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La question Kaliningrad dans les relations UE - Russie

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par Hafid ASSAOUI
Université de Perpignan - Master 2 droit public 2007
  

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Paragraphe 2 : L'avenir de Kaliningrad dans le co-pilotage

Kaliningrad a bénéficié d'un traitement spécifique de la part de la Russie, qui lui a accordé le statut de Zone économique spéciale (ZES). Ses résultats sont mitigés, malgré une très forte reprise de la croissance économique depuis la crise de 1998. Ceci pose la double question de l'ancrage des mesures dans le long terme, mais aussi d'une meilleure articulation avec les stratégies et les politiques européennes liées à l'élargissement de l'UE à la Pologne et aux Etats baltes. N'y aurait-il pas une possibilité de co-pilotage de la région pilote?

A/ Les résultats mitigé de la Zone économique spéciale

Afin d'aider au passage d'un modèle de développement basé sur une économie militarisée, largement dépendante du centre (économie de garnison) à une économie de marché dans des conditions d'enclavement, une Zone économique libre, couvrant la totalité du territoire de l'enclave, a été créée en 1991, transformée depuis en Zone économique spéciale. Les principes de son fonctionnement tiennent à deux mesures en particulier : la première est liée à l'exemption de droit de douanes à l'importation, dans une limite fixée par des quotas. La seconde consiste en l'exemption de droit de douanes à l'importation de produits intermédiaires pour les biens produits à Kaliningrad dans le cadre de la ZES (30 % de valeur ajoutée locale pour les biens manufacturés, 15 % pour les biens électroniques). L'objectif de limiter les coûts de transactions supplémentaires engendrés par la position de Kaliningrad a conduit à des résultats mitigés.

D'une part, les privilèges commerciaux ont compensé les coûts d'esclave et ont limité les tensions sociales. La demande locale a pu bénéficier de produits alimentaires au meilleur prix (exempts de droits de douane) et du taux d'inflation le plus modeste en Russie sur la période 1996-1999, sans compter les importants effets induits, principalement dans l'économie parallèle, permettant des revenus additionnels pour une large part de la population. Malgré tout, la restructuration dans la région est lente et circonscrite à quelques secteurs. La plupart des entreprises ont préféré jouer une stratégie à court terme de gestion de leur rente, aidées en cela par une diminution du coût des intrants permise par la ZES.

Sur la période 1991-2000, le produit régional brut de Kaliningrad a chuté de 55 % contre 42 % pour tout le district Nord-Ouest. En terme de revenu par habitant, avec 4 400 dollars, Kaliningrad est l'avant-dernière région sur les dix du district. Les investisseurs étrangers, censés être attirés par la ZES, n'ont apporté que 70 millions de dollars. Finalement, la Zone a largement joué pour les individus, mais n'a pas eu les effets escomptés sur la restructuration du tissu économique local.

Les raisons de ce semi-échec tiennent en premier lieu à la façon dont a été pensée la zone. A l'inverse des modèles existants dans le monde, le choix a été fait d'en étendre le principe à tout le territoire, ce qui a eu pour effet de limiter les autres moyens de la politique d'aménagement du territoire et de placer la région dans une situation de dépendance à l'égard de cet instrument. D'autre part, il existe encore des ambiguïtés entre la ZES et la législation fédérale qui restent une source de querelles juridiques .75(*)

A ce jour, la ZES a surtout permis d'exploiter des rentes d'intermédiation dans le domaine des importations, au détriment des autres régions russes. Ces bénéfices commerciaux, restés pour une large part dans l'ombre, ont néanmoins eu le mérite de positionner la région comme un axe commercial en matière de transports et de services qui lui sont associés. Le volume du commerce par habitant est par exemple trois fois supérieur à la moyenne russe. Les rares estimations faites, dont les nôtres, concernant l'économie informelle prêtent à celle-ci une importance égale, voire supérieure, à l'économie formelle. D'autres éléments montrent l'émergence d'une économie souterraine puissante.

La crise financière de 1998, avec la dévaluation consécutive du rouble, a néanmoins limité ce phénomène de rente d'intermédiation, poussé certains secteurs à des stratégies d'import -substitution et relancé l'économie locale. Kaliningrad a également bénéficié de revenus commerciaux pétroliers générés par des prix élevés de l'énergie sur le marché mondial. Ceci a eu des effets d'entraînement sur la demande locale, en particulier industrielle. En conséquence, en 2000 le taux de croissance de 14,4 % s'est avéré largement supérieur à la moyenne russe (8,3 %).

Cette tendance semble se confirmer, selon Goskomstat en 2001 où Kaliningrad atteindrait un taux de croissance de l'ordre de 6%, contre 5% pour la Russie.

Cependant, ces effets conjoncturels ne doivent pas masquer la nécessité d'une restructuration profonde et d'une préparation à l'élargissement prochain de l'UE à la Pologne et la Lituanie voisines. Le risque existe que Kaliningrad soit confinée dans une situation d'isolement marqué du fait d'une différence de traitement par rapport à ses voisins européens, cette différence de traitement touchant en premier lieu à la mobilité des personnes. Cette coupure risque également de faire perdre à Kaliningrad ses possibilités d'approvisionnement énergétique . Elle met aussi en jeu une partie non négligeable du trafic organisé par les tchelnoki, vendant cigarettes, vodka et essence. Ce marché important, non déclaré mais pas criminel pour autant, est organisé avec l'appui des douaniers et joue dans une large mesure le rôle d'amortisseur social. L'accès aux marchés de l'Europe communautaire risque également d'être compliqué dans certains secteurs comme l'agriculture et la pêche, sans aborder la question des standards. Enfin, Kaliningrad ne bénéficie pas des programmes de politiques structurelles et de pré-adhésion.

Si les choses restent en l'état, on peut craindre qu'un écart grandissant de développement économique, mais aussi social, ne s'installe durablement et ne mette en péril l'équilibre de la région par des crispations identitaires. Le différentiel de développement est déjà important, si l'on en juge par le PNB par habitant qui représente la moitié du PNB des pays Baltes, seulement le tiers de celui de la Pologne et le sixième de celui des pays scandinaves. Il est crucial que Kaliningrad résolve ces problèmes de visas et de transit, non seulement pour des raisons qui tiennent à la mobilité des personnes, mais surtout parce qu'elle est devenue une région largement ouverte sur l'extérieur et que son intégration dans l'ensemble baltique est un gage de son développement et de stabilité de la zone.

* 75 Par exemple, l'article 10 de la ZES permet des exemptions de taxes pour les investisseurs. IL entre en contradiction avec le Code fiscal de la fédération de Russie, qui a l'exclusivité de al régulation des privilèges fiscaux

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"I don't believe we shall ever have a good money again before we take the thing out of the hand of governments. We can't take it violently, out of the hands of governments, all we can do is by some sly roundabout way introduce something that they can't stop ..."   Friedrich Hayek (1899-1992) en 1984