INTRODUCTION
1. ETAT DE LA QUESTION.
Il existe déjà une abondante littérature
sur les conflits armés et sur les droits de l'homme. Ces divers travaux
ou, du moins, ceux que nous avons pu consulter nous ont inspirés dans le
choix et la formulation du présent sujet de recherche.
Rosemary ABI-SAAB1(*) se pose, à titre de problématique
générale, les questions de savoir dans quelle mesure le droit
humanitaire peut-il avoir une emprise sur des phénomènes
habituellement perçus comme relevant essentiellement de la
compétence interne des Etats, ou en des termes plus
généraux; le droit humanitaire est-il capable de s'imposer dans
la sphère traditionnel de la souveraineté de l'Etat. Elle a
choisi l'angle de l'histoire législative de deux textes fondamentaux
représentant les efforts marquants du droit humanitaire pour faire face
aux conflits internes. Il s'agit, en effet de l'article 3 commun aux quatre
conventions de Genève de 1949 et du protocole additionnel de 1977
relatifs à la protection des victimes des conflits armés non
internationaux. Son étude se fonde sur l'examen des documents et des
travaux préparatoires de conférences diplomatiques, les rapports
d'experts réunis par le C.I.C.R. L'étude a eu pour but de suivre
l'évolution de la réglementation juridique en matière des
conflits internes devant l'évolution des faits, de mettre en
évidence les efforts du C.I.C.R. et de certains Etats pour que grande
protection soit accordée aux victimes de tous les conflits armés
malgré l'existence de l'arbitraire politique. Après analyse,
l'auteur a constaté que certains progrès ont été
accomplis pour la protection des victimes des conflits armés internes.
Cet apport réside dans les articles concernant la protection des
populations civiles et des biens à caractère civil, les garanties
concernant la protection de la mission sanitaire. D'autre part, elle a
relevé une interaction entre l'évolution politique de la
Communauté Internationale et l'évolution des concepts. Ainsi on
ne parle plus de guerre mais de conflit armé, du droit humanitaire au
lieu du droit de la guerre, de parties insurgées ou belligérantes
à la place de rebelles ainsi que des droits des victimes à la
protection en remplacement du respect de certains comportements des
belligérants dans les hostilités.
Face à la catastrophe humanitaire qui se
déroule en République Démocratique du Congo (plus de trois
millions de décès depuis le 02 Août 1998), Jean MIGABO
Kalere2(*) a voulu faire
entendre la voix du peuple Congolais auprès de la Communauté
Internationale et contribuer à la rupture de l'impunité des
auteurs des massacres de populations civiles au Congo. Ses recherches
s'enracinent dans l'Accord de Lusaka, les Résolutions du Conseil de
Sécurité de l'O.N.U., les rapports ou les réactions des
associations des droits de l'homme et les organisations de
développement. Parcourant ces Résolutions et rapports, il se pose
la question suivante en guise de problématique : Qui parmi toutes
les parties signataire de l'Accord de Lusaka respecte totalement ses
engagements relatifs aux droits de l'homme ? Cette étude se fonde
sur la dialectique entre les dispositions légales ou conventionnelles et
les réalités vécues par les populations Congolaises,
décrit et analyse surtout les massacres collectifs
perpétrés par les rebelles, souvent en dehors de toute bataille
rangée entre deux groupes armés. A la suite de la description des
faits et l'analyse approfondie de la situation, l'auteur débouche sur
les conclusions d'après lesquelles l'étude comparative des
massacres observés sur l'ensemble du territoire Congolais prouve
l'existence de la stratégie de terre brûlée. Celle-ci
consiste à arrêter les gens, à les rassembler dans une
maison et à les brûler vifs à l'aide des produits
inflammables dans les provinces sous occupation rebelle. Il existe, selon lui,
un mépris manifeste des résolutions de l'O.N.U. depuis le
début de la deuxième guerre, du droit international humanitaire
fondé sur les conventions de Genève, de la convention relative
au génocide. Dans ce contexte, seule la restauration de la paix, la
démocratie et la réconciliation nationale permettraient le
décollage du développement durable pour la stabilité de
tous les Etats de la région de Grands Lacs.
Pour sa part, Michel RWAMIRINDI3(*) constate que malgré la
bonne volonté de protection de la personne humaine ; ses droits
sont régulièrement violés dans les pays à
maturité démocratique ou non. Suite à cela, il se pose
alors la question de savoir ce qu'il faut faire pour, à la fois, assurer
le minimum de respect des droits de la personne humaine pendants les
circonstances exceptionnelles et sauver l'existence de la Nation. A la fin du
travail, il est arrivé à la conclusion selon laquelle les
conventions prévoient le recours à l'Etat d'exception pendant les
circonstances exceptionnelles. Mais cet état d'exception est
conditionné par les éléments ci-après :
· l'Etat ne peut s'exercer dans le but autre que celui
par lequel il a été prévus, c'est-à-dire n'y
recourir que pour la sauvegarde de la vie de la nation ;
· ce droit (le droit de dérogation ou l'Etat
d'exception) n'est justifiable qu'en cas de guerre ou autre danger
menaçant la vie de la Nation. Le péril considéré
doit avoir un caractère extraordinaire et menacer l'existence de la
nation. L'origine du danger importe peu.
Pour ne pas enfoncer une porte déjà ouverte nous
avons, quant à nous, choisi d'orienter nos recherches dans le domaine de
la sociologie des droits de l'homme avec pour sujet la « De la
garantie des droits fondamentaux en période de guerre en
République Démocratique du Congo : Cas du
Sud-Kivu ». Cette étude est consacrée à
l'analyse des causes et des conséquences socio-politiques de diverses
violations des droits humains constatées et régulièrement
dénoncées par les organisations spécialisées en
matière de leur protection et leur promotion tant sur le plan local,
national qu'international. Ce sont donc ces violations systématiques et
massives des droits humains dont toutes les parties belligérantes se
sont pourtant engagées à protéger et à promouvoir
malgré les circonstances.
En effet, depuis près d'une décennie, la
région des Grands Lacs d'Afrique est caractérisée par une
crise socio-politique qui se manifeste, notamment, par des guerres. Ces
guerres opposent, d'une part, les gouvernements centraux et groupements
politico-
militaires plus ou moins
organisés et, d'autre part, les groupes socio-culturels ou bandes
armées
dénommées mouvement de résistance populaire et/ou force
d'autodéfense populaire. La République Démocratique du
Congo (D.C.) n'était pas épargnée par cet état de
guerre. C'est, en effet, depuis 1996 que ce pays est entré dans le
cycle des guerres dites de « libération ». Cette
situation de guerre civile ou internationalisée, en plus des
dégâts sur le plan économique, structurel et politique, ne
manque pas d'effets néfastes sur la vie quotidienne des populations
Congolaises, en général, et celle du Sud-Kivu, en particulier, en
matière du respect des droits de l'homme et des libertés
fondamentales. Les droits et libertés sont pourtant
protégés par l'Etat et la Communauté Internationale.
Plusieurs voix se sont fait entendre pour dénoncer et
condamner les violations commises sur les populations civiles. A titre
d'exemple, Roberto GARRETON mentionnait dans ses rapports l'existence de
plusieurs massacres en R.D.C. depuis le début et durant toute la
deuxième guerre dite de « libération ». La
56e Commission de l'O.N.U. sur les droits de l'homme parle, pour sa
part, d'une situation préoccupante en R.D.C. dans sa partie orientale et
la persistance des violations massives commises vis-à-vis des droits de
l'homme et du droit humanitaire pendant ces conflits armés. De
façon beaucoup plus pratique, des organisations tant nationales
qu'internationales de défense des droits humains ont abouti au constat
selon lequel il y a eu des tueries dans les villages situés dans les
territoires de la Province du Sud-Kivu (Shabunda, Mwenga, Kamituga, Uvira,
Fizi, etc.)4(*).
Ainsi, la présente étude couvre la Province du
Sud-Kivu et s'intéresse à la période allant du 02
Août 1998 à décembre 2002, c'est-à-dire la
période pendant laquelle la gestion de la Province était sous
contrôle du mouvement rebelle, le Rassemblement Congolais pour la
Démocratie (R.C.D.). Cette délimitation spatio-temporelle est
motivée par le fait que les archives consacrées à la
première guerre dite de « libération »
menée par l'A.F.D.L. ont été, en grande partie,
détruites. D'autre part, la situation de la deuxième guerre dite
de « rectification » a semblé être la plus
meurtrière.
En effet, les estimations faites suite aux enquêtes
menées par I.R.C. indiquent plus de trois millions de morts parmi la
population civile5(*). Cet
état des choses ne laisse personne indifférente dans la recherche
de solutions à ces violations des droits de l'homme.
L'espace retenu comme champ de recherche est celui du
Sud-Kivu. La raison qui milite sur ce choix est que c'est l'une des provinces
qui ont les plus souffert et payé le lourd tribut des guerres qui
sévissaient en R.D.C. Elle connaît, évidemment, un
très grand nombre de cas de violations des droits des citoyens par les
différents groupes opérant alors dans la province (R.C.D.,
Mayi-Mayi, interahamwe, ex-FAR, Armée rwandaise, bandits à mains
armées, etc.) et même les troupes gouvernementales.
2. PROBLEMATIQUE ET HYPOTHESES
La violence armée n'a pas disparu. Elle a plutôt
tendance à s'accroître à l'heure actuelle dans la
société humaine, en général, et sur le continent
africain, en particulier, en dépit de multiples efforts fournis par la
Communauté Internationale pour y mettre fin. Ces guerres sont souvent
les causes des plus graves violations des droits de l'homme et des
libertés fondamentales alors que presque la totalité d'Etats et
des groupes combattants expriment leur attachement à la dignité
de la personne et à l'établissement d'Etats respectueux des
droits de l'homme.
De nombreux êtres humains voient ainsi leurs droits
à la vie, à la liberté, à la sécurité
constamment menacés. L'égalité entre tous ni la
dignité de chacun ne sont pas respectés, les nouvelles
barrières se dressent pour des motifs liés à la race, au
sexe, à la couleur, à la langue, à l'origine sociale ou
nationale comme le souligne l'abbé Noël MPATI Ne Nzita6(*). A cela s'ajoutent, selon lui,
les déplacements forcés et massifs des populations, les limites
posées aux possibilités de secours
désintéressés, les tortures, les emprisonnements et les
exécutions sommaires sans garanties de la justice, les restrictions
imposées pour motif de racisme, les brimades et les persécutions
religieuses perpétrées dans le secret. Telles sont autant
d'atteintes inadmissibles aux impératives éthiques qui s'imposent
à toute conscience pour garantir la dignité de l'homme et assurer
la véritable paix entre les hommes.
Le Sud-Kivu, vivant aussi une situation de guerre, à
l'instar d'autres provinces de la R.D.C. ; a connu et continue à
connaître cette situation combien catastrophique en matière des
droits de l'homme. La situation est dénoncée à la fois par
la Communauté Nationale (les groupes de défense des droits
humains locaux) et par la Communauté Internationale. En effet, au
Sud-Kivu, les populations civiles sont massacrées, forcées aux
déplacements, condamnées à la famine et à la
misère, etc. à cause de la guerre qui aurait fait plus de trois
millions de victimes bien qu'elle soit présentée par LAUTERPCHT
comme le « recours ultime d'un peuple ou d'une partie du peuple pour
lutter en faveur d'un changement des structures socio-politiques soucieuses du
bien-être de la population et l'introduction de la justice
sociale »7(*). La
guerre porte en elle les germes de sa propre destruction car elle est à
la base de la perturbation des conditions de vie et de travail, de la
destruction des infrastructures socio-économiques, de la création
des foyers de tension, d'insécurité et surtout de l'aggravation
des violations des droits humains8(*).
Eu égard à ce qui précède, les
questions suivantes méritent d'être posées à titre
de problématique de travail :
- Comment les violations des droits de l'homme se
traduisent-elles concrètement au Sud-Kivu ?
- Quelles seraient les causes et les conséquences
socio-politiques des violations des droits de l'homme dans la Province du
Sud-Kivu ?
- A l'avenir, quels sont les mécanismes envisageables
pour lutter contre ces violations massives des droits de l'homme ?
A titre d'hypothèses, nous estimons que les violations
des droits de l'homme se traduiraient par des massacres des populations
civiles, des arrestations arbitraires, des tortures, des sévices
corporelles et des viols, des exécutions sommaires et assassinats, des
enlèvements forcés, d'enrôlements forcés dans les
différents groupes armés, de prises d'otage de la paisible
population civile, etc. Les principales causes des violations des droits de
l'homme au Sud-Kivu seraient, d'abord, la réticence de la population
vis-à-vis de la rébellion et le rejet de la guerre ;
ensuite, les représailles des acteurs au conflit armé qui
soupçonneraient que la population civile collabore avec la partie
adverse ou après des défaites enregistrées sur le champ de
bataille ; puis, les parties prenantes au conflit dans la Province du
Sud-Kivu s'illustreraient dans les violations des droits et libertés
fondamentaux pour s'attirer l'attention de la Communauté Internationale
et prouver leur capacité, force et importance dans les débats
consacrés au conflit armé en R.D.C. Enfin, le caractère
autoritaire de la rébellion et de divers groupes armés pousserait
ceux-ci à faire usage de la contrainte et de la répression de
toutes sortes pour se faire accepter et imposer leur volonté.
Comme conséquences des violations des droits de
l'homme au Sud-Kivu, l'on noterait le nombre très élevé de
morts parmi la population civile innocente, les déplacements massifs des
populations de leurs villages vers les forêts ou les villes à peu
près sécurisées, les séparations des familles, la
non assistance de cette population condamnée et exposée à
la famine, aux maladies à cause de l'insécurité
persistante dans la Province. Ces violations accentueraient ainsi la
répugnance des groupes armés par la population (rébellion
et bandes armées) à travers la manifestation de leur
hostilité par l'indifférence, la désobéissance
civile, etc. ; renforçant alors la tendance nationaliste,
patriotique et l'illégitimation de la rébellion.
Ainsi, la seule voie à court, moyen et long termes
pour mettre fin aux violations des droits de l'homme au Sud-Kivu, en
particulier, et en R.D.C., en général, serait la cessation de la
guerre, la mise en place effective d'institutions qui rétablissent la
paix et la démocratie, l'Etat de droit respectueux de la dignité
humaine, la lutte contre l'impunité.
3. OBJECTIFS ET INTERET DU SUJET
La machine de guerre, bien que régie par des
règles particulières, est source des violations massives des
droits de l'homme et des libertés fondamentales. Ces violations
constituent un mal qu'il faut absolument vaincre. Or, tout mal ne peut
être vaincu que si l'on parvient à la compréhension de ces
motivations et effets les plus profonds. Ainsi, la recherche des causes et des
conséquences socio-politiques des violations des droits de l'homme
pendant la période de guerre au Sud-Kivu facilitera-t-elle la mise en
oeuvre de mécanismes de leur protection et de leur promotion. Ensuite,
cette étude, par la pertinence de ses recommandations, permettra de
contribuer à la promotion des droits de l'homme ; mais aussi et
surtout d'interpeller la conscience des hommes politiques Congolais, actuels et
avenirs, sur la valeur sacrée de la personne humaine au nom de laquelle
ils prétendent mener les luttes armées et politiques.
Ce travail permets, en outre, de connaître comment les
droits de l'homme sont protégés tant sur le plan universel,
régional que national, pendant les périodes de paix comme celles
de guerre ; d'évaluer leur degré de protection dans la
Province du Sud-Kivu par les autorités en place. La compréhension
des causes et des conséquences socio-politiques oriente dans la
détermination des mécanismes envisageables pour la lutte contre
ces violations au Sud-Kivu et en R.D.C., en général.
4. METHODOLOGIE DE TRAVAIL
A. Les Méthodes.
Moyen de parvenir à un aspect de la
vérité, de répondre plus particulièrement à
la question « Comment », est liée au problème
d'explication9(*), dans la
recherche de l'interprétation des faits que nous analysons, deux
méthodes nous paraissent ainsi les plus adaptées. Il s'agit,
d'abord, de la méthode fonctionnelle dans son approche dite
relativisée défendue par Robert King MERTON et, ensuite, de la
méthode génétique proposée par Madeleine
GRAWITZ.
a. La méthode fonctionnelle
Mathématiquement, le mot
« fonction » désigne « une relation entre
deux ou plusieurs éléments, tel que tout changement introduit
dans l'un provoque une modification dans l'autre ou les autres entraînent
de leur part une adaptation »10(*). Ici, ce qui est mis en exergue, c'est
l'interdépendance qui existe entre les éléments. Dans ce
même sens, le but poursuivi dans l'analyse fonctionnelle est d'arriver
à cerner la variable indépendante la plus lourde,
c'est-à-dire celle qui exerce la plus grande influence sur la variable
dépendante. La variable dépendante est le
phénomène qui varie en fonction d'un ou de plusieurs autres
phénomènes, à l'endroit desquels il se trouve dans une
certaine situation de dépendance. Elle est donc à expliquer
tandis que la variable indépendante est explicative11(*). Ainsi, par exemple, les
violations accrues des droits de l'homme constatées et
dénoncées en R.D.C., en général, et au Sud-Kivu, en
particulier, dépendent de la situation politique dans le pays, à
savoir, la guerre.
Robert King MERTON, représentant éminent du
fonctionnalisme et défenseur de l'approche ou la conception
relativisée, propose quatre concepts fonctionnels dans son
analyse : la dysfonction, l'équivalent ou substitut fonctionnel, la
fonction manifeste et celle latente.12(*)
1° La Dysfonction.
Alors que les fonctions sont, parmi les conséquences
observées, celles qui contribuent à l'adaptation ou à
l'ajustement d'un système donné ; les dysfonctions, par
contre, sont celles qui gênent l'adaptation et l'ajustement d'un
système. Ramenant cette réflexion à la
réalité Congolaise, nous pouvons dire que l'état de guerre
que le pays a connu gêne ou empêchait l'Etat de remplir pleinement
ses missions dont celle de la garantie, de la protection et la promotion des
droits de l'homme ainsi que l'assurance de la sécurité des
citoyens. Raison pour laquelle l'on assistait au Sud-Kivu à des
violations croissantes et massives des droits individuels.
2° L'équivalent
ou substitut fonctionnel.
Un élément culturel ou social peut jouer un
rôle d'équivalent ou de substitut fonctionnel à un autre
pour exercer une activité à sa place. La réalité ne
montre-t-elle pas des besoins humains et sociaux, qui peuvent être
satisfaits de façons différentes : un seul
élément pouvant remplir plusieurs fonctions, de même qu'une
seule fonction peut être remplie par les éléments
interchangeables.
En effet, depuis le déclenchement de la seconde guerre
dite de « rectification » en R.D.C., l'on assiste à
une partition de fait du territoire national. Une partie est
contrôlée par le gouvernement central et une autre est
partagée entre diverses factions rebelles et bandes armées. Cela
implique que les missions de l'Etat jadis remplies par le seul gouvernement
central sur tout le territoire national se trouvent ainsi partagées
entre eux en vue d'assurer la continuité de l'Etat. Dans ce cas, bien
que ces belligérants ne soient pas reconnus comme gouvernements d'Etat,
ils ont l'obligation de promouvoir et de respecter les droits de l'homme et
d'assurer la sécurité des citoyens Congolais et étrangers
des territoires qu'ils administrent au même titre que l'Etat. Ces
belligérants remplissent donc le rôle de substitut de l'Etat.
3° Les fonctions
manifestes et les fonctions latentes.
Les fonctions manifestes sont les conséquences
objectives qui, contribuant à l'ajustement ou à l'adaptation du
système, sont comprises et voulues par les participants du
système. En revanche, les fonctions latentes sont essentiellement celles
qui ne sont ni comprises ni voulues mais qui n'en n'existent pas moins. Ces
fonctions latentes sont parfois remplies par des rites anciens qui, ne jouant
plus leur rôle, substituent leur but initial à une autre
fonction.
Dans le cas d'espèce, disons que les acteurs
politiques, en menant la guerre dite de « rectification »,
ont eu pour objectif principal et officiellement défendu ; le
remplacement des institutions existantes considérées selon eux
comme autoritaires et inefficaces ; donc, de les remplacer par celles qui
garantiraient le respect des droits de l'homme, la justice et le
bien-être social ainsi que la démocratie en R.D.C. Telle a
été la fonction manifeste de la guerre dans les conditions
normales.
Cependant, l'évolution du conflit a
démontré une toute autre réalité qui se distancie
presque totalement de l'objectif de départ. En effet, les mouvements
rebelles dont le R.C.D./Goma, au lieu de garantir la justice sociale et le
bien-être du peuple Congolais pour lequel ils prétendent se
battre, se plaisaient à en violer les droits et libertés les plus
fondamentaux. C'est une situation, certes, non voulue mais qui déforme
voire modifie le sens même de l'intérêt de la guerre. Cette
violation des droits humains constitue donc la fonction latente, parmi tant
d'autres, de l'état de guerre.
b. La méthode
génétique
Comme son nom l'indique, la méthode
génétique recherche la genèse des
évènements, c'est-à-dire les antécédents. Il
s'agit, selon Madeleine GRAWITZ13(*), d'un processus se déroulant dans le temps,
c'est-à-dire d'une explication diachronique. Mais pour la
génétique, le temps est secondaire différemment de
l'explication historique. C'est le sous-produit d'une genèse qui a son
propre rythme et cherche une causalité dans les faits eux-mêmes.
Le but de la méthode génétique est donc de trouver la
cause initiale, le fait générateur d'un phénomène
social donné.
Les violations de droits de l'homme, nous l'avons dit dans la
précédente méthode, sont successives à
l'état de guerre au Sud-Kivu. L'usage de cette seconde méthode
se justifie par le fait que la présente étude s'oriente vers la
recherche des causes qui seraient à la base des violations des droits
humains dans la Province du Sud-Kivu sous la rébellion ou la guerre
menée par le R.C.D./Goma. Aussi, faisons remarquer que nous nous
attèlerons à mentionner les conséquences qui en
découlent tant sur la vie des populations que du présent et de
l'avenir des rebelles et des autres responsables des bandes armées dans
la province.
B. Les Techniques.
La collecte et le traitement des données ont
été rendus possibles par l'usage de certaines techniques
d'investigation, à savoir : l'analyse documentaire, l'entretien, le
questionnaire d'enquête et l'analyse du contenu14(*).
a. Les techniques d'enquête
1° L'analyse
documentaire.
L'usage de cette technique nous a permis de trouver des
informations utiles à l'étude des droits de l'homme et de leur
protection. Ainsi, les bibliothèques, les archives et les banques de
données abondent des données qui ont retenu notre
particulière attention. Elles sont réparties principalement en
documents écrits à caractère officiel ou non, public ou
privé, national ou internationale. Les données recueillies ont
subi, éventuellement, quelques adaptations pour qu'elles se conforment
à notre objet de recherche. Il s'agit, en effet, d'ouvrages, d'articles
de travaux de mémoires, de textes légaux, etc.
2° L'entretien.
Il nous a permis d'avoir un contact direct avec nos
interlocuteurs au sujet de la situation des droits de l'homme au Sud-Kivu. Nous
avons ciblé, ici, les responsables des organisations locales de
défense des droits de l'homme (Héritiers de la Justice, Voix des
sans Voix et Liberté, Groupe Jérémie, Initiative Congolais
pour la Justice et la Paix ; MONUC, section des droits de l'homme,
APPRODEPED, etc.) afin qu'ils nous livrent ou nous fournissent les informations
sur leurs perceptions des événements ou de la situation des
droits de l'homme au Sud-Kivu, leurs interprétations des faits ainsi que
leurs expériences dans la compréhension des mobiles liés
aux différentes violations constatées et à leurs
conséquences sur la vie socio-économique et politique de la
province. Cet entretien était semi-directif en ce sens qu'il
était canalisé par un certains nombre de questions ouvertes pour
la plupart. Le guide d'entretien était composé de 23 questions.
Cette technique nous a ainsi permis de compléter les informations
fournies par l'analyse documentaire et de les préciser.
3° Le questionnaire
d'enquêtes.
La technique d'enquête par questionnaire consiste
à poser à un ensemble de répondants, le plus souvent
représentatif d'une population, une série de questions relatives
à leur situation sociale, professionnelle ou familiale, à leurs
opinions, à leur attitudes à l'égard d'options ou enjeux
humains et sociaux, à leurs attentes, à leur niveau de
connaissance ou de conscience d'un événement ou d'un
problème, ou encore sur tout autre point qui intéresse les
chercheurs. Elle vise la connaissance de la population en tant que telle
(conditions et modes de vie, valeurs ou opinions), l'analyse d'un
phénomène social que l'on pense pouvoir mieux cerner à
partir d'informations portant sur les individus de la population
concernée et des cas où il est nécessaire d'interroger un
grand nombre de personnes et où se pose un problème de
représentativité.
Etant donné que l'univers d'enquête (la province
du Sud-Kivu) est trop vaste, nous avons considéré un
échantillon représentatif de 108 personnes dont l'âge
varie entre 18 et 66 ans. Cet échantillon est constitué de
79,6% d'étudiants et 20,4% d'individus tirés au hasard dans les
autres secteurs de la vie sociale (enseignants, chômeurs, religieux,
personnel sanitaire, défenseurs judiciaires, agents des services publics
et entreprises privées, etc.) à Bukavu.
Le questionnaire est constitué de 10 questions :
2 questions d'identification et 8 questions d'opinion sur les enquêtes.
Les questions sont soit fermées (permettent à
l'enquêté de répondre par oui ou non), soit à
éventail de réponses laissant ainsi à
l'enquêté plusieurs possibilités de réponses dans le
souci de vérifier nos hypothèses sur les attitudes de la
population face aux violations des droits humains au Sud-Kivu.
b. Technique d'analyse des
données
Pour l'analyse des données collectées sur le
terrain, la technique d'analyse du contenu a été utile. C'est une
démarche qui donne au chercheur la possibilité de traiter de
manière méthodique des informations et des témoignages qui
présentent un certain degré de profondeur et de
complexité, comme, par exemple, les rapports d'entretiens semi directifs
et les opinions populaires. Elle permet de satisfaire harmonieusement aux
exigences de la rigueur méthodologique et de la profondeur inventive qui
ne sont pas toujours facilement conciliables ainsi que d'élaborer une
interprétation qui ne prend pas pour repères les propres valeurs
et représentations du chercheur.
Ainsi, les données récoltées se devaient
d'être bien interprétées et adaptées à
l'orientation de cette étude. En outre, dans le souci de produire un
travail fondé sur les informations fiables, nous avons
procédé au tirage systématique tant sur le plan
quantitatif que sur le plan qualitatif des données recueillies sur le
terrain.
5. DIFFICULTE RENCONTREE
La difficulté à laquelle nous nous sommes est
celle liée au fait que nous avions peur de nous lancer, en tant que
politiste, dans un domaine des droits de l'homme qui, le plus souvent, est
considéré comme l'apanage des seuls juristes. Cela explique,
d'ailleurs, la rareté d'ouvrages de politistes sur cet aspect. Fort
heureusement, cette peur a été vaincue par la mise en application
du principe de l'interdisciplinarité des sciences qui signifie, selon
nous, qu'il n'existe pas de domaine de recherche exclusivement
réservé à une option ou une faculté, mais que
celles-ci sont plutôt complémentaires. Cela nous a ainsi
stimulé à aller jusqu'au bout de notre étude et à
présenter les résultats convaincants.
6. SUBDIVISION SOMMAIRE DU TRAVAIL
Mises à part l'introduction et la conclusion, le
travail se subdivise en deux parties. La première est consacrée
à la théorie générale sur les droits de l'homme
dans laquelle nous nous faisons une approche conceptuelle et présentons
le cadre normatif relatif aux droits de l'homme. La deuxième partie est
consacrée au rapport entre le conflit armé et les droits de
l'homme au Sud-Kivu qui indique diverses violations ainsi que leurs
implications socio-politiques.
PREMIERE PARTIE : LES
DROITS DE L'HOMME : UN CONCEPT QUI S'INSCRIT DANS LA THEORIE GENERALE DE
L'ETAT
La partie que l'on aborde se concentre à la mise en
évidence des champs épistémologique et conceptuel de
l'étude ainsi que les sources juridiques relatives aux droits
fondamentaux de l'homme.
CHAPITRE I : CHAMPS
EPISTEMOLOGIQUE ET CONCEPTUEL
Ce chapitre est consacré à la théorie
politique à laquelle le sujet de travail se réfère et
à la définition des concepts clés qui composent le
thème de recherche.
SECTION 1 : L'ETAT :
PROTECTEUR PRIVILEGIE DES DROITS DE L'HOMME
L'Etat est défini par MULUMBATI
Ngasha comme une forme d'organisation politique où les relations entre
commandants ou dirigeants et commandés ou dirigés, qui impliquent
tout à la fois un certain consensus et une certaine contrainte, sont
diversifiées par des institutions. Il s'agit d'une
réalité sociologique qui s'impose comme telle à travers
trois éléments principaux, à savoir, la population, le
territoire et les pouvoirs publics organisés. Ces trois
éléments constituent de véritables invariants dans la
mesure où c'est à travers eux que l'Etat s'est imposé
à travers les différentes sociétés humaines et
continue à s'imposer comme réalité sociologique. A ces
trois éléments constitutifs de l'Etat, il est ajouté un
quatrième plutôt juridique que sociologique, à savoir la
reconnaissance15(*).
L'Etat, selon Dominique TURPIN16(*), est un cadre de pouvoir. Du
point de vue temporel, la notion de l'Etat est, en effet, contingente. Elle
est née, d'une certaine manière, au Ve siècle
avant Jésus-Christ dans le cadre de la cité grecque. Dans
l'espace, par contre, même si l'on s'en tient à l'époque
contemporaine, on relève que les Etats ne constituent pas le seul cadre
du pouvoir, lequel existe aussi en déça et au-delà de lui.
En déça parce que de nombreuses institutions disposent d'un
pouvoir propre sur leurs nombres : églises, partis, syndicats,
ordres professionnels, associations, familles avec, pour chacune d'elles, la
même distinction entre détenteur et destinataires de
l'autorité. Au-delà de l'Etat, parce que certaines autres
institutions, plus ou moins supranationales, disposent d'un pouvoir normatif et
d'un pouvoir de contrainte. En fin de compte, s'il ne peut y avoir d'Etat sans
pouvoir, on trouve du pouvoir sans Etat. Les deux notions ne concordent donc
pas exactement, mais l'Etat constitue cependant pour le pouvoir un cadre
privilégié.
Paragraphe 1 : Les
buts et les tâches de l'Etat
A. Les buts de l'Etat
Deux théories concurrentes aident à expliquer
des buts poursuivis par l'Etat. Il s'agit notamment de la théorie
économique moderne et libérale et la théorie
marxiste17(*).
La théorie économique moderne et libérale part du
principe d'une séparation entre l'Etat et l'économie.
L'intervention des pouvoirs publics n'est justifiée que pour maintenir
la stabilité du système économique, empêcher des
évolutions néfastes et rétablir une authentique
économie de concurrence. Etant donné que, en fin de compte, seuls
les hommes sains et aptes au travail peuvent participer activement à la
concurrence, l'Etat doit donc s'occuper de tous ceux qui ne sont plus
« concurrentiels » pour des raisons de santé ou
d'âge. C'est dans cette optique que le système des prestations
sociales se justifie dans son ensemble comme une externalité fournie par
les pouvoirs publics à titre de compensation. L'Etat devient ainsi la
nouvelle « main invisible » qui assure une équitable
répartition des biens dans le contexte général axé
sur le « laisser faire ».
La théorie marxiste prend le contre-pied. La
domination de classe et l'exploitation ont faussé l'homme et la
société : le but est d'établir une nouvelle forme de
société composée d'hommes libres, sociaux. Pour les
libéraux, les êtres humains sont des demi-dieux qui suivent
rationnellement les processus du marché et sont capables de porter un
jugement. En revanche, pour les marxistes, les hommes sont les
aliénés et des exploités qui ne pourront être
libérés que par la dictature du prolétariat.
L'approche marxiste, aussi bien que l'optique
libérale, considèrent l'activité de l'Etat sous le seul
angle de la répartition des biens. D'autres perspectives sont, en
revanche, énoncées, notamment, la reconnaissance des droits
civils et politiques qui sont considérés comme découlant
de la dignité inhérentes à la personne humaine, de
l'idéal de l'être humain libre, jouissant des libertés et
libéré de la crainte et de la misère.
B. Les tâches ou missions de
l'Etat.
Les tâches sont les fonctions qu'une organisation
donnée remplit pour atteindre les buts ou les objectifs qu'elle s'est
fixée. L'Etat, dans le cadre de ses activités, remplit certaines
missions ou tâches pour le bien-être de la communauté. Il
s'agit évidemment des tâches de protection intérieure et
extérieure et des tâches sociales (mesures pour assurer
l'existence de l'homme, les possibilités d'épanouissement, les
tâches dans le domaine communautaire)18(*).
a. La protection interne et externe
La mission de protection fait partie des premières et
des plus anciennes tâches de l'Etat et constitue l'une des tâches
les plus incontestables pratiquement. L'Etat est donc tenu d'assurer la
protection extérieure et celle intérieure à travers ses
organes administratifs que Charles DEBBASCH19(*)et Bernard GOURNAY20(*)qualifient de mission ou fonctions de
souveraineté.
