UNIVERSITE CHEIKH ANTA DIOP DE DAKAR
FACULTE DES LETTRES ET SCIENCES HUMAINES
DEPARTEMENT DE LETTRES MODERNES
Mémoire de DEA
(Littérature Comparée)
Du déclin du mythe impérial à
l'affirmation de l'identité noire : Au Coeur
des
ténèbres (1902) de Joseph Conrad, Batouala (1921)
de René Maran et
Cahier d'un retour au pays natal (1939)
d'Aimé Césaire.
Présenté Par : Sous la direction
de :
M.Amadou Hamé Niang M.Amadou Falilou
Ndiaye
Professeur titulaire
Année
académique
2007-2008
REMERCIEMENTS
Nous tenons, tout d'abord, à adresser nos plus profonds
et sincères
remerciements à notre directeur de recherche
Mr Amadou Falilou Ndiaye, qui a
dirigé ce travail, pour
tous ses conseils et ses encouragements avisés ainsi que
pour ses
travaux de recherche qui nous furent d'une aide précieuse. On
lui
exprime notre gratitude pour nous avoir guidés dans ce travail,
ménageant son
temps, son savoir, sa patience pour que ce travail
arrive à son terme.
Nos remerciements sont aussi adressés à nos
professeurs Mr Bakary Sarr,
Mr Alain Juillard, Mr
Souleymane Faye, Mr Ousmane Dia, Mr Pape Mody
Niang,
Mme Sarré, Mr Modou Ndiaye et Mr
Diarra.
Nous tenons à remercier également le chef du
département des Lettres Modernes
Mr Ibra Diene.
Un grand merci à Fatou Konaté et à
Augustin Coly qui nous ont assistés,
conseillés, soutenus tout
au long de ce travail.
Merci à vous tous.
DEDICACE
A notre père auquel nous tenons la force, la
ténacité et qui a tout sacrifié pour notre
éducation.
A notre mère cet ange de tendresse, de patience et de
générosité, dont la voix
résonne encore dans nos
oreilles pour nous
réveiller à l'aube et veiller ainsi au bon
déroulement de nos études.
A la mémoire de notre défunt grand-père
Mamadou Abdoulaye Niang, de nos
amis Aly Fall et Awa Yombé, de notre
oncle Mamadou Yaya Lo.
Ma reconnaissance est grande vis-à-vis de mon
frère Mamadou qui, en dépit de
la lourde charge familiale,
tient à me mettre dans les meilleures conditions pour
mon
épanouissement intellectuel.
A ma famille : Mamadou, Kadia, Woury, Racky Diop, Mohamed,
Boubou,
Abou, Dieynaba, Kadia Pam, Néné Lo, Racky Mama,
Néné Hawa, Kadia
Samba, Oumouyel, Malick, Ousmane, mes trois
homonymes, ma fiancée
Meissa.
A mes amis de toujours Chérif Guèye, Korguel
Niang, Mohamadou Diop, Abou
Guèye.
A mes camarades de promotion.
A tous nos amis.
SOMMAIRE
Remerciements Dédicace
Sommaire
Plan détaillé de la thèse 1
Glossaire 3
Introduction ..4
Plan raisonné 8
Partie rédigée : « Chap.III : Manifestations
de la décadence du mythe » ..12
Bibliographie commentée 25
- Commentaire d'un ouvrage ..26
· Homi K Bhabha, Les lieux de la culture. Une
théorie postcoloniale
(2007) 27
- Commentaire d'un article .31
· Jacques Chevrier, « Les romans coloniaux : enfer ou
paradis ? » .32
Bibliographie générale 37
PLAN DETAILLE DE LA
THESE
INTRODUCTION GENERALE
Première partie : Mythe de
l'Afrique et de l'Africain Chapitre I :
Imaginaire exotique du cadre naturel
I.1 : L'Ailleurs comme subversion du décor
littéraire traditionnel
I.2 : Evolution du mythe vers une altérité
géographique
Chapitre II : D'autres hommes :
perception mythique de la différence
II.1 : Opposition Sauvage et Civilisé
II.2 : Permanence du mythe de l'indigène
Deuxième partie :
Déclin du mythe impérial
Chapitre III : Manifestations de la
décadence du mythe
III.1 : Expression du malaise impérial
III.2 : Emergence d'un contre discours colonial
Chapitre IV : Formes de résistance
à l'Empire
IV.1 : Nature hostile
IV.2 : Indigènes insoumis
Troisième partie :
Identité et esthétique négro-africaine
Chapitre V : Revendication de la différence
V. 1 : Négritude : conquête d'une identité
V.2 : De l'expérience impériale à
l'attitude du Noir face à l'avenir
Chapitre VI : Processus de contestation
de la domination européenne
VI.1 : Modes d'expression du discours négro-africain
VI.2 : Rhétorique pour une civilisation de l'universel
CONCLUSION GENERALE
BIBLIOGRAPHIE GENERALE
GLOSSAIRE
Nous utiliserons les abréviations suivantes tout au cours
de cette étude :
Cahier : Cahier d'un retour au pays
natal C .t. : Au Coeur des
ténèbres
Batouala : Batouala
INTRODUCTION
L'expansion de l'impérialisme occidental est
accompagnée de la volonté de mythifier les terres et les hommes
que l'Europe soumettait à sa domination. Il fallait justifier les
conquêtes puis la colonisation. Aussi l'Afrique et les Africains sont-ils
vus à travers des prismes enchanteurs. La « vacuité »
et la « sauvagerie » sont les ténèbres dont l'Occident
se voit investi de la « mission » de civiliser.
Le mythe est érigé en doctrine dans les textes
littéraires, les travaux anthropologiques et ethnologiques encourageant
la volonté impérialiste. Dans son livre Le Nègre
romantique (1961), Léon-François Hoffman remonte
jusqu'à la Chanson de Roland, pour passer en revue les images
successives que les écrivains français se sont formés du
Nègre. Dans cette présente étude, notre champ d'analyse
étudiera le mythe de l'Afrique et de l'Africain dans la période
comprise entre la seconde moitié du XIXe siècle et l'aube du XXe
siècle. Cette période coïncide aussi bien avec
l'apogée du mythe impérial que l'apparition des premiers signes
de son déclin. Elle se caractérise par une curiosité
grandissante des « terrae incognitae ». En France ainsi qu'en
Angleterre, la conscience collective de l'époque est fortement
influencée par les textes évoquant la grandeur de l'Empire, avec
la mission impérative d'apporter ailleurs la Civilisation. Les
récits exotiques, en particulier Le roman d'un spahi (1881) de
Pierre Loti et de Kim (1901) de Rudyard Kipling cristallisèrent
le mythe de « l'homme blanc supérieur ». Ainsi, on retrouve
dans la masse textuelle, allant des revues et aux périodiques de tous
genres, la volonté de percer le mystère des espaces inconnus et
la mentalité des populations indigènes. L'interprétation
de la culture de l'Autre s'effectue à travers des
stéréotypes et clichés racistes. Par ailleurs,
l'imagination narrative établit une dualité manichéenne
entre l' « ici » et l' « ailleurs », chargeant le
récit de métaphores et de symboles dégradants. Il
s'agissait de présenter l'Autre, appelé aussi « sauvage
» avec des attributs démoniaques, l'Ailleurs, comme une terre de
désolation, marquée par la malédiction. Ces discours
justifiaient et légitimaient la colonisation.
Mais au tournant du siècle, des voix
s'élèvent pour dénoncer les conditions
déshumanisantes dans lesquelles sont réduites les populations
indigènes. Notre analyse partira des études postcoloniales pour
voir que malgré l'apologie de la grandeur impériale, s'insinuent
en filigrane dans les récits des doutes bouleversant la stabilité
de l'Empire. Dans Culture et Impérialisme (1993), Edward Said
s'appuie sur la critique littéraire pour revenir sur les
interprétations erronées de la représentation du monde non
occidental, évoquées déjà en 1978 dans
L'Orientalisme. L'Orient crée par l'Occident. Il montre comment
apparaît implicitement l'esthétique de la résistance
à l'empire chez des auteurs tels Joseph Conrad, Rudyard Kipling, Albert
Camus, Giuseppe Verdi, Charles Dickens. Homi Bhabha prolonge cette
pensée dans Les lieux de la culture. Une théorie
postcoloniale (1994). Mais ce sont les travaux de Frantz Fanon, Albert
Memmi, Patrick Chamoiseau, Aimé Césaire qui vont tenter de
redécouvrir et de se réapproprier le passé des
indigènes que l'autorité coloniale a toujours nié. Quant
à Homi Bhabha, il invite même à dépasser
l'ordonnancement du monde, construit sur l'opposition binaire entre « eux
», les Autres, et « nous », les Européens. Le
caractère éminemment conflictuel de ces notions sera
exploré par Bernard Mouralis dans Les
contre-littératures (1975) où il montre que
l'avènement du texte négro-africain change la conception de la
différence.
C'est dans ce contexte dense de la critique postcoloniale que
nous allons soumettre l'étude des textes de notre corpus : Au Coeur
des ténèbres (1902) de Joseph Conrad, Batouala
(1921) de René Maran et Cahier d'un retour au pays natal (1939)
d'Aimé Césaire.
Ces trois textes illustrent chacun une période
donnée de l'histoire du malaise dans la relation entre colonisateurs et
colonisés. L'Afrique qui se profile dans la nouvelle de Conrad est un
lieu mythique, à la fois distant et vaguement familier. Pour Maran, le
mythe de l'Afrique « sauvage » et particulièrement de
l'indigène « irréfléchi » relève du
stéréotype déstabilisateur. Aimé Césaire,
dans son poème, va au-delà du doute conradien, de
l'inhumanité supposée des Noirs et de
la dénonciation des abus coloniaux chez Maran. Il
préconise un homme noir débarrassé de ses complexes pour
revendiquer son identité culturelle.
Ce schéma n'est pas exhaustif des nombreuses questions
que soulève notre sujet. Les contextes de production et de
réception expliquent la complexité de la problématique.
Quels sont les traits caractéristiques du mythe de
l'Afrique et de l'Africain dans le discours littéraire ? Comment la
relation du texte à l'environnement socioculturel peut-elle engendrer le
mythe et son déclin ? Sur quoi repose l'existence de la
différence ? Quelles sont les modalités de construction et de
représentation de l'identité ?
Nous nous intéresserons à la manière dont
les textes de notre corpus s'ouvrent sur « leurs différences
par rapport aux assertions du centre impérial »1.
Il est probable que l'expérience des écrivains ait déteint
sur leurs récits. Pour autant qu'ils ne restituent qu'une vision
généralisée de leur époque, le mythe de l'Autre ne
parait-il donc pas, avant tout, lié à la subjectivité et
à la position de l'observateur ? Dans Mythologies (1957),
Roland Barthes note que « l'astuce profonde de l'opération
-Bichon, c'est de donner à voir le monde nègre par les yeux de
l'enfant blanc : tout y a évidemment l'apparence d'un guignol
»2. De même, dans Mimésis. La
représentation de la réalité dans la littérature
occidentale (1969), Auerbach s'interroge sur l'ambivalence entre
l'imitation fictionnelle du réel et l'écart signifiant par
rapport à ce réel.
