V. Les minéraux à pseudo-feuillets et
à faciès fibreux
Les minéraux fibreux sont des espèces à
pseudo-feuillets. Leur faciès fibreux résulte d'une
discontinuité du feuillet selon l'axe b [15]. Ce
pseudo-feuillet est constitué de plans continus d'oxygène. Dans
ces plans, les oxygènes sont aux sommets d'un hexagone plus ou moins
régulier. Entre deux plans continus d'oxygène, on trouve deux
plans discontinus formés d'oxygène et d'hydroxyle. L'empilement
des deux plans discontinus forme des octaèdres enchevêtrés
créant ainsi un ruban. Cette rupture donne naissance à des
lacunes qui forment des canaux structuraux entre des rubans. La largeur de ces
rubans est caractéristique de chaque famille. Les oxygènes du
plan continu forment la base de tétraèdre dont la pointe est
constituée par un oxygène du ruban. Ces tétraèdres
sont occupés en leur centre par des ions Si4+. Les ions
Mg2+ ou Al3+ occupent les lacunes octaédriques.
Les rubans se terminent par des liaisons entre ces cations et des
molécules d'eau. On distingue deux principales familles (Figure I-12)
[15] :
? La famille des palygorskites (appelée aussi
attapulgite) où l'empilement des deux plans discontinus fait
apparaître un ruban à cinq octaèdres. Les particules ont la
forme d'aiguilles rigides.
? La famille des sépiolites où
l'empilement des deux plans discontinus fait apparaître un ruban à
huit octaèdres. Les particules ont la forme de fibres flexibles.
La palygorskite est riche en Mg et Al; sa formule
idéale se présente comme : Si8O20Al2Mg2(OH)2 (H2O)4. En revanche,
la sépiolite est purement magnésienne; sa formule idéale
est : Si6Mg4O15(OH)2 6H2O.
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Figure I-12 : Schéma de
la structure des minéraux argileux fibreux: (a) palygorskite et (b)
sépiolite montrant des rubans formés de pseudo-feuillets 2/1 (ou
TOT) de deux couches tétraédriques (T) prenant en sandwich une
couche octaédrique (O). Les rubans sont connectés par les
oxygènes apicaux des couches tétraédriques [11].
VI. Organisation texturale des matériaux argileux
VI.1. Organisation multi-échelle de la phase solide
La phase solide du système argileux peut-être
décrite à partir de trois unités structurales et de
l'arrangement mutuel de ces unités : le feuillet, la particule et
l'agrégat (Figure I-13) [4].
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Figure I-13 : Structure
multi-échelle d'une smectite (exemple de la montmorillonite)
[7].
? Le feuillet
La première de ces unités est le feuillet. C'est
l'unité structurale de base définissant la nature
minéralogique, l'appartenance au type d'argile, les
propriétés physico-chimiques ainsi que le comportement
macroscopique. Selon la composition de ce feuillet, sa forme est très
variée. L'épaisseur est d'environ 1 nm pour une extension
latérale qui peut aller jusqu'au micron. Cette anisotropie
confère à ces feuillets une certaine souplesse [4].
? La particule primaire
La particule primaire est constituée de cinq à
dix feuillets identiques empilés et parallèles à leurs
plans de base, maintenus par les forces électrostatiques attractives
entre les ions interfoliaires et les feuillets [4]. Elle fait
généralement 8 à 10 nanomètres d'épaisseur.
La taille des particules est à peu près constante
[7].
? L'agrégat
L'agrégat est un ensemble de particules primaires
orientées dans toutes les directions. Les agrégats ont une taille
qui varie de 0.1 à 10 microns [7].
En prenant pour référence les données
d'Oberlin et Méring (1962) et Van Olphen (1964) et
portant sur les minéraux expansibles, Tessier (1975) a
proposé une nomenclature pour nommer les différents modes
d'association des particules [4] : bord à bord et face à
face. L'agrégat constitué de plusieurs particules primaires a
été nommé « unité morphologique ». La
figure I-14 représente les différents modes d'associations
supposés formant l'agrégat.
