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Société »
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UNIVERSITE DE NANTES - UNIVERSITE PARIS II PANTHEON ASSAS -
UNIVERSITE PARIS X NANTERRE - UNIVERSITE PARIS XII VAL DE MARNE - AGENCE
UNIVERSITAIRE DE LA FRANCOPHONIE
ANNEE UNIVERSITAIRE 2005-2006 LA
PROBLEMATIQUE DE L'INTEGRATION DE L'APPROCHE SEXOSPECIFIQUE DANS LES DROITS
DE LA PERSONNE: ETAT DES LIEUX ET PERSPECTIVES
MEMOIRE DE RECHERCHE POUR L'OBTENTION DU DIPLÔME
D'UNIVERSITÉ DE 3e CYCLE
"DROITS FONDAMENTAUX"
Présenté par : Mathilda Cica
DADJO
Tuteur : Marina EUDES
Chercheur au CRDH - Université de Paris II
Panthéon-Assas
Table des matières
Introduction...................................................................................................1
Premiere partie: le concept juridique de l'égalité
des sexes dans les droits
fondamentaux...............................................................................................5
Chapitre 1 : l' égalité des sexes comme un droit
fondamental.....................6
Section 1 Les fondements de l'égalité des ses
sexes dans les droits de la personne
humaine.
.................................................................................................................6
Paragraphe 1 Le
principe.......................................................................................6
Paragraphe 2.... Le passage du principe au droit : la Convention
pour l'élimination de toute forme de discrimination a l'égard des
femmes (CEDAW)..........................8
Section 2 La signification de l'égalité des
sexes..........................................................9
Paragraphe1
L'égalité...........................................................................................9
Paragraphe 2 Le principe de non discrimination
...............................................12
Chapitre 2 : Analyse critique des modes d'instrumentalisation
juridique de l'égalité des
sexes.........................................................................................15
Section 1 L'égalité par l'uniformisation :
l'égalité
formelle.......................................15
Paragraphe 1 L'égalité devant la
loi.....................................................................16
Paragraphe 2 L'égalité de traitement sans
discrimination..................................17
Section 2 L'égalité par la différenciation:
l'égalité des chances par les actions
positives 19
Paragraphe 1 La discrimination
positive............................................................20
Paragraphe 2 L'approche paritaire de l'égalité des
sexes..................................24
Deuxieme partie: Pour une égalité effective des
sexes, l'apport de l'approche sexospécifique aux droits humains
fondamentaux .................27
Chapitre 3 : L' importance de la question de
l'égalité des sexes................29
Section 1 la différence des sexes merite t-elle une
institutionnalisation dans les droits
fondamentaux7..................................................................................................29
Paragraphe 1 La différence des sexes comme
réalité universelle....................30
Paragraphe 2 L'universalité des disparités
liées a la différence des sexes......32
Section 2 la prise en compte des différences de sexes
dans Le systeme de protection des droits de l'homme des Nations
Unies..................................................36
Paragraphe 1 Les instruments normatifs sur
l'égalité des sexes.....................36
Paragraphe 2 Les plans d'actions des Nations
Unies.......................................39
Chapitre 4 : Vers une réinvention de l'egalite des
sexes............................42
Section 1 Pour une démarche sexospécifique dans la
protection des droits de
l'homme. 42
Paragraphe 1 De la nécessité de prise en compte des
rapports sociaux pour la construction de l'égalité des
sexes............................................................................43
Paragraphe 2 La démarche sexospécifique
appliquée aux droits fondamentaux44
Section 2 de l'égalité des droits au droit a
l'egalité...................................................47
Paragraphe 1 Le droit a
l'égalité.......................................................................47
Paragraphe 2 L'équité au service de
l'égalité....................................................50
CONCLUSION............................................................................................53
Bibliographie..............................................................................................55
INTRODUCTION
L'objectif des droits fondamentaux est de garantir une
société égalitaire qui assure la dignité ainsi que
le respect de tout être humain. Toutefois, il apparaIt clairement
aujourd'hui que si tout le monde ne jouit pas de ces droits fondamentaux de
part le monde, une tendance prononcée est la relation
inégalitaire qui existe entre les hommes et les femmes dans la
société1. Et ce, malgré la réaffirmation
de l'égalité des sexes par les déclarations, chartes et
pactes sur les droits fondamentaux2. De nombreux textes
spécifiques ont été également
élaborés pour lutter contre cette inégalité qu'on
observe entre les hommes et les femmes dans la société. Ainsi,
déjà en 1954, les Nations Unies adoptaient la Convention sur les
droits politiques des femmes. Cette Convention a été suivie de
nombreuses autres dont la principale est la convention sur l'élimination
de toutes formes de discriminations a l'égard des femmes3.
L'égalité des sexes est aussi, a travers les instruments de la
Charte des droits de l'Homme, reconnue comme un droit fondamental garanti dans
le corpus juridique des droits de l'Homme par l'identité des droits pour
les hommes et les femmes.
Parallèlement, s'est développée depuis
1980, et a la suite de nombreuses autres approches ayant le même
objectif, l'approche genre qui essaie de comprendre et de lutter contre les
inégalités entre les hommes et les femmes. Selon cette approche,
les inégalités entre les sexes relèvent non pas des
différences biologiques mais des constructions sociales qui
créent des rapports de pouvoir inégalitaires et par
conséquent une inégalité entre les sexes. Cette approche
prone la réalisation de l'égalité entre les sexes a
travers la prise en compte des différences sexospécifiques, ce
qui permettra a chaque individu
1 Seager, J., Atlas des femmes dans le monde : La
réalité de leurs conditions de vie, Paris, Ed. Autrement, 2003,
128p.
Ryckmans, H.., Lesfemmes dans la mondialisation, réduire
les inégalités de genre, Bruxelles, Brochure DGCI, 2001, 80 p.
Marche mondiale des femmes, Cahier de revendications mondiales
(2000).
Nation Unies, Lesfemmes dans le monde, des chiffres et des
idées, New York, 1995.
2 Notamment les Article 2 de la déclaration universelle
des droits de l'Homme. Articles 2,3 et 18 du Pacte international relatif aux
droits civils et politiques.
3 Adoptée et ouverte a la signature, a la ratification et
a l'adhésion par l'Assemblée Générale des Nations
Unies dans sa résolution 34I180 du 18 décembre 1979;
entrée en vigueur le 3 septembre 1981.
quelque soit son sexe de jouir des mêmes
droits4. En clair, l'approche genre demande la création de
conditions spéciales en fonction des différences
sexospécifiques pour aboutir a l'égalité des sexes.
La recherche universitaire a montré en effet que les
sources d'inégalités dans les relations entre les genres sont en
réalité inscrites dans les normes, les pratiques sociales, les
institutions collectives, l'état, la famille, le marché
etc.5. Dès lors, pour réaliser l'égalité
entre les sexes, l'intégration de l'approche genre a toutes les
disciplines a été adoptée par de nombreux pays, autant du
nord que du sud6.
