UNIVERSITE DE YAOUNDE II FACULTE DES SCIENCES
JURIDIQUES
UNIVERSITY OF YAOUNDE II ET
POLITIQUES
FACULTY OF LAW AND POLITICAL SCIENCES
DEPARTEMENT DE DROIT DES AFFAIRES DEPARTMENT OF
BUSINESS LAW
Procédures collectives et voies
d'exécution
MEMOIRE SOUTENU EN VUE DE L'OBTENTION DU
DIPLÔME D'ETUDES APPROFONDIES (D.E.A.) OPTION DROIT
DES AFFAIRES
Par :
KOUNGA Guy Jules
Maîtrise en Droit des Affaires et de l'Entreprise
Sous la direction du :
Professeur PAUL GERARD
POUGOUE Agrégé des Facultés de
Droit
Année académique 2003 - 2004
La Faculté des sciences juridiques et politiques de
l'Université de Yaoundé II n'entend donner aucune approbation ni
improbation aux opinions émises dans les mémoires. Celles-ci
doivent être considérées comme propres à leurs
auteurs.
DEDICACE
A ma mère Madame SOBNGWI née
MAKAMTO Jacqueline
REMERCIEMENTS
- A mon Directeur de mémoire, le
Professeur Paul-Gérard POUGOUE : avec beaucoup
d'encouragements, d'affection et d'attention, Vous nous avez fait l'honneur de
nous initier à la recherche en dirigeant ce travail malgré vos
multiples occupations.
Recevez ici notre profonde gratitude.
- A Madame DIFFO Justine : vos conseils
pratiques nous ont été d'une grande utilité pour la mise
sur pied de ce travail.
- A tous les enseignants de la Faculté des Sciences
Juridiques et Politiques de l'Université de Yaoundé II et de
l'Université de Dschang qui ont contribué à notre
formation académique. Recevez ici notre marque de gratitude.
- A mon Grand Frère André Pascal KENGNE
: tes conseils, ton soutien infatigable tant matériel que moral
ont été d'une grande importance pour la rédaction de ce
mémoire.
- A mes frères et soeurs : Jean-Pierre, Innocent,
Georges, Lisette et Véronique pour vos conseils de
proximité.
- A mes amis Alain, Anastasie, Emmanuel, Fabien, Thomas
Eléonore, Rodrigue, Calvin, Sylvie Laure, Nicole, Stéphanie,
Nadine, Diane.
- A toute la famille FOKOM et la famille TSOMDJO
PRINCIPALES ABREVIATIONS
Al. = alinéa.
Art. = article.
AUPCAP = Acte Uniforme OHADA portant Organisation des
procédures collectives d'Apurement du Passif.
AUPSRVE = Acte Uniforme OHADA portant Organisation des
Procédures Simplifiées de Recouvrement et des Voies
d'Exécution.
Bull. Civ. = Bulletin des arrêts de la cour de cassation,
chambre civile.
Cass. Com. = Cour de Cassation
française, Chambre Commerciale.
Com. = Commercial.
C. A. = Cour d'Appel.
D. = Dalloz.
D. S. = Dalloz Sirey.
Ed. = édition.
Ibid. = ibidem.
Infra = au dessous.
IR = Information rapide.
JCP =Jurisclasseur périodique.
Jex. = Juge d'exécution.
J. P. = Juridis Périodique.
Obs. = Observation.
OHADA = Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des
Affaires. Op. Cit. = opere citato.
Ord. = ordonnance.
PA = Petites Affiches.
PUA = Presse Universitaire d'Afrique. PUF = Presse
Universitaire de
France. Rép. Com. =
Répertoire Commercial.
Rev. Proc. Coll. = Revue des Procédures collectives.
Supra = au dessus.
R.T.D.Com. = Revue Trimestrielle de droit commercial. T.G.I. =
Tribunal de Grande Instance. T.P.I. = Tribunal de Première Instance.
UNIDA = Association pour l'Unification du Droit en Afrique. V. =
Voir.
SOMMAIRE
Pages INTRODUCTION 1
PREMIERE PARTIE : LA PARALYSIE DE PRINCIPE DES
VOIES
D'EXECUTION PAR L'OUVERTURE DES PROCEDURES COLLECTIVES
7
CHAPITRE 1 : FONDEMENT ET ETENDUE MATERIELLE DU BLOCAGE . 8
Section 1 : Le fondement de la suspension des voies
d'exécution .. 8
Section 2 : L'étendue matérielle du blocage
19 CHAPITRE 2 : CHAMP D'APPLICATION DU BLOCAGE DES VOIES
D'EXECUTION 28
Section 1 : Champ d'application quant aux personnes . 28
Section 2 : Champ d'application quant aux juridictions 34
DEUXIEME PARTIE : L'ADMISSION D'EXCEPTION DES
VOIES
D'EXECUTION DANS LES PROCEDURES COLLECTIVES
47 CHAPITRE 1 : L'ADMISSION DIRECTE DES VOIES D'EXECUTION DANS
LES
PROCEDURES COLLECTIVES . 48
Section 1 : Les voies d'exécution indifférentes
aux procédures collectives . 48 Section 2 : La réalisation de
l'actif de l'entreprise par l'utilisation des voies d'exécution... 60
CHAPITRE 2 : LA SUPPLEANCE DES VOIES D'EXECUTION PAR LES
PROCEDURES COLLECTIVES .. 68
Section 1 : La procédure collective, voie
d'exécution collective 68
Section 2 : Les procédures collectives, voies
d'exécution spécifiques .. 76
RESUME
La procédure des voies d'exécution qui a pour
objet la satisfaction de l'intérêt individuel du créancier
s'impose difficilement lorsque s'ouvre une procédure collective
d'apurement du passif. Cette ouverture entraîne le blocage de principe
des voies d'exécution. Ce blocage qui a un champ d'application assez
large a un fondement précis. En effet l'interdiction des voies
d'exécution est fondée sur le fait que la procédure
collective dessaisit le débiteur de la gestion de ses biens et rend
ceux-ci indisponibles entre ses mains. Encore faut-il mentionner qu'elle traite
les créanciers du débiteur de manière collective et
égalitaire. La paralysie des voies d'exécution concerne aussi
bien les saisies mobilières que les saisies immobilières et
constitue une mesure d'ordre public devant les autres ordres de juridiction.
Malgré cet arrêt ou cette suspension des voies
d'exécution par l'ouverture d'une procédure collective, ses
effets se ressentent d'une façon ou d'une autre dans l'exercice des
procédures collectives. D'une part certaines voies d'exécution,
sont directement admises dans les procédures collectives. Il en est
ainsi des voies d'exécution non suspendues, des voies d'exécution
exercées sur des créances postérieures, de la saisie
conservatoire des créances et de la saisie attribution exercées
pendant la période suspecte. Certaines voies d'exécution sont
admises pour les besoins de la liquidation : c'est la saisie immobilière
qui s'exerce avec une certaine déformation dans la liquidation des
biens. D'autre part, les voies d'exécution sont indirectement admises en
ce sens que les procédures collectives suppléent les voies
d'exécution, la procédure collective étant une voie
d'exécution collective et spécifique.
SUMMARY
The measures of execution which have for purpose the
satisfaction of creditor's individual interest have difficulties to assert
themselves when initiates the collective proceeding for wiping off debt. This
initiating proceeding involves in principle the freeze of measures of
execution. This freeze of measures of execution has a large scope and precise
foundation. In fact, the forbidding of measures of execution is based on the
fact that collective proceeding dispossesses the debtor of the management of
his property and renders it inalienable. It is interesting to mention that the
initiating proceeding treat debtor's creditors collectively and in an equal
manner. The freeze of measures of execution concerns seizure of personal
property and attachment of the real property and constitutes public order for
jurisdictions.
Despite the freeze of measures of execution by the initiating
proceedings, measures of execution affects one way or another the exercise of
collective proceedings. On one hand, certain measures of execution are directly
admitted in collective proceedings. These are: non suspended measures of
execution, measures of execution exercised on the claims born after the
decision to initiate collective proceedings, sequestration of debt and
seizure-award exercised during the period of suspicion. Certain measures of
execution are admitted with reasons of liquidation: it is the attachment of the
real property with certain distortion in the liquidation of property. On the
other hand, measures of execution are indirectly admitted because of the supply
post of measures of execution by collective proceedings; consequently,
collective proceedings are specific collective measures of execution.
INTRODUCTION
Le titulaire d'un droit de créance attend de son
débiteur qu'il honore ses engagements selon les modalités qui
affectent son obligation. Lorsque le débiteur le fait dans ces
conditions, on dit qu'il exécute son obligation de façon
volontaire. Ce mode d'exécution est d'ailleurs le souhait de tout
créancier. Pourtant ce souhait n'est pas toujours exaucé, car
très souvent, le débiteur résiste au paiement
volontaire.
Face à cette résistance, le créancier va
procéder à l'exécution forcée de son obligation. Le
plus souvent, pour l'adoption de cette stratégie, il utilisera les voies
d'exécution lorsque les circonstances le permettent. Ces voies
d'exécution désignent « le moyen par lequel une personne
peut avec le concours de l'autorité publique obtenir l'exécution
des engagements pris envers lui, spécialement contraindre celui qui a
été condamné ou s 'est engagé dans certaines formes
à satisfaire à ses obligations »1.
La procédure des voies d'exécution a connu une
évolution avant d'adopter les contours qui lui reviennent dans l'espace
juridique OHADA2.
Il existait, parallèlement aux procédés
d'exécution forcée sur les biens, un mode d'exécution
forcée sur la personne du débiteur, lequel permettait au
créancier de saisir et de vendre son débiteur au marché
aux esclaves afin de se payer sur le prix de vente obtenu. Cette forme radicale
de l'exécution forcée sur la personne, connue des
sociétés primitives a fait place de nos jours à la
contrainte par corps3. Ce mode d'exécution forcée n'a
pas été règlementé par l'Acte uniforme portant
organisation des procédures simplifiées de
1 Gérard CORNU, Vocabulaire juridique, Association
Henri CAPITANT.
2 Organisation pour l 'Harmonisation en Afrique du Droit des
Affaires adoptée par le Traité signé par les 16 Etats
membres à Port-Louis le 17 octobre 1993. Les Etats membres de l 'OHADA
sont : le Bénin, le Burkina Faso, le Cameroun, la République
Centrafricaine, la République Fédérale Islamique des
Comores, le Congo, la Côte-d 'Ivoire, le Gabon, la Guinée
Equatoriale, le Mali, le Niger, le Sénégal, le Tchad et le Togo.
3 C 'est l 'incarcération du débiteur défaillant
dans le but de le contraindre au paiement de sa dette.
recouvrement et des Voies d'exécution4.
Seule a été règlementée l'exécution
forcée sur les biens. Le créancier pour recouvrer sa
créance pourra donc saisir les biens meubles ou immeubles de son
débiteur.
Ce mode d'exécution forcée sur les biens n'est
possible que lorsque l'entreprise du débiteur est saine. Si l'entreprise
est en difficulté, le créancier va plutôt faire recours
à une procédure collective afin de recouvrer sa créance.
Celle-ci désigne toute procédure dans laquelle le
règlement des dettes et la liquidation éventuelle des biens du
débiteur ne sont pas abandonnés à l'initiative
individuelle de chaque créancier, mais organisés de
manière à ce que tous les créanciers puissent faire valoir
leur droit5. L'Acte uniforme sur les procédures collectives
d'apurement du passif6 distingue trois procédures collectives
: le règlement préventif, le redressement judiciaire et la
liquidation des biens7. Contrairement à la procédure
des voies d'exécution qui ne vise que le paiement des créanciers,
les procédures collectives vont au-delà et visent aussi bien le
redressement de l'entreprise que la punition du débiteur dont
l'entreprise est en difficulté. Comme on le constate, si dans les voies
d'exécution, on n'exécute que les biens du débiteur, les
procédures collectives peuvent exercer une exécution sur sa
personne afin de punir le débiteur qui a mal géré ses
biens.
L'objectif de paiement des créanciers qui lie ces deux
procédures paraît être le motif clé de notre sujet
intitulé « procédures collectives et voies d
'exécution ». Mais à l'analyse, il n'est pas le seul.
D'emblée, l'étude combinée de ces deux procédures
qui constituent distinctement deux disciplines en droit laisse croire qu'il
faille les comparer. Les comparer serait examiner leur point de
différence et de ressemblance sur le plan du fond et de la forme ;
4 Cet Acte uniforme a été adopté le 10
avril 1998 et entré en vigueur le 1er janvier 1999.
5 Gérard CORNU précité.
6 Cet Acte uniforme a été adopté le 10
avril 1998 et entré en vigueur le 1er janvier 1999.
7 Cet avis n 'est pas partagé par SA WADOGO (F, M),
OHADA, Droit des entreprises en difficulté, collection droit uniforme,
Bruylant, Juriscope, 2002. Celui-ci ne considère pas le règlement
préventif comme une procédure collective.
on pourra par exemple comparer la date d'adoption des actes
uniformes qui les instituent8, les personnes et les institutions
concernées par ces procédures, leurs objectifs et leur
efficacité. Si l'on prend seulement en compte les personnes qui sont
concernées par ces deux procédures, on pourra grouper les
personnes actives et celles passives. Du côté de celles-ci, on
retrouve incontestablement le débiteur qui peut être une personne
physique ou une personne morale. En ce qui concerne celles-là, si l'on
exclut les personnes instituées pour la mise en oeuvre de ces
procédures9, on parlera uniquement du créancier qui
lui aussi peut être une personne morale ou physique.
Procéder ainsi serait un peu fastidieux dans le cadre
de notre mémoire dans la mesure où, la lecture conjointe desdits
actes uniformes permet de déceler le lien qui permet de mieux
s'interroger sur la question. Ce lien résulte de l'exercice
cumulé des procédures collectives et des voies
d'exécution. Ceci étant, une voie d'exécution
déclenchée par un créancier dans son intérêt
personnel pourra être influencée par l'ouverture d'une
procédure collective d'apurement du passif contre le débiteur de
ce créancier. Aussi est-il intéressant de se pencher sur
l'influence de l'ouverture d'une procédure collective sur l'exercice
d'une voie d'exécution. Envisager ce sujet sur l'angle de l'influence
réciproque d'une procédure sur l'autre revient à
s'interroger sur les rapports que peuvent entretenir ces deux procédures
quand leur exercice se coïncide dans le temps.
Ces rapports qui sont présents dans les deux actes
uniformes1° sont plus perceptibles dans l'Acte uniforme sur les
procédures collectives d'apurement du passif. Ainsi, il ressort de la
lecture combinée des articles 9 et 7511 de l'AUPCAP que la
décision d'ouverture d'une procédure collective suspend ou
interdit l'exercice des voies d'exécution tendant à obtenir le
paiement des droits et créances exercées par les
créanciers antérieurs à cette décision
8 Les deux actes uniformes ont été
adoptés le 10 avril 1998 et entrés en vigueur le 1er
janvier 1999.
9 Comme personnes instituées, on peut citer par
exemple l 'huissier de justice, le greffier, le syndic... 1°
AUPSRVE et AUPCAP.
11 Il aurait été préférable que
ces articles ressortissent des dispositions générales ; voir
infra.
d'ouverture. Pourquoi la décision d'ouverture d'une
procédure collective suspend ou interditelle l'exercice d'une voie
d'exécution ? Les voies d'exécution et les procédures
collectives ne peuvent-elles pas cheminer ensemble ? Quelles voies
d'exécution sont-elles suspendues ou interdites ?
La suspension des voies d'exécution concerne aussi bien
les saisies mobilières que les saisies immobilières et a pour
objectif le traitement collectif des créanciers du débiteur dont
l'entreprise est en difficulté. Ce blocage des voies d'exécution
s'entend aussi explicitement dans l'AUPSRVE. C'est le lieu d'examiner l'une des
conditions essentielles d'une saisie qui est la disponibilité du bien
objet de la saisie. Or l'ouverture d'une procédure collective contre un
débiteur rend ses biens indisponibles, par conséquent lesdits
biens ne peuvent pas faire l'objet d'une saisie. Cette mesure n'est propre
qu'aux débiteurs pouvant subir une procédure collective. Ceci
étant, la catégorie des débiteurs pouvant faire l'objet
d'une saisie est d'un côté plus important que celle pouvant
être soumise à une procédure collective12.
Historiquement13, la procédure collective n'était
applicable qu'aux commerçants, mais avec l'avènement de l'AUPCAP,
on pourra appliquer la procédure à toute personne morale de droit
privé14 excepté les personnes physiques non
commerçantes. En ce qui concerne les voies d'exécution, elles
s'appliquent indistinctement à toute personne physique et aux personnes
morales de droit privé15.
Il faut aussi relever que l'ouverture d'une procédure
collective dessaisit les juridictions devant lesquelles était pendante
une voie d'exécution. Cette juridiction peut être civile,
pénale ou même administrative.
12 On fait allusion ici aux personnes physiques non
commerçant.
13 Jusqu 'à la réforme OHADA.
14 Et même aux personnes morales de droit public ayant
la forme d'une personne morale de droit privé ; lire l 'article 2 de l
'acte uniforme sur les procédures collectives d 'apurement du
passif.
15 L 'acte uniforme sur les voies d'exécutions laisse
paraître que les personnes morales de droit public ne sont pas soumises
à une telle procédure.
Des constats qui précèdent, on peut
dégager la première hypothèse de notre étude qui
établit les rapports conflictuels entre les procédures
collectives et les voies d'exécution. La seconde hypothèse qui
envisage les rapports de collaboration a ses constats propres. Comment rendre
les procédures collectives efficaces en les laissant cheminer avec les
voies d'exécution ?
La réponse à cette question est fort simple si
l'on ne prend en compte que la procédure de la liquidation des biens.
Cette procédure « qui a pour objet la réalisation de
l'actif du débiteur pour apurer son passif »16
utilise les voies d'exécution dans l'accomplissement de son objet
; c'est ainsi que les biens immeubles du débiteur sont vendus par la
voie des saisies immobilières. Par contre, lorsque l'on prend en compte
toutes les procédures collectives, l'admission n'est pas aisée.
C'est le lieu de méditer sur le terme employé par le
législateur lorsqu'il affirme que l'ouverture d'une procédure
collective « suspend » l'exercice de toutes voies
d'exécution. Le verbe suspendre utilisé ici signifie interdire
pour un temps, comme pour dire que les voies d'exécution
suspendues17 pourront reprendre plus tard. Mais quand ? Comment ?
Lesquelles ? N'y a-t-il pas des voies d'exécution qui ne sont pas
soumises au régime de la suspension mais qui cheminent
véritablement avec les procédures collectives ?
Parmi les voies d'exécution, il en est une dont l'effet
immédiat peut l'empêcher d'être arrêtée par
l'ouverture des procédures collectives18 : c'est la
saisie-attribution. Cette saisie emporte « attribution
immédiate au profit du saisissant de la créance
saisie»19. Cette propriété
juridique dont jouit le créancier saisissant manifestera sans doute ses
effets malgré l'ouverture d'une procédure collective. A
côté de cette collaboration directe des voies
16 Article2 paragraphe 3 A UP CAP.
17 Cette suspension ne concerne que les créanciers
dans la masse qui sont les créanciers antérieurs au jugement d
'ouverture de la procédure collective.
18 Voir infra.
19 Voir l'article 154 de l'A UPSRVE.
d'exécution dans l'exercice des procédures
collectives, il existe une collaboration latente liée aux objectifs
communs aux procédures collectives et aux voies d'exécution.
La suspension, l'interdiction ou l'arrêt des voies
d'exécution se justifient parfois par le fait que les procédures
collectives jouent à certains points le rôle des voies
d'exécution. C'est pourquoi il faut rappeler que l'un des objectifs
majeurs d'une procédure collective est le paiement des
créanciers20. Ce paiement peut être total ou partiel
selon la procédure ouverte. Il peut être total dans le
règlement préventif et le redressement judiciaire et partiel dans
la liquidation des biens. Cette deuxième série de constats
conduit inévitablement à rappeler la deuxième
hypothèse qui constitue les rapports de collaboration. Ces
hypothèses ne sont pas sans intérêt.
Sur un plan purement juridique, il faut connaître les
raisons qui sous-tendent les conflits entre les voies d'exécution et les
procédures collectives. Sur un plan tout à fait pratique, il faut
faire connaître aux juges et aux agents chargés de
l'exécution des décisions de justice l'étendue de leur
pouvoir lorsqu'ils sont surpris par l'ouverture d'une procédure
collective ; et au créancier d'éviter d'engager les actions
vaines.
Les procédures collectives dont l'exercice
coïncide avec celui des voies d'exécution vont exercer une grande
influence sur celles-ci. Il est de principe que les voies d'exécution
soient paralysées pour le bon déroulement des procédures
collectives (Première Partie). Mais il arrive que pour des raisons de
procédure, qu'il y ait une admission d'exception des voies
d'exécution dans les procédures collectives (Deuxième
Partie).
