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à‰valuation des risques sanitaires des ookystes de Cryptosporidium dans l'eau destinée à  la consommation humaine distribuée dans la zone métropolitaine de Port-au-Prince, Haà¯ti.

( Télécharger le fichier original )
par Anie Bras
Université de Quisqueya - Ingénieur Civil 2005
  

Disponible en mode multipage

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Université Quisqueya

Faculté des Sciences, de Génie et d'Architecture

Projet de Fin d'Etudes

Évaluation des risques sanitaires des ookystes de

Cryptosporidium dans l'eau destinée à la consommation

humaine distribuée dans la zone métropolitaine de

Port-au-Prince, Haïti.

Préparé par :

Anie BRAS

Dirigé par :

M. le professeur Evens EMMANUEL

Pour l'Obtention du Diplôme d'Ingénieur Civil

Ce mémoire est préparé au :

Laboratoire de Qualité de l'Eau et de l'Environnement (LAQUE)

N° d'ordre : 05UNIQFSGA013 ANNEE-2005

Évaluation des risques sanitaires des ookystes de Cryptosporidium dans l'eau destinée à la consommation humaine distribuée dans la zone métropolitaine de Port-au-Prince, Haïti.

Mémoire de fin d'études

présenté à

La Faculté des Sciences, de Génie et d'Architecture de l'Université Quisqueya

Pour l'obtention du diplôme d'Ingénieur Civil

par

Anie BRAS

Soutenu le 30 Juin 2005 devant la commission d'examen

Président M. Christian RACCURT Professeur des universités, praticien hospitalier,

Faculté de Médecine d'Amiens (France).

Examinateurs

M. Jacques BLAISE Professeur de la Faculté d'Agronomie et de

Médecine Vétérinaire, l'Université d'Etat

d'Haïti.

M. Frantz METELLUS Consultant à l'Organisation Panaméricaine de la Santé/Organisation Mondiale de la Santé

Mme Ruth ANGERVILLE Ingénieur de la direction de la planification de la Centrale Autonome Métropolitaine d'Eau

Potable (CAMEP).

Responsable M. Evens EMMANUEL Professeur de l'Université Quisqueya

Qui est sage en force est un homme robuste, et un homme qui a de la connaissance raffermit

la vigueur.

Proverbes de SALOMON 24 : 5

À mes parents,

Marie Sylvie et Jean Lecaire,

Pour leur amour et leur soutien incomparables.

Avant-propos

Cette étude, sur l'évaluation des risques sanitaires des ookystes de Cryptosporidium dans l'eau destinée à la consommation humaine  dans la zone métropolitaine de Port-au-Prince, s'inscrit dans le cadre d'un suivi des travaux réalisés par BRASSEUR et al entre 2000 et 2002. Étude au cours de laquelle des analyses ont été effectuées sur des échantillons d'eau de surface et de distribution, révélant la présence des ookystes de Cryptosporidium.

Ce travail de mémoire a été réalisé au Laboratoire de Qualité de l'Eau et de l'Environnement de l'Université Quisqueya.

Je tiens à remercier d'une façon toute particulière, le Professeur Evens EMMANUEL, Directeur de ce mémoire pour le soutien qu'il a apporté à ce travail. Qu'il soit aussi remercié pour sa patience et sa disponibilité, et surtout pour ses connaissances qu'il a bien voulu me prodiguer tout au long de la phase de rédaction de ce mémoire.

Je tiens à exprimer ma profonde gratitude au Professeur Christian RACCURT, qui a relu et soutenu ce travail avec beaucoup d'intérêt.

Je remercie tout spécialement les Professeurs Jacques BLAISE et Frantz METELLUS pour leur encadrement, leur aide dans l'orientation du travail et leurs conseils qui ont contribué à apporter des corrections profitables.

Mes remerciements vont également à l'endroit de l'Ingénieur Ruth ANGERVILLE pour ses précieux conseils.

Enfin, j'adresse un grand MERCI à tous mes amis et collaborateurs pour leur aide précieuse, particulièrement : Michel, Urbain, Antoine, Anaël, Edwine, Tundji, Carine, Martine, Medjine, Vanessa, Ketty, Barbara, Stanley, Adias, Albert, Osnick.

Sommaire

I. INTRODUCTION 13

I.1. Objectif de l'étude 14

I.2. Structuration de l'étude 15

II. ETUDE BIBLIOGRAPHIQUE 16

II.2. Qualité microbiologique de l'eau de boisson 16

II.3. Identification du danger 18

II.3.1. Description du pathogène : Cryptosporidium parvum 18

II.3.2. Méthodes de détection 20

II.3.3. Méthode de mesure de la viabilité des ookystes de Cryptosporidium parvum 21

II.3.4. Méthode de mesure de l'infectiosité des ookystes de Cryptosporidium parvum 21

II.4. Appréciation de l'émission du danger 22

II.4.1. Implication des animaux dans l'émission de Cryptosporidium parvum 22

II.4.2. Implication de l'homme dans l'émission de Cryptosporidium parvum 23

II.4.3. Durée et quantité d'ookystes excrétés par l'Homme : 23

II.4.4. Devenir des ookystes excrétés par l'Homme 24

II.4.5. Survie des ookystes dans l'environnement 25

II.4.6. Survie des ookystes dans les matières fécales 25

.4.7. Survie des ookystes dans l'eau 26

II.5. Diffusion du danger 26

II.5.1. Diffusion passive à partir des sources de contamination fécale animale 27

II.5.2. Diffusion passive à partir des sources de contamination fécale humaine 27

II.6. Appréciation des effets chez l'homme 27

II.6.1. Facteurs de risques 28

II.7. Présentation de la zone métropolitaine de Port-au-Prince 30

II.8. Facteurs influençant la diffusion du danger dans la zone métropolitaine de Port-au-Prince 30

II.8.1. Conditions d'insalubrité 30

II.8.2. Nature et mouvement des réservoirs d'animaux 31

II.8.3. Etat du réseau hydraulique de la CAMEP 31

II.8.4. Inefficacité du mode de traitement des eaux 32

II.8.5. Mobilité de la population à travers la zone métropolitaine de Port-au-Prince face à la problématique de l'eau 34

III. CADRE EXPERIMENTAL 34

III.I. SCHÉMA GLOBAL 35

III.2. MODULE «D'EMISSION » 36

III.3. MODULE « D'EXPOSITION » 39

III.4. MODULE DE « CONSOMMATION » 39

III.5. MODULE « D'EFFET » 40

IV. RÉSULTATS ET DISCUSSION 45

IV.1. POPULATION DE 5 ANS ET PLUS 45

IV.2. POPULATION DE MOINS DE 5ANS 49

V. CONCLUSION ET PERSPECTIVES 52

RÉFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES 55

Liste des tableaux

Tableau 1 : Qualité microbiologique de l'eau de boisson (OMS, 2000) 17

Tableau 2 : Efficacité des traitements chimiques des eaux au regard des cryptosporidies (BAUDIN et al., 2001) 33

Tableau 3 : Distribution de la concentration des ookystes dans l'eau pour les différentes zones 38

Tableau 4 : Données d'une infection expérimentale de volontaires sains par ingestion d'ookystes de Cryptosporidium parvum (DUPONT et al, 1995) 42

Tableau 5 : Données d'infection de souris immunodéprimées par ingestion d'ookystes (YANG et al., 2000) 43

Tableau 6 : Risque d'infection pour la population 5 ans et plus immunocompétente 45

Tableau 7 : Risque d'infection et de maladies pour la population âgée de 5ans et plus immunodéprimée 46

Tableau 8 : Risque d'infection pour la population immunocompétente âgée de moins de 5 ans 49

Tableau 9 : Risque d'infection et de maladies pour la population immunodéprimée âgée de moins de 5 ans 50

Liste des figures

Figure 1 : Illustration du cycle de développement des Cryptosridies 19

Figure 2: Illustration de la production et de la distribution publique de l'eau d'alimentation 32

Figure 3 : Illustration de l'évaluation des risques sanitaires propose dans le cadre de cette étude 36

Figure 4 : Variation des moyennes du risque d'infection pour la population immunocompétente âgée de 5 ans et plus 46

Figure 5 : Variation des moyennes du risque d'infection et de maladie pour la population immunodéprimée âgée de 5 ans et plus 48

Figure 6 : Variation des moyennes du risque d'infection et de maladies de la population immunodéprimée âgée de moins de 5 ans 51

Glossaire

Coccidies : Parasites protozoaires intracellulaires dont le stade infectieux donne l'ookyste très résistant, excrété dans les fèces de l'hôte définitif (UGGLA, 1996).

Cryptosporidiose : Il s'agit d'une entérite diarrhéique d'origine parasitaire pouvant être grave chez l'homme et entraîner la mort; elle est déterminée par le parasitisme d'une coccidie, du genre Cryptosporidium (EUZEBY, 1984)

Cryptosporidium spp.: Correspond à toutes les espèces du genre Cryptosporidium (AFSSA,2002)

Cryptosporidium sp.: Correspond à une espèce particulière du genre mais non déterminée (AFSSA,2002).

Cryptosporidium parvum : Correspond à une dénomination de l'espèce déterminée, équivaut à cryptosporidie (AFSSA, 2002).

Danger : événement de santé indésirable tel qu'une maladie, un traumatisme, un handicap, un décès. Par extension, le danger désigne tout effet toxique, c'est-à-dire un dysfonctionnement cellulaire ou organique, lié à l'interaction entre un organisme vivant et un agent chimique, physique ou biologique (IVS, 2000).

Estimation du risque : Il s'agit de l'estimation qualitative et/ou quantitative de la probabilité de survenue et de la gravité des effets néfastes sur la santé [= risque], connus ou potentiels, d'une population donnée. Elle est basée sur l'identification des dangers, l'appréciation des effets et l'appréciation de l'exposition (AFSSA, 2002).

