UNIVERSITE CADI AYYAD DE MARRAKECH
FACULTE DES SCIENCES JURIDIQUES, ECONOMIQUES ET SOCIALES
LES IMPLICATIONS DE L'EMERGENCE DES
SOCIETES MILITAIRES PRIVEES
SUR LES DROITS DE L'HOMME.
LAARISSA Mohamed Youssef
Mémoire de Master en Droit Public, Section Droits de
l'Homme et Libertés Publiques
Sous la direction du Professeur BELGOURCH
Abderrahman
qua 1= W Relations alial-ika-iR, aeca
international, aeca international 0a-ad-0, Questions dE Meia et dt ccicketa
j ci=JAa = W pciallés AXii-Eres
éeivW, baieE6&ER éeivWc cE eViM, j teka-ei-I,
Externalisation, skiElletii-aik, Forces -tk)td, Privatisation dE ä-guerre,
Iacidieae aii-Cée éeS)tü
- REMERCIEMENTS -
Je tiens à remercier mon Professeur
BELGOURCH Abderrahman, qui a bien
voulu diriger ce travail
et me faire part de ses précieux conseils et
encouragements continus.
- SOMMAIRE -
INTRODUCTION:
PREMIERE PARTIE : DE LA PROLIFERATION FULGURANTE DES SOCIETES
MILITAIRES PRIVEES.
Chapitre I : L'état des Lieux d'un secteur en plein Essor.
Chapitre II : La Logique de la sous-traitance et ses Implications.
DEUXIEME PARTIE : DE L'INQUIETANTE CARENCE NORMATIVE REGISSANT
LES SOCIETES MILITAIRES PRIVEES.
Chapitre III: Insuffisances et inapplicabilité des normes
existantes.
Chapitre IV : Portées et difficultés de l'adoption
d'un cadre régulateur adéquat.
CONCLUSION.
- ACRONYMES -
BIAS: Bilateral Immunity Agreements.
GSG: Gurkha Security Guards.
CICR: Comité International de la
Croix-Rouge. DIH: Droit International Humanitaire.
DIDH: Droit International des Droits de l'Homme.
ISOA: International Stability Operations Association.
ITAR: International Traffic in Arms Regulation. KBR:
Kellog, Brown & Root.
MPLA: Mouvement Populaire de Libération
de l'Angola. MPRI: Military Professional Resources
Incorporated. ONG : Organisation Non Gouvernementale.
ONU : Organisation des Nations Unies.
OUA : Organisation de l'Unité
Africaine.
RUF : Revolutinary United Front.
SMP : Société Militaire
Privée.
SSP : Société de
Sécurité Privée.
UNITA : Union Nationale pour
l'Indépendance Totale de l'Angola.
- INTRODUCTION GENERALE -
Parmi les plus anciens métiers au monde, le mercenariat
pourrait se définir comme le fait pour un individu militairement
qualifié qui, vu son désir de l'aventure, son caractère
baroudeur, sa soif de bellicisme et d'action armée, son goût du
risque et dans certains cas poussé par un engagement idéologique,
décide de porter les armes et de s'engager dans une guerre qui, n'est
pas la sienne et qui, contrairement au guérillero, au soldat
régulier ou au volontaire ne la fait qu'en échange d'une
motivation matérielle bien déterminée.
Ayant connu une phase de déclin après
l'instauration de l'ordre westphalien qui a marqué la naissance des
Etats souverains, le phénomène revient actuellement en force, en
adoptant néanmoins une forme entrepreneuriale marquant ainsi l'essor des
sociétés militaires privées, et rien ni personne ne semble
pouvoir y remédier.
La prolifération des sociétés militaires
et de sécurité privées aux quatre coins du globe, semble
être un phénomène assez inquiétant et attirant
l'intérêt de plus en plus important aussi bien des militaires, des
gouvernements, des médias, que des académiciens. L'auteur de
référence dans ce domaine demeure Peter Warren Singer, professeur
à la Cornel University et spécialiste des questions de
sécurité et défense, et qui dans son important ouvrage
«Corporate Warriors: The Rise of the Private Military Industry
» essaie de donner une approche pluridisciplinaire du
phénomène, mettant en relief le droit, la science politique, les
relations internationales, l'économie...
La place occupée par ces nouvelles
sociétés en tant qu'acteur des relations internationales pose
plusieurs questions et éveille de vifs débats, notamment, par
rapport à leur existence, leur légitimité, la nature de
leurs activités...
Se situant au carrefour de plusieurs disciplines, nous
essaierons de nous limiter au sein de notre travail, aux disciplines suivantes
: science politique, droit international, droit international humanitaire, et
relations internationales tout en essayant de rattacher le sujet à la
question des Droits de l'Homme.
La guerre et les conflits armés représentent
pour les droits de l'Homme, toutes générations confondues, la
pire des menaces. En effet, une guerre ou tout autre de ses néologismes
sont synonymes de violations massives des droits humains et de leur
annihilation totale . Les vies y sont quotidiennement détruites, les
infrastructures et les institutions totalement oblitérées et des
nécessités comme l'alimentation, l'éducation, la
santé et la justice deviennent des choses du passé. (1)
Variant selon leur intensité, échelle, zone et
enjeux, les guerres sont propices aux meurtres, aux atteintes graves à
l'intégrité physique et morale des personnes, à la famine,
au viol, au déplacement massif des populations, au nettoyage ethnique,
aux crimes de guerre, aux crimes contre l'Humanité et aux
génocides.
Dans une ère où les Droits de l'homme n'ont
jamais été si bien protégés d'une part, ni aussi
massivement violés de l'autre, le phénomène de la
prolifération des SMP (2) vient accentuer davantage la menace qui
pèse sur les droits de la personne humaine. Ces sociétés
commerciales, guidées par l'appât du gain, la réalisation
de bénéfices, et prospérant aux dépens des
souffrances humaines, se réjouissent des graves crises humanitaires.
Pour elles, de telles crises ne sont rien d'autre que la source de profits
considérables, de prospérité et le prélude des
beaux jours qui attendent le marché de la sécurité
internationale privée. Plus l'instabilité,
l'insécurité et le chaos règnent ; plus la recette du
secteur est importante.
Longtemps cotonné aux mains de l'Etat, le champ
militaire, semblait être l'un des seuls secteurs à être
épargnés par le phénomène de la privatisation.
Désormais, tel n'est plus le cas. L'URSS, le bloc Est ayant
basculé dans l'Histoire, comme tend souvent à l'annoncer un
certain « Zbigniew Brzezinski », et la menace soviétique
écartée, la délégation de la violence politique
devient permise voire encouragée (3).
(1) Jan GORFE, `'Human Rights and Private Military
Companies: A Double-Edged Sword too Dangerous to Use?'', in Thomas
JÄGER & Gerhard KÜMMEL, Private Military and
Security Companies: Problems, chances, pitfalls and prospects, Verlag für
Sozialwissenschaften, Wiesbaden, 2007, P 241.
(2)Quelque soit leur nature ou la gamme de services offerts,
les employés de ces dernières possèdent tous la
spécificité d'être des militaires de formation (Forces
Spéciales au sein de l'Us Army, Légion étrangère,
parachutiste sud-africains...), c'est la raison pour laquelle nous nous
tiendrons à l'appellation de Sociétés Militaires
Privées pour désigner ces dernières.
(3) Colonel Bruce GRANT, US Military Expertise for Sale: Private
Military Consultants as a tool of Foreign Policy,
http://www.dtic.mil/cgibin/GetTRDoc?AD=ADA344357&Location=U2&doc=GetTRDoc.pdf
Bien que l'assimilation au contractors (4) soit
très fréquente, la distinction entre ces derniers et le
mercenaire reste nécessaire. Les contractors et contrairement aux
mercenaires, ne sont pas des acteurs clandestins ou illégaux. Ils
jouissent du statut de salarié au sein de la société pour
laquelle ils travaillent. Les mercenaires quant à eux, sont souvent
recrutés ad hoc, pour des missions spécifiques et limitées
aussi bien dans le temps que dans l'espace. Les SMP ne connaissent pas ce genre
d'obstacles. Ni le temps ni l'espace ne viennent les contraindre, ainsi
offrent-t-elles une gamme de services de plus en plus ample et
diversifiée. Consulting militaire, soutien logistique et armé,
maintient d'installations et matériel militaire, génie civile et
militaire, sécurité rapprochée, gardiennage,
surveillance...Certaines d'entre elles, comme la « CST Global », une
firme israélienne spécialisée dans le contre-espionnage,
la désinformation et l'infiltration, ont été à
l'origine d'opérations de grande envergure politico-militaire et
diffusion médiatique, comme la perfide libération de la
franco-colombienne Ingrid Betancourt.
De ce fait, les SMP occupent une place de plus en plus
importante sur la scène internationale et jouissent de larges
prérogatives, chose qui tend à les présenter comme une
menace non-négligeable aussi bien pour la sécurité et la
stabilité internationales comme pour les droits de l'homme
(Première Partie), surtout que ces dernières par leur
souplesse, leur flexibilité et leur complexité, semblent
détourner et miner le contrôle national et international de
l'usage de la force et sans contrainte aucune.
D'autre part, le cadre normatif régissant le secteur
des SMP semble être désuet et totalement hors d'usage, ce qui
risque d'accroitre davantage la menace que fait peser l'industrie militaire sur
les Droits de l'Homme. Néanmoins, le développement du
phénomène et l'importante légitimité acquise par
certaines de ces SMP, présentent d'importantes opportunités par
rapport à la réglementation de l'activité de ces
dernières (Deuxième Partie).
Nous essaierions d'établir un bref aperçu des
Sociétés militaires privées, leurs développement,
leur ampleur, la place qu'elle occupe sur la scène internationale, ainsi
que des risques et des menaces qu'elles sont susceptibles de représenter
pour la paix et la stabilité internationales. Nous tenterons aussi dans
la mesure du possible de dépasser la doxa entourant le secteur en
question en nous appuyant sur certains études récentes, bien que
limitées en nombre, relatives à ce secteur
militaro-commercial.
(4) Contractor : mot anglais qui signifiant littéralement
contractant, et qui est de plus en plus utilisé pour désigner les
salariés des SMP.
- PREMIERE PARTIE -
DE LA FULGURANTE PROLIFERATION DES
SOCIETES MILITAIRES PRIVEES.
Chapitre I : L'état des Lieux d'un secteur en
plein Essor. Section 1 : Une Industrie irréversible.
§1- Portée historique d'une
actualité.
Phénomène aussi ancien que la guerre
elle-même, le mercenariat a su évoluer et mûrir pour
atteindre son étape entrepreneuriale et s'y adapter aisément.
Ainsi les deux dernières décennies ont été
témoins du fulgurant essor de l' « industrie miitaire
privée » (1). Angola, Sierra Leone, Colombie,
Ex-Yougoslavie et actuellement Irak et Afghanistan, sont les meilleures
illustrations d'un phénomène devenu irréversible.
Longtemps épargné par les vagues de
privatisation, le militaire fait de moins en moins figure d'exception. Nombreux
seront les auteurs à percevoir avec méfiance la privatisation de
l'armée, y compris les libéraux les plus radicaux. Pour Samuel
Huntington le fameux chantre d'un `'clash of civilisations»,
certaines activités professionnelles sont régulées par
l'Etat ; le militaire lui est et doit être « monopolisé
» par l'Etat. En effet, le contrôle absolu du militaire et la
monopolisation de la guerre ont marqué la naissance et
l'émergence des Etats. Ce contrôle n'était pas uniquement
une des responsabilités de l'Etat, mais en constituait sa raison
d'être, et ce depuis l'établissement de l'ordre westphalien,
où un territoire, une population et un souverain politiquement et
militairement responsable représentaient la quintessence même de
l'Etat. La perte de ce monopole et l'externalisation croissante de la guerre
pourraient non seulement annoncer le déclin des Etats, mais
également leur disparition (2).
L'émergence actuelle et la consolidation du
phénomène se sont passées à une vitesse telle que
nous pourrions aisément affirmer que le point de non retour a
été atteint et depuis bien longtemps dépassé.
Encouragé par l'Exécutif, le phénomène s'est
développé en faisant fi de l'opinion publique et du
contrôle parlementaire, privant ainsi l'organe législatif d'une de
ces majeures prérogatives, et rien ni personne ne semblent être
à même de pouvoir en limiter l'ampleur.
(1) Le terme Industrie Militaire Privée, fait allusion
au terme «Private Military Industry » utilisé par Peter Warren
Singer dans son ouvrage «Corporate warriors: the rise of the previate
military Indusrty » Corporate warriors: The Rise of the Privatized
Military Industry, Ithaca and London, Cornell University, 2008, et qui
reste la référence principale en la matière.
(2) Herfried Münkler, `'Clausewitz and the Privatization of
War `', in Hew Strachan and Andreas Herbger-Rothe, Clausewitz in the 21st
Century, Oxford University Press, 2007, p 220.
La chute du système bipolaire, et l'éclatement
de plus de 57 conflits au sein de 47 régions à la fin de la
guerre froide, vont constituer un environnement extrêmement favorable
à l'essor de l'industrie militaire privée. Plusieurs
décennies d'antagonisme Est-Ouest, et la préparation d'une guerre
qui n'eut jamais lieu, laissèrent de monstrueux stocks d'armements et
une main d'oeuvre hautement qualifiée au chômage technique. Il est
estimé qu'entre 1987 et 1997, les effectifs cumulés des
armées : américaine, soviétique/russe, française et
britannique sont passés de 5,23 à 1,24 millions d'hommes (3).
Face à la démobilisation massive d'individus ne sachant faire
autre chose que la guerre, ces derniers n'allaient pas tarder à gagner
les rangs des SMP.
En outre, une fois la menace soviétique
évincée et des processus de privatisation de plus en plus en
vogue, les grandes puissances et à leur tête les Etats Unis,
pouvaient dorénavant se permettre déléguer leurs
prestations martiales et entamer l'externalisation de certaines de leurs
activités, notamment en matière de coopération et
d'assistance militaires.
Vient s'ajouter à cela, le grand intérêt
porté par le secteur commercial au « militaire » et qui voyait
en ce dernier une nouvelle piste dont l'exploitation était forcement
l'occasion de réaliser des bénéfices plus que juteux.
(3)Philippe CHAPLEAU et François MISSER, « Le retour
des mercenaires », Politique Internationale, n° 94, hiver
2001-2002, p.219.
§2- Un phénomène rampant:
Convaincus qu'il ne s'agirait que d'un phénomène
post guerre-froide, certains spécialistes ne doutèrent pas
d'affirmer que le glas de l'industrie ne tarderait pas à retentir. Les
années à venir se sont chargées d'affirmer le contraire.
Les SMP n'ont jamais été aussi puissantes, aussi nombreuses et
aussi sophistiquées, et cela ne semble aucunement s'arrêter.
Prévalence des SMP entre 1991 et 2003
(4)
Les Zones en gris, représentent les zones
d'activités des SMP.
Prenant de plus en plus d'ampleur et ayant une
méconnaissance importante progressive des frontières
géographiques, chose est à signaler que le
phénomène ne prend guère les mêmes formes et qu'il
se manifeste de diverses manières. Ayant fait ce constat, le professeur
Herfried Münkler (5) approche le phénomène de la
sous-traitance militaire sous deux angles différents : Le premier au
sein des pays du nord, le second au sein des pays du sud. Dans le premier cas,
la sous-traitance apparait comme un processus. Dans le second, la
sous-traitance est la manifestation de l'effritement de toute autorité
étatique. Le phénomène prend deux formes aussi
différentes l'une de l'autre, que l'on se croirait devant deux
phénomènes distincts (6).
(4) P.W. SINGER,op.cit, p 7.
(5)Professeur d'Histoire et de SciencePolitique à
l'Université Libre de Berlin.
(6) Herfried Münkler, op.cit, P 221.
Là où l'externalisation apparait comme
processus, notamment aux Etats Unis et en Europe, le retrait graduel de l'Etat
est voulu et se base sur des critères de rationalisation des coûts
et des dépenses. L'Etat ne fait que déléguer une part de
son monopole de « la violence légitime » mais reste souverain
par rapport à la prise de décision politique qui demeure
intouchable.
Au sein des « Etats défaillants », ou «
Etats en délinquance », terme traduit de l'anglais «Failed
States» et utilisé pour la première fois par Madeleine
Albright, l'externalisation marque l'effritement de l'autorité de
l'Etat. Ne pouvant garantir la sécurité en tant que service
public à ses ressortissants, l'Etat la délègue
malgré lui et perd tous ses instruments et mécanismes de
contrôle en cédant aussi bien de gré que de force ses
prérogatives à des chevaliers d'industrie, n'hésitant pas
à tirer des profits maximaux du rapport de force en leur faveur.
Ainsi, nous assistons au sein de ces Etats, à la
criminalisation des forces publiques, la police et l'armée jouent aux
bandes criminelles, terrorisant et rackettant leurs concitoyens. Telle est
devenue la réalité quotidienne au sein de certaines
régions en Amérique du sud, Afrique sub-saharienne, Asie du
Sud-est... où des chefs de clans, des milices armées, et des
seigneurs de guerre viennent combler le vide laissé par l'Etat, et qui
en se livrant des guerres sans merci et pour leur propre compte, cherchent
ainsi à contrôler certains secteurs lucratifs (trafic d'armes,
drogues, diamants...) avec, pour unique règle, la spoliation et
l'annihilation de la population qu'ils sont appelés à
côtoyer (7).
