méthode stratégique.
L'analyse stratégique est un paradigme de la
théorie des organisations développé par Michel CROZIER et
Erhard FRIEDBERG.136(*)
Cette méthode, offre une conceptualisation de l'action collective, qui
permet d'interpréter les relations entre acteurs, dans un contexte
donné. Selon elle, toute organisation sociale est structurée par
les relations de pouvoir entretenues par ses principaux acteurs. Elle analyse
les comportements des acteurs comme des stratégies personnelles, soit
visant à garantir une position de pouvoir, soit au contraire à se
prémunir du pouvoir des autres acteurs. L'action collective
apparaît donc ici comme un construit social, l'ensemble des
différentes stratégies individuelles définies par les
acteurs, en fonction de leurs intérêts et ressources. L'analyse
stratégique servira donc ici de façon générale,
à étudier la façon dont les destinataires des normes
internationales de protection des défenseurs, réagissent
vis-à-vis d'elles, notamment dans leurs rapports. Elle permettra de
déceler l'impact de ces lois sur les comportements des acteurs et, la
définition de leurs itinéraires. Elle aidera en ce sens, à
l'examen et à l'évaluation des politiques et mesures,
déployées au plan interne par les autorités ainsi que les
autres acteurs sociaux, dans le sens de la mise en oeuvre des textes
internationaux de protection des militants.
B. Les techniques
d'enquête
Les méthodes, opérations intellectuelles, ne
suffisent pas à elles seules pour définir la procédure de
recherche. Elles doivent être précisées par des
opérations matérielles : les techniques d'enquête. Il
s'agit de dispositifs spécifiques de recueil ou d'analyse des
informations, destinées à tester les hypothèses de
recherche.137(*) Ce
sont elles qui donnent de la concrétisation au sujet et en confortent la
scientificité. Pour mener à bien la recherche, il faut concevoir
des instruments capables de produire toutes les informations adéquates
et nécessaires afin de vérifier les hypothèses.138(*) Afin de ce faire dans le cas
présent, l'on recourra à deux principales opérations
matérielles de collecte des données. Il s'agit des techniques
documentaires (1) et de l'entretien (2).
1. La recherche
documentaire et l'analyse des contenus
La recherche ou observation documentaire est une technique
d'enquête dans laquelle il n'ya pas de contact immédiat entre
l'observateur et la réalité. « C'est une
observation qui s'effectue à travers un élément
médiateur constitué par les documents. Le terme de document est
pris ici dans un sens large : tout élément matériel, toute
"trace" en rapport avec l'activité des hommes vivant en
société et qui, de ce fait, constitue indirectement une source
d'informations sur les phénomènes sociaux. Les documents
utilisables dans les sciences sociales sont très nombreux et très
divers. Il est difficile d'en établir un catalogue
exhaustif. »139(*) Cette opération se prête bien au
contexte de cette étude en ce sens qu'il qu'elle convient
particulièrement à l'analyse des phénomènes
macrosociaux.140(*) L'on
se proposera donc d'étudier ici les documents de toute sorte, en rapport
avec l'activité des défenseurs des droits de l'Homme camerounais.
L'analyse s'appuiera sur des éléments de documentation à
la fois directe et indirecte. La documentation directe, appelée
également primaire, englobe « tout ce qui constitue la
trace directe d'un phénomène social, qui résulte
directement de l'existence de celui-ci. » 141(*) Alors que « la
documentation indirecte, dite parfois "secondaire", est constituée par
le résultat des recherches qui ont pu déjà avoir
été entreprises sur le phénomène auquel on
s'intéresse ou sur des questions connexes. »142(*) L'étude portera donc
essentiellement sur les documents suivants :
· Les différents textes relatifs à la
protection des défenseurs applicables au Cameroun ;
· Les constructions doctrinales portant sur la
matière ;
· Les écrits en rapport avec la
réalité quotidienne des défenseurs au Cameroun. Il s'agira
ici des rapports, des publications et des communications émis par les
différents acteurs (l'Etat, les organisations internationales et
nationales de droits de l'Homme), des articles de presse ou de tout autre
support à vocation informationnelle digne de foi, commis sur le
sujet.
Toutefois puisque les données recueillies par le biais
de cette technique, ne le seront pas selon les critères convenant le
mieux à cette recherche, elles devront faire l'objet de manipulations
destinées à les présenter sous les formes requises pour la
vérification des hypothèses. Ce traitement sera fait au moyen
d'une autre opération de recherche : l'analyse de contenu. Cette
dernière est une technique de recherche pour la description
objective, systématique et quantitative du contenu manifeste des
communications, ayant pour but de les interpréter.143(*) Il s'agit d'une technique
d'étude détaillée des contenus de documents. Elle a pour
rôle d'en dégager les significations, associations et intentions,
non directement perceptibles à la simple lecture des
documents.144(*) Dans le
cadre de ce travail de recherche, d'une part on se référera
à la démarche classique d'analyse145(*) et l'on procèdera
essentiellement à une analyse de contenu de
vérification.146(*) Ceci dans le sens, que la technique visera
essentiellement à examiner le réalisme et le degré de
validité des hypothèses définies. A côté des
techniques documentaires, l'on usera également à une technique
vivante, dans le but d'obtenir des informations de qualité et fiables,
sur la réalité factuelle des acteurs sociaux. Il s'agit de
l'entretien.
2. L'interview
On appelle interview (ou entretien ou encore entrevue) un
rapport oral, en tête à tête, entre deux personnes dont
l'une transmet à l'autre des informations sur un sujet
prédéterminé. C'est une discussion orientée, un
procédé d'investigation scientifique utilisant la communication
verbale pour recueillir des informations en relation avec le but
fixé.147(*) D'une
autre manière, c'est la situation au cours de laquelle un chercheur,
l'enquêteur, essaie d'obtenir d'un sujet, l'enquêté, des
informations détenues par ce dernier, que ces informations
résultent d'une connaissance, d'une expérience ou qu'elles soient
la manifestation d'une opinion.148(*) L'interview sera employée dans le but
d'obtenir des informations crédibles et sincères, sur la mise en
oeuvre des normes protectrices des défenseurs au Cameroun. Cet usage
consistera essentiellement en des échanges, avec des personnes
ressources capables d'édifier constructivement sur le sujet. Le choix de
l'échantillon des personnes enquêtées est donc
considérablement moins influencé par le souci quantitatif que les
préoccupations d'ordre qualitatives. Il se constituera des
catégories sociales d'individus suivantes :
· Les défenseurs camerounais des droits de
l'Homme. Ceux-ci constituent la cible principale de notre enquête. C'est
la raison pour laquelle, relativement aux besoins de l'analyse, un
échantillon rigoureux a été arrêté
relativement à cette population. L'on se propose ici d'interroger les
professionnels de dix organisations différentes de défense des
droits de l'Homme.
· Les agents publics intervenant dans la mise en oeuvre
des normes internationales. Il s'agit ici des forces de l'ordre, des
autorités judiciaires et des membres de la Commission Nationale des
droits de l'Homme et des libertés.
· Les enseignants, les chercheurs et docteurs en droit
locaux.
L'on procèdera essentiellement par le biais
d'entretiens uniques, à titre documentaire et de type semi-directif. Les
échanges se feront sur la base de guides constitués de questions
ouvertes. Ils seront soigneusement préparés en fonction des
informations recherchées pour les différentes catégories
d'interrogés.
XI. ARTICULATION ET JUSTIFICATION DU PLAN
Comme le précise Raphael ROMI, « la
confection d'un mémoire ou d'une thèse est en effet une
fabrication scientifique, et c'est l'efficacité scientifique de
l'analyse qui doit inspirer le plan, les ajustements à vocation
harmonique ne doivent pas dénaturer cette inspiration
scientifique. »149(*) Il convient donc à ce titre, d'exposer la
trajectoire que l'on se propose de suivre dans cette analyse, pour
démontrer l'hypothèse de recherche définie.
Une approche binaire est toute aussi bien compatible, à
la résolution du problème inhérent à la mise en
oeuvre des normes internationales de protection des défenseurs des
droits de l'Homme au Cameroun. Il sera donc question de prime abord, d'exposer
les éléments témoignant de l'effectivité de cette
dernière (Ière partie). A ce niveau, il s'agira d'analyser les
mesures normatives et institutionnelles, prises conformément au droit
international par le Cameroun, afin d'assurer la protection des militants.
Puis, l'étude devrait ensuite s'attacher à
l'évaluation des différents procédés et politiques
déployés par l'Etat camerounais, qui auront été mis
en lumière (IIème partie). Il s'agira donc dans ce second
mouvement, de mettre en exergue les limites des mesures entreprises et, de
rechercher des stratégies palliatives aux imperfections
décelées. Une conclusion générale présentera
à la fin, la synthèse du travail.
PREMIERE PARTIE : L'ARTICULATION DE LA MISE EN
OEUVRE
Le premier aspect de cette étude s'attache à
l'analyse concrète de la mise en oeuvre des normes internationales
protégeant les défenseurs des droits de l'Homme au Cameroun. Il
s'agit ici de rechercher précisément, conformément aux
exigences méthodologiques fixées, comment se fait cette
dernière. En d'autres termes, quels sont les éléments qui
attestent de la réalité selon laquelle, le Cameroun
procède à l'implémentation effective du droit
international des militants des droits et libertés fondamentaux. Le
droit international admet généralement relativement à ce
point que : «les États doivent garantir la protection des
défenseurs des droits humains. »150(*) Cette disposition
s'inscrit en fait dans le cadre de la conception doctrinale traditionnelle, qui
veut que ce soit aux Etats, d'assurer l'exécution des obligations
auxquelles ils s'astreignent de leur gré.151(*) Les droits des
défenseurs comme tous les droits de l'Homme, en raison de ce qu'ils sont
essentiellement consacrés à une dimension internationale,
requièrent l'action de l'Etat afin que leurs détenteurs
légitimes puissent en bénéficier. En effet, parce
qu'« affirmés comme droits subjectifs, les droits de
l'homme supposent un titulaire et un débiteur. Il est admis à ce
jour que tout individu, personne humaine est titulaire des droits de l'homme
mais ces droits resteraient des simples voeux si les obligations de l'Etat,
débiteur ne sont d'une part précisées et si d'autre part
les voies de leur justiciabilité ne sont pas connues et mises en
oeuvre. »152(*) L'Etat camerounais, en vertu de ses obligations
internationales, est donc tenu de respecter, réaliser, et
protéger les droits de l'homme.153(*) Il est à ce titre, le responsable de
l'internalisation des instruments internationaux consacrant la protection des
défenseurs, dans son ordre interne. A cet effet, il faut d'emblée
préciser que la mise en oeuvre des normes protectrices des militants des
droits humains par l'Etat camerounais s'appuie sur une logique à double
détente, axée consécutivement autour de l'incorporation
des textes internationaux dans l'ordre interne (chapitre 1) et, de
l'établissement de dispositifs institutionnels destinés à
assurer l'implémentation effective de ces dispositions (chapitre 2).
CHAPITRE 1 : L'INTERNALISATION DES NORMES
INTERNATIONALES
La première articulation de la mise en oeuvre des
normes internationales protégeant les professionnels des droits de
l'Homme par l'Etat camerounais, consiste en l'intégration de ces
dernières dans son ordre juridique interne. Cette démarche repose
sur deux procédés connexes et complémentaires. Il s'agit
d'une part de la ratification des textes internationaux proclamant la
défense des militants (section 1) et d'autre part, de la
consécration législative interne des prérogatives
reconnues aux défenseurs (section 2).
SECTION 1 : LA RATIFICATION DES NORMES
PROTECTRICES DES DEFENSEURS
Dans le cadre de la mise en oeuvre de la protection des
défenseurs des droits de l'Homme, le Cameroun a ratifié les
instruments du droit international sur la base desquels cette dernière
tire son essence. Toutefois, afin de mieux appréhender la nature de
même que les enjeux de cette procédure relativement à
l'effectivité interne de la défense des militants, il
paraît d'un intérêt réel et incontournable,
d'analyser brièvement au préalable, le cadre juridique
international organisant la protection des professionnels des droits de l'Homme
(paragraphe 1). Ceci permettra logiquement par la suite, de mieux comprendre la
pertinence et les produits de la ratification des règles
protégeant les défenseurs, eu égard à
l'effectivité de leur mise en oeuvre (paragraphe 2).
Paragraphe 1 : Le
droit international relatif à la protection des défenseurs des
droits de l'Homme
La protection juridique des défenseurs des droits de
l'Homme naît de la prise de conscience par la communauté
internationale, d'abord du rôle crucial joué par ces derniers dans
l'implémentation des normes internationales relatives aux droits de
l'Homme et ensuite, de l'accroissement des risques auxquels leur oeuvre les
expose. Ces deux réalités ont amené les
législateurs internationaux, à se rendre compte de la
nécessité de mettre en oeuvre des mesures visant à
protéger les défenseurs des droits de l'Homme. Pour ce faire,
« [...] la communauté internationale a investi de
manière significative dans un cadre de protection normatif, assorti de
mécanismes connexes. »154(*) Le cadre juridique international de la
protection des défenseurs des droits de l'Homme, progressivement
construit suivant ce modèle, repose essentiellement sur des normes (A)
et des mécanismes destinés à assurer leur application
(B).
A/ Les normes
internationales de protection des défenseurs
« Il existe différentes normes et
ensembles de lois pour la protection des
défenseurs. »155(*) Le droit international des droits de l'Homme
à la base, protège les défenseurs sans se soucier de leur
activité, simplement relativement à leur qualité humaine
(1). Cette protection alors très générique s'articule
essentiellement à l'octroi de certaines prérogatives vitales
à la réalisation harmonieuse de l'oeuvre de défense des
droits de l'Homme. Pourtant avec le temps, il va apparaître compte tenu
de l'évolution des contingences, un second corps de normes
internationales relatives à la protection des défenseurs, plus
spécifique aux réalités inhérentes à la
fonction (2).
1) Les instruments
internationaux de protection communs à tous les hommes
Les défenseurs des droits de l'Homme sont d'abord
protégés simplement en raison de leur nature humaine, par les
règles du droit international des droits de l'Homme. Par ailleurs,
« en réalité, dans de nombreux pays, le droit
international des droits de l'Homme et ses mécanismes de protection
constituent le dernier recours des défenseurs des droits de
l'Homme. »156(*) Celui-ci consacre aux militants au même
titre qu'à tous les autres hommes, un certain nombre de droits
facilitant la promotion des libertés fondamentales. Ces
prérogatives se retrouvent dans l'ensemble des textes contraignants
universels (a) et régionaux (b) des droits de l'Homme.
a. Les instruments
à caractère universel
Il s'agit ici exclusivement des normes onusiennes.
« L'Organisation des Nations Unies a émis
différents instruments essentiels pour le travail des
défenseurs. »157(*) Il s'agit essentiellement de la
Déclaration Universelle des Droits de l'Homme (DUDH) du 10
décembre 1948 et du Pacte International des Droits Civils et
Politiques (PIDCP) du 16 décembre 1966. Ces deux textes de
portée internationale, constituent des normes à part
entière de protection des défenseurs des droits de l'Homme dans
la mesure où ils consacrent un ensemble de droits-libertés,
nécessaires à la promotion pacifique des droits humains
fondamentaux. Ces droits sont pour la plupart principalement codifiés
par la Déclaration. Le Pacte ne se contente en fait, dans une logique
d'emphase, que de les reprendre pour les recouvrir ainsi, de sa force
contraignante. Les prérogatives consacrées par ces deux
instruments, nécessaires pour l'action efficace et
sécurisée sont les suivantes :
· Le droit à la protection. Suivant la
Déclaration et le Pacte, les défenseurs doivent pouvoir
bénéficier et se prévaloir de la totalité des
droits et libertés qui y sont proclamés, sans distinction
aucune.158(*)
· La liberté d'opinion et d'expression.
Les défenseurs en tant qu'individus, ont le droit de ne pas être
inquiétés pour leurs positions. Ils doivent encore pouvoir
chercher, recevoir et répandre sans considérations de
frontières, les informations et les idées par quelque moyen
d'expression que ce soit.159(*)
· La liberté de réunion et
d'association pacifiques. Toute personne a le droit de se réunir
avec d'autres personnes pour exprimer des points de vue ou protester de
manière pacifique, afin de promouvoir et protéger les droits
humains. Les individus doivent encore avoir la possibilité de
s'associer librement avec d'autres, pour créer des
organisations pacifiques poursuivant les mêmes buts.160(*)
· Le droit de circuler librement.161(*) L'Etat doit veiller à
ce que tout un chacun puisse circuler librement sur son territoire, notamment
dans le but d'effectuer des recherches sur la situation des droits humains.
· Le droit de prendre part à la gestion des
affaires publiques. Toute personne doit pouvoir prendre part à
la direction des affaires publiques de son pays, soit directement, soit par
l'intermédiaire de représentants librement
choisis.162(*) Il
doit encore être en mesure de se prononcer librement sur cette
dernière.
Ces différents droits-libertés reconnus aux
individus s'imposent à l'Etat, qui est principalement tenu
d'aménager un cadre propice à leur plein épanouissement.
Toutefois, il lui est accordé la possibilité de limiter leur
exercice notamment dans les cas relevant du respect des droits ou de la
réputation d'autrui, de la sauvegarde de la sécurité
nationale, de l'ordre public, de la santé ou de la moralité
publiques.163(*)
Par ailleurs, ces prérogatives nécessaires à la
défense des droits de l'homme sont également reprises par les
instruments fondamentaux des différents systèmes régionaux
de protection des droits humains.
b. Les instruments de
portée régionale
A côté des normes onusiennes dont le rayonnement
est universel, le droit international des droits de l'Homme tire sa source
d'autres textes d'une portée moindre. Il s'agit des instruments
fondamentaux des différents systèmes régionaux de
protection des droits de l'Homme. Une observation panoramique sommaire de ces
différents instruments pourrait concéder la réalité
selon laquelle, ils obéissent tous de manière
générale, à une logique de codification similaire aux
dispositions onusiennes, participant de la consécration d'un même
noyau dur de droits inhérents à la personne. A l'actif de cette
thèse, l'on peut faire remarquer que les différents textes
à caractère régional, relativement à la protection
des défenseurs, codifient les droits décrits dans la section
précédente. En effet, « comme les instruments
universels, les instruments régionaux reconnaissent et protègent
la liberté d'association et la liberté de pensée,
d'opinion et d'expression [...] »164(*) C'est le cas, de la Charte africaine des
droits de l'Homme et des peuples (CADHP) du 27 juin 1981, principal
instrument de protection des droits humains sur le continent.165(*) Ce texte reprend dans son
corpus et protège, l'ensemble des droits-libertés
nécessaires à l'action épanouie des défenseurs,
consacrés par les textes universels du droit international des droits de
l'Homme.166(*) Aussi,
les individus pouvant se prévaloir de la CADHP doivent
bénéficier de l'exercice de ces prérogatives, sous la
seule réserve des restrictions nécessaires édictées
par les lois et règlements, en rapport notamment avec
l'intérêt de la sécurité nationale, de la
sûreté d'autrui, de l'ordre public, la santé ou la
moralité publiques ainsi que les droits et libertés des
personnes.167(*) Les
textes du droit international commun des droits de l'Homme se proposent
d'élaborer des normes de protection visant la totalité et
l'intégrité des individus, sans critère de
différenciation. Aussi leur rayonnement ne touche les défenseurs
qu'à un degré premier, en raison de leur condition humaine qu'ils
partagent avec tous leurs autres congénères. Cependant, avec le
constat de la grande dangerosité de la profession, d'autres instruments
à la suite des premiers vont voir le jour. Ceux-ci loin de la vision
généralisante et abstraite de leurs prédécesseurs,
ne se préoccupent plus désormais, que du cas particulier des
personnes oeuvrant pour la promotion et la protection des droits et
libertés fondamentales.
2) Les instruments
internationaux de protection spécifiques aux
défenseurs
L'explosion des exactions visant les défenseurs des
droits de l'Homme va donner une nouvelle impulsion à la
législation internationale inhérente à la protection de
ces derniers. En effet, la découverte de la réalité selon
laquelle les défenseurs constituaient de plus en plus les cibles
privilégiées de violations de leurs droits fondamentaux, du fait
de leur action en faveur des droits de l'Homme met à l'ordre du jour des
législateurs internationaux, l'urgence de la mise en oeuvre de mesures
destinées à leur protection. La conséquence est
l'élaboration d'une norme universelle de protection avant-gardiste,
destinée pour la première fois, particulièrement à
la catégorie des défenseurs des droits de l'Homme (a). Cette
norme trouve un écho aux différentes échelles
régionales, jetant ainsi les jalons, de l'émergence d'une
protection internationale spécifique aux professionnels des droits de
l'Homme (b).
a. La déclaration
des Nations Unies sur les défenseurs des droits de l'Homme
La prise de conscience par le législateur international
de la nécessité de protéger spécifiquement les
défenseurs des droits de l'homme va se consacrer au travers de la
Déclaration sur le droit et la responsabilité des individus,
groupes et organes de la société de promouvoir et protéger
les droits de l'homme et les libertés fondamentales universellement
reconnus. La norme, dont l'élaboration a débuté en
1984, a été adoptée par l'Assemblée
Générale des Nations Unies (AG/NU), dans sa résolution
n° 53/144 prise lors de sa 85e séance
plénière, le 9 décembre 1998, à l'occasion du
cinquantenaire de la DUDH. Il s'agit de la toute première norme
internationale disposant spécifiquement en matière de protection
des défenseurs des droits de l'Homme. « Cela fut le
premier instrument des Nations Unies à reconnaître formellement la
formidable valeur et l'importance du travail des défenseurs et leur
besoin de protection. Cette Déclaration a établi une
définition claire de ce que, plutôt que qui, un défenseur
des droits de l'homme est et a ainsi identifié les principaux droits que
les défenseurs ont besoin pour poursuivre leurs activités
légitimes de droits de l'homme. »168(*) L'on ne saurait mieux
que par ces termes, décrire le champ de force révolutionnaire
dans lequel la norme s'inscrit.
« La Déclaration n'est pas, en soi, un
instrument juridiquement contraignant. Toutefois, elle énonce une
série de principes et de droits fondés sur des normes relatives
aux droits de l'homme consacrées dans d'autres instruments
internationaux qui sont, eux, juridiquement contraignants - tels que le Pacte
international relatif aux droits civils et politiques. [...]La
Déclaration prévoit que les défenseurs des droits de
l'homme doivent être appuyés et protégés dans le
cadre de leur activité. Elle ne crée pas de droits nouveaux, mais
présente plutôt les droits existants de manière à
faciliter leur application au rôle et à la situation concrets des
défenseurs des droits de l'homme. »169(*) C'est dire qu'en fait,
la Déclaration n'apporte pas avec un corpus tout aussi inédit,
mais bien qu'elle rassemble le droit applicable aux défenseurs, contenu
jusqu'alors de façon éparse dans les normes du droit
international des droits de l'Homme. Elle se pose en loi règlementant
désormais, l'activité des défenseurs des droits humains.
Elle codifie les normes internationales de protection des activités des
défenseurs des droits de l'Homme à travers le monde.
Premièrement, la Déclaration sur les
défenseurs confère clairement à ces derniers des
droits170(*). Si elle
reprend les droits existants tels qu'entre autres les libertés
d'opinion, de réunion, d'assemblée pacifique et de circulation
etc., elle innove en mettant l'accent, sur d'autres prérogatives. C'est
le cas du droit d'accès au financement, de la faculté d'exercer
légalement l'occupation ou la profession de défenseurs des droits
de l'Homme ou encore, celle de solliciter, d'obtenir et d'utiliser les
ressources et informations, dans le but exprès de protéger les
droits de la personne. En ce sens, il paraît plus important et
significatif, de relever encore que la Déclaration de 98 fait de la
défense des droits de l'Homme, un droit fondamental de la
personne.171(*)
Elle reconnaît la légitimité de l'activité de
défense des droits de l'Homme.
D'autre part, la Déclaration de 98 met à la
charge des Etats des obligations spécifiques, dont la réalisation
est cruciale pour l'exercice épanoui par les défenseurs, de leur
mission. Les gouvernements ont désormais ainsi, un rôle
particulier et clairement défini à jouer, dans la protection des
défenseurs des droits de l'Homme.172(*) En effet, « l'adoption de la
Déclaration [...] était une reconnaissance des dangers auxquels
les défenseurs des droits se confrontent, et une étape prise par
la communauté internationale de créer des normes pour la
protection des activités des droits de l'homme. Cela en fait une
responsabilité première des Etats pour, non seulement garantir la
sécurité des défenseurs des droits de l'homme, mais aussi
de veiller à ce qu'il existe des conditions dans lesquelles ils peuvent
exercer leurs activités parce que le respect des droits de l'homme
inclut nécessairement la reconnaissance de la légitimité
de l'action des défenseurs. »173(*) La Déclaration
en tant qu'instrument pionnier en matière de protection
spécifique des défenseurs, a eu un retentissement universel. Elle
a motivé l'émergence dans les différents systèmes
régionaux de protection des droits humains, d'autres textes du genre. La
mouvance a eu un impact notoire, notamment dans le contexte africain.
b. Les instruments
régionaux africains de protection spécifiques aux
défenseurs
Le système africain de protection des droits de
l'Homme a subi, au même titre que tous les autres, l'influence de la
dynamique impulsée la Déclaration de 98. Cette dernière a
motivé l'essor en son sein, de normes revendiquant spécifiquement
la protection par les différents acteurs internationaux, des
défenseurs des droits de l'Homme. L'on peut relever à ce
titre :
· La Déclaration et le plan d'action de Grande
Baie.
· La Déclaration de Kigali.
· Les résolutions spécifiques de la
Commission Africaine des Droits de l'Homme et des peuples (CADH) sur la
protection des défenseurs en Afrique.
La Déclaration et le plan d'action de Grande
Baie, sont des instruments non contraignants, adoptés le 16 Avril
1999, par la première Conférence ministérielle de
l'Organisation de l'Unité Africaine (OUA) réunie à Grande
Baie aux îles Maurice du 12 au 16 Avril 1999. Ils constituent les
premiers instruments régionaux, faisant mention de la protection
spécifique des défenseurs. Ils appellent alors, les Etats membres
de l'OUA, à prendre les mesures appropriées pour mettre en
oeuvre la Déclaration des Nations Unies sur les
défenseurs.174(*)
La Déclaration de Kigali, est un autre
instrument non contraignant, adoptée le 8 Mai 2003, par La
première Conférence ministérielle de l'Union Africaine sur
les Droits de l'Homme en Afrique réunie à Kigali au Rwanda. Cette
norme en son article 28, reconnaît le rôle important
joué par les organisations de la société civile et les
défenseurs des droits de l'Homme en particulier dans la promotion et la
protection des droits de l'Homme en Afrique et appelle les Etats membres et les
institutions régionales à les protéger et à
encourager leur participation dans les processus de décisions.
La CADH, est l'organe chargé de promouvoir les
droits de l'Homme et des peuples et, d'assurer leur protection en
Afrique.175(*) Elle
a adopté, lors des dernières décennies, un ensemble de
résolutions spécifiques sur la protection des défenseurs
en Afrique, faisant directement référence aux droits de ces
derniers. C'est le cas de :
· La Résolution n° 56 sur la situation
des défenseurs des droits humains en Tunisie ;
· La Résolution n° 69 sur la protection
des défenseurs des droits de l'Homme en Afrique ;
· La Résolution n° 119 sur la situation
des droits des défenseurs des droits de l'Homme en
Afrique ;
· La Résolution n° 196 sur la situation
des droits de l'Homme en Afrique.
Ces divers instruments visent principalement à
interpeller la conscience des Etats membres, au sujet de la
nécessité vitale de protéger les activités des
défenseurs, du fait de leur importance pour l'effectivité des
droits fondamentaux. D'une part, ils appellent les Etats à
reconnaître le rôle des défenseurs des droits humains dans
la promotion et la protection des droits et libertés garantis par la
Charte africaine et les autres instruments tant régionaux
qu'internationaux. Et d'autre part, ils encouragent ces derniers à,
entre autres mesures, adopter des lois spécifiques sur la protection
des droits des défenseurs des droits de l'homme.176(*)Le cadre juridique de la
protection internationale des défenseurs des droits de l'homme fait
certes intervenir d'un côté, comme l'illustrent les
précédents développements des normes. Mais cependant, il
englobe également en plus de celles-ci, divers mécanismes
destinés à assurer l'implémentation et
l'effectivité de ces textes.
B/ Les mécanismes
internationaux de protection des défenseurs
Un fait est que la protection universelle des
défenseurs des droits de l'Homme tire sa substance pour l'essentiel,
d'une consécration normative par le droit international. Un autre,
réside en ce que les différents textes du droit des
gens177(*), font
intervenir des mécanismes spécifiques bien définis, dont
le but principal est de veiller à l'exécution et l'application de
leurs dispositions. Aussi, l'effectivité des normes internationales de
protection des défenseurs des droits humains, est garantie par divers
dispositifs quasi-juridictionnels (1) ou non (2), qu'il semble pertinent
d'également examiner.
1) Les mécanismes
quasi-juridictionnels
Le droit international commun des droits de l'Homme s'appuie
sur des organes quasi-judiciaires conventionnels, destinés à
assurer la justiciabilité des prérogatives consacrées par
ses dispositions. Aussi, les normes internationales générales de
protection des défenseurs qu'il a sécrété,
s'appuient en fonction des systèmes, sur divers ressorts
quasi-juridictionnels, poursuivant la mission d'assurer leur
effectivité. Il s'agit dans l'ordre universel, du Comité des
droits de l'Homme de l'ONU (a) et, au sein du contexte régional africain
de la commission africaine des droits de l'Homme et des peuples (b).
a. Le Comité des
droits de l'Homme des Nations Unies
Le Comité des droits de l'Homme est un organe
établi par l'article 28 du PIDCP, pour assurer la mise en oeuvre par les
Etats, des engagements auxquels ils se sont liés par cette convention.
D'emblée, il est important de préciser qu'il ne constitue pas une
juridiction à part entière, mais plutôt ce que la doctrine
appelle un organe quasi-judiciaire178(*). Le Comité est composé de 18 experts
indépendants élus pour un mandat de 4 ans et siégeant
à titre individuel. « Le Comité des droits de
l'homme s'acquitte de quatre grandes fonctions de supervision et de
surveillance du respect des obligations en vertu du Pacte de la manière
suivante :
a) Examen des rapports présentés par les
Etats parties
b) Examen des communications émanant de
particuliers
c) Adoption d'observations générales
d) Examen des requêtes présentées par
un Etat partie contre un autre Etat partie. »179(*) [SIC]
Les Etats parties, sauf en cas d'urgence, sont tenus de
présenter au Comité des rapports périodiques
à une temporalité régulière
déterminée par celui-ci (généralement tous les cinq
ans). Ces rapports portent sur les mesures qu'ils auront arrêtées,
dans l'intention de donner effet aux droits reconnus dans le Pacte et, sur les
progrès réalisés dans la jouissance de ces droits. Le
Comité les examine lors de sessions publiques avec les
représentants des Etats et, formule ensuite des observations
finales à l'attention des Etats. Si liberté est
laissée à ces derniers de les appliquer, le Comité
établit néanmoins systématiquement une procédure de
suivi, notamment afin de contrôler l'exécution de ses
recommandations.
Le Comité formule encore à l'attention des Etat
parties au traité, des observations générales.
Celles-ci à la différence des précédentes
liées aux rapports, visent à apporter de plus amples
précisions sur les obligations des Etats au titre du Pacte. Il s'agit
d'interprétations approfondies des dispositions de la Convention. Le
travail immense déjà fourni par le Comité en ce sens,
apporte une importante contribution à la lisibilité et à
la compréhension, des droits établis par le Pacte. Tant, il est
d'ailleurs pour autant convenu que « les différentes
catégories des droits civils et politiques ont largement
été commentées par la doctrine et explicitées par
les observations générales du Comité des droits de l'homme
des Nations Unies. »180(*)
De plus, le Comité a la capacité de recevoir et
d'apprécier des communications adressées par des particuliers.
Toute personne victime d'une violation de ses droits civils et politiques au
sens du Pacte, peut requérir l'action du Comité. Les
requêtes ou communications individuelles, ont la possibilité
d'être présentées à l'institution, au titre du
Protocole facultatif se rapportant au Pacte, pour violation
présumées par les Etats parties de leurs obligations
conventionnelles, à l'égard de certains individus.181(*) Ces requêtes sont
soumises à des conditions de recevabilité tenant essentiellement
à des règles de fond et de forme mais aussi, à
l'épuisement des voies de recours interne. Toutefois, lorsque le
Comité reçoit une communication, il prend toutes les mesures en
son pouvoir pour la traiter et, rend une décision finale destinée
à apporter une solution au litige. La décision finale du
Comité des droits de l'Homme ne peut faire l'objet d'un appel ni sur le
fond, ni sur l'irrecevabilité. Les défenseurs peuvent au
même titre que tous les hommes, lorsque leurs droits consacrés par
le PIDCP sont violés, adresser des communications au Comité. Ils
peuvent bénéficier de son action. Il en est de même pour
ceux évoluant sous le système africain de protection des droits
de l'Homme, qui peuvent en appeler à l'action de la commission africaine
des droits de l'Homme et des peuples (CADH).
b. La Commission africaine
des droits de l'Homme et des peuples
« La Charte africaine a institué une
Commission africaine des droits de l'Homme et des peuples qui rend compte
à la Conférence des chefs d'Etat et de gouvernement de l'Union
africaine. »182(*) Cette commission a pour mandat trois
domaines : la promotion des droits de l'Homme et des peuples, la
protection des droits de l'Homme et des peuples, et l'interprétation de
la Charte.183(*) Elle a
donc trois missions : une première de promotion, une
deuxième de protection et une troisième, dite consultative. L'on
s'intéresse principalement à ce niveau à sa
deuxième attribution. La Commission mène cette mission au travers
de quatre axes majeurs à savoir :
· L'examen des rapports périodiques
présentés par les Etats. L'article 62 de la CADHP oblige
chacun des Etats parties à présenter tous les deux ans, un
rapport exposant les mesures législatives ou autres, prises pour
donner effet aux droits et libertés garantis par la Charte.
Toutefois, cet examen ne donne lieu qu'à des discussions ouvertes entre
la Commission et les gouvernements. Il ne lui offre pas la possibilité
d'émettre des observations finales ou des recommandations.
· L'examen de communications
interétatiques. Il s'agit de communications déposées
par un Etat partie à la Charte contre un autre, dont il estime violer
les droits conventionnels. La Commission doit jouer ici un rôle d'arbitre
et aider les Etats à parvenir à un règlement à
l'amiable.184(*)
· L'examen de communications présentées
par des sujets autres que les Etats parties185(*) (les organisations non
gouvernementales ou les individus).
· Des mécanismes spéciaux. La
Commission a le pouvoir de nommer des rapporteurs spéciaux sur des
thématiques spécifiques.
D'après les dispositions conventionnelles, la CADH peut
être saisie en dehors des Etats parties, soit par toute personne victime
d'atteintes aux droits protégés par la Charte, soit par toute
organisation décriant une situation de violation grave de ces derniers.
Alors, les défenseurs des droits de l'Homme tout comme les autres
hommes, peuvent introduire des plaintes auprès de la Commission. Ces
dernières se plient également dans ce cas à des conditions
de recevabilité. Pour être examinée, le requérant
doit avoir encore ici, épuisé les voies de recours internes mais
encore, le cas ne doit pas être pendant devant toute autre instance
internationale186(*).
Lorsque la Commission déclare un cas recevable, elle l'examine au fond
tout en consultant au besoin l'auteur de la plainte et l'Etat mis en cause par
la communication. La CADH tout comme le Comité des droits de l'Homme de
l'ONU, est une quasi-juridiction. Par conséquent, elle ne rend pas de
décision coercitive. Alors ordinairement, lorsqu'elle conclut
après examen de fond de la requête à une violation, elle
adresse une recommandation à l'Etat concerné. Toutefois, en
raison de ce qu'elle appuie son raisonnement et motive sa décision sur
la base de textes conventionnels liant les Etats parties187(*), ces derniers sont tenus de
par leurs engagements internationaux, d'appliquer ses prescriptions. Et encore,
la Commission a le pouvoir, dans certains cas d'urgence notamment, d'ordonner
des mesures provisoires exécutoires.
La Commission constitue un mécanisme de protection des
défenseurs des droits de l'Homme à part entière, dans la
mesure où ces derniers possèdent des droits reconnus par la
Charte. Elle a même d'ailleurs à plusieurs reprises eu l'occasion
de se prononcer sur des litiges entourant notamment, les libertés
civiles si vitales à leur activité. L'on pourrait même
signifier à l'actif de l'efficacité de la protection qu'elle
pourrait offrir aux défenseurs, qu'elle se fait le promoteur, d'une
tendance à l'encadrement rigoureux des restrictions pouvant être
apportées à ces prérogatives, par l'Etat. Un exemple est
que dans une affaire, elle a estimé relativement à la
liberté d'association pacifique que : « la
règlementation de l'exercice de ce droit à la liberté
d'association devrait être conforme aux obligations des Etats à
l'égard de la Charte africaine des droits de l'homme et des
peuples. »188(*) Dans une autre affaire, elle détermine et
condamne avec force les atteintes portées par le gouvernement à
l'exercice du droit de réunion cette fois. Aussi pour la CADH, la
liberté de réunion est violée lorsque le gouvernement fait
arrêter, juger et exécuter des personnes pour avoir
organisé des réunions publiques au cours desquelles d'autres
personnes ont été assassinées, en les tenant pour
responsables. Elle l'est également lorsque les victimes sont
jugées et condamnées pour des opinions exprimées dans le
cadre de leur réunion.189(*) La Commission africaine des droits de l'Homme et des
peuples comme le Comité des droits de l'Homme, constituent les
mécanismes internationaux juridictionnels de protection des
défenseurs, établis par le droit international commun des droits
de l'Homme. Toutefois, l'avènement des normes internationales de
protection spécifiques aux défenseurs, va également
marquer l'irruption d'une toute nouvelle classe de mécanismes cette fois
non juridictionnels, affectés au support de ces dernières.
2) Les mécanismes
non juridictionnels
La protection internationale spécifique des
défenseurs est devenue une réalité, lorsqu'il était
évident au regard des circonstances, qu'elle constituait une
nécessité. Cependant, cette protection spécifique,
à la différence de l'originelle basée sur le droit
international commun des droits de l'Homme, s'appuie sur des normes non
contraignantes, faisant intervenir des mécanismes pour l'essentiel, non
juridictionnels. Il s'agit précisément dans le cas
d'espèce, de rapporteurs spéciaux. Le rapporteur
spécial, peut être envisagé comme « une
personnalité désignée pour suivre l'effectivité
d'un droit spécifique au regard notamment des violations
systématiques dont il est objet. »190(*) L'on peut se permettre
de qualifier ces institutions comme les instruments d'une protection plus
flexible et proche du réel, préalable nécessaire à
la loi et à la codification. Comme à l'image des normes, le
premier mécanisme de rapportage affecté à la question de
la protection des défenseurs, a vu le jour dans le système
universel (a). Et par la suite, la dynamique s'est répercutée
à l'échelle régionale africaine notamment (b).
a. Le rapporteur
spécial des Nations Unies sur la situation des défenseurs des
droits de l'Homme
« La reconnaissance du rôle essentiel des
défenseurs des droits de l'homme et des violations dont nombre d'entre
eux sont victimes a convaincu l'ONU que des efforts particuliers étaient
nécessaires pour protéger à la fois les défenseurs
et leur activité. La première grande mesure a consisté
à considérer officiellement la «défense» des
droits de l'homme comme un droit en soi, et à reconnaître les
personnes qui cherchent à défendre les droits de l'homme comme
des «défenseurs des droits de l'homme». Le 9 décembre
1998, par sa résolution 53/144, l'Assemblée
générale des Nations Unies a adopté la Déclaration
sur le droit et la responsabilité des individus, groupes et organes de
la société de promouvoir et protéger les droits de l'homme
et les libertés fondamentales universellement reconnus (plus connue
comme la «Déclaration sur les défenseurs des droits de
l'homme»). La seconde mesure a été prise en avril 2000,
lorsque la Commission des droits de l'homme de l'ONU a demandé au
Secrétaire général de désigner un
représentant spécial concernant la situation des
défenseurs des droits de l'homme pour suivre et appuyer la mise en
oeuvre de la Déclaration. »191(*) Tel peut être ainsi justement
résumé, l'itinéraire suivi par l'ONU, en matière de
protection des défenseurs des droits de l'Homme. A la suite de la
Déclaration sur les défenseurs, dans le but principal d'appuyer
la mise en oeuvre de cette dernière, la Commission des droits de l'Homme
des Nations Unies (actuel Conseil des Droits de l'Homme), dans sa
Résolution n° 2000/61 du 26 Avril 2000, a sollicité
la nomination d'un Représentant Spécial du Secrétaire
Général sur les défenseurs des droits de l'Homme.
Cette requête trouve satisfaction la même année.192(*) Il s'agit du premier
mécanisme international créé en rapport avec la protection
des droits consacrés par la Déclaration de 1998.
Le mandat du Rapporteur spécial est défini par
l'article 3 de la Résolution 2000/61. Il consiste à :
· Solliciter, recevoir, examiner les informations
concernant la situation et les droits de toute personne agissant seule ou en
association avec d'autres - et y donner suite -, ainsi que promouvoir et
protéger les droits de l'homme et les libertés fondamentales;
· Instituer une coopération et entretenir un
dialogue avec les gouvernements et d'autres acteurs intéressés,
s'agissant de la promotion et de la mise en oeuvre effective de la
Déclaration;
· Recommander des stratégies efficaces pour
mieux protéger les défenseurs des droits de l'homme et donner
suite à ces recommandations.
Dans la Résolution, le Conseil des Droits de l'Homme
(CDH) invite instamment tous les gouvernements à
coopérer avec le Rapporteur et, à lui fournir toutes les
informations nécessaires à l'exécution de sa mission. Le
mandat du Rapporteur Spécial est très large et possède un
rayonnement universel. Il se préoccupe de la protection des
défenseurs des droits humains : ceci implique d'une part la
sureté de leur personne et d'un autre côté, la protection
de leur légitime prérogative de défendre les droits
humains.193(*) Il
travaille donc à la réalisation de ces objectifs dans la
totalité des pays du monde. Pour assurer la protection des
activités des défenseurs, le Rapporteur
concrètement :
· Etablit des contacts avec les défenseurs des
droits de l'Homme ;
· Entretient des relations régulières avec
les Etats ;
· Examine les cas individuels de violation des droits des
défenseurs portés à sa connaissance et use de tous les
moyens possibles, pour amener les gouvernements et acteurs compétents
à y remédier ;
· Effectue des visites de pays ;
· Participe aux ateliers et conférences portant
sur des thématiques centrales pour la cause des
défenseurs ;
· Publie des rapports annuels au CDH et à
l'Assemblée générale des Nations Unies (AG/NU) sur des
thèmes ou des situations cruciaux, concernant la promotion et la
protection des droits des défenseurs des droits de l'Homme.
L'orientation donnée par l'ONU à la protection
des défenseurs des droits de l'Homme au travers de la création
d'un mécanisme de rapportage, a fortement inspiré les acteurs du
système régional africain.
b. Le rapporteur
spécial dur les défenseurs des droits humains en
Afrique
En réaction à la l'impulsion donnée dans
le système universel, un mécanisme de rapportage
spécifiquement destiné à la protection des
défenseurs des droits de l'Homme, a vu le jour dans le système
régional africain. EN effet, lors de sa 35ème session
ordinaire tenue à Banjul en Gambie, du 21 Mai au 4 Juin 2004, la CADH a
créé la fonction de Rapporteur Spécial sur la
situation des défenseurs des droits de l'Homme en Afrique. Le
mandat est mis sur pied par la Résolution n° 69 portant sur la
protection des défenseurs des droits de l'Homme en Afrique,
adoptée le 4 Juin 2004. Suivant l'article 1er de la dite
Résolution, la Commission a décidé de
« désigner un Rapporteur spécial sur la situation
des défendeurs des droits de l'homme en Afrique pour une période
de deux ans194(*) avec
le mandat suivant :
· Chercher, recevoir, examiner et agir sur
l'information relative à la situation des défenseurs des droits
de l'homme en Afrique;
· Présenter à chaque session ordinaire
de la Commission africaine un rapport sur la situation des défenseurs
des droits de l'homme en Afrique;
· Collaborer et établir le dialogue avec les
Etats membres, les institutions nationales des droits de l'homme, les
organismes intergouvernementaux, les mécanismes internationaux et
régionaux de protection des défenseurs des droits de l'homme, les
défenseurs des droits de l'homme et les autres partenaires;
· Elaborer et recommander des stratégies
visant à mieux protéger les défenseurs des droits de
l'homme et assurer le suivi de ses recommandations;
· Susciter la prise de conscience et promouvoir la
mise en oeuvre de la Déclaration de l'ONU sur les défenseurs des
droits de l'homme en Afrique. »
Le mandat du Rapporteur inclut donc différents aspects
: elle reçoit les demandes urgentes des défenseurs et les remet
au gouvernement compétent ; elle part en mission dans des
pays ; émet des rapports d'activités sur des questions
relatives à la protection des défenseurs195(*) au cours des sessions de la
Commission africaines, et elle reste en contact avec d'autres acteurs
clés, impliqués dans la situation des défenseurs dans la
région.196(*)
Contrairement à celui du Rapporteur Spécial onusien, qui a une
compétence territoriale mondiale, celui-ci ne se limite qu'au seul cadre
du continent africain.
L'on peut donc remarquer à juste titre fort de ce qui
précède, d'abord que la protection internationale des
défenseurs des droits de l'Homme se caractérise par une dynamique
essentiellement évolutive. Diluée en effet aux origines, dans le
droit international général des droits de l'Homme, elle s'est
démarquée pour constituer une matière spécifique
à part entière. D'autre part, elle s'appuie sur un cadre
juridique articulé autour premièrement, de normes consacrant des
prérogatives à l'attention des défenseurs et encore, de
mécanismes quasi-juridictionnels ou non, assurant l'exécution et
l'effectivité des précédents textes. Le droit
international des militants des droits de l'Homme est consacré par un
assortiment riche de normes à la fois conventionnelles et non
contraignantes. C'est en ce sens que la démarche adoptée par le
Cameroun dans la procédure d'internalisation de ces dispositions,
présente simultanément une réelle pertinence et une
certaine attractivité pour les défenseurs justiciables, en ce
qu'elle fait intervenir, la ratification des dispositions du droit
international conventionnel inhérent à la protection des
professionnels des droits de l'Homme.