Alors qu'autrefois les rois et leurs armées
s'attachaient à la conquête de nouveaux territoires, de nos jours,
les relations extérieures des Etats modernes se limitent à la
défense de la souveraineté propre. La protection
extérieure est constituée de la défense et de la conduite
des affaires ou des relations extérieures. La défense consiste en
la mobilisation économique de la nation, la préparation et la
conduite des opérations militaires, la participation éventuelle
des troupes au maintien de l'ordre en période de troubles graves.
Autrement dit, il s'agit de maintenir l'intégralité du territoire
et la sûreté de l'Etat contre les atteintes venant de
l'extérieur. La conduite des relations extérieures se
réalise, quant à elle, par la représentation du
gouvernement à l'étranger, la protection des ressortissants
nationaux, la participation aux conférences et aux organisations
internationales, la conduite des négociations diplomatiques, la tutelle
des territoires non autonomes, l'aide économique extérieure et
l'assistance technique.
Parmi les tâches extérieures que les organes de
l'Etat doivent accomplir, il convient de mentionner notamment que leur
disposition à coopérer au sein des organisations internationales
ne doit pas être conçue uniquement dans le but de préserver
la souveraineté et l'autodétermination du pays, mais encore de
travailler à l'édification des relations internationales plus
justes. Dans ce contexte, il s'agit de la nécessité de
développer une prise de conscience de la solidarité si l'on veut
parvenir à consolider l'ordre international.
L'Etat veille aussi à la protection intérieure
appelée aussi mission de police. Cette tâche consiste à
assurer le maintien de l'ordre, à protéger les personnes et leurs
biens en prévenant les crises et les délits, à assurer la
protection civile, la police politique et sert d'institution d'information
politique du gouvernement. La police a également pour rôle de
régler les conflits sociaux ou individuels par la mise en place
d'organes judiciaires civils et criminels qui exécutent les peines ou
les organismes de conciliation. L'Etat moderne ne doit pas seulement, comme
dans le passé, se contenter de protéger le citoyen des voleurs,
des meurtries et autres criminels ou malfaiteurs, il a encore sensiblement
étendu son champ de protection. En effet, les dépendances et
interactions toujours marquées ont conduit à intensifier les
communications, mais également à accroître les
périls auxquels l'homme s'expose. Mais cet accroissement continu des
missions de police implique du même coup des restrictions aux
libertés du citoyen.
Malheureusement, dans presque tous les pays en voie de
développement, la police est conçue moins comme protectrice de la
population que comme instrument et bras armé du gouvernement qui se sert
d'elle pour imposer ses lois et sa volonté au peuple ; de la sorte,
les rapports de confiance avec la population sont le plus souvent
détériorés. Ainsi, dès qu'un Etat n'est plus en
mesure de remplir ces missions de protection, celles-ci sont très vite
accomplies par des particuliers qui, dans certaines circonstances,
créent même les milices d'autodéfense populaires. Tel est,
en effet, le cas en République Démocratique du Congo avec des
forces dites « d'autodéfense populaires »
formées par les groupes rebelles dans les villages de la Province du
Sud-Kivu, par exemple. Une telle évolution conduit rapidement à
une destruction de la souveraineté de l'Etat par l'intérieur et
donc à l'anarchie du fait que toutes ces bandes sont difficilement
contrôlables. Lorsqu'une population a perdu confiance en l'Etat, elle ne
la retrouve pas facilement. C'est pourquoi les pouvoirs publics doivent veiller
à ce que l'Etat soit seul compétent pour accomplir les diverses
tâches de protection par la détention du monopole de la force.
Mais cette force contraignante, les pouvoirs publics n'ont le
droit d'y recourir que pour protéger la population et non pas pour leur
bon plaisir et pour la violation des droits et libertés de cette
même population car, avec l'évolution, le recours arbitraire
à la force finit par provoquer une destruction interne de l'Etat et de
son autorité.
b. Les tâches sociales de l'Etat
L'Etat à travers le monde s'occupe d'un certain nombre
de tâches dans le domaine social qui contribuent à sa
stabilité. Il s'agit des mesures pour assurer l'existence des hommes,
des possibilités d'épanouissement des citoyens et des
tâches dans le domaine communautaire.
1° Mesures pour
assurer l'existence des Hommes.
Aujourd'hui encore, la famille reste le fondement d'une
existence digne d'un être humain. Par conséquent, parmi les
tâches que l'Etat doit accomplir, la protection, le soutien et
l'épanouissement de la famille occupent une place de choix. Ainsi,
l'Etat est-il tenu d'intervenir en matière de la santé et de
l'hygiène dont le développement constitue une fonction parmi les
plus modernes de la collectivité. Il s'agit de lutter contre les
maladies et les accidents, de la distribution des soins, de la surveillance des
denrées alimentaires et des produits pharmaceutiques. Les autres actions
de l'Etat doivent être remarquables, notamment, en matière de
logement et de l'urbanisme, la défense des intérêts des
travailleurs salariés, la redistribution des revenues et
l'amélioration de l'environnement. Bref, l'Etat doit veiller à la
protection des faibles21(*).
La protection de l'eau, de l'air, du sol et la
préservation des ressources naturelles pour les
générations futures font également partie des tâches
importantes et pour l'Etat moderne aussi bien que la sauvegarde de la
liberté, la faculté d'épanouissement personnel et la
sphère privée de l'être humain.
2° Les
possibilités d'épanouissement des citoyens.
Ce sont les missions éducatives et culturelles. Ces
missions cherchent à promouvoir dans tous les domaines les connaissances
des citoyens, à développer le savoir et la culture.
L'enseignement des enfants et des adolescents, des adultes, la recherche
scientifique et la création artistique, l'information sont ainsi
assumés et contrôlés par l'Etat22(*). A cela s'ajoutent les
tâches des pouvoirs publics dans le domaine de la recherche fondamentale
et de la poursuite du développement de la science.
3° Les tâches
dans le domaine communautaire
Le fondement d'une tranquillité intérieure et
d'un ordre établi n'est autre qu'un système juridique
structuré, doublé d'un appareil judiciaire
caractérisé par des procédures simples, rapides et
correctes. Plus les citoyens ont confiance dans l'ordre juridique, moins
ils cherchent à le contourner ou à manoeuvrer pour son
contournement. Les règles de forme (le droit de procédure,
l'organisation judiciaire, etc.) sont des aspects tout aussi importants pour
une coexistence harmonieuse que les règles de fond (le droit de la
famille, le droit des contrats, par exemple).
Il incombe également à l'Etat de veiller
à la stabilité des prix, de défendre le pouvoir d'achat de
la monnaie tant à l'intérieur qu'à l'extérieur et
d'exercer une influence régulatrice sur le crédit en menant une
politique prudente en matière de taux d'intérêt. Ces
missions économiques cherchent à contrôler l'initiative
privée de manière à garantir aux particuliers des
prestations d'une qualité, d'une quantité ou d'un coût
déterminé, soit à fournir directement des prestations aux
administrés. Figurent aussi, parmi les missions économiques, le
contrôle des moyens de communication, qu'il s'agisse des transports ou
des postes et télécommunications ; de la recherche et de
l'exploitation des sources d'énergie, de l'aménagement de
l'espace et plus généralement pour le contrôle du
développement économique. Il s'agit donc de la coordination
générale de la politique économique de l'Etat.
Paragraphe 2 : L'Etat
de droit : un système au service de la garantie effective des
droits fondamentaux
Si les vues fondamentales concernant le juste pouvoir au
service du peuple étaient fort répandues, la naissance de
l'idée véritable des droits de l'homme est un
évènement propre à l'histoire de l'Europe et à ses
courants intellectuels. L'idée des droits de l'homme gagna beaucoup en
importance au bas Moyen Age ; avec la sécularisation ou
laïcisation progressive du pouvoir. Dès lors, le souverain
édictait son propre droit, contrairement à l'époque
où l'on considérait que le pouvoir venait de Dieu et trouvait ses
limites dans le droit surnaturel, il fallait bien lui fixer certaines limites
afin qu'il n'agisse pas de façon arbitraire et sans retenue aucune, mais
qu'il tienne compte des droits de ses sujets.
Ce faisant, il est né l'idée des droits
originels et inaliénables de l'homme envers le pouvoir de l'Etat. Dans
ce contexte, il ne faut pourtant jamais perdre de vue que l'idée
fondamentale d'un juste pouvoir au service du bien des hommes est
sûrement propre à tous les peuples de la terre et que les
cruautés, les abus et les violations du droit sont partout
considérés et ressentis comme un mal, à l'exception de
l'asservissement des ennemis23(*). Cette idée de droits originels et
inaliénables de l'homme envers le pouvoir et l'Etat ne peut être
considérée que dans une structure étatique qui oeuvre, en
effet, pour le bien commun, le bien être de tous et
l'intérêt général. Il s'agit de l'Etat de droit qui
est notamment développé par Blandine KRIEGEL24(*).
A. Buts et éléments
constitutifs de l'Etat de droit.
L'Etat de droit est constitué des notions de
souveraineté et le non patrimonialisme. Le pouvoir souverain est, dans
ce cadre, défini par Jean BODIN comme essentiellement civil. La
relation privilégiée n'est pas le rapport de force, mais
plutôt le rapport de droit qui en est son arme. Dans un Etat de droit,
le pouvoir souverain, la puissance publique reposent sur la loi25(*).
Pour ce qui est du non patrimonialisme, les théoriciens
de l'Etat de droit affirment que l'on ne doit pas traiter les sujets comme des
esclaves ni tenir les hommes pour des choses sur qui l'on peut faire ce que
l'on veut lorsque l'on est au pouvoir. Selon le principe chrétien, les
hommes sont à l'image de Dieu et donc libres. Les rapports publics ne
doivent donc pas être calqués sur le rapport de
propriété, la puissance n'est pas une propriété.
De là, une nouvelle définition non patrimoniale de la puissance.
Au creux du développement de la nouvelle doctrine de la puissance
publique s'affirment l'idée de l'assujettissement du pouvoir à la
loi et le développement des droits de l'homme.
Ainsi, l'homme, indépendamment de son origine, de sa
condition sociale ou de son milieu ; porte en lui un certain nombre de
droits tellement inhérents à sa personne qu'ils ne sauraient
être méconnus sans que, du même coup, son essence soit
altérée. Ces droits qui ne doivent rien à la
législation positive puisqu'ils lui sont antérieurs constituent
autant de limites à l'action de l'Etat. Les pouvoirs publics sont, au
contraire, tenus de créer des conditions nécessaires à
leur réalisation quelles qu'en soient les circonstances (qu'il y ait
guerre ou paix).
B. Les caractéristiques de l'Etat
de droit.
Tout d'abord, l'Etat de droit substitue au bien civil,
établi sur la guerre et sur les conquêtes, une
société politique établie sur la paix et dans laquelle les
litiges sont arbitrés par la négociation juridique et où
le souverain, à la différence de
l'« imperator » qui disposait d'un droit de vie et de mort
sur le citoyen, doit reconnaître et garantir le droit à la
sûreté des individus. L'Etat de droit rompt avec la forme
impériale du pouvoir.
Ensuite, l'Etat de droit sépare la politique de
l'économique et congédie la force dominante (seigneuriale) du
pouvoir dans la mesure où elle remplace le régime de la puissance
en propriété par une société où les hommes
ne sont plus des choses.
Enfin, l'Etat de droit est une nouvelle doctrine du pouvoir
qui organise un espace politique unifié, où la puissance publique
est soumise à la loi et limitée par le droit individuel et est
assortie d'une morale politique de la loi. Cette doctrine a été
élaborée à travers les écrits des légistes
et des philosophes.
Paragraphe 3 :
L'effondrement de l'Etat26(*) : Un
blocage à l'exercice et à la garantie des droits fondamentaux
Un Etat étant une institution
politique dotée d'autorité qui exerce sa souveraineté sur
un territoire reconnu. Cette définition repose, en effet, sur trois
fonctions : l'Etat est l'autorité souveraine, par conséquent
une organisation réelle chargée de prendre des
décisions ; en même temps que le symbole intangible de
l'identité ; enfin, il est le garant de la sécurité
d'un territoire et de sa population. Ces trois fonctions sont
étroitement imbriquées qu'il est difficile de s'en acquitter
séparément : l'affaiblissement de l'une entraîne les
autres dans la ruine.
Lorsque l'Etat ne parvient plus à s'acquitter de ses
fonctions de base qu'il est appelé à remplir, telles qu'elles
sont analysées dans les diverses théories, on parle dans ce cas
de l'effondrement de l'Etat. C'est donc l'incapacité de l'Etat
d'accomplir les fonctions inhérentes à sa raison
d'être : le centre de décision du gouvernement est
paralysé et impuissant, l'ordre n'est plus maintenu et la
cohésion sociale se relâche. L'Etat symbole de l'identité
n'est plus capable de conférer un nom à ses populations, non plus
qu'un sens à l'action de la société, son territoire ne
jouit plus de la sécurité, etc.
En définitive, pour le cas précis de la R.D.C.,
disons que c'est justement cet effondrement de l'Etat qui a conduit au
déclenchement de différentes guerres qui sévissaient dans
le pays. A leur tour, ces guerres ont rendu l'Etat incapable de remplir
effectivement sa mission de protection et de sécurité des
populations civiles sur tout le territoire devenu, d'ailleurs, ingouvernable
parce que partagé entre diverses factions rebelles et le gouvernement
central. Cette situation a ainsi fait place à des violations massives et
systématiques des droits de l'homme et la remise en cause de l'Etat de
droit qui a toujours tant de peine à s'installer dans la R.D.C. La
présente étude s'attelle donc à l'analyse des causes et
des conséquences socio-politiques de diverses violations
enregistrées et décriées par les organisations
spécialisées et la population, en général.
SECTION 2 : LES DROITS DE
L'HOMME : UN CONCEPT POLYSEMIQUE AU CONTENU PRECIS
Paragraphe 1 :
Définition
Le Petit Larousse illustré
définit les droits de l'homme comme les droits naturels. Ils trouvent
leur fondement dans la nature de l'homme et fournissent les règles
universelles auxquelles doit se conformer, antérieurement à toute
spécification du droit, la coexistence des individus et des
sociétés. Ce sont des droits et libertés que chaque
individu possède du seul fait de sa nature humaine27(*).
Mettant l'accent sur le fait que l'homme est un individu,
Jeanne HERSCH considère les droits de l'homme comme les droits
individuels. Elle les désigne aussi comme des droits naturels,
primitifs, absolus, primordiaux ou personnels. Ce sont, selon elle, des
facultés, des prérogatives morales que la nature confère
à l'homme en tant qu'être intelligent ; ils sont sa
propriété, inhérents à sa personnalité,
partie intégrante de l'entité humaine. Ces droits sont des
aspects, des manifestations de la personnalité humaine en son existence
subjective, ou dans ses situations de relation avec la société ou
les individus qui le composent28(*).
Pour VINCENSINI, les droits de l'homme sont des
prérogatives gouvernées par les règles reconnues par le
droit constitutionnel et le droit international. Elles visent, d'une part,
à défendre les droits des personnes dans leurs relations avec le
pouvoir de l'Etat et avec les autres personnes. D'autre part, elles tendent
à promouvoir l'établissement des conditions permettant de jouir
effectivement de ces droits29(*).
Quant à Jaques MOURGEON, les droits de l'homme ne sont
analysables que par la description de leur nature et de leur contenu en dehors
de toute interprétation théorique ou philosophique. Pour lui, la
personne est dotée des prérogatives, c'est-à-dire des
facultés de faire ou d'agir en toute conscience ou non ; de
s'abstenir ou de refuser, de réclamer, d'obtenir et, surtout, de se
protéger. Mais pour que ces prérogatives soient des droits, il
faut que celles-ci aient un statut juridique particulier. Il faut donc que la
règle y touche de quelque manière : par l'acceptation, la
limitation, l'organisation, la régulation, l'obligation ou
l'interdiction. Mais il existe des prérogatives qui échappent au
droit auquel elles sont indifférentes30(*).
Des définitions qui précèdent, nous
pouvons déduire que les droits de l'homme sont des facultés qu'un
être humain ou un individu possède en toute liberté et dont
les violations ou tout refus à y satisfaire sont
considérés comme illégaux parce que reconnus par la
collectivité. Ce sont aussi des standards fondamentaux, des
prérogatives morales ou des règles que la nature confère
à l'homme en tant qu'être doué d'intelligence auxquels
doivent se conformer la coexistence des sociétés et des
individus ; qui sont la manifestation de sa personnalité et qui lui
permettent d'agir, de vivre, de se protéger. Ils sont le fondement de
la liberté, de la justice et de la paix et dont le respect permet
à l'homme de se développer pleinement.
Paragraphe 2 : La
nature des droits de l'homme
Les droits de l'homme sont qualifiés de droits
subjectifs par rapport aux droits objectifs. Ils sont, en effet, dits
subjectifs parce qu'ils sont une qualité reconnue à toute
personne capable de poser, d'avoir quelque chose et de faire quelque chose de
juste. Ce « juste » peut être un pouvoir sur
soi-même, sur autrui ou sur les choses. Les droits de l'homme sont des
libertés que l'individu tire dans la nature et constituent les
données juridiques premières de la vie. Ici, l'homme
considéré comme l'individu hors de son monde social et de son
histoire est la source des règles naturelles dont le législateur
doit s'inspirer. Le droit est ainsi lié à l'individu, à
la qualité propre de l'homme, à sa personnalité. Il
devient donc l'émanation de l'homme, l'expression des
possibilités inaliénables et éternelles31(*).
Paragraphe 3 : Les
caractéristiques des droits de l'homme
Quatre caractéristiques majeures sont
à souligner en ce qui concerne les droits de l'homme, à savoir,
l'inhérence à l'être humain, l'universalité,
l'inaliénabilité et l'indivisibilité32(*).
A. L'inhérence à
l'être humain.
Les droits humains ne doivent pas être octroyés,
achetés, gagnés ou obtenus par héritage. Ils
appartiennent aux gens simplement parce qu'ils sont des êtres humains. A
ce titre, les droits humains sont « inhérents »
à chaque individu.
B. L'universalité.
Les droits de l'homme sont les mêmes pour tous les
humains sans considération de la race, du sexe, de la religion, de
l'ethnie, de l'opinion politique ou autre, de l'origine sociale ou nationale.
Tous les hommes sont nés libres et égaux en dignité et en
droit. Les droits humains sont « universels » parce qu'ils
s'appliquent à tout le monde. Mais cette universalité est le plus
souvent mise en mal par certains éléments inévitables
liés à l'environnement et à la culture ainsi qu'aux
civilisations. Il s'agit notamment de l'écart entre le monde occidental
par opposition au Tiers-monde, au niveau de démocratisation, les pays
à économie de marché et ceux a économie
planifiée, les Etats à une religion officielle et les Etats
laïcs, les régimes militaires et les régimes civils. Cette
situation ne permet pas d'avoir une même vision des droits de l'homme
étant donné que chaque type de régime est libre de faire
le choix qui lui convient avec tous les effets sur les conditions
humaines33(*).
C. L'inaliénabilité
Ces droits ne peuvent être enlevés car personne
n'a le droit de priver une autre personne de ses droits sous aucun
prétexte. Les gens ont toujours des droits humains même si les
lois du pays ne les leur reconnaissent pas, ou quand elles les violent. Par
exemple, quand l'esclavage est pratiqué, les esclaves ont toujours leurs
droits même s'ils sont violés ou bafoués. Ainsi, on dit
que les droits de l'homme sont inaliénables.
D. L'indivisibilité
Pour vivre la dignité, tous les êtres humains ont
conjointement droit à la liberté, à la
sécurité et au niveau de vie décent. Il est donc trompeur
d'insister sur une polarisation de tel ou tel autre droit au détriment
de l'autre parce que tous méritent une attention égale. L'un ne
peut être protégé sans l'autre.Dans cette logique, les
droits humains sont qualifiés d'« indivisibles ». La
notion des droits de l'homme ne peut être analysée qu'en faisant
aussi référence à la notion de liberté que Gilles
LEBRETON considère comme un ensemble de pouvoirs que l'homme exerce sur
lui-même (liberté d'aller et venir, de se déplacer). Elles
s'exercent donc, par essence, dans l'indépendance, sans que
l'intervention d'autrui soit nécessaire.C'est donc,
théoriquement, un comportement positif, une obligation d'agir. Toujours
selon lui, la liberté est la sphère qui échappe à
la contrainte sociale et s'oppose à la servitude34(*).
Pour Jeanne HERSCH, les libertés peuvent être
entendues comme le droit de tout homme à être honoré et
à penser et parler sans hypocrisie et tout citoyen libre a l'assurance
de n'être point inquiété dans l'exercice de sa
propriété personnelle en dans l'usage de sa
propriété réelle. Il a le droit d'aller, de rester, de
penser, de parler, d'écrire, d'imprimer, de publier, de travailler, de
produire, de garder, de transporter, d'échanger et de consommer35(*).
Paragraphe 4 : La
classification des droits et libertés fondamentales de l'homme
La catégorisation classique fait une différence
entre les droits civils, les droits politiques, les droits sociaux,
économiques et culturels ainsi que les droits environnementaux et de
développement36(*).
Mais, en plus de cette classification, William A. SCHABAS propose d'autres
catégorisations fondées, évidemment, sur la nature des
obligations imposées par l'Etat, la limitation des droits et sur leur
possibilité d'être dérogés37(*).
A. La catégorisation
classique
1. Les droits civils et politiques ou
droits de la première génération
Ces droits appartiennent à tous les membres d'une
société quels que soient leur âge, leur sexe et leur
nationalité. Ils sont regroupés en droits et libertés
liés à la vie publique et privée de la personne, ceux
liés à l'esprit et les libertés d'expression38(*).
a. Les droits et libertés
liés à la vie de la personne.
Ils sont fondamentaux dans une société
démocratique et doivent être reconnus largement par la
constitution d'un Etat. Ils comprennent le droit à la vie et
à l'intégrité physique, le droit à une protection
égale des lois, le droit et la liberté de résidence et de
circulation, le droit à l'intimité (droit à la vie
privé et au secret de correspondance), le droit et la liberté de
fonder une famille.
b. Les droits et liberté de
l'esprit.
Les libertés de l'homme dans l'exercice de ses
activités intellectuelles doivent être reconnues et garanties par
le pouvoir. Ces libertés sont également des droits. Il s'agit
de la liberté d'opinion (idées ou croyances diverses), la
liberté d'expression (liberté de la presse), la liberté
d'enseignement, la liberté d'information, la liberté de
religion.
c. Les libertés d'expression
collective.
Cette formule caractérise les droits et
libertés qui sont reconnus à des individus mais qui sont
réalisés collectivement par l'action commune de plusieurs
personnes. Elles correspondent à la liberté d'association,
à la liberté de réunion et de manifestation.
d. Le droit à la
propriété.
Une personne ne se sent bien en sécurité,
sûre d'elle-même que si elle possède quelque chose ou
quelques biens en propriété personnelle. C'est le prolongement de
sa personnalité. De ce fait, la propriété doit donc
être garantie.
e. Les droits politiques.
Les droits politiques impliquent pour chaque individu le
droit de prendre part à la direction des affaires publiques de son pays
soit directement, soit par l'intermédiaire des représentants
librement choisis et d'accéder dans les conditions
d'égalité aux fonctions publiques de son pays. La volonté
du peuple est le fondement de l'autorité des pouvoirs publics. Cette
volonté s'exprime par des élections honnêtes qui ont lieu,
en principe, périodiquement au suffrage universel égal et au vote
secret ou suivant une procédure équivalente assurant la
liberté de vote.
2. Les droits économiques,
sociaux et culturels ou droits de la deuxième
génération
En vertu du droit des peuples de disposer d'eux-mêmes,
ceux-ci déterminent librement leur statut politique et assurent
librement leur développement économique, social et culturel.
Pour atteindre leurs fins, tous les peuples peuvent disposer de leurs richesses
et de leurs ressources naturelles, sans préjudice des obligations qui
découlent de la coopération économique internationale,
fondée sur le principe de l'intérêt mutuel, et du droit
international. En aucun cas le peuple ne peut être privé de ses
moyens de subsistance. Parmi ces droits, nous pouvons citer notamment le
droit syndical, le droit à la grève, le droit au travail, le
droit à l'éducation et à la formation professionnelle.
3. Les droits environnementaux, de
développement, à la paix ou droits de la troisième
génération
Appelés aussi « droits de
solidarité », ils sont les plus récents et, à
certains égards, les plus modernes. Le volet « droits
collectifs » y est beaucoup plus présent39(*). Ces droits comprennent le
droit de vivre dans un environnement propre et protégé de toute
destruction de même que les droits liés au développement
culturel, politique et économique.
Disons, pour terminer, que cette classification
traditionnelle des droits n'est pas toujours clairement définie.
Certains droits peuvent, en effet, se retrouver dans plus d'une
catégorie. Aussi, lorsqu'on dit que chaque personne a des droits, on
doit dire également qu'elle a des responsabilités en ce qui
concerne les droits des autres. Les limites des droits et libertés des
individus ne sont, en effet, placées qu'au point où ils
commencent à nuire aux droits et libertés d'autrui. Il revient
à la loi de reconnaître ces limites et de les marquer.
B. La classification suivant les
obligations imposées par l'Etat.
Il s'agit de la dialectique « droits
négatifs-droits positifs ». Dans le premier cas, l'Etat
s'abstient simplement d'agir tandis que dans le second, il est tenu d'adopter
certaines mesures concrètes afin d'assurer la reconnaissance et la
propriété du droit. En principe, cette obligation peut être
respectée si l'Etat n'intervient pas afin de limiter les libertés
de religion, d'expression, et si ses responsables ne se livrent pas à
des actes prohibés telle que la torture et les exécutions
sommaires. Souvent les droits civils et politiques sont présentés
comme des droits négatifs.
En revanche, les droits économiques, sociaux et
culturels sont qualifiés de droits positifs, parce que l'Etat est
obligé de fournir des services de santé, de l'éducation,
etc. Mais cette obligation dépend du niveau de développement de
l'Etat et de la condition de ses ressources. Logiquement, l'obligation
pèse lourdement sur un Etat riche que sur un Etat pauvre. S'agissant des
droits les plus fondamentaux tels que le droit à la vie, on y a reconnu
un volet positif puisque l'Etat ne peut pas seulement s'abstenir d'enlever la
vie de ses citoyens par le biais, par exemple, des exécutions sommaires,
mais il doit également prendre des mesures de sécurité
afin de les protéger et de protéger l'individu des exactions
commises par les pouvoirs publics ou les particuliers.
C. Classification fondée sur la
limitation des droits.
Il est question, ici, de la dialectique « droits
individuels-droits collectifs ». La formulation des droits qui sont
tributaires de l'idéologie libérale du XVIIIème
Siècle vise exclusivement les individus et leurs rapports avec
l'Etat40(*). Mais
l'évolution de ces droits dans l'espace et dans le temps, une insistance
démesurée sur les droits de l'individu peut porter atteinte aux
droits légitimes de certains groupes d'individus pris collectivement.
C'est dans cette optique que la Déclaration Universelle des droits de
l'homme affirme, en son article 29, paragraphe 2 que « dans
l'exercice de ses droits et dans la jouissance de ses libertés, chacun
n'est soumis qu'aux limitations établies par la loi exclusivement en vue
d'assurer la reconnaissance et le respect des droits et libertés
d'autrui et afin de satisfaire aux justes exigences de la morale, de l'ordre
public et du bien-être général dans une
société démocratique ».41(*) Cette disposition est le
prototype de clauses de « limitation » dont la mission est
de rechercher l'équilibre entre les droits individuels et les droits
collectifs.
Ainsi, la liberté de croyance peut-elle faire l'objet
des restrictions qui sont nécessaires à la protection de la
sécurité, de l'ordre et de la santé publique ou de la
morale ou encore des libertés et des droits fondamentaux d'autrui,
tandis que la liberté d'expression fait référence
notamment à la réputation d'autrui comme justification des
limitations. Plusieurs droits, par exemple, le droit à la vie et
à l'intégrité physique, l'interdiction de la torture et de
la prohibition de la discrimination, ne souffrent pas des limitations de ce
genre. Toutefois, certaines limitations particulières existent
même en l'absence d'une clause de limitation classique.
D. Classification fondée sur la
possibilité de dérogation des droits.
Cette distinction établit une différenciation
entre les droits dérogeables et les droits non dérogeables.
L'expression « dérogation » est un processus qui est
analogues à la suspension des droits de la personne par le biais des
clauses même s'ils se trouvent dans les instruments qui les
reconnaissent. Cette possibilité de suspension de leur application, au
moins en partie, est prévue lors d'une situation exceptionnelle,
d'urgence. En règle générale, la situation d'urgence doit
être proclamée officiellement.
Mais cette dérogation ne doit pas être
systématique et permanente sous peine de supprimer purement et
simplement la liberté en cause car la liberté est la
règle et la restriction l'exception. Elle ne peut pas entraîner
une discrimination fondée sur la race, la langue, la couleur, le sexe,
la religion ou l'origine sociale. De plus, certains droits sont intangibles ou
« non dérogeables », en ce sens que la
dérogation n'est pas permise, même en cas d'urgence. Les droits
intangibles sont au nombre de six et diffèrent selon les
conventions42(*). Ces
droits ne peuvent jamais faire l'objet de dérogation, et cela, dans
aucun régime conventionnel. Il s'agit de, en effet, du droits à
la vie, de la prohibition des traitements inhumains, de l'abolition de
l'esclavage, du droit à la liberté de pensée, de
conscience et de religion ainsi que de l'interdiction des infractions
pénales rétroactives. Ces droits sont parfois identifiés
comme le « noyau dur des droits de la personne
humaine ».
SECTION 3 : LA
GUERRE : UN PHENOMENE AUX CONSEQUENCES EVIDENTES SUR LA GARANTIE DES
DROITS FONDAMENTAUX
William URY souligne que dans toute société,
les hommes ont l'habitude de s'engager dans les conflits destructeurs, bien
souvent mortels, dès lors qu'un différend sérieux se
manifeste entre deux personnes, groupes ou nations. Ceci dit, le conflit,
quelle que soit sa forme ou sa nature, est omniprésent dans tous les
rapports humains43(*).
Disons également, avec Gaston BOUTHOUL, que dans le
monde, il y a peu de phénomènes sociaux qui soient aussi
répandus que la guerre. En effet, selon cet auteur, alors que tant
d'institutions ne sont comprises ou pratiquée que par certains peuples,
il n'y en a pas qui ne connaît pas la guerre. Celle-ci parait tellement
évidente à tous, des plus civilisés aux plus
frustrés, tellement mêlée à la vie des peuples et
des individus, liées à leurs préoccupations,
évoquée à chaque instant par leur légende et leur
histoire que l'on ne songe guère à la définir44(*).
Paragraphe 1 :
Définition de la guerre
Dans le langage courant, le mot
« guerre » est souvent une situation souvent
employée pour désigner les situations qui ne correspondent pas au
« concept juridique » du même nom. Au sens du droit
international, la guerre est un procédé de contrainte avec emploi
de la force qui comprend obligatoirement deux aspects : un aspect
militaire et un autre interétatique. La guerre est une lutte
armée avec intention de guerre. En tant que telle, elle se distingue de
la rétorsion et des représailles pacifiques qui excluent le
recours aux armes et des représailles armées qui s'exercent sans
intention de guerre45(*).
Pour sa part, Gaston BOUTHOUL propose la définition
suivante : « la guerre est la lutte armée et sanglante
entre groupements organisés »46(*). Cette lutte, pour présenter un
caractère guerrier, doit obligatoirement être armée et
sanglante. Ce dernier trait permet, selon l'auteur, de distinguer la
guerre des autres formes d'opposition ou de compétitions, comme la
concurrence économique, les luttes sportives, la propagande politique ou
religieuse et les discussions de toute sorte. Aussi, la lutte armée,
pour mériter le nom de guerre, doit comporter des combats et des
victimes.
En un mot, Gaston BOUTHOUL définit la guerre comme
étant une forme de violence qui a pour caractéristique
essentielle d'être méthodique et organisée quant aux
groupes qui la font et aux manières dont ils la mènent. En outre,
elle est limitée dans le temps et dans l'espace, et soumise à des
règles juridiques particulières, extrêmement variables
suivant les lieux et les époques. Tous ces traits découlent du
caractère organisé des conflits guerriers47(*).
Utilisant les concepts de « conflit
armée » pour expliquer le phénomène de guerre,
Rosemary ABI-SAAB48(*)dit,
quant à elle, que ces termes impliquent l'existence d'hostilités
entre les forces armées organisées. Les hostilités sont
comprises comme les opérations de guerre ou l'état de guerre
lui-même. Divers critères, matériels ou subjectifs, ont
été recherchés pour préciser le contenu de ces
termes : les forces armées placées sous un commandement
responsable ; le contrôle territorial, le nombre de victimes, la
durée et l'intensité des combats, etc. L'application stricte de
ces critères exclurait cependant les troubles et les tensions internes,
autrement dit des situations de conflits larvés malgré qu'ils
causent des victimes qui ne sont pas moins nombreux pour autant.