(7) Herfried Münkler, op.cit, p 223
§3- L'Emergence des « Guerres Hybrides
».
De nos jours, les guerres interétatiques semblent
être révolues et se font de plus en plus rares. Lorsqu'elles ont
lieu, ces dernières ne sont qu'une affaire de semaines, voire de jours.
La dernière remonte à l'été 2008 et opposa la
Russie à la Géorgie.
La tendance actuelle a trait, de plus en plus aux conflits
dits asymétriques et de basse intensité, qui ne demeurent pas
moins meurtriers et abjects que les conflits internationaux au sens classique
du terme.
Si chaque époque possède une conception de la
guerre qui lui est propre, l'actuelle semble s'inspirer des
événements du 11/09. Les attaques du 11/09 ont eu un impact non
négligeable sur la façon de voir la guerre et sur la
révision de certaines doctrines militaires.
Etant l'un des rares secteurs épargnés par la
crise économique après les événements du 11/09, le
secteur de l'industrie militaire privée saura tirer d'incommensurables
profits de ce drame : Une opinion publique traumatisée, un climat de
paranoïa généralisé, une demande en besoins
sécuritaires de plus en plus accrue et la guerre contre le terrorisme
déclarée par certains Etats ne viendront que contribuer davantage
au bonheur d'un secteur qui se portait déjà très bien.
Dans un article publié par le «Potomac Institute
for Policy Studies en 2007 et intitulé «Conflict in 21 century: The
Rise of hybrid wars» (8), Le Lieutenant Colonel Frank G.
Hoffman (9), développe le concept de «Guerre
Hybride». Pour Hoffman, les doctrines militaires conventionnelles du
20ème siècle, conduites contre des Etats Nations et
des Armées de masses de l'ère industrielle - dont la seconde
guerre mondiale reste le modèle le plus pertinent - sont mortes.
Les guerres hybride seraient des guerres cherchant à
rallier guerres régulières guerres irrégulières et
à faire fusionner la létalité du conflit étatique
avec la ferveur sauvage et le fanatisme de la guerre irrégulière
(10), combinant ainsi combats conventionnels réguliers et
techniques insurrectionnelles. Les Etats pourront donc avoir
(8)
http://www.potomacinstitute.com/images/stories/publications/potomac_hybridwar_0108.pdf)
(9) chercheur assistant au sein du Center for Emerging
Threats and Opportunities at the Marine Corps Combat Development
Command)
recours aux tactiques conventionnelles (raids aériens,
tirs d'artillerie...) aussi bien qu'à des tactiques non
-conventionnelles (assassinat ciblé, attentat, attaque terroriste,
embuscade, cyber attaque...), mais dans les deux cas le recours à une
technologie de pointe sera primordial.
Ces guerres prendront généralement place au sein
des villes des Etats défaillants ou de celles des Etats en voie de
développement et plus précisément au sein des jungles
urbaines et des littoraux où se concentre une grande partie de la
population, ce qui constitue des cachettes sures aux insurgés et
facilite la logistique. (11)
En ce qui concerne le facteur temps, les acteurs de ces
guerres (insurgés, soldats, contractors...) chercheront à ce que
ces dernières s'étendent d'une manière indéfinie et
perdurent le plus longtemps possible, se dirigeant vers des guerres d'usure
où l'on évite tout affrontement décisif avec l'ennemi,
créant au passage des situations n'étant ni de guerre ni de paix
où seuls l'instabilité, l'insécurité et le chaos
sont protagonistes.
Les forces armées devront en outre faire preuve du plus
grand professionnalisme possible, posséder une grande
flexibilité, souplesse et facilité d'adaptation (12),
ces dernières devront donc se concentrer strictement sur le coeur de la
guerre, ce qui pourrait légitimer le recours à l'externalisation
de certaines fonctions de l'armée.
La ligne de front étant de loin le champ de bataille le
plus important, les Etats devront chercher à contrôler
l'information en vue de discréditer l'ennemi et manipuler l'opinion
publique. (13)
D'autre part, il ne semble plus que le but ultime de la guerre
soit la destruction, l'anéantissement et la soumission de l'ennemi
à notre volonté comme disait Carl von
(10) Franck G. Hoffman, op. cit, P 28.
(11) Ibid, P 15.
(12) Ibid. p 52.
(13) Ibid. p 53.
Clausewitz, mais créer des situations de
désordre et de chaos, voire des zones de «nondroit» et
à en à tirer les Profits maximaux. L'Irak, l'Afghanistan et la
Somalie en sont les meilleurs exemples.
En résumé, nous pourrions dire que les guerres
actuelles, à la différence de la vision clausewitzienne, ne
cherchent ni l'annihilation de l'adversaire ni sa soumission, mais visent
à générer de graves crises humanitaires où
l'instabilité, l'insécurité et le chaos seront maitres et
en tirer les profits, chose qui semble servir les desseins des SMP.
Section 2 : De la typologie des SMP.
« La panoplie de services offerts dépasse toute
classification, mais elles coïncident toutes dans le fait qu'elles
offrent des prestations traditionnellement reconnues aux militaires
»
Juan Carlos Zarate(14) The Emergence of
a new dog of war.
§-1 Une classification peu plausible.
Comme secteur relativement nouveau, l'industrie militaire
privée semble difficile à classifier, et vouloir en dresser une
typologie concise et succincte n'est pas chose facile, probablement à
cause de la nouveauté du phénomène et à
l'intérêt académique encore naissant, ce qui expliquerait
la rareté des études en la matière. Cette
difficulté réside également, dans la structure et nature
des SMP. Si les mercenaires classiques étaient recrutés pour des
opérations clandestines et ad hoc bien précises, cela n'est pas
le cas pour les SMP. Le seul point commun existant entre ces
sociétés, est le fait qu'elles soient avant tout des
sociétés commerciales, offrant un ensemble de services
traditionnellement réservés à l'armée et à
la police, et servant ainsi une panoplie de clients. Souplesse et
flexibilité semblent être leurs principales vertus, elles
s'adaptent à tout type de situation, et sont prêtes pour toute
tâche susceptible de leur être confiée à la condition
qu'elle présente une importante source de revenus. Le service offert
dépendra du client et des stipulations contractuelles qui auront
été définies préalablement avec lui, chose qui rend
toute classification peu plausible.
Parmi les classifications les plus fréquentes, nous
pouvons citer celles établissant une distinction entre les
Sociétés de Sécurité Privées (SSP) et les
Sociétés Militaires Privées (SMP). Cette distinction, que
l'on pourrait qualifier de dichotomique, divise effectivement ces
sociétés en deux catégories : la première offrant
des services
(14) P.W. Singer, op.cit, p 88.
à vocation défensive ou services passifs (SSP)
et la seconde des services à vocation offensive ou services actifs
(SMP).
Ainsi, les SSP seraient des sociétés
spécialisées dans la sécurité et la protection des
personnes et des biens, y compris des biens humanitaires et industriels.
(15), tandis que les SMP sociétés privées
spécialisées dans les activités relevant strictement du
champ militaire, telles que ; les opérations de combat, la planification
stratégique, la collecte de renseignements, l`appui opérationnel,
l'espionnage, l'infiltration, la logistique, la formation, l`approvisionnement
et la maintenance d`armes et de matériel...
Cette approche plutôt simpliste présente
plusieurs lacunes. Tout d'abord, on ne saurait faire une distinction
suffisamment claire entre ce qui serait « offensif » et «
défensif ». Ce qui est défensif pour les uns est forcement
offensif pour les autres, et changerait en fonction des tâches que la
firme serait appelée à accomplir.
Le relativisme subjectif de cette distinction a
été illustré à de nombreuses reprises par les
employés de l'entreprise de sécurité privée
Blackwater en Irak. Chargés de la protection des personnes et des
convois, leur mission était a priori de nature défensive. Or,
leur attitude agressive et les nombreuses exactions commises par ces derniers
permettent d'en douter. Selon diverses sources, certains employés de
Blackwater conduisent à plus de 140 km/h dans les rues de Bagdad,
obligeant les passants à se jeter hors de la route pour ne pas se faire
renverser.
D'autre part, cette dichotomie simpliste ne résiste pas
à l'épreuve des faits. Comme le rappelle Andrew Bearpark,
directeur général de la British Association of Private
Security Companies, (BAPSC) qui explique à cet égard qu':
« Au départ, la différence entre opérations
défensives et opérations offensives est absolument claire.
Cependant, lorsque vous êtes attaqué, vous devez vous
défendre, et il est vrai que, parfois, vous devez devenir offensif pour
pouvoir vous défendre. C`est la réalité pratique sur le
terrain qui détermine l`activité qui s`engage. En d'autres
termes, la posture dissuasive ou offensive d'une entreprise de
sécurité privée est en fonction des contraintes sur le
terrain. Cette distinction est donc impossible à tenir car construite
sur une base variable ». (16)
(15) Marina CAPARINI, Fred SCHREIER, Privatising Security: Law,
Practice and Governance of Private Military and Security Companies, DCAF,
Document occasionnel 6, Genève, 2005, p.2
§2 - L'approche ternaire de P.W. Singer.
Conscient des lacunes que comporte la catégorisation
dichotomique des SMP, P.W. Singer va proposer une catégorisation
ternaire dite « pointe de lance» (Tip of the Spear) qui
tiendra compte de la dualité du secteur de l'industrie militaire
privée, à savoir : sa dimension économique et sa dimension
militaire.
Singer constate que, traditionnellement, les unités de
l'armée se distinguent à la fois par la place qu'elles occupent
sur le champ de bataille et par la proximité à la ligne de front.
Ceci est aussi valable pour les SMP et leurs contractors, comme l'illustre la
figure suivante (17) :
Cette situation définit, leur entrainement, leur
rôle, leur prestige, leur impact...etc. Un individu servant au sein de
l'infanterie aura forcement une formation et une place différente par
rapport à un individu servant au sein du commandement ou au sein des
unités de support logistique. Idem pour les SMP et leurs contractors.
En nous basant sur une telle catégorisation, nous
pouvons distinguer entre trois types de firmes :
Les Firmes Militaires Prestataires (Military
Provider Firms) offrant des services à caractère militaire tels
que l'appui tactique et le soutien aux opérations de combat et
situées sur le théâtre d'opérations près de
la ligne de front (représentée par « la pointe de la
lance») ;
(16) Andrew BEARPAK, entretien conduit par Toni Pfanner,
International Review of the Red Cross, vol.88, n°863, septembre
2006, p. 170.
(17) P.W. Singer, op.cit, p 17.
· Les Firmes de Consulting Militaire
(Military Consultant Firms) recrutant des officiers de l'armée
à la retraite à même de proposer des services de conseils
stratégiques et d'entraînements militaires et positionnées
sur le théâtre de guerre;
· Les Firmes Militaires de Soutien
(Military Support Firms) fournissant des services de logistique, de
renseignement et de maintenance sur le théâtre
général afin de permettre aux soldats de l'armée
régulière de se concentrer sur le « coeur de la guerre
».
1- Les Firmes Militaires Prestataires : (Executive
Outcomes,Sandline International,Gurkha Security Guards...)
Ces sociétés constituent des «
Sociétés Mercenaries» par excellence, du fait de leur
positionnement sur la ligne de front et leur participation directe au combat.
L'exemple type de ces firmes demeure la sud-africaine Excutive Outcomes,
dissoute en 1998 suite à l'adoption par le gouvernement sud-africain du
« Foreign Military Assistance Act » relatif à
l'interdiction du mercenariat (voire infra,) mais recrée et
rebaptisée ultérieurement sous le nom de Northbridge
dont nous illustrerons les «exploits» à travers deux cas:
l'Angola et le Sierra Leone.
a- Cas de l'Angola :
Le baptême de feu d'Executive Outcomes aura lieu en 1993
lors de « l'Opération Soyo » où le gouvernement
angolais dirigé par le MPLA, - après avoir perdu le
contrôle d'importantes installations pétrolifères dans la
ville de Soyo - fait appel aux services d'Excecutive Outcomes pour les
récupérer auprès des rebelles de l'UNITA.
Avec un commando composé d'environ 80 hommes, ayant
servi auparavant dans les rangs des anciens alliés de l'UNITA, la firme
Executive Outcomes allait rapidement remplir sa part du contrat. Par la suite,
cette même Executive Outcomes allait décrocher un juteux contrat
de 40 millions de dollar pour mener à bien des programmes d'assistance
militaire et renverser ainsi le rapport de force en scellant le sort de guerre
en faveur du gouvernement angolais, ce qui aboutira à la «
reddition » de l'UNITA et aux accords de paix avec le
MPLA.(18)
(18) P.W.SINGER, op.cit, p109.
b- Sierra Leone : (19)
Au Sierra Leone, où la durée de vie ne va pas
au-delà des 37 ans, le gouvernement, et face à son
incapacité à stabiliser le pays, les déboires
consécutives de la Gurkha Security Guards (GSG), qui rompu
unilatéralement le contrat la ralliant au gouvernement
sierraléonais et devant le refus des Etats Unis, de la Grande Bretagne
et de l'ONU de toute intervention de quelque nature que ce soit, va se tourner
vers Executive Outcomes pour lui venir en aide. Pour un contrat initial de 15
millions de dollars, renégocié ultérieurement sur la base
de 35 millions, Excecutive Outcomes n'allait pas uniquement restreindre
l'accès des rebelles du RUF (Front révolutionnaire Uni)
à la Capitale et à certaines zones industrielles, mais
évincer carrément, toute trace du RUF des principales zones
minières du pays et le pousser à se replier aux fins fonds de la
jungle. Executive Outcomes et ses salariés, dont beaucoup fraichement
débarqués d'Angola et ce sans le moindre contrôle, allaient
par le biais d'interventions militaires de grande précision
(mêlant, tirs d'artillerie, opérations commando, raids
aériens...) se permettre de remplir leur part du contrat en l'espace de
quelques semaines seulement. Pour sa part, le gouvernement sierra
léonais n'ayant pas les moyens immédiats de remplir ses
obligations à l'égard de la société, allait le
faire par la concession de certaines de ces ressources diamantaires à la
Branch-Heritage Mining Company qui lui avait préalablement
recommandé le recours à Executive Outcomes.
(19) P.W.SINGER, op.cit, 115
2- Les Firmes de Consulting Militaire : (DSL, MPRI, Silver
Shadow,Levdan, Vinnel,)
« Nous comptons plus de généraux par
mètre carré ici qu'au pentagone » Harry E. Soyster,
Général retraité et exécutif auprès de MPRI
(20).
Ces firmes et contrairement aux premières ne prennent
pas en charge les missions de combat et se maintiennent à une certaine
distance de la ligne de front. Comme leur nom l'indique, elles vendent
uniquement des conseils et autres services analogues. Sont de leur ressors, la
formation, l'entraînement, la restructuration et même
l'instauration d'Armées Nationales au sein d'Etats nouvellement
indépendants, (Cas de la Croatie et de la Bosnie Herzégovine.),
la remise à niveau d'unités de combat, recyclage des contingents,
réinsertion des anciens combattants dans le cadre des DDR
(Désarmement/Démobilisation/Réinsertion). Ces
sociétés accompagnent leur client à tous les nivaux, sauf
sur le théâtre des opérations. Elles le préparent,
guident ses pas, planifient ses actions, se chargent de tout, à
l'exception de la mise en application et l'exécution des
opérations, qui elles, sont laissées au client. C'est la
principale distinction entre les firmes de consulting et les firmes
prestataires. Néanmoins, cela ne serait être une raison pour dire
que leur rôle n'est pas moins déterminant que celui de leurs
homologues. En effet, l'entrainement, l'analyse militaire et la planification
sont d'égale importance dans une guerre, que l'exécution des
opérations.
Au niveau politique, ces firmes de consulting
représentent un outil extrêmement efficace de continuation de la
politique étrangère, notamment pour les Etats «
Démocratiques » qui ne sauraient envoyer leurs représentants
officiels pour des actions à la limite du politiquement correcte. En
travaillant sous la houlette de leur gouvernement, ces firmes se permettent de
soutenir l'insoutenable et de servir ses intérêts en menant des
actions politiquement lourdes de conséquences et susceptibles
d'être blâmables auprès du législatif et de l'opinion
publique. En Birmanie par exemple, des firmes françaises comme ABAC,
OGS et PHL Consulting ont toutes été
soupçonnées d'avoir prêté leurs services à
l'armée birmane dans le cadre de sa guerre anti-
insurrectionnelle(21).
(20) P.W.SINGER, op.cit, 119
(21) Ibid, p 13.
La fameuse opération « Jaque » : Perfide
opération de sauvetage ayant mené à la libération
d'Ingrid Betancourt a bel et bien été le fruit de l'intervention
de l'une d'entre elles : à savoir, la firme israélienne GST
Global, spécialisée dans le contre-espionnage, la
désinformation et l'infiltration (22).
Cependant, la plus notoire d'entre elles, demeure la
société américaine MPRI (Military Professional Ressources
Incorporated), filiale du groupe de défense et l'un des principaux
fournisseurs du Département de Défense « L 3-Communications
Holding Inc. », rendue célèbre par ses interventions lors
des guerres sécessionnistes d'exYougoslavie, où elle s'est
majestueusement illustrée. Pour un contrat avoisinant les 140 millions
de dollars, MPRI s'est chargée de la mise en place et la formation des
Armées Croate et Bosniaque, et d'un programme de transition
démocratique à la fin de la guerre.
