Faculté des Sciences Economiques et de Gestion
de Tunis
LE REAJUSTEMENT STRUCTUREL DE
L'ECONOMIE ET SES IMPLICATIONS SUR LA SECURITE
SOCIALE : cas du secteur public
Ezzeddine
M'BAREK
Ingénieur
chercheur dans
le domaine de la
sécurité sociale
Novembre 1992
SOMMAIRE
I- INTRODUCTION
II- ENVIRONNEMENT ECONOMIQUE ET DEMOGRAPHIQUE
A- ENVIRONNEMENT DEMOGRAPHIQUE
B- ENVIRONNEMENT ECONOMIQUE ET SOCIAL
III- IMPLICATIONS SUR LA SECURITE SOCIALE : Le cas
du secteur public
A- SITUATION FINANCIERE DES REGIMES
B- IMPLICATIONS DES STRUCTURES DEMOGRAPHIQUES
C- IMPLICATIONS DES AJUSTEMENTS STRUCTURELS ET
ECONOMIQUES
IV- CONCLUSION
V- BIBLIOGRAPHIE
I-INTRODUCTION
La sécurité sociale en Tunisie et c'est
le cas d'ailleurs de la plupart des pays du monde, occupe une place importante
dans l'économie nationale par ses effets sur la répartition du
revenu, la stabilité de l'emploi, l'état de santé de la
population, la productivité de la main d'oeuvre et d'une manière
générale sur la croissance économique.
De ce fait, il existe des fortes relations et une
interdépendance manifeste entre l'économie nationale et la
sécurité sociale ce qui laisse croire que tout changement au
niveau da la politique économique et sociale et de l'évolution
des structures démographiques de la population affecte à moyen et
long terme cette dernière.
Depuis 1986, la Tunisie appliquait un plan
d'ajustement structurel de son économie. Cette opération se
poursuivra tout au long du VIIIème plan de développement
économique et social (1992-1996) et s'articulera autour de sept axes qui
intéresseront en particulier le devenir de la sécurité
sociale à savoir :
1- Instauration progressive de l'économie du
marché ;
2- Pivatisation et restructuration des entreprises
publiques ;
3- Réforme de la
fiscalité ;
4- Liberté des prix au niveau de la production et
de la distribution ;
5- Promotion du secteur privé ;
6- Développement du système
monétaire et financier ;
7- Désengagement de l'Etat des activités
concurrentielles et non stratégiques.
Ces politiques économiques de
réajustement structurel qui ont pour objectifs principaux la relance de
la croissance économique du pays ne peuvent donner les résultats
escomptés qu'à moyen et long terme compte tenu des
mécanismes et des moyens humains et techniques mis en place.
Concernant le secteur public qui est
géré en matière de sécurité sociale par la
Caisse Nationale de Retraite et de Prévoyance Sociale (CNRPS) va
connaître aux lumières des différentes formes de
réajustements structurels et en particulier la privatisation des
entreprises publiques et la promotion du secteur privé en
conformité avec l'instauration progressive de l'économie du
marché, des difficultés au niveau du financement des
régimes.
II- ENVIRONNEMENT ECONOMIQUE ET
DEMOGRAPHIQUE
L'environnement économique actuel est le
résultat partiel de l'ajustement structurel qui a commencé en
1986 par contre l'état démographique de la population tunisienne
est le fruit d'une politique de limitation des naissances entamée depuis
une longue date et renforcée corrélativement avec une politique
sanitaire de dimension préventive depuis l'avènement de
l'ère nouvelle.
A- ENVIRONNEMENT DEMOGRAPHIQUE
Le financement de sécurité sociale et
surtout le régime de retraite qui
en Tunisie fonctionne suivant le système de
répartition (c'est-à-dire les actifs par leurs cotisations
financent les prestations des retraités inactifs), est affecté
selon l'importance relative de ces derniers par rapport à la population
active occupée.
Malgré que les variables
démographiques varient lentement avec le temps et ses effets ne se
manifestent qu'à long terme, et la population tunisienne est encore
jeune, le rapport démographique (actifs cotisants/pensionnés) se
détériore de plus en plus vite dans le secteur
public.