De toutes les définitions proposées par les
auteurs, il ressort que la guerre est une lutte armée,
c'est-à-dire que tout différend surgissant entre deux groupes ou
deux Etats ne peut être tranché que par le sort des armes et que
les combats ne se déroulent qu'à moins armées. Ensuite,
ce conflit armé doit opposer des groupements organisés qui
peuvent être des Etats indépendants ou des groupes
politico-militaires se trouvant dans un même Etat. Enfin, ce conflit
armé doit être sanglant, c'est-à-dire qu'il doit faire des
victimes.
Paragraphe 2 : Les
dimensions de la guerre
Les guerres peuvent être internes
qualifiées de conflit interne ou guerre civile, soit externes
nommées guerre ou conflit international.
A. La guerre civile ou conflit
armé non international.
D'après Gaston BOUTHOUL49(*), la guerre civile désigne le conflit
armé qui s'élève entre citoyens d'un même Etat. Elle
peut se dérouler entre portions territoriales d'un même Etat
(guerre de concession), entre des groupes tels que les partis politiques ou les
confessions religieuses dont les membres sont étroitement
mêlés. Il s'agit donc d'une action hostile organisée qui
est dirigée contre les autorités au pouvoir par les forces
armées régulières pour y faire face. Elle implique la
participation de plusieurs factions ou encore d'un ensemble d'actions qui
surviennent entre les forces armées de deux ou plusieurs factions, que
ces actions entraînent ou non l'intervention des autorités au
pouvoir50(*).
B. La guerre ou le conflit armé
international.
La guerre est internationale lorsque celle-ci oppose les
forces armées des pays différents. Elle oppose deux groupes
souverains se considérant comme entité de droit international
absolument indépendante. Aussi, lorsque la guerre civile
bénéficie de l'appui des forces armées
étrangères, elle revêt alors un caractère
international et sera qualifiée de conflit international et justifie
également l'application du droit international51(*).
Cette justification de l'application du droit international
s'explique par le fait que les Etats parties au conflit sont seuls sujets du
droit international, par la recherche de l'objectivité et de
neutralité pour une justice indépendante et impériale et,
enfin, éviter que les parties impliquées au conflit ne soient
juges et parties52(*).
Le conflit armé en R.D.C. revêt cette double
dimension, c'est-à-dire qu'elle a un caractère à la fois
interne et international. Nul ne peut, en effet, nier aujourd'hui la
présence des responsables Congolais comme meneurs de la rébellion
malgré les multiples qualifications leur attribuées. A ce titre,
on parle de « conflit interne » ou de
« rébellion congolaise ». Aussi, l'implication dans
le conflit armé Congolais de plusieurs autres Etats invités ou
non (le Rwanda, l'Ouganda, l'Angola, le Zimbabwe, la Namibie, le Burundi) lui
attribue-t-elle le caractère international. D'où peut-on parler
de « conflit interne internationalisé » ou purement
de « conflit international ». Signalons, toutefois, que
tous ces Etats ont officiellement retiré leurs troupes.
Paragraphe 3 : Les
effets de la guerre
Selon COLLIER53(*), les guerres provoquent cinq types d'effets, à
savoir, la destruction du capital physique et humain, la réduction de
l'épargne, la fuite des capitaux et le déclin corrélatif
des investissements intérieurs, la perturbation des transactions
économiques, le détournement des dépenses publiques au
profit du secteur militaire au détriment des services publics.
L'analyse des incidences de la guerre montre clairement que la
guerre et les conflits civils peuvent entraver le développement
économique pendant plusieurs années. Il est impossible de
chiffrer précisément le coût des guerres en terme de pertes
en vies humaines et autres formes de dépossession pour les populations
qui les subissent.
Sur le plan humain, notamment, Gaston BOUTHOUL54(*) affirme que toute guerre est
un conflit sanglant qui fait des victimes, combattantes ou non, tuées au
cours des batailles volontairement massacrées ou victimes des privations
et des dévastations. La population civile paie le lourd tribut de la
guerre étant donné que c'est elle qui est envahie,
rançonnée, affamée, massacrée, pillée,
refoulée et parfois réduite ou amenée à
l'esclavage.
Parlant spécifiquement de la R.D.C., Baudouin HAMULI
Kabarhuza55(*) dit que
l'intervention des acteurs extérieur, notamment le Rwanda et l'Ouganda
dans le conflit Congolais a eu comme conséquence l'aggravation de
l'ethnicisme et des violations des droits humains, l'envenimement des tensions
ethniques locales qui hypothèquent, de ce fait, le dialogue et la
réconciliation entre les communautés. L'instrumentalisation des
causes ou revendications de certaines ethnies (l'exemple des banyamulenge dans
le Sud-Kivu) pour légitimer leur entrée et leur présence
sur le territoire Congolais affectera encore pendant longtemps leurs rapports
avec les autres communautés au Kivu et dans tout le pays.
Yvon Christian ELENGA56(*) mentionne, pour sa part, que la guerre qu'a
vécu la société Congolaise depuis le 02 août 1998 a
ébranlé les institutions politiques et fragilisé tant les
individus que la société. A l'Est comme à l'Ouest, elle
s'est accompagnée de son cortège de désolation, de morts,
de corps mutilés, d'entreprises pillées, de règlements de
compte, de recrudescence de xénophobie, de haine ethnique, de famine, de
maladies, etc.
Les définitions et notions sur les concepts clefs que
renferme l'objet de recherche ainsi que son orientation théorique nous
permet d'aborder maintenant le deuxième chapitre. Celui-ci est
consacré au cadre normatif relatif aux droits de l'homme dans lequel
nous allons esquisser la réglementation générale de ces
droits fondamentaux pour la vie humaine.
CHAPITRE II : CADRE
NORMATIF RELATIF AUX DROITS FONDAMENTAUX
Denis ALLAND57(*) a constaté dans ses analyses que pendant
longtemps, les personnes privées n'ont pas été
considérées comme des sujets de droit international ou des sujets
médiats. Toutefois, l'évolution du droit international depuis
1945 a abouti à conférer aux individus des droits directement
définis par le droit international dont ils sont immédiatement
titulaires. Dans la mesure où ils peuvent faire valoir directement la
violation éventuelle de leurs droits devant un organe international
indépendant, leur qualité de sujet de droit des gens parait bien
fondé et cela même si la reconnaissance d'une telle
capacité demeure relativement fonctionnelle. Cette évolution du
droit international en ce qui concerne les droits de l'homme montre l'ampleur
et la spécificité de la protection accordée aux
individus.
Jacques MOURGEON58(*) démontre, pour sa part, que même si les
déclarations faites au niveau international obligent, à juste
titre l'organisation dont elles émanent, celles-ci ne le font pas
vis-à-vis des Etats pris isolément, même s'ils ont
voté en leur faveur. C'est dire qu'elles expriment les positions de
principe d'ordre moral, philosophique ou idéologique et traduisent une
espérance plus qu'un fait. Ces déclarations n'ont de valeur
juridique et de force obligatoire vis-à-vis des Etats que si les textes
de droit interne, c'est-à-dire les textes de droit constitutionnel les y
incorporent en y faisant référence. Ce n'est que dans ces
conditions qu'elles acquièrent l'effectivité. Cette incorporation
au droit de l'Etat enrichit leur reconnaissance.
Le fondement du respect des droits de l'homme est le
caractère sacré et la dignité de la personne humaine
créée à l'image de Dieu. Ce qui implique la lutte contre
toute forme d'exploitation et de manipulation perpétrées au
détriment des hommes, non seulement dans le domaine politique et
économique, mais aussi culturel, idéologique et médical.
Il s'agit donc d'une base solide pour construire l'édifice des droits de
l'homme. L'ensemble des droits de l'homme correspond donc à la substance
de la dignité de l'être humain compris dans son
intégrité, ils se réfèrent à la satisfaction
des besoins essentiels de l'homme, à l'exercice de ses libertés,
à ses rapports avec les autres personnes59(*).
Abordant dans le même sens de la dignité de la
personne, Jacques MOURGEON60(*) écrit : « la reconnaissance de
la dignité inhérente à tous les membres de la famille
humaine et de leurs droits égaux et inaliénables constitue le
fondement de la liberté, de la justice et de la paix dans le
monde ». Mais cet idéal de l'être humain libre ne peut
être réalisé que si les conditions permettent à
chacun de jouir de ses droits sont créées notamment la
libération de la crainte et de la misère.
Pour Paul-Emile BOLTE61(*), les droits de l'homme sont fondés sur la
dignité reconnue à tous les êtres humains, sur leur
égalité et leur fraternité. Le devoir de respecter ces
droits est un devoir de caractère universel. La promotion de ces droits
est un facteur de paix ; leur violation est une cause de tension et de
troubles, même au plan international. La dignité a, pour sa part,
sa racine dans l'image et le reflet de Dieu qui sont en chacun des hommes. Par
là, toutes les personnes sont essentiellement égales entre
elles.
Sur le plan purement philosophique, Blandine KRIEGEL62(*) montre que la nature humaine
comporte des droits inaliénables. C'est le droit naturel. La nature
humaine c'est la nature avec la loi, c'est-à-dire un univers où
l'exigence mathématique conduit en même temps à
définir des lois de rapports entre êtres et à
décrire l'égalité fondamentale des conditions. Les droits
de l'homme sont une obligation et si les hommes veulent vivre en
société, il leur faut respecter ce droit, sinon la
société humaine sera dissoute. Ici, le fondement du respect des
droits de l'homme est leur caractère obligatoire et leur
inhérence à la nature humaine.
Au regard de ce qui précède, disons que le
fondement des droits de l'homme et de leur respect réside dans le fait
que ce sont, d'abord, des règles obligatoires pour toute la
société humaine car ils sont inhérents à
l'existence même de l'être humain et, ensuite, repose sur la
dignité humaine qui doit bénéficier d'une promotion par
toute autre personne ou toute institution. Ainsi, ce chapitre est
subdivisé en cinq sections, à savoir, le système universel
de protection des droits de l'homme, les systèmes régionaux de
protection des droits de l'homme, le système national de leur mise en
oeuvre, la protection des droits de l'homme en période de conflit
armé et les droits de l'homme et l'exercice du pouvoir politique.
SECTION 1 : LES SOURCES
INTERNATIONALES DE PROTECTION
Le système international est constitué par un
ensemble de règles internationales d'origine conventionnelle ou
coutumière, sur la base desquelles les individus ou les groupes peuvent
escompter et/ou exiger un certain comportement ou certains avantages de la part
des Etats. Les droits de l'homme sont des droits inhérents à
chaque individu en tant qu'être humain. De nombreux principes et
directives non conventionnels (sofl law) font aussi partie des normes
internationales des droits de l'homme63(*).
D'après William SCHABAS, le droit des droits de la
personne vise à la fois l'individu et la collectivité et ses
sujets sont protégés non seulement dans leurs rapports avec les
tiers, mais également dans leurs rapports avec l'Etat. C'est ce qu'il
appelle les effets « verticaux et horizontaux » des
droits64(*).
Des deux définitions proposées ci-dessus, nous
pouvons, pour notre part, considérer le droit international des droits
de l'homme comme un ensemble de règles édictées sur le
plan international ou mondial et obligatoirement applicables par tous les Etats
dont le but est d'assurer la protection des individus et de leurs droits
fondamentaux. Ces règles peuvent être conventionnelles ou non.
Paragraphe 1 : Les
instruments universels de protection
La création en juin 1945,
à la Conférence de San Francisco, de l'Organisation des Nations
Unies (ONU) va rendre effectif l'idéal de la promotion et de la
protection des droits de l'homme et des libertés fondamentales sur le
plan universel. Dès sa création, l'ONU s'est
préoccupée d'encourager le respect des droits de l'homme. Au
cours de ses six premières années, son activité dans ce
domaine était essentiellement, mais non exclusivement, consacré
à la définition des « droits de l'homme » et
des « libertés fondamentales » et à
l'établissement des normes et des principes généraux,
surtout par l'adoption des instruments internationaux65(*).
Les principaux instruments en matière de protection et
de promotion des droits de l'homme et du droit humanitaire sont : la
Charte des Nations Unies (1945), la Déclaration Universelle des droits
de l'Homme (1948), les deux Pactes relatifs aux droits (1966).
A. La Charte des Nations Unies.
Dès son préambule, elle proclame la foi de
l'Organisation dans les « droits fondamentaux de l'homme, dans la
dignité et la valeur de la personne humaine ». Nombre de
dispositions affirment et réaffirment que l'ONU développera,
encouragera et favorisera « le respect universel et effectif des
droits de l'homme et des libertés fondamentales pour tous sans
distinction de race, de sexe, de langue ou de religion » (Articles 1,
13, 55, 62, 68, 76)66(*).
B. La Déclaration Universelle des
droits de l'homme.
Elle énumère les droits civils et politiques
ainsi que les droits économiques, sociaux et culturels. Après
avoir affirmé que tous les êtres humains naissent libre en
dignité et en droit, elle énonce, à l'article 2, le
principe de l'égalité, de la non discrimination sur les motifs de
race, de sexe, de couleur, de langue, de religion, d'opinion politique ou de
toute autre opinion d'origine nationale ou sociale, de fortune, de naissance ou
de toute autre situation. Mais en tant que résolution de
l'Assemblée Générale des Nations Unies, elle ne constitue
pas, techniquement, une source de normes qui lient les Etats, mais plutôt
un « idéal à atteinte » comme le dit son
préambule. C'est pour cette raison que les rédacteurs l'ont
complétée par l'adoption de véritables traités
relatifs aux droits et libertés : le Pacte relatif aux droits
civils et politiques et ses deux protocoles facultatifs ainsi que le pacte
relatif aux droits économiques, sociaux et culturels67(*). Ces Pactes possèdent
en eux un caractère obligatoire parce qu'ils dépassent le stade
de la « déclaration des droits » et se forcent de
les définir pour les rendre opératoires.
C. Les Pactes internationaux jumeaux de
1966
Le pacte international relatif aux droits civils et politiques
proclame le droit collectif des peuples à disposer d'eux-mêmes, le
droit à la vie, les garanties judiciaires, le droit à la libre
circulation, les libertés fondamentales, les droits politiques, le droit
à l'égalité et des droits des personnes appartenant
à des minorités. Il engage immédiatement les Etats
à respecter et à garantir à tous les individus se trouvant
sur leurs territoires et relevant de leur compétence les droits qui y
sont reconnus selon son article deuxième. Mais le pacte contient
également certaines clauses de limitation différenciées et
d'une clause générale de dérogation qui permet de
suspendre les droits reconnus au pacte, à l'exception de certains droits
dits intangibles, dans le cas où le danger public exceptionnel menace
l'existence de la nation. Ce pacte impose aussi l'obligation d'interdire, par
la loi, la propagande en faveur de la guerre et « tout appel à
la haine nationale, raciale ou religieuse qui constitue une incitation à
la discrimination, à l'hostilité ou à la
violence » (article 20)68(*).
Quant au Pacte international relatif aux droits
économiques, sociaux et culturels, il impose à l'Etat partie un
engagement d'agir, tant par son effort propre que par l'assistance et la
coopération internationale, notamment sur le plan économique et
technique au maximum de ses ressource disponibles, en vue d'assurer
progressivement le plein exercice des droits reconnus dans le pacte. Cet
engagement de mettre progressivement en oeuvre les droits économiques,
sociaux et culturels est pris notamment à l'égard du droit au
travail, à des conditions justes et favorables au travail et de droits
syndicaux, du droit à la sécurité sociale, du droit
à un niveau de vie suffisant, du droit à la santé et du
droit à l'éducation69(*).
Paragraphe 2 : Les
mécanismes de mise en oeuvre du droit international des droits de
l'homme
La distinction est faite entre les mécanismes
universels, leur enrichissement par les systèmes régionaux ainsi
que le prolongement de leur garantie en droit interne.
A. Sur le plan universel
Ce système est composé des organes
établis sur la base de la Charte des Nations Unies ou par les principaux
traités de droit international des droits de l'homme. La Commission des
droits de l'homme et sa Sous-Commission de la promotion et de la protection des
droits de l'homme sont les principaux organes créés sur la base
de la Charte. La Commission a élaboré, au cours des deux
dernières décennies, des procédures spéciales, tels
que les rapporteurs spéciaux par thème ou par pays, ainsi que les
groupes de travail chargés de contrôler et de faire rapport sur
les situations des droits de l'homme entrant dans leur mandat70(*).
Six des principaux traités du droit international des
droits de l'homme prévoient la création de Comités
d'experts indépendants chargés de contrôler la mise en
oeuvre de ces traités. Il s'agit des Comités des droits de
l'homme (pacte international relatif aux droits civils et politiques), des
droits économiques, sociaux et culturels, d'élimination de la
discrimination raciale, pour l'élimination de la discrimination à
l'égard des femmes, contre la torture, des droits de l'enfant.
Ainsi, chaque traité est doté d'un organe
sensé faire le suivi et le monitoring de son application par les Etats
signataires71(*).
Le Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme,
qui a la responsabilité première de protéger et de
promouvoir ces droits, joue un rôle clé. Il veille à
l'application pratique des normes internationalement reconnues en
matière des droits de l'homme et s'attache à renforcer le
programme des Nations Unies relatif aux droits de l'homme et à fournir
le meilleur appui possible aux organes chargés de surveiller
l'application des instruments aux mécanismes spéciaux mis en
place par la Commission des droits de l'homme72(*). Il s'emploie aussi à améliorer
l'efficacité de l'appareil des droits de l'homme des Nations Unies,
à stimuler la mise en oeuvre et la coordination des droits de l'homme
à l'échelle du système des Nations Unies, à
développer la capacité nationale, régionale et
internationale de promotion et de protection des droits de l'homme, et à
diffuser des textes et de l'information sur les droits de l'homme.
B. L'enrichissement de la garantie par
les systèmes régionaux
En parallèle avec le système
universel, William SCHABAS distingue plusieurs mécanismes
régionaux d'architectures viables et à des étapes de
développement différentes. Ces mécanismes
complètent les normes et les structures du système universel.
L'existence de ces systèmes ajoute une richesse importante à la
protection des droits de l'homme et apporte ses contributions
particulières à l'élaboration des normes. L'auteur
dénombre trois systèmes régionaux, à savoir, le
système européen, le système américain et le
système africain. Le continent asiatique est absent parce que son
système encore en gestation n'est pas effectivement
opérationnel73(*).
Le système européen a une influence sur la
création des autres et comprend trois systèmes distincts,
à savoir, le conseil de l'Europe, l'Union Européenne et
l'Organisation pour la sécurité et la coopération en
Europe, tous imprégnés, de façon particulière, par
la protection des droits de l'homme.
Dans le système américain, la Convention
américaine des droits de l'homme est le principal traité de
protection des droits de la personne. Elle est, à plusieurs
égards, un instrument progressiste et original, comme en fait foi son
article 4 sur les droits à la vie qui contient les stipulations les
plus abolitionnistes relatives à la peine de mort. Cette Convention
garantit également les droits civils et politiques de manière
essentielle.
Quant au système africain, l'Organisation de
l'Unité Africaine (Union Africaine) est la principale institution qui
touche la protection des droits de l'homme en Afrique avec pour instrument, la
Charte Africaine des droits de l'homme et des peuples. La différence de
cette Charte par rapport aux instruments précédents se situe
à plusieurs égards, notamment au fait qu'elle proclame non
seulement des droits mais également des devoirs, et elle garantit tant
les droits individuels que les droits collectifs. Le mot
« peuple » contenu dans la Charte conditionne la
portée de la plupart des droits collectifs de la Charte tels que le
droit des peuples à l'autodétermination et à
l'indépendance qui trouve son sens dans le contexte de la
décolonisation de l'Afrique. Aux droits des peuples, s'ajoutent
plusieurs autres droits de solidarité dont le droit au
développement économique, social et culturel ; le droit
à la jouissance du patrimoine commun de l'humanité et le droit
à un environnement satisfaisant et global. Elle n'a pas non plus remis
en cause les droits civils et politiques, économiques, sociaux et
culturels.
Mais dans son application, la Charte africaine n'offre pas de
solution en cas de conflit entre les droits et les devoirs de l'individu, comme
cela est plausible entre le devoir de ne pas mettre en danger la
sécurité de l'Etat et le droit à la liberté
d'expression. Il peut aussi y avoir des conflits potentiels entre les droits
individuels et les droits collectifs. De plus, une importante partie des droits
contenus dans les autres instruments a été omise dans la Charte
tandis que d'autres sont formulés de façon vague et
imprécise (exemple sur la peine de mort et le droit d'asile).
Toutefois, la Charte a créé des
mécanismes de contrôle en instituant une Commission africaine des
droits de l'homme et des peuples. Il y a deux autres traités
spécialisés adoptés dans le cadre du système
africain. Il s'agit de la Convention de l'O.U.A. régissant les aspects
propres aux problèmes africains des réfugiés,
adoptée le 10 septembre 1969, et la Charte africaine des droits et du
bien-être de l'enfant, adoptée en juillet 1990.
En ce qui concerne le système asiatique, le Conseil de
la Ligue Arabe avait adopté en 1994 la fameuse Charte arabe des droits
de l'homme. Mais cette Charte n'est pas encore entrée en vigueur. Elle
comprend une énumération des normes fondamentales
reflétant certaines particularités du droit musulman, dont
mention est fait dans le préambule de la Charte qui fait
également référence à la Déclaration
Universelle des droits de l'homme et les pactes internationaux.
Notons qu'il est doté d'une cour des droits de l'homme
chargée de juger les cas des violations des droits dont les Etats
membres sont responsables. Ces cours constituent le maillon fort des
systèmes de protections bien que celle africaine n'est pas encore
opérationnelle par défaut de ratification (cinq Etats seulement
sur les dix exigés pour son entrée en vigueur). L'action des
tribunaux et des commissions régionaux des droits de l'homme,
établis en application des principaux traités régionaux
des droits de l'homme en Europe, aux Amériques et en Afrique, est propre
au droit international des droits de l'homme et n'a pas d'équivalent en
droit international humanitaire. Toutefois, ces mécanismes
régionaux ont de plus en plus tendance à examiner aussi les
violations du droit international humanitaire74(*).
C. Le prolongement de la protection
internationale en droit interne
Jacques MOURGEON75(*) démontre que les déclarations obligent
les organisations dont elles émanent mais non pas les Etats
isolément, même si ceux-ci ont voté en leur faveur. C'est
dire qu'elles expriment des positions de principe d'ordre moral, philosophique
ou idéologique ; qu'elles traduisent une espérance plus
qu'un fait. Ces déclarations sont dépourvues de valeur juridique
et de force obligatoire dans les Etats. Il ne peut aller différemment
que si les textes du droit interne, c'est-à-dire les textes du droit
constitutionnel incorporent ces déclarations internationales au droit
interne en y faisant référence, auquel cas elles
acquièrent l'effectivité parfois réduite à la
reconnaissance constitutionnelle des droits ; ou bien ils en font des
textes de référence pour l'interprétation des
règles internes. En s'incorporant au droit de l'Etat, ajoute-t-il, elles
enrichissent d'autant la reconnaissance des droits par celui-ci. D'autre part,
les conventions internationales reposent, pour leur mise en application
effective, sur la seule action de l'Etat que, sauf dans de très rares
cas que l'on retrouvera, nul ne peut sanctionner et auquel nul ne peut se
substituer.
Les Etats sont donc tenus de prendre des mesures pour la mise
en oeuvre du droit international humanitaire et du droit international des
droits de l'homme en temps de paix comme en situation de conflit
armé.
Pour ce qui est du droit international humanitaire, certaines
mesures d'ordre juridique et pratique doivent être prise pour garantir le
plein respect de ce droit, à savoir, traduire les traités de
droit international humanitaire, prévenir et réprimer les crimes
de guerre à travers l'adoption d'une législation pénale
,protéger les emblèmes de la Croix-Rouge et du Croissant Rouge,
mettre en pratique les garanties fondamentales et judiciaires, diffuser le
droit international humanitaire, former du personnel qualifié en droit
international humanitaire et affecter des conseillers juridiques auprès
des forces armées.
Quant au droit international des droits de l'homme, il
contient lui aussi des dispositions obligeant les Etats à mettre en
oeuvre ses règles, dans l'immédiat ou progressivement. Ainsi les
Etats doivent adopter tout un éventail de mesures législatives,
administratives, judiciaires et autres, en vue de donner effets aux droits
inscrits dans les traités. Ces mesures peuvent englober l'adoption d'une
législation pénale interdisant et réprimant les actes
prohibés par les traités, ou prévoir le droit à un
recours devant les juridictions nationales contre les violations des droits
spécifiques et veiller à ce que celui-ci soit effectif76(*).
1. Mécanismes d'introduction des
droits de l'homme en droit interne
Le plus souvent, selon Jacques
MOURGEON77(*), la
reconnaissance s'effectue par des règles écrites au premier rang
desquels figure la constitution. Contenue dans un seul, ou parfois dans
plusieurs textes successifs et complémentaires, la constitution renferme
presque toujours des dispositions relatives aux droits de l'homme. Il importe
peu que les textes constitutionnels relatifs aux droits de l'homme soient
très détaillés ou brefs, ou bien qu'ils fassent l'objet
d'articles de la constitution, ou de son préambule ; ou bien encore
qu'une déclaration des droits antérieure leur soit
incorporée en preuve de fidélité à une
éthique établie.
Les prérogatives affirmées par la constitution
ne sont pas seulement des attributs abstraits de la personne, mais deviennent
des droits positifs et admis dans l'ordre social et, comme tels, ils sont non
seulement inviolables, mais aussi imposables au pouvoir comme à autrui.
Ils sont ensuite intangibles, car modifiables seulement par une révision
de la constitution. Dans le cas où cette dernière contient
d'importantes lacunes, des textes complémentaires, de nature
législative, sont alors nécessaires, si bien que les droits
relèvent des régimes juridiques différents (lois et
constitutions) plus ou moins modifiables et conduisent à une
précarité variable très démonstrative.
Toutes les Constitutions Congolaises (à partir de
celle de 1964) ont fait et font mention du respect des droits fondamentaux de
la personne. Les différents droits qui y sont consacrés sont
imposables aussi bien aux pouvoirs exécutif, législatif
qu'à celui judiciaire. Les dispositions ci-après méritent
d'être mentionnées pour les différentes
constitutions :
- La constitution du 1er Août 1964 (de
l'article 12 à l'article 46). Les articles 12, 13, 14, 15
(alinéas 2 et 3), 16, 20 (alinéas 1 à 3), 22
(alinéa 2), 23, 24, 30 (alinéa 2), 31 à 37, 39 à 43
ne pourront jamais être dérogés même en cas de
proclamation de l'état d'urgence ;
- La constitution du 24 juin 1967 consacre le respect des
droits fondamentaux aux articles 5 à 18 ;
- La loi du 9 avril 1994 portant acte constitutionnel
harmonisé relatif à la période de transition mentionne les
droits fondamentaux et les devoirs des citoyens.
Par ailleurs, la reconnaissance des droits et des
libertés fondamentaux de l'homme est promue même en temps de
conflit armé. C'est pour ce motif que les parties belligérantes,
bien que n'ayant pas toutes des constitutions comme des Etats, insèrent
dans leurs objectifs les aspects ou les mots ayant trait à la
reconnaissance de la dignité humaine et la promotion des droits sociaux,
politiques, économiques, culturels et environnementaux.
Ainsi, le Rassemblement Congolais pour la Démocratie,
dans sa déclaration politique du 12 Août 1998, avait
affirmé avoir pour objectifs l'instauration d'un Etat de droit
sauvegardant l'identité citoyenne pour tous, combattant le tribalisme,
l'ethnicisme, l'arbitraire, l'impunité généralisé,
prêt à promouvoir le bien-être social du peuple Congolais
par des mesures spécifiques notamment dans les secteurs de la
santé, de l'éducation et de l'emploi ainsi que de construire une
économie intégrée par une gestion rigoureuse et
responsable en vue d'éradiquer la misère du peuple et de poser
les bases du développement économique du pays. Aussi, il
lutterait pour promouvoir l'auto-organisation des paysans, des travailleurs,
des femmes et des jeunes pour la défense de leurs intérêts
matériels et moraux. C'est, en fait, une synthèse des droits
fondamentaux énoncés dans les diverses constitutions
susmentionnées bien que nous soyons en pleine rébellion.
L'inclusion des dispositions relatives à la notion du
respect des droits de la personne humaine dans la constitution (exemple des
préambules des constitutions du 1er Août 1964, du 24
juin 1967, de la loi du 09 avril 1994) répond au principe de la
primauté du droit international sur le droit interne. Cette
suprématie du droit international est consacré toujours par la
constitution qui dispose que les principes énoncés dans la
déclaration universelle des droits de l'homme du 10 décembre 1948
priment sur les dispositions ou les principes correspondant de la constitution
de la République. Ces dispositions sont sensées être
respectées en temps de paix comme en temps de conflit armé.
C'est dans ce cadre que même les groupes armés et mouvements
rebelles intègrent dans leurs actes constitutifs des dispositions
marquant leur attachement aux instruments internationaux régissant les
droits de l'homme. Tel est le cas des statuts de l'A.F.D.L. et de la
déclaration politique du R.C.D. qui mentionnent leur souscription et
leur adhésion à toutes les valeurs humaines prônées
par la Déclaration Universelle des droits de l'homme, la Charte
africaine des droits de l'homme et des peuples ainsi les autres instruments y
relatifs78(*).
2. Le contenu des engagements de l'Etat
au respect des droits de l'homme
L'obligation de l'Etat à respecter
et à promouvoir les droits de l'homme se résume aux devoirs de
reconnaissance, de mise en oeuvre et de pédagogie de ces droits79(*). La reconnaissance se
matérialise par l'adhésion aux instruments de protection. Mais
pour que celle-ci ait un sens, il importe qu'au-delà d'elle, les droits
de l'homme soient une réalité vivante grâce à leur
introduction en droit interne. Dans le cas contraire, elle est lettre morte et
son discours dénué de tout fondement.
La mise en oeuvre consiste, pour sa part, à la mise en
place des conditions favorables à l'exercice et à
l'éclosion des droits de l'homme. Il s'agit donc d'initier et de mettre
en place un cadre juridique et institutionnel adéquats tant à
l'intérieur qu'à l'extérieur des frontières
nationales. Quant à la pédagogie des droits de l'homme, elle est
une simple formation à apporter aux populations qui ignorent leurs
droits. Loin, s'en faut, l'Etat doit apprendre les droits de l'homme à
ses citoyens au sens de leur donner une parfaite connaissance de la substance
de ces droits et leur en faire prendre conscience afin qu'ils en assurent la
promotion et en cultivent le respect.
3. Les droits de l'homme et l'exercice
du pouvoir politique
L'on assiste aujourd'hui, non sans conflit,
au succès de l'idéal démocratique dans le monde. Ce
succès va de pair avec une grande attention et une sollicitude pour les
droits de l'homme.
a. Les droits de l'homme et les enjeux
politiques.
Il apparaît avec Ronelingué TORIARA80(*) que les droits de l'homme sont
mal protégés et même non protégés. La
réalité est que dans le pays, les droits de l'homme prennent une
forte connotation politique ; et en la matière, les incertitudes
sont énormes. La reproduction interminable des mouvements de
rébellions armées donne au pouvoir une justification pour
sévir contre la population civile au nom de la raison d'Etat ou de la
préservation de l'ordre public. Pour lui, le paradoxe est que du point
de vue de l'Etat, le droit s'énonce de manière claire et
précise, mais semble se piéger au bout par lui-même, face
à la nécessité d'exercer la violence au nom de
l'intérêt général. Parler de protection des droits
de l'homme, dans ce cas, c'est tout simplement s'en servir pour les
intérêts politiques. Tout en les violant au nom suprême des
valeurs du pays, le pouvoir politique utilise les droits de l'homme de
manière très sélective, comme article d'exposition
à entretenir les alliances internationales.
S'il faut considérer que les droits de l'homme ne
prennent un sens qu'à travers la manière dont ils sont
vécus et respectés, ajoute-t-il, il y a lieu de constater le
décalage entre ce qui est dit et ce qui se pratique. Les discours, les
déclarations de principe ou d'intention deviennent inflationnistes. Une
autre conséquence est que cela développe de manière
considérable une polarité - raison d'Etat - contre laquelle se
brise toute possession, tout mécanisme de contrôle, toute
initiative de changement.
b. Droits de l'homme et
démocratie
Denis MASUMBUKO Ngwas81(*) démontre
qu'historiquement, à partir du monde occidental, l'humanité a
évolué des monarchies absolutistes à la démocratie,
de l'intolérance religieuse à la liberté de culte et de
religion. Le passage d'une période à l'autre s'est
opéré, en effet, progressivement grâce à des
réflexions sur la politique et à des mouvements de lutte pour le
changement politique et social. Depuis les premières formulations
éclairées des droits de l'homme jusqu'aux formulations actuelles,
comme la déclaration universelle des droits de l'homme, ceux-ci
s'imposent comme racine et condition irrévocable de la démocratie
et de l'Etat de droit.
