SOMMAIRE
DEDICACES REMERCIEMENTS
SOMMAIRE : 1
INTRODUCTION : 2
Première Partie : Cadre
général et méthodologique : 5-30
Chapitre I : Cadre Général :
6
I - Problématique : 6
II - Objectifs : 10
III- Hypothèses : 11
IV - Modèle théorique : 12
V - Cadre conceptuel : 15
VI - Revue critique de la littérature :
17
Chapitre II : 24
I - Univers de l'étude : 24
I-1 - Cadre de l'étude 24
I-2 - La population cible : 25
I-3 - Echantillonage : 25
II - Les techniques d'investigation : 27
II-1 - La Prè-enquête : 27
II-2 - La recherche documentaire : 27
II-3 - L'entretien semi directif : 28
II-4 - Le questionnaire : 28
II-5 : L'observation participante : 29
III - L'Enquête proprement dite : 29
III-1 - Déroulement de l'enquête :
29
III-2 - Les difficultés rencontrées :
30
Deuxième Partie : Historique du recrutement
et de la formation
des maîtres au Sénégal :
32-51
Chapitre I : Recrutement et formation des maîtres du
début
du XXème siècle à
l'érection des EFI 33
I - Recrutement et Formation des maîtres avant 1960
: 33
II - Recrutement et formation des maîtres
après 1960 : 35
Chapitre II - Recrutement, formation et plan de
carrière
des volontaires de l'éducation : 41
I - Le projet des volontaires de l'éducation :
41
I-1 - Montage institutionnel : 41
I-2 - Gestion du projet : 42
II - L'expérience d'autres pays en matière
de volontariat : 44
III - Recrutement, formation et plan de carrière
de carrière
des VE : 45
III-1 - Recrutement des VE : 45
III-2 - Formation des VE : 48
III-3 - Plan de carrière des volontaires :
50
III-4 - Rôle du PVE dans le PDEF : 51
Troisième Partie : Présentation,
Analyse et interprétation
des données de l'enquête :
54-73
Chapitre I : Identification des volontaires et motifs de
leur
engagement dans le volontariat de l'éducation :
55
I - Identification des volontaires : 56
I-1 - Age des VE : 56
I-2 - Sexe et situation matrimoniale : 57
I-3 - Statut socioprofessionnel des parents :
58
I-4 - Niveau d'étude et diplômes obtenus :
60
II - Motifs de l'engagement des diplômés
dans le volontariat
de l'éducation : 64
Chapitre II :
Conditions de travail et difficultés rencontrées
dans l'exercice du métier : 69
I - Situation et difficultés financières
des VE : 69
I-1 - Problèmes financiers des VE :
69
I-2 - La mutuelle des VE : 72
II - Problèmes pédagogiques des VE :
73
CONCLUSION : 77
BIBLIOGRAPHIE : 80
ANNEXES : 83
Introduction
Le caractère général et persistant des
inégalités sociales devant l'enseignement est l'un des faits les
mieux établis de la sociologie de l'éducation. La
problématique du rapport entre le niveau d'instruction et la position
sociale semble être beaucoup plus discutée. S'il y a presque
unanimité sur le fait « qu'il existe généralement
une relation élevée entre le niveau d'instruction atteint par un
individu et son statut social »1 ; l'on ne peut pas pour
autant conclure que l'atteinte d'une position scolaire élevée
implique directement l'accès à une position sociale
élevée. D'autres facteurs comme l'origine sociale continuent
«à peser au moment de l'entrée dans la vie active, dans
le choix du premier emploi, voire dans la carrière ultérieure des
diplômés»2 . Autrement dit, le niveau
scolaire élevé est incapable, à lui seul, de permettre une
ascension sociale qui est le produit d'une combinaison de plusieurs
facteurs.
Dans le cas précis des volontaires de
l'éducation (VE), les faits semblent confirmer cette idée dans la
mesure où l'on y rencontre des personnes dont le niveau
académique élevé n'empêche pas qu'ils soient dans
une catégorie socioprofessionnelle inférieure. .
Les résultats d'une étude d'évaluation
effectuée une année après le démarrage du projet
révèle que 17 % des volontaires ont la maîtrise ou plus ;
18 % la Licence, 17 % le Duel II, 16,5 le Duel I, 27 % le Baccalauréat
et seulement 4,5 % le BFEM ou équivalent ; alors que le niveau requis
pour être volontaire est le BFEM.
1 Boudon (R ) : L'inégalité des chances
: La mobilité sociale dans les sociétés industrielles,
Paris, A . COLIN, 1973, 237 p
2 Gomis (S) : La relation Famille école au
Sénégal : Le travail scolaire des enfants à Dakar,
Paris,l'Harmattan, 2003,307pp.
Par ailleurs, l'étude3 montre que 40 % des
volontaires justifient leur entrée dans le corps par
nécessité de trouver un emploi.
Ces résultats troublants qui remettent en cause d'une
certaine manière l'idée souvent admise selon laquelle le niveau
d'instruction élevé est gage de réussite sociale nous
incite à (nous) poser la question de savoir pourquoi l'affluence des
diplômés (d'un niveau élevé) dans le volontariat de
l'éducation ?
Notre travail destiné à répondre à
cette question s'articulera autour de trois parties essentielles :
Première partie : Cadre général et
méthodologique
Deuxième partie : Il sera question dans cette
partie de voir, le montage institutionnel du projet des volontaires de
l'éducation (PVE), l'historique de la formation et du recrutement des
maîtres au Sénégal, l'expérience d'autres pays en
matière de volontariat, le recrutement et la formation des volontaires
au niveau des contenus, de l'organisation, de la durée, des acteurs, des
conditions et des résultats. Il y sera également question du
statut, du plan de carrière des volontaires qui sont à Rufisque
et du rapport entre le PVE et le PDEF(Programme Décennal de l'Education
et de la Formation)
Troisième partie : Elle sera consacrée
à la présentation, à l'analyse et à
l'interprétation des données de l'enquête.
3 PVE. Rapport d'évaluation des
modalités de mise en oeuvre du PVE, de son impact, de ses
conséquences (version finale), Septembre 1996.
PREMIERE PARTIE :
CADRE GENERAL ET METHODOLOGIQUE
CHAPITRE I : CADRE GENERAL :
PROBLEMATIQUE :
Si l'on en juge par l'intérêt que suscitent
à l'heure actuelle les problèmes relatifs à
l'enseignement, par la qualité et le nombre des ouvrages et articles
concernant l'éducation, la fréquence des colloques et
échanges de vues sous des formes diverses, il apparaît nettement
que la formation de l'homme est l'une des préoccupations majeures de
notre époque. Cette fièvre de recherche s'accompagne d'un certain
nombre d'actions et de politiques qui ne sont en réalité que des
tentatives de réponse à la crise de l'éducation qui secoue
la plupart des pays en voie de développement. L'Etat
sénégalais a ainsi consacré l'éducation comme la
pierre angulaire de l'idéal partagé de construction du
développement national ; des efforts considérables ont, depuis
1960, été faits dans le domaine de la scolarisation.
Depuis l'accession à l'indépendance, les
orientations de la politique éducative ont défini des taux de
scolarisation à atteindre. Dans le premier plan quadriennal (1961-1964),
l'objectif était de scolariser 50 % des enfants d'age scolaire dans une
école primaire capable d'assurer la sélection
d'éléments viables pour la construction d'une élite en
même temps qu'une préparation à la vie dans le milieu
urbain et rural.
L'atteinte de la scolarisation universelle était
envisagée entre 1990 et 1975 mais, à la fin du
3ème plan quadriennal le taux de scolarisation obtenu
était de 41 %. Le gouvernement recule encore l'échéance de
vingt ans.
Le Sénégal a hérité d'une situation
économique relativement bonne en 1960 et a profité de cet acquis
avec un taux de croissance de 2,5 % en moyenne jusqu'en
1971, année où la situation commence à se
dégrader. En effet, de 1971 à 1986 le PIB a accusé sept
années de croissance négative. C'est ainsi que démarra la
politique de l'ajustement structurel. En 1979 sont prises les premières
mesures de redressement avec un plan de stabilisation à court terme d'un
an. Ensuite suivra le plan de redressement économique et financier
(1980-1984) et le plan d'ajustement à moyen et long terme
(1985-1992).
Cette période d'ajustement s'est
caractérisée par un taux brut de scolarisation (TBS) qui recule
de façon considérable. Il est passé de 58 % à 54 %
entre la période de 1990 et 1994, en dépit des efforts du
gouvernement sénégalais en matière d'allocations
budgétaires en faveur de l'éducation (33 % du budget, on annonce
40% pour l'année 2004/2005).
L'éducation élémentaire se
caractérise ainsi par :
- Une disparité entre les villes et les campagnes qui
reste significative : le PBS est de 80 % en 1996 en zone urbaine contre
seulement 38,5 % en zone rurale.
- Une disparité entre sexe : un écart de 14 points
sépare la scolarisation des garçons et celle des filles.
- Un nombre d'élèves par enseignant qui
croît très rapidement alors que la proportion de maîtres
qualifiés diminue ;
- Deux taux de redoublement et d'abandon scolaire qui
progressent : le taux national de redoublement est de 13,4% 4(toutes
classes confondues) ; et sur 88 élèves de l'enseignement
élémentaire, seuls 15 accèdent à l'enseignement
moyen à l'issue duquel il ne reste plus que 06 élèves dont
un seul obtiendra le baccalauréat ;
- L'introduction des classes multigrades et à doubles
flux qui, bien qu'améliorent l'accès à l'école, ne
reste pas moins un compromis du point de vue de la qualité de
l'enseignement.
4 Il est à noter que ce nombre ne
reflète pas vraiment la réalité car c'est l'Etat qui fixe
le quota des élèves qui redoublent. Il y'a alors une grande
proportion qui passe sans avoir la moyenne.
Cette tendance à la baisse du TBS est d'autant plus
préoccupante qu'elle intervient au moment où le
Sénégal, après les engagements pris à l'occasion de
la conférence de Jomtien de 1990 s'est fixé des objectifs en
rapport avec les réalités et possibilités nationales :
atteindre un TBS de 65 % en 1998 et 75 % en 2000 grâce à l'appui
du PDRH2 (Projet de Développement des Ressources Humaines) qui
prévoyait la construction et l'équipement de 3 500 nouvelles
salles de classe.
En outre, des efforts considérables ont
été réalisés par les parents
d'élèves, les collectivités locales et les ONG
(Organisation Non Gouvernementale), qui construisent en moyenne 700 à
800 salles de classe par an5.
Cependant, face au coût de revient élevé
du maître par rapport aux moyens de l'Etat, le recrutement d'enseignants
en nombre suffisant pose un sérieux problème car la construction
de salles de classe devrait s'accompagner d'un recrutement de maîtres.
Alors, pour faire face à cette situation, le
gouvernement du Sénégal a fait de la réduction du
coût du maître, un impératif économique pour juguler
le déficit. C'est ainsi qu'il a mis en place un certain nombre de
mesures et de stratégies comme :
- La fermeture des Ecoles Normales Régionales (qui
avaient une durée de formation de quatre ans).
- L'érection des Ecoles de Formations d'instituteurs
(EFI) avec cycle de formation court d'un an.
- L' « opération ailes de dinde » :
opération de recrutement direct en 1990 de 400 enseignants de niveau
BFEM.
5 ECO AFRIQUE : Etude sur les stratégies de
mise en place d'un statut pereme pour les volontaires de l'éducation
nationale, Décembre 1997 (Tous les chiffres sus mentionnés sont
tirés de ce document)
- Et enfin des flux de recrutement d'instituteurs avec la
règle des 80 % d'instituteurs adjoints (qui ont un coût
inférieur à celui des instituteurs) pour 20 % d'instituteurs.
C'est dans cette logique de la réduction du coût
de l'enseignant à l'élémentaire que l'Etat du
Sénégal eut recours au Projet des volontaires de
l'éducation. En effet, le projet entendait mobiliser et faire participer
activement le potentiel de jeunes diplômés à l'oeuvre de
l'éducation pour tous6.
Les volontaires de l'éducation
bénéficient d'une bourse de 60 000 F CFA par mois (c'était
50 000 F au début). Le projet a démarré en 1995 et en 2004
nous en sommes à la dixième génération. Seulement
ce système des volontaires n'a pas existé sans faire du bruit. La
presse en parle tout le temps, de même que les parents
d'élèves qui estiment souvent que cela ne fait qu'accentuer la
dégradation déjà poussée du système
éducatif national car les volontaires ne sont pas bien formés.
Ces derniers de leur côté revendiquent de meilleures conditions
comme l'augmentation de leur bourse (car ils n'ont pas de salaire), leur
paiement à temps, une insertion dans la fonction publique etc. Les
pouvoirs publics en ce qui les concerne multiplient les actions en leur faveur
(élaboration d'un plan de carrière, possibilité d'un
recrutement dans la fonction publique quand on a rempli certaines conditions,
augmentation de la bourse etc....). En 2003, il y'a eu à Rufisque une
école qui n'a enregistré aucune réussite à l'examen
de l'entrée en sixième et d'aucuns ont eu à accuser le
recours aux volontaires qui pour eux améliore certes l'accès
à l'école pour la population scolarisable mais en même
temps a un rôle très négatif sur la qualité des
enseignements au niveau du département de Rufisque qui est l'un des
départements de la région de Dakar où l'on compte le plus
de volontaires de l'éducation.
6 Le Sénégal s'est fixé un
objectif de la scolarisation universelle en 2015
Cette situation nous incite à un certain nombre
d'interrogation à savoir :
- Qui sont les volontaires de l'éducation nationale
à Rufisque ? Quelle est leur trajectoire ?
- Comment se fait-il que le niveau de formation
élevé ne se traduise pas par une position sociale
élevée chez certains volontaires ?
- Quels sont les principaux problèmes auxquels sont
confrontés dans l'exercice de leur métier ?
Telle est la problématique autour de laquelle vont tourner
nos investigations.
Objectif :
Toute recherche demande que les objectifs soient au
préalable clairement définis afin de bien la mener.
Dans le cadre de notre étude, l'objectif principal est
de comprendre pourquoi certaines personnes qui ont atteint un certain niveau
académique (Baccalauréat, Maîtrise) se font recruter dans
le projet des volontaires alors que le niveau requis pour être
volontaires n'est que le BFEM (Brevet de Fin d'Etude Moyenne).
Cette situation nous a paru paradoxale car en principe, une
position scolaire élevée devrait permettre d'occuper une position
sociale élevée. Il nous a semblé alors nécessaire
d'y consacrer une recherche plus approfondie.
La réalisation de cet objectif général passe
nécessairement par l'atteinte des objectifs spécifiques suivants
:
- Identifier les volontaires de l'éducation et
déterminer leurs trajectoires
- Analyser les facteurs de leur engagement dans le volontariat
surtout pour ce qui ont un niveau qui pourrait leur permettre d'être dans
une catégorie socioprofessionnelle plus élevée.
- Identifier les problèmes auxquels ils sont
confrontés dans l'exercice de leur métier et dans la vie d'une
manière générale.
Hypothèses :
Nous rappelons que l'hypothèse est une réponse
anticipée, une explication plausible d'un phénomène,
provisoirement admise et destinée à être soumise au
contrôle méthodique de l'expérience. Elle peut être
confirmée ou infirmée par les résultats issus du terrain.