Cette tendance de vieillissement si elle n'est pas
compensée par une croissance soutenue de l'emploi dans ce secteur, va
influer négativement l'équilibre financier de ce
régime.
années
|
1980
|
1988
|
1989
|
1990
|
1991
|
Actifs/retraités
|
8
|
5,9
|
5,7
|
5,6
|
5,4
|
Source : annuaires statistiques de la
CNRPS.
1- Baisse de la natalité
La politique de l'Etat Tunisien en matière de
limitation des naissances à travers un programme de planning familial
soutenu par l'amélioration du niveau économique et social de la
population et de l'accès de la femme au marché de l'emploi, a
engendré une baisse notable de la natalité comme le montre le
tableau suivant :
années
|
1966
|
1980
|
1986
|
1990
|
Taux brut de natalité pour 1000 habit.
|
45,1
|
35,2
|
31,1
|
25,5
|
Nombre d'enfants par femme
|
7,1
|
5,4
|
4,5
|
3,5
|
Taux d'acct. naturel de la pop.en %
|
3,0
|
2,76
|
2,47
|
1,9
|
source : Institut national de la statistique de
Tunisie.
3- Baisse de la mortalité
L'amélioration de la couverture sanitaire et
du niveau de vie de la population a introduit une baisse au niveau de la
mortalité ce qui va influencer positivement l'espérance de vie
à la naissance des personnes (l'espérance de vie en Tunisie est
passée de 58 ans en 1980 à 69 ans en 1991).
Cette tendance signifie qu'il y aura de plus en plus
une proportion assez importante de personnes âgées.
années
|
1980
|
1983
|
1986
|
1991
|
Taux brut de mortalité pour 1000 ha
|
7,6
|
6,9
|
6,4
|
6,0
|
Espérance de vie
|
58
|
62
|
65
|
69
|
4- Accroissement du nombre de personnes
âgées
Compte tenu de l'amélioration sensible de
l'espérance de vie à la naissance et de la baisse
simultanée de la mortalité et de la natalité, la structure
de la population tunisienne a connu un accroissement soutenu de la part des
personnes âgées, ce qui va se traduire par des charges
supplémentaires en matière de prestations sociales.
années
|
1966
|
1984
|
1984
|
1991
|
Proportion des personnes âgées de 60 ans et
plus en %
|
5,6
|
6,6
|
6,8
|
7,6
|
Source :Institut national de la statistique de
Tunisie.
4- Accroissement de la population en âge
d'activité (15-59 ans)
La population en âge d'activité (15-59
ans) a connu un accroissement régulier dans le temps comme le montre le
tableau ci-dessous. Cette augmentation est de nature à accroître
le nombre de demandeurs d'emplois mais le nombre de postes d'emplois
effectivement crées va dépendre du niveau de croissance et
d'absorption de l'économie tunisienne.
années
|
1966
|
1989
|
1991
|
Proportion des personnes en age d'activité
en%
|
53,5
|
54,5
|
55,8
|
B- ENVIRONNEMENT ECONOMIQUE ET SOCIAL
Etant donné que la sécurité
sociale se trouve au coeur de l'activité économique, il est tout
à fait naturel qu'elle sera affectée par le changement des
différentes variables économiques comme : l'emploi, la
rémunération, les prix, etc.
Dans une situation de plein emploi et de croissance
accélérée, le financement de la sécurité
sociale ne pose aucun problème par contre en période de crise
cette tache ne sera pas aisée.
1- Accroissement du produit intérieur
brut
L'économie tunisienne a connu durant la
période 1987-1991 une croissance respectable compte tenu d'une
conjoncture internationale défavorable et plusieurs aléas
climatiques intérieurs (sécheresse, inondation).
Durant cette période, la croissance du PIB
est fluctuante avec un taux maximum de 7,6% en 1990 et un taux annuel moyen de
4,3%.
années
|
1987
|
1988
|
1989
|
1990
|
1990
|
Accroissement du PIB en %
|
6,7
|
0,1
|
3,7
|
7,6
|
3,5
|
Source : Institut national de la statistique de
Tunisie
2- Taux de chômage élevé
Compte tenu d'un accroissement de la population
active (18-59 ans), de l'ordre de 3,4% par an, le taux de chômage est
actuellement à un niveau assez élevé.
