DEDICACE
Au Seigneur tout puissant pour son Amour et sa Grâce
infinis à mon endroit,
Et,
À ma grande famille pour son soutien,
Je dédie ce travail.
REMERCIEMENTS
Je voudrais, à l'heure où j'achève ce
travail, exprimer mes chaleureux remerciements à l'endroit de tous ceux
qui de près ou de loin ont contribué à sa
réalisation.
Ces remerciements s'adressent tout d'abord à tous les
enseignants de la Faculté des Sciences Juridiques et Politiques de
l'Université de Dschang et particulièrement :
Au Professeur KALIEU ELONGO Yvette-Rachel
pour toute la rigueur, la disponibilité et la patience dont elle a fait
preuve dans son importante oeuvre de conduire mes premiers pas sur
l'éprouvant chemin de la recherche.
Au Professeur ANOUKAHA François, doyen
de ladite faculté, pour son souci constant d'offrir à notre
formation un label de qualité.
Au Docteur KEUTCHA TCHAPNGA
Célestin pour sa disponibilité et ses multiples
conseils.
Au Docteur NGUIHE KANTE Pascal pour la
documentation et les conseils de recherche.
Aux Docteurs TCHOU-BAYO
Jean-Paul et TCHOUNGA Anatole pour leurs
encouragements.
Aux Docteurs NJEUFACK TEMGWA
René et NGNIMPIEBA TONNANG Edouard et
aux Doctorants NJIEUFACK Roland et TCHOUAMBIA TOMTOM
Bédel qui ont accepté avec beaucoup de plaisir de relire
ce travail en vue de son amélioration.
Pour leur assistance dans la recherche documentaire et, parce
qu'ils ont toujours partagé beaucoup d'intérêt à
discuter avec moi sur ce travail, je remercie tous mes camarades de classe et
amis et plus particulièrement NGUETSOP VOUKENG Hervé,
TCHAMENI Edmond, NGAKAM TCHIENTCHEU Nathalie, NDAMTANG Aristide MOHO FOPA Eric,
NGANSOP Séraphin, MOUDOUROU Jean Paul, KOUAKEP Clotaire, NJAYOU Fabrice,
KENFACK KENGMO Fidèle, KONTCHOP Hilarion, MAFO DIFFO Raymond, AZEUFACK
Gatien, NGASSA NGUEBDJO Colonel, KAGOU KENNA Patrice
et MAGUEU KAMDEM Joëlle.
Qu'il me soit enfin permis d'exprimer ma sincère
gratitude :
A mademoiselle TCHEUZEULE
Huguette, pour l'assistance tant matérielle que morale
dont elle n'a cessé de me combler pendant toutes les étapes ayant
conduit à la réalisation de ce travail.
Au Révérend KAMTA Isaac
Makarios, pour tous les conseils et le soutien moral
A la famille NODEM pour son
hospitalité et sa sympathie à mon endroit.
A mademoiselle MEDOM
Léonie dont la compagnie au quotidien m'a toujours
réconforté et encouragé dans la réalisation de ce
travail.
Et à bien d'autres dont les noms n'ont pas pu
être cités ici.
PRINCIPALES
ABREVIATIONS
Al. Alinéa.
ANIF: Agence Nationale des Investigations
Financières.
Art.: Article.
BCCI: Banque de Crédit et de Commerce
International.
BEAC : Banque des Etats de l'Afrique
Centrale.
Cass. : Cour de Cassation
française.
CEDEAO: Communauté Economique des Etats
de l'Afrique de l'Ouest.
CEMAC/ Communauté:
Communauté Economique des Etats de l'Afrique Centrale.
Cf. Confère
CLAB: Comité de Liaison Anti-Blanchiment
de la Zone Franc.
COBAC : Commission Bancaire de l'Afrique
Centrale.
D. : Dalloz.
FCFA: Franc de la Coopération
Financière Africaine (Zone BEAC).
GABAC : Groupe d'action contre le
Blanchiment d'Argent en Afrique Centrale
GAFI: Groupe d'Action Financière contre
le blanchiment d'argent.
GIABA: Groupe intergouvernemental d'action
contre le blanchiment de capitaux en Afrique.
JCP: Juris-Classeur Périodique.
Op. Cit. : Opere Citato
(dans l'oeuvre précitée).
p. / pp. : Page /
Pages.
PUF. : Presses Universitaires de France.
Req. : Chambre des Requêtes.
TRACFIN: Cellule de Traitement et de l'Action
Contre les Circuits Financiers Clandestins.
UEMOA: Union Economique et Monétaire de
l'Afrique de l'Ouest.
UMAC : Union Monétaire de l'Afrique
Centrale.
SOMMAIRE
TITRE I : LA COUVERTURE DES
MECANISMES ET TECHNIQUES DU BLANCHIMENT PAR LES TECHNIQUES
BANCAIRES...........................8
CHAPITRE I : L'EXISTENCE DES
PASSERELLES ENTRE LES TECHNIQUES BANCAIRES ET LE
BLANCHIMENT..........................................................10
SECTION I : Le traitement
confidentiel de certaines opérations
bancaires..................................10
SECTION II : La négligence
coupable de certains
acteurs.....................................................18
CHAPITRE II : LE RENFORCEMENT DE
LA CONFIDENTIALITE DANS LES SERVICES PARTICULIERS DE LA
BANQUE......................................................................30
SECTION I : La question de
l'identification des clients dans les cyberservices de la
banque............30
SECTION II : les limites
juridiques au contrôle de certaines opérations
bancaires........................39
CONCLUSION DU TITRE
I......................................................................................44
TITRE II : LES RESTRICTIONS DU
SECRET BANCAIRE EN ZONE CEMAC : UN GAGE D'EFFICACITE POUR LA LUTTE CONTRE
LE BLANCHIMENT...............................45
CHAPITRE I : LA DIMENSION
INSTITUTIONNELLE DE LA LUTTE ANTI-BLANCHIMENT EN ZONE
CEMAC...............................................................................................47
SECTION I : Le rôle des
institutions communautaires dans la prévention du secteur bancaire
contre le
blanchiment....................................................................................................47
SECTION II : Les
instruments des dispositifs nationaux contre le blanchiment en milieu
bancaire.....55
CHAPITRE II : LE ROLE DES
ETABLISSEMENTS
BANCAIRES......................................64
SECTION I : Les obligations des
établissements
bancaires....................................................64
SECTION II : Les sanctions des
obligations des établissements
assujettis.................................78
CONCLUSION DU TITRE
II....................................................................................85
CONCLUSION
GENERALE....................................................................................86
INTRODUCTION GENERALE
Le blanchiment d'argent est l'un des fléaux les plus
silencieux et les plus virulents de notre ère. Son éradication
exige que l'on neutralise les moyens qui permettent aux criminels de tous
ordres de dissimuler l'origine des fonds dont ils sont titulaires. Il faut en
outre pouvoir empêcher ces criminels de conserver ces fonds. En effet, le
blanchiment c'est le fait de faciliter, par tout moyen1(*), la justification
mensongère de l'origine des biens ou des revenus de l'auteur d'un crime
ou d'un délit ayant procuré à celui ci un profit direct ou
indirect. A cet égard, les criminels utilisent largement le
système bancaire, profitant du secret bancaire qui interdit aux
établissements de crédit de divulguer des informations sur leur
clientèle. Une idée se dégage, si l'on veut efficacement
lutter contre le blanchiment, il faut redéfinir le régime du
secret bancaire2(*).
Il s'agit a priori d'un sacrifice immense, mais, au regard
des statistiques sur la menace, il faut le faire. Selon le FMI, le volume
agrégé du blanchiment de capitaux dans le monde se situe sans
doute dans la fourchette de deux à cinq pour cent du produit
intérieur brut mondial, soit 590 à 1500 milliards de dollars
américains (environ 295.000 à 750.000 milliards de francs CFA),
étant entendu que le premier de ces chiffres correspond à peu
près à la valeur de la production totale d'une économie
comme l'Espagne3(*).
Le problème est longtemps resté hors des
priorités des acteurs de la scène internationale. Comme le
rappelle un expert des questions de blanchiment4(*), la prise de conscience des dangers liés
à la criminalité organisée est relativement
récente, et son point de départ peut être situé au
Sommet du G7 en 19895(*).
C'est d'ailleurs de ce Sommet que naît le GAFI, qui élabore un an
plus tard une série de « quarante recommandations ».
Celles-ci énoncent les mesures que l'ensemble des gouvernements
nationaux et des banques doivent prendre pour appliquer des plans plus
efficaces de lutte contre le blanchiment. Elles ont été
révisées en 1996 et en 2003.
La conscience du monde sera davantage interpellée sur
la question suite aux tragiques événements du 11 septembre 2001
où il est apparu que le blanchiment d'argent pouvait servir les causes
du terrorisme. Dès lors, il est certain que s'il n'est pas
maîtrisé ou traité efficacement, le blanchiment de capitaux
peut gravement nuire à la société, en permettant à
la criminalité organisée d'infiltrer les institutions
financières et même d'acquérir des pans entiers de
l'économie par ses investissements. Le GAFI pense que combattre le
blanchiment d'argent revient à détruire les activités
criminelles organisées ; le premier serait d'ailleurs le talon
d'Achille des secondes. Lutter efficacement contre la criminalité
organisée, c'est oeuvrer dans le sens d'empêcher aux criminels de
jouir du fruit de leur crime6(*).
Comme le blanchiment des capitaux est la conséquence
logique de toute activité criminelle générant des
bénéfices, il peut pratiquement intervenir partout dans le monde.
Mais, les blanchisseurs ont tendance à rechercher les lieux dans
lesquels ils courent peu de risque de détection en raison du laxisme ou
de l'inefficacité du dispositif anti-blanchiment. Bien plus, le lieu est
aussi fonction de la phase du processus ; en effet dans la première
phase, celle du `'placement''7(*), les fonds sont en général
traités dans des zones proches de celles où intervient
l'activité génératrice. Dans la seconde phase, celle de l'
«empilage''8(*), le
blanchisseur choisit un centre financier extraterritorial ou tout lieu
doté d'une infrastructure financière et commerciale convenable.
Dans la dernière phase, celle de l' `'intégration''9(*), la stabilité
économique est recherchée ; c'est cet argument qui
décide les blanchisseurs à investir dans des endroits offrant de
grandes perspectives de financement10(*).
Par l'ingéniosité de ceux qui s'y
emploient11(*), le
blanchiment d'argent se révèle être un acte subtil beaucoup
moins subversif qu'un acte de cambriolage.12(*) A l'opinion commune, il paraît moins redoutable
que le larron qui arrache un porte-monnaie dans la rue ; et pourtant, le
blanchiment est une opération hautement plus dangereuse et nuisible pour
la stabilité de nos sociétés que le hold-up. L'influence
économique et politique des organisations criminelles peut
détruire le tissu social, paralyser le fonctionnement
démocratique d'un Etat et hypothéquer le processus de transition
démocratique, en bref le blanchiment perpétue et amplifie le
crime.
Les mécanismes de blanchiment de capitaux à
grande échelle comportent généralement des
éléments transnationaux. Confrontés aux difficultés
de développement de leurs activités dans le cadre d'un espace
national13(*) , les
criminels mettent alors sur pieds des réseaux transnationaux utilisant
des techniques et des instruments calqués de la façon la plus
exacte possible sur les mécanismes du commerce international. Cette
situation rend la coopération internationale indispensable à
l'efficacité de toute stratégie de lutte anti-blanchiment. Ainsi
les Etats sont appelés à harmoniser leurs législations sur
le blanchiment, mettre sur pieds des procédures simplifiées
d'extradition, instaurer une coopération entre les autorités
monétaires, les milieux financiers et toutes les autres professions et
catégories d'entreprises exerçant des activités
vulnérables au blanchiment.14(*)
Tous les Etats sont ainsi invités à observer
harmonieusement les règles conçues par les autorités
internationales compétentes. Car les disparités existant entre
les dispositifs anti-blanchiment des Etats peuvent sérieusement
préjudicier tous les efforts entrepris.
La zone Franc est consciente des effets pervers que la
criminalité organisée peut marquer sur la transition
démocratique de ses Etats. C'est pourquoi elle s'est engagée sans
réserve à lutter contre le blanchiment. C'est par ailleurs en
droite ligne de cet engagement et des évolutions internationales que les
ministres des finances et les gouverneurs des banques centrales de cette zone
se sont réunis à Abidjan en avril 2001 pour affirmer leur
volonté commune de se doter dès 2002 d'une législation
adaptée contre le blanchiment. Ils ont par la même occasion
souligné que cette lutte est une clé de la stabilité
sous-régionale.15(*)
Ainsi, ces Etats ne se sont pas laissés berner par
l'argument selon lequel les économies en développement ne peuvent
pas se permettre d'être trop sourcilleuses quant à la source des
capitaux qu'elles attirent, mais, ont vite et bien fait de comprendre que
« le blanchiment d'argent sale est pour le système
financier ce que le SIDA est à la
société »16(*). Ce serait donc asphyxier une Afrique
déjà affaiblie par les détournements de fonds publics, la
corruption, le grand banditisme, le trafic illégal des enfants et des
organes humains, les guerres civiles, les coups d'Etat... que de fermer les
yeux sur le problème de blanchiment. Le constat est par ailleurs
clair : plus l'action contre le blanchiment tarde, plus il
s'enracine17(*).
Au niveau de la sous région d'Afrique centrale, les
chefs d'Etats, réunis à N'djamena le 14 décembre 2000, se
sont résolus à ne pas faire de la zone CEMAC une machine à
blanchir l'argent sale, en déclarant leur ferme volonté à
tout mettre en oeuvre pour lutter contre le mal18(*). Cette volonté s'est manifestée
séance tenante par la création du GABAC19(*). Trois ans plus tard, les
autorités communautaires ont adopté le Règlement portant
prévention et répression du blanchiment des capitaux et du
financement du terrorisme en Afrique centrale. Ce texte répond à
la « nécessité de renforcer la lutte contre le
blanchiment des capitaux dans les Etats de la CEMAC par l'adoption d'un texte
communautaire de nature à combler le vide législatif en
matière de prévention et de répression du blanchiment...
auxquels il y a lieu d'adjoindre les aspects relatifs à la
prévention et à la répression du financement du
terrorisme ».20(*) Il s'inspire par ailleurs de toutes les
réglementations en vigueur sur le plan international concernant la
question21(*).
Le 1er avril 2005, l'arsenal juridique
anti-blanchiment de la CEMAC est complété par un important
Règlement de la COBAC22(*). En effet, l'adoption de cet Acte rappelle s'il en
était encore besoin que l'efficacité de la lutte anti-blanchiment
est fortement tributaire de la réglementation bancaire et du
contrôle exercé sur les activités des établissements
de crédit en général ; ceci parce que, durant tout
son processus, le blanchiment entretient des liens très intimes avec la
banque tout en essayant de récupérer à son profit les
principes bancaires institués en vue de protéger la
clientèle. La banque n'a-t-elle d'ailleurs pas pour rôle de
recevoir les fonds du public, de gérer le portefeuille de sa
clientèle tout en demeurant discrète à l'égard des
tiers et silencieuse à l'égard des curieux , Se trouvant
ainsi au coeur du blanchiment consciemment23(*) ou inconsciemment ? Le blanchisseur
n'hésite pas à son tour à solliciter les banques
complaisantes, ou celles situées dans des zones où le secret
bancaire est vu comme un droit fondamental24(*). Le Règlement de la COBAC prévoit donc
une série de mesures destinées à prévenir
l'utilisation des établissements de crédit de la zone CEMAC
à des fins de blanchiment. A travers toutes ces mesures, c'est le lien
entre le secret bancaire et le blanchiment qui est indexé.
Le secret bancaire est une institution fondamentale du droit
bancaire qui assure au commerce de l'argent une certaine discrétion.
Expression du droit de la propriété, il témoigne aussi du
degré de libéralisme de la société dans laquelle on
se trouve. C'est pourquoi en tout temps il a toujours fait l'objet d'une
réglementation rigoureuse25(*). La capacité d'un banquier à pouvoir
demeurer silencieux et furtif est un indice notable de sa
crédibilité26(*). Ce secret est institué dans
l'intérêt du client, dès lors, celui-ci peut y renoncer.
Puisqu'il s'agit, de protéger un intérêt particulier, la
loi autorise le banquier à s'en départir sans
responsabilité aucune quand l'intérêt général
le commande.27(*)
De plus en plus l'idée de protection du secret bancaire
ne cesse d'alimenter des débats et des polémiques28(*). Pour les alter mondialistes,
le secret bancaire constitue une entrave à la poursuite d'investigations
contre les comptes occultes. Selon eux, il faut toujours lever le secret
bancaire, car il favorise le blanchiment d'argent. Pour les libéraux, il
faut le maintenir, car il est le garant de la sphère
privée29(*).
Au delà de ces positions maximalistes, la meilleure
solution serait sans nul doute celle qui permettrait d'assurer une protection
rationnelle des clients de banques contre une curiosité
illégitime des tiers tout en préservant l'intérêt de
l'économie en général et le droit, pour les
populations de la sous région à un environnement socio-politique
sain et paisible.
En effet, éradiquer le secret bancaire serait amputer
à la sous région un support indéniable à
l'investissement. Le laisser régner sans limites reviendrait à
courir le risque de confier à terme l'économie de la sous
région aux criminels. Le vrai problème est alors celui d'une
conciliation30(*). Si
celle-ci n'est pas bien maîtrisée ou encadrée, elle
risquerait à son tour soit de rendre la lutte anti-blanchiment
inefficace ; soit d'amputer la sphère privée d'une de ses
caractéristiques essentielles : le droit des personnes au secret
bancaire. Et, dans tous les cas, ce risque ne peut se réaliser qu'au
mépris de l'économie sous régionale.
C'est pourquoi nous nous proposons dans cette étude,
d'analyser les mécanismes du blanchiment d'argent mettant en exergue le
rôle indispensable du secret bancaire (TITRE I), lesquels justifient
d'ailleurs les aménagements que la réglementation CEMAC impose
à ce dernier dans le cadre de la lutte anti-blanchiment (TITRE II).
TITRE I : LA COUVERTURE DES
MECANISMES ET TECHNIQUES DU BLANCHIMENT PAR LES TECHNIQUES BANCAIRES
Le client d'une banque ne saurait en principe être un
mystère pour cette dernière. Selon les principes et pratiques qui
régissent la profession bancaire, une banque doit bien connaître
son client. Le client considère en général son banquier
comme un grand confident et un partenaire économique essentiel ;
celui-là consulte d'ailleurs celui-ci dans ses besoins d'investissement
et d'optimisation de ses placements : le banquier assure un devoir de
conseil au profit de son client, devoir qu'il ne peut en principe accomplir que
s'il a une connaissance parfaite de son client. Cette situation fait en
principe que les relations entre le banquier et son client se déroulent
dans la confiance et la transparence.
Cette transparence est en fait renforcée de nos jours
par l'informatique. En effet, la banque a su s'adapter à son
époque, par l'exploitation des technologies de pointe pour perfectionner
ses mécanismes et ses techniques. Ainsi aujourd'hui, plus qu'hier, la
relation existant entre une banque et ses clients est marquée par une
grande transparence. Les procédés informatiques permettent au
client d'obtenir quasi automatiquement ses relevés de compte et toutes
autres informations le concernant.
Cette confiance instaurée entre la banque et son
client, couplée à la capacité de s'adapter à
l'évolution technique pour améliorer la qualité de ses
services, fait de la banque un monde très dynamique. Ce dynamisme
bancaire est aussi pérennisé grâce à la tradition du
secret qui s'impose au banquier et dont le rayonnement sort toujours plus
renforcé après chaque innovation. Le client est toujours garanti
que ses confidences avec le banquier ne peuvent subir de fuite, ceci
grâce au secret bancaire qui lie le banquier en l'empêchant de
divulguer certaines informations sur lui. C'est toute la relation entre le
client et la banque qui est couverte par le secret.
Si ce secret est institué au départ au profit de
l'économie au nom du libéralisme, il est cependant à
constater que de nos jours, c'est plus le crime qui s'en sert, souvent
même au mépris des canons d'une économie viable. La
confidentialité qui découle de ce secret, rend la banque
attrayante et vulnérable au blanchiment. En effet, couplées
à l'ingéniosité des criminels, les modalités
particulières apportées aux techniques bancaires classiques ont
permis d'optimiser leur potentiel de confidentialité, les rendant ainsi
mieux aptes à servir la cause du blanchiment par l'exploitation
judicieuse des passerelles naturelles ou artificielles existant entre
celles-là et celui-ci (chapitre I). Par ailleurs, on note une
confidentialité accrue dans les services particuliers de la banque
(chapitre II).
CHAPITRE I : L'EXISTENCE DES PASSERELLES
ENTRE LES TECHNIQUES BANCAIRES ET LE BLANCHIMENT
Le blanchisseur est animé par le besoin d'un refuge
discret, secret et silencieux pour son butin. Il ne tolère pas le
moindre risque d'indiscrétion. Ce souci l'amène d'une part
à rechercher des techniques protégeant son anonymat et
l'existence de sa fortune (ou même la consistance de celle-ci) , et
d'autre part, il se laisse séduire par les territoires où les
législations bancaires sont suffisamment assouplies pour assurer une
pleine jouissance du secret bancaire. Ainsi, le blanchisseur recourt aux
banques offrant un traitement confidentiel des opérations bancaires
(section I), lesquelles sont souvent régies par une législation
négligente, voire laxiste (section II).
Section I - Le traitement
confidentiel de certaines opérations bancaires
Pour se cacher, les blanchisseurs, en général,
recourent à deux catégories de techniques toutes aussi
importantes l'une que l'autre. Le plus souvent, le choix de la technique
dépend de la législation du territoire sur lequel la banque se
trouve. Ainsi, les blanchisseurs entreprennent souvent, dans leurs relations
directes avec les banquiers, des techniques empêchant toute
identification efficace (paragraphe I) ou alors, ils choisissent de se servir
des intermédiaires pour s'adresser à ceux-ci. (Paragraphe II).
Paragraphe I -
L'utilisation des techniques empêchant une identification
efficace
Les blanchisseurs sont à ce niveau animés par
deux soucis majeurs : il faut passer `'incognito'', mais aussi, afin de ne
pas souvent attirer l'attention des autorités, il faut dissimuler la
vraie valeur de la fortune, voire même son origine.
Ce qui nous amène donc à analyser les techniques
protégeant l'identité du blanchisseur dans le rapport direct avec
la banque (A) et, celles rendant difficile la détermination de la
consistance du butin et même parfois de leur origine (B).
A - l'utilisation des
techniques protégeant l'identité du blanchisseur
Si le blanchisseur se laisse découvrir, il est
inexpérimenté, et il encourt de sérieux risques. Il doit
en principe entretenir un mystère sur sa personne, détourner
toute attention sur sa réalité même. Ceci est dû au
fait qu'il paraîtrait curieux en général de voir par
exemple figurer sur le compte d'une personne connue, un solde injustifié
économiquement. Alors, dans la pratique, ce danger est
écarté par l'exploitation des instruments du secret bancaire qui
sont les fameux comptes de pseudonymes (1) et, leur cousin, les comptes
à numéros (2).
1- L'emploi de
pseudonymes comme identifiant
Dans l'histoire, bien de gens, en proie aux difficultés
politiques ou judiciaires ont fait usage de pseudonymes. Selon le Dictionnaire,
Le Robert d'Aujourd'hui, un pseudonyme est un nom choisi par une
personne pour masquer son identité (dans les arts ou dans la
clandestinité). Pour ce qui concerne le blanchiment, il faut relever que
ces faux noms sont utilisés à des fins de clandestinité
malveillante.
En effet, les blanchisseurs n'hésitent pas dans leurs
rapports avec la banque, à exploiter toutes les vertus confidentielles
du secret bancaire pour demeurer inconnus aux yeux des enquêteurs. C'est
justement là un des obstacles majeurs à la lutte
anti-blanchiment. Car, pour être efficace, cette lutte a besoin que les
auteurs du délit de blanchiment soient identifiés,
retrouvés et punis.
L'utilisation des pseudonymes peut se faire par plusieurs
manières, le blanchisseur, au terme d'un entretien avec son banquier,
peut soit utiliser comme identifiant de son compte les initiales de son nom,
soit, il utilise un nom carrément imaginaire. L'illustration nous en est
donnée par l'affaire des goldens boys31(*). Il s'avère aussi que
des comptes d'un président de la sous région CEMAC ont
été découverts dans les paradis fiscaux avec comme
identifiant : Lille, Christophe...32(*). Bien souvent, au lieu de faux noms, les
blanchisseurs dissimulent leur identité à travers des
numéros.
2- L'utilisation des
chiffres comme identifiant
Le principe ici est relativement simple. L'anonymat n'est pas
absolu, en effet, dans la plupart des cas, la véritable identité
du titulaire du compte est connue des grands responsables de la banque. Dans
cette technique, la banque, au niveau le plus élevé, joue un
rôle actif, puisque, les blanchisseurs nécessitent son appui.
En général, le personnel de la banque traite
toutes les opérations courantes, sur ce compte, sous des codes,
composés de signes numériques. Ils ignorent le nom du client. La
mise en oeuvre de cette technique suppose qu'à la base, le client ne
subisse pas une procédure normale d'ouverture d'un compte, il traite
directement avec le directeur ou avec un fondé de pouvoir
spécialisé dans la gestion de pareils comptes. Le client ne
dépose pas sa signature au guichet33(*). En effet, « lorsque la banque
reçoit un virement au nom de son client, elle répond que le
bénéficiaire ne semble pas figurer sur le listing de ses clients
et que le virement n'est reçu que sous réserve de
vérification »34(*).
Cette attitude de la banque, le plus souvent, vise à
brouiller davantage les pistes afin que, même les enquêteurs qui
passeraient pour être des correspondants du client clandestin, ne
puissent réussir leur coup au premier instant. C'est là une fois
de plus la preuve que les blanchisseurs perfectionnent de plus en plus leurs
techniques. Ceci est aussi vrai pour les techniques concourrant à la
dissimulation de leur butin.
B - Techniques
permettant la dissimulation de la consistance et de la
provenance des fonds
La lutte contre le blanchiment n'est efficace qu'autant
qu'elle permet de priver les criminels des produits de leurs crimes. Le plus
souvent, ce qui attire l'attention des autorités sur la situation d'un
titulaire de compte, c'est le solde créditeur de son compte. Conscient
de ce fait, les criminels oeuvrent en vue de détruire ce risque.
Pour parvenir à échapper à l'attention
des autorités, et même à la vigilance des banques, les
blanchisseurs en général fragmentent leurs comptes bancaires.
Cette technique leur assure un double gain : D'une part, elle leur permet
d'échapper à l'obligation de déclaration du banquier. Et,
d'autre part, elle permet au blanchisseur de se servir de ces micros comptes
pour faire converger leurs soldes vers un compte plus sûr dans un paradis
fiscal. Dans l'affaire jurado35(*), l'auteur du blanchiment, avait ouvert plus
de cent soixante dix comptes bancaires pour distiller ses récoltes.
La détection de la provenance des capitaux devient plus
complexe lorsque l'auteur manipule les banques situées dans des Etats
différents mais appartenant à une même zone
monétaire comme dans la CEMAC. En effet, comme l'illustrent ces propos
tenus dans le cadre de l'Union Européenne à la veille de la mise
en circulation de l'Euro, « Avec l'avènement de la monnaie
unique, un outil de détection du blanchiment va disparaître,
puisqu'on n'aura plus d'idée sur la provenance géographique du
flux financier »36(*) ; la lutte contre le blanchiment de capitaux au
sein d'une union monétaire peut connaître des difficultés
particulières. Il va falloir ainsi pour rendre la lutte efficace miser
sur une grande coopération entre les services investis de la lutte.
L'efficacité de cette lutte est aussi souvent mise à mal par le
recours aux intermédiaires.
Paragraphe II -
La sollicitation des intermédiaires dans les rapports avec la
banque
La recherche de la confidentialité ne laisse souvent au
blanchisseur autre choix que celui de se servir d'un intermédiaire dans
ses rapports avec la banque. L'utilisation d'intermédiaires n'est pas un
fait extraordinaire en soi. Mais, c'est qu'en l'espèce, le blanchisseur
veille absolument à ce que son identité, voire son ombre ne plane
sur l'opération. Si la voie choisie exige que le blanchisseur se
présente à son banquier, alors il se présente comme
agissant pour le compte d'une autre personne.
Deux catégories d'intermédiaires sont
utilisées : on note d'une part des intermédiaires
réels (A) et d'autre part, ceux fictifs, créés juste
à des fins de blanchiment (B).
A- les
intermédiaires réels
Dans notre contexte, un intermédiaire réel,
c'est une personne physique ou morale dont l'existence juridique est certaine,
elle ne résulte d'aucun trucage. C'est seulement le but de son
intervention qui est inavoué. Ces intermédiaires peuvent
être soit des mandataires professionnels (1) ou occasionnels (2).
1 - Le recours
à des professionnels
La technique est souvent très juteuse pour les
blanchisseurs. Il s'agit en effet de recourir au conseil ou même à
l'ingénierie de certains professionnels mieux outillés pour faire
face aux obstacles juridiques mis en oeuvre dans le cadre de la lutte
anti-blanchiment. Cette technique est davantage plus rassurante si au surplus,
le professionnel est lui même tenu au secret. Dans la plupart des cas,
c'est même de ce secret que le blanchisseur veut jouir.