Ainsi, on note une augmentation des demandes pour
l'intégration de cette approche dans le domaine du droit et par ricochet
dans celui des droits fondamentaux qui sont le socle et le fondement de
l'égalité entre les sexes. Or, bien que poursuivant le même
objectif, l'approche des droits fondamentaux et l'approche genre
présentent une certaine incompatibilité dans la démarche.
En effet, les droits fondamentaux se basent sur une neutralité qui fonde
l'égalité juridique entre les sexes, tandis que l'approche genre
pose comme principe que toutes les normes doivent prendre en compte les
différences de genre afin de les élaborer de manière a
corriger les déséquilibres entre les sexes. L'approche juridique
de l'égalité des sexes est fondée sur l'identité
alors que l'approche genre est fondée sur la différenciation. I
ntégrer l 'approche sexospécifique dans les droits
4 Conseil canadien pour la coopération internationale
(CCCI), Centre international MATCH (MATCH), Association
québécoise des organismes de coopération internationale
(AQOCI), Un autre genre de développement, Ottawa, CCCI, 1991, 126p.
Dagenais, H., Piché D., Femmes, féminisme et
développement, Montréal, McGill - Queen's University Press.
440p.
Moser, Caroline O.N., Gender Planning and Development: Theory,
Practice and Training. New York: Routledge, Chapman, and Hall.
5 Institute for Development Studies, Gender and World
Development, Sussex, University of Sussex.
Bisilliat, J., Verschuur C., Le genre, un outil
nécessaire: introduction a une problématique, Paris, l'Harmattan,
263 p.
6 Condition féminine Canada, A l'aube du XXI siècle
: Plan fédéral pour l'égalité entre les sexes,
Montréal, 1995, en ligne
http:IIwww.swc-cfc.gc.caIpubsI066261951XI199508 066261951X f.pdf.
Service public fédéral affaires
étrangères, commerce extérieur et coopération au
développement, Note stratégique égalité des droits
et des chances entre les femmes et les hommes, Bruxelles, Direction
générale de la coopération au développement, 2002,
52 p.
BIT, Genre / Partenaires et égaux, Genève, bureau
pour l'égalité entre homme et femme, 2000, 115 p.
fondamentaux introduit la problématique suivante: une
conception sexospécifique des droits de l'Homme est-elle la voie vers
une conception plus valide de l'égalité entre les sexes ou au
contraire une négation du principe d'universalité qui fonde les
droits fondamentaux7?
L'hypothèse que nous essaierons de vérifier est
que c'est l'expression juridique actuelle de l'égalité des sexes
en terme de significations (valeurs substantielles) et d'instrumentalisation
(concepts et outils juridiques) qui ne permet pas d'aboutir a une
égalité effective dans les rapports entre les sexes, but ultime
des droits fondamentaux; et que, seule une réinterprétation de
l'égalité des sexes dans le domaine juridique permettrait
malgré ces difficultés d'aboutir a une égalité
réelle des individus a travers une approche genre sans pour autant
porter atteinte au principe d'universalité.
Nous nous emploierons dans le présent travail a
vérifier cette hypothèse en nous penchant dans une perspective
historique sur l'évolution de la notion d'égalité des
sexes en termes de signification et d'instrumentalisation dans la
législation des droits de l'homme au niveau international ainsi que de
leur résultats sur les rapports sociaux de genre. Cette analyse sera
mise en parallèle avec l'évolution de la notion et de la prise en
compte de l'approche genre dans les instances internationales qui a
été a la base aussi d'une certaine évolution dans
l'analyse et l'instrumentalisation de l'égalité juridique des
sexes.
Dans une première partie, nous aborderons la notion
d'égalité des sexes. Il s'agira de définir le concept sur
le plan juridique et de faire une analyse critique de son instrumentalisation
dans le temps.
Cette reprécision des contours et de la portée
de la notion d'égalité des sexes en tant que droit fondamental
nous permettra dans une seconde partie d'envisager comment parvenir a
l'égalité effective des sexes. Ce, en explorant a la
lumière des analyses précédentes, la pertinence et les
limites de
7 Apfelbaum Erika, « En guise d'introduction au
numéro `Principes et enjeux de la parité' ». Cahiers du
Gedisst, n° 17. Paris, 1996, p5-7.
l'intégration d'une approche sexospécifique dans
les droits fondamentaux pour aller au-delà de l'égalité
théorique entre les sexes.
PREMIERE PARTIE: LE CONCEPT JURIDIQUE DE L'EGALITE
DES SEXES DANS LES DROITS FONDAMENTAUX
La notion d'égalité, bien qu'étant un
principe fondamental des droits de la personne humaine suscite encore des
polémiques quand a sa signification et a sa vocation. Cette
polémique rejaillie sur toutes les autres déclinaisons de
l'égalité et spécifiquement sur la question de
l'égalité entre les sexes. Qu'entendons nous par
égalité entre les sexes? Quel est le but ultime du principe
d'égalité appliqué au sexe?
C'est seulement après avoir éclairci ces
différentes interrogations que nous pourronavec clairvoyance
étudier comment ce principe été mis en ceuvre dans les
droits fondamentaux.
Aussi, consacrerons nous cette partie explorer la notion
d'égalité des sexes telle qu'elle est énoncée et
formulée dans les instruments juridiques des droits de l'Homme. Cette
exploration nous permettra de faire le point du contenu et du but visé
par l'égalité des sexes (Chapitre 1).
A l'aune de cette définition et de ce but, nous
pourrons donc examiner les différents modes d'instrumentalisation de
cette notion. Il s'agira essentiellement d'analyser si les différentes
développées pour réaliser l'égalité des
sexes permettent d'atteindre le but visé tout en respectant le contenu
même de la notion (Chapitre 2).
Chapitre 1
L'EGALITE DES SEXES COMME UN DROIT FONDAMENTAL.
La notion d'égalité des sexes ne s'est
développée qu'à posteriori dans le corpus des droits de
l'Homme. En effet, en 1789 au moment de la proclamation de la
Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen, si elle portait le
principe d'égalité ne concernait notamment pas
l'égalité des sexes. Il s'agissait a l'époque de
l'égalité de droit des citoyens et n'était
considéré comme bénéficiaires de ces droits que les
personnes de sexe masculin. L'égalité des hommes et des femmes
avait en effet fait l'objet de discussions a l'Assemblée francaise mais
avait été rejetée. L'exclusion des femmes a
l'égalité de jouissance des droits fondamentaux a suscité
de vives réactions dont la plus célèbre était la
rédaction d'une Déclaration des droits de femmes et de la
citoyenne en 1791 par Olympe de Gouges8. Cette déclaration
soulève au sein des droits de l'homme la problématique de la
discrimination fondée sur le sexe. C'est l'amorce d'une construction
juridique autour de l'égalité des sexes qui a connu une grande
évolution dans les instruments internationaux de protection des droits
de la personne humaine.