Dans la première partie de cette étude, nous
étudierons le mythe de l'Afrique et de l'Africain. La deuxième
partie sera une réflexion sur le déclin du mythe impérial
et la troisième partie sera consacrée à l'analyse de
l'identité et de l'esthétique négro-africaine.
1 B. Ashcroft, G. Griffiths, H. Tiffin, The
Empire Writes back. Theory and Practice in Post-colonial Literatures,
Londres, Routledge, 1989, p.3, Cité par J-.M. Moura,
Littératures francophones et théorie postcoloniale,
Paris, PUF, 1995, p.5.
2 Roland Barthes, Mythologies suivi de Le Mythe,
aujourd'hui (1957) in OEuvres complètes Tome I 1942-1965,
Editions établie et présentée par Eric Marty, Paris,
Seuil, 1993.
PLAN RAISONNE
Dans le cadre de notre projet de thèse intitulé
: Du déclin du mythe impérial à l'affirmation de
l'identité noire : Au coeur des ténèbres (1902)
de Joseph Conrad, Batouala (1921) de René Maran et Cahier
d'un retour au pays natal (1939) d'Aimé Césaire, nous
proposons un plan détaillé composé de trois parties, de
six chapitres et de douze sous-chapitres.
A la fin du 19e siècle, partout en Europe
des voix s'élèvent contre le système colonial. A partir
des études postcoloniales, nous étudierons dans la
littérature romanesque européenne les grandes imageries
impérialistes ayant donné naissance au mythe de l'Afrique et de
l'Africain. C'est aussi dans ces textes que l'on retrouve les signes du
déclin du mythe impérial. Mais l'avènement du texte
négro-africain se caractérise par la déconstruction des
codes européens tels qu'ils se sont affirmés dans la culture
occidentale.
Nous tenterons de faire un exposé succinct des grandes
lignes que nous comptons développer car jusqu'à la soutenance,
notre plan reste à l'état d'ébauche.
La première partie intitulée le « mythe de
l'Afrique et de l'Africain » prend en charge le regard porté sur
l'indigène dans la littérature occidentale. Cette vision
stéréotypée implique une construction dichotomique du
monde entre « eux », les indigènes et « nous », les
Européens. Ainsi, l'exotisme qui ressort dans ces récits se
focalise d'abord sur le milieu physique, puis sur les hommes noirs. Cette
perception duale sera étudiée dans le premier chapitre, l' «
imaginaire exotique du cadre naturel ». A ce niveau, nous verrons comment
la description de l'ailleurs subvertit le décor littéraire
traditionnel. Cela passe nécessairement par l'introduction dans les
textes de termes et expressions étrangers à la langue du Blanc.
Cependant, dans le dernier sous-point, on verra que les descriptions exotiques
ne se limiteront pas seulement à donner au lecteur occidental
l'équivalent de l'exploration. La narration crée de
véritables mythes qui évoluent vers une altérité
géographique. En effet, les connotations de « vacuité »
et de « sauvagerie » suggèrent implicitement la conquête
et la
domination. Le deuxième chapitre intitulé,
« d'autres hommes : perception mythique de la différence »,
sera abordé à l'image du précédent. Dans les deux
sous-points, on note une évolution dans les concepts de « Sauvage
» et de « l'indigène ». Le premier analyse la perception
de l'Autre comme sauvage ce qui annihile toute forme de communication. Dans le
second sous-point, on note la permanence du mythe, mais du Sauvage on passe
à l'indigène. Ces métamorphoses dans le langage traduisent
l'arbitraire de la volonté de domination.
La deuxième partie intitulée le «
déclin du mythe impérial » rendra compte de l'imposture
idéologique de l'Empire qui a entraîné sa chute. Aussi, au
premier chapitre sera-t-il question des « manifestations de la
décadence du mythe » dans la masse textuelle ayant
accompagnée la construction de l'Empire. Tout d'abord, nous montrerons
les procédés stylistiques par lesquels s'exprime le «
malaise impérial » dans la littérature occidentale. Dans le
deuxième sous- point, nous étudierons l'émergence d'un
contre discours colonial. En effet, l'avènement des textes écrits
par des indigènes sonne comme une révolte dans l'ordre
établi par le colonisateur. Le deuxième chapitre de la
deuxième partie revient sur les « formes de résistance
à l'Empire ». Nous étudierons d'abord comment
l'hostilité de la nature réduit la volonté de
rationalisation dans ces contrées réfractaires à la
pénétration blanche. Ensuite, le second sous-point prendra en
charge la résistance des indigènes insoumis. Mais c'est dans la
période de l'entre-deux-guerres que se développent la quête
de « l'identité et de l'esthétique négro-africaine
», titre de notre troisième et dernière partie. Nous
étudierons dans le premier chapitre la « revendication de la
différence » qui s'exprime à travers le mouvement de la
Négritude. Les écrivains noirs partent à la
reconquête de leur identité. Ils exaltent fièrement leur
culture et se réapproprient tous ce que le Blanc considérait
comme de la sorcellerie. Dans le second sous-point, nous analyserons le statut
complexe du Noir face à l'avenir au regard de son passé colonial.
En fait, il s'en suivra un processus de
contestation de la domination européenne que nous
étudierons dans le dernier chapitre de notre étude. Dans le
premier sous-point, nous étudierons l'esthétique
négro-africaine qui s'exprime à travers les modes d'expressions
du discours anti-colonial. Les Africains prônent une civilisation de
l'universel qui bannirait les inégalités raciales.
PARTIE REDIGEE
CHAPITRE III:
Manifestations de la décadence du
mythe.
III.1 : Expression du malaise impérial
Au XXe siècle, doutes, inquiétudes et critiques
commencent à naître en Europe quant au bien fondé du projet
colonial. L'Afrique est le centre de toutes les cruautés envers les
populations indigènes. En Angleterre, d'abord, naît la
première société anticoloniale, puis le débat
s'amplifie au Parlement de Londres, en France et en Belgique. Le Congo-belge,
propriété de Léopold II, théâtre des
massacres et atrocités perpétrés sur les indigènes
entre 1885 et 1908, est au coeur de ces débats. Arthur Conan Doyle y
revient longuement dans son livre : Le crime du Congo belge (1910),
Paris, Les Nuits Rouges, 2006.
C'est dans ce sillage que l'écrivain anglo-polonais,
Joseph Conrad écrit Au Coeur des ténèbres
publié en 1902. Dans cette nouvelle, le héros Marlow,
confronté aux forces obscures des ténèbres de la jungle
congolaise, symbolise l'impossibilité de la « mission civilisatrice
». La trame narrative relate le chant de cygne de l'empire, en restituant
dans la fiction les métaphores de la décadence du mythe de
l'homme blanc. La conscience des émissaires de l'Europe
impérialiste d'être observés par les indigènes,
donne naissance à un sentiment nouveau d'inquiétude dans leur
relation avec l'autre. En effet, si le Blanc a essayé de percer le
mystère de la nature africaine, il en est autrement avec l'homme noir,
jusque là considéré comme une ombre. Ce dernier
déstabilise la domination par son mutisme assourdissant. Les
Européens le croyaient incapable de comprendre leurs agissements, mais
la littérature africaine coloniale s'est exercée à prouver
le contraire. Dans cette continuité, dix neuf ans après Au
Coeur des ténèbres, paraît Batouala de
René Maran, sous-titré « Véritable roman nègre
», écrit par un « nègre », né à
Fort-de-France.
Dans Batouala, le Martiniquais rompt avec la
représentation de l'indigène comme élément du
décor. La fiction narrative met en scène des hommes noirs,
conscients de leur statut de dominés et de l'imposture
idéologique de l'Empire.
Si Marlow s'interroge sur le mystère que
recèlent la jungle et le sauvage, il en est autrement de Batouala,
héros éponyme du roman de René Maran. L'épouvante
de Marlow devant l'inconnu inaugure le malaise impérial. On se souvient
de ses frayeurs, d'abord au contact de la jungle : « Là
voilà devant vous, souriante, renfrognée, aguichante,
majestueuse, mesquine, insipide ou sauvage et toujours muette avec l'air de
murmurer, venez donc voir » (C.t.99), puis de sa peur
viscérale des indigènes, de l'apparition de la femme sauvage, en
particulier : « Elle était debout à nous regarder sans
un geste, pareille à la brousse même, avec un air de
méditer sur un insondable dessein » (C.t.176).
L'impossibilité de décoder ces messages visuels accentue le
sentiment de profonde anxiété des « pionniers du
progrès ». Ce qu'imaginaient et redoutaient les Européens,
c'est-à-dire, l'éventualité d'une prise de conscience des
Africains, est mis en scène dans la narration de Batouala. Pour
rappel, la polémique qu'avait suscitée la parution de ce livre
est l'illustration du malaise qui s'est installé dans la
société européenne. Aussi, quand René Maran
osa-t-il donner à des indigènes le statut de personnages
principaux, ce fut l'ouverture d'une ère nouvelle dans la relation des
Européens et des indigènes et dans une large mesure de l'Occident
et de l'Afrique.
En effet, Maran, en donnant la parole aux Africains, exprime
le malaise impérial dans sa version africaine. Les indigènes,
à l'opposé des Blancs, sont représentés dans des
figures assez bouffonnes, sous le regard démythificateur de
ceux-là dont parlera Sartre, plus tard dans Orphée noir
: « Voici des hommes noirs debout qui nous regardent et je vous
souhaite de ressentir comme moi le saisissement d'être vu. Car le blanc a
joui de trois mille ans du privilège de voir sans qu'on le voie
»3.
Ainsi, le récit de Batouala bouleverse la
structure du roman impérialiste. Ce sont les personnages africains qui
observent l'Européen, le peignent dans ses
3 Jean-Paul Sartre, « Orphée noir »,
préface de Léopold Sédar Senghor, Anthologie de la
nouvelle poésie nègre et malgache de langue
française, Paris, P.U.F., 1948, p.IX.
moindres traits physiques, psychologiques et son comportement
à l'égard des indigènes. Ces derniers, dans une fine
analyse, loin des canaux du rationalisme, confrontent des aspects de leur
culture nettement « supérieurs » à celle du «
maître ». On voit donc que « contrairement à ce que
pense le philosophe existentialiste, l'Africain, même colonisé, a
su lui aussi s'arroger « le privilège de voir sans qu'on
le voie »4. Le mépris du Blanc consiste à
ignorer la présence de l'indigène, tant physique que rationnelle.
Mais il n'y a aucun doute sur la lucidité et la clairvoyance de ce
dernier qui va donner lieu à une série de représentations
railleuses de l'Européen. Ils mettent en valeurs des acquis de leur
culture dont le Blanc ne peut apprécier la sagesse. C'est cette
référence à une Afrique mythique, qu'Aimé
Césaire s'efforce de traduire en partie dans son Cahier d'un retour
au pays natal, publié en 1939. Pour ce chantre de la
négritude, les valeurs « nègres » sont la seule force
culturelle susceptible d'être opposée à la force de
l'Occident impérialiste.
