CONCLUSION
Au terme de cette étude, il apparaît que les
banques islamiques ont « recyclé » les contrats
classiques du droit musulman afin qu'ils puissent répondre aux besoins
actuels de leurs clients.
Cet effort de rénovation résulte d'une
volonté politique de répondre à un besoin identitaire fort
des clients de confession musulmane. D'ailleurs, le label de « banque
islamique » suffit parfois à lui seul à attirer une
clientèle musulmane à l'origine réticente à
déposer son argent dans des banques conventionnelles. Les banques
islamiques ont permis de voir augmenter le taux de bancarisation des
populations de nombreux pays d'Afrique et d'Asie.
Les banques islamiques, au-delà des produits originaux
qu'elle propose à ses clients, a instauré un modèle
économique alternatif désormais convoité par les
Occidentaux, notamment suite à la crise financière de 2008,
lorsque l'on s'est aperçu que les règles gouvernant les banques
islamiques leur avaient permis d'éviter les erreurs des institutions
financières conventionnelles.
Cependant, l'on peut reprocher aux banques islamiques de ne
pas assez diversifier leurs produits, notamment en matière de
financement participatif. Ainsi, si les instruments de financement par dette se
sont multipliés, les prises de participation des banques islamiques
n'ont pris jusqu'à ce jour que l'une des deux formes décrites
dans notre dernier chapitre à savoir la mudharaba et la
musharaka. Un grand effort reste à fournir pour pouvoir
élaborer de nouveaux instruments plus compétitifs qui rendront
les banques islamiques moins méfiantes et plus disposées à
prendre part directement et entièrement aux projets à
financer.
Une seconde lacune concerne l'inadéquation des
systèmes juridiques dans lesquels les banques islamiques
évoluent, ce qui empêche parfois l'application effective des
préceptes de droit musulman, d'où un clivage entre le
modèle de banque islamique tel qu'élaboré en
théorie et sa mise en oeuvre dans la pratique. Cette situation est en
voie d'amélioration car les législations de nombreux pays, tant
dans les pays à population majoritairement musulmane que dans les pays
occidentaux sont en voie de remaniement pour mieux intégrer le
système financier islamique.
En fin de compte, le droit musulman est un ensemble de
principes appelant une interprétation perpétuelle sur la base de
la notion d'ijtihad. Ce concept central fait de la Chari'a
une législation « incomplète » et nous incite
à la compléter. Dans les banques conventionnelles, les
responsables chargés d'octroyer les crédits doivent prendre en
compte des critères économiques précis. Dans les banques
islamiques, les responsables doivent également prendre en compte des
critères moraux or la morale est un concept instable qui change en
fonction du lieu et de l'époque. Même si ce système
d'interprétation est critiqué pour l'insécurité
juridique qu'il engendre, il suffit de considérer le « verre
à moitié plein » pour voir que cette souplesse ne peut
au contraire que servir les banques islamiques et leurs clients dans la mesure
où le système pourra plus rapidement s'adapter aux changements
économiques et sociaux.
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