Ainsi pour nous :
Hypothèse principale
- L'affluence des diplômés dans le volontariat de
l'éducation pourrait trouver son explication dans leur origine familiale
donc dans une sorte d'héritage social qui déterminerait leurs
stratégies face à l'école et au marché de l'emploi
; ou encore dans la saturation de ce dernier. C'est juste pour avoir de
l'argent et financer d'autres projets qu'ils sont volontaires. Ils vont quitter
l'enseignement à la première occasion. Ce n'est qu'une
stratégie de survie.
Hypothèses secondaires
- Les volontaires sont souvent des diplômés de
l'enseignement supérieur issus de familles pauvres.
- Leur principal problème est d'ordre financier ; les
autres étant directement ou indirectement liés à celui-ci
(logement, frais de déplacement, soutien familial etc.).
Le modèle théorique :
Notre problématique principale étant de
comprendre pourquoi dans le cas précis des VE, l'obtention d'une
position scolaire élevée n'a pas permis d'accéder à
une position sociale élevée, il nous a semblé plus
indiqué d'inscrire notre recherche dans la mouvance de l'individualisme
méthodologique de Raymond Boudon qui repose sur deux axiomes
fondamentaux :
- L'affirmation selon laquelle on ne peut expliquer les
phénomènes sociaux qu'à la condition de partir des
individus, de leurs motivations et de leurs actions. Le sociologue doit d'abord
étudier les actions individuelles qui constituent
l'élément de base du social puis montrer comment ces actions ont
interféré pour donner naissance à un
phénomène social.
- L'établissement du fait que les individus sont
rationnels. Cette rationalité a un sens beaucoup plus large chez Boudon
que celui que lui conférait Max Weber (1864-1920). Il estime, en effet,
qu'une action est rationnelle pour peu qu'elle soit orientée par un
intérêt, une valeur ou même la tradition. L'action d'un
individu est rationnelle nous dit-il, si « celui-ci a de bonnes
raisons d'agir ». La rationalité signifie, en termes
précis, chez Boudon que, les individus adoptent des stratégies en
fonction de l'environnement économique, institutionnel, historique etc.
Mais en aucun cas, cet environnement ne peut déterminer une action qui
reste la conséquence d'un choix individuel. Ainsi, un
élève issu d'un milieu défavorisé
peut en tirer avantage aussi bien pour faire des études
courtes que pour faire des études longues afin de
bénéficier d'une mobilité sociale ascendante.
Dès lors, tout phénomène social se
constitue par agrégation (par sommation) des comportements individuels.
Ainsi Boudon parle d'« effets émergents »pour désigner
le phénomène social résultant de l'agrégation des
comportements individuels. Bien souvent ces effets émergents sont des
« effets pervers », ce qui signifie qu'ils ne correspondent
pas aux intentions originelles des individus. L'exemple donné par Boudon
lui-même concerne la dévalorisation des diplômes : alors
qu'il est rationnel pour chaque étudiant de chercher à obtenir le
diplôme le plus élevé afin d'accéder à un
emploi qualifié et bien rémunéré, l'adoption de
cette stratégie par des dizaines de milliers d'étudiants aboutit,
quand l'offre d'emplois n'augmente pas avec la même vitesse, à une
dévalorisation des diplômes.
C'est dans cette logique que, pour expliquer la
répartition des positions sociales, Boudon distingue distribution
sociale et distribution scolaire :
- D'une part les structures sociales ne peuvent être
modifiées par le système scolaire. Elles sont
déterminées par des contraintes structurelles (économiques
et technologiques). Autrement dit, l'école n'agit pas sur la
viscosité sociale.
- D'autre part, il y a une diversité des parcours
scolaires et des inégalités de résultats. La
réussite scolaire, en fonction de l'origine familiale s'explique par une
succession de choix rationnels des familles compte tenu de leur position dans
l'espace social.
Les individus, en fonction de ressources économiques et
culturelles, apprécient différemment les risques et les
coûts de l'investissement scolaire. Par exemple, dans les milieux
populaires les gains attendus de la poursuite des études sont faibles et
les potentialités d'échec sont fortes (réciproquement pour
les classes aisées).
La réduction des inégalités scolaires ne
s'accompagne pas toujours d'une réduction des inégalités
sociales7.
En 1963, C.A. Anderson8 étudie le rapport
entre le diplôme relatif et le statut social relatif du père par
rapport au fils. Un fils ayant un diplôme plus élevé que
son père devrait avoir un statut social plus élevé ; or il
n'en est pas toujours ainsi : c'est ce qu'on appelle le « paradoxe
d'Anderson ». Dans L'inégalité des
chances, Boudon, reprenant cette analyse, souligne que le
nombre de positions scolaires augmente beaucoup plus rapidement que le nombre
de positions sociales élevées ; ce qui entraîne
mécaniquement une dévalorisation objective des diplômes
scolaires sur le marché de l'emploi. Cette analyse de Boudon nous semble
pertinente dans notre recherche qui s'intéresse à l'explication
de l'affluence des diplômés dans le volontariat de
l'éducation nationale. En effet, cette analyse de Boudon nous porte
à croire que c'est parce qu'il y a plus de diplômes
élevés que de positions sociales élevées qu'il
y'ait des diplômés qui soient dans une position sociale
inférieure. Mais le problème reste entier car pourquoi à
diplômes égaux un individu A accède à une position
sociale élevée et un individu B, une position inférieure ?
Il y a lieu de considérer d'autres facteurs.
En outre, si l'individu rationnel échappe au
déterminisme culturel (contrairement à la théorie de
l'habitus de Pierre Bourdieu), il n'échappe pas pour autant souvent au
déterminisme économique. L'étudiant issu d'un milieu
modeste, par exemple, qui « choisit » de faire des études
courtes faute de moyens financiers a une conduite largement
déterminée par un contexte économique sur lequel il n'a
pas de prise. Ce déterminisme économique reconnu par Boudon reste
pertinent pour notre étude car l'engagement des volontaires n'est pas
une action totalement indéterminée, résultant
exclusivement des stratégies individuelles des acteurs, les
7 Boudon ® : Inégalité des chances
; Paris, A. COLIN, 1979
8 Anderson (C.A) : cité par Boudon : Op.cit
volontaires ont donc une conduite rationnelle mais d'une
« rationalité limitée ». L'individu rationnel
de Boudou est, en principe, indéterminé mais rencontre sur sa
route de telles contraintes que sa marge de manoeuvre est des plus
réduites. Après tout, écrit Boudon, déclarer que la
famille qui refuse de pousser un enfant vers des diplômes
élevés est victime des mécanismes qu'elle a
intériorisés par l'effet de son environnement « n'est
qu'une manière polie de traiter ces acteurs
d'imbéciles9 »
Cadre conceptuel :
Nous avons, dans ce travail, eu recours à quelques
concepts et notions dont il convient de définir de façon
opérationnelle. En effet nous avons eu à utiliser les concepts de
mobilité sociale, de position sociale, de position scolaire, la notion
de volontaire de l'éducation etc.
Mobilité sociale :
Elle désigne, selon P.A Sorokin10 qui
institutionnalise le terme en 1927, le passage d'un individu (mobilité
individuelle) ou d'un groupe d'individus (mobilité collective) d'un
groupe social à un autre. On distingue plusieurs formes de
mobilité :
- La mobilité intergénérationnelle (ou
mobilité biographique) qui désigne la mobilité au cours
d'une vie pour les individus d'une génération donnée.
- La mobilité intergénérationnelle
désigne le changement de statut social des individus de la
génération des enfants par rapport aux individus de la
génération des parents. C'est justement cette acception que nous
utilisons dans le cadre de ce travail. Ainsi, les volontaires qui occupent un
statut social supérieur à celui de leurs pères ou
mères ont connu une mobilité sociale ascendante ; ceux qui ont un
statut social inférieur, une mobilité sociale descendante et
l'absence de mobilité (même statut social que les parents) traduit
le phénomène de la « viscosité sociale ». Ce
dernier semble résulter de ce que l'on appelle
l'hérédité sociale (les
9 Raymond Boudon : La logique du social,
Paris, Hachette, 1983
10 Sorokin (P.A) : cité par Boudon :
L'inégalité des chances, op.cit
individus héritent de la position sociale de leurs parents
quel que soit le niveau scolaire qu'ils ont atteint).
Par ailleurs, nous avons entre autres formes de
mobilités, la mobilité géographique (ou spatiale), la
mobilité professionnelle (changement de situation professionnelle)
etc.
La position sociale :
C'est le statut social occupé par un individu à
un moment donné de sa vie. La répartition des positions sociales
s'est faite à l'aide de la classification des catégories
socioprofessionnelles (CSP) du Sénégal.
La position scolaire :
Nous entendons par position scolaire le niveau
académique ou le diplôme obtenu par les individus
considérés. C'est en effet à partir du diplôme le
plus élevé obtenu par un individu que nous déterminons sa
position scolaire. Boudon a eu à distinguer distribution scolaire et
distribution sociale et note que le système scolaire est incapable
à modifier la structure sociale.
Le volontariat de l'éducation
Il désigne une politique qui vise, face au
déficit lancinant en maîtres, à recruter chaque
année 1200 diplômés (le chiffre est en train d'être
revu à la hausse- 3000 VE en 2004/2005). Le volontaire
bénéficie d'une bourse mensuelle de 60 000 FCFA (soit moins de la
moitié du salaire d'un instituteur adjoint).
Avec le chômage endémique, le PVE a rencontré
un grand succès (pour la première génération, on a
28 candidats pour un poste à pourvoir.
Le contrat d'engagement était de deux ans renouvelable
une seule fois. Mais la question de l'après volontariat se posait avec
acuité aussi bien pour les volontaires que pour le gouvernement
sénégalais. Remercier les volontaires par cohorte de
1200 entraîne un besoin équivalent en
maîtres qu'il faudrait nécessairement combler pour éviter
la fermeture des classes ; et le volontaire considère légitime de
réclamer son intégration dans la fonction publique après
quatre années de sacrifice. C'est ainsi que l'Etat a adopté des
stratégies de mise en place d'un statut pérenne pour les
volontaires de l'éducation. Nous allons y revenir dans la
deuxième partie de ce travail.
Revue critique de la littérature
:
Le mouvement et la position des individus dans le
système des catégories socioprofessionnelles a fait l'objet de
beaucoup de théories explicatives qui peuvent être
regroupées en deux grandes catégories : les théories
naturalisant la différenciation sociale et celles de
l'hérédité sociale, du déterminisme social.
Pour les premières, nous pouvons citer F- Galton
(1821-1911) et sa théorie de l'eugénisme 11qui tente
de démontrer à partir de données statistiques,
l'hérédité du « génie » et la
nécessité d'une politique eugénique visant à
encourager la fécondité des « élites »
de la société. Convaincu du caractère
héréditaire des aptitudes sociales, Galton en conclut que les
« grands hommes » naissent dans la famille des «
grands hommes ».
Nous ne saurons partager ce point de vue dans la mesure
où l'histoire montre qu'il existe d'éminents personnages qui ont
une origine très modeste et inversement des membres de l'élite de
la société ont vu leurs descendants occuper une position sociale
très basse. Si les aptitudes à réussir socialement
relevaient du biologique, il n'aurait aucune chance pour un fils d'ouvrier de
devenir cadre supérieur par exemple ; ce qui n'est pas toujours le
cas.
11 Galton (F) : citer par Montoussé (M) et
Renouar (G) : 100 Fiches pour comprendre la sociologie, BREAL, 1997, 234 p.
Cette conception a eu une influence considérable,
notamment à travers l'oeuvre d'A. Carrel (1873-1944) intitulé :
L'homme cet inconnu12. Il y synthétise la conception
de Galton en notant la nécessité d'une politique favorisant les
mécanismes sociaux accentuant la sélection : « nous
savons que la sélection naturelle n'a pas joué son rôle
depuis longtemps. (...) nous devons chercher, parmi les enfants, ceux qui
possèdent de hautes potentialités. (...). Et donner ainsi
à la Nation une aristocratie non héréditaire. (...). Pour
la perpétuation d'une élite, l'eugénisme est
indispensable. L'établissement par l'eugénisme d'une aristocratie
biologique héréditaire serait une étape importante vers la
solution des grands problèmes de l'heure présente
».Nous croyons que cette théorie est sociologiquement
insoutenable car des anthropologues comme Claude
LéviStrauss13 ont solidement démontré que les
aptitudes sociales et culturelles sont de l'ordre de l'acquisition. L'on ne
peut soutenir de façon rigoureuse qu'une personne est par exemple
ouvrier parce que dans sa constitution biologique il existe quelque chose qui
le prédispose à l'être et qui lui a été
transmis génétiquement par ses parents. L'explication de la
position sociale des individus est à chercher ailleurs que dans le
biologique.
Toujours dans les théories naturalisant la
différenciation sociale, nous pouvons noter la théorie des
élites de V. Pareto (1848-1923) pour qui toute société est
divisée en deux groupes : les dirigeants (formant l'élite) et les
dirigés. Il définit l'élite comme les membres «
supérieurs » de la société c'est-à-dire
ceux qui ont des qualités éminentes apportant pouvoir et
prestige. Il y a une élite au sein de chaque type d'activité. On
distingue par exemple au sein de l'élite politique celle non
gouvernementale et celle gouvernementale.
12 Carrel (A) : L'homme cet inconnu, Paris.
Plon, 1935, 356 p
13 Lévi-Strauss (C) : Race et
Histoire,
Les membres de cette dernière assurent leur
pérennité dans les instances dirigeantes à l'aide de deux
qualités contraires mais complémentaires : la coercition et le
consentement. Ainsi, gouverner exige deux qualités contradictoires : il
faut à la fois être souple (c'est-à-dire rusé) et
avoir l'art de la persuasion ; de plus il faut être capable d'utiliser la
force, la violence pour supprimer toute velléité de contestation.
Ces qualités vont correspondre aux deux types psychologiques
opposés à savoir les «renards » et les
« lions ». Selon Pareto, on trouve rarement ces deux vertus
politiques chez les mêmes personnes14.
Cependant, il développe l'idée selon laquelle il
existe une « circulation des élites » (remplacement
de l'ancienne élite par la nouvelle). La hiérarchie a, pour lui,
un fondement naturel, mais celle-ci ne se fait pas obligatoirement par
transmission génétique, car le fait d'y appartenir pour les
héritiers peut avoir un effet émollient (les fils n'ont pas
forcement les qualités de leurs pères). Ainsi, cette
supériorité innée n'implique pas une hiérarchie
invariable car il y a « circulation des élites ».
Enfin, Mosca (G) (1848-1941) comme Pareto, a une approche
dichotomique de la société ; celle-ci étant
séparée en deux classes : dirigeants et dirigés. Les
premiers vont monopoliser le pouvoir et profiter des avantages induits avec des
méthodes soit légalistes, soit arbitraires. En plus de la
coercition et de la manipulation, l'élite va se servir de
l'idéologie pour légitimer sa domination. Ainsi, religion et
nationalisme sont des vecteurs permettant de structurer la
société dans un sens voulu par les élites.
En revanche, si certains développent des
théories naturalisant la position sociale des individus, d'autres par
contre, expliquent la position des uns et des autres par
l'hérédité sociale (ou le déterminisme social).