Paragraphe 2 : La
ratification des normes comme préalable nécessaire à
l'effectivité de leur mise en oeuvre
Le Cameroun a ratifié chacun des instruments du droit
international des droits de l'Homme, protégeant les
défenseurs.197(*)
La première conséquence est que le rayonnement de ces normes
s'étend à son ordre interne (A). L'autre incidence consiste en
l'extension de la compétence ratione loci des différents
mécanismes conventionnels, au territoire camerounais (B).
A/ L'applicabilité
des normes protectrices des défenseurs
Le consentement d'un Etat à être lié par
un traité s'exprime par la ratification ou par
l'adhésion.198(*)
La ratification est l'approbation d'un traité par les organes internes
compétents pour engager internationalement l'Etat. Il s'agit d'un acte
discrétionnaire, libre qui doit être communiqué aux
cocontractants : échange (traité bilatéral) ou
dépôt (traité multilatéral) des
ratifications.199(*)
L'adhésion ou accession quant à elle, constitue l'acte par lequel
un Etat non partie à un traité se place sous l'empire de ses
dispositions.200(*) Ces
actes matériels intervenant dans le processus de formation des
traités, représentent suivant les cas de figure, les
procédures ultimes permettant à l'Etat de formuler sa
volonté définitive à être astreint aux dispositions
d'une convention. Elles mettent en marche l'entrée en vigueur du pacte
pour l'Etat. Une fois que l'Etat s'est placé sous l'autorité
d'une convention, il est tenu non seulement, de respecter ses dispositions mais
aussi, d'exécuter de bonne foi les obligations dont elle le
grève. La conséquence est que, le droit énoncé dans
cet instrument, a essentiellement vocation à se matérialiser et
prendre force, dans son droit interne. C'est dire que les normes des
traités auxquels l'Etat s'engage internationalement, doivent pouvoir
être appliquées dans son ordre interne. Autrement dit, il
pèse sur l'Etat, une obligation d'harmoniser avec les obligations
internationales qu'il contracte.
Dans ce sens, les textes de droit international auxquels
l'Etat camerounais consent, s'insèrent dans son ordre juridique interne.
Fort à propos, il faut préciser que le Cameroun, relativement
à l'internalisation des normes internationales conventionnelles
auxquelles il s'astreint, a adopté le système
d'intégration dit moniste avec primat du droit international. C'est
ce qu'il ressort du principe consacré par l'article 45 de la
Constitution du 18 Janvier 1996. Ce dernier dispose in
extenso que : « les traités ou accords
internationaux régulièrement approuvés ou ratifiés
ont, dès leur publication, une autorité supérieure
à celle des lois, sous réserve pour chaque accord ou
traité, de son application par l'autre partie. » Aussi,
les conventions internationales régulièrement ratifiées
par le Cameroun, bénéficient d'une applicabilité directe
avec une force supra-législative. Il en est donc ainsi des accords du
droit international des droits de l'Homme, auxquels le Cameroun est partie.
Parce que ces dernières produisent leurs effets dans son ordre interne,
il est contraint d'appliquer leurs dispositions et donc, de garantir les
prérogatives qui y sont consacrées, à chacun des citoyens
y compris aux défenseurs, sans discrimination.201(*) A cet effet, les normes
conventionnelles protectrices des défenseurs ratifiées par le
Cameroun, se trouvent exécutoires dans son ordre positif interne. Elles
font non seulement part entière de son droit interne, mais
possèdent également une force exécutoire s'imposant
même au législateur authentique, qui doit tenir compte de leurs
dispositions, dans sont entreprise d'édiction et de création des
règles internes. La conséquence est donc que, les justiciables
camerounais oeuvrant pour la défense des droits et libertés
fondamentales, ont la possibilité et même, devraient pouvoir se
prévaloir des prérogatives qui leurs sont reconnues par ces
normes. Une autre conséquence de la ratification des instruments
préservant les droits des militants, réside dans la
compétence des mécanismes créés par ces normes pour
notamment, apprécier le respect par le Cameroun de ses engagements.
B/ La compétence
des mécanismes internationaux de protection des
défenseurs
L'autre conséquence de la ratification par l'Etat
camerounais des différents instruments internationaux conventionnels
protecteurs des droits des défenseurs, est la compétence des
mécanismes institués par ces derniers. Ceci signifie qu'ils ont
tous la possibilité de contrôler l'exécution par le
Cameroun, de ses obligations au titre des conventions qui les créent.
Aussi d'une part, l'Etat camerounais est donc tenu de leur rendre compte non
seulement des mesures qu'il prend pour assurer l'effectivité des droits
consacrés, mais aussi de l'état d'avancement de
l'implémentation des textes. D'autre part, en raison de
l'opposabilité des conventions au Cameroun, les titulaires
intéressés des droits protégés ont la
possibilité en cas de violation de ces derniers, de saisir les
différents mécanismes conformément aux procédures
et instruments y relatifs, afin d'obtenir réparation. A cet effet, le
Protocole facultatif au PIDCP dispose en son article premier que :
« tout Etat partie au Pacte qui devient partie au présent
Protocole reconnaît que le Comité [des droits de l'Homme] a
compétence pour recevoir et examiner des communications émanant
de particuliers relevant de sa juridiction qui prétendent être
victimes d'une violation, par cet Etat partie, de l'un quelconque des droits
énoncés dans le Pacte. Le Comité ne reçoit aucune
communication intéressant un Etat Partie au Pacte qui n'est pas partie
au présent Protocole. » Alors lorsque cette condition est
vérifiée, selon ce qui ressort de l'article 2 :
« tout particulier qui prétend être victime d'une
violation de l'un quelconque des droits énoncés dans le Pacte et
qui a épuisé tous les recours internes disponibles peut
présenter une communication écrite au Comité pour qu'il
l'examine. »
De la même façon, la CADH peut mener en toute
compétence ses missions de consultation, de promotion et de protection
des droits de l'Homme et des peuples au sein de tous les Etats parties à
la CADHP. De ce fait, elle peut s'occuper du contentieux relatif
à l'exécution par le Cameroun de ses obligations conventionnelles
de défendre et de réaliser les droits consacrés par la
Charte. Toutefois, et il s'agit là d'un rappel, à l'instar des
autres instances internationales, la Commission Africaine ne peut se saisir
valablement que lorsque les voies de recours internes ont été
épuisées et qu'aucune autre juridiction internationale n'a
été saisie.202(*)
Dans le même ordre d'idées du moment où
l'Etat camerounais est signataire de la CADHP et, reconnaît la
compétence de la CADH. Le rapporteur spécial sur les
défenseurs des droits de l'Homme créé par cette
dernière, a la possibilité de mener ses actions de concert avec
les autorités, afin d'assurer la protection des activistes camerounais.
En outre du moment où le Cameroun est encore membre des Nations unies,
il en est également de même pour le rapporteur spécial
onusien. L'intégration des normes internationales de protection des
défenseurs des droits humains dans l'ordre juridique camerounais,
s'articule encore autour de la consécration des qu'ils reconnaissent aux
défenseurs, par la loi interne positive.
SECTION 2 : LA RECONNAISSANCE INTERNE DES NORMES
PROTEGEANT LES DEFENSEURS
Au sens de la Déclaration de 1998, les dispositions
du droit interne qui sont conformes à la Charte des Nations Unies et aux
autres obligations internationales de l'État dans le domaine des droits
de l'homme et des libertés fondamentales servent de cadre juridique pour
la mise en oeuvre et l'exercice des droits de l'homme et des libertés
fondamentales reconnus aux défenseurs.203(*) De ce fait, il faut dire que
le cadre juridique interne camerounais relatif à la protection des
travailleurs des droits de l'Homme, n'est pas riche uniquement des normes
conventionnelles internationales intégrées. La seconde
démarche employée pour l'internalisation de ces instruments
internationaux, consiste en la production par le législateur
camerounais, de règles internes préservant les
prérogatives créées par ceux-ci à l'attention des
activistes. Les droits reconnus internationalement aux défenseurs, sont
donc consacrés dans le système interne camerounais d'abord par la
loi fondamentale (paragraphe 1) et, à la suite de cette dernière,
par diverses autres lois disposant en la matière de façon
spécifique (paragraphe 2).
Paragraphe 1 : La
consécration constitutionnelle des droits reconnus aux
défenseurs
La constitution au sens matériel, représente
l'ensemble des règles écrites ou coutumières, qui
déterminent la forme de l'Etat, la dévolution et l'exercice du
pouvoir.204(*) Dans un
Etat, elle poursuit un double objet : déterminer l'organisation des
pouvoirs publics et fixer la liste des droits et libertés individuels
des citoyens.205(*) Elle
se situe au sommet de la hiérarchie des normes et constitue la loi
fondamentale, la loi des lois. Ce principe selon lequel la constitution a
valeur de loi suprême dans l'Etat est accepté par l'ensemble des
Etats.206(*) Le Cameroun s'insère dans la logique de cette
règle coutumière qui, même si elle n'est pas explicitement
énoncée, ressort de manière tacite, du contenu du texte
constitutionnel. Dans l'ordre juridique camerounais, c'est le préambule
qui est le lieu d'énonciation des droits dans la constitution
(A).207(*) Ceci, loin
d'épouser les aspects d'une simple intention fantaisiste, dénote
une réelle volition du constituant camerounais de faire du
préambule, une institution à part entière de protection
des droits fondamentaux, perceptible notamment au travers de la
constitutionnalisation de ce dernier (B).
A/ L'affirmation des
droits-libertés individuels et collectifs
D'emblée il faut avant tout remarquer que de
façon générale, « la proclamation des droits
fondamentaux est une constante dans les différents textes
constitutionnels camerounais. Le constituant camerounais a, par cet usage,
marqué son attachement aux valeurs prononcées dans les discours
en faveur des droits de l'homme. »208(*) En effet, le préambule de la
constitution camerounaise s'inspire de diverses normes du droit international
des droits de l'Homme et, reprend ainsi avec force, l'essentiel des droits et
libertés qui y sont consacrés. Il s'agit à ce titre
principalement des normes fondamentales des divers systèmes juridiques
internationaux de droits de l'Homme, auxquels le Cameroun fait partie à
savoir notamment : la Déclaration Universelle des droits de
l'Homme, les Pactes internationaux de 1966, la Charte des Nations Unies dans le
contexte onusien et aussi, la Charte africaine des droits de l'Homme et des
peuples, au niveau régional africain. L'on ne peut manquer de faire
observer qu'il s'agit là en fait, des normes internationales
présentées supra, comme consacrant à la totalité
des hommes entre bien d'autres, des privilèges nécessaires
à la défense pacifique des droits de l'Homme.
Cette inspiration est d'autant plus perceptible que, si l'on
s'intéresse à la substance des droits consacrés par le
texte constitutionnel du 18 janvier 1996, l'on ne manque de se rendre
aisément compte de ce que, les droits civils et politiques y occupent
une place prépondérante. De plus, non seulement le contenu des
droits civils et politiques consacré est abondant, mais il brille
également de son caractère multiforme et
hétéroclite. Dans un souci d'analyse, l'on peut faire remarquer
que ce dernier recoupe en fait, les droits individuels pouvant être
exercés en propre par le citoyen, en groupe et tenant compte de son
aspect spirituel. Ils peuvent ainsi être subdivisés en droits
individuels, droits de la pensée et droits de l'action
collective.209(*) Le
constituant camerounais se situe donc ainsi dans une démarche à
trois volets. D'abord, il reconnait des droits fondamentaux à l'individu
(le principe d'égalité à la protection,
l'inviolabilité du domicile, le droit à la liberté et
à la sécurité, la liberté d'aller et venir et le
droit d'établissement, le droit à la justice, le droit à
la vie et le respect de l'intégrité physique, le droit de
vote...). Ensuite il prend aussi en compte son aspect spirituel et sa
capacité à s'affirmer (la liberté de culte, la
liberté de conscience, la liberté de pensée et la
liberté d'expression...). Et enfin, en considérant la dimension
sociale de la vie et la propension du sujet à interagir avec ses
semblables, il lui consacre des droits qu'il exerce en groupe avec ceux-ci (la
liberté de réunion, la liberté d'association, la
liberté de communication, la liberté syndicale, ...). C'est dire
en somme, au regard des précédents développements, que le
législateur camerounais a constitutionnalisé les droits reconnus
aux défenseurs des droits de l'Homme par les normes internationales
conventionnelles, organisant leur protection. Ceci d'autant plus qu'il ne s'est
pas contenté de les énoncer simplement dans le préambule,
mais qu'il a également par ailleurs et de façon
complémentaire, investi ce dernier de la force constitutionnelle.
B/ La
constitutionnalisation du préambule
Si le constituant camerounais a toujours depuis le texte du 4
mars 1960, accordé une place importante au préambule de la
constitution, qu'il perçoit comme le lieu de la consécration des
principes fondateurs de la république, ce dernier a animé une
vive controverse notamment quant à la nature de sa valeur normative.
Sous le texte du 2 juin 1972 avec lequel le législateur qui poursuit
dans cette optique sans pour autant se définir clairement, la question
partage la doctrine en deux camps. S'opposent alors deux thèses :
d'une part, une réflexion aux allures jus-naturalistes stipulant la
force contraignante immanente des droits énoncés dans le
préambule et d'autre part, une autre plus positiviste soutenant
l'incertitude de la valeur juridique du préambule, et des droits qu'il
prône. Pour le doyen Maurice KAMTO, apôtre du second courant de
pensée, le problème se posait concrètement en ces
termes : « la détermination du lieu
d'énonciation des droits dans les constitutions africaines est une
étape essentielle dans la recherche de leur assise juridique, car avant
même de s'interroger sur le contenu et leur garantie effective, il faut
déjà s'assurer qu'il s'agit de normes juridiques. Or s'ils le
sont sans conteste lorsqu'ils sont insérés dans le dispositif de
la Constitution, rien n'est moins sûr lorsqu'ils figurent seulement dans
le préambule. Du coup se pose le problème de la valeur juridique
du préambule. Doit-on le considérer comme étant partie
intégrante de la Constitution et ayant par suite valeur
constitutionnelle ? »210(*) Pour lui, la question ne repose pas sur l'existence
de la valeur du préambule, car de toutes les façons :
« les préambules ont une valeur constitutionnelle, mais
seulement de lege feranda ou par simple déduction
logique. »211(*) L'embarras consistait ici en ce que si la valeur
constitutionnelle du préambule ne pouvait être nulle, elle n'en
demeurait pas moins légitimement contestable car pas juridiquement
avérée. Ce qui par conséquent n'offrait aucune garantie,
ni aucune sécurité à l'ensemble des droits
consacrés et proclamés en son sein.
Ces questionnements rémanents ont amené le
constituant à adopter une position définie et, à affirmer
clairement le fond de sa pensée. C'est ce qu'il fait avec la loi
constitutionnelle n° 96/06 du 18 janvier 1996 portant
révision de la Constitution du 2 juin 1972, qui dispose en son
article 65 que : « le préambule fait partie
intégrante de la Constitution. » Le législateur
constitutionnel a voulu ainsi doter le préambule, à
l'unanimité, d'une valeur juridique certaine et importante : la
valeur fondamentale interne, la nature constitutionnelle. Cette disposition
implique donc fort à propos, que l'ensemble des dispositions contenues
dans le préambule, appartiennent à la constitution
elle-même, et ce au même titre que le corpus de cette
dernière. La conséquence directe est qu'il s'agit de normes
constitutionnelles à part entière, dont la violation ou la
méconnaissance, peut valablement donner lieu à un contentieux. Il
en est ainsi de l'intégralité des droits proclamés par le
préambule, parmi lesquelles figurent comme exposé plus haut, les
prérogatives reconnues par le droit international, aux défenseurs
des droits de l'Homme. L'on peut rationnellement dire que le constituant
camerounais en les revêtant de la force constitutionnelle, a fait montre
d'une intention claire de garantir l'effectivité et la
sécurité des normes protégeant l'activité des
militants des droits humains. Toutefois, le constituant a par ailleurs,
laissé la possibilité au législateur, de préciser
les modalités de l'exercice par des travailleurs des droits de l'Homme,
des prérogatives qui leur sont accordées.
A. Paragraphe 2 :
L'aménagement législatif des droits reconnus aux
défenseurs
En vertu de l'article premier de la CADHP, Les Etats parties
à l'accord s'engagent à adopter des mesures
législatives ou autres pour les appliquer. Dans le sens de
l'exécution de ces obligations conventionnelles, l'Etat camerounais a
notamment élaboré des lois consacrant des droits reconnus aux
défenseurs, par les normes internationales disposant en matière
de leur protection. Ceci provient principalement de ce que, malgré que
le constituant camerounais ait conféré à ces droits la
force constitutionnelle, il a explicitement laissé au législateur
parlementaire, le soin de préciser les modalités de leur
réalisation. C'est le cas essentiellement pour ce qui est des
libertés collectives. Le préambule dispose à cet effet
que : « la liberté de communication, la
liberté d'expression, la liberté de réunion, la
liberté d'association, la liberté syndicale et le droit de
grève sont garantis dans les conditions fixées par la
loi. » Une première conséquence de ce choix est
que « les libertés publiques au Cameroun sont garanties
par la Constitution et relèvent dans leur exercice de domaine de la
loi »212(*) La seconde, corolaire à cette
architecture juridique, réside dans le fait qu'il existe dans le respect
de la philosophie constitutionnelle, des lois camerounaises disposant de
l'application des différents droits acquis aux défenseurs. Il
s'agit essentiellement des textes de loi relatifs à la
démocratisation de la vie publique, promulgués le 19
décembre 1990. Ce sont :
· La loi n° 90/43 portant sur le
déplacement et la libre circulation des personnes. Cette loi
règlemente l'exercice de la liberté d'aller et venir ainsi que le
droit d'établissement, consacrés par la loi constitutionnelle.
· La loi n° 90/052 relative à la
liberté de communication sociale. Cette norme définit le
cadre d'exercice des libertés fondamentales constitutionnelles
d'expression, d'opinion et de presse. Relativement à ce droit, l'on
pourrait encore évoquer la loi n° 96/04 du 4 janvier 1996
abolissant la censure.
· La loi n° 90/053 relative à la
liberté d'association. Cette loi régit cette liberté
proclamée par le préambule de la Constitution. Elle la
définit comme la faculté de créer une association, d'y
adhérer ou de ne pas y adhérer et, la reconnait à
toute personne physique ou morale sur l'ensemble du territoire
national.213(*)
· La loi n° 90/055 sur le régime des
réunions et des manifestations publiques. Ce texte organise en fait
l'exercice du droit constitutionnel de réunion. Au sens de cette loi,
a un caractère public, toute réunion qui se tient dans un
lieu public ou ouvert au public214(*). Les réunions publiques, quel qu'en
soit l'objet, sont libres. Toutefois, la loi les soumet à une
déclaration préalable et à une autorisation
spéciale pour le cas des réunions sur voie publique.215(*)
XII. CONCLUSION DU
PREMIER CHAPRITRE
Fort de ce qui précède, il faut d'abord relever
que le cadre juridique international relatif à la protection des
défenseurs des droits de l'Homme, s'appuie à la fois sur des
dispositions conventionnelles tirées du droit international commun des
droits de l'Homme et, sur un corpus de dispositions souples, spécifiques
à l'activité des activistes. D'autre part, il fait intervenir des
institutions quasi-juridictionnelles et non-juridictionnelles, destinées
à contrôler la réalisation des prérogatives
consacrées. Alors, la mise en oeuvre par l'Etat camerounais de ce cadre
repose en premier, sur la dynamique d'internalisation des textes sur le ressort
desquels il s'appuie. Cette dernière, se caractérise par une
démarche plurielle faisant intervenir en premier, la ratification des
instruments conventionnels de protection des défenseurs. Ensuite, la
protection des droits reconnus aux professionnels des libertés
fondamentales, par l'ordre juridique camerounais prend assise sur une
consécration constitutionnelle. Pour être enfin, définie
par des lois précises, venant organiser l'exercice par leurs
bénéficiaires, de ces prérogatives. Toutefois, il faut
préciser que le cadre juridique de la mise en oeuvre interne des normes
internationales de protection des défenseurs au Cameroun, s'appuie aussi
bien sur des mesures législatives d'intégration de ces
dernières, que sur la mise en place de mécanismes destinés
à assurer leur implémentation.
CHAPITRE 2 : LA MISE EN PLACE DE MECANISMES
INSTITUTIONNELS GARANTISSANT L'EFFECTIVITE DES NORMES PROTEGEANT LES
DEFENSEURS
La mise en oeuvre par le Cameroun des normes internationales
de protection des défenseurs des droits de l'Homme repose
également sur l'établissement d'un dispositif, dont la mission
est d'assurer la protection des droits consacrés par ces dispositions.
Cette protection des droits des défenseurs prend appui sur leur
justiciabilité (Section 1), avant de s'étendre à d'autres
sphères non juridictionnelles (Section 2).
XIII. SECTION
1 : LES INSTITUTIONS JURIDICTIONNELLES
Une analyse succincte du corpus de prérogatives
reconnues aux défenseurs des droits humains par les différents
textes internationaux, révèle que celui-ci s'articule
essentiellement autour des droits civils et politiques et
précisément, des libertés civiles individuelles. Ces
dernières constituent des droits justiciables au Cameroun. En effet,
l'Etat organise une protection juridictionnelle des libertés
fondamentales vitales à l'action des défenseurs.
« S'inspirant du modèle français, la solution
camerounaise en matière de protection juridictionnelle des
libertés publiques repose sur une dualité de
juridictions. [...] La solution adoptée est celle de la
répartition des compétences entre le juge administratif et le
juge judiciaire. La protection des libertés publiques incombe ainsi,
soit au juge judiciaire, soit au juge administratif. Ce système de
dualisme juridictionnel en matière de liberté individuelle a
été adopté au Cameroun. »216(*) Deux acteurs
juridictionnels interviennent donc dans la protection des libertés
fondamentales reconnues aux défenseurs des droits de l'Homme. Il s'agit
du juge judiciaire (paragraphe 1) et du juge administratif (paragraphe
2).217(*)
A. Paragraphe 1 : La protection des
libertés publiques par le juge judiciaire
Le juge judiciaire a la mission principale de protéger
les libertés dans les rapports entre les personnes privées.
Toutefois, il est également habilité à intervenir dans les
cas où la violation de la liberté individuelle émane soit
d'un agent de l'Etat, soit de l'administration elle-même.218(*) La protection des
droits-libertés par le juge judiciaire a d'autant plus de poids que les
principaux codes camerounais sanctionnent, les atteintes protées aux
droits fondamentaux des particuliers. Il s'agit principalement des atteintes
à l'intégrité corporelle, à la liberté et
à la tranquillité des personnes. Ces violations donnent lieu au
pénal, au prononcé d'une peine et au civil, à la
réparation du préjudice causé, par le paiement de dommage
et d'intérêts. C'est dire qu'en fait les lois civile et
pénale ainsi que le juge judiciaire, préservent les droits et
libertés individuelles, reconnues aux êtres humains en
général et aux défenseurs en particulier, du fait de ce
qu'ils possèdent cette qualité, contre de l'action d'autrui et
même, de l'Etat. A ce titre, le juge judiciaire condamne les violations
faites le droit à la vie, l'intégrité et la
sûreté physique, la liberté de circulation, le domicile ou
encore le secret de la correspondance, pour ne citer que ceux là. Quid
de la protection des droits des défenseurs, par le juge
administratif.
B. Paragraphe 2 : La protection des
libertés individuelles par le juge administratif
En vertu du principe de la dualité des juridictions, le
juge administratif est au Cameroun, à côté de son homologue
judiciaire, l'autre acteur juridictionnel de la protection des
droits-abstention. Toutefois, en raison de la différence de leurs
compétences, il interviendra pour défendre ces derniers, dans des
hypothèses et avec des voies différentes. En effet,
« au regard des textes en vigueur, le juge administratif
camerounais dispose de pouvoirs lui permettant de garantir le respect des
libertés publiques. Il intervient lorsque des agissements liberticides
sont commis au moyen d'actes administratifs unilatéraux. Son action
consiste ou bien à sanctionner l'excès de pouvoir, ou bien
à contrôler le pouvoir réglementaire. »219(*) Le juge administratif
apprécie la régularité des actes règlementaires. Sa
compétence s'exerce dans les cas où l'acte opère une
violation de la loi ; l'acte administratif est entaché d'un vice de
forme ; l'auteur de l'acte réalise par son biais un
détournement de pouvoir ou, n'est tout simplement pas compétent
pour prendre l'acte. Le juge administratif a en fait, pour mission essentielle
de protéger les individus contre l'arbitraire de la puissance publique,
de l'administration. Il s'agit d'un acteur essentiel dans la protection des
droits et libertés fondamentales internationalement reconnues aux
personnes. Ce dans la mesure où, il préserve ces derniers de la
personnalité juridique la plus puissante dans l'ordre interne :
l'Etat souverain. A côté du juge, des institutions se chargent
également de la mise en oeuvre de la protection des défenseurs
des droits de l'Homme.
XIV. SECTION 2 : LES INSTITUTIONS
NON JURIDICTIONNELLES
« Les garanties non juridictionnelles de la
protection des libertés publiques au Cameroun reposent sur la
possibilité reconnue aux particuliers de s'adresser aux institutions
tant privées que publiques de défense des droits et
libertés individuels. Les institutions privées sont
essentiellement composées d'associations de défense des droits de
l'Homme. Quant aux institutions publiques, la seule qui existe et qui fait
office d'autorité administrative indépendante est le
Comité National des Droits de l'Homme et des
libertés. »220(*) La protection institutionnelle actuelle des
défenseurs des droits de l'Homme au Cameroun, se calque encore sur ce
modèle. Elle fait en effet, intervenir tour à tour deux
catégories d'acteurs. Un premier à caractère public
créé par l'Etat : la Commission Nationale des droits de
l'Homme et des libertés (paragraphe 1). Et d'autre part, un autre
d'initiative privée émanant de la société civile de
défense des droits fondamentaux : le Réseau des
Défenseurs des droits humains en Afrique centrale (paragraphe 2).
Paragraphe 1 : La
Commission Nationale des droits de l'Homme et des libertés
(CNDHL)
La déclaration des Nations Unies sur les
défenseurs impose entre autres aux Etats membres, l'obligation de mettre
en place des institutions nationales et indépendantes, ayant pour
mission d'assurer la promotion et la protection des droits et libertés
fondamentaux sur leurs territoires.221(*) Suivant cette disposition, l'Etat camerounais a le
devoir d'aménager dans son ordre juridique interne, des institutions qui
favoriseront l'implémentation des droits de l'Homme consacrés
dans les textes internationaux. Le Cameroun dans le sens de la mise en oeuvre
de cette norme, a mis sur pied « une institution
indépendante de consultation, d'observation, d'évaluation, de
dialogue, de concertation, de promotion et de protection des droits de
l'Homme. »222(*) Il s'agit de la CNDHL. Pourtant la volition du
Cameroun inhérente à la création d'un mécanisme
national et indépendant de défense des droits de l'Homme, ne date
pas de la création de la Commission en 2004, étant donné
que l'action de cette dernière y est bien plus antérieure.
En effet, la première trace concrète du
désir de l'Etat camerounais, de mettre en oeuvre une institution avec
pour l'objectif d'accroître l'assise du respect de la dignité et
des droits humains, remonte au 08 novembre 1990, avec la création par
décret présidentiel223(*), le Comité National des Droits de l'Homme et
des Libertés (CoNDHL). « Créé par le
décret n° 90/1459 du 8 novembre 1990, le Comité National des
Droits de l'Homme et des libertés est chargé d'assurer un
contrôle non juridictionnel de la protection des libertés
individuelles. [...] Lors de sa création, le C.N.D.H.L apparaît
comme l'organe chargé de défendre les droits et libertés
des Camerounais. La lecture de l'article 2 du décret créant cet
organisme confirme cette assertion. En effet, selon cet article, "le
comité a pour mission la défense et la promotion des droits de
l'homme et des libertés". [...]Le Comité assure aussi un
rôle de suggestion et de diffusion; il a en outre en charge la formation
et l'éducation. En fin il doit jouer un rôle de
coordination.»224(*) Malgré de telles bases flatteuses quant
à sa propension à oeuvrer à la protection des droits
individuels établies, l'impact du Comité dans les faits, fut
moindre. Le Comité demeure une institution à fort
caractère politique, soumise à la puissance écrasante du
pouvoir exécutif. « C'est tout juste s'il peut mener des
investigations. [...] De plus, lorsque ses investigations sont
terminées, le Comité ne peut prendre aucune mesure visant
à faire cesser une violation de liberté constatée. La
décision de faire cesser une telle violation appartient en
définitive, soit à l'auteur de l'acte en cause, soit au
supérieur de celui-ci. [...] En fait, le Comité ne dispose que
d'un pouvoir de recommandation avec pour rôle d'aider l'administration
à respecter le droit. »225(*) De plus, les rapports qu'il produisait
n'avaient pas un caractère public, ils étaient destiné au
Président de la République jusqu'en mars 1999.
Par la suite, les Principes de Paris226(*)et les Commonwealth Best
Practices ont apporté un renouveau notamment dans, l'harmonisation
des dispositions normatives régissant les institutions nationales de
protection et de promotion des droits de l'Homme ainsi qu'en ce qui concerne
l'autonomisation des activités. La conséquence directe de ces
textes internationaux à l'interne, est la promulgation de la loi
n° 2004/016 du 22 juillet 2004 et son décret d'application
n°2005/254 du 7 juin 2005 qui consacrent la substitution du
Comité en Commission. La CNDHL est une institution beaucoup moins
formellement dépendante de l'exécutif que son
prédécesseur, possédant un plus large spectre d'action. A
l'encontre de la soumission au contrôle des fonds prévus au
fonctionnement du CoNDHL par l'exécutif227(*), la CNDHL est statutairement
« une institution indépendante dotée de la
personnalité juridique et de l'autonomie
financière. »228(*) La CNDHL a deux principales missions : celles
d'assurer la promotion et la protection des droits de l'Homme sur l'ensemble du
territoire. Pour mener à bien ces deux missions, elle
bénéficie d'attributions et de compétences définies
par l'article 2 de la loi du 22 juillet 2004. Aussi, dans le cadre sa mission
de promotion des droits de l'homme, la CNDHL : « vulgarise
par tous moyens, les instruments relatif aux droits de l'homme et aux
libertés ; assure le suivi de l'application des conventions
internationales ratifiées par le Cameroun ; veille au
développement d'une culture des droits de l'homme au sein du public
à travers l'éducation, la formation, l'information et
l'organisation des conférences et séminaires ; recueille et
diffuse la documentation internationale relative aux droits de l'homme et
assure, le cas échéant, la liaison avec les organisations
poursuivant les buts similaires. » Relativement à la
protection des droits de l'homme, elle : « reçoit
toutes les dénonciations portant sur les cas de violation des droits de
l'homme et des libertés ; diligente toutes enquêtes et
procède à toutes investigations nécessaires sur les cas de
violation des droits de l'homme et des libertés, et en fait rapport au
président de la république ; procède, en tant que de
besoin, aux visites des établissements pénitentiaires, des
commissariats de police et des brigades de gendarmerie, en présence du
procureur de la république compétent ou de son
représentant ; ces visites peuvent donner lieu à la
rédaction d'un rapport adressé aux
autorités. »
La CNDHL joue donc un rôle important dans la promotion
et la protection des droits et libertés fondamentaux consacrés
par les textes internationaux. Il s'agit donc d'une institution
républicaine prédominante de la protection des droits des
défenseurs, au même titre que de ceux des autres individus. Dans
la même lancée, une organisation de la société
civile s'est consacrée à la protection spécifique des
défenseurs.
A. Paragraphe 2 : Les organisations
de la société civile
Au Cameroun, le droit de défendre individuellement ou
collectivement les droits de l'Homme, tel que consacré à
l'article premier de la Déclaration de 98 est garanti. C'est la raison
pour laquelle, les organisations de la société civile (OSC)
apportent également, à côté de l'autorité
républicaine indépendante qu'est la CNDHL, leur contribution
à la protection des défenseurs des droits de l'Homme. Il est
intéressant à plus d'un titre d'examiner dans le cadre de cette
étude, deux OSC locales oeuvrant statutairement, à la protection
des professionnels des libertés fondamentales. Il s'agit du
Réseau camerounais des organisations des droits de l'Homme (RECODH)
ayant une portée nationale et, du Réseau des Défenseurs
des Droits Humains en Afrique Centrale (REDHAC) qui pour sa part,
possède un rayonnement sous-régional.
A/ Le Réseau
camerounais des organisations des droits de l'Homme (RECODH)
Le Réseau camerounais des organisations des droits de
l'Homme (RECODH) est en fait un produit de la volonté des dirigeants
politiques (1). Depuis sa création, il s'est imposé comme un
véritable acteur institutionnel national, oeuvrant à la
protection des défenseurs des droits de l'Homme(2).
1) Le produit d'une
volonté étatique
A la base, le RECODH est une émanation de la volition
des dirigeants étatiques, émise dans le cadre de la conception du
projet d'amélioration de la gouvernance publique. En fait, l'existence
du RECODH est en fait, une réponse aux exigences liées à
la mise en oeuvre du Programme National de Gouvernance (PNG) de la
République du Cameroun pour la période 2006-2010. Ce programme
comprenait entre autres composantes, « l'amélioration de
la participation des citoyens et de la société civile à la
gestion des affaires publiques ». Cette composante comprenait
quatre axes dont le « renforcement du secteur des droits
humains ». Ce secteur se constituait de quatre projets parmi
lesquels, celui intitulé « renforcement des
capacités des ONG des droits humains ». L'une des
activités de ce projet était la création d'un
réseau de coordination des ONG des droits humains.229(*)
Conformément à ce programme, le Projet Droits
Humains mis en oeuvre par Commission Nationale des Droits de l'Homme et des
Libertés (CNDHL) avec l'appui du Programme des Nations Unies pour le
Développement (PNUD), a organisé en février 2009 un
atelier de formation des organisations des droits de l'homme sur le
thème « la sensibilisation sur les droits de
l'homme ». L'un des résultats attendu de cet atelier
était la création d'une plateforme des organisations des droits
de l'homme au Cameroun. A la suite de ce brainstorming, un Comité de
Réflexion constitué de 17 organisations fut mis sur pied, avec
l'objectif d'élaborer un modèle des textes organiques qui
régiront le futur réseau. L'Assemblée
générale constitutive du réseau a réuni, soixante
organisations de droits de l'Homme locales, à Yaoundé le 06
janvier 2010. Au terme de cette Assemblée, les statuts du Réseau
ont été adoptés et les membres de la Coordination
Nationale élus.
Le RECODH est donc le produit de la volonté conjointe
du gouvernement (au travers du PNG), du PNUD et de la CNDHL (au moyen de leur
programme conjoint) ainsi que, des organisations de la société
civile nationales. Il s'agit d'une institution apolitique, laïque et
à but non lucrative, dont la vision est la suivante :
« à l'horizon 2015, une masse critique d'OSC sont de
véritables bastions, acteurs de réduction significative des
violations et des abus des droits humains au Cameroun. » Dans le
sens de cette visée, en plus du renforcement des capacités des
organisations des droits de l'Homme -qui a motivé sa création-,
le RECODH poursuit entre autres comme objectif, la protection et la
défense des défenseurs des droits de l'Homme et des
libertés fondamentales consacrés par les instruments nationaux,
régionaux et internationaux.
2) Un acteur
institutionnel de protection des défenseurs des droits de l'Homme
important
Le RECODH est actuellement à l'échelle
nationale, un acteur majeur de la protection des travailleurs des droits de
l'Homme. Ceci peut d'une part, s'expliquer par son étendue. Le
Réseau a en effet, en quelque trois ans, connu une extension très
significative, voire même spectaculaire. Parti d'une soixantaine de
membres enregistrés lors de l'Assemblée constitutive, il compte
aujourd'hui en son sein, plus quatre cent organisations de la
société civile (OSC), réparties dans chacune des 10
régions du pays.
D'autre part, il faut également relever que le RECODH a
mis en place un mécanisme spécifique, destiné à
dénoncer systématiquement les cas de violations des droits des
militants des droits de l'Homme dont il est informé. Mais aussi,
à apporter une assistance notamment juridique, aux victimes. Chaque fois
qu'un défenseur des droits de l'homme est en difficulté, le
RECODH saisit les autorités compétentes soient à travers
un courrier, soit par une déclaration publique, soit par appel urgent,
mais aussi mobilise la communauté des défenseurs des droits de
l'homme tant au niveau international, régional que national.230(*) Un membre de la coordination
du Réseau commande le mode de fonctionnement de ce mécanisme
comme suit : « les défenseurs et associations de
défense adhèrent constamment au Réseau et travaillent en
collaboration avec lui. Lorsqu'un défenseur est en difficulté, le
Réseau lui fournit son aide. Dans le cas où elle n'est pas
suffisante, il interpelle les autorités conformément à
leurs obligations. Cette mesure généralement est couronnée
de succès. En principe, nous privilégions les voies de recours en
interne, mais quand le besoin se fait ressentir, le Réseau peur recourir
au concours des instances internationales. »231(*) Le réseau est maintes
fois intervenu avec succès, pour secourir des défenseurs an
détresse. C'est le cas par exemple pour les défenseurs MEY ALI,
Richard DJIMELI FOUFIE où la mobilisation collective qu'il a
généré, est parvenue à faire cesser le
harcèlement judiciaire dont le premier était victime, et à
contraindre les bourreaux de l'autre à le libérer. Si à
l'échelle nationale, le RECODH constitue une importante OSC de
protection des défenseurs, son action est suppléée sur le
plan de la sous-région, par une autre institution non gouvernementale.
B/ Le Réseau des
défenseurs des droits humains en Afrique Centrale (REDHAC)
L'autre des acteurs non gouvernementaux majeurs agissant pour
la défense des défenseurs des droits de l'Homme, est le
Réseau des Défenseurs des Droits Humains en Afrique Centrale
(REDHAC). Il s'agit d'une association sous-régionale, à
caractère apolitique et à but non lucratif, non confessionnelle
et non violente. Il a été créé le 1er
Avril 2007 à Kigali au Rwanda, par les défenseurs des droits
humains délégués des pays de la sous-région
d'Afrique centrale. Son siège à Douala au Cameroun mais il
s'étend sur sept autres pays d'Afrique centrale à savoir :
la République démocratique du Congo, le Tchad, le Gabon, la
République Centrafricaine, la République du Congo, la
Guinée équatoriale ainsi que Sao Tomé et Principe. Le
REDHAC est animé par un objectif global : assurer la
reconnaissance du statut du défenseur des droits de l'homme en Afrique
Centrale. Il s'agit d'une organisation de la société civile
oeuvrant spécifiquement et exclusivement pour la protection des
défenseurs des droits humains. Elle se propose de promouvoir le statut
des défenseurs, de les former, de soutenir leur action, de créer
entre eux une solidarité et, de défendre en toutes circonstances,
leurs droits en Afrique Centrale. Afin de pouvoir réaliser les objectifs
qu'il s'est assigné, le REDHAC oeuvre précisément, dans
les divers domaines suivants : la promotion des droits des
défenseurs ; leur protection ; le plaidoyer pour la
reconnaissance officielle de leur statut ; le renforcement de leurs
capacités ; leur assistance juridique et judiciaire ainsi que, la
production d'enquêtes et de rapports informant le public en temps
réel, sur les conditions de travail des défenseurs de la
sous-région.
Le REDHAC figure parmi les acteurs de la société
civile oeuvrant à la protection des défenseurs des droits de
l'Homme, les plus importants à l'échelle régionale. Ceci
peut s'expliquer en premier lieu, par la densité du réseau de
partenariat institutionnel qu'il possède. En effet, l'institution
possède un statut d'observateur à la Commission nationale des
droits de l'Homme et des peuples (CADH) et, prend part au Forum des ONG qui se
tient annuellement, en prélude de la session de la CADH. Elle
développe d'autre part, de fructueux rapports de collaboration avec les
autorités et les organisations majeures internes et internationales, de
protection des droits de l'Homme. C'est donc auprès des institutions les
plus fortes et, dans les plus hautes sphères de décisions, que le
REDHAC déploie ses activités de rapportage et de plaidoyer, pour
la valorisation du statut de défenseur des droits humains. Mais encore,
il a la possibilité de recourir au soutien de ses partenaires interne,
régionaux ou internationaux, pour venir en aide aux défenseurs en
péril. Ce qui lui confère une grande capacité d'action en
temps réel.
Dans le même ordre d'idées, une autre raison
faisant du REDHAC un outil de choix dans la protection des défenseurs,
repose sur la palette d'action à sa disposition, pour secourir les
défenseurs. En plus de l'assistance juridique et judiciaire, le REDHAC
peut en temps réel déjà à son niveau, prendre des
mesures pour faire cesser les violations encourues par les militants. Celles-ci
peuvent aller de l'indemnisation à la délocalisation des
professionnels ou de leurs familles. Ceci est du à l'autonomie qui
caractérise l'institution. Autonomie qui lui vaut d'être un acteur
majeur non seulement dans la protection, mais aussi dans la promotion et la
formation des défenseurs locaux des droits de l'Homme.
CONSLUSION DU DEUXIEME CHAPITRE
La mise en oeuvre des normes internationales de protection des
défenseurs des droits de l'Homme par l'Etat camerounais, repose
également sur l'élaboration d'un dispositif institutionnel
destiné à assurer, l'implémentation et la
réalisation des prérogatives reconnues à ces derniers. Ce
système interne fait intervenir à la fois des mécanismes
juridictionnels et non juridictionnels. Les premiers consistent en les
juridictions judiciaires et administratives. Alors que les seconds, reposent
sur une dynamique plus complexe faisant intervenir à la fois d'un
côté, une autorité administrative indépendante la
Commission nationales des droits de l'Homme et des libertés (CNDHL) et
d'autre part, des organisations de la société civile (OSC).
L'action déployée en ce sens, par le Réseau camerounais
des organisations des droits de l'Homme (RECODH) et le Réseau des
Défenseurs des Droits Humains en Afrique Centrale (REDHAC) a
été particulièrement intéressante à ce
titre, pour être analysée dans le contexte de cette étude.
CONSLUSION DE LA PREMIERE PARTIE
Cette première partie, avait pour objectif de rendre
compte de l'articulation de la mise en oeuvre par le Cameroun, des normes
internationales de protection des défenseurs des droits de l'Homme. Il
s'agissait pour le moins, d'appréhender les ressorts utilisés par
l'Etat, dans l'exécution de ses obligations et engagements
internationaux en la matière. Dès lors que retenir en
somme ? Principalement que le Cameroun, dans le cadre de la
réalisation du droit international inhérent à la
protection des défenseurs des droits de l'Homme, emploie des
mécanismes juridiques à la fois normatifs et institutionnels. En
effet, la mise en oeuvre de ces dispositions internationales dans le contexte
camerounais, s'appuie d'abord sur une dynamique purement normative, consistant
en leur internalisation dans l'ordre juridique national. Les droits ainsi
consacrés par les normes universelles à l'attention des
défenseurs, se trouvent à leur tour protégés et
exigibles, dans le cadre interne camerounais. Puis, dans le sens de
compléter l'intégration interne des règles
internationales, le législateur crée et met sur pied, des
mécanismes dont la mission principale est d'assurer
l'implémentation et la réalisation des normes consacrées.
L'implication directe est que le défenseur a la possibilité de
recourir à des institutions, non seulement dans le sens de la jouissance
des prérogatives qui lui sont reconnues mais également, pour
obtenir réparation en cas de violation de ces dernières. C'est
dire que les droits internationaux reconnus aux défenseurs, sont
exécutables et actionnables dans l'ordre interne camerounais, et donc
effectifs.232(*) Ceci
conduit donc, d'un point de vue logique, à confirmer dans un premier
lieu, l'hypothèse attestant de l'effectivité de la mise en oeuvre
par le Cameroun, des normes internationales de protection des surveillants des
droits de l'Homme. Cependant, cette confirmation ne peut être que
réservée pour le moment. Ce essentiellement quand on sait que,
l'effectivité des droits de l'Homme fait référence
à leur entière mise en oeuvre et à leur complète
réalisation.233(*) D'autre part, étudier l'effectivité du
droit revenant aussi, au-delà de l'existence simple de la règle,
à rechercher ses effets réels sur les comportements
sociaux234(*), il
faut nécessairement évaluer la portée sociale
matérielle, des mécanismes déployés par le Cameroun
dans le sens de la mise en oeuvre du droit international relatif à la
protection des défenseurs. L'on se rend compte à ce niveau, de ce
que les procédés ainsi développés par l'Etat
camerounais, se heurtent dans la pratique à d'importants écueils,
qui limitent considérablement leur effectivité.
SECONDE PARTIE : LA LIMITATION DE LA MISE EN
OEUVRE
La notion d'effectivité prise dans un sens large, ne se
résume pas seulement à l'existence du droit. En effet, cette
dernière plus que la positivité du droit, recherche sa
portée, son influence véritable sur la réalité
factuelle. Comme l'expose par ailleurs fort à propos Véronique
CHAMPEIL DESPLATS, « quelle que soit la définition
précise que l'on adopte de l'effectivité, on peut
conventionnellement s'accorder sur le fait cette notion renvoie à la
question générale du passage du devoir être à
l'être ou, en d'autres termes, de l'énoncé de la norme
juridique à sa concrétisation. »235(*) Dès lors,
étudier l'effectivité d'un droit, c'est également chercher
à en évaluer les degrés d'application, à
préciser ses mécanismes de pénétration en
société.236(*) C'est en fait, véritablement évaluer
les effets de ce droit, en prenant en compte le point de vue des usagers de
la norme.237(*)
Dans ce sens, rechercher l'effectivité de la mise en
oeuvre par le Cameroun, des règles internationales protectrices des
activistes, commande d'analyser l'impact social concret des mesures
déployées pour ce faire, par l'Etat. Il s'agit autrement dit,
d'appréhender par le biais d'un examen de la réalité
sociale, le degré de mise en oeuvre de ces textes par le Cameroun. A cet
effet, un aperçu du quotidien des travailleurs camerounais des droits de
l'Homme, laisse apparaître des écarts existant entre le droit
prescrit et la réalité relative au droit. De fait, la mise en
oeuvre du droit international de la protection des défenseurs au
Cameroun, se heurte à des écueils sérieux qui entravent
son effectivité complète (chapitre 1). Toutefois, cette
limitation ne présente pas un caractère irrévocable et,
elle porte en elle-même, les germes de sa réversibilité
(chapitre 2).