Cette tendance ne fait pas le bonheur de la
sécurité sociale puisque le nombre de cotisants va
connaître en conséquences une baisse assez importante.
années
|
1980
|
1984
|
1989
|
Taux de chômage en %
|
11,4
|
13,1
|
15,3
|
3- Déséquilibre entre l'offre et la demande
d'emploi
Malgré un effort d'investissement
appréciable pour les trois dernières années du
VIIème plan avec un taux d'accroissement annuel moyen de 10,7%, la
demande additionnelle d'emplois se trouve à un niveau supérieur
aux créations avec tout de même une légère
amélioration à la fin du VIIème plan.
|
Demande additionnelle
|
Créations d'emplois
|
Taux de couverture en %
|
IVème plan (1973-1976)
|
198 000
|
164 000
|
82,2
|
Vème plan(1977-1981)
|
275 000
|
209 000
|
76,0
|
VIème plan (1982-1986)
|
324 000
|
200 000
|
61,7
|
VIIème plan (1987-1991)
|
300 000
|
204 000
|
68,0
|
Source : VIIème plan de développement,
Tunisie.
4- Importance relative des secteurs privé et
public
Jusqu'au VIIème plan, le secteur public est
prédominant avec 50,5% de l'effort iotal en investissement.
Cette configuration sera inversée au cours du
VIIIème plan, conformément à l'instauration de
l'économie du marché et de la promotion du secteur
privé.
Les investissements qui seront injectés dans
le secteur privé représentent ainsi 52,3% pour la première
fois.
5- Rémunération et effectif des
salariés dans le secteur public
Globalement, l'évolution des salariés
dans le secteur public est de l'ordre de 7,6% grâce surtout aux
augmentations des années 1990 et 1991.
Si l'effectif des salariés de la fonction
publique ne cesse d'accroître avec un taux annuel moyen de 2,6%,
l'effectif des salariés des entreprises publiques connaît une
diminution légère mais significative, ce qui laisse croire que le
programme d'ajustement structurel et surtout la promotion du secteur
privé a mobilisé plus d'emplois au profit du secteur privé
et on assiste de ce fait à une mobilité de la main d'oeuvre
à ce secteur au détriment du secteur public.
années
|
1986
|
1992
|
Accroissement annuel moyen en %
|
Minimum garanti (régime 48H)
|
105
|
138
|
4,7
|
Fonction
Publique
*Effectifs en milliers
*Salaire annuel moyen en D.
|
1986
258,6
3248
|
1991
294,0
4677
|
2,6
7,6
|
Entreprises publiques
*Effectifs en milliers
*Salaire annuel moyen en D.
|
1986
99,8
3939
|
1991
92,0
5690
|
-1,6
7,6
|
6- Dépenses en matière de
santé
L'Etat tunisien fournit depuis longue date une
politique en matière de santé visant à offrir à sa
population en croissance les soins nécessaires.
Ainsi, les dépenses de santé ne cesse
de s'accroître au fil des années. Elles représentent en
moyenne durant le VIIème plan 4,5% du PIB.
D'autre part et en conformité avec
l'encouragement de la médecine de libre pratique et
l'élévation sans précédent du niveau de vie de la
population, la consommation médicale a connu quant à elle une
augmentation notable.
En effet, l'indice spécifique base 100 en
1983 concernant l'entretien, l'hygiène et les soins a atteint la valeur
143,6 en 1989 accusant ainsi un accroissement de 43,6% en l'espace de six
années.
années
|
1969-72
|
1973-76
|
1977-81
|
1982-86
|
1987-90
|
Dépense tot.santé/PIB en %
|
-
|
3,5
|
3,9
|
4,4
|
4,5
|
Malgré l'effort important fourni
comparé aux pays en voie de développement dont le ratio de la
dépense totale de santé par rapport au PIB varie entre 2 et
4% ; ce rapport est en deçà de celui enregistré dans
les pays développés tels que :France(8,7%), Allemagne(8,2%),
Suède(8,8%), U.S.A(11,8%) .
7- densité médicale
Le personnel médical et paramédical a
connu lui aussi une croissance régulière ce qui a permis une
amélioration notable de la densité médicale en Tunisie qui
a passé d'un médecin pour 2200 habitants en 1986 à un
médecin pour 1800 habitants en 1991.
années
|
1986
|
1991
|
Accroissement annuel moyen en %
|
médecins
|
1350
|
4500
|
5,5
|
pharmaciens
|
1240
|
1538
|
4,4
|
dentistes
|
525
|
898
|
11,3
|
paramédicaux
|
20300
|
23883
|
3,3
|
III- IMPLICATIONS SUR LA SECURITE SOCIALE : le cas
du secteur public
A- SITUATION FINANCIERE DES REGIMES GERES PAR LA
CNRPS
1-Activité de la CNRPS
La CNRPS en tant qu'établissement public
gère les régimes de retraite et de prévoyance sociale
depuis 1976 au profit des actifs de la fonction publique et des entreprises
publiques pour les couvrir contre les risques de maladie, d'invalidité,
de vieillesse et de décès.