20 Voir supra.
PREMIERE PARTIE LA PARALYSIE DE PRINCIPE DES VOIES
D'EXECUTION PAR L'OUVERTURE DES PROCEDURES COLLECTIVES
L'efficacité d'une procédure collective est
tributaire des effets de sa décision d'ouverture à l'égard
des actions engagées. C'est ainsi que, d'après les dispositions
de l'Acte uniforme sur les procédures collectives d'apurement du passif,
le jugement d'ouverture d'une procédure collective emporte suspension ou
interdiction des actions en cours y compris les voies
d'exécution21. L'interdiction ou la suspension des voies
d'exécution qui nous intéresse ici ne doivent pas se confondre.
En effet, la suspension concerne l'interruption des voies d'exécution en
cours. L'interdiction de son côté est relative aux voies
d'exécution non encore engagées. L'interdiction et la suspension
seront désignées sous le vocable de blocage ou de paralysie
même si de temps en temps on emploiera plus le terme de suspension.
Cette paralysie des voies d'exécution qui consiste pour
les créanciers à renoncer à agir de leur propre chef a son
fondement dans les objectifs des procédures collectives (chapitre 1) et
a un champ d'application précis (chapitre 2).
21 Lire les articles 9 al. 2 et 75 al. 1er de l 'A
UP CAP.
CHAPITRE 1 : FONDEMENT ET ETENDUE MATERIELLE DU BLOCAGE
DES VOIES D'EXECUTION
Le blocage des voies d'exécution par l'ouverture des
procédures collectives est lié au caractère des
procédures collectives ; parmi ces caractères, certains ont un
aspect collectif, d'autres conflictuel. Le premier est collectif en ce sens que
les créanciers sont regroupés et soumis à un ensemble de
règles destinées à les discipliner afin que leur paiement
se fasse dans l'égalité et la justice. Le deuxième est
conflictuel en ce sens qu'il existe un conflit d'intérêt d'une
part entre les créanciers et le débiteur ou l'entreprise, d'autre
part à l'intérieur du groupe des créanciers. C'est ces
caractères qui justifient le fondement de la paralysie des voies
d'exécution (Section 1). Celles-ci sont précisément les
saisies mobilières et immobilières qui constituent en quelque
sorte l'étendue matérielle de la paralysie (Section 2).
Section 1 : Le fondement de la suspension des voies
d'exécution
L'ouverture d'une procédure collective que ce soit le
règlement préventif, le redressement judiciaire ou la liquidation
des biens entraîne suspension ou interdiction des voies
d'exécution ainsi que les mesures conservatoires. Cette suspension ou
interdiction est liée au fait que l'ouverture d'une procédure
collective rend impossible les conditions d'exercice d'une voie
d'exécution. Le caractère collectif et égalitaire de ces
procédures (paragraphe 2) rend indisponible les biens du débiteur
qui lui-même se trouve dessaisi (paragraphe 1).
Paragraphe 1 : Le dessaisissement et
l'indisponibilité
Lorsque le débiteur se trouve en état de
règlement préventif, de redressement judiciaire ou de liquidation
des biens, cette situation entraîne son dessaisissement de la gestion de
ses biens22 et la suspension des poursuites individuelles. Ce
dessaisissement (A) a pour conséquence l'indisponibilité des
biens meubles et immeubles du débiteur entre ses mains (B).
A- L'idée de dessaisissement
Le dessaisissement peut être admis différemment
comme fondement de la suspension des voies d'exécution selon qu'on se
trouve devant une procédure collective ouverte avant la cessation des
paiements ou devant celle ouverte après la cessation des paiements. Il
sera exclu dans le premier cas (1) et discuté dans le second (2).
1- L'exclusion du dessaisissement dans le
règlement préventif
Le règlement préventif est une procédure
collective ouverte contre un débiteur qui connaît une situation
économique et financière difficile mais non
irrémédiablement compromise. Elle est une procédure
destinée à éviter la cessation des paiements ou la
cessation d'activité de l'entreprise et à permettre l'apurement
du passif au moyen d'un concordat préventif. La possibilité de
déclencher une telle procédure est réservée
uniquement au débiteur qui reste à la tête de ses
affaires.
22 Sauf dans le règlement préventif
Le déclenchement du règlement préventif
par l'initiative personnel du débiteur doit être
considéré comme une raison de rejet du dessaisissement comme
fondement de la suspension des voies d'exécution. Contrairement au
redressement judiciaire et à la liquidation des biens, qui peuvent aussi
être déclenchés par les créanciers ou le tribunal,
seul le débiteur peut le faire dans le cas du règlement
préventif.
Lorsque le débiteur introduit une requête aux
fins de règlement préventif, et que le juge ouvre la
procédure, le débiteur reste à la tête de ses
affaires pour la suite de la procédure (art. 18 al. 5 AUPCAP). Avant
d'en arriver, les étapes suivies sont les suivantes : après
l'introduction de la requête suivie du dépôt du concordat
préventif, le juge de la juridiction compétente rend une
décision de suspension des poursuites individuelles et désigne un
expert. Cet expert a pour mission de faire un rapport sur la situation
économique et financière de l'entreprise, les perspectives de
redressement compte tenu des délais et remises consentis ou susceptibles
de l'être par les créanciers et toutes autres mesures contenues
dans les propositions du concordat préventif (art. 8 al.
1erAUPCAP). Après le dépôt du rapport de
l'expert, le tribunal pourra ou non homologuer le concordat préventif.
Lorsqu'il homologue celui-ci, le règlement préventif va alors
produire ses effets à l'égard du débiteur.
La situation du débiteur est alors très simple.
Il recouvre la liberté d'administration de son entreprise et la libre
disposition de ses biens dès que la décision de règlement
préventif est passée en force de chose jugée, sous
réserve cependant du respect de ses engagements concordataires auquel
veillent les organes mis en place23.
Face à cet effet que produit le règlement
préventif à l'égard du débiteur, on constate que le
débiteur reste bien à la tête de ses affaires. Par
conséquent, le dessaisissement doit être exclu comme étant
l'un des fondements de la suspension des voies d'exécution par
23 On peut citer par exemple comme organe le juge
commissaire, les contrôleurs, le syndic.
l'ouverture du règlement préventif. Ce
dessaisissement devient un fondement incontestable lorsque l'ouverture de la
procédure collective ne laisse pas le débiteur à la
tête de ses affaires.
2- La validité du dessaisissement dans le
redressement judiciaire et la liquidation des biens
Il convient de préciser le domaine du dessaisissement
(a) avant de s'interroger sur ses effets dans les procédures collectives
de redressement judiciaire et de liquidation des biens (b).
a- Le domaine du dessaisissement
Pour administrer les biens du débiteur lorsqu'une
procédure collective est ouverte après cessation des paiements,
le débiteur est dessaisi de ses biens. Dans la liquidation des biens ou
dans le redressement judiciaire, l'activité du débiteur touchant
particulièrement son patrimoine, ne peut plus ignorer la situation
nouvelle. Dans un cas, il ne peut plus agir : il est représenté
par le syndic (liquidation des biens) ; dans l'autre, il doit se faire assister
par le syndic c'est-à-dire obtenir son accord et sa participation
à l'acte (redressement judiciaire). Il y a donc seulement une
différence de degré à l'intérieur d'une même
situation qui est le dessaisissement24. Quand y a-t-il alors
dessaisissement ? Quelle est son étendue ? Comment se manifeste-t-il
?
24 SA WADOGO (F. M.), OHADA, Droit des entreprises en
difficulté, collection droit uniforme africain, Juriscope, Bruylant,
2002. N° 167.
Dans le temps, le dessaisissement s'applique à la
situation du débiteur prise entre le jugement d'ouverture et la
clôture de la procédure. Qu'en est-il de la période
suspecte ?25 Le dessaisissement ne cadre pas avec cette
période car pour qu'une personne soit dessaisie de ses biens, il faut
que ce soit suite au prononcé d'un acte. Or tel n'est pas le cas pendant
la période suspecte, seule l'inopposabilité est adaptée
à cette situation.
Quant aux biens, la question essentielle est ici de
déterminer si le dessaisissement a une portée
générale ou s'il doit avoir un périmètre
strictement limité aux biens professionnels du débiteur.
L'absence de distinction du texte militerait en faveur de la première
interprétation. En outre, la lettre elle-même de l'article 53 de
l'AUPCAP semble en ce sens en visant « les biens qu 'il peut
acquérir à quelque titre que ce soit ». Plus
fondamentalement encore, l'objectif de la liquidation des biens doit conduire
à une extension maximale de la portée du
dessaisissement26. Le dessaisissement concerne donc les biens du
débiteur qu'ils soient présents ou à venir.
L'étendue du dessaisissement quant aux biens n'est pas vraiment
dérogatoire. La règle en la matière n'est que la reprise
de l'article 2092 du c. civ. édictant le droit de gage
général du créancier sur les biens présents et
à venir de son débiteur27. Ce dessaisissement qui fait
des procédures collectives une voie d'exécution en droit
commercial28 n'est pas sans effet.
b- Les effets du dessaisissement
A côté de l'effet négatif qui est
l'inopposabilité à la masse, il existe des effets positifs qui
consistent en l' « ensaisissement de la masse
»29.
25 Il s 'agit de la période située entre la
cessation des paiements et le jugement d 'ouverture. Voir infra.
26 LE CORRE (P. M.), Le créancier face au redressement
judiciaire et à la liquidation judiciaires des entreprises, P. U.A.M. t.
1, 2000 P. 176
27 SA WADOGO (F. M.) op. cit. n° 174.
28 V. infra
29 SA WADOGO (F.M.), op. cit. n° 186 et s.
L'inopposabilité pendant le dessaisissement a un
caractère plus général que celle de la période
suspecte puisqu'elle s'applique en principe à tous les actes et quelque
soit la bonne ou mauvaise foi du créancier poursuivant.
L' « ensaisissement de la masse » consiste
pour le syndic à représenter le débiteur dans la
liquidation des biens. Celui-ci ne participe plus à la gestion de
l'entreprise. L'entreprise est gérée par le syndic du moins s'il
y a continuation de l'activité. Le syndic va alors recouvrer les
créances du débiteur au fur et à mesure qu'elles arrivent
à échéance. Il va également exercer des actions en
justice ; en reconnaissance de droits, en paiement, en responsabilité
civile engagée ou non. Ce qui permet de dire que dans la liquidation des
biens, le dessaisissement est total. Qu'en est-il en cas de redressement
judiciaire ?
Même s'il n'y aboutit pas dans tous les cas, le
redressement judiciaire tend vers une reprise totale d'activité de
l'entreprise. C'est pourquoi d'une part, la continuation d'activité de
l'entreprise est automatique et ne nécessite aucune autorisation,
d'autre part le débiteur continue d'agir. Mais, il faut la participation
du syndic, ce qui veut dire qu'il faut l'accord du débiteur et du
syndic. Chacun d'eux peut agir dans certains cas, dans d'autres, une
autorisation du juge commissaire est nécessaire.
Face à tous ces constats, on peut dire que le
dessaisissement dans le redressement judiciaire est tantôt partiel,
tantôt total.
Le dessaisissement dans le redressement judiciaire et la
liquidation des biens est similaire au dessaisissement dans les voies
d'exécution et s'apparente dès lors à une saisie. Les
procédures collectives on le sait, sont des voies d'exécution
propres au droit commercial30. Elles entraînent
l'indisponibilité des biens composant le patrimoine du débiteur
comme la saisie entraîne celle du ou des biens concernés. La
saisie explique assez bien la
30 SA WADOGO (F., M.) op. cit. n°172. Nous ne partageons
pas entièrement cet avis car les procédures collectives vont au
delà du droit commercial et embrasse plusieurs disciplines du droit. V.
infra ;
situation privilégiée des créanciers formant
la masse par rapport aux créanciers hors la masse qui seront
négligés tout au long de la procédure.
B- L'indisponibiité des biens du
débiteur
Lorsqu'une procédure collective est ouverte contre un
débiteur31, les biens concernés par cette
procédure deviennent indisponibles entre les mains de celui-ci. Le bien
indisponible ne peut plus être saisi par la voie d'une procédure
d'exécution forcée, car l'une des conditions de saisie d'un bien
est sa disponibilité.
Le bien objet de la saisie doit être disponible entre
les mains du débiteur saisi ; cette disponibilité du bien,
condition d'une saisie régulière fait défaut en cas de
redressement judiciaire et de liquidation des biens du
débiteur32. Lorsque le débiteur est en état de
redressement judiciaire ou de liquidation des biens, ces deux situations
entraînent le dessaisissement du débiteur de la gestion de ses
biens et la suspension des poursuites individuelles. Par conséquent, ses
biens meubles et immeubles n'étant pas disponibles entre ses mains,
aucune saisie ne peut plus être effectuée sur
ceux-ci33.
L'indisponibilité des biens du débiteur par
l'ouverture des procédures collectives a pour conséquence
d'interdire au débiteur d'accomplir les actes d'administration et de
disposition comme les aliénations, les actions en justice34.
Le débiteur en état de redressement judiciaire ou de liquidation
des biens demeure cependant le propriétaire des biens soumis à la
procédure collective puisque l'ouverture de la procédure n'a pas
pour effet d'entraîner un transfert de propriété des biens
du débiteur à la masse des créanciers ou de le
déposséder
31 Cette idée n 'est vérifiable que dans le
redressement judiciaire et la liquidation des biens.
32 ASSI-ESSO (A-M.), NIA W DIOUF, OHADA, Recouvrement des
créances, collection droit uniforme africain, Juriscope, Bruylant, 2002,
n° 97.
33 Lire l 'art. 75 de l 'A UP CAP.
34 POUGOUE (P., G.) et KALIEU (Y), L 'organisation des
procédures collectives d 'apurement du passif, OHADA, collection droit
uniforme, PUA, n° 104.
desdits biens. Mais, tout en demeurant propriétaire, le
débiteur ne peut ni les aliéner à titre gratuit ou
onéreux, ni les constituer en gage ou les prêter.
Cette indisponibilité
générale35 qui frappe les biens du débiteur
empêche qu'une saisie soit pratiquée sur lesdits biens, car
l'ensemble des créanciers devrait être traités
collectivement au cours de la procédure et de façon
égalitaire.
Paragraphe 2 : le caractère collectif et
égalitaire des procédures collectives
Contrairement au dessaisissement et à
l'indisponibilité qui ne sont pas communes à toutes les
procédures collectives, l'autre fondement de la suspension des voies
d'exécution est lié au caractère collectif et
égalitaire de toutes les procédures collectives. A l'ouverture
d'une procédure collective, les créanciers sont traités de
manière collective et égalitaire (A). Ce traitement est l'objet
d'une grande portée (B).
A- Le traitement collectif et égalitaire des
créanciers
La décision de suspension ou d'interdiction des voies
d'exécution fait l'objet d'une discrimination vis-à-vis des
créanciers concernés. Ceux-ci vont subir collectivement les
effets de la suspension. Ils devront produire leurs créances et
contrôler le cas échéant l'exécution des mesures
prises par l'ouverture de la procédure collective.
35 Nous pouvons dire que l 'indisponibilité est
générale dans les procédures collectives parce qu 'elle
concerne tous les biens présents et à venir du débiteur,
alors que dans les voies d'exécution, elle ne frappe que le ou les biens
objet de la saisie.
Le caractère collectif et égalitaire des
créanciers dans les procédures collectives s'apprécie
d'abord à travers la production des créances36. Mais
avant, tous les créanciers antérieurs à l'ouverture de la
procédure collective ont une situation identique que ce soit dans le
règlement préventif, le redressement judiciaire et la liquidation
des biens. La production des créances ne concerne que les
créanciers dans la masse37. Pour qu'on puisse avoir une
idée précise du passif, les créanciers doivent, aux termes
de l'article 78 de l'AUPCAP produire leur créance auprès du
syndic. Il s'agit d'une obligation qui leur est imposée et non d'une
simple faculté38.
Le déroulement de la procédure collective
suppose que soit évalué avec exactitude le passif du
débiteur, ce qui revient à identifier les véritables
créanciers39. Pour y parvenir, ceuxci sont astreints à
justifier leurs prétentions. Ils doivent produire leur créance
entre les mains du syndic qui les vérifie40. La production
consiste donc en une remise de titre qui permet au syndic de vérifier le
bien fondé des prétentions des créanciers. Rompant avec la
solution antérieure qui n'imposait l'obligation de produire qu'aux
créanciers chirographaires, l'Acte uniforme en son article 78
précité impose l'obligation de produire même aux
créanciers titulaires de sûretés41. Cette
soumission de tous les créanciers à l'obligation de production
confirme à l'évidence le caractère collectif et
égalitaire des procédures collectives.
Le caractère collectif des procédures
collectives peut aussi s'apprécier par l'institution des
créanciers contrôleurs. L'institution des créanciers
contrôleurs telle que prévue par l'AUPCAP constitue une simple
possibilité de leur désignation par le juge commissaire.
36 Dans le règlement pré ventif en particulier,
la décision d 'ouverture ouvre droit à la constitution des
mesures
d 'apurement du passif du débiteur. Pour le faire, les
créanciers antérieurs peuvent soit faire des remises totales ou
partielles de dettes, soit octroyer des délais de paiements à
leur débiteur.
37 V. infra
38 Contrairement à l 'art. 491 du
C. com., dont on pouvait
déduire que la production était simplement facultative, l 'acte
uniforme donne à la production un caractère obligatoire. A ce
propos, lire Paul-Gérard POUGOUE et Yvette KALIEU, op. cit.
n°123.
39 Alain GHOZY, Nature juridique de la production des
créances dans les procédures de règlement du passif ;
R.T.D. Com, 1978, P. 2.
40 Ripert et Roblot, Traité élémentaire
de droit commercial, T. II, n°2857.
41 Y compris bien évidemment les titulaires des
privilèges généraux comme le trésor, le fisc, la
douane, les organismes de sécurité sociale.
Cependant, il faut réserver le cas où leur
désignation est demandée par des créanciers
représentant au moins la moitié des créances même
non vérifiées. Dans ce cas leur désignation devient
obligatoire.
Les créanciers contrôleurs sont chargés
d'une mission de surveillance et de contrôle assez vague. Ils ont
toujours le droit entre autre de vérifier la comptabilité et
l'état de situation présenté par le débiteur, de
demander compte de l'état de la procédure, des actes accomplis
par le syndic, ainsi que des recettes faites et des versements
effectués. En conséquence, les contrôleurs contribuent,
s'ils exercent efficacement leurs fonctions, au bon déroulement de la
procédure et à la préservation des intérêts
des créanciers42.
Ce traitement collectif et égalitaire des
créanciers dans les procédures collectives conserve une certaine
portée.
B- La portée du caractère collectif et
égalitaire des procédures collectives
La portée du caractère collectif et
égalitaire des procédures collectives se distingue selon qu'on se
trouve dans une procédure sans cessation des paiements (1) ou dans une
procédure avec cessation des paiements (2).
1- Dans le règlement
préventif
Il faut rappeler que d'après l'art. 2 § 1 de
l'Acte uniforme sur les procédures collectives d'apurement du passif, le
règlement préventif est une procédure destinée
à éviter la cessation des paiements ou la cessation
d'activité de l'entreprise et à permettre l'apurement de son
passif au moyen d'un concordat préventif. Ainsi défini, le
règlement préventif dont la
42 SA WADOGO (F., M.), op. cit. n°160.
décision d'ouverture engendre suspension des voies
d'exécution concerne une catégorie précise des
créanciers. Ces créanciers seront traités au cours de la
procédure de manière collective et égalitaire.
La requête de règlement préventif qui doit
être adressée au président de la juridiction
compétente doit indiquer les créances pour lesquelles le
débiteur demande la suspension des poursuites
individuelles43. C'est donc dire que contrairement aux autres
procédures collectives44, le blocage des voies
d'exécution ne concerne que certains créanciers choisis par le
débiteur. Ces créanciers qui seront traités de
manière collective et égalitaire tout au long de la
procédure sont incontestablement les créanciers antérieurs
à la décision d'ouverture du règlement
préventif.
Sous d'autres cieux, ces créanciers ne seront pas
seulement antérieurs à la décision d'ouverture de la
procédure mais ils seront en plus regroupés en une masse
notamment dans le redressement judiciaire et la liquidation des biens.
2- Dans le redressement judiciaire et la liquidation
des biens
Ce qui rapproche de manière apparente ces deux
procédures dans l'Acte uniforme sur les procédures collectives
d'apurement du passif est la cessation des paiements. Car aux termes de l'art.
2 § 4, le redressement judiciaire et la liquidation des biens sont
applicables à toute personne physique ou morale commerçante,
à toute personne morale de droit privé non commerçante,
à toute entreprise publique ayant la forme d'une personne morale de
droit privé « qui cesse ses paiements ». La cessation
des paiements serait donc une des justifications du regroupement des
créanciers antérieurs à la décision d'ouverture en
une masse.
43 Lire l 'art. 5 A UP CAP.
44 V. infra
Sont considérés comme créanciers dans la
masse, ceux dont les créances ont été produites dans les
délais, ont été vérifiées. La masse est
constituée aux termes de l'art. 72 de l'AUPCAP « par tous les
créanciers dont la créance est antérieure à la
décision d'ouverture ». Autrement dit, tous les
créanciers dont les créances sont antérieures et
régulières. Peu importe qu'ils soient chirographaires, titulaires
de sûretés ou de privilèges45.