A l'image de Marlow, Batouala s'interroge sur la raison de la
présence des Européens en Afrique : « Aha ! Les hommes
blancs de peau. Qu'étaient-ils donc venus chercher, si loin de chez eux,
en pays noir ? » (Batouala, 27). Ce malaise, causé par la
présence étrangère, se convertit en
velléités de révolte, dont fait allusion Césaire,
mais sévèrement réprimées : « et le jarret
coupé à mon audace marronne / et la fleur de lys qui flue du fer
rouge sur le gras de mon épaule » (Cahier, 53).
La prise de conscience de la condition réelle des
indigènes amène les trois auteurs à s'écarter des
canons de l'exotisme qui ont forgé le mythe de l'Afrique et de
l'Africain. Leurs récits rendent compte de ce malaise impérial.
Si Conrad opère une distanciation ironique, Césaire, par contre,
rejettera cette façade séduisante des romans exotiques qui ont
bercé son enfance. Son poème condamne la conception
européenne de l'imagologie africaine : « Oh ces reines que
j'aimais jadis aux jardins printaniers et lointains avec
derrière
4 Jacques Chevrier, Les Blancs vus par les
Africains, Lausanne (Suisse), Favre, 1998, p.9, 213pages.
l'illumination de toutes les bougies marronniers !
» (Cahier, 52). La personnification de la nature africaine dans
Batouala porte une tonalité ambivalente. L'Afrique est vue mais
elle aussi observe : « La brousse, d'autre part, abonde en oreilles
secrètes, est peuplée de trop d'yeux invisibles. Les uns et les
autres sont à craindre comme la lèpre » (Batouala, 63).
Tout au long du récit, Maran réitère ce conflit à
l'échelle de la dérision. Les personnages indigènes se
rient des Européens effrayés par l'adversité de la nature
inhospitalière qui réduit la volonté de rationaliser un
peuple, imbu de sa supériorité culturelle : « Les
boundjous se trompent en se figurant que la brousse est morte. Elle parle, au
contraire, du matin au soir, comme une vieille femme » (Batouala,
144). Ils observent impuissant le piège de l'Afrique se refermer sur
eux. L'hostilité de la nature leur apparaît comme une opposition
à leur « mission ». Cependant, vu sous un autre aspect, on
peut avancer l'hypothèse que leur vulnérabilité
résulte du non-sens et de l'absence de tout fondement rationnel que les
émissaires de l'Europe perçoivent dans l'idéologie de
l'empire.
Tous les romanciers qui ont écrit sur l'Afrique,
à cette période de la colonisation, n'ont pas manqué de
représenter dans leurs fictions narratives le malaise des personnages
blancs, tourmentés face aux effets désastreux du cadre
spatio-temporel. On peut citer des romans tels La route des Indes
(1924) de E.M.Forster, Voyage au Congo (1927) de Gide, Coup de
lune (1933) de Simenon, Burmese Days (1934) de Georges Orwell, ou
l'épisode africain du Voyage au bout de la nuit (1952) de
Céline. Déjà, à la fin du 19e
siècle, Loti en peignant cyniquement le paysage de Saint-Louis, montrait
implicitement les doutes de Jean Peyral, héros du Roman d'un
spahi : « De quel droit avait-on fait de lui cet être
à part qu'on appelle spahi, traîneur de sabre à
moitié africain, malheureux déclassé, oublié de
tous, et finalement renié de sa
fiancée ». Ces interrogations de Jean Peyral
résument en substance la déception
5
que vivent les émissaires de la civilisation
européenne. C'est à travers ces « héros
troubles »6 que les auteurs de fiction suggèrent
dans leurs récits le malaise impérial. Le héros-narrateur
de Au Coeur des ténèbres soutient que
l'éloignement et la grande solitude dans ces contrées
éloignées et hostiles entraînent progressivement les
personnages blancs dans la déchéance et ils finissent par trahir
l'idéal de leur « mission ». On se rappelle Kurtz,
retranché dans son poste de l'intérieur et qui finit par
embrasser les coutumes indigènes : « La brousse sauvage l'avait
trouvé de bonne heure et avait tiré de lui une terrible vengeance
après sa fantastique invasion » (C.t. 171). Loin de tous les
carcans qui fondent les principes sacro-saints de la « Civilisation
», les exilés versent dans un excès de liberté. Le
destin tragique de Fresleven, réputé calme et de Kurtz,
commandant une tribu de sauvages, nous amène à relativiser la
prétendue « solidité » de la civilisation
européenne, quand ses émissaires peinent à s'y conformer
dans des situations extrêmes. Marlow dira que « ces petites
choses font toute une énorme différence. En leur absence, il faut
retomber sur sa force intérieure, sur sa propre capacité de
fidélité » (C.t. 157).
Dans le roman de René Maran, ce qui ne manque pas de
frapper c'est l'inversement des rôles attribués aux personnages. A
l'opposé de Conrad, Maran s'évertue à présenter
à travers le protagoniste de son récit une image autre de
l'indigène qui s'oppose à tous les stéréotypes
coloniaux.
Si dans Au Coeur des ténèbres, la
jungle se montre particulièrement inhospitalière aux Blancs, elle
réagit autrement avec les indigènes de la tribu Banda. Batouala
dénonce avec mépris tous les clichés
dépréciatifs sur le paysage africain. Entre l'Africain et la
nature, existe une proximité presque filiale : « Louée
soit la brousse ! On la croit morte : elle est vivante, bien vivante, et ne
parle qu 'à ses enfants, et à eux seuls ! » (Batouala,
145).
5 Pierre Loti, Le roman d'un spahi, Paris,
Calmann-Lévy, 1987, p.153.
6 Jean-Marc Moura, « Francophonie et critique
postcoloniale », Revue de littérature comparée N°281,
p.68.
Cette harmonie que les protagonistes de Maran revendiquent
fièrement, entre dans une optique contestataire de l'exotisme facile des
premiers récits de voyage sur l'Afrique. Le Martiniquais invite aussi
l'Europe à avoir un autre regard sur les Africains. En effet, il sort
ces derniers de la mutité dans laquelle une littérature
tendancieuse les avait confinés depuis plusieurs siècles.
Maintenant, ils observent et jugent le colonisateur et sa « civilisation
». Le malaise impérial ne doit plus s'appliquer aux seuls
Européens dans la littérature coloniale.
III.2 : Emergence d'un contre discours colonial
Le malaise impérial qui apparaît en filigrane
dans les récits qui ont d'abord construit le mythe de l'empire va
entraîner un discours qui va à l'encontre du regard de l'Occident
sur le monde non européen. Les premières critiques surgissent
cependant dans la littérature qui avait forgé le mythe de
l'empire. Elles sont l'oeuvre d'écrivains ayant effectué un
voyage dans les pays colonisés ; et découvrant l'oppression que
subissent les peuples indigènes.
Si l'on ne peut contester la sincérité de ces
écrivains, force est de constater un certain paternalisme dans leurs
récits. Dans Voyage au Congo, Gide s'offusque des mauvaises
conditions de vie des indigènes de l'Afrique équatoriale mais ne
remet jamais en cause l'idéologie coloniale. Batouala, en
dépit du scandale qui a suivi sa publication dans le milieu conservateur
colonial, reçoit de la part de certains critiques africains un accueil
moins enthousiaste. Ils reprochent à René Maran « sa
conception du négrisme et l'ont accusé de soutenir un
colonialisme au visage « humain «» 7. Toutefois,
si on remet le « véritable roman nègre » dans le
contexte des années 20, l'on perçoit en Maran le
précurseur de la Négritude et de la critique africaine.
Au début du XXe siècle, partout en Europe le
malaise colonial s'installe. Au Coeur des ténèbres
inaugure cette littérature de contestation du principe même de la
colonisation. Même si Conrad est ambiguë, de par ses élans de
défenseur de l'esprit des Lumières et en même temps de
pourfendeur du système colonial, l'on accepte qu'à travers
l'échec de Kurtz, sa pensée embrasse l'échec de toute
l'entreprise impériale en Afrique, car « Toute l'Europe avait
contribué à la création de Kurtz » (C.t.158).
Ce fantôme, ruiné par la maladie et son
appétit démesuré de l'ivoire, symbolise
le
déclin de l'impérialisme. Conrad ne s'affranchit néanmoins
pas du
7 Josiane Grinfas, « Présentation, notes,
questions et après-texte » de Batouala, Paris, Editions
Magnard, 2002, p.10.
paternalisme blanc. Ainsi, note t-on une présence
in absentia des indigènes dans la narration ou s'ils
apparaissent, leurs rapports avec les Blancs rappellent ceux de l'adulte et de
l'enfant : « Je ne vis rien d'autre à faire que de lui offrir
un des biscuits de marin de mon bon Suédois, que j'avais en poche
» (C.t. 106). La condamnation de la colonisation semble plus attraire au
souci de perpétuer la morale de la civilisation européenne et les
« vertus » de l'idéologie des Lumières. On comprend
donc l'accusation d'un racisme conradien du critique nigérian Chinua
Achebé dans son essai: An Image of Africa: Racism in Conrad's Heart
of Darkness (Massachusetts Review 18 (1977) and was reprinted in Heart
of Darkness an Authoritative Text, Background and sources,
Criticism.3rd ed. Ed. Robert Kimbrough, London :W.W Norton and Co,
1988.)
Ces réactions aux productions européennes sont
en principe à l'origine des théories postcoloniales. Aimé
Césaire avait salué en l'auteur de Batouala celui qui
« le premier fit accéder le Nègre à la
dignité littéraire »8 . En fait, Maran
retourne la perspective du récit conradien. A l'opposé de
l'histoire narrée par le marin Marlow, les personnages européens
dans Batouala n'occupent plus le devant de la scène, mieux ils
sont représentés dans des figures assez bouffonnes dans leurs
« manières de blancs » (Batouala, 44). Ils sont
soumis sous le regard accusateur des indigènes qui les jugent.
Dans Cahier d'un retour au pays natal, le discours
anti-colonial, prend un aspect singulier. En fait, le poète martiniquais
expose la situation des Antilles, avec la prise de conscience du Nègre,
de sa situation d'être sans valeur mais qui se relève et
revendique sa place.
De Conrad à Césaire en passant par Maran, les
trois auteurs inaugurent chacun, à une époque donnée de
l'histoire un palier dans la relation colonisateurs / colonisés.
8 Aimé Césaire cité par Michel
Fabre, « Autour de Maran », Présence Africaine N° 86
(1973) in Iheanacho Egonu, « Portée révolutionnaire du
premier « roman nègre » ; Ethiopiques numéro 19, Revue
socialiste de culture négro-africaine, juillet 1979, p.3.