Le recours à des professionnels permet au blanchisseur
de courir le moins de risques possibles, car du fait de l'expérience du
professionnel requis et de ses connaissances en matières fiscales,
juridiques et financières, son intervention aura pour effet entre autres
de perfectionner le jeu de sorte qu'il soit plus assimilable à un
mécanisme normal37(*). C'est ainsi que dans son rapport en 1994 le GAFI a
souligné que : « des trafiquants de drogue
s'associent avec des professionnels de la finance, d'où des
méthodes de blanchiment de plus en plus
sophistiquées. »38(*).
Techniquement, le recours à ce procédé se
fait en général dans la phase première, celle du placement
puisqu'il faut en effet trouver des voies et moyens pour se débarrasser
des liquidités.
L'une des professions les plus sollicitées, c'est celle
des avocats. Dans leurs fonctions, ces derniers sont normalement souvent
amenés à prodiguer des conseils à leurs clients et
même surtout à les représenter et à gérer
leur patrimoine, tout en se gardant de révéler certaines
informations sur les personnes qu'ils représentent.
En effet, les criminels recherchent beaucoup
l'honorabilité de la profession d'avocat. Les avocats sont en
général le plus souvent sollicités dans les
opérations de trust et de fiducie. Ainsi, des patrimoines sont
confiés à l'avocat qui doit alors les administrer. C'est lui qui
doit, de ce fait être en contact avec la banque. Compte tenu de sa
profession, et de ce qu'il est normal qu'il soit par moment dépositaire
ou intermédiaire des biens issus des transactions où ses clients
sont parties ; ou alors du fait qu'il peut être
désigné séquestre, le montant de la transaction qu'il
effectue se trouvera presque toujours économiquement ou
professionnellement justifié.
D'autres professions sont aussi sollicitées, à
l'instar des courtiers, des intermédiaires financiers39(*), des maisons de commerces, ou
même des sociétés de bourses, car, on peut lire dans le
Rapport du GAFI de 1995 que « les preuves tangibles de
blanchiment à travers les sociétés de bourse sont rares,
mais l'on considère que ce fait tient plus à la difficulté
à repérer les activités de blanchiment dans ce secteur
qu'à leur éventuel caractère marginal ».
L'intervention des professionnels ayant permis au blanchisseur
d'infiltrer le système bancaire ou financier en général,
va encore servir dans la phase de l'empilage, car le professionnel commis va
ensuite faire converger les soldes des comptes qu'il a ouverts vers un autre
compte souvent alors ouvert au nom propre du blanchisseur ou à un nom
d'emprunt comme nous l'avons vu plus haut.
La tentative infructueuse de se servir de professionnel peut
décider le blanchisseur à se servir d'intermédiaires
occasionnels.
2- L'exploitation des
intermédiaires occasionnels
Le blanchisseur ne lésine sur aucun moyen. Il est
convaincu d'une chose, son salut passera par la banque. Il connaît la
banque, il connaît ses exigences, ses failles et ses tolérances.
Alors il mettra tout en oeuvre pour passer par elle, soit directement, soit
indirectement.
Le blanchisseur sait jouir des opportunités. Il se sert
parfois soit de la personnalité d'un individu, de sa
notoriété ou de son influence pour jouir de la complaisance des
banques ou pour la détourner de son obligation d'identification. Ainsi,
dans ses rapports avec la banque, qui est une des pièces
maîtresses dans le processus de lavage, le criminel va solliciter la
médiation d'une personne physique ou morale connue et paraissant
normalement comme pouvant manipuler la somme en cause.
La technique met souvent en scène un blanchisseur
agissant à travers un homme d'affaire connu de la place, habitué
à traiter des affaires portant sur des sommes considérables. Peu
importe qu'il doive supporter l'impôt sur ladite somme, car, ce qui
compte à terme, c'est le profit et la sécurité. Blanchir
de l'argent, c'est comme faire du commerce, éventuellement, on peut
supporter certaines charges comme des commissions occultes, mais et surtout, il
y'a un gain. Si ce dernier est largement supérieur aux charges, le but
estimé est atteint.
Dans la phase de l'empilage, l'homme d'affaire complice,
justifiera ses ordres de virement à l'étranger par l'idée
de prétendues commandes qu'il passe auprès de son fournisseur. Il
est aussi souvent fait usage d'une personnalité influente dans un pays.
En Afrique, en général, le trafic d'influence, bien que souvent
réprimé par des législations pénales, est
néanmoins légion. Le blanchisseur fera alors recours à un
haut fonctionnaire en face de qui le banquier intimidé ne pourra exercer
une procédure de contrôle normale.
L'autre technique opportune ou occasionnelle pour le
blanchisseur consiste à se servir d'un pseudo mandat. Dans ce cas, le
blanchisseur agissant pour son propre compte prétend agir pour le compte
d'une autre personne qu'il représente. Il peut ainsi se faire mandater
par des personnes réelles, seulement complices à
l'opération. Le blanchisseur ne reçoit en effet aucun ordre de
son prétendu mandant, sinon, il est son propre mandant. Sous cette
qualité, il peut alors ouvrir un ou plusieurs comptes
prétendument pour le compte de ses mandants.
Cette technique permet aussi au blanchisseur qui a
démultiplié ses comptes bancaires d'y faire des
dépôts moins suspects quant à leurs montants, donc
d'échapper à la procédure de déclaration de
soupçon obligatoire parce qu'il aura pris le soin de faire des
transactions dont le montant est en dessous du seuil de déclaration.
Une fois ces comptes créés et fournis, il peut
alors se faire délivrer auprès de ses complices des mandats ou
des ordres de virements à partir desquels, la banque s'exécutera
et, ainsi, tous les soldes des comptes rejoindront un lieu sûr, bien
partis pour la suite du parcours. Une illustration de l'utilisation de faux
mandats est apportée par l'affaire jurado, où l'auteur
faisait ouvrir ses propres comptes avec une procuration que lui donnait un
vieux couple, ex beaux parents de son principal correspondant.40(*) Il peut même arriver que
l'intermédiaire choisi, soit purement fictif.
B - Les intermédiaires
fictifs
Dans notre contexte, il s'agit d'intermédiaires qui
n'existent que dans l'illusion créée par les blanchisseurs. Il
s'agit en effet de faire croire qu'une société existe ici ou
là et que c'est en son nom que ces opérations sont
exécutées. Ici, le blanchisseur ou son conseiller est prêt
à faire toute sorte de montage pour tromper tout regard curieux ou
inquisiteur. Pour l'exemple d'une société, des faux statuts
peuvent être dressés, des faux bilans, des faux comptes de
résultats... Tout ceci pour asseoir l'intime conviction du banquier que
l'opération se trouve économiquement justifiée. Le
scénario fait appel aux techniques biens connus dans le domaine que sont
les sociétés holding ou les sociétés
écrans.
Parlant de holding, il s'agit en effet, d'un type de
société que bien de législations modernes consacrent ou
n'interdisent pas (elles sont désormais possibles en OHADA)41(*). Ce sont en effet des
sociétés dont l'activité consiste à prendre et
à gérer des participations dans d'autres sociétés,
sans en général avoir d'activités commerciales. La
principale activité d'une holding n'est pas l'investissement, mais, la
gestion de ses filiales. La forme des sociétés holding s'est
surtout développée avec la mondialisation pour améliorer
la gestion des groupes internationaux ou diversifiés, regroupant des
entreprises n'ayant pas des liens économiques apparents42(*).
Les holdings sont aussi souvent utilisées pour
dissimuler l'identité des vrais propriétaires des fonds qu'elles
manient. Pour préserver l'anonymat de vrais propriétaires de
fonds, et des entités juridiques manipulées, il suffit à
la holding d'utiliser une convention de trust, ou, qu'elle émette des
actions au porteur.
A des fins de blanchiment, une holding peut être
implantée dans quasiment n'importe quel pays, selon les besoins et les
moyens de ses dirigeants afin d'assurer le transfert des fonds et l'anonymat
des comptes bancaires ainsi détenus.
Une convention de trust est en général
définie comme la relation existant entre des personnes et des biens par
laquelle ces biens sont remis à une personne ( le trustee) qui les
contrôlera et les gérera au profit d'une ou d'autres personnes (
bénéficiaires). Le plus souvent, dans le cadre d'une
opération de blanchiment, le constituant peut en même temps
être le bénéficiaire, le trustee n'étant en pratique
qu'un intermédiaire entre le constituant et lui-même43(*).
L'utilisation par la holding des actions au porteur la
dispensera de l'obligation de fournir les informations sur leur
propriétaire, car, de par leur nature, les actions au porteur sont des
titres ou valeurs ne comportant pas le nom de leur titulaire, et du fait de
leur négociabilité par simple tradition, il est normal que la
holding déclare ne pas maîtriser l'identité de l'actuel
porteur du titre. On voit à ce niveau comment le blanchiment tire parti
des institutions licites.
Les sociétés-écrans quant à elles
sont des entités qui n'existent pas effectivement dans la
réalité, même si le plus souvent, l'existence juridique ne
fait pas de doute. Elles permettent au blanchisseur de justifier sa richesse en
déclarant agir pour le compte d'une société fictive. En
effet, dans ses rapports avec la banque, le blanchisseur ou son conseiller
n'ouvre des comptes qu'au nom des entreprises qu'ils ont eux-mêmes
créés dans leur imaginaire.
Toutefois, il faudra remarquer que ces techniques ne
fonctionnent parfaitement que si les autorités et les banques, par leurs
comportements, leur sont favorables. C'est généralement le cas,
quand ces derniers font preuve d'une indolence criarde dans leur devoir
d'organiser et de respecter rigoureusement la réglementation
bancaire.
Section II - La
négligence coupable de certains acteurs
Le développement du blanchiment de capitaux et ses
rapports privilégiés avec les institutions financières ne
sont pas seulement dus à l'ingénierie et à
l'efficacité des criminels. L'analyse fait souvent ressortir que, de
manière active ou passive, ceux qui, en principe, ont vocation à
veiller sur l'intégrité du système financier contribuent
considérablement au succès du blanchiment. En effet, dans les
pays où le blanchiment d'argent est légion, on note une
réglementation bancaire insuffisante, voire laxiste (Paragraphe. I),
laquelle s'illustre par la complicité des banquiers envers les criminels
(Paragraphe II).
Paragraphe I -
Le laxisme de la réglementation bancaire dans les paradis
fiscaux
Les paradis fiscaux sont le plus souvent le fait de certains
pays qui, en général, pour attirer les capitaux étrangers,
ont une fiscalité plus favorable que celle du reste du monde. Leurs
principales caractéristiques sont entre autres : un faible taux
d'imposition, l'absence d'informations fiscales vis-à-vis de
l'extérieur, un contrôle des changes inexistant et une pratique
poussée du secret bancaire44(*). Tout ceci fait qu'on peut conclure à
l'insuffisance de la supervision bancaire. Cette insuffisance est en
soi-même de nature à nourrir les activités de
blanchiment45(*). On sait
par ailleurs que les blanchisseurs sont permanemment en quête d'anonymat
et de faille réglementaire, faiblesses naturellement inhérentes
à une politique économique fortement axée sur l'attraction
des investissements étrangers (A) protégés par un secret
bancaire sacralisé (B).
A - L'attraction des
sociétés et activités ``offshore''
La pratique '`offshore'' est l'une des pièces
maîtresses de la nébuleuse des paradis fiscaux. Les centres
``offshore'' sont en effet des territoires où des non-résidents
ont la possibilité de créer des sociétés et
d'utiliser les services financiers offerts par leurs activités à
l'extérieur de ce territoire. Ici, les entreprises qui s'installent sous
ce régime ne peuvent en effet réaliser des
bénéfices qu'à l'extérieur du territoire où
elles sont installées, elles jouissent ainsi des avantages
fiscaux46(*).
En soi-même, les centres ``offshore'' sont un
élément du système économique mondial. Leur
croissance et leur diversification sont dues à la mondialisation du
commerce, de l'industrie et de l'investissement. Pendant que certains centres
``offshore'' mettent en place des mesures de supervision bancaire et de
contrôle correspondantes, d'autres proposent le secret bancaire, la
confidentialité, l'anonymat et les possibilités d'évasion
fiscale tout en protégeant leurs investisseurs de la coopération
internationale en matière pénale. C'est cette dernière
catégorie qui joue en permanence la carte du blanchiment ; car de
par ses offres alléchantes, elle assure une liberté absolue des
opérations de transfert de fonds et capitaux (1) et n'assume qu'avec
déficience le contrôle sur les opérations de change (2).
1 - La non
surveillance des opérations de transfert de fonds et de
capitaux
L'un des éléments clés du blanchiment,
c'est le transfert des fonds. C'est là même l'expression de son
caractère international. Il est souvent utilisé dans la phase de
l'empilage pour déplacer les fonds afin de troubler leurs traces ;
dans la dernière phase -celle de l'intégration-, il est
utilisé pour rapatrier les fonds blanchis. Ainsi, lutter efficacement
contre le blanchiment, c'est aussi maîtriser ou du moins bien
réglementer les opérations de transferts effectuées sur
son sol, pour l'Etat concerné.
Lorsqu'un Etat ferme les yeux volontairement sur ces
opérations, on peut être enclin à le classer dans la
catégorie des paradis fiscaux47(*). Comme le souligne un auteur, « Il ne
peut y avoir de réponse au blanchiment à moins de porter atteinte
au minimum - et dans des conditions vraiment efficaces - à deux des
principaux mécanismes de la libéralisation financière, que
sont, le secret bancaire et le transfert de fonds d'un pays à un autre
sans notification et justification de la transaction »48(*).
Ce qui importe pour certains Etats, c'est l'investissement que
leur pays reçoit - généralement dans les pays sous
développés -, et non la provenance des fonds investis49(*). C'est sans doute cela qui
justifie la liberté appliquée au régime de cette
activité qui facilite en général de manière
considérable les mouvements de capitaux en faveur de l'investissement
dans le Sud. Mais aussi, les Etats ne doivent pas oublier qu'il s'agit
là d'un instrument d'une très grande importance au service des
blanchisseurs ; d'après les chiffres avancés par certains,
« ... le cinquième de l'ensemble des transferts
électroniques d'argent serait lié au blanchiment
d'argent. »50(*).
En Zone CEMAC, la Convention qui lie la BEAC au Trésor
français consacre une libre transférabilité51(*) du Franc CFA et une garantie
de rachat total des billets de banques émis par la BEAC et circulant
hors de la zone d'émission. Cette situation juridique a fait penser
que : « le mode même de fonctionnement du
système monétaire sous-régional (Afrique Centrale)
jusqu'en 1993, constitue un trait caractéristique fondamental d'une
émergence `'légale'' du blanchiment qui transforme la zone en
passoire monétaire servant de `'pressoir financier'' aux
criminels'' »52(*). Les statistiques tirées des rapports
d'activité de la BEAC indique des chiffres qui sont
particulièrement accablants pour la sous région, en
effet, « le transport illicite des billets de banque (CFA)
hors de la zone BEAC entre 1981 et 1998 fait état d'une sortie de
2 991 milliards de FCFA qui représente 185% de la masse
monétaire en circulation dans la zone BEAC au 30 juin 1998 (masse
monétaire zone BEAC au 30 juin 1998 : 1 615 milliards de
FCFA). Cette forte hémorragie financière qui représente
près de deux fois la masse monétaire en circulation aujourd'hui
en Afrique centrale, est mesurée par le montant des billets
rachetés auprès de la Banque de France pour un montant de
1 724 milliards de FCFA et auprès de la BCEAO pour un montant de
1 267 milliards de FCFA ».53(*)
En effet les criminels n'hésitent plus à
exploiter les vertus de ce qu'il est convenu, d'appeler le monde sans
barrières - ni naturelles, ni juridiques efficaces -.Ainsi, jouissant de
la complaisance de certains Etats, négligents dans leurs obligations de
réglementer les transferts transnationaux sur leurs territoires, les
blanchisseurs vont combiner des transferts rapides, en grandes parties anonymes
et surtout vers des destinations protectrices. Le blanchiment d'argent, pour
être réussi, a besoin que le butin circule dans le réseau
bancaire, pour perdre sa trace et se légitimer. En plus des transferts,
l'autre instrument utilisé par les blanchisseurs c'est le change dont la
moindre des failles dans le système de contrôle leur est
profitable.
2 - La
déficience dans le contrôle des changes
En général, le change peut être
défini comme la conversion d'une monnaie contre une autre. Il peut avoir
pour objet une monnaie métallique ou fiduciaire ou des valeurs
mobilières. En principe, il s'agit d'une activité très
contrôlée pour des raisons de stabilité
monétaire54(*).
Le change est techniquement très important dans un
processus de blanchiment, car, l'une des grandes opérations ou
étapes du blanchiment est celle consistant en la dissimulation de
l'origine de l'argent. Le souci peut être de rendre le butin moins
suspect en changeant les petites coupures - trop encombrantes quand la somme
est importante - en grosses coupures. Le change est ainsi utilisé
régulièrement par les blanchisseurs.
Cependant, le change est aussi une opération importante
pour l'économie. En effet, il permet aux ressortissants de tous les
Etats de pouvoir commercer entre eux, en convertissant leurs monnaies
respectives grâce au taux de change, d'ailleurs la fonction principale
des marchés des changes est supposée être de faciliter le
règlement des échanges commerciaux55(*). C'est aussi l'expression de
la liberté de se déplacer, car permettant par exemple au touriste
- à la sortie de son Etat ou alors une fois dans l'Etat d'accueil - de
convertir sa monnaie d'origine en celle en cours dans le pays d'accueil.
Le secteur des changes dans le cadre de la lutte
anti-blanchiment doit être sérieusement contrôlé, en
commençant par l'accès à la profession. En effet, comme le
constate le GAFI, « toute entreprise peut dans le cadre de ses
activités principales, effectuer certaines opérations
financières. L'offre des services de change par les agences de voyage en
constitue un exemple, l'absence des mesures dans ce domaine constituerait dans
le dispositif de lutte anti-blanchiment de capitaux un vide qui pourrait
être exploité par les criminels»56(*).
Il est ainsi à noter que les plus anciennes et les plus
banales des institutions non bancaires intervenant dans le processus de
blanchiment sont les bureaux de change qui convertissent les devises57(*). Dans la pratique,
l'opération de conversion des devises ne résout pas le
problème de l'argent liquide, mais, une première transformation a
eu lieu, rendant la détection de l'origine des fonds déjà
plus difficile. La conversion opérée par voie de change pose
ainsi un problème analogue à celui de la détection de
l'origine des fonds dans une zone monétaire à l'instar de la
CEMAC.
Ainsi, l'accès à cette profession doit
être suffisamment contrôlé. Si les îles et paradis
fiscaux tels Aruba et Liechtenstein attirent le plus des capitaux à
blanchir c'est aussi et surtout parce que les opérations de changes y
sont libres comme le vent58(*). Le plus souvent même, ces bureaux de changes
ne sont pas seulement utilisés au passage par les blanchisseurs, ils en
font partie, ils en constituent souvent un maillon essentiel, comme nous
l'illustre, l'affaire de la société basco landaise des
changes59(*).
Ne pas contrôler les changes, c'est accepter du moins,
passivement de tricher avec le blanchiment, pour un Etat. Le rôle des
bureaux de change dans le processus de blanchiment dans les paradis fiscaux et
ailleurs est dû à la déréglementation et à la
libéralisation financières, lesquelles ont également
permis à d'autres institutions non bancaires d'effectuer des
opérations de banques sans pour autant être soumises à une
réglementation dont la rigueur équivaut à celle des
standards d'une réglementation bancaire. Ainsi, il devient difficile de
maîtriser l'activité de blanchiment, quand on ne maîtrise
pas tous ceux qui peuvent intervenir dans son processus, et pourtant le GAFI
constate que « les changeurs manuels jouent un rôle
significatif au stade du placement »60(*). L'argent converti en monnaie
nationale peut facilement être réceptionné en banque sans
trop de questions. Il est à préciser que ces changeurs, du fait
qu'ils ne sont pas regardant sur les opérations qu'ils réalisent,
contribuent à renforcer les obstacles à la lutte
anti-blanchiment, aux cotés d'un secret bancaire déjà
sacralisé dans certains Etats.
B - La sacralisation
du secret bancaire
L'argent n'aime pas le bruit. Certains ont même pu
penser que le maniement de l'argent revêt le caractère d'un
sacrement : le garder, l'accueillir, le compter, thésauriser,
spéculer, receler, sont autant d'activités investies d'une
majesté quasi ontologique qu'aucune parole ne doit venir souiller, et,
qui s'accomplissent dans le silence et le recueillement. Quiconque commet le
péché de trop en parler le désacralise. Un tel
sacrilège est logiquement puni par la loi.61(*)
Ces mots résument en quelque sorte la morale du
banquier suisse, mais, cette morale est aussi celle en vigueur dans bon nombre
de pays, notamment ceux situés dans les paradis fiscaux. Les Etats
modernes, soucieux de leur santé politique, économique et
financière n'hésitent pas en général à
réglementer leur secret bancaire dans le sens de son assouplissement.
Cependant d'autres ont maintenu le statu quo, sinon radicalisé leur
secret bancaire.
Comme nous l'avons relevé tout le long de notre
étude, le banquier est le partenaire indispensable du blanchisseur. Ce
dernier, dans la plupart des temps, peut faire des montages sophistiqués
pour détourner l'attention du banquier ou pour susciter sa complaisance,
mais, paradoxalement, certains Etats proposent plutôt une
confidentialité radicale aux `'investisseurs'' afin de les attirer.
La radicalisation ou la sacralisation du secret bancaire est
l'expression d'une négligence coupable des responsables politiques et
économiques de l'Etat concerné en ce qu'ils acceptent à
travers l'instrument du secret bancaire de jouer un rôle actif au
théâtre du blanchiment d'argent. Ce choix, en
général n'est pas la fin en soi. En effet, certains paradis
fiscaux se servent ainsi du secteur bancaire et touristique pour
résorber leur problème de chômage. En Suisse par exemple,
le secteur bancaire emploie 107 000 personnes62(*).
La Suisse, l'une des meilleures places financières au
monde assure une grande séduction avec son secret bancaire, lequel
empêche de mener toute enquête efficace sur les fortunes des
dictateurs, même après leur mort : le secret bancaire suisse
survit même au client, c'est pourquoi on peut dire qu'il est
sacré. Grâce au secret bancaire, la Suisse gère environ 35%
de la fortune privée mondiale qui génèrent 11% de son
produit intérieur brut63(*).
On connaît bien les appétits des blanchisseurs
pour le secret bancaire, qu'ils soient criminels appartenant aux bandes
organisées, ou alors opérant presque seul comme des dictateurs,
tous affectionnent le secret bancaire. En effet, la Suisse détient des
comptes de presque tous les dictateurs du monde, comme le note encore Jean
ZIEGLER, l'argent de la corruption et du pillage des Etats du tiers-monde par
les dictateurs et les élites autochtones est la
« deuxième grande source de la fabuleuse richesse du
paradis helvétique ». Nous nous souvenons encore à
cet effet des affaires des fortunes de SANI ABACHA ou de MOBUTU. Après
la mort de ces dictateurs, leurs fortunes sont devenues
irrécupérables. Plus que pour sa neutralité politique,
tout le monde, y compris les banquiers eux-mêmes, admet qu'environ 80% de
ces `'super clients'' confient leurs capitaux aux établissements
helvétiques pour des raisons de confidentialité. Ces derniers
étant rassurés que malgré le caractère illicite de
leurs fortunes, aucune enquête ne pourrait efficacement conduire à
leur rapatriement, aucune, surtout quand on s'exerce à bien saisir le
sens de cette affirmation du ministre fédéral helvétique
des finances : « le secret bancaire n'est pas
négociable. »64(*).
Certains Etats sont allés jusqu'à ériger
le secret bancaire au rang de droit de la personne dont la violation
signifierait ouvrir la voie à l'Etat totalitaire. On peut donc penser
qu'ainsi, il jouirait sensiblement de la même protection que celle que
bénéficie le droit à la vie. Ainsi, comme la vie, le
secret bancaire est intouchable et sacré. Peu importe pour ces Etats
qu'il serve les intérêts du blanchiment ou d'autres crimes, leurs
solutions se trouvent ailleurs et non dans un refuge protégé par
les dieux de la banque. La lutte contre le blanchiment d'argent est presque
impossible sans un secret bancaire `'négociable''.
La sacralisation du secret bancaire, dans les Etats qui en
font usage, passe par deux éléments majeurs, tous
justifiés par l'idée de la sphère privée -
sphère où l'individu est totalement libre de faire ce qu'il veut
-.
D'une part, il y a le droit pour le client de demeurer
discret, de ne pas déclarer sa véritable identité, de ne
pas être tenu de justifier économiquement sa fortune. Il jouit
dans l'exercice de ce droit des comptes anonymes, à numéros ou
à pseudonymes pour masquer sa vraie identité. Ainsi, un code
anonyme et confidentiel assure la communication avec sa banque.
D'autre part, il y'a l'obligation absolue pour le banquier de
garder le plus grand silence sur les opérations effectuées sur le
compte du client, la violation, comparée à un sacrilège
est sévèrement punie.
Cependant, même dans des Etats qui ont essayé de
réglementer le secteur bancaire, il arrive souvent de constater que les
banques et leurs agents se laissent engluer par les criminels avec qui ils
forment souvent un syndicat soudé par une complicité sans foi ni
loi.
Paragraphe II -
L'éventuelle complicité des banques et de leurs
agents
Il est en général pensable que le banquier est
un homme qui mérite protection, qu'il est utilisé dans le
processus de blanchiment malgré lui, qu'il est toujours victime d'un jeu
qu'il n'a pas vu construire et dont il n'en subit que les effets. Sans
être totalement faux, il faut toutefois reconnaître que la banque,
souvent participe aussi activement au processus de blanchiment en tirant son
épingle du jeu au passage (A). Par ailleurs, sans inscrire le
blanchiment dans leur agenda commercial, certaines banques se trouvent
impliquées du fait d'une négligence de leurs agents, due la
plupart des temps à leur faible culture bancaire (B).
A - La technique de
prélèvement des pourcentages
Bien de banques, indépendamment du pays de leur
siège, sont souvent impliquées dans le blanchiment avec un tel
degré qu'on se demande comment on a bien pu leur reconnaître une
certaine honorabilité.65(*) Les banques qui participent au blanchiment sont,
qualifiées de `'sympathiques'' par les bénéficiaires de
leurs services.
Ces banques acceptent ainsi d'aider les criminels en leur
fournissant leurs services, leurs conseils et leurs expertises. Dans
l'affaire jurado par exemple, l'auteur du délit soulignait que
l'une des plus grandes banques françaises lui avait proposé la
possibilité de créer pour son compte des sociétés
dans les îles anglo-normandes (GUERNESEY et JERSEY) sur lesquels les
fonds blanchis seraient placés, la banque lui ayant fourni tous les
documents nécessaires pour l'opération66(*). A partir de cet exemple on
peut aisément comprendre que les banques, se trouveraient
derrière les grands montages financiers aux fins de blanchiment.
De même dans l'affaire Casablanca, les
blanchisseurs colombiens sollicitaient `'naturellement'' les services des
banques colombiennes dans la phase de placement, ces dernières
acceptaient de jouer le jeu, en contre partie, elles devaient prélever
sur les sommes ainsi perçues, à titre de frais un
intérêt de 1% (un pour cent). Ceci démontre bel et bien,
que, plus qu'on ne pense, les banques interviennent très activement dans
le blanchiment.
Le problème n'est pas l'apanage des pays du Sud ou des
paradis fiscaux `'déclarés''. En effet, une enquête du
Sénat américain a bien mis en évidence le rôle
souvent très actif que joueraient certaines banques occidentales dans le
processus de blanchiment. Nous retiendrons beaucoup plus le cas qui concerne la
sous région CEMAC. Cette étude dont des extraits ont
été publiés au journal `'L'EXPRESS'' révèle
que des banques américaines, aideraient un chef d'Etat de la sous
région à blanchir les fonds détournés dans son
pays. La même étude précise que les services de cette
banque ne seraient pas gratuits, au contraire, elle percevrait, la somme d'un
million de dollars par an à son client, pour services ainsi
rendus.67(*) En
général, les experts estiment qu'une banque active dans le
blanchiment perçoit une commission de 10 à 40% des sommes
recyclées.
Avec tous ces exemples suscités, on peut partager
l'indignation d'un panéliste de la Conférence Internationale sur
le blanchiment d'argent : « Si on considère le
blanchiment d'argent effectué dans le cadre d'activités
``offshore'', l'argent doit bien finir par arriver quelque part, qui fait
circuler cet argent ? Des banquiers... »68(*) qui, dans la plupart des
cas, travaillent dans l'ignorance des règles qui gouvernent leur
profession.
B - La faible culture
bancaire de certains agents de banques
La profession bancaire est une profession qui doit être
régie par des dispositions rigoureuses et dont le respect scrupuleux est
facteur de préservation du milieu contre l'infiltration des criminels.
L'agent de banque doit être rigoureusement formé69(*) à la déontologie
de sa profession et avoir une maîtrise considérable de ses
obligations professionnelles. Ainsi, l'agent de banque doit en principe
être suffisamment informé des législations relatives
à sa profession. Cependant, dans la pratique, on constate que l'un des
facteurs de l'infiltration du système bancaire par le blanchiment, c'est
la déficience professionnelle des agents employés. C'est
généralement pourquoi on exige que le recrutement des personnels
et agents des établissements financiers se fassent selon des
critères exigeants, permettant sûrement de s'assurer que ceux-ci
comprendront bien les implications de leur métier et en respecteraient
la déontologie.
L'insuffisance professionnelle peut gravement servir les
causes du blanchiment. Un agent pour qui toute opération est toujours
normale, quelle qu'en soit sa banalité ou son extravagance est une
menace pour le système anti-blanchiment. Il en est ainsi, d'un agent,
qui n'émet aucun doute quand un client fait subitement un
dépôt d'une somme très importante alors qu'il n'en a pas
l'habitude.