1° L'idée substantielle du modèle
démocratique82(*)
La pensée politique, depuis la fin du XIXe
Siècle, s'est habituée à résumer le contenu de la
démocratie dans la formule empruntée d'Abraham LINCOLIN,
« gouvernement du peuple, par le peuple et pour le
peuple ». On aurait pu penser, ici, que le collectif peuple qui est
la source du pouvoir, et que si l'individu est concerné, c'est en tant
qu'il fait partie du peuple au titre de citoyen. Mais la démocratie
« classique », telle qu'elle se conçoit, met en
oeuvre, plutôt, les droits de l'individu fondés sur la
liberté individuelle, et ici, sur la liberté politique. Dans la
tradition chrétienne, l'individu est la fin de la société,
la fin de la politique, il est la fin du droit. En fin de compte, l'individu
est la source de la finalité du pouvoir politique.
Dans ce sens, la démocratie est mise en oeuvre en ce
qu'une bonne partie de la doctrine appelle « liberté -
autonomie », qui représente la faculté par laquelle
l'homme dispose de lui-même. C'est cette faculté qui commande la
participation de chaque citoyen à l'établissement des
règles qui le régissent et au choix de ses dirigeants. Telle est
la tradition chez les grands théoriciens de l'Etat de nature (John
LOCKE, Jean-Jacques ROUSSEAU, par exemple) et chez les
révolutionnaristes de XVIIIe et XIVe
Siècles (la Révolution Française, en particulier). Mais
avec l'insertion de l'individu dans la société, la liberté
individuelle a subi une opération de socialisation qui, d'une part,
faisait de nombres de libertés individuelles et de libertés
collectives ne pouvant se revendiquer et se réaliser (comme la
créance) qu'en groupe, qu'en association, et, d'autre part, transformait
l'individu de l'Etat de nature à l'homme situé, concret, avec
cette fois des libertés qu'inspire la fonction sociale. D'où la
diversification des droits et libertés qui, de politiques, deviennent
également économiques, sociaux et culturels. Dans ce cas, la
démocratie politique doit se compléter par une démocratie
économique et sociale, la seconde donnant des moyens de sa
réalisation à la première, permettant ainsi la
satisfaction des besoins autres que politiques.
Le gouvernement démocratique ne sera donc pas
uniquement celui qui émane du peuple, mais celui qui respecte, voire
réalise, les droits et intérêts des citoyens. Mais ce qui
caractérise la conception dominante de la démocratie c'est,
découlant des valeurs de liberté et des droits individuels,
d'abord le libéralisme et le suffrage, ensuite, le pluralisme et, enfin,
la séparation des pouvoirs comme mécanisme de garantie de la
liberté dans le fonctionnement de l'Etat ainsi que dans les rapports
entre celui-ci et les citoyens.
Le libéralisme est le courant de pensée
bâti autour de la valeur des droits de l'individu, et qui propose
d'aménager la société de manière à assurer
et à garantir la liberté individuelle. La société
de droit ayant comme fin l'individu, les rapports entre gouvernants et
gouvernés doivent être organisés de telle façon que
la liberté du citoyen ne subisse aucune limitation de la part du pouvoir
à laquelle l'individu n'ait consenti en ayant participé à
la désignation des gouvernants. De plus, l'individu est l'acteur
principal et le bénéficiaire privilégié de la vie
sociale. Il y jouit de la totale liberté d'initiative, d'entreprise, de
propriété pour satisfaire ses besoins, préserver ses
intérêts et contribuer au progrès collectif. Enfin, en
raison de ce qui précède, l'Etat est tenu de s'abstenir dans les
activités des particuliers, de porter atteinte aux droits et
libertés de l'individu.
2° Les droits de l'homme comme fondement de la
démocratie
Les droits de l'homme proclamés universellement
à partir de 1948, dit Denis MASUMBUKO Ngwas83(*), par les Nations Unies
constituent une avancée considérable dans les pensées
politique, juridique et sociale contemporaines. Périodiquement
réaffirmés et précisés par d'autres textes
juridiques, régulièrement soutenus par les assises
juridictionnelles sans cesse développées, ces droits ne sont pas
de simples déclarations d'intention, de simples idées
lancées. Bien au contraire, ce sont des règles de droit qui
engagent et obligent les Etats qui ne les ont pas acceptées et
adoptées. Ces Etats doivent en garantir la jouissance et en assumer la
protection pour leurs citoyens sans aucune distinction fondée sur les
considérations humaines d'ordre subjectif. De façon plus directe
et plus visible, ajoute-t-il, les droits de l'homme sont au fondement de la
démocratie comme forme de gouvernement ou d'organisation sociale
acceptable.
En effet, ces droits posent clairement des piliers de la
démocratie lorsqu'ils énoncent les principes relatifs :
- aux libertés fondamentales de la personne humaine,
aux droits et devoirs du citoyen, aux élections libres et transparentes,
au pluralisme politique et social, etc. Soit la DEMOCRATIE POLITIQUE ;
- à l'égalité devant la loi, aux
procédures régulières,... soit la DEMOCRATIE
JUDICIAIRE ;
- à l'égalité devant les services
sociaux, au pluralisme économique, etc. Soit la DEMOCRATIE ECONOMIQUE ET
SOCIALE ;
- aux valeurs de fraternité, de tolérance, de
coopération, (...) qui sont des facteurs pour la participation effective
dans un esprit démocratique.
Mais les droits de l'homme et la démocratie sont en
relation d'influence réciproques, en ce sens qu'ils se
déterminent mutuellement. Les droits de l'homme constituent les piliers
de la démocratie. En revanche, la démocratie est un facteur de
promotion des droits de l'homme. Dans un certain sens, elle apparaît
comme un contenant qui a pour contenu les droits humains. Dans les Etats
où les droits de l'homme sont aujourd'hui plus ou moins affirmés
et respectés existent des structures de société de nature
démocratique. Des structures qui sont assez respectueuses de
l'individu, et qui sont assez soucieuses de la vie sociale collective.
Par contre, là où les droits de l'homme sont
méconnus ou violés massivement et/ou systématiquement,
c'est pratiquement la « jungle sociale ». L'individu est
écrasé, la masse populaire négligée et la
collectivité étouffée sous la logique des forts, des
puissants, généralement avec la complicité des
élites minoritaires aliénées.
c. Les droits de l'homme et la
limitation des pouvoirs
Le but final de l'instauration d'un régime politique
n'est pas la domination, ni la répression des hommes, ni leur soumission
au joug d'un autre. Ce à quoi l'on a visé par un tel
système, c'est à libérer l'individu de la crainte, de
sorte que chacun vive, autant que possible, en sécurité ; en
d'autres termes, conserve au plus haut point son droit naturel de vivre et
d'accomplir une action. Après quoi, ils seront en mesure de raisonner
librement. Bref, le but de l'organisation de la société c'est la
liberté84(*).
Alain TOURAINE85(*) fustige qu'aucun principe n'a d'importance plus
centrale dans l'idée démocratique que celui de la limitation de
l'Etat, qui doit respecter les droits humains fondamentaux. La limitation du
pouvoir politique est née de l'alliance de l'idée de droit
naturel et de celle de la société civile, conçue au
début comme la société économique dont les acteurs
revendiquaient la liberté d'emprise, d'échanger et d'exprimer
leurs idées. Sans cette liberté
« bourgeoise », l'idée des droits fondamentaux
serait restée purement critique, se confondant avec la résistance
à l'oppression défendue par la plupart des philosophes
politiques, de Thomas HOBBES à Jean-Jacques ROUSSEAU ; et sans la
défense des droits fondamentaux, l'esprit de libre commerce ne se serait
pas transformé en esprit démocratique. Celui-ci est né de
l'alliance de l'esprit de liberté et de l'esprit de
l'égalité. L'appel aux droits de l'homme, ajoute-t-il, va dans le
sens opposé à celui de la philosophie politique, qui domine le
siècle qui sépare la « Glorious
révolution » anglaise de la Révolution Française
et qui ne voulait donner à la politique aucun autre fondement
qu'elle-même. Pour cette pensée, aussi bien pour ROUSSEAU que pour
HOBBES, l'ordre politique est l'ordre de la raison, qui s'oppose à
l'ordre naturel, dominé par les désirs illimités de
chacun, ou à l'ordre social dominé par l'inégalité
et la corruption. La modernité consiste, dans ce domaine comme dans les
autres, à faire triompher la raison, c'est-à-dire l'ordre sur le
chao, la violence sur l'égoïsme.
Pour Désiré MOUSSOKI, citant RIVERO, une
certaine doctrine soutient que le droit n'est que la mise en oeuvre des
conceptions éthiques, sociales et économiques qui
prévalent dans une société. C'est
précisément sur la question des droits de l'homme, dont
l'effectivité conduit à une certaine réduction de la
sphère des compétences des autorités
politico-administratives, que la question de leur violation, ou de leur
méconnaissance est plus ardue et suscite que de nombreuses voix
s'élèvent ou s'indignent86(*).
Nous venons donc de parcourir l'ensemble des
législations relatives aux droits de l'homme et aux libertés
fondamentales tant au niveau international, régional que national ainsi
que leurs rapports avec le pouvoir politique. Dans le troisième
chapitre nous allons pouvoir passer à la situation réelle de tous
ces droits dans la Province du Sud-Kivu pendant la période de la
deuxième guerre dite de « rectification ».
SECTION 2 : DU RESPECT
DROITS FONDAMENTAUX DANS LES CONFLITS ARMES
Cette protection est spécialement assurée par
le droit humanitaire qui couvre bon nombre d'aspects ne relevant pas du domaine
d'application du droit international des droits de l'homme, tels que la
conduite des hostilités, le statut des combattants et des prisonniers de
guerre. De même, le droit international des droits de l'homme traite
d'aspects de la vie en temps de paix qui ne sont pas réglementés
par le droit international humanitaire, comme la liberté de presse, la
liberté de réunion, le droit de vote et le droit de grève.
Mais les deux ont pour objet de protéger la vie, la santé et la
dignité des individus bien que sous un angle différent. Par
exemple, les deux branches du droit visent à protéger la vie
humaine, interdisent la torture ou les traitements inhumains ou cruels,
définissent les droits élémentaires des personnes qui font
l'objet d'une procédure pénale, interdisent la discrimination,
comprennent des dispositions pour la protection des femmes et des enfants,
réglementent des aspects du droit à la nourriture et à la
santé87(*).
Appelé aussi droit de la guerre ou droit des conflits
armés, Pierre GUSIRA, dans son exposé sur
« l'introduction au droit international humanitaire »,
considère cette terminologie comme un ensemble de normes du droit
international d'origine conventionnelle ou coutumière destinées
à régler des problèmes survenant en période de
conflits armés internationaux ou non internationaux (rébellions
ou troubles internes diverses)88(*). Il règle donc les problèmes
humanitaires découlant directement des conflits armés,
protège les personnes et les biens qui sont ou peuvent être,
directement affectés par le conflit et restreint aux parties y prenant
part le droit d'utiliser les méthodes et les moyens de leur
choix89(*).
On distingue deux grandes parties du droit international
humanitaire, à savoir, le droit humanitaire empirique et le droit
humanitaire moderne90(*).
Paragraphe 1 : Le
droit humanitaire empirique
Il a toujours existé dans toutes les
sociétés du monde, en effet, des coutumes humanitaires
appliquées pendant la période de guerre. Ces coutumes servent
à réglementer le comportement des combattants sur le champ de
bataille, à leur donner une éthique de la guerre. La guerre, dans
la tradition africaine, par exemple, était considérée
comme un privilège des nobles, c'est-à-dire de la classe sociale
la plus élevée. Elle était donc une action noble qui
devait obéir à un certain nombre de règles et de principes
en rapport avec le traitement des non combattants (les femmes, les enfants, les
vieillards) et de leurs biens ; le traitement de l'ennemi capturé
(les prisonniers de guerre) ; l'interdiction de certaines armes
jugées trop dangereuses dans les combats, l'interdiction de certaines
méthodes de combat, etc. Ces lois sont dites empiriques parce qu'elles
sont valables selon les sociétés et selon les périodes.
En plus, elles ne sont écrites dans aucun document.
Paragraphe 2 : Le
droit humanitaire moderne
Il se distingue du premier par le fait qu'il
est écrit, il est permanent et international. Ce droit s'applique en
temps de guerre et vise la protection de l'homme pendant et après les
hostilités. Il est né du droit de Genève en 1964 avec la
publication de la première Convention de Genève par le
Comité International de la Croix-Rouge (C.I.C.R.). On en distingue deux
grandes branches : le droit de Genève et le droit de la Haye.
A. Le droit de Genève.
C'est le droit humanitaire proprement dit. Il porte sur la
protection des personnes qui ne sont pas des combattants (les personnes
civiles) et même les militaires hors combats (capturés,
blessés, malades, etc.). Ces deux catégories doivent être
traitées avec humanité. Le droit de Genève a un
caractère spécifiquement humanitaire et vise le seul profit des
victimes.
B. Le droit de la Haye.
Le droit de la Haye est le droit de la guerre proprement dit.
Il est né à Saint-Pétersbourg en 1968 et fixe les droits
et les devoirs des belligérants de la conduite des opérations.
Il limite le choix des moyens à nuire à l'ennemi. Il s'agit de
limiter, voire d'interdire certaines méthodes et moyens de combat qui
tuent sans discrimination ou provoquent des souffrances excessives. Dans le
même sens, le droit de la Haye traite de la protection des biens
culturels, de l'environnement, etc.
Paragraphe 3 : Les
instruments de protection y relatifs
A. Les Conventions du 12 Août
194991(*)
Adopté en 1864, la première convention vise
l'amélioration du sort des blessés et des malades dans les forces
armées en campagne (guerre sur terre). La deuxième convention de
Genève (1899) vise, par contre, l'amélioration du sort des
blessés, des malades et des naufragés dans les forces
armées sur mer. La troisième convention de Genève (1929)
est, quant à elle, relative au traitement des prisonniers de guerre.
La quatrième convention de Genève, enfin, est
relative au traitement des personnes civiles en temps de guerre car
l'apparition et la multiplication des missiles ainsi que d'autres armes qui
tuent sans discrimination provoque beaucoup de perte en vies humaines du
côté de la population civile. Cette dernière convention
s'applique en cas de guerre déclarée ou de tout autre conflit
armé surgissant entre deux ou plusieurs des hautes parties
contractantes, même si l'état de guerre n'est pas reconnu par
l'une d'elles. Elle s'applique également dans tous les cas d'occupation
de tout ou partie du territoire d'une partie contractante, même si cette
occupation ne rencontre pas de résistance militaire.
B. Les protocoles additionnels
(1977)
Pour arriver à mieux protéger les civils, deux
protocoles additionnels ont été créés, distinguant
les conflits armés internationaux des tensions internes et des guerres
de libération. Cette création est motivée par la
naissance de la guérilla qui a fait que les combattants ne sachent plus
distinguer leurs ennemis de la population non combattante.
Le protocole additionnel I protège les victimes des
conflits armés internationaux tandis que le second protège les
victimes des conflits armés non internationaux.
Paragraphe 4 : Les
liens entre le droit humanitaire et le droit des droits de l'homme
Le droit des droits de l'homme et le droit humanitaire ont la
même origine historique et philosophique. Ils sont tous deux
fondés sur la nécessité de protéger la personne
humaine contre les forces mauvaises qui la menacent à savoir la guerre
et l'arbitraire. Les deux systèmes constituent un ensemble de
dispositions juridiques internationales assurant le respect de la personne
humaine et son épanouissement.
Le lien entre ces deux volets du droit international public
n'est apparu qu'à la fin des années 1960 avec les guerres faisant
intervenir à la fois les aspects du droit international humanitaire et
des droits de l'homme (guerres de libération en Afrique, conflit au
Moyen-Orient : Nigeria et Vietnam, par exemple) que les gens en prirent
conscience. C'est la Conférence internationale des droits de l'homme
réunie en 1968 à Téhéran par les Nations Unies qui
a servi de cadre où ce lien a été officiellement
établi. Sa résolution XXIII intitulée « Respect
des droits de l'homme en période de conflit armé »
préconise « une meilleure application des conventions dans les
conflits armés, ainsi que la conclusion des traités
supplémentaires (...). La convergence du droit international humanitaire
et des droits de l'homme montre que la paix et la guerre, les guerres civiles
et les conflits internationaux, le droit international et le droit interne se
chevauchent de plus. Il s'en suit que le droit humanitaire et le droit des
droits de l'homme peuvent être applicables ensemble, de façon
cumulative ou complémentaire »92(*).
Quelques éléments de différence
méritent cependant d'être relevés entre le droit
international humanitaire et le droit des droits de l'homme :
1° Le droit des droits de l'homme contient des principes
généraux applicables en temps de paix (avec certaines
dérogations en temps de guerre) en rapport avec l'Etat et ses propres
ressortissants ;
2° Le droit humanitaire n'est applicable qu'au moment
où la guerre vient empêcher ou restreindre l'exercice des droits
fondamentaux de l'homme. Il est valable en cas de conflit armé et il
traite des relations entre l'Etat et des ennemis. Celui-ci est au dessus des
Etats et ses normes ont force obligatoire pour tous. Il n'y a pas de
dérogation possible pour le droit humanitaire.
La deuxième partie qui suit aborde les aspects
particuliers liés à la garantie des droits fondamentaux en
République Démocratique du Congo, notamment dans la Province du
Sud-Kivu, champ d'étude retenu pour la présente analyse.
DEUXIEME PARTIE :
CONFLITS ARMES ET DROITS FONDAMENTAUX DANS LA PROVINCE DU SUD-KIVU
En R.D.C.en général et au
Sud-Kivu en particulier, des milliers de civils sans défense sont
illégalement tués. Beaucoup ont été torturés
et un grand nombre d'entre eux sont portés disparus93(*). Baudouin HAMULI Kabarhuza
estime que les deux dernières guerres, celles de 1996-1997 et 1998
à 2002, ont à elles seules totalisé environs trois
millions de morts, plus de deux millions de déplacés internes et
plus d'un million et demi de réfugiés dans les pays limitrophes.
Toutes les provinces ont été touchées mais les provinces
du Kivu et du Katanga, selon l'auteur, semblent avoir payé le lourd
tribut94(*).
Pour Collette BRAECKMAN95(*), depuis le 02 Août 1998, la population de l'Est
du Congo a été prise dans l'engrenage de la terreur, que les
pillages se sont conjugués aux massacres. En 2000, l'ONG
américaine, International Rescue Committee (I.R.C.), fit une projection
établie grâce à des enquêtes de terrain dans sept
villages de l'Est. Ces enquêtes ont été dirigées par
l'épidémiologiste Lès ROBERTS. Ce dernier avait ainsi
estimé le nombre de victimes à 1,7 millions puis 2,5 millions de
morts. Il précise aussi que cette projection n'est qu'une estimation
conservatoire car l'étude n'a pu être réalisée que
dans les zones relativement d'accès facile. D'autres enquêtes,
menées par Oxfam, Save the Children, Christian Aid et OCHA, l'Office
humanitaire des Nations Unies ont corroboré le terrible constat de
Lès ROBERTS.
Ces droits fondamentaux sont manifestement violés par
les différents acteurs aux conflits et chacun d'entre a des motivations
différents de ceux des autres bien que les conséquences soient,
en pratique, les mêmes.
CHAPITRE I : DES
DROITS FONDAMENTAUX MANIFESTEMENT VIOLES PAR LES ACTEURS AUX CONFLITS
Le 02 Août 1998, le Rassemblement Congolais pour la
Démocratie (R.C.D.) est créé à l'Est de la R.D.C.
avec la bénédiction du Rwanda, de l'Ouganda et du Burundi qui
sont, par ailleurs, parties prenantes au conflit armé.
Simultanément débutent les massacres à l'Est comme
à l'Ouest du pays. Au Sud-Kivu, l'état des droits fondamentaux de
l'homme est passé, au fil du temps, aux stades critique, catastrophique
et même insupportable. Les violences s'y poursuivent avec un acharnement
qualifié d'indescriptible96(*).
SECTION 1 : LES
PRINCIPALES VIOLATIONS ET LEURS AUTEURS
Qu'il s'agisse des droits humains fondamentaux, des droits
reconnus à certains groupes sociaux (les enfants, les femmes, les
réfugiés), des droits humains en période de guerre, etc.,
la situation de leur garantie est au plus bas niveau. Les violations sont
considérables et peuvent être réparties en cinq grands
groupes, à savoir :
1. Les violations politiques classiques (arrestations
arbitraires, traitements dégradants, détentions dans les
conditions inhumaines, représailles, tortures, purges punitives,
etc.) ;
2. Les violations liées aux conflits intergroupes (de
type classique, régionaliste ou ethnique, etc.) ;
3. Les violations liées au contexte de guerre (crimes
de guerre, crimes de génocide et crimes contre l'humanité,
etc.) ;
4. Les atteintes aux aspirations légitimes du peuple
notamment en matière de développement économique, social
et culturel ;
5. Les difficultés, pour le peuple Congolais, d'exercer
le droit de disposer de lui-même (difficulté due principalement
à la « colonisation interne » par plusieurs pouvoirs
politiques de fait et à l'« internationalisation » du
conflit politique Congolais).
Ces cinq groupes se résument donc, pensons-nous, aux
violations de toutes les générations des droits de l'homme (les
droits civils et politiques, les droits économiques, sociaux et
culturels ainsi que les droits environnementaux). Les organismes de
défense des droits de l'homme, les médias et les rapports de
l'ONU ont, en effet, dénoncé plusieurs atteintes aux droits de
l'homme, l'insécurité permanente et les massacres des populations
dans les territoires jadis occupés par les groupes rebelles et leurs
alliés.
Paragraphe 1 : Les
droits civils et politiques
A. Les atteintes au droit à la
vie.
L'article 6, alinéa 1, du Pacte international relatif
aux droits civils et politiques dispose : « le droit à la
vie est inhérent à la personne humaine. Ce droit doit être
protégé par la loi. Nul ne peut arbitrairement être
privé de la vie ». Cet article vise les cas
d'exécutions sommaires, extrajudiciaires, les massacres liés aux
faits de guerre ou non dont les civils non armés sont victimes. Ces
atteintes sont souvent commises sous forme de meurtres, volontaires ou non,
perpétrés par les éléments des différentes
armés ou de la police.
En effet, les affrontements qui ont ponctué la
période de 1998 à 2002 ont fait des milliers de morts parmi la
population civile qui n'est pourtant pas directement liée au conflit.
Des crimes crapuleux ont été commis par les belligérants.
Le tableau N°1 en annexe illustre les tourments vécus par ces
populations du Sud-Kivu pendant ces années.
De l'analyse faite des informations figurant dans ce tableau,
force est de constater que :
· Les mois d'août à décembre 1998
sont les plus marqués par le nombre élevé de victimes des
massacres. Les exemples les plus patents sont notamment ceux des massacres
d'Uvira du 03 août qui ont fait au moins 1500 morts selon les sources
locales (Chef Coutumier, ligues coutières), les massacres de Kasika du
23 au 25 août avec à peu près 800 et 1.500 tués
d'après les témoignages des églises, des rescapés,
des ONGD et de Human Rights Watch. Makobola a été, par deux fois,
attaqué (le 25 août 1998 avec 200 victimes et du 30
décembre 1998 au 1er janvier 1999 dont le nombre de morts fut
estimé entre 500 et 1500 personnes). Uvira n'est pas en reste avec
plusieurs attaques dont les plus importantes sont celles du 31 août 1998
(au moins 630 morts à Kasenga), du 9 mai 2000 à Katogota (entre
40 et 300 morts). Fizi a connu, en mai 2001 au moins 1000 morts selon les
sources locales et humanitaires. Tous les territoires, districts,
localités sont touchés par les massacres bien que leur ampleur en
nombre de victime va diminuant au fil des années.
· Le tableau illustratif indique que les territoires les
plus touchés sont, par le nombre élevé de victimes et par
la fréquence d'attaque, Shabunda, Mwenga, Uvira, Kabare. La Ville de
Bukavu, quant à elle, compte le moins de victimes du fait que c'est un
centre urbain.
· Au début de la guerre, les massacres avaient un
caractère purement collectif (cas de Makobola, Kasika, etc.). Avec
l'évolution et la diminution des affrontements sur les principaux
fronts, la situation s'est réduite progressivement aux cas isolés
avec moins de morts. C'est le cas que l'on connaît à partir du
début de l'année 2000 suite à la signature de l'accord de
cessez-le-feu de Lusaka.
Ces massacres s'accompagnent, le plus souvent, de la
destruction massive et aveugle d'infrastructures de base. L'on assiste donc
à des incendies, à des destructions et pillages des villages
attaqués. Cette pratique était rependue, en effet, dans de
nombreux villages depuis le déclenchement de la guerre dans les
provinces sous occupation de la rébellion. Jean MIGABO Kalere97(*) en a ainsi proposé
quelques cas. Selon lui, les habitations ont été en effet
incendiées et laissant de nombreuses familles sans abri (voir tableau
N°2 en annexes). Ces actes de destruction sont posés dans
distinction de lieux (lieux de Cultes, écoles, infrastructures
sanitaires, maisons des particuliers, etc.) et ce sont les milieux ruraux qui
sont les plus touchés.
En plus des massacres collectifs à grande
échelle, l'on mentionne aussi les cas d'exécutions sommaires soit
des combattants opposés aux ordres destructeurs de leur
hiérarchie (cas des 200 soldats assassinés le 03 août 1998
à l'aéroport de Kavumu. Ils étaient accusés
d'être restés fidèles au gouvernement de Kinshasa), soit
des voleurs présumés ou des déserteurs. Ces
exécutions étaient, pour la plupart, décidées par
le Conseil de Guerre Opérationnel dans la province après des
procès sommaires entachés de vices de forme et de
procédure.
B. Les atteintes à la
dignité humaine.
Il est relevé ici des cas qui choquent les consciences.
Il s'agit, par exemple des cas d'arrestations arbitraires,
d'enlèvement, de tortures, de mises en détention
caractérisées par la force et l'arbitraire.
1. Les arrestations arbitraires
L'article 9, alinéa 2 du Pacte international relatif
aux droits civils et politiques dispose que « Tout individu a droit
à la liberté et à la sécurité de sa
personne. Nul ne peut faire l'objet d'une arrestation ou d'une détention
arbitraire. Nul ne peut être privé de sa liberté, si ce
n'est pour des motifs, et conformément à la procédure
prévus par la loi ». Plusieurs personnes au Sud-Kivu ont
été arrêtées et/ou détenues arbitrairement et
cela souvent sans inculpation ni jugement et pendant des périodes
prolongées. Si la justice ordinaire conserve encore son estime, les
organes chargés de la distribuer ou de la dire constituent
néanmoins une source de préoccupation.
Alors que le Code de procédure pénale
prévoit que personne ne peut être arrêtée et mise en
prison sans que la loi ne l'autorise ; ces détenus doivent
être déférés devant le parquet dans les 48 heures
suivant leur arrestation, au Sud-Kivu, hormis le non respect de ces
règles élémentaires, les forces de l'ordre et de
sécurité ainsi que les agents publics s'arrogent le pouvoir
d'arrêter et de détenir des personnes sans mandat et sans les
déférer devant le parquet dans le délai
réglementaire. Parfois, les mandats de justice, les exploits d'instance
et les autres démarches administratives et judiciaires sont même
monnayés pour faire avancer rapidement l'affaire.
Ignorant ou négligeant carrément les
procédures en vigueur, certains officiers de la police judiciaire
avaient des maisons de détention sous leur responsabilité
arrêtant ainsi abusivement n'importe où, n'importe quand et dans
n'importe quelles circonstances les personnes présumées coupables
d'infractions. Avec ou sans mandat d'arrêt, les policiers arrêtent
les gens sur la route, au marché et dans les maisons ; les jettent
en prison ou dans les cachots. Des centres de détention secrets ont
même été créés pour accueillir les
détenus (Mess des Officiers de l'Auditorat, résidences
officielles des autorités politico-administratives et militaires, amigo,
containers, puits, caves, prisons souterraines, etc.). Parfois, de paisibles
citoyens sont arrêtés pour des faits civils comme les dettes, les
conflits de parcelles ou fonciers qui sont transformés en infractions
pénales par les officiers du ministère public dans l'intention de
nuire. Ces arrestations sont suivies des traitements cruels, inhumains et
dégradants, des tortures par flagellation (coups et fouets ou de verge),
la privation des visites. La libération est subordonnée par le
paiement d'amendes forfaitaire, arbitrairement fixés et sans aucune
référence à la loi.
Voici, ci-après, quelques cas illustratifs
enregistrés et suivis par les organisations membres de la Ligue des
Droits de la personne dans la région des Grands-Lacs (L.D.G.L.) et ses
membres sur le terrain, dans le rapport des années 2000 et
2001 :
· Du 10 au 27 mars 2000, détention dans des
cachots de la Division Provinciale de la Sécurité et des
Renseignements (D.S.R.) à Bukavu de Monsieur MUKABO MUCHUKI J.-M. ;
ancien Coordinateur du R.C.D. à Uvira, soupçonné d'avoir
collaboré avec les ennemis du mouvement qu'il servait.
· Le 13 avril 2000, les services de
sécurité du R.C.D. ont arrêté et détenu
Monsieur BYAMUNGU LUFUNGULO, propriétaire de la pharmacie SODIPHAR au
motif qu'il soignerait les mayi-mayi et aurait mal parlé du mouvement et
collaboré à la concrétisation des journées
« villes mortes » à Bukavu en février
2000.
· Le 1er mai 2000, l'épouse de BAGULA
BUHENDWA, directeur de l'école primaire Pendu de Mushekere en Commune
Urbano-Rurale de KASHA, a été arbitrairement arrêtée
en lieu et place de son mari absent de la maison pour des raisons qui n'avaient
pas été élucidées.
· Le 23 juin 2000, monsieur Vicent, un sujet Hutu
rwandais travaillant dans les champs du chef de quartier de Mushenyi, Monsieur
KATEMBO et du Diacre MUKENDI Bin RUZINGI, a été
arrêté à quelques mètres du bureau de la
Croix-Rouge, antenne de Sange, territoire d'Uvira. Depuis lors, aucune
nouvelle de lui.
· Le 29 août 2000, Messieurs Gervais CHIRHALWIRA,
Paulin BAPOLISI, MUZALIYA WAKYEBWA et Madame Régine MUTIJIMA,
respectivement Vice-Président de la Société Civile du
Sud-Kivu, ancien directeur de Cabinet du Gouverneur de Province, directrice de
l'école primaire Mwangaza et responsable de l'ONG Action pour le
Développement Intégré de la Femme (ADIF) ont
été arrêtés à Bukavu et
déportés à Kisangani où ils ont été
gardés pendant plusieurs semaines à la prison d'Osio. Ils ont
été accusés d'avoir livré des informations
compromettantes à la presse étrangère après
l'attentant à la grenade qui a coûté la vie à 8
personnes lors de la Kermesse du 26 août 2000. Mais dans les couloirs
cette arrestation était consécutive à leur nomination par
le pouvoir de Kinshasa comme membres de l'Assemblée Constituante de la
R.D.C.
· Le 09 octobre 2000, 12 animateurs de la
Société Civile du Sud-Kivu, membres du Réseau des
Associations des droits de l'homme du Sud-Kivu (RADHOSKI) ont été
arrêtés par des militaires du R.C.D. conduits respectivement par
les Commandants FUNU et CHUMA à Bukavu. Au moment de leur arrestation,
les victimes ont été traînées dans la boue, battues
à coups de fouets et de bâtons avant d'être conduits,
certains au Camp SAIO et d'autres dans l'amigo de la D.S.R. Leurs biens parmi
lesquels un ordinateur, des appareils de communication, des montres ont
été emportés par les militaires du R.C.D.
2. Enlèvement, disparitions
forcées, traitements cruels, inhumains et dégradants
Plusieurs personnes ont été enlevées
délibérément au Sud-Kivu. Cette pratique porte atteinte
à tout un ensemble de droits de l'homme inscrits dans les instruments
juridiques nationaux et internationaux. Il s'agit notamment des droits à
la vie, à la liberté et à la sécurité ;
du droit à la dignité humaine. Des actes de torture
(mutilations), de viol, de vol qu'il serait fastidieux d'énumérer
étaient également commis. Les témoignages ou les
allégations ne donnent pas toujours de précisions sur les
circonstances de temps, sur le nombre et les identités des victimes.
La ligue des Droits de la personne dans la région des
Grands-Lacs, à travers ses associations membres, en donne des exemples
dans ses rapports de 1998 à 2002 :
· Le 07 avril 1998, trois personnes du village Rubanga,
situé à environ 10 kilomètres de Lemera-Centre en
Collectivité de Bafuliro, territoire Uvira ; ont été
enlevés et portés disparues. Le lendemain, cinq autres personnes
ont subi le même sort à Lemera ;
· Le 07 septembre, en territoire de Kabare, trois
personnes ont été portées disparues. Il s'agit de
messieurs FATAKI habitant le localité Cirhavanyi, MUHANZI MUHIMUZI de
Bahagarha, MATABARO MUHANZI également de Cirhavanyi, groupement de
Bushwira ;
· Le 22 février 1999, Monsieur ZIRIMWABABO, un des
chefs de village de la Chefferie de Ngweshe en territoire de Walungu a
été battu et poignardé par les Mayi-Mayi accusés
d'avoir accueilli les militaires du R.C.D./Goma en provenance de
Kamanyola ;
· Dans la nuit du 10 au 11 mars 1999, des hommes
armés envahissent la maison de Monsieur INGIMANYAGE MURONDA du quartier
Mukukwe en Commune d'Ibanda à Bukavu. Après avoir ligoté
la sentinelle, ces hommes avaient forcé la porte et
pénétré dans la maison où ils frappèrent
Monsieur et madame INGIMANYAGE avant d'emporter une partie de leurs
biens ;
· Le 20 mars 1999, Monsieur SAFARI MARABU, habitant le
village Nguliro à Chifunzi a été enlevé par des
militaires et ne fut relâché qu'au 31 décembre de cette
année.