14 Paréto (V) : cité par Busino (G)
Elites et élitisme, Paris, PUF, 1992
Pour K. Marx (1818-1883), la mobilité sociale
apparaît comme un instrument de pérennité de la classe
bourgeoise : « plus la classe dominante est capable d'intégrer
les hommes éminents des classes dominées, plus durable et
dangereuse sera sa domination »15.Ainsi, pour lui,
même si on a des diplômes élevés on doit
préférer se maintenir dans sa position sociale d'origine. En tout
cas nous ne croyons pas que ce soit le cas pour les volontaires qui semblent
être plutôt victimes de leur origine sociale modeste.
P.A.Sorokin (1889-1968)16 met l'accent sur les
mécanismes autorégulateurs de la société. Ces
derniers reposent sur l'action d'instances d'orientation («
sélection agencies ») dont la nature varie avec
l'époque et la société dans laquelle elles sont à
l'oeuvre. Celles-ci vont réguler le passage d'une position sociale
à une autre. Ainsi, pour Sorokin, dans les sociétés
industrielles modernes, le double mouvement des idées
démocratiques d'une part (entraînant l'égalité
formelle des citoyens), et des mutations industrielles d'autres part
(entraînant la différenciation des positions sociales), fait que
se développe une société méritocratique de classes.
Dans celle-ci les instances d'orientation sont représentées
principalement par la famille et l'école. Nous voyons donc là un
rapport entre la position scolaire et la position sociale qui sera
déterminée par l'environnement personnel de l'individu
concerné (caractéristiques physiques et intellectuelles,
conjoncture, condition de départ) et de la force des « agences
d'orientation ».On a bien chez Sorokin une théorie
fonctionnaliste de la mobilité sociale qui s'oppose à
l'interprétation marxiste. Pour lui, en effet, la mobilité
sociale est nécessaire au bon fonctionnement de la
société.
D'autres auteurs comme, D.Betraux, C.Baudelot, R.Establet et
P.Bourdieu mettent l'accent sur la reproduction de la structure sociale.
15 Marx (K) : cité par Beitone (A) et Al :
Sciences sociales, Paris, Dalloz, 2002
16 Sorokin (P.A) : cité par Boudon : op.cit
Pour D. Bertaux17, il n'existe pas de
mobilité sociale, c'est l'hérédité sociale qui est
la règle. Ce qui est important, c'est la façon dont le
système capitaliste produit à la fois la structure des «
places sociales » et des individus conformes à ces
dernières. La reproduction sociale est l'unique facteur de la
distribution sociale. C'est la reproduction nécessaire des structures et
non le choix des individus qui détermine les positions sociales auxquels
ils accèdent : « il faut penser `le choix du métier `
comme choix par le métier (ce sont les métiers qui nous
choisissent). (...) Selon cette perspective, l'unité d'analyse n'est
plus « l'individu » mais la position dans structure
particulière ». Nous pouvons dire à la lumière
de ce point de vue de Bertaux que les VE n'ont pas choisi le volontariat, mais
ont plutôt été choisis par lui. Autrement dit, c'est parce
qu'ils n'ont pas le choix qu'ils sont dans le volontariat.
C.Baudelot et R.Establet, dans L'école
capitaliste en France18, notent d'une part le fait
que les diplômes (ENA, polytechnique) donnant accès aux postes de
dirigeant restent sociologiquement très fermés et d'autre part
que la croissance exponentielle des diplômes intermédiaires pour
l'encadrement répond à une nécessité du
système capitaliste.
Pour P. Bourdieu19, l'école transforme les
inégalités sociales en inégalités scolaires. Elle a
donc pour lui, une fonction de sélection sociale. Celle-ci est
neutralisée par l'école à travers une domination
symbolique et légitimer par l'idéologie méritocratique
républicaine.
Toujours dans le rapport position scolaire/position sociale R.
Boudon avance l'idée selon laquelle les structures sociales ne peuvent
être modifiées par le système scolaire. Elles sont
plutôt déterminées par des contraintes structurelles
17 Bertaux (D) : Destins personnels et structure de
classe, PUF, 1977
18 Baudelot (C) et Establet (R) : L'école
capitaliste en France,
19 Bourdieu (P) et Passeron (JC) : La reproduction,
Ed. Minuit, 1970
(économique et technologique). Pour lui, les positions
scolaires élevées augmentent beaucoup plus rapidement que les
positions sociales élevées ; ce qui entraîne
mécaniquement une saturation du marché de l'emploi, donc une
difficulté réelle des diplômés d'avoir une insertion
socioprofessionnelle équivalente à leurs diplômes ainsi
dévalorisés.
Pour ce qui est du phénomène spécifique
du volontaire de l'éducation ; il n'a pas fait l'objet de beaucoup
d'écrits. En effet, les seuls documents que nous avons pu trouver sont
principalement :
- Le « rapport d'évaluation des
modalités de mise en oeuvre du PVE, de son impact, de ses
conséquences » (1996), étude financée par la
Banque Mondiale et qui était juste destinée à recueillir,
sur le terrain, des données quantitatives et qualitatives, après
un an d'exécution du projet. Ces données devraient servir pour
une prise de décision, une rectification et une amélioration des
performances de celui-ci ; et aussi pour engager la bataille d'opinion contre
les détracteurs du projet.
- L'étude effectuée par le Cabinet ECO AFRIQUE
et dont le rapport est intitulé : « Etude sur les
stratégies de mise en place d'un statut pérenne pour les
volontaires de l'éducation nationale », Décembre 1997.
Cette étude propose les stratégies de pérennisation du
recrutement des volontaires.
-La communication de Monsieur Makhtar SOW, directeur adjoint
du PVE lors de l'atelier de LOME du 28 au 30 juin 1999 intitulée :
« Financement de l'éducation : Exemple des volontaires du
Sénégal ». Il y expose les problèmes qui ont
conduit à la création du PVE, la nature de l'intervention, ses
objectifs, ses réalisations, les performances des volontaires dans les
examens professionnels (CAP, CEAP), etc.
Seulement, il est à noter que la plupart de ces
études ne montrent pas trop les faiblesses du projet des VE, ils
cherchent pour la plupart à gagner la bataille d'opinion engagée
contre les détracteurs du projet, à convaincre les bailleurs de
fond etc. Ce qui compromet la recherche du point de vue de son
objectivité.
Par ailleurs, certains brochures et dépliants
distribués par le PVE et la presse nationale aussi bien orale
qu'écrite nous ont été d'un très grand apport.
CHAPITRE II : CADRE METHODOLOGIQUE
La méthodologie est la marche rationnelle de l'esprit
vers la vérité, un ensemble organisé de démarches
intellectuelles permettant de bien mener un travail quelconque de recherche.
Compte tenu de la nature de notre objet d'étude qui
porte sur la relation entre niveau d'instruction et insertion
socioprofessionnelle, nous avons porté notre choix sur les deux
méthodes classiques de la sociologie à savoir la méthode
qualitative et celle quantitative.
I - UNIVERS DE L'ETUDE
I-1-Le cadre de l'étude
Le choix de Rufisque comme cadre d'étude n'est pas le
fruit d'un hasard. En effet, Rufisque fait partie des départements de
Dakar où l'on compte le plus de volontaires du fait du nombre important
de villages qui en fait partie. De plus, il y a eu, l'année
dernière à Rufisque, une école dont nous tairons le nom,
qui n'a eu aucune réussite à l'examen de l'entrée en
sixième et d'aucuns ont eu à accuser les volontaires de
l'éducation. C'est ainsi que le département de Rufisque nous a
semblé être un cadre bien indiqué pour notre recherche
d'autant plus que l'EFI de Dakar y est installée et des volontaires y
sont formés.
Le département de Rufisque est subdivisé en deux
IDEN (inspection départementale de l'éducation nationale) :
Rufisque I et Rufisque II. C'est cette dernière qui a plus servi de
cadre pour notre étude car Rufisque I ne recrute pas de
volontaires ; les quelques VE qui s'y trouve lui viennent
directement du ministère (la liste sécuritaire, nous allons y
revenir).
L'IDEN de Rufisque II par contre, évalue chaque
année ses besoins en maîtres et procède au test de
recrutement au niveau local. C'est ce qui explique la présence massive
de VE.
I- 2 - La population cible
C'est la catégorie de personnes auprès desquelles
s'est effectué le recueil des données. En effet nous avons eu
à cibler :
- le directeur du PEV (Projet des Volontaires de l'Education)
- Les inspecteurs départementaux de l'éducation
nationale de Rufisque. - Les directeurs d'école de Rufisque
- Les responsables syndicaux du SELS (Syndicat des Enseignants
Libres du Sénégal)
- Les volontaires, les maîtres contractuels et les
enseignants insérés dans la fonction publique qui sont
passés par le volontariat.
- Les nouveaux volontaires qui sont stagiaires à l'EFI de
Rufisque.
Telles sont les personnes auprès desquelles nous avons
effectué nos enquêtes.
I- 3 - Echantillonnage
« L'échantillon est le sous-ensemble des
personnes tirées dans la population de référence et qui
roule à base d'information »20. Nous avons
utilisé aussi bien la méthode probabiliste que celle non
probabiliste. En effet, pour les stagiaires nous avons utilisé
l'échantillonnage par quota (qui est une technique non probabiliste)
et
20 Grawitz (M) : Méthodes des sciences
sociales, Paris, Dalloz, 1990,1140p
celui du hasard simple pour les autres catégories de notre
population cible. Sa taille est de : voir tableau.
Population interrogée
|
Effectif
|
Volontaire de l'éducation
|
20
|
Stagiaire de l'EFI
|
45
|
Directeur d'école
|
05
|
Inspecteur de l'éducation
|
04
|
Responsable syndical
|
03
|
Directeur du projet
|
01
|
Directeur adjt du projet
|
01
|
Total
|
79
|
NB : Il est à noter que les
directeurs d'écoles, inspecteurs, responsables syndicaux, le directeur
du projet et le directeur adjoint du projet ont été
interrogés dans cadre des entretiens. Seul les VE et les volontaires
stagiaires ont fait l'objet d'enquêtes par questionnaires.
En outre, en dehors des enquêtes formelles, nous avons
eu à discuter de façon informelle avec plusieurs personnes
censées détenir des informations pouvant nous aider à
mieux comprendre la problématique des volontaires de
l'éducation.
A l'EFI de Rufisque, nous avons eu à recueillir beaucoup
d'informations auprès des formateurs qui sont tous des inspecteurs de
l'éducation.
II - LES TECHNIQUES D'INVESTIGATION
Ce sont les procédés opératoires par
lesquels se fait le recueil des données. Dans le cadre de notre
étude nous avons eu recours à plusieurs procédés
:
- la pré - enquête
- la recherche documentaire ;
- l'entretien semi - directif ;
- le questionnaire ;
- l'observation - participante.
II-1-La pré-enquête
Avant d'entreprendre notre recherche documentaire, nous nous
sommes appliqué à observer directement (sans support,
c'est-à-dire, sans questionnaire ni guide d'entretien) tout ce qui avait
trait au volontariat de l'éducation.
Nous avons, en effet, effectué des enquêtes
exploratoires en nous entretenant avec des personnes ressources (Inspecteurs de
l'éducation, directeurs d'écoles, enseignants, syndicalistes
etc..) Pour avoir une idée plus ou moins précise sur la
question.
II- 2 - La recherche documentaire
Ayant ainsi eu une idée sur le phénomène,
nous avons fait le tour de certains bibliothèques et centres de
documentation pour avoir des informations sur le thème. En effet,
à la bibliothèque de l'université, au niveau du
ministère de l'éducation, à la direction du projet des
volontaires de l'éducation, à l'IA (Inspection d'académie)
de Dakar, à l'EFI de Rufisque, au centre de documentation du DPS
(Direction de la Prévision et des Statistiques), nous avons
pu trouver des documents sur le sujet. Cependant, les
écrits portant sur les volontaires ne sont pas très nombreux (CF
revue de la littérature).
Les quotidiens de la ville de Dakar ont également
été une précieuse source de documentation. C'est à
partir de ces recherches que nous avons pu élaborer nos questionnaires
et guides d'entretien et formuler nos hypothèses de travail.
II-3 - L'entretien semi -directif
Nous avons effectué des entretiens à l'aide d'un
guide (voir annexe) avec des directeurs d'écoles, des inspecteurs de
l'éducation, des responsables syndicaux, le directeur du projet et le
directeur adjoint ; entretiens qui nous ont permis de mieux comprendre le
phénomène que nous étudions.(Pour les détails :
voir annexes)
II-4 - Le questionnaire
Il s'est adressé principalement aux volontaires qui
sont dans les classes et aux volontaires stagiaires qui sont en formation
à l'EFI. Il comprend 04 grandes rubriques :
I -Identification ;
II - Niveau d'étude et diplômes obtenus ;
III -Motifs de l'engagement dans le volontariat ;
IV -Condition de travail et difficultés
rencontrées
Pour les détails sur le questionnaire : (voir Annexe).
II-5 - L'observation participante :
Elle nous a permis d'aller au delà des discours et des
écrits portants sur les volontaires et qui sont souvent empreints de
subjectivisme. En effet, nous sommes allé à l'EFI de Rufisque en
tant que stagiaire et avons eu à suivre les cours, à participer
aux activités du foyer socioéducatif et culturel, à
échanger avec les volontaires-stagiaires etc. Ce qui nous a permis de
connaître un peu la réalité sur le recrutement, la
formation (durée effective, contenu, condition) et sur les conditions
d'exercice du métier. Ce qui est souvent dit officiellement à
propos du recrutement, de la formation et du traitement des volontaires n'est
pas toujours ce qui se passe réellement sur le terrain ; et c'est
justement cette observation participante qui nous a permis d'aller
au-delà de ce qui est apparent et découvrir la
réalité cachée pour une raison ou une autre. Les
inspecteurs formateurs ont eu à discuter avec nous sur tous ce sur quoi
nous avons eu à les interroger sans aucune méfiance.
II - L'ENQUETE PROPREMENT DITE
II-1- Déroulement de l'enquête
Après avoir élaboré nos outils
d'enquête (questionnaire, guide d'entretien), nous avons effectué
un pré -test. Cinq questionnaires ont, en effet, été
administrés à des volontaires et 03 entretiens effectués
pour tester la fiabilité de nos outils. Ce travail préalable nous
a permis de reformuler certains questions et thèmes et d'en
éliminer d'autres.
Il nous a, par ailleurs, préparé à
l'enquête proprement dite en nous donnant une idée du terrain, de
ses exigences et de sa nature.
Pour l'administration des questionnaires, nous avons
utilisé la méthode du dépôt compte tenu du fait que
notre population est instruite. Nous avons, ainsi, profiter des stages
pratiques des stagiaires de l'EFI de Rufisque pour la distribution des
questionnaires. Ils étaient disséminés dans toutes les
écoles des deux IDEN - Inspection Département de l'Education
Nationale) pour effectuer des stages. Nous avons, alors, donné à
chacun d'eux quelques exemplaires de questionnaire pour qu'ils les remettent
aux volontaires et Maîtres contractuels trouvés sur place. Une
note introductive a accompagné chaque questionnaire précisant
l'objet de l'enquête. A la fin de leur stage, ils sont revenus à
l'EFI avec les questionnaires déjà remplis. Ce stage «
à responsabilité entière » s'est
effectué du 07 au 25 juin 2004.
Pour ce qui est des entretiens, c'est nous même qui les
avons effectué entre la date du 14 Mai 2004 et le 12 Août 2004.