CHAPITRE 3 : LA CONSISTANCE DE LA
LIMITATION
La mise en oeuvre des normes internationales de protection des
défenseurs des droits de l'Homme au Cameroun est considérablement
limitée dans sa réalisation pratique. Les obstacles aux mesures
déployées par l'Etat sont propres à chacune d'elles.
Ceux-ci tiennent donc aussi bien d'une part, au contexte social et à
l'ordre juridique interne (section 1), qu'aux institutions mises en place
d'autre part (section 2).
XV. SECTION 1 : LES LIMITES SOCIO-JURIDIQUES
L'on se propose d'analyser ici tour à tour, les
entraves de nature juridiques (paragraphe 1) et les écueils d'ordre
social (paragraphe 2).
A. Paragraphe 1 : Les
entraves juridiques
Les limites juridiques à la mise en oeuvre des textes
internationaux de protection des militants des droits de l'Homme tiennent
essentiellement premièrement, aux normes elles-mêmes. Il faut
remarquer ici que les règles internationales organisant la protection
spécifique des défenseurs, n'exercent pas véritablement un
attrait significatif sur ces derniers (A). Ensuite, d'autre part, c'est
l'esprit dans lequel le législateur camerounais internalise ces textes,
qui dans une large mesure, compromet et met à mal leur
effectivité (B).
A/ La faible
attractivité exercée par les normes internationales
spécifiques protectrices des défenseurs sur ceux-ci
Un examen bref de l'activité quotidienne des
défenseurs locaux des droits de l'Homme révèle une
inappropriation dans une large part, par eux des textes internationaux
organisant leur protection. C'est dire en fait, que ceux-ci définissent
leurs itinéraires sans pour autant faire appel ou encore se servir de
ces derniers (1). Ce désintérêt des professionnels des
droits de l'Homme des textes consacrés pourtant spécifiquement
à leur activité, pourrait s'expliquer par leur caractère
non contraignant et leur faible impact sur l'Etat (2).
1) Des règles
méconnues de leurs destinataires
L'enquête sommaire réalisée auprès
de quelques défenseurs camerounais des droits de l'Homme a
révélé un détail offrant des prises pour une
analyse intéressante. Il s'agit de la méconnaissance dans une
large part par les défenseurs eux-mêmes, des textes internationaux
organisant leur protection spécifique. C'est ce qu'il ressort du
graphique suivant :
Source : Données collectées au moyen de
l'enquête de terrain réalisée
Le graphique à lui seul est très
évocateur : l'écrasante majorité de la population de
militants enquêtée ne connaît pas les textes internationaux
consacrés spécifiquement à la protection et à
l'organisation de leur activité. Une précision est clairement
à apporter ici. En effet, quand il est dit qu'ils ne les connaissent
pas, cela signifie que si certains ont eu à en entendre vaguement
parler, la constance pour tous est qu'ils n'ont pas connaissance des textes des
normes et donc, sont dans l'incapacité de s'en prévaloir dans la
conduite de leurs activités. La déclaration des Nations Unies du
9 décembre 1998 ou encore les déclarations de Kigali et de Grand
Baie, tout comme les différentes résolutions adoptées par
la Commission africaine des droits de l'Homme et des peuples (CADH), semblent
tournées en une denrée rare réservée à la
seule connaissance de quelques privilégiés, y compris parmi la
population même de leurs destinataires. Dès lors, l'on remarque
que la propension de ces normes à avoir un impact réel est
considérablement amoindrie, étant donné qu'elles sont
très peu connues de leurs cibles. Ceci est déjà une
entorse considérable à l'effectivité de leur mise en
oeuvre, surtout quand on sait que cette dernière, comme vu plus haut,
suppose une évaluation des effets de la norme, vu entre autre sous le
prisme de l'appréciation qu'en font les usagers.238(*) Des doutes sont à
émettre quand à la possibilité de ces derniers
d'interpréter la norme, quand ils ne la connaissent pas.
En fait, la grande majorité des défenseurs dans
la conduite de leurs activités quotidiennes, font appel et se
prévalent des dispositions des textes fondamentaux du droit
international commun des droits de l'Homme. Il s'agit de la déclaration
universelle du 10 décembre 1948, des pactes internationaux de 1966 et
des différentes conventions importantes (conventions contre la torture,
sur le statut des réfugiés, les droits de l'enfant, de la femme,
...) C'est dire qu'au sein des normes internationales de protection des
activistes, il ya comme une propension pour les textes dits communs, à
avoir la priorité, à être plus vus, plus connus que les
instruments spécifiques et donc, à être plus
sollicités qu'eux. L'on ne saurait manquer à la lecture de ce
phénomène, d'être interpellé par la
nécessité de le comprendre.
A ce niveau, l'on pourrait très bien présenter
à titre explicatif, le facteur local lié à la
méconnaissance généralisée des règles de
droit par les populations justiciables. Le faire, c'est rappeler en fait qu'
« au Cameroun comme dans d'autres pays, le problème de
l'ineffectivité du droit et de l'indisponibilité des textes est
très criard. »239(*) Mais néanmoins, est-ce que le défaut
de publication de la loi représenterait un meilleur argument ?
L'admettre ne reviendrait-il pas à acquiescer de ce que la
réalité serait biaisée, que la promotion
défectueuse du droit ne couvrirait que certaines catégories de
normes au profit d'autres ? Les fondements véritables du
déficit d'attractivité des normes spécifiques de
protection des défenseurs relativement aux instruments communs, sont
ailleurs. Ils peuvent trouver de la consistance notamment, dans le
défaut de coercition qui les caractérise.
2) Le caractère non
contraignant des textes
Les normes internationales consacrées à la
protection de l'activité spécifique des défenseurs des
droits de l'Homme présentent la caractéristique principale
d'être des règles dépourvues de force coercitive. Ces
règles relèvent de la catégorie hétéroclite
dite des normes internationales de soft law240(*). Les normes de soft
law ou normes souples, par opposition aux règles dures ou dites de
hard law, sont toutes celles qui échappent aux
catégories traditionnellement reconnues par la théorie
positiviste des sources du droit internationales241(*). La norme souple, distincte
de la règle dure qui elle peut être d'origine conventionnelle ou
coutumière, est celle qui est par définition non contraignante
et, dont la violation n'appelle pas à l'exercice d'une
sanction.242(*) C'est
une norme énoncée dans un instrument n'ayant pas vocation
à créer à l'attention de ses destinataires, des
obligations juridiques.
Les bases théoriques ainsi clarifiées pour les
nécessaires besoins méthodologiques, il faut faire remarquer que
les instruments internationaux destinés à la protection
spécifique des militants des droits de l'Homme applicables au Cameroun,
s'inscrivent dans un cadre presqu'exclusivement déclarationnel. L'on se
réfère là aux cas explicites de la déclaration du 9
décembre 1998 et des différentes déclarations prises dans
le contexte régional africain. Plus loin encore, les différentes
résolutions prises par la CADH tombent également sous le coup de
la soft law. Ceci en raison du fait que la Commission constitue une
quasi-juridiction, étant donné qu'elle n'a pas statutairement la
compétence d'émettre des décisions et des actes, pourvus
d'une force contraignante. Cela étant, il est de rigueur d'exposer
logiquement, que ces textes ne lient pas les Etats. Ils ne les obligent en
aucune façon à mettre en oeuvre et réaliser les droits
qu'ils consacrent à l'intérieur de leurs dispositions, à
l'attention des défenseurs. L'on peut donc ainsi appréhender
d'une certaine façon, le fait latent et sous-entendu que ces
règles ne suscitent pas chez les militants un intérêt
significatif. Il leur est difficile d'exercer au près d'eux une
attraction sensible rivalisant avec celle mobilisée par les normes du
droit international commun des droits de l'Homme. Ceci principalement en raison
de ce que premièrement, ces dernières rentrent sous le plein axe
des obligations juridiques internationales contractées par l'Etat,
signataire des conventions les créant. Et encore à cause du fait
que ces règles sont assorties par le moyen de ces liens, de la puissance
coercitive, astreignant l'Etat à leur mise en oeuvre.
Mieux encore, le caractère non coercitif de ces normes
pose encore un problème. Ceci essentiellement en raison du fait que la
mise en oeuvre de leurs dispositions soit laissée à la
discrétion de l'Etat, ce dernier peut ne pas réaliser ou le faire
selon son appréciation, à sa convenance, ou même suivant
les intérêts qu'il défend. Cette trop grande liberté
ou marge de manoeuvre accordée à l'Etat, a conduit dans le
contexte camerounais, à la production d'un droit interne peu soucieux de
l'esprit exprimé par les normes protectrices des défenseurs.
B/ Un cadre juridique
interne inadéquat
Le cadre juridique interne camerounais pose des
difficultés à la mise en oeuvre effective et complète du
droit international relatif à la protection des défenseurs des
droits de l'Homme. Ceci en raison de deux facteurs. Le premier tient au silence
du législateur au sujet de la question du militant des droits humains
(1). Le second est relatif à la faible marge de manoeuvre
accordée aux acteurs privés désirant oeuvrer pour la
promotion des droits fondamentaux (2).
1) L'inexistence d'un
statut juridique clair reconnu au défenseur des droits de
l'Homme
Le droit interne camerounais relativement à la question
de la protection des défenseurs des droits de l'Homme se
caractérise par un vide juridique pesant. En effet, le
législateur camerounais est demeuré silencieux à ce sujet.
La législation positive -toute aussi éparse qu'elle puisse
être- dans toute son étendue, ne fait aucunement mention et ne
reconnaît pas la notion de défenseur des droits de l'Homme. Les
professionnels des droits de l'Homme au Cameroun constituent une classe
relevant de la réalité purement factuelle et non juridique. Une
catégorie à part entière, inconnue encore du
législateur, en marge et au dépourvu de la consistance que seul
ce dernier pourrait lui donner. Dans les faits, les défenseurs des
droits de l'Homme n'ont pas plus de droits ni de privilèges que les
autres membres du tissu social. Leur protection aux termes du droit, repose sur
les normes existantes, les prérogatives reconnues et consacrées
à la protection de la totalité et de l'intégralité
des citoyens. L'on pourrait y lire de manière latente, la
timidité voire même la réticence de l'autorité,
à véritablement consacrer juridiquement, la défense des
droits de l'Homme. C'est ce que du moins, dénote l'un des surveillants
locaux des droits de l'Homme interrogés, lorsqu'il expose l'analyse
éclairée, qu'il fait de la question. Selon lui :
« Les défenseurs des droits de l'Homme au Cameroun ne
peuvent s'appuyer que sur les droits civils et politiques consacrés
à tous les citoyens. Pour le gouvernement, dont la rhétorique est
à la question de l'ordre public, il n'est pas judicieux d'accorder plus
de droits à certains. C'est la raison pour laquelle il ne veut ni
reconnaître un statut, ni élaborer un cadre légal
conférant une immunité aux défenseurs, car ce serait la
porte ouverte à des désordres et à la rupture de la
cohésion sociale. On ne devrait pas protéger
spécifiquement les défenseurs des droits de l'Homme parce qu'ils
n'ont pas plus de droits que les autres citoyens. Les défenseurs ne
peuvent donc que se servir des éléments légaux existant
déjà pour travailler, parce que le gouvernement refuse de
légiférer sur la question de leur protection
spécifique. »243(*)
Cette analyse peut encore se comprendre au travers de la
position adoptée par l'Etat camerounais, relativement aux
recommandations qui lui été effectuées, au sujet des
questions afférant aux défenseurs des droits de l'Homme, dans le
cadre du second cycle de l'examen périodique universel.244(*) Les autorités ont
rejeté systématiquement toutes les recommandations
élaborées dans le sens de la mise en oeuvre d'opérations
visant à informer sur les menaces dont les activistes sont l'objet,
à mettre en place la protection active, adéquate et
immédiate des défenseurs ou encore, à traduire les
coupables de violations commises à l'endroit des droits de ceux-ci.
L'ignorance par le législateur interne du défenseur des droits de
l'Homme est une entrave à la réalisation des prérogatives
accordées par les normes internationales à ce dernier, dans la
mesure où elle les place dans le cadre du non-droit. C'est dire que la
position adoptée par l'autorité légale-rationnelle
camerounaise consistant à nier la nécessité d'encadrer
spécifiquement l'activité des militants des droits de l'Homme,
est une épine considérable à la mise en oeuvre du droit
international de la protection des défenseurs. Le droit camerounais
obstrue l'effectivité de la concrétisation des droits des
défenseurs, notamment à cause du rôle important
réservé aux autorités, dans la conduite par les
défenseurs, de leurs activités.
2) Un aménagement
strict de la question des libertés publiques consacrant la
suprématie de l'autorité
Les justiciables doivent exercer les droits-libertés
qui leur sont reconnus, dans les conditions prévues par la loi. C'est
là, un principe coutumier tacite, consacré dans l'essentiel des
instruments internationaux du droit international des droits de l'Homme. L'Etat
a la possibilité ou même, le pouvoir d'apporter des restrictions
aux droits civils et politiques de ses citoyens lorsqu'il en juge la
nécessité, notamment lorsque sont engagés
l'intérêt de la sécurité nationale, la
sûreté d'autrui, de la santé, de la morale publique ou des
droits et libertés des personnes.245(*) C'est l'Etat qui organise par ses pouvoirs
légaux-rationnels, l'exercice par les individus des droits qui leur sont
consacrés. Pourtant, dans la pratique l'accroissement du pouvoir
discrétionnaire de l'administration notamment, en ce qui concerne la
légifération sur les matières relatives aux droits de
l'Homme en général et des défenseurs en particulier, ne va
pas sans travers. Dans la pratique en effet, on constate à une ampleur
généralisée, une utilisation détournée
des cadres législatifs, à l'encontre des militants des droits
humains246(*). Fort
à propos, un avis éclairé fait part de ce que :
« si la notion d'Etat de droit implique la protection des droits
par la loi, force est de constater que cette situation est souvent loin de se
vérifier dans la réalité. Ceux qui détiennent le
pouvoir utilisent les lois pour faire obstacle aux actions des
défenseurs des droits de l'Homme et les contrôler. La
législation limite le champ d'application des actions des
défenseurs et ne garantit aucune protection en cas de besoin. Pire, son
usage est détourné pour en faire un instrument activement
dirigé contre les défenseurs. »247(*)
Dans cet ordre d'idées, la responsabilité
accordée au législateur interne quant à l'organisation du
cadre d'exercice adéquat pour la jouissance par tout un chacun de ses
droits et libertés consacrés internationalement est à
l'origine d'effets pervers dans l'ordre camerounais. La solution adoptée
par la loi confère à l'administration publique un large pouvoir
sur la conduite par les défenseurs de leurs activités. Les
militants sont soumis à la décision et à l'approbation de
l'autorité à tous les temps forts de l'action qu'ils souhaitent
mener. La création de l'association ou encore même la
réalisation d'une manifestation publique illustrent à souhait
cette dépendance des activistes du joug des autorités.
Ceci ne peut constituer un élément facilitant la
jouissance sereine par ces derniers de leur activité, notamment quand on
sait que leur action vise à effectuer un droit de regard sur l'oeuvre
gouvernementale, relativement à la gestion qu'il fait des droits et
libertés des populations. Bien évidemment, cela pose des
difficultés quand il faut en quelque sorte, que les activistes aient
l'avis de l'Etat, pour pouvoir renseigner sur son action et
éventuellement, dénoncer les travers de cette dernière.
Interdictions massives de manifestations, lenteurs et lourdeurs administratives
dans le processus de création d'associations de droits de l'Homme,
irruptions parfois violentes des forces de l'ordre lors de la conduite par les
défenseurs d'activités publiques, illustrent à souhait le
caractère peu opportun et propice de la législation en vigueur.
Il semble intéressant de faire intervenir en guise d'argument ici,
l'analyse que fait un observateur de la société civile,
relativement au cas particulier des droits de réunion et de
manifestation publique. D'après lui : « de par
les textes, la liberté de réunion et le droit de manifester sont
un acquis au Cameroun. Ces textes sont assez favorables à ces actions.
Seulement dans la pratique, la chose est toute autre. Les actions qui
bénéficient automatiquement de l'approbation des autorités
sont celles en faveur du régime. Quand il s'agit d'une réunion ou
d'une manifestation dont l'objet est la revendication du respect d'un droit par
le gouvernement, certaines autorités font tout ce qui est à leur
pouvoir pour refuser. Elles utilisent diverses stratégies pou y
parvenir. Ces stratégies vont parfois jusqu'au refus de
réceptionner une demande d'autorisation de manifestation publique ou une
déclaration de réunion. »248(*) Cette toute-puissance
de l'administration sur l'action des défenseurs, est d'autant plus un
inconvénient qu'il s'agit là d'un contexte social au sein duquel,
les droits de l'Homme n'ont pas encore épousé le coeur des
moeurs.
B. Paragraphe 2 : Les
pesanteurs sociales et culturelles
Les obstacles socio-culturels tiennent d'une part aux
autorités (A) et d'un autre côté à la population
(B).
A/ Le climat
d'adversité existant entre les défenseurs et les
autorités
Les droits de l'Homme constituent un vent culturel encore
nouveau, que les préceptes et mentalités locales traditionnelles
ne se sont pas encore appropriés (1). Relativement à cet
état des choses, les différents acteurs, à savoir
notamment les autorités et les défenseurs, peinent à
rentrer dans leurs rôles et à développer les relations
escomptées (2).
1) La conception
culturelle traditionnelle totalitaire de l'autorité
Les sociétés traditionnelles africaines se
caractérisaient par la hiérarchisation du pouvoir.
Indépendamment de la typologie attribuée à la
société en question, eusse t-elle été à
hiérarchie mouvante, diffuse ou pyramidale249(*), la gestion du pouvoir et de
l'autorité, demeurait au coeur de redistribution des liens sociaux. Au
sein de cette configuration, le détenteur de l'autorité,
l'élu, occupait une place privilégiée et importante. Ceci
non seulement, en raison de la nature transcendante que lui conférait ce
pouvoir mais également, de sa mission. Me Jean Claude KATENDE apporte
plus d'éclaircissements au sujet de cette importance intemporelle de la
dévolution du pouvoir dans la structuration de la société
africaine. D'après lui, « de la société
africaine traditionnelle à la société moderne, le pouvoir
politique a toujours été considéré comme un
instrument que la tradition ou le peuple donne à un homme, une femme ou
un groupe d'hommes pour qu'il contribue au bien être de toute sa
communauté. »250(*) Cependant à la base dans cette
société traditionnelle africaine à dynamique collective,
l'intérêt supérieur qui motivait la situation favorable du
chef, c'était au sens large, la protection de son village ou de son
peuple. Aussi, non seulement les multiples privilèges et pouvoirs
accordés au chef l'étaient afin qu'il puisse réussir sa
mission visant à pérenniser la communauté mais, les
critères personnels d'appréciation de son action engageaient le
bien être de l'ensemble du tissu social, et non l'auto-promotion
personnelle.
C'est avec l'héritage laissé par la
colonisation, que va que ces dynamiques traditionnelles vont progressivement se
déformer et se pervertir. La dynamique collective cédant le pas
à la lutte pour la promotion personnelle sous le coup de la
modernisation, ceci couplé à une image verticale de la toute
puissante et brutale autorité désormais gravée à
jamais dans le subconscient de l'ensemble des sociétés africaines
par le colon, achèvent de détruire le concept coutumier de
l'autorité. Désormais le pouvoir est l'affaire d'un homme, autour
duquel se bâtit une administration forte et violente, à l'image du
colon d'antan. Vincent FOUCHER explique : « la
personnalisation du pouvoir tient sans doute autant, voire plus, aux
trajectoires historiques coloniales et postcoloniales des pays africains
qu'à une « culture politique africaine »
antérieure et initiale. A partir des années 1990, de nombreux
chercheurs ont souligné, avec des accents différents,
l'enracinement du mode de gouvernement postcolonial dans l'expérience
coloniale : la logique du « commandement », celle du
« despotisme décentralisé », la
militarisation, l'usage de la punition, l'absence de séparation des
pouvoirs, le bricolage juridique, l'existence de niveaux de citoyenneté
variables, mais aussi le rôle central d'un nombre restreint
d'intermédiaires [...] , tous ces traits décisifs de la
personnalisation du pouvoir en Afrique ont marqué les régimes
coloniaux avant d'être ceux des régimes postcoloniaux. Les Etats
postcoloniaux ont prolongé cette trajectoire, suivant des modèles
de développement autoritaires planifiés et alimentant le culte
des héros libérateurs. »251(*) Au sein de cette
déformation de l'autorité, cette dernière s'insère
désormais dans une logique d'accumulation de puissance, cruciale pour la
pérennisation de sa position, au détriment de
l'intérêt collectif et des prérogatives individuelles des
populations. Me KATENDE expose fort à propos, que la conséquence
et la résultante logique de cette dynamique autoritaire de gestion du
pouvoir, est la violation massive des droits de l'Homme. Il décrit
que : « la détermination de garder le pouvoir en
violation de la constitution et contre la volonté populaire aboutit
à court ou moyen terme à la violation des droits fondamentaux et
des libertés individuelles. Les hommes qui modifient la constitution ou
torpillent le processus électoral dans leur pays pour se maintenir au
pouvoir finissent par prendre des mesures (atteintes à la liberté
d'expression, de manifestation pacifique...) ou à poser des actes qui
violent les droits fondamentaux (arrestation et détention arbitraires
des opposants ou des membres de la société civile qui les
critiquent, assassinats politiques...) de leurs citoyens et ils s'exposent
à des poursuites judiciaires au plan national ou international.
[...] »252(*) Dans un tel contexte, le dialogue entre les
autorités et les défenseurs des droits de l'Homme part sur des
bases polluées et en lieu et place de la collaboration le ton est, dit
de manière euphémique, plus à l'adversité et la
méfiance.
2) L'hostilité des
pouvoirs publics relativement à l'action des
défenseurs
Il est difficile aux défenseurs de mener sereinement
à bien leurs activités, dans le contexte camerounais, en raison
essentiellement de l'hostilité que les autorités publiques
démontre de façon générale à leur
égard. Les militants locaux des droits de l'Homme se sentent incompris
par ces derniers et, perçus comme des adversaires. Pour l'un d'eux,
« si quelqu'un se lève au Cameroun et vous dit qu'il ya
une mesure que l'Etat a prise pour la protection des défenseurs, je suis
prêt à parier ma tête. Bien au contraire, la chasse est
réservée aux défenseurs. L'Etat parle des droits de
l'Homme mais en aucune façon des défenseurs. D'où la
prégnance des violations faites aux droits des activistes. Ceux-ci sont
perçus comme des adversaires désignés. La collaboration
avec les autorités a de la peine et beaucoup de peine même
d'ailleurs. »253(*) En effet, leur confiance en les autorités est
de plus émoussée que non seulement ces dernières, ne les
soutiennent pas dans leur action, mais encore, ce sont elles qui se posent en
face comme des obstacles déterminés à l'entraver. Comme le
précise un militant local des droits de l'Homme, « en
général, ceux qui s'opposent en termes de droits de l'Homme
frontalement à l'administration, font face à des menaces
physiques. »254(*) Les défenseurs font
régulièrement et systématiquement l'objet de menaces et de
violences de toutes natures, orchestrées par aussi bien par les
autorités administratives, que par les policières. Me KATENDE,
établissant un constat d'ensemble, appuie relativement à cela
que : « dans beaucoup de pays africains, les forces de
sécurité (Forces armées et la police) agissent comme des
instruments de répression de toute voix discordante (opposition,
syndicat, société civile...) au lieu d'agir comme des forces de
promotion et de défense des droits fondamentaux et des libertés
individuelles (Rwanda, Gabon, Togo, Burundi, Ethiopie, Cameroun, Lybie, R. D.
Congo, Burkina Faso...). »255(*)
A ce niveau néanmoins, le propos relativement à
l'hostilité des agents publics est de l'avis manifesté par
certains acteurs locaux des droits de l'Homme a biaiser. Selon leur avis
généralisé, en dépit du fait qu'il existe des
autorités ne percevant pas d'un bon oeil l'action des défenseurs,
d'autres par contre sont plus sensibles aux questions droitdel'hommistes. De ce
fait, il y a coexistence au sein du système, d'une part de
personnalités hostiles et farouches à l'essor de la
défense des droits de l'Homme et d'un autre côté,
d'éléments ouverts à la collaboration et, contribuant
spontanément à la conduite par les professionnels des droits
humains, de leurs activités. Dès lors, le problème
posé par l'attitude pro-droits de l'Homme ou anti-droits de l'Homme de
l'autorité a plus de poids d'autant qu'il tire sa consistance de
l'inadéquation du cadre juridique interne, relatif à la
protection des défenseurs. A ce niveau encore, il semble plus
qu'opportun d'exposer la conception qu'à un travailleur local des droits
de l'Homme de la question. D'après lui : « la
collaboration des autorités avec les défenseurs des droits de
l'Homme ne repose sur aucune obligation légale, elle est purement
subjective. De ce fait, toutes les autorités ne collaboreront pas avec
les organisations de la société civile de la même
façon et n'auront pas les mêmes dispositions. Parce qu'il n'ya pas
de cadre légal et institutionnel obligeant les autorités à
le faire, leur attitude varie en fonction de leurs aspirations. La
collaboration dépend des dispositions des uns et des autres : avec
ceux qui sont ouverts et prédisposés à la protection des
droits de l'Homme elle est bonne mais, avec ceux qui ont un réflexe
autoritaire et répressif, elle est impossible. C'est mi-figue, mi-raisin
et cela dépend du profil psychologique et du background culturel de
l'autorité en question. Il ya d'une part, des personnes ayant une
conception moderne, démocratique et compréhensive de
l'autorité. Celles-là sont vraiment ouvertes, elles
coopèrent avec nous et nous fournissent tout ce dont on a besoin. Et il
ya également d'autre part, des autorités plus répressives
et rugueuses. Elles s'opposent à l'action des organisations de la
société civile et vont même jusqu'à en opprimer les
acteurs. Le mieux serait d'avoir un cadre juridique qui oblige tout le monde
à coopérer. »256(*) Seule une législation forte et
renseignée au sujet de l'activité locale de défense des
droits de l'Homme, parviendrait à fédérer les tendances
partagées par les autorités, pour les mettre au service de
l'action la plus forte des militants. Néanmoins cette mesure ne
suffirait pas à elle seule, ceci d'autant plus que l'oeuvre des
défenseurs, ne trouve pas dans la population, l'écho qu'elle
devrait avoir.
B/ L'ignorance
généralisée des populations vis-à-vis des questions
de droits de l'Homme
L'action des défenseurs des droits de l'Homme se heurte
à la faible imprégnation des populations, au sujet des
thématiques relatives aux droits fondamentaux. L'évolution
poussive de la culture droitdel'hommiste des populations s'explique par
l'état profondément délétère du contexte
socio-économique (1). Elle fonde l'incompréhension ambiante et la
mauvaise réception faite par le public de l'oeuvre des militants (2).
1) Un contexte
socio-économique imperméable à l'essor d'une culture des
droits de l'Homme
Le contexte socio-économique camerounais n'aide pas
à l'essor véritable des droits de l'Homme. Le Cameroun est un
pays encore an quête de développement et, la majorité de sa
population n'a pas encore atteint un niveau de vie adéquat et
satisfaisant. Les camerounais pour la plupart, ont encore maille à
partir avec les difficultés existentielles et, ne manifestent pas un
intérêt majeur et conséquent pour les réflexions
d'ordre juridiques. Le droit est si éloigné des populations en
quête de la satisfaction des besoins et du bien être
matériels. Il apparaît comme une denrée dont le plus grand
nombre se décharge volontiers, à l'attention d'une caste
privilégiée de spécialistes. Au sujet de l'apathie des
populations relativement au droit et aux droits de l'Homme, un professionnel
local des droits de l'Homme émet l'avis suivant très
instructeur : « le contexte social camerounais relativement
à la promotion du droit se caractérise par l'ignorance
généralisée de la population. Au Cameroun, les gens vivent
« au jour le jour » c'est-à-dire, qu'ils vivent au
quotidien et ne se préoccupent principalement, que de leur survie.
Parler des droits de l'Homme à ce moment, apparaît comme un luxe
réservé à la proportion privilégiée de ceux
qui ont bien mangé. »257(*)
Cette situation est bien évidemment compromettante pour
l'action harmonieuse et efficace des défenseurs en ce sens, que lui fait
défaut l'appui dont elle a besoin et qu'elle ne pourrait trouver que
dans l'énergie et le support du public. Dès lors, il est
d'emblée difficile pour les militants d'oeuvrer à la protection
des droits et prérogatives de personnes qui les ignorent elles
mêmes et n'en ont pas conscience. Mais encore, le mouvement de
défense des droits de l'Homme ne peut dans ce contexte, prendre toute sa
consistance étant donné que l'âme même de la
population ne se l'est pas appropriée. Prêcher les droits de
l'Homme pour les activistes prend d'autant plus encore facilement, les airs
d'une hérésie dans un contexte politique et culturel favorable
à la multiplication des exactions à leur égard. Ceci en
vient à exposer aux représailles d'une population, n'ayant pas
les outils pour lui permettre de saisir les enjeux et l'importance du mouvement
pour elle.
2) La
méconnaissance du rôle des défenseurs par les
communautés
La conséquence de l'ignorance par les populations des
thématiques droitdel'hommistes, se caractérise par la
méconnaissance par celles-ci de la nature, du rôle et de
l'importance des défenseurs des droits de l'Homme. Comment serait-il
possible au public inconscient même de l'existence de ses droits,
d'accueillir et de savoir se servir de l'action du défenseur ?
Toutefois, cette ignorance participe encore, de la précarité de
la condition du défenseur des droits de l'Homme. Elaguer dessus
prendrait les airs encore une fois, eu égard au contexte camerounais,
d'une réflexion sur la thématique du prédécesseur
entre l'oeuf et la poule. Ceci en ces termes que s'il est vrai qu'un cadre
juridique interne précisant un statut légal fait de
privilèges et de pouvoirs aux défenseurs, leur assurerait la
reconnaissance et le soutien des populations, ces derniers de fait pourrait
tout aussi bien amener dans l'autre sens, le législateur à
organiser l'exercice de la défense des droits de l'Homme. Toutefois, il
est plus pertinent et intéressant ici d'analyser essentiellement comment
l'ignorance des populations et leur méconnaissance des
défenseurs, contribue à dégrader leur image et, nuire
à leur action.
Bien dans les faits, il faut faire remarquer qu'à la
base, plusieurs thématiques soutenues par les droits de l'Homme entrent
en droite ligne en contradiction et en conflit, avec des positions culturelles
traditionnelles locales établies. Dès lors, le fait pour les
défenseurs de s'engager dans ces domaines les amène à
entrer en conflit avec les avis de la population encore nourrie pour
l'essentiel, aux us et aux approches coutumières. Cette confrontation
expose les défenseurs, aux représailles des proportions de la
population qui se verront lésées par leur action. La
dangerosité de l'entreprise de défense en est plus
aiguisée et expose ses adeptes à d'autant plus de risques, que
l'ensemble du grand public, ne partage pas uniformément les
pensées droitdel'hommistes et, ne les apprécie pas souvent comme
les seuls intermédiaire qu'au fond, ils sont. En guise d'exemples
concrets, il faut évoquer le cas des défenseurs oeuvrant sur les
thématiques relatives à des catégories sociales auxquelles
les traditions réservaient déjà un traitement
précis. Ceux-ci s'engagent souvent sinon toujours, dans des dynamiques
venant révolutionner et changer l'approche coutumière
établie et communément partagée socialement. C'est le cas
des militants des droits de la femme ou encore des personnes non
hétérosexuelles. Les défenseurs militants pour la
reconnaissance sociale des droits de la femme, font régulièrement
l'objet de menaces orchestrées généralement, par les
époux frustrés, organisant des représailles à
l'endroit des « personnes participant à
l'émancipation de leurs femmes et venant leur monter la
tête. »258(*) Le bilan est encore plus lourd pour ce qui est des
défenseurs des LGBTI259(*). La non hétérosexualité
étant encore perçue socialement comme une abomination et
violemment réprimée260(*), les militants pour la dépénalisation
et son expression libre déchaînent les passions des foules. Un
défenseur des droits des personnes non hétérosexuelles
mentionne à ce sujet que « c'est énorme de parler
des LGBTI au Cameroun, c'est dur. Défendre les LGBTI c'est s'exposer
à la réticence des populations qui condamnent l'orientation
sexuelle non-hétéro. Nous par exemple, faisons l'objet de menaces
tous les jours. Elles peuvent consister en des appels ou correspondances
anonymes ou même physiques. Elles proviennent de tous horizons : ce
peut être le voisinage, les familles des LGBTI ou les autorités
qui nous accusent de faire l'apologie de l'homosexualité. Nous avons
même été contraints à cause du flot de violences, de
fermer la structure un moment. Et encore, c'est un combat qu'il faut mener par
ses seules moyens, parce que l'Etat ne vous accordera aucune subvention,
étant donné que pour lui, vous travaillez sur une cible
hors-la-loi. »261(*) Un exemple fort illustrateur de ces propos pourrait
être encore pour ne citer que celui-là, l'assassinat violent du
directeur exécutif de la Cameroonian Fondation for AIDS (CAMFAIDS), Mr
Eric OHENA LEMBEMBE, sauvagement agressé et tué en juillet
2013.262(*) Ce meurtre
n'a non seulement pas été condamné publiquement par le
gouvernement mais aussi, les enquêtes de police ouvertes n'ont pas
été concluantes.263(*) La mise en oeuvre des normes organisant la
protection des défenseurs au Cameroun, est donc considérablement
entravée par les pesanteurs liées au contexte socio-juridique
mais encore, elle l'est également par des écueils liées
aux institutions garantes de son effectivité.
XVI. SECTION 2 : LES LIMITES
INSTITUTIONNELLES
En plus des limites d'ordres juridiques, l'effectivité
de la mise en oeuvre du droit international des défenseurs des droits de
l'Homme au Cameroun se heurte à des entraves de nature institutionnelle.
En fait, si des manquements sont à recenser au niveau de la loi interne,
des obstacles peuvent également être relevés au niveau des
mécanismes chargés d'assurer son implémentation et sa
réalisation. Le dispositif institutionnel local chargé d'assurer
la protection des militants des droits de l'Homme, fait face dans la pratique,
à des difficultés sérieuses mettant à mal sa
propension à réaliser efficacement sa mission (paragraphe 1).
Face à cette faiblesse du système interne, les défenseurs
abandonnés à eux-mêmes, recherchent beaucoup plus le
soutien des acteurs internationaux externes (paragraphe 2).
A. Paragraphe 1 : Une
protection institutionnelle faible à tous les niveaux
L'on étudiera tour à tour les limitations
liées aux institutions juridictionnelles (A) et, celles relatives aux
non juridictionnelles (B).
A/ Les entraves
liées aux institutions juridictionnelles
D'emblée, il faut signaler ici que l'on ne se
prévaut pas, d'avoir la prétention de réaliser une
étude exhaustive de l'intégralité des obstacles
empêchant la réalisation efficace du droit à la justice des
citoyens en général et, des défenseurs des droits de
l'Homme en particulier. Il s'agit plutôt à ce niveau, de soulever
et de développer sur une préoccupation fondamentale permanente,
qui semble désormais rattachée localement, à l'exercice du
ministère de la justice. Il s'agit de la question rémanente de
l'indépendance du juge camerounais (1). En effet, « les
obstacles à l'oeuvre du juge en matière de protection des droits
de l'Homme, s'analysent principalement du point de vue du statut
contrasté qui est le sien dans l'ordre juridique interne camerounais et
y soulève donc, le problème de son
indépendance. »264(*) Dès lors, il faudra ensuite,
considérer comment, sous le prisme de cette réalité, le
juge de protecteur des défenseurs, peut se muer en un outil de choix
venant renforcer les mécanismes d'oppression de ces derniers (2).
1) De l'apparente
indépendance du juge camerounais
La séparation des pouvoirs est un principe dont le but
est de prévenir les abus du pouvoir en confiant l'exercice de celui-ci
à plusieurs organes, chargés chacun d'une fonction
différente et à mesure de se faire mutuellement
contrepoids.265(*)Cette
théorie a été formulée par MONTESQUIEU dans son
ouvrage célèbre De l'esprit des lois, in extenso en ces
termes : « il ya dans chaque Etat trois sortes de
pouvoirs : la puissance législative, la puissance exécutrice
des choses qui dépendent du droit des gens, et la puissance
exécutrice de celles qui dépendent du droit civil. Par la
première, le prince ou le magistrat fait des lois pour un temps ou pour
toujours, et corrige ou abroge celles qui sont faites. Par la seconde, il fait
la paix ou la guerre, envoie ou reçoit des ambassades, établit la
sûreté, prévient les invasions. Par la troisième, il
punit les crimes, ou juge les différends des particuliers. On appellera
cette dernière la puissance de juger, et l'autre simplement la puissance
exécutrice de l'Etat. [...] Tout serait perdu si le même homme, ou
le même corps des principaux, ou des nobles, ou du peuple,
exerçaient ces trois pouvoirs : celui de faire des lois, celui
d'exécuter les résolutions publiques, et celui de juger les
crimes ou les différends des particuliers. »266(*) Si depuis son
indépendance le Cameroun a adhéré à ce principe, ce
n'est qu'en 1996 avec le texte constitutionnel du 18 janvier, notamment par
ses articles 37 à 42, que sera affirmé un véritable
pouvoir judiciaire. L'indépendance du juge est donc dans l'ordre
juridique interne camerounais, un principe constitutionnel. En effet, à
l'article 37 alinéa 2 de la loi constitutionnelle n° 96/06, le
constituant stipule très explicitement que : « le
pouvoir judiciaire est [...] indépendant du pouvoir exécutif et
du pouvoir législatif. Les magistrats du siège ne relèvent
dans leurs fonctions juridictionnelles que de la loi et de leur
conscience. » Ce principe constitutionnel relatif à
l'indépendance du juge camerounais est par ailleurs repris textuellement
par l'article 5 du décret n° 95/048 du 8 mars 1995 portant statut
de la magistrature. Une telle consécration juridique de
l'indépendance du juge devrait représenter plus qu'un
élément positif, une opportunité certaine, d'autant plus
que cette dernière constitue une conditionnalité importante de
l'action efficace de ce dernier, comme protecteur des droits fondamentaux. Une
analyse superficielle et innocente devrait conduire à louer les efforts
consentis par le législateur camerounais, pour la promotion d'une
justice sereine et influente mais la réalité est toute autre et
invite à plus de prudence.
L'indépendance du juge de l'avis d'une part de la
doctrine, impose que le juge ait nécessairement une image sociale
caractérisée par la neutralité, l'objectivité,
l'impartialité, la loyauté, l'honnêteté, la
dignité et l'abnégation.267(*) Elle ne saurait donc s'apprécier uniquement
à la seule lettre de sa proclamation constitutionnelle. En effet,
« l'indépendance de la justice, condition sine qua non
pour l'efficacité dans son action et sa crédibilité aux
yeux des citoyens, dépend d'une combinaison de plusieurs conditions,
c'est-à-dire de l'organisation et du fonctionnement de la justice, du
statut, des attributions et des moyens du juge. »268(*) Par ailleurs, relativement
à cette consécration constitutionnelle de l'autonomie et du
pouvoir du juge, M. Jean Calvin ABA'A OYONO fait remarquer très
lucidement que : « parler de pouvoir judiciaire n'est qu'une
technique rédactionnelle qui ne signifie pas nécessairement que
son détenteur est plus prépondérant, plus respecté,
plus craint et moins vulnérable que ne serait le détenteur de
l'autorité... »269(*) Il faut dire, à la charge de cette
réflexion prudente et peu enjouée, que l'autorité et
l'indépendance du juge camerounais, semble considérablement
lestée par l'influence qu'exerce sur lui, le pouvoir politique.
Le principal grief à l'effectivité de la
protection des défenseurs des droits de l'Homme par le juge, tient
à la dépendance institutionnelle de ce dernier, vis-à-vis
du pouvoir exécutif. Il faut remarquer de manière
générale que « les premières menaces
internes qui risquent de porter atteinte à l'indépendance du juge
sont celles qui proviendraient du statut qui organise sa carrière. Ce
statut est organisé de manière unilatérale par les textes
de loi dans les pays où la profession de juger est
institutionnalisée. Il s'agit donc d'un domaine où la
négociation entre le futur magistrat et l'administration qui fixe les
conditions de recrutement n'est pas prévue et cela n'est que pure
logique. On imagine mal qu'un magistrat (et de manière plus
générale un fonctionnaire) vienne
« discuter » des conditions d'exercice de sa fonction de
juger avec les pouvoirs publics avant d'exercer sa profession. Comme pour les
fonctionnaires, le recrutement constitue une
« réquisition », et même si celle-ci est
« consentie » (le candidat se présente au concours
en toute connaissance de cause), elle transforme les agents de l'Etat en
« agents du gouvernement ».270(*) Le contexte camerounais ne
déroge pas à cette vue d'ensemble. Malgré la proclamation
vertueuse de l'indépendance des magistrats du siège, leur
subordination au pouvoir exécutif est évidente et, s'explique par
la porosité du statut qui leur est défini. En effet,
toujours d'après la loi constitutionnelle positive en vigueur,
« le Président de la République est garant de
l'indépendance du pouvoir judiciaire. Il nomme les magistrats. Il est
assisté dans sa mission par le Conseil supérieur de la
magistrature qui donne son avis sur les propositions de nomination et sur les
sanctions disciplinaires concernant les magistrats du
siège. »271(*) Dans les faits et selon le statut légal
relatif à l'organisation de la magistrature, le Président de la
République possède un ascendant hiérarchique à part
entière, sur la totalité des corps de magistrats. En effet, il
préside au Conseil supérieur de la magistrature et a, le pouvoir
de les nommer et de prendre à leur endroit, des mesures disciplinaires,
telles la révocation ou encore l'affectation272(*). Comment comprendre cette
domination accordée au chef de l'Etat sur ses
« homologues » du judiciaire ? Cette
ambigüité ne manque pas de préoccuper Jean Calvin ABA'A
OYONO, qui y souligne « une curieuse manière d'allouer le
gardiennage de l'indépendance d'un pouvoir d'Etat à un autre
alors que les deux se valent constitutionnellement. » Il est
difficile dans tous les cas, de ne pas y voir la suprématie d'un pouvoir
sur un autre, cas de figure paradoxal et contradictoire dans un contexte de
séparation de l'autorité. Ce sont ces tâtonnements du
constituant camerounais, qui expliquent que les magistrats du siège
soient soumis à des pressions politiques, actionnées par des
pouvoirs publics désireux de museler l'appareil judiciaire au
mépris des principes constitutionnels d'indépendance.273(*) Il est logique de toutes les
façons, dans cet imbroglio, d'admettre la nature constitutionnellement
admise, du chef de l'Etat comme supérieur hiérarchique à
part entière, de la totalité des magistrats de la
République. Reconnaître cela, conduit à admettre comme
conséquent le joug lourd pesant sur le juge camerounais, tenu de se
soumettre aux exigences de l'autorité politique, dans l'exercice de sa
fonction d'administration de la justice. Il est bien difficile de parler d'une
indépendance du juge, quand celui-ci vit sous la menace
perpétuelle de la sanction de l'institution exécutive, au bon
vouloir de laquelle il est subordonné et dépend. Dès lors,
l'interprétation de M. Achille MBEMBE prend tout son sens, quand il
affirme que : « la peur du juge camerounais s'explique comme
celle du justiciable, par une société camerounaise nourrie depuis
des lustres de la sève de l'autocratie, de la répression et de
l'asservissement de l'homme»274(*) Il s'agit là d'une peur significative,
illustrant à souhait l'argument de la réalité d'un pouvoir
judiciaire de seconde zone, sans véritable assise institutionnelle.
Mieux encore, une fois sortis du cadre expressément
démarqué par le constituant de 1996275(*), le constat à faire
est le même notamment pour ce qui est du juge administratif et des
magistrats du parquet. Relativement au cas exprès du juge administratif,
le doyen François CHEVALLIER fait remarquer que repose
déjà sur lui à la base une présomption de
partialité en faveur de l'administration. C'est ce qui ressort notamment
de la pensée suivante : « les justiciables
s'expliquent mal que l'existence de cet ordre de juridiction spécial
à l'administration soit totalement étrangère à
toute idée de privilège »276(*) Dès lors, l'on
comprendrait mieux sous cette optique l'étrange et presque suspicieuse
austérité caractérisant la position adoptée par le
juge administratif camerounais, relativement à l'organisation de la
question de recours gracieux préalable.277(*)
D'autre part, les magistrats du parquet et assimilés
quant à eux, sont subordonnés au Ministre de la justice garde des
sceaux et, relèvent administrativement de son autorité.278(*) En dépit de ce que
stipule l'adage suivant lequel « ils ont la plume serve mais la
parole libre », cette relative marge de manoeuvre reconnue qui
leur est reconnue relativement à leur conduite des débats,
s'exerce suivant des modalités assez strictes. Selon ce qui ressort de
l'article 3 du décret de 1995 précité, leur liberté
de parole ne s'exerce qu'à l'audience, lorsque des instructions leur ont
été données, uniquement à condition qu'ils aient au
préalable et en temps utile, informé leur chef
hiérarchique direct de leur intention de s'écarter oralement des
réquisitions écrites déposées conformément
aux instructions reçues. Toutefois, dans la pratique l'on relève
que les magistrats du parquet ne s'écartent presque jamais des
informations reçues. Le pouvoir hiérarchique sur les magistrats
du parquet s'exerce très régulièrement et très
intensément, depuis la mise en oeuvre des poursuites jusqu'au suivi de
l'exécution des peines et décisions en matière non
répressive.279(*)
Lorsqu'ils sont en détachement, les magistrats sont
hiérarchiquement subordonnés à l'autorité
auprès de laquelle ils sont détachés. Quoique, quelque
soit l'autorité sous les ordres de laquelle ils puissent se trouver,
pour ce qui est de leur avancement ou de la procédure disciplinaire, ils
relèvent inconditionnellement de l'autorité du Ministre de la
justice.280(*) A
côté de l'omni présence de l'exécutif, le
ministère du juge en matière de protection des droits
fondamentaux se heurte à la récurrence d'influences de nature
sociale. Dans un tel contexte, le magistrat loin de l'étiquette de
protecteur des libertés que son image intrinsèque renvoie, peut
devenir une menace pour l'exercice de ces dernières, notamment dans le
cas précis des militants des droits de l'Homme.