Section 1 LES FONDEMENTS DE L'EGALITE DES SEXES DANS LES
DROITS DE LA PERSONNE HUMAINE.
D'abord énoncée en tant que principe dans les
instruments généraux de la Charte des Nations Unies,
l'égalité des sexes a fait l'objet d'une législation
spécifique a travers d'autres conventions.
Paragraphe 1 Le principe.
La notion d'égalité des sexes est apparue dans les
droits fondamentaux a partir de la Déclaration Universelle des Droits de
l'Homme. Le préambule de
8 Disponible en ligne sur le site de l'Association internationale
des Droits de l'Homme http:IIwww.aidh.orgIBiblioIText fondatIFR oB.htm
cette déclaration affirme en effet la foi des Nations
Unies dans ((les droits fondamentaux de l'homme, la dignité de la valeur
de la personne humaine dans l'égalité des droits des hommes et
des femmes 9.
Dès lors, le terme ((humain utilisé dans son
article 1er qui dispose que (( tous les êtres humains naissent
libres et égaux en dignité et en droits pose le principe de
l'égalité des sexes occulté dans la déclaration
francaise de 1789. On peut en effet affirmer sans se tromper que l'expression
((humain recouvre les hommes et les femmes et ce, au regard de la disposition
de son préambule précédemment citée.
Le principe est reprécisé dans l'article 2 qui
stipule que ((chacun peut se prévaloir de tous les droits et de toutes
les libertés proclamées dans la présente
déclaration sans distinction aucune, notamment de race, de couleur, de
sexe
1O. Ce principe de l'égalité des sexes acquiert
une force juridique a partir de sa réaffirmation dans les deux Pactes
internationaux tirés de la Déclaration Universelle des Droits de
l'Homme, a savoir: le Pacte international relatif aux droits civils et
politiques et le Pacte international relatif aux droits économiques,
sociaux et culturels. Le principe de l'égalité des sexes est en
effet posé de deux manières dans le Pacte international relatif
aux droits économiques, sociaux et culturels. Il exige des Etats parties
d'abord de respecter et ensuite l'obligation de garantir les droits ((sans
discrimination aucune fondée sur la race, la couleur, le sexe... 1
1.
La Charte des Nations Unies pose ainsi le principe de
l'égalité des sexes en ce sens qu'elle annonce que les droits qui
y sont énoncés doivent s'appliquer a toutes les personnes sans
distinction d'aucune sorte notamment de sexe. L'égalité des sexes
est ainsi consacrée comme principe des droits
9 ème considérant du préambule de la
Déclaration Universelle des Droits de l'homme, adoptée et
proclamée par l'Assemblée générale des Nations
Unies dans sa résolution 217 A du 10 décembre 1948, in, Nation
Unies, Recueil d'instruments internationaux, Vol 1, Genève, 1994, p.
1
10 Article 2 de la Déclaration Universelle des Droits
de l'homme, adoptée et proclamée par l'Assemblée
générale des Nations Unies dans sa résolution 217 A du 10
décembre 1948, in, Nation Unies, op. cit., p. 2.
11 Article 2 du pacte international relatifs aux droits
économiques et sociaux adopté et ouvert a signature a la
ratification et a l'adhésion par l'Assemblée
générale des Nations Unies dans sa résolution 2000 A (XXI)
du 16 décembre 1966 in, Nation Unies, op. cit., p.9.
fondamentaux en ce qu'elle est une règle transversale a
observer dans la garantie de ces droits. Il s'agit d'une dimension a inscrire
dans l'agencement et la garantie des droits définis dans ce
domaine'2.
Le principe de l'égalité des sexes a
été réaffirmé dans certains domaines
spécifiques a travers d'autres textes des Nations Unies. La plus
complète en cette matière est la Convention pour
l'élimination de toute forme de discrimination a l'égard des
femmes (C[DAW)'3 qui éclaire sur la portée et les
implications juridiques de ce principe.
Paragraphe 2 Le passage du principe au droit : la Convention
pour l'élimination de toute forme de discrimination a l'égard des
femmes (CEDAW)14.
L'égalité des sexes a été
consacrée comme un droit par la Convention sur l'élimination de
toutes les formes de discrimination a l'égard des femmes
élaborée en '979.
La Convention relie l'ensemble des droits
énoncés par le Pacte International relatif aux droits civils et
politiques et le Pacte international relatifs aux droits économiques,
sociaux et culturels avec la spécificité d'en faire un instrument
pour le droit des femmes a l'égalité.
Le préambule de la onvention part du constat que
malgré l'existence des différents traités leur
garantissant des droits égaux ( les femmes continuent de faire l'objet
d'importantes discriminationsB'5. [lle indique par là que les
mécanismes internationaux de protection des droits humains n'ont pas pu
garantir la protection égale des droits pour les femmes. Ce qui
constitue une violation des principes de l'égalité des droits et
du respect de la dignité
12VOGEICPOI~J(Y, Eliane, < Genre et droit, enjeux
de la parité >>, Cahiers du Gedisst, n° 17, Principes et
enjeux de la Parité, P.10.
13Adoptée et ouverte a la signature, a la
ratification et a l'adhésion par l'Assemblée
générale des Nations Unies dans sa résolution 34I180 du 18
décembre 1979, entrée en vigueur le 3 septembre 1981.
14Abrégé ici CEDEF.
15 6eme alinéa du préambule a la Convention sur
l'élimination de toute forme de discriminations envers les femmes in,
Nation Unies, op. cit., p. 150.
humaine'6. Aussi les Etats parties a la convention
se fixent-ils pour objectif d'éliminer la discrimination envers les
femmes dans l'exercice et la jouissance de tous les droits civils, politiques,
économiques, sociaux et culturels'7.
Cette convention établit l'égalité des
droits de manière innovante par rapport aux dispositions
antérieures en la matière: d'abord, la convention oblige
((l'exercice des droits )), ce qui suppose la possibilité de les
utiliser et de les revendiquer devant les instances judiciaires'8.
La jouissance des droits fait appel a un bénéfice du contenu
réel du droit dans la vie. De plus, cette convention ne se limite pas a
la sphère politique mais s'étend également aux domaines
privés telles les relations familiales'9.
En clair, au-delà de la reconnaissance juridique du
principe de l'égalité des hommes et des femmes, la convention
invite les Etats a assurer par voie de législation ou par d'autre moyens
appropriés, l'application effective dudit principe))20.