Certains agents, sous prétexte d'un respect à la
lettre des règles déontologiques de leur profession ignorent
souvent de se poser de bonnes questions en fonction des situations dans
lesquelles ils se trouvent avec un client.
Le problème de la culture professionnelle bancaire est
accentué par la déréglementation et la
libéralisation financières que nous avons soulignées plus
haut. Des opérations des banques sont effectuées par des
personnes qui ne sont pas soumises à la déontologie bancaire. Il
faut ainsi mettre fin à ce parallélisme, afin de pouvoir unifier
le contrôle des opérations bancaires avec un corps de
règles unique, et une déontologie unique, ou alors, on impose
à toutes ces structures le même régime, surtout celui
découlant de la lutte anti-blanchiment en matière de secret
bancaire.
La faible culture bancaire des agents de banques est une
épine sérieuse dans les pieds du dispositif anti-blanchiment. Un
agent qui ne sait que garder silence et s'exercer à la furtivité,
est un danger pour la lutte anti-blanchiment, car, en agissant ainsi, il peut
être en train de servir les intérêts d'un criminel en se
gardant de toute révélation.
Il y a lieu, à ce niveau de constater que les criminels
par leurs imaginations, savent pertinemment exploiter à leurs bas
avantages les vertus des services bancaires , souvent à l'insu des
autorités et des établissements de crédit, et parfois avec
leur bénédiction ou leur complaisance. Cette situation est
d'autant plus critique qu'elle perpétue le mal, qui comme nous l'avons
vu, n'épargne aucune région au monde, encore moins la
CEMAC70(*).
Cette situation est encore rendue plus difficile, quand
à l'imagination des criminels, se joignent des difficultés
techniques et souvent même juridiques, empêchant de contrôler
sérieusement les activités d'un client au sein d'une banque,
c'est le problème de la confidentialité dans les services
particuliers de la banque.
CHAPITRE II : LE RENFORCEMENT DE LA
CONFIDENTIALITE DANS LES SERVICES PARTICULIERS DE LA BANQUE
Il a été souligné que les blanchisseurs
sollicitent la banque plus pour sa confidentialité que pour tout autre
motif. En allant en banque, c'est en effet moins l'envie de fructifier sa
fortune par le jeu des intérêts sur épargne, encore moins
la peur d'être volé qui motivent le criminel ; mais, c'est
dans le souci de faire reposer son butin loin de tout regard curieux,
inquisiteur et frustrant. Cette psychologie va donc disposer le blanchisseur
à être à l'affût de tout mécanisme
satisfaisant au maximum ce souci. Si dans les cas étudiés dans le
chapitre précédent, le banquier pouvait non seulement, à
cause de son contact physique avec son client mieux l'identifier ; avec
les cyberservices et téléservices71(*) de la banque, ce contact physique s'éclipse.
De plus, les criminels essaient à leur tour de jouir des vertus des
protections diplomatiques et des services tels les coffres-forts en ce que les
pouvoirs du `'banquier-bailleur'' sont limités.
L'étude de ce chapitre sera ainsi axée sur deux
principaux points à savoir, la question de l'identification des clients
dans les cyberservices de la banque (SECTION I), et les limites juridiques au
contrôle efficace de certaines opérations bancaires (SECTION
II).
SECTION I - La
question de l'identification des clients dans les cyberservices de la
banque
Le développement des services bancaires est aujourd'hui
aussi dû pour une part considérable aux technologies de
l'information et de la communication. De plus en plus notre continent
s'approprie ces outils de développement. Il est par ailleurs devenu
courant que les établissements de crédit au sein de la CEMAC
offrent des services bancaires par téléphone, Internet, etc.
L'apport de ces technologies dans le domaine bancaire est
considérable. La simplification des procédures, l'obtention
automatique des relevés de compte le démontrent. De plus,
certains soutiennent que ces technologies offrent un éventail
d'instruments facilitant la lutte anti-blanchiment. Par exemple, grâce
à l'adresse `'Internet protocole'' et celui du serveur de messagerie, on
a pu dénicher l'auteur du virus informatique `'I LOVE YOU''72(*).
Mais, à la réalité, ces prouesses
risquent de n'être que la face visible de l'iceberg73(*). L'analyse, comme nous allons
le voir, révèle qu'il est presque certain que, appliqué
dans le domaine bancaire, ces technologies facilitent plus le blanchiment que
sa détection. Car, la science de ces technologies porte encore en elle
des failles, lesquelles sont bien volontiers utilisées par les
criminels, pour agir `'incognito'' grâce à la toile mondiale
qu'est Internet. Ainsi que nous allons le voir dans les développements
qui vont suivre, les circonstances qui entourent l'utilisation des
cyberservices de la banque rendent difficile l'identification du client
(PARAGRAPHE I). Ces difficultés s'ajoutent à la furtivité
des opérations sur Internet qui empêche de mener avec
efficacité les opérations de traçabilité
(PARAGRAPHE II).
Paragraphe I -
Les difficultés d'identification des `'cyber-clients74(*)'' dans leurs rapports avec la
banque
Identifier un client, c'est une étape capitale dans la
procédure anti-blanchiment. Il faut en effet, déterminer l'auteur
du délit afin de lui faire supporter les conséquences de son
acte. Comme on l'a vu, si dans les procédés empêchant son
identification, le client devait solliciter l'appui de la banque, ou alors
devait nourrir son sens d'imagination pour concevoir des artifices afin de
créer l'illusion, dans les cyberservices, ces difficultés
d'identification semblent être inhérentes même au
système et au procédé employés. Quelle que soit la
technique employée, un préalable est presque toujours acquis,
surtout au moment de l'utilisation du service : c'est l'existence d'une
distance entre le client et la banque (A). En plus, le client jouit d'une
totale liberté dans l'utilisation de ces services (B).
A - L'existence d'une
distance entre la banque et son client
La banque classique, c'est un peu comme une maison avec une
guérite où on identifie les visiteurs avant de leur ouvrir ses
portes. En effet, un établissement bancaire reçoit en principe
ses clients au guichet qu'elle aménage, à travers laquelle elle
est en contact physique avec le client, vérifie la conformité
entre ses pièces d'identité avec sa physionomie, vérifie
aussi sa signature. Avec ce système, on peut presque soutenir qu'avant
de servir un client, la banque est à même de pouvoir faire son
portrait physique du moins facial. Le guichet permet à la banque
d'assurer un contrôle sur ses clients avant de les servir :
S'assurer par exemple que l'instruction émane bien du donneur d'ordre,
ce qui évite à la banque de courir le risque de recommencer un
paiement du fait d'une erreur. Ce dispositif profite aussi aux autorités
tant fiscales que pénales dans le cadre de leurs éventuelles
enquêtes.
Avec le temps, cette vision des choses ne satisfait plus les
exigences du commerce international, victime ou acteur d'une mondialisation
exigeant le décloisonnement des Etats et l'ouverture des
frontières. De plus malgré son aspect sécurisant, cette
vision n'est plus adaptée aux besoins des commerçants et autres
clients de la banque qui de plus en plus, exigent de leur banque une
disponibilité permanente.
Dans ce nouveau contexte, il est devenu très difficile
de toujours revenir à son banquier pour décaisser la somme
nécessitée pour une affaire, de plus le transport physique de
l'argent, non seulement encombrant, est aussi très risquant.
La révolution commence sans doute avec la carte de
crédit qui est un instrument permettant à son détenteur de
créditer les achats de biens et services qu'il effectue auprès de
certains commerçants disposant d'un terminal adéquat. Si, au
départ ces cartes ne sont émises que dans un réseau de
diffusion restreint, de nos jours, celles émises sont pour la plupart
universelles, utilisables partout75(*). Le mode de fonctionnement de cette carte
témoigne de son utilité pratique.
La carte dorénavant n'est plus seulement
utilisée à travers les terminaux électroniques ou
magnétiques placés dans des magasins. Mais, elle est
utilisée dans le commerce électronique grâce à
Internet. S'il est presque évident de soutenir que le détenteur
d'une carte de crédit est identifié au moment de l'acquisition de
cette carte, il faut cependant reconnaître qu'à deux niveaux,
cette identification peut être truquée. D'une part, de plus en
plus, des détaillants acceptent de revendre ces cartes, alors, si ces
détaillants ne sont pas soumis à l'obligation d'identification
ça devient très dangereux. D'autre part, il est à noter
que puisque l'utilisation de cette carte se fait loin des yeux du banquier
émetteur, cette distance peut servir à un criminel, en ce que
celui-ci peut confier l'achat d'une carte de crédit à une
personne qui la lui remettra ; donc, l'achat de la carte sera fait avec le
produit d'un crime, et la carte en définitive sera utilisée par
le blanchisseur. L'identification, si elle ne peut être effectuée
qu'à l'entrée en relation entre la banque et le client, demeure
défaillante.
A coté des cartes de crédit, on note de plus en
plus des sites Internet spécialisés dans les opérations
bancaires, proposant même l'ouverture des comptes et leur gestion
entièrement possibles sur le réseau. C'est ici le maximum de
confidentialité et d'anonymat qui est de fait garanti au client. Les
procédures d'ouvertures de pareils comptes permettent certes
d'identifier le client, mais sans garantie fiable d'authenticité des
informations que le client donnera sur son identité, car comme le
constate un auteur « Le client a la faculté de fait de ne
pas décliner sa véritable
identité »76(*). En effet, un client se rend sur Internet où
des publicités très séduisantes abondent77(*), suit les instructions, ouvre
un compte, reçoit une notification d'ouverture de compte, effectue son
premier versement et peut désormais effectuer des dépôts,
des virements, des retraits, et bien d'autres opérations possibles via
un compte bancaire classique. On imagine aisément comment il serait
loisible à un criminel d'utiliser sans gène un pareil service.
L'identification peut être facilement truquée du
fait de l'invisibilité des interlocuteurs78(*). Ceci justifierait aussi et
surtout pourquoi la banque sur Internet draine de plus en plus des clients et
adeptes comme le signale le GAFI qui prenait la Suède à titre
d'exemple en constatant que : « une des plus grandes banques du
pays compte désormais 100 000 clients ayant un compte sur
Internet »79(*). Pendant le fonctionnement d'un compte sur Internet,
des difficultés d'identification efficace peuvent se
révéler tout en favorisant la cybercriminalité. Il peut
ainsi s'agir des cas de fraude ou même d'une collusion entre une personne
apparemment titulaire du compte au moment de l'ouverture, agissant sous le
régime de prête-nom80(*), et une autre, blanchisseur et vrai
propriétaire en retrait au moment de l'ouverture du compte.
L'un des grands services de la banque à distance de nos
jours, c'est le porte-monnaie électronique81(*) dont le premier modèle
a été lancé en zone CEMAC en 2004 par `'Afriland First
Bank Cameroun82(*)''.
Même si les experts du GAFI pensent que cet outil ne sert pas encore
grandement les intérêts du blanchiment du fait que son utilisation
est encore limitée par le territoire national, il faudrait toutefois
rester vigilant parce que, même sur le plan national, le blanchiment peut
se faire, parce qu'il n'est pas une infraction exclusivement internationale.
Même si en outre pour empêcher que cet outil -très important
pour le commerce- ne soit utilisé par les blanchisseurs, les
réglementations prévoient sur Recommandation du GAFI, le montant
maximum des valeurs qui doivent y figurer. Il reste cependant à craindre
que les criminels toujours très astucieux fractionnent leurs avoirs en
acquerrant plusieurs porte-monnaie en veillant à ne pas excéder
les seuils d'alerte. En plus, comme le note un auteur, Un portefeuille
électronique permet les transferts anonymes d'une carte à une
autre83(*). Ce qui laisse
déjà découvrir la marge de manoeuvre dont disposent les
utilisateurs de ces services dans leurs rapports avec la banque.
B - la liberté
du client dans l'utilisation des services à distance de la
banque
Pour une efficacité certaine de la lutte
anti-blanchiment, il est toujours nécessaire que l'accès au
compte du client admette un intermédiaire : le banquier. C'est
celui-ci qui, en pratique va surveiller les mouvements de fonds, les retracer
afin de prévenir tout danger ou fraude. Dans la pratique pourtant des
services à distance de la banque, on note une certaine
confidentialité du client et une grande marge de manoeuvre de sa part
limitant un contrôle efficace de la banque84(*).
D'une part, il est à noter que le client des services
à distance de la banque a dans la plupart des temps accès
à son compte de manière permanente85(*). Cette situation laisse
comprendre qu'il jouit de bien plus de facilités que les clients de
guichets. Elle pose par ailleurs un problème technique sérieux
à la lutte anti-blanchiment. En effet, dans ces hypothèses, il
n'est pas toujours possible de bloquer une opération bancaire douteuse.
Le plus souvent les autorités ne sont alertées qu'après
coup, or, la réalité est que, une seconde de retard prise par les
autorités sur les blanchisseurs prend souvent des mois pour être
compensée.
D'autre part, le client de tels services a la faculté
de se déplacer à volonté. En prenant pour exemple le cas
des détenteurs des cartes de crédit, on peut imaginer le risque
de cette liberté de déplacement. En effet, ce n'est pas cette
liberté qui est un danger, mais, l'utilisation que les criminels en
font. Ainsi, une carte de crédit acquise dans des conditions peu
sécurisantes dans un paradis fiscal, si elle est d'utilisation
internationale, peut être utilisée valablement auprès des
banques de la CEMAC.
Conscients de ces diverses utilisations malveillantes, les
diverses réglementations intervenues dans le domaine des services
bancaires rendus grâce aux technologies de l'information et de la
communication, ont, pour la plupart, et sur Recommandation du GAFI, posé
que les valeurs incluses dans ces cartes ou devant figurer sur les comptes en
ligne soient plafonnées. Cette mesure, nous le pensons, ne prive pas les
blanchisseurs de leurs avantages qui demeurent encore réels. Car, aucun
obstacle juridique ou technique sérieux ne s'y oppose. Ainsi, les
blanchisseurs peuvent choisir soit de fragmenter leur fortune en divers
comptes86(*), soit
d'acheter autant de titres que leurs avoirs le leur permettent dans le respect
des plafonds réglementaires.
Ainsi vues, les libertés dont jouissent les criminels
grâce aux services bancaires rendus au moyen des technologies de
l'information et de la communication sont de nature à mettre en
déroute la lutte anti-blanchiment, surtout quand, à tout ce qui
vient d'être cité, s'ajoute la furtivité des
opérations effectuées par Internet.
Paragraphe II -
La furtivité des opérations bancaires sur Internet
Les avis sont presque unanimes. Le réseau mondial
Internet offre aux blanchisseurs un avantage précieux : la
rapidité dont l'un des principaux effets est la difficulté, voire
l'impossibilité de retracer l'opération87(*). Malgré les prouesses
constatées jusqu'à présent dans l'évolution des
technologies de l'information et de la communication, repérer les traces
d'une opération sur Internet n'est pas ce qu'il y a de facile. Internet
impose de nouveaux défis aux autorités de lutte anti-blanchiment,
en effet c'est la combinaison de transferts rapides, en grande partie anonymes,
et de destinations protectrices que les actions de lutte contre le blanchiment
de l'argent doivent désormais combattre88(*).
En effet, travailler sur Internet, c'est à la fois
être nulle part et partout, c'est là même l'une des
principales illustrations de la mondialisation. Il n'y a plus, ni
barrières, ni frontières entre les pays sur Internet, la question
de souveraineté des Etats s'effrite et perd de sa valeur. Ainsi, tout
s'ouvre. Et, en se décloisonnant et en s'internationalisant, le
système financier, opérationnel sur Internet a permis à
l'argent sale de mieux circuler, de mieux se cacher, de mieux se mouvoir et de
mieux se mettre en valeur, le plus souvent très loin de son lieu
géographique et social d'origine.
Sur Internet, tout va si vite, tout se brouille dans une
nébuleuse constituée d'une infinité de liens hypertextes -
liens reliant les fichiers entre eux - . Les traces se perdent du fait d'une
infinité de services rendus aux mêmes instants et empruntant les
mêmes canaux, touffus et confus. En conséquence, le risque de
rupture de la piste d'audit est très probable.
La grande célérité des opérations
sur Internet est un facteur de brouille des pistes d'enquête, surtout
quand elle est couplée à la
dématérialisation89(*) et au caractère massif des
opérations.
La sécurité de l'argent
électronique90(*)
est garantie. Les transactions se font dans l'anonymat. Les États n'ont
pas réussi à imposer une technologie capable de garder la trace
des paiements aux fins de vérification. Le cryptage informatique des
messages et le recours aux signatures numériques garantissent le secret
des transactions. L'ordinateur qui reçoit des unités de valeur
sait qu'elles sont authentiques, mais il en ignore l'origine. On peut manipuler
la monnaie électronique sur Internet à volonté sans
qu'elle ne laisse la moindre trace.
Internet est de ce fait très sollicité pour le
blanchiment. Comme le note un expert des questions de blanchiment, chaque jour
plusieurs centaines des milliards d'euros transitent entre les comptes des
milliers de banques en réseau91(*), et, ces transactions se déploient avec une
telle rapidité que repérer leur provenance et leur destination
finale est un leurre. Selon un autre auteur, il faut environ vingt minutes
maximum pour transférer par Internet des fonds d'un pays à un
autre, ces fonds pouvant à leur tour être déplacés
soixante douze fois en vingt quatre heures d'une partie à une autre de
la planète92(*).
L'avantage que les criminels ont se trouve aussi au niveau où, les
opérations de détection prendront mille fois plus de temps que
l'opération elle-même, on aura besoin d'experts pointus et d'une
coopération internationale très dynamique, ce qui tarde toujours
à se mettre en place. En effet, pour peu qu'un mouvement bancaire ait
utilisé trois à quatre écrans d'ordinateurs, il faut
souvent bien plus qu'une année pour reconstituer la chaîne de
l'opération. On ne peut qu'être désolé quand on se
rend compte que pour le temps nécessité pour retracer (si on y
parvient) une opération bancaire sur Internet, de milliers d'autres
opérations pourraient être effectuées.
Une illustration de la complexité des opérations
sur Internet nous est apportée par les actions et opérations du
réseau SWIFT93(*)
qui est une société de routage financier transportant des ordres
de paiement entre sept mille institutions financières et
transfère trois mille milliards d'euros par jour pour six millions de
messages traités quotidiennement94(*). On doit quand même relever, tout comme
l'auteur de ces chiffres qui paraissent un peu exagérés, que les
chiffres varient selon les sources et il n'est pas toujours possible de
déterminer exactement le nombre d'établissements financiers
membres, ni le volume précis des transactions traitées.
Toutefois, ces chiffres sont assez révélateurs. Les
opérations effectuées sur le réseau SWIFT ne sont pas
facilement traçables, il s'agit en effet d'un réseau aveugle
où toutes les opérations sont traitées en cascade et avec
des cryptages. C'est d'ailleurs cela qui fait que ce réseau soit
régulièrement mis en cause par les autorités en charge de
la lutte anti-blanchiment.95(*) Le système SWIFT laisse peu de traces
comptables du fait de son cryptage et de son internationalité. De ce
fait, la production de la preuve de leurs opérations devient
illusoire.
Comme on le voit, Internet se présente comme un
labyrinthe, qui, couplé à l'ingéniosité des acteurs
et promoteurs de l'industrie du crime organisé se révèle
être très hostile à toute tentative de déceler les
preuves contre ces derniers. Si les difficultés de repérage des
traces des opérations transitant par Internet sont pour la plupart dues
à la technique, il est des cas où elles peuvent être dues
au régime auquel le droit soumet certaines relations entre la banque et
son client.
SECTION II -
Les limites juridiques au contrôle de certaines opérations
bancaires
Il arrive bien souvent que les obstacles à une bonne
identification du client découle du régime juridique de certaines
situations juridiques. Il en est ainsi de la protection dont
bénéficient les comptes bancaires des missions diplomatiques
(PARAGRAPHE I), et de la grande discrétion qui entoure le régime
du contrat de location de coffre-fort (PARAGRAPHE II).
Paragraphe I - La
protection des comptes des missions diplomatiques
Les relations entre les Etats souverains sont, sous l'angle du
droit, d'un type exceptionnel. L'ordre international, quelque part, en
dépend. Ainsi, pour renforcer la paix mondiale, les Etats vont
entretenir entre eux des relations permanentes avec l'implantation dans l'Etat
étranger d'une représentation ou d'un ensemble de
représentations, dites `'missions diplomatiques''.
La diplomatie signifie en elle-même l'ensemble des
pratiques et institutions formant le cadre dans lequel les Etats conduisent
leurs relations extérieures pacifiques. Elle implique donc que l'Etat
qui accueille ou accrédite une mission diplomatique devant s'installer
sur son territoire doit au nom de la paix, s'engager à assurer à
cette dernière des mesures de sécurité, de protection et
de facilitation dans l'exercice de ses fonctions. En effet les missions
diplomatiques ont en général trois grandes fonctions qui
sont : la représentation, l'information et la négociation
dans les domaines politique, économique, culturel et social.
Ces mesures sont prévues par des textes internationaux,
notamment, la Convention de Vienne du 18 avril 1961. Cette Convention
prévoit en effet que, dans les relations diplomatiques, les Etats et
leurs biens jouissent à l'Etranger d'un statut particulier. Ce statut
particulier profite non seulement aux diplomates, mais aussi aux biens
nécessaires à l'accomplissement de leur mission, en ceci que ces
derniers sont immunisés contre les violations et les mesures de
contrainte. On dit alors que ces biens jouissent d'un privilège et d'une
inviolabilité.
La détermination des biens pouvant jouir de ces
privilèges n'est pas faite de manière expresse dans ladite
Convention. Mais, la cour d'appel de Paris, à l'occasion d'un litige qui
intéressait les représentations diplomatiques de la Russie en
France, a dans un considérant affirmé que la protection de ces
biens, visant « à garantir l'accomplissement efficace des
fonctions des missions diplomatiques ; que la réalisation de cet
objectif implique que soit assurée la protection des moyens
affectés à l'exercice de ces fonctions... » et,
considérant que l'article 22 alinéa 3 de la Convention de Vienne
dispose que les locaux de la mission, leur ameublement et les autres objets s'y
trouvant ainsi que les moyens de transport de la mission ne peuvent faire
l'objet d'aucune perquisition, réquisition ou saisie ou mesure
d'exécution, en plus de ce que l'article 25 de la même Convention
oblige l'Etat accréditaire à accorder « toutes
facilités pour l'accomplissement des fonctions de la
mission », la cour de Paris déduit que « la
protection des valeurs inscrites sur les comptes bancaires ouverts au nom d'une
ambassade pour les besoins de son activité de service public sur le
territoire de l'Etat accréditaire découle des règles du
droit des relations diplomatiques et relève du régime
spécifique des immunités diplomatiques »96(*) ; donc insaisissables,
insusceptibles de perquisition, et de toute autre mesure de contrainte. Cette
position de la cour d'appel de Paris est quelque peu confortée par le
Comité Spécial de l'ONU sur les Immunités
Juridictionnelles des Etats et de leurs biens. En effet le Rapport de cette
instance, en sa session du 4 au 15 février 2002 expose les projets
d'articles qui ont été proposés et dont il ressort du
projet d'article 19 que « les biens, y compris les comptes
bancaires utilisés ou destinés à être
utilisés dans l'exercice des fonctions de la mission diplomatique de
l'Etat et de ses postes consulaires » jouissent des
immunités juridictionnelles.
Ainsi, on peut comprendre de tout ce qui précède
que les comptes protégés contre les perquisitions, saisies et, en
général de toute autre mesure de contrainte, constitueront un
obstacle sérieux à la lutte anti-blanchiment, laquelle suppose en
effet l'usage des techniques de perquisition. Prenant l'exemple du compte
bancaire qui nous intéresse dans le cadre de notre étude, la
levée du secret bancaire n'est-elle pas déjà une mesure de
contrainte, en ce qu'elle implique que le banquier renonce malgré lui et
malgré le titulaire du compte au secret qui régit le premier et
protège le second ?
Ainsi, comme les valises diplomatiques, dont les liens avec la
criminalité internationale ont été à plus d'une
fois mis en exergue97(*),
les comptes bancaires des missions diplomatiques sont un outil
privilégié des blanchisseurs, ces derniers étant souvent
aidés par les diplomates qui les couvrent alors avec leur statut, et
parfois c'est le diplomate lui-même qui met sur pied la filière
criminelle.
Des illustrations de l'utilisation des comptes des diplomates
à des fins de blanchiment ne manquent pas, on notera aussi, l'affaire
qui a conduit au rappel de l'ambassadeur de la Suisse au Luxembourg le 8
juillet 2002 du fait de l'accusation de blanchiment aggravé qui pesait
sur ce dernier, dont les comptes bancaires étaient bizarrement fournis.
Selon les autorités luxembourgeoises, l'enquête ne pouvait pas
aller plus loin dans « cette affaire impliquant un diplomate
couvert par l'immunité »98(*).
Aux Etats-Unis, la modeste banque Riggs, réputée
être la banque préférée des ambassades à
Washington, est dans le collimateur des autorités
fédérales pour avoir violé de façon «
délibérée et systématique » les lois
sur le contrôle des transactions et du blanchiment. Elle a
été condamnée à 25 millions de dollars d'amende
pour avoir hébergé le compte de la femme de l'ambassadeur
d'Arabie Saoudite destiné aux bourses aux étudiants saoudiens
nécessiteux. Or, deux des étudiants saoudiens accusés
d'être des pirates de l'air du 11 septembre en avaient
bénéficié.99(*) On comprend aussi, qu'en dehors même de la
protection légale que la Convention de Vienne accorde aux diplomates,
ceux-ci peuvent en outre essayer d'abuser de leur statut.
Au regard de cette protection renforcée des comptes
bancaires des missions diplomatiques, on est en droit de les rapprocher des
coffres-forts.
Paragraphe II -
La forte discrétion des opérations effectuées sur des
coffres-forts
Les banques ont très souvent des chambres fortes
où elles placent de grands coffres contenant des cases munies d'une
fermeture spéciale qu'elles mettent à la disposition de leurs
clients qui y déposent leurs titres et objets précieux. Le
contrat permettant cette opération entre la banque et son client est
qualifiée de location de coffre-fort. Ce contrat permet aux clients de
tenir secrète la possession de certains biens tant vis-à-vis des
créanciers que de l'Etat. Cette fonction particulière de
discrétion du coffre-fort fait que certains le préfèrent
au dépôt des titres en banque. En plus, il est beaucoup moins
onéreux, le prix de la location étant peu
élevé100(*), préférable à celui des frais
de dépôt en banque.
Classer ce contrat est très difficile, la doctrine
pense qu'il ne s'agit pas d'un dépôt car le banquier n'ayant pas
un accès personnel au coffre et ne reçoit donc pas la remise des
objets que y place le client101(*). Mais, de par les éléments qui
composent son régime, la tendance est plutôt à
considérer qu'il s'agit d'une location.102(*) C'est aussi la position de
la jurisprudence103(*),
même s'il faut en outre préciser que la location de coffre-fort ne
s'identifie pas absolument au louage ordinaire104(*). Ces difficultés
d'appréciation ont inspiré la doctrine qui a dégagé
les caractères généraux d'une variété de
dépôt appelée `'contrat de garde'' où elle propose
de ranger le contrat de location de coffre-fort105(*). Cette analyse
présente l'avantage de souligner le principal service attendu du
banquier : qu'il garde le coffre, et surtout son contenu, qu'il le
protège des périls. Ainsi, plus que la théorie de location
de droit commun, celle de garde justifie mieux le régime rigoureux de la
responsabilité qui pèse sur le banquier qui est tenu d'une
obligation de résultat de sécurité, même s'il ne
sait pas ce que contient le coffre puisqu'il est confidentiel, secret et
très personnel au client.
Ce régime offrirait sans aucun doute de par ses
séduisants éléments constitutifs des avantages aux
blanchisseurs. Tout comme l'attraction des paradis fiscaux est fondée
sur les exonérations fiscales et sur l'absolutisme du secret bancaire
qui y est pratiqué ; les blanchisseurs et criminels de tous genres,
sans doute trouveraient dans l'institution du coffre-fort une
sécurité multidimensionnelle dont les principales illustrations
sont d'une part la discrétion106(*)et, d'autre part, l'obligation de surveillance
renforcée du banquier. La jurisprudence pense en effet que le banquier
est responsable du seul fait que les choses déposées dans le
coffre ont été volées ou
détériorées107(*), et le banquier n'est exonéré que s'il
rapporte la preuve d'une cause étrangère qui ne puisse lui
être imputable, un bombardement par exemple. Tout ceci constitue un atout
pour le blanchisseur qui aime la sécurité et la
discrétion.
Le danger vient justement de toutes ces protections car, il
est ainsi très difficile de détecter l'activité du client,
nous savons en effet que c'est souvent au vu des mouvements des comptes et de
l'étendue des transactions des clients que les banquiers
découvrent souvent que quelque chose ne va pas. Mais avec un coffre-fort
dont a priori, le banquier ne maîtrise pas le contenu, on perçoit
comment il peut grandement servir les intérêts des blanchisseurs.
Il ne se pose pas ici, à vrai dire, un problème d'identification,
car le client peut effectivement s'identifier, mais tant qu'on n'a pas l'oeil
sur le contenu du coffre-fort, on demeure impuissant. De plus, on peut aussi
relever que les choses peuvent être compliquées si lors de la
signature du contrat de location de coffre-fort, le client agissait sous le
régime de prête-nom. Ceci s'imagine aisément, puisque
l'accès au coffre-fort est en effet réservé au client ou
à son mandataire. Ainsi, après la signature du contrat de
location, le client apparent signe au profit du client réel une
procuration générale et illimitée dans le temps pour lui
permettre d'accéder au coffre. Le vrai client passerait ainsi pour
être mandataire, pourvu que le banquier ne dépiste rien.
