La politique étrangère des Etats-Unis au
Venezuela, la période Chavez
(1999-2007)
SOMMAIRE
Introduction.............................................................................................................p.
4
I- L'action des Etats-Unis sur le plan politique : une
volonté de contrecarrer la « révolution
bolivarienne ».....................................................................................p.
8
A) La promotion de la
démocratie..........................................................................p.
8
B) Une volonté d'isoler le Venezuela, tant sur le plan
régional qu'international....p. 13
II- La politique étrangère américaine en
matière économique ou la protection des intérêts
vitaux
américains.......................................................................................p.
17
A) La défense des intérêts
économiques
américains..............................................p. 17
B) Une nouvelle politique
énergétique...................................................................p.
18
Conclusion..............................................................................................................p.
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INTRODUCTION
Tout au long du Xxe siècle, et
particulièrement depuis la Seconde Guerre Mondiale, les Etats-Unis ont
réussi à s'imposer comme un acteur incontournable des relations
internationales. En effet, depuis cette époque, les Etats-Unis ont
démontré à de nombreuses reprises leur capacité
à modifier le cours de la vie internationale. Leurs multiples
interventions, qu'elles soient diplomatiques ou militaires, directes ou
indirectes, mettent en lumière une volonté de jouer un rôle
prépondérant dans les affaires internationales, et ce, sur tous
les continents. La France et l'Allemagne à la fin de la Seconde Guerre
Mondiale, la Corée, Cuba, le Vietnam, la Grenade, le Nicaragua, la
Somalie, et, plus récemment, l'Afghanistan et l'Irak sont autant de
pays dans lesquels les Etats-Unis sont intervenus, avec plus ou moins de
succès selon les époques et les circonstances.
Egalement, sur le plan institutionnel, cette ambition se
traduit par la prééminence du Département d' Etat (il
s'agit de l'équivalent américain du Ministère des Affaires
Etrangères) au sein de l'administration fédérale. Les
services de ce Département d'Etat sont effectivement
particulièrement étoffés et le Secrétaire d'Etat,
personnage clé de l'administration, a vocation à seconder le
président dans la mise en oeuvre de la politique étrangère
des Etats-Unis.
En ce qui concerne l'Amérique du Sud, les
Etats-Unis ont démontré assez tôt l'intérêt
qu'ils portaient à ce sous-continent. Ainsi, James Monroe,
président des Etats-Unis de 1817 à 1825, est resté
célèbre pour avoir posé le principe de la non-intervention
des Européens dans les affaires de l'Amérique. C'est
effectivement le 2 décembre 1823, lors de son message annuel au
Congrès des Etats-Unis, que le président Monroe a prononcé
un discours à l'intention des puissances européennes. Il
s'agissait de ce qu'il est convenu d'appeler la doctrine Monroe. Selon
cette doctrine, toute intervention européenne, toute tentative de
colonisation d'une partie de l'Amérique par l'Europe était
proscrite. De la même façon, les Etats-Unis s'engageaient à
ne pas intervenir en Europe. Cette doctrine Monroe est importante
idéologiquement parlant dans la mesure où elle a fixé les
grandes orientations de la politique étrangère américaine
jusqu'au début du Xxe siècle et continue, d'une certaine
manière, à imprégner cette politique
étrangère de nos jours.
Tout au long du XIXe siècle et au début du
Xxe siècle, les Etats-Unis ont cherché à étendre
leur sphère d'influence à ce sous-continent qu'est
l'Amérique du Sud. Ainsi, la guerre contre le Mexique (1846-1848) permet
aux Etats-Unis d'acquérir le Nouveau-Mexique, l'Arizona et la
Californie. Plus tard, ils l'emportent face aux Espagnols à Porto-Rico
et à Cuba, qui devient une république indépendante. De la
même manière, les Etats-Unis font de Haiti et Saint-Domingue des
protectorats.