Aux créanciers dans la masse, on ajoute les
créanciers de la masse c'est-à-dire ceux dont les créances
sont nées postérieurement au jugement d'ouverture et d'une
activité régulière du débiteur et les
créanciers hors la masse dont les droits sont inopposables parce que
leur créance est née d'une activité
irrégulière du débiteur, peu importe qu'elle soit
antérieure ou postérieure au jugement d'ouverture.
L'existence de la masse dans l'OHADA46 consacre
véritablement le caractère collectif des procédures de
redressement judiciaire et de liquidation des biens. Les inopposabilités
de la période suspecte lui sont appliquées.
Les créanciers dans la masse dans les procédures
avec cessation des paiements et les créanciers dont le débiteur
sollicite la suspension des poursuites dans le règlement
préventif verront l'ensemble de leurs voies d'exécution
paralysé.
Section 2 : L'étendue matérielle du
blocage
Aux termes des articles 9 al. 2 et 75 al.1er de
l'AUPCAP, le jugement d'ouverture arrête ou interdit également
toute voie d'exécution de la part des créanciers
antérieurs tant sur les meubles que sur les immeubles (paragraphe 1).
Cette paralysie des voies d'exécution s'étend sur une
période déterminée (paragraphe 2).
45 POUGOUE (P., G.) et KALIEU (Y), op. cit.
n°149
46 Il faut mentionnée que la masse a été
supprimée en France par la loi du 25 janvier 1985 sur les
procédures collectives.
Paragraphe 1 : Les voies d'exécution
paralysées par les procédures
collectives
Il s'agit des voies d'exécution ayant une nature
exécutoire (A) et de celle ayant une nature conservatoire (B).
A- Les voies d'exécution ayant une nature
exécutoire
Il convient de faire une distinction entre la suspension qui
concerne les saisies mobilières (1) et celle liée à la
saisie immobilière (2).
1- Application de la suspension des poursuites à
la saisie mobilière
Les articles 9 al.2 et 75 al.1er de l'Acte uniforme
sur les procédures collectives s'appliquent à toutes les saisies
mobilières, qu'il s'agisse de la saisie-vente, de la saisie des
récoltes sur pied, de la saisie-revendication, de la
saisie-appréhension, de la saisie des droits d'associés et des
valeurs mobilières. Ils s'appliquent également aux
procédures simplifiées de recouvrement telles les injonctions de
payer47 par exemple.
Le fisc étant également concerné par
l'arrêt des voies d'exécution, l'avis à tiers
détenteur ne peut être délivré après le
jugement d'ouverture, pour des créances antérieures.
La saisie-attribution qui a des caractères quelque peu
spécifiques sera étudiée ultérieurement. Mais
avant, il faut noter que la décision d'ouverture d'une procédure
collective arrête aussi les saisies immobilières.
47 T.P.I de Libreville, Ord. De
référé, répertoire n° 714/2002-2003 du 26
septembre 2003 : Ohadata J-04-145. Il faut relever ici que les
procédures simplifiées de recouvrement ne sont pas
expressément visées par les articles 9 al.2 et 75 al. 1 A UP
CAP.
2- Application de la suspension à la saisie
immobilière
L'arrêt des voies d'exécution s'applique à
la saisie immobilière, l'art. 75 al.1er en particulier de
l'AUPCAP visant les saisies sur les immeubles.
Avec cet Acte uniforme, la saisie immobilière
commencée avant le jugement d'ouverture doit être interrompue par
l'effet de ce jugement. Il en est de même de l'adjudication
prononcée par suite de la conversion de la saisie en vente
volontaire48. Cette règle s'applique même après
adjudication, dès lors que la publication du jugement n'est pas
intervenue avant le jugement d'ouverture49.
On remarquera cependant que la prorogation d'un commandement
de saisie immobilière publié avant le jugement d'ouverture ne
constitue qu'une mesure conservatoire échappant à l'interdiction
des voies d'exécution50.
On ajoutera que la procédure d'ordre n'est pas une
mesure d'exécution, mais une mesure de répartition, de sorte
qu'elle n'est pas concernée par la règle de l'arrêt des
voies d'exécution51.
Parallèlement à l'interdiction des saisies
exécutoires par l'ouverture d'une procédure collective, cette
mesure s'applique aussi aux saisies simplement conservatoires.
B- Les voies d'exécution ayant une nature
conservatoire
Les saisies conservatoires règlementées par
l'Acte uniforme sur les procédures simplifiées de recouvrement et
les voies d'exécution sont soumises à la règle de
l'arrêt ou de l'interdiction des voies d'exécution.
48 Com. 24 oct. 1995: Bull. civ. IV. N°247.
49 V. aussi pour un jugement d 'ouverture intervenu entre l
'adjudication et la surenchère : civ. 2è 24 mars 1993 : Bull.
civ. II, n°128.
50 Civ. 2è 23 oct. 1991: Bull. civ. II, n)
283.
51 Nancy 1 7 janv. 1990 : Rev. Proc. Coll. 1991, 210, obs. C.
Saint Alary HOUIN.
Il faut relever que d'après les dispositions dudit acte
uniforme, ce n'est qu'après l'obtention d'un titre que la saisie
conservatoire peut faire l'objet d'une conversion en saisie définitive.
Si l'acte de conversion n'a pas été effectué au jour du
jugement d'ouverture, c'està-dire signifié au tiers saisie, en
cas d'intervention d'un tiers, dans les saisies de créances, ou dans le
cas contraire, par exemple en matière de saisie conservatoire
préalable à une saisievente, peut-il encore être
effectué après le jugement d'ouverture ? La jurisprudence apporte
à cette question une réponse négative52. Seule
la demande de paiement contenue dans l'acte de conversion emporte attribution
immédiate au profit du créancier de la créance saisie
conservatoire et non la saisie conservatoire elle-même53.
Cette règle, qui a essentiellement vocation à jouer en
matière de saisie conservatoire de créance, joue à
l'identique en matière de saisie conservatoire préalable à
une vente54.
L'impossibilité de la conversion laisse-t-elle
cependant subsister les effets attachés à la saisie
conservatoire, à savoir d'une part l'affectation spéciale
prévue à l'art. 2075 al. 1 du
C.civ. et d'autre part le privilège
du gagiste reconnu au créancier saisissant par l'art. 2073 du
C. civ.? Alors que les juridictions de fond étaient
hésitantes sur la question55, la Cour de cassation
française a clairement répondu par la négative. La saisie
conservatoire doit faire l'objet d'une mainlevée faute de
possibilité de conversion après le jugement d'ouverture et ses
effets sont ainsi anéantis.
Pendant combien de temps une telle sanction pourra-t-elle
être appliquée ?
52 Com. 19 juillet 1994 : D. 1995, 479, note J. PRE VA
ULT.
53 T. G.I Lyon 26 septembre 1995 : Rev. Proc. Coll. 1996,
343, n°1, obs. P CANET.
54 Com. 2 février 1999 : D. 1999, I.R. 63.
55 V. pour la conservation de l 'affectation spéciale
et du privilège gagiste : T. G.I. Lyon 20 fév. 1996 : D. 1996, I.
R. 188.
Paragraphe 2 : La période de la paralysie des voies
d'exécution
L'ouverture des procédures collectives entraîne
la paralysie des voies d'exécution pendant une période
déterminée. Cette période diffère selon qu'on a
affaire à des voies d'exécution interdites (B) ou simplement
suspendues (A).
A- La période de « la suspension »
des voies d'exécution
L'esprit des articles 9 al.2 et 75 al. 1 de l'Acte uniforme
sur les procédures collectives d'apurement du passif
révèle que la décision d'ouverture d'une procédure
collective « suspend » l'exercice de toute voie
d'exécution ainsi que les mesures conservatoires. Le verbe suspendre
signifie interrompre pour un temps. On ne peut toutefois interrompre que
ce qui a déjà été engagé. Pour bien
comprendre le phénomène et la période de suspension, il
faut faire une distinction entre le règlement préventif d'une
part et le redressement judiciaire et la liquidation des biens d'autre part.
Dans le règlement préventif, la suspension
concerne les voies d'exécution engagées par les créanciers
antérieurs à la décision d'ouverture de la
procédure collective. C'est dire que toute voie d'exécution qu'il
s'agisse d'une saisie conservatoire ou exécutoire engagée avant
la décision d'ouverture doit être interrompue. Mais une nuance
apparaît cependant : estce que cette suspension concerne toutes les voies
d'exécution entamées avant l'ouverture des procédures
collectives ?
La réponse à cette question dépend de
l'interprétation donnée à l'article 9 al. 1 et 2 de
l'AUPCAP. Au terme de l'alinéa 1, « La décision
prévue par l 'article 8 ci-dessus suspend ou interdit toutes les
poursuites individuelles tendant à obtenir le paiement des
créances désignées par le débiteur et nées
antérieurement à ladite décision ». Cet
alinéa 1er doit être
rapproché de l'article 5 alinéa 2 d'après
lequel la requête adressée par le débiteur au
président de la juridiction compétente «indique les
créances pour lesquelles le débiteur demande la suspension des
poursuites individuelles ». L'alinéa 2 précise
« La suspension concerne aussi bien les voies d'exécution que
les mesures conservatoires ». L'alinéa 1 de cet article parle
de la suspension des poursuites individuelles tendant à obtenir le
paiement des « créances désignées par le
débiteur » ; ce qui laisse logiquement penser que la
suspension ne concerne que les créances désignées par le
débiteur. Cette analyse peut-elle a fortiori s'appliquer à
l'alinéa 2 ? Il y a lieu d'y penser. Car les voies d'exécution ne
s'exercent que sur les créances, et rien n'empêche que de telles
créances ne soient pas désignées par le
débiteur.
Dans le redressement judiciaire et la liquidation des biens,
la suspension s'analyse autrement. A ce propos, l'article 75 alinéa
1er énonce : « La décision d'ouverture
suspend ou interdit toutes les poursuites individuelles tendant à faire
reconnaître des droits et des créances ainsi que toutes les voies
d 'exécution tendant à en obtenir le paiement, exercées
par les créanciers composant la masse sur les meubles et immeubles du
débiteur. »
Contrairement à ce qui a été dit plus
haut sur le règlement préventif, ici, la volonté du
débiteur n'a aucune influence sur les poursuites suspendues. C'est donc
à l'égard de toutes les créances que cette mesure
s'applique. Elle s'applique à tous les créanciers composant la
masse. Cette période de suspension s'étend
généralement à toute la période
suspecte56. La période suspecte est une notion qui constitue
l'une des pierres angulaires du droit des procédures
collectives57.
On peut noter qu'en général, la période
de suspension des voies d'exécution est cette période là
qui précède le jugement d'ouverture. Cette période est
qualifiée de suspecte dans le redressement judiciaire et la liquidation
des biens. La période de l'interdiction des voies
56 C'est la période allant du jour de la cessation des
paiements à la décision d'ouverture (art. 67 AUPCAP. Elle peut s
'étendre au maximum sur 18 mois.
57 Paul-Gérard POUGOUE et Yvette KALIEU, op. cit.
n° 134.
d'exécution de son côté se situe plutôt
après la décision d'ouverture de la procédure
collective.
B- La période de l' « interdiction » des
voies d'exécution
Les articles 9 al.2 et 75 al. 1er parlent aussi de
l'interdiction des voies d'exécution. Dans ce cas, il s'agit des voies
d'exécution non encore entamées avant l'ouverture des
procédures collectives. Parler de l'interdiction en indexant les voies
d'exécution commencées après l'ouverture de la
procédure collective ne devrait pas créer de doute sur
l'identité des destinataires de l'interdiction. Ces destinataires sont
bel et bien les créanciers antérieurs à la décision
d'ouverture. Comme dans le cas de la suspension, la période de
l'interdiction doit s'apprécier selon que l'on se trouve dans le
règlement préventif ou dans le redressement judiciaire et la
liquidation des biens. Dans tous ces cas la période de l'interdiction va
du jugement d'ouverture au jugement de clôture de la procédure
collective concernée.
Dans le règlement préventif, une fois de plus
l'interdiction des voies d'exécution concerne les créanciers
antérieurs au jugement d'ouverture dont les créances ont
été désignées par le débiteur. Ces
créanciers peuvent être chirographaires, ou titulaires de
sûretés. La décision de suspension des voies
d'exécution dans le règlement préventif est suivie par la
désignation d'un expert. Cet expert a pour mission de faire un rapport
sur la situation économique et financière du débiteur et
les perspectives de redressement proposées par celuici. En effet la
suspension ayant un caractère provisoire, il faut que le
tribunal qui décidera par la suite de confirmer ou d'annuler la
décision ait suffisamment d'éléments pour se
décider. Cette mesure provisoire s'applique pendant une période
de deux mois au maximum, période impartie a l'expert pour le
dépôt de son rapport. En cas d'homologation du concordat
préventif, la période de l'interdiction pourra
aller jusqu'à trois ans58. Toutefois, lorsque le concordat
comporte des délais n'excédant pas deux ans, le tribunal peut
rendre la période d'interdiction opposable à tous les
créanciers même à ceux qui ont refusé tout
délai ou toute remise.
Dans le redressement judiciaire et la liquidation des biens,
l'interdiction concerne toujours les créanciers antérieurs
à l'ouverture de la procédure collective, seulement dans ces cas,
ils sont désignés sous le vocable de masse des créanciers.
Il leur est interdit d'exercer aucune voie d'exécution jusqu'à la
fermeture de la procédure. La période d'interdiction ici
diffère selon qu'il s'agit du redressement judiciaire ou de la
liquidation des biens.
La fermeture du redressement judiciaire qui correspond
à la fin de l'interdiction des voies d'exécution dépend de
l'homologation ou non du concordat de redressement par le tribunal. Dès
que les créanciers qui auront été préalablement
informés des propositions concordataires procèdent au vote du
concordat, il revient au tribunal de se prononcer. Le tribunal peut prendre une
décision d'homologation ou de rejet. Lorsqu'il y a homologation celle-ci
produit des effets dont celui qui nous intéresse est la cessation des
effets du redressement judiciaire. Dès le jugement d'homologation, il
n'y a plus interdiction des poursuites individuelles, et, la masse est
dissoute. Seulement les voies d'exécution ne pourront être
exercée que conformément à la décision prise par la
masse concordataire59. Le concordat peut être rejeté
soit parce qu'il n'est pas sérieux, soit parce que l'entreprise du
débiteur n'éprouve aucune difficulté. Dans ce cas-ci les
créanciers sont libres d'exercer leurs voies d'exécution. Dans ce
cas là il s'agira plutôt pour le juge de prononcer la liquidation
des
58 Pour le débat autour de la limitation de ce
délai, V. P. G. POUGOUE et Y KALIEU, op.cit. n°193.
59 On imagine ici par exemple qu 'une créance que le
débiteur s 'est engagé à payer dans 2 mois n 'ait pas
été faite. Alors ce n 'est qu 'à bon droit que le
créancier titulaire de la créance pourra exercer les poursuites
à travers les voies d 'exécution.
biens qui a ses effets propres. Il y a également
conversion en liquidation des biens en cas d'annulation ou de résolution
du concordat60.
Dans la liquidation des biens enfin, la situation s'analyse
autrement. Les saisies immobilières sont autorisées mais ne sont
pas exercées individuellement par les créanciers mais par leur
représentant qui est le syndic. Les autres saisies sont toujours
interdites et ne pourront être reprises qu'en cas de clôture de la
procédure pour insuffisance d'actif. Car en cas de clôture pour
extinction du passif61, aucun créancier n'a plus rien
à revendiquer, et par conséquent les voies d'exécution
interdites sont simplement caduques.
Comme on le constate, le blocage des voies d'exécution
par l'ouverture d'une procédure collective est fondé sur le fait
que la procédure collective empêche l'exercice d'une saisie. Cet
empêchement est dû au fait qu'elle dessaisit le débiteur de
ses biens en les rendant indisponibles. Surtout faut-il relever que le
traitement des créanciers doit être assuré collectivement.
Les voies d'exécution paralysées sont diverses et leur suspension
ou interdiction s'étendent sur une période précise. Cette
paralysie des voies d'exécution a en outre un champ d'application bien
précis.
60 Pour la distinction entre annulation et résolution
du concordat, lire P.G POUGOUE et Y. KALIEU, op. cit. n°240 et s.
61 C'est une hypothèse rare en pratique vu le nombre
de liquidation judiciaire engagée depuis l'entrée en vigueur de l
'A UP CAP.
CHAPITRE 2 : CHAMP D'APPLICATION DU BLOCAGE DES VOIES
D'EXECUTION
Les articles 9 al. 2 et 75 al. 1er de l'Acte
uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du
passif énoncent clairement que l'ouverture d'une procédure
collective (règlement préventif, redressement judiciaire et
liquidation des biens) contre un débiteur entraîne l'interdiction
ou la suspension des voies d'exécution ainsi que les mesures
conservatoires. Pour apurer le passif du débiteur, ces dispositions
décident que la décision d'ouverture d'une procédure
collective empêche l'exercice de toute voie d'exécution. Cette
suspension ou cette interdiction ne concerne que certaines personnes
précises (Section 1). L'absence de voies de recours contre cette mesure
consacre à cet empêchement un caractère d'ordre public donc
aucune juridiction ne peut ignorer (section 2).
Section 1 : Champ d'application quant aux personnes
La décision de suspension ou d'interdiction des voies
d'exécution est une règle classique dans les procédures de
règlement du passif. Elle a pour but d'organiser collectivement ces
procédures. La mesure s'applique en faveur du débiteur
(Paragraphe 1) au profit collectif des créanciers et leur est
individuellement préjudiciable (Paragraphe 2).
Paragraphe 1 : L'application de la mesure au
bénéfice du débiteur
Il convient de déterminer le débiteur
concerné par la mesure (A) car alors il faudra le distinguer de celui
qui est extérieur à la suspension des voies d'exécution
(B).
A- Le débiteur concerné par la
mesure
Les personnes au bénéfice desquelles s'applique
le blocage des voies d'exécution sont les débiteurs auxquels
s'appliquent les mesures prises par l'ouverture d'une procédure
collective. C'est le lieu de souligner que contrairement à l'opinion
émise par certains auteurs notamment le Professeur
SAWADOGO62, le règlement préventif doit être
considéré comme une procédure collective comme le
redressement judiciaire et la liquidation des biens. Cette proposition est
vraie pour au moins trois raisons : d'abord, la loi le considère
expressément comme une procédure collective (art. 1er
AUPCAP) ; ensuite, comme les autres procédures, le
règlement préventif est une procédure
judiciaire63 ; enfin, les créanciers concernés par
cette procédure sont aussi traités
collectivement64.
Après cette clarification, il faut noter que les
procédures collectives sont destinées à soigner les
difficultés des personnes mentionnées à l'article 2 de
l'AUPCAP qui se trouvent dans la situation visée par le même
article. Ces personnes peuvent être : toute personne physique ou morale
commerçante, toute personne morale de droit privé non
commerçante ainsi que toute entreprise publique ayant la forme d'une
personne morale de droit privé65. Les personnes non
éligibles à la procédure collective qui ne peuvent pas
payer leurs dettes sont en état de déconfiture, laquelle se
caractérise par une inorganisation ; le paiement sera le prix de la
course. Cette désignation des personnes pouvant faire l'objet d'une
procédure collective et par voie de conséquence d'une suspension
des voies d'exécution permet de les regrouper en deux grandes
catégories à savoir les personnes physiques et les personnes
morales.
62 Cet auteur pense que le règlement
préventif ne doit pas être considéré comme une
procédure collective dans la mesure oh il intervient avant la cessation
des paiements, et est ouverte à l 'initiative exclusive du
débiteur. V. SA WADOGO (F., M.), op. cit. n°3.
63 Contrairement au règlement amiable de la loi
française n°84-148 du 1er mars 1984 relative à la
prévention et au règlement amiable des difficultés des
entreprises auquel l 'auteur semble comparer.
64 V. supra.
65 Relativement au droit comparé, il faut dire qu 'en
France, la procédure collective est applicable même aux
agriculteurs et aux artisans.
Dans la catégorie des personnes physiques, on peut
citer les commerçants et les dirigeants des personnes morales. Ces
derniers ne peuvent être condamnés que dans des cas précis
: il en est par exemple en cas d'action en comblement du passif.
En ce qui concerne les personnes morales, l'OHADA fait une
grande innovation dans cette catégorie66. A côté
des personnes morales commerçantes traditionnellement admises, on ajoute
désormais toute personne morale de droit privé et toute personne
publique ayant la forme d'une personne morale de droit
privé67. Pour les personnes morales de droit privé les
sociétés commerciales en particulier, la lecture des textes
permet de déduire qu'une société fictive puisse faire
l'objet d'une procédure collective68.
Seules ces personnes soumises à la procédure
collective verront les voies d'exécution dirigées contre eux se
suspendre. Autrement dit, leurs propres débiteurs n'y sont pas
concernés.
B- Le débiteur extérieur à la
mesure
Dans quelle mesure peut-on envisager un débiteur qui
ressent les effets de l'ouverture d'une procédure collective alors que
les voies d'exécution diligentées contre lui ne sont pas
arrêtées ? La suspension peut-elle ne pas bénéficier
à certains débiteurs ? La question mérite d'être
posée car lorsque l'ouverture de la procédure collective
entraîne le dessaisissement du débiteur69, il reviendra
au syndic qui le représente (dans la liquidation des biens) de recouvrer
ses créances envers ses propres débiteurs.