Le blanchisseur, comme nous le voyons depuis le début
de cette étude, recherche les techniques de protection et de grande
confidence. Il s'agit pour le cas du coffre-fort d'empêcher le banquier
de pouvoir dénoncer des opérations, en profitant du régime
discrétionnaire d'une technique bancaire. Le coffre-fort est très
redoutable en matière de blanchiment, on peut tout y déposer, il
peut être utilisé à toutes les étapes de la grande
chaîne des opérations de la grande criminalité
organisée et internationale : on peut y déposer les pierres
précieuses et les stupéfiants en attente de trafic, les armes en
attente de livraison aux mutineries et aux terroristes, ou encore l'argent
fruit ou produit du crime ; tout ceci sans réelles
inquiétudes. Le banquier n'étant tenu que de surveiller la
santé du coffre et d'assurer la sécurité de son contenu,
même s'il ignore de quoi il est constitué.
CONCLUSION DU TITRE
I
A l'issue de ce premier titre, un constat confirme
l'hypothèse posée à l'introduction : la banque est au
coeur du blanchiment. En effet, la récupération malveillante des
vertus de la première assure au second un certain succès, lequel
n'est pas juste le fruit de l'ingéniosité des criminels ou de la
négligence des autorités. Mais, il est aussi dû tant aux
failles inhérentes à l'utilisation des TIC108(*) dans les services bancaires,
qu'à la limitation du contrôle de certaines relations entre la
banque et son client. Toutes ces causes produisent deux grands types
d'effets : soit elles empêchent une identification efficace de la
clientèle, soit elles empêchent plutôt un contrôle
sérieux des activités du client. Il y a toujours alors le secret
qui est recherché ou qui existe naturellement : Refus du client de
dire la vérité109(*), ou convention de confidentialité
absolue.110(*) En bref,
ce titre aura permis à travers maintes analyses de mettre en
évidence le rôle du secret bancaire dans le processus de
blanchiment.
Ayant constaté que le principal vecteur du mal c'est le
secret bancaire, les autorités de la CEMAC à travers la
réglementation anti-blanchiment, vont le réaménager dans
le sens des restrictions, c'est ce qui fait l'objet du deuxième titre de
notre étude.
TITRE II : LES RESTRICTIONS DU SECRET
BANCAIRE EN ZONE CEMAC : UN GAGE D'EFFICACITE POUR LA LUTTE CONTRE LE
BLANCHIMENT
Comme nous l'avons jusqu'à présent vu, les
blanchisseurs sollicitent beaucoup et presque toujours la banque parce que
cette dernière assure à leur butin un refuge paisible et anonyme
grâce au secret auquel sont tenus ses agents. C'est le secret bancaire en
effet qui attire ces criminels qui, sans scrupule, y recourent pour cacher
leurs fortunes afin de les débarrasser des odeurs de corruption et de
trafics de tous genres dont elles sont issues à l'origine. Parce que le
blanchiment est de nature à perpétuer et à entretenir des
délits très nuisibles à la santé politique et
économique de la sous région, les autorités communautaires
lui ont déclaré une lutte sans merci.
Le souci d'efficacité de cette lutte exige que le choix
des armes à employer soit judicieusement opéré et tienne
compte de leur rôle dans le processus de blanchiment. Dès lors,
conscients de la fonction de la banque dans le développement de cette
industrie du crime et plus particulièrement du secret qui y
règne, les autorités communautaires ont jugé indispensable
de redéfinir le cadre juridique des relations entre la banque et son
client, en apportant de sérieuses restrictions au secret bancaire.
Cette mesure aura sans doute le mérite de l'idée
selon laquelle, lutter contre le blanchiment doit avant tout avoir pour but de
démasquer les fortunes des blanchisseurs afin de les en priver par le
jeu des confiscations. Car, faute de bénéfices utilisables,
l'activité criminelle très probablement va s'interrompre. Ces
objectifs ne peuvent selon les experts être atteints qu'à travers
la banque, car c'est dans le circuit financier et bancaire que les criminels
font circuler leurs recettes, avec ou sans la complicité des agents
desdits secteurs.
L'importance que revêt la prévention du secteur
bancaire contre les désastres du blanchiment d'argent dans la
Communauté CEMAC s'illustre surtout par la rigueur observée dans
les obligations imparties aux banques et à leurs agents (CHAPITRE II).
Mais, aussi par l'implication des organes de la Communauté et par la
création de nouvelles institutions devant accompagner et encadrer les
banques dans leurs lourdes missions, donnant ainsi à cette lutte une
dimension institutionnelle (CHAPITRE I).
CHAPITRE I :
LA DIMENSION INSTITUTIONNELLE DE LA LUTTE ANTI-BLANCHIMENT EN ZONE CEMAC
La lutte anti-blanchiment fait désormais partie des
grands chantiers de la Communauté. La stabilité financière
et économique en dépend, l'ordre politique et juridique en est
tributaire. Cette vision a tout naturellement justifié l'implication des
organes de l' Union Monétaire de l'Afrique Centrale (UMAC) et plus
particulièrement la Banque des Etats de l'Afrique Centrale (BEAC) et la
Commission Bancaire de l'Afrique Centrale (COBAC). Mais, du fait que leurs
fonctions originelles n'étaient pas spécifiques au fléau
du blanchiment des capitaux dans la sous région, les autorités de
la CEMAC n'ont pas hésité à créer au niveau
communautaire un organe entièrement dévoué à la
lutte contre ce mal, c'est le GABAC. Au niveau national, la Communauté a
renforcé le dispositif existant dans les différents Etats en
instituant l'ANIF.
Ainsi, sous ce chapitre, nous proposons d'axer nos
développements d'une part sur le rôle des institutions
communautaires dans la lutte anti-blanchiment en milieu bancaire (SECTION I),
et d'autre part, sur la nouvelle dynamique des dispositifs nationaux de lutte
contre le blanchiment, en illustrant par le dispositif camerounais (SECTION
II).
SECTION I - le
rôle des institutions communautaires dans la prévention du secteur
bancaire contre le blanchiment
Tout naturellement, l'activité bancaire au sein de
la CEMAC est encadrée par deux principaux organes à savoir la
BEAC et la COBAC. Ces deux organes -dans le cadre de la lutte anti-blanchiment
en milieu bancaire- jouent un rôle déterminant (paragraphe I)
renforcé par l'appui technique du GABAC (paragraphe II).
Paragraphe I -
L'apport déterminant des organes de contrôle de l'activité
bancaire
Les organes de contrôle de l'activité bancaire au
sein de la CEMAC se sont lancés dans une logique destabilisatrice des
activités de blanchiment par voie bancaire dans la zone. Cette logique
est manifestée au niveau de la BEAC par sa volonté
d'assainissement du système bancaire (A) et à la COBAC par le
plein usage de sa fonction de supervision de l'activité bancaire dans la
Communauté (B).
A - La volonté
d'assainissement du système bancaire de la BEAC
Avant de présenter l'action réelle de la BEAC
dans le cadre de la lutte contre le blanchiment d'argent en Zone CEMAC (2) nous
voudrions d'abord présenter sommairement l'institution et ses objectifs
(1).
1 - La BEAC et
ses objectifs
La Banque des Etats de l'Afrique Centrale (BEAC) est un organe
de la CEMAC. C'est en effet elle qui a la charge d'émettre la monnaie
commune de la sous région ; elle a en outre la mission de garantir
la stabilité de cette monnaie.
Le rôle de la BEAC dans l'exercice de l'activité
bancaire est notable. En effet, de par l'article 25 de ses statuts, la BEAC est
habilitée à prendre, à l'initiative de son Conseil
d'Administration, toutes dispositions pour imposer aux banques et
établissements financiers le respect des normes prudentielles. Cette
disposition amène à déduire que la BEAC aurait un pouvoir
réglementaire et disciplinaire. Bien plus, la BEAC, jouit d'une mission
d'assistance technique prévue par l'article 26 de ses statuts, en ce
qu'elle est autorisée à enquêter sur le respect des
prescriptions édictées par les organismes en charge de
l'organisation de la profession bancaire et de la politique du crédit
pour en faire rapport à ces organismes.
Conduire les opérations de change relève aussi
des missions de la BEAC qui doit en outre promouvoir le bon fonctionnement du
système de paiement dans la Communauté. L'importance de ces
missions est tel que, un obstacle à leur bonne conduite pourrait
générer des crises systémiques dans la sous région.
Prévenir ces crises de manière efficace a donc justifié
que la BEAC s'implique très activement dans la lutte anti-blanchiment en
milieu bancaire.
2 - L'action de
la BEAC en matière de lutte anti-blanchiment en milieu
bancaire
La BEAC a vite pris conscience de ce que le blanchiment des
capitaux était une menace catastrophique pour le système bancaire
et financier de la Communauté, et que ce fléau pouvait affecter
toutes les tentatives et projets de développement de la sous
région. L'action de la BEAC dans le cadre de la prévention du
système bancaire contre le blanchiment s'est manifestée à
plusieurs niveaux.
D'abord, il faut relever que la BEAC a fait de la lutte
anti-blanchiment l'un des grands chantiers des « Réformes
de deuxième génération ». En
effet, ces réformes participent de la volonté de doter la
sous région d'instruments et d'institutions appropriés pour un
financement sain des économies des pays membres. On voit donc
aisément comment il aurait été maladroit que dans le cadre
de tels objectifs, la BEAC n'incluse pas la lutte contre le blanchiment en
milieu bancaire. Car, assainir les investissements, c'est déjà
empêcher que les investissements apparemment `'sains'' soient
réalisés au moyen des ressources `'sales''. C'est donc en
conséquence de cette option que d'autres actions de la BEAC se
déploient.
Ensuite, la BEAC s'illustre par la sensibilisation à
travers l'organisation des séminaires et conférence sur le
blanchiment d'argent111(*) ou par la participation à certaines instances
partageant les mêmes objectifs112(*). C'est en droite ligne avec cette volonté de
sensibilisation qu'elle a organisé à Douala, pendant la
période allant du 03 au 07 Août 2001 un séminaire sous
régional sur le blanchiment des capitaux.
De même, la BEAC, à travers son gouverneur, s'est
exprimée à la Réunion des gouverneurs des banques
centrales africaines, lors de sa 28ème session tenue à
Yaoundé. Le gouverneur de la BEAC a d'ailleurs illustré la
détermination de la BEAC en ces termes :
« Au-delà du préalable que constitue ce cadre
juridique, les banques centrales vont désormais oeuvrer aux cotés
des autorités compétentes des Etats à intensifier la
sensibilisation des milieux financiers et contribuer à l'application
effective des textes... par ailleurs, elles devront assurer leurs obligations
en tant qu'organismes assujettis appelés à effectuer des
déclarations de soupçons au même titre que les organismes
financiers. »113(*)
Enfin, l'action de la BEAC est manifestée par son
dynamisme dans la mise sur pied de nouveaux organes de lutte anti-blanchiment.
En effet, dans le cadre de la bonne réalisation de ses missions, la BEAC
se doit de donner des avis conformes pour la prise de certaines
décisions au sein de la Communauté. A titre d'illustration, le
Règlement organisant le fonctionnement du GABAC n'a été
adopté par le Comité Ministériel de l'UMAC le 15 mars 2002
qu'après avis conforme de la BEAC. En outre, on notera que les projets
de règlement intérieur du GABAC ont été
élaborés par un comité technique placé sous la
supervision de la BEAC. L'action de la BEAC est complétée et
perfectionnée par la COBAC dans le cadre de sa fonction
générale de supervision de la profession bancaire dans la
Communauté.
B - L'importance du
rôle de supervision de la COBAC dans le cadre de la lutte contre le
blanchiment
A la fin des années 80, le tissu bancaire de la Zone
UDEAC est totalement sinistré, 75% des banques existantes sont
insolvables. Cette situation amène alors les autorités de l'Union
à tenir compte de toutes les causes d'un pareil désastre et
à mettre sur pied un dispositif réglementaire et disciplinaire
rigoureux et fiable. La COBAC voit ainsi le jour en 1990 et plus
précisément le 16 octobre de cette année à
Yaoundé. Le régime de ses activités et missions est
renforcé par la Convention portant harmonisation de la
réglementation bancaire en Afrique Centrale du 17 janvier 1992.
La COBAC est une instance technique, car, aucun membre n'y
siège en qualité de représentant des pouvoirs publics.
Tous les établissements de crédit installés dans la
sous-région lui sont assujettis. Malgré les liens forts qu'elle
entretient avec la BEAC, il est à préciser qu'elle n'en est pas
une simple émanation, mais elle constitue un organe propre de la
Communauté pourvu d'une personnalité juridique propre. Cependant,
on peut déplorer qu'au regard de ses importantes missions, la COBAC ne
soit toujours pas une structure permanente, car, ses assemblées ne sont
convoquées que périodiquement.
Dans l'exercice de sa mission de supervision de
l'activité bancaire, la COBAC jouit d'attributions particulières.
En effet, elle édicte des normes, veille au respect par les
établissements assujettis des dispositions législatives et
réglementaires et sanctionne les manquements constatés. On
pourrait aussi ajouter avec une insistance particulière que la COBAC a
la responsabilité de veiller sur la bonne qualité de la situation
financière des établissements de crédit et au respect par
eux des règles déontologiques de la profession.
De par toutes ces fonctions, on comprend aisément
l'importance du rôle qui est attendu de la COBAC dans le cadre de la
lutte contre le blanchiment et particulièrement en milieu bancaire. La
COBAC, en effet contrôle l'accès à la profession bancaire,
ce qui est un aspect notable de la préservation du secteur bancaire
contre les criminels et autres aventuriers de tous genres qui se
constitueraient banquiers juste pour blanchir les produits criminels issus de
leurs basses besognes. Le problème est réel en Afrique. En effet
comme le souligne M. BROWN un expert de l'Interpol, « des groupes
criminels achètent des banques en Afrique pour s'en servir comme points
de transit avant de transférer les fonds dans d'autres banques, sur des
marchés financiers plus solides »114(*). Ainsi, il est presque
évident d'affirmer que le contrôle exercé par la COBAC va
filtrer les aspirants à la profession et ne laissera passer que ceux
dont la moralité sera jugée ou présumée compatible
avec la noble profession de gérer la fortune d'autrui. Comme le souligne
par ailleurs la doctrine, à travers du pouvoir d'autorisation, il s'agit
d'un rôle préventif qui est ainsi reconnu à la COBAC en ce
sens « qu'avant d'émettre un avis favorable, elle aura
procédé à des vérifications
nécessaires »115(*).
D'autre part, l'édiction des normes prudentielles et le
contrôle du respect des règlements par les établissements
de crédit sont davantage de garanties de préservation des banques
contre l'activité criminelle des blanchisseurs en ce que, les banquiers
ne vont pas agir dans un laisser-aller sans bornes. Un contrôle judicieux
des changes va limiter dans une portion considérable l'activité
des criminels.
Enfin, le pouvoir réglementaire dont jouit la COBAC,
lui a permis dans le cadre de la lutte contre le blanchiment dans le secteur
bancaire et financier de mettre sur pied un texte très important de
portée régionale imposant aux établissements assujettis
dont la BEAC des comportements rigoureux permettant de détecter et de
réprimer le blanchiment116(*). Ce texte rejoint par ailleurs d'autres textes de la
Commission visant la transparence et le contrôle interne des
banques117(*). La bonne
application de ces textes assurera sans aucun doute, une certaine victoire
à la lutte contre le blanchiment dans notre Communauté surtout si
on exploite en plus toutes les vertus qu'offre le GABAC.
Paragraphe II -
Le concours technique du GABAC
Parce que les criminels sont très astucieux et
créatifs, l'efficacité d'un dispositif anti-blanchiment exige que
l'on l'appréhende sous tous les aspects et surtout techniques. Les
autorités de la CEMAC ont intégré cette vision des choses
dans leur stratégie de lutte. La résultante en est d'ailleurs la
création du GABAC le 14 décembre 2000 à N'djamena par Acte
additionnel de la Conférence des Chefs d'Etats de la Communauté.
Le GABAC verra son organisation et son fonctionnement réglementés
par un Règlement du Comité Ministériel de l'UMAC du 14
avril 2002.
Il ressort de tous ces textes que la technicité de cet
organe s'illustre tant dans sa mission de coordination des stratégies de
lutte anti-blanchiment dans la Communauté (A) que dans sa mission de
coopération avec les autres structures similaires existant en dehors de
la Communauté (B).
A - La mission de
coordination des stratégies de lutte anti-blanchiment dans la
CEMAC
Les Etats ne sont pas souvent mieux outillés pour faire
face, seuls à certains problèmes. Le blanchiment peut justement
faire partie de la catégorie de ces problèmes dont la
résolution dépasse en général le cadre territorial
national. Les solutions trouvées contre le blanchiment tombent toujours
très vite en désuétude. Cette situation résulte du
fait que non seulement, les blanchisseurs travaillent tout le temps au
renouvellement des techniques à employer ; mais aussi, on note chez
ces derniers une faculté impressionnante à s'adapter aux
nouvelles législations anti-blanchiment afin de mieux exploiter leurs
failles. Tout ceci, ajouté au caractère international du
blanchiment, impose à tout dispositif de lutte contre le blanchiment une
mise à jour constante des instruments utilisés afin de diminuer
l'écart entre la ruse des délinquants et les moyens pour la
combattre.
C'est à toutes ces attentes que le GABAC dans son
déploiement doit répondre. Il est en effet vu selon les textes
qui le régissent comme la « structure commune de promotion
des normes, instruments et standards de lutte contre le blanchiment,
chargée également du suivi de leur mise en oeuvre
coordonnée et de leur efficacité »118(*). Ainsi, il a la charge de
promouvoir les législations anti-blanchiment dans les Etats CEMAC en
conseillant les autorités étatiques et en mettant à leur
disposition des études et recherches devant permettre de
réorienter les stratégies nationales et communautaires dans le
domaine. Ses missions la conduisent aussi inévitablement à
coordonner toutes les stratégies de lutte anti-blanchiment en vigueur
dans la Communauté.
La technicité du GABAC s'exprime aussi en ce qu'il
effectue une part considérable de ses travaux sur le terrain. En effet,
au-delà du fait que le GABAC doit coordonner, animer et dynamiser les
actions entreprises dans les Etats de la Communauté dans le cadre de la
lutte contre le blanchiment d'argent et des produits du crime. Il doit, et
c'est là l'une de ses principales missions, « contribuer
à la connaissance des spécificités du
phénomène du blanchiment d'argent en Afrique
Centrale »119(*). Comme le précisent les experts de la BEAC,
en Afrique Occidentale et Centrale, les fonds à blanchir proviendraient
de trafics de toutes natures, portant non seulement sur les stupéfiants,
mais, aussi sur les pierres précieuses, les armes, les êtres
humains120(*).
Par ailleurs, le GABAC a la tâche d'initier et de
coordonner les actions d'évaluation des dispositifs anti-blanchiment au
sein des Etats membres de la Communauté. Pour une lutte efficace, les
autorités doivent être à même de pouvoir savoir
jusqu'où les efforts déployés ont porté des fruits
et ce qu'il y a lieu de faire pour améliorer les résultats le cas
échéant. Le GABAC doit ainsi sur les divers rapports des Agences
Nationales d'Investigation Financière, dresser des statistiques
permettant de reconsidérer le cas échéant les
stratégies adoptées si la nécessité l'exige. Le
GABAC établit semestriellement un rapport régional de
synthèse des rapports des ANIF qui est transmis au gouverneur de la BEAC
et au secrétaire exécutif de la CEMAC aux fins d'information des
Etats Membres et des Institutions de la Communauté121(*).
Pour finir, relevons que selon l'article 5 alinéa 4 du
Règlement du 14 avril 2002 portant organisation et fonctionnement du
GABAC : « le GABAC entreprend toute action visant à
protéger les systèmes bancaires et financiers des atteintes
liées au phénomène du blanchiment et à mettre en
oeuvre dans la Communauté des principes, recommandations et normes
arrêtés dans le cadre de la coopération
internationale »122(*). En plus de toutes ces fonctions de coordination de
la lutte contre le blanchiment dans la Zone CEMAC dévolues au GABAC, il
est en outre investi de la mission de collaboration avec des structures
connexes hors de la Communauté.
B - la mission de
coopération du GABAC
Le mouvement de lutte contre le blanchiment d'argent se
révèle de plus en plus être une question universelle. Tous
les Etats sont en effet impliqués, mais, surtout pas de manière
isolée. En effet, les Etats impliqués doivent collaborer sur les
techniques et stratégies de lutte, sur leurs résultats, sur leurs
expériences en matière de lutte contre le blanchiment et surtout
en ce qui concerne la prévention du système bancaire et financier
en général.
La CEMAC à travers le Règlement du 14 avril 2002
a tenu compte de cette situation, c'est pourquoi elle a mandaté le GABAC
d'une mission de « collaboration avec les structures similaires
existant en Afrique et au niveau international»123(*). Cette solution est, on peut
le dire, inévitable ; surtout quand on tient compte de l'aspect
international du fléau qu'est le blanchiment des capitaux. Une
enquête contre un trafiquant pour blanchiment depuis la Côte
d'Ivoire (CEDEAO) peut se répercuter au Cameroun (CEMAC) et vice versa.
La détection, le démantèlement et la répression
d'un tel réseau nécessitent évidemment que les structures
compétentes dans les deux Communautés puissent communiquer. En
l'espèce donc, il est indispensable que le GABAC puisse sans aucun
obstacle fournir et recevoir des informations du GIABA, qui est l'organe
chargé de promouvoir les législations anti-blanchiment et de
faciliter la coordination des activités des Etats membres de la
CEDEAO.
Toujours dans le cadre de cette mission de collaboration, on
imagine déjà l'importance des relations que le GABAC devra
entretenir avec le CLAB. En effet, il ressort des missions que les ministres
des finances et les gouverneurs de banques centrales de la Zone Franc ont
assignées à cette institution qu'elle a la charge de coordonner
les initiatives anti-blanchiment entreprises en Zone Franc. Elle doit ensuite
assurer l'organisation des séminaires sous régionaux sur la lutte
anti-blanchiment et préparer des cadres juridiques appropriés.
Ainsi, le CLAB fait régulièrement le point des actions
entreprises dans la Zone Franc depuis septembre 2000 et des évolutions
enregistrées sur le plan international, données très
utiles au bon accomplissement des missions du GABAC, qui compte sans doute
aussi sur le dynamisme des dispositifs nationaux de lutte contre le blanchiment
pour soutenir son action à la base afin de lui assurer un succès
certain.
SECTION II -
Les instruments des dispositifs nationaux contre le blanchiment en milieu
bancaire : Exemple du Cameroun
La lutte contre le blanchiment d'argent est longtemps
restée dans le monde une affaire nationale. Ce n'est d'ailleurs que
très récemment que les autorités mondiales en ont fait une
bataille universelle. Il n'est pas rare de voir que dans certains pays, le
dispositif national ait précédé celui conçu par les
organismes internationaux ou communautaires.
Au Cameroun par exemple, les autorités n'ont pas
attendu l'année 2000124(*) pour se mettre au combat contre les nuisances du
blanchiment des capitaux. Il ne pouvait d'ailleurs en être autrement
surtout quand on sait que certains maux, connexes et facteurs du blanchiment
sont bien réels dans cette Nation, à l'instar de la
`'Feymania125(*)'' et de
la grande corruption.
L'arsenal juridique déployé alors contre ces
maux, antérieur à la réglementation communautaire, a
souvent fait l'objet d'une mise à jour avant d'être efficacement
renforcé par la consécration d'un organe découlant de
l'organisation communautaire de la lutte anti-blanchiment. Ainsi, nous
étudierons ces instruments du dispositif national en analysant les
instruments prévus par les législations nationales en la
matière (paragraphe I) et l'agence nationale d'investigation
financière (paragraphe II).
Paragraphe I -
Les instruments nationaux `'classiques'' de lutte contre le blanchiment en
milieu bancaire au Cameroun
La lutte contre le blanchiment d'argent semble relever d'un
défi politique. Elle passe inévitablement par la lutte contre la
corruption et les trafics de tous ordres. Le blanchiment d'argent au Cameroun
serait lié à deux grandes catégories de délits
à savoir « 1- le produit d'activités criminelles
organisées classiques comme l'extorsion des fonds, la prostitution, le
vol, la fraude... 2- les délits en col blanc, comme le
détournement de biens et fonds publics, la corruption, les
déclarations frauduleuses de revenus et de
bénéfices... »126(*) . A cet effet, on peut déjà saluer les
efforts ayant conduit à la mise en place de la Chambre des comptes de la
Cour Suprême. Pour l'efficacité de ses missions, il faudrait que
le secret bancaire lui soit inopposable afin qu'elle puisse vérifier les
comptes bancaires de tous les gestionnaires de crédits publics, gage
d'une bonne discipline budgétaire.
La lutte contre le blanchiment d'argent est indissociable de
celle contre la corruption, les produits issus de cette dernière suivent
inexorablement les circuits de blanchiment. L'article 66 de la loi
Constitutionnelle du 18 janvier 1996 portant révision de la constitution
camerounaise du 2 juin 1972, en ce qu'elle prévoit la déclaration
des biens et des avoirs des principaux responsables de l'Etat, au début
et à la fin de leurs mandats ou de leurs fonctions, est à cet
égard une disposition très importante dans cette volonté
de lutter contre le blanchiment d'argent. Cette disposition illustrerait
davantage la crainte des pouvoirs publics de voir l'administration publique se
mettre au service des blanchisseurs. Nous pensons en outre que les
déclarations de ces personnalités ne devraient pas par
elles-mêmes faire foi, mais, devraient être vérifiées
minutieusement auprès des banques et établissements de
crédit de la place. Cette idée n'a pas échappé au
législateur qui prévoit qu' « En cas de refus de
déclaration des biens et avoirs par les personnes assujetties ou de
doute sur la déclaration, la Commission peut demander à tout
service public ou privé compétent de lui communiquer toute
information pouvant lui permettre d'établir les biens. et avoirs de
celles-ci127(*) ».
D'un autre coté, on note de vraies dispositions
législatives conçues pour barrer la voie aux activités de
blanchiment sur le plan national. Parmi ces dispositions, on relèvera
dans l'ordre chronologique la loi n° 97/019 du 07 août
1997128(*) surtout en
ses articles 126 et suivants, la loi n° 2003/004 du 21 avril 2003 sur le
secret bancaire, et la loi de finances 2004, surtout en son article 12.
De tous ces textes, il ressort en filigrane ou explicitement
que le secret bancaire est inefficace dans le cadre de la lutte contre le
blanchiment. On note par ailleurs, à la lecture de tous ces actes que,
leur application fait appel à deux instruments dont les rôles sont
quelques peu différents et complémentaires, il s'agit des
autorités judiciaires (A) et de l'autorité monétaire
(B).
A- Les autorités
judiciaires
Ces autorités, dans le cadre de la lutte contre le
blanchiment d'argent ont un rôle double.
D'une part, les lois en vigueur dans le domaine habilitent ces
autorités dans le cadre des enquêtes sur le blanchiment du pouvoir
de solliciter des informations auprès des établissements de
crédit sans que le secret bancaire puisse leur être
opposable129(*).
D'autre part, les autorités judiciaires, et plus
précisément cette fois-ci les procureurs de la république,
sont dépositaires d'informations suspectes venant de la banque, chaque
fois que les dirigeants ou les agents de celle-ci savent ou pensent que les
sommes en cause proviennent d'infractions à la législation sur
les stupéfiants ou au blanchiment d'argent. Si l'article 6 alinéa
d de la loi de 2003 sur le secret bancaire ne s'est limité qu'à
préciser qu'une pareille déclaration ne saurait être vue
comme une violation du secret bancaire, la loi n° 97/019 sur le trafic des
stupéfiants poursuit sa logique en son article 128 en apportant des
éléments sur l'action du procureur informé. Cet article
dispose en effet que : « Dans le délai prévu
pour l'opération en cours, le procureur de la république accuse
réception au déclarant qui fait alors procéder à
l'exécution de ladite opération. Le procureur de la
république peut toutefois assortir l'accusé de réception
d'un blocage de fonds, compte ou titre. » Avec ces
précisions sur le rôle du procureur averti, on comprend mieux
qu'il ne s'agit pas d'une simple formalité, mais d'une contrainte
professionnelle et déontologique des opérateurs du secteur
bancaire, presque tenus des mêmes obligations envers l'autorité
monétaire.
B - L'autorité
monétaire
Nous commencerons par souligner que de toutes ces trois lois
étudiées, seule la loi de 2003 sur le secret bancaire fait
expressément mention de l'autorité monétaire. En effet,
l'article 12 de la loi de finances de 2004 ne fait expressément mention
d'aucune autorité et la loi de 1997 sur le trafic des stupéfiants
ne confie explicitement cette fonction de détection et de
répression du blanchiment des capitaux en milieu bancaire qu'aux seules
autorités judiciaires.
L'article 6 alinéa d de la loi de 2003, en revanche,
sans utiliser une formule impérative, procède par une logique a
contrario pour demander aux banques et à leurs dirigeants de
dénoncer certains faits suspects ou convaincus de liens avec le
blanchiment à leur connaissance à l'autorité
monétaire130(*).
L'autorité monétaire au Cameroun est sans doute
exercée par le ministre des finances. En effet, du fait des missions
générales assignées à son département
ministériel, parmi lesquelles celle de veiller sur la bonne santé
financière et économique de la République, il a paru
normal de lui reconnaître quelques pouvoirs en ce sens. En plus, nous
n'ignorons plus les liens indéfectibles qui peuvent se tisser entre
l'évasion fiscale et le blanchiment d'argent. Ainsi, il a paru normal de
permettre à la personnalité ayant la charge de l'ordre
fiscalo-douanier de pouvoir investir les voies empruntées par les
criminels pour troubler ledit ordre.