Exposition : désigne, dans le domaine sanitaire, le contact entre une situation ou un agent dangereux et un organisme vivant. L'exposition peut aussi être considérée comme la concentration d'un agent dangereux dans le ou les milieux pollués mis en contact avec l'homme (IVS, 2000).

Evaluation du risque : L'évaluation des risques se définit comme étant l'activité qui consiste à déterminer les propriétés toxiques d'un produit chimique et les conditions de l'exposition humaine à ce produit, en vue de constater la réalité d'une exposition humaine et de caractériser la nature des effets qui peuvent en résulter. Lorsque les risques visés par l'évaluation prennent en compte la santé humaine, on parle de risques sanitaires ou toxicologiques. National Research Council, (NRC, 1983).

Infection : Correspond à l'excrétion détectée d'ookystes par un individu (AFSSA, 2002)

Maladie : également appelée cas, correspond à des manifestations cliniques de cryptosporidiose, consécutives à l'ingestion d'ookystes (AFSSA, 2002).

Ookystes : forme de résistance ou stade transmissible de Cryptosporidium spp (OMS, 2000) .

Risque : probabilité de survenue d'un danger (IVS, 2000).

Résumé

La cryptosporidiose est une cause de diarrhée fréquente en Haïti. La transmission à l'homme se fait par l'intermédiaire de l'eau et des aliments contenant les ookystes du parasite Cryptosporidium. Dans la population les groupes spécifiques ayant un niveau de risque très élevé sont les enfants, les personnes sous-alimentées et les malades contaminés par le virus de l'immuno-déficience humaine (VIH). Les récentes études ont démontré la présence d'une quantité d'ookystes allant de 4 à 1274 pour 100 litres d'eau analysés. L'exposition de la population à une telle concentration peut générer des risques sanitaires extrêmement élevés. L'objectif de ce travail a été d'évaluer les risques sanitaires liés à la présence de ce parasite dans l'eau de distribution sur la population de la zone métropolitaine de Port-au-Prince. Pour la réalisation de cette étude, un modèle exponentiel a été utilisé dans le calcul de la probabilité de développer une infection pour quatre types de populations : Populations immunocompétente et immunodéprimée âgées de moins de 5 ans ; immunocompétente et immunodéprimée âgées de 5 ans et plus. Un niveau de risque d'infection allant de 1 à 5% a été retrouvé pour la population immunocompétente, et un niveau de risque d'infection et de maladies allant de 1% à 97% a été retrouvé pour la population immunodéprimée. Dans ce contexte, il est important de mettre en place une stratégie de surveillance de la qualité microbiologique de l'eau dans la perspective de réduire les infections liées à la consommation d'eau contaminée.

Mots clés : Cryptosporidium, Ookystes, Cryptosporidiose, risque sanitaire.

.

Abstract

The cryptosporidiosis is one of the frequent causes of diarrhea in Haïti. The transmission to children under five, HIV infected persons, and people living in low level conditions, is made possible by mean of water and food containing oocysts of Cryptosporidium. Recent studies demonstrated that the amount of oocysts in 100 liters of drinking water used by the population in Port-au-Prince (Haiti) rised from 4 to 1274 oocysts in the studied water samples. Consequently the population is exposed to high sanitary risks. The aim of this study was to evaluate the risks pointing out the presence of the parasite in the drinking water of the metropolitan area, Port-au-Prince. An exponential model has been used to mark on the probability of an increasing infection. Four prototypes have been listed: immunocompetent and immunodeficient persons under five year old; immunocompetent and immunodeficient persons five years old and up.

It happened that a risk of 1 to 5% of infection is detected for the immunocompetent cluster of the population and a variation between 1 to 97% for the immunodeficient cluster of the population. In this context it is necessary to promote an appropriate strategy to improve the microbiologic quality of drinking water in order to reduce in Haiti the risk of human infections with pathogen microorganisms related to biological environmental pollution.

Key words : Cryptosporidium, Cryptosporidiosis, sanitary risk, drinking water.

I. Introduction

L'eau de boisson a, depuis toujours, été un vecteur potentiel dans la transmission de maladies (ANDERSON et STRENSTROM, 1986; GALBRAITH et al., 1987; BENTON et al., 1989). L'Organisation Mondiale de la Santé estime en effet que 80% des maladies qui affectent la population mondiale lui sont directement associées (DESJARDINS, 1990). Dans les pays en développement les maladies hydriques sont responsables de 5 millions de morts chaque année (OMS, 1995). Ainsi, au cours de ces dernières décennies, la surveillance de la qualité de l'eau est devenue un facteur primordial auquel une attention toute particulière est accordée.

Pour évaluer le danger microbiologique relatif à l'eau de boisson, les indicateurs bactériens de contamination fécale ont été largement utilisés. Pourtant, il semble qu'un certain nombre d'épisodes épidémiques liés à la consommation d'eau aujourd'hui, proviennent de germes d'une autre nature pour lesquels le suivi des indicateurs traditionnels n'est pas totalement satisfaisant (BONNARD, 2001). C'est le cas de Cryptosporidium parvum, protozoaire parasite responsable d'une infection appelée la cryptosporidiose. Les ookystes de ce dernier font partie des pathogènes les plus résistants aux types de traitement classique telle que la désinfection chimique; ils présentent un haut niveau d'infectiosité et ils peuvent survivre pendant plusieurs mois à une température de 30°C (FAYER et al., 1998).

En effet depuis 1980, une vingtaine d'épidémies liées aux Cryptosporidium ont été rapportées dans le monde (RACCURT, 2002). La plus importante est celle survenue à Milwaukee, aux Etats-Unis en 1993, qui a contaminé 403.000 personnes dont 4.400 ont été hospitalisées et 69 sont décédées (MAC KENZI et al., 1994). La cause de cette tragédie était une modification du procédé de traitement de l'eau de boisson distribuée dans la ville.

Dans cette vaste population, les groupes spécifiques les plus vulnérables, ayant un niveau de risque beaucoup plus élevé sont les enfants, les personnes sous alimentées, les personnes immunodéficientes en particulier les malades contaminés par le virus de l'immunodéficience humaine (VIH). Au cours de différentes enquêtes menées à travers le monde, il a été constaté que la prévalence de la cryptosporidiose dans les pays en développement est de 4 à 20 % et que chez les malades atteints du SIDA elle est de plus de 50 % dans des pays d'Afrique et en Haïti (OMS, 2000).

En Haïti, la cryptosporidiose est responsable de 17% des diarrhées aiguës, observées chez les enfants de moins de 2 ans et de 30% des diarrhées chroniques chez les patients contaminés par le VIH (PAPE et al., 1987). A Port-au-Prince, la capitale haïtienne, une étude menée par RACCURT en collaboration avec les Centres GHESKIO entre 2000 et 2001, portant sur 1529 examens coprologiques parasitaires, indiquait que la prévalence de Cryptosporidium sp. était de 10,3%. Chez les 57 adultes infectés par Cryptosporidium sp., 56 (soit 98%) étaient VIH positifs et 1 (soit 2%) était VIH négatif.

Les récentes études sur la circulation des ookystes de Cryptosporidium sp. dans l'eau de boisson, distribuée par adduction publique à Port-au-Prince (BRASSEUR et al., 2002), indiquent le caractère imminent du danger. Dans ce contexte, il est important de procéder à l'évaluation des risques sanitaires.

I.1. Objectif de l'étude

Evaluer les risques sanitaires liés à la présence des ookystes de cryptosporidium dans l'eau destinée à la consommation humaine distribuée dans la zone métropolitaine de Port-au-Prince.

I.2. Structuration de l'étude

L'étude s'articule autour des points suivants:

une étude bibliographique comprenant :

1) une synthèse sur la qualité microbiologique de l'eau de boisson a) L'identification du danger : description de Cryptosporidium parvum b) l'appréciation de l'émission du danger, c) l'appréciation des effets chez l'Homme ;

2) une présentation du site d'étude : Zone Métropolitaine de Port-au-Prince et les différents facteurs influencant la diffusion du danger dans la Zone Métropolitaine de Port-au-Prince.

le cadre expérimental comprenant : une estimation quantitative du risque relatif à la consommation d'eau de distribution publique dans la Zone Métropolitaine de Port-au-Prince ;

les résultats et discussion ;

la conclusion.

II. ETUDE BIBLIOGRAPHIQUE

II.1. Eau potable : définition

Une eau potable se définit comme étant une eau exempte de germes de maladies à transport hydrique, de substances toxiques, ne contenant pas de quantités excessives de matières minérales et organiques. Elle doit par ailleurs, être limpide incolore et ne présenter aucun goût ou odeur désagréables. Les qualités requises sont donc d'ordre physique, chimique et bactériologique (LANOIX et ROY, 1976).

II.2. Qualité microbiologique de l'eau de boisson

L'utilisation des organismes normalement présents dans l'intestin comme indicateurs de pollution fécale à la place des organismes pathogènes eux-mêmes est universellement acceptée pour le contrôle et l'évaluation de la qualité microbiologique de l'eau. L'analyse bactériologique permet de mettre en évidence la pollution fécale de l'eau. Elle représente également un bon moyen pour contrôler l'efficacité des mesures de protection ou de traitement (OMS, 2000).

Pour ces différentes raisons, il est préférable de rechercher des germes qui sont toujours présents en grand nombre dans les matières fécales des hommes et des animaux à sang chaud, qui se maintiennent plus facilement dans le milieu extérieur et qui sont clairement identifiés (cf. tableau ci-dessous).

Tableau 1 : Qualité microbiologique de l'eau de boisson (OMS, 2000)

 

Valeurs guides OMS

Interprétation

Coliformes thermotolérants

0/100 ml

Indicateurs de pollution fécale

Streptocoques fécaux

Pas de normes

Indicateurs de pollution fécale

Coliformes totaux

0/100 ml dans 95 % des échantillons d'eaux traitées

Indicateurs d'efficacité du traitement (désinfection) ; ne signalent pas nécessairement une pollution fécale

Ces germes sont dénommés germes indicateurs de pollution fécale et leur présence témoigne de l'existence d'une contamination fécale au moment du prélèvement. Leur mise en évidence dans l'eau n'est pas la preuve de la présence de pathogènes, mais elle permet de la suspecter fortement. Les coliformes totaux ne sont pas tous d'origine fécale. Ils ne sont donc pas indicateurs d'une pollution fécale. Leur recherche est cependant utile pour contrôler la qualité d'une eau après traitement (OMS, 2000).