2) Une
réalité paradoxale : le juge oppresseur des
défenseurs des droits de l'Homme
Comme le fait remarquer Jean Paul PASSERON, « en
définitive, la justice en Afrique noire reste et restera
marquée par le régime d'unité de pouvoir qui confie le
rôle essentiel au chef de l'Etat, érigé en véritable
guide de la nation animant un parti unique ou dominant, majoritaire à
l'Assemblée et pouvant éliminer sans rencontrer d'obstacles toute
opposition susceptible de nuire à la cohésion nationale, au
développement du pays »281(*) Dans un tel environnement, les conditions ne sont
pas propices à une action épanouie et efficace du juge, en tant
que garant de la légalité et, protecteur des droits individuels.
Bien au contraire, est bien plus envisageable, la perspective d'un juge livide,
complètement acquis à la domination et à la promotion des
intérêts des autorités politiques et gouvernementales. Ce
cas de figure relativement à la mise en oeuvre de la protection des
défenseurs des droits de l'Homme, n'est bien évidemment pas sans
dangers majeurs. Ceci quand on sait notamment que dans le contexte des pays
à faible culture démocratique, les défenseurs des droits
de l'Homme se posent très souvent, plus comme des adversaires
ouvertement déclarés, que des partenaires de
l'Etat.282(*) Un
juge aux ordres de l'exécutif représente dès lors à
coup sûr, une menace à l'épanouissement des
activités des professionnels des droits de l'Homme. Ce d'autant plus
que, rompus non seulement à évoluer au milieu des sillons
tortueux et dangereux du non droit et de l'illégalité,
dessinés par la négation affirmée et permanente de leurs
droits, ces derniers doivent désormais redoubler d'ardeur afin de
pouvoir se défendre contre la puissance des mécanismes de la
harmada judiciaire.
Il ne s'agit pas là d'une situation imaginaire, issue
des projections que l'on pourrait faire dans le contexte d'une étude de
cas préfigurés de systèmes de protection des
défenseurs des droits de l'Homme, mais bien de la réalité
factuelle. De la réalité prégnante à laquelle se
trouvent rompus les militants des droits de l'Homme de divers pays à
travers le monde. A cet effet, un avis éclairé renseigne de ce
que : « l'effet des législations répressives
est aggravé par l'absence d'un système judiciaire
indépendant de protection des droits de l'Homme. Dans certains pays,
loin d'assumer son rôle de garant des droits, l'appareil judiciaire s'est
laissé compromettre et utilisé comme une arme dirigée
contre les défenseurs. »283(*) La situation décrite correspond à
celle du Cameroun, où le harcèlement judiciaire284(*) est une menace à
laquelle les défenseurs des droits de l'Homme doivent manifestement
faire face, avec régularité, dans la conduite de leurs
activité. Il arrive, comme l'illustrent certains cas, que le magistrat
se trouve à participer, au moyen des outils mis à sa disposition,
à l'oppression des défenseurs des droits de l'Homme. Il importe
à ce niveau, de faire intervenir des exemples patents afin
d'étayer et de démontrer les éléments
avancés ici.
Bien dans ce sens, l'on pourrait rationnellement
évoquer le cas des sept syndicalistes de la Centrale syndicale du
secteur public (CSP).285(*) Ces derniers ont organisé un sit-in à
l'appel de la CSP devant la primature le 11 novembre 2010, avec l'intention de
remettre au Premier Ministre, un mémorandum des travailleurs des
services publics à l'attention du chef de l'Etat, portant notamment sur
l'amélioration des conditions des travailleurs au Cameroun. Ils sont
arrêtés par les éléments du commissariat central de
la ville de Yaoundé. Le procureur ne les libère que le 12
novembre à 20h 30, les informant de ce qu'ils devaient comparaître
le 15 novembre 2010 devant le tribunal de première instance (TPI) de
Yaoundé, pour les motifs d'organisation de manifestation illégale
et de trouble à l'ordre public. Les accusés plaident non
coupables, sur la base du fait que la CSP avait au préalable,
notifié aux autorités son intention d'organiser une
manifestation, selon ce que prévoit l'article 6 de la loi n 990/055 du
19 décembre 1990 relative au régime des réunions set des
manifestations. Ce n'est que le 5 mars 2012, après de multiples renvois
(onze au total), que le TPI de Yaoundé Centre Administratif prononce un
non lieu en faveur des sept syndicalistes. Il faut dire en définitive
que, « même si cette affaire s'est soldée par un non
lieu, il n'en demeure pas moins que les prévenus ont subi la torture
morale du fait de se représenter au tribunal à chaque fois qu'il
y avait audience et des différentes autres frustrations telles que la
garde à vue et les frais d'avocat ainsi que le temps perdu pour les
audiences. »286(*)
On pourrait encore en outre, ajouter le cas du
défenseur Mey Ali, promoteur de l'organisation non gouvernementale
OS_civile, basée à Kousséri. Introduit dans un dossier de
procédure par erreur, le plaignant s'est désisté des
charges portées contre lui. Toutefois, malgré le
désistement du plaignant contre lui, il a été jugé
et condamné à une peine de deux années d'emprisonnement
avec sursis, le 03 février 2011, par le tribunal de Kousséri.
Ayant interjeté appel contre cette décision et, en dépit
du jugement rendu, le défenseur a continué d'être
harcelé par les autorités policières pour le même
dossier. Il reçoit un appel d'un élément du commissariat
de Kousséri le 23 février 2011, lui signifiant que le même
dossier pour lequel il avait été condamné, était de
nouveau pendant au commissariat et, qu'il devait s'y rendre à nouveau
afin d'être entendu. Craignant pour sa sécurité, il se
réfugie dans une autre ville. Toutefois, une fois que le
Délégué général à la
sûreté nationale a été informé de ce dossier,
le harcèlement orchestré par les autorités
policières et judiciaires a cessé.287(*)
Un autre exemple est donné par le cas d'Abdoulaye MATH,
président du Mouvement pour la défense des droits de l'Homme et
des libertés (MDDHL). Celui-ci quelques jours après avoir
publié un communiqué de presse lu publiquement, dans lequel il
accusait le procureur M. Mamadou HISMAILA, certains de ses substituts ainsi que
certains officiers de police judiciaire de dépasser les limites de leur
autorité avec impunité, est arrêté, maltraité
et détenu avec 14 autres membres de l'organisation le 30 mars 2012, au
cours d'un rassemblement pacifique organisé par le MDDHL.288(*) En marge des limites
relatives au juge, il faut ajouter que la mise en oeuvre des normes
internationales de protection des défenseurs des droits de l'Homme au
Cameroun, se heurte également par ailleurs, à des
difficultés relatives aux mécanismes non juridictionnels.
B/ Les limites
liées aux institutions non juridictionnelles
Il faut analyser séparément et tour à
tour, les difficultés propres à la Commission nationale des
droits de l'Homme et des libertés (1) d'une part et, aux organisations
de la société civile d'un autre côté (2).
1) La dépendance
institutionnelle de la Commission Nationale des droits de l'Homme et des
libertés de l'autorité publique exécutive
La Commission Nationale des droits de l'Homme et des
libertés (CNDHL) de par son mandat qui consiste en la promotion et la
protection des droits de l'Homme consacrés par le droit positif interne,
devrait jouer un rôle important dans la mise en oeuvre des normes
protégeant les défenseurs. Pourtant, force est de constater que
la réalité factuelle ne donne pas raison à cette
hypothèse. Dans les faits, l'action de la CNDHL en matière de
protection des droits fondamentaux, est entravée elle aussi par une
série d'écueils sérieux à la fois d'ordres
opérationnels et statutaires289(*). Les limites opérationnelles sont celles
qui surviennent au cours du fonctionnement de l'institution lorsqu'elle est en
plein activité sur le terrain de la protection des droits
fondamentaux alors que, les entraves statutaires sont celles qui
découlent de la structure même de l'institution, telles que
conceptualisée par le législateur290(*).
Les limites opérationnelles de la CNDHL recensent
l'ensemble des difficultés mettant à mal la conduite efficace et
harmonieuse des activités de l'institution. Elles tiennent d'abord dans
un premier temps, à la déconcentration poussive de la Commission.
A ce niveau, il faut préciser que si la centralisation de l'institution
dans la seule capitale politique qui avait droit de cité au temps de
l'ancien Comité n'est plus à l'ordre du jour, c'est à
grand peine que la Commission s'implante dans les autres localités du
pays. Actuellement, elle ne dispose d'antennes que dans sept des dix
régions du pays. Ceci ne saurait constituer un détail
négligeable quand l'on sait combien cela biaise la visibilité de
l'institution et sa perception par la population. La difficile expansion de la
Commission est motivée par l'importance des difficultés
financières, auxquelles elle doit faire face. C'est ce qui explique
encore, que l'institution dans la capitale, n'est pas de siège
défini et que ses locaux se retrouvent au sein d'une triade de
bâtiments administratifs distincts.
A côté de ce problème, il est
nécessaire ensuite d'évoquer celui de la carence cruelle en
ressources humaines dont l'institution est victime. La Commission a en effet,
hérité du problème de l'insuffisance des moyens en
personnel du Comité. Déjà au propos de son
prédécesseur, Mme ETONGUE MAYER faisait remarquer que :
« malgré l'importance de la mission de protection (...),
le Comité national des droits de l'Homme et des libertés continue
de souffrir d'une insuffisance chronique en ressources
humaines. »291(*) Cette pensée a encore droit de cité de
nos jours, d'autant plus que le problème de ressources humaines, se pose
encore avec acuité, au sein des différents sites de
l'institution. De plus, il faut également ressortir qu'en plus de ce
besoin pressant en recrutement, le personnel déjà
déployé doit faire face à d'importantes carences en
matériel et à des défis logistiques considérables.
Les employés de l'unité de protection déplorent de ne pas
avoir à leur disposition suffisamment de moyens de transport, afin de
pouvoir satisfaire aux exigences en célérité
réclamées notamment dans les cas de figure de descentes
urgentes.292(*)
Toutefois, une analyse profonde et minutieuse laisse déceler que ces
écueils opérationnels, proviennent des limites statutaires
définies par le législateur.
Les limites obstruant le rôle de la CNDHL dans la
protection des droits de l'Homme en général, et des
défenseurs en particulier, tiennent principalement aux écueils
d'ordre statutaire. Ces derniers s'articulent particulièrement autour de
la dépendance institutionnelle de la Commission, vis-à-vis du
pouvoir exécutif. La structure de l'institution telle
qu'élaborée par le législateur, pose le problème de
son indépendance essentiellement, en raison de la solution qu'il a
adopté pour régler les questions relatives à sa
composition et à son approvisionnement. D'après la loi 2004/016
portant création, organisation et fonctionnement de la CNDHL, c'est le
Président de la République qui nomme par décret le
président, le vice-président ainsi que
l'intégralité des membres de la Commission.293(*) Plus loin encore, le
législateur met l'approvisionnement financier de l'institution à
la charge de l'Etat. L'article 20 dispose fort à propos que :
« Les ressources de la Commission proviennent des : dotation
inscrites chaque année au budget de l'Etat ; appuis provenant des
partenaires nationaux et internationaux ; dons et legs. »
Comment dès lors concevoir l'indépendance d'une structure qui
dépend financièrement de l'Etat et dont, les membres sont
nommés par ce dernier ? Est-on véritablement en droit
d'escompter de la Commission qu'elle soit un interlocuteur libre et objectif du
gouvernement dans ces conditions ? Qu'elle s'érige en
véritable protecteur des défenseurs des droits de l'Homme ?
Cette approche législative fait une entorse
légère mais pas des moindres, aux règles internationales
en la matière. D'abord, les Principes de Paris. Ceux-ci mettent
une emphase sur la nécessité de la neutralité des
institutions nationales de droits de l'Hommes. Elles doivent être
garanties contre toute influence extérieure de l'Etat et disposer d'une
autonomie financière. Ils recommandent que l'institution nationale
dispose d'une infrastructure adaptée au bon fonctionnement de ses
activités, en particulier de crédits suffisants. Lesquels
crédits devraient lui permettre de se doter de personnel et de locaux
propres, afin d'être autonome vis-à-vis de l'Etat et de
n'être soumise qu'à un contrôle financier respectant son
indépendance. Peut-on bâtir une autonomie financière
garante de toute influence étatique sur la base de capitaux d'origine
publique ? La déclaration des Nations Unies du 9
décembre 1998 en son article 14 alinéa 3, met
également à la charge de l'Etat, la responsabilité et
l'obligation d'appuyer le développement d'institutions nationales
indépendantes, visant à assurer la promotion et la
protection des droits et libertés fondamentaux sur leurs territoires.
L'indépendance des INDH est une exigence sur laquelle insistent les
textes internationaux protégeant les défenseurs. Une exigence
à laquelle l'architecture institutionnelle de la CNDHL telle
qu'aménagée législativement, ne souscrit pas
véritablement. Relativement à la question de la dépendance
de la CNDHL, un responsable de l'unité de protection déclare
que : « il est difficile d'envisager l'indépendance
totale de la Commission au regard des textes. Il s'agit d'une institution
créée et subventionnée par l'Etat, dont les dirigeants
sont nommés par décret présidentiel et, ont obligation de
rendre compte à l'autorité exécutive. Parler d'une
neutralité est donc complexe, en ce que la Commission doit dans son
action, tenir compte de la sensibilité du gouvernement. Ce qu'il importe
de considérer ce sont les implications d'une telle tutelle
institutionnelle. Sur le plan pratique, les actions de la Commission sont
limitées. Faute de moyens financiers, elle ne dispose pas des ressources
nécessaires pour mettre en oeuvre sa politique et par ricochet, ne peut
véritablement avoir un impact. »294(*) A la lecture de cette
intervention, l'on perçoit mieux en quoi les limites statutaires
à l'action de la CNDHL nourrissent les opérationnelles.
Dépendante du budget et des ressources que l'Etat veut bien lui accorder
dans la mesure de ses possibilités, l'institution ne dispose pas des
moyens dont elle a véritablement besoin pour déployer une action
profonde et efficace. Quoique, d'autres implications de cet état de
fait, sont à prendre en considération dans cette analyse.
La dépendance de la Commission vis-à-vis du
gouvernement diminue sa propension à assurer l'implémentation des
droits des défenseurs, en ce qu'elle constitue un frein
considérable à la coopération entre elle et ces derniers.
Pour les défenseurs qui de manière générale, se
sentent marginalisés et combattus par l'autorité, il n'est pas
opportun voire envisageable, de collaborer avec la CNDHL. C'est une institution
à la solde de l'Etat avec laquelle il serait dangereux de pactiser de
l'avis de certains. En ce sens, un défenseur expose que
« la commission nationale des droits de l'Homme et des
libertés n'est pas fiable. Sa proximité avec le gouvernement
n'offre aucune garantie aux défenseurs. Il faut être assez
naïf, trop naïf pour fonctionner avec elle. C'est comme si tu allais
demander à un commissaire de te
défendre. »295(*) Cet avis est partagé par un autre de ses
confrères, beaucoup moins subjectif mais tout aussi incisif dans ses
propos. Selon lui, « les relations entre les défenseurs et
la CNDHL coincent parce qu'elle a été
récupérée par le gouvernement central. L'affirmation de
son indépendance n'est qu'un leurre tant elle est financée par le
gouvernement. Chez nous, on a coutume de dire que quand quelqu'un vous
nourrit, il vous commande. Son rôle est peu ressenti et les attentes
au niveau des populations et de la société civiles demeurent
insatisfaites. »296(*) Toutefois, cette intervention a le mérite de
mettre en lumière l'élément profond expliquant le
déphasage entre la Commission et les professionnels locaux des droits de
l'Homme. Celui-ci se décline en la différence des
procédés employés par chacun des acteurs. Les
défenseurs font dans la dénonciation et affectionnent le recours
à des méthodes produisant un impact social fort. C'est en ce
sens, que la Commission à leurs yeux tarde encore à gagner en
légitimité, étant donné que l'essentiel de son
oeuvre est entourée de silence et faiblement perçue. Dans
l'ensemble, pour la majorité des travailleurs locaux des droits de
l'Homme, la commission doit aller beaucoup plus loin que ce qu'elle fait.
Elle doit oeuvrer à la lumière ouvertement, publiquement, de
façon à ce que l'on puisse la voir et la sentir sur le
terrain.297(*)
Ceux-ci souhaitent voir en la Commission un partenaire plus aux allures de
confrères. Pourtant, la Commission se perçoit d'un autre
côté, comme « une institution républicaine
dont le travail est de changer profondément les choses. Aussi dans le
respect de sa vocation et, le souci de ne pas corrompre les résultats de
l'action qu'elle entreprend, son activité à la différence
des ONG, ne s'inscrit pas dans l'activisme. Le silence est donc une question de
rigueur en termes de méthodologie pour atteindre ses objectifs,
méthodologie différente de celle des ONG et associations de
défense des droits de l'Homme, qui ne disposent pas des mêmes
ressorts qu'elle pour agir. »298(*) Toutefois, au-delà de cette divergence des
approches, la réalité est là, celle-là même
d'une distance entre les défenseurs des droits de l'Homme et la CNDHL,
d'une disparité qui handicape grandement, la propension de cette
dernière à constituer un mécanisme garant de
l'effectivité de la mise en oeuvre du droit international relatif
à la protection des militants.
L'analyse ne saurait être valablement achevée,
sans que l'on ne puisse faire intervenir les entraves liées cette
fois-ci à l'action déployée par la CNDHL, relativement
à la protection des défenseurs. Cette dernière est
fortement discutable quand à sa qualité à assurer une
défense effective et efficace des défenseurs en temps
réel. Ceci en raison de ce que déjà à la base, la
Commission ne dispose pas de stratégies d'action destinées
spécifiquement à la protection des défenseurs. Elle traite
les défenseurs, à l'image du droit interne, comme les autres
individus, sans leur consacrer plus de prérogatives ou de
privilèges. Les mesures de protection qu'elle va leur accorder ne sont
pas imprégnées des nécessités de
célérité se rattachant à la dangerosité
particulière caractérisant leur activité.
Plus loin, c'est la portée de ces mesures mêmes
qu'il faut discuter. Ces dernières se limitent pour l'essentiel,
à des correspondances administratives adressées aux
autorités ayant compétence pour agir dans le ressort pour lequel,
elle les sollicite. La Commission est une institution ne disposant pas de
pouvoirs d'action spécifiques, ce qui explique qu'elle doive se remettre
aux autres autorités capables elles, d'agir dans leurs domaines
légaux de compétence. A ce niveau, il se pose
nécessairement le problème de la réception par ces
dernières, des recommandations et invitations de la Commission. Pour
tout dire, la Commission dans l'imaginaire social, se réduit à
une structure de conseil, à laquelle l'Etat se réfère et
dont, la légitimité est encore à asseoir auprès des
autres organismes étatiques. Dès lors,
l'obligatoriété de ces recommandations, n'est pas établie
et est considérablement effritée par le fait que leur
réception soit variable, évidemment en fonction de la
considération que les autorités en cause ont d'elle. Selon ce
qu'un responsable de l'unité de protection a fait savoir :
« si certaines autorités coopèrent volontiers d'autres
non. La légitimité de la Commission est encore à asseoir
surtout auprès des autorités de police et de gendarmerie. C'est
ce qui explique le fait que des agents puissent être encore
arrêtés ou gardés à vue, dans le cadre de l'exercice
de leur mission. Toutefois, pour pallier à la réticence des
autorités peu coopératives, l'on en fait explicitement
état à l'intérieur des rapports annuels que nous
produisons. Lorsque les hautes autorités les consultent, ils en prennent
connaissance et demandent des comptes aux récalcitrants ».
L'on est en droit de se demander quel pourrait être l'impact en temps
réel de ce subterfuge, permettrait-il réellement à la
Commission d'obtenir dans l'immédiat la protection par des
éléments de police ou de justice, d'un défenseur ?
L'on est plus tenté de voir la portée de tels
procédés dans le long terme, ce qui conduit à imaginer
pour le moment, une Commission bien en dessous des attentes et des standards,
qu'exigent une institution véritablement garante de l'effectivité
de la protection des défenseurs des droits de l'Homme. Le constat est
pratiquement le même à réaliser pour ce qui est des
organisations de la société civile oeuvrant à la
protection des militants.
2) L'impact
résiduel de l'action des institutions privées de protection des
militants
L'efficacité de l'action des organisations de la
société civile oeuvrant localement pour la protection des
défenseurs des droits de l'Homme, est elle aussi limitée par de
nombreuses obstacles. Ces derniers tiennent à la fois aussi bien aux
difficultés internes auxquelles elles sont rompues, qu'à des
menaces externes venant nuire à leur bonne marche.
Les premières se rapportent comme pour le cas de la
Commission Nationale des droits de l'Homme et des libertés, à des
limites venant entraver l'opérationnalisation des activités des
institutions. Elles se rapportent essentiellement à des carences en
financement ainsi qu'aux difficultés logistiques et matérielles
empêchant les associations de mettre en oeuvre des actions fortes et
durables destinées à assurer la protection des défenseurs
des droits de l'Homme. Le Réseau des défenseurs des droits
humains en Afrique centrale (REDHAC) et le Réseau Camerounais des
organisations des droits de l'Homme (RECODH), associations locales, oeuvrant
spécifiquement dans le domaine de la protection des militants des droits
de l'Homme, dépendent des sources de financements provenant de
particuliers. Ils sont donc soumis à des limitations en ressources
humaines, matérielles comme financières, proportionnelles
à la masse des fonds qui leur sont alloués. Ces dernières
les empêchent d'abord, de fournir en temps réel une protection
adéquate aux défenseurs qui y sont affiliés. Mais aussi,
de couvrir la large part des individus et associations travaillant dans les
frontières du domaine national, à la promotion et à la
protection des libertés fondamentales. Néanmoins, ces limites
liées à la structure et à l'organisation des institutions,
sont plus aisées à maîtriser que les dangers provenant de
l'extérieur.
En plus des limitations qui leur sont intérieures, il
faut relever que les institutions privées de protection des
défenseurs des droits de l'Homme évolue dans un contexte
caractérisé par une insécurité prégnante,
compromettant leur évolution sereine et, entravant la portée de
leur action. En fait ce qu'il faut dire ici, c'est que ces institutions,
s'attirent les foudres des autorités et des groupements anonymes
anti-droitsdel'Hommistes. Elles sont donc soumises, du fait de leur action,
à des risques importants et à des menaces
régulières. Aussi, des membres du RECODH ont eu à
être victimes d'intimidations et menaces de toutes sortes de la part des
autorités ou de personnes anonymes, de harcèlement judiciaire, et
même d'arrestations arbitraires en violation des libertés de
réunion et de manifestation publique.299(*) En guise d'exemple, lors de notre entrevue dans
leurs locaux en septembre 2013, l'association faisait face à une
procédure pendante devant le tribunal de première instance du
Mfoundi, ouverte contre elle au motif de trouble à l'ordre public, pour
le compte d'une manifestation diligentée suivant le respect de la
législation en vigueur. Le cas de figure est le même pour le
REDHAC. La structure fait face régulièrement à des rapts
et à des attaques, orchestrés manifestement par des auteurs
anonymes visiblement peu contents de l'action de l'organisation, dans le but
d'engendrer la psychose au sein des membres, et de désarçonner
leur action.300(*) Mais
ici en plus, il faut relever la récurrence des menaces
perpétrées à l'encontre de la directrice
exécutive.301(*)
C'est dire que ces organisations, dans la conduite de leurs activités,
s'exposent à de hauts risques et font l'objet d'importantes pressions
extérieures, qui entravent l'efficacité des mesures qu'ils
mettent en oeuvre, pour la protection des défenseurs. C'est ce qui
pousse une activiste de la place, à observer que :
« la protection des défenseurs des droits de l'Homme au
Cameroun est effective mais pas, à 100%. Je dirai qu'elle l'est à
80. Ceci principalement en raison de ce qu'il existe sur le terrain, des
structures qui fournissent un appui efficace aux militants. Mais le
problème est qu'il faut que l'on permette à ces structures de
s'exprimer librement. L'Etat parfois empiète dans leurs
activités, afin que ces structures ne soient pas à leur aise.
Pourtant, si ces associations avaient la possibilité de déployer
la pleine mesure de leur action, les défenseurs seraient vraiment
protégés dans le cadre de l'exercice de leur
mission. »302(*) Tout compte fait, le contexte camerounais fait
l'état d'une protection institutionnelle interne, très
insuffisante des défenseurs. C'est ce qui accroît
l'attractivité des exutoires proposés par le système
international de protection des droits de l'Homme.
Paragraphe 2 : Un
système institutionnel de protection des défenseurs
dépendant de l'extérieur
L'action déficiente des institutions internes de
protection des défenseurs a échoué à
fédérer la population locale des professionnels des droits
humains (A). Dès lors, les défenseurs beaucoup plus mus par une
logique disparate, recherchent désespérément le soutien
des acteurs internationaux (B).
A/ La faible
intégration des défenseurs des droits de l'Homme
locaux
Les institutions internes de protection des défenseurs
des droits de l'Homme se heurtent toutes chacune à leur niveau, à
des difficultés qui les empêchent d'assurer effectivement la
réalisation des droits reconnus aux militants locaux. Du fait des
problèmes qu'elles rencontrent, elles n'ont pas réussi à
s'ériger en les catalyseurs que l'on était en droit d'escompter,
d'une action efficace des défenseurs. Elles ont échoué
à cristalliser et unifier ces derniers dans la légalité.
Cela a des répercussions sur le contexte caractérisant
l'activité de défense locale des droits humains.
La première de ces implications subséquentes,
s'articule autour de la précarité des conditions
sécuritaires des défenseurs locaux. Il faut savoir que,
« de manière générale, les défenseurs
sont menacés dans les environnements où ils ont été
repoussés à la marge de la société, soit parce
qu'ils défendent des causes impopulaires (comme les LGBTI), soit parce
qu'ils sont taxés d'anti-nationalisme, accusés d'être des
espions étrangers, d'être liés à des groupes
terroristes ou extrémistes, ou tout simplement d'être naïfs,
élitistes, ou déconnectés de la
réalité. »303(*) Il paraît utopique, dans le contexte actuel
définissant les Etats africains, encore en plein essor
démocratique, de détacher la défense des droits de
l'Homme, du risque et de la dangerosité qui la caractérise.
Aussi, dans un contexte marqué par l'inefficacité criarde du
dispositif destiné à assurer leur protection, les menaces et
violations à l'endroit des défenseurs, ne peuvent qu'exploser. A
ce sujet, un défenseur déclare avec beaucoup d'amertume
que : « nous [Les défenseurs des droits de l'Homme
locaux] sommes immensément exposés. A tel point qu'à un
moment, il faut du coeur. Il faut un travail de fourmi pour arriver à
défendre les droits de l'Homme au Cameroun. Si tu n'as pas un gabarit
moral impressionnant, une domination spirituelle, si tu n'es pas
cuirassé contre les intempéries, tu ne peux pas parler de droits
de l'Homme ici. »304(*) Pour un autre, les violations à l'encontre du
militantisme pour les droits humains revêtent un caractère
systématique d'une évidence mathématique. Selon lui,
« si vous êtes défenseurs des droits de l'Homme au
Cameroun et que vous n'avez pas encore subi de menaces, alors il est clair que
vous n'allez pas sur le terrain. »305(*) De plus, les institutions en
charge d'assurer leur protection n'étant pas à la hauteur de la
tâche, c'est tous seuls que les défenseurs doivent batailler. La
responsabilité de la prise en main de leur sécurité repose
entièrement, sur les travailleurs des droits de l'Homme locaux. L'un
deux dépeint très bien cette réalité :
« au Cameroun, la protection des défenseurs des droits de
l'Homme n'est pas accrue parce que l'Etat ne manifeste pas vraiment une
intention en ce sens. Ce sont les défenseurs qui prennent en charge leur
protection, c'est à eux de se trouver. »306(*) Il semble à la fois
intéressant et pertinent, de faire suivre ces développements des
tableaux ci-après, illustrant à la force des statistiques
réelles, la précarité et la dangerosité
caractérisant les conditions dans lesquelles évoluent, les
défenseurs camerounais des doits de l'Homme.
Sources : Données collectées au moyen de
l'enquête de terrain réalisée
La seconde de ces conséquences, découlant de la
première consiste en la faible intégration des surveillants
locaux des droits de l'Homme. Dans un contexte où c'est à chacun
de se prendre en main, les défenseurs évoluent encore plus pour
le moment, dans une dynamique individuelle. C'est chacun qui mène ses
activités, dans le domaine ciblé sans véritable synergie
avec toute la communauté des défenseurs. Les défenseurs ne
parlent pas d'une seule et même voix. Leur oeuvre se décompose en
actions éparses sans impact fort réel. De plus, cet
itinéraire individualiste est, bien évidemment à l'origine
de disparités, étant donné que tous n'ont pas le
même accès aux ressources. Si une catégorie bien
imprégnée des réalités et des
nécessités inhérentes à la profession, se
rapprochent des réseaux disponibles, d'autres moins au fil, ne le font
pas. Le phénomène est d'autant plus significatif, que l'on peut
percevoir une sorte de distinction existant les acteurs sociaux locaux de la
défense des droits de l'Homme, les répartissant en fonction de
leur auto-appropriation du rôle qu'ils ont à jouer. C'est un peu
comme si, il y avait d'une part des défenseurs évoluant dans la
lumière, possédant et maîtrisant
l'intégralité des éléments nécessaires
à la conduite harmonieuse et efficace de leurs activités et, d'un
autre côté une autre catégorie pour le moins consistante de
défenseurs évoluant dans l'ombre, dans l'amateurisme
commandé par l'ignorance. Ceux-ci n'ont pas accès facilement aux
informations fiables dont ils ont besoin et ne déploient pas
véritablement des actions éclairées et efficaces. Ce
dernier groupe d'activistes, ne connaît pas la législation
internationale spécifique se rapportant à la protection de leur
activité et, n'a même pas connaissance, de l'existence des
mécanismes internationaux déployés en ce sens.307(*) Alors qu'ils
nécessitent un renforcement de leurs capacités afin de
déployer un travail efficace de protection des droits fondamentaux, ils
sont déjà actifs sur le terrain, malgré qu'ils n'aient pas
en leur possession les ressources requises pour. C'est la prise en compte de
cet aspect qui amène un défenseur, a biaiser le propos relatif
à la paternité de l'ineffectivité de leur protection
à l'interne. Selon lui, « la responsabilité de
l'état délétère de la protection des
défenseurs des droits de l'Homme au pays est à mettre à la
responsabilité de la totalité des acteurs et pas seulement
l'Etat. Le mal vient de toutes parts y compris même des défenseurs
des droits de l'Homme eux-mêmes. Beaucoup d'acteurs de la
société civile ne savent même pas au juste quel est leur
rôle. Ils ne connaissent pas exactement ce qu'ils ont à faire et
adoptent des postures et attitudes qui n'arrangent pas les choses. Nombreux
sont ceux qui se comportent comme des acteurs de l'opposition et ne veulent pas
collaborer avec le gouvernement. Nombreux encore sont d'un autre
côté, ceux qui perçoivent la défense des droits de
l'Homme comme une activité lucrative, un business, un exutoire pouvant
les sortir au moyen d'une ruse mal placée, de la misère ambiante.
C'est dire qu'en fait les défenseurs en majorité pâtissent
de la carence d'appui à laquelle ils sont soumis. La multitude d'entre
eux a la volonté mais, ne dispose ni des ressources, ni des
capacités nécessaires afin de mener à bien leur
action. »308(*) C'est cette situation de manque, qui pousse les
activistes locaux, du fait de l'incapacité des institutions internes
à les assister selon leurs besoins, à rechercher le secours de
l'étranger.
B/ Le recours
récurrent, voire systématique aux organisations internationales
des droits de l'Homme et institutions diplomatiques
étrangères
Face à l'incapacité des institutions locales
à coordonner et à appuyer leur action, les défenseurs des
droits de l'Homme locaux, se tournent vers les dispositifs extérieurs,
afin d'y trouver les ressources nécessaires à la conduite de
leurs activités. En effet, les professionnels camerounais des droits de
l'Homme, sollicitent résolument le soutien des organisations
internationales ainsi que des représentations diplomatiques des Etats
étrangers, aussi bien pour ce qui de leur assistance financière
que, pour la prise en charge de leur sécurité. Selon ce que
rapporte un activiste local, « partout au niveau des
organisations internationales telles que Amnesty International, la
Fédération Internationale des droits de l'Homme ou encore
l'Organisation Mondiale contre la torture, il ya des services d'urgence
chargés de la protection des défenseurs des droits de l'Homme.
Une fois avertis par le moyen de nos communications, ils saisissent rapidement
les hautes autorités qui en appellent à leur tour aux services
compétents, afin que ces derniers prennent des
mesures. »309(*) Dans le même sens, un autre beaucoup plus
concret, explique l'attractivité de ces procédures, par la force
de l'influence exercée par les institutions extérieures sur le
gouvernement. Pour lui, « les représentations
diplomatiques étrangères des grandes puissances font
désormais énormément pression sur les autorités.
Elles exercent un poids de par le regard plus affiné qu'elles posent,
qui a pour conséquence que la démocratie fait de plus en plus
attention. »310(*) Ce fait traduit, l'inefficacité du
système interne mis en place à l'attention de la protection des
activistes camerounais. Système peu attractif aux yeux des
bénéficiaires défenseurs, qui préfèrent se
tourner vers les options établies à l'international, plus
efficientes et productives.
Néanmoins s'arrêter à ce niveau de
l'analyse, ce serait l'écourter de façon brutale et la conduire
partiellement. Car si d'une part l'attractivité du dispositif
extérieur relativement aux questions d'ordre sécuritaire a
té établie, une autre interrogation subsiste. D'un autre
côté, il faut interroger la quintessence et la pertinence du
recours systématique des défenseurs à l'étranger,
dans la quête des ressources matérielles et financières
notamment, nécessaires à la mise en oeuvre de leur action. Cette
question revêt en fait dans cette étude, un intérêt
particulier en raison de ce qu'essentiellement, « l'accès
des organisations non gouvernementales (ONG) de défense des droits de
l'Homme au financement, est un droit universel. »311(*) En effet, de nombreux
organes et procédures spéciales des doits de l'Homme, notamment
au sein des Nations Unies, ont souligné, en tant que principes, que
l'accès au financement est partie intégrante du droit à la
liberté d'association, et que les ONG devraient avoir librement
accès à des fonds, y compris étrangers.312(*) La déclaration sur
les défenseurs des droits de l'Homme de 1998 consacre explicitement le
droit des défenseurs des droits de l'Homme à accéder au
financement.313(*) Elle
dispose fort à propos en son article 13 que :
« chacun a le droit, individuellement ou en association avec
d'autres, de solliciter, recevoir et utiliser des ressources dans le but
exprès de promouvoir et protéger les droits de l'Homme et les
libertés fondamentales par des moyens pacifiques, conformément
à l'article 3 de la présente Déclaration. »
La déclaration met donc à la charge de l'Etat relativement au
droit d'accès au financement des ONG, une double obligation :
l'obligation négative de ne pas interférer dans l'accès au
fonds et, l'obligation positive de créer un cadre juridique et
administratif, ainsi qu'une pratique, qui facilitent aux ONG l'accès au
financement et leur utilisation.314(*)
Toutefois, il faut remarquer que la pratique dans le contexte
de l'Etat camerounais, n'est pas à l'appropriation par le gouvernement
de l'obligation positive dont il est débiteur. Un observateur de la
société civile rapporte : « La défense
des droits de l'Homme requiert des ressources tant humaines que
matérielles et financières. Ainsi donc les défenseurs des
droits de l'Homme doivent être soutenus. Jusqu'ici, l'essentiel de
l'appui en ressources pour les défenseurs des droits de l'Homme est
apporté par les partenaires internationaux. Le gouvernement devrait
faire du soutien en ressources aux défenseurs des droits de l'Homme une
priorité nationale. [...] Au-delà de recommander l'appui de la
société civile par ses partenaires, il est souhaitable que le
gouvernement apporte directement son appui financier à la contribution
des défenseurs des droits de l'Homme à la consolidation de l'Etat
de droits au Cameroun. »315(*) Aussi, à la lumière de cette
affirmation, le recours des travailleurs locaux des droits de l'Homme à
l'appui des institutions étrangères, s'explique non pas seulement
par la déficience des dispositifs internes mais aussi plus loin, par
l'inaction du gouvernement. Son manque de détermination et d'engagement,
à soutenir leur action, en violation du droit international
inhérent à leur protection. Car en restreignant ainsi
l'accès des professionnels des droits humains aux ressources
nécessaires à la conduite de leurs activités, l'Etat
camerounais ne s'acquitte pas des obligations mises à sa charge, par le
droit international316(*) et, s'inscrit en marge de ce dernier. D'autant plus
qu'effectivement, « l'accès des ONG de défense des
libertés fondamentales à un financement est un droit, et tout
Etat qui applique des restrictions injustifiables au regard du droit
international le viole. Les restrictions du droit au financement sont les
mêmes que celles au droit à la liberté d'association, car
le premier est une composante du deuxième. »317(*) Cette remarque est assez
significative du moment où, la violation par l'Etat des normes
internationales de protection des défenseurs des droits de l'Homme,
constitue une limite importante, à la mise en oeuvre de ces
dernières.
XVII. CONCLUSION DU TROISIEME CHAPITRE
Ce chapitre se destinait à l'étude des limites
entravant l'effectivité de la mise en oeuvre des normes internationales
de protection au Cameroun. A la lumière des développements
précédents, l'on retient essentiellement que les écueils
à la protection locale des militants sont d'ordres socio-juridiques et
institutionnels. Les premiers tiennent à la fois au contexte social et
au droit positif interne. Ils se rapportent d'une part, à la faible
imprégnation des populations du discours des droits de l'Homme et
d'autre part, à l'inadéquation des cadres juridiques
international et interne, organisant la protection spécifique des
défenseurs. Les obstacles d'ordre institutionnels pour leur part,
s'articulent autour des déficiences mettant à mal, la propension
des mécanismes, chargés de la réalisation des droits
reconnus aux travailleurs des droits de l'Homme. De manière
générale, l'on remarque encore que ces faiblesses ont
désorganisé la population locale des défenseurs,
restreignant la portée de l'action déployée par celle-ci.
Face à ces handicaps, cette dernière à titre
d'expédient, s'est résolument tournée vers le soutien
salvateur de la communauté internationale. Si cet exutoire superficiel
participe de la consolidation de la crise du système national de
protection des défenseurs, il ne saurait apporter à long terme
des réponses durables et efficaces à la résolution de la
question. La mise en oeuvre pleinement effective par l'Etat camerounais, du
droit international relatif aux professionnels des libertés
fondamentales, passe par l'adoption et l'exécution de mesures
d'ensembles ciblées.
CHAPITRE 4 : LA REVERESIBILITE DE LA
LIMITATION
La limitation de la mise en oeuvre par l'Etat camerounais, des
normes internationales de protection des défenseurs des droits de
l'Homme, ne constitue pas une situation définitive et
irréversible. Il est en effet, possible d'améliorer l'impact et
l'effectivité des mesures déployées par les
autorités, dans le sens de la réalisation des droits reconnus aux
militants. Plus qu'une possibilité ou qu'une simple
éventualité, il s'agit là même en fait, d'une
véritable nécessité. D'abord, en raison de ce que les
défenseurs des droits de l'Homme sont en droit de
bénéficier d'une protection efficace et d'un cadre
règlementaire leur permettant de travailler librement et sans entrave,
harcèlement ou menace.318(*) Et encore, de par la prise en considération
du besoin urgent d'un processus de révision des lois, des politiques
et des pratiques portant atteinte aux défenseurs des droits de l'Homme
aux niveaux national, régional et universel.319(*) Partant de ce constat, il
est clair que l'amélioration du système élaboré par
les autorités camerounaises, pour la mise en oeuvre du droit
international relatif aux défenseurs des droits de l'Homme, passe
inéluctablement par la révision du dispositif national (section1)
d'une part et, des cadres juridiques universel et africain d'autre part
(section 2).
XVIII. SECTION 1 : LES MESURES CORRECTIVES AU NIVEAU
INTERNE
Les mesures correctives à l'échelle interne
camerounaise sont essentiellement d'ordres institutionnel et juridique.
Premièrement, il est nécessaire d'ajuster, d'assister et de
consolider l'action déployée par les divers acteurs, intervenant
dans la protection des surveillants des droits de l'Homme (paragraphe 1).
D'autre part, cette démarche ne sera efficace et ne pourra s'installer
dans la durabilité, qu'à une seule condition. Il s'agit de
l'encadrement par le droit positif interne, de l'activité de
défense des droits de l'Homme (paragraphe 2).
A. Paragraphe 1 : Le
renforcement du système institutionnel national
Les actions à entreprendre concernent à la fois
la totalité des acteurs institutionnels (B) et la population des
défenseurs locaux des droits de l'Homme en particulier (A).
A/ Des mesures propres
à la communauté des défenseurs
Pour une meilleure protection des défenseurs
camerounais des droits de l'Homme et partant, un militantisme plus efficace de
ces derniers, deux stratégies principalement, sont à mettre en
branle. Il s'agit d'abord, de la construction d'une synergie entre les
différents professionnels des droits de l'Homme locaux (1) et ensuite,
de la mise en oeuvre de politiques destinées à renforcer leurs
capacités (2).
1) L'établissement
d'un système de réseautage efficace entre les
défenseurs
« Dans un contexte où les
défenseurs des droits font face à de nombreux obstacles dans
l'exercice du métier, seule l'union des forces peut constituer une
alternative. »320(*) Cette analyse faite par un observateur de la
société civile camerounaise, est assez pertinente pour deux
raisons. L'étude faite du contexte camerounais, a laissé entendre
en premier, que ce dernier constitue en fait, un environnement au sein duquel
les militants sont exposés à des risques importants, dans la
conduite de leur activité. En outre, ils sont appelés à
faire face à ces risques tous seuls, compte tenu des déficiences
entachant de l'appareil juridique destiné à les soutenir. Un
défenseur fort à propos, fait constater de sa propre
expérience que « ce sont les autres associations de
défense des droits de l'Homme qui volent à son secours en cas de
pépin, et pas une autorité institutionnelle
camerounaise. »321(*) C'est en ce sens que la mise en place d'un
réseautage efficace entre les défenseurs locaux des droits de
l'Homme, présente une opportunité réelle. Toutefois, il
faut rechercher néanmoins, les avantages que gagneraient les
professionnels locaux des droits de l'Homme à se mettre en
réseau.
L'intervention d'un membre de l'unité de protection de
la CNDHL-Littoral, éclaire beaucoup, au sujet de cette
préoccupation. Pour lui en effet, « la mise en place d'un
réseau sérieux de défenseurs représente une
stratégie incontournable, pour une protection plus efficace des
défenseurs au Cameroun. Les associations de défense gagneraient
à se mettre en réseau, pour un travail plus efficace et une plus
grande protection. »322(*) C'est dire en fait que, le réseautage
permettrait en premier lieu, aux militants locaux, de mener des actions ayant
un impact plus incisif et fort. Comme le dit l'adage, seule l'union fait la
force. L'agrégation des efforts permettrait aux défenseurs de se
mouvoir vers des objectifs et une vision commune, d'acquérir plus de
visibilité et de devenir à la fois, les observateurs et les
interlocuteurs incontournables de l'action gouvernementale qu'ils doivent
être. C'est ce qui motive l'appréciation faite par un
défenseur, de l'opportunité de cette démarche. Selon lui,
« la protection des défenseurs des droits de l'Homme au
Cameroun n'est pas assurée, parce que la société civile
n'est pas assez organisée pour ce faire. En Afrique de l'Ouest par
contre, les réseaux y sont très efficaces et très
solidaires, à telle enseigne que les pouvoirs publics les craignent.
C'est pour cela qu'ils mènent des actions très fortes.
L'organisation en réseau ici au pays, est encore très
récente. Pour tout dire, il n'y en a même qu'un seul à
l'échelle nationale : le RECODH. Pour une protection efficace des
défenseurs au Cameroun, il faut renforcer le système de
réseautage en créant des plate-formes dans chaque région,
pour densifier le réseau national et le REDHAC. La solidarité
entre les défenseurs représente la meilleure façon
d'assurer le renforcement de leur action. Ceci est d'autant plus crucial, qu'il
est nécessaire que les défenseurs soient très combattifs
et compétitifs, pour soumettre le gouvernement et l'amener à
respecter ses engagements. »323(*)
Le système de réseautage de plus, est une
garantie pour la sécurité et la protection des défenseurs.