Nous avons enregistré les entrevues à l'aide
d'un magnétophone et avons fini toutes les enquêtes de terrain le
12 Août 2004. Nous n'avons cependant pas manqué de rencontrer
quelques difficultés.
II-2 - Les difficultés rencontrées
Nous étions confrontés au cours de notre recherche
à des obstacles d'ordre humain, matériel ou financier.
Nous avions décidé de faire nos enquêtes
pendant les vacances pour des raisons d'emploi du temps mais cela s'est
avéré impossible car pendant cette période il nous serait
impossible de trouver les volontaires. C'est pourquoi nous avons profité
de l'année scolaire pour faire toutes les enquêtes de terrain.
Concernant les obstacles humains nous pouvons citer la
méfiance de certains acteurs qui doutent de l'utilisation
ultérieure des réponses recueillies. C'est ainsi qu'ils ont tout
bonnement refusé de répondre à certaines questions, ou
donné des réponses dont nous avons découvert la
fausseté par la suite.
L'autre difficulté a été liée au
fait que nous étions obligé de faire nos enquêtes avant que
les volontaires ne partent en vacance. Cependant le coup de main des stagiaires
de l'EFI nous a permis de surmonter cette difficulté.
Pour ce qui est des obstacles d'ordre financier et
matériel ; ils sont liés aux problèmes de transport, de
saisie, de photocopie des documents etc.Tout cela a été quelque
peu onéreux par rapport aux revenus dont nous disposons.
DEUXIEME PARTIE :
HISTORIQUE DU RECRUTEMENT ET DE LA
FORMATION DES MAITRES AU SENEGAL
CHAPITRE I : RECRUTEMENT ET FORMATION
DES MAITRES DU DEBUT DU XXème SIECLE A
L'ERECTION DES E F I :
Depuis l'implantation de la première école
française à Saint-Louis en 1816 par un instituteur-missionnaire
du nom de Jean Dard, le recrutement et la formation des maîtres n'ont pas
cessé de subir des bouleversements. Ainsi de 1817 à 1903, la
question du recrutement et de la formation ne s'est posée qu'en terme de
formation académique. Après cette période c'est
l'ère des cours normaux (jusqu'en 1960). D'autres changements sont
également intervenus après l'accession du pays à
l'indépendance.
I- RECRUTEMENT ET FORMATION DES MAITRES AVANT 1960
:
L'enseignement mutuel qui servit au premier instituteur
sénégalais (Jean Dard), privilégiait largement la
formation académique pour la démultiplication de l'enseignement.
Jean Dard, nous dit Joseph Gaucher, devait estimer d'abord les capacités
de ses moniteurs et après seulement les former moralement à leur
future fonction et « les dresser à la gymnastique de
l'enseignement mutuel »21, un processus mis en place en
deux journées au plus..
Avec la disparition définitive de l'école
mutuelle et la relève assurée par les FRERES PLOERMEL, la
question de la formation reste inchangée. L'idée selon laquelle
la chose pédagogique pouvait se suffire d'une assez bonne instruction
demeure ; le reste s'acquiert par une longue expérience pratique. Cette
restriction ne résolvait pas pour autant les problèmes : le mode
d'enseignement simultané (les FRERES PLOERMEL faisaient exécuter
en même temps le même travail à un
21 Gaucher (J) : Les débuts de l'enseignement
en Afrique francophone. Jean Dard et l'école mutuelle de Saint-Louis
Sénégal.
groupe d'élèves) requerrait un personnel
important auquel la communauté religieuse sur laquelle reposait
désormais tout l'enseignement élémentaire ne se
dérobait pas. Mais, si la régularité et le
dévouement des FRERES ne souffraient pas de critique, il n'en
était pas de même de leur niveau de connaissance. Il avait
été mis en question en conseil privé lors de la discussion
des programmes pour l'arrêté du 03 Janvier 1838. Le débat
sur le niveau de compétence souvent décevant avait d'ailleurs un
caractère plus global. Il se retrouvait dans tous les services.
L'administration locale accusait l'administration centrale de se
débarrasser de ses pires éléments dans la colonie alors
qu'il fallait plus de qualité que dans la métropole.
Ce débat de formation sera sans solution jusqu'à
la création en 1884 de l'école secondaire dans laquelle le
directeur des FRERES PLOERMEL percevait le couronnement d'un édifice
bien structuré qui lui servira d'école normale : « Nous
pouvons donc travailler ici bien tranquillement sans être
inquiétés au sujet des titres universitaires autres que le brevet
supérieur et même moins...Notre école bien
constituée servira d'école normale à nos frères des
écoles primaires et nous pouvons préparer les sujets sur place
pourvu que vous nous donniez les sujets nécessaires pour bien consolider
l'oeuvre en ces débuts »22.
Cette institution, à sa fermeture avait formé
déjà 18 instituteurs et il y en aurait bien davantage si cette
formation éminemment utile avait été
rémunérée comme d'autres moins pénibles.
Dans cette situation, l'insuffisance du personnel demeure
malgré le besoin urgent d'enseignement justifié tant du point de
vue économique qu'idéologique. Au risque de voir l'instruction
publique se limiter dans les villes, une nouvelle réforme s'imposait.
22 Le livre africain 198p
+ L'école normale de Saint-Louis
C'est la première école de formation de
maîtres au Sénégal. Créée en1903, elle
dépendait dans un premier temps du gouverneur général et
était fusionnée à l'école des fils de chefs.
+ Les cours normaux des moniteurs
Ils recrutaient sur concours des élèves
âgés de 13 ans au moins et 17 ans au plus parmi les titulaires du
Certificat d'Etudes Primaires. Le C.N ne comportait qu'une seule promotion. Le
recrutement avait lieu tous les trois ans. Les deux premières
années étaient consacrées à l'enseignement
général et la troisième et dernière à la
formation professionnelle.
+ Les cours normaux des instituteurs adjoints :
Ils recrutaient sur concours des élèves
titulaires du C.E.P.E. et âgés de 14 à15 ans. La formation
débouchait sur le Brevet élémentaire (B.E) suivi d'une
formation professionnelle à l'issue de laquelle était
délivré le certificat de fin d'étude des cours normaux,
mention : instituteur adjoint (I.A).
Ce sont là les grands axes de la formation des
maîtres avant 1960.
II- RECRUTEMENT ET FORMATION DES MAITRES APRES 1960
:
Avec l'accession du Sénégal à
l'indépendance, naît la nécessité de
réorienter le système éducatif vers de nouveaux besoins de
développement et aux objectifs de la conférence d'Addis
Abéba (Ethiopie du 15 au 25 Mai1961).
Cours normaux d'instituteurs adjoints, Ecoles Normales,
Centres Régionaux de formation professionnelle (C.R.F.P.) et Cycles de
formation accélérée constitueront pour l'essentiel les
structures de formation des maîtres de l'école
élémentaire.
+ Les Cours Normaux et C.R.F.P. :
A la place des cours normaux des moniteurs, sont
érigés les cours normaux (C.N.) fonctionnant comme des
établissements secondaires. L'année de formation étant
supprimée, les jeunes titulaires du B.E.P.C. passaient le concours de
l'Ecole normale William Ponty (ENWP) ou l'Ecole Normal des jeunes filles de
Rufisque tandis que les autres entraient dans les C.R.F.P, structures
accueillant des titulaires du B.E.P.C pour la formation en un an d'instituteurs
et d'instituteurs adjoints.
+ Les écoles normales (E.N.) :
Il en existait deux :
-L'ENWP transférée de Sébikhotane
à Thiès en 1963 et qui plus tard abritera et donnera sa
dénomination d'une part aux institutions de formation des jeunes filles
installées à Rufisque à savoir l'E.N. des jeunes filles et
d'autre part le cours normal de Thiès.
-L'école normale des jeunes filles de Rufisque
transférée en 1966 à Thiès. Elle recrutait sur
concours des élèves titulaires du B.E.P.C. Les
élèves postulant au Baccalauréat des séries A, D et
C, les structures fonctionnaient comme dans les seconds cycles des
lycées. Les bacheliers étaient subdivisés en trois
catégories : la première était orientée à
l'université, la seconde à l'E.N.S (école normale
supérieure) pour la formation de professeurs de
collège, la troisième catégorie directement dans les
classes sans formation professionnelle préalable.
+ Les cycles de formation rapide
En 1962 /1963, des stages accélérés
s'organisaient pendant les grandes vacances pour pallier le déficit en
personnel enseignant. Des maîtres de niveau très faible seront
ainsi mis dans les classes. Certains auront tout juste le niveau du C.M.2.
En 1968, arrêt du recrutement dans les cours normaux dont
les dernières promotions terminaient leur cursus en 1972.
En cette année, suite aux bouleversements de1968, le
système éducatif post indépendance connaissait pour la
première fois une réforme en profondeur qui, dans le domaine de
la formation des maîtres, se concrétisait par la création
d'écoles normales de type nouveau. En effet, en 1972, les ENWP de
Thiès, l'E.N pilote de Mbour étaient réformée. A la
place de nouvelles structures formaient des instituteurs ordinaires en quatre
(04) ans. Les E.N étaient au nombre de cinq (05) :
-L'E.N.R William Ponty de Thiès;
-L'E.N.R DE Bambey;
-L'E.N.R de Saint-Louis ;
-L'E.N.R DE Mbour ;
-L'E.N.R Germaine Legoff pour les institutrices à
Thiès.
La formation était sanctionnée par le B.S.E.N
dont la note de services n° 621/MEN/SG/DEP du 23/01/1976 attestait le
niveau supérieur au Baccalauréat : « La
scolarité, les programmes et les méthodes d'enseignement sont de
nature à
leur (élèves maîtres) donner un niveau
de formation générale nettement supérieur au
Baccalauréat et une formation professionnelle qui s'appuie sur une
connaissance réelle du milieu, connaissance qu'animent le désir
et l'aptitude à promouvoir celui-ci ».23
En 1983, l'E.N.R.W.P de Thiès fusionnait avec l' Ecole
régionale de Mbour pour s'installer à Kolda sous la
dénomination de E.N.R de Kolda. Le Sénégal
possédait ainsi six institutions de formation des instituteurs :
- l'E.N.R Germaine Legoff de Thiès ;
- l'E.N.R de Bambey ;
- l'E.N.R de Saint-Louis ;
- l'E.N.R William Ponty de Kolda ;
- le CFPS de Thiès ;
- le CFPP de Dakar ;
Les écoles normales régionales recrutaient des
titulaires du BEPC ou DFEM, âgés de 18 à 20 ans. Le CFPS et
le CFPP recrutaient, eux des jeunes titulaires respectivement du
Baccalauréat ou du DFEM pour une année de formation
professionnelle. A côté de ces structures, des réformes
successives se sont intéressées à la formation des
maîtres.
+ L'Opération « Ailes de dindes
» :
En 1990, 400 enseignants ont été recrutés au
niveau du BFEM et formés en un mois par l'INEADE et la DEPEE à
Thiès.
23 P.V.E : Rapport d'évaluation des
modalités de mise en oeuvre du P.V.E, de son impact de ses
conséquences.op. cit.
Les modalités de recrutement ainsi que la
répartition des quotas n'ont pas été clairement
spécifiées.
Le document utilisé pour leur formation initiale a
été amélioré et a servi de module standard pour la
formation des volontaires de l'éducation (V.E). L'appellation «
ailes de dindes » a un caractère péjoratif et fait
allusion à l'importation massive à l'époque de carcasses
de dindes venant d'Europe et bon marché, de véhicule d'occasion
par la suite.
+ Le recrutement des élèves maîtres des
E.F.I :
En 1994, les Ecoles Normales ont cédé la place aux
Ecoles de formation des instituteurs (E.F.I). Elles étaient au nombre de
quatre (04) :
-l'E.F.I de kolda ;
-l'E.F.I de Louga ;
-l'E.F.I de Saint-louis ;
-l'E.FI de Thiès.
Le recrutement se faisait en deux niveaux de concours :
· Le niveau I ou BFEM :
Il concerne tout sénégalais et
/sénégalaise âgé d'au plus 30ans et titulaire au
moins du BFEM ou équivalent.
Pour cette catégorie, les disciplines ciblées
pour servir de base de test étaient : la dissertation, la dictée,
l'explication de texte, les Sciences Naturelles, l'Histoire ou la
Géographie (pour ces trois dernières, le candidat opérait
un choix).
· Le niveau II ou Bac
Au même titre que le niveau précédent,
pouvait faire acte de candidature, tout sénégalais
âgé de 30 ans au plus mais cette fois titulaire du Bac. Pour
les
disciplines, base des épreuves, c'étaient la
dissertation, l'explication de texte, les Mathématiques, les Sciences
Naturelles, l'Histoire ou la Géographie.
Les épreuves étaient tirées du niveau de la
Terminale (programmes en vigueur).
La formation dans les EFI ne dépassait pas 5 mois et
comprenait deux volets : une formation théorique et une formation
pratique sous forme de stage dans les écoles. Les EFI sont actuellement
relayées par le projet des volontaires de l'éducation.
CHAPITRE II : RECRUTEMENT, FORMATION
ET PLAN DE CARRIERE DES VOLONTAIRES DE
L'EDUCATION
INTRODUCTION
Par souci de démocratiser l'accès à
l'éducation, le gouvernement sénégalais a lancé en
Juillet 1995 le projet des volontaires de l'éducation (PVE).Grâce
à ce projet, 1200 jeunes diplômés de l'enseignement
secondaire et supérieur ont été recrutés pour aller
enseigner dans les zones les plus défavorisées en matière
d'éducation et souvent très démunies. C'est ainsi qu'il
sera question dans ce chapitre de voir le montage institutionnel du projet,
l'expérience d'autres pays en matière de volontariat, de
recrutement, la formation et le plan de carrière des VE.
I - LE PROJET DES VOLONTAIRES DE L'EDUCATION :
I-1-Le montage institutionnel du projet :
Les V.E sont régis par les dispositions de
l'arrêté ministériel n° 0005558/MEN/MDCEBLN du 15 Juin
1995 portant création du projet des volontaires de l'éducation et
fixant les conditions de sélection de formation et de prise en charge
des V.E dans le secteur formel de l'éducation de base24.
Il indique également les obligations du V.E, la
durée du projet estimée à quatre (04) ans avec une
période d'extinction de quatre (04) ans, la composition et les missions
du comité de pilotage.
24 Internet : www. Google.fr
En complément de cet arrêté, des notes
techniques à l'attention du ministre rendent compte :
-Du lancement du projet dont le déclic a
été amorcé avec l'information des syndicats ; leurs
réactions ont mobilisé la presse écrite et parlée.
« Cette situation parait avoir désorienté la direction
du projet qui s'est focalisée sur ces derniers au détriment des
autres acteurs au plan national et local ».
-Des sources de financement provenant :
· De partenaires au développement pour assurer le
démarrage.
· du budget de l'Etat pour la prise en charge des bourses
des V.E. -Des perspectives de pérennisation du projet à travers
:
· l'engagement de l'Etat à recruter les meilleurs
V.E dans la fonction publique après les quatre ans sur la base d'un
quota qui restait à déterminer.
· la mutuelle des V.E ( nous allons y revenir dans la
troisième partie).
· la régionalisation qui présente des
opportunités relatives à aux attributions des
collectivités locales liées au secteur de l'éducation.