66 Avant l 'entrée en vigueur de l 'OHADA, seules les
personnes morales commerçantes pouvaient subir une telle
procédure au regard des dispositions du Code de commerce de 1808 qui
était applicable dans la plupart des Etats membres de l'OHADA. V.
Philippe TIGER, les procédures collectives après cessation des
paiements : P.A., OHADA, Numéro spéciale, 13 oct. 2004, PP. 35 et
s.
67 Pour l'application de la procédure collective aux
personnes publiques, V. Venant TCHOKOMAKOUA, La réforme du cadre
juridique des entreprises du secteur public et parapublic : J.P. n°26,
Yaoundé, P. U.A, 1996, PP. 97 et s.
68 V. P. G. POUGOUE et Y. KALIEU, op. cit. n°
26.
69 V. supra.
On en déduit que les débiteurs du
débiteur soumis à la procédure collective,
précisément les personnes tenues envers lui, avec lui ou pour lui
sont extérieurs à la suspension des voies d'exécution. Il
en est ainsi, de ses propres débiteurs, de ses codébiteurs
solidaires, de ses codébiteurs tenus in solidum, de ses cautions.
Cet ensemble de personnes ne bénéficient pas des
effets positifs de la suspension des voies d'exécution. Celles-ci
pourront être exercées envers eux toutes les fois que les
conditions d'exercice sont remplies. Il ne sera autrement que si
eux-mêmes se trouvent dans les situations similaires à celle du
débiteur c'est-à-dire, soit dans une situation financière
et économique difficile mais non irrémédiablement
compromise, soit en état de cessation des paiements. Dans de pareils
cas, leurs propres créanciers subiront eux aussi les préjudices
de la suspension des poursuites.
Paragraphe 2 : L'application de la mesure au
préjudice du créancier
La législation OHADA, tendue vers la recherche du
redressement de l'entreprise et faisant passer au second plan
l'intérêt des créanciers, il était logique qu'elle
réduise sensiblement les droits individuels des créanciers (A).
Mais tous les créanciers du débiteur ne sont pas concernés
par le blocage des voies d'exécution (B).
A- Les créanciers soumis à la suspension
des voies d'exécution
Les articles 9 al.2 et 75 al. 1er de l'acte
uniforme sur les voies d'exécution suspendent ou interdisent toute voie
d'exécution de la part des créanciers antérieurs au
jugement d'ouverture. Désormais, la procédure assure
l'organisation des poursuites. Le « gel » qu'engendrent ces
articles ne peut être nié et est donc patent.
Postérieurement au
jugement d'ouverture, les voies d'exécution sont
suspendues, car la procédure fige le passif. Le jugement d'ouverture
«arrête ou interdit toute voie d'exécution de la part de
ces créanciers (les créanciers antérieurs) tant sur les
meubles que sur les immeubles », dispose les articles 9 al. 2 et 75
al. 1er de l'Acte uniforme précité. En effet, la
procédure entraîne une saisie collective des
créanciers70. Corrélativement, elle fige
l'élément passif du patrimoine du débiteur.
Mais surtout, la procédure collective nie les voies
d'exécution ; voire les détruit purement et simplement. C'est
ainsi que les dispositions de l'acte uniforme précité suspendent
ou interdisent les poursuites individuelles des créanciers
antérieurs. Cependant, la procédure collective " ne supprime
pas les poursuites des créanciers ; elle les canalise dans un moule
unique et collectif "71. Les créanciers sont
désormais placés sur un pied d'égalité et ils
devront même être replacés sur ce pied
d'égalité si un créancier, pressentant des
difficultés financières, avait agi après la cessation des
paiements72. Les procédures collectives organisent un
règlement collectif des dettes de l'entreprise en difficulté et
imposent, pour un certain temps, l'arrêt des poursuites individuelles et
interdit les paiements volontaires des créanciers antérieurs. Ces
atteintes aux droits des créanciers sont nécessaires pour que
soit mis en place le processus de désintéressement collectif.
Seules les voies d'exécution exercées par des
créanciers antérieurs au jugement sont arrêtées ;
les créanciers postérieurs n'auront pas à subir la
suspension des poursuites individuelles ; ils disposent des voies
d'exécution de droit commun73.
70 Sur cette notion ; voir LE CANNU et ALII, Droit des
Entreprises en difficulté, ed GLN Joly, 1994, cité par David
DEFRANCE, Procédure collective et voies d'exécution,
mémoire de D.E.A, Université de LIILE II, 1997- 1998 in
www2.univ-lille2.fr.
71 Voir Le Cannu, Pitron, Sénéchal ; Droit des
entreprises en difficulté, édition GLN Joly, 1994,
n°1163.
72 Cf POLLAND - DULIAN, Le principe d'égalité
dans les procédures collectives, JCP ed G 1998, I, 138, n°6 et
n°12, cité par David DAFRANCE, op. cit.
73 Elles sont appelées voies d'exécution de
droit commun par opposition aux procédures collectives qui sont des
voies d'exécution spéciales. V. infra.
B- Les créanciers non soumis à la
suspension des voies d'exécution
Il est question ici d'envisager les créanciers
antérieurs qui ne sont pas concernés par la décision de la
suspension et surtout les créanciers postérieurs au jugement
d'ouverture encore appelés créanciers de la masse ou
créanciers contre la masse74. D'abord, en ce qui concerne les
créanciers antérieurs et extérieurs à la mesure, on
retrouve implicitement les créanciers de salaires dont les poursuites ne
sont pas suspendues et surtout les créanciers qui n'ont pas
été désignés par le débiteur dans le
règlement préventif.
Les créanciers postérieurs n'auront pas à
subir la suspension des poursuites individuelles ; ils disposent des voies
d'exécution de droit commun. Toutefois, ce droit de poursuite
individuelle n'est reconnu qu'aux créanciers dont la créance est
née régulièrement après le jugement d'ouverture. La
date de naissance de la créance constitue alors le critère
permettant de déterminer si le créancier est soumis aux
interdictions des articles 9 al. 2 et 75 al. 1er de l'acte uniforme
sur les procédures collectives ou non. Les choses sont donc parfaitement
claires et simples.
Le paiement préférentiel de certains
créanciers, en dehors du processus de désintéressement,
s'explique par la volonté affichée de maintenir l'emploi et
l'activité. Mais quelle serait l'utilité de la reconnaissance
d'un droit sans sanction ? Les créanciers, qui assurent le maintien de
l'activité, bénéficient de la faculté d'exercer des
voies d'exécution afin d'assurer une sanction et une garantie de leur
paiement à l'échéance75.
Ainsi, les créanciers postérieurs (c'est
à dire ceux dont la créance est née postérieurement
au jugement d'ouverture) échappent au principe de l'interdiction des
paiements énoncés par les articles 9 et 75 de l'AUPCAP. Le
créancier postérieur est traditionnellement
présenté comme bénéficiant d'une situation
particulièrement avantageuse
74 V. supra.
75 V. infra.
au sein de la procédure collective. Cette situation
crée un privilège de procédure au profit des
créanciers postérieurs, qui se manifeste de deux façons.
Tout d'abord, ce créancier a un droit au paiement à
l'échéance ; ensuite, s'il n'obtient pas ce paiement à
l'échéance, il participera aux répartitions dans le cadre
collectif, mais à un rang préférentiel. Le
créancier postérieur, non réglé à
l'échéance, bénéficie d'un droit de priorité
par rapport aux créanciers antérieurs.
Comme on le constate, il y a d'un côté des
débiteurs et créanciers concernés par le blocage des voies
d'exécution et de l'autre des débiteurs et créanciers dont
la mesure ne les atteint pas. Par conséquent ceux-ci ne sont pas
concernés par le caractère d'ordre public de la mesure.
Section 2 : Champ d'application quant aux juridictions
La décision d'ouverture d'une procédure
collective interdit ou suspend l'exercice de toute voie d'exécution
ainsi que les mesures conservatoires (art. 9 et 75 AUPCAP). Cette
décision a incontestablement des effets sur les voies d'exécution
qui étaient pendantes76 devant le juge des voies
d'exécution (paragraphe 1). Cette mesure de suspension a un
caractère d'ordre public aussi bien interne qu'international (paragraphe
2).
Paragraphe 1 : Les juridictions soumises à la
suspension
La décision de suspension ou d'interdiction des voies
d'exécution dessaisit par la même occasion le juge de
l'exécution de sa compétence (A). Reste posée la question
des autres juridictions (B).
76 V. 1ère Partie, chapitre 1, section 2,
paragraphe 1 supra.
A- La soumission non équivoque des juridictions
civiles
Parler de la soumission des juridictions civiles à la
décision de suspension des voies d'exécution revient à
s'interroger sur le problème devant le juge des voies
d'exécution. Quel est le juge compétent pour dessaisir le juge
des voies d'exécution ? (1) Quel est le sort de la décision de
suspension auprès dudit juge ? (2).
1- Le juge compétent pour ordonner la
suspension
Aux termes de l'article 3 de l'AUPCAP, le règlement
préventif, le redressement judiciaire et la liquidation des biens
relèvent de la juridiction compétente en matière
commerciale77. L'alinéa 2 poursuit en disant « Cette
juridiction est également compétente pour connaître de
toutes les contestations nées de la procédure collective, de
celles sur lesquelles la procédure collective exerce une influence
juridique, ainsi que de celles concernant la faillite personnelle et les autres
sanctions... »
L'Acte uniforme portant organisation des procédures
simplifiées de recouvrement et des voies d'exécution OHADA en son
article 49 énonce : « La juridiction compétente pour
statuer sur tout litige ou toute demande relative à une mesure
d'exécution forcée ou à une saisie conservatoire est le
président de la juridiction statuant en matière d 'urgence ou le
magistrat délégué par lui ».
Il ressort de la lecture combinée de ces deux
dispositions que la juridiction compétente en matière commerciale
est la juridiction des procédures collectives et des difficultés
liées auxdites procédures d'une part, et que le président
de la juridiction statuant en matière d'urgence ou le magistrat
délégué par lui est le juge des voies d'exécution
et des difficultés
77 Au Cameroun cette juridiction est soit le T.P.I, soit le
T.G.I selon le montant de la demande.
d'exécution d'autre part78. Ces dispositions
posent quelques problèmes : la procédure collective qui survient
lorsque le débiteur subit une voie d'exécution peut-elle
être considérée comme une difficulté
d'exécution ? Inversement, la poursuite d'une voie d'exécution
suspendue par la procédure collective peut-elle être
considérée comme une contestation née de la
procédure collective ? A qui revient la compétence de
résoudre de telles difficultés ?
La réponse à ces questions diffère selon
qu'elle est envisagée du côté de la loi ou du
côté des tribunaux. Du côté de la loi les articles 9
et 75 AUPCAP énonce que la décision d'ouverture d'une
procédure collective suspend ou interdit l'exercice de toute voie
d'exécution ainsi que les mesures conservatoires. La loi uniforme donne
ainsi compétence au juge des procédures collectives de se
prononcer sur la suspension des voies d'exécution79. Mais
qu'adviendra-t-il si cette décision de suspension n'est pas
respectée ? Autrement dit, le non respect de la décision de
suspension par le juge de l'exécution doit-il être
considéré comme une contestation née de la
procédure collective ?
Le juge des voies d'exécution appelé à se
prononcer sur la question se déclare compétent et ne tarde pas
à prononcer « la discontinuation des poursuites
»80.
A titre de droit comparé, le juge français
reconnaît compétence au tribunal de la procédure collective
pour connaître de l'action en nullité du paiement résultant
d'une saisie attribution appliquée en période
suspecte81.
La compétence de la discontinuation revendiquée
par le juge de l'exécution ne saurait confondre l'ouverture d'une
procédure collective à une difficulté d'exécution.
Car la procédure collective s'analyse plus comme une voie
d'exécution collective. Toutefois il n'y a
78 Sur la controverse sur l 'identité du juge
compétent en matière des voies d 'exécution, lire Henri
TCHANTCHOU, Le contentieux de l 'exécution et des saisies dans le
nouveau droit OHADA (article 49 AUPSRVE) ; J.P, N° 46, Yaoundé, P.
U.A. 2001, pp. 98 à 105.
79 Ces dispositions sont bien appliquées par les juges
dans la pratique. Voir par exemple T. G.I de Ouagadougou, jugement N° 234
du 29 mars 2000 : ohadata J-04-180 ; Tribunal régional hors classe de
Dakar, jugement N° 1538 du 8 août 2000 : ohadata J-04-342.
80 Voir à ce sujet, Tribunal de travail hors classe de
Dakar, Ord. de référé n° 81/465 du 4 mars 2003,
Affaire MOUSTAPHA KEBE contre Papa SAMBA KAMA et 149 autres: Site
lexinter.net/jurafrique.
81 C.A. Limoges, 20 février 1996, Rev. Proc. Coll.
1997, P. 49, Obs. CANET
pas de mal à ce que le juge de l'exécution se
déclare compétent pour la circonstance. Malgré l'ouverture
de la procédure collective, il est le juge de droit commun des voies
d'exécution, et est compétent pour prononcer la mainlevée
d'une saisie.
Le juge des voies d'exécution à notre avis ne
saurait être le juge exclusif en la matière ; la procédure
collective étant une voie d'exécution collective, le juge des
procédures collectives ne devrait pas décliner sa
compétence lorsqu'il est face à une telle situation. On en
déduit qu'il y a une sorte de compétence partagée en la
matière entre le juge de l'exécution et le juge des
procédures collectives.
2- Le sort de la décision de suspension devant
le juge de l'exécution
Comme il a été dit plus haut, le juge des
procédures collectives est aussi compétent « pour
connaître les contestations nées de la procédure collective
». Jointe aux dispositions relatives à la paralysie des voies
d'exécution par l'ouverture des procédures collectives, cette
disposition de l'AUPCAP signifie que la décision du juge des
procédures collectives dessaisit le juge des voies d'exécution.
Comment comprendre alors la discontinuation des poursuites prononcées
par le juge de l'exécution de Dakar au sujet d'un débiteur en
« liquidation des
biens »82 ?
Disons tout simplement qu'au regard du droit OHADA cette
compétence n'est pas expressément attribuée au juge de
l'exécution. Cependant, en tant que juge de droit commun des voies
d'exécution on ne saurait lui refuser une telle compétence.
Seulement le juge des procédures collectives au regard du droit OHADA ne
saurait non plus se déclarer incompétent. Le raisonnement qui
attribue la compétence aussi au juge des procédures collectives a
une démarche logique car la procédure collective s'analyse comme
une voie
82 Tribunal hors classe de Dakar, op. Cit. Il faut relever
que ledit jugement parle de « liquidation judiciaire » au lieu de
redressement des biens.
d'exécution collective. Mais cette compétence
partagée entre le juge de l'exécution et le juge des
procédures collectives ne devrait se comprendre que par rapport à
l'interprétation des textes énoncés plus
haut83.
En somme, il faut retenir que le juge compétent pour
ordonner la suspension des poursuites est incontestablement le juge des
procédures collectives. Lorsque malgré cette décision de
suspension un créancier continue à exercer les voies
d'exécution, la jurisprudence reconnaît que le juge de
l'exécution puisse ordonner la discontinuation des
poursuites84. Mais rien ne s'oppose à ce que la demande en vu
d'obtenir la discontinuation soit adressée plutôt au juge des
procédures collectives. En attendant que la haute
juridiction85 puisse attribuer exclusivement la compétence
à l'une quelconque de ces juridictions, il faut admettre que la
compétence est partagée entre le juge des voies
d'exécution et le juge des procédures collectives. Un tel
raisonnement ne saurait tenir lorsqu'on a affaire aux juges administratif et
pénal.
B- La question de la suspension devant les juridictions
autres que civiles
Parler de la suspension des voies d'exécution devant
les autres juridictions autres que civiles revient à s'interroger sur
l'origine des titres exécutoires et des voies d'exécution
menées par les juges pénal (2) et administratif (1).
1- Le problème de la suspension devant le juge
administratif
L'article 33 AUPSRVE cite parmi les titres exécutoires
« les décisions juridictionnelles revêtues de la formule
exécutoire et celles qui sont exécutoires sur minute
».
83 V. l'art.3 AUPCAP et art. 49 AUPSRVE.
84 V. Tribunal Hors classe de Dakar, op. cit.
85 La haute cour fait référence à la
Cour commune de justice et d 'arbitrage.
L'article 30 al. 1er de son côté
déclare que l'exécution forcée et les mesures
conservatoires ne sont pas applicables aux personnes qui
bénéficient d'une immunité d'exécution.
L'alinéa 2 ajoute que « les dettes certaines, liquides et
exigibles des personnes morales de droit public ou des entreprises publiques
quelle qu 'en soit la forme et la mission donne lieu à compensation
»86.
De son côté, l'acte uniforme sur les
procédures collectives énonce que les procédures
collectives « sont applicables à toute entreprise publique
ayant la forme d 'une personne morale de droit privé qui cesse ses
paiements ».
A la lecture attentive de ces diverses dispositions, il
apparaît que les voies d'exécution sont réticentes en ce
qui concerne les personnes publiques et que les procédures collectives
s'appliquent plus ou moins à ces personnes. C'est ainsi que l'entreprise
publique ayant la forme d'une personne morale de droit privé peut faire
l'objet d'une procédure collective mais non d'une voie
d'exécution. Par conséquent la suspension des voies
d'exécution n'est pas envisageable.
Cette suspension est-elle envisageable à l'égard
des autres personnes morales de droit public ? La réponse
négative nous vient de l'exécution des décisions de
justice administrative. A ce propos, il faut relever que l'exécution des
décisions des juridictions administratives à la différence
de celles rendues par le juge judiciaire, ne comporte pas de formule
exécutoire à l'égard des personnes publiques enjoignant
aux agents publics de prêter main forte à
l'exécution87. Pourtant l'une des conditions d'exercice d'une
voie d'exécution est l'obtention d'un titre exécutoire qui peut
être une décision juridictionnelle revêtue de la formule
exécutoire (art. 33 AUPSRVE).
Le raisonnement devant le juge pénal s'analyse
différemment.
86 V. aussi les commentaires de Philippe TIGER, Le droit des
affaires en Afrique, Que sais-je ? PUF 1999, P. 100.
87 Charles DEBBASCH et Jean-Claude RICCI, Contentieux
administratif, 4è édition ; D. 1985, n° 627.
2- Le problème de la suspension devant le juge
pénal
L'acte uniforme OHADA sur les voies d'exécution ne
règlemente que les saisies sur les biens. Or le juge pénal est le
juge des peines d'emprisonnement et d'amendes. Si l'on met de côté
la peine d'emprisonnement qui ne relève pas des voies d'exécution
de l'OHADA, on peut s'interroger sur la question de savoir si l'on peut
recourir à une voie d'exécution pour recouvrer une peine
d'amende.
Si l'on s'en tient à la logique de l'Acte uniforme sur
les voies d'exécution, rien n'empêche à ce qu'on recouvre
une peine d'amende par l'exercice des voies d'exécution du moment
où elle s'analyse comme << une créance certaine,
liquide et exigible » (art. 31). Dans un tel cas, l'Etat qui est le
titulaire de la créance doit-il suspendre où arrêter
l'exercice de ses voies d'exécution en cas de survenance d'une
procédure collective ouverte contre le condamné ?
La réponse à cette question est sans nul doute
affirmative, car la décision d'ouverture suspend ou interdit <<
aussi bien les voies d'exécution que les mesures conservatoires
». Les créanciers dont les voies d'exécution sont
bloquées sont aussi bien les créanciers chirographaires, les
créanciers titulaires de sûretés que ceux titulaires de
privilèges généraux ; et l'Etat fait partie de cette
dernière catégorie.
Donc la décision d'ouverture des procédures
collectives a une influence sur la décision rendue par le juge
pénal dans tous les cas où cette décision fait l'objet de
mesures d'exécution forcée telle que règlementées
par l'OHADA. Cette influence qui est l'interdiction des voies
d'exécution constitue une mesure d'ordre public dans les
procédures collectives.
Paragraphe 2 : Le caractère d'ordre public de la
suspension des voies d'exécution
La paralysie des voies d'exécution par l'ouverture
d'une procédure collective telle qu'énoncée par les
articles 9 et 75 de l'acte uniforme sur les procédures collectives est
une mesure d'ordre public aussi bien sur le plan interne qu'international (A).
Toute contravention à cette mesure doit faire l'objet d'une sanction
(B).
A- La suspension des voies d'exécution, une mesure
d'ordre public
La suspension des voies d'exécution est une mesure d'ordre
public aussi bien sur le plan interne (1) qu'international (2).
1- L'ordre public interne
La décision de suspension des poursuites individuelles
qui inclut la suspension des voies d'exécution ne peut faire l'objet
d'aucune voie de recours. Cette absence de voies de recours explique le
caractère d'ordre public de la suspension et est justifiée par le
fait qu'il s'agit d'une mesure temporaire et urgente88.
Le principe de l'arrêt des voies d'exécution qui
est un principe d'ordre public est confirmé par la
jurisprudence89. Il ne s'applique selon les articles 9 al. 2 et 75
al.1 qu'aux créanciers dont la créance a son origine
antérieurement au jugement d'ouverture90. Ces textes
88 V. P. G. POUGOUE et Y. KALIEU, op. cit. n°
54.