Ce texte consacre donc l'égalité des sexes dans
les droits fondamentaux et nous allons en explorer le contenu en terme de
signification.
Section 2 LA SIGNIFICATION DE L'EGALITE DES SEXES
L'égalité des sexes telle que
présentée dans la Charte des Nations Unies et dans la CEDAW fait
appel a deux notions fondamentales des droits de l'Homme:
l'égalité et la non discrimination.
Paragraphe 1 L'égalité
La signification de la notion d'égalité dans le
domaine juridique demeure encore polémique. Les diverses tendances
doctrinaires en matière d'égalité
16 7éme alinéa du préambule a la Convention
sur l'élimination de toute forme de discriminations envers les femmes
in, Nation Unies, op. cit., p. 150.
17 Article 2 de la Convention sur l'élimination de toute
forme de discriminations envers les femmes in, Nation Unies, op. cit., p.
152.
18 Nations Unies, Assessing the statut of women's, a guide to
reporting under the convention for elimination of all forms of discrimination
against women, New York, UN division for the advanced of women, 2000, p.6
19Idem.
20Alinéa 5 de l'article 3 de la Convention sur
l'élimination de toute forme de discriminations envers les femmes in,
Nation Unies, Recueil d'instruments internationaux, Vol.1, Genève, 1994,
p.153
sont assez bien résumées par John Rawls qui,
distingue l'égalité formelle, l'égalité des chances
etl'égalité des résultats21.
L'égalité formelle exige que tous aient les
mêmes droits légaux d'accès aux avantages de la
société. ici, l'égalité ou la similarité des
conditions sociales n'est pas recherchée comme une fin.
L'égalité des chances demande que
d'égales perspectives de cultures et de réalisation soient
accordées aux personnes ayant des aspirations et dispositions
semblables. Le cadre légal doit donc mettre en place des outils pour
minimiser l'influence du hasard, afin de préserver les conditions a une
juste égalité des chances.
L'égalité des chances vise a atteindre
l'égalité des résultats qui a pour but de réaliser
l'égalité dans la répartition des revenus, richesses et
positions22. L'égalité revêt ainsi une double
signification: un traitement rigoureusement identique des personnes ou objets,
ou l'édiction de règles diversifiées prenant en compte les
différences constatées dans les situations, les aptitudes et les
activités23. L'égalité entre les sexes
n'échappe pas a cette dualité du principe égalitaire.
L'essence de l'article 3 du Pacte international relatif aux droits
économiques, sociaux et culturels est que les hommes et les femmes
doivent jouir de manière égale des droits énoncés
dans la convention. Aussi l'égalité des sexes revêt-elle
les deux formes principales de l'égalité: l'égalité
formelle et l'égalité substantive.
L'égalité formelle consiste a supprimer toute
différence juridique entre les sexes. [lle appelle a ce que les
mêmes droits soient reconnus aux hommes et aux femmes et qu'ils soient
traités de la même manière par la loi24.
L'égalité formelle des sexes est atteinte quand la loi et les
règlements de la république
21 RAWLS, J., Théorie de lajustice, Paris, Seuil, 1987, pp
97-106.
22VIELE, P., La représentation desfemmes et
la construction des roles parentaux- une approche comparative du droit de la
sécurité sociale, inDEVILLE, Anne, PAYE, Olivier, (dir.), Les
femmes et le droit- Constructions idéologiques etpratiques sociales,
Bruxelles, Publication des facultés universitaires de Saint-Louis, 1999,
pp. 223- 224.
23 GOYARD, P., <<Les diverses prérogatives
juridiques et les notions d'égalités et de discrimination
>>, in INGBER, Léon, (dir), L'égalité, Bruxelles,
ed. Bruylant, 1997, p.151.
24ALSTON, P., l'Union européenne et les droits
de l'Homme, Bruxelles, ed., Bruylant, 2000, p.228.
traitent de manière indifférenciée les
femmes et les hommes. C'est l'identité des droits.
L'égalité substantive, quant a elle, vise
l'égalité dans les faits. Les hommes et les femmes doivent
être traitées de manière a ce qu'ils puissent obtenir les
mêmes conséquences dans leurs vies25. L'effet des lois
doit donc garantir que tous les citoyens concernés jouissent de la
même manière des bénéfices de ces dispositions. [lle
implique donc la prise en compte de la diversité des situations des
individus.
Bien que l'égalité formelle soit la plus
utilisée dans les constitutions, législations et
règlements des [tats, l'article 3 du Pacte International relatif aux
droits économiques, sociaux et culturels exige aussi l'égale
jouissance dans les faits des droits cités. Au regard de cet article,
les [tats se doivent de s'assurer de l'égalité a
l'intérieur et avant la loi. L'égalité a
l'intérieur de la loi demande de s'assurer lors de la
légifération que les textes garantissent une jouissance
égale aux hommes et aux femmes dans le cas de l'égalité
des sexes. Le respect de l'égalité devant la loi incombe aux
administrations et tribunaux. Il implique que les autorités de ces
institutions appliquent la loi de manière égale pour les hommes
et les femmes26.
La finalité de l'égalité des sexes est
entendue comme visibilité, autonomie, responsabilité et
participation égale des femmes et des hommes dans toutes les
sphères de la vie publique et privée. ((L'éga!ité
entre !es femmes et !es hommes ne sera accomp!ie que !orsque toute personne,
que!s que soient son sexe, son orientation sexue!!e, son groupe ethnique, aura
!a possibiité de réa!iser tous ses droits dans !a mesure de son
propre poten tie! et de con tribuer
25 DEKADJEVI, I., le droit des femmes a
l'égalité des chances dans l'emploi au Bénin,
mémoire de DEA, Chaire Unesco des droits de la personne et de la
démocratie, Faculté de Droit et des Sciences Politiques,
Université d'Abomey- Calavi, Calavi, Novembre 2005, p.5.
26 United Nations Committee on Economic, Social and Cultural
Rights, General Comment No. 16: Article : The equal right of men and women to
the enjoyment of economic, social and cultural rights, EIC.12I2005I3, 13 mai
2005. Consulté en ligne le 20 mars 2006 sur :
http:IIwww.iwraw-ap.orgInews gr16.htm
a l'évolution culturelle, économique, politique et
sociale de son pays tout en bénéficiant personnellement de cette
évolution 27.
L'égalité telle que énoncée porte en
lui le principe de non discrimination qui garantie le traitement
égal.
Paragraphe 2 Le principe de non discrimination
Le principe de non discrimination est un corollaire du
principe d'égalité. Il est énoncé par la
Déclaration Universelle des Droits de l'Homme en ces termes: ((chacun
peut se prévaloir de tous les droits et de toutes les libertés
proclamées dans la présente déclaration sans distinction
aucune notamment de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion,
d'opinion politique ou de toute autre opinion, d'origine nationale ou sociale,
de fortune, de naissance ou de toute autre situation )).28 Dans le
cadre de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme, le principe
de non discrimination s'applique donc a l'égalité des sexes mais
son champ d'application s'arrête aux droits et principes
énoncés dans le texte.