C'est en ce sens également, qu'il représente une
opportunité importante pour la communauté camerounaise de
surveillants des droits humains, qui non seulement est permanemment
exposée des périls importants, mais aussi, fait continuellement
l'objet de violations. Ceci amène l'un deux à préciser
que : « la stratégie pour une protection efficace des
défenseurs doit sortir d'eux-mêmes. Ils doivent se
connaître, s'informer mutuellement de leurs actions, avoir des relais de
connexion. Il faut se regrouper afin que nous puissions faire entendre notre
voix et, de surcroit, ça constituera une espèce de protection
logique. »324(*) La mobilisation collective et unie, assure la
protection individuelle de chacun des défenseurs. C'est ce qu'explique
M. Félix AHOUANSOU, qui fait l'apologie de la synergie, comme outil
efficace pour la défense des droits de l'Homme. Pour lui :
« le travail en synergie permet de veiller à la
sécurité des défenseurs des droits de l'Homme en diffusant
rapidement des informations lorsqu'un défenseur est menacé [...].
La synergie permet également de centraliser les informations sur les
défenseurs des droits de l'Homme, de réagir sur la situation d'un
défenseur menacé sans pour autant se mettre en situation de
conflit avec son Etat. Le travail en synergie permet de protéger les
défenseurs des droits de l'Homme tout en se protégeant. La
synergie d'actions est un outil efficace contre le risque de persécution
des défenseurs des droits de l'Homme. »325(*) Toutefois il faut
préciser que si la synergie présente autant d'avantages pour les
défenseurs, elle suppose pour être correctement mise en place, la
réunion de conditionnalités bien définies. La synergie
nécessite principalement, la professionnalisation des
militants.326(*) C'est
la raison pour laquelle afin qu'elle puisse efficacement être
adaptée localement, il est nécessaire que les capacités
des défenseurs soient renforcées.
2) Le renforcement des
capacités des défenseurs
L'activité de défense des droits de l'Homme,
même si elle peut et devrait même être l'apanage de tout le
monde, n'est pas réservée à tout qui dame quelconque.
C'est une oeuvre obéissant à des dynamiques complexes, qui
demande avant de s'y lancer, une préparation importante, si l'on
désire bien la mener. En ce sens, M. Félix AHOUANSOU
déclare que : « Le travail des défenseurs des
droits de l'Homme est un travail à la fois compliqué et simple.
Il est compliqué en ce sens qu'il suppose de la connaissance mais des
méthodes bien étudiées et appropriées. Il est
simple lorsque les méthodes utilisées sont les plus subtiles et
les plus pacifiques possibles. »327(*) Sans la maîtrise des
subtilités et des prérequis techniques nécessaires, l'on
ne peut constituer un défenseur à part entière des droits
de l'homme.
Pourtant, de l'analyse du contexte camerounais, il ressort que
les défenseurs locaux pour la plupart, ont besoin d'être
édifiés sur les rouages nécessaires à la conduite
de leur activité. La majorité des militants font preuve d'une
ignorance saisissante, des informations encadrant la défense des droits
de l'Homme. En effet, beaucoup ne connaissent pas la législation
positive internationale et interne, organisant la mise en oeuvre de leur
activité. Un observateur s'insurge en ce sens, de ce qu'il y a des dits
professionnels de la défense des droits humains, qui organisent des
manifestations sans même savoir qu'obligation leur est faite par la loi
nationale, de les déclarer au préalable.328(*) Un plus grand nombre encore,
ignorent les exigences et attitudes requises pour la sécurisation
physique et informationnelle de leur travail. C'est dire en fait, que les
défenseurs locaux des droits d l'Homme pour la plupart, ne sont pas dans
leur rôle et il est important à plus d'un titre de les former.
Il est nécessaire d'instruire les défenseurs des
subtilités relatives à la conduite de leur activité, pour
deux raisons. La première a déjà été
déclinée plus haut. Elle consiste en ce que la
professionnalisation des défenseurs, constitue une condition pour
l'opérationnalisation d'un système de synergie efficace entre
eux. En effet, selon M. AHOUANSOU, la synergie suppose la qualité de
l'activité des défenseurs des droits de l'Homme,
l'impartialité, la transparence, la crédibilité au travers
d'informations exactes et aussi, le respect de la législation nationale
encadrant l'activité des ONG de défense des droits de
l'Homme.329(*)
L'autre raison consiste en ce que, la maîtrise des règles
dirigeant leur activité et surtout, de la légalité
organisant cette dernière, protège les défenseurs des
droits de l'Homme d'une part importante des persécutions auxquelles ils
font face. C'est ce que fait remarquer un professionnel local :
« s'il y a encore du chemin à faire pour
l'effectivité de la protection des défenseurs au Cameroun, il y a
néanmoins, en ce qui concerne la protection des droits de l'Homme en
général, une relative avancée qui laisse la place à
l'optimisme. Avant, il était interdit de penser mais aujourd'hui, on
pense et on parle même si on se fait suivre. On ne peut plus facilement
venir arrêter quelqu'un pour avoir dit ce qu'il pensait. Malgré
qu'aujourd'hui encore, on défend les manifestations, pour qu'on
parvienne à t'arrêter, il faut que tu ais fait une erreur, ce
à quoi tu peux échapper si tu restes vigilant et si tu
maîtrises l'étendue de tes droits et
devoirs. »330(*) C'est dire qu'en fait, la connaissance par les
défenseurs de la légalité et des règles encadrant
leur activité, les protège et leur permet de conduire leur
travail dans la lumière, quelque soit l'intensité des pressions
pouvant exister tout autour. Pour les arrêter à ce moment, il faut
que le coupable commette absolument une violation de leurs prérogatives.
C'est en ce sens que dans le but d'assurer une plus efficace
protection des défenseurs locaux, il faut entreprendre
l'élaboration d'un réseau national avec des antennes
régionales, regroupant la totalité des militants travaillant sur
le territoire. Toutefois, au préalable, il sera nécessaire
d'organiser la tenue systématique et régulière, de
séminaires de formation, destinés à actualiser et à
renforcer les ressources informationnelles et les capacités
sécuritaires des défenseurs camerounais. Mais encore à ces
mesures, il est nécessaire d'adjoindre, la promotion du dialogue entre
la totalité des acteurs institutionnels, intervenant dans la mise en
oeuvre des normes internationales de protection des activistes.
B/ La promotion du
dialogue et de la coopération entre les acteurs
Pour M. Félix AHOUANSOU, « il y a deux
règles essentielles à respecter dans la défense des droits
de l'Homme en Afrique afin de faire ce travail et de s'épargner les
persécutions de la part des gouvernements. Il s'agit de la synergie
d'actions et du dialogue. »331(*) A ce titre, à côté de
l'organisation de la communauté des défenseurs locaux en un
réseau fort et aménagé, il est important de mettre en
oeuvre d'autre part, des stratégies destinées à promouvoir
le dialogue entre les différentes acteurs institutionnels en charge de
la protection des activistes. L'effectivité totale de la mise en oeuvre
du droit international relatif aux défenseurs des droits de l'Homme au
Cameroun, passe par le développement de bonnes relations de
coopération entre les activistes, les autorités, la CNDHL et les
populations. Il faut donc promouvoir le consensus d'abord entre les
défenseurs et le gouvernement (1), mais aussi entre les
défenseurs et l'institution nationale des droits de l'Homme (2) et
enfin, entre les défenseurs et les populations (3).
Intéressons-nous tour à tour, à chacun des axes de
coopération ainsi définis.
1) L'axe
défenseurs-autorités
Relativement au premier axe, l'analyse du contexte interne
démontre qu'il n'existe pas de relations de collaboration
véritables établies entre les défenseurs et les
autorités. Tout au contraire, l'ambiance entre les deux
catégories de prime abord, est à la méfiance et à
la lutte. Pourtant, un examen profond de la question explique cet état
de fait, par la faible appropriation par chacun des acteurs, des rôles
respectifs qu'ils sont appelés à jouer. D'un côté,
il y a chez les défenseurs des droits de l'Homme locaux, des acteurs
plongés dans une vision manichéenne, qui diabolisent les
autorités. Pour ces défenseurs aux convictions affirmées,
le dialogue avec le gouvernement est inenvisageable parce qu'il est l'ennemi
à abattre. Collaborer avec les autorités ne peut être d'une
opportunité significative, parce que ce sont elles qui militent pour
entraver le changement, que les défenseurs souhaitent apporter. Ceci
constitue déjà à ce niveau, un frein considérable
à l'essor d'une relation de consensus entre les professionnels des
droits de l'Homme et l'Etat.
Cependant, les griefs ne proviennent pas que de la
communauté des défenseurs. En effet, il faut également
relever comme écueil, la conception classique totalitariste de
l'autorité, qui caractérise certains agents étatiques.
Ceux-ci sont peu ouverts à la gouvernance participative, et aux
préceptes droitsdel'hommistes. Ils comprennent mal le rôle des
défenseurs. Pour eux, « ils ne sont rien de plus que des
gêneurs, des adversaires, des traîtres, des anti-patriotes qui
écornent volontiers l'image du pays à
l'extérieur. »332(*) Dans ce sens, il est difficile pour ces
autorités, d'envisager la coopération et le consensus avec les
défenseurs. Néanmoins, ce propos est à biaiser et il
existe des raisons d'être optimiste. Ce pour la simple et bonne raison,
que cette philosophie anti-droitsdel'hommiste n'est pas l'apanage de la
totalité des autorités, mais seulement, de quelques-unes d'entre
elles. Un défenseur rapporte relativement à cela que :
« il y a certes encore à faire pour la protection des
droits de l'Homme au Cameroun. Toutefois, les heurts ne se situent pas au plan
macro ou à la volonté politique, mais plutôt au niveau des
individus. Il y a comme une scission au niveau des personnes investies de
l'autorité, partageant dans deux camps différents, les pro-droits
de l'Homme et ceux qui retardent l'avancée. Tout porte à croire
que les hauts dirigeants sont pour leur part, sensibles à cette question
et agissent pour l'évolution. Il ne reste plus qu'une chose à la
protection des droits de l'Homme, que les décideurs à tous les
niveaux sortent de leur prison
incompréhensible. »333(*)
C'est précisément pour cette raison, qu'il est
important de promouvoir le dialogue et la recherche de consensus entre les
défenseurs et les gouvernants. Ceci d'autant plus que, c'est ce dialogue
qui fonde la raison d'être et la pertinence même de
l'activité de défense des droits de l'Homme. Car, selon ce que
précise AHOUANSOU, « le dialogue suppose un accompagnement
du gouvernement, dans la mise en oeuvre de ses engagements nationaux et
internationaux. Il s'agit de rappeler aux gouvernants qu'il est question des
engagements qu'ils ont eux-mêmes pris vis-à-vis de leurs
communautés. »334(*) C'est l'outil par excellence, auquel les militants
doivent recourir pour accompagner l'Etat vers la mise en oeuvre des
instruments internationaux de protection des droits de l'Homme.335(*) Ceci amène un
défenseur local, à appeler à se servir de la force du
dialogue, pour dépasser l'incompréhension et l'intolérance
qui existent entre les autorités et les défenseurs. Selon lui,
« il est nécessaire que les défenseurs continuent
de dialoguer avec les autorités, afin de leur faire comprendre le bien
fondé de leur rôle, qu'ils sont la lumière et qu'ils ont
l'obligation de dire quand les choses ne vont pas. Autorités et
défenseurs doivent cesser de se regarder comme des chiens de
faïence, ils doivent briser le mur qui les sépare afin de pouvoir
véritablement se faire confiance et, travailler main dans la
main. »336(*)
2) L'axe
défenseurs-Commission nationale des droits de l'Homme et des
libertés
Les défenseurs n'entretiennent pas véritablement
un flux de relations soutenu et abondant -du moins d'un ratio tel que l'on
devrait être en droit de l'attendre- avec la CNDHL. Cette situation
s'explique par la perception générale que ceux-ci ont de
l'institution. Pour l'essentiel des surveillants locaux des droits de l'Homme,
la Commission est une institution inféodée par le pouvoir de
laquelle il faut se méfier. Cette croyance, qui s'appuie sur la
dépendance administrative et financière de l'institution
vis-à-vis de l'exécutif, est alimentée par le
mystère et le silence entourant notamment, l'activité de cette
dernière. Cette attitude défensive influence
considérablement la propension des activistes à collaborer en
toute confiance avec l'institution. Elle limite les rapports entre les deux
catégories d'acteurs et, compromet largement l'obtention d'un consensus
entre elles. En conséquence, peu de défenseurs parmi la masse
existante s'affilient à la Commission ou encore, participent aux
ateliers de renforcement de capacités qu'elle met en oeuvre à
leur attention.337(*)
Les défenseurs ne possèdent qu'une connaissance vague, fortement
subjective de l'institution et, ne saisissent pas véritablement
l'opportunité qu'il peut y avoir à coopérer avec elle. De
l'opinion de certains même, « la CNDHL est un gouffre
à sous, elle n'accomplit pas la mission pour laquelle elle a
été mise sur pied. »338(*)
Pourtant, il faut encourager et stimuler, la promotion de
rapports de coopération véritables entre les défenseurs
des droits de l'Homme et la Commission. D'abord, parce que tous ces acteurs
sont porteurs de la même mission, celle d'assurer le monitoring de
l'action gouvernementale. Les militants et la l'institution nationale de droits
de l'Homme contrôlent l'exécution par le gouvernement, de ses
obligations internationaux en matière de droits de l'Homme. Plus loin,
il faut remarquer que le seul moyen pour les deux parties d'arriver à
véritablement se comprendre réside dans le dialogue. Et encore,
dans un contexte de symbiose, les défenseurs tout comme la commission,
ne peuvent que profiter, notamment des ressources qu'ils mettront chacun, l'un
à la disposition de l'autre. C'est en ce sens, que le membre de
l'unité de protection de la CNDHL-Littoral interviewé, encourage
la synergie entre les militants des droits de l'Homme et la CNDHL. Pour lui,
« l'amélioration de la protection des défenseurs
des droits de l'Homme au Cameroun passe aussi par le renforcement de la
coopération entre les défenseurs et la Commission. Les
défenseurs gagneraient à se rapprocher de la commission pour
avoir les bonnes informations concernant son mode de fonctionnement. De plus,
leur collaboration avec elle ne peut que bénéficier à
chacune des parties prenantes. A ce titre, il faut relever la
nécessité pour les défenseurs locaux, de se former et de
se spécialiser afin d'être plus efficaces, au lieu de chercher
à balayer un champ d'action large, pour faire n'importe quoi. C'est le
devoir de la CNDHL de former les associations qui souhaitent l'être dans
ce sens. La formation s'inscrivant dans le cadre de la promotion, il s'agit
là même en fait, d'une obligation statutaire. La CNDHL peut donc
avoir à jouer un rôle important, dans la construction d'une
communauté de défenseurs des droits de l'Homme plus performante
et avertie. »339(*)
3) L'axe
défenseurs-population
Le troisième axe de coopération qu'il faut
établir, fait intervenir les défenseurs des droits de l'Homme et
les populations. Il est tout aussi, sinon plus important même, que les
autres. Ceci essentiellement en raison de ce que les populations constituent
à la fois, le réceptacle et le moteur de l'action des militants.
Les récepteurs en ce sens qu'ils représentent les principaux
bénéficiaires de l'entreprise de défense des droits de
l'Homme. C'est pour le respect de leurs prérogatives que les
professionnels oeuvrent. Et, c'est dans ce sens qu'ils sont également,
les causes du combat mené par ces derniers. Il est donc crucial compte
tenu de cela, qu'elles puissent accompagner les défenseurs dans leur
travail, qu'elles les mettent dans les conditions favorables afin qu'ils soient
à mêmes de bien veiller au respect de leurs prérogatives.
C'est pourtant à ce niveau, qu'il y a comme un problème dans le
contexte camerounais.
En effet, les populations sont peu imprégnées
des questions relatives aux droits de l'Homme. Elles ne possèdent pas
les outils nécessaires pour appréhender l'action des activistes,
et la supporter comme elles le devraient. Bien au contraire, dans un cadre
où le droit moderne en général et les droits de l'Homme en
particulier, peinent encore à s'imposer, ce sont les us, traditions et
coutumes qui dictent l'essentiel des normes légales-rationnelles
effectivement observées par le plus grand nombre. Du moment où le
discours droitdel'hommiste entre en conflit avec l'essentiel des lois
coutumières, les défenseurs très souvent, se font les
adeptes d'une philosophie aux allures hérétiques, impropre aux
valeurs communément partagées. Ils doivent donc se heurter
à la résistance des populations, dont ils ont pourtant
paradoxalement, besoin du soutien.
C'est pour cela, qu'il est important d'établir une
plateforme de concertation et de dialogue entre les défenseurs et les
populations, dans le but de sensibiliser ces dernières aux droits de
l'Homme et, de les amener à appuyer l'action déployée par
les activistes. Les populations doivent pouvoir véritablement
s'imprégner de la culture des droits de l'Homme. Ce n'est que lorsque
ces dernières se seront appropriées de la quintessence des droits
et libertés qui leur sont reconnus, qu'elles comprendront le bien
fondé, l'importance de l'oeuvre des militants et qu'enfin, elles
pourront la supporter et l'appuyer solidement. En effet, comme le fait
remarquer un observateur, « il faut sensibiliser les populations
et former l'opinion publique aux droits de l'Homme, afin qu'elles puissent
collaborer avec les défenseurs car en fait, pour que la défense
des droits de l'Homme soit efficace, il faut que les gens puissent porter
à la connaissance des militants les cas de violations dont ils sont
victimes. »340(*) Ces stratégies institutionnelles doivent
pouvoir d'autre part, être complétées par la
consécration juridique du statut du défenseur des droits de
l'Homme.
Paragraphe 2 : La
révision du cadre juridique pour la promotion du statut du
défenseur des droits de l'Homme
Pour une meilleure mise en oeuvre des normes internationales
de protection des défenseurs des droits de l'Homme au Cameroun, il est
nécessaire de réviser le cadre juridique existant. Cette
révision doit nécessairement être effectuée, sous le
prisme de la valorisation du statut du défenseur des droits de l'Homme.
Ceci commande donc, l'élaboration d'un nouvel ordre interne organisant
l'activité (A). Cette démarche de restructuration normative devra
se parachever par la codification du droit relatif à la protection des
défenseurs, ainsi produit (B).
A/ L'élaboration
d'un cadre juridique efficace de protection spécifique des
défenseurs des droits de l'Homme
« Il est temps d'établir des cadres
règlementaires nationaux favorables aux activités des
défenseurs des droits de l'Homme, d'entreprendre une révision et
une abrogation systématique des lois qui limitent indûment les
droits de la société civile et des défenseurs, et de
garantir l'établissement des responsabilités des agressions
contre les défenseurs des droits de l'Homme. »341(*) C'est dans cette remarque
faite par un observateur de la société civile internationale, que
se trouve l'âme de la démarche à suivre, pour
l'amélioration du cadre juridique camerounais, de mise en oeuvre des
normes internationales de protection des défenseurs. Cette mesure
devrait s'articuler autour d'abord, de l'adoption d'une loi interne
règlementant l'activité de défense des droits de l'Homme
(1) et ensuite, de la création d'un mécanisme destiné
à assurer l'implémentation de cette norme (2).
1) La production d'une loi
consacrant la protection spécifique des travailleurs des droits de
l'Homme
Selon ce qui ressort du droit international positif, l'Etat a
l'obligation d'assurer la protection des militants des libertés
fondamentales, relevant de sa juridiction. En effet, « en vertu
de l'article 12 de la Déclaration de l'ONU sur les défenseurs,
les Etats doivent garantir la protection des défenseurs des droits
humains. »342(*) Selon cette disposition : « [...]
L'Etat prend toutes les mesures nécessaires pour assurer que les
autorités compétentes protègent toute personne,
individuellement ou en association avec d'autres, de toute violence, menace, ou
représailles, discrimination de facto ou de jure, pression ou toute
autre action arbitraire dans le cadre de l'exercice légitime des droits
visés dans la présente Déclaration. A cet égard,
chacun a le droit, individuellement ou en association avec d'autres,
d'être efficacement protégé par la législation
nationale quand il réagit par des moyens pacifiques contre des
activités et des actes, y compris ceux résultant d'omissions,
imputables à l'Etat et ayant entraîné des violations des
droits humains et des libertés fondamentales, ainsi que contre des actes
de violence perpétrés par des groupes ou des individus qui
entravent l'exercice des droits humains et des libertés
fondamentales. » Suivant cette norme, l'Etat doit pouvoir
élaborer un ordre juridique, c'est-à-dire normatif et
institutionnel, qui garantit efficacement la protection des militants des
droits fondamentaux. Pourtant, dans le contexte camerounais, il est clair que
l'Etat ne parvient pas à s'acquitter de cette obligation qui lui est
faite.
En effet, la réalité camerounaise se
détache de la prescription commandée par la déclaration de
98. Ceci principalement, parce que le cadre juridique interne ne reconnait pas
au défenseur, la nécessité d'une protection
spécifique ; la loi nationale ne s'intéressant à lui
qu'au même titre que la totalité des autres citoyens. Cet
écart entre le droit et les faits réels, est
interprété par certains comme un manque de volonté
politique clair. En effet, une défenseure locale fait l'analyse
suivante : « l'évaluation que je fais de la
protection des défenseurs des droits de l'Homme au Cameroun est purement
négative. Son effectivité est nulle. Il faut pour qu'elle
s'améliore, que l'Etat arrête la politique à double
détente dont il se prévaut habituellement, cette hypocrisie
sournoise qui consiste à faire semblant d'accepter tout haut les normes
internationales de droits de l'Homme, pour combattre violemment leur
implémentation tout bas par la suite. »343(*) Quoiqu'il en soit, il est
apparent que le noeud du problème se trouve là.
Précisément autour de la nécessité que revêt
la production de normes internes, légiférant
spécifiquement sur la protection de l'activité des
défenseurs. Pour un autre activiste, elle est évidente et
possède même une part cruciale, dans la mise en oeuvre d'un
système de protection des militants plus efficace :
« tout part des textes, il faut d'abord une loi qui
protège les défenseurs. Quand cette loi sera là, il faudra
un mécanisme pour suivre l'application de cette loi. Il faut une loi et
des règlementations en ce qui concerne spécifiquement les
défenseurs des droits de l'Homme. »344(*) En effet, seule la
reconnaissance officielle ponctuée par la force du droit permettra de
donner à la fonction de défense des droits de l'Homme, l'assise
sociale dont elle a besoin pour mieux s'épanouir au Cameroun. Seul le
pouvoir de la loi arrivera à garantir la protection des militants contre
les agressions de tous ordres, quelle qu'en soit leur origine. Seule la force
de coercition exercée par la menace d'une sanction, pourra
fédérer les populations et les autorités, quelques soient
leurs propres éthiques et philosophies, sous la contrainte de collaborer
et de coopérer avec les défenseurs.
Pour parvenir à ces fins, c'est-à-dire arriver
à un cadre juridique produisant ces effets, la démarche du
législateur doit pouvoir intégrer certains éléments
d'une importance cruciale. Loin toutefois, d'ambitionner élaborer un
manuel de conception du projet de loi qui sera élaboré en ce
sens, il s'agit plus d'indiquer les bases sur lesquelles doit s'appuyer la
création d'une législation soucieuse, d'une protection efficace
des défenseurs des droits de l'Homme. En fait, le législateur
camerounais notamment, devrait pouvoir incorporer la Déclaration des
Nations Unies sur les défenseurs au sein d'une norme légale
interne, qui détermine distinctement d'une part, la critériologie
définissant la qualité de professionnel des droits de l'Homme
ainsi que d'autre part, la nature et l'étendue des obligations
auxquelles l'Etat se trouve tenu envers les détenteurs de ce statut. En
outre, le législateur devra au moyen de cette loi, créer un
mécanisme national destiné à la protection des
défenseurs des droits de l'Homme, dont il définira soigneusement
les missions et le fonctionnement.345(*)
2) L'établissement
d'un mécanisme de monitoring destiné à surveiller
l'application de la loi
La mise en oeuvre d'un cadre juridique assurant une protection
plus efficace des défenseurs des droits de l'Homme au Cameroun,
intègre en plus de l'adoption d'une loi encadrant l'activité, la
mise en place d'un dispositif destiné à assurer
l'implémentation de la dite norme. Il faudra en fait à la suite
de la norme légale, créer une institution dont la principale
mission, sera d'assurer le monitoring de l'application de celle-ci. Cette
mesure est elle aussi, une obligation attribuée par le droit
international à l'Etat. La déclaration de 98 encore, en son
article 14(3) consacre cette responsabilité de l'Etat, selon ce qu'il
suit : « l'Etat encourage et appuie, lorsqu'il convient, la
création et le développement d'autres institutions nationales
indépendantes pour la promotion et la protection des droits de l'Homme
et des libertés fondamentales dans tout territoire relevant de sa
juridiction, qu'il s'agisse d'un médiateur, d'une commission des droits
de l'Homme ou de tout autre type d'institution nationale. » Le
Cameroun dispose déjà, d'une institution nationale de droits de
l'Homme : la Commission nationale des droits de l'Homme et des
libertés. Cependant, pour que cette institution puisse jouer le
rôle de mécanisme d'appui de la loi sur les défenseurs, il
faudra nécessairement réaménager son statut
légal.
En effet, le statut actuel régissant le fonctionnement
de la CNDHL tel qu'il est organisé par la loi n° 2004/016 du 22
juillet 2004, limite la capacité de l'institution à assurer une
protection fiable des défenseurs des droits de l'Homme. La loi encourage
la dépendance administrative et financière de l'institution
vis-à-vis du pouvoir exécutif en place. Ceci en raison de ce
qu'en premier lieu les membres de la Commission sont formellement nommés
par le Président de la République et aussi, parce que le budget
animant le fonctionnement de celle-ci, est voté par l'Etat. C'est en ce
sens qu'il est nécessaire de modifier la loi régissant la
structuration de l'institution, afin que cette dernière soit à
même de devenir l'acteur majeur qu'elle doit être dans la mise en
oeuvre d'une protection adéquate des défenseurs. C'est l'opinion
d'un responsable de l'équipe de protection CNDHL-Centre :
« il faut modifier la loi qui aménage le fonctionnement de
la Commission, de sorte à permettre à ses acteurs de mener
aisément et efficacement, les activités de promotion et de
protection des droits de l'Homme. Les éléments à toucher
dans cette opération de révision sont au nombre de deux. Il
s'agit d'abord de l'autonomie financière : à ce niveau,
l'institution doit pouvoir être en mesure de voter elle-même son
budget à l'assemblée, comme les autres institutions
étatiques. Le second point à revoir, c'est celui de la
désignation des responsables : ils doivent être votés
ou élus par les représentants du peuple, et non le
gouvernement. »346(*) Toutefois, si les mesures ainsi prescrites
constitueront déjà une avancée indéniable, il est
nécessaire d'investir la Commission de davantage de pouvoirs, pour
qu'elle puisse assurer l'implémentation de la future loi sur les
défenseurs.
Il est nécessaire en fait, que la réforme dont
la CNDHL doit faire l'objet, puisse lui accorder les fonctions
spécifiques d'un bureau de protection des défenseurs des droits
de l'Homme, telles qu'elles sont définies par les principes de Paris et
la déclaration de 98347(*). La Commission devra ainsi se voir investir d'un
réel pouvoir d'investigation et aussi, de la capacité de
contraindre les intéressés à coopérer avec elle,
sous peine de sanctions judiciaires pénales. C'est tout au moins, le
modèle inspiré par un défenseur, qui voit en la
restructuration une condition de la mise en oeuvre d'une meilleure protection
locale des défenseurs. Pour lui : « il faut
créer à partir du modèle de l'actuelle, une nouvelle
Commission nationale avec de réels pouvoirs, des antennes dans tous les
départements, un mandat clair de protection des droits de l'Homme en
général et des droits des défenseurs en particulier. Cette
institution aura pour mission de mener entre autres, les actions
suivantes : apporter l'assistance nécessaire aux défenseurs
des droits de l'Homme en difficulté ; demander des comptes en temps
et en heures au sujet des violations commises contre les droits des
défenseurs et les obtenir, sous peine de sanctions ; promouvoir le
statut du défenseur des droits de l'Homme auprès du large
public. »348(*) Les mesures juridiques destinées à
améliorer la mise en oeuvre par le Cameroun, des normes internationales
de protection des défenseurs sont de deux ordres. Elles consistent
d'abord, en la restructuration du cadre légal et institutionnel relatif
à la protection des militants. Ensuite, elles s'articuleront autour de
la vulgarisation des lois internes et internationales, protégeant les
travailleurs des droits de l'Homme.
B/ La codification des
textes existant se rapportant à la protection des
défenseurs
La déclaration des Nations Unies sur les
défenseurs en son article 14(2), oblige l'Etat à assurer
« la publication et [la] large disponibilité des textes de
lois et règlements nationaux et des instruments internationaux
fondamentaux relatifs aux droits de l'Homme. » Cette disposition
implique notamment, que celui-ci doit pouvoir assurer la vulgarisation des
textes existant aussi bien internes et internationaux, traitant de la
protection des défenseurs des droits de l'Homme. Pourtant, au cours de
l'enquête réalisée dans le cadre de cette étude,
l'on sait rendu compte de ce que la majorité des défenseurs
interrogés, n'avaient même pas connaissance de l'existence
d'instruments internationaux encadrant spécifiquement la conduite de
leur activité. Comment dans un tel contexte peuvent-ils se
prévaloir de ces normes et, définir leurs itinéraires en
fonction d'elles ? En fait, il faut dire que la distance entre les
justiciables et la règle est un problème prégnant
caractérisant le système juridique camerounais tout entier. C'est
ainsi que parmi les écueils à une protection efficace des droits
de l'Homme à l'échelle nationale, un défenseur mentionne
l'inappropriation de la loi en vigueur par les acteurs. Pour lui,
« s'il y a du progrès, il faut également encore
beaucoup faire pour la protection des droits de l'Homme au Cameroun. Comme
problème à l'effectivité de cette dernière, il faut
relever en premier lieu, celui lié à l'appropriation et à
l'application des textes par les individus. En fait, très souvent, on a
de bons textes mais, leur connaissance fait défaut y compris même
chez ceux qui en ont besoin. »349(*) Un autre, expose en des termes durs et amers la
même réalité, tout en se focalisant particulièrement
sur le cas de la déclaration universelle de 1948. « Je
déplore que bien que la déclaration universelle des droits de
l'Homme soit une substance de notre constitution, qu'elle soit mal connue sinon
méconnue même, de nos autorités. Il s'agit là d'une
observation résultant de mes propres expériences et, quand une
chose est ignorée, elle ne peut être pratiquée. Sil elle
était connue, elle n'aurait peut-être pas été
totalement appliquée, mais elle l'aurait quand même
été. Mais tel que les choses se passent au terroir, j'ai envie de
dire qu'elle n'est pas connue. Il faut donc un travail de sensibilisation et
d'enseignement des dispositions de la norme dans tous les milieux sociaux et
même dans les programmes éducatifs. Ce devrait même
être une norme. »350(*)
C'est en raison de cette difficulté des justiciables
à accéder aux normes, qu'il est indispensable de les rapprocher
de leurs destinataires. Il faut recenser l'ensemble des normes internationales
et internes protégeant les défenseurs, et les publier à
l'intérieur d'un code qui traitera spécifiquement de la question.
Cette codification en plus de faciliter l'accès des normes à
leurs bénéficiaires et aux acteurs, va apporter à
celles-ci une sécurité juridique. Ceci garantira leur existence,
notamment au travers de l'aisance pour les justiciables à y recourir.
Mais également, ce procédé préservera les normes de
protection des défenseurs, contre tout écran législatif
pouvant potentiellement nuire à leur application. C'est pourquoi, il est
absolument important de la faire suivre à la réformation du cadre
juridique interne relatif à la question de la protection des
travailleurs des droits de l'Homme. Pourtant, toutes ces mesures qu'il faudra
déployer à l'interne, dépendent fortement de la mise en
oeuvre d'actions d'une plus grande envergure, aux échelles universelle
et régionale.
XIX. SECTION 2 : LES MESURES
CORRECTIVES SUR LE PLAN INTERNATIONAL
Les stratégies adoptées à
l'échelle interne camerounaise, doivent intervenir dans le cadre de
dynamiques beaucoup plus larges, actionnées à au niveau
international. De l'avis d'un observateur, « bien que la
Déclaration de l'ONU sur les défenseurs ait été
approuvée en 1998, les expériences relatives à
l'institution de normes et d'instances nationales de protection des
défenseurs sont rares, et la majorité d'entre elles ont lieu en
Amérique latine. Si nous devions proposer des pistes d'explication, nous
citerions probablement la pression d'une société civile forte et
revendicative en matière de droits humains, ainsi que l'existence d'un
système régional de défense des droits humains
structuré. Ces deux éléments ont peut-être pu
générer la volonté politique nécessaire des
gouvernements nationaux. »351(*) Au-delà de la prudence qui l'anime, cette
pensée met bien en lumière le fait que les grands changements
intervenant dans les politiques nationales, trouvent bien souvent leur origine
et sont favorisés, par les mouvements impulsés par les
décideurs internationaux. L'ordre national n'a-t-il pas par ailleurs,
finalement plus vocation à être influencé par le
système international et à recevoir de lui, qu'à
l'influencer ? Toutefois sans vouloir entrer dans un large débat
extérieur aux fins de l'analyse, il s'agit juste d'introduire que pour
une meilleure mise en oeuvre des normes internationales de protection des
défenseurs des droits de l'Homme au Cameroun, il importe
nécessairement d'impulser des politiques destinées à
renforcer et à réviser les systèmes onusien (paragraphe 1)
et africain (paragraphe 2) de protection des droits de l'Homme.
A. Paragraphe 1 : Au
niveau universel
Les décideurs onusiens, dans l'objectif d'assurer une
meilleure protection des défenseurs des droits de l'Homme, gagneraient
tout d'abord à renforcer les mécanismes règlementant la
réalisation par l'Etat de ses engagements internationaux en
matière de droits de l'Homme (A). Toutefois, c'est un investissement
dans la production d'un instrument conventionnel organisant
spécifiquement la protection de l'activité de défense des
droits de l'Homme, qui marquera une avancée significative vers
l'idéal poursuivi (B).
A/ Un encadrement plus
coercitif de l'exécution par l'Etat de son obligation de protéger
les droits fondamentaux de ses nationaux
Le droit international des droits de l'Homme, dans la large
part des instruments fondamentaux positifs le constituant, consacre
l'obligation pour l'Etat de mettre en oeuvre la promotion et la protection, des
prérogatives fondamentales reconnues aux personnes relevant de sa
juridiction.352(*) De
l'avis d'une part de la doctrine, ces dispositions placent essentiellement sous
la responsabilité de l'Etat, trois obligations : celles de
« respecter, réaliser et protéger les droits de
l'Homme »353(*). C'est dire qu'en fait, l'Etat est tenu de recourir
aux mesures législatives, administratives, judiciaires et toutes autre
nécessaires que lui confère sa puissance régalienne, pour
garantir effectivement à tout individu et sans discrimination, les
droits et libertés fondamentales qu'ils possède, en vertu de sa
dignité intrinsèque.
Toutefois, dans le cadre de cette étude, l'on a bien pu
remarquer à loisir, que ces dispositions constituaient le cadre
juridique encadrant la protection des droits de l'Homme au Cameroun. Pourtant,
malgré la forcé législative -constitutionnelle même
pour certaines- reconnues à ces normes, force à été
encore de constater la prégnance dans la réalité, des
limitations et des violations commises impunément, à l'attention
de leurs bénéficiaires. Forfaits et travers qui pour la plupart
par ailleurs, étaient allégués à des
autorités ou à des agents étatiques. Dès lors,
quelle lecture faire de cet état des choses ? L'on peut très
bien rationnellement envisager, que les mesures prises à l'international
pour assurer le monitoring de ces dispositions, ne sont pas assez efficaces
pour contraindre l'Etat à mettre en oeuvre les obligations auxquelles il
consent à être lié. Une telle conclusion est loin
d'être hasardeuse et de provenir ex nihilo. Ceci d'autant plus que lors
de l'analyse du contexte camerounais, l'on a bien mis en exergue le fait que le
pays ait rejeté sans inquiétude, toutes les recommandations qui
lui ont été adressées au sujet de la mise en oeuvre
d'actions concrètes spécifiques, destinées à
protéger effectivement les défenseurs des droits de l'Homme, dans
le cadre du second cycle de l'examen périodique universel (EPU). Quand
on sait que l'EPU est un mécanisme mis en oeuvre pour assurer le suivi
de l'exécution des obligations internationales contractées par
l'Etat, on est en droit de se questionner à l'exemple de ce cas patent,
sur sa portée réelle. Quelle en est la consistance ? Dispose
t-il de moyens réels efficaces pour obliger l'Etat même contre son
gré, à réaliser ses engagements internationaux en
matière de droits de l'Homme ? Dans le cas concret envisagé
ici, il semble apparent que ce ne soit pas le cas. A côté de ce
mécanisme, il faut également convoquer les autres dispositifs,
à savoir les quasi-juridictions ainsi que les rapporteurs
spéciaux, intervenant dans le domaine spécifique de la protection
des défenseurs des droits de l'Homme. Une quasi-juridiction peut-elle
véritablement contraindre l'Etat, quand on sait qu'elle n'a pas la
possibilité de rendre des décisions ayant autorité de la
chose jugée et force de coercition ? En d'autres termes, est-on
logiquement en droit d'escompter que le Comité des droits de l'Homme ait
plus de chance auprès des Etats, que l'EPU quand il repose sur les
même ressorts ? Pareil pour le rapporteur ; en dépit de
toutes les missions et pouvoirs qu'il puisse avoir en sa possession, de quels
moyens dispose t-il pour obliger l'Etat à agir ? Rien et moins que
la conscience de l'Etat, comme c'est le cas pour la totalité des
dispositifs évoqués ici.
En effet, une observation froide des mécanismes
employés par le système de monitoring de l'application du droit
international des droits de l'Homme, permet d'appréhender le fait que,
ces derniers reposent en fait, sur la bonne conscience des Etats. Le principe
de la sacro-sainte souveraineté de l'Etat s'érige encore avec
force contre l'avancée pourtant fulgurante de la diplomatie des droits
de l'Homme, ne laissant comme garantie de leur implémentation à
ces derniers, que la gestion en paterfamilias de l'Etat. Dès lors,
peut-on véritablement attendre de l'Etat qu'il puisse au nom de la cause
des droits de l'Homme, prendre des mesures qui ne l'arrangent pas ? Il est
difficile d'imaginer une telle hypothèse, encore plus quand l'on se
remémore le dicton suivant lequel « les Etats n'ont pas
d'amis, mais uniquement des intérêts. » Toutefois,
les multiples questionnements soulevés ici, ont pour but d'amener
à appréhender que la garantie d'une réalisation
systématique pas les Etats de leurs engagements en matière de
droits de l'Homme, passe par la mise en oeuvre d'un système
international de monitoring, plus offensif. L'idée est pour la
communauté des acteurs internationaux, d'oeuvrer à diminuer ce
trop grand pouvoir discrétionnaire laissé à l'Etat dans la
mise en oeuvre de ses engagements internationaux. Ceci étant
donné de ce que les exemples comme le cas à l'honneur dans cette
étude, attestent de la thèse suivant laquelle, cette importante
marge de manoeuvre en vient à hypothéquer la réalisation
même des droits fondamentaux des individus. Et si l'idée
réside là, l'idéal pour sa part, s'articule autour de
l'élaboration de mesures de contrôle coercitives, encadrant
l'exécution par l'Etat de son obligation de protéger les droits
fondamentaux de ses nationaux, capables de sanctionner les manquements commis
par celui-ci en ce sens.
Le lobbying est le mot d'ordre devant guider l'ensemble des
mesures destinées à renforcer et à réformer le
système international de protection des défenseurs des droits de
l'Homme. C'est ce qui ressort de l'analyse faite par le membre de
l'unité de protection de la CNDHL-Centre que l'on a rencontré au
cours de l'enquête réalisée. Selon lui,
« à l'échelle internationale, les institutions
internationales doivent mettre la pression pour les cas dont elle est
informée, sur les Etats afin qu'ils assurent et mettent en oeuvre les
mesures nécessaires pour une protection efficace et meilleure des
défenseurs des droits de l'Homme. Il faut une implication forte de la
communauté internationale notamment parce que les gouvernements aiment
qu'on les frappe par le haut. J'en veux pour preuve, que les appels urgents
émanant des ONG internationales amènent plus les autorités
à réagir, que les plaintes des défenseurs
elles-mêmes. »354(*) Il importe de mettre sur pied une politique de
lobbying efficace et performante, rompue à faire passer le devoir de
l'Etat de réaliser les droits et libertés des personnes relevant
de sa compétence, du régime juridique international d'une
obligation de moyens, à celui d'une obligation de résultat. Ce
n'est qu'à ce moment que l'on pourra véritablement envisager une
mise en oeuvre complète par l'Etat camerounais au même titre que
tous les autres, des normes internationales de protection des défenseurs
des droits de l'Homme. Et encore, c'est dans cette dynamique qu'il faut se
situer, pour renforcer le cadre défini par ces textes.
B/ La conception d'un
cadre juridique conventionnel traitant spécifiquement de la protection
des défenseurs des droits de l'Homme
Le second axe sur lequel le lobby exercé pour la
réformation du système juridique international en vue d'une
amélioration significative de la protection des défenseurs des
droits de l'Homme, devrait porter sur l'amélioration des textes existant
en la matière. Il s'agit concrètement de militer pour l'adoption
d'une loi conventionnelle édictant les principes qui
règlementeront l'activité à l'échelle universelle,
et formulant les standards qui coordonneront la sécurisation des
travailleurs des droits de l'Homme à travers le monde. Il est question
en quelque sorte d'élaborer une norme de portée contraignante
avant-gardiste en la matière, qui aura la charge de stimuler et
d'harmoniser les efforts législatifs nationaux émis dans
l'intention de protéger les professionnels des droits fondamentaux.
Cette mesure est à l'image de l'initiative proposée par un
activiste de la place : « au niveau international, il est
nécessaire d'intensifier les pressions diplomatiques. Il faut qu'il y
ait une dynamique d'ensemble pour faire pression sur les Etats qui ne
protègent pas les défenseurs. Mais surtout, vu qu'il s'agit d'un
droit spécifique, il faut un texte contraignant, une convention de
portée spécifique pour protéger les défenseurs des
droits de l'Homme, parce qu'une déclaration à elle seule, ne
suffit pas. Il faut des normes au sens puriste du terme et pas seulement des
déclarations, une convention comme celles qui existent relativement
à d'autres matières de droits de l'Homme, qui organisera
spécifiquement la protection de ceux qui exploitent la défense
des droits de l'Homme, dans un cadre strictement
professionnel. »355(*)
C'est justement la voie qu'il faut suivre, à notre
humble sens. Les décideurs internationaux de même que la
totalité de la communauté internationale, tireraient
énormément de profit, de l'encadrement par une norme de force
conventionnelle, de l'activité et de la protection des militants des
droits de l'Homme. Pour quelle raison, simplement à cause du rôle
important joué par ceux-ci pour la promotion et la protection des
prérogatives reconnues à l'humanité toute entière.
En effet, les défenseurs symbolisent une catégorie
d'individus356(*), dont
le rôle est crucial pour la réalisation des droits
déjà consacrés et protégés à
l'attention de la totalité et de l'intégralité des autres
catégories sociales d'individus (femmes, enfants, handicapés,...)
C'est leur action courageuse de dénonciation et de formation, qui permet
aux bénéficiaires de ces droits de les connaître, d'en
jouir et de s'en prévaloir. C'est grâce à eux que
l'essentiel des instruments de droit international des droits de l'Homme
s'implantent de la société et mieux même, prennent vie.
C'est dire en fait, que les défenseurs sont le maillon fort, l'âme
du mouvement international de promotion et de défense des droits de
l'Homme. C'est en ce sens, que la communauté internationale gagnerait
à investir dans la mise en oeuvre d'un cadre juridique conventionnel
spécifique relatif à leur protection. Ceci en raison de ce que,
la protection efficace et effective des professionnels des droits de l'Homme
constitue en fait, un choix ciblé et une action significative pour
l'amélioration et la protection des droits de l'Homme. M. Margaret
SEKAGGYA, rapporteure spéciale des Nations Unies sur la situation des
défenseurs des droits de l'Homme, n'affirmait-elle pas fort à
propos que : « la protection des défenseurs a un
effet multiplicateur sur la protection des droits de
l'Homme »357(*) ? Il est donc vital pour l'amélioration
des systèmes de protection internationaux et internes de protection des
défenseurs des droits de l'Homme, d'élaborer une norme
conventionnelle règlementant spécifiquement la question. Cette
convention devra être assortie par ailleurs, d'un mécanisme
juridictionnel destiné à assurer le monitoring de
l'implémentation du texte et, compétent pour connaître du
contentieux lié à l'application de ce dernier. Il s'agit
là d'une mesure hautement nécessaire due à l'importance de
la protection du défenseur pour la préservation des droits
reconnus à la totalité des hommes. Loin de constituer une
fantaisie, c'est compte de cet enjeu crucial et majeur que la convention sur la
protection des défenseurs des droits de l'Homme, à la
différence des autres assorties de quasi-juridictions, devra être
appuyée par un mécanisme juridictionnel à part
entière, destiné à veiller méticuleusement au
respect et à la réalisation de ses dispositions.
B. Paragraphe 2 : A
l'échelle régionale africaine
Il est essentiel d'avoir un système régional de
protection des droits de l'Homme attractif et performant, capable d'encourager
les Etats à promouvoir et protéger les droits des
défenseurs. De manière générale, le système
africain en lui-même, relativement à la question de la protection
des défenseurs des droits de l'Homme, à toujours bien suivi les
dynamiques impulsées au niveau universel. En effet, à la base, la
Charte africaine des droits de l'Homme et des peuples sur lequel il se fonde,
reprend d'essentiel des dispositions consacrées par les instruments
universels des droits de l'Homme, consacrant des prérogatives
nécessaires à l'opérationnalisation des activités
de défense des libertés fondamentales. En outre, rapidement
à la suite de l'adoption de la résolution n° 53/144 en
1998, il s'est doté de normes allant dans le sens de la
répercussion en son sein, de l'engagement solennel pris alors par les
Nations Unies. De plus, la Commission africaine a encore affirmé cette
intention de suivre le système universel, dans la protection
internationale des militants, par la création en 2004 du
mécanisme de rapportage spécial sur la situation des
défenseurs en Afrique, à la suite de la Commission des droits de
l'Homme en 2000. La résultante est que le système africain de
protection des droits de l'Homme présente aujourd'hui au regard de la
législation internationale positive, un cadre juridique
intéressant en matière de protection des défenseurs.