89
Cass. Com. 6 décembre
1994, Quot. Jur. 12 janvier 1995, p. 4. 90
Cass. Com. 28 février
1995, Bull. Civ. IV, n°59.
utilisent donc le clivage reposant sur le caractère
antérieur ou postérieur de la créance afin de
déterminer son régime91
Le caractère d'ordre public de la suspension doit
être respecté par toutes les juridictions de l'Etat dans lequel
est ouverte une procédure collective. Cet ordre public s'applique
différemment dans un cadre international.
2- L'ordre public international
Avant de parler de la suspension des voies d'exécution
comme une mesure d'ordre public international, il importe au préalable
de définir ce qu'on entend par procédure collective
internationale. Au regard de la diversité des systèmes juridiques
en présence sur le plan international, il faut considérer comme
relevant des procédures collectives internationales les faillites et
autres insolvabilités internationales pouvant conduire au redressement
ou à la liquidation de l'entreprise et comportant un certain
redressement du débiteur au profit d'un syndic ou d'un organe
équivalent dès lors que le débiteur n'est plus en mesure
de payer ses dettes92. Toutefois il y a lieu de souligner qu'il n'y
a de procédure collective internationale que si les activités ou
les biens du débiteur se localisent dans au moins deux Etats
différents.
Sans vouloir verser dans la controverse doctrinale sur
l'unité ou la pluralité des procédures collectives
internationales93, il importe de se consacrer sur la position de
l'OHADA.
D'abord, l'OHADA légifère sur les effets
à l'étranger d'une procédure ouverte dans un Etat. Aux
termes de l'article 247 AUPCAP, les décisions d'ouverture et de
clôture des
91 Marie Hélène MONSERIE, Entreprises en
difficulté-Redressement judiciaire (Période d'observation),
Rep. Com. Dalloz, Mars
1997.
92 F. M. SAWADOGO, op. cit. n°387.
93 Pour le développement de ces théories, V. SA
WADOGO précité, n° 389 et s.
procédures collectives ainsi que celles relatives aux
contestations acquièrent l'autorité de la chose jugée dans
les autres Etats parties. Cette disposition laisse logiquement penser que la
décision qui arrête les voies d'exécution produit ses
effets dans tous les Etats membres de l'OHADA.
Ensuite, l'OHADA émet l'hypothèse d'ouverture de
plusieurs procédures collectives. Nonobstant le principe de
l'unité de procédure, il est possible que plusieurs
procédures collectives soient ouvertes contre un même
débiteur lorsque par exemple celui-ci a des établissements
situés dans des territoires différents. A ce propos, l'article
251 AUPCAP dispose que la procédure ouverte sur le territoire où
le débiteur a son principal établissement est appelée
« procédure principale » et que celle ouverte sur le
territoire où le débiteur n'a pas son principal
établissement est appelée « procédure secondaire
». Les créanciers pourront dans ce cas produire dans toutes
les procédures. En conséquence, leurs voies d'exécution
seront suspendues ou interdites dans toutes ces procédures.
Il convient de relever que le caractère d'ordre public
international de la suspension ne s'étend que dans les Etats membres de
l'OHADA, ce qui laisse un doute sur les voies d'exécution menées
en dehors de ce cadre. Lesdites voies d'exécution seront alors à
l'abri des sanctions de l'Acte uniforme sur les procédures
collectives.
B- La sanction de la violation de la
suspension
La suspension ou l'interdiction des voies d'exécution
par la décision d'ouverture d'une procédure collective
d'apurement du passif est une mesure d'ordre public dont la violation
entraîne une sanction. Cette sanction est principalement
l'inopposabilité à la masse des créanciers (1). Le juge
appelé à se prononcer doit prononcer la mainlevée des
voies d'exécution ou la discontinuité (2).
1- La nature de la sanction : l'inopposabilité et
la nullité
La procédure collective ne se contente pas de figer le
passif, de bloquer l'exercice des voies d'exécution. Parfois, elle les
terrasse, notamment par le jeu des inopposabilités de la période
suspecte ou les nullités des voies d'exécutions exercées
postérieurement à la décision d'ouverture. Il s'agit pour
les inopposabilités d'éviter qu'un créancier ne se taille
«la part du lion», au moyen d'une voie d'exécution
pratiquée antérieurement à la procédure ; pour les
nullités qu'aucune mesure d'exécution ne soit prise au
mépris de la décision de suspension des poursuites
individuelles.
2- Les effets de la sanction
La sanction du mépris de la suspension entraîne soit
la main levée de la saisie (a), soit la discontinuité de celle-ci
(b).
a- La mainlevée de la saisie
En vertu de la règle saisie sur saisie ne vaut, le
débiteur soumis à une procédure collective ne devrait plus
faire l'objet d'une voie d'exécution. Etant dessaisi de ses biens qui
sont rendus indisponibles, tout créancier qui exercerait une saisie sur
ces biens fera l'objet d'une poursuite. Cette poursuite doit aboutir à
la mainlevée de la saisie. Cette mainlevée qui n'est pas
règlementée par l'Acte uniforme OHADA portant organisation des
procédures collectives d'apurement du passif doit se faire selon les
règles de droit commun ; c'est-à-dire selon les dispositions de
l'Acte uniforme sur les voies d'exécution. Il est alors logique que
la
mainlevée ressortisse de la compétence du juge de
l'exécution. C'est d'ailleurs lui qui s'est déclaré
compétent pour prononcer la discontinuation des poursuites.
b- La discontinuité de la poursuite
La discontinuation des poursuites en parlant des voies
d'exécution n'est qu'une application raffinée de la
mainlevée. C'est du moins ce que l'on peut déduire du jugement
rendu par le Tribunal du Travail Hors Classe de Dakar en date du 4 mars 2003
dans l'espèce Moustapha KEBE contre Papa Samba KAMA et 149
autres94. Dans son raisonnement, le juge pour ordonner la
discontinuation des poursuites déclare « Qu 'il s'y ajoute au
demeurant, qu 'il n 'est pas contesté que ladite société
est en liquidation judiciaire ; Qu 'or, aux termes de l 'article 75 de l 'Acte
Uniforme sur le redressement et la liquidation judiciaire, « la
décision d 'ouverture suspend ou interdit toutes les poursuites
individuelles... >>. >>.
Comme on peut le comprendre la décision de discontinuation
des poursuites n'est qu'une autre façade de la demande de
mainlevée sur les saisies pratiquées.
94 V. supra.
CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE
A l'issue de cette première partie, on ne peut que
constater l'effet perturbateur, parfois même ravageur de la
procédure collective ; tant il est vrai que procédure collective
et voies d'exécution répondent de deux logiques opposées :
l'une, l'égalité des créanciers ; les autres le
privilège du premier saisissant. Mais faut-il en déduire que dans
ce bras de fer entre procédures collectives et voies d'exécution,
ce sont celles là qui partent absolument gagnantes ? La
complexité du droit des procédures collectives ne permet pas de
donner une réponse positive à cette interrogation. Car s'il est
incontestable que la procédure collective paralyse les voies
d'exécution, il n'en demeure pas moins vrai que les voies
d'exécution puissent gagner leur point dans le jeu. Car tout au long de
la procédure collective, on assiste de plus en plus à une sorte
d'admission des voies d'exécution dans les procédures
collectives.
DEUXIEME PARTIE L'ADMISSION D'EXCEPTION DES VOIES
D'EXECUTION DANS LES PROCEDURES COLLECTIVES
Les voies d'exécution peuvent-elles faire bon
ménage avec les procédures collectives ? Si l'on ne tient compte
que des mesures édictées par les articles 9 al. 2 et 75 al. 1, on
risque de répondre par la négative. Pourtant, une analyse
approfondie de l'exercice des procédures collectives permet d'approcher
la solution contraire. D'abord, comme il a été dit dans la
première partie95, malgré la décision de
suspension des poursuites, certains créanciers sont admis à
exercer leurs voies d'exécution ; il en est par exemple des
créanciers postérieurs et des créanciers de salaire.
Ensuite l'effet de l'attribution immédiate de certaines saisies s'oppose
à ce qu'elles soient soumises à la décision de suspension
des voies d'exécution. Enfin il faut noter que d'une certaine
manière l'arrêt des voies d'exécution par l'ouverture des
procédures collectives n'est pas sans solution, car les
procédures collectives s'observent comme des voies d'exécution
collectives (Chapitre 2). A côté de cette admission indirecte des
voies d'exécution dans les procédures collectives, on observe de
plus en plus une admission directe, soit pour les besoins de procédures,
soit par la force de certaines voies d'exécution (Chapitre 1).
95 V. chapitre 2, section 1, paragraphe 2, B.
CHAPITRE 1 : L'ADMISSION DIRECTE DES VOIES D'EXECUTION
DANS LES PROCEDURES COLLECTIVES
Il est de principe que les procédures collectives
arrêtent les voies d'exécution. Cette perturbation des voies
d'exécution ne les anéantit pas totalement. L'Acte
uniforme96 le dit clairement lorsqu'elle énonce à
l'article 75 al. 6 que « Les actions et les voies d'exécution
non atteintes par la suspension ne peuvent plus être exercées ou
poursuivies au cours de la procédure collective qu 'à l'encontre
du débiteur assisté du syndic en cas de redressement judiciaire
ou représenté par le syndic en cas de liquidation des
biens». Ces voies d'exécution peuvent notamment
cohabiter avec les procédures collectives pour les besoins de la
liquidation. C'est le cas dans la procédure de liquidation des biens
avec la réalisation de l'actif de l'entreprise (Section 2). D'autres
voies d'exécution peuvent jouer dans toutes les procédures
collectives : nous pouvons les qualifier de voies d'exécution
indifférentes à l'ouverture d'une procédure collective
(Section 1).
Section 1 : Les voies d'exécution
indifférentes aux procédures collectives
L'ouverture d'une procédure collective ne place pas
tous les créanciers dans une même situation. C'est ainsi que
pendant que d'aucuns trouvent leurs voies d'exécution
arrêtées, d'autres voient les leurs simplement admises (Paragraphe
1). Certaines voies d'exécution comme la saisie conservatoire des
créances et la saisie-attribution ont des effets qui les rendent aussi
indifférentes à l'ouverture des procédures collectives, on
peut dire que celles-ci sont spécialement admises (Paragraphe 2).
96 Il s 'agit de l 'A UP CAP.
Paragraphe 1 : Les voies d'exécutions simplement
admises
Parmi les voies d'exécution simplement admises,
certaines sont celles qui ne sont pas suspendues par l'ouverture de la
procédure collective d'apurement du passif (A), d'autres celles
exercées sur des créances postérieures (B).
A- Les voies d'exécution non
suspendues
L'ouverture d'une procédure collective qui impose une
discipline collective notamment la suspension des voies d'exécution
n'atteint pas tous les créanciers antérieurs. Il apparaît
que malgré l'ouverture de la procédure collective, certains
créanciers subissent un traitement particulier. Il en est par exemple
des salariés et des créanciers dont le débiteur n'a pas
demandé la suspension des poursuites dans le règlement
préventif.
C'est le lieu de noter que le concordat préventif comme
le concordat de redressement a une nature « contractuelle »
et n'a d'effet qu'entre les parties. Autrement dit, tout créancier
qui n'est pas visé par ce concordat peut exercer librement ses voies
d'exécution. C'est ce que confirme un arrêt de la Cour d'Appel
d'Abidjan en date du 8 Novembre 200297. En l'espèce, le juge
de l'exécution avait ordonné la mainlevée d'une
saisie-attribution pratiquée par le créancier sur les
créances de son débiteur en règlement préventif. Le
juge de l'appel avait jugé que cette décision de mainlevée
« était une mauvaise application de la loi de sorte qu'il
convient d'infirmer l'ordonnance attaquée et statuant à nouveau
de débouter la Sté GOMP-CI de sa demande de mainlevée et
en conséquence de dire que la saisie attribution de créances du 1
8/1 2/2001 produira tous ses effets ».
97 Cour d'Appel d'Abidjan, Arrêt N°1129 du 8
Novembre 2002, Affaire Jean MAZUET contre GOMP- CI : Ohadata J-03-291.
La poursuite des créances salariales se fait aussi sans
préjudice de l'ouverture des procédures collective. C'est ce que
déclare en effet l'Acte uniforme sur les procédures
collectives98. La jurisprudence applique positivement cette
règle de droit en jugeant que les poursuites individuelles pour le
recouvrement des créances salariales ne peuvent être suspendues
par un jugement prononçant le règlement préventif, quelle
que soit la date de naissance de telles créances par rapport à
celle dudit jugement99.
Si l'on admet que les créanciers dont les
créances ne sont pas suspendues par l'ouverture du règlement
préventif en vertu du caractère contractuel du concordat
préventif sont admis à exercer leur voie d'exécution,
l'admission des créances salariales se justifie par le caractère
alimentaire du salaire. Cette admission des voies d'exécution ne cause
pas en principe de préjudice à la procédure collective, ce
qui n'est toujours pas le cas en ce qui concerne les créanciers
postérieurs.
B- Les voies d'exécution exercées sur des
créances postérieures
Il est important de mentionner que les créanciers
postérieurs sont libres d'exercer leurs poursuites à travers
l'exercice des voies d'exécution (1). Quelle est la portée de
cette liberté de poursuite (2).
1- la liberté de poursuite des créanciers
postérieurs
L'ouverture d'une procédure collective impose, pour un
certain temps, l'arrêt des poursuites individuelles et interdit les
paiements volontaires des créanciers antérieurs. Ces
98 V. art.9 al. 3 dudit acte uniforme.
99 Cour d'Appel d'Abidjan, Chambre Civile et Commerciale,
arrêt n° 89 du 16 janvier 2001, Affaire: Société WORLD
CITY contre GRODJI DJOKOUEHI Jean : ohadata J-02-80
atteintes aux droits des créanciers sont
nécessaires pour que soit mis en place le processus de
désintéressement collectif. Les créanciers
postérieurs sont alors soumis à la procédure de
vérification des créances et seront payés dans le cadre
d'un règlement collectif global consécutif à un concordat
de redressement ou à une liquidation des biens. Le paiement
préférentiel de certains créanciers, en dehors du
processus de désintéressement, s'explique par la volonté
affichée de maintenir l'emploi et l'activité.
En effet, les créanciers postérieurs
échappent à la règle de l'interdiction des voies
d'exécution et le droit d'être payé à
l'échéance a pour corollaire le droit d'exercer des poursuites
individuelles. Le créancier postérieur impayé peut agir
immédiatement en paiement de sa créance en usant des voies
d'exécution sans que puisse lui être opposé le respect de
l'ordre. Il résulte de ce principe que le créancier
postérieur dispose des voies d'exécution de droit commun. La
faculté d'exercer librement des poursuites constitue le corollaire du
droit au paiement à l'échéance.
Au-delà de ce paiement à
l'échéance, la liberté de poursuite des créanciers
postérieurs se justifie aussi par le fait qu'il faut assurer la
sauvegarde de l'activité. La priorité accordée aux
créanciers postérieurs a une finalité précise : il
s'agit de rassurer les partenaires pendant la période de
l'exécution du concordat. L'entreprise doit se procurer du
crédit. La survie de l'entreprise en difficulté serait gravement
compromise si les partenaires (fournisseurs - banque accordant des
facultés de paiement) savaient que, venant en concours avec les
créanciers antérieurs, ils ne seraient qu'incomplètement
payés.
Cette liberté des poursuites accordée aux
créanciers postérieurs est reconnue par la jurisprudence
française. Ainsi, par un arrêt de la chambre commerciale de la
Cour de Cassation en date du 20 Juin 1989100, la haute juridiction a
fermement rejeté le moyen tiré du classement des
créanciers établi par l'article 40 de la loi de 1985 pour faire
échec à une
100 Cass, Com, 20 juin 1989, Bull. Civ. , IV, n°196 ;
JCP éd. E, II, 15658, obs Cabrillac et Petel.
mesure de contrainte exercée par le comptable du
Trésor. La Cour de cassation balaya le moyen par un attendu lapidaire :
«attendu que s 'agissant de créances fiscales nées
après le jugement d 'ouverture, l 'usage d 'un avis à tiers
détenteur n 'était pas interdit ».
Comme on peut le constater, il y a une liberté
d'exercice des voies d'exécution sur toutes les créances
nées régulièrement, après la décision
d'ouverture, de la continuation de l'activité et de toute
activité régulière du débiteur ou du
syndic101. Mais cette liberté de poursuite n'est pas sans
portée.
2- La portée de la liberté de poursuite
des créanciers postérieurs
Quelles voies d'exécution vont pratiquer les
créanciers postérieurs ? Qui doit être saisi ? La solution
à ces deux questions diffère selon qu'on est en présence
du règlement préventif ou du redressement judiciaire et de la
liquidation des biens. Avant d'y arriver, rappelons que malgré
l'ouverture d'une procédure collective d'apurement du passif, le
débiteur n'est pas exproprié de ses biens102.
Dans la procédure du règlement préventif,
le débiteur, après homologation du concordat reste à la
tête de ses affaires. Par conséquent toute saisie qui peut
être faite entre les mains de ce dernier le sera sans difficulté.
On en déduit que les créanciers postérieurs pourront
pratiquer une saisie conservatoire ou une saisie exécutoire en cas
d'inexécution de ses obligations. Ces saisies sont-elles possibles dans
les autres procédures ?
Dans les procédures de redressement judiciaire et de
liquidation des biens, le débiteur est assisté ou
représenté. Ce qui veut dire que seules les voies
d'exécution qui ne nécessitent pas son intervention directe
peuvent être exercées. On fait ainsi allusion à la saisie
conservatoire des créances et à la saisie-attribution. Ces
saisies constituent une variété qui
101 Ces créances qui sont appelées
créances contre la masse sont déterminées par l 'article
117 A UP CAP.
102 V. Première partie, chapitre 1, Section 1,
paragraphe 1.
permet au créancier de saisir entre les mains d'un
tiers la créance qu'il détient contre son débiteur.
Seulement, au regard de l'Acte uniforme portant organisation des
procédures simplifiées de recouvrement et des voies
d'exécution, le syndic qui assiste ou représente le
débiteur peut-il être considéré comme un tiers ?
Il est de commun accord que le tiers doit être le
débiteur du débiteur ; autrement dit, le débiteur saisi
doit détenir une créance envers ce tiers. Pourtant, dans la
saisie des comptes bancaires, le banquier n'est pas nécessairement le
débiteur du débiteur. On en déduit que le tiers doit
être toute personne qui détient une créance du
débiteur. Dans cette dernière hypothèse, on peut
facilement admettre la saisie conservatoire des créances ou la
saisieattribution.
La liberté de poursuite des créanciers
postérieurs se justifie par le fait que ceux-ci joue un double
rôle dans l'entreprise en difficulté : assurer la sauvegarde de
l'activité et procurer le crédit à l'entreprise.
Devront-ils exercer leur poursuite au risque de contrarier ces objectifs ?
Autrement dit, la liberté de poursuite des créanciers
postérieurs ne risque-elle pas d'occasionner certaines
difficultés supplémentaires à l'entreprise ?
Même si la liberté de poursuite des
créanciers postérieurs peut occasionner des difficultés
supplémentaires à l'entreprise en difficulté, on ne
saurait refuser l'exercice de telle poursuite. Tout d'abord parce que la
possibilité pour les créanciers postérieurs d'exercer les
voies d'exécution103 est la seule garantie pour ceux-ci de
faire confiance à l'entreprise en difficulté. Ensuite dans
l'espoir de pouvoir recouvrer leurs dus, les créanciers dans la masse ne
sauraient faire obstacle à de telles poursuites au risque de voir leur
créance diminuée.
La justification des voies d'exécution spécialement
admises contient des justifications plutôt liées à la
nature même de ces voies d'exécution.
103 En effet, il s 'agit des poursuites individuelles en
général.
Paragraphe 2 : Les voies d'exécution
spécialement admises
Il est des voies d'exécution dont l'exercice peut ne
pas être perturbé par la procédure collective, notamment si
elles sont exercées pendant la période suspecte. Il en est ainsi
de la saisie conservatoire des créances (A) et de la saisie-attribution
(B).
A- La saisie conservatoire des
créances
Une saisie conservatoire est une procédure dont
l'objectif est de placer sous main de justice des biens du débiteur,
afin que celui-ci n'en dispose pas ou ne les fasse pas disparaître. Cette
saisie peut aux termes de l'article 54 AUPSRVE être exercée par
toute personne dont la créance paraît fondée en son
principe si elle justifie de circonstances de nature à en menacer le
recouvrement. Cette saisie peut être pratiquée sur des biens
meubles corporels ou incorporels du débiteur. Sur les biens meubles
incorporels, il peut s'agir soit de la saisie des droits d'associés et
des valeurs mobilières, soit de la saisie des créances. La saisie
des créances qui nous intéresse ici se déroule en
plusieurs phases, principalement la phase conservatoire et la phase
exécutoire. Schématiquement la procédure est l'acte de
saisie, la dénonciation de la saisie et la conversion en
saisie-attribution. La question qui se pose est celle de savoir si une saisie
conservatoire des créances pratiquée pendant la période
suspecte et convertie pendant la même période peut être
perturbée par l'ouverture des procédures collectives.
