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Intérêts et enjeux économiques de l'intégration à  l'Union Européenne d'un point de vue turc

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par Benoit ILLINGER
Université Pierre Mendès France (Grenoble II Sciences Sociales) - DEA Economie et Politiques Internationales 2002
  

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Conclusion

Nous avons, tout au long de ce travail, montré que la Turquie avait un intérêt économique à adhérer à l'UE mais à condition, d'une part, qu'elle dépasse le stade de l'Union douanière (pour bénéficier d'effets dynamiques croissants), d'autre part, qu'elle bénéficie d'un accroissement de son stock de capital et enfin qu'elle dispose d'un système de redistribution afin d'éviter que tous les gains aillent aux mêmes individus.

Nous noterons néanmoins deux limites à cette conclusion, somme toute très théorique.

Premièrement, nous mettons en exergue le fait que notre recommandation de redistribution sociale semble illusoire. En effet, on sait que l'intégration de la Turquie à l'Union européenne suppose une convergence « réelle », c'est-à-dire la modification de sa structure vers un modèle européen. A cet effet, elle doit respecter trois points importants : mettre aux normes son économie, augmenter le niveau de vie de sa population et conduire une politique économique qui s'inscrit dans la philosophie de l'UE à savoir avoir des déficits limités pour assurer une certaine stabilité de la zone. Or, il semble que ces trois objectifs soient difficilement compatibles. Le triangle « réformes-croissance-orthodoxie » se révèle porteur de redoutables contradictions (MENIER N. [2001]). En effet, la mise aux normes des différents secteurs économiques sera, par exemple, coûteuse en termes sociaux. Comme nous l'avons montré lors du premier chapitre, l'ouverture nécessite une redistribution pour indemniser les « perdants ». Pourtant les dépenses de l'Etat, qu'il s'agisse de subventions ou d'aides sociales, conduisent à un accroissement du déficit. De surcroît, la nécessité d'attirer les IDE bloque également un certain nombre de réformes allant dans un sens socialement égalitaire. La course à l'attractivité est souvent antinomique d'Etat providence.

La vente d'entreprises d'Etat ou l'utilisation de la « planche à billets » a certes pu limiter la fracture sociale dans un premier temps mais la restructuration de l'économie se poursuivant, l'Etat ne dispose plus de moyen d'indemnisation des « perdants ». Aussi, il est judicieux de se poser la question de savoir si, en Turquie, il n'y aura pas quelques générations sacrifiées. Ces derniers se désintéresseront alors du processus d'intégration qui pourtant à long terme leur serait bénéfique.

Deuxièmement, la question des gains de l'intégration à l'Union Européenne ne recouvre pas celle de la convergence132(*) des économies intégrées. Les gains, même positifs et mutuels, peuvent accentuer la divergence s'ils sont principalement captés par les pays les plus développés (ou la réduire dans le cas contraire). Or, cette analyse a essentiellement démontré que l'intégration de la Turquie à l'UE lui apporterait, en se poursuivant, des effets positifs. Nous n'avons par ailleurs pas comparé l'intensité de ces gains par rapport à ceux engendrés pour les autres pays de l'Union. En conséquence, nous ne pouvons pas savoir si la Turquie entamerait une réelle convergence ou si, au contraire, l'écart entre les pays s'accentuerait, cantonnant la Turquie au statut de pays le moins développé de l'UE.

Pour répondre à la question soulevée il faudrait donc entamer un travail sur les gains économiques que l'UE engrangerait en accueillant la Turquie en son sein et procéder à une comparaison afin d'observer si l'intégration mènerait à la convergence des économies comme se fut le cas pour l'Espagne.

Cette question de la convergence est importante dans le sens où, s'il n'y a pas convergence à long terme, l'Union avec la Turquie ne serai pas tenable. Alors, même si les recommandations que nous faisons dans ce travail sont fondées, elles n'en deviendraient que les garantes de la « moins pire » des options.

* 132 « D'une manière générale, la convergence peut être définie comme étant la diminution des écarts de performances économiques relatifs à plusieurs pays. » ECHINARD Y. [1997].

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