L'utilité des peines de prison pour les criminels( Télécharger le fichier original )par Paul-Roger GONTARD Université d'Avignon et des Pays de Vaucluse - Maitrise de droit privé, option Carrières Judiciaires 2007 |
B/ Vivre en prison« La prison, c'est une agression permanente pour l'esprit et le corps. Ce sont des odeurs, des bruits, des voix fortes, des cris, une sensation pesante, oppressante de dureté dans les choses et les êtres... Imaginez-vous « arrivant » dans une coursive d'une centaine de détenus qui vous scrutent, vous jaugent. Une angoisse vous saisit à tel point qu'elle vous paralyse dans un mal-être permanent dont il est difficile de se débarrasser. La prison a ses règles, ses traditions, sa culture propre... C'est une « microsociété » avec ses rites et ses lois aux antipodes de ce que l'on peut connaître à l'extérieur. Ici, la règle qui prédomine sur tout le reste est la loi du plus fort, du plus malin, du plus vicieux... Il semble que tout ce qu'il y a de mauvais en l'homme y soit réuni et tellement concentré que cela en devient une « matière » qui se ressent, qui se palpe dans l'atmosphère... La violence des mots, des coups, des regards, des lieux, tout respire le mal... » 65(*) Bien vivre en prison dépend de votre tempérament, de l'infraction que vous avez commise, de votre place dans la société avant d'entrer en prison, etc... Là aussi il est très difficile de parler avec des généralités. Cependant des constantes existent : la nourriture en prison est souvent de piètre qualité et en quantité insuffisante. Il faut donc « cantiner » pour pouvoir manger à sa faim. Celui qui n'en a pas les moyens peut espérer obtenir du service médical des pâtes et des gels énergétiques ou des compléments alimentaires. Pour garder ce qui a été acheté il faut louer des réfrigérateurs (7€/mois). Là encore, faute de moyens, c'est la « débrouille » qui prime. Pour se divertir, l'incontournable des prisons est la télévision (39€/mois). Elle marche souvent en permanence et à très fort volume. Elle engendre d'ailleurs des comportements surprenants dans les établissements pénitentiaires. Véronique VASSEUR explique dans son livre que les soirs de match de l'équipe locale ou nationale de football les appels d'urgence au service médical se font très rares. Les surveillants se préoccupent plus souvent de leur poste de télévision que des coursives vides, et les détenus sont concentrés devant leurs écrans jusqu'à l'explosion à la prochaine occasion de but, ce qui crée vacarme tel qu'il peut faire penser à une émeute. Les nouvelles prisons ne sont pourtant pas encore la panacée. En effet, beaucoup de détenus les considèrent trop impersonnelles, trop froides, et les mises en cellules individuelles, ajoutées à cette impression, donnent une recrudescence des suicides. Quant à l'accès aux soins ou aux activités culturelles ou sportives, les détenus répondent dans une sensible majorité (>à 60%66(*)) que ces accès sont insatisfaisants. Vivre en prison c'est aussi être coupé du ciel et du soleil de longues heures par jour. Ce manque d'air qui ne vient pas des couloirs ou qui n'a pas été déjà respiré par votre voisin, étouffe toujours les détenus dans leurs premiers mois d'incarcération. Les promenades sont alors des bouffées d'air. De rares moments comme ceux-ci disparaissent presque totalement pour les détenus qui sont sous le coup d'une peine disciplinaire. * 65 Texte tiré du blog du détenu Laurent JACQUA condamné à 30 ans de prison: http://laurent-jacqua.blogs.nouvelobs.com/ * 66 Institut de sondage BVA ; CONSULTATION EN VUE DES ETATS GÉNÉRAUX DE LA CONDITION PÉNITENTIAIRE ; Paris ; octobre 2006 |
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