Aux termes de l'article 82 AUPSRVE, « Muni d'un titre
exécutoire constatant l'existence de sa créance, le
créancier signifie au tiers saisi un acte de conversion ». Le
même article 82 in fine dispose que l'acte informe le tiers que, dans
cette limite, « la demande entraîne attribution immédiate
de la créance saisie au profit du créancier ».
L'article 84
ajoute que Les dispositions des articles 158 et 159, 165
à 168, des 2e et 3e alinéas de l'article 170, des articles 171 et
172 ci-après sont applicables. Ces dispositions renvoient à
l'acte de la saisie-attribution, au paiement par le tiers saisi et aux
contestations relatives à la saisieattribution. A l'analyse de ces
dispositions, on déduit qu'après la conversion, la saisie produit
les effets d'une saisie-attribution.
Cette réflexion devrait valider que la saisie
conservatoire des créances convertie pendant la période suspecte
est indifférente aux inopposabilités de la période
suspecte. La jurisprudence française104 n'adhère pas
à cette position en décidant que si la saisie conservatoire
portant sur une créance faite pendant la période suspecte est
nulle, le paiement obtenu par le créancier saisissant, doit
lui-même être annulé. Cette solution donnée par la
Cour de cassation est faite en réponse à un moyen de cassation
qui soutenait que la conversion de la saisie conservatoire en
saisie-attribution transformait une mesure conservatoire en mesure
d'exécution, à l'abri des nullités de la période
suspecte. Nous ne soutenons pas cette position de la cour de cassation car si
on l'applique à l'Acte uniforme elle risque d'anéantir l'effet
attributif immédiat de la saisie conservatoire des créances
convertie en saisieattribution. Cet effet attributif immédiat qui
caractérise aussi la saisie-attribution s'impose d'ailleurs
malgré l'ouverture d'une procédure collective.
B- La saisie-attribution
La saisie-attribution est la voie d'exécution
forcée qui permet à un créancier de saisir entre les mains
d'un tiers, appelé tiers saisi, les créances portant sur une
somme d'argent autres que les créances de rémunération du
travail et de se faire attribuer lesdites sommes dès
104
Cass. Com., 12 octobre 1999,
Bull. n° 166.
l'exploit de saisie105. La saisie-attribution,
selon l'article 154 AUPSRVE, emporte, à concurrence des sommes pour
lesquelles elle est pratiquée ainsi que tous ses accessoires, mais pour
ce montant seulement, attribution immédiate au profit du saisissant de
la créance saisie, disponible entre les mains du tiers. A la lecture de
cette disposition, il importe de faire une analyse textuelle (1) avant de se
pencher sur ses différentes applications (2).
1- L'effet immédiat de la saisie attribution,
cause de son admission législative dans les procédures
collectives
L'acte de saisie de la saisie-attribution emporte attribution
immédiate au profit du saisissant de la créance saisie. Cette
règle de l'article 154 AUPSRVE permet d'envisager la force de la
saisie-attribution face à l'ouverture d'une procédure collective.
Il s'agit bien évidemment d'une saisie-attribution pratiquée
pendant la période suspecte.
Il y a plus, la procédure collective s'analysant en une
saisie, l'Acte uniforme sur les voies d'exécution envisage
l'hypothèse de la pluralité des saisies. A ce propos, l'article
155 alinéa 1er dispose que les actes de saisie
signifiés au cours de la même journée entre les mains du
même tiers sont réputés faits simultanément. Si les
sommes disponibles ne permettent pas de désintéresser la
totalité des créanciers ainsi saisissants, ceux-ci viennent en
concours. Que se passe t- il alors lorsque une voie d'exécution,
spécialement une saisie-attribution, est effectuée le jour
même du prononcé du jugement d'ouverture. Il s'agit ici de deux
saisies faites simultanément ; doit-on pourtant en conclure que les
créanciers de la procédure et le ou les créancier(s)
saisissant(s) viendront en concours ? Evidemment non. Dans ce cas, la
décision d'ouverture de la procédure collective doit primer et,
par voie de conséquence suspendre la saisie-attribution
exercée.
105 Cf. ASSI-ESSO (A-M.), NIA W DIOUF, OHADA, Recouvrement
des créances, collection droit uniforme africain, Juriscope, Bruylant,
2002, n° 367
L'alinéa 2 de l'article 155 AUPSRVE mentionne un autre
problème. Il dispose en effet que La signification ultérieure
d'autres saisies ou de toute autre mesure de prélèvement,
même émanant de créanciers privilégiés, ne
remettent pas en cause cette attribution, « sans préjudice des
dispositions organisant les procédures collectives ».
Malgré une position doctrinale qui semble
tranchée106, l'expression « sans préjudice
des dispositions organisant les procédures collectives »
devrait être interprétée de deux façons.
D'abord, elle doit s'entendre comme le notent ASSI-ESSO et NIAW DIOUF que
l'ouverture d'une procédure collective d'apurement du passif est une
limite au privilège du premier saisissant et par conséquent
anéantit l'attribution immédiate de la créance saisie
attribuée. Nous ne sommes pas allié à cette
interprétation.
Ensuite, elle doit s'entendre que le privilège du
premier saisissant conserve sa portée en cas d'ouverture des
procédures collectives. Cette expression devrait s'orienter dans ce sens
pour au moins deux raisons : d'abord parce que la décision de suspension
des voies d'exécution ne spécifie pas les voies
d'exécution concernées ; or cette disposition de l'article 155 in
fine est l'unique règle de l'Acte uniforme sur les voies
d'exécution qui mentionne expressément le terme procédure
collective, une façon de préciser la résistance de la
saisieattribution face aux effets de l'ouverture de la procédure
collective. Ensuite, à titre de droit comparé notamment le droit
français dont le droit OHADA est l'émanation, l'expression
devrait être comprise au sens de l'article 43 de la loi française
sur les procédures civiles d'exécution qui énonce que
« la survenance ultérieure d 'un jugement portant ouverture d
'un redressement ou d'une liquidation judiciaire ne remet pas en cause cette
attribution «. En plus il faut relever que soumettre cette expression
à la première interprétation serait anéantir
106 ASSI-ESSO et NIA W DIOUF en particulier énoncent
que la seule limite au privilège du premier saisissant est l 'existence
d 'une procédure collective survenue postérieurement contre le
débiteur saisi en citant l 'art. 155 al. 2 : lire leur ouvrage
précité, n° 369.
totalement les voies d'exécution par l'ouverture des
procédures collectives au lieu de les déformer simplement
lorsqu'elles sont admises107.
L'admission des saisies-attributions dans les procédures
collectives fait l'objet de plusieurs applications.
2- Les différentes applications
L'admission des saisies-attributions dans les
procédures collectives a fait l'objet de plusieurs applications dans la
jurisprudence. La jurisprudence française s'en démarque
particulièrement. Elle applique cette admission différemment
suivant la période d'intervention de la procédure collective.
Elle adopte une position contraire par rapport à ce que
prévoit l'Acte uniforme lorsqu'une voie d'exécution,
spécialement une saisie-attribution, est effectuée le jour
même du prononcé du jugement d'ouverture. Ainsi, la Cour d'appel
de Caen a statué sur cette hypothèse dans un arrêt du 10
octobre 1995108. En l'espèce, une saisie-attribution du
compte bancaire du débiteur avait été pratiquée le
11 mars 1993 à 10 heure 10 (l'article 56 du décret de 1992
imposant d'indiquer l'heure de la saisie). Le même jour, dans
l'après midi, une procédure collective a été
ouverte à l'encontre de ce même débiteur. La banque, tiers
saisi, soutenait que la saisie fut nulle car effectuée en cours de
procédure ; l'effet du jugement d'ouverture devant être
reporté au jour du prononcé à 0 heure 00. Par une
interprétation littérale de l'article 43 alinéa 2 de la
loi de 1991109 et spécialement de la notion de «
survenance », la Cour d'appel fait prévaloir l'effet
attributif de la saisie en considérant que celui ci fait exception
à la prise d'effet rétroactif du jugement d'ouverture. Cette
interprétation
107 V. Section 2 de ce chapitre.
108 CA CAEN, 10 Oct 1995 , Rev. Proc. Coll. 1998 , p 91, obs
CANET .
109 Il s 'agit ici de la loi fran çaise sur les
procédures civiles d 'exécution. Cet article est l
'équivalent de l 'article 155 al. 2. AUPSRVE.
des textes ne peut qu'être regrettée ; la
doctrine soulignant unanimement que la saisieattribution doit être
exercée au plus tard la veille du jugement d'ouverture110.
Il faut surtout relever que les articles 169 à 172
AUPSRVE organisent une procédure de contestation mais celle-ci n'a pas
de caractère suspensif. L'ouverture d'une procédure collective
pendant le délai de contestation ne remet pas en cause l'effet
attributif ; les organes ne peuvent demander la suspension de la saisie. C'est
en ce sens qu'a statué un arrêt de la Cour d'appel de Lyon en date
du 8 février 1995111.
La situation est donc parfaitement claire. Dès lors que
la saisie-attribution est signifiée la veille du jugement d'ouverture au
plus tard ; elle sera achevée et ne pourra être remise en cause.
En tout état de cause, la saisie-attribution, contrairement à
l'ancienne saisie arrêt, ne peut être inachevée : soit elle
a produit son effet légal ; soit elle ne peut plus intervenir.
La saisie-attribution produit bien ses effets pendant la
période suspecte. En effet la survenance d'une procédure ne remet
pas en cause l'effet attributif de la saisie-attribution nous indique l'article
155 AUPSRVE. Le juge de l'exécution de Lyon a statué
précisément en
ce sens 112
|
; précédé déjà par d'autres
décisions113. La Cour d'appel de Rennes dans un arrêt
du
|
3 mars 1994114, puis la Cour d'appel d'Amiens dans
un arrêt du 4 avril 1997115 , ont cependant successivement
refusé l'annulation sur ce fondement car le paiement est forcé et
n'est pas effectué par le débiteur, soulignent ces
arrêts.
Il est donc louable que le législateur intervienne
à défaut d'une prise de position par la jurisprudence Ohada, pour
donner l'efficacité souhaitée à la saisie-attribution
pratiquée pendant la période suspecte.
110 obs CANET, sous arrêt
précité.
111 C.A. Lyon, 8 février 1995, Rev. Proc. Coll. 1998,
p 89, obs. CANET.
112 JEX Lyon, 2 Avril 1996 et 23 Avril 1996, D. 1997, JP p.
43, note Prévault.
113 JEX Clermont Ferrand, 27 janvier 1994, Rev. Huis. 1994 p.
954 ; JEX Dijon, 1er Février 1994, ibid, p. 954 ; JEX
Quimper, 3 février 1994, ibid, p. 703, note Dahan ; C. A. Rennes 3 Mars
1994, ibid, p. 946.
114 C. A. Rennes, 3 Mars 1994, Juris data n° 046238 ;
JCP ed E 1995, pana 10 ; JCP ed E 1995, I, 457 n° 10, obs.
Cabrillac.
115 C. A. Amiens, 4 Avril 1997, BRDA 1997, N° 12 p.
12.
Les voies d'exécutions indifférentes à
l'ouverture des procédures collectives sont admises soit selon la
qualité des créanciers qui les exercent, soit selon les effets
attachés auxdites voies d'exécution. Ces voies d'exécution
indifférentes aux procédures collectives produisent en principe
les effets que leur attache le droit commun des voies d'exécution. Ces
effets et même la procédure de droit commun se trouvent
modifiés lorsqu'elles servent à la réalisation de l'actif
de l'entreprise.
Section 2 : La réalisation de l'actif de
l'entreprise par l'utilisation des voies d'exécution
L'augmentation du nombre de liquidation des biens, due aux
problèmes économiques actuels, a entraîné un
accroissement des cessions de biens immobiliers appartenant à des
personnes et des entreprises en difficultés financières.
Toutefois, pour éviter d'éventuelles malversations permettant aux
acquéreurs de réaliser de bonnes affaires au détriment des
créanciers, le législateur a mis en place un ensemble de
règles destinées à protéger leurs droits. Ainsi, la
procédure utilise les voies d'exécution notamment, la saisie
immobilière, pour procéder aux réalisations de l'actif
immobilier et offrir des garanties de probité116.
Cependant, cette voie d'exécution du fait de sa
lourdeur a été adaptée aux particularités de la
procédure collective. Cette dernière centralise la saisie
immobilière car les poursuites sont désormais collectives. La
saisie immobilière apparaît comme absorbée par la
procédure (paragraphe 1). Mais, plus encore, elle altère la
lourdeur de la saisie immobilière afin d'assurer une plus grande
rapidité. La cohérence interne de cette voie d'exécution
se trouve
116 Cette procédure constitue une voie à
explorer pour rassurer l'opinion publique suite aux malversations
constatées au sein des Tribunaux de commerce ; Cf GA UDINO A., La mafia
des Tribunaux de Commerce, Albin Michel, 1998, cité par David DEFRANCE
précité.
profondément perturbée. Dès lors, la saisie
immobilière est déformée par la procédure
(paragraphe 2).
Paragraphe 1 : Une saisie immobilière
absorbée par la procédure collective
L'étude de la saisie immobilière exercée
dans la liquidation des biens dénote une prépondérance des
organes de la procédure collective au sein de cette voie
d'exécution. De cette prépondérance découle une
protection juridique plus diffuse du débiteur (A) mais également
une dérogation au régime traditionnel de la saisie
immobilière (B).
A- la protection du débiteur dans le cadre de la
procédure collective
Le jugement prononçant la liquidation des biens emporte
de plein droit dessaisissement du débiteur. Dès lors, exceptions
faites des actions purement personnelles, les droits et actions du
débiteur sont exercés durant toute la durée de la
procédure par le syndic.
La question se pose donc de connaître la portée
de la règle du dessaisissement du débiteur lorsque celui-ci fera
l'objet d'une saisie immobilière dans le cadre de réalisation de
l'actif par le syndic. En effet, le droit commun des saisies
immobilières reconnaît un rôle actif au saisi : il est
informé à toutes les étapes de la procédure ; il
peut formuler des observations par l'intermédiaire de dires qui seront
examinés lors d'une audience particulière dite audience
éventuelle. Le débiteur dessaisi pourra-t-il faire valoir ses
observations dans le cadre de la procédure de saisie immobilière
? La question est fondamentale car il s'agit de la protection juridique du
débiteur. En effet, un auteur a souligné qu'il fallait laisser au
débiteur les moyens
juridiques de se faire entendre et de faire sanctionner une
illégalité commise à son
détriment117.
La jurisprudence a tiré toutes les conséquences
du dessaisissement. Relativement au droit comparé deux arrêts de
la cour de cassation française permettent de les présenter.
D'abord, la chambre commerciale de la cour de cassation, dans un arrêt du
11 avril 1995118, précise qu'en vertu de l'art. 152 de la
loi, le liquidateur119 qui exerce le pouvoir exclusif d'agir au nom
du débiteur dans la procédure de saisie immobilière, se
trouve dispensé de délivrer au débiteur saisi la sommation
prévue à l'article 689 du Code de Procédure Civile.
Ensuite, tirant les conséquences de cette jurisprudence, la chambre
commerciale dans un arrêt du 6 avril 1996 indique que le liquidateur
représente le débiteur dessaisi dans cette procédure et
que celui-ci n'est pas recevable à formuler des dires.
Ces deux arrêts s'expliquent par le recours dont dispose
le débiteur, à l'égard de l'ordonnance du juge
commissaire, devant le Tribunal de la procédure. Cette jurisprudence ne
reconnaît pas la saisie immobilière comme une procédure
autonome ; les droits du débiteur étant suffisamment garantis
dans le cadre de la procédure collective. La chambre Mixte a
été saisie de la difficulté. Dans son arrêt du 5
décembre 1997, la chambre Mixte reprend la solution de la chambre
commerciale120. Elle estime que lorsque « l 'ordonnance du
juge commissaire est passée en force de chose jugée à l
'égard du débiteur qui dispose à son encontre d'un recours
autonome devant le tribunal de la procédure ; le liquidateur, qui en
vertu de l 'art. 152 de la loi est investi du droit de représenter le
débiteur, est dispensé de lui délivrer la sommation
prévue à l 'art. 689 du Code de Procédure Civile.
»
117 SENECHAL dans note sous Cass., Com, 11 avril 1995, Rep
Def 1995, art 36139.
118 Cass, Com, 11 avril 1995, Rep Def 1995, art 36139, note
SENECHAL.
119 Sous la législation OHADA, ce terme est l
'équivalent de syndic. Ce dernier étant remplacé par trois
professions dans la législation française sur les entreprises en
difficulté à savoir les administrateurs judiciaires, les
mandataires-liquidataires et les experts en diagnotic.
120 Mixte, 7 Décembre 1997, D. A. 1998 p 29.
La doctrine approuve cette position de la haute juridiction :
« c 'est dans le cadre de la procédure collective que la loi
assure la protection du débiteur ; il ne l 'a pas à l 'être
une seconde fois dans la saisie immobilière ». Elle estime
qu'il serait « inutile et inopportun de donner au débiteur la
possibilité de contester les modalités de la vente lors de l
'audience éventuelle devant le tribunal de grande instance
«121 . En effet, cela retarderait la vente mais aussi cela
pourrait conduire à une contrariété de
décisions.
La saisie immobilière est donc perturbée
lorsqu'elle se trouve utilisée en procédure collective. Cet effet
perturbateur se ressent encore à l'aune de son régime.
B - Un régime dérogatoire au droit
commun
L'acte uniforme OHADA portant organisation des
procédures collectives d'apurement du passif renvoie à certaines
dispositions de l'Acte uniforme OHADA portant organisation des
procédures simplifiées de recouvrement et des voies
d'exécution pour les ventes ayant lieu sous la forme des saisies
immobilières «sauf celles auxquelles il est
dérogé par le présent Acte uniforme
»122.
Le problème s'est posé de savoir si le
créancier privilégié, reprenant les poursuites, pouvait
être déclaré adjudicataire pour la mise à prix, s'il
n'est pas intervenu d'enchères. Un arrêt de la chambre commerciale
du 6 janvier 1998 admet cette possibilité sur le fondement de l'article
129 du décret de 1985 ; l'article 706 alinéa 2 du code de
procédure civile (permettant de déclarer adjudicataire le
poursuivant) étant applicable123. En outre, la Cour de
Cassation fonde sa décision sur l'article 161 en précisant que la
mise à prix est déterminée non par le juge commissaire
seul mais par celui-ci en accord avec le créancier poursuivant.
Dès lors, l'article 706 du Code de procédure civile s'applique en
cas de procédure collective sauf, et
121 SENECHAL dans note précitée.
122 V. art 154 § 1.
123
Cass. Com. 8 janvier 1998,
Quot. Jur. du 10 Février 1998, p. 4.
l'exception est de taille, lorsque le poursuivant est le
liquidateur puisque le liquidateur ne peut être déclaré
adjudicataire.
Le droit commun des saisies immobilières est donc
profondément modifié. Les incidents de la saisie sont purement et
simplement ignorés, parce que la procédure collective utilise la
saisie immobilière comme modalité de réalisation de
l'actif. Or, l'actif doit être réalisé rapidement pour
éviter qu'il ne se dépérisse. Toutes les voies de
contestations offertes par les incidents de la saisie immobilière sont
ignorées afin d'accélérer la réalisation de
l'actif. C'est ce même esprit de rapidité qui explique la
déformation de la procédure de saisie immobilière.
Paragraphe 2 : Une saisie immobilière
déformée par la procédure collective
La saisie immobilière de l'article 150 de l'Acte
uniforme sur les procédures collectives n'obéit pas au même
régime que le droit commun124. La procédure ne s'ouvre
pas par un commandement aux fins de saisie immobilière mais par une
décision du juge commissaire (A) ; le prix n'est pas réparti
comme en droit commun, par le juge des saisies immobilières, mais par le
syndic (B).
A- La nécessité de l'ordonnance du juge
commissaire.
Contrairement au droit commun, la notification d'un
commandement n'est pas nécessaire ; l'article 150 de la l'acte uniforme
impose l'intervention du juge commissaire. L'ordonnance du juge commissaire
sera publiée à la conservation foncière. Elle se
substitue
124 Ici, il s 'agit des dispositions de l 'Acte uniforme
portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement
et des voies d'exécution.
au commandement comme le prévoit l'article 152
alinéa 1 de l'acte. Dès lors, comme en droit commun, l'ordonnance
emporte indisponibilité du ou des immeubles visés par celle-ci.
L'immeuble saisi ne pourra donc plus faire l'objet d'aliénation.
Cependant, la saisie immobilière se trouve déformée en
l'absence de commandement.
La vente faite sans l'autorisation du juge commissaire est
nulle 125 car la compétence d'attribution du juge commissaire
est d'ordre public. De même, toute saisie immobilière
engagée sans l'intervention du juge commissaire est nulle. Le principe a
été rappelé par un arrêt de la chambre commerciale
du 19 mars 1991 à propos d'une saisie engagée par un
créancier hypothécaire ayant recouvré son droit de
poursuite126. En l'espèce, le cahier des charges fixant les
conditions de la vente avait été déposé sans
l'intervention du juge commissaire, ce qui enlevait toute validité
à la procédure de saisie immobilière. Dès lors, la
procédure engagée par le créancier était
irrégulière et la radiation du commandement était
justifiée car le créancier reprenant les poursuites doit
préalablement demander l'autorisation du juge commissaire. Cet
arrêt résout implicitement le point de savoir quelle
procédure doit suivre le créancier hypothécaire.