Compte tenu de cette tendance liée à la réception par le
système régional africain, des options définies au niveau
universel, l'on peut rationnellement escompter, excepté revirement
accidentel, que les mesures prescrites pour la réformation de la
politique onusienne de défense des droits des activistes, puissent
trouver écho à l'échelle africaine.
Toutefois, des actions sont à entreprendre ici, dans le
sens notamment de rompre avec cette politique attentiste. Un travail de
lobbying et de plaidoyer important, est à mener résolument par
les acteurs de la société civile continentale, pour doter le
système régional d'outils plus efficaces pour la protection
spécifique des défenseurs. L'on est également en droit
d'attendre que le changement vienne d'ici et pas seulement continuellement d'en
haut. Néanmoins, un tel projet requiert d'abord l'auto-conscientisation
des acteurs des sociétés civiles africaines et, leur
volonté de s'unifier pour marcher d'un seul pas et ne parler que d'une
voix. Ce n'est que lorsque la société des défenseurs sera
elle-même assez solidaire et forte, qu'elle pourra mener, de concert avec
les autorités, les combats relatifs aux questions engageant son avenir
et son épanouissement. C'est dans cette optique, qu'il faudrait
investir, encourager et soutenir des initiatives telles que le réseau
panafricain des défenseurs des droits humains ou encore, les
réseaux d'étendue sous-régionale tels que le réseau
des défenseurs des droits humains (REDHAC) et le projet des
défenseurs des droits de l'Homme de l'Est et la corne de l'Afrique
(EHAHRDP). Dans cet ordre de pensée, M. Félix AHOUANSOU croit en
les vertus de la promotion de la coopération et du dialogue entre les
différents acteurs institutionnels, pour la mise en oeuvre d'un cadre
plus propice et fertile à la défense harmonieuse des droits de
l'Homme en Afrique. De son avis, « seuls le dialogue avec les
Etats et la synergie d'actions au plan régional est susceptible de
favoriser le travail des défenseurs des droits de l'Homme en Afrique.
Car la défense des droits de l'Homme ne doit pas être synonyme
d'antagonisme avec les gouvernants. Les propos trop syndicalistes, les actes de
violence ne sont pas de nature à arranger les choses entre Gouvernements
et défenseurs des droits de l'Homme. Au contraire, la violence et
l'arrogance se trouvent parfaitement aux antipodes de la défense des
droits de l'Homme. »358(*)
CONSLUSION DU QUATRIEME CHAPITRE
Dans ce chapitre, l'objectif était de montrer que les
limites qui entravent la mise en oeuvre, des normes internationales de
protection des défenseurs des droits de l'Homme au Cameroun, ne
constituent pas des obstacles infranchissables. Bien au contraire, ces
écueils sont parfaitement réversibles. Toutefois même si
c'est le cas, afin de pouvoir surmonter ces obstacles, il est nécessaire
d'élaborer et d'exécuter des stratégies bien
précises. Ces mesures correctives, doivent pour être efficaces
déployées conjointement à l'échelle interne
camerounaise et, au niveau international. Au niveau national, il faut recourir
à des politiques de réformes institutionnelles et juridiques. Les
premières s'articulent autour d'abord d'une part, de la
professionnalisation de la communauté locale de défenseurs et du
renforcement de la synergie entre ceux-ci. Elles font intervenir ensuite
d'autre part, la promotion du dialogue et de la coopération entre
l'intégralité des acteurs à savoir : les militants
des droits de l'Homme, les autorités, la Commission Nationale des droits
de l'Homme et des libertés ainsi que les populations. Les secondes
mesures tiennent essentiellement à la production d'un nouveau cadre
juridique interne consacrant le statut du défenseur et, au recensement
et à la publication des textes protégeant les militants des
droits de l'Homme. Les stratégies développées à
l'échelle camerounaise, devront s'intégrer dans un champ plus
large de politiques impulsées au niveau onusien et sur le plan
régional africain. Ces dernières s'attachent principalement au
renforcement des mécanismes de monitoring d'une part et, à la
production de dispositions conventionnelles, traitant spécifiquement de
la protection des défenseurs des droits de l'Homme. Elles ne pourront
être incitées que grâce à une campagne de plaidoyers
et lobbying, mise ne route par une communauté éclairée et
unifiée de militants, accompagnés par des observateurs
résolus et soucieux de la protection des droits de l'Homme.
CONSLUSION DE LA SECONDE PARTIE
Cette seconde partie poursuivait l'objectif d'analyser la
portée sociale concrète des mesures déployées par
l'Etat camerounais, dans le but d'assurer la protection des défenseurs
des droits de l'Homme relevant de sa juridiction, conformément aux
standards internationaux. Il s'agissait concrètement
d'appréhender par le biais d'un examen du contexte social national
réel, le degré de mise en oeuvre des textes internationaux
protégeant les militants. Dès lors, jusqu'où peut-on dire
que le Cameroun met en oeuvre ces instruments ? En guise de réponse
à cette interrogation, retenons trois choses. D'abord que cette mise en
oeuvre est effective de toutes les façons, compte tenu de ce que l'Etat
a mis en place des mesures législatives et institutionnelles,
destinées à assurer l'application des dispositions
consacrées par ces normes. D'autre part, que cette mise en oeuvre est
toutefois considérablement entravée, par des écueils
émanant des déficiences dont sont victimes, les mécanismes
déployés par l'Etat. Ces insuffisances ou obstacles, tiennent
précisément à l'inadéquation des cadres juridiques
international et camerounais, ainsi qu'à la faiblesse du dispositif
institutionnel camerounais, en charge de l'application de ces instruments.
Néanmoins il faut encore saisir que, la limitation obstruant
l'effectivité de la mise en oeuvre par le Cameroun, du droit
international relatif à la protection des professionnels des droits de
l'Homme, n'est pas péremptoire. A ce titre, la
réversibilité de cette dernière passe par la mise en
oeuvre de mesures correctives et de stratégies palliatives,
destinées à réformer les systèmes camerounais,
africain et onusien de protection des droits de l'Homme en
général, et des défenseurs en particulier. Ces conclusions
amènent donc à confirmer le postulat qui soutenait cette
recherche. Hypothèse qui on le rappelle, supposait dans un premier
temps, la réalité de l'effectivité de la mise en oeuvre
des normes internationales de protection des surveillants des droits de l'Homme
au Cameroun. Réalité qu'elle tempérait dans un second
moment, par l'existence de difficultés, toutefois surmontables.
CONCLUSION GENERALE
L'approche méthodologique adoptée dans le cadre
de ce travail de recherche, a conduit à la développer, sous le
prisme de l'effectivité de la mise en oeuvre des normes internationales
protégeant les professionnels des droits de l'Homme au Cameroun. Il
était ainsi précisément question, d'analyser comment et
jusqu'où les instruments internationaux de protection des militants,
sont mises en oeuvre au Cameroun. Une hypothèse a été
formulée pour éclairer l'étude. Celle-ci précisait
que cette mise en oeuvre est effective même si toutefois, elle se heurte
difficultés, qu'il faut résoudre.
Dans un premier temps, il apparaît que l'Etat a investi
dans des procédés normatifs et institutionnels, afin de garantir
aux militants relevant de sa juridiction, l'essentiel des prérogatives
internationales qui leur sont reconnus. Ces techniques consistent d'abord, en
l'internalisation des instruments internationaux protégeant les
défenseurs et, en la consécration législative de
prérogatives nécessaires à l'opérationnalisation de
l'activité de défense des droits de l'Homme. Elles reposent
ensuite au-delà de cet encadrement, sur la mise en place de
mécanismes institutionnels, destinés à assurer
l'implémentation des droits protégés. Au vu de ces
éléments, il est logique d'affirmer l'effectivité de la
mise en oeuvre au Cameroun, des textes de protection des défenseurs.
Cependant dans un second volet, un examen de la
réalité sociale permet de se rendre compte de ce que dans la
pratique, les défenseurs camerounais évoluent dans un contexte
où leurs droits sont fréquemment niés et bafoués.
Pour cause, la déficience des techniques d'appui érigées
par l'Etat pour assurer l'internalisation des normes les protégeant. Des
obstacles juridiques et institutionnels, limitent considérablement la
mise en oeuvre par les autorités, des textes assurant la protection des
militants. Néanmoins, cette limitation peut être
résorbée, notamment au moyen de mesures, destinées
à réformer les systèmes interne et international de
protection des professionnels des droits de l'Homme. Voilà qui
achève de confirmer le postulat, émis au départ de la
recherche.
Toutefois, il faut nécessairement tempérer les
résultats obtenus à la lumière de cette étude,
compte tenu notamment, des limites dont elle a fait l'objet. La première
à évoquer à ce titre, consiste justement, en la faible
dimension de l'échantillon exploité. Relativement aux
restrictions de temps et de ressources auxquelles l'on s'est trouvé
astreint, il n'était pas possible d'enquêter sur une grande
proportion de personnes. La conséquence est qu'il faut apporter des
cautions quant aux conclusions obtenues. Toujours dans le même sens, il
faut encore déplorer le fait que le guide employé n'est pu
être assez fouillé et, que l'on ait été contraint de
négliger des pistes qui pouvaient apporter une vue plus large de la
réalité. C'est le cas ici par exemple, des informations relatives
au vécu des défenseurs enquêtés. Il s'agit
précisément d'abord, des motivations qui les poussent à se
lancer dans le travail des droits de l'Homme et aussi, des formations qu'ils
ont reçu avant de s'y destiner (leur profil). Ceci aurait pu apporter
plus d'éclaircis sur leurs itinéraires et, permis d'expliquer
certains faits découverts tout au long de l'analyse, tels que la
méconnaissance par bon nombre des défenseurs de la
légalité interne et internationale relative à leur
profession ou encore, la maîtrise technique et professionnelle,
très variable de chacun des défenseurs interrogés.
Néanmoins ceci ne décrédibilise en
aucune façon l'étude menée, mais ouvre plutôt des
pistes exploitables pour de prochaines recherches qui pourront et devront
même, être menées sur le sujet. Sujet par ailleurs, tout
aussi important qu'il traite d'une thématique aux enjeux des plus
sérieux car au final, la nécessité de défendre les
professionnels des droits de l'Homme ne relève pas d'un vague besoin
d'étendre la législation internationale à une autre
catégorie d'individus quelconque. Bien au contraire, comme cela est
apparu en trame de fond tout au long de l'analyse, l'enjeu participe de la
protection et de la sauvegarde même, des droits de tous les hommes. Les
défenseurs des droits et libertés fondamentales, constituent les
maillons essentiels et les leviers sur lesquels la promotion d'une culture des
droits de l'Homme devra s'appuyer. Les différents acteurs ont donc le
plus grand intérêt à réfléchir autour de la
question de leur protection.
BIBLIOGRAPHIE
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et cours
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3) Thèses et mémoires
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4) Articles
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5) Documents
a. Textes officiels
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· Pacte international relatif aux droits civils et
politiques du 16 décembre 1966.
· Principes de Paris d'octobre 1991, concernant le statut
et le fonctionnement des institutions nationales pour la protection et da
promotion des droits de l'Homme.
· Résolution n° 53/144 de l'Assemblée
générale des Nations Unies portant Déclaration
sur le droit et la responsabilité des individus, groupes et organes de
la société de promouvoir et protéger les droits de l'homme
et les libertés fondamentales universellement reconnus du 9
décembre 1998.
ii. Textes internes camerounais
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portant création du Comité National des Droits de l'Homme et des
Libertés.
· Loi n° 96-06 du 18 Janvier 1996 portant
Constitution de la République du Cameroun.
· Loi n° 2004/016 du 22 juillet 2004 portant
création, organisation et fonctionnement de la Commission nationale des
droits de l'Homme et des libertés.
· Loi n° 90/43 du 19 décembre 1990 portant
sur le déplacement et la libre circulation des personnes.
· Loi n° 90/052 du 19 décembre 1990 relative
à la liberté de communication sociale.
· Loi n° 90/053 du 19 décembre 1990 relative
à la liberté d'association.
· Loi n° 90/055 du 19 décembre 1990 sur le
régime des réunions et des manifestations publiques.
· Loi n° 2006/015 du 29 Décembre 2006.
· Décret n° 95/048 du 08 Mars 1995 portant
statut de la magistrature.
b. Rapports et autres documents
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· AMNESTY INTERNATIONAL, La situation des droits
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· Bulletin quotidien de l'ONU, n° PPG/5702 du
vendredi 10 décembre 2010, 13 pages.
· Centre pour les Droits de l'Homme et la
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édition spéciale du 10 décembre 2010, 7 pages.
· Commission Interaméricaine des droits de
l'Homme, Rapport sur la situation des défenseurs des droits de
l'Homme dans les Amériques, OEA/Ser.L/V/II. 124, Doc. 5 Fr,
adopté à sa 124ème session ordinaire, 7 mars
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ANNEXES
Outils méthodologiques
1) Guide d'entretien à l'attention des
défenseurs des droits de l'Homme
2) Guide d'entretien à l'attention des membres de
l'unité de protection de la CNDHL
3) Guide d'entretien à l'attention des coordonnateurs
de réseaux
Textes internationaux
Textes
universels
4) Résolution n° 53/144 adoptée par
l'Assemblée Générale des Nations Unies portant :
« Déclaration sur le droit et la responsabilité des
individus, groupes et organes de la société de promouvoir et
protéger les droits de l'homme et les libertés fondamentales
universellement reconnus » du 9 décembre 1998
5) Résolution 2000/61 de la Commission des droits de
l'Homme des Nations Unies du 26 avril 2000
Textes régionaux africains
6) Déclaration de Kigali du 8 mai 2003
7) Déclaration et plan d'action de Grande Baie de
1999.
8) Résolution n° 69 de la Commission africaine des
droits de l'Homme et des peuples du 4 juin 2004
Textes nationaux
9) Second cycle de l'examen périodique universel,
recommandations du groupe de travail, Décisions du Cameroun
(extraits)
GUIDE D'ENTRETIEN UTILISE POUR LES DEFENSEURS DES
DROITS DE L'HOMME
1) Avant d'aborder vos réactions au regard de la
protection locale des défenseurs, est-ce que vous pourriez me dire qui
vous êtes. Je propose que vous fassiez un petit film de votre vie, comme
si vous étiez metteur en scène, en insistant sur ce qui vous
semble important. (Identification : nom de la structure, nom et
rôle/poste de la personne rencontrée).
2) Que fait concrètement votre association ?
Quelles activités mène t-elle notamment dans le domaine de
la défense des droits de l'Homme ?
3) Connaissez-vous les normes internationales de protection
des défenseurs des droits de l'Homme ? Pouvez-vous les
identifier ? Y recourrez vous et à quelle fréquence ?
Pouvez-vous dire que vous bénéficiez des droits qu'ils vous
reconnaissent (droit à être protégé, liberté
d'expression, d'association, droit de protestation, droit d'accès au
financement, droit de collaboration avec les organisations
internationales) ? Quelle appréciation faites-vous de
l'efficacité de ces dernières ?
4) Comment est-ce que conformément à ses
obligations internationales, l'Etat organise t-il la protection des
défenseurs ? Quelle appréciation faites-vous des mesures
qu'il déploie dans ce sens ?
5) Quelles sont les autorités qui interviennent dans la
mise en oeuvre des normes internationales de protection des
défenseurs ? Travaillent-elles en partenariat avec vous dans la
conduite de vos activités ?
6) Dans ce sens, quels sont vos relations avec les
différents rapporteurs internationaux oeuvrant dans le domaine de la
protection des défenseurs ? Comment analysez-vous leur
action : pensez-vous qu'elle est efficace, qu'elle impacte
véritablement sur l'évolution des choses ? Si oui pourquoi,
Si non, quels sont les heurts ?
7) Quelles difficultés rencontrez-vous dans la conduite
de vos activités ? Subissez-vous des menaces ? Sous quelles
formes et à quelle fréquence ? De la part de qui ?
Quelles mesures prenez-vous pour assurer votre protection ?
8) Quel regard jetez-vous sur la protection des droits de
l'Homme dans le contexte national ?
9) A votre avis, peut-on dire que la protection des
défenseurs des droits de l'Homme est effective au Cameroun ?
Quelles stratégies faudrait-il mettre en oeuvre aussi bien au niveau
local, qu'à l'échelle nationale, afin d'assurer une protection
efficace des défenseurs au Cameroun ?
10) Arrivés en fin d'entretien, avez-vous l'impression
que quelque chose d'important n'a pas été dit, que nous avons
oublié un aspect important des choses et que vous souhaiteriez
ajouter ? Avez-vous un dernier message que vous aimeriez faire
passer ?
GUIDE D'ENTRETIEN UTILISE POUR LES MEMBRES DE L'UNITE
DE PROTECTION DE LA CNDHL
1) Avant d'aborder vos réactions au regard de la
protection locale des défenseurs, est-ce que vous pourriez me dire qui
vous êtes. Je propose que vous fassiez un petit film de votre vie, comme
si vous étiez metteur en scène, en insistant sur ce qui vous
semble important. (Identification : nom de la structure, nom et
rôle/poste de la personne rencontrée).
2) Quel est clairement le mandat de la CNDHL ?
3) Quelles activités l'institution mène-t-elle
concrètement dans le domaine de la défense des droits de
l'Homme ? Comment organise-t-elle la mise en oeuvre de ces actions ?
D'aucuns disent de la CNDHL, qu'il s'agit d'un instrument sous le
contrôle à part entière de l'Etat dans les faits, qu'en
est-il réellement selon vous ?
4) Connaissez-vous les normes internationales
consacrées à la protection des défenseurs des droits de
l'Homme ? Pouvez-vous les identifier ? Quelle appréciation
faites-vous de leur efficacité ?
5) Comment est-ce que, conformément à ses
obligations internationales, l'Etat camerounais organise-t-il la protection des
défenseurs des droits de l'Homme ? Comment appréciez-vous
les mesures qu'il déploie en ce sens ?
6) Quelles sont les autorités qui interviennent dans la
mise en oeuvre des normes internationales de protection des
défenseurs ? Travaillent-elles en partenariat avec vous dans la
conduite de vos activités ?
7) Quels types de relations entretenez-vous avec les
défenseurs des droits de l'Homme ? Comment organisez-vous leur
protection, eu égard au caractère risqué de leur mission
et de son importance pour la cause des droits humains sur le territoire ?
En d'autres termes, disposez-vous au niveau de l'institution, de mesures de
protection spécifiques réservées aux
défenseurs ? Si oui, comment peuvent-ils en
bénéficier ? Le font-ils souvent ? Comment
appréciez-vous l'impact de ces mesures ?
8) Dans le même sens, quels sont vos relations avec les
différents rapporteurs internationaux oeuvrant dans le domaine de la
protection des défenseurs ? Comment analysez-vous leur
action : pensez-vous qu'elle est efficace, qu'elle impacte
véritablement sur l'évolution des choses ? Si oui pourquoi,
Si non, quels sont les heurts ?
9) Quelles difficultés rencontrez-vous dans la conduite
de vos activités ? Subissez-vous des menaces ? Sous quelles
formes et à quelle fréquence ? De la part de qui ?
Quelles mesures prenez-vous pour assurer votre protection ?
10) Quelle évaluation faites-vous de l'action de la
CNDHL en matière de protection des droits de l'Homme au Cameroun en
général ? Et relativement à la protection des
défenseurs en particulier ? Y a-t-il des mesures que l'institution
se propose de prendre à l'avenir, afin d'assurer une meilleure prise en
charge de la protection des défenseurs ?
11) A votre avis, peut-on dire que la protection des
défenseurs des droits de l'Homme est effective au Cameroun ?
Quelles stratégies faudrait-il mettre en oeuvre aussi bien au niveau
local, qu'à l'échelle nationale, afin d'assurer une protection
efficace des défenseurs au Cameroun ?
12) Arrivés en fin d'entretien, avez-vous l'impression
que quelque chose d'important n'a pas été dit, que nous avons
oublié un aspect important des choses et que vous souhaiteriez
ajouter ? Avez-vous un dernier message que vous aimeriez faire
passer ?
GUIDE D'ENTRETIEN UTILISE POUR LES COORDONNATEURS DES
RESEAUX D'ORGANISATIONS DE LA SOCIETE CIVILE
1) Identification : nom de la
structure, nom et rôle/poste de la personne rencontrée.
2) Qu'est-ce que le Réseau ? Quel est clairement
son mandat ?Comment fonctionne le Réseau ?
3) Quelles activités mène-t-il dans le domaine
de la défense des droits de l'Homme ? Comment organise-t-il la mise
en oeuvre de ces actions ?
4) Connaissez-vous les normes internationales de protection
des défenseurs des droits de l'Homme ? Pouvez-vous les
identifier ? Y recourrez-vous et à quelle fréquence ?
Pouvez-vous dire que vous bénéficiez des droits qu'ils vous
reconnaissent (droit à être protégé, liberté
d'expression, d'association, droit de protestation, droit d'accès au
financement, droit de collaboration avec les organisations
internationales) ? Quelle appréciation faites-vous de
l'efficacité de ces dernières ?
5) Comment est-ce que conformément à ses
obligations internationales, l'Etat organise-t-il la protection des
défenseurs ? Comment appréciez-vous les mesures qu'il
déploie dans ce sens ?
6) Quelles sont les autorités qui interviennent dans la
mise en oeuvre des normes internationales de protection des
défenseurs ? Travaillent-elles en partenariat avec vous dans la
conduite de vos activités ? Dans ce sens, quels sont vos relations
avec les différents rapporteurs internationaux oeuvrant dans le domaine
de la protection des défenseurs ?
7) Quelles relations entretenez-vous avec les autres
défenseurs des droits de l'Homme ? Comment s'insèrent-ils
dans le Réseau ? Y a t-il des actions spécifiques que le
Réseau met-il en oeuvre pour garantir leu protection, compte tenu de la
dangerosité de leur activité ? Quelles sont-elles ?
Vous proposez-vus de prendre des mesures dans ce sens à l'avenir ?
Si oui, lesquelles ?
8) Quelle évaluation faites-vous de l'action du
Réseau en matière de protection des droits de l'Homme au Cameroun
en général et, relativement à la protection des
défenseurs en particulier ?
9) Quelles difficultés rencontrez-vous dans la conduite
de vos activités ? Subissez-vous des menaces ? Sous quelles
formes et à quelle fréquence ? De la part de qui ?
Quelles mesures prenez-vous pour assurer votre protection ?
10) A votre avis, peut-on dire que la protection des
défenseurs des droits de l'Homme est effective au Cameroun ?
Quelles stratégies faudrait-il mettre en oeuvre afin d'assurer une
protection efficace des défenseurs au Cameroun ?
Défenseurs des droits de
l'homme
Résolution de la Commission des droits
de l'homme 2000/61
La Commission des droits de l'homme,
Rappelant la résolution 53/144 de
l'Assemblée générale, en date du 9 décembre 1998,
par laquelle l'Assemblée a adopté par consensus la
Déclaration sur le droit et la responsabilité des individus,
groupes et organes de la société de promouvoir et protéger
les droits de l'homme et les libertés fondamentales universellement
reconnus,
Réaffirmant l'importance de la
Déclaration, de sa promotion et de sa mise en oeuvre,
Soulignant le rôle important que les individus,
les organisations non gouvernementales et les groupes ont à jouer dans
la promotion et la protection de tous les droits de l'homme et libertés
fondamentales,
Notant avec une profonde préoccupation que, dans
de nombreux pays, les personnes et organisations qui s'emploient à
promouvoir et défendre les droits de l'homme et les libertés
fondamentales s'exposent souvent à des menaces, au harcèlement,
à l'insécurité, à des détentions arbitraires
et à des exécutions extrajudiciaires,
1. Accueille favorablement le rapport du
Secrétaire général (E/CN.4/2000/95) sur les moyens
d'assurer la promotion et la mise en oeuvre effectives de la Déclaration
sur le droit et la responsabilité des individus, groupes et organes de
la société de promouvoir et protéger les droits de l'homme
et les libertés fondamentales universellement reconnus,
présenté conformément à la résolution
1999/66 de la Commission, en date du 28 avril 1999;
2. Invite tous les États à promouvoir et
mettre en oeuvre la Déclaration;
3. Prie le Secrétaire général de
nommer, pour une période de trois ans, un représentant
spécial qui fera rapport sur la situation des défenseurs des
droits de l'homme dans toutes les régions du monde et sur les moyens qui
pourraient permettre de renforcer leur protection conformément à
la Déclaration; les principales attributions du représentant
spécial seront les suivantes :
a) Solliciter, recevoir, examiner les informations
concernant la situation et les droits de toute personne agissant seule ou en
association avec d'autres - et y donner suite -, ainsi que promouvoir et
protéger les droits de l'homme et les libertés fondamentales;
b) Instituer une coopération et entretenir un
dialogue avec les gouvernements et d'autres acteurs intéressés,
s'agissant de la promotion et de la mise en oeuvre effective de la
Déclaration;
c) Recommander des stratégies efficaces pour
mieux protéger les défenseurs des droits de l'homme et donner
suite à ces recommandations;
4. Invite instamment tous les gouvernements à
coopérer avec le Représentant spécial du Secrétaire
général et à l'aider dans l'accomplissement de ses
tâches, ainsi qu'à communiquer sur demande tous les renseignements
nécessaires à l'exécution de son mandat;
5. Prie le Secrétaire général de
prêter au Représentant spécial tout le concours qui lui
sera utile, en lui fournissant notamment le personnel et les ressources
jugés nécessaires pour qu'il puisse s'acquitter de son mandat;
6. Prie également le Représentant
spécial de présenter tous les ans un rapport sur ses
activités à la Commission et à l'Assemblée
générale, et de faire toutes suggestions et recommandations
susceptibles de lui permettre de mieux s'acquitter de ses tâches et
activités;
7. Décide d'examiner cette question à sa
cinquante-septième session, au titre du point de l'ordre du jour
intitulé "Promotion et protection des droits de l'homme";
8. Recommande au Conseil économique et social
d'adopter le projet de décision suivant :
[Pour le texte, voir chap. I, sect. B, projet de décision
35.]*
65e séance
26 avril
2000
[Adoptée par 50 voix contre zéro, avec 3
abstentions, à l'issue d'un vote par appel nominal.
*E/CN.4/2000/167
DECLARATION DE KIGALI
La première Conférence ministérielle de
l'Union Africaine sur les Droits de l'Homme en Afrique réunie le 8 mai
2003 à Kigali (Rwanda) :
ADOPTE SOLENNELLEMENT LA DECLARATION DE KIGALI.
Réaffirmant son attachement aux
principes et objectifs contenus dans l'Acte Constitutif de l'Union africaine
adopté à Lomé, (Togo) en 2000, la Charte africaine des
Droits de l'Homme et des Peuples adoptée à Nairobi (Kenya) en
juin 1981, la Déclaration solennelle sur la Conférence sur la
Sécurité, la Stabilité, le Développement et la
Coopération en Afrique (CSSDCA), le Nouveau Partenariat pour le
Développement de l'Afrique de l'Union africaine (NEPAD) adopté
à Lusaka, Zambie en 2001, aux dispositions pertinentes de la
Déclaration sur le code de conduite dans les relations interafricaines
entre les Etats adoptée à Tunis (Tunisie) en juin 1994, ainsi que
dans toutes les autres déclarations et décisions pertinentes de
l'Union africaine, la Charte des Nations Unies et la Déclaration
universelle des Droits de l'Homme en 1948 et les Déclaration et
Programme d'action de Vienne de 1989 et 1993;
Rappelant la Déclaration et le Plan
d'Action de Grand Baie adoptés par la première Conférence
ministérielle de l'OUA sur les Droits de l'Homme en Afrique, tenue
à Grand Baie (Maurice) du 12 au 16 avril 1999 et réaffirmant son
attachement aux principes et objectifs y
contenus;
Réaffirmant que le respect des droits
de l'homme est indispensable pour le maintien de la paix et de la
sécurité nationales, régionales et internationales, et
constitue un des socles fondamentaux du développement durable;
Réaffirmant également les
principes consacrés dans l'Acte constitutif de l'Union africaine, en
particulier l'interdiction du génocide et des crimes de guerre et des
crimes contre l'humanité et déterminée à combattre
l'idéologie du génocide et toutes ses manifestations
;
Rappelant le rapport du Groupe international
d'Eminentes Personnalités intitulé « Le Génocide qui
pouvait être évité » et entériné par la
36ème Session ordinaire de la Conférence des Chefs d'Etat et de
Gouvernement de l'OUA tenue à Lomé (Togo), en juillet 2000, et la
décision par laquelle la Conférence a demandé au
Secrétaire général de poursuivre activement la mise en
oeuvre des recommandations contenues dans ce rapport ;
Profondément préoccupée
par le fait que, en dépit des progrès réalisés dans
le règlement de certains conflits sur le continent, les conflits
armés et les conflits civils se poursuivent dans certaines parties du
continent et conduisent à des violations massives des droits de l'homme
et du Droit international humanitaire et provoquent des flux massifs de
réfugiés et de personnes déplacées;
Gravement préoccupée par la
discrimination qui persiste à l'égard des femmes et des jeunes
filles et par les pratiques traditionnelles néfastes et dangereuses pour
la vie et la santé des femmes et des enfants dans certaines parties de
l'Afrique;
La Conférence :
1. REAFFIRME le principe que tous les droits de l'homme sont
universels, indissociables, interdépendants et intimement liés
;
2. NOTE AVEC SATISFACTION les progrès
réalisés par les Etats membres dans la promotion et la protection
des Droits de l'Homme et des Peuples, en particulier depuis l'adoption de la
Déclaration et du Plan d'action de Grand Baie et EXHORTE les Etats
membres à utiliser ces acquis dans l'intérêt et pour le
bien-être de tous les peuples d'Afrique ;
3. REAFFIRME le droit au développement, et DEMANDE
à la communauté internationale de soutenir les Etats membres dans
leurs efforts constants de réaliser ce droit ;
4. EXHORTE les Etats membres et les institutions
régionales à accorder la même importance aux droits
économiques, sociaux et culturels ainsi qu'aux droits civils et
politiques; et à adopter à tous les niveaux, une approche
appropriée dans la planification, la mise en oeuvre et
l'évaluation de leurs politiques et programmes.
5. LANCE UN APPEL aux Etats membres pour qu'ils garantissent
l'indépendance réelle de la justice, l'accès à un
coût raisonnable au système judiciaire et le droit à un
procès équitable sur le continent en tant que préalable
à l'enracinement de l'état de droit et de la démocratie
;
6. REITERE le rejet de l'impunité et REAFFIRME
l'engagement à poursuivre les auteurs du génocide, des crimes de
guerre et des crimes contre l'humanité et LANCE UN APPEL à tous
les Etats membres pour qu'ils coopèrent pleinement avec le Tribunal
pénal international pour le Rwanda et lui apportent l'appui politique et
financier, en particulier dans les domaines des arrestations des
suspects/accusés, de la protection des témoins/victimes, de
l'exécution des peines et de l'indemnisation des victimes et des parties
civiles;
7. SE FELICITE de la décision prise par le Conseil
exécutif de l'Union africaine lors de sa deuxième session
ordinaire tenue en mars 2003 à N'Djamena (Tchad) selon laquelle la date
du 7 avril 2004, dixième anniversaire du génocide rwandais, sera
commémorée par l'Union africaine comme une journée de
souvenir en mémoire des victimes du génocide au Rwanda et comme
une réaffirmation de la détermination de l'Afrique à
prévenir et à combattre le génocide sur le continent ;
8. REITERE la recommandation du Conseil exécutif
à l'Organisation des Nations Unies, à la Communauté
internationale dans son ensemble et à la société civile de
commémorer le 7 avril comme journée de réflexion sur le
génocide au Rwanda et de renouveler leur engagement à
prévenir le génocide dans le monde ;
9. EXPRIME SA PREOCCUPATION face au fléau du terrorisme
en tant que source de violations graves des droits de l'homme, notamment le
droit à la vie et à la sécurité et EXHORTE les
Etats membres à mettre en oeuvre la Convention sur la prévention
et la lutte contre le terrorisme, adoptée par la 35ème
Conférence des Chefs d'Etat et de gouvernement de l'OUA, tenue à
Alger, en juillet 1999 ;
10. PREND NOTE de l'importante contribution de la
Conférence mondiale de Durban sur le racisme, la xénophobie et
l'intolérance et LANCE UN APPEL à tous les Etats membres pour
qu'ils intensifient leurs efforts de lutte contre le fléau du racisme,
de la xénophobie, de l'intolérance et de la discrimination ;
11. LANCE EN OUTRE UN APPEL à tous les Etats membres
pour qu'ils mettent en oeuvre tous les instruments internationaux et africains
pertinents relatifs à la protection des réfugiés, des
personnes déplacées et des rapatriés et en particulier
s'acquittent de leurs obligations découlant de la Convention de l'Union
africaine régissant les aspects propres au problème des
réfugiés en Afrique;
12. PREND NOTE AVEC SATISFACTION des efforts
déployés pour trouver une solution à la situation
difficile dans laquelle vivent les réfugiés, les demandeurs
d'asile et les personnes déplacées et LANCE UN APPEL aux Etats
membres pour qu'ils reconnaissent le déplacement forcé comme une
violation grave des droits fondamentaux à la paix, à la
sécurité et à la dignité et prennent toutes les
mesures nécessaires pour résoudre le problème ;
13. LANCE UN APPEL aux Etats membres qui ne l'ont pas encore
fait pour qu'ils ratifient le plus tôt possible la Convention de l'Union
africaine régissant les aspects propres au problème des
réfugiés en Afrique et les principaux traités
internationaux pertinents relatifs aux réfugiés ;
14. DEMANDE aux organes compétents de l'Union africaine
dans l'exercice de leurs fonctions de consolidation de la paix et de
règlement des conflits de veiller à l'inclusion des droits de
l'homme, des principes humanitaires et autres mesures légales de
protection dans les accords de paix, en vue de faciliter le rapatriement
volontaire et la réinsertion des réfugiés, des
rapatriés et des anciens combattants dans leurs pays d'origine ;
15. SE FELICITE de la conclusion d'un Protocole d'accord entre
la Commission africaine des Droits de l'Homme et des Peuples et le Haut
Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés et LANCE UN
APPEL à la communauté internationale et aux autres partenaires
pour qu'ils soutiennent les efforts déployés par le continent
africain en vue de trouver une solution aux problèmes des
réfugiés, des rapatriés et des personnes
déplacées dans un esprit de solidarité internationale et
de partage de fardeau;
16. NOTE AVEC UNE GRAVE PREOCCUPATION que les droits des
femmes et des enfants restent, en dépit des progrès
réalisés, insuffisamment protégés dans nombre de
pays africains; SE FELICITE des progrès réalisés vers
l'adoption du projet de Protocole à la Charte africaine des droits de
l'Homme et des Peuples relatif aux droits de la femme et LANCE UN APPEL aux
Etats membres pour qu'ils prennent toutes les mesures nécessaires pour
adopter, signer et ratifier rapidement le Protocole et assurer sa mise en
oeuvre dès son entrée en vigueur par les Etats parties ;
17. LANCE UN APPEL aux Etats membres afin qu'ils s'acquittent
de leurs obligations découlant du droit international et en particulier
adoptent les mesures appropriées pour mettre fin au recrutement des
enfants soldats et assurer la protection des populations civiles, en
particulier les enfants, les femmes et les personnes âgées et les
personnes handicapées dans les situations de conflits armés ;
18. LANCE UN APPEL aux Etats membres qui ne l'ont pas encore
fait pour qu'ils ratifient le plus tôt possible la Charte africaine des
Droits et du Bien-être de l'Enfant et LANCE EN OUTRE UN APPEL aux organes
délibérants de l'Union africaine pour qu'ils fournissent un
secrétariat approprié et les ressources financières et
matérielles nécessaires au Comité africain des experts sur
les droits et le bien-être de l'Enfant afin de lui permettre de
s'acquitter efficacement de son mandat ;
19. NOTE AVEC UNE PROFONDE PREOCCUPATION les conditions
difficiles dans lesquelles vivent en général les groupes
vulnérables y compris les personnes handicapées et LANCE UN APPEL
aux Etats membres pour qu'ils accordent un soutien adéquat à
l'Institut Africain de Réadaptation dont le siège est à
Harare (Zimbabwe) ;
20. LANCE UN APPEL aux Etats membres pour qu'ils
élaborent un Protocole relatif à la protection des droits des
personnes handicapées et des personnes âgées ;
21. NOTE EGALEMENT AVEC PREOCCUPATION la propagation à
un rythme alarmant du VIH/SIDA et la prévalence persistante du
paludisme, de la tuberculose et des autres maladies infectieuses connexes en
Afrique et EXHORTE les Etats membres à prendre des mesures pour
renforcer les programmes de prévention de celles-ci et promouvoir et
protéger les droits des personnes vivant avec le VIH/SIDA.
22. ENCOURAGE les Etats membres à déployer plus
d'efforts conjointement avec la communauté internationale, en
particulier l'Organisation mondiale de la santé (OMS) en vue
d'éradiquer le VIH/SIDA, le paludisme, la tuberculose et les autres
maladies infectieuses connexes qui constituent un obstacle au
développement socio-économique du continent ainsi qu'un obstacle
à la jouissance des droits économiques, sociaux et culturels ;
23. NOTE AVEC SATISFACTION que la Charte africaine des Droits
de l'Homme et des Peuples a été ratifiée par tous les
Etats membres et DEMANDE aux organes délibérants de l'Union
africaine de doter la Commission africaine d'un siège et d'une structure
appropriés et de ressources financières et humaines
adéquates pour son fonctionnement harmonieux, y compris la
création d'un Fonds de contributions volontaires qui sera financé
par les contributions des Etats membres et des institutions internationales et
régionales;
24. EN APPELLE aux organes délibérants de
l'Union africaine pour qu'ils revoient le fonctionnement et la composition de
la Commission africaine des Droits de l'Homme et des Peuples en vue de
renforcer son indépendance et son intégrité fonctionnelle
et d'assurer la représentation appropriée des femmes et de faire
rapport le plus tôt possible sur les progrès
réalisés aux organes compétents de l'Union africaine ;
25. EXHORTE les Etats membres qui ne l'ont pas encore fait
à incorporer dans leurs législations internes les dispositions de
la Charte africaine des droits de l'Homme et des Peuples et ses protocoles, les
principes du Droit international humanitaire (en particulier les quatre
Conventions de Genève de 1949 et leurs protocoles additionnels de 1977)
et autres principaux instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme
qu'ils ont ratifiés, et à honorer leurs obligations en vertu de
chaque instrument y compris la soumission des rapports, le cas
échéant;
26. NOTE AVEC PREOCCUPATION que le Protocole à la
Charte africaine relatif à la mise en place d'une Cour africaine des
Droits de l'Homme et des Peuples qui requiert quinze ratifications pour entrer
en vigueur, a été ratifié par neuf Etats membres
seulement, et en conséquence LANCE UN APPEL aux Etats membres qui ne
l'ont pas encore fait, pour qu'ils signent et/ou ratifient le Protocole afin
qu'il entre en vigueur en juillet 2003 au plus tard, conformément
à la décision AHG/Dec.171 (XXXVIII) ;
27. REITERE le fait que la responsabilité
première de la promotion et de la protection des droits de l'homme
incombe aux Etats et, en conséquence, EXHORTE les Etats qui ne l'ont pas
encore fait, à mettre en place des institutions nationales
indépendantes des droits de l'homme, à leur fournir des
ressources financières adéquates et autres pour leur
fonctionnement harmonieux et à garantir leur indépendance.
28. RECONNAIT le rôle important des Organisations de la
société civile en générale et des défenseurs
des droits de l'homme en particulier, dans la promotion et la protection des
droits de l'homme en Afrique et LANCE UN APPEL aux Etats membres et aux
institutions régionales afin qu'ils protègent les droits des
défenseurs des droits de l'homme et encouragent la participation des
Organisations de la société civile à la prise de
décision à travers des moyens de consultation en vue de
consolider la démocratie participative et le développement
durable et SOULIGNE la nécessité pour ces Organisations
d'être indépendantes et transparentes;
29. RECONNAIT que les médias sont des vecteurs
importants pour la réalisation du droit à l'information et en
conséquence, EXHORTE les Etats parties à garantir à
travers des mesures législatives et de politiques appropriées, la
liberté et l'indépendance de la presse;
30. RECONNAIT que les normes juridiques contenues dans les
conventions internationales et régionales se rapportant aux droits de
l'homme, leur adoption ainsi que la création des mécanismes de
protection et de promotion des droits de l'homme ne sauraient suffire à
elles seules à garantir l'enracinement des principes des droits de
l'homme et leur respect par tous, LANCE UN APPEL aux Etats membres pour qu'ils
fassent de l'éducation aux droits de l'homme une constante dans les
programmes d'enseignement notamment ceux destinés aux agents
chargés de l'application de la loi. De ce fait, la Conférence
INVITE les Etats membres à accroître leurs efforts pour une
meilleure et une plus grande diffusion de la culture des droits de l'homme et
les encouragent à faire en sorte que les textes des conventions
internationales et régionales soient publiées et connues par
tous.
31. LANCE UN APPEL à la solidarité de l'Afrique
avec les peuples dont les droits fondamentaux sont gravement violés.
32. ACCUEILLE FAVORABLEMENT la décision de la
Conférence de l'Union africaine tenue à Durban (Afrique du Sud)
en juillet 2002, de créer un portefeuille au sein de la Commission de
l'Union chargé des questions de démocratie, de droits de l'homme,
de la gouvernance et de la société civile, qui contribuera
à canaliser les efforts visant à promouvoir les droits de l'homme
sur le continent ;
33. RECONNAIT que la mise en oeuvre, le suivi et
l'évaluation sont essentiels à la réalisation de la
Déclaration de Grand Baie et de la présente Déclaration,
DEMANDE au Président de la Commission de l'Union africaine, de
coordonner le suivi de la mise en oeuvre de ces deux Déclarations et
EXHORTE les Etats membres à présenter des rapports de mise en
oeuvre à la Commission de l'Union africaine ;
34. SE FELICITE de la tenue de cette Conférence,
DEMANDE au Président de la Commission de l'Union africaine de soumettre
un rapport sur les résultats de la Conférence à la
prochaine session ordinaire du Conseil exécutif de l'Union et RECOMMANDE
que la Conférence ministérielle sur les droits de l'homme se
tienne dans un intervalle n'excédant pas quatre ans.
Adoptée à Kigali, Rwanda, le 8 mai 2003
DECLARATION ET PLAN D'ACTION DE GRAND BAIE
(MAURICE)
La première Conférence ministérielle de
l'OUA sur les droits de l'homme en Afrique réunie à Grand Baie
(Maurice) du 12 au 16 avril 1999;
ADOPTE SOLENNELLEMENT LA DÉCLARATION ET LE PLAN
D'ACTION DE GRAND BAIE (MAURICE).
Considérant que la promotion et la
protection des droits de l'homme est une priorité pour l'Afrique et que
la présente Conférence constitue une occasion unique pour
procéder à une analyse globale et à une réflexion
sur les mécanismes pour la protection et la garantie des droits de 1
"homme aux fins d'un développement accéléré du
continent;
Rappelant la Déclaration sur la
situation politique et socio-économique en Afrique et les changements
fondamentaux qui surviennent dans le monde, adoptée par la
Conférence des Chefs d'Etat et de Gouvernement de l'OUA en 1990, de
même que la Déclaration instituant, au sein de l'OUA, le
Mécanisme de prévention, de gestion et de règlement des
conflits, adoptée par la Conférence des Chefs d'Etat et de
Gouvernement de l'OUA en juin 1993 au Caire (Egypte) ;
Reconnaissant que le respect des droits de
l'homme est crucial à la promotion de la sécurité
collective, d'une paix durable ainsi que d'un développement durable, tel
qu'énoncé dans le Programme d'Action du Caire sur la relance de
la transformation socio économique, adopté par la session
extraordinaire du Conseil des Ministres tenue du 25 au 28 mars 1995 au Caire
(Egypte) ;
Notant qu'il est de plus en plus reconnu que
les violations des droits de l'homme peuvent constituer un fardeau pour la
communauté internationale ;
Réaffirmant son engagement à
l'égard des objectifs et principes contenus dans la Charte de l'OUA, la
Charte des Nations Unies, la Déclaration universelle des droits de
l'homme, ainsi que la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples;
Hautement préoccupée par les
actes de génocide et les autres crimes contre l'humanité commis
dans certaines parties de l'Afrique ;
Soulignant que le respect des droits de
l'homme est indispensable au maintien de la paix et de la
sécurité régionales et internationales, ainsi qu'à
l'élimination des conflits, et qui constitue une des bases importantes
sur lesquelles les efforts de développement devraient reposer ;
Considérant le processus de
démocratisation en cours sur le continent, ainsi que les aspirations des
peuples africains à vivre dans un état de droit, garantissant la
pleine jouissance des droits de l'homme et des libertés fondamentales
pour tous, indépendamment du sexe, de la race, du lieu d'origine, de la
religion, du statut social, de l'appartenance ethnique, des opinions politiques
ou de la langue;
Considérant également
l'importance du droit au développement, du droit à la paix et
à la sécurité internationales, ainsi que des principes de
solidarité et de relations amicales entre les Etats, tel que
prévu dans la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples;
Rappelant la détermination de tous les
dirigeants africains à créer des conditions susceptibles de
garantir la justice sociale et le progrès, permettant ainsi aux peuples
africains de jouir de meilleures conditions de vie dans une plus grande
liberté et dans un esprit de tolérance mutuelle;
Réitérant la
nécessité de considérer les questions des droits de
l'homme de manière constructive dans un esprit de justice,
d'impartialité et de non sélectivité, loin de toute
instrumentalisation politique;
Reconnaissant les progrès accomplis
par les Etats africains en matière des droits de l'homme et la
contribution significative du continent africain à leur
universalité;
Reconnaissant également la contribution des ONG
africaines à la promotion et à la protection des droits de
l'homme en Afrique;
Rappelant les recommandations de la
deuxième Conférence des institutions nationales de droits de
l'homme tenue à Durban (Afrique du Sud), en 1998;
Déterminée à consolider les acquis
obtenus en Afrique ' dans le domaine de la promotion et de la protection des
droits de l'homme et des. peuples.