Les streptocoques fécaux sont en grande partie d'origine humaine. Cependant, certaines bactéries classées dans ce groupe peuvent être trouvées également dans les fèces animales, ou se rencontrent sur les végétaux. Ils sont néanmoins considérés comme indicateurs d'une pollution fécale, et leur principal intérêt réside dans le fait qu'ils sont résistants à la dessiccation (OMS, 2000). Ils apportent donc une information supplémentaire sur une pollution. L'indicateur le plus utile pour estimer la pollution fécale est la bactérie Escherichia coli.

Toutefois, aucun organisme ne présente tous les caractères d'un indicateur idéal. Ainsi les entérovirus et les kystes de certains parasites résistent mieux à la désinfection que l'E. coli, que les coliformes et leur absence dans l'eau de boisson qui a subi une simple désinfection n'indique pas nécessairement l'absence de virus entériques ou de formes quiescentes de Cryptosporidium, de Giardia, d'amibes et d'autres parasites (OMS, 2000).

Dans les pays en développement comme Haïti par exemple, la chloration reste le seul mode de traitement appliqué à l'eau brute destinée à la consommation humaine (EMMANUEL et LINDSKOG, 2002). L'apparition des pathogènes résistants aux types de traitement classique explique le fait que dans l'ensemble de ces pays, les maladies hydriques soient responsables de 5 millions de morts chaque année (DESJARDINS, 1990). Le contrôle de la qualité de l'eau reste et demeure jusqu'à présent une préoccupation cruciale à laquelle les pays en développement doivent faire face.

Dans les pays développés par contre le problème de la qualité microbiologique de l'eau était censé régler jusqu'à ce qu'une nouvelle vague épidémique liée à des parasites d'une autre nature se soit déclarée. C'est ainsi qu'en 1993 à Milwaukee aux Etats Unis à la suite d'une contamination de l'eau de boisson par Cryptoporidium sp, sur un total de 840.000 consommateurs exposés, 403.000 sont tombés malades, 4.400 ont été hospitalisés et 69 sont décédés.

Cette épidémie a conduit à une prise de conscience de l'importance des épidémies à cryptosporidies, de l'inadaptation des moyens de surveillance et de la nécessité de développer une recherche spécifique sur ce parasite et les moyens de l'éliminer (MAC KENZIE et al., 1994).

II.3. Identification du danger

Environ 20 espèces de Cryptosporidium ont été décrites chez plus de 117 espèces de mammifères dans le monde (DUMOULIN et al., 2000). La principale d'entre elle est Cryptosporidium parvum avec, à ce jour, 10 génotypes identifiés chez de nombreux mammifères domestiques et sauvages (PERZ et Le BLANCQ, 2001) dont au moins 4 sont infectants pour l'Homme (génotypes I et II principalement, et génotypes du porc et du chien).

II.3.1. Description du pathogène : Cryptosporidium parvum

Il s'agit d'un parasite unicellulaire (protozoaire) appartenant à l'ordre des coccidies, phylum Apicomplexa. Cet organisme a été observé pour la première fois en 1907 au niveau de la muqueuse gastrique de souris (TYZZER, 1907). Ces coccidies, cosmopolites, appartiennent à la famille des Cryptosporiidés. Cryptosporidium occasionnent chez l'homme des entérites diarrhéiques subfébriles. Les malades rejettent dans leurs selles des ookystes sporulés (EUZEBY, 1984). Le cycle de multiplication comprend des stades asexués et sexués et se déroule dans la cellule parasitée en localisation extra-cytoplasmique. De plus, ce cycle est caractérisé par des phénomènes d'auto-infection et par des rétro-infections (reproduction sexuée avec production d'ookystes se recyclant directement dans l'intestin sans passer par le milieu extérieur) induisant une prolificité importante du parasite (AFSSA, 2002). Les différents stades intracellulaires présentés dans la figure 1 se développent dans la bordure en brosse des cellules épithéliales intestinales, dans des vacuoles parasitophores. Le parasite peut parfois se développer aux dépens des épithéliums des voies biliaires ou respiratoires.

Figure 1 : Illustration du cycle de développement des Cryptosporidies

La multiplication sexuée conduit à la formation d'ookystes matures de petites dimensions mesurant de 4,8 à 5 micromètres, sporulés dès leur émission et renfermant 4 sporozoïtes nus, non renfermés dans des sporocystes. Le rejet d'ookystes sporulés, immédiatement infectants, permet l'infection directe de l'homme au contact d'animaux parasités (EUZEBY, 1984).

II.3.2. Méthodes de détection

Chez l'hôte infecté, les ookystes de Cryptosporidium sp. peuvent être identifiés par l'examen microscopique dans des frottis fécaux, liquide biliaire ou duodénal après coloration par le Ziehl Nielsen modifié (ZNM), par la carbofuschine (méthode de Heim) ou par un marquage avec un anticorps monoclonal fluorescent (AFSSA, 2002)

Appliquées à l'eau, les techniques microscopiques sont peu performantes et une concentration préalable des oocystes est nécessaire (AFSSA, 2002)

Pour les eaux, la méthode comporte quatre étapes :

- Concentration sur site par filtration sur une cartouche placée dans un dispositif de prélèvement qui enregistre la quantité d'eau filtrée (plusieurs dizaines à plusieurs centaines de litres d'eau) ;

- Au stade de l'analyse au laboratoire, il est procédé à une élution du matériel retenu par la cartouche puis à une centrifugation de l'éluat. La recherche d'ookystes est effectuée sur le culot ;

- Pour concentrer les ookystes dans le culot, la technique par flottation sur couche de saccharose est d'un faible rendement. Elle est maintenant remplacée par une immunocapture sur des billes magnétiques recouvertes d'un anticorps monoclonal anti-Cryptosporidium sp. ;

- la révélation de la capture des ookystes s'effectue par immunofluorescence directe utilisant un anticorps monoclonal anti-Cryptosporidium sp. marqué à la fluorescéine. La lecture s'effectue avec un microscope à fluorescence.

Le couplage de l'immunocapture sur bille et la révélation par immunofluorescence est à la base de la technique normalisée par l'AFNOR (norme NF T 90-455, juillet 2001) pour la recherche de Cryptosporidium sp. dans l'eau.

II.3.3. Méthodes de mesure de la viabilité des ookystes de Cryptosporidium parvum

La mise en évidence d'ookystes de Cryptosporidium sp. dans l'eau ne permet pas de préjuger de leur viabilité ni de leur infectiosité. Certains de ces ookystes peuvent être non viables, c'est-à-dire incapables de libérer les 4 sporozoïtes qu'ils contiennent ou bien les sporozoïtes libérés peuvent aussi être incapables de pénétrer dans les entérocytes intestinaux et avoir perdu leur caractère infectant.

On peut évaluer leur viabilité à partir des méthodes permettant la mise en évidence du dékystement des ookystes. La plus classique consiste à traiter les ookystes séparés par un double gradient de saccharose pendant 1 h à 37° C et placés ensuite dans un bain d'eau à 4° C. Le pourcentage d'ookystes dékystés est déterminé par la différence du nombre d'ookystes intacts comptés avant et après dékystement, divisé par le nombre d'ookystes comptés avant dékystement, multiplié par 100 (BRASSEUR et al., 2002). Ce contrôle est possible après marquage par un anticorps monoclonal fluorescent et examen au microscope à épifluorescence.

II.3.4. Méthode de mesure de l'infectiosité des ookystes de Cryptosporidium parvum

L'infectiosité des ookystes peut être déterminée avec le modèle souriceau BALB/c-NMRI nouveau-né (LI et BRASSEUR, 2000). Les souriceaux de 4 jours exempts d'organisme pathogène spécifique, sont inoculés par voie orale (sonde) par des doses comprises entre 100 et 1000 ookystes. Sept jours plus tard, les souriceaux sont sacrifiés et leur tube digestif, prélevé en totalité du pylore à l'anus, est homogénéisé par broyage au Potter dans 3 ml d'eau distillée stérile. Pour chaque échantillon, 3 étalements de la suspension sont colorés par la carbofuschine et examinés en microscopie à contraste de phase. Un souriceau est considéré comme positif lorsque au moins un ookyste est mis en évidence dans l'une des 3 lames examinées. Pour chaque groupe, l'infectiosité des ookystes est exprimée en pourcentage d'animaux trouvés infectés : (nombre d'animaux infectés)/(nombre d'animaux inoculés) x 100. Les pourcentages d'animaux excréteurs 7 jours après l'ingestion des ookystes montrent qu'à partir d'une dose de 1000-1500 ookystes, 100% des animaux sont infectés. Pour des doses inférieures, on observe que le nombre d'animaux infectés est proportionnel à la dose ingérée.

II.4. Appréciation de l'émission du danger

II.4.1. Implication des animaux dans l'émission de Cryptosporidium parvum

Les Cryptosporidium sont des parasites de mammifères et de divers oiseaux, affectant surtout les individus très jeunes, infectés très tôt après la naissance : veaux, agneaux, chevreaux, porcelets âgés de 1 à 3 semaines, surtout lorsqu'il n'ont pas absorbé le colostrum maternel (EUZEBY, 1984). La présence de Cryptosporidium parvum est décrite chez les mammifères domestiques (cheval, porc, chien, chat) et des mammifères sauvages cervidés : buffles (Synerus caffer), zèbre (Equus zebra), gnou (Connochaetes gnou). Un rapport d'étude réalisée sur la faune sauvage en Tanzanie faisant appel à l'utilisation d'anticorps monoclonaux indique la présence d'ookystes de Cryptosporidium sur 8/36 des échantillons de matières fécales de buffles, 7/25 de zèbre et 7/26 de gnous (MTAMBO, 1995). La prévalence de l'infection cryptosporidienne a été déterminée dans 38 élevages de poulets de chair (KICHOU et al., 1996). Divers facteurs modulent les risques de contamination environnementale par les cryptosporidies. Il s'agit de facteurs liés aux parasites, aux hôtes, aux modes d'élevage et à l'environnement (AFSSA, 2002).