Le Pacte international relatif aux droits civils et
politiques, en énoncant le principe de non discrimination dans
l'alinéa 1 de son article 2, a par l'article 26 élargi son champ
d'application a d'autres situations oi les articles du pacte sont
inapplicables. L'article 26 de ce pacte stipule en effet que ((toutes les
personnes sont égales devant la loi et ont droit sans discrimination a
une égale protection par la loi. A cet égard, la loi doit
interdire toute discrimination et garantir a toutes les personnes une
protection égale et efficace contre toute discrimination notamment de
race, de couleur, de sexe... ))29. Le principe de non
discrimination est ainsi étendu a tous les domaines des droits humains
et peut même être considéré comme un droit
fondamental qui prohibe toute différence de traitement a une personne ou
a un groupe de personnes sur la base uniquement de son! leurs situations
particulières telles la couleur, la race,
27 Agence intergouvernementale de la Francophonie, Egalité
des sexes et développement, Concepts et terminologie, 2002, p. 37
Publié en ligne sur
http:IIcifdi.francophonie.orgIgenreIfemmesl.pdf
28 Article 2 de la declaration universelle des droits de l'Homme
in Nation Unies, op. cit., p.2. 29Article 26 du Pacte International
relatif aux droits civils et politiques in Nation Unies, op. cit., p.30
l'origine, le sexe etc. La loi doit en ce sens interdire toute
discrimination et garantir a tous une protection égale.
Toutefois, l'interdiction de distinction n'est pas absolue,
elle concerne les critères de différenciation des droits qui
manquent de justifications objectives et vérifiables. Pour ne pas
être traitées de discriminatoires, les distinctions doivent avoir
un but légitime et les moyens employés pour ce fait
proportionnels au but visé. Deux critères caractérisent
donc une discrimination: une différence de traitement dans l'exercice
des droits et un manque de justifications objectives et
vérifiables30.
Dans le cadre de l'égalité des sexes, la
Convention sur l'élimination de toute forme de discrimination a
l'égard des femmes définit la discrimination envers les femmes
comme ((toute distinction, exclusion ou restriction faite sur la base du sexe
et qui a pour effet ou pour but de corn prornettre ou de détruire la
reconnaissance, la jouissance ou l'exercice par les fernrnes quel que soit leur
statut rnatrirnonial, sur la base de l'égalité de l'hornrne et de
la fernrne, des droits de l'Hornrne et des libertés fondarnentales dans
les dornaines politiques, éconorniques, sociaux, culturels et civils ou
dans tout autre dornaine 31 . La discrimination sexuelle est donc
toute différentiation qui, par voie d'exclusion ou de restrictions
fondées sur le sexe, empêche les personnes d'un sexe de jouir de
leurs droits humains de la même manière que celles de l'autre
sexe.
La discrimination basée sur le sexe peut être
directe ou indirecte. La discrimination est directe quand une différence
de traitement se base explicitement sur les distinctions relatives
exclusivement a l'appartenance sexuelle et aux caractéristiques des
femmes ou des hommes qui ne peuvent être objectivement
justifiées32. La discrimination indirecte fait
référence aux lois,
30 RENUCCj , J.F., Droit européen des droits de l'Homme,
Paris : L.G.D.J, 2002, 3e ed. p. 109.
31 ~rticle 1 de la Convention sur l'élimination de toute
forme de discrimination envers les femmes, Nation Unies, op. cit., p.145.
32 United Nations Committee on Economic, Social and Cultural
Rights, op. cit., p.4.
décrets et programmes qui ne paraissent pas
discriminatoires dans leur énoncé mais qui ont un effet
discriminatoire dans leur application33.
33Ide
Chapitre 2
ANALYSE CRITIQUE DES MODES D'INSTRUMENTALISATION
JURIDIQUE DE L'EGALITE DES SEXES
L'égalité de sexes telle qu'établie par
les conventions internationales sur les droits de la personne humaine oblige
les [tats parties a consacrer et respecter une égalité des normes
juridiques pour les hommes et pour les femmes. [lle appelle également
les gouvernements a s'engager dans la mise en place de conditions pour la
réalisation d'une égalité dans les faits entre les
individus des différents sexes. Des lors, diverses approches juridiques
ont été développées, pour réaliser
l'égalité entre les hommes et les femmes. Les premiers pas de la
construction de l'égalité ont été faits a travers
l'uniformisation des droits pour les hommes et les femmes
(égalité formelle). [nsuite, il a été
constaté que l'égalité des sexes ne pouvait se
réaliser sans la prise en compte des différences qui existaient
entre les hommes et les femmes. La construction de l'égalité des
sexes s'est ainsi développée a travers des formes successives
d'instrumentalisation que sont l' égalité devant la loi,
l'égalité de traitement, l'égalité des chances et
l'égalité des résultats34.
Section 1 L'EGALITE PAR L'UNIFORMISATION : L'EGALITE
FORMELLE
Les premieres dispositions légales relatives a
l'égalité des sexes se sont attachées a la formulation des
mêmes droits pour les femmes que pour les hommes. Pour
l'égalité des sexes, il faut en effet que les deux sexes puissent
de manière indifférenciée se prévaloir des
mêmes droits devant la loi et bénéficier d'un traitement
identique par cette loi. L'uniformisation des droits pour les hommes et les
femmes permettait ainsi de réaliser l'égalité formelle
entre les personnes de différent sexe.
34VOGEL-POLSKY, E., op. cit., P. 12.
Paragraphe 1 L'égalité devant la loi
Première approche utilisée pour
l'égalité des sexes, elle vise essentiellement
l'égalité formelle des hommes et des femmes devant la loi.
L'égalité devant la loi exige que la loi traite toutes les
personnes semblables de la même façon. Suivant la théorie
de l'égalité devant la loi, l'absence de traitement
différent des hommes et des femmes dans le libellé de la loi et
l'application de celle ci assure l'égalité des sexes.
Cette approche est applicable et très utile dans les
domaines oi les hommes et les femmes se trouvent dans des situations identiques
tel le droit de vote ou l'autorisation d'accès a certains
métiers. Mais, lorsqu'ils ne se trouvent pas dans des situations
identiques, ce qui est souvent le cas, le modèle de
l'égalité devant la loi n'est d'aucune utilité pour
réaliser l'égalité des sexes. Ce modèle permet au
contraire dans de tels cas de perpétuer la discrimination parce que
n'arrivant pas a éliminer l'inégalité réelle des
conditions. En effet, pour prétendre a l'égalité dans la
théorie de l'égalité devant la loi, il faut être
semblable ou se trouver dans des situations semblables. Et la norme est
établie par rapport au groupe favorisé. Pour jouir des
mêmes droits que les hommes, la femme doit donc démontrer qu'elle
leur est semblable et réciproquement.