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Figure I-14 : Modes
d'associations supposés des feuillets de montmorillonite en suspension :
(a) dispersion, (b) agrégation face-face, (c) association bord-face, (d)
association bord-bord (d'après Van Olphen, 1964) [4].
VI.2. Empilements des feuillets
? Cas des minéraux homogènes
:
Si on considère les principales espèces
minéralogiques, trois grands types d'empilements sont à
considérer (figure I-15) [9] :
i) Empilement ordonné : Dans ce cas les
feuillets sont empilés les uns sur les autres dans un ordre parfait.
C'est le cas des phyllosilicates dont l'espace interfoliaire est vide ou
anhydre (kaolinites ou illites).
ii) Empilement semi-ordonné (ou désordre
translationnel) : Les feuillets successifs présentent des
translations «semi-définies». Les feuillets sont
séparés par quelques molécules d'eau, l'épaisseur
de la particule est variable et dépend du degré d'hydratation.
Ils peuvent glisser latéralement les uns sur les autres.
iii) Empilement désordonné (ou
désordre turbostratique) : Dans ce cas d'empilement, des feuillets
successifs présentent des translations et/ou des rotations quelconques
dans tout l'édifice. Les feuillets sont séparés par un
film d'eau permettant une libre rotation autour d'un axe perpendiculaire au
plan de la particule.
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Figure I-15 : Les différents
types d'empilement dans les argiles [1]. ? Cas des
minéraux interstratifiés :
Dans le cas des minéraux interstratifiés,
l'empilement se caractérise essentiellement par le mode de succession
des feuillets de nature différente suivant la normale à leur
plan. Ainsi si on considère un minéral interstratifié qui
contient deux types de feuillets A et B, on peut envisager essentiellement
trois types d'interstratifiés (figure I-16) [8] :
i) Ségrégés : une particule
donnée présente des séquences AAABBB (Figure I-16a). Le
diagramme de diffraction X est la superposition des diagrammes produits par
chacun des constituants.
ii) Réguliers : une particule donnée
comporte alors des séquences ABABAB...AB (Figure I-16h). Une
période de surstructure perpendiculairement au plan des feuillets
égale à la somme des épaisseurs des deux feuillets
apparaît (dT=dA+dB). Le diagramme de diffraction X comporte alors des
réflexions basales de surstructure correspondant à dT.
iii) Aléatoires : c'est-à-dire tous
les cas intermédiaires entre les deux décrits
précédemment (Figure I-16c). Dans ce cas, les diagrammes de
diffraction X présentent des réflexions (001) irrationnelles, et
leur interprétation est très délicate.
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Figure I-16 : Différents
modes de succession des feuillets au sein d'une unité
interstratifiée
[8].
VI.3. Organisation des espaces
poraux
L'organisation des matériaux argileux (du feuillet
à l'assemblage d'agrégat) ne peut être
interprétée que si l'organisation de l'espace poral est prise en
considération. La dimension, la forme la distribution des espaces poraux
dépendent de la granulométrie du matériau argileux, de son
caractère gonflant, du fluide interstitiel et des contraintes.
Touret et Pons (1989) ont décrit l'existence de trois
types d'espace lié à l'organisation de la phase solide (Figure
I-17)
[9].
i) L'espace interfoliaire : sépare deux
feuillets dans un empilement. Il est généralement occupé
par les couches d'eau adsorbée (1 à 4) et des cations
échangeables, et son épaisseur moyenne est comprise entre 1,5 et
2,5 nm (figure I-17a).
ii) L'espace interparticulaire : séparant les
particules argileuses qui forment les agrégats. Il est susceptible de
diminuer jusqu'à atteindre la valeur de l'espace interfoliaire pour les
argiles fortement compactées; dans ce type d'espace la double couche
peut se développer. Les micropores lenticulaires sont intérieurs
aux particules, à l'échelle de quelques nm (figure I-17h).
iii) L'espace interagrégat : a une section
moyenne comprise entre 1,6 et 16 nm où l'eau circule librement (eau
libre) limitant les effets électrostatiques de la double couche (figure
I-17c).
Chapitre-I- Etude bibliographie
Figure I-17 : Les
différents types d'espaces poraux [9].
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