Nous pourrions citer un autre exemple, celui de
l'ex-Zaïre, où, face à un Laurent Désiré
Kabila assisté par la Bechtel Company, Mobutu se vit dans
l'obligation de faire de même. Ayant sollicité l'intervention de
MPRI et d'Executive Outcomes, ces dernières n'étant pas
très convaincues de la crédibilité d'un régime
à l'agonie, et étant restées sceptiques par rapport aux
moyens dont il disposait pour remplir ses obligations contractuelles. Elles
désistent et cèdent leur place à la société
française Geolink qui se chargea du recrutement de mercenaires
pour le régime, avec les résultats que nous connaissons.
3- Les Firmes Militaires de Soutien : (Brown & Root,
DynCorp,Pacific Architects and Engineers)
Cette troisième et dernière catégorie de
firmes dans la classification de Singer, semble être la plus ambigüe
et la plus complexe de toutes. Elles fournissent des services d'aide et de
soutien non létaux incluant l'appui logistique, le soutien technique,
l'approvisionnement et le transport. Elles se spécialisent dans des
tâches périphériques aux activités du client en
offrant des possibilités et une efficacité qui lui font
défaut. Ce dernier, le plus souvent engagé dans des interventions
de longue durée, peut se concentrer
(22)(
http://www.israelvalley.com/news/2008/07/05/18266/israel-colombie-global-cst-une-firme-specialisee-dans-le-contre-espionnage-ladesinformation-l-infiltration)
sur le champ tactique(23). Ce secteur
représente, selon Singer, la plus importante part de la privatisation
militaire autant pour son étendue que pour ses revenus. Parmi les plus
connues d'entre elles, nous trouvons KBR (Kellogg Brown & Root) ancienne
filiale du Holding Halliburton, dirigée de 1995 à 2000 par le
vice-président américain Dick Cheney. Elle est désormais
une société indépendante, est actuellement chargée
du soutien logistique aux troupes américaines, ainsi que de nombreuses
fonctions allant de la gestion des cantines au ravitaillement en carburant et
en munitions. La KBR fut très active également pendant la guerre
du Kosovo, en travaillant pour le compte de l'OTAN, de la KFOR (Kosovo
Force) et la gestion de la question des camps de réfugiés.
Parmi les innombrables services rendus au cours de cette dernière nous
pourrions citer les suivants :
· Construction.
· Génie civile et militaire.
· Maintien des camps.
· Maintien et entretien des Structures.
· Services de transport.
· Lessive.
· Approvisionnement en munition et carburant.
· Courrier Postal.
· Restauration.
· Assainissement.
Aussi pertinente que puisse paraître la classification
donnée par Singer, elle ne peut cependant en aucun cas être
considérée comme exhaustive. La nature des SMP est fortement
rattachée à la gamme de services qu'elles sont appelées
à offrir et changent très fréquemment en fonction du
client et des stipulations existantes au sein de chaque contrat, ce qui rend
impossible toute classification concrète et plausible.
(23) Philippe DUFORT, Typologie des acteurs de
l`industrie des services militaires, Centre d'étude des
politiques étrangères et de sécurité,
Université du Québec à Montréal, Concordia
University, Note de recherche 35, octobre 2007, p.16.
Chapitre II : La Logique de la sous-traitance et ses
Implications.
Section 1 : Au niveau Politico-juridique:
« La sous-traitance généralisée des
activités militaires déresponsabilise le donneur d'ordre.
Privatiser, dans les démocraties de marché, c'est toujours
réduire l'influence de la règle, la possibilité des
régulations, les moyens de supervision, l'obligation de transparence, la
suprématie de l'intérêt collectif sur tout autre
(24). Le recours à ces acteurs encourage l'impunité,
et permet d'échapper aux contrôles démocratiques, et
jusqu'à un certains points de la responsabilité politique, il
devient plus facile pour les gouvernements démocratiques de violer les
lois internationales, et le cas échéant, de laisser commettre,
voire d'ordonner la perpétration de violations des droits de l'Homme. En
toute impunité »
(25).
§1- Contournement du contrôle
démocratique.
La sous-traitance militaire présente de nombreux
avantages pour les Etats y ayant recours. Contourner le cadre légal et
démocratique, faire fi de l'opinion publique en la maintenant
désinformée, évincer le législatif en
matière de politique étrangère, soutenir des positions
contraires à sa politique officielle, notamment par rapport aux
contraintes que supposeraient le respect et la protection des droits de
l'Homme, et enfin, en cas d'exactions, la dilution de la responsabilité,
sont désormais chose possible.
Après la guerre du Vietnam, les Etats-Unis ont
opté pour une armée professionnelle constituée de
volontaires. Les chefs militaires ont alors mis en place toute une série
de garde-fous afin de veiller à ce que la politique
étrangère du gouvernement soit toujours en phase avec la
volonté du peuple américain. Sous l'impulsion du chef
d'état-major de l'époque, le général Creighton
Abrams (1972-1974), les militaires ont voulu s'assurer que le gouvernement ne
se lancerait pas dans une guerre sans le soutien
(24) (25) Xavier Renou, Chapleau Philippe, Wayne Madsen,
François-Xavier Verschave, La privatisation de la violence :
Mercenaires et SMP au services du Marché, Agone, collection Dossier
Noirs, Marseille, 2005, p 303.
nécessaire de la nation. C'était la «doctrine
Abrams». (26)
La présence massive de contractors en Irak, en
Afghanistan, démontrent bien à quel point cette doctrine a
été vidée de sa substance. 1/100 en 1991, 1/10 en 2003,
les contractors ont su multiplier leur présence au point de constituer
le deuxième contingent présent en Irak après celui de
l'armée américaine.
D'autre part, La diffusion des images et des statistiques de
guerre n'est jamais une chose positive pour un gouvernement. Les
atrocités commises lors de la guerre du Vietnam et les images des
déboires des soldats américains en Somalie ont
profondément marqué les esprits au sein de l'opinion publique
Américaine. S'engager dans une guerre impopulaire peut influencer
négativement les intentions de vote des citoyens et coûter
très cher aux gouvernements l'ayant menée. Ayant compris cela,
les gouvernements vont voir en l'externalisation un excellent outil pour mener
à bien leurs desseins sans la moindre contrainte.
Noam Chomsky dans son ouvrage « La Manufacture du
Consentement », explique qu'en démocratie, les gouvernements n'ont
guère besoin de la force pour contrôler leur population, la
création du consentement, notamment à travers la propagande et
les médias, est plus que suffisante. A ce niveau, les gouvernements
pourraient simuler l'humanitaire et la bienfaisance auprès de leur
opinion publique tout en confiant les tâches politiquement incorrectes
aux acteurs privés.
Sur ce point, la sous-traitance va se montrer d'une
utilité irrévocable. Permettant aux gouvernements de mener des
actions politiquement au bord du correct, les gouvernements se feront un
plaisir d'en faire un outil de divulgation des vérités, de
neutralité apparente et de désinformation et de manipulation des
opinions. En effet, ce processus va de paire avec la doctrine du zéro
mort adoptée de plus en plus par l'occident, vu que ces contractors
n'intègrent pas les statistiques des combattants tombés au
combat. Comme combattants marginaux, les contractors, en cas de bavure ou
d'insuccès sont plus faciles à sacrifier, et le
désintérêt voire le mépris de l'opinion publique et
des médias les rendent leur périssement plus facile et
politiquement moins couteux que les soldats réguliers. Dans le bourbier
irakien, personne ne semble à l'heure actuelle se soucier des plus de
1000 contractors ayant laissé la vie.
(26) P.W.Singer
http://www.courrierinternational.com/article/2007/10/25/comment-le-pentagone-est-devenu-accro-aux-mercenaires)
§2- Un instrument de politique
étrangère.
La possibilité de négliger l'opinion publique et
le contrôle parlementaire représente un avantage inouï pour
les gouvernements ayant recours aux SMP. Plusieurs de ces SMP, pour ne pas dire
la plupart, travaillent sous la houlette de leur gouvernement et certaines se
croient même confiées un devoir patriotique.
Soutenir les dictateurs les plus dépravés,
contribuer au maintien par la force de personnes physiques et morales non
désirées, préserver une influence dans des conflits sans y
être engagés directement en disposant d'hommes de main fiables et
fidèles autres que ses représentants officiels, ce sont là
des actes tout à fait possible, et sans le moindre coût politique
ou contrainte populaire et législative.
Aux Etats-Unis, l'utilisation de contractors a par exemple
permis à l'administration de s'immiscer dans les affaires d'autres Etats
de manière non officielle ou encore de contourner les limitations du
Congrès. En 2001, ce fut le cas en Colombie dans le cadre de la lutte
contre la drogue où le Département d'Etat a outrepassé la
limite fixée par le Congrès à 300 contractants civils en
ordonnant à DynCorp d'embaucher des pilotes
d'hélicoptères étrangers qu'il n'est pas obligé de
compter dans ses rapports, contrairement aux citoyens américains.
(27)
En outre, le contingent de contartors en Irak, n'agit pas
uniquement comme mécanisme multiplicateur de la main d'oeuvre
guerrière, sans avoir à se soucier des coûts politiques
traditionnellement que susciterait l'envoie supplémentaire de forces,
mais aussi à dépasser, les contraintes bureaucratiques et
institutionnelles. (28)
Dans sa dimension internationale, le recours aux SMP offre aux
gouvernements la possibilité de contourner les contraignantes
dispositions du chapitre 7 de la charte des Nations Unies, et de garder une
certaine neutralité par rapport à leur engagement dans tel ou tel
conflit. Ce fut notamment le cas des Etats Unis en Ex- Yougoslavie, où
ces derniers, désirant renverser le rapport de force défavorable
aux Etats sécessionnistes,
(27) CHRISTIAN MILLER, T., «Foreign Pilots Hired to Boost
U.S. Drug War», Los Angeles Times, 18 août 2001.
(28) E.L. GASTON, Mercenarism 2.0? The Rise
of the Modern Private Security Industry and Its Implications fot International
Humanitarian Law Enforcement, Harvard Internatioanl Law Journal, Volume
49, number 1, Winter
2008.
www.harvardilj.org/attach.php?id=134, p236.
mais également de préserver leur
neutralité de part leur participation aux négociations de paix
destinées à aboutir aux accords de «Dayton» ne
pouvaient mener d'action directe contre la Serbie (28). La solution
adoptée fut donc le recours à « MPRI ».
En plus, et comme l'observe certains auteurs, le mercenariat
et la sous-traitance constituent une prolongation du crime d'agression et une
menace pour la paix et la sécurité internationales (29).
(28) SARAH PERCY, INT'L INST. FOR STRATEGIC STUD., Regulating
The Private Security Industry 12-13 (2006); Michaels, Supra Note 76,
At 1025-29 Nn.61-82 and accompanying text.
(29) M. CHERIF BASSIOUNI, introduction to international criminal
law 144-45 (2003); see also g.a. res. 48/92, pmbl., u.n. doc.
a/res/48/92 (dec. 20, 1993) (classifying use of mercenaries as a threat to
peace).
§3- La question de l'impunité:
L'irresponsabilité des Etats et l'impunité des
individus coupables de dérives et d'exactions semblent être l'unes
des questions majeures posées par le phénomène de la
sous-traitance. Bien qu'en principe les Etats sont tenus responsables des
individus travaillant pour leur compte et ainsi répondre des actes de
ces derniers, il semble en pratique que cela soit difficilement applicable.
Nous pourrions même pousser l'analyse au point de dire, que le recours
aux SMP offre aux Etats un moyen d'échapper à toute
responsabilité.
Au niveau disciplinaire, les armées
régulières, sont des instituions dotées d'une discipline
et de normes bien précises, dont la violation est
sévèrement sanctionnée. Par ailleurs, en tant qu'acteur
principal au sein des conflits armés, ces dernières sont tenues
de respecter et de se soumettre aux dispositions du droit international
humanitaire. La violation de l'une de ses dispositions est susceptible
d'entrainer la responsabilité de l'Etat et les individus agissant en son
nom, se verront appliqués le droit pénal militaire interne.
Dans le cas des SMP et bien que l'Etat qui les contractent et
s'en sert est censé théoriquement répondre de leur acte et
en être responsable, cela est bien plus compliqué en pratique.
Comme secteur survenu dans un environnement sans le moindre encadrement
normatif concret, le principe de Nullum crimen, nulla poena sine
praevia lege poenali, semble régir le secteur et
encourager l'irresponsabilité et l'impunité qui lui sont
relatives.
De toutes les incalculables exactions commises par ces acteurs
privés, aucune ne semble échapper à la règle de
l'impunité, des fois même avec la tacite complicité des
gouvernements. En 1999, des agents de la société
DynCorp, employés par la force de police internationale des
Nations Unies dans les Balkans, ont été mêlés
à une affaire d'esclavage sexuel avec des mineures en Bosnie. Mis
à pieds dans un premier temps, les contractors responsables ont
été licenciés une fois le scandale
révélé à la presse.
Lors d'une de ses opérations de lutte anti-narco en
Colombie, la société Dyncorp avait abattu par erreur 17 civils
dont des enfants et du personnel religieux. Amené à se prononcer
sur cette bavure, les autorités américaines dirent tout
simplement qu'elles avaient à veiller sur le sécurité de
leurs ressortissants et non sur ceux des autres Etats.
En 2003, les autorités américaines avaient
délégué les séances d'interrogatoire au sein
de la prison d'Abu Grahib aux sociétés CACI International
et Titan Corp. Le scandale ayant
éclaté au grand jour, plusieurs militaires
furent condamnés conformément à la législation
militaire américaine. Ces derniers critiquèrent fortement le fait
que leurs homologues privés n'aient eu le moindre souci judiciaire par
rapport à cette affaire.
Le 16 septembre 2007, alors qu'ils escortaient un convoi
diplomatique à l'ouest de Bagdad, plusieurs employés de la
société Blackwater se sont retrouvés impliqués dans
la fusillade de 17 civils irakiens. Ils ont affirmé avoir agi en
situation de légitime défense, suite à une attaque
armée. Les témoins de la scène ont déclaré
au contraire que les contractants n'avaient pas été
préalablement agressés. Les circonstances de cette fusillade sont
restées floues et en décembre 2009, le parquet
fédéral américain a rejeté les charges pesant
contre les agents contractuels au motif d'irrégularités dans la
procédure criminelle. (Voir infra).
Un autre point à signaler, concerne le fait que les
dérives commises par les agents privés ne viennent guère
s'ajouter aux registres de celles commises par l'armée
régulière, ce qui doterait cette dernière d'une meilleure
image auprès du citoyen. Devant l'obligation de diaboliser,
discréditer l'ennemi et manipuler l'opinion, le gouvernement pourra
discrètement évincer sa responsabilité grâce
à l'opacité du secteur et à l'incohérence du cadre
normatif qui le régit.
En effet, la dilution de la responsabilité et le fait
de maintenir ses mains propres tout en délégant les tâches
susceptibles d'être gênantes à autrui semble être une
prérogative très intéressante, de laquelle
l'exécutif ne saurait lâcher prise aussi facilement. Devant
l'absence d'un cadre normatif effectif, la messéance et
inapplicabilité des normes existante, l'industrie militaire
privée demeure tout simplement incontrôlable.
Section 2 : Sur le plan Militaire.
Le recours aux SMP constitue une arme à double
tranchant à manier avec précaution et modération. Si elles
permettent aux armées de métiers de se concentrer sur le coeur de
la guerre en quête d'efficacité, notamment par le biais de la
délégation des opérations n'ayant pas trait à
l'usage létal de la force. Ces dernières peuvent également
représenter par leur nature entrepreneuriale, le mépris des
soldats réguliers et le manque de coordination, un risque potentiel pour
les Etats y ayant recours.
§1- La question de la fiabilité :
« Les mercenaires et les auxiliaires sont inutiles et
périlleuses ou mixte ; et si quelqu'un tient son Etat fondé sur
les armes mercenaires, il ne sera jamais ni ferme ni en sécurité,
parce qu'elles sont désunies, ambitieuses, sans disciplines,
infidèles, gaillardes parmi les amis, lâches parmi les ennemis :
point de craint de Dieu, pas de foi envers les hommes et l'on diffère la
ruine tant qu'on diffère l'attaque, et, dans la paix tu es spolié
par elles, dans la guerre par les ennemis. La cause de ce la est qu'ils n'ont
d'autre amour et d'autre cause qui les tienne au champ qu'un peu de gages, qui
ne sont pas suffisants pour faire qu'ils veuillent mourir pour toi. Ils veulent
bien être tes soldats tandis que tu ne fais pas la guerre, mais quand
vient la guerre ou s'enfuir ou s'en aller » (Nicolas Machiavel, Le
Prince Traduction de Marie Gaille-NIKODIMOV)
Bien que les notions de mercenaires et contractors
diffèrent l'une de l'autre, la célèbre citation ci-dessus
est loin d'être messéante à l'égard des seconds.
Malgré les nombreux avantages que puisse présenter la
sous-traitance, rien ne vaut l'obéissance, la fiabilité et
surtout la loyauté de l'armée régulière.
Les intérêts d'une entreprise, essentiellement
mesurées en termes de rentabilité et de bénéfice,
sont d'un ordre différent de l'efficacité politique de la
défense. Les soldats de l'armée régulière ne sont
ni des marchants ni des marchandises. Offrant à leurs citoyens le
service public relatif à la défense, ils obéissent
à une logique autre que la logique marchande.