Le créancier qui reprend les poursuites, est soumis au
même régime que le syndic, il devra donc présenter par une
requête au juge commissaire. On constate alors que la procédure a
été considérablement accélérée et
simplifiée. C'est ce même esprit de rapidité qui
préside dans les dispositions relatives au prix.
125 Com 28 mars 1995, cité par SOINNE B , n°
2412.
126 Com 19 mars 1991, D 1991, JP 360, note Honorat.
B - La répartition du prix par le
syndic
En droit commun, l'ordre est fixé par un magistrat
spécialisé127 du Tribunal de grande instance.
L'article 150 alinéa 6 de l'Acte uniforme portant organisation des
procédures collectives d'apurement du passif dispose que « le
syndic répartit le produit des ventes et règle l 'ordre entre les
créanciers ».
Dès la publication de la vente, le syndic requiert du
conservateur foncier, l'état des inscriptions. Puis il dressera
l'état de collocation, au vu de ces inscriptions, des créances
admises et des créances des créanciers postérieurs.
L'état de collocation est ensuite déposé au greffe du
tribunal de la procédure qui le fera publier.
S'il ne s'élève aucune contestation, le syndic
procédera à la clôture de l'ordre par le dépôt
d'un procès verbal de clôture d'ordre au greffe du tribunal de la
procédure. Les contestations éventuelles devront être
formées dans un délai de 30 jours à compter de la
publication. Les contestations devront être dénoncées,
à peine d'irrecevabilité, aux créanciers inscrits et au
syndic. Elles seront tranchées par le tribunal de la procédure.
Dans les 8 jours suivant le règlement définitif des
contestations, le syndic règle définitivement l'ordre entre les
créanciers par le procès verbal de clôture d'ordre. Il fera
procéder enfin à la radiation des inscriptions en saisissant le
juge aux ordres128 par voie de requête.
Ces dispositions relatives à l'ordre s'appliquent
à l'exclusion de toutes autres nous indique une jurisprudence constante
de la cour de cassation. En droit commun, un décret de 1852
prévoit un mécanisme d'avance sur collocation au profit du
Crédit Foncier lors de l'adjudication d'un immeuble grevé
à son profit d'une hypothèque. A ce titre, le crédit
foncier demandait au notaire lors de la cession amiable ou à
l'adjudicataire lors d'une vente à la barre du tribunal de lui remettre
les fonds sur le fondement de ce texte. Par trois arrêts successifs du
127 Ce magistrat est le président de la juridiction
compétente ou le magistrat délégué par lui, art.
326 A UPSRVE.
128 Il s 'agit ici du juge de l 'art.326 A UPSR VE.
9 juin 1992129, 19 octobre 1993130 et 28
juin 1994131 ; la chambre commerciale de la cour de cassation
affirme « l 'inapplicabilité » de ce mécanisme
en cas de procédure collective sur le fondement des dispositions de
l'AUPCAP qui prévoient que le prix d'adjudication doit être
versé au compte ouvert à la caisse des dépôts et
consignation.
L'admission directe des voies d'exécution dans les
procédures collectives est soit fonction des créanciers qui les
exercent, soit fonction de la nature même de ces voies
d'exécution. En fonction des créanciers qui les exercent, les
voies d'exécution peuvent collaborer avec les procédures
collectives pour le recouvrement des créances postérieures et des
créances non suspendues par la décision d'ouverture des
procédures collectives. En fonction de la nature des voies
d'exécution, l'admission des voies d'exécution accompagne
l'efficacité de certaines voies d'exécution. Au-delà de
ces considérations, l'exercice des voies d'exécution dans les
procédures collectives peut se justifier par la réalisation de
l'actif de l'entreprise. A côté de cette admission directe, il
existe une admission indirecte qui se justifie par le fait que les
procédures collectives sont des voies d'exécution collective.
129
Cass. Com. 9 juin 1992, D.
1992, JP 388, note Honorat.
130
Cass. Com. 19 Octobre 1993,
D. 1994,
som. com. 179, obs. Honorat.
131 Cass, Com, 28 juin 1994, D ; 1994, JP 477, note Honorat.
CHAPITRE 2 : LA SUPPLEANCE DES VOIES D'EXECUTION PAR
LES PROCEDURES COLLECTIVES
L'effet perturbateur qu'exerce l'ouverture d'une
procédure collective sur les voies d'exécution n'est pas sans
remède. En effet si les procédures collectives neutralisent ou
paralysent les voies d'exécution, c'est parce qu'elles s'analysent en
une voie d'exécution collective (Section 1). Comme les voies
d'exécution, elles ont pour finalité la recherche de
l'intérêt des créanciers. Mais pendant que les voies
d'exécution les traitent individuellement, les procédures
collectives les considèrent collectivement. Il y a plus, la
procédure collective sanctionne également le débiteur
saisi en le protégeant pareillement. Elle se présente sous cet
angle comme une voie d'exécution spécifique (Section 2).
Section 1 : La procédure collective, voie
d'exécution collective
Il a été dit plus haut132que
l'interdiction d'exercice des voies d'exécution par l'ouverture d'une
procédure collective était justifiée par le fait qu'elle
entraînait le dessaisissement du débiteur et
l'indisponibilité de ses biens133. Ce sont là certains
traits qui caractérisent les voies d'exécution et que nous ne
reprendront pas dans ce chapitre. Il faut plutôt noter que, comme les
voies d'exécution, la procédure collective est une mesure
forcée de désintéressement car elle contribue au paiement
des créanciers (Paragraphe 1). Elle a aussi pour finalité la
recherche de l'intérêt des créanciers pris collectivement
(Paragraphe 2).
132 Cf. Première partie, chapitre 1, section
1.
133 Ibid.
Paragraphe 1 : Traits communs quant aux finalités
des procédures collectives et des voies d'exécution
A côté du redressement de l'entreprise du
débiteur134 qui caractérise les procédures
collectives, elles s'occupent aussi du paiement des créanciers (A) comme
les voies d'exécution et est par conséquent une mesure
forcée de désintéressement (B).
A- Paiement des créanciers
A côté de la recherche de l'intérêt
du débiteur, la procédure collective s'occupe du paiement des
créanciers même si ce paiement n'est pas toujours prioritaire. En
privilégiant le terme apurement dès le titre de l'Acte
uniforme sur les procédures collectives, le législateur OHADA a
entendu souligner qu'il se préoccupait tout autant sinon plus de
l'extinction du passif que de son règlement. Le paiement des
créances demeure cependant l'un des modes d'extinction du passif
utilisé par l'Acte uniforme OHADA portant organisation des
procédures collectives d'apurement du passif. Mais il s'effectuera selon
les modalités qui sacrifient les droits des créanciers à
la sauvegarde de l'entreprise sans méconnaître le principe d'un
traitement égalitaire de ces créanciers compte tenu de la
catégorie à laquelle ils appartiennent135.
Avant le paiement proprement dit des créanciers on
passe d'abord par la détermination du passif. Cette détermination
du passif se réalise par la production et la vérification des
créances136.
134 V. infra.
135 V. Yves GUYON et Jean DERRUPE, Entreprises en
difficulté - redressement judiciaire (phase de traitement - les
créanciers),
Rép. Com. Dalloz,
septembre 1996, n° 630.
136 V. supra.
En ce qui concerne les modalités de paiements des
créanciers, il faut relever qu'en vue de favoriser le redressement de
l'entreprise, un traitement privilégié a été
réservé aux créanciers postérieurs à
l'ouverture de la procédure137. Les créanciers
liés à la poursuite de l'entreprise sont payés à
leur échéance, sinon ils bénéficient d'un paiement
prioritaire.
Sous réserve du cas des créanciers
rétenteurs, le règlement des créanciers antérieurs
ne peut avoir lieu qu'après la solution du redressement judiciaire et
ses modalités varient selon le choix retenu : continuation de
l'entreprise, cession de l'entreprise et liquidation des biens. Pendant
l'assemblée concordataire, des propositions de règlement du
passif sont élaborées. Elles contiennent habituellement des
délais et des remises. Ces délais et remises qui constituent des
restrictions au paiement des créanciers aboutissent au paiement en
fonction du délai ou de la remise accordé par chacun. Pour les
créanciers qui ont refusés tous délais et remises, le
tribunal impose des délais et remises uniformes de paiements. Par cette
réaction, le législateur a eu le souci d'établir un
traitement égalitaire des créanciers. La mesure concerne toutes
les catégories des créanciers, chirographaires ou titulaires de
sûretés, dont la créance est antérieure au jugement
de redressement judiciaire ; tous devront subir le moratoire
décidé et être payés à l'issue de ces
échéances.
Tout paiement avant l'échéance est
sévèrement sanctionné. A l'inverse, le défaut de
paiement aux échéances prévues par le concordat de
redressement permet aux créanciers de recourir aux voies
d'exécution s'ils disposent d'un titre exécutoire ou après
en avoir obtenu un ; c'est aussi une cause de résolution du
concordat.
Le paiement des créanciers en cas de cession de
l'entreprise s'analyse selon qu'elle est partielle ou totale. En cas de cession
partielle, d'actifs, liée au plan de continuation, le prix est
versé à l'entreprise. Le règlement des créanciers
s'effectue donc sans changement selon les modalités d'apurement
arrêtées par le concordat de redressement. En cas de cession
totale, le
137 C'est ce qui justifie par ailleurs l'admission de leurs
voies d'exécution dans les procédures collectives.
règlement des créanciers est immédiat. Il
sera effectué avec le prix de cession et le prix de vente des autres
éléments du patrimoine non compris dans la cession de
l'entreprise138.
En cas de liquidation des biens, le paiement des
créanciers devient la seule finalité de la procédure. Les
déchéances du terme facilitent le règlement global. Qu'il
ait reçu un paiement complet ou partiel, le créancier perd en
principe ses droits à l'égard du débiteur dès lors
qu'il n'y a plus d'actif à répartir. Le créancier serait
alors totalement ou partiellement payé selon qu'il y a suffisamment
d'actif ou pas. Ce paiement qui ne satisfait pas toujours le créancier
est une mesure de désintéressement forcé commune à
la procédure collective et aux voies d'exécution.
B- Mesures forcées de
désintéressement
La procédure collective se conçoit comme une
mesure forcée de désintéressement dans la mesure où
le paiement des créanciers n'émane pas de la volonté du
débiteur dont l'entreprise connaît des difficultés.
L'application contemporaine de cette mesure forcée de
désintéressement a une origine historique.
La faillite139 trouve son origine dans les statuts
des villes italiennes, à la fin du XVe siècle, notamment à
Gênes, Florence et Venise. Ces procédures avaient essentiellement
un caractère pénal. Elles étaient limitées aux
commerçants. Ceux-ci bénéficiaient de nombreux avantages
en matière de crédit. S'ils en abusaient, c'est-à-dire
s'ils ne pouvaient pas payer leurs créanciers à
l'échéance, le droit les traitait comme des délinquants.
Celui qui avait failli à ses engagements était
présumé être un fraudeur (faillitus, ergo fraudator). Il
pouvait donc être emprisonné. Ces sanctions déjà
sévères étaient aggravées lorsque les faillis
avaient
138 Yves GUYON et Jean DERRUPE, op. cit. n° 734.
139 C'est sous cette appellation qu 'on désignait la
procédure de concours.
commis des malhonnêtetés
caractérisées140. On brisait solennellement leur banc
à l'assemblée des marchands, d'où l'expression encore en
vigueur de banqueroute (« banca rotta »). En même temps on
liquidait leurs biens en suivant une procédure respectueuse de
l'égalité des créanciers et aboutissant si possible au
vote d'un concordat.
Même si le caractère pénal de la
procédure collective a sensiblement diminué, il n'en demeure pas
moins qu'elle demeure une mesure forcée de
désintéressement par son ouverture et par sa gestion. Comme dans
les voies d'exécution, dans les procédures collectives
après cessation des paiements, le créancier qui trouve le
recouvrement de sa créance menacé peut déclencher la
procédure collective. Cette initiative du créancier doit aboutir
normalement à la prise des mesures forcées pour favoriser le
paiement collectif des créanciers. C'est ainsi que par exemple dans la
liquidation des biens, la loi uniforme donne le pouvoir au syndic de
gérer les biens du débiteur. Le syndic pourra prendre des mesures
forcées afin de pouvoir apurer le passif. Dans l'action en comblement du
passif, l'article 185 AUPCAP énonce que La juridiction compétente
peut enjoindre aux dirigeants à la charge desquels a été
mis tout ou partie du passif de la personne morale de céder leurs
actions ou parts sociales de celle-ci ou ordonner leur cession forcée
par les soins du syndic, au besoin après expertise. On peut aussi citer
l'exemple de la vente sur saisie immobilière qui est une mesure
forcée pour désintéresser les créanciers.
Ces mesures forcées de désintéressement
convergent inévitablement à la recherche de
l'intérêt du créancier.
140 V. Yves GUYON, Entreprise en difficulté
(Avant-propos), Répertoire commercial Dalloz, mars 1996, n°
9.
Paragraphe 2 : La recherche de l'intérêt du
créancier
Le rôle actif du créancier dans les
différentes procédures collectives d'apurement du passif se
justifie par le fait que les mesures prises dans ces procédures ont pour
but de satisfaire l'intérêt des créanciers, qu'ils soient
titulaires de sûretés ou simplement chirographaires. La recherche
de cet intérêt peut être principal (A) ou secondaire (B)
selon la procédure envisagée.
A- La recherche principale de l'intérêt du
créancier dans la liquidation des biens
Il faut d'abord mentionner que contrairement aux voies
d'exécution dont l'exercice n'a pour principe que de satisfaire
l'intérêt du créancier, la recherche de cet
intérêt n'occupe une place principale que dans la liquidation des
biens. Le but principal de la procédure de liquidation des biens est de
réaliser l'actif du débiteur pour apurer son passif. La recherche
de l'intérêt du créancier dans la liquidation des biens se
vérifie sur plusieurs points.
D'abord, parce que ses intérêts sont
menacés, l'acte uniforme sur les procédures collectives
d'apurement du passif lui offre la faculté de déclencher la
procédure de liquidation des biens. C'est ce que prévoit
l'article 28. L'assignation suppose une créance certaine, liquide et
exigible dont le créancier doit préciser le montant, la nature et
le titre sur lequel il se fonde. En demandant l'ouverture d'une
procédure collective contre son débiteur, le créancier ne
fait qu'exercer un droit141. Cette demande s'apparente pour
certains142 à l'exercice d'une action oblique.
Ensuite, les inopposabilités de la période
suspecte qui sont communes à la liquidation des biens et au redressement
judiciaire constituent un effet garant de la protection de
l'intérêt
141 Paul Gérard POUGOUE et Yvette KALIEU, op. cit.
n°66.
142 M. POCANAM, Réflexions sur quelques aspects du
droit de la faillite au Togo, Penant, note, P. 204.
des créanciers. Ainsi, un certain nombre d'actes
pouvant être accomplis par le débiteur est déclaré
inopposable à la masse des créanciers143. Cette masse
est aussi une marque de la recherche de l'intérêt du
créancier dans le redressement judiciaire et la liquidation des biens.
En effet, La décision d'ouverture constitue les créanciers en une
masse représentée par le syndic qui, seul, agit en son nom et
dans l'intérêt collectif et peut l'engager144. La
recherche de l'intérêt des créanciers occupe une place
tellement importante que cette décision d'ouverture emporte, au profit
de la masse, hypothèque que le greffier est tenu de faire inscrire
immédiatement sur les biens immeubles du débiteur et sur ceux
qu'il acquerra par la suite au fur et à mesure des
acquisitions145.
Enfin la recherche de l'intérêt du
créancier est marquée par le fait que la liquidation des biens
qui emporte réalisation des biens du débiteur se fait au profit
des créanciers. Il s'agit pour le syndic avec l'actif réellement
réalisé ou recouvré, de payer tout ou partie des
créanciers. Aux principes généraux qui régissent
l'apurement du passif, l'Acte uniforme sur les procédures collectives a
ajouté l'ordre de répartition des deniers suivant qu'ils
proviennent de la vente des immeubles ou des meubles.
En ce qui concerne les principes généraux, il
faut dire que les sommes provenant des différentes ventes sont remises
dans un compte postal, bancaire ou au trésor (art. 45). Les paiements
sont autorisés par le juge commissaire qui fixe en même temps la
part revenant à chacun. Les créanciers doivent être
informés du paiement. La répartition peut alors être faite
entre les créanciers dont les créances ont été
vérifiées et admises. Les modalités sont diverses suivant
les procédures. Les paiements peuvent être faits partiellement au
long de la procédure ou en une seule fois à la fin de la
procédure. L'ordre de répartition est prévu aux articles
166 et 167 de l'acte uniforme sur les procédures collectives. Ce
paiement qui fait partie de la
143 Lire les articles 67 et suivants A UP CAP.
144 Article 72 A UP CAP. 145 Article 74 A UP
CAP.
recherche de l'intérêt du créancier est
fonction des délais et remises dans le règlement préventif
et le redressement judiciaire.
B- La place secondaire de l'intérêt du
créancier dans le règlement préventif et le redressement
judiciaire
Le règlement préventif et le redressement
judiciaire sont des procédures collectives qui prennent plus en compte
l'intérêt de l'entreprise. La sauvegarde de l'entreprise du
débiteur y occupe une place importante146. La place de
l'intérêt du créancier arrive en second lieu. Sans revenir
sur les inopposabilités de la période suspecte et la masse des
créanciers qui caractérisent le redressement judiciaire et la
liquidation des biens, la recherche de l'intérêt du
créancier se vérifiera sur les points communs au redressement
judiciaire et au règlement préventif et sur des points qui sont
propres à ce dernier.
Le règlement préventif et le redressement
judiciaire sont caractérisés par l'octroi des remises de dettes
et des délais de paiement que les créanciers accordent à
leur débiteur dont l'entreprise est en difficulté. Ces
délais et remises qui restreignent leurs droits orientent en quelque
sorte leurs intérêts. Ainsi, ils seront payés au fur et
à mesure que ces échéances arriveront.
Dans le règlement préventif, bien que la
priorité soit accordée au redressement de l'entreprise, certains
créanciers peuvent ne pas subir l'ouverture de la procédure, et
leur intérêt est totalement préservé.
Les procédures collectives d'apurement du passif sont,
on l'a vu des voies d'exécution collectives en ce sens qu'elles
réservent une place importante aux intérêts des
créanciers pris
146 V. infra.
collectivement. Ces voies d'exécution collectives
s'éloignent des voies d'exécution classiques car elles
détiennent une certaine spécificité.
Section 2 : La procédures collective, voies
d'exécution spécifiques
Les procédures collectives sont des voies
d'exécution collectives. Elles utilisent la méthode des voies
d'exécution en les déformant quelque peu. Surtout elles mettent
l'accent sur la protection du débiteur (Paragraphe 2) pour bien
gérer l'entreprise en difficulté. Elles sanctionnent aussi
certains débiteurs défaillants, car, ils peuvent être
à l'origine de certains incidents (Paragraphe 1).
Paragraphe 1 : La spécificité à
travers les incidents et les sanctions
Il importe d'étudier d'abord les incidents (A) avant de
nous interroger sur les sanctions de la procédure collective (B).
A- Les incidents de la procédure
collective
Relativement à son exécution et à ses
rapports avec les voies d'exécution, on peut relever deux incidents de
la procédure collective : la périodicité pour subir une
autre procédure collective (2) et les cas d'ouverture d'une seconde
procédure collective (1).
1- Les cas d'ouverture d'une seconde procédure
collective
Sous le chapitre 5 de l'Acte uniforme sur les
procédures collectives, intitulé solution du redressement et de
la liquidation des biens, la section 5 est consacrée à la
survenance d'une seconde procédure collective. Cette survenance d'une
seconde procédure collective est liée au fait que le concordat de
redressement ait été remis en cause. Cette remise en cause du
concordat est tributaire de certains agissements qu'aurait causés le
débiteur. Ces actes du débiteur pourront entraîner soit
l'annulation, soit la résolution du concordat147 ou
l'ouverture simple d'une seconde procédure collective.
Par rapport à l'avenir l'effet commun de la
résolution et de l'annulation du concordat est la conversion du
redressement judiciaire en liquidation des biens. Cette conversion
entraîne elle-même des conséquences. Une nouvelle
procédure va s'ouvrir alors que les effets de l'ancienne ne vont pas
disparaître totalement. Les nouveaux créanciers sont
invités à produire et leurs créances seront
vérifiées sans délai. Quant aux créanciers
antérieurement admis, ils sont d'office reportés sur le nouvel
état des créances sous déduction des dividendes qu'ils
auraient éventuellement reçus dans la première
procédure.
Sous la section 5 du chapitre 5 précité, la
survenance d'une seconde procédure collective n'est pas la suite d'une
annulation ou d'une résolution148.
L'ouverture d'une seconde procédure collective
s'écarte des voies d'exécution au sens classique en ce qu'ici,
tout est mis en oeuvre pour vendre le bien ou pour se faire attribuer au cas
où le débiteur ne le fait pas dans le délai qui lui est
imparti. Il en est de même de la périodicité.