Par ailleurs, si les contextes diffèrent, l'expression
de la décadence du mythe impérial reste une constante dans ces
textes. Conrad passe par plusieurs subtilités narratives pour contourner
la censure de la morale victorienne. Il utilise l'ironie pour
déconstruire le mythe sur lequel est bâti la prétendue
supériorité de l'homme blanc, d'où la récurrence
des termes comme : « imaginez » (C.t.88) et «
si » (C.t.110). L'Anglo-polonais bouleverse la structure du
récit exotique, pour laisser s'imaginer les Européens à la
place des indigènes : « Si un tas de Noirs mystérieux,
munis de toutes sortes d'armes terribles, se mettaient tout d'un coup à
suivre la route de Deal à Gravesend, attrapant les culs-terreux à
droite et à gauche pour leur faire porter de lourds fardeaux, j'imagine
que toutes les femmes et toutes les chaumières du voisinage auraient
vite fait de se vider » (C.t.110). Ce roman, comme le sera par la
suite Batouala, est une oeuvre d'avant-garde d'une littérature
de révolte. Dans la fameuse préface, l'auteur du «
véritable roman nègre » défend le point sur lequel la
critique européenne a été le plus sensible, celui du
« nègre-raisonneurcritique-juge » : « J'ai
poussé la conscience objective jusqu'à y supprimer des
réflexions qu'on aurait pu m'attribuer » (Batouala, 15). A
l'image de Conrad, Maran rompt le charme de la littérature coloniale.
Leurs textes s'évertuent à désaffubler l'Africain de tous
les stéréotypes qui ont justifié sa domination. La
fête des « Ga'nza » a servi de prétexte à
Batouala et ses congénères de revendiquer leur humanité :
« L'homme, quelle que soit sa couleur, est toujours un homme, ici
comme à M'Poutou (France) » (Batouala, 99). En dépit
d'une présence infime dans la nouvelle de Conrad, les rares
indigènes qui sortent de l'arrière-plan de la trame narrative
présentent un caractère humain. Marlow, tout au cours de sa
progression dans la colonie belge du Congo, ne cesse de remettre en question la
volonté de déshumaniser les indigènes. Dans tous les
récits qui prolongeront l'idéologie d'Au Coeur des
ténèbres un fait revient fréquemment : c'est le
démenti de l'anthropophagie des Africains. Marlow dira que «
c'était des hommes avec qui on pouvait travailler, et (qu'il) leur
(était) reconnaissant.
Et après tout ils ne se mangeaient pas l'un l'autre
sous (son) nez » (C.t.134). Bardamu, héros du Voyage au
bout de la nuit, alité dans la jungle mais sauvé par des
« sauvages », embouche la même trompette : « Ils
auraient bien pu me balancer au jus les porteurs pendant que nous franchissions
un marigot. Pourquoi ils ne l'ont point fait ? (...) Ou bien encore
ils auraient pu me bouffer puisque c'était dans leurs usages ?
»9. Ces observations ironiques tendent à mettre le doute
dans l'esprit des européens. Claude Maisonnat verra en ces textes une
« écriture visant à déloger le lecteur des
leurres des captations imaginaires (...) de ne pas se trouver aveuglé
par la certitude d'être du côté du savoir et de la
lumière, alors qu'il est au coeur des ténèbres
»10. Pour le lecteur du Cahier d'un retour au pays
natal aussi, le poète tente d'ébranler en lui des
certitudes. Césaire s'adresse d'abord à lui-même,
d'où le recours au style direct. Par sa présence, le poète
s'implique, engage sa responsabilité. Il s'assume en tant que Noir,
frère de race de ceux qu'on opprime. Refusant de parler à travers
la bouche d'un Marlow ou d'un Batouala, il accepte d'être : «
l'homme famine, l'homme insulte (...) un homme-juif, un homme pogrom, un
chiot, un mendigot » (Cahier, 20). En fait, le poème
témoigne d'un refus de l'ordre régissant l'idéologie
coloniale, en atteste la violence du lexique, de l'écriture : «
ASSEZ DE CE SCANDALE ! » (Cahier, 32). Aux Noirs descendants
d'esclaves, la dénonciation visera à les arracher de leur
passivité et de leur rendre leur dignité d'hommes. Toutefois, la
force persuasive du discours qui s'exprime à travers les insultes, les
invectives et les cris s'adoucira dans la clausule de l'oeuvre : «
debout et libre » (Cahier, 62). L'image de la «
colombe » (Cahier, 65) qui ferme le poème se situe en
réaction aux images de l'Afrique sombrant dans les
ténèbres et de l'Africain existant dans l'anonymat le plus
obscur. Le poète insère tous les clichés : soleil, mer et
paysage dans un contexte qui vient
9 Louis-Ferdinand Céline, Voyage au bout de
la nuit, Paris, Gallimard, 1952, p.1 77.
10 Claude Maisonnat, « Truth stripped of its
cloack of time » Ou l'énigme de la littéralité dans
Heart of Darkness, Joseph Conrad 2 «Heart of
Darkness» une leçon des ténèbres. La Revue des
Lettres Modernes - Textes réunis et présentés par Josiane
Paccaud-Huguet, Paris-Caen, Lettres Modernes Minard, 2002, p.1 01.
démentir le charme trompeur des Antilles. De sorte que,
les Antillais se libèrent de la puissance idéologique et
dominatrice de l'Occident. Césaire recherche l'insolite pour arracher
les indigènes à la passivité que préconisait le
vieux père de Batouala : « Il n' y a plus rien à faire.
Résignez-vous » (Batouala, 101). Ce complexe
d'infériorité dont s'acharne Césaire est le
sédiment idéologique hérité de la philosophie des
Lumières, des études anthropologiques et ethnologiques sur les
Africains. Toute cette imagerie avec ses démonstrations «
scientifiques » tendait à justifier l'impérialisme. Dans
Emile, Rousseau affirme que « l'organisation du cerveau est
moins parfaite aux deux extrêmes (la zone torride et la zone polaire).
Les Nègres ni les Lapons n'ont pas le sens des Européens
»11.
Batouala réfutait ces théories absurdes
qui étaient destinées à la hiérarchisation des
races. Le Nègre représenté dans la dignité humaine
et littéraire, conscient de son statut de dominé, dément
le substrat philosophique hégélien sur lequel l'Occident s'est
basé pour dominer le monde non européen. On avait montré
la différence entre les personnages d'Au Coeur des
ténèbres, muets, déniés de toute manifestation
rationnelle et ceux du « véritable roman nègre » qui
observent le colonisateur et le juge : « Les frandjés nous ont
asservis. Nous connaissons maintenant leurs qualités et leurs
défauts » (Batouala, 92). On peut aussi mettre en
parallèle le raisonnement des indigènes de la tribu banda et
certaines idées de l'époque des Lumières. Batouala remet
en cause les considérations d'ordre esthétiques sur les
critères de la « beauté blanche ». En fait, on se
souvient que dans Essais sur les moeurs, Voltaire affirmait sans
ambages que « Si leur intelligence (aux Noirs) n'est pas d'une autre
espèce que (leur) entendement, elle est fort inférieure
12». Le héros de Maran perçoit dans ces propos
l'intolérance culturel et un racisme latent. Il dénonce ainsi les
« manières de
11 Emile, livre Ie, 1762. Cité par
Mercer Cook, « J.-J. Rousseau and the Negro », The journal of Negro
History, 1936, p.294-303; repris par Léon François Hoffman,
Le nègre romantique. Personnage littéraire et obsession
collectives, Paris, Payot, 1973, p.71.
12 Voltaire, Essais sur les moeurs, 1756,
chap.CXLI, cité par Hoffman, Op.cit. ; p.71.
blancs » (Batouala, 44) : « Les
traditions valent ce qu'elles valent. Certaines sont infiniment
désagréables. D'autres sont tout le contraire. Du nombre, la
propreté corporelle. Seuls les blancs n 'en ont cure »
(Batouala, 67).
BIBLIOGRAPHIE COMMENTEE
COMMENTAIRE D'UN OUVRAGE
Homi K. BHABHA, Les lieux de la culture. Une théorie
postcoloniale (2007).
Les lieux de la culture. Une théorie
postcoloniale, de Homi K. Bhabha, publié en 1994, puis en 2007
à Paris aux Editions Payot & Rivages pour la traduction
française, va constituer l'objet de la présente analyse.
Au fil des onze chapitres de l'ouvrage, qui
s'échelonnent sur 411 pages, le critique indien, professeur de
littérature anglaise et américaine à l'Université
de Harvard, revient sur les questions d'identité, d'appartenance
nationale, d'hybridité culturelle, de la vision d'un monde dominé
par l'opposition entre soi et l'autre, de l'imitation et de l'ambivalence
utilisées comme armes par les colonisés contre les colonisateurs,
des liens qui existeraient entre colonialisme et globalisation.
Pour situer la question de la culture, Homi Bhabha fait
référence dans sa théorie à l'élan
postcolonial. Il s'appuie sur un matériau littéraire,
philosophique, psychanalytique et historique pour asseoir sa critique.
Dès l'introduction de l'ouvrage, l'auteur dès
les premières pages entame un essai de définition des «
lieux de la culture ». Il soutient que le besoin d'affirmer une tradition
culturelle opprimée vient de l'inconfort de la situation sociale. Dans
les récits, par exemple, les écrivains, au-delà d'une
maison inconfortable, montrent les conditions de vie des minorités
ethniques. C'est ainsi que le lieu d'où parlent ces peuples devient en
quelque sorte le lieu le plus intime de leur vie.
S'écartant des canons de la représentation
binominale du monde, l'auteur invite à revoir la théorie d'un
monde polarisé dans la relation centre et périphérie ou
oppresseur et opprimé. Cette image en miroir, pense-t-il, est vectrice
des rébellions et des mobilisations populaires subversives.
Seulement, au regard des « nouveaux » langages de la
critique, Bhabha manifeste son inquiétude à voir une
continuité des divisions géopolitiques ou encore le passe-temps
de l'élite occidentale qui produit un discours sur l'Autre, dans le but
de renforcer son rôle hégémonique. C'est dans cette veine
qu'il s'interroge aussi sur la raison de spécifier la théorie
critique comme « occidentale ». Ce qui ne signifie pour lui, qu'une
volonté d'affirmer l' « eurocentricité idéologique
» (p.72). En fait, il remarque que dans les textes produits par des
auteurs écrivant sur l'Autre, c'est la différence de ce dernier
qui est mise en avant. On ne lui confère aucun pouvoir de nier ou
d'établir son désir historique.
Cette différence culturelle dans la
représentation coloniale, est interprétée par l'auteur
comme un signe d'angoisse des Européens. Car l'indigène demeure
un mystère de par son attitude « moitié acquiesçant,
moitié s'opposant, jamais fiable » (p.76).
Bhabha, dans sa critique, oppose ce concept de «
différence culturelle » à la « diversité
culturelle » qui, pense t-il, doit être dépassée,
parce qu'étant confinée dans l' « utopie d'une
mémoire mythique, d'une identité collective » (p.77). Les
limites de cette notion de diversité culturelle résident dans sa
résistance à l' intertextualité.