Restant intimement liés à leur Etat patrie, ces
derniers et dans l'accomplissement de leur mission se basant
`'l'honneur», `'la loyauté», `'la
fidélité», `'l'amour»et `'la dévotion
inconditionnelle»envers leur Pays, et ne
peuvent en à aucun moment vendre ou louer leurs services au plus
offrant, encore moins sans le consentement des autorités auxquelles ils
obéissent.
Les SMP, et leurs contractors, contrairement aux soldats
réguliers, ne sont liés à leurs clients que par les liens
vénaux, et seul l'appât du gain et la maximisation des profits en
constituent la motivation, nul besoin d'affirmer qu'un contractor est loin de
donner la vie pour son client.
Plusieurs cas ont été rapportés où
ces derniers abandonnaient leur poste dès qu'ils estimaient que leur vie
se trouvait en danger ou remarquaient que la tâche à accomplir
n'était plus rentable. Un militaire de carrière serait puni pour
désertion; le contractor lui n'irait pas au-delà d'une
résiliation de contrat et d'un licenciement.
Nous pourrions citer à titre d'exemple le cas de
l'intervention de la Gurkha Security Guards (GSG) qui travaillait pour le
compte du gouvernement Sierra-léonais qui y avait fait recours dans le
cadre de sa lutte contre le RUF. Ayant subi de nombreuses pertes dont celle de
son commandant en chef, la compagnie résilia unilatéralement le
contrat et quitta le Sierra Léone, laissant le gouvernement à la
merci des rebelles.
La nature différente de ces deux entités peut
avoir des conséquences nonnégligeables sur le
théâtre des opérations et être susceptible de causer
plus de tort que de bien aux Etats qui les engagent.
§2- Manque de coordination et problèmes de
dépendance :
Ayant été les seuls maitres de la ligne de
front, les militaires se voient de plus en plus rejoints par leurs homologues
privés sur leur chasse gardée. L'ajout de forces
parallèles sur la ligne de front pourrait être susceptible de
générer certaines tensions entre ces deux corps de
métier.
Les SMP sont intimement liées aux armées
nationales, pour plusieurs raisons. L'une d'entre elles, concerne le fait
qu'elles y recrutent leurs dirigeants de même que du personnel
formé et expérimenté. Sur ce point, certains militaires
jugent déplorable le fait que leurs collègues vendent leur
savoir-faire acquis tout au long des années au sein de l'institution, au
plus offrant. Ils estiment que la privatisation corrompt les militaires et
ternit leur image aussi bien auprès de leurs homologues,
qu'auprès de l'opinion
publique(30). Ce qui engendre souvent un certain
mépris envers les contractors et qui sur le théâtre des
opérations, pourrait s'avérer très dangereux. A ce sujet
nombreux ont été les cas où les contractors ont
été laissés à leur merci lorsqu'ils faisaient
l'objet d'attaques d'insurgés, sans que l'armée
régulière ne se manifeste de quelque manière que se
soit.
Un autre problème susceptible d'entraver la
coordination entre armée régulière et armées de
contractors est l'absence de la chaine de commandement au sein de la structure
organisationnelle des SMP. Contrairement aux militaires qui sont soumis
à une discipline assez stricte rigide et régis selon une
hiérarchie bien déterminée, les contractors n'ont qu'un
simple statut de salarié, ils constituent une force parallèle et
non pas une force assujettie à l'armée régulière.
En cas de désobéissance ou de faute grave, la pire des sanctions
encourues, serait le licenciement.
A côté du manque de coordination, un recours
excessif aux SMP peut entrainer l'addiction de l'Etat qui en fait usage, au
point de ne plus pouvoir s'en passer. C'est notamment le cas du gouvernement
américain qui n'est actuellement plus en mesure d'assurer ses missions
les plus fondamentales : mener et gagner une guerre (31). L'externalisation
massive des opérations militaires a créé une
véritable dépendance envers les SMP.
Comme le signale Singer, à en juger par la situation en
Irak, il semble que les Etats-Unis soient prisonniers d'un cercle vicieux. Il
leur est désormais impossible de mener la guerre sans ces contractants
militaires privés, et impossible de la gagner avec eux.
(30) Colonel Bruce grant, op.cit.
(31)P.W.Singer, Retour sur le scandale Blackwater. Comment le
Pentagone est devenu accro aux Mercenaires.
http://www.courrierinternational.com/article/2007/10/25/comment-le-pentagone-est-devenu-accro-aux-mercenaires
Section 3 : Des Enjeux Economico-financiers :
§1- Des perspectives économiques
intéressantes.
L'externalisation propose des perspectives économiques
intéressantes aussi bien pour les Etats que pour les individus
s'engageant dans les rangs des SMP.
Sur le plan économique et financier, la principale
raison pour laquelle les gouvernements ont recours à ce processus
concerne la réduction des dépenses publiques relatives à
la défense. En effet, les SMP qui sont recrutées pour des
missions bien précises sont d'un moindre coût que l'armée
régulière. Leurs employés sont payés à la
tâche et ne disposent pas du statut de fonctionnaire comme les soldats
réguliers, ce qui permet à l'Etat contractant de faire fi des
énormes dépenses que viendrait à présenter le
maintien d'une armée. Cependant, cette rentabilité reste relative
et dépend du type de prestation confiée aux contractors et
surtout de la durée des contrats. Signalons que plus la durée du
contrat est longue, moins rentable il sera.
En ce qui concerne les individus, nombreux sont ceux qui
après de bons et loyaux services rendus à la mère patrie
décident de se reconvertir dans le secteur privé, principalement
en quête de plus d'indépendance et de meilleures perspectives
salariales, en prenant part à un secteur générant plus de
200 milliards de dollars de bénéfices par an.
Cependant, si certains contractors parviennent à
décrocher des contrats aux alentours de 25000 dollars par mois, avec une
assurance vie ou incapacité se situant entre 1,5 et 2 millions de
dollars, tel n'est pas le cas des plus de 30000 contractors se trouvant en
Irak. (32)
Les contractors possèdent généralement
des statuts de journaliers, ils sont payés à la journée de
travail. En d'autres termes, pas de travail, pas de solde. En outre ces
derniers font souvent objet de discrimination salariale sur la base de leur
pays d'origine. Ainsi un contractors africain ou sud-américain percevra
moins qu'un européen ou un américain, violant ainsi les
dispositions de la convention 111 de l'Organisation Mondiale du Travail
relative à la non-discrimination entre salariés. Ajoutons
également, que la majorité des contractors et contrairement aux
soldats réguliers, ne sont pas pris en charge par leur
(32) Des Gardes Suisses à Blackwater: Mercenaires et
auxiliaires d'hier et d'aujourd'hui.
http://www.securitymanagementinitiative.org/index.php?option=com
docman&task=doc download&gid=378&Itemid=&lang=fr, p109.
recruteur : logement, nourriture, accidents, maladie... ce qui
suppose bien sûr des dépenses supplémentaires.
Sur la base de ce qui précède, nous pourrions dire
que le bilan des alléchantes perspectives proposées par le
secteur de l'Industrie Militaire Privée reste très
mitigé.
§2- Implications au sein du Marché de
l'armement.
L'Industrie de la sécurité est venue couvrir les
pertes survenues au complexe militaro-industriel après la fin de la
guerre froide (33). En effet, nombreuses sont les firmes d'armements
à avoir créé des SMP et qui cherchent par le biais de
celles-ci à perpétuer et à accroitre la demande de leurs
produits sur le marché mondial.
De nombreuses SMP ne sont en fait que des filiales de holdings
spécialisés dans divers domaines (exploitation minière,
pétrolière, télécommunication, MPRI pour L3-
Communications ...) et de nombreux groupes de défense. (KBR pour
Halliburton...). Ces SMP ne représenteraient pas uniquement des hommes
de mains fiables et efficaces, mais seraient également une façon
plus ou moins indirecte d'assurer certains marchés et certaines ventes.
Ce qui viendrait à dire, que le recours aux SMP constitue une
continuation de leur politique économique par d'autres moyens. Les deux
graphiques suivants illustrent parfaitement ces propos :
(33) P.W.Singer,Op.cit, p79.
(34)
http://cartographie.sciences-po.fr/cartotheque/54D
fournisseurs armes 2004.jpg
§3- Stabiliser l'instable ?
En plus d'être un mécanisme assurant aux groupes
d'armements d'écouler leurs produits au sein des zones d'activité
de leur filiales, les SMP permettent à d'autres multinationales
d'exploiter les richesses naturelles au sein des zones les plus instables de la
planète. Sur ce point, le département de défense a
recensé plus de 74 pays où la sécurité physique
constituait un problème majeur. Cependant, pour certaines
multinationales soucieuses d'exploiter les ressources minières et
pétrolières des Etats défaillants incapables de fournir
les normes sécuritaires élémentaires, une telle carence
sécuritaire n'est aucunement synonyme de contrainte.
Qu'il s'agisse d'une zone de guerre ou zone de paix le recours
aux SMP va s'avérer être un moyen extrêmement efficace
permettant à ces dernières de mener à bien leur projets.
Par conséquent, l'investissement accru au sein des zones les plus
dangereuses au monde va contribuer davantage à la
prospérité de l'industrie. Ainsi, grâce aux SMP, les
multinationales peuvent parvenir à créer une certaine
stabilité au plein milieu d'un conflit. Le groupe Halliburton avait
reçu plus de 2OO millions de dollars pour l'élaboration de
projets relatifs à l'exploitation des ressources
pétrolières au sein de l'enclave du Cabinda en Angola. Cela
n'aurait jamais pu être accompli sans la protection fournie par la firme
« Airscan » contre les rebelles contrôlant la région.
Si la protection fournie aux Multinationales n'était pas
aussi efficace, ces groupes
(34')
http://cartographie.sciences-po.fr/cartotheque/D04d_Firmes_armement_2008.jpg
ne prendraient pas d'aussi gros risques au sein de
régions aussi instables et aussi dangereuses. Ce cas de figure se
répète également en Algérie et en Colombie,
où certaines compagnies pétrolières dédient
respectivement 9% et 6% de leur budget pour s'offrir des services
sécuritaires. Les multinationales, ont de plus en plus tendance à
prendre leur sécurité en main, vu que les gouvernements des Etats
où elles sont appelées à s'installer ne sont pas à
même de leur fournir la sécurité nécessaire.
§4- le nébuleux marché des
SMP.
Le marché de l'industrie militaire privée semble
être un marché gré à gré plus qu'un
marché organisé. Par marché organisé, nous
entendons, un marché qui a une localisation géographique
précise, qui propose des produits et services standardisés et qui
se charge de mettre en contact des intervenants (35).
En outre, il semble emprunter au capitalisme la transgression
des règles et le manque de transparence. En effet comme y fait allusion
Fernand Braudel, contrairement à l'économie de marché qui
renvoie à des échanges de proximité intervenant dans des
marchés réglementés et transparents, le capitalisme,
consiste à contourner les règles de la concurrence pour
dégager des profits exceptionnels. Il est alors à la recherche de
positions de monopole, obtenues notamment en allongeant le circuit commercial
jusqu'à le rendre opaque.(36)
De ce fait, le secteur est loin de se rattacher aux cinq
principes de la concurrence pure et parfaite, prônés par les
économistes libéraux et qui sont : l'atomicité du
marché, l'homogénéité des produits, la libre
entrée et la libre sortie sur le marché, la mobilité des
facteurs de production et enfin la transparence de l'information.
En résumé, comme le dirait P.W. Singer, nous
sommes devant une distorsion de l'économie du marché qui
révulserait Adam Smith, une imbrication du monde des affaires et du
gouvernement qui effraierait les Pères Fondateurs, et une
évolution du complexe militaro-industriel qui doit faire se retourner
dans sa tombe le président Eisenhower. Sans changement, c'est une
recette pour une mauvaise politique, et de mauvaises affaires. (37)
(35) Zvi Bodie et Robert Merton, Finances, Nouveaux
Horizons, 2ème éd, p 525.
(36) (Xavier de la Vega, Qu'est-ce que le Capitalisme ?,
Sciences Humaines, La grande Histoire du Capitalisme,
http://www.scienceshumaines.com/qu-est-ce-que-le-capitalisme_fr_25417.html).(37)The
«Enron Pentagon», Boston Globe, 19 octobre 2003, in RENOU Xavier,
CHAPLEAU Philppe, MADSEN Wayne et VERSCHAVE François-Xavier, op.cit.
- DEUXIEME PARTIE -
DE L'INQUIETANTE CARENCE
NORMATIVE REGISSANT LE SECTEUR
LES SOCIETES MILITAIRES PRIVEES.
Chapitre III: Insuffisance et inapplicabilité des
normes existantes.
Section 1 : Au niveau International. §1- DIH
:
Le Droit international Humanitaire, est l'ensemble des
règles applicables en temps de guerre, destinées à
restreindre les souffrances inutiles et à protéger la personne
humaine selon la catégorie à laquelle elle appartient. Cette
catégorisation constitue par ailleurs une de ses principales
spécificités.
Comme nouvelle catégorie de combattants, les
contractors peinent à trouver leur place. En effet, s'agissant d'un
phénomène relativement nouveau, aucune disposition du droit de
Genève ne saurait aborder clairement la place occupée par ces
individus au sein de ses dispositions.
Jouissant d'une mauvaise réputation au sein de leurs
zones d'action, les contractors sont facilement assimilés à des
mercenaires. Cette situation est à l'origine d'un amalgame susceptible
de freiner toute avancée sur la question. En pratique, le statut de ce
dernier est susceptible de changer en fonction des stipulations contractuelles
consenties entre la firme pour laquelle il travaille et le client.
Eu égard à ce qui précède, nous
essaierons de situer le contractor au sein des dispositions du Droit
International Humanitaire.
1- Le contractor: Un Mercenaire ?
L'article 47 du protocole additionnel aux Conventions de
Genève du 12 août 1949 relatif à la protection des victimes
des conflits armés internationaux commence par renier à ce
dernier le statut de combattant et en conséquent celui de prisonnier de
guerre. En outre, il établit une liste de six conditions cumulatives qui
sont censées donner une définition au terme de mercenaire et qui
sont énumérées ci-dessous :
a) être spécialement recruté dans le
pays ou à l'étranger pour combattre dans un conflit
armé;
b) prendre une part directe aux hostilités;
c) prendre part aux hostilités essentiellement en
vue d'obtenir un avantage personnel et à qui est effectivement promise,
par une Partie au conflit ou en son nom, une rémunération
matérielle nettement supérieure à celle qui est promise ou
payée à des combattants ayant un rang et une fonction analogues
dans les forces armées de cette Partie;
d) n'être ni ressortissant d'une Partie au conflit, ni
résident du territoire contrôlé par une Partie au
conflit;
e) ne pas être membre des forces armées d'une
Partie au conflit; et
f) ne pas avoir été envoyé par un Etat
autre qu'une Partie au conflit en mission officielle en tant que membre des
forces armées dudit Etat.
La catégorie de contractors la plus proche à
cette définition est celle travaillant pour le compte des « firmes
militaires prestataires » comme les salariés d'Executive Outcomes
ou de la Gurkha Security Guards.
Aussi claire que puisse paraître cette
définition, chose est à signaler qu'elle manque gravement de
réalisme et demeure tout à fait hors d'usage, du fait qu'il est
tout simplement impossible de rencontrer un individu remplissant les six
critères à la fois. Hugh Brooks, président de
l'International Stability Operations Association (voire infra), trouve
que la définition donnée au mercenaire par les instruments
internationaux est une facétie tout simplement. Le Professeur Geoffrey
Best ajoute à son tour, que : « tout mercenaire qui ne
parviendrait pas à s'exclure de cette définition mérite
d'être abattu, et son avocat avec lui ! »(38)
D'autre part, l'article ne fait à aucun moment allusion
à une possibilité de sanction, il se contente uniquement de
préciser que le mercenaire en cas de capture ne disposera pas de
l'avantageux statut de prisonnier de guerre, et demeurera à la merci de
la puissance détentrice qui est dans le droit de le juger pour le crime
de mercenariat et lui appliquer ses dispositions pénales internes.
2- Le contractor: Un Combattant ?
A la lumière de l'article 4 de la 3ème
convention de Genève, relatif au traitement des
(38)Geoffrey BEST, Humanity in Warfare : the Modern History
of International Law of Armed Conflicts, Londres, Weidenfeld and
Nicholson, 1980, p.238.
prisonniers de guerre, les contractors semblent relativement
trouver place, surtout ceux travaillant pour le compte des
Sociétés Militaires de Soutien, du genre de KBR.
L'article relatif aux personnes bénéficiant du
statut de prisonnier de guerre dispose dans sont 1er paragraphe al 4
et 5 que :
4. Les personnes qui suivent les forces armées
sans en faire directement partie, telles que les membres civils
d'équipages d'avions militaires, correspondants de guerre, fournisseurs,
membres d'unités de travail ou de services chargés du
bien-être des forces armées, à condition qu'elles en aient
reçu l'autorisation des forces armées qu'elles accompagnent,
celles-ci étant tenues de leur délivrer à cet effet une
carte d'identité semblable au modèle annexé;
5. Les membres des équipages, y compris les
commandants, pilotes et apprentis, de la marine marchande et les
équipages de l'aviation civile des Parties au conflit qui ne
bénéficient pas d'un traitement plus favorable en vertu d'autres
dispositions du droit international;
En effet, le fait pour ces contractors et comme en dispose
l'al 4, les employés des firmes militaires de soutien et même de
consulting peuvent parfaitement trouver leur place au sein du dit article et
bénéficier contrairement à leurs collègues des
firmes militaires prestataires, des avantageuses dispositions relatives au
statut de prisonnier de guerre.