· Le décret 96-346 du 08Mai 1996 autorisant les
V.E à se présenter au C.E.A.P (pour les titulaires du B.F.E.M) et
au C.A.P (pour les titulaires du bac) dans une perspective de faire
carrière dans l'enseignement.
I-2-Gestion du projet des V.E
Pour plus de flexibilité dans la gestion, le projet
bénéficie d'une autonomie au niveau financier et administratif.
Il est ainsi géré au niveau central par une direction
composée comme suit :
-un directeur ;
-un directeur adjoint ; -un gestionnaire ;
-un secrétariat ;
-un personnel de soutien
Au niveau décentralisé, les I.D.E.N gèrent
le projet. Elles assurent : -le recrutement, la formation initiale et continue
des V.E.
-l'affectation ;
-l'organisation de la signature de l'engagement des V.E à
servir le pays. - les formalités administratives pour le paiement des
V.E au niveau local.
Par ailleurs, le projet dispose de son propre local, d'outils
informatiques et de partenaires au développement qui ont accepté
d'apporter leur appui ponctuel en mettant à sa disposition des moyens
financiers et matériels conséquents :
-l'agence Canadienne pour le Développement
International (ACDI) a assuré le financement du lancement du projet
(sensibilisation) et du recrutement de la première
génération pour un montant de 11 073 800 FCFA.
-UNICEF : Financement de la formation et de l'élaboration
des documents de la formation : 82 552 800 FCFA.
-mission Française de coopération et d'action
culturelle : paiement des bourses de formation des V.E de la première
génération : 180 000 000FCFA. - banque Mondiale : Financement de
la première étude d'évaluation du PVE (Septembre 1996) : 9
715 500FCFA.
II- L'EXPERIENCE D'AUTRES PAYS EN MATIERE DE
VOLONTARIAT :25
C'est en 1963 que le président des Etats-Unis, J.F
KENEDY lançait le mouvement du corps de la paix pour jeter un pont entre
l'Amérique et plus particulièrement les anciennes colonies
d'Afrique. Un an après soit le 19 Janvier 1964, treize (13) volontaires
du progrès ouvraient au Tchad la voie de l'action de l'Association
française des volontaires du Progrès de la paix (AFVP) en Afrique
noire.
Ainsi, de 1963 à1968, l'AFVP permettait à plus de 5
000 jeunes Français de réaliser leur « désir de
solidarité avec les peuples africains ».
Les volontaires japonais suivront. Ce sont chaque
année, 1 000 jeunes professionnels de 20 à 39 ans, qui partent
pour deux ans. L'un des slogans utilisés pour le recrutement est le
suivant : «Voulez-vous transpirer pour les pays en voie de
développement ? ». Ils sont ainsi, 2 500 volontaires en 1992
dans les pays du Tiers Monde ; mais ils sont surtout nombreux au
Sénégal et au Maroc.
L'intervention de ces différents mouvements de
volontaires est en rapport avec cette notion capitale de la solidarité
entre les peuples, entre les hommes, entre les cultures.
Dans la sous région, principalement au Mali et Burkina
Faso, depuis quelques années, des voies nouvelles similaires sont
ouvertes pour trouver des solutions alternatives au déficit en
personnel.
25Extrait de « Le volontaire de
l'éducation », document réalisé par la direction du
P.V.E
Le gouvernement malien recrute des vacataires dans le secteur de
l'éducation. Ceux-ci signent un contrat d'un an renouvelable avec
l'Etat.
Au Burkina Faso le recours aux volontaires remonte aux
années 80. L'Etat recrutait entre 400 et 800 agents dans le cadre du
Service national de Développement (SND). Le taux de scolarisation est
ainsi passé de 16,5% en1983 à 31% en 1993 soit une augmentation
de prés de 90% en neuf ans.
En 1996, ils sont 1100 jeunes burkinabés
recrutés chaque année qui, ensemble avec les enseignants, luttent
pour assurer l'éducation au plus grand nombre.
Ces expériences furent des exemples pour le PVE DU
Sénégal.
III- LE RECRUTEMENT, LA FORMATION ET LE PLAN DE
CARRIERE DES V.E :
II-1- Le recrutement des V.E :
Le recrutement des V.E s'effectue aussi bien au niveau local
qu'au niveau central. En effet au niveau central des candidats sont
recrutés au niveau de la direction du projet qui organise un test de
recrutement composé d'une dissertation et d'un entretien de confirmation
avec un jury après admissibilité. Peut ainsi faire acte de
candidature tout sénégalais ou sénégalaise
âgé de 30 ans au plus et titulaire du BFEM ou tout diplôme
admis en équivalence. C'est la liste de ces candidats que l'on appelle
« liste sécuritaire » car elle permet de pourvoir aux
postes qui seraient vacants dans des IDEN qui ne recrutent pas. Ces VE de la
liste sécuritaire sont souvent affectés dans des zones
reculées du pays.
Au niveau local, sur la base des besoins exprimés par
chaque IDEN à partir des prévisions et projections de la carte
scolaire, les volontaires recrutées (1200 les années
passées et 3000 en 2004/2005) sont répartis en quotas. Les
dossiers de candidature sont ainsi ouverts dans les IDEN attributaires de
quotas.
Toutes les opérations liées au recrutement se
font au niveau de la circonscription scolaire (dossier de candidature,
constitution du jury, choix des sujets, correction et proclamation des
résultats). Cela a le double mérite de promouvoir les originaires
des localités retenues et d'éviter les coûts de
l'organisation d'un concours de recrutement centralisé. Les VE
recrutés dans une circonscription sont gérés par l'IDEN et
ne peuvent être affectés d'un département à un
autre.
En cas de manquement grave d'un VE, l'inspecteur
départemental peut le démettre et convoquer un jury pour
procéder à son remplacement
Il est cependant à noter que si officiellement le
recrutement devrait se faire comme indiqué plus haut, l'observation sur
le terrain nous montre que la réalité est parfois toute autre. Le
recrutement de gré à gré y est quelque chose de
très courant. Le cas de N.S ? 25ans, stagiaire à l'EFI de
Rufisque nous semble en être une parfaite illustration. Voici son
discours : « ...J'ai eu mon bac en 1999 et ai été
orientée au département d'histoire. En 2000 j'ai
été victime d'un accident de la circulation qui m'a
poussée à arrêter les études ; et depuis je suis
restée sans rien faire. C'est ainsi que mon père qui est
médecin m'a proposée de faire le volontariat, ce que j'ai
refusé au début. Mais c'est lui-même qui a fait des
démarches pour mon recrutement. Je n'ai fait aucun concours ou test, mon
père m'a trouvée à la maison pour me demander d'aller
remplir les formalités d'inscription à l'EFI. J'ai même
refusé au début, c'est pourquoi je suis venue très en
retard. Je ne compte pas du tout faire carrière dans l'enseignement
...»
Nous voyons à travers ce discours que le test de
recrutement n'est pas un passage obligé pour être VE. Il suffit
d'avoir ce que les acteurs eux même appellent « le bras
long ». Et puis NS n'est pas la seule à être dans cette
situation à l'EFI.
Lors de nos visites d'observation à l'EFI de Rufisque,
nous avons eu à constater de nouvelles venues de stagiaires jusqu'au
courant du mois de Mai alors que le recrutement se fait normalement en octobre
; Et quand nous avons interrogé le directeur de l'EFI sur leur
provenance, il nous a répondu qu'ils provenaient de la liste d'attente.
Cela ne nous a pas convaincu car une augmentation des effectifs a
été constatée alors que la liste d'attente ne fait que
remplacer les démissionnaires. Quand nous lui avons reposé la
question une autre fois, il a évoqué la permutation avec des
stagiaires d'autres EFI (même chose que pour la liste d'attente, la
permutation n'a pas d'effet sur les effectifs). Quand au mois de Mai de
nouveaux recrus étaient venus, ce sont les stagiaires eux-mêmes
qui se sont posé des questions ; et le directeur de répondre avec
un ton ironique : « Ce sont les amis d'Abdoulaye
Wade26 ». Nous pensons que ces propos peuvent se passer de
commentaires.
Par ailleurs, nos investigations nous révèlent
que l'effectif initial de l'EFI, toutes classes confondues (elle comptait 04
classes) était de 175 stagiaires et l'effectif au mois de Mai de 263
stagiaires soit une augmentation de 88 stagiaires de provenance douteuse. La
plupart de ces derniers nous ont clairement signifié qu'ils n'ont pas
fait de concours.
Ces faits constituent un compromis du point de vue de la
crédibilité du recrutement des VE car il y a parmi ces personnes
des VE qui n'ont que le BFEM et qui ont arrêté les études
depuis plus de 10 ans. Il y a même des VE menuisiers,
26 Président de la République du
Sénégal
commerçants etc. qui comptent allier cette activité
avec l'exercice du métier d'enseignant.
C'est d'ailleurs ces considérations qui expliquent la
recommandation du Rapport Général du séminaire
d'évaluation des conclusions des Etats Généraux de
l'Education et de la Formation (EGEF) selon laquelle il fallait «
Démocratiser et crédibiliser » le recrutement des
vacataires et volontaires de l'éducation27.
Après le recrutement suit la formation initiale et
continue des VE.
II-2-Formation des volontaires de l'éducation :
La formation des VE se déroule en six mois (du mois de
Janvier au mois de Juin). Elle s'effectue en deux phases : une formation
initiale qui alterne cours théoriques et pratique de classes avec
l'assistance de maîtres d'application expérimentés ; et une
formation continue avec l'encadrement du corps de contrôle et du
directeur d'écoles.
Nos investigations à l'EFI nous ont permis d'avoir des
informations plus amples sur la formation initiale des VE au niveau des
contenus, de l'organisation, de la durée effective, des acteurs, des
conditions et des résultats.
Du point de vue des contenus, la formation initiale des VE
comprend des cours théoriques et trois stages pratiques :
-un stage d'imprégnation qui s'effectue dès le
début de la formation. Ainsi les VE sont envoyés dans des «
écoles d'application » pour observer pendant deux semaines
des leçons effectuées par des maîtres
expérimentés. Ils prennent ainsi le
27 DPRE : Rapport Général des
conclusions des EGEF, Dakar, les 17, 18 et19 Novembre 2003
film des leçons observées et font des
discussions d'évaluation avec le maître à la fin du cours.
A l'issue des quinze jours de stage, chaque VE rédige un rapport
à rendre.
- Un autre stage au mois de mars donne quelques
responsabilités au VE qui effectue des leçons sous la supervision
du maître. Sa durée est également de deux semaines.
-Le troisième et dernier stage dit « à
responsabilité entière » rend le VE maître de sa
classe. Le maître se contente d'observer sans intervenir en notant les
erreurs éventuelles qu'il montrera au VE lors des discutions
d'évaluation qui ont lieu à la fin de la journée.
Les cours théoriques quant à eux concernent la
didactique du Français à l'élémentaire, celles des
mathématiques, de l'éveil, la psychologie de l'enfant, la
déontologie, les activités du préscolaire, la
pédagogie générale, l'informatique etc.28.
Par ailleurs l'EFI est dotée d'outils informatiques,
d'une machine photocopieuse neuve, de salles de classe en nombre suffisant,
d'une direction, d'une direction des études, d'un secrétariat ;
bref l'on peut dire que le cadre est adéquat pour la formation.
Seulement il est à noter qu'il existe un écart
entre la durée de formation proclamée et celle effective
(démarrage tardif des cours. Pas de rigueur dans la surveillance, etc.).
M.B, 28 ans, stagiaire à l'EFI de dire : « Je ne viens qu'une
seule fois par semaine et c'est juste pour avoir des nouvelles de l'EFI. Je
n'ai pas le temps, je travaille dans des chantiers, car je suis père de
famille [...] On fait
28 Pour plus de détails, voir l'emploi du temps
dune des classes de l'EFI en Annexes.
rarement l'appel ici, et même si on le fait, mes amis
répondront présent pour moi ». Ces propos illustrent
bien l'absence, sinon le manque de surveillance.
La formation initiale est sanctionnée par une
attestation de stage qui leur est délivrée à la fin de la
formation (au mois de juin). Il est à préciser qu'il n'y a
d'examen et que les devoirs ne sont pas notés.
II- 3 -Plan de carrière des volontaires de
l'éducation :
Il a été défini lors de « la
concertation nationale sur le devenir du volontaire de l'éducation
»29 organisée du 04 au 06 Février 1998.
Cette concertation a réuni l'ensemble des acteurs et partenaires de
l'école : autorités administratives et académiques,
parents d'élèves, enseignants à la retraite, volontaires
de l'éducation, collectivités locales, syndicats d'enseignants,
partenaires au développement et les ministères
concernés.
A l'issu des travaux, un consensus s'est réalisé
pour la création d'un nouveau corps devant accueillir les volontaires
à la fin de leur volontariat. C'est celui des maîtres contractuels
(M.C). Dans ce nouveau corps, les anciens V.E perçoivent un salaire (et
non plus une bourse) et peuvent faire carrière dans l'enseignement (11
catégories). Ils peuvent avancer tous les deux ans et atteindre le
plafond après 22 ans de service.
A partir de ce corps, les M.C, titulaires de diplômes
professionnels (CEAP ou CAP) peuvent être recrutés dans la
fonction publique.
C'est ainsi qu'un plan de carrière a été mis
en place et comprend 3 paliers : + Volontariat ;
+ Contractualisation ;
+ Titularisation dans la fonction publique.
29 Sow (Makhtar), directeur adjoint du projet.
Le volontariat devient ainsi le passage obligé pour entrer
dans l'enseignement élémentaire.
Depuis l'année 2003, 600 M.C sont titularisés
chaque année dans la fonction publique et la durée de volontariat
est réduite à 03 ans en Octobre 2002 et à 02 ans en
octobre 2004.
Il est à noter par ailleurs que l'on ne peut pas parler
du PVE sans évoquer le P.D.E.F (Programme Décennal de l'Education
et de la Formation) dont il contribue à la réalisation.
II-4 - Rôle du PVE dans le PDEF :
Une scolarisation universelle de qualité est devenue
une urgence en raison de l'ignorance de plus en plus grandissante et de ses
corollaires : la pauvreté, la malnutrition, l'insécurité,
les maladies, les guerres... ces diverses calamités menacent le devenir
de l'Afrique et du monde entier. C'est ainsi que, parmi les six objectifs
définis par le Forum mondial « Education pour tous » de Dakar
2000, il a été retenu de « faire en sorte que, d'ici
à 2015, tous les enfants, en particulier les filles, les enfants en
difficulté et, ceux qui appartiennent à des minorités
ethniques aient la possibilité d'accéder à un enseignement
primaire obligatoire et gratuit de qualité et de le suivre
jusqu'à son terme ».30
Au Sénégal, le P.D.E.F est à la fois un
cadre et un outil pour la réalisation des objectifs d'éducation
pour tous dans la période de 2000 à 2010.
« Le PDEF est avant tout sur une approche programme
reposant sur une gestion de l'éducation dans sa globalité tout en
tenant compte de la spécificité de chacune de ses composantes
[...] A travers cette approche, le PDEF s'oriente
30 Revue Pédagogique : ADEF / Afrique, N°
1, Mai 2004
essentiellement vers l'amélioration de
l'accès, de la qualité et de la gestion de l'éducation et
de la formation dans une perspective de scolarisation universelle de 2000
à 2010 ». C'est surtout, en ce qui concerne la composante
« accès » que la contribution du Projet des Volontaires de
l'éducation a été la plus significative. En effet, en
terme d'accès, les résultats attendus se résumaient dans
ses grandes lignes à :
- Construire six mille (6.000) salles de classe.
