Intelligence économique et stratégie d'entreprise, état de la question et pratique en Algerie( Télécharger le fichier original )par Souhil FEKIR EHEC Alger - Magister 2009 |
Section2 : de la veille stratégique à la protection de l'information « une condition stratégique »Cette section remet en cause la notion du système d'information et son processus représentant le coeur de l'activité de l'intelligence économique. Elle passe ainsi aux différents types de veille, qu'elle soit passive ou active. Elle traite également ses composantes qui sont, en réalité, une catégorisation des données à collecter de l'environnement externe en fonction des acteurs y exerçant et leur impact sur l'organisation : marketing pour les clients, concurrence pour les concurrents, technologique pour la technologie,... ; l'entreprise est aussi surveillée, à sa faveur (ex : en tant qu'un client), ou à sa défaveur (ex : en tant qu'un concurrent, ce qui rend indispensable la protection de son patrimoine informationnel.
§1. Composantes et processus de veilleL'intelligence économique est une activité qui inclus deux différentes phases, la veille stratégique et la protection de l'information suivant la définition donné par le CIGREF basée sur celle de l'IHEDN (supra). Une cellule efficace bâtie en fonction des besoins de l'organisation est primordiale. (*) BAUMARD, 1991, d'après Hans Graf HUYN, « La stratégie de la désinformation », in Géopolitique, no 29, Printemps 1990.
La veille est avant tout un état d'esprit, une attitude, une discipline apparue récemment, venant pour réponde à la nécessite de la mise en place d'un management de l'information tourné vers la qualité et non pas la quantité. Elle exige une compétence et une structure spécifique.
La veille est une étape du processus de l'intelligence économique et peut être définie, selon le rapport de CIGREF (1) comme suit« ...il ne peut y avoir de démarche d'intelligence économique sans une activité organisée de veille. [La veille est] « l'activité continue de l'environnement technologique, commercial, etc., pour en anticiper les évolutions » et [définit] l'anticipation comme « détection d'une situation avant qu'elle se soit réellement manifestée » » (2). Elle regroupe un ensemble de phases allant de la définition des besoins à la communication des informations et les réajustements nécessaires. Le schéma suivant met en évidence l'ensemble des ces phases. (*) Notice d'information rédigée à l'occasion du lancement de l'emprunt obligataire de 2005, visa COSOB N° 05-05 du 17/10/2005
Model canonique de la veille
Source : La veille stratégique : Du concept à la pratique, IAAT, juin 2005, www.iaat.org, le processus de veille, type adapté de Afnor X50-053. Cette démarche sera détailler dans le point « Processus de veille » de cette section. Nous remarquons l'utilisation du terme « continue », c'est ce que distingue la veille (ou l'intelligence économique) des autres opérations de recherches d'informations qui sont lancées généralement pour un besoin spécifique et momentané ; cela remet en cause l'hypothèse du néo-panoptisme de l'auteur Philipe BAUMARD qui consiste à supprimer les intervalles de la non- surveillance par l'omniprésence de la technologie. L'activité de veille est assurée par la cellule de veille qui a une structure spécifique et repose sur deux dimensions, une dimension stratégique et une dimension opérationnelle. - la dimension stratégique : elle regroupe quatre éléments principaux, les objectifs, une comité de veille représentant les membres, les fonctions et l'organisation, les finalités opérationnelles dont la principales est la mise en place de la stratégie et finalement une légende. - la dimension opérationnelle contient des acteurs (observateurs, décideurs, experts, réseaux externes), les sources d'information, les outils (de recherche, de traitement,...) et les limites (objectifs floues, information non pertinentes,...). Cette structure est un résumé d'un schéma exemple de cellule de veille stratégique posé par la IAAT (source page précédente) que nous allons présenter et expliquer dans la deuxième partie de ce rapport.
L'activité de veille peut être passive et consiste à recevoir les signaux émanant de son environnement, comme elle peut être active dans le cas où l'entreprise cherche elle-même les informations existant dans cet environnement lui apparaissant pertinentes.