3- Le Contractor: Un Civil?
La tendance voudrait que la grande majorité des
contractors veuillent se définir comme civils, et
bénéficier de ce fait de la protection de la
4ème convention de Genève relative à la
protection de ces derniers. Cependant, bien qu'il soit relativement bien
protégé, le statut de civil suppose plusieurs exigences. La
principale : l'interdiction formelle du port d'armes et la participation aux
hostilités. Or, de part la nature de leur travail, les contractors sont
appelés à porter systématiquement les armes et à
participer au combat dans certains cas. Par conséquent, il est
très difficile de pouvoir concéder à ces individus le
statut de civil.
Ne trouvant pas de place précise au sein des
dispositions du DIH, et par la complexité des tâches qu'il est
appelé à accomplir et les différentes stipulations
contractuelles qu'il est appelé à remplir, la seule protection
plausible et applicable à ce
dernier demeure probablement l'article 3 commun aux quatre
conventions de Genève portant sur les standards humanitaires applicables
à tout individu, de part sa simple condition d'Etre Humain.
§2- OUA :
Ayant subi les conséquences et les ravages des
activités mercenaires sur leur territoire, conscients de la grave menace
qu'elles constituent pour l'indépendance, la souveraineté, la
sécurité, l'intégrité territoriale et le
développement harmonieux, et préoccupés du danger que
représentent ces activités pour l'exercice légitime du
droits des peuples africains sous domination coloniale et raciste, de la lutte
pour leurs indépendance et autodétermination, les membres de
l'OUA décident de se prémunir contre ce fléau par le biais
de l'adoption de la Convention sur l'Elimination du Mercenariat en Afrique en
date du 3 juillet 1977.
La convention reprend grosso modo la même
définition donnée au mercenaire au sein de l'article 47 du
protocole additionnel, avec néanmoins une légère nuance en
ce qui concerne la partie relative à la participation aux
hostilités et la compensation pécuniaire. La convention se
contente de citer ces deux critères sans chercher à donner trop
de précisions et réaffirme le statut de combattant illégal
attribué au mercenaire par le protocole.
L'une des principales nouveautés de la convention
concerne le fait que le mercenariat soit perçu en tant que crime contre
la paix et la sécurité et est de ce fait,
sévèrement punissable.
Ne jouissant pas du statut de combattant et par
conséquent de celui de prisonnier de guerre en cas de capture, les Etats
se réservent le droit d'appliquer à ce dernier les sanctions
nécessaires les plus sévères y compris la peine capitale,
comme en dispose l'article 7 de la convention.
Dans son article 6, la convention définit
également un ensemble d'obligations que les Etats parties sont tenus de
respecter et qui peuvent être énumérées de la
façon suivante :
a) empêcher que ses nationaux ou des étrangers
se trouvant sur son territoire commettent l'une des infractions
prévues à l'article 1er de la présente convention;
b) empêcher l'entrée ou le passage sur son
territoire de tout mercenaire et de tout équipement qui lui est
destiné;
c) interdire sur son territoire toute activité
d'organisations ou d'individus qui utilisent les mercenaires contre un Etat
africain, membre de l'Organisation de l'Unité Africaine, ou contre des
peuples africains en lutte pour leur libération;
d) communiquer aux autres membres de l'Organisation de
l'Unité Africaine, soit directement, soit par l'intermédiaire du
Secrétariat Général de l'OUA, toute information relative
aux activités des mercenaires, dès qu'elle sera parvenue à
sa connaissance;
e) interdire sur son territoire le recrutement,
l'entraînement, l'équipement ou le financement de mercenaires et
toutes autres formes d'activités susceptibles de favoriser le
mercenariat;
f) prendre toutes mesures législatives ou autres
nécessaires à la mise en oeuvre immédiate de la
présente convention.
En outre, la convention induit en cas de non respect de l'une
de ses dispositions, la responsabilité des Etats et celle de leurs
ressortissants ayant été reconnus coupables de telles
activités.
Aussi innovante que soit la convention africaine de 1977, il est
à affirmer que certaines de ses dispositions laissent à
désirer.
Une lecture attentive de la convention permet de relever
certaines failles, notamment dans son article premier al 2, qui dispose que
:
« Commet le crime de mercenariat l'individu, groupe ou
association, le représentant de État ou l'État
lui-même qui, dans le but d'opposer la violence armée à
un processus d'autodétermination à la stabilité ou
à l'intégrité territoriale d'un autre État,
pratique l'un des actes suivants:
a) Arbitrer, organiser, financer, assister, équiper,
entraîner, promouvoir, soutenir ou employer de quelque façon que
ce soit des bandes de mercenaires;
b) S'enrôler, s'engager ou tenter de s'engager dans
les dites bandes;
c) Permettre que dans les territoires soumis à sa
souveraineté ou dans tout autre lieu sous son contrôle, se
développent les activités mentionnées dans l'alinéa
a ou accorder des facilités de transit, transport ou autre
opération des bandes susmentionnées.»
Nous pouvons observer une ferme condamnation du mercenariat,
mais la convention reste néanmoins restreinte et limité au
mercenariat auquel ont eu recours les grandes puissances pendant les guerres
d'indépendance de l'ère postcoloniale.
Elle ne fait aucunement allusion au recours d'un gouvernement
souverain à des activités mercenaires, pour son propre compte,
son propre intérêt et dans la limite de son territoire. En
d'autres termes, un gouvernement souverain, qui dans la limite de son
territoire et dans le but de préserver son ordre interne y fait
recours. Le silence de la convention sur cette catégorie de mercenariat,
fait qu'il soit tout à fait tolérable aux yeux de cette
dernière.
§3-ONU :
Inspirée par la convention de l'OUA sur
l'élimination du mercenariat en Afrique, et son caractère
condamnatoire, l'Assemblée générale des Nations Unies
adopte, et ce juste après l'assassinat du président Comoriens
Ahmed Abdallah, la convention internationale contre le recrutement,
l'utilisation, le financement et l'instruction des mercenaires en date du 4
décembre 1989.
Comme pour son homologue africain, le texte de la convention
onusienne reprend les mêmes conditions cumulatives relatives au statut de
mercenaire, ainsi que d'autres disposition relatives à la nature
criminelle de l'activité et le risque que représente cette
dernière sur la paix, la stabilité internationale et sur le droit
des peuples à l'autodétermination ... A ce niveau la ressemblance
entre les deux textes peut sembler assez frappante, cependant la convention ne
fait qu'allusion « au crime de mercenariat » et ne prévoit
aucune sanction, laissant ainsi le choix aux Etats parties d'agir selon leurs
dispositions internes.
On pourrait aller plus loin et affirmer que la convention ne
constitue rien d'autre qu'un simple «Ersatz» du texte africain,
ajoutons à cela son manque de clarté et de précision ainsi
que sa faible prévalence et tardive entrée en vigueur.
Adoptée en 1989, la convention internationale contre le
recrutement, l'utilisation, le financement et l'instruction des mercenaires
n'est en effet entrée en vigueur qu'en 2001 et le nombre d'Etats parties
ne dépasse pas les 32, sans compter le fait qu'aucune des grandes
puissances n'y a adhéré. (39)
A titre récapitulatif, nous pourrions reprendre
certains des propos du juge Richard Goldstone, qui affirme que ni la convention
des Nations Unies ni le Protocole Additionnel ne contiennent des dispositions
réprimant les Etats ayant recours au mercenariat. Dans le cas où
de telles dispositions puissent être proposées, les grandes
puissances refuseraient d'en adopter considérant que les Etats ne sont
pas censés contrôler et ne peuvent contrôler les actes de
leurs concitoyens à l'Etranger. En outre il réaffirme le
caractère obsolète et hors d'usage des définitions
données à la notion de mercenaire.(40)
Enfin, il est à rappeler que, par sa complexiste et sa
dualité, le secteur de l'industrie militaire privée pose
problème. Son appartenance au militaire et à l'économique,
suppose que ce dernier soit régi aussi bien par le droit international
des Droits de l'Homme que par le droit commercial international.
(39)
http://www.icrc.org/dih.nsf/WebSign?ReadForm&id=530&ps=P
(40) E.L. Gaston, op.cit, p232.
Section 2 : Un manque de cohérence au niveau
interne.
Au niveau interne, la régulation connait
également plusieurs entraves et souffre d'un manque de cohérence
et de pertinence, qui pourrait probablement être dû à un
certain manque de volonté politique de la part de certains Etats
à adopter des normes régulatrices contraignantes, efficaces et
applicables. D'autre part, la complexité du secteur contribue à
rendre les Etats totalement impuissants. Toutefois, au sein de cette section
nous essaierons d'aborder certaines des tentatives ayant été
adoptées au sein de l'ordre interne de certains Etats.
§1- Les Déclarations de Neutralité
:
Les premières tentatives d'instauration d'un cadre
normatif destiné à restreindre l'activité mercenaire
prirent la forme «Déclarations de Neutralité » ou
«Neutrality Acts ». Ces dernières constituaient des
dispositions législatives visant à conserver la neutralité
des Etats à l'égard de l'engagement ou la participation de leurs
ressortissants ou de leurs résidents à des actions armées
à l'étranger et devant lesquels ils avaient déclaré
leur neutralité. On retrouve les origines d'une telle loi aux Etats Unis
avec le «Neutrality Act » de 1794, destiné à interdire
la participation des ressortissants américains dans un conflit
armée contre un Etat en paix avec les Etats Unis.
La Grande Bretagne adopte en 1870 le «Foreign Enlistment
Law » ou la Loi sur l'enrôlement à l'étranger qui,
sanctionne le recrutement de mercenaires sur le territoire national, et
interdit aux sujets britanniques de rejoindre les forces armées d'un
pays en guerre contre un pays qui est en paix avec la Grande-Bretagne (41).
§-2 Le cadre répressif interne:
Par `'cadre répressif interne», nous sous-entendons
l'ensemble des normes
(41)If any person, without the license of Her Majesty, being a
British subject, quits or goes on board any ship with a view of quitting Her
Majesty's dominions, with intent to accept any commission or engagement in the
military or naval service of any foreign state at war with a friendly state,
or, whether a British subject or not, within Her Majesty's dominions, induces
any other person to quit or to go on board any ship with a view of quitting Her
Majesty's dominions with the like intent,--He shall be guilty of an offence
against this Act, and shall be punishable by fine and imprisonment, or either
of such punishments, at the discretion of the court before which the offender
is convicted;
internes adoptées au sein des Etats et qui se
rattachent directement aux activités mercenaires dans le but est de les
sanctionner et les interdire. Comme exemple nous pourrions prendre le cas de la
Belgique, qui suite aux actions commises par certains de ses ressortissants au
Congo dans les années 60, adopta en 1979 des dispositions visant
à interdire le recrutement de mercenaires et toute autre activité
assimilable. A la Belgique pourrait également s'ajouter la France dont
l'article 436 du code pénale sanctionne l'activité avec des
peines allant jusqu'à 5 ans de prison et une amende allant
jusqu'à 75000 euros (42).
§3- Régulation de l'Assistance Militaire :
(cas de l'Afrique du Sud).
Les multiples actions et interventions menées par
Executive Outcomes en Angola, et le préjudice causé par cette
dernière non seulement à l'image mais également aux
intérêts nationaux et internationaux de Pretoria, ont mené
l'Afrique du Sud à entreprendre les mesures nécessaires pour
réprimer et interdire le Mercenariat, et qui eurent pour effet
immédiat, la dissolution d'Executive Outcomes.
L'article 98 (b) (43) de la constitution
sud-africaine prévoit qu'afin de vivre en paix et en harmonie, la
participation des citoyens sud-africains à un conflit armé aussi
bien national qu'international est formellement interdite sauf exception
d'ordre constitutionnel ou législatif.
C'est dans l'objectif de compléter cette disposition
constitutionnelle que le gouvernement de Nelson Mandela adoptera le
«Regulation of the Foreign Military Assistance Act »
(44) en 1998, afin de réprimer fermement le Mercenariat et
réguler l'assistance militaire.
La loi dispose dans son article 2, qu'il est formellement
interdit au sein de la république sud-africaine, de recourir, de
financer, de former ou de s'engager dans une
(42) Est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 Euros
d'amende le fait : 1° Par toute personne, spécialement
recrutée pour combattre dans un conflit armé et qui n'est ni
ressortissante d'un Etat partie audit conflit armé, ni membre des forces
armées de cet Etat, ni n'a été envoyée en mission
par un Etat autre que l'un de ceux parties au conflit en tant que membre des
forces armées dudit Etat, de prendre ou tenter de prendre une part
directe aux hostilités en vue d'obtenir un avantage personnel ou une
rémunération nettement supérieure à celle qui est
payée ou promise à des combattants ayant un rang et des fonctions
analogues dans les forces armées de la partie pour laquelle elle doit
combattre ; 2° Par toute personne, spécialement recrutée
pour prendre part à un acte concerté de violence visant à
renverser les institutions ou porter atteinte à
l'intégrité territoriale d'un Etat et qui n'est ni ressortissante
de l'Etat contre lequel cet acte est dirigé, ni membre des forces
armées dudit Etat, ni n'a été envoyée en mission
par un Etat, de prendre ou tenter de prendre part à un tel acte en vue
d'obtenir un avantage personnel ou une rémunération
importants.
(43)
http://www.info.gov.za/documents/constitution/1996/a108-96.pdf
activité mercenaire. Cette dernière y est
définie comme la participation directe dans un conflit armé en
tant que combattant, pour son profit personnel. D'autre part, aucun citoyen
sud-africain ou résident ou sociétés, ne pourront
prêter assistance militaire sans le consentement et l'autorisation des
autorités compétentes, à savoir : le ministère de
la Défense et le Comité National de Contrôle des Armes
Conventionnelles et qui peuvent la retirer à tout moment. L'autorisation
ne pourra être attribuée si cette assistance:
a) Est de quelque manière que ce soit, en conflit
avec les obligations internationales de la République ;
b) Aboutit à de graves violations des droits de
l'homme et aux libertés ;
c) Menace la paix et la stabilité de la région
où ces activités sont susceptibles d'être menées, ou
influence négativement le rapport de force au sein de cette
région ;
d) Soutient ou encourage le terrorisme ;
e) Contribue à l'intensification et à la
recrudescence des conflits régionaux ;
f) Porte atteinte aux intérêts nationaux ou
internationaux de la république.
Cette procédure d'autorisation s'effectue de la
façon suivante : Après consultation du comité national de
contrôle des armes conventionnelles sur le principe de la vente et des
services militaires et de sécurité, le ministre de la
défense examine au cas par cas le contrat de prestation de services
militaires avant son acceptation ou son refus.
Ces autorisations et ces rejets devront et conformément
à l'article 7, être justifiées au regard des principes de
droit international public, et fondées sur des considérations de
préservation de la paix et de protection des droits de l'homme. En
outre, des peines sont prévues en cas de violations et de non respect de
l'une des dispositions de la loi. L'article 8 en effet, prévoit des
peines allant de l'amende à l'emprisonnement ou les deux dans certains
cas. Le cas échéant, tout individu accusé et
déclaré coupable se doit de coopérer et de fournir tout
les détails et informations disponibles sur le matériel
utilisé par ce dernier (armement, uniforme, véhicule,
équipement...)
Un autre point à signaler, concerne l'article 9 relatif
à la compétence
(44) Regulation of the Foreign Military Assistance Act,
Act n° 15, 1998, Government Gazette, n° 18912, 20 mai 1998.
Consultable sur le site :
www.info.gov.za/gazette/acts/1998/a15-98.pdf
extraterritoriale des tribunaux sud-africains, qui dispose que
ces derniers sont aptes à juger toutes personnes ayant outrepassé
les dispositions en dépit du fait que les infractions aient
été commises en dehors du territoire sud-africain,
exceptés les ressortissants étrangers ayant commis ces actes en
dehors du territoire.
§4- Le contrôle sur la fabrication, la
vente et l'exportation de biens et de services de défense:
Cette catégorie, au sein de laquelle nous prendrons
comme exemple le cas étasunien, fait référence aux
prestations militaires incluses dans le cadre des activités relatives
à la fabrication, la vente et l'exportation de bien et service de
défense. Elle vise particulièrement à contrôler les
services prêtés par les SMP américaines auprès des
états acquéreurs de matériel militaire de fabrication
américaine.
Ce contrôle sur les SMP est effectué par le
département d'État sur la base de la loi sur le contrôle
des exportations d'armes de 1968 (Arms Export Control Act)
(45) et la réglementation sur le trafic international d'armes
ITAR (International Trafficking of Arms Regulations).
(46) Dans ce cadre, « quiconque fabrique ou exporte des
articles militaires ou bien fournit des services militaires » a
l'obligation de s'inscrire au Bureau de contrôle de l'industrie de la
défense du département d'État (47). La
prestation de service militaire est définie comme la «
prestation d'une assistance - incluant l'entraînement - de
ressortissants étrangers, tant aux États-Unis qu'à
l'étranger, pour la conception, le développement, la
fabrication(...) ou l'utilisation d'articles de défense (...)
(45) La section 2778 de l'Arms Export Control Act
investit le président de l'autorité de contrôler les
exportations d'armes et assimilées, mais cette compétence a
été déléguée au Secrétaire
d'État en vertu de l'Executive Order 11958. Initialement, la
loi ne concernait que les exportations de matériel militaire. Son
domaine matériel d'application a été étendu
à la vente de services militaires en 1980.