Parmi les éléments facilitant les modalités d'infection et/ou modifiant l'excrétion, on retient en particulier (AFSSA, 2002) :

-la prolificité importante des cryptosporidies, due aux particularités du cycle infectieux, l'infectiosité immédiate des ookystes rejetés dans les excréments responsables d'une contagion facile par ingestion ;

-la grande résistance de ces ookystes dans l'environnement.

II.4.2. Implication de l'homme dans l'émission de Cryptosporidium parvum

Au contraire de la plupart des autres coccidies qui parasitent l'Homme, les ookystes de Cryptosporidium sp. sont sporulés et infectants dès leur élimination fécale. Par conséquent, la transmission inter-humaine, soit par contact direct (entourage, partenaires sexuels, enfants, personnel hospitalier), soit par contact indirect via l'alimentation ou certains supports (couches contaminées) est une caractéristique de la cryptosporidiose humaine. L'auto-infestation est biologiquement possible (AFSSA, 2002).

a) Rôle de l'Homme dans le cycle parasitaire

Le rôle de l'Homme dans la contamination de l'environnement par des ookystes de Cryptosporidium sp. est capital pour 3 raisons (GUYOT et al., 2001) :

la transmission inter-humaine est une des caractéristiques du cycle parasitaire;

-Cryptosporidium parvum de génotype I (humain) semble être une variété anthroponotique (on ne la retrouverait que chez l'Homme bien qu'elle ait été rapportée une fois chez un singe et une fois chez un dugong) ;

Cryptosporidium parvum de génotype I est responsable de près de la moitié des épidémies humaines rapportées jusqu'à maintenant dans le monde, y compris dans des pays où la variété dominante est Cryptosporidium parvum de génotype II (bovin).

II.4.3. Durée et quantité d'ookystes excrétés par l'Homme :

a) S'agissant des conditions naturelles d'excrétion

Dans 70% des cas, l'excrétion d'ookystes, après arrêt de la diarrhée, est détectable dans les selles pendant 1-15 jours et peut se prolonger pendant 18 à 90 jours (JOKIPII et JOKIPII, 1986).

b) S'agissant des infections expérimentales humaines

Les principales conclusions tirées des expérimentations humaines fondées sur l'ingestion d'inoculums parasitaires d'origine animale et humaine (travaux du groupe de Chappell), sont les suivantes (AFSSA, 2002) :

- il existe un délai de l'ordre d'une semaine entre l'ingestion et l'apparition des signes cliniques ;

- l'excrétion sporadique d'ookystes se poursuit pendant une durée pouvant aller jusqu'à un mois après l'ingestion ;

- il n'existe pas de corrélation claire entre la taille de l'inoculum, la gravité des symptômes et/ou les quantités d'ookystes excrétés ;

- le nombre cumulé d'ookystes excrétés peut dépasser 108

c) S'agissant des porteurs asymptomatiques

Ils constituent un danger potentiel de dissémination parasitaire mais représentent une faible proportion de la population générale. Elle est de l'ordre de 0,4 à 3 % selon l'âge des individus. (HOLTEN-ANDERSEN et al., 1984 ; ISAACS et al., 1985 ; JOKIPII et al., 1985 ; MATA et al., 1984 ; TZIPORI et al., 1983).

II.4.4. Devenir des ookystes excrétés par l'Homme

Tout comme pour les ookystes excrétés par les animaux, les temps de survie des ookystes dans l'environnement sont longs, de l'ordre de plusieurs mois. Cette résistance favorise la dissémination des parasites, le contact avec de nouveaux hôtes et la possibilité de produire de nouvelles générations d'ookystes.

II.4.5. Survie des ookystes dans l'environnement

Les ookystes de Cryptosporidium peuvent rester viables et infectieux dans l'eau et dans les fèces animales pendant plusieurs mois à des températures comprises entre 0 et 30°C, ils ne peuvent pas se multiplier dans l'environnement (FAYER et al., 1998). En effet, les ookystes de Cryptosporidium sont très résistants et conservent pendant longtemps leur pouvoir infectieux à la surface du sol et des plantes, surtout en milieu humide (EUZEBY, 1984).

II.4.6. Survie des ookystes dans les matières fécales

Des essais de viabilité ont été réalisés sur des pools de matières fécales de veaux à 4°C (JENKINS et al., 1997) montrant la persistance de 10 % d'ookystes viables à 410 jours (diminution de 88 % de l'infectiosité initiale) et 14 % de viabilité au bout de 259 jours (diminution de 77 % de l'infectiosité initiale).

Dans la revue de WALKER et al. (1998), trois paramètres physico-chimiques paraissent influer la survie des ookystes de Cryptosporidium parvum dans les matières fécales bovines :

- la température : les températures élevées (60°C au coeur d'un tas de fumier), ainsi que les alternances des phases gel-dégel tendent à minorer la survie des ookystes ;

- le temps : l'étude à l'obscurité et à température ambiante, pendant 176 jours, montre une réduction de la viabilité de 47 % ;

- la concentration en ammoniaque : dans un modèle de simulation, à la concentration de 2000 mg/l et pendant 5-6 jours, ce composé peut entraîner une inactivation des ookystes de près de 100%.

Dans la revue de ROSE et SLIFKO (1999), la survie des ookystes est suivie dans les matières fécales, pendant 6 mois : pour l'Homme, une inactivation de 41 à 99 % est observée à 4°C et pour les bovins, l'inactivation atteint 60 à 72 % entre 5 et 10°C.

.4.7. Survie des ookystes dans l'eau

Les ookystes de Cryptosporidium peuvent rester viables et infectieux dans l'eau pendant plusieurs mois à des températures comprises entre 0 et 30°C et jusqu'à un an dans de l'eau de mer (FAYER et al., 1998; ROBERTSON et al., 1992 ; TAMBURRINI & POZIO, 1999)

La viabilité et l'infectiosité des ookystes survivants ont été étudiées dans l'eau de distribution maintenue pendant 8 semaines à 2 températures différentes (4°C et 10°C). Les comptages effectués par recueil des ookystes par immunoséparation et marquage spécifique ont montré qu'après 4 semaines de séjour à 10°C le pourcentage d'ookystes survivants était de 67%, 48% après 6 semaines et 27% après 8 semaines. A 4°C on obtenait dans les mêmes temps des survies de 95%, 90% et 88% respectivement. Le dékystement des ookystes survivants à 4°C décroissait rapidement en 2 semaines et se stabilisait à 30% jusqu'à 8 semaines alors qu'il décroissait régulièrement à 10°C. L'infectiosité des ookystes survivants décroissait de 40% à 10°C, en 6 semaines et seulement de 15% par conservation à 4°C et ceci quelle que soit la quantité d'ookystes survivants (AFSSA, 2002).

II.5. Diffusion du danger

La diversité des hôtes potentiels de Cryptosporidium spp. et la résistance des ookystes dans l'environnement conduisent à considérer plusieurs facteurs intervenant dans la diffusion du danger, en premier lieu à partir des sources de matières fécales, animales et humaines et, secondairement par diffusion passive (ruissellement) et infiltration dans les sols. Certains de ces facteurs sont assez bien caractérisés, notamment ceux qui sont liés à une activité humaine. D'autres restent difficiles à évaluer, en particulier le réseau hydrographique, la pédologie, le type de végétation, la climatologie. Ils peuvent favoriser ou non la résistance des ookystes, leur accumulation, leur accessibilité aux espèces réceptives (ruissellement, infiltration, etc.) (AFSSA, 2002).

II.5.1. Diffusion passive à partir des sources de contamination fécale animale

Elle a été mise en évidence dans plusieurs études. La recherche d'ookystes dans les ruisseaux autour de 11 fermes bovines laitières au Nord-Est des Etats-Unis (SISCHO et al., 2000) montre que 36% de ces ruisseaux sont contaminés. L'épandage sur les champs apparaît comme le facteur de risque principal.

Lors d'un suivi de 18 mois dans une exploitation en Grande Bretagne (HOODA et al., 2000), il a été montré que dans 70 % des cas, les eaux de surface autour de l'exploitation sont contaminées par Cryptosporidium. Une corrélation avec les fortes pluies, et non avec l'épandage, a été mise en évidence. C'est ainsi que des fuites accidentelles d'eaux de ruissellement souillées vers les fossés de drainage plutôt que vers des fosses à lisier, peuvent représenter une source importante d'ookystes viables.

II.5.2. Diffusion passive à partir des sources de contamination fécale humaine

La diffusion à partir de sources de contamination fécale humaine peut se faire principalement par les rejets d'eaux issues des stations d'épuration et par l'épandage des boues produites par ces installations. Par ailleurs en cas de surcharge des installations en période de fortes pluies ou de dysfonctionnement des installations, l'eau des réseaux d'égout est rejetée directement dans le milieu naturel par les déversoirs d'orage d'une partie des ouvrages (AFSSA, 2002).

II.6. Appréciation des effets chez l'homme

La maladie due à Cryptosporidium sp. est connue sous le nom de cryptosporidiose. Chez l'Homme, la cryptosporidiose est de gravité variable suivant le terrain. Chez le sujet immunocompétent, la cryptosporidiose survient après une incubation de 9 jours et de 12-13 jours chez les patients infectés par le VIH (JOKIPII & JOKIPII, 1986).