En 1991, la population couverte se ventile comme
suit :
Catégorie
|
nombre
|
Actifs
|
438237
|
Retraités
|
57393
|
Conjoints survivants
|
23184
|
Orphelins
|
15406
|
TOTAL
|
534220
|
Source : annuaire statistique de la
CNRPS.
L'apport de la CNRPS ne se limite pas aux
prestations fournies à ses adhérents mais à d'autres
activités telles que :
a) La contribution aux efforts de l'Etat dans le domaine
de la santé :
- forfait alloué au ministère de la
santé publique :6 MD.
- protocole d'accord : 0,455 MD.
Le montant représente 26,4 % des
dépenses du régime de la prévoyance sociale de
l'année 1991.
b) Contribution de la CNRPS dans le domaine des
transferts sociaux
comme le cas de la participation avec un montant de 246
mille dinars en 1990/1991 aux différentes associations des
handicapés.
c) Contribution de la CNRPS le domaine de l'habitat pour
renforcer la politique de l'Etat en octroyant des prêts pour
l'acquisition d'un logement.
D'autres types de prêts son aussi
octroyés tels que les prêts personnels et les
véhicules.
L'enveloppe arrêté annuellement est de
20 MD répartie comme suit :
- prêts logement : 10 MD
- prêts personnel : 6 MD
- prêts véhicule : 4 MD
2- L'équilibre des régimes depuis
1985
a) Régime des pensions
années
|
1985
|
1986
|
1987
|
1988
|
1989
|
1990
|
Recettes directes en MD
|
78
|
100
|
110
|
124
|
147
|
159
|
Dépenses directes en MD
|
64
|
82
|
94
|
105
|
127
|
142
|
Solde direct en MD
|
14
|
18
|
16
|
19
|
20
|
17
|
Source : annuaire statistique de la
CNRPS.
b) Régime obligatoire de prévoyance
sociale
années
|
1985
|
1986
|
1987
|
1988
|
1989
|
1990
|
Recettes directes en MD
|
13
|
16
|
17
|
19
|
23
|
26
|
Dépenses directes en MD
|
9
|
10
|
12
|
13
|
13
|
22
|
Solde direct en MD
|
4
|
6
|
5
|
6
|
10
|
4
|
Source : annuaire statistique de la
CNRPS.
c) Régime facultatif d'assurance
maladie
années
|
1985
|
1986
|
1987
|
1988
|
1989
|
1990
|
Recettes directes en MD
|
0,9
|
1,0
|
1,1
|
2,0
|
3,0
|
3,4
|
Dépenses directes en MD
|
1,4
|
1,5
|
1,7
|
2,3
|
3,6
|
4,3
|
Solde direct en MD
|
-0,5
|
-0,5
|
-0,6
|
-0,3
|
-0,6
|
-0,9
|
Source : annuaire statistique de la
CNRPS.
d) Régime du capital
décès
années
|
1985
|
1986
|
1987
|
1988
|
1989
|
1990
|
Recettes directes en MD
|
4,7
|
4,9
|
5,0
|
5,3
|
5,6
|
6,5
|
Dépenses directes en MD
|
3,6
|
5,7
|
6,6
|
8,6
|
3,6
|
8,1
|
Solde direct en MD
|
1,1
|
-0,8
|
-1,4
|
-3,0
|
-0,6
|
-1,6
|
e) Equilibre général des
régimes
années
|
1985
|
1986
|
1987
|
1988
|
1989
|
1990
|
Recettes directes en MD
|
96,4
|
121,9
|
132,5
|
149,9
|
178,4
|
194,4
|
Dépenses directes en MD
|
78,8
|
99,7
|
114,7
|
127,4
|
151,9
|
177,2
|
Solde direct en MD
|
17,6
|
22,2
|
17,8
|
22 ,5
|
26,5
|
17,2
|
Nous pouvons remarquer à partir de ces
données que globalement les régimes gérés par la
CNRPS sont excédentaires mais ce solde positif qui ne représente
qu'environ 9 % des recettes en 1990, ce qui dénote sa fragilité
compte tenu surtout de détérioration du rapport
démographique (accroissement de plus en plus rapide des
pensionnés par rapport aux actifs) et du déficit escompté
des régimes du capital décès et de l'assurance maladie
facultative, en plus du taux d'accroissement annuel moyen des dépenses
directes, soit 17,6% cinq années durant contre un taux d'accroissement
de 15% des recettes directes.