L'importance du ministre des finances131(*) dans les stratégies
de lutte contre le blanchiment d'argent en Zone CEMAC a par ailleurs
été reconnue à travers le pouvoir de tutelle que la
réglementation communautaire lui confie sur les agences nationales
d'investigation financière.
Paragraphe II -
L'instrument national consacré par la réglementation
communautaire : l'Agence National d'Investigation Financière
(ANIF)
L'organisation de la lutte contre le blanchiment des capitaux
en milieu financier et bancaire est minutieusement élaborée dans
la communauté. A la base des institutions on a les agences nationales
des investigations financières qui sont en effet la cheville
ouvrière du dispositif de lutte dans la CEMAC. Leur rôle est
reconnu comme déterminant du fait de leur intervention sur le double
plan national et communautaire. Nous allons nous attarder sur deux grands
points qui permettront de rendre compte de cette importance. Ainsi, nous allons
étudier l'organisation et le fonctionnement de l'ANIF (A) avant
d'analyser les différentes missions qui lui sont assignées
(B).
A - L'organisation et
le fonctionnement de l'ANIF
Selon l'article 25 du Règlement portant
prévention et répression du blanchiment et du financement du
terrorisme en Afrique Centrale, il est institué dans chaque Etat membre
une agence nationale d'investigation financière. Selon le même
texte, un décret précise dans chaque Etat en conformité
avec le présent Règlement, les modalités d'organisation,
de fonctionnement et de financement de l'ANIF132(*).
Selon l'article 27 du Règlement portant
prévention et répression du blanchiment, l'ANIF doit être
composée de quatre (4) membres133(*). L'alinéa 2 de l'article 27 dispose en outre
que le chef de l'ANIF est l'un des fonctionnaires détachés du
ministère des finances. Ce critère a été justement
respecté au Cameroun, car le chef de l'ANIF ici est issu du
ministère des finances134(*). Au regard de l'importance du rôle que doit
jouer l'ANIF, on peut se demander, si cet effectif prévu par la
réglementation de la CEMAC ne va pas se révéler
insuffisant135(*).
Les membres et correspondants de l'ANIF doivent prêter
serment avant leur entrée en fonction136(*), règle respectée au Cameroun137(*). Lors de la prestation de
serment, ils s'engagent à « accomplir leurs missions
loyalement, dans le strict respect du Règlement et des dispositions
prises pour son application »138(*). En plus, Les membres de l'ANIF doivent travailler
en toute indépendance139(*).
L'ANIF ne fonctionne pas fermée sur elle-même.
Elle compte sur l'appui de ses correspondants140(*), lesquels ont pour mission de collaborer avec elle
dans le cadre de l'exercice de ses missions de façon à assurer
une bonne coopération entre l'ANIF et les Administrations dont ils
relèvent.
L'ANIF, comme presque toutes les autres structures de son
genre141(*), est
placée sous l'autorité du ministre des finances. Cette situation
peut appeler quelques remarques. En effet, parlant du TRACFIN en France, un
magistrat, spécialisé des questions de la délinquance
financière et de blanchiment en France regrette qu'on ait placé
TRACFIN auprès du ministre de l'économie et des finances et non
pas auprès du ministre de la justice. Il pense que cette situation est
« préjudiciable à l'efficacité de cet
organisme, dépourvu de pouvoir d'enquête et placé
auprès d'un ministère qui n'a pas de fonctions
répressives »142(*). A la suite de ces propos, nous constatons aussi que
dans le cadre de la réglementation communautaire, l'ANIF est fortement
influencée par le ministère des finances qui y est
représenté par deux membres dont l'un en est le chef ; en
plus ce ministère en assure la tutelle. On aurait bien aussi
souhaité voir cette influence partagée entre le ministère
des finances et celui de la justice. Mais, nous pensons que cette organisation
voulue par les autorités communautaires n'est pas sans fondement. En
effet, il n'est pas exclu que le choix du ministère des finances pour
assurer la tutelle de l'ANIF soit dicté par la conscience que les actes
de blanchiment affectent beaucoup plus le secteur financier, et par
conséquent, posent des questions beaucoup plus en relation avec ce
domaine. Par ailleurs, dans l'accomplissement de ses missions, l'ANIF
coopère beaucoup avec les autorités relevant du ministère
de la justice, ainsi, le volet répressif qui a fait l'objet des propos
de M. MARTIN précité n'est pas ignoré par les
autorités qui ont pensé cette structure dans la CEMAC.
Le fonctionnement de l'ANIF est sanctionné par des
rapports trimestriels et annuels qu'elle adresse aux ministres en charge des
finances, la sécurité, de la justice ainsi qu'au
secrétaire permanent du GABAC143(*) qui assure d'ailleurs la coordination des
activités des ANIF dans la CEMAC. Ces rapports permettent
d'apprécier le taux de réalisation des missions dévolues
à l'ANIF.
B - Les missions
assignées à l'ANIF
L'ANIF, comme nous l'avons dit plus haut, est une pièce
essentielle du dispositif anti-blanchiment dans la CEMAC. C'est elle en effet
qui travaille à la base auprès des banques et toutes autres
personnes assujetties. Ses missions sont nombreuses et précises.
Selon l'article 25 du Règlement communautaire relatif
à la prévention et à la répression du blanchiment
d'argent, l'ANIF est chargée de recevoir, de traiter, et le cas
échéant de transmettre aux autorités judiciaires
compétentes les déclarations auxquelles sont tenus les organismes
financiers et autres personnes assujettis. Les banquiers sont obligés de
porter à la connaissance de l'ANIF les faits dont ils savent ou qui
paraissent être liés au blanchiment d'argent144(*).
Au terme de ces missions, les banques et leurs agents ne
peuvent désormais déclarer leurs soupçons qu'auprès
de l'ANIF145(*) . Cette
disposition à pour effet majeur de dessaisir les autorités
judiciaires et l'autorité monétaire de cette fonction de
dépositaire automatique des déclarations de soupçons des
banques liées au blanchiment.
Contrairement aux autorités judiciaires qui travaillent
dans la publicité des débats et des poursuites, les membres de
l'ANIF sont tenus selon l'article 31 alinéa 4 du Règlement
précité au « secret des informations recueillies
dans le cadre de le leurs fonctions ou missions, même après la
cessation de celles-ci »146(*).
Cependant, si les membres de l'ANIF doivent demeurer
silencieux sur les faits dont ils ont connaissance dans l'exercice de leurs
fonctions, ils ont en revanche besoin, qu'aucun secret ou silence ne leur soit
opposé dans le cadre de l'exercice de leurs missions. Le
Règlement communautaire précise d'ailleurs qu'ils doivent pouvoir
obtenir, de toute autorité publique, des personnes assujetties ou de
toute personne physique ou morale, la communication des informations et
documents dans le cadre des investigations qu'ils entreprennent à la
suite d'une déclaration de soupçon. C'est ici le lieu de
préciser que le secret bancaire n'est pas opposable aux agents de l'ANIF
dans le cadre de leurs enquêtes.
L'ANIF contribue à travers ses rapports à mieux
connaître les techniques de blanchiment recensées au niveau
national. Elle transmet ces études contenues dans ses rapports au
secrétaire permanent du GABAC. Elle contribue aussi à mieux
lutter contre le mal en proposant dans ses rapports des méthodes de
lutte pouvant permettre de renforcer celles existantes et peut-être aussi
de mieux redéfinir le rôle des établissements bancaires.
L'implication des institutions financières, et surtout
l'assemblage de leurs diverses compétences permettent de mieux
détecter les indices de blanchiment et de veiller à leur
dénonciation. En effet comme souligné dans nos
considérations introductives, l'efficacité de la lutte
anti-blanchiment est tributaire d'une bonne réglementation bancaire, et
surtout du respect scrupuleux de cette dernière.
Les autorités communautaires, par la dimension
institutionnelle qu'elles donnent à ce combat, contribuent ainsi dans
une large mesure à l'efficacité de cette lutte, surtout que
toutes ces institutions contribuent, chacune dans son domaine de
compétence, à prévenir l'utilisation du secret bancaire
à des fins de blanchiment, en supervisant et en encadrant les
établissements assujettis dans l'accomplissement du rôle qui est
attendu d'eux.
CHAPITRE
II : LE
ROLE DES ETABLISSEMENTS BANCAIRES
La lutte contre le blanchiment en Zone CEMAC n'est pas juste
une affaire politique ou institutionnelle, elle ne peut en effet revêtir
une certaine efficacité que si, justement, les professions dites
`'vulnérables'' y participent activement. Ainsi, il faut noter que du
fait de l'utilisation avérée et incontournable de la banque dans
le jeu du blanchiment, elle apparaît naturellement comme un outil
indispensable dans la lutte contre ce mal. Comme nous l'avons en effet vu, les
blanchisseurs recherchent deux choses : masquer l'origine de leurs biens
ainsi que l'identité des personnes impliquées. Et seuls les
établissements de crédit sont à même de pouvoir leur
garantir de pareils services ; on ne peut en principe toujours passer que
par ces établissements pour les traquer.
Conscientes de cette situation, les autorités de la
CEMAC, inspirées des recommandations du GAFI, ont à travers la
COBAC adopté un texte consacré entièrement aux diligences
des établissements assujettis en matière de lutte
anti-blanchiment. Il ressort de ce texte que maintes diligences, devenues
classiques à la profession bancaire, sont désormais soit
renforcées, soit réaménagées pour répondre
aux exigences d'une lutte efficace contre le blanchiment d'argent dans la Zone.
Il s'agit à travers cette nouvelle réglementation d'instaurer un
climat de prudence et de transparence dans les rapports reliant les
établissements de crédit à leurs clients, permettant ainsi
de détecter facilement les indices de blanchiment afin de mieux en
assurer la répression.
La rigueur de ces mesures s'illustre à travers les
obligations que la réglementation impose aux établissements
assujettis (SECTION I) et des sanctions qui en découlent (SECTION
II).
SECTION I - Les
obligations des établissements assujettis
Pour bien participer à la lutte contre le blanchiment
d'argent, et éviter d'être des maillons volontaires ou
inconscients de la chaîne criminelle, les banques doivent être en
mesure de mieux connaître leurs clients et correspondants,
développer une très grande vigilance dans leurs relations avec
ceux-ci, mettre sur pied des procédures internes facilitant la
circulation de l'information, et surtout savoir informer les autorités
chargées d'exécuter les lois anti-blanchiment des agissements
suspects qu'ils auraient détectés dans l'exercice de leur
profession.
Il s'agit grosso modo de mieux connaître ses clients
afin de mieux trahir leurs comportements qui paraîtraient
suspects147(*). Pour
atteindre cet objectif, plusieurs obligations sont imparties aux
établissements bancaires. Nous nous proposons de les étudier
successivement : l'identification des clients (paragraphe I), la
déclaration des opérations suspectes (paragraphe II) et la
coopération avec les autorités en charge de la lutte
anti-blanchiment en milieu financier (paragraphe III).
Paragraphe I -
L'obligation d'identification des clients et correspondants
Naturellement, le client qui va en banque doit se faire
identifier avant de se faire servir, il y va d'ailleurs de son
intérêt. S'il ouvre un compte, il faudra à la longue que
les opérations de débit ne soient pas effectuées ni
ordonnées par n'importe qui, donc, l'identification permettra à
la banque de ne servir que l'ayant droit légitime. Mais, comme nous
l'avons vu, l'identification n'est pas toujours là pour servir le client
en protégeant son compte contre l'accès des intrus. En effet pour
certains clients désirant opérer dans la clandestinité, il
faut mentir et ne pas déclarer sa vraie identité de
manière à pouvoir demeurer introuvable, c'est l'approche que
partage les blanchisseurs dont les maîtres mots de l'action sont
`'anonymat'' et `'silence''. En effet, l'un des secrets recherchés par
les blanchisseurs dans ses relations avec la banque c'est celui de son
identité.
La contre-mesure à cette tactique des blanchisseurs est
le renforcement par les autorités de la CEMAC des dispositions
régissant l'identification des clients et la mise à jour des
mécanismes classiques d'identification. Le contrôle
d'identité des clients d'une banque a, selon certains auteurs
été le premier instrument juridique mis en place dans le cadre de
la lutte anti-blanchiment. Ceci puisque, ce contrôle aboutit à
empêcher l'anonymat des financiers du crime, en bloquant ainsi leurs
opérations. Nous allons présenter les méthodes
générales d'identification (A) et celles particulières (B)
en vigueur dans le cadre de la lutte anti-blanchiment en Zone CEMAC.
A- Les méthodes
générales d'identification
En général, l'identification est soumise
à certaines modalités dont le respect en assure
l'efficacité. La réglementation CEMAC s'est largement
inspirée sur la question, de la recommandation n° 10 du GAFI qui
dispose que les institutions financières ne devraient pas tenir de
comptes anonymes ni de comptes sous des noms manifestement fictifs. Elles
devraient être tenues d'identifier, sur la base d'un document officiel ou
d'une autre pièce d'identité fiable, leurs clients habituels ou
occasionnels, et d'enregistrer cette identité, lorsqu'elles nouent des
relations d'affaires ou effectuent des transactions148(*).
La phase d'identification est très essentielle en
matière de lutte anti-blanchiment149(*). Que le client soit personne physique ou morale, il
doit fournir à la banque des pièces qui certifient et son
existence, et son authentique identité. La vérification des
pièces se fait de manière rigoureuse, ainsi, les pièces
doivent être officielles et non périmées150(*). Ainsi, s'il s'agit d'une
personne physique, l'identification peut être faite à partir de la
Carte Nationale d'Identité en cours de validité, d'un Passeport
en cours de validité et peut-être aussi même d'un permis de
conduire en cours de validité. Si le client est une personne morale
commerçante, les pièces à fournir sont entre autres les
statuts151(*), la preuve
de son immatriculation au registre du commerce et du crédit
mobilier152(*). S'il
s'agit par contre d'une personne morale non commerçante, il sera
exigé le récépissé de déclaration153(*). Le principe est que, en
l'absence d'une pièce garantissant cette authenticité
recherchée, l'identification ne peut être valablement faite.
Selon le GAFI, Les institutions financières devraient
conserver pendant au moins cinq ans tous les dossiers nécessaires se
rapportant aux transactions effectuées et à l'identification de
leurs auteurs. Il est question de pouvoir répondre rapidement aux
demandes d'information des autorités compétentes. Ces dossiers
doivent être suffisamment complets pour permettre de reconstituer les
transactions individuelles de façon à fournir, si
nécessaire, des preuves en cas de poursuites pour conduite
criminelle.154(*) C'est
justement en ce sens que la réglementation anti-blanchiment a vu le
problème de la gestion des documents relatifs au dispositif
anti-blanchiment des établissements bancaires. En effet, il ressort de
l'article 39 du Règlement de 2005 que,
« L'établissement assujetti doit conserver pendant cinq
ans à compter de la clôture de ses comptes, de la cessation de ses
relations avec eux ou de l'exécution de leurs opérations, les
documents relatifs à l'identité de ses clients habituels ou
occasionnels ainsi que les caractéristiques de ces
opérations. »
L'article 13 du Règlement du 4 avril 2003
précise que, les caractéristiques de l'opération et les
informations concernant l'identité et le domicile des
intéressés doivent être consignées par écrit
et conservées par l'établissement assujetti qui les tient avec
les documents et les pièces qui s'y rattachent à la disposition
des autorités chargées de la lutte contre le blanchiment.
L'établissement assujetti doit tout mettre en oeuvre pour recueillir ces
informations auprès du client155(*) afin de pouvoir les conserver, faute de quoi, elle
doit renoncer à traiter avec lui156(*).
L'article 14 du Règlement du 1er avril 2005
pose que « Tout établissement assujetti doit
procéder à la clôture des comptes sur lesquels apparaissent
des problèmes d'identification insolubles en cours de fonctionnement,
ainsi que ceux des clients qui exigent l'anonymat ou se présentent sous
un faux nom. » Mais, on se pose vraiment la question de
savoir s'il n'y a pas incompatibilité entre cette disposition et celle
de l'article 16 du même Règlement qui semble tolérer
l'existence des comptes à numéros, en se bornant juste à
exiger des établissements assujettis un vigilance accrue à
l'égard de pareils comptes. Or, nous avons déjà vu comment
ces comptes à numéros pouvaient sérieusement aider les
blanchisseurs dans leurs activités de blanchiment, on aurait alors
souhaité les voir interdits sur le territoire de la CEMAC, au lieu de
les soumettre juste à une méthodes particulières de
contrôle.
B - Les
méthodes particulières d'identification
Toutes les relations entre les établissements
assujettis et leurs clients ne font pas courir les mêmes risques de
blanchiment. C'est sûrement ce qui a fait introduire certains
paramètres particuliers qui puissent être utilisés pour
identifier certaines personnes et leurs transactions. On va ainsi
s'arrêter d'abord sur le cas des clients occasionnels (1), ensuite sur le
cas des clients non résidents (2) et enfin sur le cas des personnes
politiquement exposées (3).
1- Les
particularités de l'identification des clients
occasionnels
Pour une banque, un client occasionnel est un client qui ne
passe à la banque que pour jouir d'un service précis ou effectuer
une opération ponctuelle. C'est donc un client qui n'a pas de liens
durables avec la banque, il n'y a entre eux aucune relation d'affaires
établie. C'est l'exemple du client qui va à la banque juste pour
toucher un chèque, pour effectuer une opération de change ou pour
réaliser un transfert157(*).
On aurait pu penser que du fait qu'il n'est que `'de passage''
à la banque, il ne serait pas soumis à un contrôle
d'identification tout aussi rigoureux que les clients habituels. Pourtant, la
réglementation anti-blanchiment dans la Zone CEMAC, pose que dans des
conditions déterminées, ce type de client soit rigoureusement
contrôlé.
En effet, ce type de client est soumis à deux types de
contrôle d'identification : d'une part, il n'est soumis à la
procédure `'connaissance clientèle'' normale que
« pour une transaction portant sur une somme supérieure
à un montant défini par le Comité Ministériel de
l'UMAC ou, à défaut, par l'Etat membre ».
D'autre part il est systématiquement et automatiquement
soumis à un contrôle d'identification nonobstant le montant de sa
transaction « lorsque la provenance licite des capitaux n'est pas
certaine » et, « en cas de
répétition d'opérations distinctes, effectuées dans
une période limitée et pour un montant individuel
inférieur au seuil prévu. »
Ces mesures revêtent un certain réalisme dans la
mesure où les blanchisseurs ne sont plus libres de choisir leurs
techniques, les contre mesures tiennent bien compte de la dimension de leurs
stratégies. Les hypothèses qui justifient le contrôle
systématique des clients occasionnels tiennent bien compte de la
technique de fragmentation que les blanchisseurs utilisent souvent pour passer
à travers les mailles des déclarations d'office. Ce
réalisme se poursuit dans la procédure d'identification des
clients non résidents.
2 - La condition
spécifique du client non-résident en matière
d'identification
L'équation à résoudre ici est celle
d'obtenir malgré la distance, des informations authentiques du client
concernant son identité, en effet comme le prévoie l'article 9 du
Règlement de 2005, les clients non-résidents158(*), du fait de la distance ne
seront pas toujours présents à l'entretien d'identification.
Mais, malgré cette situation, le Règlement continue en
précisant qu'ils doivent « faire l'objet d'une
identification et d'une surveillance permanente ».
Nous savons que l'article 4 du Règlement de 2005 exige
que les pièces à présenter soient non seulement
officielles, mais et surtout elles doivent porter une photo du client, devant
permettre au banquier d'apprécier la concordance entre l'image de la
photo et le visage du client ; la distance est de nature à faire
manquer cet objectif. Cet obstacle est perçu par la COBAC qui
précise à l'alinéa 2 de cet article que
« chaque établissement assujetti devra envisager la
possibilité d'une vérification indépendante de la
situation de ses clients non-résidents par un tiers de réputation
confirmée ». 159(*)Et, en vue de limiter les risques pour cette
catégorie de clients, l'alinéa 4 de l'article 9 du
Règlement de 2005 précise que l'établissement bancaire
devra leur appliquer des mesures spécifiques et
adéquates160(*).
Cette rigueur affichée transparaît aussi dans les
procédures d'identification des personnes politiquement
exposées.
3 - Les
spécificités de l'identification des personnes politiquement
exposées
Les circuits de blanchiment se nourrissent le plus souvent des
produits de corruption et de détournements des fonds publics dont se
rendent coupables les hommes politiques et les hauts responsables de
l'Administration Publique de nos Etats. Bien plus, comme nous l'avons vu plus
haut parlant des diplomates, ces derniers se servent souvent de leurs
immunités et autres protections pour blanchir subtilement de fortes
quantités d'argent issues de trafics de tout genre.
Consciente de ces faits, la réglementation
communautaire anti-blanchiment a consacré des dispositions
particulières à l'identification de ceux qu'elle dénomme
« personne politiquement
exposée »161(*). Les établissements assujettis, avant
l'acceptation à leurs guichets des personnes politiquement
exposées, doivent se renseigner sur l'origine des fonds quelle que soit
la nationalité des personnes en cause. Ayant au préalable
exigé que pareilles personnes soient soumises aux normes
« connaissance clientèle
normale »162(*), le Règlement pose en son article 8
alinéa 2 que les établissements assujettis obtiennent
l'autorisation de la haute direction avant de nouer une relation d'affaires
avec de tels clients et surtout d'assurer une surveillance renforcée et
continue de la relation d'affaires.
Ayant identifié leurs clients, les
établissements assujettis deviennent à même de pouvoir les
surveiller, et si dans cet exercice, ils détectent quelque chose de
suspect, ils devront le déclarer.
Paragraphe II -
L'obligation de déclaration des opérations suspectes
Avec la lutte anti-blanchiment en milieu bancaire dans la
CEMAC, le banquier n'est plus un confident absolu de son client, il a
changé de camp, il fait désormais oeuvre de juda. La
déclaration des opérations suspectes, véritable tombeau du
secret bancaire, découle logiquement de l'obligation d'identification
des clients. Car, au terme de cette dernière, le banquier dresse une
série d'indices permettant de mieux connaître le client, de mieux
cerner son comportement afin de pouvoir mieux apprécier la
licéité des opérations qu'il pourra effectuer. À
partir de l'identification, chaque client est désormais traité en
fonction de son profil pré établi par la banque.
Bien plus, le Règlement dispose qu'au-delà de
ces modalités générales de surveillance, un dose de
rigueur soit employée à l'égard des opérations
qu'il qualifie de « haut risque » pour lesquelles
il exige un renforcement de vigilance163(*). Afin de mieux comprendre les implications de cette
obligation du banquier qui rompt avec le devoir classique de non immixtion et
celui du secret du banquier, nous proposons d'analyser d'abord son objet (A),
ensuite nous étudierons les modalités de son exercice (B) et
enfin nous présenterons les éventuelles suites qui peuvent
découler de son exercice (C).
A - L'objet de la
déclaration : les opérations suspectes
Même si les divers Règlements communautaires
régissant la lutte anti-blanchiment dans la CEMAC ne donnent pas une
définition expresse de la notion d'« opérations
suspectes », encore moins d'une liste d'opérations
suspectes, nous avons recensé à la lecture des diverses
dispositions de ces règlements trois catégories d'actes devant
faire l'objet de surveillance minutieuse, car pouvant grandement
véhiculer le blanchiment. Il s'agit des opérations atypiques (1),
des opérations sur des comptes à haut risque (2) et des
opérations portant sur un montant défini par le Conseil
Ministériel de l'UMAC ou par les autorités nationales (3).
1 - Les
opérations atypiques
En général ce qui est atypique, c'est ce qui ne
relève pas de l'ordinaire, ce qui n'est pas courant, ce qui n'est pas
habituel. C'est aussi ce que semble dire le Règlement du 1er
avril 2005 quand il pose que des transactions atypiques sont celles qui sont
sans relation avec l'activité, les habitudes financières ou le
patrimoine de leur auteur164(*).
Un établissement de crédit doit élaborer
en son sein un système de gestion de risques permettant de dresser pour
chaque client un profil clair. La banque doit connaître sa
clientèle, avoir une bonne compréhension des activités
normales raisonnables sur les comptes de sa clientèle de façon
à pouvoir déterminer les transactions atypiques. Dans ces
hypothèses, le compte en lui-même n'appelle pas de suspicion, il
est normal et ce caractère ne disparaît que si dans son
fonctionnement, il sert de base à des opérations à
l'allure suspectes.
Est atypique, une opération qui manque de justification
économique. En principe, dès que les sommes inscrites sur un
compte en banque semblent n'avoir aucun lien avec l'activité du client,
le doute doit naître. Il en est par exemple ainsi lorsque n'ayant aucun
antécédent de travail, un client sans emploi effectue
fréquemment des opérations importantes ou tient un solde de
compte élevé.
2- Les opérations
sur les comptes à haut risque
Au sens du Règlement du 1er avril 2005, un
compte à haut risque est un « compte présentant un
degré de risque élevé en raison de la qualité de
son titulaire, de l'origine douteuse ou incertaine de ses ressources ou de la
nature des opérations qui y sont accomplies, de son pays d'origine ou de
celui des intermédiaires »165(*). En effet, il ne faut pas
perdre de vue que le blanchiment déploie une nocivité
particulièrement grave quand il est associé à certaines
catégories de personnes, de fonctions ou lorsque son processus est
déclenché à partir de certains pays.
L'article 22 du Règlement du 1er avril 2005
précise justement, et de manière expresse la gamme d'indicateurs
permettant de dire qu'un compte est à haut risque :
Il s'agit d'abord de l'activité professionnelle du
client. En effet, le degré de surveillance d'un compte peut doubler en
fonction de la profession du client, surtout si celle-ci est de nature à
beaucoup flirter avec la corruption, le trafic des stupéfiants, le
détournement des fonds publics, ou même le trafic des organes
humains166(*).
Il s'agit ensuite du pays d'origine et de la source du fonds.
La lutte contre le blanchiment des capitaux ne doit tolérer aucune
faille. En effet, du fait de la mondialisation des services bancaires, les
blanchisseurs utilisent de plus en plus les services internationaux des banques
pour blanchir leur argent. Les établissements assujettis à la
COBAC doivent être assez regardants sur les opérations qui ont un
lien avec l'étranger167(*).
Il s'agit en outre du type des opérations que le compte
doit supporter. En effet, un compte dans une banque qui n'existe que pour
réaliser des opérations de change ou de transfert est un compte
suspect. Il peut aussi s'agir d'un compte où les remises ne sont faites
que par des matières précieuses, à l'instar de l'or.
Enfin, on peut ajouter au rang des comptes à `'haut
risque'' les comptes où l'anonymat est requis, plus
précisément des comptes affectés d'un numéro
confidentiel. Cependant, il est des cas où la déclaration doive
être faite à cause seulement du montant de la transaction.
3- Les opérations
excédant le montant seuil
Outre les cas où l'établissement assujetti doit
lui-même analyser la situation pour voir s'il y a lieu de déclarer
ou pas, il est une hypothèse où il est tenu de déclarer
d'office. L'article 12 du Règlement du 4 avril 2003 dispose en son
alinéa 3 ceci : « Tout paiement en espèces ou
par titres au porteur d'une somme dont le montant unitaire ou total est
supérieur à un seuil fixé par le Comité
Ministériel ou à défaut par des dispositions prises par
chaque Etat membre, donne lieu à une déclaration précisant
l'objet de l'opération, l'origine et la destination des espèces
ou titres, ainsi que de l'identité des parties, qui est faite à
l'Agence nationale d'Investigation Financière ».
Il s'agit là d'une mesure qui n'est assorti d'aucune
exception. Ainsi, les établissements assujettis devraient
automatiquement sans besoin d'analyse supplémentaire, déclarer
pareilles transactions à l'ANIF. Toutefois, on peut se demander, si
l'ANIF disposera en temps réels de ressources pour traiter efficacement
toutes les déclarations qui pourront lui être faites. Cette
difficulté conduira dans la pratique à ne pas trop abaisser le
montant seuil des déclarations. Ceci pourrait aussi limiter le nombre de
déclarations en permettant d'accorder un traitement sérieux aux
déclarations qui seront faites.
B - Les
modalités d'exercice de la déclaration par les
établissements assujettis
À la découverte d'une opération suspecte,
l'établissement assujetti doit immédiatement en informer l'ANIF
en vertu de l'article 26 du Règlement de 2005. La formulation de cette
disposition permet de comprendre que désormais, seule l'ANIF est
compétente pour recevoir les déclarations des
établissements assujettis. Si le problème lié à la
détermination de l'autorité compétente se trouve ainsi
résolu, il ne nous reste plus qu'à analyser la désignation
des personnes habilitées à déclarer (1), et, la forme et
les mentions de la déclaration (2).
1- La
désignation des personnes habilitées à
déclarer
La déclaration des opérations suspectes ne se
fait pas dans le désordre et par n'importe qui. Selon le
Règlement COBAC de 2005, les établissements assujettis doivent
désigner en leur sein des agents responsables de cette mission. Il
s'agit en effet, de responsabiliser son personnel et d'instaurer une discipline
qui tienne compte de l'enjeu de l'acte à poser, car la
déclaration ne doit pas être une fantaisie.
L'article 41 dudit Règlement pose en son alinéa
1 que « tout établissement assujetti communique à
l'ANIF et à la COBAC l'identité de ses dirigeants et
préposés normalement habilités à faire la
déclaration ». La compétence confiée
à ces personnes désignées n'est pas absolument exclusive.