Les dispositions de l'Arms Export Control Act sont
insérées dans le United States Code, titre 22, sections
2751 à 2799, qui peut être consulté sur le site :
http://uscode.house.gov/search/criteria.shtml
(46) Les dispositions de l'International Trafficking of Arms
Regulations sont insérées dans le Code of Federal
Regulations, titre 22, sections 120 à 130, qui peut être
consulté sur le site :
http://www.gpoaccess.gov/cfr/index.html
(47) Code of Federal Regulations, titre 22, section
122-1 (a) : « Any person who engages in the United States in the business
of either manufacturing or exporting defense articles or furnishing defense
services is required to register with the Office of Defense Trade Controls.
l'entraînement militaire d'unités et de
forces étrangères, régulières ou
irrégulières » (48). Les sociétés
militaires privées souhaitant exécuter un contrat à
l'étranger doivent ensuite obtenir l'autorisation du même
organisme.
Cependant, et comme cela est indiqué par nombreux
observateurs, malgré sa portée relativement évidente,
l'ITAR manque de clarté sur certains points et les licences
accordées ne comportent pas de clauses de surveillance. Ce sont les
représentants américains à l'étranger qui doivent
s'assurer de la bonne exécution du contrat mais personne n'a la charge
exclusive du suivi des SMP et de leurs activités. De plus, les
restrictions aux contrats nécessitant l'accord préalable du
législatif, peuvent être facilement contournées par les
SMP.
§5- Difficultés à gérer la
nature transnationale du secteur de l'industrie militaire
privée:
Aussi efficaces que puissent paraître les tentatives de
régulations internes, il restera très difficile de pouvoir
contrôler le secteur de l'industrie militaire privée dans son
ensemble. Un autre problème concerne le fait que la majorité des
mesures adoptées par les Etats au niveau interne, ne vise en quelque
sorte qu'à réprimer une certaine catégorie de mercenariat.
C'est-à-dire, que ne sont condamnés que les individus ne pouvant
pas être contrôlés par leur Etat d'origine et susceptibles,
lors de l'accomplissement de leur tâche, de porter atteinte à ses
intérêts.
Tout porte à dire que, sans la coordination d'efforts
et une coopération efficace et effective entre les Etats, l'adoption
d'instruments relatifs à la régulation, limitation et
répression du mercenariat et autres activités analogues, ne
pourra rester que lettre morte.
(48) Ibid., titre 22, section 120-9 : « (a)
Defense service means:
(1) The furnishing of assistance (including training) to foreign
persons, whether in the United States or abroad in the design, development,
engineering, manufacture, production, assembly, testing, repair, maintenance,
modification, operation, demilitarization, destruction, processing or use of
defense articles;
(2) The furnishing to foreign persons of any technical data
controlled under this subchapter (see §120.10), whether in the United
States or abroad; or (3) Military training of foreign units and forces, regular
and irregular, including formal or informal instruction of foreign persons in
the United States or abroad or by correspondence courses, technical,
educational, or information publications and media of all kinds, training aid,
orientation, training exercise, and military advice. »
Chapitre IV : Portées et limites de l'adoption
d'un cadre régulateur adéquat.
Section 1 : De la Portée des initiatives
entreprises.
§-1 Le Document Montreux:
Comme il tend à se définir, le
`'Document de Montreux sur les obligations juridiques pertinentes et les bonnes
pratiques pour les États en ce qui concerne les opérations des
entreprises militaires et de sécurité privées
opérant pendant les conflits armés»du 17 septembre
2008 est le fruit d'une initiative conjointe lancée par le CICR et de la
Suisse. Il a été élaboré grâce à la
participation d'experts gouvernementaux de plusieurs Etats à l'occasion
de réunions étalées de 2006 à 2008. Il comporte
deux parties. Au sein de la première partie, il rappelle les obligations
qu'incombent aux États, et aux SMP, de même qu'à leur
personnel au regard du droit international et se permet d'emmètre
certaines recommandations au sein de la deuxième.
1- Des Etats et de leurs Obligations:
Bien qu'il n'ait aucune valeur contraignante et qu'il ne fasse
que rappeler certaines des obligations auxquelles sont tenues les acteurs des
conflits armées, le document de Montreux a le mérite de palier
l'amalgame relative à la Responsabilité au sein du secteur de
l'Industrie Militaire Privée. En effet, selon, Philip Spoerri, directeur
du droit international et de la coopération au CICR, le Document de
Montreux a été élaboré pour «rappeler
qu'il n'y a ni flou juridique en matière de recours aux entreprises
militaires et de sécurité privées, ni impunité.
[...] En cas d'infraction, les responsables peuvent être
jugés dans leur pays, dans le pays de leur compagnie ou encore dans le
pays où a été commis le délit; il n'y a pas
d'échappatoire possible »
Le document distingue trois catégories d'Etats: Ceux
qui engagent des SMP (Etats Contractants), ceux sur le territoire desquels les
SMP opèrent (Etats Territoriaux) et les Etats où les SMP ont leur
siège social (Etats d'origine).
a- Les Etats contractants :
Les Etats contractants sont les Etats ayant recours aux SMP et
sont en principe ceux qui endossent la responsabilité la plus importante
en matière de droit humanitaire et de droit de l'homme, puisque les SMP
travaillent pour leur compte.
Les États contractants restent liés par leurs
obligations de droit international, même s'ils mandatent des SMP pour
exercer certaines activités. S'ils sont des puissances occupantes, les
États contractants doivent prendre toutes les mesures en leur pouvoir
pour rétablir et assurer, autant qu'il est possible, l'ordre et la
sécurité publics. En outre, un certain contrôle est
exigé par rapport aux activités mandatées par les Etats
contractants, et ils sont sollicités d'éviter la
délégation des activités que le droit international
humanitaire assigne explicitement à un agent ou à une
autorité étatiques, comme exercer, conformément aux
Conventions de Genève, le pouvoir de l'officier responsable sur le camp
de prisonniers de guerre ou sur les lieux d'internement de civils. Sur ce point
nous pouvons rappeler le cas des exactions commises par les firmes CACI
International et Titan Corp., qui s'étaient chargées des
interrogatoires des détenus de guerre irakiens.
Par ailleurs et dans les limites de leur pouvoir, les
États contractants sont tenus, de faire respecter le droit international
humanitaire par les SMP qu'ils mandatent.
Un autre point important, et le fait que le document demande
aux Etats contractants de faire le nécessaire pour adopter des mesures
légales essentielles, et veiller à les appliquer de bonne foi,
afin de lutter contre toute impunité .
Le document de Montreux rappelle enfin qu'en vertu du droit
international coutumier les Etats sont directement responsables des violations
du droit humanitaire ou des droits de l'homme commises par les SMP. Le CICR
précise à cet égard que la responsabilité des actes
commis par les EMSP peut être imputée à l'Etat
«notamment si lesdites compagnies ont qualité pour exercer
partiellement l'autorité gouvernementale ou si elles agissent sur les
instructions ou sous la direction ou le contrôle des autorités de
l'État »(49) auquel cas, l'Etat est tenu
d'accorder des réparations pour les violations commises.
(49)
Le droit international humanitaire et les défis
posés par les conflits armés contemporains, Rapport
préparé par le Comité international de la Croix-Rouge
Genève, septembre
2003
http://www.icrc.org/Web/fre/sitefre0.nsf/htmlall/5UDGR6/$File/INTCONFIHLReportV%20french.pdf
b- Les Etats territoriaux :
L'Etat sur le territoire duquel opèrent les SMP est
dit « territorial ». Il doit faire respecter le droit humanitaire
sous sa juridiction en adoptant diverses mesures d'ordre législatif ou
autre, comme la diffusion des Conventions de Genève parmi les SMP et
leur personnel, ayant une situation juridique similaire aux Etats contractants,
et donc partiellement les mêmes obligations. Cependant, il est à
préciser qu'en cas où l'Etat se trouverait sous occupation, sont
concernées uniquement les zones sur lesquelles il est en mesure
d'exercer un contrôle effectif.
c- Les Etats d'origine :
Sont les Etats au sein desquelles les SMP ont leur
siège et donc la nationalité. En principe ils sont tenus, dans
les limites de leur pouvoir, de faire respecter le droit international
humanitaire par les SMP ayant leur nationalité, et en particulier de
:
a) Diffuser le plus largement possible le texte des
Conventions de Genève et des autres normes pertinentes du droit
international humanitaire parmi les EMSP et les membres de leur
personnel;
b) Ne pas encourager ou assister à des violations
du droit international humanitaire par les membres du personnel d'EMSP, et
prendre les mesures appropriées pour prévenir de telles
violations;
c) Prendre des mesures pour faire cesser les violations
du droit international humanitaire commises par les membres du personnel d'EMSP
par les moyens appropriés, tels que règlements militaires,
ordonnances administratives et autres réglementations et, le cas
échéant, sanctions administratives, disciplinaires ou
judiciaires.
2- Des recommandations :
La seconde partie du document de Montreux établit une
série de recommandations et de bonnes pratiques que les Etats pourraient
incorporer au sein de leurs législations;
Ne pas externaliser des activités relatives à
l'usage claire et directe de la force ou celles considérées comme
« essentiellement gouvernementales ». Pour les Etats territoriaux de
déterminer quels services peuvent ou ne peuvent être
effectués sur leur territoire et ; pour les Etats d'origine de
déterminer quels services peuvent ou ne peuvent être
exportés.
Les Etats, toutes catégories confondues doivent tenir
compte et s'assurer du professionnalisme et de la capacité de cette
dernière à effectuer ses missions dans le respect du droit
national pertinent, du DIH et du DIDH et mettre un point d'honneur à la
transparence et à la supervision des contrats. La qualité des
prestations proposées et le passé irréprochable de
l'entreprise et de son personnel devraient toujours prévaloir sur le
critère du prix le plus bas dans la sélection des SMP. Quant aux
clauses contractuelles, elles devraient inclure le respect du droit national,
du DIH et du DIDH, la possibilité de rompre le contrat en cas de
mauvaise conduite de la société et d'exiger des
dédommagements pour les victimes et enfin l'obligation pour le personnel
d'être identifiable sur le terrain.
Les bonnes pratiques concernent également le
régime des autorisations et les règles sur la fourniture de
services par les SMP et leur personnel. Celles-ci visent en particulier les
restrictions à l'usage de la force par les SMP et le contrôle et
l'enregistrement de l'armement détenu par les SMP afin de lutter contre
le trafic d'armes et la prolifération des armes
légères.
Enfin, au niveau du contrôle du respect des
prescriptions et de la responsabilité des SMP, il appartient aux Etats
contractants de doter leur dispositif législatif de la compétence
juridictionnelle en matière pénale pour les crimes au regard du
droit international et du droit national commis par les SMP, les membres de
leur personnel ainsi que des mécanismes de responsabilité
à caractère non pénal en cas de conduite incorrecte ou
illicite des SMP et de leurs employés ; aux Etats territoriaux,
d'établir une autorité de « monitoring » et d'imposer
des sanctions si nécessaire et, aux Etats d'origine, de contrôler
le respect des termes de l'autorisation à l'étranger et le cas
échéant, d'imposer des sanctions extraterritoriales.
Le document de Montreux peut être
considéré comme une initiative régulatrice courageuse et
encourageante, néanmoins sa valeur non-contraignante et la
complexité du secteur risque entre autres, de le reléguer
à sa véritable valeur, celle de recommandation.
§2- L'autorégulation dans le Cadre de l'ISOA
:
De plus en plus soucieuses face à la question relative
au respect des Droits de l'Homme, nombreuses seront les SMP à opter pour
l'instauration de mécanismes d'autorégulation par le biais
d'adoption de codes de conduite régissant leurs activités et le
comportement de leurs employés. Certains iront même jusqu'à
inclure des formations en la matière au sein de leur gamme des services.
C'est dans un tel but que des associations comme l'ISOA vit le jour.
L'International Peace Operations Association
(IPOA) nouvellement rebaptisée ISOA (International
Stability Operations Association) est une association professionnelle ;
voire un Lobby comme certains tendent à la définir, fondée
en avril 2001 et basée à Washington, D.C, États-Unis; et
destinée à représenter l'industrie militaire
privée.
Devant le désintérêt de plus en plus
marqué des grandes puissances à engager leurs
représentants officiels, et à leur réticence par rapport
à la participation aux opérations de maintien de la paix, l'ISOA
atteste sans le moindre doute que les SMP représentent la solution la
plus efficace et la plus crédible et donc le futur de la paix et de la
stabilité internationales. Ces dernières peuvent contribuer
positivement à l'amélioration de la promotion et de protection
des droits de l'Homme par l'apport de solutions rapides, efficientes et
beaucoup plus rentables.
C'est dans un souci de clarté et de plus de
transparence que cette dernière adoptera un code de conduite imposable
à ses membres, et que ces derniers seront tenus de respecter
méticuleusement ; faute de quoi ils pourraient se voir radier de
l'association avec les conséquences pour l'image de marque qu'une SMP
est susceptible de s'attribuer.
Le Code de Conduite adopté et qui semble assez
cohérant, vise à faire respecter les normes éthiques par
les sociétés membres de l'ISOA qui travaillent dans les
situations de conflit et de post-conflit afin qu'elles puissent offrir leurs
services au profit de la paix internationale et de la sécurité
humaine. Lors de l'exercice de leur activité ces dernières
devront se baser sur des instruments tels que :
? La Déclaration universelle des droits de l'Homme (1948)
? Les quatre Conventions de Genève (1949)
· Les Protocoles additionnels aux quatre Conventions de
Genève (1977)
· La Convention sur l'interdiction des armes chimiques
(1993)
· Les Principes volontaires sur la sécurité
et les droits de l'Homme (2000)
· Le Document de Montreux sur entreprises militaires et de
sécurité privées (2008)
De ce fait, elles s'engagent au sein de chaque
opération à respecter la dignité de tout être humain
et d'adhérer strictement à toutes les lois et à tous les
accords relevant des droits de l'Homme, et à accomplir leurs
tâches de bonne foi avec la plus grande transparence et
professionnalisme.
Concernant la responsabilité, les signataires de ce
document et conscients de la délicatesse de leurs tâches et de la
nature unique de la situation de conflit ou post-conflit dans laquelle ils
travaillent, se doivent de reconnaitre l'importance des lignes de
responsabilité nettes et opératives pour assurer les
opérations de paix efficaces et la viabilité de l'industrie
à long terme. Ils s'engagent à répondre légalement
de leurs actions et celles de leurs employés devant les autorités
compétentes et à coopérer pleinement dans le cadre des
investigations relatives à toute allégation de violations
contractuelles et celles du Droit humanitaire international et du Droit des
droits de l'homme. Par conséquent, les signataires s'engagent à
prendre des actions fermes et définitives si les employés de leur
organisation sont coupables d'activités illégales. Pour toutes
infractions importantes, à l'image de graves violations du droit
international humanitaire ou des droits de l'Homme, les signataires devront
rapporter ces crimes aux autorités compétentes.
Par rapport à leur clientèle, les
sociétés parties à l'ISOA s'abstiennent de prêter
service à des clients autres que des gouvernements légitimes et
reconnus, des organisations internationales, des organisations
non-gouvernementales et les sociétés privées
légitimes.
Pour ce qui est du personnel et de son recrutement, les
signataires s'engagent à mener toutes les vérifications
préalables au cours de leur processus d'embauche ou d'externalisation
afin d'éviter l'engagement de personnel au passé entaché
et dont la conduite pourrait affecter leur viabilité, en particulier au
regard de violations du droit international humanitaire ou des droits de
l'Homme.
Le code prévoit également des dispositions
relatives aux prérogatives des employés, telles que
l'interdiction de toute discrimination salariale basée sur des
critères raciaux, nationaux ou autres, et le droit à des
assurances vie et de santé proportionnelles à leur salaire et au
niveau de risque de leur service conformément au droit.
Le cadre normatif proposé par l'ISOA semble assez
cohérent et tend à être une initiative assez
crédible, que seul le temps et la pratique nous permettront de
confirmer.
Section 2 : Les Limites Politico-juridiques de
l'application effective d'un cadre normatif concret. (Cas des
Etats-Unis)
Les grandes puissances ne veulent aucunement d'une
régulation effective et efficace du secteur de l'Industrie Militaire
Privée, parce qu'elles sont les premières à profiter du
vide juridique entourant le secteur.
Notre choix des Etats Unis est motivé par leur
position de première puissance mondiale, celle de premier client des SMP
et par la multitude de «faux-fuyants» entrepris par ces derniers dans
le but de s'acquitter de toute responsabilité, susceptible de leur
être imposable à eux ou à leurs ressortissants. Nous
essaierons d'illustrer nos propos par le biais des différentes
manifestations de la lutte acharnée qu'ils ont livré et
continuent à livrer à l'encontre de la juridiction de la CPI,
aussi bien au niveau national que transnational.
La limitation du rôle de la CPI semble profitable aussi
bien aux autorités américaines, qu'à leurs vassales,
notamment aux SMP et à leurs contractors. Les contractors travaillant
pour le compte des autorités américaines jouissent d'un carde
protecteur sans égal et assimilable à une immunité et
à une impunité de droit et de fait.