Analysant le stéréotype dans le discours du
colonialisme, l'auteur revient largement sur l'ambivalence autour de ce
concept. En fait, si le stéréotype est une idée toute
faite, toujours « en place » (p.21), il n'en reste pas moins qu'il
est toujours répété. Bhabha souligne son caractère
immuable, c'est-à-dire qui ne peut se libérer des
considérations épidermiques, raciales, culturelles. Il emploie le
terme de « fixité » pour montrer que de cette stratégie
discursive, résulte les « idéologies de dominance ou de
dégénérescence raciale et culturelle » (p. 134).
Sur la question du « mimétisme et de l'homme
» (chap.4), Homi Bhabha fait observer une fois de plus l'ambivalence du
discours colonial. Car, s'il y a une volonté de représenter la
colonie et l'indigène sous un aspect imitant la
métropole et l'Européen, force est de constater
le caractère comique du projet. En effet, c'est sous le signe de la
farce que s'opère la « mission civilisatrice ». La
justification religieuse ne peut s'accommoder des exactions commises sur les
peuples colonisés. Le mode du discours colonial que l'auteur appelle
mimétisme est frappé par une ambivalence. En fait, cette
stratégie est à la fois ressemblance et menace. L'Européen
ne diffuse qu'une image « partielle » (p. 150) de sa culture à
l'indigène, de crainte que ce dernier ne réclame plus de
liberté au point de se rebeller contre le colonisateur.
Dans « Sournoise civilité »,
l'intitulé du chapitre 5 qui fait écho au
précédent, l'auteur analyse les relations entre l'indigène
et le maître blanc, fondées sur le rapport de paranoïa et de
persécution. L'indifférence manifeste de l'indigène
instaure un sentiment de terreur latente.
Mais ce sont les signes du triomphe de la civilisation
anglaise que Bhabha souligne dans la littérature impériale. En
effet, dans la quasi-totalité des textes des écrivains
britanniques, le critique indien mentionne la fréquence d'un «
scénario joué dans les immensités sauvages et muettes de
l'Inde, de l'Afrique et des Caraïbes coloniales, de la découverte
soudaine et fortuite du livre anglais » (p.171). Il cite Marlow, le
personnage de Conrad qui ramasse en pleine jungle le livre de Towson (ou
Towser). Ce qu'il invite à interpréter comme les agissements
illimités des Européens dans un espace sans limite.
Pour ce qui est du Livre Saint qui a servi de prétexte
à l'expansion impérialiste, Bhabha en montre l'aspect
dérisoire, par l'usage qu'en ont fait les peuples indigènes. Ces
derniers utilisent la Bible comme objet de curiosité, à des fins
commerciales ou même comme papier de rebut.
Malgré ces signes du malaise de la domination
occidentale, l'auteur note un silence bruissant qui traverse tous les
récits de l'empire. De Sir Alfred Lyall à Carlyle, en passant par
Bridley jusqu'à Kipling, Bhabha souligne ce silence, synonyme de
l'apologie impériale mais qui peine à cacher les signes de la
confusion coloniale que mettent clairement en scène Au Coeur des
ténèbres de
Joseph Conrad et Routes des Indes de E.M. Forster.
Les contradictions coloniales résident dans la vaine tentative de
dominer tout en passant sous silence les velléités de
résistance des indigènes. Bhabha reprend la métaphore de
Fitzjames Stephen : « Un tonneau de poudre peut être inoffensif ou
exploser, mais vous ne pouvez l'éduquer comme le fuel domestique,
à exploser en petites quantités » (p.208).
Les lieux de la culture invite à
dépasser la bipolarisation du monde et essaie de faire comprendre qu'une
culture en mouvement et en contact avec d'autres cultures ne doit plus
prétendre à une quelconque authenticité nationale. Ce qui
importe, pense Homi Bhabha, c'est de réfléchir sur une
théorie engagée, en prenant pour point de départ
l'hybridité du monde postcolonial.
Cependant, ne peut-on pas présager une limite à
cette théorie de dépassement quand on sait que l'Africain ou
l'indigène dominé plusieurs siècles durant, continue
à vivre un néocolonialisme qui ne diffère de l' «
ancien » que par des concepts euphémiques.
Aussi Bhabha, lui-même, semble-t-il conscient de cette
limite, car il est arrivé à la conclusion qu'au colonisé
comme au colonisateur est amputé l' « activité de
négation » (p. 134), c'est-à-dire que l'un et l'autre ne
peuvent plus se libérer du caractère fixe des
considérations de peau, de sang, de culture.
L'expérience coloniale est traversée par une
tradition de contradictions. La volonté de dominer l'indigène
fait qu'on lui nie une culture propre mais le paradoxe est qu'on hésite
à lui transmettre toute la culture du « maître ». Ainsi,
s'établit une relation ironique ponctuée d'effets du
trompe-l'oeil. Car l'Ecole anglaise n'a réussi qu'à créer
des interprètes qu'Homi Bhabha appelle « homo imitans » (p.
150).
Cet ouvrage est capital dans notre projet de thèse.
Car, en plus de l'oeuvre d'Edward Said, Culture et
Impérialisme, nous disposons encore plus d'outils critiques dans
l'élaboration du déclin du mythe impérial à la
lumière de la théorie postcoloniale.
COMMENTAIRE D'UN ARTICLE
Jacques CHEVRIER, « Les romans coloniaux : enfer ou
paradis ? »
|
Dans la perspective de notre commentaire bibliographique, nous
avons sélectionné l'article de Jacques Chevrier intitulé :
« Les romans coloniaux : enfer ou paradis ? » (12 pages : 61 à
72), publié dans la Revue du Livre : Afrique Noire, Maghreb,
Caraïbes, Océan Indien, Notre Librairie N° 90 Octobre -
Décembre 1987.
Dans ce numéro consacré aux « Images du
Noir dans la littérature Occidentale », est adjoint le sous-titre :
« Du Moyen-Âge à la conquête coloniale » qui a
valeur de délimitation du cadre temporel de l'analyse. Jacques Chevrier,
dans cet article, de la même façon que les autres auteurs de cette
Revue N°90, pose un regard critique sur le caractère ambivalent de
l'image du Noir telle qu'elle est représentée dans la
littérature romanesque européenne. Une dizaine de textes : Un
capitaine de 15 ans (J. Vernes), Le roman d'un spahi (P. Loti),
Au pays des fétiches et Terres de mort (P.V. D'Octon),
Dans la brousse (P. Bonnetain), Au Coeur des
ténèbres (J. Conrad), Les morts qui parlent (E.M.
De Voguë), Terres de soleil et de sommeil et Le voyage de
centurion (E. Psichari) et La maîtresse noire (L.-C.
Royer), ont servi à étayer son analyse munitieuse de
l'ambiguïté du projet impérialiste.
Optant pour la méthode de l'analyse textuelle, la
démarche de l'auteur consiste à étudier dans les textes du
corpus la vision de l'Afrique par les Européens. Chevrier structure son
étude en deux volets : d'abord, la vision pessimiste qui prête au
continent « maudit » les couleurs de l'enfer ; ensuite celle plus
optimiste qui y verrait plutôt une terre de rédemption. Entre les
deux, l'ironie semble être l'orientation critique que laisse entrevoir
l'auteur. Mais c'est
surtout la dimension idéologique et mythologique qui se
révèle être l'enjeu de l'analyse.
Telle est la méthodologie de Chevrier. Pour ce qui est
de l'argumentation, le premier volet (la vision pessimiste) est construit
autour de la représentation de l'ailleurs et de
l'altérité.
Il montre d'abord comment les romanciers et les voyageurs
décrivent le milieu physique où clichés et
stéréotypes semblent concourir à une volonté de
mythification. Le paysage est perçu comme un univers de
désolation, figé, immense et hostile. Le soleil d'Afrique hante
les Européens d'où les termes négatifs et
dépréciatifs qui accompagnent ce mot : « malfaisance »
et « malédiction » (p.64). L'auteur pense que les
évènements tragiques ou sanglants associés au soleil
suggèrent l'accablement et la maladie. « L'effroyable nulle part
» est aussi, selon Chevrier, la caractéristique principale de la
nouvelle de Conrad et des autres textes cités.
En effet, le monde effroyable des ténèbres,
décrit avec une connotation maléfique, renforce
l'atmosphère à la fois macabre et démoniaque de la trame
narrative des récits sur l'Afrique. L'auteur insiste sur les notations
de ces écrivains-voyageurs à propos des pays visités.
D'une « terre maudite » à la « sauvagerie oubliée
de Dieu », au « pays infortuné », Psichari, Loti, Conrad
et autres ne tarissent pas de qualificatifs à l'obsession de la mort qui
hante leurs héros. Chevrier revient aussi sur les descriptions de
paysages de nuit ; car il a constaté que chez les romanciers, la lune,
comme le soleil, présente des attributs démoniaques. En fait,
dès la tombée de la nuit, les fêtes religieuses, le tam-tam
et la bamboula deviennent l'expression du diable dans ces contrées
« sauvages ». Les récits qui passent sous la critique de
Chevrier baignent dans cette atmosphère de magie et de sorcellerie. Ce
qui entraîne, selon l'auteur, cette impression d'ensorcellement,
d'inquiétude et de frayeur des Européens livrés sans
défense aux sortilèges dits malfaisants du continent.
Ainsi, de la remarque de Psichari : « Nous n'eussions
jamais cru qu'un paysage peut faire mal à ce point » à la
lancinante question de Conrad : « Qu'étions-nous pour nous
être fourvoyés là ? » (p.66), Chevrier opère
une transition pour montrer ensuite l'effet du contact de l'Autre,
appelé indigène avec l'Européen.
Il note que comme la nature, c'est dans le registre du
démoniaque qu'est entraperçue la relation avec l'Autre, la femme
noire en particulier. L'auteur souligne toutefois que ce thème,
abondamment exploité dans toute la littérature coloniale, est
l'objet de plusieurs interprétations. Si pour certains, le «
mariage colonial » se réduit à une liaison précaire,
afin de supporter les rigueurs de l'exil, d'autres, en revanche, y voient la
principale cause de la déchéance de l'Européen. Le
héros de Loti, Jean Peyral, succombe aux charmes de la petite Fatou-Gaye
qui distille dans les veines du spahi des ivresses inconnues. Robert de
Coussan, héros de La maîtresse noire de Louis-Charles
Royer, devient l'esclave d'une jeune fille peule appelée Mouk.
Même pour le vertueux Psichari, son héros Maxence, dans Le
voyage de centurion, n'échappe pas aux sortilèges africains
de la femme noire. Cette liaison est vécue par les personnages comme le
point extrême d'un pacte funeste scellé avec une créature
méchante et perverse, à telle enseigne que tout retour devenait
impossible. A l'image du vapeur de Marlow s'enfonçant au plus profond du
coeur des ténèbres, ces émissaires de l'Europe
impérialiste, remarque Chevrier, s'enlisent dans la plus complète
déchéance, au point de perdre tout espoir de prendre du galon
pour Jean Peyral, ou d'être contraint par sa maîtresse aux
malversations tel Robert de Coussan, jusqu'à Maxence qui a
occasionné de fâcheuses conséquences à sa troupe du
fait de son retard pour Atar, causé par sa maîtresse noire.