1. La Conférence ministérielle affirme le
principe que les droits de l'homme sont universels, indivisibles,
interdépendants et étroitement liés, et exhorte les
gouvernements, dans leurs politiques, à accorder aux droits
économiques, sociaux et culturels, la même valeur qu'aux droits
civils et politiques.
2. La Conférence affirme également que le droit
au développement, le droit à un :environnement
généralement sain, et le droit à la paix et à la
sécurité nationales et internationales', sont des droits
universels et inaliénables qui font partie intégrante des droits
fondamentaux de l'homme.
3. La Conférence affirme par ailleurs
l'interdépendance des principes de la bonne gouvernance, de
l'état de droit, de la démocratie et du développement.
4. La Conférence reconnaît que le
développement de l'état de droit, de la démocratie et des
droits de l'homme a besoin d'un système judiciaire indépendant,
transparent, accessible et impartial, qui puisse rendre une justice prompte et
peu coûteuse. Pour cela, le système a besoin d'un corps de
magistrats professionnels et compétents jouissant de conditions
favorables.
5. La Conférence reconnaît que les valeurs
essentielles sur lesquelles sont fondées les droits de l'homme,
notamment :
a. (a) le caractère sacré de la vie et de la
dignité humaines ;
b. (b) la tolérance des différences ;
c. (c) l'aspiration à la liberté, à
l'ordre, à l'égalité, à la prospérité
et à la stabilité,
sont largement partagées par toutes les cultures. A cet
égard, l'intégration des valeurs traditionnelles et culturelles
de l'Afrique au débat sur les droits de l'homme serait
utile pour
garantir leur transmission aux générations futures.
6. La Conférence note que la question des droits de la
femme et de l'enfant demeure un motif de préoccupation pour tous. En
conséquence, elle accueille favorablement la décision
d'élaborer un protocole à la Charte africaine garantissant une
protection plus efficace des droits de la femme et lance un appel à
l'O.U.A. pour la convocation d'une réunion d'experts gouvernementaux en
vue d'examiner cet instrument. Elle exhorte tous les pays africains à
oeuvrer sans relâche à l'élimination de toutes les formes
de discrimination à l'égard des femmes, et à l'abolition
des pratiques culturelles qui déshumanisent ou avilissent les femmes et
les enfants. La Conférence recommande également aux Etats de
prendre les mesures appropriées pour mettre fin au
phénomène et au recrutement des enfants soldats et pour renforcer
la protection des populations civiles, en particulier les enfants dans les
situations de conflit. Elle recommande en outre aux Etats de prendre des
mesures pour éradiquer la violence à l'encontre des femmes et des
enfants, le travail des enfants, l'exploitation sexuelle et le trafic des
enfants, et pour garantir la protection juridique des enfants dans les
situations de conflit et des enfants réfugiés.
7. La Conférence note que les droits des personnes
handicapées ou vivant avec le VIH SIDA, en particulier les femmes et les
enfants, ne sont pas toujours respectés. En conséquence, elle
exhorte tous les Etats africains à tout faire pour garantir le plein
respect de ces droits.
8. La Conférence est consciente que les violations des
droits de l'homme en Afrique sont causées notamment par
a. les formes contemporaines d'esclavage;
b. le néo colonialisme, le racisme et
l'intolérance religieuse;
c. la pauvreté, la maladie, l'ignorance et
l'analphabétisme;
d. les conflits et leur cortège de
réfugiés et de personnes déplacées;
e. les remous sociaux que peut entraîner la mise en
oeuvre de certains aspects des programmes d'ajustement structurel;
f. le problème de la dette;
g. la mauvaise gestion, la mauvaise gouvernance et la
corruption;
h. l'absence de l'obligation de rendre compte dans la gestion
des affaires publiques;
i. le monopole de l'exercice du pouvoir;
j. les pratiques traditionnelles néfastes;
k. le manque d'indépendance du judiciaire;
l. le manque d'indépendance des institutions des droits
de l'homme;
m. l'absence de liberté de presse et de liberté
d'association;
n. la détérioration de l'environnement;
o. le non respect des dispositions de la Charte de l'O.U.A.
sur l'intégrité territoriale et l'intangibilité des
frontières héritées de la colonisation, et sur le droit
à l'auto détermination;
p. les changements inconstitutionnels de régime;
q. le terrorisme;
r. le népotisme;
s. l'exploitation de l'ethnicité.
Il est par conséquent nécessaire d'adopter une
approche à volets multiples pour l'élimination des causes des
violations des droits de l'homme en Afrique.
9. La Conférence, tout en se félicitant des
améliorations constatées dans la gestion du problème des
réfugiés, estime que le nombre élevé des
réfugiés, des personnes déplacées et des
rapatriés en Afrique constitue une entrave au développement. Elle
reconnaît le lien entre les violations des droits de l'homme et les
déplacements de populations, et requiert par conséquent des
efforts renouvelés et concertés de la part des Etats membres et
de l'OUA pour s'attaquer à ce problème.
10. La Conférence reconnaît que le
développement et. la dynamisation de la société civile, le
renforcement de la cellule familiale en tant que base de la
société, l'élimination des pratiques traditionnelles
néfastes et la consultation des anciens et des notables de la
communauté doivent tous être considérés comme des
éléments du processus de création d'un environnement
propice à l'épanouissement des droits de l'homme en Afrique et
comme des outils de promotion de la solidarité entre les peuples
africains.
11. La Conférence, hautement préoccupée
par les actes de génocide, les crimes contre l'humanité et
d'autres crimes de guerre perpétrés dans certaines parties de
l'Afrique, lance un appel aux Etats africains pour que de tels actes soient
définitivement bannis du continent, et recommande que ces violations
graves des droits de l'homme soient dûment sanctionnées.
La Conférence, également
préoccupée par le fléau du terrorisme en tant que source
de violations graves des droits de l'homme, notamment le premier d'entre eux,
le droit à la vie, exhorte les pays africains à élaborer
et à mettre en oeuvre une Convention africaine sur la coopération
en matière de lutte contre ce fléau.
13. La Conférence réaffirme l'attachement de
l'Afrique à la promotion, à la protection et au respect des
droits de l'homme. A cet égard, elle exhorte les Etats qui n'ont pas
encore ratifié toutes les principales conventions de l'OUA et de l'ONU
sur les droits de l'homme, à le faire dans les meilleurs délais
possibles. Il s'agit en particulier des conventions suivantes :
a. La Charte africaine des droits de l'homme et des peuples
b. La Charte africaine des droits et du bien être de
l'enfant
c. La Convention régissant les aspects propres aux
problèmes des réfugiés en Afrique ;
d. Le Protocole à la Charte africaine des droits de
l'homme et des peuples sur la création d'une Cour africaine des droits
de l'homme et des peuples ;
e. Le Pacte international sur les droits économiques,
sociaux et culturels ;
f. Le Pacte international sur les droits civils et
politiques
g. La Convention des Nations Unies sur les droits de l'enfant
h. La Convention des Nations Unies sur le statut des
réfugiés et son Protocole
i. La Convention sur l'élimination de toutes les formes
de discrimination à l'égard des femmes ;
j. Les quatre Conventions de Genève relatives au
traitement des blessés, des prisonniers de guerre et des civils en temps
de guerre, ainsi que les deux Protocoles additionnels
k. La Convention des Nations Unies contre la torture ;
l. La Convention des Nations Unies sur l'élimination de
toutes les formes de discrimination raciale.;
m. Les statuts de la Cour pénale internationale.
14. La Conférence reconnaît la
nécessité pour les Etats de donner effet à la Charte
africaine, au droit international humanitaire et aux autres principaux
instruments internationaux sur les droits de l'homme et des peuples qu'ils ont
ratifiés, dans leurs législations nationales en vue d'en assurer
un plus grand impact sur l'ensemble du continent.
15. La Conférence réitère que la
responsabilité première en matière de promotion et de
protection des droits de l'homme incombe à l'Etat. Elle exhorte par
conséquent les Etats à créer des institutions nationales
des droits de l'homme, à veiller à leur financement
adéquat et à garantir leur indépendance.
16. La Conférence reconnaît que l'obligation des
Etats parties, en vertu de la Charte africaine des droits de l'homme et des
peuples, de présenter des rapports, constitue un mécanisme
important et une occasion pour les gouvernements africains d'engager un
processus de dialogue permanent avec leurs citoyens en particulier, et les
peuples africains en général. En conséquence, elle
recommande que les Etats parties prennent les dispositions appropriées
pour honorer leurs obligations en ce qui concerne la soumission des rapports,
conformément à la Charte.
17. La Conférence reconnaît l'importance de la
promotion d'une société civile africaine, notamment ses ONG,
ancrées dans les réalités du continent, et incite les
gouvernements africains à une collaboration constructive avec elles en
vue de consolider la démocratie et le développement durable.
18. La Conférence invite toutes les organisations
internationales, gouvernementales, intergouvernementales et non
gouvernementales à coopérer et à harmoniser leurs
initiatives avec l'OUA et ses organes compétents, ainsi qu'avec les
différents groupements sous régionaux en Afrique, en vue d'une
approche plus coordonnée dans la mise en oeuvre des droits de l'homme en
Afrique et d'une optimisation de l'impact de ces programmes et initiatives.
19. La Conférence note que l'adoption de la
Déclaration des Nations Unies sur la protection des défenseurs
des droits de l'homme par la 54éme session de la Commission des Nations
Unies sur les droits de l'homme marque un tournant important, et lance un appel
aux gouvernements africains pour qu'ils prennent les mesures appropriées
pour mettre en oeuvre cette Déclaration en Afrique.
20. La Conférence en appelle au Secrétaire
général de l'OUA et à la Commission africaine des droits
de l'homme et des peuples pour qu'ils élaborent des stratégies
appropriées et prennent des mesures pour assurer la sensibilisation et
l'information des populations africaines sur les droits de l'homme et le droit
international humanitaire par des procédés d'éducation
formels et non formels comprenant, entre autres, un module spécial au
programme scolaire.
21. La Conférence reconnaît que les médias
sont des acteurs importants dans l'établissement de liens entre les
gouvernements et les peuples. En conséquence, elle exhorte les Etats
à garantir une presse libre et indépendante sur leurs territoires
afin de lui permettre de jouer son rôle dans la promotion des droits de
l'homme en Afrique. A cette fin, la Conférence lance un appel au
Secrétaire général de l'OUA pour qu'il examine la
possibilité de fournir une assistance aux organisations de médias
du continent.
22. Afin de s'assurer que les droits de l'homme sont
intégrés à toutes les activités de l'OUA, la
Conférence reconnaît la nécessité de les faire
figurer aux programmes de l'Organisation continentale.
23. La Conférence, tenant compte du fait que le travail
de la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples est crucial
pour le respect scrupuleux des droits de l'homme en Afrique, considère
qu'il est nécessaire d'évaluer la structure et le fonctionnement
de la Commission et de déterminer dans quelle mesure elle met en oeuvre
le Plan d'Action de Maurice pour la période 1996 2001, et aussi de
l'aider à aplanir tous les obstacles à l'accomplissement effectif
de sa mission. Il est tout aussi urgent et nécessaire de doter la
Commission de ressources humaines, matérielles et financières
suffisantes.
24. La Conférence note qu'aux termes de la Charte
africaine des droits de l'homme et des peuples, c'est la Conférence des
Chefs d'Etat et de Gouvernement qui est habilitée à se prononcer
de façon décisive sur les rapports d'activités de la
Commission africaine des droits de l'homme et des peuples, et exprime l'espoir
que la Conférence des Chefs d'Etat et de Gouvernement examinera la
possibilité de déléguer cette tâche au Conseil des
Ministres.
25. La Conférence souligne que la coopération
entre la Commission africaine et les institutions nationales des droits de
l'homme renforcera grandement le respect des droits de l'homme en Afrique. A
cet égard, la Conférence se félicite de la décision
de la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples d'accorder un
statut officiel aux institutions nationales des droits de l'homme.
26. La Conférence, préoccupée par le fait
que le fardeau de la dette extérieure paralyse les efforts de
développement de l'Afrique et entrave la promotion et le respect durable
des droits de l'homme, lance un appel à la communauté
internationale et plus particulièrement aux institutions
multilatérales de financement, pour qu'elles allègent cette dette
extérieure et prennent toutes les mesures nécessaires pour
réduire ce fardeau qui pèse sur les Etats, afin de leur permettre
de réaliser la pleine émancipation de leurs peuples au plan
économique, et d'accroître au maximum la jouissance des droits de
l'homme par les peuples africains.
27. La Conférence demande au Secrétaire
général de l'OUA de transmettre la présente
Déclaration à la Conférence des Chefs d'Etat et de
Gouvernement, à tous les gouvernements africains, à la Commission
africaine des droits de l'homme et des peuples, au Haut Commissariat des
Nations Unies aux droits de l'homme et aux autres institutions et organes
compétents des Nations Unies, et d'examiner la possibilité de
faire de la présente Conférence une activité
régulière du programme de l'OUA.
28. La Conférence recommande aux Etats
d'élaborer et d'adopter des plans d'action nationaux en vue de la
promotion et de la protection des droits de l'homme.
29. Enfin, la Conférence demande au Secrétaire
général de l'OUA de soumettre à la prochaine session du
Conseil des Ministres un rapport sur les conclusions de la présente
Conférence.
Adoptés à Grand Baie (Maurice), le 16
avril 1999
RESOLUTION ACHPR/Res.69(XXXV)04 SUR LA PROTECTION DES
DEFENDEURS DES DROITS DE L'HOMME EN AFRIQUE
La Commission africaine des droits de l'homme et des
peuples, réunie en sa 35ème Session ordinaire tenue à
Banjul, Gambie du 21 mai au 4 juin 2004;
Reconnaissant l'importante
contribution des défenseurs des droits de l'homme à la promotion
des droits de l'homme, la démocratie et la primauté du droit en
Afrique;
Gravement préoccupée
par la persistance des violations ciblant des individus et des membres des
familles, des groupes ou des organisations oeuvrant pour la promotion et la
protection des droits de l'homme et des peuples et par les risques qui guettent
de plus en plus les défenseurs des droits de l'homme en Afrique ;
Notant avec profonde préoccupation
la persistance de l'impunité des menaces, des attaques et
des actes d'intimidation contre les défenseurs des droits de l'homme et
la manière dont cela influe négativement sur le travail et la
sécurité de ces derniers;
Rappelant que la Commission
africaine des droits de l'homme et des peuples a la mission de promouvoir les
droits de l'homme et des peuples et d'en assurer la protection en Afrique;
Réaffirmant l'importance du
respect des objectifs et des principes de la Charte africaine pour la promotion
et la protection de tous les droits de l'homme et libertés fondamentaux
des défenseurs des droits de l'homme et de toutes les personnes du
continent;
Ayant à l'esprit la
Déclaration sur le droit et la responsabilité des individus, des
groupes et des organes de la société dans la promotion et la
protection des droits humains et libertés fondamentaux universellement
reconnus (Déclaration sur les défenseurs des droits de
l'homme);
Consciente du fait que dans la
Déclaration de Grand Baie (Maurice), l'Organisation de l'Unité
africaine a demandé aux Etats membres de «prendre les dispositions
nécessaires pour assurer la mise en oeuvre de la Déclaration de
l'ONU sur les défenseurs des droits de l'homme en Afrique»;
Consciente que la Déclaration
de Kigali reconnaît «le rôle important que jouent les
défenseurs des droits de l'homme dans la promotion et la protection des
droits de l'homme en Afrique»
Rappelant
sa décision d'inscrire à son programme la situation des
défenseurs des droits de l'homme et de désigner un Point focal
sur les défenseurs des droits de l'homme;
1. DECIDE de désigner un Rapporteur
spécial sur la situation des défendeurs des droits de l'homme en
Afrique pour une période de deux ans avec le mandat suivant :
a. Chercher, recevoir, examiner et agir sur l'information
relative à la situation des défenseurs des droits de l'homme en
Afrique;
b. Présenter à chaque session ordinaire de la
Commission africaine un rapport sur la situation des défenseurs des
droits de l'homme en Afrique;
c. Collaborer et établir le dialogue avec les Etats
membres, les institutions nationales des droits de l'homme, les organismes
intergouvernementaux, les mécanismes internationaux et régionaux
de protection des défenseurs des droits de l'homme, les
défenseurs des droits de l'homme et les autres partenaires;
d. Elaborer et recommander des stratégies visant
à mieux protéger les défenseurs des droits de l'homme et
assurer le suivi de ses recommandations;
e. Susciter la prise de conscience et promouvoir la mise en
oeuvre de la Déclaration de l'ONU sur les défenseurs des droits
de l'homme en Afrique.
2. DECIDE de nommer la Commissaire Jainaba
Johm Rapporteur spéciale sur la situation des défenseurs des
droits de l'homme en Afrique pour une période d'une année.
3. REITERE son appui au travail
effectué par les défenseurs des droits de l'homme en Afrique;
4. LANCE UN APPEL aux Etats membres pour
qu'ils assurent la promotion et donnent tout son effet à la
Déclaration de l'ONU sur les défenseurs des droits de l'homme en
Afrique, qu'ils prennent toutes les dispositions nécessaires pour
assurer la protection des défenseurs des droits de l'homme et incluent
dans leurs rapports périodiques des informations sur les mesures prises
en vue d'assurer la protection des défenseurs des droits de l'homme;
5. INVITE ses membres à
intégrer dans leurs activités la question des défenseurs
des droits de l'homme;
6. LANCE UN APPEL aux Etats membres pour
qu'ils collaborent avec et assistent la Rapporteur spéciale dans
l'accomplissement de ses fonctions et lui fournissent toute l'information
nécessaire pour la réalisation de sa mission;
7. DEMANDE à l'Union africaine
d'accorder les ressources suffisantes, l'assistance et l'appui
nécessaires pour la mise en oeuvre de la présente
résolution.
Banjul, Gambie, le 4 juin 2004
TABLE DES MATIERES
DEDICACES
i
REMERCIEMENTS
ii
LISTE DES TABLEAUX
iii
LEXIQUE DES ABREVIATIONS ET SIGLES
iv
RESUME
vi
ABSTRACT
vii
EPIGRAPHE
viii
SOMMAIRE
ix
INTRODUCTION GENERALE
1
I. CONTEXTE DE L'ETUDE
3
A. Contexte juridique
3
B. Contexte social
7
II. DELIMITATION DE L'ETUDE
9
A. Délimitation spatiale
9
B. Délimitation temporelle
10
C. Délimitation matérielle
10
III. DEFINITION DES CONCEPTS
12
A. Mise en oeuvre
12
B. Norme internationale
13
1. Norme
14
2. Norme internationale
16
C. Protection
18
D. Défenseur des droits de
l'Homme
20
1. Droits de l'Homme
20
2. Défenseur des droits de
l'Homme
22
IV. INTERET DU SUJET
23
A. Intérêt scientifique
24
B. Intérêt social
24
V. REVUE DE LA LITTERATURE
26
A. La première tendance : la
défense des droits de l'Homme appréhendée comme
phénomène social objectivement étudiable.
26
B. La seconde tendance : la
défense des droits de l'Homme analysée du point de vue des
acteurs.
30
VI. PROBLEMATIQUE
33
VII. HYPOTHESE DE RECHERCHE
35
VIII. CADRE METHODOLOGIQUE
36
A. Les méthodes d'analyse
37
1. La méthode juridique
38
2. Les méthodes sociologiques
39
B. Les techniques d'enquête
40
1. La recherche documentaire et l'analyse
des contenus
41
2. L'interview
43
IX. ARTICULATION ET JUSTIFICATION DU
PLAN
44
PREMIERE PARTIE : L'ARTICULATION DE LA MISE EN
OEUVRE
45
CHAPITRE 1 : L'INTERNALISATION DES NORMES
INTERNATIONALES
47
SECTION 1 : LA RATIFICATION DES NORMES
PROTECTRICES DES DEFENSEURS
47
Paragraphe 1 : Le droit international relatif
à la protection des défenseurs des droits de l'Homme
47
A/ Les normes internationales de protection des
défenseurs
48
1) Les instruments internationaux de
protection communs à tous les hommes
48
a. Les instruments à caractère
universel
49
b. Les instruments de portée
régionale
50
2) Les instruments internationaux de
protection spécifiques aux défenseurs
52
a. La déclaration des Nations Unies
sur les défenseurs des droits de l'Homme
52
b. Les instruments régionaux
africains de protection spécifiques aux défenseurs
55
B/ Les mécanismes internationaux de
protection des défenseurs
57
1) Les mécanismes
quasi-juridictionnels
57
a. Le Comité des droits de l'Homme
des Nations Unies
57
b. La Commission africaine des droits de
l'Homme et des peuples
59
2) Les mécanismes non
juridictionnels
62
a. Le rapporteur spécial des Nations
Unies sur la situation des défenseurs des droits de l'Homme
62
b. Le rapporteur spécial dur les
défenseurs des droits humains en Afrique
65
Paragraphe 2 : La ratification des normes
comme préalable nécessaire à l'effectivité de leur
mise en oeuvre
67
A/ L'applicabilité des normes protectrices
des défenseurs
67
B/ La compétence des mécanismes
internationaux de protection des défenseurs
69
SECTION 2 : LA RECONNAISSANCE INTERNE DES
NORMES PROTEGEANT LES DEFENSEURS
70
Paragraphe 1 : La consécration
constitutionnelle des droits reconnus aux défenseurs
71
A/ L'affirmation des droits-libertés
individuels et collectifs
72
B/ La constitutionnalisation du
préambule
73
Paragraphe 2 : L'aménagement
législatif des droits reconnus aux défenseurs
74
CONCLUSION DU PREMIER CHAPRITRE
76
CHAPITRE 2 : LA MISE EN PLACE DE MECANISMES
INSTITUTIONNELS GARANTISSANT L'EFFECTIVITE DES NORMES PROTEGEANT LES
DEFENSEURS
77
SECTION 1 : LES INSTITUTIONS
JURIDICTIONNELLES
77
Paragraphe 1 : La protection des
libertés publiques par le juge judiciaire
78
Paragraphe 2 : La protection des
libertés individuelles par le juge administratif
78
SECTION 2 : LES INSTITUTIONS NON
JURIDICTIONNELLES
79
Paragraphe 1 : La Commission Nationale des
droits de l'Homme et des libertés (CNDHL)
80
Paragraphe 2 : Les organisations de la
société civile
82
A/ Le Réseau camerounais des organisations
des droits de l'Homme (RECODH)
83
1) Le produit d'une volonté
étatique
83
2) Un acteur institutionnel de protection
des défenseurs des droits de l'Homme important
84
B/ Le Réseau des défenseurs des
droits humains en Afrique Centrale (REDHAC)
85
CONSLUSION DU DEUXIEME CHAPITRE
87
CONSLUSION DE LA PREMIERE PARTIE
88
SECONDE PARTIE : LA LIMITATION DE LA MISE EN
OEUVRE
90
CHAPITRE 3 : LA CONSISTANCE DE LA
LIMITATION
91
SECTION 1 : LES LIMITES SOCIO-JURIDIQUES
91
Paragraphe 1 : Les entraves juridiques
91
A/ La faible attractivité exercée par
les normes internationales spécifiques protectrices des
défenseurs sur ceux-ci
91
1) Des règles méconnues de
leurs destinataires
92
2) Le caractère non contraignant des
textes
94
B/ Un cadre juridique interne inadéquat
95
1) L'inexistence d'un statut juridique clair
reconnu au défenseur des droits de l'Homme
95
2) Un aménagement strict de la
question des libertés publiques consacrant la suprématie de
l'autorité
97
Paragraphe 2 : Les pesanteurs sociales et
culturelles
99
A/ Le climat d'adversité existant entre les
défenseurs et les autorités
99
1) La conception culturelle traditionnelle
totalitaire de l'autorité
99
2) L'hostilité des pouvoirs publics
relativement à l'action des défenseurs
101
B/ L'ignorance généralisée des
populations vis-à-vis des questions de droits de l'Homme
103
1) Un contexte socio-économique
imperméable à l'essor d'une culture des droits de l'Homme
103
2) La méconnaissance du rôle
des défenseurs par les communautés
104
SECTION 2 : LES LIMITES INSTITUTIONNELLES
106
Paragraphe 1 : Une protection institutionnelle
faible à tous les niveaux
107
A/ Les entraves liées aux institutions
juridictionnelles
107
1) De l'apparente indépendance du
juge camerounais
108
2) Une réalité
paradoxale : le juge oppresseur des défenseurs des droits de
l'Homme
113
B/ Les limites liées aux institutions non
juridictionnelles
116
1) La dépendance institutionnelle de
la Commission Nationale des droits de l'Homme et des libertés de
l'autorité publique exécutive
116
2) L'impact résiduel de l'action des
institutions privées de protection des militants
122
Paragraphe 2 : Un système
institutionnel de protection des défenseurs dépendant de
l'extérieur
124
A/ La faible intégration des
défenseurs des droits de l'Homme locaux
124
B/ Le recours récurrent, voire
systématique aux organisations internationales des droits de l'Homme et
institutions diplomatiques étrangères
128
CONCLUSION DU TROISIEME CHAPITRE
131
CHAPITRE 4 : LA REVERESIBILITE DE LA
LIMITATION
132
SECTION 1 : LES MESURES CORRECTIVES AU NIVEAU
INTERNE
132
Paragraphe 1 : Le renforcement du
système institutionnel national
133
A/ Des mesures propres à la
communauté des défenseurs
133
1) L'établissement d'un
système de réseautage efficace entre les défenseurs
133
2) Le renforcement des capacités des
défenseurs
135
B/ La promotion du dialogue et de la
coopération entre les acteurs
137
1) L'axe
défenseurs-autorités
138
2) L'axe défenseurs-Commission
nationale des droits de l'Homme et des libertés
140
3) L'axe défenseurs-population
141
Paragraphe 2 : La révision du cadre
juridique pour la promotion du statut du défenseur des droits de
l'Homme
142
A/ L'élaboration d'un cadre juridique
efficace de protection spécifique des défenseurs des droits de
l'Homme
143
1) La production d'une loi consacrant la
protection spécifique des travailleurs des droits de l'Homme
143
2) L'établissement d'un
mécanisme de monitoring destiné à surveiller l'application
de la loi
145
B/ La codification des textes existant se
rapportant à la protection des défenseurs
147
SECTION 2 : LES MESURES CORRECTIVES SUR LE
PLAN INTERNATIONAL
149
Paragraphe 1 : Au niveau universel
149
A/ Un encadrement plus coercitif de
l'exécution par l'Etat de son obligation de protéger les droits
fondamentaux de ses nationaux
150
B/ La conception d'un cadre juridique conventionnel
traitant spécifiquement de la protection des défenseurs des
droits de l'Homme
152
Paragraphe 2 : A l'échelle
régionale africaine
154
CONSLUSION DU QUATRIEME CHAPITRE
156
CONSLUSION DE LA SECONDE PARTIE
157
CONCLUSION GENERALE
158
BIBLIOGRAPHIE
160
ANNEXES
172
TABLE DES MATIERES
192
* 1 NGUEMA I.,
« Violence, droits de l'Homme et développement en
Afrique » in Revista IIDH, Vol. 21, 1995, p. 93.
* 2 BOUKONGOU J. D., Cours de
projet de recherche (inédit), Master 2, UCAC, APDHAC, 2011-2012, p.
9.
* 3 Office contre la drogue
et le crime des Nations Unies, Criminalité et développement en
Afrique (Rapport), Juin 22005, p. v.
* 4 SEKAGGYA M., Message
sur les défenseurs des droits de l'homme : dix ans après la
déclaration sur les droits de l'homme, dix points pour mieux les
connaitre, en annexe de son rapport sur la situation des défenseurs
des droits de l'homme présenté à l'Assemblée
générale des nations unies le 12 août 2008, A/63/288
* 5 Observatoire pour la
protection des défenseurs des droits de l'Homme, intervention orale
à la 53éme session ordinaire de la Commission africaine des
droits de l'Homme et des peuples (Banjul, 9-23 avril 2013) sous le point 9 de
l'ordre du jour : « Situation des défenseurs des droits
de l'Homme »,
http://protectionline.org/files/2013/04/Intervention-orale-sur-les-HRD-en-Afrique_CADHP_130413.pdf
(consulté le 19/08/2013).
* 6 Observatoire pour la
protection des défenseurs des droits de l'Homme (OBS), L'obstination
du témoignage, Rapport annuel 2011, p. 9.
* 7 East and Horn Africa
Human Rights Defenders Project (EHAHRDP), Defending human rights: resource
book for human rights defenders, 2nd edition, p. 2.
* 8 Rapport du
Secrétaire général de l'ONU à l'Assemblée
générale, 55ème session, A/55/292, 11
août 2000 cité dans Rapport sur la situation des
défenseurs des droits de l'Homme dans les Amériques, CIDH,
pp 7-8.
* 9 Commission
Interaméricaine des droits de l'Homme, Rapport sur la situation des
défenseurs des droits de l'Homme dans les Amériques,
OEA/Ser.L/V/II. 124, Doc. 5 Fr, adopté à sa
124ème session ordinaire, 7 mars 2006, p. 1.
* 10 Idem, p. 1.
* 11 OBS, Op. Cit.,
p.15.
* 12 Il s'agit de l'actuel
Conseil des droits de l'Homme des Nations Unies.
* 13Commission
Interaméricaine des droits de l'Homme, Op. Cit., p. 7.
* 14 EHAHRDP, Op.
Cit., p. 2 (traduit de l'anglais).
* 15 Idem, p. 4.
* 16 EGUREN L. E. et
QUINTANA M. M., Protection des défenseurs des droits humains :
bonnes pratiques et leçons tirées de l'expérience,
Protection International, 2011, p. 6, disponible sur
www.protectionline.org
(consulté le 19/08/2013).
* 17 Commission
Interaméricaine des droits de l'Homme, Op. Cit., p. 8.
* 18 EGUREN L. E. et QUINTANA
M. M., Op. Cit., p. 6.
* 19 Commission
Interaméricaine des droits de l'Homme, Op. Cit., p. 1.
* 20 Idem, p. 1.
* 21 Réseau des
défenseurs des droits humains en Afrique centrale (REDHAC), Etat des
lieux de la situation des défenseurs au Cameroun (inédit),
p. 1,
http://www.redhac.org.
(Consulté le 19/08/2013)
* 22 Département
d'Etat des Etats-Unis/Bureau pour la démocratie, les droits de l'Homme
et le travail, Rapport 2012 sur les droits de l'Homme au Cameroun, p. 1,
disponible à l'adresse (chercher)
* 23 Idem, p. 1.
* 24 Réseau
camerounais des organisations des droits de l'Homme (RECODH), Rapport sur
l'état des droits de l'Homme au Cameroun 2011, p. 152.
* 25 Idem, p. 155.
* 26 GUIME DJIME,
défenseur des droits de l'Homme, a été assassiné
à son domicile dans la nuit du 10 au 11 juin 2011. (Cf. Rapport RECODH
2011, p. 161) Eric OHENA LEMBEMBE, journaliste engagé dans la
défense des droits des lesbiennes, gays, bisexuels, transgenre et
intersexuels (LGBTI) a été retrouvé assassiné
à son domicile à Yaoundé, dans la soirée du 15
juillet 2013. (Cf. la page web suivante :
http://www.fidh.org/-cameroun-1547-
)
* 27 Voir le cas du
défenseur des droits de l'Homme MEY ALI, président de
l'organisation OS CIVILE. (Rapport 2011 RECODH, p. 155) Voir également
celui de Mr MOWHA Franklin, président national de Front Line Fighters
For Citizens Interest et défenseur des droits des paysans et de la
minorité Bororo dans la région de l'Ouest Cameroun. (Rapport
RECODH 2011, p. 160 ; Communiqué de presse du REDHAC du 14
décembre 2012).
* 28 GABY AMBO, directeur
exécutif et co-fondateur de FINDERS INITIATIVE GROUP (FIG), ONG de
défense des droits de l'homme basée à BAMENDA, a
été victime d'intimidations, vols et menaces de mort.
(Communiqué de presse du REDHAC du 10 octobre 2012) Maximilienne NGO MBE
directrice exécutive du REDHAC, est victime d'intimidations, de vols et
menacée de viol par les éléments des forces de
sécurité. (Rapport 2013 AMNESTY INTERNATIONAL, p. 57 ; appel
urgent de l'Observatoire pour les défenseurs du 15 avril 2011, rapport
annuel 2011 de l'observatoire, p. 128.) Les avocats Alice NKOM et Michel TOUGUE
ainsi que membres de leurs familles, sont menacées de violence et de
mort, pour avoir représenté des personnes accusées de
relations homosexuelles. (Rapport 2013 AMNESTY INTERNATIONAL, p. 57 ;
appel urgent du REDHAC du 25 octobre 2012)
* 29 Stéphane KOCHE,
membre de l'Association pour la défense des droits des homosexuels
(ADEFHO) est arrêté et maintenu en détention pendant
plusieurs heures par des membres des forces de sécurité le 27
mars 2012, pour avoir organisé à Yaoundé, un atelier sur
les droits des minorités sexuelles. (Rapport 2013 AMNESTY INTERNATIONAL,
p. 57)
* 30 Richard FOUOFIE
DJIMELI, réalisateur du film de fiction « 139 les derniers
prédateurs » mettant en scène un tyran au pouvoir de
puis 139 ans, a été enlevé dans la nuit du samedi 23 au
dimanche 24 mars 2013, dans sa chambre au quartier CRADAT à
Yaoundé. (Cf. Appel urgent du REDHAC du 25 mars 2013.)
* 31 AMNESTY INTERNATIONAL,
La situation des droits humains dans le monde, rapport 2013, p. 57.
* 32 AMNESTY INTERNATIONAL,
Op. Cit., p. 56.
* 33 BOUKONGOU J. D., Cours
de projet de recherche (inédit), Master 2, UCAC, APDHAC, 2011-2012,
p. 19.
* 34 GUILLIEN R. et VINCENT
J., Lexique des termes juridiques, 13ème
édition, Paris : Dalloz, 2001, p. 219.
* 35 BOUKONGOU J. D., Cours
de droit international des droits de l'Homme (inédit), Master 1,
UCAC, APDHAC, 2010-2011, p. 3.
* 36 GUILLIEN R. et VINCENT
J., Op. Cit., p. 217.
* 37 BOUKONGOU J. D., Cours
de projet de recherche (inédit), Master 2, UCAC, APDHAC, 2011-2012,
p. 20.
* 38 Idem, p. 20.
* 39 Ibidem, p. 20.
* 40 Comité
International de la Croix Rouge, « Mise en oeuvre du droit
international humanitaire : du droit à
l'action » disponible à l'adresse suivante :
www.icrc.org/fre/assets/files/other/mise_en_oeuvre_dih.pdf.
(Consulté le 19/08/2013)
* 41 BOISSON DE CHAZOURNES
L., « La mise en oeuvre du droit international dans le domaine de la
protection de l'environnement : enjeux et défis » in
Revue générale de droit international public, tome 9,
Paris : Pedone, 1999, p. 39.
* 42 COMBACAU J. et SUR S.,
Droit international public, 2e édition, Paris :
Montchrestien, coll. « Domat-droit public », 1995, p.
167.
* 43 MALJEAN DUBOIS S.,
« La mise en oeuvre du droit international de
l'environnement » in Les notes de l'institut du
développement durable et des relations internationales (IDDRI),
n° 4, Paris, 2003, p. 22.
* 44 NGWANZA OWONO J.,
La mise en oeuvre de la convention-cadre de l'ONU sur les changements
climatiques au Cameroun : cas du mécanisme de développement
propre, Mémoire présenté et soutenu publiquement en
vue de l'obtention du Master en droits de l'Homme et action humanitaire, UCAC,
2008-2009, 77 pages.
* 45 GUILLIEN R. et VINCENT
J., Lexique des termes juridiques, 13ème
édition, Paris : Dalloz, 2001, p. 445.
* 46 Idem, p. 559.
* 47 D. DE BECHILLON,
Qu'est-ce qu'une règle de droit ?, Paris : éd.
Odile Jacob, 1997, pp. 163-164.
* 48 Idem, pp. 165-166.
* 49 KELSEN H.,
Théorie générale des normes,
1ère édition, Paris : PUF, coll.
Léviathan, 1996, p. 2.
* 50 Idem, p. 6.
* 51 D. DE BECHILLON,
Op. Cit., p. 173.
* 52 KELSEN H., Op.
Cit., p. 9.
* 53 LABEE X., Les
critères de la norme juridique, Paris : PUL, 1994, p. 12.
* 54 Idem, p. 13.
* 55 D. DE BECHILLON,
Op. Cit., p. 170.
* 56 SALMON J.,
Dictionnaire de droit international public, Bruxelles :
Bruylant/AUF, 2001, pp. 546-547.
* 57 COMBACAU J. et SUR S.,
Op. Cit., pp. 15-16.
* 58 DUPUY P-M., Droit
international public, 3ème édition, Paris :
Dalloz, 1995, p. 284.
* 59 COMBACAU J. et SUR S.,
Op. Cit., pp. 25-26.
* 60 Pour les auteurs, les
principaux éléments de formation du droit international sont,
conformément à l'article 38 du statut de la Cour internationale
de justice (CIJ) : l'engagement international de l'Etat, la coutume
internationale, les traités internationaux, les instruments
concertés non conventionnels, les actes unilatéraux
étatiques, les actes des organisations internationales, les principes
généraux de droit. Voir page 43
* 61 COMBACAU J. et SUR S.,
Op. Cit., p. 43.
* 62 Idem, p. 45.
* 63 COMBACAU J. et SUR S.,
Op. Cit., pp. 25-26.
* 64 NGUYEN QUOC DINH et
alli, Droit international public, 5ème
édition, Paris : LGDJ, 1994, p. 114.
* 65 SALMON J.,
Dictionnaire de droit international public, Bruxelles :
Bruylant/AUF, 2001, p. 547
* 66 D. DE BECHILLON,
Op. Cit., p. 193.
* 67 Idem, pp. 194-195.
* 68 DUPUY P-M., Op.
Cit., p. 284.
* 69 COMBACAU J. et SUR S.,
Op. Cit., p. 19.
* 70 CORNU G.,
Vocabulaire juridique, 3ème édition,
Paris : PUF, 2002, p. 701.
* 71 SALMON J.,
Dictionnaire de droit international public, Bruxelles :
Bruylant/AUF, 2001, p. 899.
* 72 Idem, p. 902.
* 73 MBAYE K., Les
droits de l'Homme en Afrique, Paris : éd. A. Pedone, 1992, p.
76.
* 74 Idem, p. 70.
* 75 MORANGE J., Manuel
des droits de l'Homme et libertés publiques, Paris : PUF,
collection Droit fondamental, 2007, p. 7.
* 76 HERMET G. et alli,
Dictionnaire de la science politique et des institutions politiques,
Paris : Armand Colin, 1994, p. 89.
* 77 POUILLE A.,
Libertés publiques et droits de l'Homme,
16ème édition, Paris : Mémentos Dalloz,
2008, p. 7.
* 78 MOURGEON J., Les
droits de l'Homme, Paris : PUF, collection Que sais-je ?,
n° 1728, 1998, p. 9.
* 79 KAMWANGA KILIYA D., Les
mécanismes internationaux de protection et effectivité des droits
de l'Homme, Mémoire présenté en vue de l'obtention du
diplôme d'études approfondies (DEA) en droits de la personne et de
la démocratie, Université d'Abomey-Calavi (Bénin), 2005,
http://www.memoireonline.com/12/05/29
(consulté le 19/08/2013).
* 80 MBAYE K., Op.
Cit., p. 25.
* 81 ETEME ETEME S. P.,
Droits de l'Homme et police judiciaire au Cameroun, Paris :
L'Harmattan, 2009, p. 24.
* 82 Centre des Nations
Unies pour les droits et la démocratie en Afrique centrale, Rights
& democracy focus, édition spéciale du 10
décembre 2010, Yaoundé, p. 1.
* 83 Observatoire pour la
protection des défenseurs des droits de l'homme, Violations du droit
des ONG au financement : du harcèlement à la
criminalisation, rapport annuel 2013, p. 96.
* 84 Il faut signifier que
c'est à compter de l'adoption de ce texte que l'expression
« défenseur des droits de l'Homme » s'est
vulgarisée. Jusque là les termes les plus couramment
utilisés étaient « militant »,
« professionnel », « travailleur » ou
« surveillant » des droits de l'Homme. Par
conséquent dans le cadre de cette étude, l'on emploiera donc
indifféremment ces différentes locutions parce qu'elles rendent
compte de la même réalité.
* 85 Haut-commissariat des
Nations Unies aux droits de l'Homme, Les défenseurs des droits de
l'homme : protéger le droit de défendre les droits de
l'homme, fiche d'information n° 29, Genève : publications
de l'ONU, 2004, p. 2.
* 86 MATHIEU J-L., La
défense internationale des droits de l'Homme, Paris : PUF,
coll. Que sais-je ?, 1993, 127 pages.
* 87 Idem, p. 7.
* 88 MATHIEU J-L., Op.
Cit., p. 16.
* 89 Idem., p. 17.
* 90 JAUDEL E., Le juste
et le fort : la défense des droits de l'homme sur trois
continents, Paris : éd. Grasset et Fasquelle, 1989, 203
pages.
* 91 Idem, p. 13.
* 92 JAUDEL E., Op. Cit., p.
143.
* 93 AURENCHE G.,
L'aujourd'hui des droits de l'Homme, Paris : Nouvelle
cité, 1985, 265 pages.
* 94 AURENCHE G.,
« Les droits de l'Homme en questions » in Etudes
(revue), Tome 378, n° 6(3786), juin 1993, Paris : éd. Assas,
pp. 725-734.
* 95 AURENCHE G.,
L'aujourd'hui des droits de l'Homme, Paris : Nouvelle
cité, 1985, p. 11.
* 96 Idem, p. 10.
* 97 Ibidem, p. 123.
* 98 Ibid, p. 124.
* 99 AURENCHE G.,
« Les droits de l'Homme en questions » in Bulletin des
études (revue), Tome 378, n° 6(3786), juin 1993, Paris :
éd. Assas, p. 727.
* 100 Idem, p. 730.
* 101 Ibidem, pp. 730-731.
* 102 Ibid, p. 733.
* 103 Il faut entendre le
terme personne ici selon la conception large du droit
général à savoir comme une entité pouvant
être physique ou non, dotée de la capacité d'agir.
* 104 MENGUE M. T.,
« Société civile au Cameroun et promotion des droits de
l'homme » in Vers une société de droit en Afrique
centrale (90-2000), MAUGENEST D. et BOUKONGOU J. D. (Dir.),
Yaoundé : PUCAC, 2001.
* 105 Idem, P. 31.
* 106 Ibidem, P. 41.
* 107 DE MONTALEMBERT A.,
« Amnesty International : la défense des droits de
l'Homme à la portée de tous » in Bulletin des
études, tome 352, n° 3(3528), mars 1980, Paris :
éd. Assas, pp. 319-331.
* 108 LEAUD A., Amnesty
International : le parti des droits de l'Homme, Paris :
éd. Du Seuil, 1993, 245 pages.
* 109 DE MONTALEMBERT A.,
Op. Cit., p. 331.
* 110 LEAUD A., Op.
Cit., p. 89.
* 111 Idem, p. 90.
* 112 OFUATEY-KODJOE W.,
« L'Organisation des Nations Unies et la défense des droits
individuels et collectifs » in Revue internationale des sciences
sociales, n° 144, juin 1995, Paris : érès, pp.
355-372.
* 113 OFUATEY-KODJOE W.,
Op. Cit., p. 355.
* 114 Idem, p. 359.
* 115 Ibidem, p. 360.
* 116 Ibid., p. 359.
* 117 Ibid., pp.
361-362.
* 118 QUIVY R. et VAN
CAMPENHOUDT L., Manuel de recherche en sciences sociales,
4ème édition, Paris : Dunod, 2011, p. 81.
* 119 Le Cameroun a
adhéré à la Charte des Nations Unies (CNU)
conformément à son article 4 et, est devenu membre de
l'organisation le 20/09/1960. Il a également signé,
ratifié et déposé les instruments de la Charte africaine
des droits de l'Homme et des peuples (CADHP) respectivement les 23/07/1987,
20/06/1989 et 18/09/1989. Par conséquent il est soumis aux dispositions
de ces textes et reconnaît les compétences des organes qu'elles
créent. C'est pourquoi la déclaration de 98 et les textes non
contraignants du système africain élaborés dans le sens de
la protection des défenseurs, lui sont applicables. Et aussi que la
compétence des différents mécanismes de rapportage
établis à l'échelle onusienne et africaine, s'étend
à son territoire.
* 120 BESSON S.,
« L'effectivité des droits de l'Homme : du devoir
être, du pouvoir être et de l'être en matière de
droits de l'Homme », in XXXX, p. 69.
* 121 BOUKONGOU J. D., Cours
de projet de recherche (inédit), Master 2, UCAC, APDHAC, 2011-2012,
p. 7.
* 122 BOUKONGOU J. D., Op.
Cit., p. 7.
* 123 COMBACAU J. et SUR S.,
Droit international public, 2e édition, Paris :
Montchrestien, coll. « Domat-droit public », 1995, p.
180.
* 124 Préambule de la
Déclaration des Nations Unies sur les défenseurs du 9
décembre 1998.
* 125 GRAWITZ M., Lexique
des sciences sociales, 5ème édition, Paris :
Dalloz, 1991, p. 203.
* 126 AKTOUF O.,
Méthodologie des sciences sociales et approche qualitative des
organisations, Montréal : les presses de l'université
du Québec, 1987, p. 27.
* 127 Idem, P. 28.
* 128 GRAWITZ M.,
Méthodes des sciences sociales, 8ème
édition, Paris : Dalloz, 1990, p. 384.
* 129 AKTOUF O., Op.
Cit., p. 27.