- Recruter 2000 à 2500 enseignants par an, au niveau de
l'enseignement élémentaire. Sur ce point, le PVE a même
dépassé les résultats attendus en recrutant 2700
enseignants par an ; nombre qui est revu à la hausse à partir de
2004 avec un recrutement de 3000 enseignants.
- Relever le TBS à 75 % en veillant à la
parité entre filles et garçons. Là également le PVE
a fait des résultats très positifs. Aussi, entre 1995 et 2003, le
TBS est passé de 54, 6 % à 75, 8 % avec un bond de 21,2 points
soit un rythme de croissance de 2,8 points par an31. Les
disparités entre régions et entre garçons et filles ont
également été largement réduites. Le tableau
ci-dessus en est une illustration :
|
1995
|
2003
|
Région
|
TBS
|
Rang
|
TBS
|
Rang
|
Dakar
|
88,4 %
|
1er
|
85,2 %
|
5ème
|
Diourbel
|
24,2 %
|
10ème
|
46,8 %
|
10ème
|
Fatick
|
42,8 %
|
5ème
|
66,9 %
|
7ème
|
Kaolack
|
36,8 %
|
8ème
|
51,8 %
|
9ème
|
Kolda
|
41,1 %
|
6ème
|
96,5 %
|
2ème
|
Saint-Louis
|
55,9 %
|
4ème
|
85,5 %
|
4ème
|
Tamba
|
38,9 %
|
7ème
|
88,3 %
|
3ème
|
31 Entretien avec le Directeur du PVE
Louga
|
34,5 %
|
9ème
|
65,5 %
|
8ème
|
Thiès
|
56 %
|
3ème
|
79,3 %
|
6ème
|
Ziguinchor
|
88,4 %
|
1er
|
100,9 %
|
1er
|
Sénégal
|
54,6 %
|
-
|
75,8 %
|
-
|
- Alphabétiser 120 000 personnes par année dans
le sous-secteur de l'éducation non formelle. Ici, il faut noter que le
PVE ne prend pas cela en charge mais l'étude d'évaluation a
montré que les V.E contribuent de leur propre initiative à
l'alphabétisation des adultes dans leur communauté d'accueil.
De ce qui précède nous voyons que le Projet des
volontaires prend, presque entièrement, en charge la composante
accès du P.D.E.F.
Seulement, la question se pose de savoir s'il ne constituera
pas un blocage en ce qui concerne la composante qualité. La
massification peut-elle rimer avec la qualité ?
TROISIEME PARTIE :
PRESENTATION - ANALYSE ET
INTERPRETATION DES DONNEES DE
L'ENQUETE
CHAPITRE I : IDENTIFICATION DES VOLONTAIRES DE
L'EDUCATION ET MOTIFS DE LEUR ENGAGEMENT DANS LE METIER
Avant de commencer l'analyse de nos tableaux issus des
enquêtes de terrain auprès des acteurs (VE, Stagiaires), nous
estimons nécessaire de donner quelques précisions sur la nature
des regroupements de modalités que nous avons effectués dans le
cas de certaines variables comme par exemple celle de la catégorie
socioprofessionnelle (CSP) des parents. Nous nous sommes, à cet effet,
inspiré des regroupements faits par Monsieur Souleymane
GOMIS32dans son étude sur la relation famille-école au
Sénégal. Ainsi l'activité économique des parents se
présente désormais en deux modalités « cadres
supérieurs, moyens et riches commerçants » (C.S.M.R.C)
et la modalité « ouvriers, employés, artisans et autres
agents »(O.E.A.A.A).
La première modalité regroupe en son sein les
professions suivantes : enseignant, infirmier, médecin,
ingénieur, magistrat, entrepreneur, grand commerçant et autres
cadres. Elle est désignée par le label «
catégorie des populations à niveau de vie élevé
et moyen » (nivem).
La deuxième modalité de cette même
variable CSP des parents est constituée « d'ouvriers,
d'artisans, de petits vendeurs, de chauffeurs, de retraités, de
chômeurs et de débrouillards ». Les individus de cette
seconde modalité de la variable sont désignés par le label
« catégorie de la population à niveau de vie faible »
(nivf).
Cette variable nous permet de déterminer l'origine sociale
des V.E.
32 Gomis (S) : Relation famille-école,
op.cit
Nous avons fait de même pour la variable « niveau
académique » en la résumant en deux modalités dont
une première que nous avons appelée « diplômés
de l'enseignement supérieur » et qui regroupe le
baccalauréat, le DUEL, la licence, la maîtrise ou plus ; et une
deuxième « diplôme de l'enseignement moyen »
qui équivaut au BFEM.
Cette variable nous permet de déterminer la «
position scolaire » des V.E.
Nous nous proposons dans ce chapitre de voir,
conformément à notre question de départ, les motifs qui
ont poussé les diplômés de l'enseignement supérieur
au volontariat de l'éducation bien que le niveau requis soit le BFEM.
Mais avant d'en arriver là, il convient de voir qui sont les volontaires
de l'éducation ? Quelle est leur trajectoire ? Cela, dans la mesure
où nous espérons trouver dans leur identité et leur
parcours des éléments explicatifs de leur engagement dans cette
activité.
I - IDENTIFICATION DES V.E A RUFISQUE :
I-1 - Age des VE :
En observant le tableau n°1 ci-dessous, on
s'aperçoit que les âges des VE varient entre 20 et 45 ans. Par
ailleurs, le calcul de la moyenne arithmétique et du mode nous montre
que l'âge moyen des VE est de 32 ans (Moy.arith.) et que l'âge le
plus fréquent est de 36 révolus (Mode).
Pour ce qui est des stagiaires (volontaires de la
dixième génération recrutés en octobre 2003 en
formation dans les E.F.I, au moment où nous faisions nos
enquêtes), l'âge moyen est de 28,66 ans (moyenne
arithmétique) et la majeure partie des volontaires stagiaires ont un
âge de 24 révolus (Mode) (Tableau 2).
Les différences d'âge entre les VE qui sont dans
les classes et les stagiaires s'expliquent par le fait que parmi les VE, il y
en a qui sont de la première génération, donc qui ont fait
dix (10) ans de service.
Mais dans les deux cas, l'age est relativement
élevé par rapport à l'âge normal au BFEM
(diplôme requis pour être VE). Cela peut s'expliquer par le fait
que la plupart d'entre eux ont un diplôme supérieur au BFEM et que
les quelques personnes qui n'ont que le BFEM ont été dans
d'autres secteurs d'activité (commerce, enseignement dans le
privé, formation professionnelle). Cette situation est un des
problèmes du Projet car certains volontaires estiment avoir
désappris et jugent la durée de la formation très courte
pour leur permettre d'être « dans le bain ». «
Je suis titulaire du BFEM et suis restée sans rien faire, sinon
m'occuper de mon ménage[...] Je ne crois pas que les six mois de
formation me remettront dans le bain », déclare S.Nd, 35,
mariée, mère de 03 enfants. Nous pensons que ces propos sont
édifiants par rapport à l'idée développée
plus haut.
Tableau 1 : Répartition des VE selon
l'âge
Classes d'âge
|
[20-24]
|
[25-29]
|
[30-34]
|
[35-39]
|
[40-44]
|
Non réponse
|
Total
|
Effectif
|
02
|
04
|
04
|
06
|
01
|
03
|
20
|
Source : Enquêtes
Tableau 2: Répartition des stagiaires selon
l'âge
Classes d'âge
|
[20-24]
|
[25-29]
|
[30-34]
|
[35-39]
|
[40-44]
|
Total
|
Effectif
|
06
|
20
|
18
|
00
|
01
|
45
|
Source : Enquêtes
I-2 - Sexe et situation matrimoniale :
Le tableau n° 3 nous montre que 60 % des VE
interrogés sont des hommes et 40 % des femmes. Par ailleurs, 60 % sont
des célibataires, 30 % des mariés, 5 % de
divorcés et 5 % de veufs. Nous constatons
également que parmi les mariés, 66,7 % sont des femmes. Cela
tient au fait que l'âge au mariage des femmes est plus bas que celui des
hommes.
Pour les volontaires-stagiaires, nous avons 37,78 % d'hommes et
62,22 % de femmes avec 31,12 % de mariés et 66,67 % de
célibataires.
Tableau n° 3 : Répartition des VE
selon le sexe et le statut matrimonial
S.M Sexe
|
Célibataire
|
Marié
|
Divorcé
|
Veuf
|
Total
|
effectif
|
%
|
effectif
|
%
|
effectif
|
%
|
effectif
|
%
|
effectif
|
%
|
M
|
10
|
50
|
02
|
10
|
-
|
-
|
-
|
-
|
12
|
60
|
F
|
02
|
10
|
04
|
20
|
01
|
05
|
01
|
05
|
08
|
40
|
Total
|
12
|
60
|
06
|
30
|
01
|
05
|
01
|
05
|
20
|
100
|
Tableau n° 4 : Répartition des
stagiaires selon le sexe et le statut matrimonial
S.M
Sexe
|
Célibataire
|
Marié
|
Divorcé
|
Total
|
effectif
|
%
|
effectif
|
%
|
effectif
|
%
|
effectif
|
%
|
M
|
15
|
33,34
|
02
|
4,45
|
-
|
-
|
17
|
37,78
|
F
|
15
|
33,34
|
12
|
26,67
|
01
|
2,22
|
28
|
62,22
|
Total
|
30
|
66,67
|
14
|
31,12
|
01
|
2,22
|
45
|
100
|
Source : Enquêtes
I-3- Statut socioprofessionnelle des parents :
En observant les tableaux 5 et 6, on voit que 85 % des VE sont
originaires de familles à niveau de vie faible (nivf) contre seulement
15 % qui proviennent de familles à niveau de vie élevé et
moyen (nivem). En outre les enquêtes révèlent que la
quasi-totalité des VE ont une mère ménagère ou
couturière (95 %).
Pour ce qui est des stagiaires de l»EFI, nous avons 64,45
% qui viennent de familles niveau de vie faible et 35,55 % qui ont une origine
sociale plus élevée (Tableau 7).
Si nous nous sommes intéressés à la
profession de la mère c'est parce qu'avec le développement du
travail de la femme, nous estimons qu'il ne faille plus seulement s'en tenir
à la profession du père pour désigner le statut social des
individus. Dans l'Afrique traditionnelle, le rôle de la femme
était « fondamentalement la procréation et la tenue de
la maison »33. La femme avait ainsi la situation sociale
de son mari ; mais actuellement, la famille a connu de profonds bouleversements
qui font que l'on ne peut plus ne pas prendre en compte la profession de la
mère dans la détermination du statut social des individus.
Dans le cas aussi bien des VE interrogés que des
stagiaires de l'EFI, nous voyons qu'ils sont pour la plupart issus de familles
à niveau de vie faible. Ce qui pourrait être un facteur explicatif
de leur engagement dans le volontariat de l'éducation (nous allons y
revenir).
Tableau 6 : Statut social du père des
VE
Statut socioprofessionnel du père
|
Effectif
|
%
|
Cs.m.rc
|
03
|
15
|
Oeaaa
|
17
|
85
|
Total
|
20
|
100
|
Source : Enquête
33 Adepoju (A) : La famille africaine : Politiques
démographiques et développement, Paris, Karthala, 1999, 318 p.
Tableau 7 : Statut socioprofessionnel du
père des stagiaires
Statut socioprofessionnel du père
|
Effectif
|
%
|
Cs.m.rc
|
16
|
35,55
|
Oeaaa
|
29
|
64,45
|
Total
|
45
|
100,00
|
Source : Enquête
I-4 - Niveau d'étude et diplômes obtenus :
Le tableau 8 montre que 75 % des VE de Rufisque sont
diplômés de l'enseignement supérieur et 25 % seulement ont
le BFEM (niveau requis pour être candidat au volontariat de
l'éducation).
Pour ce qui concerne les volontaires stagiaires à l'EFI
de Rufisque, le Tableau 9 montre que 48,89 % parmi eux ont le BFEM contre 51,11
% de diplômés de l'enseignement supérieur ; et il est
à noter qu'il existe parmi les diplômés de l'enseignement
supérieur, un nombre important de VE qui ont atteint le niveau de la
maîtrise ou plus.
En outre, moins de 10 % de ceux qui ont été
orientés à l'université l'ont quittée parce qu'ils
ont « cartouché » et 10 % y sont toujours inscrits, alliant
ainsi les deux activités (enseigner et étudier).
Par ailleurs, 75 % des VE n'ont pas encore eu leur
diplôme professionnel (CAP ou CEAP) sans lequel ils ne pourront pas
être titularisés dans la fonction publique. Il est à
préciser que le VE peut se présenter au CAP ou au CEAP dès
sa deuxième année de service. Mais il n'est pas rare de voir des
MC, qui ont fait dix ans sans avoir à se présenter au moins une
seule fois à ces examens professionnels. Cet état de fait
s'explique, pour les acteurs, par le fait qu'ils n'ont pas le désir de
faire carrière dans l'enseignement. M.D, 40 ans, VE de la
première génération de
dire : « Je n'ai pas fait les examens professionnels
parce que je ne compte pas du tout rester dans l'enseignement [...]Je cherche
de l'argent pour aller investir ailleurs [...] Mais, cela ne veut aucunement
dire que je ne fasse pas convenablement mon travail ».
Il ressort de ces propos de M.D l'idée que le fait de ne
pas vouloir rester dans l'enseignement ne conduit pas forcément le
volontaire à négliger son travail.
Tableau 8 : Niveau académique des
VE
Niveau académique
|
Effectif
|
%
|
D.E.S34
|
15
|
75
|
BFEM
|
05
|
25
|
Total
|
20
|
100
|
Source : Enquête
Tableau 9 : Niveau académique des
stagiaires de l'EFI
Niveau académique
|
Effectif
|
%
|
D.E.S
|
23
|
51,11
|
BFEM
|
22
|
48,89
|
Total
|
45
|
100
|
Tableau 10 : Diplôme professionnel des
VE
Avez-vous un diplôme professionnel ?
|
Effectif
|
%
|
D.E.S
|
05
|
25
|
BFEM
|
15
|
75
|
Total
|
20
|
100
|
Source : Enquête
34 DES : Diplômés de l'enseignement
supérieur
Nous nous sommes enfin intéressé à
l'activité des VE avant leur engagement dans le volontariat de
l'éducation. C'est ainsi que le tableau 11 nous révèle que
35 % des VE étaient étudiants ou élèves juste avant
leur engagement, 35 % sont restés sans rien faire, 20 % enseignaient
dans les écoles privées et 10 % faisaient du commerce.
Pour ce qui est des stagiaires, 13,33 % ne faisaient rien
juste avant leur entrée dans le volontariat de l'éducation, 20 %
étaient élèves ou étudiants, 17 % enseignants dans
les écoles privées, 15,56 % étaient en formation
professionnelle (pour la plupart en informatique), 15,56 avaient des contrats
dans des entreprises et ceux qui restent étaient vigiles, militaires, en
stage dans une entreprise ou bien faisaient du commerce (cf Tableau 12).