B- IMPLICATION DES STRUCTURES DEMOGRAPHIQUES
Au niveau de la sécurité sociale ce
qui importe le plus quant au devenir du financement de ses régimes,
c'est l'état de santé de la population couverte, la croissance de
l'effectif des cotisants et l'évolution du gain de ses
adhérents.
Au niveau de l'effectif des actifs, les deux
dimensions économique et démographique sont
liées.
On a vu dans le chapitre sur l'environnement
économique et économique que :
1) Structurellement la proportion des personnes
âgées est de plus en plus importante dans la population
tunisienne.
2) Le nombre d'années de jouissance d'une pension
est de plus en plus important compte tenu d'une espérance de vue
à la naissance plus élevée.
3) Malgré l'accroissement de la population en
âge d'activité, le nombre d'emploi crées dans le secteur
public est actuellement assez faible (taux de chômage de l'ordre 15,3% en
1989).
4) Le secteur privé va connaître une
importance capitale en matière d'investissements durant le VIIème
plan, ce qui va mobiliser davantage les nouveaux emplois crées par la
croissance économique escomptés au détriment bien entendu
du secteur public.
Toutes ses tendances structurelles au niveau
démographiques sont résumées fidèlement par ce
qu'on appelle le rapport démographique
(actifes/pensionnés) :
années
|
1985
|
1986
|
1987
|
1988
|
1989
|
1990
|
Effectif des actifs (1)
Accroissent en %
|
349655
-
|
369042
5,5
|
378159
2,5
|
387451
2,5
|
401772
3,7
|
416657
3,7
|
Effectif des pensionnés(2)
Accroissent en %
|
48865
|
53452
|
58167
|
61955
|
66320
|
71245
|
Rapport :(1)/(2)
|
7,16
|
6,90
|
6,50
|
6,25
|
6,06
|
5,85
|
Nous constatons d'après le tableau ci-dessus,
que l'accroissement annuel moyen des actifs, soit 3,5% est relativement faible
par rapport à l'accroissement annuel moyen des pensionnées, soit
7,8% durant la période 1985-1990.
Cette croissance déséquilibrée
des actifs par rapport aux pensionnés, qui n'est que le résultat
d'une structure démographique donnée et d'un niveau d'absorption
de l'économie tunisienne de demandeurs d'emplois, va influer
négativement sur le rapport démographique qui reflète
l'état de santé du régime de retraite de la
sécurité sociale.
Ce rapport passe en l'espace de cinq ans seulement
de 7 cotisants pour un pensionné à 5 cotisants pour un
pensionné.
Cette tendance va influer directement
l'équilibre financier du régime de retraite d'une manière
négative. En effet, cette évolution non proportionnelle des
cotisants et des bénéficiaires en faveur des derniers engendre
une augmentation du niveau des prestations plus importante que les cotisations
ce qui va poser un problème certain au niveau du financement d'un
régime basé sur le système de répartition ce qui
est le cas du régime de retraite géré par la
CNRPS.
B- IMPLICATION DES AJUSTEMENTS STRUCTURELS ECONOMIQUES
Comme on l'a dit auparavant que la
sécurité sociale ne vit pas en dehors de la politique nationale
mais il y a en fait entre les deux une interdépendance étroite
qui se manifeste sous plusieurs formes.
Une croissance économique soutenue qui
génère plus de de postes d'emplois effectifs et plus de gain pour
la population affiliée est bénéfique pour le financement
des régimes de la sécurité sociale.
En effet, pour un système de
répartition ce qui importe le plus c'est l'accroissement plus que
proportionnel du nombre de cotisants par rapport au nombre de pensionnés
et ceci ne peut être réalisé que grâce à une
croissance économique performante.
