Politique Africaine de sécurité et de défense: problèmes et perspectives( Télécharger le fichier original )par Tony KELO ZOLA Université de Lubumbashi - Relations internationales 2009 |
Section 2 : PERSPECTIVESEn cette section deuxième du chapitre, l'étude se cadrera sur les point que voici :- reprofiler l'Etat africain par une culture de démocratie et de bonne gouvernance, - la déconnection aux ex- métropoles,- et enfin les Etats-Unis d'Afrique, ainsi dit pris sous une forme de cogestion africaine basée sur plusieurs matières notamment de sécurité et de défense mais, cela par un essai d'un système processural allant de la confédération africaine puis vers le fédéralisme africain. §1. Reprofiler l'Etat africain par une culture de démocratie et de bonne gouvernance.Puisque les Etats africains tiennent encore à la création, un jour, des Etats-Unis d'Afrique et pour rendre fortes, ces institutions futures africaines, l'Afrique se voit obliger de faire asseoir au sein de ses nations, l'état de droit garantie par le fonctionnement des instances es parlementaires ou judiciaires à l' intérieur des Etats, qui ces dernières, serviront comme étendard des aspirations des peuples dont les politiques utiliseront comme politiques étrangères et dont ils auront à défendre les intérêts nuit et jour dans le jeu d' intérêts entre les puissances du monde, pense Daniel BACH. Les « nouvelles démocraties » africaines devront subir l'épreuve du temps. Une chose est de proclamer l'état de droit, une autre de garantir exercice effectif des droits reconnus aux citoyens africains. Une chose est d'affirmer l'indépendance de la magistrature, une autre de donner aux juges les moyens de s'opposer aux empiétements du pouvoir politique et d'assurer réellement leur mission. U ne chose est d'inscrire dans les textes pluralisme politique, une autre de permettre aux formations politiques d'exercer librement leurs activités, les dispositions constitutionnelles relatives au multipartisme sont longtemps restées lettre-morte, cela doit inciter à la prudence, de même, l'organisation des scrutins et leur déroulement ne répondant pas toujours aux critères garantissant l'honnêteté et la transparence des élections. Ainsi donc, il semble que le succès ou l'échec des expériences démocratiques en cours reposera sur la capacité des acteurs politiques et sociaux de surmonter plusieurs défis84(*) : -Le premier est d'assurer, dans les faits comme dans les consciences, le passage de la démocratie formelle au vécu démocratique, ce qui passe par des activités systématiques d'éducation et de formation des citoyens aux droits de l'homme et aux libertés fondamentales ainsi que par une adhésion des dirigeants aux principes d'une bonne gouvernance. Cette notion, que l'on peut définir comme « the conscious management of regime structures with a view to enhancing the legitimacy of the public realm » (Goram Hyden) et que Richard Joseph a popularise en Afrique grâce à son programme « African governance » développé au centre Carte d'Antlanta, a fait l'objet de diverses réflexions (au niveau de la Banque mondiale et de la coalition globale pour l'Afrique). C'est le pluralisme politique qui a permis d'en préciser les critères : état de droit et respect des droits de l'homme, responsabilité de l'administration dans la gestion des affaires de l'Etat, utilisation efficace et prudente des deniers publics, transparence de la gestion publique, etc. -Le deuxième défi auquel sont confrontées les expériences démocratiques réside dans l'impatience- légitime- des populations qui, au-delà de la conquête de nouveaux espaces de liberté, aspirant à un changement radical de leurs conditions de vie et de travail. « Changer la vie », « mettre terme à la misère », voilà ce qu'attendent les peuples africains des transitions démocratiques. On touche là un point sensible. A défaut d'être en mesure, sinon de surmonter tous les obstacles économiques et financiers, du moins d'alléger les souffrances des populations, les forces du renouveau, issues du suffrage universel, courent à l'échec. « Ventre affamé n'a point d'oreilles » dit le dicton il va de soi que ceux qui sont condamnés à survivre au quotidien n'ont pas de coeur à comptabiliser l'héritage désastreux des régimes autoritaires du passé. Ils sont plutôt enclins à mettre sur le compte de nouveaux dirigeants des difficultés qu'ils endurent. « Que signifie la démocratie », « quel sens a le droit de vote lorsqu'on a pas de quoi à manger ? » entend-on souvent dans la bouche des populations africaines. C'est ce désenchantement, cette désillusion que les leaders des régions démocratiques doivent s'attacher à prévenir. C'est aussi sur ce terrain que les bailleurs de fonds internationaux doivent être conséquents : on ne peut à la fois exiger que la gouvernance démocratique soit la règle et maintenir une pression financière telle sur les nouveaux régimes africains que la situation des populations ne peut que perdurer et leur désarroi s'amplifier. En fait, la crise remet en cause la légitimité des Etats africains- qu'ils soient ou non démocratique- parce qu'ils ne plus en mesure de rendre des services concrets aux populations. Il est donc à craindre que ne se développe de plus en plus des sociétés hors et contre Etats, sources de conflits futurs au sein de pratiquement tous les Etats de l'Afrique. A cet égard la généralisation et la banalisation du phénomène émeutier au sein de la jeunesse des villes constituent l'une des plus grandes menaces auxquelles sont confrontés les pouvoirs établis. Ce