En tant que première puissance mondiale, les Etats Unis
jouent un rôle exceptionnel dans le système international
d'aujourd'hui, ils exercent une influence importante à l'égard du
développement du Doit International et n'hésitent pas à
tirer de gros avantages de cette situation en vue de l'adapter à leurs
besoins et à leurs intérêts.
Dans l'état actuel des choses, le citoyen Etasunien
jouit d'un rang qui semble assez privilégié sur la scène
internationale. Il semble disposer d'une certaine supériorité,
sur le droit International et sur ses juridictions, qui peut lui être
permise de part sa condition de ressortissant de la première puissance
mondiale.
Parmi les différentes manifestations de cette
«arrogance», signalons tout d'abord le retrait de la signature
américaine en date du 6 Mai 2002, leur refus catégorique de toute
adhésion future au statut de Rome et l'adoption de mesures
répréhensibles aussi bien au niveau interne (ASPA, MEJA,...)
qu'au niveau international, notamment par le biais des
traités bilatéraux d'immunité (Bilateral
Immunity Agreements), destinés à soustraire tout ressortissant
étasunien à la compétence de la CPI.
§1- La CPI : une juridiction illégale aux
yeux du Droit International ?(50)
Ne se contentant pas d'appartenir aux sept Etats ayant
voté contre le statut de Rome créant la CPI, les Etats Unis vont
même aller plus loin en mettant en doute la conformité de cette
dernière par rapport au Droit International. En effet ces derniers n'ont
pas hésité à présenter des arguments discutables
certes, mais qui prouveraient selon eux, l'incompatibilité de la CPI
avec le Droit international général et dont nous citerons
quelques uns.
· Le statut de Rome n'est pas compatible avec la charte des
nations Unies et ne tient pas compte du rôle spécifique du
Conseil de sécurité prévu au sein du chapitre 7.
· La définition donnée aux crimes sur
lesquelles la cour est appelée à statuer reste trop ambigüe
par rapport à d'autres traités contenant les mêmes
crimes.
· Le statut de Rome crée des obligations pour des
Etats sans leur consentement, ce qui représente une violation de
l'article 34 de la convention de Vienne sur le droit des traités de 1969
et qui dispose qu' : Un traité ne crée ni obligations ni
droits pour un Etats tiers sans son consentement ».
· En se fondant sur l'article 124 du statut, relatif aux
dispositions transitoires, les Etats Unis voient mal pourquoi et comment un
Etat partie au statut peut se déroger de certaines de ces dispositions,
alors qu'un Etat tiers serait dans l'obligation de se les appliquées.
(51)
§2- L'American Service-Members' Proctection Act.
(52)
L'ASPA, ou Loi portant sur la protection des
membres des forces armées des Etats-Unis, est une loi
fédérale Américaine introduite par le sénateur
Républicain Jesse A. Helms,
(50) Andreas Zimmermann Les Etats-Unis et la
Cour Pénale Internationale«,, in : Le devenir du Droit
International, Publications de la Revue Marocaine d'Administration Locale et de
Développement, 2004, S. p 135.
(51) Nonobstant les dispositions de l'article 12, paragraphes
1 et 2, un État qui devient partie au présent Statut peut
déclarer que, pour une période de sept ans à partir de
l'entrée en vigueur du Statut à son égard, il n'accepte
pas la compétence de la Cour en ce qui concerne la catégorie de
crimes visée à l'article 8 lorsqu'il est allégué
qu'un crime a été commis sur son territoire ou par ses
ressortissants. Il peut à tout moment retirer cette déclaration.
Les dispositions du présent article seront réexaminées
à la conférence de révision convoquée
conformément à l'article 123,paragraphe 1.
alors président de la commission des affaires
étrangères et adoptée par le congrès en 2OO2. La
loi a pour fonction principale de fournir une protection au personnel militaire
américain contre toute poursuite de la juridiction pénale
internationale à la quelle les Etats Unis ne sont pas partie. L'ASPA
autorise le président des Etats Unis à entreprendre toute les
« MESURES NECCESAIRES » afin de libérer du
collimateur de la CPI tout membre des forces armées américaines
ou autres individus tels que :
· Les personnes Protégées par les Etats
Unis.
· Les alliés des Etats Unis.
· Les individus détenus et emprisonnés,
ayant participé à des opérations officielles pour le
compte des Etats Unis et qui jouissaient préalablement de la protection
Américaine.
L'ASPA comporte plusieurs articles, exprimant grosso modo de
nombreuses interdictions dont nous pouvons citer quelques unes.
Interdictions de toute coopération entre le
gouvernement fédéral, les gouvernements locaux ou toute autre
agence Américaine de coopérer avec la CPI ou de l'assister de
quelque manière que ce soit. De ce fait, l'extradition des
ressortissants américains est formellement interdite, idem pour les
transferts et l'échange d'informations « touchant à la
sécurité nationale des Etats Unis » et l'interdiction pour
le personnel de la CPI de pouvoir mener des investigations sur le territoire
américain.
Elle interdit également aux troupes américaines
de participer aux opérations de maintien de la paix dans le cadre des
nations unies à moins d'avoir la garantie d'une entière
protection contre la juridiction de la CPI.
En outre, l'ASPA interdit aux Etas Unis de fournir aux Etats
parties à la CPI toute aide militaire quelconque, excepté les
membres de l'OTAN ou d'autres qui font partie d'une listes d'Etats
considérés comme d'importants alliés des Etats Unis. Afin
d'accentuer cette dérogation, et de limiter encore plus le rôle de
la CPl les Etats Unis ont en outre, conçu des traités
bilatéraux d'immunités afin d'exempter leurs ressortissants et
ceux de leur ailés de la compétence de la cour.
(52)
http://www.state.gov/t/pm/rls/othr/misc/23425.htm
§3- USA et les BIAS:
Sur le plan transnational, bien que les limités
imposés par les Etats Unis soient nombreuses, nous nous limiterons
à aborder l'épineuse question des «Traités
Bilatéraux d'Immunités » ou «
traités de non-remise des personnes » (Bilateral Immunity
Aggreements).
Lors de l'adoption du statut de Rome en 1998, Le
sénateur Jesse A. Helmes, fit savoir à la secrétaire
d'Etat des affaires étrangères de l`époque «Madeleine
Albright », qu'il était impératif de trouver le moyen de
protéger leurs concitoyens d'une telle juridiction. Les BIAS sont venus
répondre à cette sollicitation des autorités
américaines.
(53)
Ces accords dotés, du même esprit que
L'American Service-Members' Proctection Act, visent à
soustraire les citoyens et le personnel militaire américain de la
juridiction de la CPI. Ils prohibent toute assignation devant la cour, du
gouvernement, le personnel militaire, les fonctionnaires, les contractors et
les citoyens. Ces accords sont parfois réciproques et n'obligent pas les
Etats-Unis à soumettre ces personnes à des enquêtes ou
à des poursuites judiciaires, en d'autres termes : demeurer dans
l'impunité totale.
Dépassant la centaine, ces accords de non remise des
personnes sont tout à fait légaux pour les Etats qui n'ont ni
signé ni ratifié le statut de Rome. Pour ce qui est des Etats
(53)
http://cartographie.sciences-po.fr/cartotheque/07
CPI BIAs.jpg
partie au statut, les Etats Unis s'appuient sur les
dispositions de l'article 98 al.2 du statut qui prévoit que «
la cour ne peut poursuivre l'exécution d'une demande de remise qui
contraindrait l'Etat requis à agir de façon incompatible avec les
obligations qui lui incombent en vertu d'accords internationaux selon lesquels
le consentement de l'Etat d'envoi est nécessaire pour que soit remise
à la Cour une personne relevant de cet Etat ».
- CONCLUSION GENERALE -
L'industrie militaire Privée est venue pour rester. Si
certains prédirent qu'il ne s'agirait que d'un phénomène
post guerre froide, dont le glas n'allait guère tarder à sonner,
le temps s'est bien chargé de prouver le contraire.
Face à la recrudescence de la sous-traitance des
fonctions régaliennes, l'industrie a bien de beaux jours devant elle. En
effet, cette dernière ne s'est jamais aussi bien portée, n'a
jamais été aussi répandue que de nos jours, son avenir
semble chaque fois plus prometteur, et rien ne semble être à
même de pouvoir; voire de vouloir restreindre et comme nous l'avons vu
antérieurement, une industrie qui génère plus de 200
milliards de dollars de bénéfices chaque année.
Le point de non-retour a été atteint; et depuis
longtemps dépassé. Appelées à être un acteur
de plus en plus important des relations internationales, la remise en cause de
leur existence relèverait tout simplement de l'angélisme et de
l'utopie. Leur importance et ampleur sont devenues telles, que les
écarter ou chercher à restreindre leur rôle n'aurait pour
conséquence que de retarder l'aboutissement de solutions effectives et
efficaces en la matière.
Les initiatives entreprises par certains Etats et
organisations et destinées à régir les activités de
ces sociétés, semblent assez courageuses, mais demeurent
malheureusement insuffisantes (régulation interne, document de Montreux,
charte de l'ISOA...). La nature transnationale de l'industrie et les avantages
tirés par certains gouvernements (chapitre II), notamment ceux des
grandes démocraties, semblent être à la base d'un
sérieux manque de volonté politique qui mine toute tentative
d'adoption d'un cadre juridique crédible et efficace.
Toutefois, la guerre, la paix et la sécurité
internationales sont des affaires beaucoup trop importantes et
sérieuses, pour qu'elles soient uniquement confiées à des
sociétés commerciales soumises à des critères de
rentabilité et de productivité,
tirant profit des souffrances humaines, uniquement responsables auprès
de leurs actionnaires, et surtout incontrôlables. Ne pas remédier
à cette situation par l'adoption de mesures nécessaires
permettant un véritable contrôle du secteur, pourrait conduire les
Etats du Nord sur la même voie de décadence que leurs homologues
défaillants au Sud, comme nous avons pu le constater au sein du premier
chapitre de notre travail.
Le principe du «Laissez faire, Laissez passer»
est loin d'être la solution optimale pour garantir le plein
équilibre de la paix mondiale, bien au contraire il ne saurait
qu'engendrer davantage d'instabilité, source de profits pour les SMP.
En outre, le fait que les contractors diffèrent des
mercenaires `'classiques»de l'ère postcoloniale et leur
présence n'affecte aucunement les compagnons de « Bon Denard
». Les « affreux » seront toujours à l'ordre du jour. Les
acteurs classiques des relations internationales auront toujours besoin
d'hommes de main hautement qualifiés et pouvant agir dans l'ombre et la
clandestinité, afin de mener à bien les missions
délicates, pour lesquelles ceux-ci ne sauraient recourir à leurs
représentants officiels.
Aussi grand que puissent devenir le niveau de
réglementation et de transparence des SMP, le mercenariat comme
instrument classique de la politique étrangère de certains
gouvernements soucieux de la propreté de leurs mains restera constamment
d'actualité.
Nous pourrions finalement dire que si les programmes
d'ajustement structurel génèrent des controverses en voulant
appliquer les mêmes solutions à tout le monde, que dire alors des
SMP qui suivent ce même principe (mêmes guerres, mêmes
solutions, mêmes méthodes...). Celles-ci prennent à part
à des conflits, en totale méconnaissance du contexte et des
dimensions sociologiques, économiques, politiques, des territoires
investis, alors que chaque conflit est unique.
Si Les SMP semblent être parfois des solutions
relativement bonnes à court terme, tel n'est pas le cas à moyen
et à long terme. L'externalisation des services des armées
mérite plus de lucidité à travers un contrôle aussi
bien national qu'international, afin de conserver en toutes circonstances
l'indépendance et l'autonomie de décision face aux agissements
malsains et sournois d'une minorité dirigeante. En effet, le risque
d'addiction et de dépendance viscérale à
l'égard des SMP, ne les laissera pas uniquement au rang d'acteur des
conflits armés, mais les fera basculer graduellement dans celui de
décideur, marquant ainsi la victoire du complexe militaro-industriel sur
la démocratie et le droit.
- Bibliographie -
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3ème édition, Paris ; 2006.
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II- Ouvrages Spécialisés:
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· OLSSON Christian, « Vrai
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Etats-Unis et la Cour Pénale Internationale«,, in : Le
devenir du Droit International, (Publications de la Revue Marocaine
d'Administration Locale et de Développement), 2004.
IV- Thèses et Mémoires :
· AUZOU Stanislas, Vers des
sociétés militaires privées à la française
?, Mémoire de recherche sous la direction du Professeur
Michel-Louis Martin, Institut d'Etudes Politiques de Toulouse, 2008, 111 pp.
http://www.sciencespo-toulouse.fr/IMG/pdf/AUZOU
Stanislas.pdf
· JUNG Stéphanie, Les nouveaux
entrepreneurs de guerre : Défis juridiques et implications politiques du
recours aux sociétés militaires privées,
Mémoire de quatrième année, Institut d'Etudes Politiques
sous la direction du Professeur Vlad Constantinesco, Université Robert
Schuman Strasbourg III, 2006, 126 pp.
www.infoguerre.fr/.../SMP
nouveaux entrepreneurs guerre.pdf
· MAZZUCOTELLI Olivia, Les entreprises
militaires et de sécurité privée : le modèle
anglo-saxon d'externalisation de la sécurité, Mémoire
de Master
sous la direction du Professeur Joubert Jean-Paul,
Université Jean Moulin Lyon III, 2010.
http://www.memoireonline.com/11/10/4066/m
Les-entreprises-militaires-et-de-securite-privee-le-modele-anglo-saxon-dexternalisation-de-l.html
? RENAULD Anne-Christine, Diamants et
Conflits, Mémoire réalisé sous la direction de Madame
MILLET-DEVALLE, INSTITUT DU DROIT DE LA PAIX ET DU DEVELOPPEMENT,
Université de Nice-Sophia Antipolis, 2002, 111pp.
http://www.grip.org/bdg/pdf/g1556.pdf
V- Instruments: Instruments
Internationaux :
· Les quatre conventions de Genève de 1949 et
leurs protocoles additionnels.
· Convention internationale contre le recrutement,
l'utilisation, le financement et l'instruction des mercenaires du 4
décembre 1989.
· Convention de l'Organisation de l'Unité
Africaine sur l'élimination du mercenariat en Afrique du 3 juillet
1977.
· Résolution de la Commission des droits de
l'hommes 2000/3 considérant l'utilisation de mercenaires comme moyen de
violer les droits de l'homme et d'empêcher l'exercice du droit des
peuples à l'autodétermination.
· Le document de Montreux.
· Charte de l'ISOA. Législations
Internes :
Afrique du Sud:
? Regulation of the Foreign Military Assistance Act.
Etats-Unis :
· L'American Service-Members' Proctection Act
(ASPA).
· Arms Export Control Act (AECA).
· International Trafficking ofArms Regulations
(ITAR).
· Military Extraterritorial Juridiction Act.
(MEJA).
Royaume-Uni:
· Foreign Enlistment act du 9 août 1870.
· Foreign and Commonwealth Office, Private military
companies : options for regulation.
VI- Webographie:
·
www.bibliojuridica.org
(Bibliothèque Juridique virtuelle de l'Université Nationale
Autonome de Mexico).
·
www.cartographie.sciences-po.fr
(Atelier de Cartographie de Science Po).
·
www.caei.com.ar (Centre
Argentin d'Etudes Internationales).
·
www.ejil.org (European Journal of
International Law).
·
www.harvardilj.org
(Harvard International Law Journal).
·
www.ohchr.org (Haut Commissariat
aux Droits de l'Homme).
·
www.persée.fr (Portail de
Revue en Sciences Humaines et Sociales).
·
www.reei.org/reei20/indice.html
(Revista Electrónica de Estudios Internacionales).
·
http://www.relacionesinternacionales.info/ojs/index.php?journal=Rela
ciones Internacionales (Revista Academica de Relaciones
internacionales).
·
www.revues.org (Plateforme de
revues et collections de livres en sciences humaines et sociales).
· http://www.stability-operations.org/
(International Stabiliy Operations Association).
·
www.un.org (Organisations des
Nations Unies).
·
www.unam.mx (Université
Nationale Autonome de Mexico).
- ANNEXES -
Annexe 1 : Résolution de la Commission des droits
de l'hommes 2000/3 considérant l'utilisation de mercenaires comme moyen
de violer les droits de l'homme et d'empêcher l'exercice du droit des
peuples à l'autodétermination.
Annexe 2 : Sites Internet de sociétés de
sécurité / de soutien militaire.
Annexe 3 : Membres de l'International Stability Operation
Association (ISOA).