Dans les pays en voie de développement
où la croissance économique est, soit faible, soit
modérée, mais de courte durée vu les structures encore
fragiles, les nombreux goulots d'étranglements et l'importance de la
conjoncture internationale, la relance de l'économie nationale se fait
par des ajustements structurels.
Mais l'ajustement des structures économiques
ne peut donner ses fruits qu'à moyen et long terme (en moynne 5 à
10 ans).
En Tunisie, le programme d'ajustement structurel
entamé depuis 1986 et qui vise à promouvoir l'environnement
économique ne peut être performant pleinement qu'au cours du
VIIIème plan de développement économique et social, mais
il y a lieu de remarquer que les résultats préliminaires de cette
opération ont commencé à être sentis vers la fin du
VIIème plan.
Néanmoins, l'ajustement structurel en Tunisie
a eu des effets certains sur le financement des régimes dans le secteur
public.
La Tunisie veut compte tenu de la conjoncture
économique internationale, dynamiser le secteur privé et
instaurer progressivement l'économie du marché ce qui
nécessite la libéralisation des prix et des investissements et
d'encourager l'initiative privée.
Puisque les ressources sont rares, l'Etat pour
financer cette opération coûteuse, va s'occuper uniquement des
secteurs stratégiques tout en restructurant les entreprises publiques
dans un but d'efficience économique.
Cette restructuration qui a pour objectif de
privatiser certaines entreprises en difficultés ou de pratiquer de
nouvelles méthodes de gestion dans d'autres en vue d'augmenter la
productivité.
En effet, les orientations du VIIIème plan,
indiquent que le secteur privé sera prioritaire avec une enveloppe
d'investissement pour la première fois supérieur à celui
consacré au secteur public avec un taux de 52,3%.
Il faut donc s'attendre à ce que le secteur
privé accapare en conséquence des nouveaux postes d'emplois
crées, soit à partir des entreprises privatisées ou
restructurées, soit à partir de l'implantation de nouveaux
projets privés.
Ainsi, le secteur public va perdre son importance
progressivement au profit du secteur privé ce qui réduit en
conséquence le nombre de cotisants et les recettes des
régimes.
Par contre les prestations de l'autre
côté vont augmenter compte tenu du vieillissement de la population
affiliée et d'une espérance de vie plus élevée des
personnes âgées.
Il est donc certain, comme le montre
l'évolution du rapport démographique et l'accroissement plus
important des prestations par rapport aux cotisations, que les régimes
de la CNRPS vont connaître des difficultés au niveau du
financement dans un lendemain très proche.
L'ajustement structurel en Tunisie s'est
accompagné d'une liberté progressive des prix (environ 60% des
produits), ce qui a incité les pouvoirs publics à augmenter les
salaires.
La liberté des prix a pour
conséquence : d'augmenter le coût de la santé par le
biais de l'élévation des prix pharmaceutiques et des actes
médicaux.
Ainsi, le régime de la prévoyance
sociale, qui connaît un déficit structurel au niveau de
l'assurance maladie facultative, va connaître un accroissement de ses
dépenses surtout que le poste pharmacie a un poids
prépondérant (environ 50% de la dépense totale et 70% des
dépenses de la longue maladie).
De plus, l'amélioration de la densité
médicale, de l'infrastructure sanitaire et du niveau de vie de la
population tunisienne, a contribué davantage à l'accroissement de
la consommation médicale.
L'augmentation des salaires a un effet positif pour
le régime de prévoyance puisqu'elle induit une recette
supplémentaire sans avoir un effet sur les dépenses parce que les
prestations de maladie sont octroyées sans conditions sur les
gains.
Par contre pour le régime de retraite, toute
augmentation de salaire a un effet sur les cotisations et sur les prestations
à la fois.
Ce qui importe le plus dans ce cas c'est le rapport
démographique entre actifs et pensionnés et surtout son
évolution dans le temps.
En effet, les augmentations de salaires vont donner
droit dans le futur à une pension plus élevée ce qui exige
un accroissement soutenu de la population des cotisants.
Ainsi, une élévation des salaires ne
peut être bénéfique qu'à très court terme et
la tendance à la baisse du taux démographique ne peut être
compensée que par la fructification des fonds de réserves sur le
marché monétaire axée principalement sur la
libéralisation des taux d'intérêts et la diversification
des produits financiers tels que certificat de dépôt et bons de
trésor, la CNRPS s'adapte actuellement quoique lentement à cette
situation nouvelle.