Il semble en effet que le souci d'organisation est primé par celui
d'obtenir le maximum de déclarations en en multipliant les sources
à titre exceptionnel et en cas d'urgence168(*). La déclaration doit
contenir certaines mentions.
2 - La forme et
les mentions de la déclaration
La forme de la déclaration est au choix du
délateur, car selon l'article 19 du Règlement du 4 avril 2003,
« la déclaration peut être verbale ou
écrite »169(*). Le principe est que la déclaration soit
faite avant l'exécution par la banque de l'opération douteuse.
Mais compte tenu de certaines circonstances, il peut arriver des
difficultés à déclarer avant l'exécution, car
certaines opérations ne laissent transparaître leur
caractère suspect qu'après coup.
Si la déclaration porte sur une opération non
encore exécutée, le banquier déclarant doit
expressément y faire indication de son délai d'exécution.
Mais, si la déclaration porte sur une opération
déjà effectuée, elle devra le préciser et
être assortie des raisons pour lesquelles l'exécution a
déjà eu lieu.
Concernant les mentions, une déclaration doit pouvoir
fournir des informations utiles à l'ANIF afin de lui permettre de
pouvoir reconstituer les opérations liées à la même
personne.170(*) Ces
informations permettront à l'ANIF de mieux apprécier la suite
à réserver à la déclaration reçue.
C - Les suites
éventuelles de la déclaration
Dans la logique de la réglementation anti-blanchiment
de la CEMAC, une déclaration de soupçon faite à l'ANIF
peut avoir plusieurs suites.
Tout d'abord, c'est le lieu ici de préciser que la
déclaration n'est pas irrévocable. En effet, le déclarant
peut revenir sur sa déclaration, soit pour l'étayer ou la
renforcer, soit alors pour l'infirmer. Cette possibilité découle
de la formulation de l'alinéa 4 de l'article 5 du Règlement du 4
avril 2003 qui dispose que : « toute information de nature
à renforcer le soupçon ou à l'infirmer doit être
immédiatement déclarée à
l'ANIF »171(*).
Ensuite, ayant reçu une déclaration, l'ANIF se
doit d'en accuser réception, à moins que l'établissement,
auteur de la déclaration l'en dispense172(*).
Enfin, il peut arriver que le soupçon du
déclarant se transforme en présomption de blanchiment d'argent.
Dans ce cas, si l'opération n'a pas encore été
effectuée, l'ANIF pourra s'opposer à son
exécution173(*).
L'opposition174(*) est
alors notifiée au déclarant par télécopie ou par
tout autre moyen laissant trace écrite par le chef de l'ANIF.
L'établissement ainsi notifié doit se soumettre pendant une
durée qui ne peut excéder 48 heures, sauf en cas de prorogation
dudit délai par ordonnance du juge pour une durée
supplémentaire qui ne peut excéder 8 jours, comme le
prévoie l'alinéa 2 de l'article 33 du Règlement du
1er avril 2005.
La procédure de déclaration est très
confidentielle. La rigueur du régime de cette confidentialité
s'illustre à travers son imposition même au procureur de la
République. Ainsi, si les soupçons déclarés se
révèlent accentués et que l'ANIF en saisit le procureur de
la République, « la déclaration dont ce dernier est
avisé ne figure pas au dossier de la
procédure. »175(*). La confidentialité est une condition
essentielle du dispositif, tant pour s'assurer la coopération des
banques que pour préserver l'efficacité des investigations
ultérieures. La confidentialité est aussi un devoir pour le
délateur qui doit s'abstenir d'informer l'auteur de l'opération
suspecte.
Il arrive souvent, qu'au lieu d'aller soi-même
déclarer, les établissements assujettis se voient plutôt
sollicités par les autorités en charge de la lutte
anti-blanchiment dans la CEMAC, pour fournir quelques informations ou documents
utiles à une enquête sur le blanchiment.
Paragraphe III -
Le devoir de coopération au profit des autorités de
lutte
La banque n'est plus un lieu sûr, sacré,
où on peut faire dormir une fortune discrètement sans subir
l'intrusion des tiers. Même si, l'activité du blanchiment a
échappé à la vigilance du banquier, ou plutôt a
profité de sa complicité, il lui sera difficile d'échapper
aux enquêtes des autorités anti-blanchiment si elles
découvrent sa trace.
La réglementation anti-blanchiment impose aux
établissements assujettis à la COBAC d'apporter pleine
collaboration aux autorités en charge de la lutte anti-blanchiment si
ces dernières sollicitent leur collaboration. Si au Cameroun comme nous
l'avons relevé plus haut, le régime était
déjà applicable aux banques avec les lois de 1997 et de 2003, il
faut préciser que la réglementation communautaire
anti-blanchiment a le mérite et la particularité de limiter de
manière absolue les personnes et autorités habilitées
à requérir la collaboration des établissements bancaires
dans le cadre de la lutte anti-blanchiment176(*). Cette communication heurte déjà, nous
l'avons dit, le principe du secret bancaire ; alors il ne faudra pas
laisser n'importe qui jouir d'un tel privilège.
L'établissement assujetti est tenu non seulement
à une obligation de coopération, consistant en la communication
de l'information nécessitée par l'autorité
considérée, mais aussi et surtout, il doit s'exécuter dans
de brefs délais. L'article 44 du Règlement du 1er
avril 2005 exige en effet des établissements assujettis qu'ils prennent
des mesures d'organisation nécessaires pour être à
même de communiquer « dans de meilleurs délais
à l'ANIF ou à la COBAC » sur leur demande, les
rapports, documents et pièces qui s'y rattachent.
On peut toutefois noter que le Règlement du
1er avril 2005 semble nourrir une certaine méfiance à
l'égard des autorités judiciaires177(*) en ceci qu'il ne leur
reconnaît pas expressément beaucoup de cas d'intervention. Ceci
contrairement au Règlement de 2003 qui confère à ces
autorités de réels pouvoirs178(*)même si les mesures qui en découlent
sont rigoureusement encadrées par le même texte179(*).
Le défaut pour un établissement bancaire, de
déférer à la requête d'une de ces autorités,
tout comme le manquement à toute autre diligence découlant de
l'organisation de la lutte anti-blanchiment, sont passibles de sanctions.
SECTION II - Les
sanctions des obligations des établissements bancaires
La lutte contre le blanchiment d'argent dans le secteur
financier dans la CEMAC, est un défi pour les autorités
communautaires. Convaincues des risques graves qu'il y a à
tolérer un système bancaire complaisant et complice des actes de
blanchiment, elles ont assorti les diligences imposées aux
établissements assujettis de sanctions. Il s'ensuit que les obligations
imparties aux établissements assujettis à la COBAC par la
réglementation anti-blanchiment en vigueur, revêt un
caractère impératif, dont la bonne exécution, la non ou la
mauvaise exécution sont toutes sanctionnées par les dispositions
des Règlements en vigueur sur la question.
Nous nous proposons d'analyser ces sanctions à deux
niveaux : d'une part, il s'agit d'étudier l'exemption de
responsabilité des établissements assujettis comme sanction de la
bonne exécution des diligences (paragraphe I) et, autre part, d'analyser
le régime des sanctions applicables en cas de faute des
établissements assujettis (paragraphe II).
Paragraphe I -
L'exemption de responsabilité des établissements
assujettis
Le principe est posé par les articles 30 et suivants du
Règlement du 1er avril 2005, d'où il ressort que les
établissements assujettis sont garantis que leur responsabilité
ne serait nullement engagée, s'ils accomplissent leurs diligences de
bonne foi. L'exemption de responsabilité n'est pas automatique, elle est
soumise à une conditionnalité. C'est pourquoi, nous proposons de
nous arrêter un instant sur l'analyse des conditions d'exemption (A)
avant de préciser la conséquence de cette exemption (B).
A- Les conditions
d'exemption de responsabilité
Le Règlement communautaire pose bien que les
établissements assujettis ne sont exempts que de la
responsabilité qui découlerait de l'exercice « de
bonne foi » de leurs diligences ; peu importe que le
soupçon déclaré donne lieu à des enquêtes,
poursuites, condamnations ou pas.
La première condition requise, c'est la bonne foi.
L'article 30 du Règlement de 2005, l'exige quand il dispose :
« Pour des sommes ou les opérations ayant fait l'objet de
la déclaration et des diligences prescrites, aucune poursuite
pénale ne peut être intentée contre l'établissement
assujetti, ses dirigeants et ses préposés qui ont agi de bonne
foi. » Le problème ici, c'est que, cette notion à
laquelle font référence tous ces textes n'est pas définie
par eux.
De plus, on est porté à déduire que, les
actes et diligences accomplis de mauvaise foi seront sanctionnés. Mais
là aussi, les textes ne précisent ni ce qui constitue la mauvaise
foi, ni la sanction qui doive le cas échéant être
appliquée. Ce silence et cet imbroglio sont très nuisibles
à l'esprit d'efficacité jusque là entretenu par les
dispositifs mis sur pied pour lutter contre le blanchiment des capitaux dans
l'espace CEMAC180(*).
Les autres éléments de cette
conditionnalité sont des éléments indifférents. En
effet, dans le même esprit que la Recommandation n° 16 du GAFI,
l'article 31 alinéa 2 du Règlement de 2005 dispose que
l'établissement assujetti est exempt de responsabilité
« même si les enquêtes n'ont donné lieu, ni
à poursuites, ni à une condamnation, ou même si la preuve
du caractère délictueux des faits à l'origine de la
déclaration n'est pas rapportée ou encore si ces faits ont fait
l'objet d'une décision de non-lieu, de relaxe ou
d'acquittement ». On doit sûrement revenir, à la
philosophie sous tendue par cette lutte en milieu bancaire pour comprendre
pourquoi l'exemption n'est pas conditionnée par une quelconque suite
donnée au soupçon. Il s'agit en effet d'un dispositif incitateur
à la délation, encadré par des peines plus lourdes en cas
de non déclaration qu'en cas de violation du secret bancaire181(*). Cette stratégie peut
avoir un côté pervers. En effet, il sera fréquent que les
établissements assujettis, fassent des déclarations, juste pour
simuler une certaine volonté active de coopération, alors qu'au
fond, elles veulent fuir le risque des sanctions plus lourdes. Et, puisqu'il
s'agit d'une contrainte, il est tout à fait normal que l'Etat les
dispense des responsabilités pouvant en découler. Mais alors,
qu'en est il des victimes innocentes d'un pareil dispositif ? Cette
question trouvera sans doute réponse dans l'étude des
implications de cette exemption.
B - Les
conséquences de l'exemption de responsabilité des
établissements assujettis
S'il est normal d'exempter les établissements
assujettis des responsabilités découlant de l'exercice de bonne
foi des diligences imposées par la lutte anti-blanchiment, il ne demeure
pas moins injuste de léser les personnes qui pourraient souffrir d'un
tel dispositif. Le Règlement du 4 avril 2003 apporte une réponse
à ce problème. Il dispose justement en son article 68 qu'
« en cas de préjudice résultant directement des
déclarations, diligences et mesures prévues par le présent
Règlement, l'Etat répond du dommage subi dans les conditions
prévues par les textes en vigueur sans aucune possibilité
d'action récursoire ».
Ainsi, les personnes qui auraient injustement souffert d'une
diligence, notamment d'une déclaration de soupçon, d'une mesure
d'opposition de l'ANIF, d'une mise sur surveillance des comptes bancaires par
les autorités judiciaires... réclameront dédommagement
auprès de l'Etat.
Cette mesure, rappelle s'il en était encore besoin, que
la lutte contre le blanchiment des capitaux est une affaire de l'Etat, elle
engage la responsabilité de ce dernier. L'Etat doit supporter tous les
aléas d'un dispositif qu'il a lui-même mis sur pied, quoique
l'objectif visé soit très noble. Il s'agit en effet d'une
responsabilité définitive, car, après avoir
dédommagé les victimes, il ne jouira d' «aucune
possibilité d'action récursoire182(*) ». Mais, si l'établissement
assujetti a en outre commis une faute, il encourt des sanctions.
Paragraphe II -
Le régime des sanctions applicables en cas de faute des
établissements assujettis
Les diligences imposées aux établissements
assujettis doivent être scrupuleusement respectées. Une mauvaise
action183(*) ou une
abstention184(*) peuvent
être sanctionnées par des autorités.
Ces sanctions peuvent être administrées par deux
catégories d'autorités : soit il s'agit des autorités
de contrôle de la profession bancaire (A) qui sanctionnent alors au plan
disciplinaire, soit il s'agit des autorités judiciaires pour ce qui
concerne les sanctions civiles et pénales (B).
A- La mise en oeuvre des
sanctions disciplinaires par la COBAC
En cas de défaillance par un établissement
assujetti dans l'accomplissement des diligences imposées en
matière de lutte anti-blanchiment, la COBAC peut exercer son pouvoir
disciplinaire. Ces possibilités sont expressément reconnues par
le Règlement du 1er avril 2005, qui les prévoie en ses
articles 55 et 60.
L'article 55 dispose qu' « en cas de non-respect
avéré des procédures internes et exigences
réglementaires par un établissement assujetti, la Commission
Bancaire prend des mesures appropriées, sévères et
publiques si les circonstances l'exigent ». Cette disposition
est renforcée et précisée par l'article 60 pour lequel
lorsque par suite soit d'un grave défaut de vigilance, soit d'une
carence dans l'organisation de ses procédures internes de
contrôle, un établissement assujetti a omis d'accomplir les
obligations mises à sa charge, la COBAC peut engager une
procédure disciplinaire sur le fondement des dispositions des textes
régissant la profession.
En effet selon la Convention portant création d'une
Commission Bancaire de l'Afrique Centrale, la COBAC exerce sur tous les
établissements qui lui sont assujettis un pouvoir disciplinaire. Cette
Convention stipule d'ailleurs en son article 13 que si un établissement
de crédit n'a pas déféré à une injonction ou
n'a pas tenu compte d'une mise en garde, ou a enfreint gravement la
réglementation, la Commission Bancaire peut prononcer une ou plusieurs
des sanctions disciplinaires, lesquelles peuvent varier en fonction du
degré des fautes185(*). Dans le cadre de la lutte anti-blanchiment,
l'article 60 précité ajoute qu'outre l'exercice de son pouvoir
disciplinaire, la COBAC doit aviser le Procureur de la République de
l'Etat sur le territoire duquel a été relevée l'infraction
punie.
Toutefois, ces décisions doivent être
motivées, et ne pourront être prononcées qu'après
que les responsables de l'établissement en cause, qui peuvent
requérir l'assistance d'un représentant de leur Association
Professionnelle ou même par un avocat186(*), aient été invités à
formuler leurs observations soit par écrit, soit lors d'une audition. En
effet, il s'agit de constater ici que les responsables de banques jouissent
devant la COBAC, des mêmes droits de défense que devant une
juridiction ordinaire.
B - La mise en oeuvre
des sanctions civiles et pénales par l'autorité
judiciaire
Le comportement d'un établissement bancaire peut se
révéler incompatible à la réglementation
anti-blanchiment. Bien plus, ayant agi en dehors des cas de bonne foi, la
banque va normalement devoir répondre de ses actes à
l'égard des victimes. Nous envisagerons donc ici, les sanctions
pénales (1) et les sanctions civiles (2) dont peuvent être
condamnés les établissements fautifs.
1 - Les sanctions
pénales
Les établissements bancaires coupables d'avoir
manqué à l'une de leurs obligations et diligences prévues
par la réglementation anti-blanchiment en vigueur dans la CEMAC sont
passibles des mêmes peines que les actes de blanchiment d'argent. Tel est
l'esprit de la réglementation communautaire187(*).
Le Règlement du 4 avril 2003, traite la question avec
plus de rigueur. Il a réservé au banquier défaillant, la
même sanction que celle qui est réservée au blanchisseur.
Cette sanction est celle qui est contenue dans son article 46, qui
dispose qu' «est puni d'un emprisonnement de 5 à 10 ans et
d'une amende pouvant aller jusqu'à cinq fois le montant des sommes
blanchies sans être inférieure à FCFA 10 000 000,
celui qui aura commis intentionnellement un ou plusieurs agissements
énumérés à l'article 1er ci-dessus
relatif à la définition du blanchiment des
capitaux ».
Toutefois, à la lecture de l'article 48 de ce
Règlement, il ressort que ce sont les agents et les dirigeants de ces
établissements assujettis qui vont en définitive supporter les
sanctions qui seront prononcées. Puisque cet article dit qu'est puni des
peines prévues pour l'infraction de blanchiment des capitaux le fait
« pour les dirigeants ou les agents des organismes
financiers » de porter à la connaissance du
propriétaire des sommes ou de l'auteur de la déclaration faite
à l'ANIF. En effet, il serait irréaliste de croire pouvoir
soumettre des établissements, qui sont en principe des personnes
morales, à des peines d'emprisonnement. Mais, nous pensons qu'il
faudrait que les amendes soient plutôt mises à la charge de la
personne morale, et non à celle des agents188(*).
Bien plus, de véritables sanctions applicables aux
établissements assujettis apparaissent à l'article 53 du
Règlement du 4 avril 2003. Il s'agit en effet des sanctions
supplémentaires qui peuvent en outre être prononcées
à l'encontre des personnes morales condamnées pour les
infractions de blanchiment189(*). Ces sanctions complémentaires sont
importantes, en effet, elles permettent de sanctionner la structure en
elle-même, et même de pouvoir la détruire.
S'il apparaît que le blanchiment a été
commis de façon habituelle en utilisant les facilités que procure
l'exercice de l'activité bancaire, les peines de l'article 46 seront
doublées. C'est ce qui ressort en effet de l'article 47 du
Règlement du 4 avril 2003.
2 - Les sanctions
civiles
La lecture de l'article 31 du Règlement du
1er avril laisse comprendre que la banque, ne peut être
exempte de responsabilité civile pour violation du secret bancaire, que
lorsqu'elle a accompli ses diligences de bonne foi. Ainsi, il demeure pensable,
qu'en cas de mauvaise foi de l'établissement bancaire, le client trahi
pourra légitimement le poursuivre en réparation du dommage qu'il
aurait de ce fait subi.
Même si les textes en vigueur sur la question n'ont pas
précisé cette situation, on peut toutefois se rapprocher des
éléments du régime de la responsabilité civile
posé à l'article 1382 du code civil pour résoudre ce
problème. Cependant, on doit relever que, dans ce contexte, c'est
l'établissement assujetti qui devra prouver qu'il a agi de bonne foi. On
suppose, en effet, que l'action du client contre l'établissement
assujetti, ne se fera qu'après que l'Etat l'ait repoussée pour
absence de bonne foi de ce dernier190(*), ce qui laissera déjà planer sur lui
une présomption de mauvaise foi.
On se demande en outre, s'il suffira pour le client trahi
injustement de prouver que son secret bancaire a été
violé, ou alors, il devra apporter la preuve d'un préjudice subi.
En attendant que la question soit davantage précisée par la
jurisprudence et la doctrine, nous pensons quand même que, si l'existence
d'un préjudice subi par le client n'est pas requis pour sanctionner au
pénal le banquier fautif191(*) ; au civil pourtant, la réparation vise
par essence à pallier un dommage dont la preuve est nécessaire,
ainsi, le client devra établir le préjudice subi et le lien de
causalité.
CONCLUSION DU TITRE II
Il y a lieu de dire que la CEMAC a choisi son camp : la
lutte contre le blanchiment de capitaux en milieu bancaire et financier est
devenu dans cet Espace économique l'une des grandes priorités de
la construction communautaire en Afrique Centrale. La Déclaration des
Chefs d'Etats de N'Djamena n'est pas restée lettre morte, un arsenal
juridique est désormais institué pour encadrer les relations
entre le banquier et ses clients, même si certaines précisions
restent à fournir192(*). La banque dans la Zone CEMAC n'est plus un lieu
sacré, secret, où tout peut être caché.
Toutefois, la recherche de l'équilibre
opérée par la réglementation anti-blanchiment dans la
CEMAC, autorise à constater pertinemment que le secret bancaire n'est
pas mort avec la lutte anti-blanchiment, les honnêtes clients y auraient
toujours droit, et en cas de préjudice, réparation incomberait
à l'Etat ou à l'établissement assujetti selon les cas.
CONCLUSION
GENERALE
Au terme de notre analyse, nous constatons que la
volonté de lutter contre le blanchiment des capitaux dans le secteur
bancaire en Zone CEMAC est désormais une réalité. Les
textes sont mis en place, et les mécanismes institués.
Au nom de ce combat contre le blanchiment d'argent, le secret
bancaire du fait de son rôle convaincu dans le processus de blanchiment,
se trouve quelque peu malmené dans la CEMAC. Cependant, l'importance de
sa valeur est reconnue à travers l'institution d'un mécanisme de
réparation au profit des clients lésés injustement. La
charge de cette réparation pèse a priori sur l'Etat,
véritable orchestreur de cette lutte. Mais aussi, l'attitude de
l'établissement assujetti dans l'accomplissement de ses diligences peut
le rendre responsable des dommages qui pourront s'en suivre.
Malgré la jeunesse de ce dispositif anti-blanchiment en
milieu bancaire, le souci de l'équilibre initié par les
autorités de la CEMAC à travers le mécanisme de
déclaration contrebalancé par la réparation des dommages
causés aux clients honnêtes, nous autorise un peu à lui
promettre un avenir radieux, conciliateur des intérêts d'une
économie saine et des prérogatives de la sphère
privée.
Toutefois, il faut relever que l'effectivité et
l'efficacité de ce dispositif nécessite que des mesures
complémentaires soient prises par les autorités sous
régionales. En ce sens, il faudra prendre des mesures pour limiter la
circulation des espèces en limitant leur pouvoir
libératoire et en promouvant la bancarisation des populations; il
faudra limiter la tendance à la désintermédiation
financière et, surtout interdire ou du moins veiller au contrôle
des comptes bancaires ouverts dans les paradis fiscaux au profit des hommes
politiques et publics de la sous région193(*).
En bref, puisqu'il s'agit de traquer les criminels par la
banque, il faut restaurer le monopôle bancaire et veiller à son
respect, afin de mieux contrôler les flux financiers.
ANNEXES.
ANNEXE I : Déclaration de la
Conférence des Chefs d'Etats de la CEMAC du 14 décembre 2000
à N'djamena
ANNEXE II : Règlement
n° 02/02/CEMAC/UMAC/CM, portant organisation et fonctionnement du Groupe
d'Action contre le Blanchiment d'Argent en Afrique Centrale (GABAC)
ANNEXE III : Décret
n° 2005/187 du 31 mai 2005 portant organisation et fonctionnement de
l'Agence Nationale d'Investigation Financière (ANIF).
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· Traité de N'djamena du 16 mars 1994 instituant
la CEMAC.
· Acte additionnel du Traité de la CEMAC N°
9/00/CEMAC-086/CCE du 14 décembre 2000 portant création du
GABAC.
· Convention de coopération monétaire entre
les Etats membres de la Banque des Etats de l'Afrique Centrale (BEAC) et la
République française, signée à Brazzaville le 23
novembre 1972.
· Convention régissant l'union Monétaire de
l'Afrique Centrale.
· Les 40 recommandations du GAFI, 1990.
· Déclaration de la Conférence des Chefs
d'Etats de la CEMAC du 14 décembre 2000 à N'djamena.
· Règlement COBAC du 22 décembre 1992
relative à la procédure et d'audition des dirigeants
d'établissements de crédit.
· Règlement n°02/00/CEMAC/UMAC/CM du 29 avril
2000 portant réglementation des changes dans la CEMAC.
· Règlement N° 02/02/CEMAC/UMAC/CM du 14
avril 2002 portant organisation et fonctionnement du GABAC.
· Règlement N° 01/03-CEMAC-UMAC-CM du 04
avril 2003 portant prévention et répression du blanchiment des
capitaux et du financement du terrorisme en Afrique Centrale.
· Règlement COBAC R-2005/01 du 1er
avril 2005 relatif aux diligences des établissements assujettis en
matière de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du
terrorisme en Afrique Centrale.
· Loi camerounaise N° 2003/004 du 21 avril 2003
relative au secret bancaire au Cameroun.
· Loi camerounaise N° 97/019 du 7 août 1997
relative au contrôle des stupéfiants.
· Loi camerounaise n° 003/2006 du 25 avril 2006
relative à la déclaration des biens et avoirs
· Décret du 31 mai 2005 portant organisation et
fonctionnement de l'Agence nationale d'investigation financière (ANIF)
du Cameroun.
TABLE DES MATIERES
DEDICACE
i
REMERCIEMENTS
ii
PRINCIPALES ABREVIATIONS
iii
SOMMAIRE
iv
INTRODUCTION GENERALE
1
TITRE I : LA COUVERTURE DES MECANISMES ET
TECHNIQUES DU BLANCHIMENT PAR LES TECHNIQUES BANCAIRES.
8
CHAPITRE I : L'EXISTENCE DES
PASSERELLES ENTRE LES TECHNIQUES BANCAIRES ET LE BLANCHIMENT.
10
Section I - Le traitement confidentiel de
certaines opérations bancaires.
10
Paragraphe I - L'utilisation des techniques
empêchant une identification efficace.
10
A - l'utilisation des techniques
protégeant l'identité du blanchisseur.
11
1- L'emploi de pseudonymes comme
identifiant.
11
2- L'utilisation des chiffres comme
identifiant.
12
B - Techniques permettant la dissimulation de
la consistance et de la provenance des fonds.
12
Paragraphe II - La sollicitation des
intermédiaires dans les rapports avec la banque.
13
A- les intermédiaires réels
13
1 - Le recours à des
professionnels.
14
2- L'exploitation des intermédiaires
occasionnels.
15
B - Les intermédiaires fictifs.
17
Section II - La négligence coupable de
certains acteurs.
18
Paragraphe I - Le laxisme de la
réglementation bancaire dans les paradis fiscaux.
19
A - L'attraction des sociétés et
activités ``offshore''.
19
1 - La non surveillance des
opérations de transfert de fonds et de capitaux.
20
2 - La déficience dans le
contrôle des changes.
22
B - La sacralisation du secret bancaire.
24
Paragraphe II - L'éventuelle
complicité des banques et de leurs agents.
26
A - La technique de prélèvement
des pourcentages.
26
B - La faible culture bancaire de certains
agents de banques.
28
CHAPITRE II : LE RENFORCEMENT DE
LA CONFIDENTIALITE DANS LES SERVICES PARTICULIERS DE LA BANQUE.
30
SECTION I - La question de l'identification
des clients dans les cyberservices de la banque.
30
Paragraphe I - Les difficultés
d'identification des `'cyber-clients'' dans leurs rapports avec la banque.
31
A - L'existence d'une distance entre la banque
et son client.
32
B - la liberté du client dans
l'utilisation des services à distance de la banque.
34
Paragraphe II - La furtivité des
opérations bancaires sur Internet.
36
SECTION II - Les limites juridiques au
contrôle de certaines opérations bancaires.
39
Paragraphe I - La protection des comptes des
missions diplomatiques.
39
Paragraphe II - La forte discrétion des
opérations effectuées sur des coffres-forts.
41
CONCLUSION DU TITRE I
44
TITRE II : LES RESTRICTIONS DU SECRET
BANCAIRE EN ZONE CEMAC : UN GAGE D'EFFICACITE POUR LA LUTTE CONTRE LE
BLANCHIMENT.
45
CHAPITRE I : LA DIMENSION
INSTITUTIONNELLE DE LA LUTTE ANTI-BLANCHIMENT EN ZONE CEMAC.
47
SECTION I - le rôle des institutions
communautaires dans la prévention du secteur bancaire contre le
blanchiment.
47
Paragraphe I - L'apport déterminant des
organes de contrôle de l'activité bancaire.
48
A - La volonté d'assainissement du
système bancaire de la BEAC.
48
1 - La BEAC et ses objectifs.
48
2 - L'action de la BEAC en matière
de lutte anti-blanchiment en milieu bancaire.
49
B - L'importance du rôle de supervision
de la COBAC dans le cadre de la lutte contre le blanchiment.
50
Paragraphe II - Le concours technique du
GABAC.
52
A - La mission de coordination des
stratégies de lutte anti-blanchiment dans la CEMAC.
52
B - la mission de coopération du
GABAC.
54
SECTION II - Les instruments des dispositifs
nationaux contre le blanchiment en milieu bancaire : Exemple du
Cameroun.
55
Paragraphe I - Les instruments nationaux
`'classiques'' de lutte contre le blanchiment en milieu bancaire au
Cameroun.
56
A - Les autorités judiciaires.
57
B - L'autorité monétaire.
58
Paragraphe II - L'instrument national
consacré par la réglementation communautaire : l'Agence
National d'Investigation Financière (ANIF).
59
A - L'organisation et le fonctionnement de
l'ANIF.
59
B - Les missions assignées à
l'ANIF.
61
CHAPITRE II : LE ROLE DES
ETABLISSEMENTS BANCAIRES.
64
SECTION I - Les obligations des
établissements assujettis.
64
Paragraphe I - L'obligation d'identification
des clients et correspondants.
65
A- Les méthodes générales
d'identification.
66
B - Les méthodes particulières
d'identification.
68
1- Les particularités de
l'identification des clients occasionnels.
68
2 - La condition spécifique du
client non-résident en matière d'identification.
69
3 - Les spécificités de
l'identification des personnes politiquement exposées.
70
Paragraphe II - L'obligation de
déclaration des opérations suspectes.
70
A - L'objet de la déclaration :
les opérations suspectes.
71
1 - Les opérations
atypiques.
71
2- Les opérations sur les comptes
à haut risque.
72
3- Les opérations excédant le
montant seuil.
73
B - Les modalités d'exercice de la
déclaration par les établissements assujettis.