Annexe 1 :
Utilisation de mercenaires comme moyen de violer les
droits de l'homme et d'empêcher l'exercice du droit des peuples
à l'autodétermination
Résolution de la Commission des droits de
l'homme 2000/3
La Commission des droits de l'homme,
Rappelant la résolution 54/151 de
l'Assemblée générale, en date du 17 décembre 1999,
et sa propre résolution 1999/3 du 23 avril 1999,
Rappelant également toutes les
résolutions applicables dans lesquelles elle a, entre autres
dispositions, condamné tout État qui permettrait ou
tolérerait le recrutement, le financement, l'instruction, le
rassemblement, le transit et l'utilisation de mercenaires en vue de renverser
le gouvernement d'un État Membre de l'Organisation des Nations Unies, en
particulier celui d'un pays en développement, ou de combattre les
mouvements de libération nationale, et rappelant en outre les
résolutions et les instruments internationaux applicables adoptés
par l'Assemblée générale, le Conseil de
sécurité, le Conseil économique et social et
l'Organisation de l'unité africaine, notamment la Convention de
l'Organisation de l'unité africaine sur l'élimination du
mercenariat en Afrique,
Réaffirmant les buts et principes
consacrés dans la Charte des Nations Unies en ce qui concerne le strict
respect des principes de l'égalité souveraine, de
l'indépendance politique, de l'intégrité territoriale des
États, de l'autodétermination des peuples, du nonrecours à
la menace ou à l'emploi de la force dans les relations internationales
et de la non-ingérence dans les affaires relevant de la
compétence interne des États,
Réaffirmant également que, en vertu du
principe de l'autodétermination tel qu'il est développé
dans la Déclaration relative aux principes du droit international
touchant les relations amicales et la coopération entre les États
conformément à la Charte des Nations Unies, tous les peuples ont
le droit de déterminer en toute liberté leur statut politique,
sans ingérence extérieure, et de poursuivre leur
développement économique, social et culturel, et que tout
État a le devoir de respecter ce droit conformément aux
dispositions de la Charte,
Considérant que les activités de
mercenaires continuent à se développer dans de nombreuses
régions du monde, qu'elles revêtent de nouvelles formes,
permettant aux mercenaires d'être mieux organisés et mieux
payés, que leur nombre augmente et que davantage de personnes sont
prêtes à devenir mercenaires,
Alarmée et préoccupée par le
danger que les activités de mercenaires constituent pour la paix et la
sécurité dans les pays en développement,
particulièrement en Afrique et dans les petits États,
Profondément préoccupée par les
pertes en vies humaines, les importants dégâts matériels et
les répercussions négatives sur la vie politique et
économique des pays touchés, qui résultent des
activités criminelles internationales des mercenaires,
Convaincue que, quelle que soit la manière
dont on a recours à leurs services ou à leurs activités et
quelle que soit l'apparence de légitimité qu'ils cherchent
à se donner, les mercenaires sont une menace pour la paix, la
sécurité et l'autodétermination des peuples et
empêchent les peuples d'exercer leurs droits fondamentaux,
1. Accueille avec satisfaction le rapport du
Rapporteur spécial sur la question de l'utilisation de mercenaires comme
moyen de violer les droits de l'homme et d'empêcher l'exercice du droit
des peuples de disposer d'eux-mêmes (E/CN.4/2000/14 et Corr.1);
2. Réaffirme que l'utilisation, le
recrutement, le financement et l'instruction de mercenaires sont des motifs de
grave préoccupation pour tous les États et sont contraires aux
buts et principes consacrés dans la Charte des Nations Unies;
3. Considère que les conflits armés,
le terrorisme, le trafic d'armes et les opérations clandestines par une
tierce puissance, notamment, encouragent la demande de mercenaires sur le
marché mondial;
4. Demande instamment à tous les États
de prendre les mesures nécessaires et de faire preuve d'une
extrême vigilance face à la menace que constituent les
activités de mercenaires, ainsi que d'adopter les mesures
législatives requises pour empêcher que leur territoire et les
autres territoires relevant de leur autorité, aussi bien que leurs
nationaux, ne soient utilisés pour le recrutement, le rassemblement, le
financement, l'instruction et le transit de mercenaires en vue
d'activités visant à empêcher l'exercice du droit à
l'autodétermination, à renverser le gouvernement d'un
État, à porter atteinte, en totalité ou en partie,
à l'intégrité territoriale ou à l'unité
politique d'États souverains et indépendants qui se conduisent
conformément au droit des peuples à disposer d'eux-mêmes,
ou à les démembrer;
5. Demande à tous les États qui ne
l'ont pas encore fait d'envisager de prendre les dispositions voulues pour
signer ou ratifier la Convention internationale contre le recrutement,
l'utilisation, le financement et l'instruction de mercenaires;
6. Se félicite de la coopération des
pays qui ont reçu la visite du Rapporteur spécial sur la question
de l'utilisation de mercenaires comme moyen d'empêcher l'exercice du
droit des peuples de disposer d'eux-mêmes;
7. Se félicite également de
l'adoption, par certains États, d'une législation nationale qui
limite le recrutement, le rassemblement, le financement, l'instruction et le
transit de mercenaires;
8. Invite les États à enquêter sur
l'implication éventuelle de mercenaires chaque fois que des actes
criminels relevant du terrorisme se produisent, où que ce soit;
9. Prie la Haut-Commissaire des Nations Unies aux
droits de l'homme d'apporter au Rapporteur spécial toute l'aide et tout
l'appui dont il a besoin pour s'acquitter de son mandat;
10. Décide, conformément à la
demande de l'Assemblée générale, d'organiser un atelier
consacré aux formes traditionnelles et nouvelles de l'emploi de
mercenaires comme moyen de violer les droits de l'homme et d'empêcher
l'exercice du droit des peuples à l'autodétermination, avant la
cinquante-cinquième session de l'Assemblée
générale, et prie la Haut-Commissaire de faire rapport sur les
conclusions de l'atelier à la cinquanteseptième session de la
Commission;
11. Réaffirme qu'il importe de formuler une
définition juridique plus claire du mercenaire pour pouvoir
prévenir et réprimer plus efficacement les activités de
mercenaires;
12. Demande instamment à tous les États
de coopérer pleinement avec le Rapporteur spécial dans
l'accomplissement de son mandat;
13. Prie le Haut-Commissariat des Nations Unies aux
droits de l'homme de s'employer, à titre prioritaire, à faire
largement connaître les effets néfastes des activités de
mercenaires sur l'exercice du droit des peuples à
l'autodétermination et, si besoin est, de fournir, sur leur demande, des
services consultatifs aux États qui seraient victimes des
activités de mercenaires;
14. Prie le Rapporteur spécial de consulter
les États et les organisations intergouvernementales et non
gouvernementales au sujet de l'application de la présente
résolution, et de lui présenter, à sa
cinquante-septième session, avec des recommandations précises,
ses constatations sur l'utilisation de mercenaires comme moyen de faire
obstacle à l'exercice du droit à l'autodétermination;
15. Décide d'examiner à sa
cinquante-septième session la question de l'utilisation de mercenaires
comme moyen de violer les droits de l'homme et d'empêcher l'exercice du
droit des peuples à l'autodétermination au titre du même
point de l'ordre du jour.
35e séance
7 avril 2000
Annexe 2 : Sites Internet de sociétés de
sécurité / de soutien militaire.
- Aegis Defence Services :
http://www.aegisworld.com
- AeroGroup, Inc. :
http://www.aerogroupinc.com
- AirScan :
http://www.airscan.com
- AKE :
http://www.akegroup.com
- AMA Associates :
http://www.ama-assoc.co.uk
- Applied Marine Technology:
http://www.amti.net
- ArmorGroup International, Plc. :
http://www.armorgroup.com
- Artic Slope (ASRC) :
http://www.asrcfederal.com
- Atlantic Intelligence :
http://www.atlantic-intelligence.fr
- ATSI :
http://www.atsifightertraining.com
- Ayr Aviation:
http://www.ayraviation.co.uk
- Babylon Gates, Ltd. :
http://www.babylongates.com
- Bactec :
http://www.bactec.com
- Bae Systems :
http://www.baesystems.com
- Beni Tal :
http://www.beni-tal.co.il
- BH Defense :
http://www.bhdefense.com
- Bidepa :
http://www.bidepa.com
- BLP Middle East:
http://www.blp-middle-east.org
- Blue Hackle, Ltd. :
http://www.bluehackle.com
- Blue Sky Group International:
http://www.blueskysc.org
- Brillstein Security Group :
http://www.eubsa.com
- Britam Defence :
http://www.britamdefence.com
- CACI International :
http://www.caci.com
- Cobham:
http://www.cobham.com
- Cochise Consultancy:
http://www.cochiseconsult.com
- Combat Support Associates :
http://www.csakuwait.com
- Common Task Tactical Training, Inc. (CT3i)
:
http://www.ct3i.com -
Control Risks Group:
http://www.crg.com
- Crescent Security Group :
http://www.crescentsecuritygroup.com
- Cubic Corporation:
http://www.cubic.com
- Custer Battles :
http://www.custerbattles.com
- Defense Control :
http://www.defensecontrol.com
- DFI International:
http://www.dfi-intl.com
- Diligence :
http://www.diligencellc.com
- Double-Eagle Management Company:
http://www.double-eagle-mc.com
- Drum Cussac :
http://www.drum-cussac.com
- Dyncorp International:
http://www.dyn-intl.com
- Eagle Group International :
http://www.eaglegroupint.com
- Entourage International:
http://www.entourageinternational.com
- EOD Solutions, Ltd. :
http://www.eod-solutions.com
- Erinys International :
http://www.erinysinternational.com
- European Landmine Solutions:
http://www.landmine-solutions.com
- Genric :
http://www.genric.co.uk
- Géos :
http://www.geos.tm.fr
- Global Impact:
http://www.riskandthreat.net
- Global Options:
http://www.globaloptions.com
- Global Strategies Group:
http://www.globalgroup.com
- Golan Group:
http://www.golangroup.com
- Gormly International:
http://www.gormlyintl.com
- Group 4 Securicor :
http://www.g4s.com
- Groupe Earthwind :
http://www.groupe-ehc.com
- Hart Security, Ltd. :
http://www.hartsecurity.com
- Hill & Associates :
http://www.hill-assoc.com
- International Charter Incorporated of
Oregon:
http://www.icioregon.com
- International Intelligence :
http://www.int-int.co.uk
- International Security Instructors :
http://www.isiusa.us -
International SOS :
http://www.internationalsos.com
- Iraqi-American Services :
http://www.iraqi-americanservices.com
- ITT Systems :
http://www.ittsystems.com
- Janusian Security Risk Management:
http://www.janusian.com -
Jemsec International:
http://www.jemsec.com
- Katana :
http://www.katanasecurity.com
- Kroll:
http://www.krollworldwide.com
- Maavarim :
http://www.demining.co.il
- Meyer Global Security:
http://www.meyerglobalforce.com
- MidEast Security:
http://globalic.net/security.htm
- Military Professional Resources Inc. :
http://www.mpri.com -
MSI-Defence Systems :
http://www.msi-dsl.com
- MVM, Inc. :
http://www.mvminc.com
- Northbridge Services Group:
http://www.northbridgeservices.com
- Northrop Grumman :
http://www.northropgrumman.com
- Olive Group:
http://www.olivegroup.com
- Omega Risk Solutions:
http://www.omegasol.com
- OSSI Safenet Security Services :
http://ossisafenet.com
- Pacific Architects and Engineers:
http://www.paegroup.com -
Pilgrims Group :
http://www.pilgrimsgroup.co.uk
- Pistris, Inc. :
http://www.pistris.com
- Point Org Sécurité :
http://www.point-org-securite.com
- Reed, Inc. :
http://www.reedinc.com
- Ronco Consulting Corporation:
http://www.roncoconsulting.com
- Ronin Security Group :
http://www.roninsecurgroup.com
- Safe Security, Ltd. :
http://www.safesecurityltd.com
- Saladin Security:
http://www.saladin-security.com
- Sandi Group :
http://www.thesandigroup.com
- Sayeret, Inc :
http://www.sayeretgroup.org
- Secopex :
http://www.secopex.com
- Secure Risks :
http://www.securerisks.com
- Securiforce :
http://www.securiforce.com
- Sentinel Corporation :
http://www.sentinelcorp.net
- Serco Group :
http://www.serco.co.uk/markets/defence/index.asp
- Silver Shadow Advanced Security Systems :
http://silvershadow.pionet.com
- SOC-SMG :
http://www.soc-smg.com
- Special Operations Associates :
http://www.specialopsassociates.com
- SY Coleman:
http://www.sycoleman.com
- Task International :
http://www.task-int.com
- The Steele Foundation:
http://www.steelefoundation.com
- Titan Corporation:
http://www.titan.com
- Trident Group :
http://www.gotridentgroup.com
- Triple Canopy:
http://www.triplecanopy.com
- Trojan Securities:
http://www.trojansecurities.com
- Unity Resources Group :
http://www.unityresourcesgroup.com
- URS :
http://www.urscorp.com
- UXB International, Inc. :
http://www.uxb.com -
Vinnell Corporation:
http://www.vinnell.com
- Wackenhut Corporation:
http://www.wackenhut.com
- Westar Aerospace and Defense Group (QinetiQ)
:
http://www.westar.com
Annexe 3: Membres de l'ISOA
http://ipoaworld.org/eng/isoamembers.html
L'International Peace Operations Association
(IPOA) nouvellement rebaptisée ISOA (International Stability
Operations Association) est une association professionnelle fondée en
avril 2001 et basée à Washington, D.C, États-Unis. Elle
est destinée à représenter l'industrie militaire
privée, et compte chaque fois plus de membres.
1 AECOM Technology Corporation
2 Aggreko International
3 Agility
4 Air Charter Service PLC
5 AMECO
6 American Glass Products
7 ARINC Engineering Services LLC
8 BAE Systems
9 Baker Tilly
10 BMMI
11 Burton Rands Associates
12 Crowell & Moring LLP
13 CSS International Holdings
14 DLA Piper LLP
15 DynCorp International
16 Ecolog International
17 EOD Technology, Inc.
18 Frank Crystal & Company
19 FSI Worldwide
20 GardaWorld
21 Gibson, Dunn & Crutcher LLP
22 Hart
23 Holland & Hart LLP
24 Interconex, Inc
25 International Armored Group
26 International Relief & Development
27 ISOA Members and Disaster Response
28 J-3 Global Services
29 MineWolf Systems (Associate Member)
30 Mission Essential Personnel
31 MPRI
32 New Century
33 Olive Group
34 OSPREA Logistics
35 OSSI, Inc.
36 Overseas Lease Group, Inc.
37 PAE
38 Paramount Logistics
39 Pax Mondial Limited
40 Reed, Inc.
41 Relyant
42 Rutherfoord
43 SafeNet
44 Securiforce International America, LLC
45 Securiguard, Inc.
46 Security Support Solutions (3S)
47 Shield International Security
48 Shook, Hardy & Bacon LLP
49 SOC Inc.
50 SOS International, Ltd.
51 Telum Protection Corporation
52 Triple Canopy
53 Unity Resources Group
54 URS
55 Whitney, Bradley & Brown, Inc.
56 WSI International
- TABLES DES MATIERES -
ACRONYMES 5
INTRODUCTION 6
PREMIERE PARTIE :
DE LA FULGURANTE PROLIFERATION DES SOCIETES MILITAIRES
PRIVEES.
Chapitre I : Etat des Lieux d'un secteur en plein Essor
10
Section 1 : Une Industrie irreversible 10
§1- Portée Historique d'une actualité 10
§2- Un phénomène rampant 12
§3- L'émergence des Guerres Hybrides 14
Section 2 : Typologie des SMP 17
§1 : Une catégorisation peu plausible
|
17
|
§2 : L'approche ternaire de Singer
|
19
|
1- Les Firmes Militaires Prestataires
|
20
|
2- Les Firmes de Consulting Militaires
|
22
|
3- Les Firmes Militaires de Soutien
|
23
|
Chapitre II : La Logique de la sous-traitance et ses
Implications 25
Section 1 : Au niveau Politico-juridique 25
§1- Contournement du contrôle démocratique
25
§2- Un instrument de politique étrangère
27
§3- La question de l'impunité 29
Section 2 : Sur le plan Militaire 31
§1- La question de la fiabilité 31
§2- Manque de coordination et problème de
dépendance 32
Section 3 : Des Enjeux Economico-financiers
34
§1- Perspectives Economiques Intéressantes ? 34
§2- Implications au sein du Marché de l'armement
35
§3 - Stabiliser l'instable ? 36
§4- Le nébuleux marché des SMP 37
DEUXIEME PARTIE :
DE L'INQUIETANTE CARENCE NORMATIVE REGISSANT LE SECTEUR DES
SOCIETES MILITAIRES PRIVEES.
Chapitre III: Insuffisance et inapplicabilité des
normes existantes 39
Section 1 : Au niveau International 39
§1- DIH 39
1- Le contractor: Un Mercenaire ? 39
2- Le contractor: Un Combattant ? 41
3- Le Contractor: Un Civil ? 41
§- OUA 42
§- ONU 44
Section 2 : Un manque de cohérence au niveau
interne 46
§1- Les Déclarations de Neutralité 46
§-2 Le cadre répressif interne 46
§3- Régulation de Assistance Militaire : (cas de
l'Afrique du Sud) 47
§4- Le contrôle sur la fabrication, la vente et
l'exportation de biens et
de services de défense 49
§5- Difficultés a gérer la nature
transnationale du secteur de l'industrie militaire privée 50
Chapitre IV : Portées et limites de l'adoption
du cadre régulateur adéquat...51
Section 1 : De la Portée des initiatives
entreprises 51
§1- Le Document de Montreux 51
1- Des Etats et de leurs Obligations 51
a- Les Etats contractants 53
b- Les Etats territoriaux 52
c- Les Etats d'origine 53
2- Des recommandations 53
§2-L'autorégulation dans le Cadre de l'ISOA 55
Section 2 : Les Limites Politico-juridiques de
l'application effective d'un cadre normatif convenable. (Cas des Etats-Unis)
58
§1- La CPI : une juridiction illégale aux yeux du
Droit
International 59
§2 - L'American Service-Members' Proctection Act 59
§3- Les Etats-Unis et les Traités bilatéraux
d'immunité 61
CONCLUSION 63
BIBLIOGRAPI-IIE 66
ANNEXES 74
TABLES DES IIIAFIERES 85
|