· Le 02 juin 1999, Messieurs SHAMAMBA KANDOLE et MUHINYA,
âgés respectivement de 18 et 16 ans, habitant le village Muhinga
à Chifunzi, dans le groupement de Kalonge en territoire de Kalehe ont
été portés diaprus ;
· Monsieur ZABANITA MIVUMBI habitant de Mukama/Kalehe a
été détenu du 11 au 15 mai 2000 par les militaires du
R.C.D./Goma sans motif légal. Pendant sa détention, il a
été battu jusqu `à perdre l'usage de sa
langue ;
· Le 1er juin 2000, madame Berthe
âgée de 25 ans révolus, a été violée
par un militaire près de Ndondu en territoire de Fizi. Son bourreau,
après avoir assouvi ses appétits sexuels, avait tiré trois
balles dans son appareil génital ;
· Monsieur Augustin BAMBE a été soumis
à la bastonnade sur ordre du greffier du tribunal coutumier de Kalehe
pour n'avoir pas pu rembourser une dette ;
· Le 12 avril 2002, Monsieur BUHAGARHA KACIS,
âgé de 26 ans, a été enlevé par les
militaires au service du R.C.D./Goma à Walungu pour non respect
présumé des obligations dudit mouvement.
Au cours du même mois, le Commandant KYATENGA Patrick de
la police à Kamituga, en territoire de Mwenga avait administré
des coups de matraques sur l'organe génital de Monsieur BYEMBA RUBENI
détenu dans le cachot de la police. Une expertise médicale avait
établi, à ce sujet, que ces coups pourraient entraîner la
stérilité de la part de la victime.
3. Les atteintes aux droits à la
sécurité et à la paix
Aux termes de l'article 9 du Pacte international relatif aux
droits civils et politiques, toute personne a droit à la liberté
et à la sécurité de sa personne. Cette
sécurité des citoyens d'un pays repose sur le respect par
celui-ci des droits de l'homme. Mais la sécurité est
restée précaire sur tout le territoire congolais, en
général, et dans la province du Sud-Kivu, en particulier ;
cela en rapport avec les affrontements entre les forces gouvernementales et
leurs alliés, d'une part, et le R.C.D. et ses alliés ainsi que
les bandes armées, d'autre part. Il s'en suit alors une vague de
violations massives d'autres droits humains et du Droit international
humanitaire tels que la liberté de circulation, les prises d'otage, la
soumission aux travaux forcés, etc.98(*)
4. La liberté de circulation
« Quiconque se trouve sur le territoire d'un Etat a
le droit d'y circuler librement et d'y choisir librement sa résidence.
Toute personne est libre de quitter n'importe quel pays, y compris le
sien » (Article 12 du Pacte international relatif aux droits civils
et politiques). L'exercice de ce droit est constamment entravé par les
bandes armées et la rébellion du fait de l'existence de plusieurs
administrations suivant le groupe contrôlant le milieu. De nombreuses
barrières ont, en effet, été érigées sur les
axes routiers rendant la libre circulation des personnes et des biens
difficile. Pour les franchir, les passagers et les véhicules sont le
plus souvent soumis au paiement d'une taxe variant entre 2 et 5 dollars
américains. Héritiers de la Justice a dénoncé dans
ses rapports trimestriels de l'année 2001 les barrières
érigées par les Mayi-Mayi sur le tronçon routier Bukavu -
Mwenga. Tout passager étant soumis au paiement de la taxe variable selon
l'humeur du préposé au contrôle de la barrière.
Cette situation était la même en territoire de Walungu et de
Shabunda.
5. Les travaux forcés
Aux termes de l'article 8 du Pacte international relatif aux
droits civils et politiques, nul ne sera tenu en esclavage et à la
traite des esclaves sous toutes ses formes, nul ne sera tenu en servitude ou ne
sera astreint à accomplir un travail forcé et obligatoire. Les
populations civiles sont battues, pillées, parfois réduites
à l'esclavage dans la province du Sud-Kivu. Elles sont aussi contraintes
de travailler dans les mines de Coltan (Colombo-Tantalite).
Il arrive, en outre, que les groupes armés utilisent
des civils comme porteurs ou, en cas d'affrontements, comme boucliers humains
car, selon ces assaillants, ils ne peuvent subsister sans ces
misérables soumis à leur autorité : ils comptent sur
eux pour les nourrir, se mettre à leur service, travailler sous leurs
ordres99(*).
Pour ce qui est du droit à la paix, l'article 20 du même
pacte interdit toute propagande en faveur de la guerre ainsi que tout appel
à la haine nationale, raciale ou religieuse qui constitue une incitation
à la discrimination, à l'hostilité ou à la
violence.
De l'observation faite de la situation du Sud-Kivu, il ressort
que la crise politique était ponctuée par des discours de haine.
Ceux-ci étaient tenus par les responsables tant politiques que
militaires à l'occasion des meetings populaires. Ces discours
étaient, pour la plupart, diffusés en direct ou en rediffusion
sur les radios émettant à Bukavu notamment la R.T.N.C., la Radio
« Patriote » détenue par des inconnus se faisant
passer pour des mayi-mayi. La première diffusait, à titre
illustratif, à travers l'émission « la
politique », animée à l'époque par Philippe
MBILIZI Mulonda, des appels à la haine contre les Katangais
accusés d'avoir confisqué le pouvoir politique et
spécialement, contre le président de la République,
Laurent-Désiré KABILA. Pour sa part, la Radio
« Patriote » diffusait des messages incitant à la
violence et à la haine contre l'ethnie Tutsi en général et
le « Banyamulenge » en particulier, l'Ouganda et le Rwanda
qualifiés d'agresseurs contre la R.D.C.100(*)
C. L'état des libertés
publiques
La population du Sud-Kivu n'avait, pendant la guerre aucune
possibilité de jouir de toutes ses libertés publiques telles la
liberté d'opinion, d'association, de culte et d'expression ; de
réunion pacifique, etc.
1. Les libertés de presse,
d'opinion et d'expression
« Nul ne peut être inquiété
pour ses opinions. Toute personne a droit à la liberté
d'expression ; ce droit comprend la liberté de rechercher, de
recevoir et de répondre des informations et des idées de toute
espèce, sans considération de frontières, sous une forme
orale, écrite, imprimée ou artistique, ou par tout autre moyen de
son choix » (Article 19, alinéas 1 et 2 du Pacte international
relatif aux droits civils et politiques). L'Est du territoire Congolais
était caractérisé par une situation telle que l'exercice
de ces libertés a été et est encore sérieusement
mis à mal. Des membres de la société civile et certains
dirigeants politiques ont été soit arrêtés, soit
intimidés pour avoir exprimé publiquement des opinions contraires
à celles de la rébellion. C'est le cas du président de la
société civile, coordination de Bukavu, Monsieur CIRHALWIRA et de
ses collègues qui ont été arrêtés et
transférés à Kisangani après s'être
prononcés sur l'attentant qui coûta la vie à plusieurs
personnes à la Kermesse organisée par la Bralima à Bukavu
en février 2000. L'arrestation est due à toute personne qui ose
exprimer une opinion contraire à l'idéologie du
« gouvernant » ou du maître des lieux sous son
contrôle. Les ennuis réservés varient selon la
gravité d'opinions émises et vont du séjour
indéterminé dans les cachots à l'exécution
extrajudiciaire.
Une telle situation explique ainsi la grande
difficulté d'existence d'une presse libre dans les différents
coins et recoins de la région du Kivu. Les autorités rebelles
ont, en effet, multipliées des entraves à un libre exercice de la
liberté de la presse. Les organes de presse étaient
paralysés par les effets de la guerre. La presse publique audiovisuelle,
instrument idéologique de la rébellion, y est demeurée la
principale source locale d'information. Cependant, les journalistes qui y
travaillent ne sont pas libres parce que soumis aux ordres et à la
logique du pouvoir en place. Pour ce qui est des radios privées ayant vu
le jour dans des conditions officielles au Sud-Kivu, les cahiers de charge leur
étaient imposés ne pouvaient pas leur permettre de remplir
pleinement leurs devoirs d'information de la population. Raison pour laquelle
elles axent leurs émissions sur les domaines tels que la religion, le
développement.
La volonté de bâillonner la presse se
concrétise par les menaces proférées à l'endroit
des journalistes. Plusieurs journalistes ont été
arrêtés, humiliés, intimidés. L'exemple le plus
frappant est celui de l'interdiction de commenter les faits de guerre qui
aboutit à la suspension pour la première fois au mois de mai 1999
des activités de la Radio Maendeleo et l'arrestation de Monsieur
KAMENGELE OMBA, animateur et chef des programmes radio de ladite chaîne.
Il leur était reproché d'avoir publié certains articles
critiques à l'égard du pouvoir notamment sur les réactions
de la population bukavienne (jets de pierres) lors du meeting organisé
quelques jours plus tôt à la place Major Vangu en Commune
d'Ibanda. Autorisée à reprendre ses activités au mois
d'août 2001, elle se verra, pour la seconde fois, retirée sa
licence d'exploitation le 09 décembre 2002 pour avoir diffusé sur
les ondes les avis de la population de Bukavu sur la mise en circulation des
nouvelles plaques minéralogiques par les pouvoirs publics. Les radios
qui continuaient d'émettre étaient soumises à un
contrôle sévère et à la censure de toute publication
prétextant la guerre, le respect de l'ordre public.
2. Les libertés d'association, de
réunion et syndicale
Les articles 21 et 22 du Pacte international relatif aux
droits civils et politiques disposent que le droit de réunion pacifique
est reconnu et que toute personne a le droit de s'associer librement avec
d'autres, y compris le droit de constituer des syndicats et d'y adhérer
pour la protection de ses intérêts. L'exercice de ces droits ne
peut faire l'objet que des seules restrictions prévues par la loi et qui
sont nécessaires dans une société démocratique,
dans l'intérêt de la sécurité nationale, de la
sûreté publique, de l'ordre public ou pour protéger la
santé ou la moralité publiques ou les droits et les
libertés d'autrui.
Le climat de terreur qui régnait dans la Province du
Sud-Kivu a voué à l'échec toute liberté
d'association ou de réunion publique pacifique. Toute idée de
rassemblement dans un lieu privé ou public n'était pas sans
risque d'être qualifiée d'atteinte à l'ordre public ou de
connivence avec l' « ennemi ». L'exercice des
libertés était aussi compromis par la multiplication des
formalités à remplir à chaque réunion d'organes
statutaires des associations. Les défenseurs des droits de l'homme
n'ont pas été épargnés.
Ainsi, à partir de novembre 1999, tout
déplacement sur le terrain devait requérir le visa de la
coordination technique des agences onusiennes et des ONG, structure
montée par les autorités rebelles pour entraver la liberté
des animateurs de ces organisations. Un certain nombre de défenseurs des
droits humains a été inquiété pour avoir osé
dénoncer les différentes violations sans tenir compte de leurs
auteurs. L'illustration est celle du saccage, le 05 juin 1999 par les soldats
rebelles, des bureaux du groupe JEREMIE ; une organisation
indépendante de défense des droits de l'homme basée
à Bukavu pour avoir publié des critiques sur la
détérioration de l'enseignement et d'autres services sociaux dans
les zones sous contrôle de la rébellion101(*).
S'agissant de la liberté syndicale, son exercice a
souvent été entravé par des menaces
proférées à l'endroit des syndicalistes qui revendiquaient
les droits de leurs syndiqués. La ligue des Droits de l'homme dans la
région des Gands-Lacs (L.D.G.L.) cite, à titre exemplatif, le cas
des délégués syndicaux de l'Office des Douanes et Assises
(OFIDA), messieurs KAMITANJI, BABOLE, MATESO et SEKUNDI qui ont
été interpellés et arrêtés pendant plus de
quatre jours par les services de sécurité pour avoir
réclamé une augmentation de la prime et dénoncé les
affectations fondées sur des considérations ethnico-tribales.
D. La violence à l'égard
des femmes
La violence à l'égard des femmes désigne
tous les actes de violence dirigés contre le sexe féminin, et
causant ou pouvant causer aux femmes un préjudice ou des souffrances
physiques, sexuelles ou psychologiques, y compris la menace de tels actes, la
contrainte ou la privation arbitraire de liberté, que ce soit dans la
vie publique ou privée. Elle s'entend comme englobant, sans y être
limitée, les formes de violence énumérées
ci-après102(*) :
- la violence physique, sexuelle et psychologique
exercée au sein de la famille, y compris les coups, les sévices
sexuels infligés aux enfants de sexe féminin au foyer, les
violences liées à la dot, le viol conjugal, les mutilations
génitales et autres pratiques traditionnelles préjudiciables
à la femme, la violence non conjugale, et la violence liée
à l'exploitation ;
- la violence physique, sexuelle et psychologique
exercée au sein de la collectivité, y compris le viol, les
sévices sexuels, le harcèlement sexuel et l'intimidation au
travail, dans les établissements d'enseignement et ailleurs, le
proxénétisme (tirer profit de la prostitution d'autrui ou
encourager) et la prostitution forcée ;
- la violence physique, sexuelle et psychologique
perpétrées ou tolérée par l'Etat où qu'elle
s'exerce.
Au Sud-Kivu et dans toute la partie orientale de la R.D.C.
sous contrôle rebelle, des femmes étaient tuées de
manière particulièrement atroce. Nombre de femmes et de jeunes
filles ont été violées avant leur assassinat, d'autres
pendant leur détention. La violence multiforme à l'égard
des femmes est ainsi utilisée comme arme de guerre par toutes les
parties belligérantes dans le cadre d'un effort pour gagner le
contrôle sur les civils et les territoires qu'elles occupent et pour
conserver ce contrôle103(*). Les femmes constituent donc des véritables
entreprises de déshumanisation menées à une très
grande échelle.
Faisant référence au rapport publié en
mai 2002 par Human Rights Watch, Collette BRAECKMAN104(*) mentionne qu'il s'agit d'une
guerre dans la guerre du fait que, poussée par une pauvreté
extrême, les femmes continuent de se rendre au champ pour cultiver, dans
les forêts pour y faire du charbon ou au marché pour y vendre
leurs produits, même si de telles activités les exposaient
à la violence sexuelle. Elles sont utilisées comme butin de
guerre ou comme esclaves sexuelles, comme porteuses. Ces viols, ajoute
l'auteur, sont accompagnés de brutalités extraordinaires
(appareils génitaux coupés, seins amputés, etc.).
En illustrant la situation, Collette BRAECKMAN fustige que les
femmes de Mwenga sont entrées dans le martyrologe de la R.D.C. : en
septembre 1999, cinq d'entre elles avaient été accusées de
sorcellerie par l'épouse d'un militaire. Elles furent alors battues,
déshabillées, violées par les militaires puis
jetées dans des trous d'eau salée. Les villageois, pour les
sauver, avaient dû payer les militaires. Aussi, ajoute-t-elle, lors du
passage de Louis MICHEL, le ministre belge des affaires
étrangères, à Bukavu en Janvier 2002, un
représentant de la Société Civile du Sud-Kivu lui montra
une fillette de 13 dénommée Elizabeth. Celle-ci était la
seule survivante d'une opération militaire après avoir
été violée par plusieurs soldats en pleine campagne. Sa
voisine qui l'accompagnait succomba peu de temps après.
Faisant aussi mention de la violence au quotidien dans la
province du Sud-Kivu, Clotilde AZIZA BANGWENE et INTERAYAMANGA rapportent que
les viols et enlèvements dans le mois de février 2002 de trois
filles au village de Canjavu (le 11 février), de deux femmes dans le
groupement de Burhale (le 12 février et le 13 du même
mois)105(*).
E. La violation des droits de
l'enfant.
Les enfants devront recevoir les soins et l'aide dont ils ont
besoin et, notamment :
- Ils devront recevoir une éducation telle que le
désirent leurs parents ou les personnes qui en ont la garde ;
- Toutes les mesures doivent être prises pour faciliter
le regroupement des familles momentanément
séparées ;
- Les enfants de moins de quinze ans ne doivent pas être
recrutés dans les forces ou groupes armés, ni autorisés
à prendre part aux hostilités. Dans le cas contraire au point
précédent, une protection spéciale doit leur être
applicable106(*).
Dans la pratique, pour ne citer que cet exemple, la
République Démocratique du Congo, en général, et la
Province du Sud-Kivu, en particulier, connaissent une situation telle que les
enfants, dès l'âge de 8 ans, sont recrutés comme porteur,
pisteurs, garde du corps ou soldats selon un rapport publié par
l'UNICEF.
Paragraphe 2 : Les
droits économiques, sociaux et culturels
L'article 22 de la Déclaration
Universelle des droits de l'homme stipule que « Toute personne,
en tant que membre de la société, a droit à la
sécurité sociale, elle est fondée à obtenir la
satisfaction des droits économiques, sociaux et culturels indispensables
à sa dignité et au libre développement de sa
personnalité, grâce à l'effort national et à la
coopération internationale, compte tenu de l'organisation et des
ressources de chaque pays ». Le développement des droits
économiques et sociaux dépend de la situation des Etats et de
leurs finances. Il est donc évident que dans un contexte de guerre ces
droits soient ignorés au profit des dépenses et
préoccupations militaires. C'est ainsi que l'environnement
économique de l'Est de la R.D.C. se détériorait de jour au
lendemain, renforçant la précarité des conditions de vie
des populations.
En effet, depuis la conquête des provinces de l'Est par
la rébellion, celle-ci s'est peu préoccupée de
l'amélioration des conditions de vie de la population et consacrait une
grande partie aux dépenses militaires. Aussi, les affrontements entre
belligérants ont entraîné une forte
détérioration des conditions de vie socio-économiques sur
tous les plans. La pauvreté s'est accrue, l'insécurité
alimentaire suite à la flambée des prix des denrées de
première nécessité alors que le pouvoir d'achat de la
population reste trop bas. Ces affrontements ont, par ailleurs, causé la
destruction avancée de la plupart des infrastructures : routes,
marchés, écoles, hôpitaux et centres de santé,
bâtiments administratifs, etc. avec des répercutions sur les
conditions de vie des populations civiles.
A. Economie et gestion des fonds
publics.
L'absence d'un programme économique cohérent sur
l'ensemble du territoire sous contrôle de la rébellion constitue
un facteur déterminant dans le processus de désintégration
économique de la Province du Sud-Kivu. Les importations et les
exportations ont été mises à mal par les taxes
exorbitantes qui découragent les opérateurs économiques et
ralentissent de manière aussi drastique l'activité
économique allant jusqu'à la paralysie de plusieurs secteurs.
En effet, le nombre de percepteurs des taxes s'est accru dans
les marchés urbains et ruraux. Confrontée à cette
pléthore de taxes et de surtaxes, la population ne sait plus lesquelles
payer et lesquelles laisser. Et devant ces hésitations, la force de
police intervient avec son lot de conséquences. Depuis août 1998,
notent les rapports de la ligue des Droits de la personne dans la région
des Gands-Lacs, les taxes dues à l'importation ont évolué
de façon croissante. Elles atteignaient, en 1999, 13 à 14 % FOB
(Free On Board) pendant qu'en Ouganda, pays voisin impliqué, par
ailleurs, dans le conflit Congolais ; ces frais ne représentent que
moins de 1 % du prix FOB. Pour l'importation de poissons salés et du
riz, la taxe était de 18,45 % sur la valeur CAF (Coût, Assurance,
Frêt). Le taux pour les véhicules variait entre 18,45 % et 35,6 %
sur la valeur CAF. La taxe due à l'exportation du bois, de l'or et du
café était successivement de 6 ; 0,75 et de 1 % sur la
valeur FOB en 2000 et 2001. Cette situation a ainsi provoqué la hausse
des prix des produits de première nécessité107(*).
A cela s'ajoute la mauvaise gestion des fonds publics, les
détournements et autres formes d'abus. En effet, force est de constater
que des recettes importantes sont enregistrées, notamment, les taxes
perçues dans les marchés, les patentes périodiques et
impôts de diverses entreprises et de grandes sociétés ainsi
que d'autres recettes réalisées par les services publics et
parapublics opérant au Sud-Kivu (OFIDA, Direction Provinciale des
Contributions, SNEL, REGIDESO, Office Congolais de Café, Titres
Fonciers, entités décentralisées, etc.).
La politique de maximisation des recettes prônée
par les responsables rebelles n'a jamais été suivie de
réalisations concrètes dans le développement
socio-économique de la province. Pourtant, le cessez-le-feu
observé depuis le dernier trimestre de l'année 2000 sur les
principaux fronts par les belligérants devait, en principe, contribuer
à la réduction des dépenses militaires au profit d'autres
charges telles que la santé, les salaires des fonctionnaires, les soldes
des militaires, l'aménagement de l'infrastructure, etc.
B. Santé, Education et
travail.
Les articles 25 et 26 de la Déclaration Universelle des
Droits de l'Homme des nations Unies disposent que toute personne à droit
à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son
bien-être et ceux de sa famille. Mais un niveau de vie suffisant suppose
du travail, et du travail rémunéré de façon
à satisfaire les besoins dont font partie les soins de santé.
Ensuite, comment accéder aux soins de santé dans une province
où hôpitaux, pharmacies et centres de santé sont
détruits, incendiés et/ou pillés ?
En effet, au Sud-Kivu, le taux de chômage est
très élevé. Le peu de fonctionnaires de l'administration
publique est impayé malgré les recettes fiscales, parafiscales et
douanières réalisées par les services publics. Dans les
institutions privées, les responsables sont forcés à
mettre leurs travailleurs en congé technique ou procéder à
des compressions des effectifs suite au manque de finances suffisantes pour
répondre aux obligations salariales suite à l'environnement
économique malsain. Tel est le cas de la Bralima et de la Pharmakina qui
ont procédé, plus d'une fois, à des licenciements pendant
ces quatre années de guerre.
Concernant le droit à la santé, il y a lieu de
relever que dans un contexte de guerre caractérisé par la crise
économique, facteur de paupérisation
généralisée de la population ; l'accès aux
services de santé est devenu un véritable casse-tête. Les
coûts sont, en effet, devenus très élevés. En outre,
la destruction des infrastructures sanitaires a véritablement
contribuée à la détérioration de l'état de
santé des populations du Sud-Kivu. Cette destruction d'infrastructures
sanitaires est prouvée par le tableau N°3 en annexe du travail que
nous présente Jean MIGABO KALERE à titre illustratif. Le tableau
reprend quelques services médicaux pillés et détruits
pendant la période du 02 août 1998 à décembre 2000.
Ici encore, ce sont les Centres des milieux ruraux qui sont les plus
touchés par ces actes de pillage et de destruction.
L'insécurité a aussi conduit les médecins
et les techniciens de santé de l'intérieur à fuir vers les
grands centres urbains. Selon Médecins Sans Frontières, dans
certains districts de l'Est de la R.D.C. plus ou moins 75 % des enfants de
moins de 3 ans n'ont pas survécus. La mortalité infantile
moyenne décime 60 % des enfants de moins de 5 ans. Près de 18,5
millions de personnes n'ont plus accès aux soins de santé, les
enfants n'ont plus été vaccinés dans certains coins et la
mortalité maternelle est l'une des plus élevés du monde
avec à peu près 3000 décès sur 100 000 en couche.
Cela est lié notamment à la guerre, et lorsque les armes se
taisent, c'est la pauvreté et la misère qui tuent108(*).
Les écoles sont aussi victimes de la guerre dans la
province du Sud-Kivu. Le secteur de l'éducation est, en effet, largement
affecté par les effets de la guerre. Les infrastructures scolaires,
surtout celles situées dans les zones rurales, ont été
détruites par les belligérants. Plus de la moitié
d'écoles ont été touchées et, dans certains
villages, seulement un enfant sur deux fréquente l'école.
D'où une diminution sensible du taux de scolarisation. Dans les
territoires de Mwenga, Bunyakiri, Kalehe, Kalonge, par exemple, les
écoles n'ouvrent pas souvent les portes à cause de
l'insécurité. Dans d'autres comme Walungu, Fizi, Uvira,
Shabunda ; les écoles ne sont opérationnelles que dans les
chefs-lieux109(*). Dans
la ville de Bukavu, par contre, les écoles ont fonctionné par
intermittence au début de la guerre avant une stabilisation qui survint
peu de temps après.
Un autre aspect non négligeable ayant affecté
le domaine de l'éducation en faveur de la jeunesse du Sud-Kivu est le
problème de frais d'études. Cette situation remonte à
1993, depuis que l'Etat Congolais démissionna des missions sociales par
l'accumulation des arriérés de salaires des fonctionnaires et
enseignants. Face à cette situation, les responsables d'écoles et
les professeurs mirent au point, en accord avec les parents, le système
de « prime » ou de « frais de
motivation ». Mais, à l'heure actuelle, suite à la
situation de conflit armé qui a accru le niveau de pauvreté de
toute la population Congolaise, la plupart de parents sont incapables de payer
cette prime due aux enseignants, prime variant entre 2,5 et 25 dollars le mois
par enfant dans la ville de Bukavu. Cela a une lourde conséquence sur le
taux de déperdition scolaire alors que le pays connaissait, vers la fin
des années 1990, un taux de scolarisation de 30 % ; presque sans
équivalent en Afrique110(*).
Ainsi, les enquêtes rapportées par la Ligue des
Droits de la personne dans la région des Grands-Lacs (1999-2000-2001)
démontrent que le taux de déperdition scolaire est de 35 % en
1999 et atteignait 40 % en 2000 uniquement dans la ville de Bukavu. Au niveau
de l'enseignement supérieur et universitaire, ce taux était de 11
% à l'I.S.D.R. et de 7 % à l'I.S.T.M., par exemple, pour
l'année académique 1999-2000. Il est passé, pour
l'année académique 2000-2001 à plus de 15 %111(*).
Pour clore cette section, mentionnons que toutes ces
violations des droits humains dont il est question sont en même temps des
violences structurelles, instituées, vives, chaudes, massives et
systématiques. Elles frappent la dignité humaine dans ses valeurs
fondamentales d'ordre personnel (la vie, l'estime de soi, la liberté,
l'auto-accomplissement) ou d'ordre relationnel et collectif
(l'égalité, la tolérance, la fraternité,
l'ouverture à l'autre, etc.)112(*). Elles ne distinguent pas aussi les lieux
(marchés, lieux de cultes, installations sanitaires), les
catégories socio-économiques (leaders coutumiers, intellectuels,
commerçants, hommes d'églises ou personnalités
religieuses) et touchent tant les villes que les villages de la
province113(*).
Mais il faut noter que toutes les informations livrées
sur les violations des droits humains au Sud-Kivu ne constituent qu'une infime
partie de celles qui se commettent. Le nombre exact de victimes n'est souvent
pas précisé et les données officielles ne correspondent
pas toujours à celles des sources indépendantes
constituées des sources locales renforcées par les investigations
menées sur les lieux de violations par les organisations
spécialisées. Cet état des choses est dû, notamment,
au contexte d'insécurité qui régnait dans la
majorité des territoires sous contrôle des bandes armées
créant ainsi une inaccessibilité. Il y a aussi l'effacement de
traces des forfaits par les auteurs des crimes.
Enfin, l'état de guerre dans lequel se trouvait la
R.D.C., en général, et la Province du Sud-Kivu, en particulier,
ne peut en aucun cas servir d'alibi pour toutes les atrocités commises
sur les civils non armés. Aucun degré de violence de la part des
violateurs ne saurait justifier ces massacres et autres violations dont les
populations sont victimes. Mais qui sont, en fait, les auteurs des violations
des droits humains en cette période de guerre dans la Province du
Sud-Kivu ? La réponse à cette question est donnée
dans le paragraphe qui suit.
Paragraphe 3 : Les
auteurs des violations
Depuis le début de la guerre dite de
« rectification » en R.D.C., plus ou moins 18 groupes
armés, qualifiés de « forces
négatives » se croisent, s'allient ou se combattent, selon les
rapports des Nations Unies. Parmi eux l'on peut citer, notamment, les rebelles
burundais (F.N.L., F.D.D.), les ex-Forces Armées Rwandaises, les
extrémistes Hutu appelés interahamwe, les forces
d'autodéfense locale formées par le pouvoir rebelle sous forme de
milices levées dans les villages, les forces d'autodéfense
populaires dites Nationalistes Mayi-Mayi, les rebelles ougandais, etc. Tous ces
groupes ont, certes, des objectifs différents dans la conduite de la
guerre mais le seul point commun qui les caractérise sur le terrain est
qu'ils pillent les villageois, emportent les récoltes, tuent les
récalcitrants, violent les femmes ou recrutent de force les jeunes
garçons114(*).
Quoique que le Rassemblement Congolais pour la
Démocratie ait prétendu contrôler tout le territoire
sud-kivutien, la majeure partie de son intérieur était
dirigée par les groupes armées dénommés
« Mayi-Mayi » appuyés par les miliciens
rwandais « interahamwe » et les ex-FAR. Cette forme de
rébellion dans la rébellion a créé
l'insécurité généralisée dans la grande
partie des territoires notamment ceux de l'arrière-province (Kalehe,
Fizi, Walungu, Kabare, etc.). Ainsi, dans les deux camps, les droits et
libertés se trouvaient habituellement bafoués. A propos des
forces du R.C.D., il faut mentionner les militaires incontrôlés,
leurs alliés rwandais qui ont toujours été
impliqués dans les grandes batailles ainsi que les forces de l'ordre et
de sécurité. Les bandes armées, quant à elles, se
spécialisaient plus dans les embuscades tendues sur certains axes
routiers et dans les attaques contre les villages.
Comme toutes les parties au conflit ont combattu sur le
terrain dans la Province du Sud-Kivu, il serait alors subjectif
d'épargner aussi les troupes gouvernementales du fait que les
affrontements avec les civiles ont été signalés au
début de la guerre. D'où, le gouvernement Congolais est aussi
auteur des violations des droits humains dans la Province du Sud-Kivu bien que
celles-ci soient de faible intensité par rapport à d'autres
groupes en présence.
Ainsi, toute la population du Sud-Kivu est unanime au fait
que la guerre en R.D.C. était à la base des violations des droits
humains dans la province (100 %). Quant à savoir qui en sont les
auteurs, 63 % pensent que tous les acteurs au conflit sont responsables des
violations des droits de l'homme au Sud-Kivu, 15,7 % mettent les violations au
compte du R.C.D./Goma, 12 % pointent les armées étrangères
en l'occurrence les alliés du R.C.D./Goma (Rwanda et Burundi) ;
seulement 2,8 % de la population responsabilisent le R.C.D./Goma, les bandes
armées et les armées étrangères tandis que les
bandes armées seules sont nommées par 1,9 % de la population.
SECTION 2 : LES
VIOLATIONS DES DROITS FONDAMENTAUX : UNE SITUATION AUX CAUSES MULTIPLES ET
DIVERSIFIEES
Plusieurs causes sont à la base des violations des
droits de l'homme dans la partie orientale de la R.D.C. et,
spécialement, au Sud-Kivu. Pour Jean MIGABO KALERE115(*), les motifs des massacres et
autres violations des droits humains sont de quatre principaux ordres, à
savoir : l'opposition à la nouvelle guerre et l'impopularité
de la rébellion, l'opposition populaire à la domination
étrangère, l'opposition aux pillages des ressources
économiques et la présumée installation des colonies de
peuplement dans le Kivu. A cela s'ajoutent les représailles, la
vengeance, les règlements de compte, les suspicions,
l'intolérance, etc.
Paragraphe 1 :
L'opposition à la guerre et l'impopularité de la
rébellion
Ces deux éléments constituent
le premier motif. Du point de vue social en effet, la rébellion n'a
jamais été, en effet, acceptée par les populations du
Sud-Kivu. Cela se manifestait notamment par la dénonciation de
l'inopportunité de la guerre suite aux espoirs qui les nourrissaient
après la prise du pouvoir par feu le président
Laurent-Désiré KABILA, par la considération de la nouvelle
« libération » comme une agression au vu du contexte
qui précéda le déclenchement de la guerre, notamment, la
demande du président de la République du départ des
troupes alliées (Rwandaises et Ougandaises) de la R.D.C. Cet acte est le
plus souvent interprété comme la libération de la
soumission vis-à-vis de ces Etats étrangers et le signe de
nationalisme et de patriotisme auquel se sont alliées ces
populations116(*).
Eu égard à ce qui précède, les
populations ont montré ou manifesté leur hostilité au
mouvement par l'indifférence, la dénonciation des abus commis par
celui-ci pour se faire accepter par la force et leur refus de la guerre. Les
fréquentes tueries peuvent alors s'analyser comme la volonté des
autorités rebelles à obliger les populations locales à se
soumettre à leur action politico-militaire et à inhiber toute
forme de résistance suite à la terreur.