L'Afrique, remarque Chevrier, est représentée
comme le lieu de la mort et dans les ouvrages cités, la mort sous les
tropiques devient un thème récurrent. Les écrivains
brossent un tableau particulièrement morbide afin de montrer l'enfer
dans lequel sont fourvoyés les émissaires de la civilisation. Ces
derniers,
ajoute l'auteur, succombent du fait des effets
conjugués de la solitude, de l'alcool et des maladies
vénériennes. Toutefois, souligne-t-il, le point de non retour est
franchi quand ils retournent vers la barbarie. Car, s'ils échappent
à la mort, ils ne sont pas pour autant quittes avec l'Afrique. Les
écrivains coloniaux font une part importante au thème du «
décivilisé » dans leurs récits. Kurtz, le
héros de Conrad, en est une parfaite illustration.
Dans le deuxième volet (la vision optimiste), l'auteur
souligne que les données du problème changent radicalement dans
les oeuvres du corpus. Même si le péché de la barbarie et
de la sauvagerie persiste, le continent africain est maintenant vu sous un
angle moins lugubre. Il devient une terre d'épopée, de croisades
et même une école d'énergie pour toute une
génération.
Chevrier note dans les textes une tonalité qui verse
plus vers l'exaltation et au ravissement. Chez les personnages, l'Afrique
devient le prétexte d'une introspection profonde de leur être.
Aussi, l'auteur mentionne-t-il la naissance de deux espaces antagonistes dans
l'univers de l'écrivain. Pour les personnages européens, l'aspect
épique de la colonie vient s'opposer à l'inertie de la
métropole incarnée par les sophistes et les sceptiques. L'Afrique
devient ainsi une fontaine de jouvence où les héros retrouvent
leur énergie.
L'auteur achève son analyse par une vue d'ensemble du
roman de Joseph Conrad, Au Coeur des ténèbres qui
déconstruit l'image mythique de l'Afrique. L'Anglo-polonais,
souligne-t-il, s'est mis dans une position intermédiaire ; il n'exalte
ni le dernier degré de la décadence incarné par les «
sauvages » ni le degré suprême de l'épanouissement
représenté par les Européens.
La réflexion de Jacques Chevrier sur « les romans
coloniaux : enfer ou paradis ? » apporte une vision nouvelle à
l'ambiguïté de la représentation de l'Afrique dans le champ
littéraire colonial. La contradiction qui se lit à travers ces
récits reflète la difficulté à posséder ce
continent dominé mais indocile. L'Afrique et l'Africain ont
résisté à tout effort de rationalisation et de
territorialisation. Mais pour pérenniser le projet impérial, il
importait pour ces
écrivains d'apporter une vision nouvelle sur l'Afrique,
afin d'inciter les jeunes Européens à s'engager dans «
l'oeuvre » coloniale. Aussi, se sont-ils évertués à
présenter l'Afrique comme une terre de
régénération.
Dans cet article de Jacques Chevrier, on remarque une
perspective d'analyse actuelle qui consiste à laisser à
l'appréciation de la critique les deux aspects de la
problématique. Ce qui a pour intérêt d'offrir au lecteur
une interprétation libre de l'étude.
La critique textuelle à laquelle sont soumis ces
récits facilite notre analyse. En effet, entre le point de vue de
l'auteur et les exemples extraits du corpus, on apprécie une
cohérence qui ne prête pas à équivoque.
L'analyse de Jacques Chevrier élargit le champ critique
relatif aux images africaines dans la vision occidentale. Il rend ainsi compte
d'un regard sur des publications anciennes mais dont l'actualité reste
manifeste dans les rapports Occident / Tiers-monde.
On déplore, cependant, une absence des Africains dans
le second volet de l'article. En effet, son analyse de la vision optimiste de
la représentation de l'Afrique ne prend en compte que le milieu
physique.
Toutefois, l'article de Chevrier apporte beaucoup à
notre projet de thèse, dans la mesure où le roman de Conrad,
texte principal dans son corpus occupe une place centrale dans notre recherche.
Il s'insère dans la première partie de notre étude : Mythe
de l'Afrique et l'Africain.
BIBLIOGRAPHIE GENERALE
I CORPUS ET AUTRES OUVRAGES DES TROIS AUTEURS
1.1 - Corpus
- CESAIRE Aimé, Cahier d'un retour au pays natal
(1939), Paris, Présence Africaine, 1983.
- CONRAD Joseph, Au Coeurs des ténèbres
(1902), Paris, Garnier- Flammarion, 1989.
- MARAN René, Batouala (1921), Paris, Editions
Magnard, collection « Classiques & Contemporains », 2002.
1.2- Autres ouvrages des trois auteurs
1.2.1- CESAIRE
- Cadastre, Paris, Seuil, 1960.
- Corps perdu, Paris, Editions Fragrance, 1949.
- Discours sur le colonialisme, Paris, Présence
Africaine, 1955. - Et les chiens se taisaient, Paris, Présence
Africaine, 1956.
- Ferrements, Paris, Seuil, 1961.
- La tragédie du roi Christophe, Paris,
Présence Africaine, 1963. - Les Armes miraculeuses, Paris,
Gallimard, 1946.
- Moi, laminaire..., Paris, Seuil, 1982.
- Soleil cou coupé, Editions K, 1948.
- Toussaint Louverture-La Révolution française
et le problème colonial, Paris, Présence Africaine, 1981.
- Une saison au Congo, Paris, Seuil, 1967.
- Une tempête, Paris, Seuil, 1969.
1.2.2- CONRAD
- Almayer's Folly, A story of and Easter River, Harmond
Worth, Penguin Modern classics, 1976 (1895).
- Congo Diary and other uncollected Pieces, edited and comments
by Zdislaw Nayden, New York, double day, 1978.
- Lord Jim, New York, Norton and co, 1960 (1900).
- Nostromo, London, Dent, New York, Dutton, 1957
(1904).
- Notes on life and letters, London et Tornado Dent,
1921.
- Tales of hearsay (« the warrior's soul»,
«Prince Roman», «théâtrale», «the black
note») and last essays, Leipzig, Tauchnitz, 1925.
- The Arrow of Gold, A story between two notes, London,
Dent, 1947 (1919).
- The Nigger of the «Narcissus»: A tale
of sea (1897), Typhoon (1902), the shadow lines a confession
(1917), London, J.M. Dent Sons, New York, E.P. Dutton co., 1945.
- Un paria des îles, Paris, Gallimard, 1982.
1.2.3- MARAN
- Afrique Equatoriale Française : terres et races
d'avenir, Paris, L'Imprimerie de Vaugirard, ill. de Paul Jouve, 1937.
- Asepsie noire !, Paris, Laboratoire Martinet, 1931.
- Bêtes de la brousse, Paris, Albin Michel,
1941.
- Djouma, chien de brousse, Paris, Albin Michel,
1927.
- Le livre de la brousse, Paris, Librairie
Arthème Fayard (Le livre de demain), 1937.
- Les pionniers de l'Empire, Paris, Albin Michel (3
volumes), 1943-1956.
- Livingstone et l'exploration de l'Afrique, Paris,
Gallimard (NRF-La découverte du monde), 1938.
- Mbala, l'éléphant, Paris, Arc en Ciel,
1947.
- Savorgnan de Brazza, Paris, Editions du Dauphin,
1951.
- Un homme pareil aux autres, Paris, Arc en Ciel,
1947.
II OUVRAGES DE FICTION
- CABRAL Amilcar, Unité et combat (1975).
- CAILLE René, Voyage au Tombouctou (1830),
Paris, La Découverte, Tome 1, 1996.
- CELINE Louis-Ferdinand, Voyage au bout de la nuit,
Paris, Gallimard, 1952.
- FREDERIC Louis, L'Inde jour et nuit, Paris, Juillard,
1957.
- GIDE André, Voyage au Congo suivi de Le
retour du Tchad, Paris, Gallimard, 1927 et 1928.
- KIPLING Rudyard, Kim, Paris, Gallimard, 1993.
- LEIRIS Michel, L'Afrique fantôme de Dakar à
Djibouti, N.R.F., 1934. - LONDRES Albert, Terre
d'Ebène, Paris, Albin Michel, 1929 (1927).
- LOTI Pierre, Les désenchantées, Paris,
Calmann-Lévy, 1966.
- LOTI Pierre, Le roman d'un spahi, Paris,
Calmann-Lévy, 1987. - LOTI Pierre, Pêcheur d'Islande,
Paris, Calmann-Lévy, 1986.
- MALRAUX André, La tentation de l'Occident,
Paris, Grasset, 1926.
- MEKER Maurice, Le temps colonial,
Dakar-Abidjan-Lomé, N.E.A., 1980.
- OUOLOGUEM Yambo, Le Devoir de violence (1968), Paris,
éditions Le Serpent à Plumes, 2003.
- SENGHOR Léopold Sédar, OEuvre
poétique, Paris, Seuil, 1990.
- SIMENON Georges, « L'Heure du nègre
», in Mes apprentissages, Reportages 193 1-1946, Paris, Omnibus,
2001.
- YOURCENAR Marguerite, Mémoires d'Hadrien,
Paris, Gallimard, 1974.
III ETUDES SUR CESAIRE, CONRAD ET MARAN
3.1. SUR CESAIRE
3.1.1. Ouvrages
- ANTOINE Régis, Carrefour de culture,
Günter Rarr Verlag - Tübingen, 1993.
- BA Mamadou Souley, Césaire, Fondation d'une
poétique, Paris, L'Harmattan, 2005.
- BAJEUX Jean-Claude, Antilles retrouvée. Claude Mac
Kay, Luis Pales
Matos, Aimé Césaire, poètes noirs
antillais, Editions Caribéennes, 1983.
- BLERALD Alain, Négritude et politique aux
Antilles, Editions
Caribéennes, 1981.
- BRICHAUX-HOUYOUX Suzanne, Quand Césaire
écrit Lumumba parle : une saison au Congo, édition
commentée, Paris, L'Harmattan, 1993.
- CAILLER Bernadette, Proposition poétique. Une
lecture de l'oeuvre d'Aimé Césaire, Sherbrooke, Naaman,
1976.
- COMBE Dominique, Aimé Césaire, « Cahier
d'un retour au pays natal » (Coll. Etudes littéraires), Paris,
PUF, 1993.
- CONDE Maryse, Le « Cahier » d'Aimé
Césaire. Collection Profil d'une oeuvre, Paris, Hatier, 1978.
- CONFIANT Raphaël, Aimé Césaire ou la
traversée paradoxale du siècle, Paris, Stock, 1993.
- DELAS Daniel, Aimé Césaire, Paris,
Hachette université, 1991.
- Georges Ngal, Aimé Césaire, un homme à
la recherche d'une patrie, Dakar, Editions NEA, 1975.