Les symptômes durent 12 à 18 jours, pouvant se prolonger jusqu'à 40 jours, même chez les patients immunocompétents (STEHR-GREEN et al., 1987). Les signes cliniques associant diarrhée aqueuse (en moyenne 6 à 12 selles par jour suivant les études), douleurs abdominales, asthénie, nausées, vomissements sont présents dans plus de 80% des cas. Une fièvre modérée (38°- 38°5C) est observée dans 40 à 60% des cas. On observe une perte de poids (en moyenne 4,5 kg) dans 50 à 75% des cas. Une hospitalisation est nécessaire dans un faible pourcentage de cas, principalement pour réhydratation. La durée d'émission des ookystes est de 3 à 8 jours (maximum rapporté: 90 jours) A ce jour, il n'existe aucun traitement de la cryptosporidiose. Seules la paramomycine et la nitazoxanide ont une efficacité partielle sur les symptômes mais ne permettent pas d'éliminer le parasite (AFSSA, 2002).

II.6.1. Facteurs de risques

Dans la cryptosporidiose humaine ou animale, l'âge et le statut immunitaire de l'hôte apparaissent comme des facteurs de risque essentiels. En revanche, le rôle des facteurs de virulence propres au parasite reste actuellement difficile à évaluer.

a) Facteurs de risque liés à l'hôte

Sur la base d'observations épidémiologiques et expérimentales, le jeune âge et le déficit immunitaire de l'hôte sont les deux principaux facteurs de risque identifiés, aussi bien chez l'animal que chez l'Homme. Enfin il faut préciser qu'en zone tropicale et dans des conditions socio-économiques défavorables, la cryptosporidiose de l'enfant s'associe à un risque de diarrhée prolongée, de malnutrition et éventuellement de retard de développement psychomoteur (AGNEW et al., 1998 ; GUERRANT et al., 1999).

b) L'état immunitaire : Chez l'Homme

Le rôle de l'immunité cellulaire dans la pathogénie de la cryptosporidiose a été clairement établi chez l'Homme, essentiellement par les observations cliniques et épidémiologiques effectuées chez des malades immunodéprimés, en particulier au cours du SIDA :

- La cryptosporidiose au cours du SIDA a plusieurs particularités. La susceptibilité à l'infection est croissante avec la diminution du taux de lymphocytes CD4 sanguins. Le risque est multiplié par 2 pour un taux de 500 à 1000 lymphocytes CD4/mm3, par 3,6 pour un taux de 100 à 200 et par 6 pour un taux <100 (POZIO et al., 1997). L'infection par Cryptosporidium s'associe à un risque 3 fois plus élevé de présenter des manifestations cliniques à la suite d'une contamination, avec une symptomatologie dont la sévérité croit avec la diminution du taux de CD4 : diarrhée prolongée et fréquence plus élevée de douleurs abdominales. Au cours d'une épidémie dans une communauté de toxicomanes, un taux d'attaque de cryptosporidiose de 16,6% a été observé chez les malades VIH-, versus 30,7% chez les sujets VIH+ (POZIO et al., 1997). La maladie est fréquemment chronique (plusieurs mois à plusieurs années) avec persistance de l'émission d'ookystes et des symptômes cliniques sans guérison parasitologique.

Cette chronicité entraîne plusieurs type de complications : déshydratation, malabsorption, atteinte des voies biliaires, justifiant des hospitalisations, voire des interventions chirurgicales pour cholécystectomie (MC. GOWAN et al., 1993 ; VAKIL et al., 1996). La cryptosporidiose s'associe à une mortalité directement liée à ces complications (HOXIE et al., 1997).

La description de Cryptosporidium parvum, l'appréciation de l'émission du danger, et des effets chez l'Homme montrent à quel point sa présence dans l'eau de boisson peut avoir de sérieuses répercussions sur la santé des consommateurs.

Cependant à Port-au-Prince, capitale haïtienne, la présence des ookystes de Cryptosporidium sp. a été décelée d'après les résultats des récentes études effectuées par BRASSEUR et al. (2002) sur la circulation de ces derniers dans l'eau de boisson, distribuée par adduction publique.

II.7. Présentation de la zone métropolitaine de Port-au-Prince

Port-au-Prince, ville côtière située dans la baie du même nom, est au coeur d'une structure urbaine regroupant les municipalités de Port-au-Prince, Carrefour, Pétion-Ville et Delmas qui englobe Cité Soleil, Delmas et Tabarre. La région accueille 2.164.207 d'habitants environ (IHSI, 2003). Un quart de la population d'Haïti vit dans l'aire métropolitaine qui connaît une croissance démographique explosive, accompagnée du développement d'un prolétariat urbain et d'une bidonvilisation incontrôlée. Aujourd'hui, avec une disponibilité de 23,7 millions de m3 d'eau par an (BRGM-GERSAR-LGL, 1989), Port-au-Prince ne peut fournir que 11,85 m3/an à chacun de ses 2.164.207 habitants.

II.8. Facteurs influençant la diffusion du danger dans la zone métropolitaine de Port-au-Prince

II.8.1. Conditions d'insalubrité

L'accumulation des déchets dans les ravins, sur les places et dans les marchés publics de l'aire métropolitaine contribue à la dégradation de l'environnement. L'agglomération produit annuellement environ 584.000 tonnes de déchets solides (HOLLY, 1999). Or le système de ramassage ne peut éliminer que 30 % des déchets produits ; au moment des fortes précipitations le reste dévale les rues, se dépose dans les parties basses de la capitale et obstrue les égouts.

Il s'ensuit des inondations de différents quartiers de la ville et des crues encore plus importantes à chaque averse ultérieure. Ces inondations continuelles de la ville sont dangereuses sur le plan sanitaire vu que les eaux contiennent en plus des ordures ménagères, des déchets humains qui s'infiltrent dans le réseau de distribution d'eau potable qui n'est pas continuellement en charge et qui est soumis à une pression interne irrégulière du fait que les canalisations vétustes dans la plupart des cas se trouvent en surface de nombreuses rues.

II.8.2. Nature et mouvement des réservoirs d'animaux

En pays sous-développés, où l'hygiène et la police sanitaire sont peu respectées, les chances pour les animaux de se contaminer puis de contaminer directement ou indirectement l'homme sont multipliées (EUZEBY, 1984). A Port-au-Prince l'élevage libre des animaux comme le porc, les volailles, les boeufs, les cabris est pratiqué . Or, ces animaux sont considérés comme étant des réservoirs ou sources de parasites tels que le Cryptosporidium (EUZEBY, 1984). Au lieu d'être parqués en enclos les animaux sont autorisés à circuler dans les rues et contaminent directement l'environnement par le rejet d'ookystes sporulés, immédiatement infectants. L'errement des chiens n'est pas contrôlée, ils sont exposés à la contamination du parasite qu'ils transmettront ensuite à l'homme. De plus le réseau de drainage de Port-au-Prince est constitué de grands collecteurs à ciel ouvert et d'une batterie de collecteurs moyens, de conduites circulaires majoritairement en béton et de canaux rectangulaires (LÉGER, 2002). Par conséquent, les rats qui courent le long de ces canaux favorisent la dissémination du parasite.

II.8.3. Etat du réseau hydraulique de la CAMEP

La Centrale Autonome Métropolitaine d'Eau Potable (CAMEP), entreprise parapublique, chargée de l'approvisionnement en eau potable de la Région Métropolitaine de Port-au-Prince, d'une population de 2.164.207 habitants environ, a une production de 40 millions de m3 d'eau par an provenant de 12 forages de la Plaine du Cul-de-Sac (totalisant 264 litres/sec.) et 17 sources du massif de la Selle (totalisant un débit de 923 litres/sec). Cette production ne garantit que 11,85 m3/ habitant/an, ce qui est nettement inférieur à la dotation minimale de 36,5 m3/habitant/an (TRACTEBEL, 1998). Cette situation donne naissance à ce qu'on appelle la problématique de l'eau. En outre, les sources captées pour l'approvisionnement en eau potable sont contaminées par les excréta humains du fait que les zones non aedificandi créées autour de chaque source n'ont pas été respectées (HOLLY, 1998). La dégradation du réseau par la réalisation de raccordements clandestins, mal conçus, et le fait que le réseau n'est pas toujours en charge, causent des fuites multiples, et entraînent par conséquent la baisse de la qualité de l'eau distribuée. Les matières fécales déposées par les eaux de ruissellement provenant des pluies s'infiltrent dans les canalisations d'eau potable de surface qui courent le long des rues et contaminent le réseau de distribution.

Figure 2: Illustration de la production et de la distribution publique de l'eau d'alimentation

II.8.4. Inefficacité du mode de traitement des eaux

En Haïti, la chloration reste le seul mode de traitement appliqué à l'eau brute destinée à la consommation humaine. Théoriquement, la désinfection au chlore est très économique et très efficace (EMMANUEL & LINDSKOG, 2002). Toutefois d'après FAYER et al., (1998) les ookystes de Cryptosporidium font partie des pathogènes les plus résistants aux types de traitement classique telle que la désinfection chimique.

L'efficacité d'un traitement chimique vis-à-vis de l'élimination des microorganismes dépend principalement de la concentration [C] du désinfectant, de la ou des substances utilisées et du temps [T] de contact. Pour un microorganisme donné, le produit de ces deux valeurs est voisin d'une constante, exprimée en mg.L-1.min :

[C] x [T] = constante CT

Le Tableau 2 présente d'une part, pour un traitement effectué aux doses et temps de contact habituellement pratiqués dans les installations, l'importance de l'abattement possible en cryptosporidies et, d'autre part, les valeurs des « CT » correspondant à 1 et 2 logarithmes d'abattement (BAUDIN et al., 2001). Ce tableau montre que pour l'élimination des cryptosporidies, dans les conditions réelles de fonctionnement des installations, les traitements de chloration ne sont pas efficaces.