Paragraphe 2 :
L'opposition aux pillages des ressources économiques
La guerre de la R.D.C. était aussi
présentée par la plupart d'observateurs comme ayant pour objectif
la recherche des ressources économiques de la part des pays
impliqués et des rebelles et groupes armés en
présence.117(*)
En effet, au terme de l'enquête effectuée par le
panel des inspecteurs des Nations Unies, il est mentionné l'exploitation
illégale des ressources minérales et forestières de la
R.D.C. Cette exploitation s'y déroulait à un rythme
inquiétant et distinguait le pillage systématique qui consistait
au stock des minerais, de bois, de café, du bétail et des fonds
se trouvant dans les territoires conquis par les armées
étrangères alliées à la rébellion pour y
être soit transférés, soit exportés sur les
marchés internationaux. Il distingue aussi l'exploitation
endogène développé grâce aux structures
préexistantes mises au point lors de la lutte pour le pouvoir
menée par l'A.F.D.L. Ces structures ont été
améliorées à l'exploitation exogène, elle a
été mise en place par l'Ouganda et le Rwanda pour le
contrôle des ressources minières et financières en
violation de la souveraineté de la R.D.C., de la législation
nationale et parfois du droit international118(*). Cette convoitise des richesses naturelles du Congo
est présentée par Baudouin HAMULI KABARHUZA comme étant
une cause majeure de la poursuite de la guerre à l'Est dont les
conséquences sont, notamment, la mort et le déplacement des
communautés entières. Bref, les violations des droits de
l'homme119(*).
Dans ce contexte, le peuple Congolais s'opposait à ces
pillages. Cette opposition populaire ne manquait pas de conséquences sur
la sécurité de la population civile. En fait, les massacres
à grande échelle dénoncés et reconnus par les
dirigeants rebelles du R.C.D./Goma se faisaient autour des mines d'or
traditionnellement exploitées par les populations locales. Cette
opposition, devenant permanente, entraînait donc des milliers de victimes
dans les couches des populations civiles non armées tuées, en
guise de réaction, par les rebelles et leurs alliés.
Paragraphe 3 :
L'opposition à la domination étrangère
Nul n'ignore que le conflit armé en R.D.C. mettait aux
prises à la fois les armées étrangères et les
groupes nationaux et locaux. La présence des troupes
étrangères « non invitées »
était ainsi perçue comme une agression et une domination tant
politique qu'économique par le peuple Congolais. Aussi, les objectifs
présentés par ces alliés des rebelles Congolais, à
savoir, la sécurité des frontières communes et la
prévention des attaques de leurs pays respectifs par les groupes
rebelles présents dans l'Est du Congo n'acquiert pas l'assentiment de la
majorité des populations Congolaises, en général, et
celles du Sud-Kivu, en particulier. Ainsi, pour faire admettre ces populations
civiles non armées les buts de la guerre et ses
« bien-fondés », des actes de terreur, de menace
qui finissent par porter atteinte aux libertés et droits de l'homme dans
les territoires contrôlés par ces armés.
Paragraphe 4 : La
présumée installation des colonies de peuplement dans le Kivu
Pour certains, du point de vue de l'objectif
politique de la guerre, ceci est l'une des finalités est l'occupation du
Congo et surtout dans sa partie orientale. L'installation des populations qui
proviendraient de l'extérieur du pays rencontre ainsi la forte
densité des populations autochtones farouchement opposées
à toute domination étrangère conduirait les rebelles
à créer des espaces vides par des attaques des villages
ciblés. Les populations autochtones seraient alors obligées de se
déplacer pour leur sécurité. Ce qui constitue
déjà une violation des droits humains et du droit humanitaire.
Paragraphe 5 : Les
représailles et les règlements de comptes
A l'issue des conspirations militaires auxquelles les
populations ont opposé un refus ou après des revers militaires au
front, les représailles infligées sont à la hauteur des
pertes subies. Toutes ces représailles étaient commises, d'une
part, sans prétexte ou sous couvert, tant dans les villes que dans les
milieux ruraux, des mesures de protection ou de participation à la
reconstruction nationale. En effet, les autorités rebelles justifiaient
souvent la mort des populations civiles et le rançonnement des milliers
de paisibles citoyens par les attaques perpétrées contre les
milices, c'est-à-dire les combattants Mayi-Mayi, les interahamwe et
ex-FAR, etc.120(*)
D'autre part, les parties au conflit accusaient la population civile
d'apporter de l'aide et du soutien à la partie adverse121(*). Ces soupçons se
nourrissaient évidement du fait de l'incompréhension et de la
divergence des vues sur les raisons qui ont poussé au
déclenchement de la guerre dite de « rectification »
entre les populations Kivutiennes et les acteurs politico-militaires.
Les autres causes ou buts des massacres évoqués
par les défenseurs des droits humains sont notamment l'esprit de
vengeance et les règlements de compte. En effet, plusieurs tueries ont
été ordonnées par les responsables militaires pour venger
la mort de leurs combattants au front après affrontements. D'autres
l'ont fait suite à la découverte des massacres de leurs
protégés par le camp adverse. Ainsi, par exemple, les massacres
de Kilungutwe, de Makobola, de Kasika, de Zokwe sont présentés
comme ayant eu pour but de venger la mort de quelques 30 combattants du
Rassemblement Congolais pour la Démocratie et membres de l'Armée
Patriotique Rwandaise, victimes d'une embuscade tendue par les Mayi-Mayi non
loin de la paroisse. Ceux de Mboko auraient aussi la même cause122(*).
Quant aux règlements de compte, ils paraissent la
forme la plus sûre et la plus utilisée de justice dans les milieux
occupés par les groupes armés. Bien des gens règlent, en
effet, leurs différends en se faisant justice eux-mêmes par la
violence, les fausses accusations. Des allégations indiquent que
beaucoup d'actes du genre ont été commis et continuent à
l'être par des personnes qui entretiennent certains rapports avec les
différents protagonistes123(*).
Signalons, pour clore ce chapitre que les violations
auxquelles il est fait allusion se commettaient en toute impunité. Leurs
auteurs utilisaient menaces et intimidations pour prouver leur véritable
force et leur domination ; et, ainsi, mettre en garde toute tentative de
dénonciation et d'opposition à leur volonté. Exploitant
aussi les tensions et divisions ethnico-tribales, les auteurs des massacres et
autres violations des droits de l'homme visent à camoufler leur
responsabilité dans les faits commis pour les qualifier de massacres
interethniques. En outre, l'entretien de la confusion et la négation des
faits sont utilisés afin de cacher l'existence de ces actes à
l'opinion nationale et internationale. La conséquence de ces
dissimulations est la confusion dans la détermination des preuves lors
d'éventuelles enquêtes124(*). Toutes ces violations ne manquent pas, en effet, de
victimes et de conséquences sur la vie quotidienne de la population,
voire sur le succès des forces qui contrôlaient cette partie du
territoire. Tels sont les éléments qui font l'objet chapitre qui
suit et qui est, par ailleurs, le dernier du présent travail.
CHAPITRE II : LA CRISE
HUMANITAIRE DANS LA PROVINCE DU SUD-KIVU : UNE SITUATION AUX CONSEQUENCES
NEFASTES SUR LES VICTIME ET NECESSITANT DES MESURES APPROPRIEES POUR SON
ERRADICATION
Ce chapitre comprend trois sections. La
première porte sur les principales victimes des violations
perpétrées en cette période de guerre. La deuxième
évoque, en fait, les différentes conséquences de ces
violations sur la vie quotidienne de la population sud-Kivutienne et sur les
différents groupes en présence. La troisième, quant
à elle, propose les mécanismes envisageables pour la lutte contre
toute violation au Sud-Kivu, spécialement, et en R.D.C.
SECTION 1 : LES
POPULATIONS CIVILES : VICTIMES INNOCENTES DES VIOLATION DES DROITS
FONDAMENTAUX
On entend par
« victimes », des personnes qui, individuellement ou
collectivement, ont subi un préjudice, notamment une atteinte à
leur intégrité physique ou mentale, une souffrance morale, une
perte matérielle ou une atteinte grave à leurs droits
fondamentaux, en raison d'actes ou d'omissions qui enfreignent les lois
pénales en vigueur dans un Etat, y compris celles qui prescrivent les
abus criminels de pouvoir. Une personne peut être
considérée comme une « victime » que l'auteur
soit identifié ou non, arrêté, poursuivi ou
déclaré coupable, et quels que soient ses liens de parenté
avec la victime. Le terme « victime » inclut aussi, le cas
échéant, la famille proche ou les personnes à la charge de
la victime directe et les personnes qui ont subi un préjudice en
intervenant pour venir en aide aux victimes en détresse ou pour
empêcher la victimisation125(*).
La guerre en R.D.C. qui était
caractérisée par la violation massive des droits humains a fait
beaucoup de victimes. En effet, des milliers de civils sans défense sont
des cibles des combattants lors des tueries délibérées et
arbitraires. Le Rassemblement pour le Progrès (R.P.) mentionne que les
populations Congolaises, en général et les Kivutiens en
particulier, martyrisées par 32 ans de règne dictatorial et
fortement déstabilisées par une arrivée des
réfugiés rwandais en 1994 sont, depuis 1996, victimes des
massacres126(*). Des
hommes, des femmes, des vieillards et des enfants se réduisent à
des silhouettes en fuite, à des corps jetés dans des fosses
communes, voire à des chiffres127(*).
Toutes les catégories sociales sont ainsi
touchées et concernées par les actes de violations des droits
humains mais avec une particularité : celle des catégories
les plus vulnérables notamment les femmes, les enfants et les
vieillards. Jean MIGABO Kalere128(*) classifie les victimes des violations selon
l'âge (les personnes du troisième âge, les femmes enceintes
et les enfants mineurs) et selon les fonctions exercées dans la
société.
Paragraphe 1: Selon
l'âge et le sexe
A. Les enfants mineurs.
Le livre-document publié par M.S.F. se contente de
montrer que dans certains districts de l'Est de la R.D.C., près de 75 %
des enfants de moins de 3 ans n'ont pas survécu et que la
mortalité infantile moyenne décime 60 % des enfants de moins de 5
ans129(*).
B. Les femmes enceintes et les personnes
du troisième âge
Durant tous les massacres dans les territoires jadis sous
contrôle de la rébellion les femmes, en générale, et
celles qui sont enceintes et vieilles, en particulier étaient victimes
des violations des droits de l'homme. Elles étaient la cible
privilégiée des groupes armés pour la simple raison
qu'elles sont facilement exploitables. Le rapport de M.S.F. mentionne aussi que
le taux de mortalité maternelle au moment de la couche s'est
sensiblement accru depuis le début de la guerre pour atteindre le niveau
le plus élevé dans le monde avec le décès
d'à peu près 3.000 mères sur 100.000 uniquement en
R.D.C.
Paragraphe 2 : Selon
les fonctions sociales exercées
Toute personne pouvant être vecteur
d'une certaine opinion sociale et capable d'organiser, de mobiliser les
populations ou de participer à leur développement social et
économique était pourchassée. La rébellion
dirigeait ses attaques surtout contre les leaders religieux et coutumiers et
contre les intellectuels oeuvrant dans les organisations de
développement et diverses associations. De nombreux pasteurs et diacres
des églises protestantes, des diacres laïcs, des
séminaristes, des prêtres et des religieuses catholiques ont ainsi
été massacrés, assassinés, torturés depuis
le déclenchement de la seconde guerre.
Sont aussi constamment victimes des violations des droits de
l'homme, des personnes indépendantes ou des organisations qui se sont
engagées ardemment dans la dénonciation des auteurs d'abus ou de
violations. En réponses aux dénonciations relatives à
l'existence des violations des droits de l'homme au Sud-Kivu, certaines
autorités provinciales ont menacé de suspendre ou de fermer les
activités des organisations citées.
Paragraphe 3 :
Attitudes et moyens de défense des victimes face aux violations
subies
Face à la méconnaissance des
droits de l'homme et à leur violation, il y a toujours, de la part des
victimes trois types de situations, d'attitudes ou de comportements possibles,
à savoir, la résignation ou la soumission, le recours à la
violence et le recours à la non-violence130(*).
A. La soumission et la
résignation.
Cette attitude favorise le statu quo et s'explique par
l'ignorance. En R.D.C., de vastes masses populaires ignorent, en effet, tout
de leurs droits, surtout en milieu rural. Leur apport au savoir ou à
l'information est dérisoire, médiocre ou carrément nul.
Après l'ignorance, l'environnement culturellement pauvre influe beaucoup
sur le type d'attitude. Ainsi, même informées, les victimes
affichent souvent des comportements de soumission face aux violations de leurs
droits. Enfin, le poids des structures sociales et politiques. Quand ces
structures sont oppressives ou répressives, elles écartent les
victimes et les condamnent à l'attentisme. La soumission constitue
donc un obstacle à la promotion des droits de l'homme et une cause
majeure de leurs violations.
B. Le recours à la violence.
Ici, les victimes réagissent par la violence lorsque
leurs droits sont violés. Quand cette violence est mise en oeuvre, soit
pour violer les droits de l'homme, soit pour les défendre, elle
s'exprime dans toutes ses formes (violence du regard ou du geste, du discours,
violence intellectuelle qui est celle de l'Etat, des régimes politiques
ou des groupes armés, etc).
C. La confiance aux organisations de
défense des droits humains.
Elle est la façon efficace mais la moins courante
d'exiger le respect des droits de l'homme et de travailler pour la construction
de la paix. Elle est un ensemble de valeurs stratégiques, de techniques
d'action visant à défendre les droits de l'homme et la paix dans
des situations d'oppression interpersonnelles et intergroupes. Dans son
essence, la non-violence s'ordonne aux valeurs fondatrices de la dignité
humaine (respect de la vie) et aux valeurs constructrices des interactions
humaines positives (amour, vérité, justice, etc.).
Ainsi, aussi impuissante, la population du Sud-Kivu a-t-elle
assisté à des exécutions sommaires et extrajudiciaires des
militaires, des civils et des religieux ; à des assassinats
délibérés et arbitraires des personnes innocentes ;
à des arrestations et détention illégales, à des
enlèvements et disparitions ; à des actes de torture et
autres mauvais traitements et aux scènes d'impunité131(*). La violence des
atrocités entraîne une peur dans le chef de la population qui se
résout à abandonner toute idée de résistance de
peur de subir les représailles de la part des groupes armés. La
population Sud-Kivutienne accepte donc avec docilité extraordinaire de
se soumettre aux abus de toutes sortes. Elle se soumet surtout face à la
pression des autres qui sont soumis en majorité et qui craignent
d'effaroucher l'autorité publique. Le contrôle du groupe pour
maintenir le statu quo devient alors paralysant et entretient le système
des violations. Toute tentative de résistance entraîne au sein du
groupe la désapprobation parce que celui-ci se sent menacé par
ceux dont les actes sont porteurs de répression. C'est, en
fait, la résignation qui est appliquée parce que les victimes
vivent les atrocités. Ce qui signifie qu'elles représentent un
terrain préparé pour faciliter les abus de leurs
persécuteurs car ils ne font rien pour s'en sortir
collectivement132(*).
Ce moyen se relevant inefficace, les victimes se confient
alors aux organisations spécialisées dans la matière de
défense des droits humains, des églises et très rarement
chez les supérieurs hiérarchiques des violateurs. Ces
organisations élaborent ainsi des programmes d'assistance aux victimes.
Ces programmes développent des mécanismes de revendications et de
dénonciation, de l'observation de la situation des droits de l'homme et
le comptage des violations, des alertes en cas de situations confuses, la
formation sur les droits de l'homme dans les milieux ruraux et urbains pour
apprendre aux gens à revendiquer les droits en cas des violations.
Même si les actions des ONG de défense des droits humains ne
parviennent pas à éradiquer les violences sur les populations
civiles dans la Province du Sud-Kivu, elles influent toutefois sur le taux de
prévalence de cas des violations. Concrètement, les actions des
ONG de défense des droits humains ont obligé quelque part la
reconnaissance de certaines violations des droits de l'homme par les
belligérants bien que celles-ci aient été souvent
qualifiées d'actes isolés ou de simples bavures. Aussi, les
actions des ONG de défense des droits de l'homme ont
particulièrement attiré l'attention de la Communauté
Internationale sur la catastrophe humanitaire existante à l'Est de la
R.D.C.
En effet, au début du conflit armé en R.D.C.,
les massacres se sont produits dans un silence souvent qualifié de
complice de la Communauté Internationale. Cette culpabilisation est
à la suite de l'incapacité de cette dernière de
prévenir et d'empêcher, voire de favoriser les massacres. Ce
silence était qualifié de soutien tacite à la guerre,
à la présence des forces armées étrangères
ainsi qu'à la violation des droits humains car l'ONU, l'OUA ou l'Union
Africaine et les autres organisations internationales s'abstenaient à
réagir face à la violence et aux violations massives des droits
humains à l'Est de la R.D.C. et, spécialement, au
Sud-Kivu133(*).
Ce n'est que quelque temps après les
dénonciations faites, d'abord, par les confessions religieuses notamment
les sources d'information catholiques alimentées par les réseaux
missionnaires, ensuite, par les organisations membres de la
société civile que cette communauté internationale est
sortie de son mutisme. Mais au début tout au moins, ces informations
alarmistes étaient accueillies avec un relatif scepticisme. La
Communauté internationale emboîta ainsi le pas en critiquant aussi
la persistance des violations particulièrement graves des droits de
l'homme sur base des rapports graves de Monsieur Roberto GARRETON. Ce dernier
confirmait l'existence de plusieurs massacres au Congo durant la
deuxième guerre dite de « libération ». C'est
dans ce cadre que différentes résolutions ont finalement
été prises, notamment celle 1234 du 09 avril 1999 dans laquelle
l'ONU condamnait les massacres perpétrés par toutes les parties
au conflit armé et demandait aux Etats engagés dans la guerre de
respecter la souveraineté et l'intégrité territoriale de
la R.D.C. Dans sa Résolution 1291 du 24 février 2000, le Conseil
de Sécurité décida de l'envoi d'une mission de maintien de
la paix en R.D.C., la MONUC, et exprima ses préoccupations sur le
pillage des ressources et richesses naturelles du Congo, et exigea, enfin, le
retrait de toutes les troupes étrangères de la R.D.C. Par sa
Résolution 1304, l'ONU insista sur la démilitarisation de la
Ville de Kisangani suite aux affrontements armés entre les troupes
rwandaises et Ougandaises et condamna les massacres et autres atrocités
commis quotidiennement sur le sol Congolais. L'Union Européenne n'est
pas du reste des organisations internationales qui ont condamné les
actes de violence contre les populations civiles. En effet, elle a
également demandé à tous les
belligérants au conflit Congolais de respecter les droits fondamentaux
de l'homme et le droit international humanitaire dans les zones qu'ils
contrôlaient. Enfin, des Organisations Internationales des droits de
l'homme comme Amnesty International et Human Rights Watch ont aussi
publié des rapports sur les violations des droits humains pendant la
guerre au Congo. Des constats sur l'existence des tueries dans
différents villages, ces organisations ont formulé des
recommandations à l'endroit des auteurs et des acteurs nationaux et
étrangers impliqués dans la guerre Congolaise134(*).
Toutefois, les diverses actions des organisations locales de
défense des droits humains ont eu beaucoup plus d'effets dans les villes
et les campagnes jadis sous contrôle rebelle que dans ceux
contrôlés par les bandes armées (Mayi-Mayi, ex-FAR,
interahamwe, Rebelles burundais des F.D.D., etc.). Des démarches ont
été initiées pour négocier l'accès à
ces zones par différentes organisations. Aussi, faut-il souligner, que
bien que les organisations de défense des droits humains sont parvenues,
grâce aux dénonciations, à influencer l'application des
sanctions à l'égard de certains auteurs des violations sous
ordres des autorités rebelles du R.C.D./Goma, à obtenir des
interpellations au profit des victimes ; les réparations, quant
à elles, ne se faisaient pas du tout suivre. Cet état de chose
remet, toutefois, en cause l'efficacité même des actions des ONG
de défense des droits humains.
SECTION 2 : LES
CONSEQUENCES DE LA CRISE
Les multiples violations des droits humains constatées
et dénoncées à l'Est de la R.D.C. et au Sud-Kivu
particulièrement ne manquent pas d'effets néfastes tant sur la
vie quotidienne de la population que sur la survie politique et la
popularité des groupes armés en présence. Cette section
est donc consacrée, d'une part, aux conséquences
socio-économiques et sanitaires des populations et, d'autre part, aux
conséquences du point de vue politique.
Paragraphe 1 : Du
point de vue socio-économique et sanitaire
Parmi les conséquences socio-économiques et
sanitaires des violations perpétrés sur les populations civiles,
les plus importantes sont les suivantes : la fuite des populations dans
les forêts, la destruction des tissus économique et social, la
haine entre communautés ethniques, la propagation des maladies
infectieuses, le traumatisme psychologique, etc.
A. Le déplacement de la
population.
A la suite des massacres et autres exactions, des populations
civiles ne prenant aucunement part à la guerre qui sévissait dans
la Province du Sud-Kivu, les paysans étaient obligés de fuir loin
dans des forêts ou vers les centres urbains à la recherche
désespérée d'un asile et d'une protection. Ainsi, selon
Collette BRAEKMAN135(*),
ces exactions et massacres ont pousse près de deux millions de civils
à prendre fuite et à se transformer en déplacés
internes. Les déplacements des populations de leurs milieux d'origine ne
sont pas aussi sans conséquences.
En effet, les centres urbains sont maintenant
surpeuplés et connaissent une situation de crise et de pénurie
alimentaire du fait de l'abandon de l'activité agricole des paysans qui
constitue, cependant, la principale source de revenu pour les populations
rurales qui représentent pratiquement 71% de la population en
province136(*). L'autre
effet des déplacements des populations rurales dans les forêts est
que celles-ci sont exposées, d'abord, aux nouvelles attaques des bandes
armées dissimulées dans la brousse, c'est-à-dire à
de nouveaux actes de violation de droits humains. Ensuite, abandonnées
à elles-mêmes dans ces forêts, plusieurs familles sont
exposées aux intempéries par manque d'abri adéquat
entraînant des maladies inconnues, à la famine car elles n'y
subsistent que grâce à quelques racines, herbes et fruits ;
elles sont aussi à la merci d'animaux sauvages (les
réfugiés des parcs nationaux). Aucune assistance ne leur est
apportée.
B. Le traumatisme psychologique des
populations victimes.
Les violations des droits de l'homme ont des
conséquences graves sur le psychisme des survivants dont les
séquelles sont très profondes et difficiles à
guérir. Les témoins des massacres se disent encore hantés
par les scènes de violence, de massacres macabres et sont frappés
par du chagrin et du désespoir, et maudissant leur propre existence.
Toutes les personnes qui ont survécu à ces barbaries sont
totalement et profondément marquées. Beaucoup d'entre les
victimes survivantes ont ainsi choisi, une fois de plus le chemin de l'exil
vers les pays étrangers tels le Burundi, la Tanzanie, etc.137(*)
C. La destruction des tissus
socio-économiques.
Les violations des droits humains dans les milieux ruraux,
surtout, entraînent, comme nous l'avons signalé
précédemment, les populations à l'exil soit dans les
forêts, soit dans les centres urbains ou encore dans les pays
étrangers. Cet exode massif menace de déstabiliser ou
déstabilise déjà les villages, notamment dans les secteurs
économique et social.
En effet, en dépit de la persistance de quelques
activités de survie, la vie économique dans la Province du
Sud-Kivu est pratiquement arrêtée, asphyxiée, les
activités bancaires et commerciales sont totalement paralysées.
Cette situation est consécutive aux pillages commis par les forces en
présence et aux multiples tracasseries des autorités
politico-militaires et administratives rebelles. Les quelques recettes
provinciales perçues, au lieu d'être utilisées pour
l'amélioration de l'économie locale, étaient par contre,
orientées principalement vers l'effort de guerre138(*).
D'où, la population se trouve ainsi clochardisée
et son dynamisme habituel est rompu à la suite de la situation
d'insécurité permanente. Cette thèse est confirmée,
en effet, par une enquête menée à Bukavu par le Rotary Club
au début de l'année 1999 sur un échantillon de 267 jeunes
âgés entre 17 et 39 ans. Les résultats de cette
enquête indiquent que 100 % de l'échantillon affirme vivre une
situation précaire dont les manifestations sont
l'insécurité généralisée (65 %),
l'arrêt des activités socio-économiques (53 %)139(*).
La violence et les violations des droits humains corrompent,
piègent et bloquent les relations interpersonnelles ou
intergroupes : entre deux ou plusieurs individus, entre deux ou plusieurs
groupes sociaux. Elles sont considérées comme des descriptions ou
des analyseurs permettant de décrire et de comprendre les conflits
interpersonnels et/ou intergroupes, comment ces conflits naissent et se
développent140(*). En effet, la violence alimente la haine entre
ethnies ou entre groupes sociaux ainsi que la peur et la méfiance entre
les populations. Les violations des droits humains dont sont auteurs les
ex-rebelles du R.C.D./Goma et leurs alliés, le Rwanda et le Burundi
enveniment les tensions ethniques locales et hypothèquent, de ce fait,
le dialogue et la réconciliation entre les communautés. Au
Sud-Kivu, par exemple, les Banyamulenge ont toujours éprouvé des
difficultés à faire reconnaître leur identité
Congolaise auprès d'autres ethnies locales. Cela est dû notamment
à l'instrumentalisation de leur cause afin de légitimer
l'entrée des troupes rwandaises au Congo. Cette situation s'est
aggravée par la difficulté ou l'impossibilité de
distinction entre rwandais et Banyamulenge auteurs des multiples tueries,
exactions et autres violations des droits humains dans la province. La
confusion dont il est question affectera, pendant longtemps encore, les
rapports des Banyamulenge avec les autres communautés au Kivu comme dans
tout le pays141(*).
D. La propagation des maladies
infectieuses et Rejet des victimes par la société.
Cette propagation des maladies infectieuses, notamment le
SIDA, est due à l'existence de la violence sexuelle à
l'égard des femmes et des jeunes filles. Les experts soulignent que
parmi les forces militaires qui évoluent dans la région, la
prévalence du SIDA est de 60 % et que les maladies sexuellement
transmissibles sont un fléau généralisé. Une fois
violées, les femmes sont exposées au rejet par leurs familles, au
reniement de leurs maris. Les enquêteurs de Human Rights Watch rapportent
le cas de ces femmes seules, abandonnées, rejetées et
méprisées qui, pour survivre, n'ont plus d'autre recours que de
camper aux abords des rues et de se livrer à la prostitution. Peu de
mesures significatives sont prises pour protéger ces femmes142(*).
E. La perte de confiance
vis-à-vis des collaborateurs de la rébellion.
La terreur qui régnait dans le Kivu n'est surtout pas
moins gratuite qu'on le croit. Elle n'est pas le simple corollaire de la
guerre, car elle dépeuple la région, oblige les paysans à
fuir. Cette terreur visait aussi à réduire au silence les
intellectuels, à neutraliser les chefs traditionnels, les leaders
d'opinion qui pourraient prendre la tête d'éventuelles
révoltes. C'est ainsi que presque tous les Bami de la région qui
représentent la dernière autorité incontestée sont
entrés en clandestinité. D'autres ont été
assassinés. Ceux des Bami qui ont été séduits par
les autorités rebelles et leurs alliés sont purement et
simplement désavoués par les populations de leurs
entités143(*).
Paragraphe 2 : Sur le
plan politique
Le conflit armé de la R.D.C. avec son
lot de violations des droits humains ont eu d'énormes
conséquences sur le succès même de la rébellion et
de différentes forces armées en présence dans la Province
du Sud-Kivu et dans toute la partie orientale du pays. En effet, l'on a
assisté à une illégitimation de la rébellion et
à un renforcement de l'esprit nationaliste et patriotique, à la
résistance et la méfiance vis-à-vis des actions et
décisions des autorités rebelles.
En effet, le déclenchement de la seconde guerre
dite de « rectification » a été
opéré dans un contexte tel que la population Congolaise en
général, et celle du Sud-Kivu, en particulier, espérait
déjà un changement socio-économique positif après
la lutte armée qui mit fin à la dictature mobutienne. Selon
Jean-Charles MAGABE144(*), ancien gouverneur de la Province du Sud-Kivu, la
population de Sud-Kivu n'a jamais cru à la seconde
« libération » parce que la prise du pouvoir de
Monsieur Laurent-Désiré KABILA représentait un espoir qui
renaissait déjà avec quelques réalisations
socio-économiques ainsi que la promesse des élections
présidentielles faite par le Chef de l'Etat. Les autorités
rebelles n'ont donc pas convaincre le peuple sur le bien-fondé de leur
rébellion.
Les violations des droits humains ont accentué, chez
les populations Congolaises, ce sentiment de rejet de la rébellion ainsi
que de tous leurs collaborateurs. Cette impopularité se manifestait
notamment par la méfiance vis-à-vis des promoteurs de la guerre
à savoir le R.C.D./Goma et leurs alliés. La population ne
participait plus à des activités édictées par les
hauts responsables rebelles. Ce qui fait qu'il n'a existé, durant toute
la période de rébellion, aucun mécanisme mobilisateur
capable de redynamiser la population145(*). Les populations Congolaises du Kivu se
trouvaient ainsi devant des rebelles dont la quasi-totalité avait une
mauvaise renommée. Ce qui impliquait automatiquement, pour le mouvement
rebelle, un manque d'assise et de légitimité populaire pourtant
nécessaire dans la poursuite de sa lutte146(*).
L'impopularité se traduisait concrètement par
le fait que les populations des territoires occupés ne se retrouvaient
pas dans la rébellion et ne cachaient plus leur hostilité. Dans
la province du Sud-Kivu, le Rassemblement Congolais pour la Démocratie
et ses alliés, considérés comme promoteurs de la guerre
dont les conséquences sont les violations des droits humains, n'ont eu
de souteneurs que quelques individus désireux d'accéder à
des postes jugés rémunérateurs en période de vaches
maigres. L'une des raisons avancées sur la manifestation de cette
hostilité est notamment celle du comportement des troupes sur le
terrain. L'on n'a jamais vu, en effet, une armée s'adonner au pillage
systématique d'un territoire à libérer, se plaire à
massacrer la population à libérer, faire la chasse aux animateurs
de la vie socio-économique, etc.147(*)
Chaque effet ayant aussi sa conséquence, nous pouvons
souligner que cette impopularité implique la démonstration de la
résistance populaire qui se manifestait notamment par la
désobéissance civile, la méconnaissance de certaines
autorités installées par la rébellion, la sympathie
envers les bandes armées dites « Nationalistes »,
les « Mayi-Mayi ». En effet, au Sud-Kivu et dans les autres
provinces occupées par les rebelles et leurs alliés, les gens ne
se bousculaient pas pour participer aux manifestations politiques
organisées par la rébellion. A plusieurs reprises, les
responsables du Rassemblement Congolais pour la Démocratie ont
été largement contestés et largement hués lors des
meetings qu'ils organisaient, lors des cérémonies
« officielles » ou lors des représentations
quelconques.
Tel en est, par exemple, le cas lors des deux rassemblements
populaires tenus, respectivement, au mois d'août 1998 pour l'explication
des pourquoi de la guerre à la Grand-place de la poste et le 13 mars
1999 à la place Major Vangu dans la ville de Bukavu. Parler de la
rébellion ou de la guerre lors des cérémonies où
participe la population telles les collations des grades académiques,
les participations aux conférences-débats ou colloques, les
représentations aux activités socio-culturelles était
considéré comme un tabou ou une provocation. Le mouvement rebelle
était ainsi réduit au silence et ne s'exprimait le plus souvent
que par la voie des ondes, à la Radio Télévision Nationale
Congolaise considérée comme un instrument idéologique du
mouvement rebelle.
Les responsables rebelles ont, eux-mêmes, pris acte de
cette impopularité comme une des caractéristiques du
Rassemblement Congolais pour la Démocratie parce qu'ils confirmaient
l'incapacité de mobilisation de la masse populaire et d'un défaut
d'adhésion à sa logique politico-militaire. Cet état des
choses a conduit ainsi une frange de la population à ne plus avoir peur
de dénoncer l'incapacité du R.C.D./Goma et ses alliés
d'assurer la sécurité des territoires qu'ils
contrôlaient148(*). Tels sont, à titre d'illustration, le
message de Noël 2001 et Nouvel an 2002 du Mwami NGWESHE-XV WEZA-III,
Pierre J-M. NDATABAYE Muhigirwa du 23 décembre 2001, dans lequel il
dénonçait la prise en otage du peuple par quelques
« politicailleurs » marquée par de tueries
généralisées et de viols, de profanation et de pillage
à grande échelle des richesses du pays, une association de
malfaiteurs qui s'est liguée pour terroriser et intimider par des
massacres et des tortures dont la violence est la seule voie de réussite
dans la vie. Il ajoute que c'est la population Congolaises qui en est la
victime malgré le raisonnement, en ce début du siècle de
la nouvelle civilisation dénommée
« mondialisation » que les promoteurs veulent nous la faire
accepter selon leur règle de jeu.