Ainsi, dans la mesure oi les hommes et les femmes ne sont pas
identiques pour des raisons biologiques ou parce que la société
leur attribue un statut différencié les placant dans des
conditions différentes, ils ne peuvent parvenir a
l'égalité des sexes devant la loi. En insistant sur la
comparabilité étroite comme critère d'accès a
l'égalité, l'égalité devant la loi fait fi des
différences biologiques et socio-culturelles qui existent entre les
hommes et les femmes. L'égalité devant la loi est ainsi
partiellement inopérante dans le cadre de l'égalité des
sexes car elle n'appréhende et n'autorise pas la prise en compte des
différences liées au sexe. Comme souligné par Rebecca
COOK, ((en vertu de ce modèle, les femmes sont obligées de
soutenir qu'elles sont pareilles aux hommes et méritent donc le
même traitement, soit qu'elles sont différentes mais devraient
être traitées comme si elles étaient pareilles ou encore
qu'elles
sont différentes et doivent donc se voir accorder un
traitement particulier ))35. Progressivement donc, les
femmes ont acquis des droits calqués sur ceux des hommes dans la mesure
oi elles pouvaient faire preuve d'une même capacité intellectuelle
ou morale36.
Mais, l'égalité devant la loi permettait de
justifier certaines inégalités faites aux femmes parce qu'elles
ne sont pas (semblables)) aux hommes qui bénéficient de ces
prérogatives. Aussi, fréquemment, (la loi fixait des normes
différenciées selon le sexe créant de fait des
catégories socio-lé gales dont chacune respectivement pouvait
prétendre au bénéfice de l'égalité devant la
loi, mais une loi aux normes différentes y37 ·
La réalisation de l'égalité des sexes par
l'approche de l'égalité devant la loi se trouvait ainsi
limitée par les différences biologiques et socioculturelles entre
les hommes et les femmes. Le but de l'égalité des sexes telle que
formulée par le Pacte international relatif aux droits
économiques, sociaux et culturels ne pouvait donc être
entièrement atteint par cette forme d'instrumentalisation juridique.
Aussi, l'égalité devant la loi est-elle suivie
ou même accompagnée de l'égalité de traitement sans
discrimination.
Paragraphe 2 L'égalité de traitement sans
discrimination
C'est l'approche anti-discriminatoire de
l'égalité des sexes. L'égalité de traitement est
une instrumentalisation de la notion de non discrimination selon laquelle le
traitement différent de situations comparables et le traitement
identique de situations différentes sont interdits38. Cette
approche est issue du
35 COOK, R., <<Women's International Human right law:
The way forward >>, in Human Rigths of women's: National and
International Perspectives, sous la direction de Rebecca J. COOK, Philadelphie,
university of Pennsylvania Press, 1994, P. 11, cite par BAUER, Jan, Seul le
silence te protègera: les femmes, la liberté d'expression et le
langage des droits de l'Homme, Essais sur les droits humains et le
développement démocratique n°6, Montréal, Centre
international des droits de la personne et du développement
démocratique, 1996, p 35.
36 VOGEL-POLSKY, E., op. cit., p.15.
37DEKEUWER-DEFFOSSEZ, F., la question juridique de
l'égalité des sexes, publié en ligne le 4 avril 2004 sur
le site de l'observatoire des inégalités,
http:IIwww.inegalites.frIarticle.php3?id article=219
38REJUCCI, J.F., op. cit., P.388
postulat de l'égalité naturelle de tous les
êtres humains39. Les hommes et les femmes étant
formellement égaux, on ne saurait leur appliquer de traitement
différent a cause de leur seule appartenance sexuelle. Car
l'égalité de traitement est violée si la distinction
manque de justification objective et raisonnable40. De ce fait,
cette approche de l'égalité est indifférente une fois de
plus aux inégalités sociales et/ou historiques qui
désavantagent les femmes et/ou les hommes par rapport a la jouissance de
traitement.
L'égalité de traitement devant la loi sans
aucune discrimination empêche ainsi la prise en compte des
inégalités historiques qui existent entre hommes et femmes et qui
justifieraient un traitement différentiel voir compensatoire pour
arriver a l'égalité de jouissance des droits également
reconnus. Cette approche propose l'intégration des exclus par le seul
moyen de l'absence de discrimination explicite. Ce faisant, on ne touche pas a
l'inégalité qui caractérise les rapports sociaux entre
sexes. En garantissant a tous le même traitement on perpétue les
inégalités particulièrement en ce qui concerne les
inégalités entre sexes. En raison des disparités
existantes, l'égalité de traitement des hommes et de femmes ne
constitue donc pas une stratégie suffisante pour garantir
l'égalité des sexes.
L'égalité devant la loi et
l'égalité de traitement sans discrimination reviennent a "mettre
sur la même ligne de départ des personnes qui n'ont pas les
mêmes ressources et faire semblant de s'étonner en constatant
qu'à l'arrivée elles n'aient pas réalisé les
mêmes performances"41.
Ainsi, bien que l'égalité des sexes ait
été formellement obtenue dans les fonctions politiques depuis la
convention sur les droits politiques des femmes42, et que les
conditions d'éligibilité et les traitements
réservés aux candidats soient
39 Tous les êtres humains naissent libres et égaux
en droit>> article premier de la déclaration universelle des
droits de l'Homme.
40RENUCCI, J.F., op. cit., p. 109.
41 DELPHY, C., <<Parité>>,
<<discrimination positive>> et <<universalisme a
lafrançaise>>, réflexions sur les moyens politiques enfin
l'égalité hommes femmes, 1999 P.13 en ligne sur
http:IIlmsi.netIarticle.php3?id article=432
42 ouverte a la signature et a la ratification par
l'Assemblée générale des Nations Unies dans sa
résolution 640 (VII) du 20 décembre 1952, entrée en
vigueur le 7juillet 1954.
les mêmes quelque soit leur sexe, il n'en demeure pas
moins que le nombre de femmes élues dans les assemblées autant au
niveau national qu'international demeure infime. Le même exemple peut
être donné en ce qui concerne l'égalité
d'accès a l'éducation et a certaines professions qui
étaient interdites a l'un ou l'autre des sexes.
De ce constat, il apparaIt clairement que
l'égalité formelle ne peut entièrement résoudre les
problèmes réels d'inégalités spécifiquement
dans le domaine de l'égalité des sexes. Les normes
internationales des droits de l'homme ayant été concues sur un
modèle masculin, le modèle de non discrimination ne permet pas
selon Cook, la remise en cause des lois, cultures et traditions religieuses
d'inspiration masculine43. On ne saurait aboutir a une
égalité effective des sexes si les normes a l'aune desquelles est
estimée l'égalité du traitement ont été
élaborées d'un point de vue unisexe.