147 Pour l 'annulation et la résolution du concordat,
lire P. G. POUGOUE et Y. KALIEU, op. cit. n° 241 et s.
148 V. art.144 AUP CAP.
2- La périodicité pour subir une
procédure collective
Après avoir été l'objet d'une
procédure collective qui s'est bien soldé, le débiteur
dispose d'une certaine période pour se voir encore accorder une telle
mesure de redressement. C'est le cas en matière de règlement
préventif. L'article 5 alinéa 3 de l'acte uniforme sur les
procédures collectives énonce qu'« Aucune
requête en règlement pré ventif ne peut être
présentée par le débiteur avant l'expiration d'un
délai de cinq ans suivant une précédente requête
ayant abouti à une décision de règlement préventif
». Seulement cette disposition n'a pas précisé ce qu'il
y a lieu de faire dans un tel cas.
Dans les procédures civiles d'exécution la
saisie d'un débiteur n'est pas limité, il suffit que le bien
possédé par le débiteur soit un bien saisissable et que le
créancier remplisse les conditions requises pour pratiquer une saisie.
Ici, la sanction que peut subir le débiteur est
généralement civile alors que la procédure collective se
rebelle par une pléthore de sanctions pénales.
B- Les sanctions de la procédure
collective
Les sanctions de la procédure collective ont trait
tantôt au patrimoine du débiteur (1), tantôt à sa
personne (2).
1- Les sanctions patrimoniales
Les sanctions patrimoniales des procédures collectives
concernent les dirigeants et dans certains cas les membres ou associés
des personnes morales. Elles consistent en l'extension du passif social aux
dirigeants et à l'extension de la procédure collective aux
dirigeants. Rappelons que ces sanctions font partie de l'objet
des procédures collectives. C'est du moins ce qu'énonce l'article
1er AUPCAP : « Le présent Acte uniforme a pour objet
: - de définir les sanctions patrimoniales relatives à la
défaillance du débiteur et des dirigeants de l'entreprise
débitrice ».
Il ne fait donc aucun doute que les procédures
collectives s'occupent des sanctions patrimoniales. Elles le font d'ailleurs
comme les voies d'exécution. Mais à la différence de
celles-là, celles-ci ne parlent que des dommages et
intérêts, et n'intègre pas les sanctions dans leur objet.
Ceci est vérifiable même lorsqu'il s'agit des sanctions
extrapatrimoniales.
2- Les sanctions extrapatrimoniales
Comme les sanctions patrimoniales, les sanctions
extrapatrimoniales, au terme de l'article 1er AUPCAP font partie de
l'objet des procédures collectives. Ces sanctions sont les sanctions
civiles et les sanctions pénales. La sanction civile qui est la faillite
personnelle correspond à un ensemble de déchéances
civiques et surtout professionnelles que va subir le failli dans sa personne et
dans ses biens. Le failli perd les droits rattachés à la
qualité de commerçant, est exclu des fonctions administratives,
ne peut plus être éligible ou électeur aux fonctions
publiques.
Les sanctions pénales de leurs côtés sont
constituées de la banqueroute et des sanctions assimilées. Le
règlement préventif, le redressement judiciaire, la liquidation
des biens n'entraînent pas par eux-mêmes la condamnation
pénale du débiteur. Il n'en va autrement que lorsque des fautes
précises ont été commises.149
Rien de tel n'existe dans les voies d'exécution. Les
voies d'exécution prévoient certes des sanctions civiles,
professionnelles et pénales mais qui jouent un rôle subsidiaire
dans
149 Pour l'énumération de ces
différentes fautes, lire P.G. POUGOUE et Y. KALIEU, op. cit. n°321
et s.
l'exercice des voies d'exécution. Il en est de même
de la protection du débiteur qui est moins accentuée dans les
voies d'exécution.
Paragraphe 2 : La spécificité par le souci
accentué de la protection du débiteur
S'il est incontestable que les voies d'exécution
s'occupent de la protection et de l'intérêt du débiteur, il
n'en demeure pas moins que cette protection soit limitée. Contrairement
aux voies d'exécution, les procédures collectives consacrent une
protection accentuée du débiteur. Cette protection est
élevée dans le règlement préventif et le
redressement judiciaire (A) et moins élevée dans la liquidation
des biens (B).
A- Dans le règlement préventif et le
redressement judiciaire
Le règlement préventif et le redressement
judiciaire sont des procédures collectives destinées en
priorité au redressement de l'entreprise à travers le concordat.
Le débiteur est protégé à travers son entreprise.
Et, on voit nettement la distinction opérée entre le sort de
l'homme et le sort de l'entreprise.
Dans le règlement préventif, la
possibilité est accordée au débiteur dont l'entreprise
connaît une situation difficile mais non irrémédiablement
compromise de s'adresser au tribunal pour voir son entreprise redressée.
C'est ainsi que l'Acte uniforme lui permet de choisir les créanciers
qu'il veut voir les poursuites suspendre afin de préparer un concordat
préventif.
Dans le redressement judiciaire, on laisse la
possibilité au débiteur dont l'entreprise est en état de
cessation des paiements de pouvoir redresser son entreprise à travers le
concordat de redressement.
Comme on peut le constater, la sauvegarde de l'entreprise qui
sous-entend la protection de l'intérêt du débiteur est
capitale dans le règlement préventif et le redressement
judiciaire. La protection du débiteur est justifiée par le fait
qu'au-delà de sa protection individuelle, c'est celle de l'emploi qu'on
préserve et même de l'économie nationale toute
entière.
Dans la liquidation judiciaire par contre, l'accent est mis
sur l'intérêt des créanciers.
B- Dans la liquidation des biens
Il convient de rappeler que la liquidation des biens est une
procédure qui a pour objet la réalisation des biens du
débiteur pour apurer son passif. Comme le redressement judiciaire, elle
s'applique au débiteur qui a cessé ses paiements.
C'est dans cette procédure de liquidation des biens que
la protection du débiteur est sacrifiée au profit de
l'intérêt des créanciers. Retenons tout simplement que dans
cette procédure, il y a possibilité pour le débiteur
d'être relevé de ses sanctions. Ce relèvement de la
faillite personnelle encore appelé réhabilitation signifie que le
failli est relevé des différentes déchéances avant
l'expiration de la durée normale. Elle est prévue et
organisée par les articles 204 à 215 de l'AUPCAP qui
prévoient les cas de réhabilitation et la procédure de
réhabilitation elle-même150.
150 Pour le relèvement de la sanction, lire P. G.
POUGOUE et Y. KALIEU, op. cit. n° 314 et s.
CONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE
Interrogé sur la question de savoir si
procédures collectives et voies d'exécution, malgré le
caractère quasi-absolue de l'interdiction de celles-ci par l'ouverture
de celles-là pouvaient cohabiter, nous avons répondu à
travers une analyse qui prend en compte toutes les étapes de
l'exécution des mesures prises dans les procédures collectives,
et les méthodes qu'utilisent les voies d'exécution. De là,
on aboutit à une admission non contestée des voies
d'exécution dans les procédures collectives. Cette admission peut
être directe ou indirecte. Directe, on voit le jeu des voies
d'exécution exercées sur des créances postérieures
et celles utilisées par ceux dont les poursuites n'ont pas
été suspendues : nous avons retenues ici que celles-ci
étaient simplement admises. A côté de celles simplement
admises, on a aussi noté l'admission spéciale de la saisie
conservatoire des créances et de la saisie-attribution. Les voies
d'exécution trouvent également leur admission directe dans les
procédures collectives par la réalisation de l'actif du
débiteur dans la liquidation des biens.
Le remède de l'anéantissement des voies
d'exécution par l'ouverture des procédures collectives est
l'organisation de ces procédures collectives elles-mêmes. Car les
procédures collectives constituent en quelque sorte des voies
d'exécution collectives dotées d'une spécificité
propre.
CONCLUSION GENERALE
A l'analyse, on ne peut que constater les interférences
réciproques entre procédures collectives et voies
d'exécution. Ces interférences sont les conséquences des
rapports que ces deux procédures entretiennent entres elles. Leurs
rapports sont tantôt des rapports de conflit, tantôt ceux de
substitution. A la vérité, les rapports de conflits sont
hiérarchisés et présente en amont les rapports de
suprématie et en aval les rapports de collaboration.
Les rapports de suprématie ou de
supériorité de la procédure collective sur les voies
d'exécution sont une consécration de l'acte uniforme OHADA sur
les procédures collectives. Cet Acte uniforme énonce en ses
articles 9 al. 2 et 75 al. 1 la paralysie des voies d'exécution par
l'ouverture des procédures collectives. Cette paralysie qui a un
caractère d'ordre public s'applique aussi bien à la saisie
mobilière qu'à la saisie immobilière. Derrière le
caractère d'ordre public de cette mesure se cache la qualité du
juge compétent pour résoudre les difficultés
résultant de la suspension ou de l'arrêt des voies
d'exécution. Même si la jurisprudence semble considérer la
suspension uniquement comme une difficulté d'exécution en
attribuant la compétence au juge de l'exécution, il y a lieu de
constater que la loi n'a pas tranché le problème et son
interprétation laisse croire que les problèmes liés
à la suspension sont à la fois les difficultés
d'exécution et les contestations liées à
l'exécution des procédures collectives. Le caractère
ravageur des procédures collectives peut justifier cette double
compétence.
La paralysie des voies d'exécution se justifie
nettement par le fait que les effets de la décision d'une
procédure collective l'apparente à une voie d'exécution,
mais une voie d'exécution collective qui peut collaborer de façon
exceptionnelle avec les voies d'exécution. Mais comment concilier deux
procédures qui doivent être constamment en conflit. Les actes
uniformes sur les voies d'exécution et sur les procédures
collectives donnent un large champ
d'activité à la jurisprudence chargée de
les appliquer en conciliant l'intérêt individuel du
créancier cherchant à contraindre son débiteur
défaillant à exécuter ses obligations et
l'intérêt collectif des créanciers soumis à une
procédure collective qui en outre, dans la phase de redressement,
poursuit d'autres buts que l'exécution des biens du débiteur. Ces
intérêts sont antagonistes lorsqu'il faut déterminer le
moment où prend effet l'arrêt des poursuites individuelles et la
portée des saisies sur des créances à terme ou en germe et
la saisieattribution. Ils le sont également au sein de la
procédure collective lorsque les créanciers de la
procédure s'emparent de ces voies d'exécution. Ils ne le sont pas
lorsque des mesures sont adoptées pour améliorer
l'efficacité de la réalisation forcée des immeubles du
débiteur en liquidation des biens.
Quoi qu'il en soit, le dessaisissement du débiteur et
l'indisponibilité de ses biens par l'ouverture d'une procédure
collective, le caractère collectif et égalitaire des
procédures collectives, les modalités d'exécution des
mesures prises dans les procédures collectives font de la
procédure collective une voie d'exécution collective.
BIBLIOGRAPHIE
I- Textes législatifs
1- Acte uniforme OHADA portant organisation des
procédures collectives d'apurement du passif.
2- Acte uniforme OHADA portant organisation des
procédures simplifiées de recouvrement et des voies
d'exécution.
II- Jurisprudence
1- T.G.I de Ouagadougou, jugement N° 234 du 29 mars 2000 :
ohadata J-04-180.
2- Tribunal Régional hors classe de Dakar, jugement
N° 1538 du 8 août 2000 : ohadata J-04- 342.
3- Cour d'Appel d'Abidjan, Chambre Civile et Commerciale,
arrêt n° 89 du 16 janvier 2001, ohadata J-02-80
4- Cour d'Appel d'Abidjan, arrêt N° 1129 du 8
novembre 2002 : ohadata J-03-291.
5- Tribunal de Travail hors classe de Dakar, Ordonnance de
référé N° 8 1/465 du 4 mars 2003 : Site internet
lexinter.net/jurafrique.
6- T.P.I de Libreville, Ordonnance de
référé, répertoire N° 7 14/2002-2003 du 26
septembre 2003 : ohadata J-04-145.
III- Ouvrages généraux
1- ANOUKAHA (F), TJOUEN (A, D), Les procédures
simplifiées de recouvrement et les voies d'exécution en OHADA,
collection droit uniforme, PUA, 1999.
2- ASSI-ESSO (A-M), NIAW DIOUF, OHADA, Recouvrement des
créances, collection droit uniforme africain, Juriscope, Bruylant,
2002
3- DEBBASCH (C) et RICCI (J-C), Contentieux administratif,
4ème éd. Précis Dalloz, Paris CEDEX, 1985.
4- LE CORRE (P,M), Le créancier face au redressement
judiciaire et à la liquidation judiciaires des entreprises, P.U.A.M. T.
1, 2000.
5- LE CORRE (P,M), Le créancier face au redressement
judiciaire et à la liquidation judiciaires des entreprises, P.U.A.M. T.
2, 2000.
6- POUGOUE (P-G) et KALIEU (Y), L'organisation des
procédures collectives d'apurement du passif OHADA, PUA, Collection
droit uniforme, 1999, 232 pages.
7- SAWADOGO (F, M), OHADA, Droit des entreprises en
difficulté, collection droit uniforme africain, Juriscope, Bruylant,
2002.
8- TIGER (P), le droit des affaires en Afrique, QSJ, PUF,
1999.
IV- Articles de doctrine
1- CAMPANA (M,J), L'amélioration du droit des
créanciers, Petites Affiches, N°147, 8 décembre 1993
2- COUDERT (J-L), Dans les procédures collectives
l'égalité des créanciers est-elle un mythe ou une
réalité ?, Petites Affiches, N° 103, 26 août 1992
3- GHOZY (A), Nature juridique de la production des
créances dans les procédures de règlement du passif,
R.T.D.Com, 1978.
4- GUYON (Y), Entreprise en difficulté (Avant-propos),
Répertoire commercial Dalloz, mars 1996.
5- GUYON (Y) et DERRUPE (J), Entreprises en difficulté
-redressement judiciaire (phase de traitement)- les créanciers,
Rép. Com. Dalloz, septembre 1996.
6- MONSERE, Entreprises en difficulté -redressement
judiciaire (période d'observation,
Rép. Com. Dalloz, mars 1997.
7- TCHANTCHOU (H), Le contentieux de l'exécution et des
saisies dans le nouveau droit OHADA (art. 49 AUPSRVE), J.P. N° 46,
Yaoundé, PUA, 2001, PP. 98 à 105. 8- TCHOKOMAKOUA (V), La
réforme du cadre juridique des entreprises du secteur public et
parapublic, J.P. N° 26, Yaoundé, PUA, avril-mai-juin 1996, PP.97
à 102.
V- Sites Internet
1-
lexinter.net/jurafrique
2-
www.juris.freesurf.fr
3-
www.ohada.com
4-
www.ohada.org
5-
www2.univ-lille2.fr
TABLES DES MATIERES
Pages
Dédicace .. iii
Remerciements iv
Principales abréviation .. v
SOMMAIRE .. vii
RESUME viii
SUMMARY ix
INTRODUCTION .. 1
PREMIERE PARTIE : LA PARALYSIE DE PRINCIPE DES VOIES
D'EXECUTION PAR L'OUVERTURE DES PROCEDURES COLLECTIVES 7
CHAPITRE 1 : FONDEMENT ET ETENDUE MATERIELLE DU BLOCAGE
8
Section 1 : Le fondement de la suspension des voies
d'exécution 8
Paragraphe 1 : Le dessaisissement et l'indisponibilité
9
A- L'idée du dessaisissement . 9
1- L'exclusion du dessaisissement dans le règlement
préventif 9
2- La validité du dessaisissement dans le redressement
judiciaire et la liquidation des biens .. 11
a- Le domaine du dessaisissement 11
b- Les effets du dessaisissement 12
B- L'indisponibilité des biens du débiteur 14
Paragraphe 2 : le caractère collectif et
égalitaire des procédures collectives 15
Pages
A- Le traitement collectif et égalitaire des
créanciers 15
B- La portée du caractère collectif et
égalitaire des procédures collectives .. 17
1- Dans le règlement préventif .. 17
2- Dans le redressement judiciaire et la liquidation des biens .
18
Section 2 : L'étendue matérielle du blocage
. 19
Paragraphe 1 : Les voies d'exécution paralysées par
les procédures collectives 20
A- Les voies d'exécution ayant une nature
exécutoire 20
1- Application de la suspension des poursuites à la
saisie mobilière 20
2- Application de la suspension des poursuites à la
saisie immobilière 21
B- Les voies d'exécution ayant une nature conservatoire .
21
Paragraphe 2 : La période de la suspension des voies
d'exécution 23
A- La période de << la suspension >> des
voies d'exécution 23
B- La période de l' << interdiction >> des
voies d'exécution 25
CHAPITRE 2 : CHAMP D'APPLICATION DU BLOCAGE DES VOIES
D'EXECUTION . 28
Section 1 : Champ d'application quant aux personnes
. 28
Paragraphe 1 : L'application de la mesure au
bénéfice du débiteur .. 28
A- Le débiteur concerné par la mesure 29
B- Le débiteur extérieur à la mesure 30
Paragraphe 2 : L'application de la mesure au préjudice du
créancier 31
A- Les créanciers soumis à la suspension des voies
d'exécution 31
B- Les créanciers non soumis à la suspension des
voies d'exécution . 33
Section 2 : Champ d'application quant aux juridictions
. 34
Paragraphe 1 : Les juridictions soumises à la suspension
34
A- La soumission non équivoque des juridictions civiles .
35
1- Le juge compétent pour ordonner la suspension . 35
2- Le sort de la décision de suspension devant le juge de
l'exécution 37
B- La question de la suspension devant les juridictions autres
que civiles 38
1- Le problème de la suspension devant le juge
administratif 38
2- Le problème de la suspension devant le juge
pénal 40
Paragraphe 2 : Le caractère d'ordre public de la
suspension des voies d'exécution 41
A- La suspension des voies d'exécution, une mesure d'ordre
public 41
1- L'ordre public interne 41
2- L'ordre public international .. 42
B- La sanction de la violation de la suspension . 43
1- La nature de la sanction : l'inopposabilité . 44
2- Les effets de la sanction . 44
a- La mainlevée de la saisie . 44
b- La discontinuité de la poursuite 45
CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE 46
DEUXIEME PARTIE : L'ADMISSION D'EXCEPTION DES VOIES
D'EXECUTION DANS LES PROCEDURES COLLECTIVES 47
CHAPITRE 1 : L'ADMISSION DIRECTE DES VOIES
D'EXECUTION
DANS LES PROCEDURES COLLECTIVES 48
Section 1 : Les voies d'exécution
indifférentes aux procédures collectives 48
Paragraphe 1 : Les voies d'exécutions simplement admises
. 49
A- Les voies d'exécution non suspendues 49
B- Les voies d'exécution exercées sur des
créances postérieures 50
1- La liberté de poursuite des créanciers
postérieurs .. 50
2- La portée de la liberté de poursuite des
créanciers postérieurs .. 52
Paragraphe 2 : Les voies d'exécution spécialement
admises 54
C- La saisie conservatoire des créances .. 54
B- La saisie-attribution 55
1- L'effet immédiat de la saisie attribution, cause de
son admission
législative dans les procédures collectives 56
2- Les différentes applications . 58
Section 2 : La réalisation de l'actif de
l'entreprise par l'utilisation
des voies d'exécution . 60
Paragraphe 1 : Une saisie immobilière absorbée par
la procédure collective . 61
A- La protection du débiteur dans le cadre de la
procédure collective 61
B- Un régime dérogatoire au droit commun . 63
Paragraphe 2 : Une saisie immobilière
déformée par la procédure collective . 64
A- La nécessité de l'ordonnance du juge
commissaire 64
B- La répartition du prix par le syndic 66
CHAPITRE 2 : LA SUPPLEANCE DES VOIES D'EXECUTION PAR LES
PROCEDURES COLLECTIVES 68
Section 1 : La procédure collective, voie
d'exécution collective 68 Paragraphe 1 : Traits communs
quant aux finalités des procédures collectives
et des voies d'exécution 69
A- Paiement des créanciers . 69
B- Mesures forcées de désintéressement .
71
Paragraphe 2 : La recherche de l'intérêt du
créancier 73
A- La recherche principale de l'intérêt du
créancier dans la liquidation des biens 73
B- La place secondaire de l'intérêt du
créancier dans le règlement préventif et le redressement
judiciaire 75
Section 2 : Les procédures collectives, voies
d'exécution spécifiques 76
Paragraphe 1 : La spécificité à travers les
incidents et les sanctions 76
A- Les incidents de la procédure collective . 76
1- Les cas d'ouverture d'une seconde procédure collective
77
2- La périodicité pour subir une procédure
collective 78
|
Pages
|
B- Les sanctions de la procédure collective
|
|
78
|
1- Les sanctions patrimoniales ..
|
78
|
|
2- Les sanctions extrapatrimoniales
|
79
|
|
Paragraphe 2 : La spécificité par le souci
accentué de la protection du débiteur
|
|
80
|
A- Dans le règlement préventif et le redressement
judiciaire
|
|
80
|
B- Dans la liquidation des biens
|
|
81
|
CONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE
|
|
82
|
CONCLUSION GENERALE
|
|
83
|
BIBLIOGRAPHIE
|
|
85
|
TABLE DES MATIERES
|
|
88
|
|