Intérêts et enjeux économiques de l'intégration à l'Union Européenne d'un point de vue turc( Télécharger le fichier original )par Benoit ILLINGER Université Pierre Mendès France (Grenoble II Sciences Sociales) - DEA Economie et Politiques Internationales 2002 |
3.2 Tableau de synthèse des Explications de la protection appliquées à la Turquie
Tableau de Synthèse des Explications de la protection appliquées à la Turquie. 3.3 EnseignementsAu terme de cette synthèse très caricaturale qui, rappelons le encore, ne prend en compte que les effets de l'ouverture commerciale à l'Europe, on se rend compte que théoriquement et globalement (colonne de droite): - trois groupes sur cinq ont intérêt au protectionnisme, - un à l'ouverture commerciale à l'Union européenne, - un reste indéterminé. La conclusion que l'on peut donc tirer de cette approche n'est pas évidente pour différentes raisons : - Tout d'abord, il reste le problème des capitalistes (assimilés au groupe TüSIAD) que nous avons déjà soulevé et qu'aucune analyse ne permet d'intégrer. Ce groupe a une grande importance d'une part car il représente un « poids » important du point de vue électoral et d'autre part car si l'on montre qu'il est théoriquement en faveur de l'ouverture, alors les désirs se rééquilibrent (nous avons deux groupes pour et deux groupes contre l'ouverture) et l'application de l'ouverture devient plus compréhensible en terme de coalition. - Ensuite, le statut des travailleurs du secteur agricole pose problème dans la mesure où c'est l'hypothèse de départ qui les classe indépendamment ou parmi les travailleurs non-qualifiés qui fera de ce dernier groupe le plus nombreux ou non. - Enfin, il ne semble pas être du ressort de l'économiste de juger si le gain de certains compense la perte d'autres (et de surcroît de voir si le bien-être marginal engendré par le gain est supérieur au bien-être marginal détruit par une perte). Il en reste tout de même que de s'ouvrir à l'Union européenne semble satisfaire moins de groupes que le fait de rester en autarcie. En prenant en compte les explications factorielles et sectorielles, la Turquie devrait donc théoriquement rester fermée à l'UE. Aussi il se peut que prendre en compte le côté de l'offre de protection soit pertinent car on constate alors que la demande « exaucée » est celle du groupe qui tend à représenter la majorité de la population78(*) soit, à peu de chose près (dans une république démocratique comme la Turquie) la majorité des électeurs. De surcroît, si l'on considère qu'à la marge le gain de bien être lié à l'amélioration des revenus est décroissante, le choix d'ouverture semble rester optimal dans la mesure où le groupe appelé à bénéficier d'un gain ( les travailleurs non-qualifiés) est le groupe originellement « défavorisé ». Nous avons donc montré dans ce chapitre que l'idéal théorique est le libre-échange (ouverture au monde dans un cadre mondial et ouverture à l'UE dans un cadre européen). De plus nous avons vu qu'à priori plus les pays sont différents et plus l'intégration favorise la spécialisation des économies et donc une utilisations plus efficaces des ressources. Le libre-échange entre pays inégalement développés est donc bénéfique et donc l'intégration de la Turquie à l'UE devrait théoriquement être bénéfique. Nous avons néanmoins relativisé cette conclusion théorique en montrant que toutes les décisions profitent plus à certains groupes (voire même dégrade la situation d'autres) s'il n'y a pas de redistribution Dans cette perspective nous avons cherché dans le cas de la Turquie, théoriquement quels étaient les intérêts suivis par le biais de la politique régionaliste européenne et aussi au détriment de qui s'imposaient-ils. Et nous avons estimé que l'ouverture à l'Europe permettrait aux travailleurs non-qualifiés d'être bénéficiaire d'un gain au détriment des autres groupes. Néanmoins ce choix semble rester optimal dans la mesure où ce groupe est appelé à être le plus lourd quantitativement et que nous estimons qu'à la marge un gain pour ce groupe « défavorisé » est largement supérieur à la perte à la marge des autres groupes. En conclusion, l'ouverture commerciale à l'UE semble être optimale dans l'optique d'étude de ce premier chapitre.
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* 73 le capital (productif) est considéré, à l'instar des analyses à facteurs spécifiques de Samuelson et Jones (SAMUELSON P. [1971] JONES R.W. [1971].), comme immobile entre branches sur le court terme. * 74 Les intérêts des détenteurs de capital productif sont fonctions, selon une étude de MILNER [1987] de leur positionnement vis-à-vis de l'extérieur. Elles effectuent leur choix en calculant les coûts/bénéfices qu'elles retireraient de l'ouverture selon leur degré de multinationalité avant ouverture. Dans le cas de la Turquie nous considérons que, au vu du nombre de firme multinationales turques, globalement ce groupe non-homogène est en faveur du protectionnisme. * 75 On ne prend pas en compte la mobilité internationale du capital qui ne serait pas toujours vérifiée à court terme du fait des taux de change. On ne prend en compte que la mobilité intersectorielle nationale. * 76 Par commodité nous considérons que le groupe des agriculteurs est propriétaire de ses terres. Si ce n'est pas le cas alors nous avons affaire à des travailleurs non-qualifiés. * 77 On considère que relativement à la moyenne européenne, la Turquie peut-être considérée comme abondamment doté en facteur « terre » . * 78 Pourtant il est vrai que le groupe des travailleurs non-qualifiés n'est pas le plus nombreux que le groupe des agriculteurs. Néanmoins, d'une part on peut considérer comme nous l'avons déjà mentionné qu'il y a, parmi le groupe des agriculteurs, une grande part d'hommes dont la situation est comparable en nos terme à celle des travailleurs non-qualifié, et d'autre part car l'exode rural est entamé ( en un quart de siècle la population urbaine est passé de 38% à 61% et cette tendance se poursuit - BEAU N. [1995]) et qu'on constate donc que peu à peu la population travaillant dans le secteur primaire tend à rejoindre le groupe des « travailleurs non-qualifiés ». |
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