Les placements effectués dans le passé
par la CNRPS sont exclusivement de nature étatique comme le montre la
situation arrêtée au 31/12/1991 :
Type de placement
|
Montant en MD
|
Proportion en %
|
Bons d'équipement
|
75,7
|
70
|
Emprunt
|
1,8
|
2
|
Bons de trésor
|
30,5
|
28
|
Cette structure montre que le portefeuille des
placements est dominé par les bons d'équipement (70%) dont son
rendement est relativement faible par rapport aux nouveaux
produits.
En conformité avec la politique actuelle en
matière de placements, la CNRPS s'oriente progressivement vers les
produits financiers à hauts rendements pour rentabiliser davantage ses
réserves afin d'atteindre un rendement moyen en 1996 de 8% comme le
prévoit le VIIIème plan.
En matière de la promotion du secteur de
l'habitat et compte tenu de la politique nouvelle de l'Etat qui vise à
encourager l'initiative privée et à renforcer l'épargne
des ménages, la CNRPS a décidé en 1988 de ne plus
construire de nouveaux logements pour loyer dont le rendement s'est
avéré faible et a procédé par la vente de certains
cités.
Actuellement, la CNRPS accorde des crédits
logement pour ses affiliés, soit une enveloppe annuelle d'un montant de
10 MD est allouée et avec un taux d'intérêt de
8,25%.
IV- CONCLUSION
Etant donné l'interdépendance entre
l'économie nationale d'un pays et la sécurité sociale, et
l' intérêt particulier et l'importance de cette dernière
quant à l'application des différentes politiques
économiques arrêtées par l'Etat en matière de
santé, d'emplois, d'épargne, d'habitat, d'entraide entre les
générations et de stabilité sociale ; la
sécurité sociale se touve donc au coeur des bouleversements et
des changements tant conjoncturels que structurels des variables
économiques.
L'Etat tunisien par souci d'efficience
économique a choisi le modèle de l'économie du
marché sans oublier la dimension sociale. Ce choix nécessite des
changements profonds au niveau des structures économiques qui ne donne
plein rendement qu'après plusieurs années voire une
décennie entière.
L'économie du marché qui s'instaure
progressivement avec la libéralisation des prix et des investissement,
la privatisation des entreprises publiques en difficultés, la promotion
du secteur privé dans tous les domaines et le désengagement de
l'Etat des secteurs concurrentiels, exige des mutations et des transformations
profondes au niveau de l'unité productrice pour qu'elle soit performante
et rentable ; une nouvelle vision du travail, et une nouvelle organisation
de la couverture sociale.
Ainsi, le secteur public va donner place au secteur
privé qui va accaparer une proportion plus importante des actifs ce qui
réduit en conséquence le nombre de cotisants aux régimes
gérés par la CNRPS.
Cet handicap conjugué avec l'accroissement du
nombre des personnes âgées et l'élévation de
l'espérance de vie, influera négativement sur le financement des
régimes.
D'après les indicateurs formulés
précédemment, la CNRPS va connaître dans un avenir
très proche (si toutes choses restant égales par ailleurs) des
difficultés au niveau de l'équilibre financier surtout pour le
régime de retraite qui occupe une place prépondérante par
rapport aux autres régimes gérés.
Pour remédier à cette situation, il
est tout à fait naturel de procéder aux ajustements
nécessaires en fonction des changements intervenus au niveau du paysage
économique et social du pays afin de sauvegarder la
pérennité du système, en cherchant de nouveaux taux
d'équilibre.
V-
BIBLIOGRAPHIE
1- DELEEK H., L'avenir de la sécurité
sociale en europe, Economica, 1987.
2- LANGAR S., L'influence des facteurs
socio-démographiques sur les dépenses des soins médicaux
des ménages, mémoire de 3ème cycle, INTES,
1992.
3- M'BAREK E., Les effets économiques de la
sécurité sociale :le cas de la Tunisie, mémoire de
DEA, FSEGT, 1990.
4- Les statistiques de la caisse nationale de retraite et
de prévoyance sociale.
5- VIIème et VIIIème plan de
développement économique et social, ministère du
plan,Tunisie.
6- Annuaires statistiques de l'INS, Tunisie.
7- Enquête population-emploi de 1989, INS ,
Tunisie.
|