- HALE Thomas et KESTELOOT Lilyan, Les cahiers
césairiens, Pennsylvania University de 1972 à 1976.
- KEITH Louis Walker, La cohésion poétique de l
'oeuvre césairienne,
Paris, Editions Jean-Michel Place ; Tübingen, GUnter Narr
Verlag, 1979. - KESTELOOT Lilyan et KOTCHY, Aimé Césaire,
l'homme et l'oeuvre ,
précédé d'un texte de Michel Leiris, Paris,
Présence Africaine, Coll. « Les
Classiques africains », 1982.
- KESTELOOT Lilyan, Aimé Césaire poète
d'aujourd'hui, Paris, Seghers, 1963.
- KESTELOOT Lilyan, Comprendre le Cahier d'un retour,
Paris, Ed. Saint-Paul, Coll. « Les Classiques africains », 1982.
- ZADI Bernard, Césaire entre deux cultures,
Editions NEA, Dakar 1978. - Articles, Mémoires et
thèses
- DIANE Alioune Badara, Note de lecture Mamadou Souley Ba,
Césaire, Fondation d'une poétique, Paris, L'Harmattan,
2005. Ethiopiques n°76 - Centième anniversaire de L.S. Senghor.
Cent ans de littérature, de pensée africaine et de
réflexion sur les arts africains 1er semestre 2006.
- ERIKSON John et KESTELOOT Lilyan, Aimé
Césaire, Numéro spécial de L'esprit créateur,
Bâton Rouge, Louisiane 1992.
- GRAZIANI Benno, Aimé Césaire,
Numéro spécial de IL Castoro n°106, 1975.
- HALE Thomas, Les écrits d'Aimé
Césaire, Bibliographie commentée. Numéro
spécial de Etudes françaises, Montréal 1978.
- IRELE Abiola, Les origines de la négritude
à la Martinique, Sociologie de l'oeuvre poétique d'Aimé
Césaire, Thèse université, Lettres, Sociologie de la
culture, Paris, FLSH, 1967.
- SERI Ernest, « Cahier d'un retour au pays
natal comme l'expression d'un malaise existentiel », Ethiopiques
n°60 revue négro-africaine de littérature et de philosophie
1er semestre 1998.
- SONKO El Hadj, « L'Afrique dans l'imaginaire
poétique d'Aimé Césaire. L'exemple de Cahier d'un
retour au pays natal, Ferrements et Moi, laminaire
», Mémoire de maîtrise de littérature africaine, UCAD,
FLSH, 2006-2007.
3.2. Sur Conrad
3.2.1. Ouvrages
- BRUCE Harkness, éd. Conrad 's Heart of Darkness and
the Critics, San Francisco, 1960.
- COX C.B., Joseph Conrad, The Modern Imagination,
London: J.M. Dent; Totowa, N.J.: Rowman & Littlefield, 1974.
- DEAN Leonard, « Heart of Darkness »,
Background and Criticisms, Prentice-Hall, 1960 Edward Garnett,
Conrad 's the critical heritage, edited by Norman Sherry, Routledge
& Kegan Paul, 1973.
- GEORGES Jean-Aubry, Joseph Conrad in the Congo,
Boston: Little, Brown, 1926.
- GRIFFITH John Wylie, Joseph Conrad and the anthropological
dilemma, Oxford Clarendon Press, 1995.
- KIMBROUGH Robert, «Heart of Darkness»,
an authoritative Text, Background and Sources, New York, Norton,
1963.
- WATT Ian, Conrad in the Nineteenth Century, Berkeley
Los Angeles, University of California Press, 1979.
- WATT Ian, Conrad 's «Heart of Darkness », A
critical and
contextual discussions, Milano, Mursia International,
1977. 3.2.2. Articles, Mémoires et Thèses
- DARRAS J., «Le voyage en Afrique», Esprit
N°128, Juillet 1987, p.1 - p.12, Pour un examen de la manière dont
André Gide, P. Leiris et J. Berque ont relu « Coeur des
ténèbres ».
- FAYE Ndèye Gnilane, « L'Ailleurs et l'Etranger
dans le récit de voyage : Au Coeur des ténèbres
(1902) de Joseph Conrad et « L'Heure du nègre »
(1932) de Georges Simenon », Mémoire de Maîtrise,
Littérature Comparée, UCAD, F .L. S .H., 2005-2006.
- GAYE Mamadou, «The image of Africa in Joseph Conrad's
Heart of Darkness and Graham Greene's Conrad's Heart of Matter»,
Mémoire de maîtrise, UCAD Dakar juin 1984.
- GAYE Mamadou, « Conrad et l'homme blanc hors d'Europe
», Mémoire de D.E.A., Dakar juin 1985.
- GAYE Mamadou, « Crimes et Culpabilité dans
quelques récits de Joseph Conrad », thèse pour le Nouveau
Doctorat de Littérature Anglaise, Université des Sciences
Humaines de Strasbourg, 1983.
- GAYE Mamadou, « Kipling, Conrad and Forster »,
Annales de la
Faculté des Lettres et Sciences Humaines de Dakar,
N°27, 1997.
- KONATE Fatou, « De Conrad à Camus : Variations
autour du mythe de l'Afrique et de l'Africain (Coeur des ténèbres
et L'Exil et le Royaume) », Mémoire de D.E.A., UCAD, F.L.S.H.,
2003-2004.
- KONATE Fatou, « Le chant de Cygne de l'empire à
travers les récits de Conrad et de Camus : Coeur des
ténèbres (1898) et L'Exil et le Royaume (1957), Mémoire de
Maîtrise, Littérature Française, UCAD, F.L.S.H.,
2002-2003.
- MAISONNAT Claude, « Truth stripped of its cloak of time
» ou l'énigme de la littéralité dans Heart of
Darkness ; Joseph Conrad 2 « Heart of Darkness » une
leçon des ténèbres, Revue des Lettres Modernes,
Paris-Caen, Lettres Modernes minard, 2002.
- MAYOUX J.J., « Introduction, Traduction et Chronologie
» de Au Coeur des ténèbres, Paris, Garnier-Flammarion,
1980.
- NDIAYE Falilou, « Le chant de cygne de l'empire : De
Conrad à Camus », Littérature et culture partagée -
Litterature and sheared
culture, Actes du Colloque International de l'A.I.L.C., Dakar
8 - 10 novembre 2001, P.U.D., Dakar (Sénégal), 2003.
- NDIAYE Falilou, « Simenon entre Conrad et Camus »
in TRACES N°16. « Georges Simenon et L'Afrique. Des reportages sur
l'Afrique à la recherche d'un nouvel humanisme », Actes du
Colloque, Dakar du 1er au 3 décembre 2003.
- NIANG Amadou Hamé, « Le déclin du mythe
impérial : procès du colonialisme et de l'apartheid dans Au
Coeur des ténèbres (1902) de Joseph Conrad et dans L
'Age de fer (1992) de John Maxwell Coetzee, Mémoire de
Maîtrise, Littérature Comparée, UCAD, F.L.S.H.,
2006-2007.
- PACCAUD-HUGUET J., « Kurtz ou les vestiges du jour
», Joseph Conrad 2 « Heart of Darkness » une leçon des
ténèbres, Revue des Lettres Modernes minard, 2002.
- PAPPO MUSSARD C., « Notes dans la traduction de
Heart of Darkness », Les Langues Modernes, Bilingue, 1993.
- SARIOLS Deeri, « Ombres et lumières des
tropiques : Conrad et Sanchez Pinol vers un renouveau de la littérature
fantastique du XXe siècle », Revue de littérature
Comparée 2007- 4 (n°324) page 473 à 488.
- SIARY Gérard, « L'Afrique dans Heart of Darkness
de Joseph Conrad, l'image de l'Afrique entre reflet et symbole », Acte de
colloque de l'Association Internationale de Littérature Comparée,
« the paths of multiculturism », Editions Cosmos, Juin 2000.
3.3. Sur Maran
3.3.1. Ouvrages
- ALES SANDRI Brigitte, L'école dans le roman
africain. Des premiers écrivains francographes à Boubacar Boris
Diop, Paris, L'Harmattan (Educations et sociétés), 2005.
- BLACHE Joseph, Vrais noirs et vrais blancs d'Afrique au XXe
siècle, Paris, Orléans-Maurice Caillette éditeur,
1992.
- CAMERON Keith, René Maran, Boston, Twayne,
1985.
- CHAUMEL Alfred, Les blancs jouent et gagnent
(pochades congolaises), Paris, Henry Goulet, 1926.
- Collectif, Francofonia 14 (2005), numéro
dirigé par Lourdes Rubiales (articles de Pierre-Philippe Fraiture,
Pierre Halen, Marie- Hélène Koffi-Tessio, Roger Little, Buata
Malela, Anthony Mangeon, Bernard Mouralis, Lourdes Rubiales et une lettre
inédite de René Maran à André Fraisse), Universidad
de Cadiz, servicio de publicaciones.
- Collectif, Hommage à René Maran,
Paris, Présence Africaine, 1965. (textes de Charles Astruc, Mercer Cook,
Albert Darnal, Manoel Gahisto, Charles Kunstler, Léopold Sédar
Senghor, René Violaines ; témoignages de Charles Bareilley, Odet
Denys, François Descoeurs, A. Fraysse, J. Jacoulet, Albert Maurice,
Pierre Paraf, Jean Portail, François Raynal, Martial Sinda, Paul Tuffrau
; et le texte intégral de Djogoni de René Maran).
- GASTON-JOSEPH Koffi, Roman vrai d'un noir, Paris,
Aux Editions du monde Nouveau, 1922.
- HAUSSERL Michel, Les deux Batouala, Sherbrooke
(Québec) - Bordeaux - Naaman - SOBODI, 1975.
- LAINE Pierre, L'Afrique centrale et la
littérature française des années 20. Maran, Gide,
Céline : Actes d'accusation du système colonial,
N'djaména - Université du Tchad (Annales de l'Université
du Tchad. Série lettres n°1), 1974.
- MOURALIS Bernard, PIRIOU Anne (directeurs), Robert
Delavignette savant et politique (1897-1976), Paris, Karthala « coll.
Hommes et sociétés », 2003.
- OJO-ADE Femi, René Maran, écrivain
négro-africain, Paris, Fernand Nathan, 1977.
- ONANA Charles, René Maran. Le premier Goncourt
noir, Paris, Editions Duboiris (Itinéraire), 2007.
- TRAUTMANN René, Au pays de « Batouala ».
Noirs et blancs en Afrique, Paris, Payot, 1922.
- VALDI François, La femme-antilope, Paris,
André Delpeuch Editeur, 1928.
3.3.2. Articles, Mémoires et Thèses
- EGONU Iheanacho, « Portée révolutionnaire
du premier « roman nègre » », Ethiopiques numéro
19, revue socialiste de culture négro-africaine, juillet 1979.
- FABRE Michel, « Autour de René Maran ».
Présence Africaine 86 (2ème semestre 1973) :
171.