Tableau 2 : Efficacité des traitements chimiques des eaux au regard des cryptosporidies (BAUDIN et al., 2001)

II.8.5. Mobilité de la population à travers la zone métropolitaine de Port-au-Prince face à la problématique de l'eau

Les 2.164.207 habitants de Port-au-Prince passent le plus clair de leur temps à la recherche de l'eau potable. Plus de 60% d'entre eux n'ont accès ni à un branchement personnel, ni à une fontaine publique. Seulement 12% des familles bénéficient d'un branchement particulier (BONHOMME et ROCK., 2001). Les bidonvilles qui abritent près de la moitié de la population de la ville ne bénéficient pas tous des services de la CAMEP. Plusieurs fois par jour, les habitants doivent aller chercher l'eau hors de la maison; certains font même des kilomètres pour s'approvisionner aux fontaines. Cette mobilité des gens pour la quête de l'eau explique l'interconnection qu'il y a entre les différentes zones. Par conséquent, une eau contaminée dans un point bien spécifique peut avoir des répercussions sur une population de loin supérieure à celle de son environnement immédiat. Par hypothèse on peut dire que ce n'est pas uniquement la zone où l'on a identifié le danger qui représente un risque d'exposition pour la population, ce serait plutôt toute la population de la zone métropolitaine de Port-au-Prince qui est alimentée par ce réseau qui constitue donc la population à risque.

Tenant compte de la surpopulation de la Région Métropolitaine de Port-au-Prince, de la dégradation sans cesse croissante du réseau de distribution de la CAMEP et enfin de la mobilité de cette population pour la quête de l'eau, l'ampleur du danger devient évident, d'où l'importance que revêt la conduite d'une estimation quantitative des risques sanitaires.

III. CADRE EXPERIMENTAL

Une évaluation des risques se réalise à partir de données existantes, de données générées pour les besoins de la cause et d'outils méthodologiques, tels que les modèles mathématiques, l'expérimentation, l'observation et la modélisation (EMMANUEL, 2004) .

III.I. SCHÉMA GLOBAL

Le modèle de cette évaluation quantitative des risques s'articule autour de 4 modules :

- un module d'« Emission » (ou contamination), donnant les résultats des analyses (nombre d'ookystes prélevés); qui caractérise la contamination de l'eau de distribution ;

- un module d'« Exposition » : prise en compte de la proportion d'ookystes viables, seuls susceptibles d'entraîner une infection ;

- un module de « Consommation », aboutissant à la caractérisation de l'ingestion d'eau de consommation pour quatre types de populations donnés.

- un module d'« Effet », aboutissant, à l'aide d'une relation dose-réponse, à la caractérisation du risque d'infection et, à l'aide d'une relation infection-maladie, à celle du risque de maladie pour la population immunodéprimée.

Figure 3 : Illustration de l'évaluation des risques sanitaires propose dans le cadre de cette étude

III.2. MODULE «D'EMISSION »

Méthodologiquement, l'évaluation de l'émission ou de la contamination peut se réaliser à partir de données existantes. Ainsi, plusieurs travaux ont été réalisés. Le choix est porté dans le cadre de cette étude sur les travaux effectués par BRASSEUR et al. entre 2000 et 2002. La distribution de la concentration des ookystes dans l'eau pour les différentes zones est présenté dans le tableau 3.

III.2.1. Matériels et méthodes

Vingt-sept prélèvements d'eau de surface et de distribution par adduction publique dans la zone métropolitaine de Port-au-Prince et ses environs immédiats ont été effectués. Cette étude exclut les prélèvements d'eau de surface. Les échantillons d'environs 100 litres sont filtrés suivant un débit de 100 litres à l'heure, sur des capsules de polyéthersulfone. Les capsules sont conservées à 4°C jusqu'au traitement au laboratoire conformément à la norme AFNOR 2000. Les filtres sont élués avec du tampon PBS, pH 7,4 additionné de tween 80. L'éluat est centrifugé et les ookystes de Cryptosporidium sp. sont isolés par séparation immuno-magnétique en les recouvrant d'un anticorps monoclonal anti-ookyste de Cryptosporidium. La collecte des billes magnétiques a été effectuée dans un champ magnétique. Le complexe ookystes/billes est ensuite dissocié par HCl 0,1N. Les ookystes isolés sont marqués par un anticorps monoclonal anti-Cryptosporidium fluorescent permettant la détection et le comptage.

Résultats des analyses

Tableau 3 : Distribution de la concentration des ookystes dans l'eau pour les différentes zones

ZONE

POP. TOTALE

n / 100L

Pop. moins de

5 ans

Port-au-Prince

704.777

 

65.536

Bolosse

 

6,9

 

Bolosse la foi

 

4,6

 

Rue St Martin

 

10

 

Christ- roi

 

4

 

Pacot

 

0

 

Blvd Harry Truman

 

2,8

 

Chemin des Dalles

 

38

 
 
 
 
 

Delmas

679.650

 

68.817

Delmas 6

 

1274

 

Delmas 66

 

8

 

Delmas 75

 

12

 

Delmas 33

 

0

 

Cité-Soleil

 

17,3

 

Tabarre -La Plaine

 

4,5

 
 
 
 
 

Pétion-Ville

283.052

 

29.415

Pétion-ville

48,6

 

Berthe-Péguy-ville

 

9,2

 

Tête de l'Eau

 

3,2

 
 
 
 
 

Carrefour

373.916

 

38.095

Bizoton 5

 

5

 

III.3. MODULE « D'EXPOSITION »

Le développement de ce module exige de prendre en compte la performance de la méthode d'analyse. Il exige de prendre en compte la proportion d'ookystes viables. Le nombre d'ookystes observé lors de l'analyse ne correspond en effet pas au nombre d'ookystes réel, en raison d'un rendement (d'une sensibilité) de la méthode inférieur à 100%. Dans les conditions d'application de la norme AFNOR (NF T 90-455), c'est à dire pour un volume filtré allant jusqu'à 200 litres, les résultats d'intercalibration des laboratoires permettent d'estimer ce rendement à 40%.

On émet les hypothèses suivantes :

Hypothèse 1

Chaque ookyste présent réellement dans un échantillon a une probabilité constante égale à 40% d'être observé, quel que soit l'échantillon, indépendamment des autres ookystes.

Hypothèse 2

On considère que la probabilité pour un ookyste d'être viable est constante, unique et indépendante des autres ookystes (hypothèse forte).

Hypothèse 3

On considère que les ookystes viables sont tous potentiellement infectants.

III.4. MODULE DE « CONSOMMATION »

L'étude prend en compte la consommation pour quatre types de populations

1 - Population immunocompétente et immunodéprimée âgée de moins de 5 ans :

Consommation d'eau de boisson par jour : 0,75 L/j (HOPKIN, 1980)

2 - Population adulte immunocompétente et immunodéprimée

Consommation d'eau de boisson par jour : 2L/j (HOPKIN, 1980)

III.5. MODULE « D'EFFET »

III.5.1. Relation Dose-Réponse

La probabilité pour un individu d'être infecté est clairement liée au nombre de microorganismes pathogènes ingéré. La loi Dose-Réponse est la fonction associant la probabilité pour un individu d'être infecté selon la quantité d'ookystes ingérée (la dose, notée D) : Pr(Infection|D) = f(D)

Plusieurs fonctions Dose-Réponse ont été proposées. Pour les dangers microbiens, les modèles les plus fréquemment utilisés sont les modèles « exponentiel » et « Bêta-Poisson ». Il a été montré sur les données de DUPONT et al. (1995) que le modèle Béta-Poisson, plus complexe que le modèle exponentiel, ne permettait pas un meilleur ajustement aux données que le modèle exponentiel : selon le principe statistique classique de parcimonie, et en l'absence de données complémentaires sur le processus entraînant ou non l'infection, le modèle exponentiel est donc préférentiellement utilisé dans le cadre de cette étude, plus simple. Le choix de ce modèle nécessite toutefois l'adoption de certaines hypothèses.

La formulation suivante est retenue pour la justification « biologique » du modèle dose-réponse de type exponentiel :

- chaque ookyste ingéré a une probabilité r faible de provoquer une infection. Cette probabilité n'est pas de 1 car il faut que l'ookyste arrive sur le site d'infection, survive aux défenses locales de l'organisme, ... ;

- cette probabilité est identique pour chaque ookyste et chaque individu ;

- cette probabilité ne dépend pas du nombre d'ookystes ingérés. Cette hypothèse suppose l'absence de synergie d'action entre les ookystes ;

- enfin, ce modèle considère que l'infection est effective dès que le nombre d'ookystes « infectants » est supérieur à 0 (pas d'effet seuil).

On aboutit mathématiquement à la loi dose-réponse (simple) suivante :

Pr(Infection|D) = 1 - exp(-r D)

Ce modèle ne comporte qu'un seul paramètre r, qu'il est nécessaire d'estimer à partir de données expérimentales.

On notera que r correspond à la probabilité pour un ookyste de provoquer l'infection. On peut également, à partir de ce paramètre évalué la dose infectieuse 50 (DI50) , quantité d'ookystes nécessaires pour que la probabilité d'infection soit de 50% :

DI50 = - ln(0.5) / r (AFSSA, 2002)

III.5.2. Données expérimentales pour l'estimation du paramètre r

L'étude prend en compte deux populations pour l'estimation du paramètre r: une population immunocompétente, et une population immunodéprimée. La relation dose-réponse pour ces deux populations est différente.

Deux séries de données sont utilisées pour traiter ce module :

- pour ce qui concerne la population immunocompétente, les données obtenues par DUPONT et al. (1995) ;

- pour ce qui concerne, la population immunodéprimée, les données obtenues par YANG et al (2000).

III.5.2.a Population immunocompétente

On retient un modèle de relation Dose-Réponse dit « exponentiel » (HAAS et al., 1999). Pour appliquer ce modèle exponentiel, on considère notamment les hypothèses 4 et 5 suivantes :

- Une entité infectieuse est suffisante pour entraîner l'infection, Hypothèse 4 ;

- Les actions des particules infectieuses ingérées sont indépendante, Hypothèse 5 ;

.

