L'utilité des peines de prison pour les criminels( Télécharger le fichier original )par Paul-Roger GONTARD Université d'Avignon et des Pays de Vaucluse - Maitrise de droit privé, option Carrières Judiciaires 2007 |
B/ Traitement de la psychose en prison« La prise en charge des patients psychotiques en milieu pénitentiaire pose enfin le difficile problème des soins sous contrainte. Le droit français proscrit le maintien en détention « des détenus en état d'aliénation mentale » (article D398 du code de procédure pénale). Le constat d'un état pathologique qui ne permet pas au sujet de rendre compte de ses actes alors qu'il est détenu, impose donc une hospitalisation d'office dans un centre hospitalier spécialisé. Pourtant, en 1996, pour près de 7700 hospitalisations d'office en France seules 200 concernaient des détenus77(*). » J. L. SENON et d'autres auteurs78(*), dans un travail collectif très approfondi sur les pathologies rencontrées en milieu pénitentiaire notent que toutes les formes de psychoses schizophréniques se rencontrent en prison. Les patients souffrant de formes paranoïdes sont les plus aisément dépistés. Mobilisant l'institution lorsqu'ils présentent une décompensation, ces patients sont ceux qui interrogent le plus le monde pénitentiaire sur l'adéquation de leur pathologie avec leur présence en milieu carcéral. Certains patients stabilisés, ayant appris à vivre avec leur délire, s'accommodent finalement assez bien de la routine pénitentiaire qui reproduit rapidement le rythme de la chronicisation asilaire. Un traitement moléculaire peut avoir de bons résultats sur ce public, mais un arrêt de ces traitements remettrait les sujets dans le même état mental qu'avant leur prise de médicaments. Un traitement de fond complémentaire est donc nécessaire. Les formes « hébéphréniques » sont souvent plus difficiles à mettre en évidence, les actes inadéquats, les propos saugrenus et agressifs conduisent cependant vite à des sanctions disciplinaires et c'est dans ce contexte que le psychiatre fait le plus souvent leur connaissance. La recherche d'un cadre contraignant à l'extrême, témoigne souvent de la nature indicible de l'angoisse de ces sujets, qui peuvent être momentanément apaisés par l'isolement, même en l'absence d'une thérapeutique adéquate. Plus rares, du moins dans notre pratique, sont les formes déficitaires ou hébéphréno-catatoniques. Les établissements accueillant des détenus condamnés à de longues peines sont particulièrement propices au repli de type autisme faisant des détenus des individus murés dans leur monde et dont on ne se préoccupe qu'à chaque examen automatique de leur situation pour en constater l'immuabilité. Ainsi, pour reprendre le propos de F. Macheret-Christe, B. Gravier79(*) du Service de Médecine et de Psychiatrie Pénitentiaires (SMPP) du canton de Vaud (Suisse), « le monde pénitentiaire est particulièrement délétère pour les patients chroniques qui se trouvent vite à l'écart des stimulations et des médiations relationnelles que la prison propose au détenu. La ritualisation de la vie quotidienne, la dépendance qu'induit un milieu où tout est programmé conduisent à des régressions dont tous perçoivent l'inadéquation, mais pour lesquelles peu de moyens existent ». Une illusion de stabilisation due à la contrainte et aux règles de l'enfermement pourra masquer une dégradation de l'état mental du détenu. Pour ces populations cliniquement repérables il est urgent de mettre des moyens spécifiques à leur réadaptation sociale. Seuls des professionnels du milieu psychiatrique ou des personnels de l'administration pénitentiaire spécifiquement formés pourraient utilement intervenir sur ces populations. * 77 C. PAULET, Réflexions de l'Association des Secteurs de Psychiatrie en Milieu Pénitentiaire, document de travail, 22/07/1997 * 78 SENON J.L., MERY B., LAFAY N., INCIDENTS COLLECTIFS ET INDIVIDUELS EN DÉTENTION : ÉTUDE DES RELATIONS AVEC LES PSYCHOPATHOLOGIES PÉNITENTIAIRES, http ://www.medecine-penitentiaire.com/, * 79 F. MACHERET-CHRISTE, B. GRAVIER ; SCHIZOPHRÉNIE, PSYCHOSE ET PRISON ; C.E.D.E.P. : Comité Européen : Droit, Ethique et Psychiatrie ; XIIème SEMINAIRE, LA PEINE DU FOU, LA PRISON, LE SOIN ; Juin 2003 |
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