L'analyse des tableaux nous permet de dire que beaucoup parmi
les VE ont tenté de gagner leur vie ailleurs. C'est parce qu'ils n'ont
pas pu avoir une insertion professionnelle meilleure qu'ils sont engagés
dans le volontariat. « Je faisais du commerce après avoir
arrêté les études à l'université, estime
S.L, mais j'ai estimé que l'on a beaucoup plus de
sécurité financière si on a un salaire quand bien
même il est petit. On est sûr au moins de l'avoir toutes les fins
de mois ; alors que pour le commerce, cela peut être bon aujourd'hui et
mauvais demain ».
Ces propos de S.L, 29 ans, célibataire, et VE à
Rufisque II nous donnent déjà une idée sur les motifs de
l'entrée des VE dans le métier. Pour lui, on est volontaire juste
pour avoir de l'argent, de la « sécurité financière
».
Tableau 11 : Qu'est ce que vous faisiez juste
avant d'être V.E ? Réponse des volontaires
Activités effectuées
|
Effectif
|
%
|
Etudes
|
07
|
35
|
Enseignement dans le privé
|
04
|
20
|
Commerce
|
02
|
10
|
Rien
|
07
|
35
|
Total
|
20
|
100
|
Tableau 12 : Réponse des stagiaires de
l'EFI
Activités effectuées
|
Effectif
|
%
|
Rien
|
06
|
13,33
|
Etudes
|
09
|
20
|
Enseigner dans le privé
|
08
|
17,78
|
Formation professionnelle
|
07
|
15,56
|
Contrat en entreprise
|
07
|
15,56
|
Stage
|
03
|
06,67
|
Commerce
|
03
|
06,67
|
Vigile
|
01
|
02,22
|
Militaire
|
01
|
02,22
|
Total
|
45
|
100
|
L'identification des VE nous a permis de mieux
appréhender les motifs de leur engagement dans le volontariat de
l'éducation. Qu'est ce qui, chez certains VE, fait que l'obtention d'un
diplôme élevé ne permet pas d'accéder à une
position sociale tout aussi élevée ?
Cette question sera traitée avec les causes de
l'engagement des VE dans le métier.
II - MOTIFS DE L'ENGAGEMENT DES DIPLOMES DE
L'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR DANS LE VOLONTARIAT
De ce qui précède, nous savons que les
volontaires ont pour la plupart obtenu un diplôme universitaire (75 %) et
il y en a même qui sont toujours inscrits à l'université ;
D'autre part, la majeure partie de ceux qui ont quitté
l'université ne l'ont pas fait par ce qu'ils ont « cartouché
». Cela nous autorise à dire que les VE sont majoritairement dans
une situation académique qui pourrait leur permettre d'avoir une
activité professionnelle socialement et économiquement plus
valorisée. C'est le cas de M.S, 28 ans stagiaire à l'EFI de
Rufisque qui déclare : « Je sus inscrit en Licence de Lettres
Modernes et en même temps, je suis titulaire du diplôme d'assistant
social. Je suis sorti de l'ENDSS cette année, mais puisque l'emploi
n'est pas garanti, je me suis engagé dans le volontariat en attendant de
trouver mieux. Je suis marié donc je ne peux rester sans rien faire...
».
L'analyse de ces propos de M.S montre que l'engagement dans le
volontariat peut trouver explication dans la saturation du marché de
l'emploi car, quand bien même il est détenteur d'un diplôme
professionnel (diplôme d'Etat d'assistant social) l'insuffisance de
l'offre de d'emploi empêche M.S de trouver l'emploi désiré.
Le volontariat devient ainsi pour lui une simple « issue de
secours », il y est « en attendant de trouver mieux
».
Aussi, ressort-il de ce discours l'idée que le VE
accède à ce métier par contraintes économiques et
nécessité : « Je suis marié » dit-il,
ce qui sous-entend qu'il a des responsabilités sociales et
financières qui l'obligent à gagner sa vie quelque part
même s'il n'aime pas cette activité.
En sus, l'analyse du tableau 13 relatif au projet de
carrière des VE montre clairement qu'ils n'avaient pas comme ambition
initiale de devenir enseignant. En effet, 05 % seulement des personnes
interrogées ont déclaré avoir l'enseignement comme projet
de carrière. Les 95 % qui restent, évoquent les professions comme
: administrateur civil, journalisme, diplomate, sage-femme d'Etat,
interprète, etc. certains espèrent même, à travers
le volontariat accéder aux fonctions d'administrateur civil par le biais
des concours professionnels.
Ces données nous révèlent que ces
diplômés de l'enseignement supérieur débarquent dans
le volontariat juste pour échapper au chômage. L'idée de S.
Gomis35 développée dans son étude citée
plus haut en est une parfaite illustration. Il écrit : « Ils
(les étudiants originaires des milieux populaires) se présentent
à plusieurs concours sans grande motivation et atterrissaient là
où ils sont admis sans forcément connaître au
préalable les contraintes et les compétences exigées par
la profession. Ils accèdent à ce métier comme à un
autre non par conviction mais plutôt par accident.. ».
Nous voyons bien à travers ces propos que l'origine
sociale est largement déterminante par rapport à l'attitude des
diplômés vis-à-vis du marché de l'emploi.
Tableau 13 : Projet de carrière
Métier souhaité
|
Effectif
|
%
|
Enseignant
|
01
|
05
|
Autres professions
|
19
|
95
|
Total
|
20
|
100
|
35 Gomis (S) : La relation famille-Ecole au
Sénégal, op.cit
Il apparaît clairement de ce tableau que les VE
interrogés n'ont pas une vocation enseignante. Cela illustre
parfaitement l'idée de Bertraux36 selon laquelle il faut
penser le choix du métier comme choix par le métier ; c'est
à dire par exemple que les VE n'ont pas choisi
délibérément d'être volontaires ; ils ont
été contraints par des facteurs comme l'origine sociale.
Concernant cette dernière, nous avons justement découvert que la
majeure partie des VE (85 %) sont originaires de familles à niveau de
vie faible (95 % ont une mère ménagère ou
couturière, et 85 % ont un père appartenant à la
catégorie des « ouvriers, employés, artisans et autres
agents »-o.e.a.a.a-).
Nous pouvons donc dire que si leur origine sociale modeste n'a
pas empêché les volontaires de réussir à
l'école, elle n'en est pas moins une entrave quant à leur
insertion socioprofessionnelle. Autrement dit, à diplômes
égaux, celui qui a une origine sociale élevée a plus de
chance de réussir socialement que celui qui est issu de familles
à niveau de vie faible. On peut ainsi déduire que ces VE qui ont
des diplômes élevés sont victimes de leur origine sociale
modeste qui est la principale cause de leur engagement dans le volontariat de
l'éducation. La plupart avaient d'autres ambitions que l'enseignement et
évoquent souvent l'argent et les difficultés économiques
pour justifier leur entrée dans le métier comme en atteste le
tableau 14.
Tableau 14 : Pourquoi avez-vous été
volontaire ?
Motif évoqué
|
Effectif
|
%
|
Faute de mieux
|
07
|
35
|
Argent
|
05
|
25
|
Echec à l'université
|
02
|
10
|
Destin
|
02
|
10
|
Tremplin
|
02
|
10
|
Amour du métier
|
02
|
10
|
Total
|
20
|
100
|
Source : Enquête
36 Bertraux (D) : op.cit
L'analyse des causes évoquées par les acteurs
conforte bien la position que nous avons défendue plus haut selon
laquelle l'engagement des diplômés de l'enseignement
supérieur dans le corps des VE s'explique sinon exclusivement, du moins
en partie par leur origine sociale modeste dans la mesure où seulement
10 % des VE justifient leur engagement en évoquant « l'amour du
métier ». Tous ceux qui restent parlent d'argent, de
contraintes économiques ou d'absence de choix. En tout cas l'argent est
le mot qui revient le plus. D'ailleurs certains enseignants non volontaires
considèrent que ceux-ci sont là que pour amasser des sous et
financer d'autres projets. C'est le cas de cet enseignant cité dans le
rapport de l'étude d'évaluation37. Il déclare :
« Ils (les VE) ne sont là que pour l'argent, et partiront
à la première occasion sans crier gare ».
Par ailleurs, le tableau 15 révèle que la
plupart d'entre eux ne comptent pas rester dans l'enseignement (75 %) et ils
estiment à 55 % ne considérer le volontariat de
l'éducation que comme une « simple issue de secours
».
En revanche, l'avis des inspecteurs montre que même
s'ils ne veulent pas, ils ne quittent que très rarement le
métier, peut-être qu'ils n'aiment pas le métier au
début, mais une fois entrer dans le corps, ils finissent par aimer et
décident de faire carrière. M.D, inspecteur-formateur à
l'EFI de Rufisque de dire : « Je ne suis pas sûre que les VE
entrent dans le métier par amour ou vocation, mais ce qui est certain
c'est qu'ils finissent presque tous par aimer l'enseignement. J'en veux pour
preuve le fait que nous ne voyons que très rarement des VE qui
démissionnent.».
Nous pouvons rétorquer à M.D que le fait de ne
pas démissionner n'est pas une preuve de l'amour du métier car
celui qui y est entré par contraintes économiques ne quittera pas
tant que la contrainte persiste.
37 PVE : Rapport général , op.cit
Nous pouvons dire en bref que la principale cause de
l'engagement des VE est leur origine sociale modeste. Le volontariat constitue
pour eux une sorte « d'issue de secours ». C'est pour eux un
passage pour accéder à une situation sociale plus
élevée.
Tableau 15 : Comptez-vous rester dans
l'enseignement ?
|
Effectif
|
%
|
Oui
|
04
|
20
|
Non
|
15
|
75
|
Non réponse
|
01
|
05
|
Total
|
20
|
100
|
Source : Enquête
Tableau 16 : Le volontariat est-il pour vous une
simple issue de secours ?
|
Effectif
|
%
|
Oui
|
11
|
55
|
Non
|
09
|
45
|
Total
|
20
|
100
|
Nous pouvons en définitive, dire que même si le
volontariat est parfois accepté comme acte de civisme voire de
patriotisme, la raison profonde qui motive le choix des candidats (souvent
issus de famille à niveau de vie faible) est l'obtention d'un emploi
régulièrement rétribué.
Mais quelles sont les difficultés rencontrées par
les VE dans l'exercice de leur métier ?
CHAPITRE II : CONDITIONS DE TRAVAIL ET DIFFICULTES
RENCONTREES DANS L'EXERCICE DU METIER
Depuis le démarrage du projet, le volontariat de
l'éducation n'a pas cessé de faire parler de lui. Les volontaires
se sont organisés en syndicat : le S.E.L.S (Syndicat des Enseignants
Libres du Sénégal) et chaque année on assiste à des
grèves répétées de leur part visant à
l'amélioration de leur condition car les VE sont confrontés
à des difficultés aussi bien financières et
matérielles que pédagogiques (difficulté à tenir
correctement une classe). C'est ainsi que nous avons jugé
nécessaire de voir comment les VE, eux-mêmes,
apprécient-ils leur situation ?
I - SITUATION ET DIFFICULTES FINANCIERES DES VE :
I-1 - Problèmes financiers des VE :
Comme nous l'avons dit précédemment, les
volontaires n'ont pas de salaire mais plutôt une bourse de 60.000 F CFA
mensuelle versée par l'Etat, soit moins de la moitié du salaire
d'un instituteur adjoint. C'est ainsi que, ce qui a été
payé aux VE de 1995 à 1999 est de 7.847.800.000 F CFA . Ce que
l'Etat aurait dû payer s'il avait recruté des IA
s'élève à 18.233.861.200 soit une différence de
10.386.061.20038 alors que le VE effectue exactement le même
travail que l'instituteur adjoint (IA). 85 % des VE déclarent ainsi ne
pas être d'accord avec le principe de la bourse et en considèrent
le montant souvent comme insuffisant, dérisoire ou modique. Pour eux,
c'est une injustice car on ne peut pas comprendre
qu'ils effectuent le même travail que leurs
collègues non volontaires au moment oüceux-ci peuvent
leur payer trois fois S.ND que nous avons cité plus haut de dire
:
« Nous ne saurons être d'accord avec cette bourse de
misère qui ne nous permet
38 MEN : Tableau au comparatif du coût des VE et
des IA (1995-1999)
même pas de survivre ; surtout quand on a une
famille en charge. C'est de l'exploitation, seulement nous n'avons pas le choix
[...].Le S.E.L.S doit radicaliser la lutte et tordre la main aux
autorités de ce pays ».
N.S n'est qu'un exemple parmi presque tous ses autres
collègues qui se considèrent comme étant victimes d'une
injustice.
Certains VE pensent que non seulement la bourse ne leur permet
pas de vivre, mais aussi et surtout sa modicité leur empêche de
faire convenablement leur travail. S. ND continue : « ...Il m'arrive,
quand la fin du mois approche de ne plus aller en classe juste parce que je
n'ai pas de quoi payer le ticket de transport. J'éprouve
également des difficultés réelles pour me payer des fiches
pendant cette période du mois ».
Tableau 17 : Etes-vous d'accord avec le principe
de la bourse
Réponse
|
Effectif
|
%
|
Oui
|
01
|
05
|
Non
|
17
|
85
|
N.R39
|
02
|
10
|
Total
|
20
|
100
|
Tableau 18 : Comment jugez-vous le montant de la
bourse ?
Réponse
|
Insuffisant
|
Dérisoire
|
Minime
|
Modique
|
Minable
|
Acceptable
|
Total
|
Effectif
|
09
|
04
|
03
|
02
|
01
|
01
|
20
|
%
|
45
|
20
|
15
|
10
|
05
|
05
|
100
|
39 Non réponse
De ces deux tableaux, nous nous rendons compte que les VE sont
loin d'être satisfaits du traitement financier dont ils sont l'objet. La
plupart d'entre eux ne sont d'accord ni avec le principe, ni avec le montant de
la bourse versée par l'Etat. Autrement dit, ils estiment qu'un
travailleur doit avoir non pas une bourse mais plutôt un salaire.
L'appellation même de bourse donnée au pécule reçu
par les VE pose ainsi problème pour ceux-ci ;
D'un autre côté, le jugement porté sur le
montant montre qu'ils ne sont pas satisfaits du tout. C'est d'ailleurs ce qui
explique que la plupart des VE ont des activités parallèles
(commerce, pêche, menuiserie bois etc.). Nous avons eu à
rencontrer un VE qui continue à gérer son atelier de menuiserie
tout en enseignant.
En outre, l'analyse du tableau 19 montre que la
quasi-totalité des VE n'ont rien réalisé de concret avec
leur bourse. Ils ne font que soutenir leur famille et survivre avec leur bourse
quand bien même ils étaient engagés pour épargner et
financer d'autres projets. C'est peut-être ce qui justifie le fait
évoqué plus haut par un inspecteur selon qui les VE ne
démissionnent que très rarement. Ils peinent à trouver un
emploi meilleur et n'ont pas, d'un autre côté, la
possibilité d'épargner pour investir éventuellement dans
d'autres secteurs. C'est ainsi qu'ils risquent souvent de faire carrière
dans l'enseignement sans une grande motivation.
Tableau 19 : Quelles réalisations
faites-vous avec votre bourse ?