Tableau 4 : Données d'une infection expérimentale de volontaires sains par ingestion d'ookystes de Cryptosporidium parvum (DUPONT et al, 1995)

Ookystes ingérés

Nombre total sujets

Nombre sujets infectés

Sujets malades (Cryptosporidiose)

30

5

1

0

100

8

3

3

300

3

2

0

500

6

5

2

1000

2

2

0

10000

3

3

1

100000

1

1

0

1000000

1

1

1

En admettant que le nombre d'ookystes provoquant une infection suite à l'ingestion de D ookystes suit une loi Binomiale de paramètre D, n le nombre d'ookystes ingérés et r la probabilité pour un ookyste d'entraîner une infection :

n ~ Binomiale(D, r)

Comme r est faible et D est grand, on peut utiliser la convergence de la loi Binomiale vers la loi de Poisson, d'où :

n ~ Poisson(r D)

La probabilité d'obtenir au moins une infection est alors égale à

Pr(Infection|D) = 1 - exp(-r D)

D'après l'ajustement de la loi Dose-Réponse exponentielle aux données de DUPONT et al. (1995), le paramètre estimé est de r = 0.00419. La dose infectieuse 50, (DI50) est de 165 ookystes.

III.5.2.b Population immunodéprimée

Tableau 5 : Données d'infection de souris immunodéprimées par ingestion d'ookystes (YANG et al., 2000)

Ookystes ingérés

Nombre total de souris

Souris infectées

0

8

0

1

24

4

5

8

8

10

8

8

Dans ce contexte particulier, le raisonnement repose sur les données observées par YANG et al., 2000), reprises dans le Tableau 5, et obtenues sur souris immunodéprimées avec les hypothèses suivantes :

Hypothèse 6

On retient l'hypothèse d'une transposition possible des données obtenues sur souris immunodéprimées à des individus immunodéprimés (hypothèse forte, mais très sécuritaire au regard des paramètres issus de l'étude de YANG et al. 2000) ;

Par ajustement du modèle exponentiel sur ces données, on estime que la dose infectieuse 50 (DI50) est égale à 1,96 ookystes, le paramètre estimé est de r = 0.354 ce qui signifie en d'autres termes, que moins de 2 ookystes par individu sont nécessaires pour infecter la moitié d'une population immunodéprimée exposée à l'ingestion d'ookystes. Pour ce qui concerne cette population spécifique, l'hypothèse suivante est retenue :

Hypothèse 7

La probabilité de maladie d'un individu immunodéprimé infecté est de 1 (hypothèse forte, sécuritaire).

En conséquence, le risque d'infection est égal au risque de maladie dans cette sous-population et le nombre d'infections est égal au nombre de cas cliniques de cryptosporidiose.

Le nombre de personnes contaminées par le virus du SIDA en Haïti est estimé approximativement à 400.000 (PSI, Haïti) soit 5% de la population totale qui est de 8.304. 062 habitants (IHSI, 2003).

Hypothèse 8

Les 5% sont uniformément répartis à travers le pays, en fonction de la population de la zone considérée.

Connaissant le paramètre r et acceptant le modèle exponentiel, il est alors possible d'évaluer la probabilité d'infection quelle que soit la dose ingérée pour les différents types de population.

IV. Résultats et Discussion

IV.1. POPULATION DE 5 ANS ET PLUS

Tableau 6 : Risque d'infection pour la population 5 ans et plus immunocompétente

ZONE

Pop. 5ans

et plus

I.C

n / 100 L

Rend. 40%

Nbre. ookyste. pr. 2 L / J

Dose ingérée

Risque

d'inf./ jour

Moy. Risque/ d'inf.

Port-au-Prince

607.279

 
 
 
 
 

1,16%

Bolosse

 

6,9

2,76

0,0552

0,0552

1%

 

Bolosse la foi

 

4,6

1,84

0,0368

0,0368

1%

 

rue st Martin

 

10

4

0,08

0,08

1%

 

Christ-roi

 

4

1,6

0,032

0,032

1%

 

chemin des

dalles

38

15,2

0,304

0,304

2%

 

Pacot

 

0

0

0

0

 
 

Blvd Harry Truman

 

2,8

1,12

0,0224

0,0224

1%

 
 
 
 
 
 
 
 
 

Delmas

580.292

 
 
 
 
 

2%

Delmas 66

 

8

3,2

0,064

0,064

1%

 

Delmas 6

 

1274

509,6

10,192

10,192

5%

 

Delmas 75

 

12

4,8

0,096

0,096

1%

 

Delmas 33

 

0

0

0

0

 
 

Cité Soleil

 

17,3

6,92

0,1384

0,1384

1%

 

Tabarre - la Plaine

 

4,5

1,8

0,036

0,036

1%

 

Carrefour marin

 

5,5

2,2

0,044

0,044

1%

 
 
 
 
 
 
 
 
 

Pétion-Ville

240.956

 
 
 
 
 

1,33%

Pétion-ville

 

48,6

19,44

0,3888

0,3888

2%

 

Berthe-Péguy-ville

 

9,2

3,68

0,0736

0,0736

1%

 

Tête de l'eau

 

3,2

1,28

0,0256

0,0256

1%

 
 
 
 
 
 
 
 
 

Carrefour

319.030

 
 
 
 
 

1%

Bisoton 5

 

5

2

0,04

0,04

1%

1%

Pop : Population ; Rend : Rendement ; Risque d'inf./ jour : Risque d'infection pour un jour donné ; Moy Risque.

d'inf. : moyenne du Risque d'infection ; I.C. : immunocompétente ; L / J : litre par jour

Le risque d'infection pour la population immunocompétente âgée de 5 ans et plus, consommatrice d'eau de distribution par adduction publique, varie entre 1 et 5%. Cette probabilité de risque englobe non seulement la population de la zone ou les prélèvements ont été effectués mais également la population des zones avoisinantes.

Toutefois la prise en compte de l'incertitude du risque vis-à-vis des données relatives à la présence du parasite dans l'eau de distribution par adduction publique pour un nombre considérable d'endroits appartenant à la même municipalité, exige de prendre pour la population totale d'une municipalité considérée, un niveau de risque qui serait égal à la moyenne arithmétique des différents résultats trouvés. La figure 2 présente la variation des moyennes du risque à laquelle les populations respectives des différentes municipalités de la région métropolitaine se trouvent exposées.

Figure 4 : Variation des moyennes du risque d'infection pour la population immunocompétente âgée de 5 ans et plus.

Lecture exemple : la municipalité de Delmas qui accuse une population immunocompétente approximative de 580.292 habitants a une moyenne de risque d'infection égale à 2%.

Tableau 7 : Risque d'infection et de maladies pour la population âgée de 5ans et plus immunodéprimée

ZONE

Pop.5

ans et plus I.D.

n / 100 L

rend. 40%

Nbre. ooKyste

pr. 2 L / J

Dose Ingérée

Risque

d'inf./ jour

Moy. Du

Risque/ d'inf.

 
 
 
 
 
 
 
 

Port-au-Prince

31.962

 
 
 
 
 

3,23%

Bolosse

 

6,9

2,76

0,0552

0,0552

2%

 

Bolosse la foi

 

4,6

1,84

0,0368

0,0368

1%

 

rue st Martin

 

10

4

0,08

0,08

3%

 

Christ-roi

 

4

1,6

0,032

0,032

1%

 

chemin des dalles

 

38

15,2

0,304

0,304

11%

 

Pacot

 

0

0

0

0

0%

 

Blvd Harry Truman

 

2,8

1,12

0,0224

0,0224

1%

 

Delmas

30.541

 
 
 
 
 

18,37%

Delmas 66

 

8

3,2

0,064

0,064

2%

 

Delmas 6

 

1274

509,6

10,192

10,192

97%

 

Delmas 75

 

12

4,8

0,096

0,096

3%

 

Delmas 33

 

0

0

0

0

0%

 

Cité Soleil

 

17,3

6,92

0,1384

0,1384

5%

 

Tabarre la Plaine

 

4,5

1,8

0,036

0,036

1%

 

Carrefour Marin

 

5,5

2,2

0,044

0,044

1%

 

Pétion-ville

12.681

 
 
 
 
 

5,44%

Pétion-ville

 

48,6

19,44

0,3888

0,3888

13%

 

Berthe-Peguy-ville

 

9,2

3,68

0,0736

0,0736

3%

 

Tête de l'eau

 

3,2

1,28

0,0256

0,0256

1%

 

Carrefour

16.791

 
 
 
 
 
 

Bizoton 5

 

5

2

0,04

0,04

1%

1%

Pop : Population ; Rend : Rendement ; Risque d'inf./ jour : Risque d'infection pour un jour donné ; Risque Moy. d'inf : Risque moyen d'infection ; I.D. : Immunodéprimée ; L / J : litre par jour

Dans cette population le risque d'infection est égal au risque de maladie et le nombre d'infections est égal au nombre de cas de cryptosporidiose. Par conséquent, le risque d'infection qui varie de 1 à 97% est aussi égal au nombre de cas de maladie. Ces résultats expriment le caractère imminent du danger pour la population immunodéprimée. Ces données ne sont qu'un simple reflet de la réalité en raison du fait que la totalité des personnes vivant avec le virus du SIDA n'est pas connu avec exactitude. La figure 5 présente la variation approximative des moyennes du risque auquel se trouvent exposées les populations immunodéprimées respectives des différentes municipalités de la région métropolitaine.

Figure 5 : Variation des moyennes du risque d'infection et de maladie pour la population immunodéprimée âgée de 5 ans et plus

Le nombre moyen de personnes infectées appartenant à la population immunocompétente et le nombre moyen de personnes infectées et malades appartenant à la population immunodéprimée âgée de 5 ans et plus pour la région métropolitaine de Port-au-Prince, seraient donc égaux à la moyenne pondérée des moyennes du risque multipliée par les populations respectives des différentes municipalités.

Ainsi pour la Région Métropolitaine de Port-au-Prince :

Le nombre ainsi estimé de personnes infectées pour la population immunocompétente âgée de 5 ans et plus est donc égal à : 23.844 personnes.

Le nombre ainsi estimé de personnes infectées et malades pour la population immunodéprimée âgée de 5 ans et plus est donc égal à : 7.494 personnes.