Dans ses lettres ouvertes adressées au
Président du Rassemblement Congolais pour la Démocratie (au total
12 lettres) de 1999 à 2003, Monsieur Idésbald BYABUZE
dénonçait tous les abus commis par le mouvement rebelle sur les
populations Congolaises des territoires sous contrôle de la
rébellion. Prenant pour cas deux d'entre elles (celle du 13 octobre 2001
qui est la cinquième et celle du 12 mars 2002, la douzième),
signalons que l'auteur y mentionne les arrêtés du gouverneur de la
Province du Sud-Kivu remplaçant les absents de leurs postes de travail
suite à la décision des fonctionnaires de rester à la
maison à cause de non paiement de leur prime et du refus du
Rassemblement Congolais pour la Démocratie d'accepter l'envoi des
arriérés de salaire promis par le Gouvernement de la
république. Il y dénonce aussi les pillages, les viols, les
meurtres et la traîtrise dont sont auteurs les rebelles en appelant le
peuple à se rappeler à tout instant de ces pires maux qui lui
sont infligés depuis le début de la guerre d'août 1998.
Selon lui, en effet, la guerre a ramené Bukavu, en particulier et le
Sud-Kivu en général, à l'âge de la pierre
taillée et leurs habitants, de vrais australopithèques, des
hommes ayant oublié les attributs de la modernité à cause
des actes de barbarie, les uns les plus crapuleux que les autres tels que
l'enterrement des femmes vivantes, les viols sadiques et sans
considérations, les tueries par tous les procédés, etc.
La résistance et l'opposition à la
rébellion se manifestait également par la dispersion des lettres
anonymes ou des tracts appelant soit à des villes mortes, à des
grèves généralisées ou encore l'interdiction de
paiement de certaines taxes en faveur des autorités rebelles. Les
exemples ci-après méritent d'être mentionnés en
guise de preuve :
· Message du G.D.S.K. intitulé
« Réveillez-vous peuple Congolais » dans lequel le
groupe remercie la population pour avoir boycotté la rentrée
scolaire, l'encourage à rester vigilante, ferme et fidèle
malgré les intimidations, les tueries, met en garde les Congolais qui
jettent la population dans la misère, la domination et promet
l'échec du fait que le peuple prend conscience de la
réalité des choses ; demande à la population de
poursuivre la résistance et appelle aux services
générateurs de recette de cesser toute perception et à la
population de ne plus payer les taxes, aux fonctionnaires de ne plus perdre
leur énergie pour un travail non rémunéré ;
décrète, enfin la journée du 05 décembre 1998 ville
morte en mémoire de tous les Congolais tombés sous les balles de
la rébellion et de leurs alliés (à Kavumu, Kasika, Uvira
et Bukavu). Le message date du 24 novembre 1998 à Bukavu ;
· Le Front Démocratique pour la Libération
du Congo, dans son « Flash d'info » N° 001 de novembre
1998, affirme que le R.C.D. et ses alliés sont les principaux artisans
de la misère du peuple. Il les avertit, à cet effet, que la
colère de ce peuple assujetti n'est point contrôlable lorsqu'elle
se déchaîne et que la vindicte de celui-ci arrivera tout en
encourageant les amis de la résistance et d'alerte ;
· Les Nationalistes pour la résistance dans
« Compatriote du Sud-Kivu : finis la peur, les intimidations et
la terreur » appellent, quant à eux, à partir du 31
janvier 2000, à une grève générale des
fonctionnaires, des agents de l'Etat, des privés et des services
générateurs de recettes, des écoles et universités,
des policiers et militaires, de tous les commerces sur toute l'étendue
de la Province du Sud-Kivu ;
· Le Conseil de Sécurité de la
Résistance locale du Sud-Kivu, dans son compte rendu de la
réunion du 02 février 2000, écrivit une lettre ouverte aux
Rebelles Congolais, à leurs alliés et à la
Communauté Internationale. Dans cette lettre, le Conseil accuse les deux
premiers cités à entretenir la misère de la population, le
pillage des richesses, les massacres et tueries à grande échelle
des innocents civils, des enlèvements, des exactions et autres barbaries
perpétrés à Makobola, Kasika, Burhinyi, Mwenga, etc. Il
indique, en outre, que les populations du Sud-Kivu ne resteraient pas
indifférentes malgré les intimidations et promet d'autres actions
de plus grande envergure en cas de surdité politique ;
· Le Parti de la Résistance Nationale, dans sa
déclaration politique N°01/P.N.R./S-G/2002 du 10 janvier 2002
à Uvira, décréta aussi les dates de 16 et 17 janvier 2002
journées villes mortes de recueillement en guise de protestation contre
la paupérisation des populations et en souvenir des compatriotes
victimes des massacres de plus de 3,5 millions de civils innocents (Makobola,
Sange, Kasika, Burhale, Izege, Kabare, Bunyakiri, Masisi, Beni, Butembo, Isiro,
Kisangani, etc). Le Parti recommandait ainsi à toutes les couches
populaires à rester en famille réfléchir sur le cycle
infernal de violence dans le pays et envisager des solutions à court
terme et à long terme pour la libération totale des consciences.
Aux hommes politiques du R.C.D./Goma et à leurs alliés, il leur a
été demandé de démissionner en bloc et demander
pardon au peuple Congolais pour les préjudices subis par leurs
actes ; aux Organismes Internationaux, en signe de compassion envers les
populations meurtries, de focaliser leur aide humanitaire vers les territoires
sous contrôle des « Mayi-Mayi » jusque là
abandonnées à leur propre sort.
En plus, la résistance opposée par la population
aux actions de la rébellion a rendu l'exécution de certaines
décisions prises par les autorités rebelles difficile voire
impossible. Aussi, la poursuite de la guerre impopulaire ponctuée par
des violations flagrantes et massives des droits humains a renforcé le
sens patriotique et l'esprit nationaliste dans les esprits des habitants du
Sud-Kivu. Pendant la guerre, en effet, malgré la partition de fait de
l'Etat Congolais, les populations des territoires sous contrôle de la
rébellion, spécialement celles du Sud-Kivu, avaient plus tendance
à la reconnaissance d'un seul gouvernement, à savoir, celui
basé à Kinshasa, capitale de la R.D.C. et siège des
institutions nationales149(*). C'est pour cette raison que tout le peuple
Congolais a toujours prié pour la fin de la guerre et le recouvrement de
l'intégrité territoriale de la R.D.C. à travers divers
messages et actions des organisations de la société civile, les
églises et les organismes internationaux. Tels sont les exemples des
messages de Monseigneur Emmanuel KATALIKO, archevêque de Bukavu aux
fidèles de Bukavu et aux hommes de bonne volonté du 05
décembre 1998, la Déclaration des Pasteurs des la
Communautés membres des églises du Christ au Congo en ville de
Bukavu du 21 décembre 1998150(*), le message du Cardinal Frédérique
ETSOU à l'occasion de l'intronisation de son Excellence Monseigneur
Charles MBOGHA Kambale, archevêque de Bukavu le 03 juin 2001, les
messages de paix de la Société Civile du Sud-Kivu, à
l'exemple de celui à l'occasion du 39e anniversaire de
l'indépendance de la R.D.C. adressé le 16 juin 1999 aux
présidents de la R.D.C. et du R.C.D.
Concernant la difficulté de l'exécution des
décisions prises par les autorités rebelles, la plus importante a
avoir été boycottée par la population du Sud-Kivu,
pensons-nous, est celle liée à la mise en circulation de
nouvelles plaques minéralogiques sur tout le territoire
contrôlé par le R.C.D./Goma par la Décision
N°001/R.C.D./CUPSG/2002 du 21 juillet 2002 et l'Arrêté
Départemental N°077/DPFBP-RCD/JMEE/2002 du 23 juillet 2002. Dans la
lettre numéro 519.02/1/97,en effet, l'archevêché de Bukavu
a clairement donné sa position négative sur le changement
desdites plaques en argumentant que cela pouvait attendre la
réunification du pays du fait que la décision relevait
entièrement des compétences de souveraineté,
c'est-à-dire de la seule compétence du gouvernement de la
République.
Aussi, l'église Catholique refusait qu'il soit
imposé à la population de financer le
« mouvement-parti ». Toujours à ce sujet,
« Conscience Patriotique » a lancé des tracts sur
lesquels on pouvait lire : « Toutes les couches sociales ont
réagi et manifesté leur désaccord à l'égard
de cette nouvelle manoeuvre de pillage et d'extorsion. Le R.C.D. n'administre
rien ici, sauf piller, taxer et voler [...]. Refusons de prendre ces plaques
trop exorbitantes et inutiles. Attendons le gouvernement issu des
négociations en cours, un gouvernement d'union nationale qui, seul, est
habilité à mettre en circulation de nouvelles plaques
minéralogiques [...]. Acceptons de marcher à pieds, fermons nos
activités si le R.C.D. nous y oblige et refusons une fois pour toute
à enrichir les criminels et les traîtres qui ont
déjà tué plus de 4 millions de Congolais ».
Sans avoir la prétention d'avoir
énuméré toutes les conséquences
socio-économiques et politiques qui paraissent innombrables, nous nous
limitons à celles mentionnées ci-haut que nous
considérons, personnellement, comme étant les principales. Dans
la section qui suit, nous allons faire allusion aux différents
mécanismes envisageables en vue de mettre fin aux violations des droits
humains en R.D.C., en général, et dans la Province du Sud-Kivu,
en particulier.
SECTION 3 : LES
PERSPECTIVES DE SORTIE DE CRISE EN MATIERE DE RESPECT DES DROITS
FONDAMENTAUX
Les guerres et les conflits civils ont souvent pour causes
l'ethnicité, l'exclusion des accords de partage du pouvoir et les
rivalités entre clans ou factions. Leurs conséquences sont aussi,
le plus souvent, les violations des droits humains, la destruction totale et
généralisée des infrastructures socio-économiques
et culturelles ainsi que les violations massives et flagrantes des droits de la
personne humaine.
Pour remédier à ces violations des droits de
l'homme et donc aux violences et aux situations conflictuelles qu'elles
entraînent dans une sorte de cercle vicieux ou de réaction en
chaîne, les solutions les plus salutaires pour en finir sont les
stratégies de la non violence. Il est, en effet, contradictoire et
illusoire de vouloir faire évoluer les droits de l'homme en recourant
à la violence, quelles qu'en soient l'origine et la forme151(*). On peut donc
lutter contre ces violations en mettant complètement fin à la
guerre, par la création d'un système de représentation
politique durable fondé sur l'intégration, la mise en place d'un
Etat fort précurseur de l'Etat de droit respectueux de la constitution,
de la primauté du droit et du respect des droits de la personne, apte
à satisfaire les besoins des citoyens et à promouvoir le
développement socio-économique sans que ces principes
fondamentaux ne soient mis en péril152(*). En outre, la lutte contre l'impunité est
nécessaire par le jugement de tous les responsables d'actes ayant
causés préjudice aux populations civiles.
Paragraphe 1 : La
cessation de la guerre et l'établissement d'un Etat fort
Malgré le calvaire subi, les populations Congolaises,
en générale, et celles du Kivu, en particulier ont toujours
été pacifiques et ont toujours lutté en faveur de la paix
et de la cessation des hostilités en privilégiant le dialogue, le
débat d'idées, plutôt que la violence, pour sortir la
région de la tourmente. C'est dans ce cadre que les organisations
membres de la Société Civile et les églises ont depuis
fait appel aux parties au conflit Congolais à envisager la paix et
à arrêter le cycle de violence qui dessert toute la région
des Grands-Lacs153(*).
Ces pressions conjuguées par ces organisations
locales, nationales et internationales ont poussé les
belligérants à choisir l'option de la négociation
politique pour sortir de la crise qui a mis à genoux l'Etat dans
l'exercice de ses fonctions. Le long processus s'est, en effet,
réalisé en plusieurs étapes154(*). Il a finalement abouti
à la signature de l'accord global et inclusif entre représentants
de tous les groupements politiques et les belligérants à Pretoria
(Afrique du Sud) le 17 décembre 2002 sur fond de concessions mutuelles.
L'accord prévoyait, en effet, la cessation des hostilités dans
laquelle les parties acceptent de prendre toutes les mesures nécessaires
à la sécurisation des populations sur l'ensemble du territoire
national. A cet effet, les dispositions visant à garantir cette
sécurité devraient être prises. En plus de cela, l'accord a
institué un type de régime politique exceptionnel (un
président secondé par quatre vice-présidents) pour
permettre à toutes les parties de participer à la gestion du
pouvoir politique en R.D.C.
Toutefois, bien que la population du Sud-Kivu soit unanime
que le fait que seul le rétablissement de la paix en R.D.C. est l'option
qui contribue à la cessation ou à l'éradication des
violations des droits de l'homme (96,3%) ; la grande partie demeure
septique sur l'aboutissement du processus de paix en cours en R.D.C. En effet,
seulement 52,8% de la population pensent que le processus de paix en cours dans
le pays aiderait à mettre fin à la violence et aux violations des
droits humains en R.D.C. et dans la Province du Sud-Kivu, en particulier. Les
47,2 % restant disent ne pas avoir confiance ou ne pas être convaincus de
la détermination des hommes politiques Congolais de mettre fin à
la guerre pour des intérêts égoïstes.
La fin de la guerre doit être suivie par la
réhabilitation d'un Etat fort qui signifie la mise en place des
institutions étatiques capables d'organiser la redistribution des
revenus au sein des populations. Dès lors, l'idée d'un Etat fort
en R.D.C. exclut sans équivoque tout soutien aux régimes
dictatoriaux modernes, de l'espèce de la dictature mobutienne de triste
mémoire, qui sont à la base de l'effondrement de l'Etat avec pour
manifestations les violations des droits de la personne et la réduction
de tout un peuple à la mendicité155(*). L'Etat fort est,
d'entrée de jeu, le précurseur ou constitue un prélude
à l'émergence progressive d'un Etat de droit.
Paragraphe 2 : Un
retour rapide à un Etat de droit et la lutte contre
l'impunité
Une des caractéristiques de l'Etat de
droit est l'application et le respect des dispositions constitutionnelles et de
toutes les lois de la République. Dans cette perspective, les droits
fondamentaux, dans leur universalité, ont une signification profonde
pour les citoyens. L'Etat de droit est le résultat de la collaboration
des gouvernants nationalistes avec les autres acteurs acquis au
développement humain. Ainsi, l'Etat de droit est un Etat tout court en
perpétuelle évolution politique, économique et sociale ou
morale plaçant l'homme au centre de ses préoccupations. Le
rétablissement de l'Etat de droit ne pourrait toutefois pas, à
lui seul, aboutir au renforcement de la primauté des droits humains au
Sud-Kivu et en R.D.C. après cette longue guerre fratricide qui a fait
autant de victimes. Il est alors impérieux de mettre en place des
structures chargées de rendre justice pour tous les crimes qui ont
été commis pendant cette période de guerre afin de lutter
contre l'impunité.
En effet, le gouvernement de la république et les
mouvements rebelles Congolais ont toujours reconnu la commission d'actes de
violations des droits de la personne dans les territoires sous leur
contrôle. Or l'histoire contemporaine a enseigné et enseigne qu'il
y a une tendance irréversible vers l'identification et la
responsabilisation de ceux qui ont commis tous ces crimes. Plus personne, et
notamment ceux qui font partie de la « Caste des
puissants », ne devra être à l'abri de devoir, un jour,
répondre devant la justice de sa responsabilité vis-à-vis
des crimes qu'il a commis ou commandités. Cela peut prendre certainement
du temps mais ce moment devrait impérativement arriver de façon
certaine et irrémédiable en R.D.C.156(*)
Pour Christian HEMEDI BAYOLO157(*), le contexte
général de violences armées ainsi visualisées et de
conflagration régionale qui demeure depuis 1996 ne peut
qu'entraîner des violations massives des droits de l'homme, du droit
international humanitaire et du droit des gens qualifiées de crimes de
guerre, de crime contre l'humanité, de génocide ou de crime
d'agression. Amnesty International parle de « la dignité
humaine réduite à néant en R.D.C. » (Londres,
mai 2001). Cette situation appelle donc, dans le cadre de la lutte contre
l'impunité des Nations Unies, des poursuites et des sanctions
pénales à l'encontre de leurs auteurs et de leurs complices par
des instances judiciaires compétentes ; ralliant ainsi l'opinion de
l'ancien rapporteur spécial des Nations Unies en R.D.C. sur la situation
des droits humains, Monsieur Roberto GARRETON.
Eu égard à ce qui précède,
au-delà de la volonté de respecter la Convention de Genève
du 12 Août 1949 relative à la protection des personnes civiles et
temps de guerre, la Communauté Internationale et même les
belligérants se sont sentis interpellés et ont affirmé la
nécessité de mettre en place des mécanismes
adéquats pour la protections des droits de l'homme dans ce conflit. Il
s'agit notamment des textes suivants :
· La Résolution 1341 (2001) du 22 février
2001 du Conseil de Sécurité, notamment, le point 14, souligne
spécialement que les forces occupantes devront être tenues
responsables des violations des droits de l'homme commises sur le territoire
qu'elles contrôlent ;
· La Résolution 1304 (2000) du 16 juin 2000 du
Conseil de Sécurité, notamment les points 13, 14 et 15 ; le
Conseil de Sécurité spécifie qu'il « est d'avis
que les gouvernements rwandais et ougandais devraient fournir des
réparations pour les pertes en vies humaines et les dommages
matériels qu'ils ont infligés à la population civile de
Kisangani [...] » ;
· La Résolution 1234 (1999) du 9 avril 1999 du
Conseil de Sécurité, points 6 et 7. Il y est exposé
que le Conseil de Sécurité condamne tous les massacres
perpétrés sur le territoire Congolais et demande, afin que tous
les responsables soient traduits en justice, qu'une enquête
internationale soit ouverte sur toutes les affaires de ce type, notamment sur
les massacres dans la Province du Sud-Kivu et autres atrocités. Bien
d'autres textes ont abordé dans ce même sens à l'exemple de
l'Accord de Paix de Syrte du 18 avril 1999, la Résolution N°
2002/14 du 19 avril 2002, l'Accord de Cessez-le-feu de Lusaka de 1999.
Deux autres évènements majeurs confirment la
volonté des parties au conflit en R.D.C. de lutter contre
l'impunité en envisageant des mécanismes de répression des
crimes internationaux commis dans le pays. Il est question ici de :
· la ratification du Statut de Rome portant
création de la Cour Pénale Internationale qui réprime tous
les faits qualifiés de crime de guerre, de crime contre
l'humanité, de crime de génocide et de crime d'agression par le
gouvernement Congolais, le 30 mars 2002 ;
· l'adoption consensuelle à Sun City, par la
plénière du dialogue intercongolais, des résolutions de la
Commission de paix et réconciliation numéros 20/DIC/AVRIL/2002 et
21/DIC/AVRIL/2002. La première porte création « d'une
Commission Nationale Vérité et Réconciliation »
chargée de rétablir la vérité et de promouvoir la
paix, la justice, le pardon et la réconciliation nationale. La seconde,
quant à elle, porte requête du gouvernement de transition au
Conseil de Sécurité d'instituer comme pour l'ex-Yougoslavie, le
Rwanda, la Sierra Leone, un tribunal pénal international pour la
République Démocratique du Congo.
Cette requête du gouvernement de transition est
corroborée par la population du Sud-Kivu. En effet, 100 % de nos
enquêtés sont favorables à la poursuite judiciaire contre
toute personne qui serait identifiée comme auteur ou complice des actes
de violations des droits de l'homme pendant la période qu'a duré
le conflit armé au Sud-Kivu et en R.D.C. en général. 91,8
% d'entre eux sont favorable à l'institution d'un tribunal
spécial pour la R.D.C. par souci d'équité,
d'impartialité et d'objectivité. Les 8,3 % qui s'y opposent
pensent, quant à eux, que cette procédure prend trop de temps et
n'aboutirait pas à un jugement équitable comme c'est le cas, par
exemple, du Tribunal Pénal International pour le Rwanda basé
à Arusha, en Tanzanie. Pour eux, il est donc préférable
que les auteurs et responsables des crimes en R.D.C. soient jugés par
les institutions judiciaires nationales.
Mais pour la population du Sud-Kivu et de la R.D.C., la
formation d'un gouvernement de transition consacrant la réunification du
pays et l'intégration des forces rebelles ayant exterminé des
milliers des fils et filles Congolais des territoires occupés sans
jugement préalable ne constitue pas une garantie à la promotion
et à la protection futures des droits humains dans la province et dans
le pays. Ainsi, 85,2 % pensent que tous les auteurs identifiés ou
responsables des violations des droits humains durant cette période de
guerre ne devraient pas être responsabilisés dans la gestion des
institutions de la transition, voire de la prochaine République issue
des élections libres, démocratiques et transparentes. Aussi, 94,4
% sont pour leur exclusion pure et simple de la gestion de l'Etat. Seule cette
procédure permettrait de mettre fin à l'arbitraire qui a pour
effet la mise en faillite de l'Etat Congolais. Le temps n'est plus à la
« Révolution-Pardon » comme le souligne KIZITO wa
Payeye158(*).
Quelles sont, en définitive, les résultats de
cette étude ? La réponse à cette question est reprise
dans la partie conclusive qui suit et qui synthétise notre analyse.
CONCLUSION
Nous voici arrivé au terme de notre
étude consacrée à la problématique de la garantie
des droits fondamentaux en période de guerre en République
Démocratique du Congo. Cas du Sud-Kivu. Elle a essentiellement
consisté à analyser les causes et des conséquences
socio-politiques des violations dénoncées tant au niveau local,
national qu'international avant de proposer les perspectives de sortie de
crise.
En abordant ce travail, l'on a été animé
par le souci de compréhension des motivations profondes et les effets
des violations des droits humains. Cette compréhension des motivations
et des effets d'un mal président toute mise au point de
mécanismes de lutte contre les violations, de protection et de promotion
des droits humains en temps de paix comme en temps de guerre
conformément aux législations existantes.
L'étude par la pertinence de ses recommandations,
serait ainsi notre façon de contribuer à la promotion des droits
de l'homme au Sud-Kivu, mais aussi et surtout une interpellation de la
conscience des hommes politiques Congolais, actuels et avenir, sur la valeur de
la personne humaine au non de laquelle ils prétendent mener les luttes
politico- militaires. Dans cette perspective, notre problématique s'est
articulée autour de trois questions, à savoir, comment les
violations des droits de l'homme se traduisaient-elles concrètement au
Sud-Kivu ?, quelles en seraient les causes et les conséquences
socio-politiques ?, à l'avenir, quels sont les mécanismes
envisageables pour lutter contre ces violations massives des droits de
l'homme ?
Répondant à ces questions à titre
d'hypothèse, nous avons pensé que les violations des droits de
l'homme se traduiraient par les massacres des populations civiles, des
arrestations arbitraires, des tortures, des sévices corporelles et des
viols, des exécutions sommaires et assassinats, des enlèvements
forcés, d'enrôlements forcés dans les différents
groupes armés, de prises d'otage de la paisible population civile, etc.
Les principales causes des violations des droits de l'homme au Sud-Kivu
seraient, d'abord, la réticence de la population vis-à-vis de la
rébellion et le rejet de la guerre ; ensuite, les
représailles des acteurs au conflit armé qui
soupçonneraient que la population civile collabore avec la partie
adverse ou après les défaites enregistrées sur le champ de
bataille ; puis, les parties prenantes au conflit dans la Province du
Sud-Kivu s'illustreraient dans les violations des droits et libertés
fondamentaux pour s'attirer l'attention de la Communauté Internationale
et prouver leurs capacité, force et importance dans les débats
consacrés au conflit armé en R.D.C. Enfin, le caractère
autoritaire de la rébellion et de divers groupes armés pousserait
ceux-ci à faire usage de la contrainte et de la répression pour
se faire accepter et imposer leur volonté.
Comme conséquence, l'on noterait le nombre très
élevé de morts parmi les populations civiles innocentes, les
déplacements massifs de ces populations de leurs villages vers les
forêts ou les villes à peu près sécurisées,
les séparations des familles, la non assistance des populations
condamnées et exposées à la famine, aux maladies suite
à l'insécurité persistante dans la province. Ces
violations accentueraient ainsi la répugnance des groupes armés
par la population (rébellion et bandes armées) à travers
la manifestation de leur hostilité par l'indifférence, la
désobéissance civile, etc. ; renforçant alors la
tendance nationaliste, patriotique et l'illégitimation de la
rébellion. Ainsi, la seule voie à court, moyen et long termes
pour mettre fin aux violations des droits de l'homme au Sud-Kivu, en
particulier, et en R.D.C., en général serait la cessation de la
guerre, la mise en place effective d'institutions qui rétablissent la
paix et la démocratie, l'Etat de droit respectueux de la dignité
humaine, la lutte contre l'impunité.
La vérification des hypothèses a
été rendue possible par l'usage de la théorie
générale de l'Etat, de certaines méthodes, à
savoir, la méthode fonctionnelle dite relativisée dont le tenant
est Robert King MERTON et la méthode génétique.
L'on sait, en effet, que l'Etat, à travers ses
missions, est le seul garant de la sécurité intérieure, du
maintien de l'ordre et de la protection des personnes et de leurs biens en
prévenant toute crise et tout délit. Lorsqu'il n'est plus en
mesure de remplir cette mission de protection, celle-ci est exposée et
risque d'être accomplie par tout particulier qui, dans certaines
circonstances, dégénère vers la violation des droits les
plus fondamentaux de la population et de tous les citoyens suite à la
confusion alors que l'Etat de droit est, en principe, au service du bien du
peuple et de la justice sociale. Ainsi, l'effondrement et la faillite de l'Etat
conduisent au déclenchement de la guerre qu'il l'empêche, de ce
fait, à accomplir ses missions dont celle de protection et de promotion
des droits de l'homme. L'on assiste aussi à une partition de fait du
territoire national impliquant aussi un partage de l'exécution des
missions étatiques selon la que l'espace territorial est
contrôlée par chacun des belligérants au même titre
que l'Etat unifié. Aussi, bien que la guerre ait été
présentée comme une nécessité de remplacement
d'institutions autoritaires par celles qui garantissent la justice sociale, le
respect des droits humains et la démocratie, elle s'est
détournée de cet idéal par les violations massives et
systématiques des droits humains.
Dans la méthode fonctionnelle dite relativisée,
Robert King MERTON a proposé quatre concepts clefs : la dysfonction
qui gène l'ajustement et l'adaptation du système,
l'équivalent ou le substitut fonctionnel qui montre qu'une fonction peut
être remplie par les éléments différents mais
interchangeables, les fonctions manifestes qui sont des conséquences
objectives comprises et voulues par les participants du système, et,
enfin, les fonctions latentes dont leur existence est inévitable bien
que n'étant pas comprises ni voulues par les participants du
système. L'étude des causes et des conséquences
socio-politiques nous a également inspiré le choix de la
méthode génétique. Des techniques telles que l'analyse
documentaire, l'entretien, le questionnaire d'enquêtes, l'analyse du
contenu nous ont servi dans la collecte de données, l'analyse et
l'interprétation des résultats.
A la suite des enquêtes et analyses, il apparaît
clairement que nos hypothèses de départ sont pratiquement
confirmées. Les résultats du travail prouvent, en effet, que
toutes les générations ou catégories de droits de l'homme
ont été violés dans la Province du Sud-Kivu pendant la
période de guerre, c'est-à-dire des droits civils et politiques
aux droits environnementaux et à la paix en passant par les droits
sociaux, économiques et culturels. Les violations se traduisaient par
les massacres (droit à la vie) de plusieurs milliers des populations
civiles non armés qui s'accompagnaient de la destruction
systématique et aveugle des infrastructures de base (logements,
installations administratives, économiques et sanitaires, etc.) ;
les atteintes à la dignité humaine (arrestations et
détentions arbitraires, enlèvements et disparitions
forcés, traitements cruels, inhumains et dégradants, la
soumission aux travaux forcés, etc.) ; les atteintes au droit
à la sécurité qui restreint la libre circulation des
populations et de leurs biens dans les différents territoires de la
province ; les atteintes au droit à la paix (discours de haine,
état de guerre) ; les atteintes aux libertés publiques
(libertés d'opinion, d'expression, de presse, d'association, de
réunion et syndicale). A cela s'ajoutent les violences à
l'égard des femmes et les violations des droits de l'enfant (viols,
enrôlement des mineurs dans l'armée, etc.), les violations des
droits économiques, sociaux et culturels (la mauvaise gestion des fonds
publics, la réduction de l'économie à un état
chaotique, l'inaccessibilité aux soins de santé primaires,
à l'éducation, le non paiement de salaires des fonctionnaires,
bref, la paupérisation de la population).
Toutes les parties au conflit se sont rendus coupables des
violations des droits humains au Sud-Kivu dont les causes sont notamment
l'opposition à la guerre, aux pillages des ressources économiques
de l'Etat congolais, à la domination étrangère, à
la conquête et l'installation présumées des colonies de
peuplement dans le Kivu ; les représailles et les règlements
de compte ; l'impopularité de la rébellion. Les principales
victimes de ces actes de violation des droits humains au Sud-Kivu sont les
populations civiles non armées et sans défense et surtout les
catégories les plus vulnérables, à savoir, les femmes, les
enfants, les vieillards, les paysans et les plus démunis. Ces victimes
sont condamnées à la soumission ou la résignation et,
quelques fois, au recours à la violence. Elles se confient aussi aux
organisations de défense des droits de l'homme en dernier recours.
Pour ce qui est des conséquences , les violations des
droits humains au Sud-Kivu ont, sur le plan socio-économique et
sanitaire , poussé les populations de l'intérieur à fuir
vers les forêts et les Centres Urbains, abandonnant ainsi leurs
activités agricoles qui approvisionnent les villes en denrées
alimentaires et avec pour effet l'exposition aux nouvelles attaques des bandes
armées dans ces forêts, aux maladies, à la famine,
etc. ; elles ont causé la destruction des tissus
socio-économiques (alimentation de la haine interethnique et
intergroupe, arrêt des activités économiques) ; la
propagation des maladies infectieuses suites aux viols et violences
sexuels ; le traumatisme psychologique des populations victimes ; la
perte de confiance ou la méfiance à l'égard collaborateurs
de la rébellion (civils ou non).
Du point de vue politique, le succès et la
réussite de la rébellion et des bandes armés ont
été compromis à causes des violations des droits humains
dont elles se sont rendues coupables au Sud-Kivu. Les violations des droits
humains ont, en effet, accru le sentiment de rejet de la rébellion qui,
dès le départ, était impopulaire suite à la
divergence de vue sur le bien fondé de la guerre ; la
méfiance, l'insubordination aux actions entreprises par les
autorités rebelles base de son illégitimation ; la
résistance par la désobéissance civile, la
méconnaissance de l'autorité rebelle, la sympathie envers les
bandes armées, le renforcement du sens patriotique et de l'esprit
nationaliste ; l'absence d'adhésion populaire aux idéologies
de la rébellion, le boycott de l'exécution des décisions
prises par le pouvoir rebelle, etc.
Pour ce faire, les mécanismes envisageables pour lutter
contre les violations des droits de l'homme sont la cessation de la guerre, le
rétablissement de la paix et la restauration d'un Etat de droit
respectueux de la dignité humaine et soumis à la loi, d'un Etat
fort et démocratique, la lutte contre l'impunité qui consiste au
jugement de tous les responsables identifiés des violations des droits
humains durant cette période de guerre dite de
« rectification ». Cela passe, en effet, par l'institution
d'un tribunal pénal international pour la R.D.C. afin de juger les
crimes de guerres et les crimes contre l'humanité, la disqualification
de tous les auteurs des violations des droits de l'homme de la gestion des
institutions politiques de la transition voire de la troisième
république à venir.
Eu égard aux résultats auxquels nous sommes
parvenus, l'étude laisse apparaitre de nouvelles perspectives de
recherche en terme vérification des suggestions ci-après
formulées :
· Qu'il y ait intensification de la sensibilisation et de
la formation et information des populations, surtout rurales, sur les droits de
l'homme et les libertés fondamentales auxquels ils ont droit ;
· La formation de la future armée nationale sur le
respect des droits de l'homme et du droit international humanitaire dans
l'exercice de ses fonctions ;
· Que les hommes politiques congolais apprennent
désormais à mettre l'homme au centre de tout intérêt
politique et oeuvrent pour son épanouissement intégral ;
· Que les lois en matière de protection et de
promotion des droits de l'homme soient rigoureusement appliquées en vue
de décourager tous ceux qui auraient, une fois de plus, l'intention
maléfique d'y porter atteinte.
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québécois des droits et libertés : Notes et
documents, Ed. Yvon Blais, Québec, 1994.
37. SCHABAS (W.A.), Précis du droit international
des droits de la personne, Ed. Yvon Blais Inc, Québec, 1997, 425
p.
38. TOURAINE (A), Qu'est-ce que la
démocratie ?, Fayard, Paris, 1994, 297 p.
39. TURPIN (D), Droit Constitutionnel, 5e
Edition, P.U.F., Paris, 1997, 825 p.