D'autres approches de l'égalité fondée
paradoxalement sur la différenciation des sexes ont donc
été développées pour essayer de remédier aux
conditions qui font que l'inégalité demeure malgré
l'égalité devant la loi et l'égalité de traitement
sans discrimination.
Section 2 L'EGALITE PAR LA DIFFERENCIATION : L'EGALITE
DES CHANCES PAR LES ACTIONS POSITIVES
La recherche de l'égalité entre les sexes a
travers l'égalité formelle ne permet pas d'aboutir a
l'égalité substantielle et ce, a cause des différences
biologiques et ou sociales qui existent entre les hommes et les femmes. Aussi,
l'égalité des sexes s'est orientée non plus vers
l'égalité entendue comme identité des droits mais
l'égalité construite a partir des différences. C'est le
développement de la théorie de l'égalité des
chances qui part du principe que les personnes étant soumises a des
conditions différentes, il faut procéder a une égalisation
des conditions de départ pour garantir l'égalité dans
la
43 COOK Rebecca, op. cit., p 39.
jouissance de certains droits44. Aussi faut-il
conférer a chaque individu la chance de prétendre pour
lui-même a la garantie des droits vis-à-vis de la loi. Il s'agit
ici non plus d'instituer des droits égaux maisun droit spécifique
a travers des protections et privileges. Les notions de discrimination positive
et de parité sont ainsi venues a la rescousse de la notion
d'égalité45. Ces deux approches partent de la prise en
compte des différences pour construire l'égalité
substantielle.
Paragraphe 1 La discrimination positive.
La discrimination positive est une rupture
d'égalité, justifiée par une situation
d'inégalité et destinée a rétablir ladite
égalité4o. [lle consiste a rééquilibrer
la situation de groupes considérés comme
défavorisés en leur créant un statut
privilégié47. La logique qui soutient cette
démarche est très bien explicitée par ce discours d'un
ancien président américain : "Imaginons un cent metres dans
lequel l'un des coureurs aurait une jambe attachée. Durant le temps
qu'il lui faut pour parcourir 10 metres, l'autre en aurait déjà
parcouru 50. Comment rectifier cette situation? Doit-on simplement
délivrer le premier coureur et laisser la course se poursuivre en
considérant qu'il y a désormais 1égalité
des chances1? Pourtant, un des coureurs a toujours 40 metres
d'avance sur l'autre. Est-ce que la solution la plus juste ne serait pas de
permettre a celui qui était attaché de rattra per son retard ? Ce
serait agir conséquemment dans le sens de
l'égalité48.
Ainsi, l'approche "affirmative action" ou discrimination
positive en francais en ce qui concerne l'égalité, s'oriente vers
la mise en ceuvre de mesures visant a
44Mise en oeuvre en 1960 aux Etats-Unis pour
remédier aux problèmes de d'inégalités
socio-économiques surtout en matière dSéduction
entre les différentes races. Lire a ce sujet Thermes Julie, Essor et
déclin de l'affirmative actionles étudiants noirs a Havard, Yale
etPrinceton, Paris, ed CNRS histoire, 1999, 426p.
45 ADRINNI, S., Du droit égalitaire aux discriminations
positives dans la législation italienne, un parcours conceptuel, in
DEVILLE, Anne, PAYE, Olivier, (dir.), Les femmes et le droit- Constructions
idéologiques et pratiques sociales, Bruxelles, Publication des
facultés universitaires de Saint-Louis, 1999, p. 44.
46RENUCCI, J.-F., op. cit., P.113.
47 SLAMA, A. G., <<Contre la discrimination positive. La
liberté insupportable >>, Pouvoirs, n° 111, p.143.
Publié en ligne sur le site de l'observatoire du communautarisme:
http:IIwww.communautarisme.netIdocsIagslamadiscrimination-positive.pdf
48 Lyndon B. Johnson, Pdt des USA le 4 juin 1985 cité par
Le Trehondat, P., Silberstein, P, Vive la discrimination positive, plaidoyer
pour une république des égaux, Paris, Syllepse, 2004, P.7
corriger les désavantages séculaires
qu'entraInent les inégalités des rapports sociaux entre les
hommes et les femmes.
La discrimination positive en matière
d'égalité des sexes consiste en un traitement différentiel
entre hommes et femmes afin de remédier aux inégalités de
fait. Il s'agit de discrimination a rebours. Dans le cadre de la lutte contre
la discrimination, sont menées des actions positives qui sont des
actions temporaires visant a éliminer la discrimination passée ou
actuelle subie par un groupe de personnes en leur accordant certains avantages
préférentiels49. Cela peut être des encadrements
spécifiques ou des mesures d'incitation souvent en direction du groupe
défavorisé pour lui permettre d'entrer en compétition sur
le même pied d'égalité que le groupe qui dominait.
Cette approche qui dépasse la logique collective du
droit de l'homme est jugée inégalitaire et contraire au principe
de la non-discrimination. Les mesures préférentielles
accordées a un sexe particulièrement porteraient atteinte a
l'égalité formelle des sujets de droit devant la
loi50. Les mesures individuelles de correction
d'inégalités collectives sont nécessairement injustes et
discriminatoires envers ceux qu'elles frappent51.
Le Comité des droits économiques, sociaux et
culturels des Nations Uniess'est prononcé sur cette polémique en
affirmant que : "l'adoption a titre tern poraire de rnesures spéciales
destinées a garantir aux hornrnes, aux fernrnes et aux groupes
défavorisés l'égalité de fait ne constitue pas une
violation du principe de non-discrirnination"52. Le Comité
des droits de l'Homme mis en place dans le cadre du Pacte international relatif
aux droits civils et politiques fait la même observation en
précisant que "l'application du principe d'égalité suppose
de la part des Etats l'adoption de rnesures en faveur de groupes
désavantagés,
49Agence Intergouvernementale de la Francophonie, op.
cit., P.19.
50 VOGEL-POLSKY, E.,op. cit., p. 18.
S1DEKEJJ%ATER DEFOSSEZ, F., L'égalité
des sexes, Connaissances du droit, Paris, Dalloz, 1998, p. >>.
S2united Nations Committee on Economic, Social and Cultural Rights,
op. cit..
visant a atténuer ou a sup primer les conditions qui
font naItre ou contribuent a perpétuer la discrimination interdite par
le pacte"53.
Le principe d'actions positives est donc admis par les
conventions internationales sur les discriminations, dans la mesure oC.i elles
sont temporaires54. Au niveau régional, la Charte
Européenne des droits de fondamentaux55 ainsi que le
Protocole de la Charte Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples relatif
au droit des femmes en Afrique56 incitent même les Etats
parties a prendre des mesures positives pour encourager l'égalité
des sexes.