73
1- La désignation des personnes
habilitées à déclarer.
74
2 - La forme et les mentions de la
déclaration.
74
C - Les suites éventuelles de la
déclaration.
75
Paragraphe III - Le devoir de
coopération au profit des autorités de lutte.
76
SECTION II - Les sanctions des obligations des
établissements bancaires.
78
Paragraphe I - L'exemption de
responsabilité des établissements assujettis.
78
A- Les conditions d'exemption de
responsabilité.
78
B - Les conséquences de l'exemption de
responsabilité des établissements assujettis.
80
Paragraphe II - Le régime des sanctions
applicables en cas de faute des établissements assujettis.
80
A- La mise en oeuvre des sanctions disciplinaires
par la COBAC.
81
B - La mise en oeuvre des sanctions civiles et
pénales par l'autorité judiciaire.
82
1 - Les sanctions pénales.
82
2 - Les sanctions civiles.
83
CONCLUSION DU TITRE II
85
CONCLUSION GENERALE
86
ANNEXES.
87
BIBLIOGRAPHIE
96
* 1 Selon l'Art.
1er du Règlement UMAC du 4 avril 2003 relatif à la
prévention et à la répression du blanchiment des capitaux
en Zone CEMAC : « le blanchiment des capitaux désigne un
ou plusieurs des agissements ci-après énumérés
commis intentionnellement
a) la conversion ou le transfert de biens provenant d'un crime
ou d'un délit au sens des textes applicables dans l'Etat membre ou du
présent Règlement, dans le but de dissimuler ou de
déguiser l'origine illicite desdits biens ou d'aider toute personne qui
est impliquée dans la commission de ce crime ou délit à
échapper aux conséquences juridiques de ses actes
b) la dissimulation ou le déguisement de la nature, de
l'origine, de l'emplacement, de la disposition, du mouvement ou de la
propriété de biens provenant d'un crime ou d'un délit au
sens des textes applicables dans l'Etat membre ou du présent
Règlement
c) l'acquisition, la détention ou l'utilisation de
biens provenant d'un crime ou d'un délit au sens des textes applicables
dans l'Etat membre ou du présent Règlement
d) la participation à l'un des actes visés au
présent article, l'association pour commettre ledit acte, les tentatives
de le perpétrer, le fait d'aider, d'inciter ou de conseiller quelqu'un
à le faire ou le fait d'en faciliter l'exécution.
La connaissance de l'origine des biens ou l'intention de
commettre les faits susvisés nécessaire en tant
qu'élément de l'infraction peut être établie
à partir de circonstances de fait objectives. »
* 2 Cf. BONNEAU (Thierry),
droit bancaire, 12e éd.. Montchrestien, Domat, coll.
Droit privé, p. 138.
* 3 GAFI, `'Tout sur le
blanchiment des capitaux'', site officiel du GAFI :
http://www.fatf-gafi.org.
* 4 CHESNEY (Marc),
professeur de finance au groupe HEC et président du centre
d'études sur le blanchiment d'argent et la corruption de la France.
Cité dans `'Forum de Paris, Les Journées HEC-Parquet Financier de
Paris : compte rendu des tables rondes (édition 1999)'' in la
Lettre du Blanchiment, numéro hors série, janvier 2000.
http://www.paranos.com/espionage/conf.html
* 5 Sommet des 7 pays les
plus industrialisés du monde, G7.
* 6 En effet, en privant les
délinquants de ces gains mal acquis, on les atteint à leur point
sensible, et faute de bénéfices utilisables, l'activité
criminelle s'interrompt.
* 7Encore dite phase de
prélavage. A ce stade, le criminel en possession de son butin introduit
ses bénéfices illégaux dans le système financier.
Le but ici est de se débarrasser matériellement d'importantes
sommes en numéraires. Plusieurs techniques sont le plus souvent
utilisées ici, il peut y parvenir en fractionnant de fortes
quantités d'espèces pour obtenir des sommes plus petites et moins
suspectes à déposer directement sur un compte bancaire, ou en se
procurant divers instruments monétaires (chèques, ordres de
virements...) qui sont ensuite collectés et déposés sur
des comptes en d'autres lieux, c'est alors qu'intervient la seconde phase.
* 8 A ce stade, l'argent
étant déjà dans le circuit financier, le blanchisseur
s'active à brouiller les pistes pouvant mener jusqu'à son
origine. Cette phase interdit toute possibilité de remonter à
l'origine des produits illicites, grâce à un système
complexe de transactions financières successives destiné à
travestir la trace comptable de ces profits. Il le fait en multipliant les
conversions et les déplacements de fonds d'un compte bancaire à
un autre, chaque compte à ce niveau pouvant lui-même être
décomposé en sous compte. Une fois ces fonds
éloignés de maints soupçons, le blanchisseur passe
à la dernière phase.
* 9 Ici, le but est de donner
une explication économique à la richesse
« blanchie ». Les risques, dans leur majorité sont
écartés, les fonds sont alors introduits dans des
activités économiques légitimes par des investissements
dans l'immobilier ou dans la création d'entreprises par exemple avec une
grande apparence de légitimité
* 10 Comme par exemple les
pays de l'Espace OHADA où l'harmonisation du droit des affaires vise
entre autres objectifs d'instaurer « un droit qui assure la
sécurité des créanciers, des tiers et des
investisseurs » et donc, adapté aux besoins
économiques, clair, simple et sécurisant les relations et les
opérations économiques. Cf. PAILLUSSEAU (Jean), `'Le droit
OHADA : Un droit très important et original'', in JCP,
n° 4 spécial OHADA année 2004.
* 11 Dans l'affaire
jurado par exemple, le héros Franklin Jurado, diplômé
de HAVARD, est un conseiller financier. HERAIL (Jean-Louis) et RAMAEL
(Patrick) : Blanchiment d'argent et crime organisé : la
dimension juridique, 1ere édition, PUF, 1996, Paris. P.13.
* 12 HERAIL (Jean-Louis) et
RAMAEL (Patrick), op. Cit.
* 13 Un espace national se
révèle en général très réduit pour
les criminels qui recherchent la clandestinité.
* 14 GNIMPIEBA TONNANG
(Edouard), Droit matériel et intégration
sous-régionale en Afrique centrale (contribution à l'étude
des mutations récentes du droit communautaire CEMAC), Thèse,
Université de Nice- Sophia Antipolis, mars 2005. p. 195.
* 15 « La
lutte contre le blanchiment des capitaux est devenue, au niveau de la zone
Franc, un des critères multilatéraux de la bonne gouvernance et
une clé de la bonne gestion publique. » GNIMPIEBA TONNANG
(Edouard), op. cit. p. 196 (note n°603).
* 16 KONAN BANNY (Charles),
gouverneur de la banque centrale des Etats de l'Afrique de l'ouest (BCEAO),
propos tenu lors du Sommet des gouverneurs des banques africaines tenu à
Yaoundé les 29 et 30 juillet 2004. in TCHUENKAM (Boniface), `' Contre le
blanchiment et pour l'intégration monétaire'', paru dans :
Le Financier d'Afrique, n°08, août/sept.2004
* 17 Les gouverneurs des
banques centrales réunis au sommet de Yaoundé en 2004
reconnaissent que le phénomène de blanchiment prend des
proportions grandissantes en Afrique, et que trois grands facteurs justifient
cet état de choses : d'abord ils affirment à
l'unanimité que ce fléau est lié à la
libéralisation des économies africaines et notamment du
système bancaire. Ensuite, ils pensent que cette libéralisation a
renforcé le flux financier dans un contexte où les Etats
africains ne disposent pas de moyens adéquats pour surveiller le
marché ainsi libéralisé. Enfin, on indexe la persistance
de règlements importants en liquide.
* 18 Le 14 décembre
2000, les Chefs d'Etats de la Zone CEMAC réunis au sein de la
traditionnelle Conférence des Chefs d'Etat, ont déclaré
leur « volonté commune et solennelle de tout mettre en oeuvre
pour lutter contre le blanchiment d'argent dans les Etats membres de la CEMAC
par tous moyens appropriés à cette fin, en particulier l'adoption
d'une législation harmonisée et la mise en place de structures
spécialisées. » (Cf. Déclaration de N'Djamena,
14 décembre 2000), même si la lutte contre le blanchiment d'argent
faisait déjà dans certains pays de la CEMAC à l'instar du
Cameroun l'objet de réglementation - incidente - nous pensons que c'est
cette Déclaration des Chefs d'Etats qui institue de manière
`'harmonisée'' la lutte contre le blanchiment d'argent dans la CEMAC.
* 19 Créé par
Acte Additionnel N° 09/00/CEMAC-086 /CCE 02, du 14 décembre
2000.
* 20 Voir préambule
du Règlement numéro 01/03-CEMAC-UMAC- du 4 avril 2003 portant
prévention et répression du blanchiment des capitaux et du
financement du terrorisme en Afrique centrale.
* 21 La convention des
Nations unies contre le trafic illicite de stupéfiants et de substances
psychotropes adoptée à Vienne le 19 décembre 1988 ;
La Convention du Conseil de l'Europe du 8 novembre 1990 relative au
blanchiment, au dépistage, à la saisie, et à la
confiscation des produits du crime ; La Déclaration de principe de
Bâle pour la prévention de l'utilisation du système
bancaire pour le blanchiment de fonds d'origine criminelle ; Les quarante
recommandations du GAFI...
* 22 Règlement COBAC
R-2005/01 relatif aux diligences des établissements assujettis en
matière de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du
terrorisme en Afrique centrale.
* 23 Les banques sont
souvent de connivence avec les blanchisseurs, elles prennent alors des
commissions sur des transactions illicites ou obscures et en retour offrent
leur silence. C'était le cas dans l'affaire Casablanca,
diligentée par le service de douane des Etats-Unis, cf.
http://www.cba.ca/fr/magazine/getarticle.asp?at_id=205.
* 24 Selon l'Association
Suisse des Banquiers, le secret bancaire est, en fait, un droit de la
personne ; il est le garant de la sphère privée ; le
supprimer signifierait ouvrir la voie à l'Etat totalitaire. Citée
par ZIEGLER (Jean), `' Mort programmée du secret bancaire
suisse'' in Le Monde Diplomatique, février 2001, p.
12.
* 25 Pour le cas du Cameroun
on note la loi bancaire de 1985, et plus récemment de la loi
numéro 2003/004 du 21 avril 2003 relative au secret bancaire.
* 26 SOUOP (Sylvain), `'Le
secret bancaire : de la confidentialité à la
délation''. In Juridis Périodique no 56, pp 91-99.
* 27 Ainsi selon la loi du
21 avril 2003 sur le secret bancaire, les administrations du fisc, des douanes,
du trésor ; les autorités judiciaires ; la commission
des marchés financiers, les institutions supérieures de
contrôle des finances publiques peuvent solliciter et obtenir les
informations normalement couvertes par le secret bancaire.
* 28 En effet il faut
reconnaître avec un auteur que le secret bancaire est une
« institution, qui a de nombreux avantages mais qui peut
présenter aussi quelques inconvénients. » Cf. FARHAT
(Raymond), Le droit bancaire : Réglementation-
Instruments, Etude de droit comparé, Beyrouth, Arab printing press,
1995, p. 159.
* 29 « En ce qu'il
relève de la sphère intime de la personne, l'instauration du
régime du secret bancaire renforce l'imperméabilité de
cette sphère...ceci fait évoluer, encore plus rapidement la
reconnaissance et le respect des droits personnels, faisant partie de droits de
l'homme, objet d'un ultime aboutissement des libertés
fondamentales. », Cf. FARHAT (Raymond), op. cit. p. 172.
* 30 Pourtant, pour FARHAT
(Raymond), il reste que l'institution du secret bancaire « constitue
un tout que l'on doit accepter ou rejeter », op. cit. p. 159.
* 31 Citée par HERAIL
(Jean Louis) et RAMAEL (Patrick), op. Cit. p. 41.
* 32 Cf. KOMNAN (Bertrand),
`'bémol sur l'annulation de la dette des pays pauvres'', publié
sur
http://www.icicemac.com.
* 33 Laquelle signature en
temps normal devrait faciliter, à travers la vérification et la
reconnaissance, de s'assurer de la part des agents que l'opération
ordonnée émane du véritable titulaire du compte, mais, du
fait du souci de confidentialité et d'anonymat, cette formalité
est inutile
* 34 HERAIL (Jean Louis) et
RAMAEL (Patrick), op. Cit. p. 40.
* 35 HERAIL (Jean Louis) et
RAMAEL (Patrick), op. Cit. p. 13.
* 36 WACK (René),
chargé de mission au Crédit Lyonnais (France), cité dans
La lettre du blanchiment, op. Cit.
http://www.paranos.com/espionage/conf.html.
* 37 L'appel à des
professionnel permet de remplir l'une des conditions fondamentales de
succès d'une opération de blanchiment, celle-ci :
« ... de toujours faire en sorte qu'elle ressemble le plus possible
à une opération légale. Par conséquent, les
procédés utilisés ne sont eux-mêmes que de simples
variantes des méthodes normalement employées par les entreprises
licites » Cf. ATTAC `'Paradis fiscaux, mode d'emploi, Annexe - Secret
bancaire et blanchiment d'argent'', 10 juillet 2000,
http://www.france.attac.org
* 38 Rapport GAFI 1994,
cité par CHESNAIS (Marc), `'Blanchiment de l'argent sale et
mondialisation financière'', publié sur
http://www.attac.com.
* 39 L'exercice de certaines
diligences prescrites en matière de lutte contre le blanchiment peut
être paralysé du fait du régime de la relation qui peut
exister entre un établissement assujetti et son client. Dans une
espèce, l'établissement assujetti (Société Axa
Conseil vie), se prévalant des exigences en matière de lutte
contre le blanchiment avait refusé de rembourser les bons de
capitalisation qu'il avait auparavant émis, au motif que le porteur, non
seulement n'agissait pas pour son compte, mais refusait de fournir
l'identité de leurs véritables bénéficiaires des
opérations malgré la requête de l'émetteur. La Cour
d'Appel de Paris ayant fait droit au prétentions de l'émetteur a
vu sa décision cassée par la Chambre Commerciale au motif que
« Un émetteur d'un bon ne peut s'exonérer de son
obligation de remboursement en l'absence de toute opposition
régulière, que dans l'hypothèse d'un détournement
de la propriété du bon litigieux, la seule circonstance que le
porteur n'agit pas pour son compte... étant insuffisante pour
caractériser un tel risque... ; qu'en statuant comme elle l'a fait,
la cour d'appel a violé le texte susvisé ». cf. Cass.
Com. 21 janvier 2004, n° 170 FS-P, X. il ressort de cette position de la
Chambre Commerciale que le porteur n'est pas tenu de décliner
l'identité des vrais bénéficiaires de ses
opérations, ce qui est très dangereux dans le cadre de la lutte
anti-blanchiment.
* 40 HERAIL (Jean Louis) et
RAMAEL (Patrick), op. Cit. p. 13.
* 41 POUGOUE (PG), ANOUKAHA
(F) et NGUEBOU TOUKAM (J) , Programme de formation en ligne avec le soutien du
Fonds Francophone des Inforoutes, Sociétés commerciales et du
groupement d'intérêt économique,
http://www.ohada.com ,
* 42 Cf. `'Holding'' in
Encyclopédie numérique MICROSOFT ENCARTA 2004.
* 43 « Comme pour
les SAI (sociétés d'affaires internationales), ces fonds ont
dépassé leur vocation initiale qui est de gérer et
contrôler des actifs au bénéfice d'autrui. »
FERJAULT (Elodie), op. cit. P.41.
* 44 Cf. GUILLIEN (Raymond)
et VINCENT (Jean), Lexique des termes juridiques, Dalloz,
14e édition 2003.
* 45 La lutte
anti-blanchiment commande que plusieurs instruments soient mis à sa
disposition. Ainsi, que le secteur bancaire soit rigoureusement
réglementé, précisément que le secret bancaire soit
souple ; bien plus, puisqu'il s'agit d'une infraction dont le
déploiement s'observe beaucoup plus à l'international, il faut
instaurer une collaboration internationale entre les Etats impliqués
dans la lutte. Cette dernière exigence serait un leurre si
déjà l'Etat sollicité dans le cadre d'un enquête
internationale n'applique pas lui-même les normes standards de lutte.
* 46 Ce type de
société est généralement appelé
société d'affaires internationales, très sollicitée
par les blanchisseurs comme le note un auteur : « les
filières de blanchiment font appel à ce type d'entité pour
cacher l'identité du propriétaire des avoirs ». cf.
FERJAULT (Elodie), Secret professionnel et blanchiment de capitaux,
mémoire, magistère de juriste d'affaires, Université
Panthéon Assas. Mai 2002. P. 38.
* 47 Le Cameroun sur ce plan
a pu être considéré un moment comme un paradis fiscal, du
fait du scandale `' Leadership academy''. Il s'agissait selon un auteur d'un
`'établissement financier ``offshore'''' illégal mais
fonctionnant avec l'implication active des « mandataires de
l'Etat ». Cette société opérant dans
l'exportation des capitaux nationaux a fini par extorquer plus de 3 milliards
de FCFA (selon le rapport de l'expert financier EBE EVINA chargé
d'auditer les comptes de cette société) à ses
épargnants camerounais motivés par la recherche du gain facile
(il leur était proposé des placements de leurs épargnes
à l'étranger pour un taux allant de 10 à 300% l'an) pour
les uns et par le souci de trouver un lieu de dépôt
sécurisant pour les autres. Malgré la décision de la COBAC
du 06 janvier 2000 suspendant les activités les activités de IFS
International (structure assimilée) Private Banking, c'est seulement le
18 octobre 2000 que l'autorité monétaire nationale décide
de mettre fin aux activités mafieuses de Leadership academy. (cf.
ABISSAMA ONANA, `'activités criminelles et blanchiment des capitaux en
Afrique Centrale'' in Enjeux, n° 9, octobre 2001.
http://www.afriquepluriel.ch/crime
)
* 48 CHESNAIS (Marc), op.
cit.
* 49 Dans ces pays,
« la politique optimale y consiste à ne pas contrôler
avec trop de rigueur les clients » cf. ATTAC, `'Paradis fiscaux, mode
d'emploi, Annexe - Secret bancaire et blanchiment d'argent'', 10 juillet 2000,
http://www.france.attac.org
* 50 Cf. Rapport
spécial sur la conférence internationale sur le blanchiment,
publié sur
http://www.fintrac.gc.ca .
* 51 « Les
transferts de fonds entre les Etats membres et la France sont
libres » cf. Art. 10 Convention de Coopération
Monétaire précitée.
* 52 ABISSAMA ONANA, `'
Activités criminelles et blanchiment des capitaux en Afrique centrale'',
publié dans le journal Enjeux, n° 9, octobre 2001,
http://www.afriquepluriel.ch.crime
.
* 53 Cf. `'
l'économie néo féodale et l'Etat corrompu en
Afrique : le cas du Cameroun'', article réalisé par la firme
Prescriptor sur la signature de ABISSANA ONANA, publié par
Amand'la, septembre 2001. Selon l'auteur de cette citation, l'argent
qui circule ainsi à grande échelle serait issu de la corruption
et cette circulation illicite contribuerait au processus de blanchiment.
* 54 Cf. Préambule
(point 6) du Règlement n° 02/00/CEMAC/UMAC/CM du 29 avril 2000
portant réglementation des changes dans la CEMAC.
* 55 On peut observer aussi
cette logique dans la réglementation des changes en vigueur dans la
CEMAC, en effet, le principe de la liberté des mouvements des capitaux
dans l'intérêt des règlements internationaux est toujours
constant dans les dispositions du Règlement n° 02/00/CEMAC/UMAC/CM
du 29 avril 2000 ; cette liberté n'est limitée que lorsque
les opérations en causes sont illicites (Cf. Art. 71).
* 56 GAFI, `'Rapport sur les
typologies du blanchiment de l'argent, 1997-1998'', 12 février 1998,
http://www.fatf-gafi.org.
* 57 En Zone CEMAC, si la
réglementation des changes est une réalité, il faut
cependant noter que certaines modalités de ce contrôle ne sont pas
de nature à en renforcer l'efficacité. L'Art. 18 du
Règlement n° 02/00/CEMAC/UMAC/CM du 29 avril 2000, pose que :
« les opérations de change manuel portant sur des montants
supérieurs à 1 million de FCFA doivent être
effectuées par les intermédiaires agréés qui sont
tenus, par conséquent, de les exécuter si toutes les conditions
sont réunies ». De ce texte, on relève que
l'intervention des intermédiaires agréés, n'est
impérative que lorsqu'il s'agit des opérations portant sur des
montants supérieurs à un million de FCFA, donc en dessous de ce
seuil, l'opération de change peut être valablement
effectuée par toute personne (même non agréée).
Cette situation peut facilement faire les affaires des criminels qui pourront
alors avoir recours à la technique de fragmentation de leur butin pour
ne solliciter que les intermédiaires non agréés. On aurait
alors souhaité que toutes les opérations de change
relèvent de la compétence des intermédiaires
agréés.
* 58 HERAIL (Jean-Louis) et
RAMAËL (Patrick), Op. Cit. p 50.
* 59 Idem, p. 34.
* 60 GAFI, `'Rapport sur les
typologies du blanchiment de l'argent 1997-1998'',
http://www.fatf-gfi.org
* 61 ZIEGLER (Jean), mort
programmée du secret bancaire suisse, in le monde diplomatique,
février 2001, p.12.
* 62 Idem.
* 63 Idem.
* 64 Cité par ZIEGLER
(Jean) op. Cit.
* 65 Voir par exemple le
scandale de la banque du crédit et du commerce international, HERAIL
(Jean-Louis) et RAMAËL (Patrick), op. Cit. p. 9
* 66 Idem p. 14
* 67 GAETNER (Gilles),
`'Les faramineux comptes secrets d'Omar Bongo'' in l'Express
du 08/06/2000.
http://www.lexpress.fr
* 68 Rapport spécial
sur la conférence internationale sur le blanchiment, publié sur
http://www.fintrac.gc.ca
* 69 Cette exigence semble
bien perçue dans la Zone CEMAC, en effet, l'Annexe de la Convention
portant harmonisation de la réglementation bancaire en Afrique Centrale
du 7 janvier 1992 laisse comprendre qu'il faudra remplir certains
critères intellectuels et même professionnels pour pouvoir exercer
les fonctions de responsables dans un établissement de crédit
(cf. Art. 22).
* 70 La CEMAC affiche en
effet beaucoup de prédispositions à même de pouvoir la
rendre vulnérable au blanchiment. Elle est un sous région en voie
de développement, elle a un code d'investissement économiquement
attractif et surtout ses banques s'internationalisent de plus en plus.
* 71 Ces termes sont
employés pour parler des services offerts par la banque,
opérationnels à travers les Technologies de l'Information et de
la Communication (Téléphone, Internet, Terminal
électronique...)
* 72 Virus informatique
(programme susceptible d'entraîner des perturbations dans le
fonctionnement d'un ordinateur) crée en l'an 2000, très
destructeur, il se propage par courrier électronique sous la forme d'un
fichier joint nommé LOVE-LETTER-FOR-YOU.TXT.vbs. il a infiltré
les systèmes informatiques des institutions officielles des Etats-Unis
et de la Grande-Bretagne.
* 73 En effet, les
Technologies de l'information et de la Communication (TIC), surtout l'Internet,
offrent plus d'avantages aux criminels qu'aux autorités qui les
combattent. On constate que ces TIC offrent l'avantage de la rapidité,
avantage qui ne profite en pratique qu'au premier sur la ligne ; or, on
sait que dans la plupart des cas, les criminels sont en avance sur les
autorités anti-blanchiment.
* 74 Terme utilisé
ici pour parler des clients de la banques qui utilisent Internet comme moyen de
contact.
* 75 On peut à ce
niveau citer comme exemples, les cartes `'VISA'', `'EUROCARD'', `'MASTERCARD''
qui constituent des moyens de paiement acceptés dans presque tous les
établissements commerciaux et bancaires du monde. Cf.
Encyclopédie numérique MICROSOFT ENCARTA 2004.
* 76 LE CERF (Xavier) et
IVALDI (Nicolas) , `' des usages de traçabilité en
matière de paiement électronique'', in
Traçabilité et responsabilité, sous la direction
de PEDROT ( Philippe), éd. Economica, 2003, p.189 et suiv.
* 77 Cas de la `'banque de
l'union européenne'' qui pour faire sa publicité dit qu'elle est
la première banque sur Internet à garantir des paiement anonymes
à ces clients depuis ANTIGUA.
* 78Le blanchiment peut
être facilité par la nature dématérialisée de
la relation qui s'établit via Internet entre le banquier ou le
prestataire de services d'investissement et son client, qui rend plus difficile
la vérification de l'identité et de la capacité
financière de ce dernier. Les possibilités de traitement,
largement automatisées, des opérations des clients sont
également un facteur de risque en permettant aux clients de dissimuler
des opérations douteuses ou frauduleuses dans une masse
d'opérations traitées sans contrôle humain.
* 79 GAFI, `'Rapport sur les
typologies du blanchiment de l'argent1997-1998'', 12 février 1998,
publié sur le site officiel du GAFI
http://www.fatf-gafi.org
* 80 Personne qui fait
figurer son nom dans un contrat comme si elle agissait pour son propre compte,
alors qu'en réalité elle n'intervient que comme mandataire d'une
autre, sans que le cocontractant ait connaissance de cette interposition. (Cf.
Lexique des termes juridiques, 14è édition.).
* 81 Le porte-monnaie
électronique est une forme de monnaie électronique qui constitue
une valeur monétaire qui est stockée sur un support
électronique (carte à puce ou disque dur), émise contre
remise de fonds d'un montant dont la valeur n'est pas inférieure
à la valeur monétaire émise et acceptée comme moyen
de paiement par les entreprises autres que l'institution émettrice.
* 82 Banque commerciale
établie au Cameroun.
* 83 KOBRIN (Stephen) `'la
monnaie électronique et la disparition des marchés nationaux'' in
Revue électronique de l'USIA, volume 2, numéro 4, octobre 1997.
* 84 « Il est
à souligner qu'en l'état de la technique, il est difficile, voire
impossible, de savoir si la personne faisant fonctionner le compte est
réellement celle qui l'a ouvert. » (cf. Banque de France -
Secrétariat Général de la Commission Bancaire, Livre
Blanc, `'Internet, quelles conséquences prudentielles ?'',
Décembre 2000)
* 85 Ce qui peut
caractériser une banque Internet, c'est aussi la possibilité
offerte au client - et la volonté de ce dernier - de traiter
lui-même ses opérations à distance, d'effectuer des
opérations de retraits ou de versements d'espèces en recourant
à des guichets automatiques libre service, sans aucun contact physique
entre lui et son banquier ( cf. Banque de France, op. cit.).
* 86 Ce qu'ils peuvent faire
sous diverses identités, car, en fait, ils en ont la
possibilité.
* 87Les opérations
bancaires effectuées sur Internet ne paraissent pas présenter de
risques de nature spécifique en matière de blanchiment d'argent.
En revanche, trois facteurs principaux accroissent les risques
traditionnels : facilité d'accès au réseau sans
contrainte géographique, matérielle ou temporelle,
dématérialisation, et rapidité des opérations. Ces
trois facteurs, dans un contexte de traitement automatisé des
opérations, rendent le contrôle des flux financiers plus complexe,
tant au moment de l'entrée en relation avec le client que lors de la
réalisation des transactions financières. (Cf. Banque de France,
Préc. P. 75).
* 88 On a là une
idée de la tâche que doivent accomplir les enquêteurs et
tout autre organisme impliqué dans la lutte anti-blanchiment. Le constat
semble être clair que, avec le temps les obstacles à la lutte se
multiplient sans que les précédents soient vraiment combattus.
Aujourd'hui, on assiste aux techniques informatiques favorisant la
célérité et l'anonymat des criminels alors même que
la lutte n'avait pas encore jusqu'à lors vaincu le problème du
secret bancaire classique.
* 89 Pratiquement tous les
milliards de dollars, d'euros, de marks et de yen, de CFA qui circulent de nos
jours à travers le monde se présentent sous forme d'octets, de
séries de zéros et de uns. Ce n'est qu'à la toute
dernière étape du voyage que l'argent retrouve son
caractère tangible, sous forme de cartes de crédit, de
chèques, de billets de banque ou de pièces de monnaie. Cf. KOBRIN
(Stephen), op. Cit.
* 90 Cette expression
désigne la quantité de valeur monétaire chargée
dans la puce d'une carte de paiement ou dans la mémoire d'un ordinateur,
et que son processeur peut utiliser comme moyen de paiement auprès des
entreprises acceptant ce mode de règlement.
* 91 LE CERF (Xavier) et
IVALDI (Nicolas) ; sous la direction de PEDROT (Philippe), `' Des usages
de traçabilité en matière de paiement
électronique'', op. Cit.
* 92 LUCIANO (Violante)
Président de la chambre des députés italienne qui fut
longtemps Président de la commission parlementaire anti -mafia,
cité par LE CERF (Xavier) et IVALDI (Nicolas), op. Cit.
* 93 Society for Worldwide
Interbank Financial Telecommunications (Compagnie de
télécommunication mondiale pour les transactions
financières interbancaires). Il s'agit d'un système qui chapeaute
près de 3 800 banques dans 94 pays et assure 1 600 000 transferts
de fonds et crédits documentaires par jour. SWIFT a été
créé en 1973 sous la forme d'une coopérative de droit
privé, constituée par 500 banques européennes et
américaines. Son but était de fournir aux banques et à
certaines institutions financières le support d'un réseau
informatique sécurisé pour réaliser leurs transactions.