Réponse
|
Soutien familial
|
Survie
|
Commerce
|
Aucune
|
NR
|
Total
|
Effectif
|
05
|
04
|
01
|
09
|
01
|
20
|
%
|
25
|
20
|
05
|
45
|
05
|
100
|
Pour ce qui est du retard dans le paiement de la bourse, ils
estiment à l'unanimité qu'ils sont payés à temps
actuellement. Seulement, les anciens disent qu'au début ils pouvaient
rester deux mois sans percevoir, mais avec les acquis du S.E.L.S, ce
problème est devenu un mauvais souvenir.
Le logement également n'a pas posé de
problème car la plupart d'entre eux habitent Rufisque et ceux qui sont
dans les villages environnants sont hébergés gratuitement par les
communautés d'accueil.
Concernant la prise en charge sociale, les VE ne l'ont pas mais
ont une mutuelle qui offre un certain nombre de prestations.
2°) La mutuelle des volontaires de
l'éducation
Dés le lancement du PVE, le gouvernement du
Sénégal a pris la décision de sensibiliser les 1200
volontaires de la première génération pour les amener
à mettre sur pied une mutuelle qui devrait prendre en charge leurs
problèmes de santé.
C'est ainsi que 31 délégués
représentants les VE recrutés dans les 31 circonscriptions
scolaires se sont réunis en assemblée générale le
10 décembre 1995 pour constituer la mutuelle des volontaires de
l'éducation. Les textes fondamentaux (statuts, règlement
intérieur) ont été étudiés et adoptés
et un conseil d'administration de dix (10) membres élus a
été constitué avec à sa tête un
Président (tous des VE).
L'Etat a mis à la disposition de cette mutuelle un
gestionnaire de formation et des locaux, à la demande des VE.
Depuis février 1996, la mutuelle est fonctionnelle (locaux
équipés) et elle prend en charge :
- 100 % des frais d'hospitalisation des VE malades et 5 membres
de sa famille (pour les mariés),
- 100 % des frais d'accouchement
- 40 % des soins externes (consultation, ordonnance
etc.)40,
- En outre, la mutuelle fait un prêt de 60 000 FCFA
remboursable sans intérêt au VE en 6 mois en raison de 10 000 F
par mois.
Ce prêt est donné au mois d'octobre pour
permettre au VE de payer les frais de déplacement vers leurs lieux
d'affectation. Les fonds de la mutuelle proviennent de la cotisation de ses
membres et de l'aide de partenaires. Les VE donnent chaque mois 2 700 F soit 32
000 annuel.
La mutuelle avait un deuxième domaine d'intervention
correspondant à la réinsertion future des VE qui souhaiteraient
s'investir dans l'enseignement privé et dans le non formel (cela parce
qu'au début, le projet de devait durer que 04 ans au bout desquels les
VE devraient être remerciés).
Il s'agissait donc de financer des projets éducatifs
initiés par les VE arrivés au terme de leur engagement (04
ans).
II- PROBLEMES PEDAGOGIQUES DES VE :
Les problèmes pédagogiques des VE sont souvent
liés à la durée de la formation initiale (qui est petite)
à une absence de formation continue et enfin à une
difficulté d'insertion dans le milieu professionnel.
40 Entretien avec les responsables de la mutuelle et
les VE eux-mêmes
Pour ce qui est de la formation, en effet, nous avons vu dans
la deuxième partie de ce travail que sa durée n'était pas
satisfaisante pour les VE. Elle ne leur a pas permis d'avoir le bagage
nécessaire pour gérer convenablement une classe. Il ne sont donc
pas très bien préparés à leur tâche. MD,
formateur à l'EFI, leur disait souvent : « la durée de
la formation est insuffisante mais la meilleure manière d'apprendre
à nager, c'est de plonger »41.
C'est pour dire que quand bien même la formation n'est pas
très satisfaisante avec une longue pratique vous finirez par devenir de
bons maîtres.
Cependant, la réalité du terrain montre que :
- La plupart des VE sont ponctuels, assidus, sérieux
dans le travail et qu'ils entretiennent de bonnes relations avec leurs
élèves (entretien avec les directeurs d'école)
- Les performances des VE en matière de gestion
administratives de la classe sont jugées moyennes par les directeurs qui
les gèrent et leurs performances pédagogiques
médiocres.
- Les performances de leurs élèves sont
jugés moyennes,
- Les difficultés pédagogiques qu'ils
rencontrent le plus souvent résident dans la conduite des leçons
de langage et de calcul (didactique), la tenue de classes spéciales
(classe à double flux, classes multigrades et CM2) et
l'évaluation objective du travail des enfants.
Les avis sont presque unanimes sur la nécessité de
renforcer le suivi et le recyclage axé sur la maîtrise de la
didactique des disciplines fondamentales.
Pour ce qui est de la formation continue des VE, ils estiment ne
recevoir que très rarement des visites d'inspection.
41 Observation participante
Par ailleurs, l'analyse des rapports avec le milieu
professionnel montre que :
- les VE entretiennent de bonnes relations avec l'équipe
pédagogique de leur école (directeurs, enseignants non
volontaires, volontaires),
- Les relations avec l'IDEN et ses services sont
également jugées très bonnes par 85 % des VE. Les IDEN
trouvent en ce qui les concerne, que les VE sont « consciencieux et
respectent le règlement scolaire ».
Il convient de noter que très souvent, une bonne
coopération entre IDEN et VE a fait prévaloir des rapports de
camaraderie qui ont abouti à une collaboration franche et
spontanée.
L'IDEN est assez souvent interpellé et directement par
les VE, qui trouvent en lui l'interlocuteur pouvant répondre de
manière claire à leurs sollicitations (information sur le PVE,
bourses, communications avec l'extérieur).
Ils estiment en outre à 40 % être bien
acceptés par les enseignants non volontaires contre 30 % qui
considèrent ces derniers comme faisant l'objet d'un « complexe
de supériorité ». Les propos suivants d'un enseignant
non volontaire, cité dans l'étude
d'évaluation42 confortent ces derniers dans leur idée.
Il dit : « les volontaires ne sont pas des collègues, ils sont
des compagnons d'école au même titre que les femmes de charge et
les gardiens ». Cela montre que les relations VE/ autres enseignants
ne sont pas toujours bonnes.
C'est ainsi que tous les volontaires interrogés sont
syndiqués et appartiennent tous au SELS (Syndicat des Enseignants Libres
du Sénégal) qui constitue la seule organisation syndicale des
VE).
42 PVE : Etude d'évaluation op. cit.
Parmi les acquis du SELS, les VE interrogés ainsi que les
responsables syndicaux évoquent :
- La réduction de la durée du volontariat qui passe
de 04 à 03 ans en octobre 2002 et à 02 ans en octobre 2003 ;
- La titularisation dans la fonction publique de 600 MC par an,
à partir de 2003 ;
- octroi d'indemnité de direction ;
- possibilité offerte au MC d'entrer à l'ENS pour
devenir professeur ou inspecteur de l'enseignement ;
- participation des MC au mouvement régional et national
du personnel ;
- augmentation de la bourse des VE qui passe de 50 000 F à
60 000 F CFA ;
- participation des MC titulaires de diplôme professionnel
aux concours professionnels de la fonction publique ;
- En bref, nous pouvons dire qu'il y a eu des
améliorations très importantes
dans les conditions d'existence
et de travail des VE ces dernières années.
CONCLUSION
Nous avons eu à montrer que depuis 1816, date de la
création de la première école au Sénégal, le
recrutement et la formation des maîtres n'ont pas cessé de subir
des bouleversements. C'est ainsi que de 1817 à 1903, la question du
recrutement et de la formation des maîtres s'est posée en terme de
niveau académique. L'enseignement mutuel de Jean Dard
considérait, en effet, la chose pédagogique comme pouvant se
suffire d'une assez bonne instruction générale (niveau
académique élevé), le reste s'acquérant par une
longue expérience pratique. Avec les Frères PROERMEL, la
situation est restée inchangée.
A partir de 1903, c'est l'ère des cours normaux des
moniteurs qui recrutaient sur concours ses agents.
Après 1960, on assiste successivement à la
création des cours normaux d'instituteurs adjoints et CRFP, à
celui des écoles normales, des cycles de formation rapide (pour combler
le déficit en personnel enseignant), les écoles normales
réformées, « l'opération ailes de dinde »,
l'érection des EFI en 1994 et le projet des volontaires de
l'éducation. On voit donc que le recours à des cycles de
formation rapide ne date pas d'aujourd'hui (en 1962-1963, des stages
accélérés s'organisaient pendant les grandes vacances pour
pallier le déficit en maîtres. Il y a également
l'opération ailes de dinde en 1990).
Seulement, pendant cette période on avait recours
à des maîtres de niveau académique très faibles
(pour l'opération de 1962, il y avait même certains qui avaient
juste le niveau du CM2 et pour celui de 1990 ce fut le BFEM).
Par contre, pour le projet des volontaires, quand bien
même le niveau requis est le BFEM, la plupart des VE ont un diplôme
supérieur. Cette affluence des diplômes de l'enseignement
supérieur dans le volontariat de l'éducation trouve ainsi son
explication dans leur origine sociale modeste (85 % sont issus de familles
à niveau de vie faible et 95 % ont une mère soit
ménagère soit couturière) qui détermine largement
leurs stratégies face au marché de l'emploi. L'obtention d'un
diplôme élevé ne garantit pas chez eux l'accès
à une position sociale élevée. Cependant, on ne peut pas
dire qu'ils ne sont pas rationnels, totalement déterminés par
leur origine sociale, mais qu'ils sont plutôt rationnels d'une
rationalité limitée. Ils ont « choisi » mais
leur choix reste déterminé par des contraintes extérieures
(origine sociale). Le diplômé issu d'une famille aisée
aurait une attitude différente ; il attendrait par exemple de trouver
l'emploi désiré alors que celui qui vient des milieux
défavorisés n'a pas les moyens d'attendre. Il est
interpellé par des besoins vitaux (soutien de famille, sa propre survie
etc). C'est ainsi que, au lieu d'attendre et de chercher l'emploi
désiré. Il adopte une stratégie d'insertion rapide et
facile en attendant de trouver mieux. C'est le cas des VE qui sont pour la
plupart à la recherche d'un emploi régulier et
rémunéré pour échapper au chômage.
Seulement le traitement salarial dont ils sont l'objet fait
que, comme nous le disions dans les hypothèses, le problème
principal des VE est d'ordre financier. Ils estiment de façon unanime
que le montant de la bourse est « modique » et qu'il ne leur permet
pas de travailler convenablement et d'épargner pour pouvoir investir
ailleurs comme ils l'auraient souhaité. Ils ont également des
problèmes d'ordre pédagogique mais de moindre importance pour
eux, que ceux d'ordre financier. Ces problèmes pédagogiques sont
surtout liés à la courte durée de la formation.
Nous avons enfin confirmé avec nos enquêtes de
terrain notre hypothèse selon laquelle les VE de Rufisque sont pour la
plupart des diplômés de
l'enseignement supérieur et que leur engagement dans le
volontariat s'explique surtout par leur origine sociale modeste.
Il est à noter que la question reste loin d'être
épuisé. En effet, nous estimons nécessaire
d'évaluer l'impact des volontaires sur l'enseignement
élémentaire
Rufisquois, voire national aussi bien du point de vue de
l'accès que de la qualité(deux composantes du PDEF).
Il se pose également le problème de l'avenir même
du
corps des instituteurs car les VE ne cotisent pas à la caisse de
retraite. Et est-ce
le recrutement d'enseignants en nombre suffisant suffit
pour régler le problème si
l'on sait qu'il y a parfois des
personnes qui sont réticents à envoyer leurs enfants
à
l'école ? Autant de questions qui font que la question
mérite des
approfondissements.
BIBLIOGRAPHIE :
1°) ADEPOJU (A) : La famille africaine : politiques
démographiques et développement, Paris, Karthala, 1999 - 318
p.
2°) ANDERSON (A.C) : cité par Boudon :
L'inégalité des chances, Paris, A. Colin, 1973 - 237
p.
3°) BAUDELOT (C) et ESTABLET (R) : L'école
capitaliste en France,
4°) BERTAUX (D) : Destins personnels et structure de
classe, Paris PUF, 1977.
5°) BOUDON ( R ) : L'inégalité des chances
: la mobilité sociale dans les sociétés
industrielles, Paris, A. Colin, 1973 - 237 p.
6°) BOUDON ( R ) : La logique du social, Paris,
Hachette, 1983.
7°) BOURDIEU (P) et PASSERON (J.C.) : La
reproduction, Ed. minuit, 1970.
8°) CARREL (A) : L'homme, cet inconnu, Paris, Plon
; 1935 - 356 p.
9°) CUIN (C.M) : Les sociologues et la mobilité
sociale, paris, PUF, coll. Le Sociologue, 1994.
10°) D.P.R.E.E : « Rapport général des
conclusions des EGEF », Dakar, les 17, 18, 19 novembre 2003.
11°) ECO AFRIQUE : « Etude sur les stratégies de
mise en oeuvre d'un statut pérenne pour les volontaires de
l'éducation nationale », Dakar, décembre 1997.
12°) GAUCHER (J) : Les débuts de l'enseignement
en Afrique francophone. Jean Dard et l'école mutuelle de Saint-
Louis (Sénégal).
13°) GUEYE (MB. Nd) : 4ème revue
annuelle du PDEF : « Enjeux, recommandations, perspectives » in revue
pédagogique ADEF/AfRIQUE, n° 1, mai 2004.
14°) LEVI-STRAUSS : Race et Histoire, Paris,
UNESCO, 1970, 50 p.
15°) MARX (K) : cité par Beitone (A) et Al :
Sciences sociales, Paris, Dalloz, 2002
16°) MONTOUSSE (M) et RENOUAR (G) : 100 fiches pour
comprendre la sociologie, BREAL, Rosny, 1997 - 234P .
17°) PRETO (V) : cité par BUSINO (G) : Elites et
élitisme, Paris, PUF, 1992.
18°) PVE : « Evaluation des modalités de mise
en oeuvre du projet des volontaires de l'éducation, de son impact, de
ses conséquences : Rapport d'évaluation », Dakar, septembre
1996.
19°) PVE : « Les volontaires de l'éducation
», octobre 2004.
20°) SOROKIN (P.A) cité par BOUDON :
L'inégalité des chances : la mobilité sociale dans les
sociétés industrielles, Paris, A. Colin, 1973, 237p.
21°) SOW (M) : « Financement de l'éducation :
Exemple des volontaires du Sénégal », Atelier de Lomé
du 28 au 30 juin 1999.
22°) WADE (A) et AL : Rapport d'évaluation de la
formation initiale des enseignants au Sénégal,
Mémoire CREI, ENS Dakar, 1989.
ANNEXES
EMPLOI DU TEMPS DE L'EFI
HORAIRE
|
LUNDI
|
MARDI
|
MERCREDI
|
JEUDI
|
VENDREDI
|
8H
10H
|
Français
|
Eveil
|
Pédagogie générale
|
français
|
mathématiques
|
10h
10h15
|
P A U S E
|
10H 15
12H
|
Psychologie
|
mathématiques
|
Didactique des langues nationales
|
Activité du préscolaire
|
informatique
|
APR E S MID I
|
|
Législation et déontologie
|
Initiation à la recherche et à
l'animation
|
X
|
éveil
|
X
|
17h 17h15
|
P A U S E
|
17H 15
19H
|
Activité du préscolaire
|
Atelier pédagogique
|
X
|
Santé et nutrition
|
Pédagogie générale
|