Communication et contrôle de la trypanosomose animale africaine : étude de cas des interrelations entre les agro-éleveurs et leurs prestataires de services vétérinaires dans la province du Kénédougou (Burkina Faso).( Télécharger le fichier original )par Der DABIRE Université de Ouagadougou, Département de Sociologie - Maîtrise en Sociologie 2005 |
INTRODUCTION GÉNÉRALE.En Afrique sub-Saharienne, l'élevage joue un rôle important dans les systèmes de production. Au Burkina Faso, cet élevage contribue à raison de douze pourcent (12%) à la formation du produit intérieur brut (Dénis OUEDRAOGO, 2002). Toutefois des contraintes limitent les efforts de développement de ce secteur, parmi lesquelles les maladies animales et en particulier la trypanosomose animale. Cette maladie est causée par un parasite du nom de trypanosome et transmis par des vecteurs appelés mouches tsé-tsé (ou glossines). Prenant conscience de cette situation, les acteurs sociaux (éleveurs, Etat, privé, partenaires au développement et chercheurs) réagissent par des actions de lutte pour son contrôle dont les stratégies principales de lutte sont : la lutte contre les vecteurs, l'utilisation du bétail trypanotolérant et l'usage des médicaments trypanocides. Mais, l'usage des médicaments est le plus connu et répandu chez les éleveurs. Cependant, les études techniques menées sur les pratiques d'usage des trypanocides ont montré qu'ils sont utilisés dans des conditions inappropriées (Diall ; 1997). En conséquence, il en résulte des échecs de traitements devenant de plus en plus nombreux et fréquents. De plus, la mise au point d'un vaccin tarde à venir et la maladie persiste. Or, de nos jours, l'expansion de l'élevage bovin de race zébu (plus sensible à la TAA) et de la culture cotonnière oblige les éleveurs à continuer à utiliser les trypanocides. D'où, il est question de savoir comment sont-ils utilisés dans un tel contexte ? C'est face à cette interrogation qu'un Projet régional intitulé « Gestion améliorée de la chimiorésistance dans le cadre de la lutte intégrée contre la TAA dans la zone cotonnière ouest africaine » a entrepris un programme de recherches sur les pratiques paysannes en matière de gestion de la TAA. Dénommé BMZ, il intervient dans trois pays d'Afrique de l'Ouest à savoir le Burkina Faso, le Mali et la Guinée. Son objectif principal est d'aider les éleveurs à continuer la lutte contre la TAA en minimisant les risques de chimiorésistance. Au Burkina Faso, le Projet intervient dans la province du Kénédougou en partenariat avec le CIRDES (Centre International de Recherche -Développement sur l'Elevage en Zone Subhumide) qui assure l'exécution des activités sur le terrain. Unique centre spécialisé de recherche en élevage en Afrique occidentale, le CIRDES a réalisé plusieurs études sur la problématique de la gestion de la TAA et de la chimiorésistance (Dénis OUEDRAOGO ; 2002). Mais, force est de constater qu'elles restent d'ordre technique. Or, comme le remarque Dénis OUEDRAOGO, la problématique de la TAA est plus qu'un problème médical. En effet, elle a des implications sociales, car à travers les traitements et la vente des trypanocides s'affrontent plusieurs acteurs sociaux ayant des motivations et des logiques sociales différentes. Ainsi, il se dégage l'idée de l'implication du social dans les stratégies de lutte utilisées par les agro-éleveurs dont la nécessité de tenir compte pour des actions efficaces et durables est bien perçue de nos jours. C'est pourquoi, le Projet BMZ a inscrit dans sa nouvelle approche cette étude sociologique dont l'objectif global est d'analyser l'influence des facteurs sociaux sur les stratégies paysannes en matière de gestion de la TAA et de la communication y relative. Toutefois, le cas spécifique de la communication nous préoccupe dans cette recherche intitulée «communication et contrôle de la TAA : étude de cas des interrelations entre les agro-éleveurs et leurs prestataires de services vétérinaires» pour deux raisons. En effet, elle s'inscrit dans la suite des études antérieures réalisées dans la province du Kénédougou depuis 1998 à nos jours et qui ont révélé dans leurs conclusions respectives la méconnaissance des sources d'approvisionnement des médicaments et surtout les informations relatives à leur application. De plus, elle se veut un appui à la vulgarisation de l'Utilisation Rationnelle des Trypanocides (URT) comme une stratégie de lutte contre la TAA dans ce contexte de résistance. Or, il existe un manque de données et d'information sur les pratiques, attitudes, stratégies et comportements des agro-éleveurs face à l'information et la communication sur lesquelles il faut s'appuyer pour une meilleure promotion de cette stratégie de lutte. Dans ce sens, il apparaît nécessaire de parvenir à une meilleure connaissance de leur système d'information et de communication pour des actions efficaces et durables. Ainsi, décrire leur système d'information et de communication et analyser les logiques sociales qui le sous-tendent s'avère être une préoccupation fondamentale. Or le phénomène de l'information est si important et complexe à la fois à telle enseigne qu'il nous semble difficile de prétendre à sa compréhension approfondie. Mais comme l'écrit Guy Rocher1(*) « Toute connaissance part de données intuitives, sur lesquelles l'esprit s'efforce de construire un ensemble de relations significatives et vérifiables. Le succès ne sanctionne pas toujours ces entreprises, qui sont d'autant plus hasardeuses que les données à traiter sont plus complexes et plus confuses. Mais leur richesse même nous provoque à ne pas nous contenter de l'état brut dans lequel elles nous sont livrées par le sens commun ». L'objectif de cette étude est d'identifier et d'analyser les facteurs socioculturels qui influencent les pratiques et les comportements des agro-éleveurs face à l'information et la communication associée à la gestion de la TAA. Elle s'inscrit dans le cadre d'une recherche-action qui se veut une investigation sociologique dans laquelle nous faisons une interprétation culturelle de la communication à partir de nos enquêtes et du contenu de nos entretiens. Cette étude est structurée en quatre chapitres : § le premier chapitre fixe le cadre théorique et la méthodologie; § le second chapitre présente l'espace d'étude et analyse les circuits d'information en vigueur chez les agro-éleveurs ; § le troisième chapitre traite de l'implication des prestataires de services vétérinaires dans l'information des agro-éleveurs et des difficultés y afférentes à travers leurs pratiques et attitudes dans l'usage des trypanocides ; § et le quatrième chapitre analyse le besoin, les sources et les stratégies de communication en vigueur chez les agro-éleveurs. * 1(In Changement social, 1968, P 96).
|
|