Par sécurité, les messages sont codés et une
vérification systématique de l'émetteur est
effectuée grâce à une clé. Le système est
opérationnel à toute heure. cf. LE CERF (Xavier) et IVALDI
(Nicolas), op. cit.
* 94 LE CERF (Xavier) et
IVALDI (Nicolas) ; sous la direction de PEDROT (Philippe), `' des usages
de traçabilité en matière de paiement
électronique'', op. Cit.
Remarque : les chiffres varient selon les sources et il n'a
pas été possible de déterminer exactement le nombre
d'établissements financiers membres, ni le volume précis des
transactions traitées
* 95HERAIL (Jean-Louis) et
RAMAÊL (Patrick), op. Cit. p .50
* 96 Cour d'Appel de Paris,
1ère ch. Sect. A Aff. Ambassade de la
Fédération de Russie En France c/ la société Noga,
10 août 2000, ,
http://www.lexinter.net.,
Répertoire de jurisprudence I.
* 97 on se souvient encore
de la mission de paix de l'ONU au Congo Démocratique fortement
impliquée dans le trafic des pierres précieuses lesquelles
étaient dissimulées dans des valises diplomatiques auxquelles il
ne serait pas exagéré de comparer les comptes bancaires
`'diplomatiques''.
* 98 NICOLAS (Jean), `'
bizarreries suisses au Luxembourg'', publié sur
http://www.swisspolitics.org
, 13 juillet 2002.
* 99 `'L'Empire suspecte les
comptes de diplomates'' Réseau Voltaire, 17 mai 2004.
* 100 RIPERT (Georges) et
ROBLOT (René), Traité de droit commercial, tome 2,
15e éd., LGDJ, 1996. p. 581.
* 101 BENABENT (Alain),
Troit civil : les contrats spéciaux civils et commerciaux,
3e éd., Montchrestien, 1997.
* 102 RIPERT (Georges) et
ROBLOT (René), op. cit. p. 581.
* 103 Cass. Req., 12
novembre 1906. D., 1907. 1. 409, note Valery.
* 104 Car, dans un contrat
de bail ordinaire, le locataire doit avoir la libre jouissance de la chose
louée et le bailleur n'a comme obligation, que d'assurer la pleine
jouissance du bien loué au locataire ; or, dans le cas du contrat
de coffre-fort, le client/ locataire ne peut accéder au coffre qu'avec
le concours du banquier, ce dernier, faisant pourtant office de bailleur, ayant
une obligation de surveillance de la salle des coffres, et d'assurer la
sécurité du contenu du coffre.
* 105 TUNC, le contrat
de garde, Paris, 1942, cité par RIPERT (Georges) et ROBLOT
(René), op. cit. p. 582.
* 106 personne d'autre ne
pouvant accéder valablement au contenu du coffre sans l'avis du client,
ce qui lui donne un maximum de protection, car ses activités ne laissent
pas de traces, il est en général le seul à savoir ce que
cache son coffre.
* 107 Cass. Req. 11
février 1946, D. 1946. 365.
* 108 Technologies de
l'Information et de la Communication.
* 109 Sur son
identité, sur la provenance et la destination de ses biens...
* 110 Absolutisme du secret
bancaire, utilisation des comptes à numéros...
* 111 La BEAC a
organisé un séminaire de sensibilisation sur la lutte contre le
blanchiment des capitaux dans les pays de la zone CEMAC à Yaoundé
du 7 au 9 novembre 2000.
* 112 La BEAC a pris part
activement à plusieurs rencontres sur le blanchiment d'argent dont la
28ème Réunion Ordinaire de l'Association des Banques
Centrales Africaines, tenue à Yaoundé, les 29 et 30 juillet
2004.
* 113 Cité par
TCHUENKAM (Boniface), `'contre le blanchiment et pour l'intégration
monétaire, (analyse de la Réunion des gouverneurs des banques
centrales africaines)'', in Le Financier d'Afrique, n° 008,
août/septembre 2004, p. 7.
* 114 Assemblée
Générale des Nations Unies Session extraordinaire
consacrée au PROBLEME MONDIAL DE LA DROGUE 8-10 juin 1998, article de
fond, le blanchiment d'argent.
http://www.un.org
* 115 Voir KALIEU (Yvette), `'
Le contrôle bancaire dans la zone de l'Union Monétaire de
l'Afrique Centrale'', in Penant, N° 841, PP : 445 - 472. Voir
aussi Art. 14, convention du 17 janvier 1992précité.
* 116 Le texte dont il
s'agit est bel et bien le Règlement COBAC R-2005/01 du 1er
avril 2005 adopté à Libreville, relatif aux diligences des
établissements assujettis en matière de lutte contre le
blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme en Afrique
Centrale.
* 117 On relève
entre autres le Règlement COBAC R-2001/07 relatif au contrôle
interne des établissements de crédit et le Règlement COBAC
R-2003/02 relatif à la surveillance des positions de changes.
* 118 Préambule acte
additionnel portant création du GABAC du 14 décembre 2000, point
4.
* 119 Cette mission est
très importante, en effet, les techniques de blanchiment et les
infractions de base peuvent changer d'un lieu à un autre, conscient de
cette situation, chaque dispositif de lutte se doit de savoir quelles sont les
particularités du blanchiment dans son environnement afin de pouvoir
efficacement choisir les instruments de lutte adaptés.
* 120 BEAC, `'la lutte
contre la blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme en Zone
CEMAC'', publié sur le site officiel de la BEAC :
http://www.beac.int.
* 121 Article 35 al. 3,
Règlement du 4 avril 2003 relatif à la prévention et
à la répression du blanchiment d'argent et du financement du
terrorisme en Afrique Centrale.
* 122C'est à cette
fin que le GABAC doit mettre à jour les techniques de blanchiment
recensées dans la sous région, ceci afin d'aiguiser la vigilance
des autorités et des établissements assujettis sur des
opérations qui pourraient apparemment être normales alors que
masquant en réalité de grandes opérations de blanchiment.
* 123 Article 4
Règlement du 14 avril 2002 portant organisation et fonctionnement du
Groupe d'Action contre le Blanchiment d'Argent en Afrique Centrale (GABAC).
* 124 Année de la
Déclaration de N'djamena et de la création du GABAC.
* 125 Mot apparu dans le
langage des camerounais en début des années 90. Son
étymologie est incertaine, mais, on s'accorde à dire qu'il s'agit
de l'art de tromper, d'extorquer et d'escroquer.(Cf. MALAQUAIS (Dominique),
`'Anatomie d'une arnaque : feymen et feymania au Cameroun'', in Les
études du CERI, n° 77 - juin 2001)
* 126 Voir, TWENGEMBO,
commentaire sous loi de finances 2004, in Juridis Périodique
n° 57, janv-fév-mars 2004 ; pp. 23-32.
* 127 Cf. Art. 10 de la Loi
n° 003/2006 du 25 avril 2006 relative à la déclaration des
biens et avoirs.
* 128 Loi relative au
contrôle des stupéfiants, des substances psychotropes, et des
précurseurs et à l'extradition et à l'entraide judiciaire
en matière de trafic des stupéfiants, des substances psychotropes
et des précurseurs.
* 129 Cf. Art. 126, loi de
1997 sur le trafic des stupéfiants, et Art. 8 al. 1 loi de 2003 sur le
secret bancaire.
* 130 L'article 6
alinéa D de la loi de 2003 sur le secret bancaire dispose en effet
que : « la déclaration faite au procureur ou à
l'autorité monétaire par les dirigeants d'un établissement
de crédit d'opérations ou d'informations portant sur des sommes
d'argent dont ils savent ou qui paraissent provenir du trafic des
stupéfiants, de l'activité d'organisations criminelles ou du
blanchiment des capitaux ».
* 131 Même si, dans
le cadre de la réglementation communautaire, comme nous allons le voir
dans la suite de nos développements, il n'est plus habilité
à recevoir les déclarations suspectes.
* 132 Pour ce qui est du
ces du Cameroun, le président de la République, par un
décret du 31 mai 2005 a réglementé l'organisation et le
fonctionnement de l'ANIF du Cameroun. Le 1er août 2005, le
chef de l'ANIF a été investi dans ses fonctions par un acte du
premier ministre, et, le 3 août, c'était au tour des
chargés d'études, au nombre de trois (3) d'être investis
par un acte du ministre de l'économie et des finances.
* 133 Ces membres viennent
des services divers : un fonctionnaire détaché par le
ministère des finances, un officier de police judiciaire
spécialisé dans les questions financières
détaché par le ministre en charge de la sécurité ou
de l'intérieur, un inspecteur des services de douanes
détaché par le ministre des finances, et un magistrat
spécialisé dans les questions financières, issu du
ministère de la justice.
* 134 Le directeur de
l'ANIF, Hubert NDE SAMBONE, était inspecteur vérificateur
à la cellule de contrôle fiscal de la division des grandes
entreprises.
* 135 Du côté
de l'UEMOA, la structure similaire qui y fait office d'ANIF, à savoir la
Cellule Nationale de Traitement des Informations Financières, est
composée de six (6) membres dont et surtout un représentant de la
BCEAO qui en assure le secrétariat. Bien plus, la Directive relative
à la lutte contre le blanchiment de capitaux dans les pays de l'UEMOA
prend la peine de préciser la qualification des membres et la fonction
qu'ils vont occuper dans la Cellule. Cette précaution n'est pas
observée dans la CEMAC, et le risque est grand que l'organisation des
ANIF soit différente, d'un Etat de la Zone à un autre.
* 136 Art. 31 al. 3 du
Règlement relatif à la prévention et à la
répression du blanchiment des capitaux et du financement du terrorisme
en Afrique Centrale.
* 137 Les présents
membres de l'ANIF au Cameroun ont effectivement prêté serment le
21 septembre 2005 devant la Cour d'Appel du Centre à Yaoundé.
* 138 Cf. Art. 23 al. 2
décret n° 2005/187 du 31 mai 2005 portant organisation et
fonctionnement de l'ANIF au Cameroun.
* 139L'article 32 du
Règlement communautaire précité pose d'ailleurs que :
« les correspondants et les membres de l'ANIF ne peuvent exercer
concomitamment aucune activité pouvant porter atteinte à
l'indépendance de leurs fonctions ».Cette exigence est encore
reprise dans le décret du 31 mai organisant l'ANIF en son Art. 9 Al. 3
et 4.
* 140 En effet, l'article
28 du Règlement de 2003 précité pose que :
« dans chaque Etat Membre, des correspondants de l'Agence Nationale
d'Investigation Financière sont désignées ès
qualité au sein de la police, de la gendarmerie, des douanes et de la
justice ou de tout autre service public dont le concours est jugé
nécessaire dans le cadre de la lutte contre le blanchiment des capitaux
et le financement du terrorisme, par décision du ministre
compétent prise à la demande du ministre en charge des finances
sur proposition du chef de l'ANIF. ». Voir aussi, Art. 9,
décret du 31 mai 2005.
* 141 Il en ainsi du
TRACFIN en France, et du CENTIF dans les pays de l'UEMOA.
* 142 MARIN (Jean-Claude),
Procureur Adjoint au Tribunal de Grande Instance de Paris, propos tenu lors des
Journées HEC-Parquet financier de Paris, in La Lettre du
blanchiment, précité.
* 143 Art. 12 (1)
décret du 31 mai 2005 : « L'ANIF élabore des
rapports d'activités trimestriels. Ces rapports recensent les techniques
de blanchiment relevées sur le territoire national et formulent des
propositions visant à renforcer la lutte contre le blanchiment des
capitaux et le financement du terrorisme. Elle établit annuellement un
rapport récapitulatif »
* 144 Voir aussi Art. 3
décret du 31 mai 2005 organisant l'ANIF.
* 145 Cf. article 8,
Règlement relatif à la prévention et à la
répression du blanchiment d'argent et du financement du terrorisme en
Afrique Centrale.
* 146 Voir aussi Art. 23
al. 1 décret du 31 mai 2005 organisant l'ANIF.
* 147 On perçoit
très clairement que ces obligations conduisent des professionnels tels
que les banquiers à s'immiscer dans les affaires de leurs clients,
contrairement au principe de non-ingérence selon lequel celui-ci n'a pas
à surveiller les opérations qu'effectue son client.
« Le banquier a alors le droit et le devoir de connaître
l'arrière-plan économique » des opérations de
son client. Cf. FERJAULT (Elodie), op. cit.
* 148En particulier
lorsqu'elles ouvrent des comptes ou des livrets, lorsqu'elles réalisent
des transactions fiduciaires, lorsqu'elles louent des coffres, lorsqu'elles
procèdent à des transactions importantes en espèces.
* 149 L'identification est
un exercice permanent des établissements assujettis dans leurs relations
avec les clients. En effet, elle doit pouvoir être réalisée
chaque fois qu'il y a contact avec le client, c'est-à-dire non seulement
à l'entrée en relation, mais, aussi pendant la relation :
lorsque le client demande l'ouverture d'un nouveau compte, lorsqu'il se
présente au guichet pour effectuer une transaction, lorsqu'il veut
toucher un chèque.
* 150 L'article 11 du
Règlement du 4 avril 2003 dispose en effet que : « la
vérification de l'identité d'une personne physique est
opérée par la présentation d'un document officiel original
en cours de validité... l'identification d'une personne morale est
effectuée par la production des statuts et de tout documents
établissant qu'elle a été légalement
constituée et qu'elle a une existence réelle au moment de
l'identification ».
* 151 A ce sujet il y a
lieu de préciser que dans le cadre du droit des sociétés
OHADA, en vigueur dans tous les pays de la CEMAC, les statuts des
sociétés commerciales doivent dans tous les cas passer par devant
notaire, ce qui en assure une grande marque d'authenticité.
* 152 Tous les pays de la
CEMAC étant membres de l'OHADA, connaissent cette formalité issue
de sa réglementation.
* 153 S'il s'agit d'une
association au Cameroun.
* 154 Recommandation
n° 12 du GAFI.
* 155 Des
préconisations sont faites en matière d'entrée en relation
avec la clientèle sur Internet, ainsi, pour éviter que des
comptes soient ouverts sous de fausses identités ou par des
prête-noms en profitant des difficultés d'identification dues
à une relation dématérialisée. Il est
recommandé en particulier que des mesures spécifiques permettant
d'établir l'identité du client soient mises en place telles que
notamment, l'obtention de pièces justificatives supplémentaires
ou des mesures additionnelles de vérification. Par exemple, le dossier
d'ouverture de compte, comprenant notamment l'identifiant et le mot de passe du
client (ou son équivalent) peut être envoyé par la poste,
si possible avec accusé réception. Enfin, il est apparu
nécessaire de souligner que le fonctionnement d'un compte - y compris la
réception de fonds et d'instruments financiers - ne peut être
autorisé qu'une fois que la procédure d'identification a
été achevée.
* 156 La
réglementation anti-blanchiment en milieu bancaire fait de
l'impossibilité d'identification d'un client un motif légitime de
refus d'ouverture d'un compte bancaire.
* 157 Naturellement, ce
type de client sert beaucoup les intérêts du blanchiment, comme
nous l'aurons vu dans le premier chapitre du premier titre, les blanchisseurs,
de peur d'apparaître sur la scène ou de se faire remarquer,
peuvent se servir des `'hommes de pailles'' pour agir.
* 158 Selon l'Art. 6 de
l'Annexe I du Règlement du 29 avril 2000 portant réglementation
des changes dans la CEMAC, est vu comme non-résident, les personnes
physiques et morales ayant leur résidence habituelle ou leur
activité économique à l'étranger sauf : d'une
part, les fonctionnaires des Etats membres de la CEMAC en poste dans les
ambassades, consulats, missions civiles et militaires et, d'autre part, les
malades en traitement, même de longue durée, et les
étudiants des pays membres qui gardent leur statut de résident de
la CEMAC.
* 159sûrement, il
pourra s'agir d'une banque implantée dans le pays où
réside le client en cause, et qui est soumise aux diligences
connaissance clientèle au moins égales à celles en vigueur
dans la CEMAC. Cependant, il est des situations où la banque
correspondante agit de connivence avec le client blanchisseur. Une illustration
nous est révelée dans les faits de la décision de la
Chambre Criminelle de la Cour de Cassation française du 3
décembre 2003 n° 6345 FS-PF,X.. ici, connaissant la provenance
illicite des fonds à placer, la banque du lieu de résidence du
client « avait déclaré à Paneurolife
connaître le proposant, Guy Z..., depuis six mois, alors qu'en
réalité, il ne le connaissait que depuis un peu plus d'un
mois ».
* 160 Ces mesures sont
notamment : l'authentification des documents présentés, la
demande des documents supplémentaires, le contact indépendant
avec les clients, l'intermédiation d'un tiers, et surtout l'exigence
d'un premier paiement par l'intermédiaire d'un compte ouvert au nom du
client auprès d'une banque soumise à des normes de diligences
semblables à celles en vigueur dans la CEMAC.
* 161 Article 3 (w)
Règlement du 1er avril 2005 : Personne exerçant
ou ayant exercé d'importantes fonctions publiques, à l'instar
notamment des chefs d'Etats ou de gouvernement, des figures politiques, hauts
fonctionnaires de l'administration, de la magistrature ou de l'armée,
cadres dirigeants de sociétés publiques et parapubliques et
responsables de grands partis politiques. Toutes les personnes physiques ou
morales qui leur sont clairement liées ou associée rentrent dans
le cadre de cette définition.
* 162 La soumission des
personnes politiquement exposées aux procédures de connaissance
clientèle normale est une mesure courageuse. On sait qu'il s'agit en
fait de personnes influentes, qui, le plus souvent veulent menacer les agents
de banques afin d'obtenir leur complaisance. Ainsi, on appelle davantage les
établissements assujettis à veiller d'abord à
détecter le caractère `'politiquement exposée'' du client
en cause et de veiller à ne pas se laisser influencer.
* 163 L'obligation de
vigilance est une opération classique du banquier. Elle signifie que le
banquier se doit de vérifier que l'ordre qu'il a reçu
émane véritablement du titulaire du compte ou de son mandataire,
qu'il s'agit d'un ordre régulier. Dans le cadre de la lutte contre le
blanchiment, l'obligation de vigilance est renforcée en ce qu'elle exige
du banquier à développer l'aptitude à pouvoir observer ses
clients et à détecter les indices de suspicion.
* 164 Cf. Art 3 z)
Règlement COBAC du 1er avril 2005.
* 165 Cf. Art. 3 i)
Règlement COBAC du 1er avril 2005.
* 166 Cas des morguiers par
exemple.
* 167 A ce sujet, l'article
12 al. 3 érige les transferts internationaux au rang des
opérations de haut risque. Il dispose en effet que les
établissements assujettis doivent développer une vigilance
particulière à l'égard des opérations de ransferts
électronique de fonds, surtout ceux en provenance ou à
destination d'établissements ou d'institutions financières qui ne
sont pas soumis à des obligations au moins équivalentes à
celles du présent Règlement, ou qui sont situés dans des
pays non membres du GAFI ou dans les pays identifiés comme non
coopératifs en matière de lutte contre le blanchiment. Ainsi, on
comprend qu'un compte bancaire ouvert au nom d'un client résidant par
exemple aux Îles Caïman serait classer `'haut risque''.
* 168 C'est l'esprit de
l'alinéa 2 du même article qui dispose que : « tout
dirigeant ou préposé d'un établissement assujetti,
même s'il n'est pas normalement habilité par application des
dispositions de l'alinéa qui précède, peut prendre
l'initiative de déclarer lui-même à l'ANIF, dans des cas
exceptionnels et en raison notamment de l'urgence, une opération lui
paraissant relever des articles 26 et 28, et d'assurer la diffusion aux membres
concernés du personnel des informations, avis ou recommandations de
caractère général en provenance de l'ANIF ou de la
COBAC. ».
* 169 Mais, le
déclarant a tout intérêt à garder une copie de sa
déclaration, car on pourra le moment venu lui reprocher de n'avoir pas
déclarer, auquel cas, il se servira de cette preuve pour sa
défense. Ainsi, les déclarations faites verbalement ou par
téléphone - ce qui est souvent le cas en situation d'urgence -
doivent être confirmées par télécopie ou tout autre
moyen laissant trace écrite. Cette prudence est elle-même
rappelée à l'intention du déclarant par le
Règlement du 1er avril 2005 en ces termes, à
l'alinéa 2 de son article 27 : « la
déclaration verbale doit être confirmée par tout moyen
laissant trace écrite. En tout état de cause,
l'établissement assujetti doit pouvoir justifier l'accomplissement de
ses diligences. ». Voir aussi Art. 17 décret du 31 mai
2005.
* 170 Même si les
règlements en la matière ne le précisent pas assez, nous
pensons qu'une bonne déclaration en ce sens doit, entre autres
informations, contenir : une synthèse retraçant les
éléments clefs de la déclaration, la motivation du
soupçon, l'analyse détaillée des faits, l'identification
de l'entité déclarante et les éléments
d'identification des personnes parties prenantes à
l'opération.
* 171 Cette mesure est
réaliste. Nous le pensons parce que, vu les circonstances dans
lesquelles les établissements assujettis doivent faire les
déclarations, il y a toujours une bonne dose de probabilité que
la précipitation et l'urgence altèrent un peu
l'objectivité et la qualité d'appréciation du
déclarant. Il est donc normal de lui permettre, quand il a des raisons
de le faire, qu'il puisse y revenir.
* 172Cf. Art. 20 al. 2,
Règlement du 4 avril 2003. Voir aussi Art. 18 décret du 31 mai
2005.
* 173 Cf. Art. 21 al. 2
décret du 31 mai 2005.
* 174 En principe en
l'absence d'opposition, l'établissement assujetti est libre
d'exécuter l'opération. Cependant, la Cour de Cassation
française apporte un aménagement particulier à cette
liberté de l'établissement assujetti. Ainsi, dans son arrêt
du 3 décembre 2003, n° 6345 FS-PF, X ; elle déclare que
« le seul fait (pour Christian X..., banquier) de reconnaître
une provenance délictuelle au fonds remis..., constituait le
délit de blanchiment... » et que « Christian X...
devait répondre de blanchiment de fonds remis par Guy Z..., nonobstant
l'accusé de réception de TRACFIN non assorti d'une
opposition ». Ainsi, on en déduit que lorsque le banquier
connaît l'origine frauduleuse des fonds qui lui sont remis, malgré
l'accusé de réception non assorti d'opposition, il doit renoncer
à traiter avec le client. L'absence d'opposition ne constitue pas
automatiquement la bonne foi du banquier qui collabore avec un criminel, c'est
pourquoi dans le cas de cette affaire, la Cour de Cassation a
décidé que « Christian X..., a agi en concertation
frauduleuse avec le propriétaire des sommes qu'il était
chargé de placer ».
* 175 Cf. Art. 20 al. 3,
Règlement du 1er avril 2005.
* 176Il ressort en effet de
l'article 13 du Règlement du 4 avril 2003 que seuls certains organismes
et personnes peuvent demander et obtenir valablement communication de certains
documents et pièces auprès des établissements assujettis.
Il s'agit de l'ANIF, de l'autorité judiciaire et de la COBAC.
* 177 Il y a lieu de
préciser à regret, que ces règlements se soient juste
limités à la notion d'autorité judiciaire, sans
préciser dans le détail quel type de magistrat est apte à
pouvoir réclamer des établissements bancaires la communication de
certains documents. Pour le cas du Cameroun, et, en nous référant
à la loi n° 2005/007 du 27 juillet 2005, portant code de
procédure pénale, nous pensons au terme de l'article 16 de cette
dernière, que, tant les magistrats du parquet, que ceux de la
juridiction de jugement pourront valablement ordonner de telles mesures, qui
s'assimilent en fait, à des mesures de perquisition. En effet, selon cet
article « Le mandat de perquisition est l'ordre donné à
l'officier de police judiciaire par le procureur de la République, le
Juge d'Instruction ou la juridiction de jugement, de pénétrer
dans tout lieu public ou privé, de le fouiller aux fins de rechercher et
de saisir tous objets ou documents qui ont servi à la commission d'une
infraction ou qui apparaissent comme le produit d'une
infraction. »
* 178 En effet selon
l'article 65 de ce dernier Règlement, afin d'obtenir la preuve de
l'infraction d'origine, et la preuve des infractions prévues dans ce
Règlement, les autorités judiciaires peuvent notamment ordonner,
pour une durée déterminée le placement sur surveillance
des comptes bancaires, la communication d'actes authentiques et sous seing
privé, de documents bancaires, financiers et commerciaux.
* 179 Non seulement, elles
doivent être limitées dans le temps, elles ne doivent en outre
être ordonnées que « lorsque ces comptes...sont
utilisés ou sont susceptibles d'être utilisés par des
personnes soupçonnées de participer aux infractions
prévues par le présent Règlement ».
* 180 On peut, afin de
contribuer à la compréhension des textes poser simplement que,
constituerait par exemple une déclaration de mauvaise foi, une
déclaration injustement ou insuffisamment motivée, ou une
déclaration faite à une autorité non habilitée dans
le cadre de la réglementation anti-blanchiment en vigueur dans la
CEMAC.
* 181 Prenant l'exemple du
Cameroun, l'art 26 de la loi de 2003 sur le secret bancaire punit la violation
du secret bancaire d'un emprisonnement de trois mois à trois ans et
d'une amende de 1.000.000 à 10.000.000 Fcfa ou de l'une de ces deux
peines seulement ; cependant l'article 27 de la même loi punit d'un
emprisonnement de un à cinq ans et d'une amende de 1.000.000 à
20.000.000 FCFA le banquier qui ne déclare pas ses opérations
suspectes.
* 182 Action exercée
par celui qui a exécuté une obligation dont un autre était
tenu, contre ce dernier afin d'obtenir sa condamnation à ce qui a
été exécuté.
* 183 Le fait d'alerter
par exemple le client, le propriétaire des fonds, ou l'auteur de
l'opération de la déclaration qui a été faite
à l'ANIF.
* 184 Absence de
déclaration d'une opération dont le montant excède le
montant défini par le Conseil Ministériel de l'UMAC ou par les
autorités nationales par exemple.
* 185 Si un
établissement assujetti ne respecte pas toutes les diligences qui lui
sont imposées, en vertu de toutes les dispositions qui viennent
d'être citées, la COBAC pourra lui appliquer l'une des sanctions
suivantes : l'avertissement, le blâme, l'interdiction d'effectuer
certaines opérations ou toutes autres limitations dans l'exercice de ses
activités, la suspension ou la démission d'office du ou des
dirigeants responsables et le retrait d'agrément, qui en l'espèce
semble être la sanction disciplinaire la plus importante. Voir davantage
KALIEU (Yvette), op. cit.
* 186 Voir KALIEU (Yvette),
sur le sens de l'article 3 du Règlement COBAC du 22 décembre 1992
relative à la procédure et d'audition des dirigeants
d'établissements de crédit.
* 187 Ce qui n'était
pas toujours le cas dans les législations nationales. pour prendre
l'exemple du Cameroun, l'article 98 de la loi de 1997 punit le blanchiment
d'une peine d'emprisonnement allant 5 à 10 ans et d'une amende pouvant
aller jusqu'à cinq fois le montant des sommes blanchies sans être
inférieure à FCFA 10 000 000, pendant que l'article 130
de la même loi punit le banquier qui n'aura pas déclaré des
opérations suspectes d'une peine d'emprisonnement allant de un mois
à un an et d'une amende allant de FCFA 250 000 à FCFA 1
250 000 ou de l'une de ces deux peines seulement, ces peines sont alors
différentes de celles que la même loi applique au blanchiment. Ces
peines paraissent toutefois plus souples que celles prévues par la loi
sur le secret bancaire. Cette dernière pose en son article 27 que le
banquier qui ne déclare pas les opérations suspectes au procureur
ou à l'autorité monétaire est puni d'une peine
d'emprisonnement allant de 1 à 5 ans et d'une amende allant de FCFA
1 000 000 à FCFA 20 000 000.
* 188 Puisque
l'organisation du dispositif interne et la formation des agents incombent
à l'établissement assujetti. Toutefois, il est des cas où
malgré la rigueur du dispositif interne, certains agents
réussissent à s'allier aux criminels.
* 189 Ces sanctions
sont : l'interdiction à titre définitif ou pour une
durée de cinq ans au moins d'exercer directement ou indirectement
certaines activités professionnelles ; la fermeture
définitive ou pour une durée de cinq ans au moins de leurs
établissements ayant servi à commettre l'infraction ; la
dissolution de l'établissement assujetti lorsque ce dernier a
été créé pour commettre les faits
incriminés ; ou la diffusion de la décision par la presse
écrite ou par tout autre moyen de communication audiovisuelle.
* 190 Car, en principe,
l'Etat n'est tenu d'indemniser les victimes du dispositif anti-blanchiment que
si les faits ayant causé le préjudice subi par ces
dernières ont été commis de bonne foi par les
établissements de crédit. Ainsi, en cas d'absence de bonne foi,
on pense raisonnablement que l'Etat pourra repousser l'action dirigée
contre lui, ce qui laissera déjà planer sur
l'établissement de crédit concerné une présomption
d'absence de bonne foi.
* 191 La sanction
pénale vise en général la répression d'une
violation légale, indifféremment des préjudices qui
peuvent en découler pour les particuliers.
* 192 Il faut relever que
cette réglementation n'a pas beaucoup pris en compte la dimension
Internet des activités bancaires, pourtant le phénomène
devient à la mode dans la sous région.
* 193 Ceci, car les
« personnes politiquement exposées » vont le plus
souvent dans des pays comme la Suisse, le Luxembourg et les autres paradis
fiscaux pour thésauriser le produit de leurs détournements et de
la corruption dont ils se rendent coupables. Ils sollicitent par ailleurs
très rarement les banques de leurs pays.