40. URY (W), Comment négocier la paix. Du conflit
à la coopération chez soi, au travail et dans le monde,
Nouveaux Horizons, Paris, 2001, 209 p.
41. VINCENSINI, (J-J), Le livre des droits de
l'homme, Ed. Robert Laffont, Paris, 1985.
42. ZARTMAN (W) (Dir), L'effondrement de l'Etat.
Désintégration et restauration du pouvoir légitime,
Nouveaux Horizons, Paris, 1995.
2- Articles, Revues, Rapports, Mémoires et
T.F.E., Textes juridiques, Notes de cours.
1. AMNESTY International, La guerre contre les civils non
armés, IFAI, Londres, 1998, 30 p.
2. C.I.C.R., Mise en oeuvre nationale du droit
international humanitaire : Droit international humanitaire et droit
international des droits de l'homme similitudes et différences,
Services Consultatifs, Mars 2001, 6 p.
3. Charte Africaine des droits de l'homme et des peuples de
Juin 1981.
4. Congo - Afrique, N° 318, octobre 1997.
5. Congo - Afrique, N° 328, octobre 1998.
6. Congo - Afrique, N° 329, mars 1999.
7. Congo - Afrique, N° 347, septembre 2000.
8. Congo - Afrique, N° 361, janvier 2002.
9. Congo - Afrique, N° 369 - 370, Novembre -
décembre 2002.
10. Déclaration des principes fondamentaux de
justice relatifs aux victimes de la criminalité et aux victimes d'abus
de pouvoir, Résolution 40/34 du 29 novembre 1985.
11. Déclaration politique du R.C.D.,
Département de la mobilisation et propagande, Goma, 12 Août 1998,
6 p.
12. Déclaration sur l'élimination de la
violence à l'égard des femmes, Résolution 48/104 de
l'Assemblée Générale du 20 décembre 1993.
13. Déclaration sur la protection des femmes et des
enfants en période d'urgence et de conflit armé,
Résolution 8318 (XXIX) du 14 décembre 1974.
14. Déclaration sur les droits des peuples à
la paix, Résolution 39/11 du 12 Novembre 1984.
15. Déclaration Universelle des droits de l'homme du 10
décembre 1948.
16. DEDONGA Dheba (M), Séminaire sur le droit
public, inédit, G3 Droit/C.U.B., 1999-2000.
17. Groupe Jérémie, Pour la
sécurité des pays voisins, la guerre est-elle une
solution ?, Bukavu, juillet 2001, 2 p.
18. Héritiers de la Justice, Situation des droits
de l'homme en R.D.C. : Rapport de 2e et 3e trimestre
1998. Cas du Sud-Kivu, Octobre 1998, 18 p.
19. Héritiers de la Justice, Situation des droits
de l'homme en R.D.C. : Cas du Sud-Kivu, Bukavu, avril 1999, 31 p.
20. Human Rights Watch, La guerre dans la guerre, violence
sexuelle contre les femmes et les filles à l'Est du Congo, New
York, juin 2002, 62 p.
21. Jeune - Afrique Economie, du 26 au 29 novembre
1998.
22. L.D.G.L., Rapport sur la situation des droits de
l'homme dans la région des grands lacs : Burundi, R.D.C., Rwanda.
Exercice 1998, Imprimerie de Kagbayi, Kigali, Juin 1999, 90 p.
23. L.D.G.L., Rapport sur la situation des droits de
l'homme dans la région des Grands-Lacs : Burundi, Rwanda, R.D.C.,
Exercice 2002, COFICO, Kigali, 2003.
24. L.D.GL., Grand-Lacs, entre la violence impunie et la
misère. Rapport sur la situation des droits de l'homme : Burundi,
Rwanda, R.D.C., années 2000 - 2001, COFICO, Kigali, 2002, 162 p.
25. MAGABE (J-C), Martyre et résistance : les
populations du Kivu face à l'occupation. Colloque sur le factionnalisme
en Angola, au Congo et en R.D.C., Nancy, le 06 mars 1999.
26. Nations Unies, Rapport du groupe d'expert sur
l'exploitation des ressources naturelles de la R.D.C., S/2001/357, 2001,
26 p.
27. Pacte international relatif aux droits civils et
politiques, Résolution 2200 A (XXI) du 16 décembre 1966.
28. Protocole additionnel aux conventions de Genève du
12 août 1949 relatif à la protection des victimes des conflits
armés non internationaux (Protocole II) du 8 juin 1977.
29. Revue Amani, N°33-34, Février-mars
2002.
30. RWAMIRINDI (M), La question du respect des droits de
l'homme pendant les circonstances exceptionnelles, Mémoire, Droit,
U.N.R., Butare, 2001, 70 p.
TABLE DES MATIERES
DEDICACE-------------------------------------------------------------------------------------------------I
REMERCIEMENTS
-------------------------------------------------------------------------------------II
SIGLES ET ABREVIATIONS
------------------------------------------------------------------------III
INTRODUCTION
1
1. ETAT DE LA
QUESTION
1
2. PROBLEMATIQUE
ET HYPOTHESES
4
3. OBJECTIFS ET
INTERET DU SUJET
6
4. METHODOLOGIE DE
TRAVAIL
7
A. Les Méthodes.
7
a. La méthode fonctionnelle
7
1° La Dysfonction.
8
2° L'équivalent ou substitut
fonctionnel.
8
3° Les fonctions manifestes et les fonctions
latentes.
9
b. La méthode
génétique
10
B. Les Techniques.
10
a. Les techniques d'enquête
10
1° L'analyse documentaire.
10
2° L'entretien.
11
3° Le questionnaire d'enquêtes.
11
b. Technique d'analyse des
données
12
5. DIFFICULTE
RENCONTREE
12
6. SUBDIVISION
SOMMAIRE DU TRAVAIL
12
PREMIERE PARTIE : LES DROITS DE
L'HOMME : UN CONCEPT QUI S'INSCRIT DANS LA THEORIE GENERALE DE L'ETAT
14
CHAPITRE I : CHAMPS EPISTEMOLOGIQUE ET
CONCEPTUEL
14
SECTION 1 : L'ETAT : PROTECTEUR
PRIVILEGIE DES DROITS DE L'HOMME
14
Paragraphe 1 : Les buts et les tâches de
l'Etat
15
A. Les buts de l'Etat
15
B. Les tâches ou missions de
l'Etat.
15
a. La protection interne et externe
16
b. Les tâches sociales de l'Etat
18
1° Mesures pour assurer l'existence des
Hommes.
18
2° Les possibilités
d'épanouissement des citoyens.
18
3° Les tâches dans le domaine
communautaire
19
Paragraphe 2 : L'Etat de droit : un
système au service de la garantie effective des droits
fondamentaux
19
A. Buts et éléments
constitutifs de l'Etat de droit.
20
B. Les caractéristiques de l'Etat de
droit.
20
Paragraphe 3 : L'effondrement de l'Etat : Un
blocage à l'exercice et à la garantie des droits fondamentaux
21
SECTION 2 : LES DROITS DE L'HOMME : UN
CONCEPT POLYSEMIQUE AU CONTENU PRECIS
22
Paragraphe 1 : Définition
22
Paragraphe 2 : La nature des droits de
l'homme
23
Paragraphe 3 : Les caractéristiques des
droits de l'homme
24
A. L'inhérence à l'être
humain.
24
B. L'universalité.
24
C. L'inaliénabilité
24
D. L'indivisibilité
25
Paragraphe 4 : La classification des droits et
libertés fondamentales de l'homme
25
A. La catégorisation classique
26
1. Les droits civils et politiques ou droits
de la première génération
26
a. Les droits et libertés liés
à la vie de la personne.
26
b. Les droits et liberté de
l'esprit.
26
c. Les libertés d'expression
collective.
26
d. Le droit à la
propriété.
26
e. Les droits politiques.
26
2. Les droits économiques, sociaux et
culturels ou droits de la deuxième génération
27
3. Les droits environnementaux, de
développement, à la paix ou droits de la troisième
génération
27
B. La classification suivant les obligations
imposées par l'Etat.
27
C. Classification fondée sur la
limitation des droits.
28
D. Classification fondée sur la
possibilité de dérogation des droits.
29
SECTION 3 : LA GUERRE : UN
PHENOMENE AUX CONSEQUENCES EVIDENTES SUR LA GARANTIE DES DROITS
FONDAMENTAUX
29
Paragraphe 1 : Définition de la
guerre
30
Paragraphe 2 : Les dimensions de la guerre
31
A. La guerre civile ou conflit armé
non international.
31
B. La guerre ou le conflit armé
international.
32
Paragraphe 3 : Les effets de la guerre
32
CHAPITRE II : CADRE NORMATIF RELATIF AUX
DROITS FONDAMENTAUX
34
SECTION 1 : LES SOURCES
INTERNATIONALES DE PROTECTION
36
Paragraphe 1 : Les instruments universels de
protection
36
A. La Charte des Nations Unies.
37
B. La Déclaration Universelle des
droits de l'homme.
37
C. Les Pactes internationaux jumeaux de
1966
37
Paragraphe 2 : Les mécanismes de mise
en oeuvre du droit international des droits de l'homme
38
A. Sur le plan universel
38
B. L'enrichissement de la garantie par les
systèmes régionaux
39
C. Le prolongement de la protection
internationale en droit interne
41
1. Mécanismes d'introduction des
droits de l'homme en droit interne
42
2. Le contenu des engagements de l'Etat au
respect des droits de l'homme
44
3. Les droits de l'homme et l'exercice du
pouvoir politique
45
a. Les droits de l'homme et les enjeux
politiques.
45
b. Droits de l'homme et
démocratie
46
c. Les droits de l'homme et la limitation
des pouvoirs
48
SECTION 2 : DU RESPECT DROITS
FONDAMENTAUX DANS LES CONFLITS ARMES
50
Paragraphe 1 : Le droit humanitaire
empirique
51
Paragraphe 2 : Le droit humanitaire
moderne
51
A. Le droit de Genève.
51
B. Le droit de la Haye.
51
Paragraphe 3 : Les instruments de protection y
relatifs
52
A. Les Conventions du 12 Août 1949
52
B. Les protocoles additionnels (1977)
52
Paragraphe 4 : Les liens entre le droit
humanitaire et le droit des droits de l'homme
52
DEUXIEME PARTIE : CONFLITS ARMES
ET DROITS FONDAMENTAUX DANS LA PROVINCE DU SUD-KIVU
54
CHAPITRE I : DES DROITS FONDAMENTAUX
MANIFESTEMENT VIOLES PAR LES ACTEURS AUX CONFLITS
55
SECTION 1 : LES PRINCIPALES VIOLATIONS
ET LEURS AUTEURS
55
Paragraphe 1 : Les droits civils et
politiques
56
A. Les atteintes au droit à la
vie.
56
B. Les atteintes à la dignité
humaine.
57
1. Les arrestations arbitraires
58
2. Enlèvement, disparitions
forcées, traitements cruels, inhumains et dégradants
60
3. Les atteintes aux droits à la
sécurité et à la paix
62
4. La liberté de circulation
62
5. Les travaux forcés
62
C. L'état des libertés
publiques
63
1. Les libertés de presse, d'opinion
et d'expression
63
2. Les libertés d'association, de
réunion et syndicale
65
D. La violence à l'égard des
femmes
66
E. La violation des droits de l'enfant.
67
Paragraphe 2 : Les droits économiques,
sociaux et culturels
68
A. Economie et gestion des fonds
publics.
68
B. Santé, Education et travail.
69
Paragraphe 3 : Les auteurs des violations
72
SECTION 2 : LES VIOLATIONS DES DROITS
FONDAMENTAUX : UNE SITUATION AUX CAUSES MULTIPLES ET
DIVERSIFIEES
73
Paragraphe 1 : L'opposition à la guerre
et l'impopularité de la rébellion
74
Paragraphe 2 : L'opposition aux pillages des
ressources économiques
74
Paragraphe 3 : L'opposition à la
domination étrangère
75
Paragraphe 4 : La présumée
installation des colonies de peuplement dans le Kivu
75
Paragraphe 5 : Les représailles et les
règlements de comptes
76
CHAPITRE II : LA CRISE HUMANITAIRE DANS LA
PROVINCE DU SUD-KIVU : UNE SITUATION AUX CONSEQUENCES NEFASTES SUR LES
VICTIME ET NECESSITANT DES MESURES APPROPRIEES POUR SON ERRADICATION
78
SECTION 1 : LES POPULATIONS
CIVILES : VICTIMES INNOCENTES DES VIOLATION DES DROITS
FONDAMENTAUX
78
Paragraphe 1: Selon l'âge et le sexe
79
A. Les enfants mineurs.
79
B. Les femmes enceintes et les personnes du
troisième âge
79
Paragraphe 2 : Selon les fonctions sociales
exercées
79
Paragraphe 3 : Attitudes et moyens de
défense des victimes face aux violations subies
80
A. La soumission et la
résignation.
80
B. Le recours à la violence.
80
C. La confiance aux organisations de
défense des droits humains
81
SECTION 2 : LES CONSEQUENCES DE LA
CRISE
83
Paragraphe 1 : Du point de vue
socio-économique et sanitaire
84
A. Le déplacement de la
population.
84
B. Le traumatisme psychologique des
populations victimes.
84
C. La destruction des tissus
socio-économiques.
85
D. La propagation des maladies infectieuses
et Rejet des victimes par la société.
86
E. La perte de confiance vis-à-vis
des collaborateurs de la rébellion.
86
Paragraphe 2 : Sur le plan politique
87
SECTION 3 : LES PERSPECTIVES DE SORTIE
DE CRISE EN MATIERE DE RESPECT DES DROITS FONDAMENTAUX
93
Paragraphe 1 : La cessation de la guerre et
l'établissement d'un Etat fort
93
Paragraphe 2 : Un retour rapide à un
Etat de droit et la lutte contre l'impunité
95
CONCLUSION
98
BIBLIOGRAPHIE
103
TABLE DES MATIERES
108
ANNEXES
* 1R. ABI-SAAB, Droit
humanitaire et conflits internes, Origines et évolution de la
réglementation internationale, A. Pédone, Paris, 1986,
280p.
* 2 J. MIGABO Kalere,
Génocide au Congo ? Analyse des massacres des populations
civiles, Broederlijke, Bruxelles, 2002, 216p.
* 3 M. RWAMIRINDI, La
question du respect des droits de l'homme pendant les circonstances
exceptionnelles, Mémoire, Droit, U.N.R., Butare, 2001, 70p.
* 4J. MIGABO Kalere, Op.
Cit., p.122.
* 5 Groupe
Jérémie, Pour la sécurité des pays voisins, la
guerre est-elle une solution ?, Bukavu, Juillet 2001, p1.
* 6 N. MPATI Ne Nzita,
« Droits de l'homme dans l'enseignement de Jean-Paul II »
in Congo-Afrique, N° 328, Octobre 1998, pp. 497 - 498.
* 7 LAUTERPCHT, Cité par
R. ABI-SAAB, Op. Cit., p. 8.
* 8 B. HAMULI Kabarhuza,
Donner sa chance au peuple Congolais. Expérience de
développement participatif, Karthala, Paris, 2002, pp. 58 - 61.
* 9 M. GRAWITZ,
Méthodes des Sciences Sociales, 7e Edition, Dalloz,
Paris, 1986, p. 448.
* 10 N. MULUMBATI,
Introduction à la science politique, Collection Savoir et
Connaître, Editions Africa, Kinshasa-Lubumbashi, 1977, p. 32.
* 11 G. ROCHER,
Introduction à la sociologie générale. L'organisation
sociale, Vol. 2, Ed. H.M.H., Paris, 1968, p. 164.
* 12 R.K. MERTON,
Eléments de méthode sociologique, Ed. Plon, Paris, 1953,
pp.95-138.
* 13 M. GRAWITZ,
Op.Cit., pp.453-454.
* 14 R. QUIVY, L. V.
CAMPENHOUDT, Manuel de recherche en sciences sociales, Dunod, Paris,
pp.159-229.
* 15 N. MULUMBATI,
Sociologie politique, Ed. Africa, Lubumbashi, 1988, Collection savoir
et connaître, p.75
* 16 D. TURPIN, Droit
Constitutionnel, 3e Edition, P.U.F., Paris, 1997, p.13.
* 17 T. FLEINER-GERSTER,
Théorie générale de l'Etat, P.U.F., Paris, 1986,
pp.440- 441.
* 18 T. FLEINER-GERSTER,
Op.Cit., pp. 442456.
* 19 C. DEBBASCH, La
science administrative, 5e Edition, Dalloz, Paris, 1989, p.
44.
* 20 B. GOURNAY,
L'Administration, P.U.F., Paris, Collection Que sais-je ?, 1980, p.
9
* 21 B. GOURNAY,
Op.Cit., p.10.
* 22 C. DEBBASCH, Op
Cit., p.51.
* 23 T. FLEINER-GERSTER,
Op.Cit., p.88.
* 24 B. KRIEGEL, Cours de
philosophie politique, Librairie Générale Française,
Paris, 1996, pp.12- 22.
* 25 Cité par B.
KRIEGEL, Op.Cit., pp. 18-19.
* 26 W. ZARTMAN (Dir.),
L'effondrement de l'Etat. Désintégration et restauration du
pouvoir légitime, Nouveaux Horizons, Paris, 1995, p.6.
* 27S.a., Petit Larousse
illustré, Ed. Larousse, Paris, 2001, p.350.
* 28 J. HERSCH (Dir), Le
droit d'être un homme. Anthologie mondiale de la liberté,
J.C.L./Unesco, Paris, 1990, p.129.
* 29 J.J. VINCENSINI, Le
livre des droits de l'homme, Ed. Robert Laffont, Paris, 1985, p.12.
* 30 J. MOURGEON, Les
droits de l'homme, 2e Edition, P.U.F., Paris, Collection Que
sais-je ?, 1981, p. 7.
* 31 M. DEDONGA,
Séminaire sur le droit public, inédit, G3 Droit/C.U.B.,
1999 - 2000.
* 32 s.a., Vers une
culture des droits humains en Afrique (extrait). Un manuel pour l'enseignement
des droits humains, SINIKO, s.d., pp 2-3.
* 33 Haut Commissariat aux
droits de l'homme, Techniques de communication en droits de l'homme. Actes
du séminaire organisé du 18 au 21 mai 2001, Bureau sur le
terrain en R.D.C., Goma, Juin 2002, pp.32-39.
* 34 G. LEBRETON,
Libertés publiques et droits de l'homme, 3e Edition,
Armand Colin, Paris, 1997, pp.16-18.
* 35 J. HERSCH,
Op.Cit., p.149.
* 36 S.a., Vers une
culture des droits humains en Afrique (extrait). Un manuel pour l'enseignement
des droits humains, SINIKO, s.d., p.5.
* 37 W. A. SCHABAS,
Précis du droit international des droits de la personne, Ed.
Yvon Blais Inc, Québec, 1997, pp.40-45.
* 38 Lire P. de QUIRINI,
Les droits des Citoyens Zaïrois, 2e Edition, CEPAS,
Kinshasa, 1980, pp.16-68.
* 39 W. A. SCHABAS,
Op.Cit., p.40.
* 40 Cfr. Charte Africaine des
droits de l'homme et des peuples adoptée en Juin 1982.
* 41 W. A. SCHABAS, Op.
Cit., p.42.
* 42 Cfr. Article 3 commun
aux quatre Conventions de Genève de 1949 ; l'article 4,
alinéa 2 du pacte relatif aux droits civils et politiques de
1966 ; l'article 12, alinéa 2 de la Convention européenne de
sauvegarde des droits de l'homme et l'article 27 de la Convention
américaine des droits de l'homme.
* 43 W. URY, Comment
négocier la paix. Du conflit à la coopération chez soi,
au travail et dans le monde,
Nouveaux Horizons, Paris, 2001, pp. XI - XIV.
* 44 G. BOUTHOUL,
Traité de sociologie. Les guerres, éléments de
polémologie, Payot, Paris, 1951, p. 25.
* 45 N. Q. DINH et allii,
Droit international public, 2e Edition, L.G.D.J., Paris,
1980, p. 855.
* 46 G. BOUTHOUL,
Op.Cit., p. 35.
* 47 G. BOUTHOUL, Op
Cit., p. 37.
* 48 R. ABI-SAAB, Op.
Cit., p. 69.
* 49 G. BOUTHOUL,
Op.Cit., p.447.
* 50 R. ABI - SAAB,
Op.Cit., pp.67et 117.
* 51 Ibid.
* 52 J. MIGABO Kalere,
Op;Cit., p.129.
* 53 Banque Africaine de
Développement, Rapport sur le développement en Afrique 2001.
Renforcement de la bonne gouvernance en Afrique, Economica, Paris, 2001,
p. 125.
* 54 G. BOUTHOUL, La
population dans le monde. Les grands événements historiques -
Guerres et Populations - perspectives d'avenir, Payot, Paris, 1935, p.
209.
* 55 B. K. HAMULI,
Op.Cit., pp. 60-61.
* 56Y. G. ELENGA,
« L'Afrique des rébellions ou alibi
démocratique », Congo-Afrique, N° 329, mars
1999, pp.147-150.
* 57 D. ALLAND, Droit
international public, P.U.F., Paris, Collection droit fondamental, 2000,
pp. 73-74.
* 58 J. MOURGEON, Op.
Cit., p. 77.
* 59 N. MPATI Ne Nzita,
« Droits de l'homme dans l'enseignement de Jean-Paul II »,
Congo-Afrique, N° 328, Octobre 1998, pp.495-497.
* 60 J. MOURGEON,
Op.Cit., p.54.
* 61 P-E. BOLTE, Les droits
de l'homme et la papauté contemporaine, FIDES, Montréal,
1975, p.108.
* 62 B. KRIEGEL,
Op.Cit., pp.118-119.
* 63 C.I.C.R., Mise en
oeuvre Nationale du droit international humanitaire : Droit
international humanitaire et droit international des droits de l'homme.
Similitudes et différences, Services Consultatifs, Mai 2001,
p.1.
* 64 W. SCHABAS,
Op.Cit., p.1.
* 65 Nations Unies,
L'ONU pour tous. Ce qu'il faut savoir de l'ONU, de ses travaux, de son
évolution pendant les 20 premières années 1945 -
1965, 8e Ed., Service de l'Information, New York, Mars 1968,
p.148.
* 66 N. Q. DINH et allii,
Op. Cit., p.547.
* 67 W. SCHABAS et D. TURP,
Droit international Canadien et Québécois des droits et
libertés : Notes et documents, Ed. Yvon Blais, Québec,
1994, p.4.
* 68 Idem, pp.13-14.
* 69 Idem, p.31.
* 70 C.I.C.R.,
Op.Cit., p.4.
* 71 C.
LUTUNDULA, « Des engagements et devoirs de l'Etat en
matière de protection et de promotion des droits de l'homme »,
Congo-Afrique, N° 328, Octobre 1998, p.469.
* 72 Haut Commissariat des
Nations Unies aux droits de l'homme, Op.Cit., p.57.
* 73 W. A. SCHABAS,
Op.Cit., pp.99-31.
* 74 C.I.C.R, Op.Cit.,
p.4.
* 75 J. MOURGEON,
Op.Cit., pp.7-80.
* 76 C.I.C.R.,
Op.Cit., p.3.
* 77 J. MOURGEON,
Op.Cit., p.71.
* 78 Lire s.a.,
« Des principes, programme minimum et Statuts de
l'A.F.D.L. », Congo-Afrique, N° 318, Octobre 1997,
pp.497-499 et s.a., Déclaration politique du R.C.D.,
Département de la mobilisation et propagande, Goma, 12 Août 1998,
p.6.
* 79 N. N. MPATI,
Op.Cit., pp. 63-68.
* 80 D. MAUGENEST & P.G.
POUGOUE (Dir.), Droits de l'homme en Afrique Centrales. Colloque de
Yaoundé (9-11 Novembre 1994), Karthala, Paris, 1996, pp.75-77.
* 81 D. MASUMBUKO Ngwas,
« Les droits de l'Homme, la démocratie et la paix »
in Haut Commisariat aux Droits de l'homme, Op.Cit., pp.24-25.
* 82 H. NGBANDA,
Afrique : Démocratie piégée, Equilibre
d'aujourd'hui, Paris, 1993, pp.24-27.
* 83 D. MASUMBUKO Ngwas, Op.
Cit., pp. 26 - 27.
* 84J. HERSCH,
Op.Cit., p.129.
* 85 A. TOURAINE, Qu'est-ce
que la démocratie ?, Fayard, Paris, 1994, pp.57-61.
* 86 D. MAUGENEST et P.G.
POUGOUE, Op.Cit., p.57.
* 87 C.I.C.R.,
Op.Cit., p.1.
* 88 Haut Commissariat des
Nations Unies aux Droits de l'Homme, Op.Cit., p.56.
* 89 C.I.C.R., Op.Cit,
p.1.
* 90 Haut Commissariat des
Nations Unies aux Droits de l'Homme, Op.Cit, pp.56-61.
* 91 C.I.C.R., Les
Conventions de Genève du 12 Août 1949, 4e Edition,
Genève, 1989, pp.157-171.
* 92 C. de ROOVER,
Servir et protéger. Droits de l'homme et Droit humanitaire pour les
forces de police et de sécurité, C.I.C.R., Genève,
1999, p.139.
* 93 AMNESTY International,
« Les violences massives tuent la décence humaine. Extrait du
rapport d'Amnesty International sur la R.D.C. »,
Congo-Afrique, N° 347, septembre 2000, p.390.
* 94 B. HAMULI Kabarhuza,
Op Cit., p.59
* 95 ) C. BRAECKMAN, Les
nouveaux prédateurs. Politique des puissances en Afrique Centrale,
Fayard, Paris, 2003, pp.152-156.
* 96 Héritiers de la
Justice, Situation des droits de l'homme en R.D.C. : Rapport de
2e et 3e trimestre 1998.Cas du Sud-Kivu, Bukavu,
Octobre 1998, p.1.
* 97 J. MIGABO Kalere,
Op.Cit., pp.85-86.
* 98 LDGL, Rapport sur
la situation des droits de l'homme dans la région des Grands-Lacs :
Burundi, R.D. Congo, Rwanda. Exercice 1998, Imprimerie de Kabgayi,
Kigali, Juin 1999, p.51.
* 99 C. BRAECKMAN,
Op.Cit., p.155.
* 100 Héritiers de la
Justice, Op.Cit., p.15.
* 101 L.D.G.L.,
Op.Cit., pp.65-66.
* 102 Haut Commissariat des
Nations Unies aux droits de l'homme, Déclaration sur
l'élimination de la violence à l'égard des femmes,
Genève, 1996-2000, p.3.
* 103 Human Rights Watch.,
La guerre dans la guerre, violence sexuelle contre les femmes et les filles
à l'Est du Congo, New York, Juin 2002, pp.13-15.
* 104 C. BRAECKMAN,
Op.Cit., pp.160-165.
* 105 B. AZIZA et R.
INTERAMAHANGA, « Violence au quotidien », Revue
Amani, N°33-34, février-mars 2002, p.5.
* 106 Haut Commissariat aux
droits de l'homme, Protocole additionnel aux Conventions de Genève
du 12 Août 1949 relatif à la protection des victimes des conflits
armés non internationaux (protocole II) du 8 juin 1977,
Genève, 1996-1999, p.3.
* 107 L.D.G.L.,
Op.Cit., p.94.
* 108 C. BRAECKMAN,
Op.Cit., p.156.
* 109 Héritiers de
la Justice, Situation des droits de l'homme en R.D.C. : Cas du
Sud-Kivu, Bukavu, avril 1999, p.30.
* 110 C. BRAECKMAN,
Op.Cit., p.158.
* 111 L.D.G.L.,
Op.Cit., p.95.
* 112 D. MASUMBUKO NGWAS,
« Les droits de l'homme, la démocratie et la paix »
in Haut Commissariat des Nations Unies aux Droits de l'homme, Op.Cit.,
p.27.
* 113 J. MIGABO KALERE,
Op.Cit., pp.82-107.
* 114 C. BRAECKMAN,
Op.Cit., p.160.
* 115 J. MIGABO KALERE,
Op.Cit., pp.113-117.
* 116 S. MARYSSE et F.
REYNTJENS (Dir.), L'Afrique des Grands-Lacs. Annuaire 2000-2001, Tome
5, L'Harmattan, Paris, 2001, pp.143-147.
* 117 P. MATHIEU & J -
C. WILLAME (Dir.), « Conflits et guerres au Kivu et dans la
région des Grands-Lacs. Entre tensions locales et escalade
régional », Cahiers Africains, N°39-40,
l'Harmattan, Paris, 1999, pp.174-175.
* 118 Nations Unies,
Rapport du groupe d'experts sur l'exploitation illégale des
ressources naturelles et autres richesses de la R.D.C., S/2001/357, 2001,
p.2.
* 119 B. HAMULI Kabarhuza,
Op.Cit., pp.59-61.
* 120 Héritiers de
la Justice (1998), Op.Cit., p.2.
* 121 Amnesty
International, « les violences massives tuent la décence
Humaine » in Op.Cit., p.393.
* 122 Amnesty
International, La guerre contre les civils non armés, Londres,
EFAI, 1998, pp.12-14.
* 123 Héritiers de
la Justice (1999), Op. Cit., p.30.
* 124 Lire à ce
sujet J. K. MIGABO, Op.Cit., pp.81-83. et C. BRAECMAN,
Op.Cit., pp.153-154
* 125 Haut Commissariat aux
Droits de l'homme, Déclaration des principes fondamentaux de justice
relatif aux victimes de la criminalité et aux victimes d'abus de pouvoir
du 29 novembre 1985, Genève, 1996-1999, p.1.
* 126 Rassemblement pour le
Progrès, Pour que l'on n'oublie jamais. Mourir pour avoir accueilli,
aimé et protégé, s.v., s.d., p.10.
* 127 C. BRAECKMAN,
Op.Cit., p.155.
* 128 J. MIGABO Kalere,
Op.Cit., p.99-101.
* 129 C. BRAECKMAN,
Op.Cit., p.156.
* 130 D. MASUMBUKO Ngwas,
Op.Cit., pp.28-30.
* 131 Héritiers de la
Justice (1998), Op.Cit., p.16.
* 132 D. MAUGENEST et P - G
POUGOUE, Op.Cit., pp.72-73.
* 133 Rassemblement pour le
Progrès, Op.Cit., pp.38-39.
* 134 J. MIGABO Kalere,
Op.Cit., pp.121-122.
* 135 C. BRAECKMAN,
Op.Cit., p.161.
* 136 L.D.G.L. (1999),
Op.Cit., p.63.
* 137 Rassemblement pour le
Progrès, Op.Cit., pp.33-35.
* 138 Héritiers de la
Justice (1998), Op.Cit., p.16.
* 139 J-C. MAGABE Mwene,
« Martyre et résistance. Les populations du Kivu face à
l'occupation », Colloque sur le factionnalisme en Angola, au
Congo et En R.D.C., Nancy, le 06 mars 1999, p.3.
* 140 Haut Commissariat aux
Droits de l'homme, Op. Cit., p.28.
* 141 B. HAMULI Kabarhuza,
Op. Cit., pp.60-66
* 142 C. BRAECKMAN, Op.
Cit., p.163.
* 143 C. BRAECKMAN,
Op.Cit, p.167.
* 144 BAPUWA Mwamba,
« Un transfuge dénonce l'occupation Rwandaise. Jean-Charles
MAGABE, ancien gouverneur du Sud-Kivu, a fui la province occupée par la
rébellion, qu'il accuse d'"assassinats et de pillages" »,
Jeune-Afrique Economie, du 16 au 29 Novembre 1998, pp.108-109.
* 145 Héritiers de la
Justice (1998), Op. Cit., p.17.
* 146 J. MIGABO Kalere,
Op.Cit., p.113.
* 147 J - C. MAGABE,
Op.Cit., p.4.
* 148 J. MIGABO Kalere,
Op.Cit., p.113.
* 149 I. BYABUZE
Katabaruka, Lettre ouverte à Monsieur le Président du
R.C.D./Goma sur les résultats partiels du dialogue intercongolais,
N/Réf. : DOC. 12.Idé.B.K., du 29 mars 2002, Bukavu, p.4.
* 150 Rassemblement pour le
Progrès, Op Cit., pp. 40 - 45.
* 151 D. MASUMBUKO Ngwas,
Op.Cit, p.28.
* 152 Banque Africaine de
Développement, Op.Cit., p.146.
* 153 Rassemblement pour le
Progrès, Op.Cit., p.40.
* 154 Lire S. MARYSSE et F.
REYNTJENS, Op.Cit., pp.143-174.
* 155 KIZITO wa Payeye,
« Etat fort, précurseur d'un Etat de droit »,
R.D.Congo-Débat Forum, 04/12/2002, pp.1-2.
* 156 R. GARRETON,
« Lettre ouverte aux Congolaises et aux Congolais »,
Congo-Afrique, N°361, Janvier 2002, pp.16-17.
* 157C. HEMEDI Bayolo,
« Lutte contre l'impunité : esquisse des
mécanismes de répression des crimes commis en R.D.C. depuis
1996 », Congo-Afrique, N°369-370,
Novembre-Décembre 2002, pp.569-574.
* 158 KIZITO wa Payeye,
Op.Cit., p.4.
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