IV.2. POPULATION DE MOINS DE 5 ANS

Tableau 8 : Risque d'infection pour la population immunocompétente âgée de moins de 5 ans

ZONE

Pop. I.C moins

5 ans

n / 100 L

rend.

40%

Nbre. ookyste

pr. 0,75L / J

Dose

ingérée

Risque

d'inf./ jour

Moy/ Risque

d'inf.

Port-au-Prince

62.260

 
 
 
 
 

0,83%

Bolosse

 

6,9

2,76

0,0207

0,0207

1%

 

Bolosse la foi

 

4,6

1,84

0,0138

0,0138

1%

 

rue st Martin

 

10

4

0,03

0,03

1%

 

Christ-roi

 

4

1,6

0,012

0,012

1%

 

chemin des dalles

 

38

15,2

0,114

0,114

1%

 

Pacot

 

0

0

0

0

0%

 

Blvd Harry Truman

 

2,8

1,12

0,0084

0,0084

0%

 

Delmas

65.377

 
 
 
 
 

1,16%

Delmas 66

 

8

3,2

0,024

0,024

1%

 

Delmas 6

 

1274

509,6

3,822

3,822

2%

 

Delmas 75

 

12

4,8

0,036

0,036

1%

 

Delmas 33

 

0

0

0

0

0%

 

Carrefour marin

 

5,5

2,2

0,0165

0,0165

1%

 

Cité Soleil

 

17,3

6,92

0,0519

0,0519

1%

 

Tabarre La Plaine

 

4,5

1,8

0,0135

0,0135

1%

 

Pétion-ville

27.945

 
 
 
 
 

1%

Pétion-ville

 

48,6

19,44

0,1458

0,1458

1%

 

Berthe-Peguy-ville

 

9,2

3,68

0,0276

0,0762

1%

 

Tête de l'eau

 

3,2

1,28

0,0096

0,0096

1%

 

Carrefour

36.191

 
 
 
 
 
 

Bizoton 5

 

5

2

0,015

0,015

1%

1%

Pop : Population ; Rend : Rendement ; Risque d'inf./ jour : Risque d'infection pour un jour donné ; Moy / Risque d'inf :

Moyenne du Risque d'infection ; I.C. : immunocompétente ; ; L / J : litre par jour

Le risque d'infection pour les enfants de moins de 5 ans pour les différentes zones est à peu près constant 1%, sauf concernant le prélèvement effectué à Delmas 6 qui donne un niveau de risque égal à 2%.

Tableau 9 : Risque d'infection et de maladies pour la population immunodéprimée âgée de moins de 5 ans

ZONE

Pop. I.D

Moins

de 5 ans

n / 100 L

rend.

40%

Nbre. ookystes

pr. 0,75L / J

Dose ingérée

Risque

d'inf./ jour

Moy/Risque. d'inf.

Port-au-Prince

3.276

 
 
 
 
 

1%

Bolosse

 

6,9

2,76

0,0207

0,0207

1%

 

Bolosse la foi

 

4,6

1,84

0,0138

0,0138

0%

 

Rue st Martin

 

10

4

0,03

0,03

1%

 

Christ-roi

 

4

1,6

0,012

0,012

0%

 

chemin des dalles

 

38

15,2

0,114

0,114

4%

 

Pacot

 

0

0

0

0

 
 

Blvd Harry Truman

 

2,8

1,12

0,0084

0,0084

0%

 

Delmas

3.440

 
 
 
 
 

13,16%

Delmas 66

 

8

3,2

0,024

0,024

1%

 

Delmas 6

 

1274

509,6

3,822

3,822

74%

 

Delmas 75

 

12

4,8

0,036

0,036

1%

 

Delmas 33

 

0

0

0

0

0%

 

Tabarre La Plaine

 

4,5

1,8

0,0135

0,0135

0%

 

Carrefour marin

 

5,5

2,2

0,0165

0,0165

1%

 

Cité Soleil

 

17,3

6,92

0,0519

0,0519

2%

 

Pétion-ville

1.470

 
 
 
 
 

3%

Pétion-ville

 

48,6

19,44

0,1458

0,1458

5%

 

Berthe-Peguy-ville

 

9,2

3,68

0,0276

0,0762

3%

 

Tête de l'eau

 

3,2

1,28

0,0096

0,0096

0%

 

Carrefour

1.904

 
 
 
 
 
 

Bizoton 5

 

5

2

0,015

0,015

1%

1%

Pop : Population ; Rend : Rendement ; Risque d'inf./ jour : Risque d'infection pour un jour donné ; Risque Moy. d'inf :

Risque moyen d'infection ; I.D. : immunodéprimée

Le risque d'infection est égal au risque de maladie et le nombre d'infections est égal au nombre de cas de cryptosporidiose. De ce fait le risque d'infection qui varie de 1 à 74% est aussi égal au nombre de cas de maladies. La figure 6 présente la variation approximative de la moyenne du risque à laquelle se trouvent exposées les populations immunodéprimées respectives des différentes municipalités de la région métropolitaine, âgées de moins de 5 ans.

Figure 6 : Variation des moyennes du risque d'infection et de m ladies de la population immunodéprimée âgée de moins de 5 ans

Ainsi pour la Région Métropolitaine de Port-au-Prince :

Le nombre de personnes infectées en moyenne pour la population immunocompétente âgée de moins de 5 ans est égal à 1.916 enfants.

Le nombre de personnes infectées et malades en moyenne pour la population immunodéprimée âgée de moins de 5 ans est égale à 549 enfants.

V. CONCLUSION ET PERSPECTIVES

Cette étude sur l'évaluation des risques sanitaires dus aux ookystes de Cryptosporidium dans l'eau destinée à la consommation humaine dans la Région Métropolitaine de Port-au-Prince, s'inscrit dans le cadre d'un suivi des travaux réalisés par BRASSEUR et al entre 2000 et 2002. Travaux au cours desquels des analyses ont été effectuées sur des échantillons d'eau de distribution, révélant la présence des ookystes de Cryptosporidium. L'objectif de cette présente étude était d'évaluer les risques sanitaires liés à la présence de ce parasite dans l'eau destinée à la consommation humaine et distribuée dans la zone métropolitaine de Port-au-Prince.

A partir d'une étude bibliographique réalisée sur Cryptosporidium parvum et les différents facteurs influençant la diffusion du danger dans la zone métropolitaine de Port-au-Prince un cadre expérimental a été élaboré qui consiste en  un développement respectif des modules suivants :

- « Emission » (ou contamination) : donnant les résultats des analyses (Nombre d'ookystes prélevés); caractérisant la contamination de l'eau de distribution.

- « Exposition » : prise en compte de la proportion d'ookystes viables, seuls susceptibles d'entraîner une infection ;

- « Consommation » : aboutissant à l'ingestion d'eau de consommation pour quatre types de population donnés.

- « Effet » : aboutissant, à l'aide d'une relation dose-réponse, à la caractérisation du risque d'infection et, à l'aide d'une relation infection-maladie, à celle du risque de maladie pour la population immunodéprimée.

A l'issue de ces quatre premières parties, la phase d'interprétation des résultats est abordée où l'on a constaté que :

Le risque d'infection pour la population immunocompétente âgée de 5 ans et plus, consommant l'eau de distribution par adduction publique, varie entre 1 à 5% ;

Le risque d'infection pour la population immunodéprimée qui est égal au risque de maladie varie de 1 à 97%, situation particulièrement alarmante pour ce groupe d'individus déjà vulnérables d'autant plus que seulement une fraction limitée de la population infectée par le VIH a accès au traitement anti-rétroviral ;

Le nombre estimé de personnes immunocompétentes (âgées de 5 ans et plus) infectées par Cryptosporidium parvum dans la zone métropolitaine de Port-au-Prince est égal à  23.844 personnes et le nombre estimé de personnes immunodéprimées âgées de 5 ans et plus) infectées par Cryptosporidium parvum et susceptibles de développer une cryptosporidiose grave est égal à  7.494 personnes.

Le prélèvement effectué à Delmas 6 donne un niveau de risque égal à 2% pour les enfants âgés de moins de 5 ans et immunocompétents.

Le risque d'infection et de maladie pour les enfants immunodéprimés âgés de moins de 5 ans varie entre 1 et 74%.

Le nombre estimé d'enfants infectées pour la population immunocompétente âgée de moins de 5 ans pour la zone métropolitaine de Port-au-Prince est égale à  1.916 enfants.

Pour la population immunodéprimée âgée de moins de 5 ans, le nombre estimé d'enfants infectés par Cryptosporidium parvum et donc malades est égal à  549 enfants.

Les résultats obtenus dans ce travail sont le reflet de la réalité donnant une idée de l'ampleur du danger que revêt la circulation de Cryptosporidium parvum dans l'environnement urbain et sa présence dans l'eau de distribution par adduction publique dans la zone métropolitaine de Port-au-Prince. Par conséquent il serait souhaitable de mettre en place une stratégie de surveillance de la qualité microbiologique de l'eau dans la perspective de réduire les infections liées à la consommation d'eau contaminée.

Cependant, compte tenu de la complexité que revêt la conduite de l'évaluation des risques sanitaires dans un tel contexte, il serait intéressant à l'avenir d'orienter cette recherche vers une évaluation de risque plus poussée en utilisant la technique du type Monte Carlo qui prendrait en compte :

1) l'incertitude du niveau de risque liée à l'ignorance partielle ou au manque de connaissances sur le phénomène étudié, en établissant des intervalles de confiance.

2) la variabilité qui correspond à la diversité et l'hétérogénéité du risque d'un individu à l'autre, ou d'un jour à l'autre, en raison de la variabilité de la consommation d'eau et de la variabilité de la contamination de l'eau.

Par ailleurs, il serait souhaitable d'effectuer des analyses sur des échantillons d'eau de consommation dite « traitée » et vendue au détail dans des récipients appartenant aux usagers, et de plus en plus achetée par la population.

RÉFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES

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