Il existe deux types de veille, la veille passive et la veille active. a- la veille passive : elle consiste à recevoir les signaux venant de l'environnement, de collecter des données générales, d'anticiper et de pro agir. Elle concerne généralement les objectifs non confidentiels, ce qui permet d'observer et de se poser des questions à partir de ces observations. Les autres auteurs définissent ce type de veille comme la réception des signaux faibles (approche utilisée par les Etats-Unis) et n'attendant plus que leur certitude augmente. Le schéma suivant clarifie son fonctionnement :
Les signaux sont des faits concurrentiels dont il faut s'accommoder - signaux organisé - Une menace s'installe Signaux nouveaux Sporadiques. Isolés à peine significatifs Degré de liberté Visibilité et et d'autonomie amplitude des de l'entreprise signaux avertisseurs - Convergence significative des signaux - Début de quantification - Apparition de tendances
Source : gestion concurrentielle, de GUERNY et DELBES, 3082, d'après SRI (Stanford Research Institute) Il en découle que l'entreprise doit détecter le moindre signal d'alerte d'un changement de son environnement. Le degré de liberté de l'entreprise diminue au fur et à mesure que les signaux deviennent multiples, visibles pour tout le monde et convergents. On peut se trouver dans une situation de surabondance et de redondance de l'information. La veille passive concerne le plus souvent l'émergence des nouveaux entrants et nouvelles tendances (signaux faibles). b- veille active : elle consiste à rechercher des données précises sur un sujet précis qui ne sont pas généralement disponibles dans l'environnement pour tous le monde et ont un caractère spécifique. Dans ce type de veille on se pose des questions et ont observe après. Les signaux recherchés sont forts et concernent généralement les concurrents. cela permet d'alerter l'entreprise sur les écarts stratégiques des concurrents. Le tableau suivant résume ces deux types et les différences principales: Modalité de fonctionnement v. active et v. passive :
Source : Idem Les auteurs (De GUERNY et DELBES) distinguent ainsi deux dimensions de la veille active : · La veille défensive qui permet de répondre aux questions suivantes : - Le concurrent est-il satisfait de sa position actuelle? - Quels sont les manoeuvres probables et les changements stratégiques auxquels le concurrent risque de se livrer à l'avenir, et quels en sont les dangers ? · veille offensive (qui sera revue dans l'élément de protection des informations du dernier paragraphe de cette section) consiste à répondre aux questions : - Où se situent les vulnérabilités du concurrent? Au niveau de la gamme de produits, au niveau géographique, etc. ? - Quelle est l'initiative susceptible de provoquer les représailles les plus dommageables de la part du concurrent ? (*)
En fait, la description de ces auteurs de la veille stratégique active prend sa source peut être dans la veille concurrentielle en tant que composante de la veille stratégique.
(*) D'après Michael Porter, dans le cadre du séminaire « Competitive analysis », juin 1985. L'activité de veille est, de ce qui précède, vitale pour l'entreprise. Elle permet de connaître son environnement (micro et macro) et, par conséquent, de pouvoir anticiper et réagir au bon moment en prenant des décisions (décisions stratégiques en particulier- voir information et décision stratégique, chapitre1), c'est une question de survie ou de mort, une finalité exigeant une planification et une mise en oeuvre fortement attentives d'une cellule et d'un processus de veille.
L'environnement externe de l'entreprise est composé de plusieurs acteurs pouvant agir sur elle même, des acteurs proches appartenant au micro-environnement (cf. M. Porter), et des facteurs lointains constituant le macro-environnement. Ces derniers, vu leur influence sur l'entreprise, doivent faire l'objet d'une surveillance continue, ce qui constitue toute une activité de veille. Suivant cette catégorisation, on peut distinguer cinq domaines de l'activité de veille à savoir celui de la concurrence, du marketing, du commercial, de la technologie et du sociétal.
L'entreprise doit connaître les technologies (1) disponibles dans son environnement en permanence notamment les acquis scientifiques, les procédés de réalisation, les matériaux, les systèmes d'information, les technologies, et les produits (Voir annexe6, VT). a- les acquis scientifiques : L'entreprise doit connaître les découvertes et les démonstrations des scientifiques (expérience où modèle théorique), ce qui exige un minimum de connaissance, elle ne doit pas chercher cette information lorsqu'elle n'est utilisée que par les spécialistes du domaine comme elle n'attend pas à ce que celle-ci soit largement disponible ou ancienne, c'est le stade moyen comportant les thèses, les protocoles d'expérience, les labo,...l'homéopathie est un domaine utilisant fortement cette activité (ex : SAIDAL en Algérie).