Au Xxe siècle, les Etats-Unis se montrent beaucoup
plus ambitieux dans leur politique étrangère
sud-américaine, n'hésitant plus à évincer certains
dirigeants dont les idées politiques sont, à leurs yeux,
incompatibles avec les intérêts américains. Ainsi, en 1973,
les Etats-Unis interviennent au Chili pour écarter le leader socialiste
Salvador Allende, qui est remplacé par Augusto Pinochet. De même,
quelques années plus tard, les Etats-Unis décident d'intervenir
au Nicaragua, dirigé par les sandinistes. Ces sandinistes se
réclament de Sandino, un patriote nicaraguayen assassiné par les
Américains en 1934. Craignant une montée du socialisme dans la
région et une propagation de celui-ci en Amérique du Sud, les
autorités américaines, dès la fin des années
soixante-dix, décident de tout mettre en oeuvre pour écarter les
sandinistes du pouvoir. Ainsi, l'administration de Ronald Reagan met sur pied
les contras, une force de 15000 hommes qui a vocation à
contrecarrer cette révolution sandiniste. Cependant, c'est sur le
terrain électoral, en 1989-1990, que les Américains parviennent
à leurs fins en réussissant à unifier les partis
politiques hostiles aux sandinistes. En effet, en 1990, Violeta Chamorro, la
candidate de l'UNO (Union nacional opositora), remporte les
élections face aux sandinistes. Par conséquent,
l'interventionnisme américain en Amérique latine apparaît
comme une véritable tradition, et semble avoir pris une importance
accrue dans la deuxième moitié du Xxe siècle.
Le Venezuela, quant à lui, est un pays dont
l'histoire récente est marquée par une succession de
régimes démocratiques, de tentatives de coups d'Etat et de
dictatures. Colonie espagnole, le Venezuela se révolte dès le
début du XIXe siècle. D'abord organisés par Miranda, ces
soulèvements le sont ensuite par Bolivar, surnommé el
Libertador. Ce dernier parvient à faire proclamer la
république de Grande-Colombie qui rassemble la Nouvelle-Grenade, le
Venezuela et l'Equateur. Par la suite, Bolivar réussit à
libérer la Colombie, la Bolivie ainsi que le Pérou actuels.
Cependant, la volonté de Bolivar d'unifier l'Amérique latine
reste un échec. La parenté idéologique entre Bolivar et le
dirigeant actuel du Venezuela, Hugo Chavez, est évidente. En effet, Hugo
Chavez a décidé de rebaptiser la République du Venezuela
en « République Bolivarienne du Venezuela ». De la
même manière, Hugo Chavez entend exporter sa révolution
bolivarienne et unifier l'Amérique latine. En d'autres termes, Hugo
Chavez se pose en héritier de Simon Bolivar et les
références au bolivarisme apparaissent comme un véritable
leitmotiv de son action politique.
En 1945, le dictateur Medina Angarita est
renversé et Romulo Betancourt, issu de l'Action Démocratique
(AD), devient président du Venezuela. Le pays entre alors dans une
transition démocratique : une nouvelle constitution est
promulguée en 1947 et le suffrage universel est instauré. Elu
président en 1947, l'écrivain Romulo Gallegos sera
renversé par l'armée. A partir de 1953, le pays est dirigé
par Pérez Jimenez et entre à nouveau dans une phase dictatoriale.
En janvier 1958, Pérez Jimenez est écarté du pouvoir
à son tour et est remplacé par l'ancien président Romulo
Betancourt. Ce dernier mène une politique de modernisation du pays, en
particulier dans les domaines de l'agriculture et de l'industrie. Au cours des
années soixante, une alternance voit le jour : l'AD (Action
Démocratique) et le COPEI (Parti social-chrétien) se
succèdent à la tête du pays au gré des
élections. Ainsi, en 1974, le pouvoir revient à l'Action
Démocratique. Carlos Andrés Pérez s'emploie alors à
mettre en lumière son hostilité à l'égard des
Etats-Unis. En effet, ce dernier critique la dictature du Chili et renoue des
relations diplomatiques avec Cuba. Dans une moindre mesure, sur le plan
économique, ce dirigeant décide de nationaliser le fer, l'acier
et le pétrole au milieu des années soixante-dix. Les
années quatre-vingt sont caractérisées par une crise
économique et par une défiance croissante du peuple à
l'égard des dirigeants vénézuéliens. C'est
pourquoi, en 1992, deux tentatives de coup d'Etat sont menées, dont
l'une par Hugo Chavez. Finalement, ces soulèvements militaires sont un
échec. En décembre 1993, Rafael Caldera, qui avait
accédé une première fois à la présidence en
1968, est réélu à la tête du pays. Ce dirigeant, sur
le plan interne, est animé par la volonté de répondre
à la crise économique et sociale. Sur le plan international,
l'action politique de cet homme est caractérisée par la recherche
d'un consensus avec les Etats-Unis. En effet, pendant la période
1993-1998, les relations entre le Venezuela et les Etats-Unis semblent assez
calmes, le Venezuela apparaissant comme un véritable partenaire des
Américains. Cependant, aux élections présidentielles de
1998, Hugo Chavez, à la tête du parti « Movimiento
Quinta Republica » (Mouvement Cinquième république),
remporte une large victoire électorale avec 56 % des voix. Il s'agit,
par ailleurs, du meilleur score jamais enregistré au Venezuela depuis
une quarantaine d'années. Officiellement investi président le 2
février 1999, Hugo Chavez fait rapidement proclamer une nouvelle
Constitution qui autorise des changements plus ou moins anecdotiques dans le
système politique vénézuélien. En effet, la
« République du Venezuela » devient la
« République Bolivarienne du Venezuela ». Outre ce
changement symbolique, la nouvelle Constitution abolit le Sénat, mettant
ainsi en place un système monocaméral. Egalement, le mandat du
président passe de 5 à 6 ans. Ce dernier, comme tout
fonctionnaire, peut faire l'objet d'un référendum
révocatoire. Cette procédure nouvelle permet au peuple de
destituer tout dirigeant vénézuélien, qu'il s'agisse du
président, d'un gouverneur ou d'un administrateur public. Cette
« Constitution Bolivarienne du Venezuela » a
été approuvée par un peu plus de 71 % des votants, ce qui
prouve que les vénézuéliens accordent une confiance
certaine à leur nouveau dirigeant.
