SECTION 2 : L'AVENIR DE KALININGRAD
Paragraphe 1 : scénarios possibles des relations
entre Kaliningrad et l'UE
La question de l'ouverture internationale de pays en
transition, et par extension, de leur intégration à
l'économie mondiale, est depuis treize ans au centre des débats
sur les politiques de transformation systémique. Cette question
revêt un caractère particulier au regard du dialogue engagé
entre la Russie et l'UE, pour lequel Kaliningrad représente une
pièce important du puzzle, que ce soit sur la question des visas ou sur
celle de la coopération transfrontalière. Selon
P.Joenniemi72(*), trois
scénarios d'ouverture sont envisageables dans le cas de la région
de Kaliningrad.
A/ Scénario 1: Le choix de l'indifférence
Dans ce scénario, les relations entre Kaliningrad
et l'UE se poursuivent sans prendre en compte les conséquences de
l'élargissement de l'UE. Des projets d'assistance technique divers sont
toujours réalisés, mais ils demeurent intégrés
à un programme d'action consacré à la Russie dans son
ensemble.
Cette option souffre de l'absence d'une réelle
stratégie adaptée à la situation d'enclave au sein de
l'UE. Au lieu de coopérer avec Kaliningrad dans une perspective
régionale, l'UE ne fournit que des aides ponctuelles et circonscrites
à certains domaines, comme l'assistance médicale. Les actions
politiques à l'égard de Kaliningrad, bien qu'importantes, ne font
pas l'objet d'une aide intégrée tenant compte des
réalités locales. D'autres formes de coopération
ponctuelles pourraient être amplifiées : le renforcement de la
présence de Kaliningrad dans les eurorégions de la Baltique et de
Niémen , les projets Interreg III , la Dimension
septentrionale ou l'Initiative de Nida
[8]
entre la Russie et la Lituanie pour améliorer les transports, la
qualité de l'environnement, la santé publique et le
contrôle douanier.
L'option de l'indifférence est de loin la plus
improbable. Pourtant, pendant les années 1990, Kaliningrad a souffert du
désintérêt de la "grande Russie" comme de celui de l'UE,
soucieuse de ne pas être suspectée d'ingérence. Mais un
espace de près d'un million d'habitants occupant une telle position
centrale dans la zone de la Baltique ne saurait être abandonné
à la dérive. Tous les acteurs comprennent qu'il serait bien
irresponsable à long terme de rester dans une indifférence qui
pourrait mettre en péril la pérennité économique de
la zone.
B/ Scénario 2 : Le choix de l'isolement
Dans ce scénario, l'UE considère que le
retard économique et social accumulé par Kaliningrad par rapport
à ses voisins baltes est tel qu'une aide, aussi cher payée
soit-elle par les contribuables européens, ne peut être rentable ;
ce problème incombe donc à la seule Russie. Trois raisons
alimenteraient cette position : il apparaît d'abord très difficile
pour l'UE d'offrir à la région russe un niveau d'aide
équivalent à celui attribué aux Etats candidats à
l'adhésion 73(*) ; ensuite, la Russie dans son ensemble est
très loin d'atteindre un niveau acceptable en matière
d'économie de marché et de fonctionnement démocratique ;
enfin, la Russie pourrait se montrer réticente à toute
implication étrangère directe sur son territoire.
Ce scénario, au mieux favorise le renforcement du
secteur informel, au pire conduit à la crise et au déclin, la
criminalité transfrontalière augmentant en particulier,
menaçant à terme la stabilité régionale. Ceci
encourage l'UE à renforcer son isolement par la stricte application de
l'accord de Schengen. En cas de dégradation plus prononcée de la
situation, avec l'apparition d'une épidémie contagieuse ou un
taux de criminalité très élevé, d'autres mesures
seront prises, telles la mise en place d'un «cordon sanitaire» autour
de la région. En cas d'aggravation de la situation et d'accroissement de
l'instabilité, l'UE n'a pas prévu de scénario de sortie de
crise pouvant y répondre efficacement.
* 72 Le courrier des
pays de l'est ; « RUSSIE -EUROPE vers quelle
intégration ? » ; mensuel N1025, la
documentation Française ; mai 2002, p37.
* 73 Interreg III est
l'initiative communautaire du fonds européen de développement
régional (FEDER) en faveur de la coopération entre régions
de l'Union européenne pour la période
2000-2006.http://europa.eu.int/comm/regional_policy/interreg3/index_fr.htm>.
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