b- les procedes de réalisation : C'est le savoir faire qui est demandé ici notamment lorsque l'entreprise pénètre un nouveau domaine où des connaissances nouvelles doivent être utilisées (ex : entreprise diversifiant sa stratégie). Connaître un procédé consiste à connaître (2) : - son principe : les fondements scientifiques de son efficacité ; - le coeur du sujet : la vrai transformation réalisée ; - les performances du procédé : la précision des cotes obtenues, le degré de pureté atteint, la résistance du collage à l'arrachement, le rendement de la réaction ; - les conditions d'efficacité : matériaux, environnement/ambiance,... ; - les difficultés de mise en oeuvre : le degré de difficulté ; - les risques d'échec, la duré de mise au point ; - (1) : « ...le mot technologies recouvre ici des ensembles d'informations de plus en plus vastes, complexes, évolutifs, et dont la composante économique n'est pas la moins intéressante », B. Martinet et J.M. Ribault, la veille technologique, concurrentielle et commerciale, les éditions d'organisation, paris, 1989. (2) Idem, partiellement modifié
l'extension actuelle du procédé : branche, matériaux, vitesse, ... Le schéma suivant présente un check-list contenant les principaux éléments des procédés de réalisation :
Tableau 1-1 Veilleur sur procédé : CHEK - LIST (*)
c- les matériaux : Ce type de veille concerne les matériaux que l'entreprise utilise massivement et qui constituent la majorité de ses coûts (étape de transformation, pays producteur, sources permanentes et occasionnelles, mode de transport, ...), les nouveaux matériaux. d- les systèmes d'informations et technologie: La veille sur les systèmes d'informations s'intéresse aux langages et logiciels de programmation, outils d'aide et de prise de décision, les évolutions devant être constatées en la matière, les procédures des systèmes d'informations, etc. Pour connaître plus de détail, voir chapitre précédent, système d'information. e- les produits (*): Les éléments sur lesquels doit porter cette activité sont : La fonction de service principale et ses critères d'appréciation, les fonctions de service complémentaire et leurs critères d'appréciation, la résistance aux contraintes particulières, les fonctions de service sont d'usage et/ou d'image, les critères d'appréciation de chaque fonction mesurant les performances du produit , les caractéristiques et le design du produit, les gammes de produits (différenciation entre gamme, respect des standards,...). (*) Ibidem
Ce type de veille concerne les concurrents actuelles et potentiels. Elle consiste à surveiller leurs forces et leurs faiblesses afin de mesurer leur stratégie et bâtir la sienne. Tout changement de stratégie des concurrents doit être détecté, analysé et expliqué pour pouvoir prendre les décisions (stratégiques) pertinentes dans le bon moment, une stabilité doit être aussi notée. L'information finale (produit informationnel) est présentée sous forme de rapports stratégiques contenant une évaluation périodique sur la stratégie des concurrents. C'est, en fait, l'établissement d'une « situation stratégique nette » pour chaque concurrent comportant les éléments suivant : Plan type de la situation stratégique nette d'un concurrent (1)
Les points forts et les points faibles portent essentiellement sur (2):
· (1) : De GUERNY et DELBES, gestion concurrentielle, 3082. (2) : B. Martinet et J.M. Ribault, la veille technologique, concurrentielle et commerciale, 1989
Autres éléments font l'objet d'une surveillance relevant des concurrents et du marché : · l'intensité de la concurrence : elle devient plus fortes si les concurrents sont nombreux et équilibrés, croissance du secteur lente, coûts fixes élevés, produits des concurrents peu différenciés, concurrents très divers, enjeux stratégiques élevés pour chacun d'eux, obstacles à la sortie élevés, obstacles à l'entrée faibles. · Les éléments clé des concurrents : machines, volumes de production, effectifs,... · Les coûts : englobe les prix des composantes disponibles, les prix unitaires, les salaires, les coûts de douane, du port,...
Elle permet d'acquérir des informations sur (*):
(*) Idem
La veille Marketing permet de connaître : · l'image de l'entreprise · l'évolution du marché · le comportement du consommateur · les axes de communication des concurrents,... Elle permet de détecter de nouveaux marchés, de lancer de nouveaux produits aux clients,....
Appelée par fois « veille par excellence » (1), elle permet de surveiller les nouvelles tendances et s'occupe des éléments qui n'ont pas été traités par les autres types de veille, à savoir veille réglementaire, financière, fiscale, économique, politique, écologique, sociale, culturelle, etc.
L'activité de veille est, de ce qui précède, vitale pour l'entreprise. Elle permet de connaître son environnement (micro et macro) et, par conséquent, de pouvoir anticiper et réagir au bon moment en prenant des décisions pertinentes. C'est une question de survie ou de mort, une finalité exigeant une planification et une mise en oeuvre fortement attentives d'une cellule et d'un processus de veille.
|
|