Véritable chantre de l'anti-capitalisme, Hugo
Chavez entend remettre en cause le processus de privatisation de l'industrie
pétrolière engagé dans les années soixante-dix.
Plus généralement, le nouveau président se donne pour
objectif principal de modifier l'économie
vénézuélienne pour financer des programmes sociaux contre
la pauvreté et fournir des services sociaux aux
vénézuéliens dont les revenus sont les plus modestes. Sur
le plan international, Chavez entend remettre en cause la prétendue
suprématie américaine en Amérique du Sud. En d'autres
termes, il souhaite unifier l'Amérique latine contre des Etats-Unis
qu'il considère trop impérialistes, à l'instar de Simon
Bolivar qui avait libéré les peuples d'Amérique latine de
la tutelle coloniale à la fin du XIXe siècle.
Au début du premier mandat de Chavez, les
relations entre le Venezuela et les Etats-Unis apparaissent relativement
apaisées, l'administration Clinton se montrant assez indifférente
à l'égard du Venezuela. A cette époque, les relations
entre les deux pays semblent pacifiques et aucune tension majeure ne survient.
Cependant, l'arrivée à la Maison-Blanche de George W. Bush en
2000 va modifier durablement les relations qu'entretiennent ces deux pays.
Effectivement, le fait que Hugo Chavez soit idéologiquement proche de
Fidel Castro inquiète les Etats-Unis. Par ailleurs, Hugo Chavez
n'hésite pas à critiquer les bombardements américains en
Afghanistan, consécutifs aux attentats du 11 septembre 2001. Egalement,
sur le plan économique, les Etats-Unis sont dépendants du
pétrole vénézuélien, dont la production est
destinée en premier lieu à l'économie américaine.
Ainsi, en tant que membre de l'OPEP (Organisation des Pays Exportateurs de
Pétrole) depuis 1960, le Venezuela dispose d'une influence certaine sur
les prix du pétrole, et, de facto, sur la croissance économique
américaine.
Dès lors, en quoi l'arrivée au pouvoir
d'Hugo Chavez a-t-elle modifié de façon durable la politique
étrangère des Etats-Unis au Venezuela ? Quelles sont les raisons
qui ont incité les Etats-Unis à adopter une attitude nouvelle
à l'égard de ce pays d'Amérique latine ? Par ailleurs,
cette politique étrangère n'est-elle pas ambivalente ?
Ainsi, il apparaît que l'action des Etats-Unis sur
le plan politique, depuis 1999, vise à contrecarrer la
« révolution bolivarienne » engagée par Hugo
Chavez. Il s'agit tout d'abord de promouvoir la démocratie, les
Etats-Unis considérant que le Venezuela n'est qu'un semblant de
régime démocratique, c'est-à-dire un régime
autoritaire qui ne dirait pas son nom. Il s'agit également de
réduire l'influence de ce pays en essayant de l'isoler tant sur le plan
régional qu'international (I). Par ailleurs, la politique
étrangère des Etats-Unis au Venezuela est marquée par un
souci de protéger les intérêts vitaux américains. Il
s'agit en premier lieu de défendre les intérêts
économiques des Etats-Unis et en second lieu de mettre en oeuvre une
nouvelle politique énergétique, qui permettra à terme de
réduire la dépendance des Etats-Unis dans le domaine de
l'énergie (II).
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