* 130 LOUBET DEL BAYLE J.-L.,
Initiation aux méthodes des sciences sociales,
Paris-Montréal : L'Harmattan, 2000, éditeur, p. 27.
* 131 BOUKONGOU J. D., Cours
de projet de recherche (inédit), Op. Cit., p. 23.
* 132 EINSENMANN C.,
Cours de droit administratif, Paris : Karthala-PDM, 2003, p.
45.
* 133 STARCK B. et alli,
Introduction au droit, 3ème édition,
Paris : Litec, Coll. Litec Droit, 1990, p. 44.
* 134 LASCOUMES P. et
SEVERIN E., « Théories et pratiques de l'effectivité du
Droit » in Revue Droit et Société, n° 2,
1986, p. 128
* 135 RANGEON F.,
« Réflexions sur l'effectivité du droit », in
XXXX, p. 128.
* 136 Voir pour plus
d'informations CROZIER M. et FRIEDBERG E., L'acteur et le système.
Les contraintes de l'action collective, Paris : Le Seuil, 1977.
* 137 QUIVY R. et VAN
CAMPENHOUDT L., Manuel de recherche en sciences sociales,
4ème édition, Paris : Dunod, 2011, p. 166.
* 138 Idem, p. 162.
* 139 LOUBET DEL BAYLE
J.-L., Initiation aux méthodes des sciences sociales,
Paris-Montréal : L'Harmattan, 2000, éditeur, p. 167.
* 140 QUIVY R. et VAN
CAMPENHOUDT L., Op. Cit., p. 179.
* 141 LOUBET DEL BAYLE
J.-L., Op. Cit., p. 168.
* 142 LOUBET DEL BAYLE
J.-L., Op. Cit., p. 168.
* 143 AKTOUF O., Op.
Cit., p. 112.
* 144 Idem, p. 111.
* 145 LOUBET DEL BAYLE J.-L.,
Op. Cit., p. 186.
* 146 Idem, se
référer à la typologie effectuée à la page
112.
* 147 AKTOUF O., Op.
Cit., p. 87.
* 148 LOUBET DEL BAYLE
J.-L., Op. Cit., p. 71.
* 149 ROMI R.,
Méthodologie de la recherche en droit : Master et
doctorat, Paris : Litec, 2006, p. 55 cité par BOUKONGOU J. D.,
BOUKONGOU J. D., Cours de projet de recherche (inédit), Op. Cit.,
p.26.
* 150 EGUREN L. E. et
QUINTANA M. M., Protection des défenseurs des droits humains :
bonnes pratiques et leçons tirées de l'expérience,
Bruxelles : Protection International, 2011, p. 13.
* 151 L'allusion est faite
ici à la conception classique volontariste du droit international, qui
veut que ce dernier ne trouve sa source exclusivement, que dans la
volonté des Etats. Pour les tenants de cette philosophie axée sur
le statocentrisme, tels que le doyen JELLINEK, « l'Etat ne peut
être lié par le droit que s'il y consent. » Il
s'agit de la règle « pacta sunt servanda ».
Cette pensée s'est fortement enracinée dans l'appréhension
moderne du droit international, dans la mesure où elle a
été consacrée comme norme de jus cogens
(règle impérative), par la Convention de Vienne sur
le droit des traités du 23 mai 1969. Cette dernière dispose
à ce sujet en son article 26 que : « tout
traité en vigueur lie les parties et doit être
exécuté par elles de bonne foi. »
* 152 NYALUMA MULAGANO
A., « Les obligations de l'Etat dans la mise en oeuvre des
droits de l'Homme » (pp 99-106) in Manuel de formation à
l'intention des défenseurs des droits de l'Homme en Afrique
(collectif), Dimension sociale Bénin, Calavi, Juillet 2009, p.
99.
* 153 Idem, p.
99.
* 154 Observatoire pour la
protection des défenseurs des droits de l'homme (OBS), L'obstination
du témoignage, rapport annuel 2011, p.16
* 155 EGUREN L. E. et
QUINTANA M. M., Op. Cit., p. 3.
* 156 OBS, Op.
Cit., p.16.
* 157 EGUREN L. E. et
QUINTANA M. M., Idem, p. 3.
* 158 Cf. Article 2
DUDH et Article 2 PIDCP.
* 159 Cf. Article 19
DUDH et Article 19 PIDCP.
* 160 Voir Article 20
DUDH, Articles 21 et 22 PIDCP.
* 161 Voir Article 12
DUDH et Article 13 PIDCP.
* 162 Article 21
DUDH, Article 25 PIDCP.
* 163 Article 19
PIDCP, voir aussi article 29 DUDH.
* 164 EGUREN L. E. et
QUINTANA M. M., Op. Cit., p.5
* 165 L'on ne s'appesantit
dans le cadre de l'étude que sur le cas du système
régional africain pour des besoins de méthodologie. Ceci dans la
mesure où l'on s'attache à ce niveau à ne mettre en
exergue que les normes internationales de protection des défenseurs des
droits de l'homme opposables et applicables au Cameroun. Alors, cela est loin
de signifier que seule la CADHP a repris dans son corpus les
prérogatives nécessaires à l'action de défense des
droits humains consacrées par les textes universels. Cela est le cas
pour les autres instruments fondamentaux des systèmes régionaux
à savoir : la Convention européenne des droits de
l'Homme (CDEH) et la Convention américaine relative aux droits
de l'Homme (CADH), respectivement pour les systèmes européen
et américain. En guise d'exemple, l'on peut se contenter de faire
remarquer ici que le droit de réunion pacifique consacré aux
articles 20 de la DUDH et 21 du PIDCP comme mentionné
plus haut, est repris non seulement par la CADHP en son article 11, mais aussi
par les CEDH et CADH respectivement en leurs articles 11 et 15.
* 166 Le droit à la
protection à l'article 2, les libertés d'opinion et d'expression
à l'article 9, la liberté d'association pacifique à
l'article 10, le droit de réunion à l'article 11, la
liberté de circulation à l'article 12 et enfin, le droit de
participation à la gestion des affaires publiques à l'article
13.
* 167 Articles 11 et 12
CADHP.
* 168 Propos de Mr. Hasan
SHIRE SHEIKH (président de l'Unité des défenseurs de l'est
de la corne de l'Afrique, et responsable du Secrétariat du Réseau
panafricain des défenseurs) à l'occasion de Johannesburg + 10, la
Conférence de tous les défenseurs des droits de l'Homme
d'Afrique qui s'est tenue à Kampala, du 20 au 23 Avril 2009 in
Johannesburg + 10 Le rapport de la conférence, Projet des
défenseurs des droits humains de l'est et de la corne de l'Afrique
(EHAHDRDP), 5 Septembre 2009, P. 9
* 169 Haut-commissariat des
Nations Unies aux droits de l'Homme, Les défenseurs des droits de
l'homme : protéger le droit de défendre les droits de
l'homme, fiche d'information n° 29, Genève : publications
de l'ONU, 2004, p. 22.
* 170 Consulter à
cet effet, les articles 1, 5, 6, 7, 8, 9, 11, 12 et 13 du corpus de la
Déclaration.
* 171 Elle dispose fort
à propos dans son article premier que : « Chacun a le
droit, individuellement ou en association avec d'autres, de promouvoir la
protection et la réalisation des droits de l'homme et des
libertés fondamentales aux niveaux national et
international. »
* 172 La Déclaration
définit distinctement les obligations liant les gouvernements envers les
Etats, aux articles 2, 9, 12, 14 et 15. Les Etats ont ainsi la
responsabilité et la charge de protéger et promouvoir tous les
droits de l'Homme ; de veiller à ce que toute personne sous leur
juridiction en profite ; d'adopter toutes les mesures législatives
et règlementaires pour assurer la mise en oeuvre effective des droits et
libertés ; de diligenter au plus vite des enquêtes
impartiales sur les violations des droits humains ; de protéger les
personnes de toute violence ou discrimination ; de stimuler et de soutenir
la création d'institutions nationales indépendantes de promotion
et de protection des droits humains ; de promouvoir l'enseignement des
droits de l'Homme à tous les niveaux.
* 173 Propos de Mme
Margaret SEKAGGYA, le rapporteur spécial des NU pour les
défenseurs lors de Johannesburg + 10 in Johannesburg + 10 Le rapport
de la conférence, Projet des défenseurs des droits humains
de l'est et de la corne de l'Afrique (EHAHDRDP), 5 Septembre 2009, P. 40.
* 174 La Déclaration
dispose ainsi qu'il suit en son article 19 : « La
Conférence note que l'adoption de la Déclaration des Nations
Unies sur la protection des défenseurs des droits de l'homme par la
54éme session de la Commission des Nations Unies sur les droits de
l'homme marque un tournant important, et lance un appel aux gouvernements
africains pour qu'ils prennent les mesures appropriées pour mettre en
oeuvre cette Déclaration en Afrique. »
* 175 Cf. Article 30 de la
CADHP.
* 176 Voir
Résolution n° 196.
* 177 Pour reprendre la
formule de l'éminent penseur du 18ème siècle
Emer DE VATTEL.
* 178 Ceci dans la mesure
où, le Comité ne rend pas de décisions ayant
autorité de la chose jugée ou force contraignante, mais
plutôt des avis et recommandations, dont l'exécution ne contraint
pas les Etats. Toutefois, étant donné que les mesures qu'il
prescrit se rattachent aux obligations conventionnelles que le Pacte impose
à ces derniers, ils sont tenus de les réaliser.
* 179 BOUKONGOU J. D.,
Cours de droit international des droits de l'Homme (inédit), Master 1,
UCAC, APDHAC, 2010-2011, p. 25.
* 180 GUIMDO B-R .,
Cours de Contentieux des droits civils et politiques (inédit), Master
2, UCAC, APDHAC, 2011-2012, p. 2.
* 181 BOUKONGOU J. D.,
Op. cit, P. 30.
* 182 POUGOUE P. G.,
« La Commission africaine des droits de l'homme et des peuples entre
son passé et son avenir », in : L'effectivité
des droits fondamentaux dans les pays de la communauté francophone,
1994, Montréal : AUPELF-UREF, pp. 529-532 Cité par BOUKONGOU
J. D., Op. cit, P. 37.
* 183 Le mandat de la CADH
est défini par l'article 45 de la Charte africaine des droits de
l'Homme et des peuples.
* 184 Pour amples
développements sur le sujet, bien vouloir consulter les articles 47
à 53 de la CADHP.
* 185 Article 55
CADHP.
* 186 Article 56
CADHP. Voir les articles 55 à 59 pour la procédure.
* 187 Selon ce qui est
disposé à l'Article 60 de la CADHP : « la
Commission s'inspire du droit international relatif aux droits de l'homme et
des peuples, notamment des dispositions des divers instruments africains
relatifs aux droits de l'homme et des peuples, des dispositions de la Charte
des Nations Unies, de la Charte de l'Organisation de l'Unité Africaine,
de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme, des dispositions
des autres instruments adoptés par les Nations Unies et par les pays
africains dans le domaine des droits de l'homme et des peuples ainsi que des
dispositions de divers instruments adoptés au sein d'institutions
spécialisées des Nations Unies dont sont membres les parties
à la présente Charte. »
* 188 Communications 147/95
et 149/96, affaire Sir Dawda K. Jawara c/ Gambie.
* 189 Communications
137/94, 139/94, 154/96 et 161/97, affaire Ken Saro-Wiwa.
* 190 NYALUMA MULAGANO
A., « Les obligations de l'Etat dans la mise en oeuvre des
droits de l'Homme » (pp 99-106) in Manuel de formation à
l'intention des défenseurs des droits de l'Homme en Afrique
(collectif), Dimension sociale Bénin, Calavi, Juillet 2009, p.
163.
* 191 Haut-commissariat des
Nations Unies aux droits de l'Homme, Les défenseurs des droits de
l'homme : protéger le droit de défendre les droits de
l'homme, fiche d'information n° 29, Genève : publications
de l'ONU, 2004, p. 21.
* 192 En Août 2000,
le mandat de Représentant Spécial du Secrétaire
Général sur les défenseurs des droits de l'Homme est
créé. Mme Hina JILANI, avocate pakistanaise des droits de
l'Homme de grande notoriété, est nommée comme
première titulaire du poste, pour une durée de trois comme requis
dans la résolution. Le mandat perdure même sous le Conseil des
Droits de l'Homme avec les mêmes conditions de durée. Il est ainsi
renouvelé en 2008 (Résolution 7/81) et en 2011
(Résolution 16/5). En 2008, la magistrate ougandaise Margaret
SEKAGGYA succède à Mme JILANI ; le mandat change alors de
titre pour devenir Rapporteur Spécial sur la situation des
défenseurs des droits de l'Homme. Les titulaires ne sont plus
nommés par le Secrétaire Général, mais par le
Président du Conseil des Droits de l'Homme. Cependant il faut relever
que la substance du mandat reste la même, inchangée.
* 193 Haut-commissariat des
Nations Unies aux droits de l'Homme, Op. Cit., p. 26.
* 194 A titre
d'information, le mandat est actuellement détenu par Mme Reine
ALAPINI-GANSOU, une éminente juriste béninoise, depuis le 5
Novembre 2011, en vertu de la Résolution n° 202.
* 195 A cet effet, le
Rapporteur a commencé par ailleurs, à publier La lettre de la
Rapporteure, un bulletin bi-annuel destiné à informer les
défenseurs de ses activités, faisant état de
problématique s d'intérêt pour les défenseurs dans
le contexte africain.
* 196 EGUREN L. E. et
QUINTANA M. M., Protection des défenseurs des droits humains :
bonnes pratiques et leçons tirées de l'expérience,
Bruxelles : Protection International, 2011, p. 10.
* 197 Vu l'importance de ce
point pour la suite de l'étude, il est nécessaire de s'y attarder
de nouveau amplement. Le Cameroun a adhéré au Pacte
International relatif aux droits civils et politiques et au Protocole
facultatif au Pacte, le 27 juin 1984. Il a signé les instruments
relatifs à la Charte africaine des droits de l'Homme et des
peuples, le 23 juillet 1987, les a ratifié le 20 juin 1989 et
déposé le 18 septembre 1989. La Charte des Nations Unies
est entrée en vigueur au Cameroun le 20 septembre 1960.
L'adhésion du pays s'est faite conformément à l'article 4
qui dispose ainsi qu'il suit : « Peuvent devenir Membres des
Nations Unies tous autres Etats pacifiques qui acceptent les obligations de la
présente Charte et, au jugement de l'Organisation, sont capables de les
remplir et disposés à le faire. L'admission comme Membres des
Nations Unies de tout Etat remplissant ces conditions se fait par
décision de l'Assemblée générale sur recommandation
du Conseil de sécurité. »
* 198 Selon ce qu'il
ressort des articles 14 et 15 de la Convention de Vienne sur le droit des
traités.
* 199 GUILLIEN R. et
VINCENT J., Lexique des termes juridiques, 13ème
édition, Paris : Dalloz, 2001, p. 459.
* 200 Idem, p.
21.
* 201 Cette obligation est
faite par le PIDCP qui dispose en article 2 : « Les Etats
parties au présent Pacte s'engagent à respecter et à
garantir à tous les individus se trouvant sur leur territoire et
relevant de leur compétence les droits reconnus dans le présent
Pacte, sans distinction aucune... » Elle est également
textuellement reprise par la CADHP en son article 2 : « toute
personne a droit à la jouissance des droits et libertés reconnus
et garantis dans la présente Charte sans distinction
aucune... »
* 202 BOUKONGOU J. D.,
Cours de droit international des droits de l'Homme (inédit), Master 1,
UCAC, APDHAC, 2010-2011, p. 38 (inédit). Néanmoins
précisément en ce qui concerne la condition d'épuisement
des voies de recours internes, la CADH s'est abondamment prononcée pour
y apporter des tempéraments. Aussi, selon elle, « il
serait incorrect d'obliger les plaignants à user des voies de recours
qui ne fonctionnent pas de façon impartiale et qui ne sont pas tenues de
statuer conformément aux principes de droit. Le recours dans ce cas
n'est ni adéquat ni efficace. » (Communication 60/91,
affaire Constitutionnal Rights Project c/ Nigéria)
L'idée générale ainsi défendue est que la
règle ne devrait astreindre les plaignants à
« épuiser des voies de recours internes qui, en termes
pratiques, ne sont ni disponibles ni pratiques. » (Communication
71/92, affaire RADDHO c/ Zambie)
* 203 Voir Article 3 de la
Déclaration sur le droit et la responsabilité des individus,
groupes et organes de la société de promouvoir et protéger
les droits de l'homme et les libertés fondamentales universellement
reconnus.
* 204 GUILLIEN R. et
VINCENT J., Lexique des termes juridiques, 13ème
édition, Paris : Dalloz, 2001, p. 147.
* 205 DEBBASCH C. et
alii, Droit constitutionnel et institutions politiques,
4e éd., Paris : Economica, 2001, p. 83 cité par
ZBIGNIEW DIME LI NLEP P., La garantie des droits fondamentaux au
Cameroun, DEA en Droit International des Droits de l'Homme,
Université Abomey-Calavi, Bénin, 2004 disponible sur
www.memoireonline.com/03/07/396/m_la-garantie-des-droits-fondamentaux-au-cameroun.html
* 206 GONIDEC P. F.,
Les droits africains, Evolutions et sources, 2e
édition, Paris : LGDJ, 1985, p. 100 cité par ZBIGNIEW P.,
Idem.
* 207 ZBIGNIEW P., Op.
Cit.
* 208 ZBIGNIEW P., Op.
Cit.
* 209 Idem.
* 210 KAMTO M.,
« L'énoncé des droits dans les constitutions des Etats
africains francophones » in R.J.A., n° 2-3, Yaoundé,
Presses Universitaires du Cameroun, 1991, p. 12 cité par ZBIGNIEW P.,
Op. Cit.
* 211 KAMTO M., Op. Cit.,
p. 15 cité par ZBIGNIEW P., Op. Cit.
* 212 ATANGANA AMOUGOU J.
L., L'Etat et les libertés publiques au Cameroun : essai sur
l'évolution des libertés publiques en droit camerounais,
Thèse, droit public, Volume 1, Université Jean Moulin Lyon III,
1999, p. 175.
* 213 Article 1 de la
loi n° 90/053.
* 214 Article 2 de la
loi n° 90/055.
* 215 Article 3 d la
loi n° 90/055.
* 216 ATANGANA AMOUGOU J.
L., L'Etat et les libertés publiques au Cameroun : essai sur
l'évolution des libertés publiques en droit camerounais,
Thèse, droit public, Volume 1, Université Jean Moulin Lyon III,
1999, pp. 236-237.
* 217 Il convient de
procéder à une précision ici afin de dissiper tout doute
pouvant rationnellement se manifester. Bien, ce qu'il faut dire, c'est que
l'analyse aurait parfaitement pu intégrer la juridiction
constitutionnelle. En effet, au travers du mécanisme du contrôle
de la constitutionnalité des lois et règlements, le conseil
constitutionnel peut également être considéré, au
même titre que ses augustes confrères, comme un mécanisme
de défense des droits constitutionnels reconnus aux militants.
Cependant, l'inopportunité d'intégrer cette juridiction à
l'analyse, consiste en ce qu'elle obéit à des conditions de
saisine strictes et restrictives, à l'opposé des autres. Les
justiciables ordinaires ne peuvent la saisir individuellement, afin d'obtenir
la protection de leurs prérogatives. A cet effet, le texte
constitutionnel du 18 janvier 1996 dispose n son article 47(2) que :
« Le Conseil constitutionnel est saisi par le Président de
la République, le président de l'Assemblée Nationale, le
président du Sénat, un tiers des députés ou un
tiers des sénateurs. »
* 218 ATANGANA AMOUGOU J.
L.,Op. Cit., p. 238.
* 219ATANGANA AMOUGOU J.
L., Op. Cit., p. 248.
* 220 Idem, p. 222.
* 221 La déclaration
dispose en effet, en son article 14 alinéa 3 que :
« L'État encourage et appuie, lorsqu'il convient, la
création et le développement d'autres institutions nationales
indépendantes pour la promotion et la protection des droits de l'homme
et des libertés fondamentales dans tout territoire relevant de sa
juridiction, qu'il s'agisse d'un médiateur, d'une commission des droits
de l'homme ou de tout autre type d'institution nationale. »
* 222 Cf. article 1(2) de
la loi n° 2004/016 du 22 juillet 2004 portant
création, organisation et fonctionnement de la Commission Nationale des
Droits de l'Homme et des Libertés.
* 223 Il s'agit du
décret n° 90/1459 du 08 novembre 1990 portant
création du Comité National des Droits de l'Homme et des
Libertés.
* 224 ATANGANA AMOUGOU J.
L., Op cit, p. 222.
* 225 Idem, p. 227.
* 226 Principes de
Paris concernant le statut et le fonctionnement des institutions nationales
pour la protection des droits de l'Homme : Résolution
A/RES/48/134 du 20 décembre 1993.
* 227 Cf. Laurent DOH,
« Les neuf péchés de Chemuta Banda Président de
la CNDHL : Pourquoi Paul Biya doit le démettre », L'article 3
du décret du 8 novembre 1990 encourage de telles pratiques
comme l'illustrent les cas évoqués dans cet article consultable
sur
http://www.icicemac.com/node/6713.
* 228 Cf. article 1(3) de
la loi n° 2004/016 du 22 juillet 2004 portant création,
organisation et fonctionnement de la CNDHL.
* 229 Réseau
camerounais des organisations des droits de l'Homme (RECODH), Rapport sur
l'état des droits de l'Homme au Cameroun 2011, pp. 1-2
* 230 Source : RECODH,
Formulaire de candidature pour le prix 2013 du réseau panafricain
des défenseurs des droits de l'Homme (inédit), p. 6.
* 231 Propos recueillis
lors d'un entretien avec le coordonnateur national du RECODH.
* 232 BESSON S.,
« L'effectivité des droits de l'Homme : du devoir
être, du pouvoir être et de l'être en matière de
droits de l'Homme », in XXX, pp. 70-71.
* 233 Idem, p. 69.
* 234 RANGEON F.,
« Réflexions sur l'effectivité du droit », in
XXX, p. 126.
* 235 CHAMPEIL-DESPLATS V.,
« Effectivité et droits de l'Homme : Approche
théorique » in A la recherche de l'effectivité des
droits de l'Homme, CHAMPEIL-DESPLATS V. et LOCHAK D. (Dir.), Paris :
Presses universitaires de Paris 10, Année, pp. 11-26, article disponible
sur :
http://books.openedition.org/pupo/1152
(consulté le 30/08/2013).
* 236 RANGEON F.,
« Réflexions sur l'effectivité du droit », in
XXXX, p. 128.
* 237 Idem, p. 135.
* 238 RANGEON F., Op. Cit., p.
135.
* 239 MBEYAP KUTNJEM A.,
Le droit à la justice au Cameroun (à l'origine de
l'accélération de la modification du code pénal au
Cameroun), DEA en Droits de la personne et de la démocratie,
Université d'Abomey-Calavi, Bénin, 2005 :
http://www.memoireonline.com/07/06/177/m_droit-justice-cameroun4.html#toc15
* 240 C'est un concept
théorisé et formulé à l'origine par le juriste de
la Common law Lord McNair, dans son ouvrage intitulé The functions
and differing legal character of treaties, pour désigner les
principes abstraits en droit par opposition à la hard law ou le
droit concret, opératoire, issu de l'épreuve judiciaire.
* 241 Il s'agit là
des catégories de sources énumérées à
l'article 38 alinéa 1 du Statut de la Cour internationale de justice.
* 242 DUPLESSIS I.,
« Le vertige et la soft law : réaction
doctrinales en droit international » in Revue
québécoise de droit international, Hors-série, 2007,
p. 249.
* 243 Intervention d'un
défenseur enquêté lors de la collecte des données
sur le terrain. Tout au long de l'analyse, dans le souci d'étayer cette
dernière, l'on fera intervenir de manière
régulière, les avis pertinents donnés par la population de
défenseurs enquêtée. Toutefois, la majorité des
militants ayant requis l'anonymat, ces citations se feront dans des conditions
respectant cette exigence.
* 244 Consulter pour plus
amples informations, le document présentant les Décisions du
Cameroun, au sujet des recommandations du groupe de travail pour le Second
cycle de l'examen périodique universel, paru en Septembre 2013, pp.
21-25.
* 245 Consulter à
titre indicatif attestant du caractère coutumier et
généralisé de cette exigence du droit international :
les articles 11 et 13 de la CADHP, l'article 12 alinéa 3 du PIDCP.
* 246 Observatoire pour la
protection des défenseurs des droits de l'Homme (OBS), L'obstination
du témoignage, rapport annuel 2011, p. 12.
* 247 OBS, Rapport annuel
2011, pp. 12-13.
* 248 Réseau
camerounais des organisations des droits de l'Homme (RECODH), Rapport sur
l'état des droits de l'Homme au Cameroun 2011, p. 153.
* 249 Lire pour de plus
amples informations sur le sujet ABEGA S. C., Introduction à
l'anthropologie sociale et culturelle, 1ère
édition, éd. Afrédit, 2005, pp. 93-95.
* 250 KATENDE J. C.,
« A quoi sert le pouvoir politique en Afrique ? » in
XXX, p. 1.
* 251 FOUCHER V.,
« Difficiles successions en Afrique sub-saharienne : persistance
et reconstruction du pouvoir personnel » in XXX, pp. 131-132.
* 252 KATENDE J. C., Op. Cit.,
p. 4.
* 253 Propos recueillis
lors de l'enquête de terrain réalisée.
* 254 Un défenseur
de la place interrogé.
* 255 KATENDE J. C., Op.
Cit., p. 4.
* 256 Propos recueillis au
cours de l'enquête de terrain.
* 257 Intervention d'un
enquêté.
* 258 Propos d'un
défenseur enquêté.
* 259 Appellation
génériques communes désignant les personnes non
hétérosexuelles. Le sigle résume en fait, les cas de non
hétérosexualité connus. Il signifie : lesbiennes,
gays, bisexuels, transsexuels et intersexuels.
* 260 Il faut relever que
la violence dans ce cas n'a pas seulement un sens physique. Il faut y ranger
aussi les cas de violences psychologiques subies par les adeptes et les
personnes environnantes telles que le rejet, les injures et autres.
* 261 Intervention d'un
défenseur des LGBTI interviewé au cours de l'enquête de
terrain.
* 262 Eric OHENA LEMBEMBE
était parallèlement directeur exécutif de la CAMFAIDS et
journaliste engagé dans la défense des droits des LGBTI. Il a
été retrouvé assassiné à son domicile,
à Yaoundé, dans la soirée du 15 juillet 2013. Les
premières constatations du rapport d'autopsie laissaient croire qu'il
ait été battu à mort par ses agresseurs, son cou et ses
pieds ayant alors apparemment été brisés, son visage, ses
mains et ses pieds brûlés au fer à repasser.
* 263 Observatoire pour la
protection des défenseurs des droits de l'Homme, intervention orale lors
de la 54ème session ordinaire de la Commission africaine des
droits de l'Homme et des peuples, sous le point 9 de l'ordre du jour :
« Situation des défenseurs des droits de
l'Homme », p. 2.
* 264 ZBIGNIEW DIME LI NLEP
P., La garantie des droits fondamentaux au Cameroun, DEA en Droit
International des Droits de l'Homme, Université Abomey-Calavi,
Bénin, 2004 disponible sur
www.memoireonline.com/03/07/396/m_la-garantie-des-droits-fondamentaux-au-cameroun.html
* 265 GUILLIEN R. et
VINCENT J., Lexique des termes juridiques, 13ème
édition, Paris : Dalloz, 2001, p. 507.
* 266 MONTESQUIEU, De
l'esprit des lois, Livre XI, Chapitre VI.
* 267 DJUIDJE B.,
« Le statut du juge judiciaire camerounais : un tableau
contrasté », Annales de la Faculté des Sciences
Juridiques et Politiques- Université de Dschang, Tome 3, Yaoundé,
Presses Universitaires d'Afrique, 1999, p. 46 cité par ZBIGNIEW DIME LI
NLEP P., Op. Cit.
* 268 BADARA FALL A.,
« Les menaces internes protées à l'indépendance
du juge dans l'organisation de la justice » in Collectif, Actes
du deuxième congrès de l'Association des hautes juridictions de
cassation des pays ayant en partage l'usage du français (AHJUCAF) :
L'indépendance de la justice, Dakar- 7 et 8 Novembre 2007, p.
48.
* 269 ABA'A OYONO J. C.,
« Les mutations de la justice à la lumière du
développement constitutionnel de 1996 », Afrilex 2000/2001,
pp. 1-23 cité par MBEYAP KUTNJEM A., Le droit à la justice au
Cameroun (à l'origine de l'accélération de la modification
du code pénal au Cameroun), DEA en Droits de la personne et de la
démocratie, Université d'Abomey-Calavi, Bénin, 2005 :
http://www.memoireonline.com/07/06/177/m_droit-justice-cameroun4.html#toc15
* 270 BADARA FALL A., Op.
Cit., p. 56.
* 271 Article 37
alinéa 3 de la loi n° 96/06 du 18 janvier 1996.
* 272 A la base, se trouve
le principe de l'inamovibilité des magistrats. Celui-ci suppose que ces
derniers, ne puissent faire l'objet d'aucune affectation par voie d'avancement
sans leur consentement, excepté du moment où les besoins du
service l'exigent. Cette garantie de l'indépendance du juge, est absente
de la constitution camerounaise. Ce vide profite dons à
l'autorité exécutive qui à loisir procède à
des affectations aux motivations ambigües. M ; MBUYEM relativement
à l'instrumentalisation que fait l'autorité de ces
dernières, distingue les affectations prévisions des affectations
sanctions. Les premières viseraient à muter d'une localité
à une autre un juge pour le dessaisir d'une affaire, afin de l'octroyer
à un magistrat plus allégeant envers l'autorité. Alors que
les secondes renverraient à des mesures disciplinaires arbitraires et
autoritaires, destinées à isoler les magistrats ne cédant
pas à l'influence politique, dans des coins reculés du pays.
* 273 BADARA FALL A.,
« Le statut du juge en Afrique », numéro
spécial, revue électronique Afrilex n°3/2003, pp.2-34
Cité par MBEYAP KUTNJEM A., Op. Cit.
* 274 MBEMBE Achille,
« Tradition de l'autoritarisme et problème de gouvernement en
Afrique subsaharienne » in revue Afrique et développement, vol
XVI n°1, 1992 cité par MBEYAP KUTNJEM A., Op. Cit.
* 275 Le titre V de la loi
constitutionnelle n° 96/06 ne se réfère explicitement qu'au
juge judiciaire et encore à ce niveau, restrictivement aux magistrats du
siège.
* 276 CHEVALIER
François, « le droit au juge devant les juridictions
administratives », p 188 . in RIDEAU J. (dir.) Le droit au
juge dans l'Union Européenne, LGDJ, Paris, 229 pages
Cité par MBEYAP KUTNJEM A., Op. Cit.
* 277 Pour de plus amples
développements au sujet de la question, consulter ZBIGNIEW DIME LI NLEP
P., La garantie des droits fondamentaux au Cameroun, DEA en Droit
International des Droits de l'Homme, Université Abomey-Calavi,
Bénin, 2004 disponible sur
www.memoireonline.com/03/07/396/m_la-garantie-des-droits-fondamentaux-au-cameroun.html
* 278 XXX, Le statut
particulier des magistrats et le régime de la magistrature au
Cameroun, Juriscope, 1997, p. 19.
* 279 Idem, p. 19.
* 280 Ibidem, p. 19.
* 281 PASSERON J. P., le
pouvoir et la justice en Afrique noire francophone et à Madagascar,
Paris, Pedone, 1966 pp. 157-158, cité par MBEYAP KUTNJEM A., Op.
Cit.
* 282 Propos d'un
défenseur interrogé lors de l'enquête
réalisée.
* 283 Observatoire pour la
protection des défenseurs des droits de l'Homme (OBS), L'obstination
du témoignage, rapport annuel 2011, p. 14.
* 284 Le harcèlement
judiciaire est une arme redoutable contre les défenseurs des droits de
l'Homme. Il consiste en la traduction de ces derniers, devant les instances
judiciaires pour des procédures interminables
caractérisées par de multiples subterfuges dolosifs et abusifs
tels qu'entre autres : la disparition des fonds du dossier, les
changements des juges, les renvois interminables des audiences, ...
* 285 Il s'agit des
sieurs : Jean-Marc BIKOKO, Maurice Angelo PHOUET FOE, Théodore
MBASSI ONDOA, Joseph ZE, Eric NLA'A, NKILI EFFOA et Claude Charles FELEIN.
Sources : RECODH, Rapport sur l'état des droits de l'Homme au
Cameroun 2011, pp. 156-159 ; Appels urgents de l'Observatoire
pour la protection des défenseurs des droits de l'Homme CAM 001/1110/OBS
135.1 du 17 décembre 2010 et CAM 001/1110/OBS 135.2 du 11 février
2011.
* 286 Réseau
camerounais des organisations des droits de l'Homme (RECODH), Rapport sur
l'état des droits de l'Homme au Cameroun 2011, pp. 158-159.
* 287 Source : RECODH,
Rapport sur l'état des droits de l'Homme au Cameroun 2011, p.
155.
* 288 Source :
Réseau des défenseurs des droits humains en Afrique centrale
(REDHAC), Rapport sur la situation des défenseurs des droits humains
en Afrique centrale (inédit), présenté lors du forum
des ONG et de la CADH, Banjul, 14 avril- 02 mai 2012, pp. 4-5. Le cas se
rapproche de celui du défenseur Adama MAL-SALI, représentant du
MDDHL à Balaza-Lawane. Il a fait l'objet d'une détention
arbitraire au terme d'une procédure mitigée ponctuée de
renvois intempestifs, au motif de « diffamations et
dénonciations calomnieuses », pour avoir dénoncé
les abus d'un chef de canton. (Source : Observatoire pour la protection
des défenseurs des droits de l'Homme, note CMR 002/1205/OBS130.1) Un
autre cas pourrait étayer l'analyse, celui du militant MOWHA Franklin,
président National de Front Line Fighters For Citizens Interest,
défenseur des droits des paysans et de la minorité Bororo. Il a
également été victime de harcèlement judiciaire et
de procédures irrégulières, méprisant ses droits et
garanties processuels. (Source : RECODH, Rapport sur l'état des
droits de l'Homme au Cameroun 2011, p. 160, REDHAC, Communiqué de
presse du 14 décembre 2012.) L'exemple des membres de la Mbororo Social
and Cultural Development Association (MBOCSUDA), victimes d'actes de
harcèlement judiciaire sur la base d'une plainte déposée
par un influent propriétaire terrien local. Les actes se sont nettement
intensifiés après que MBOCSUDA ait déposé un raport
lors de l'examen périodique universel du Conseil des droits de l'Homme
du Cameroun à Genève, exposant les obstacles rencontrés
par la communauté Mbororo. (Source : OBS, intervention orale lors
de la 54ème session ordinaire de la CADH, sous le point 9 de
l'ordre du jour : « Situation des défenseurs des
droits de l'Homme », p. 3.)
* 289 Pour reprendre la
classification proposée par M. ZBIGNIEW DIME LI NLEP P. dans son travail
sur La garantie des droits fondamentaux au Cameroun, Op. Cit.
* 290 ZBIGNIEW DIME LI NLEP
P., Op. Cit.
* 291 E. J. ETONGUE MAYER,
« Le Comité national des droits de l'homme et des
libertés du Cameroun » in Cahier africain des droits de
l'homme, n° 9, Droit à la démocratie en Afrique
centrale, Yaoundé, Presses de l'U.C.A.C., 2003, p. 249 citée
par ZBIGNIEW DIME LI NLEP P., Op. Cit.
* 292 A titre d'exemple, il
faut dire ici que l'unité de protection de la CNDHL-Yaoundé, ne
dispose que d'un seul véhicule, devant couvrir les besoins de quatre
services différents.
* 293 Loi n° 2004/016
du 22 juillet 2004 portant création, organisation et fonctionnement de
la CNDHL, article 6.
* 294 Un responsable de
l'unité de protection de la CNDHL-Centre interviewé au cours de
la collecte des données.
* 295 Propos d'un
défenseur interrogé.
* 296 Intervention d'un
défenseur interrogé.
* 297 Un professionnel des
droits de l'Homme de la place interviewé.
* 298 Propos recueillis
lors d'un entretien avec le responsable de l'unité de protection de la
CNDHL-Littoral.
* 299 Source : RECODH,
Formulaire de candidature pour le prix 2013 du réseau panafricain
des défenseurs des droits de l'Homme (inédit), p. 10.
* 300 A cet effet, il
semble intéressant de préciser que lors de la période de
deux mois, que l'on a eu à passer au sein de l'organisation dans le
cadre du stage académique, la structure a été victime deux
agressions opérées par des auteurs anonymes jusqu'à
présent non identifiés. La première fois, lors d'un
week-end, les individus ont saboté les branchements de l'organisation au
niveau des installations alimentant l'immeuble où elle se trouvait.
Craignant pour leur sécurité, les membres ont
décidé de déménager. Toutefois, peu après le
changement de locaux, un nouveau cas d'effraction a été
noté toujours, au sortir d'un week-end. Cette fois là, c'est la
totalité du matériel de la directrice exécutive et donc,
des informations cruciales relatives à la vie du REDHAC, qui a
été dérobé.
* 301 Entre autres :
SMS anonymes la menaçant de viol et viol de sa nièce par des
personnes affirmant appartenir aux forces de sécurité (AMNESTY
INTERNATIONAL, La situation des droits humains dans le monde, rapport
2013, p. 57) ; lettres anonymes l'accusant de « salir
l'image du Président de la République », vols
répétitifs, écoutes téléphoniques et
filature par une voiture non immatriculée (Observatoire pour la
protection des défenseurs des droits de l'Homme (OBS), L'obstination
du témoignage, rapport annuel 2011, pp. 128-129) ;
écoutes téléphoniques, menaces d'enlèvement, de
viol et d'assassinat (REDHAC, Rapport sur la situation des
défenseurs des droits humains en Afrique centrale (inédit),
présenté lors du forum des ONG et de la CADH, Banjul, 14 avril-
02 mai 2012, p. 3)
* 302 Intervention d'une
défenseure locale des droits de l'Homme interrogée au cours de
l'enquête de terrain.
* 303 Observatoire pour la
protection des défenseurs des droits de l'Homme (OBS), L'obstination
du témoignage, rapport annuel 2011, p. 17.
* 304 Propos d'un
professionnel des droits de l'Homme enquêté.
* 305 Un défenseur
des droits de l'homme interviewé.
* 306 Propos d'un militant
local enquêté.
* 307 En effet, force
à été de constater que, c'est en collaboration avec les
réseaux que les rapporteurs spéciaux travaillent le plus. Aussi,
ce ne sont que les défenseurs appartenant à des réseaux
bénéficient de leur assistance, à l'opposé du
reste. Les rapporteurs par conséquent, n'entretiennent des relations
qu'avec une partie bien déterminée des défenseurs des
droits de l'homme locaux.
* 308 Intervention d'un
surveillant des droits de l'Homme interrogé lors du terrain.
* 309 Propos recueillis
auprès d'un défenseur interrogé.
* 310 Un défenseur
interviewé au cours de l'enquête.
* 311 Observatoire pour la
protection des défenseurs des droits de l'Homme (OBS), Violations du
droit des ONG au financement : du harcèlement à la
criminalisation, rapport annuel 2013, p. 7.
* 312 Idem, p. 11.
* 313 Ibidem, p. 12.
* 314 OBS, Violations
du droit des ONG au financement : du harcèlement à la
criminalisation, rapport annuel 2013, p. 17.
* 315 Réseau
camerounais des organisations des droits de l'Homme (RECODH), Rapport sur
l'état des droits de l'Homme au Cameroun 2011, p. 153.
* 316 Le droit
d'accès au financement des ONG n'a pas uniquement été
consacré par la déclaration de 1998. A partir de
l'interprétation extensive que fait le Comité des droits de
l'Homme du contenu du droit à la liberté d'association
consacré par l'article 22 du PIDCP, la protection mise en oeuvre par le
pacte, s'étend à la totalité des activités
menées par l'association, et par ricochet, à la recherche de
fonds. (Cf. communication n° 1274/2004 : Belarus,
document des Nations Unies CCPR/C/88/D/1274/0224, 10 novembre 2006, paragraphe
7.2.) Dans le système africain, la rapporteure spéciale sur la
situation des défenseurs des droits de l'Homme en Afrique de la CADH, a
recommandé solennellement aux Etats « d'apporter aux
défenseurs des droits de l'Homme l'appui financier et matériel
nécessaire à l'accomplissement effectif de leur mission. (Cf.
CADH, Rapport d'intersession, novembre 2011-avril 2012, paragraphe
50.
* 317 Observatoire pour la
protection des défenseurs des droits de l'Homme (OBS), Violations du
droit des ONG au financement : du harcèlement à la
criminalisation, rapport annuel 2013, p. 8.
* 318 Observatoire pour la
protection des défenseurs des droits de l'Homme (OBS), L'obstination
du témoignage, rapport annuel 2011, p. 15.
* 319 Idem, p. 15.
* 320 Réseau
camerounais des organisations des droits de l'Homme (RECODH), Rapport sur
l'état des droits de l'Homme au Cameroun 2011, p. 152.
* 321 Un défenseur
interviewé lors de l'enquête.
* 322 Propos
collectés au cours de l'enquête de terrain.
* 323 Idem.
* 324 Un défenseur
enquêté.
* 325 AHOUANSOU
F., « Règles essentielles pour la sécurité
d'un militant des droits de l'Homme en Afrique » in Manuel de
formation à l'intention des défenseurs des droits de l'Homme en
Afrique (collectif), Dimension sociale Bénin, Calavi, Juillet 2009,
p. 244.
* 326 Idem, p. 244.
* 327 AHOUANSOU F., Op.
Cit., p. 244.
* 328 Un observateur de la
société civile interrogé.
* 329 AHOUANSOU F., Op.
Cit., pp. 244-245.
* 330 Intervention d'un
militant interrogé au cours de la phase de collecte des
données.
* 331 AHOUANSOU F., Op.
Cit., p. 244.
* 332 Un défenseur
des LGBTI interrogé.
* 333 Un défenseur
interviewé.
* 334 AHOUANSOU F., Op.
Cit., p. 245.
* 335 Idem, p. 245.
* 336 Propos d'un
défenseur des LGBTI, recueillis au cours d'un entretien.
* 337 Informations obtenues
lors de l'entretien avec un membre de l'unité de protection de la
CNDHL-Littoral.
* 338 Un défenseur
interrogé.
* 339 Intervention du
membre de l'unité de protection de la CNDHL-Littoral
interviewé.
* 340 Un défenseur
des droits de l'Homme interviewé lors de l'enquête de terrain.
* 341 Observatoire pour la
protection des défenseurs des droits de l'Homme (OBS), L'obstination
du témoignage, rapport annuel 2011, p. 16.
* 342 EGUREN L. E. et QUINTANA
M. M., Protection des défenseurs des droits humains : bonnes
pratiques et leçons tirées de l'expérience,
Bruxelles : Protection International, 2011, p. 13.
* 343 Une défenseure
locale des droits de l'Homme interviewée.
* 344 Propos recueillis
auprès d'un défenseur des droits de l'Homme de la place, au cours
d'une interview réalisée lors de l'enquête.
* 345 EGUREN L. E. et
QUINTANA M. M., Op. Cit., pp. 27-37.
* 346 Proposition d'un
membre de l'unité de protection de la CNDHL-Centre interviewé
lors de l'enquête.
* 347 EGUREN L. E. et QUINTANA
M. M., Op. Cit., p. 57.
* 348 Proposition faite par
un défenseur des droits de l'Homme local interrogé au cours de
l'enquête de terrain.
* 349 Analyse faite par un
défenseur des droits de l'Homme interrogé.
* 350 Idem.
* 351 EGUREN L. E. et QUINTANA
M. M., Protection des défenseurs des droits humains : bonnes
pratiques et leçons tirées de l'expérience,
Bruxelles : Protection International, 2011, p. 65.
* 352 Cette obligation est
consacrée dans la plupart des textes de droit international de droits de
l'Homme. A titre indicatif, Cf. entre bien d'autres les art. 2 de la
Déclaration universelle des droits de l'Homme, art. 2 du Pacte
international relatif aux droits civils et politiques, art. 2(2) du Pacte
international relatif aux droits économiques sociaux et culturels, art.
2 de la Déclaration sur les défenseurs, art. 1 de la Charte
africaine des droits de l'Homme et des peuples.
* 353 NYALUMA MULAGANO
A., « Les obligations de l'Etat dans la mise en oeuvre des
droits de l'Homme » (pp 99-106) in Manuel de formation à
l'intention des défenseurs des droits de l'Homme en Afrique
(collectif), Dimension sociale Bénin, Calavi, Juillet 2009, p.
99.
* 354 Propos recueillis
lors de l'entretien avec le membre de l'unité de protection de la
CNDHL-Centre.
* 355 Intervention d'un
surveillant local des droits de l'Homme.
* 356 L'expression est
employée ici avec mesure à un sens figurée et par
extension. L'on ne cherche en aucune façon à revendiquer le fait
qu'il y ait un critère naturel et objectif fédérant la
totalité des défenseurs des droits de l'Homme. Mais l'accent a
voulu simplement être mis ici, sur le partage par ces individus, du
même combat et de leur égale part du fait de leur retentissement
social, à la législation conventionnelle au même titre que
les autres catégories d'individus sociales existantes,
internationalement protégées par des normes contraignantes.
* 357 SEKAGGYA M. A.,
Message sur les défenseurs des droits de l'homme : dix ans
après la déclaration sur les droits de l'homme, dix points pour
mieux les connaitre, en annexe de son rapport sur la situation des
défenseurs des droits de l'homme présenté à
l'Assemblée générale des nations unies le 12 août
2008, A/63/288
* 358 AHOUANSOU
F., « Règles essentielles pour la sécurité
d'un militant des droits de l'Homme en Afrique » in Manuel de
formation à l'intention des défenseurs des droits de l'Homme en
Afrique (collectif), Dimension sociale Bénin, Calavi, Juillet 2009,
p. 245.