- FABRE Michel, « Autour de rené Maran, The New Negro
and
Negritude ». Phylon 36.3 (3rd quarter 1975) : pp.
340-35 1.
- GUIMENDEGO Maurice, « Le roman Batouala de
René Maran :
portrait satirique du colonisateur ou materia prima
pour
l'histoire ? » Francofonia 10(2001) : pp. 6
1-77.
- OUABEGO C. Guillaume, « Etude comparée de
l'amour dans Batouala de René Maran et L 'Etat sauvage
de G. Conchon : lauréats du prix Goncourt », Mémoire de
D.E.A., Littérature Comparée, UCAD, FLSH, 2001-2002.
- RUBIALES Lourdes, « Désillusion et frustration :
l'administration coloniale contre René Maran », Actes du colloque
international Désillusion et désenchantement dans les
littératures de l'ère coloniale, organisé par la
SIELEC en partenariat avec le Centre d'étude du XXème
siècle (Université Paul-Valèry, Montpellier III),
Montpellier les 25, 26, 27 mai 2006.
- SANKO Hélène, « Les mots pour le dire :
L'Afrique d'après Batouala de René Maran ».
Francographies 2 (1993) : pp. 131- 141.
- TEULIE Gilles (éditeur), Les littératures
africaines : Transpositions ? Actes du Colloque APELA (Association pour
l'étude des littératures africaines), Université
Montpellier III (Les carnets du CERPANAC n°2), septembre 2001-2002.
IV AUTRES ARTICLES, OUVRAGES ET REVUES GENERAUX DE
REFERENCES
- ABIOLA Irèle, La pensée. « Réflexions
sur la négritude »,
Ethiopiques n°69 Hommage à L.S.Senghor
2ème semestre 2002.
- ACHEBE Chinua, « An image of Africa: Racism in
Conrad's Heart of Darkness », Massachusetts Review 18 (1977) and was
reprinted in Heart of Darkness, an Authoritative Text, Background and
Sources, Criticism. 3rd ed. Ed. Robert Kimbrough, London: W.W
Norton and Co., 1988; p.p. 251-261.
- ADOTEVI John-Bosco, L'apartheid et la société
internationale, Dakar - Abidjan, N.E.A., 1978.
- AFFERGAN Francis, Exotisme et altérité, Essai
sur les fondements d'une critique de l'anthropologie, Paris, P.U.F.,
1987.
- ANTOINE Régis, La littérature
franco-antillaise, 2e édition
augmentée et mise à jour, Paris, Editions Karthala,
1992.
- ASTIER-LOUFTI Martine, Littérature et colonialisme
-
L'expansion coloniale vue dans la littérature
romanesque
française, 1871-1914, Paris-La Haye, Mouton,
1971.
- AUERBACH Eric, Mimésis, la représentation
de la réalité dans la littérature occidentale,
traduit de l'Allemand, Paris, Gallimard, 1969.
- AUGARD Albert, La fin de la race blanche, Paris, La
pensée universelle, 1972.
- BALANDIER Georges, Afrique ambiguë, Paris,
Plon,
« coll. TERRE HUMAINE, civilisations et
sociétés », 1957.
- BARTHES Roland, Le degré zéro de
l'écriture, Paris, Seuil, 1953. - BARTHES Roland, Le plaisir du
texte, Paris, Seuil, 1973.
- BARTHES Roland, Mythologies (1957) in OEuvres
complètes Tome I 1942-1965, Paris, Seuil, 1993.
- BECOUR Simone, L'Afrique et l'impérialisme,
Paris, Gallimard, 1998.
- BENOT Yves, Diderot, de l'athéisme à
l'anticolonialisme, Paris, Librairie François Maspero, 1970.
- BHABHA Homi K., Les lieux de la culture - Une
théorie postcoloniale (1994), Paris, Payot & Rivages, 2007.
- BLACHERE Jean-Claude, Le modèle nègre -
Aspects littéraires du mythe primitiviste au XXe siècle chez
Apollinaire, Cendrars, Tzara, Dakar Abidjan Lomé, NEA, 1981.
- BRUHL-LEVY Claude, La mentalité primitive,
Paris, Alcan, 1925. - BRUNSCHWIG, Mythes et réalités de
l'impérialisme colonial français 1871-1914, Paris,
Armand-Colin, 1960.
- CAMUS Albert, L'Homme révolté, Paris,
Gallimard, 1951.
- CARRE Nathalie, « Des explorateurs aux écrivains
voyageurs :
cheminement littéraire », in Notre Librairie :
Voyage en Afrique de
l'explorateur à l'expert, n°153,
janvier-mars, 2004.
- CHALAYE Sylvie, Nègres en images, Paris,
L'Harmattan, 2002.
- CHALLAYE Félicien, Souvenirs sur la
colonisation, Paris, Les nuits rouges (réédition), 1935.
- CHEVRIER Jacques, « Les romans coloniaux : enfer ou
paradis ? », Revue du Livre : Afrique Noire, Maghreb, Caraïbes,
Océan Indien, Notre Librairie N°90 Octobre-Décembre 1987,
pp. 6 1-72.
- CHEVRIER Jacques, Les Blancs vus par les Africains,
Lausanne (Suisse), Favre, 1998.
- CHEVRIER Jacques, Littérature africaine - Histoire
et grands thèmes, Paris, Hatier, 1990.
- CURTIN Philip, The Image of Africa British Ideas and
Action, 1780-1850, London: Macmillan, 1965.
- DARWIN Charles, De l'origine des espèces,
Cambridge, Harvard, UP, 1964.
- DAVIDSON Basil, «Old Africa Rediscovered».
L'Afrique avant les Blancs, Paris, PUF, 1962.
- DIOUF Madior, « Le monde noir colonial dans l'oeuvre
d'André Demaison - De l'exotisme africain au destin de l'Afrique »,
Thèse pour le Doctorat de 3e cycle de Lettres Modernes,
17-06-1975.
- EBOKO Fred, « Négrologie » : chère
Afrique cauchemar, Le Monde diplomatique, Manière de voir
N°79, Bimestriel février- Mars 2005.
- FABRE Cédric, Ecri vains-voyageurs, Paris,
adpf, juin 2003.
- FALQ Jacqueline - KANE Mohamadou, Littérature
africaine.
Textes et travaux. Tome I, N.E.A., Nathan Afrique,
1974.
- FANON Frantz, Les damnés de la terre, Paris,
Librairie François
Maspero, Editeur S.A.R.L., 1968.
- FANON Frantz, Peau noire - masques blancs, Paris,
Seuil, 1952.
- GLISSANT Edouard, Quatrième siècle
(1964), Paris, Gallimard, 1997.
- GLISSANT, Edouard, Le Discours antillais, Paris,
Seuil, 1981.
- GOBINEAU, Essai sur l'inégalité des races
humaines, Paris, 1853. - GOUNONGBE A., La toile de soi. Culture
colonisée et expressions
d'identité, Paris, L'Harmattan, 1995.
- GOURAIGE Ghislain, Continuité noire, Dakar -
Abidjan, N.E.A., 1977.
- HOFFMAN Léon-François, Le nègre
romantique - Personnage littéraire et obsession collective, Paris,
Payot, 1973.
- JANHEINZ Jahn, Muntu, l'homme africain et la culture
négro- africaine, Paris, Seuil, 1961.
- KANDJI Mamadou, « De l'Iléité à
l'altérité : l'imaginaire insulaire de Defoë à
Coetzee », littérature et culture partagée, Actes du
Colloque International de l'A.I.L.C., Dakar 8-10 novembre 2001.
- KANT Emile, Logique, trad. L. Guillermit, Paris, Vrin,
1970.
- KASSE Maguèye, « Le personnage du Noir tel qu'il
apparaît dans la littérature d'expression allemande » -
Douzième Congrès de l'Association des Germanites de
l'Enseignement Supérieur A.G.E.S., Dakar, 12-15 avril 1979, Auditorium
de l'Université, N.E.A., Dakar, 1983.
- LEBEL Roland, L'Afrique occidentale dans la
littérature française (depuis 1870), Paris, Larose, 1925.
- LEIRIS Michel, Brisées, Paris, Mercure de
France, 1966.
- LEVI-STRAUSS Claude, Race et Histoire, UNESCO,
1952.
- LEVY-STRAUSS Claude, La pensée sauvage, Paris,
Plon, 1962. - LEVY-STRAUSS Claude, Tristes tropiques, Paris, Plon,
1955.
- LIAUZU Claude, Violence et colonisation, Paris,
Syllepse, 2003.
- MAKOUTA-MBOUKOU Jean-Pierre, Systèmes,
théories et
méthodes comparée en critiques
littéraire. Des nouvelles critiques
à l'éclectisme négro-africain,
Paris, L'Harmattan, Volume II, 2003. - MALRAUX André, Préface
à « Musée de Dakar, témoin de l'art
nègre », Michel Renaudeau, Paris, Editions
Delroisse, 1973.
- MAMMERI Mouloud, L'Opium et le bâton, Paris,
Plon, 1965.
- MATESO Locha, La littérature africaine et sa
critique, Paris,
A.C.C.T. et Editions Karthala, 1986.
- MBOCK Charly-Gabriel, Comprendre Ville cruelle d'Eza
Boto, Paris, Les Classiques Africains, 1992.
- MBOM Clément, Frantz Fanon aujourd'hui et
demain, Paris, Nathan, 1985.
- MELVILLE J. Herskovits, L'héritage du Noir,
Paris, Présence Africaine, 1966.
- MEMMI Albert, L'Homme dominé, Paris, Gallimard,
1968. - MEMMI Albert, Le Racisme, Paris, Gallimard, 1982.
- MEMMI Albert, Portrait du colonisé suivi du
Portrait du colonisateur, Paris, Editions Corréa, 1957.
- MERCIER Roger, L'Afrique noire dans la littérature
française. Les premières images (XVIIe-XVIIIe siècles)
Dakar, publications de la F.L.S.H., 1962.
- MOURA Jean-Marc, « Francophonie et critique postcoloniale
», Revue de Littérature Comparée, N°281.
- MOURA Jean-Marc, « Littératures francophones et
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V. WEBOGRAPHIE
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Consulté le 13 juillet 2008.
VI. FILMOGRAPHIE
- Apocalypse Now. Film américain sorti le 26
septembre 1979, réalisé par Francis Ford Coppola. Avec Martin
Sheen, Marlon Brando, Frederic Forrest. Genre : guerre. Durée : 3h 22
min.
- Cahier d'un retour au pays natal. Film
français en couleur, pour tous publics. Réalisé par :
Philippe Bérenger. Acteurs : Jacques Martial (l'homme qui revient),
Anthony Farouil (le kid), Laurent Willy, Patricia Castel. Sotie le 10 mai 2008.
Durée : 1 h 05 min.
- René Maran, l 'éveilleur de
consciences. Film documentaire réalisé par Barcha Bauer et
Serge Patient. France 3 Aquitaine, La Lanterne, RFO Guyane, Prodom Canal
Antilles, 2007, 52 minutes.