phénomène est directement lié à un dynamisme démographique qui a consacré l'écrasant poids majoritaires des jeunes dans l'ensemble des sociétés africaines. La jeunesse des villes, est exclue des modes de socialisation « classique » - en particulier l'école, du fait de la crise profonde des systèmes éducatifs - coupée de la culture politique des générations précédentes qui avaient trouvé dans la lutte anticoloniale des référents communs, est socialement, psychologiquement et politiquement déstructurée. Pour la plupart sans travail, considérés comme les « underdogs » de la société, en profonde opposition avec leurs aînés, souvent, perçus comme « profiteurs » du système, ces jeunes représentent une proie facile pour tous les démagogues. Ailleurs, de leurs plus jeunes âges, ils fournissent la chair à canon des guerres civiles et des conflits interethniques. L'acuité de ce problème commande que les Etats fassent dorénavant l'une de leurs urgences, centrant en particulier leurs efforts sur l'éducation et la formation. La dérive de la jeunesse africaine traduit également le caractère multidimensionnel de la crise : économique et financière. Cette dernière est devenue de plus en plus culturelle et politique, sapant les fondements et les structures même des sociétés africaines. -Cela montre bien, et c'est le troisième défi, que l'enracinement et la pérennité de la démocratie en Afrique, passe bel et bien par une réhabilitation, voire une reconstruction pure et simple de l'Etat. La clé du succès final des transitions démocratiques actuelles se jouera de ce point de vue sur le terrain du développement humain, c'est-à-dire un développement axé sur l'homme et la satisfaction de ses besoins prioritaires dans les domaines de la lutte contre la pauvreté, de la sécurité alimentaire, de la santé, de l' éducation, de la formation, la sécurité et défense des peuples et de leurs biens, l'accent devra être mis sur les catégories les plus démunies, les plus vulnérables des populations (jeunesse, paysans, femme). « Etre près de gens » (« put the people first ») doit devenir le credo de l'Etat démocratique africain. Les populations du continent ont eu de l'Etat postcolonial une image négative, celle d'un pouvoir répressif, sécuritaire et accapareur. En étant plus proche des populations, en répondant à leurs attentes dans les domaines clés pour leur survie, en assurant leur protection (sécurité et défense) et l'épanouissement de leurs potentialités (par le biais de l'éducation et de la formation), l'Etat démocratique retrouverait sa légitimité. Au service du mieux-être des populations, à tous les niveaux, sur le plan local comme régional, il réaffirmerait sa présence et pourrait revendiquer son utilité sociale. Fondée désormais sur le critère « put the people first », les missions de l'Etat démocratique doivent impérativement être reconfigurées, reprofilées. L'Etat doit concentrer ses efforts en se fixant cinq grands objectifs : le retrait des domaines dont l'utilité sociale n'est pas claire et dans lesquels le secteur privé dispose d'un avantage comparatif. Réinvestissement des secteurs-clés- l'éducation, la santé, les infrastructures, la sécurité et défense nationale, pour le développement du potentiel humain.Redéploiement des « moyens humains et matériels » de l'Etat : il est effet nécessaire de redéployer les moyens de l'Etat démocratique de façon à lui permettre de répondre véritablement aux aspirations et aux besoins des populations. Promotion d'une culture démocratique : les nouveaux régimes africains doivent s'attacher à l'enracinement de la démocratie dans les institutions (réhabilitation par exemple du pouvoir judiciaire et de l'appareil d'Etat dans son ensemble, y compris sur le plan de l'apparence matérielle), dans les textes (consolidation des libertés fondamentales). Réévaluation des tâches essentielles du maintien de l'ordre à la lumière des exigences découlant du respect de droit de l'homme, et sans négliger la lutte contre la corruption dans toutes ses manifestations. La mission de sécurité assignée à l'Etat renvoie inévitablement à la constitution d'une véritable armée nationale, dont le model serait tout autre que celui dont se sont dotés nombre d'Etats au cours des quatre dernières décennies. Et ce qu'il faut, en somme, c'est de réussir le processus de démocratisation en cours. La nécessité de celle-ci réside dans le fait que la démocratie s'inscrit au coeur des mutations actuelles comme tendances universelle de l'évolution des sociétés contemporaines. Elle tient aussi au fait que la démocratisation constitue une opportunité historique exceptionnelle à saisir par les peuples du continent africain pour pouvoir mettre un terme aux gestions politiques, économiques et sociales qu'ils ont enduré pendant de longues années et qui compte, énormément, dans le retard qu'ils accusent aujourd'hui comparativement au reste du monde. Cela part du constat que l'évolution positive récente sur le triple plan politique, économique et social de quelques rares pays africains prouve à suffisance que la démocratie est la condition de tout développement du fait qu'elle libère les énergies et donne lieu à des nouvelles synergies. Un préalable à faire pour que la démocratie en Afrique soit la condition de tout développement, est la déconnection des Etats africains à leurs ex-métropoles, pense SAMIR AMINI. * 84 BOURGI, A. , « Profiler l'Etat africain démocratique », in : la nécessaire reconstruction de l'Etat africain, tiré de http// : www.helios univ- reims.fr, France 2009, p.30 |
|