Mais, malgré le caractère temporaire que doivent
revêtir les mesures de discriminations positives et leur acceptation par
les instances internationales des droits de l'homme, il est évident que
les résultats de cette mesure créent une autre
inégalité.
D'abord, en ce qu'elle contredit le principe de
l'égalité devant la loi qui est un fondement de la
démocratie. Et ce a double titre : en créant des
inégalités au bénéfice de certaines personnes, elle
déplace l'injustice au lieu de la combattre; mais également, elle
renforce le repli identitaire des bénéficiaires57.
Ensuite, en rompant avec l'égalité formelle, les actions
positives aboutissent a une catégorisation des individus engendrant
souvent une stigmatisation des groupes qu'elles visent a
protéger58. La discrimination positive renforcerait ainsi les
particularités des groupes bénéficiaires au lieu de les
intégrer. Cette approche risquerait ainsi de faire éclater la
société surtout
53 Le Trehondat, P., Silberstein, P., Vive la discrimination
positive, plaidoyer pour une république des égaux, Paris,
Syllepse, 2004, P.17
54 La Convention sur l'élimination de toutes les formes de
discrimination raciale de 1965 ainsi que la convention de 1979 sur
l'élimination de toutes les formes de discrimination envers les
femmes.
55L'alinéa 2 de l'article 23 de la charte
précise que le principe de l'égalité n'empêche pas
le maintien ou l'adoption de mesuresprévoyant des avantages
spécifiques enfaveur du sexe sous-représenté.
56 Le dernier alinéa de l'Article 2 du protocole invite
les Etats a <<prendre des mesures correctives etpositives dans les
domaines oh des discriminations de droit et defait a l'égard desfemmes
continuent d'exister >>.
57 SLAIVIA, A. G., op. cit., pp. 133-134.
58LOC}jACK, D., Les droits de l'Homme, Paris, Ed. La
Découverte & Syros, 2002, P.90.
qu'elle crée des exceptions a la règle commune,
ce qui contribue a fragiliser la confiance sur laquelle se bötit une
société démocratique59.
Ceci se justifie d'autant plus dans les cas oi elle minimise
la prise en compte du mérite au profit d'autres critères, elle
comporte le risque de promouvoir des personnes moins compétentes. Aussi,
la discrimination positive pour l'égalité des sexes a du mal a ((
éviter ce férninisrne au rabais qui consiste a attribuer
systérnatiquernent aux fernrnes des positions de pouvoir, de
cornrnandernent ou de responsabilité qui n'ont d'autres justifications
que l'appartenance au genre )) ~0.De fait, de la pensée
suivant laquelle ((il est rnoins corn pétent parce qu'il n'a pas
été recruté au rnérite , les
bénéficiaires de la discrimination positives passeront rapidement
a une forme de stigmatisation plus grave qui est: ((il n 'est pas corn
pétent parce qu 'il est de tel sexe 61. Et Comme le souligne
Francois de Kevnas, " de telles pensées sont évidemment peu
propices a une véritable inégalité des
sexes"62. Au delà du fait d'être inégalitaires
envers ceux qui en pötissent, les actions positives sont donc sources
d'inégalités pour ceux qui en bénéficient.
Les limites de la discrimination positive dans le cadre de
l'égalité des sexes sont résumées de la
manière suivante par Simona Andrinni ((... en reconnaissant a la fernrne
sa condition de désavantagée, en la protégeant et en lui
accordant les rernèdes pour sortir de sa condition, on la destine, en
rnêrne tern ps, a derneurer éternellernent dans cette condition
(deuxièrne)B63.
Cette approche dite qualitative de l'égalité des
chances a été suivie d'une approche dite quantitative : la
parité.
59 SLAMA, A.G., op. cit. , pp. 135-136
60 NGAKOUTOU, T. , Femmes africaines et démocratie, Dakar,
éd UNESCO, 1995, P.16
61Le POURHIET, A. M., <<Pour une
analyse critique de la discrimination positive >>, Le débat, 2001,
n° 114, p.174 en ligne sur le site de l'observatoire du communautarisme.
http:IIwww.communautarisme.netIPour-une-analysecritique-de-la-discrimination-positive
a251.html
62DEKEUWER DEFOSSEZ, F., op. cit., p. 75.
63ADRINNI, S., op. cit., p. 37.
Paragraphe 2 L'approche paritaire de
l'égalité des sexes.
La parité vise une égale représentation
des différents groupes dans les domaines sociaux, économiques et
politiques. C'est l'approche quantitative de l'égalité
utilisée dans le domaine de l'égalité des sexes, elle vise
a prendre en compte la dualité sexuelle de l'humanité a travers
une égale représentation des hommes et des femmes dans les
différentes structures de la société. L'approche paritaire
part donc de l'idée que non seulement on peut mesurer l'état de
l'égalité ou d'inégalité entre les sexes a travers
leur proportion dans un milieu donné mais que l'équilibre des
rapports de force entre eux doit être assuré par leur
équilibre numérique a un même niveau de pouvoir.
[lle nécessite la mise en place de mesures
spécifiques et de critères quantitatifs qui s'organisent avec des
lois et règlements qui fixent a l'avance les proportions
prédéterminées pour chaque sexe dans tous les domaines de
la vie publique. Fortement utilisée dans le cadre de la
représentation politique, elle est également utilisée pour
l'administration publique, et les autres corps de métier pour exiger une
plus grande présence de l'un ou l'autre des sexes. Des lois ont
été ainsi prises pour prédéterminer la composition
quantitative de ces assemblées représentatives ou de certains
corps de métier.
Cette approche permet d'avoir une égalité
quantitative des sexes. Mais par le fait qu'elle fixe des nombres a l'avance
pour l'occupation de certaines fonctions dans la société, elle
constitue une limitation au libre accès car elle détermine un
seuil supérieur pour l'un ou l'autre des sexes. Il s'agit
d'intégration de préférences basées sur le sexe
dans les dispositions légales; or, au nom du principe
d'égalité, les normes ne doivent pas contenir des règles
de préférences déterminées64. De
multiples autres arguments sont développés pour relever une
certaine incohérence dans le discours sur la parité.
64 TCHAKALOFF, Christophe M.-F., < Egalité et action
positive en droit européen , Pouvoirs, 1997 n° 82 P. 91 s,
cité par RENTJCCI, J.-F., op. cit., P.396.
((Si il y a deux sexes, il n 'y a pas deux
raisons65 . Cette phrase résume les arguments pour la remise
en cause de la parité. A quoi servirait-il que les femmes ou les hommes
soient représentés en raison de leur appartenance sexuelle dans
l'espace publique? La logique de la représentation démocratique
est de pouvoir recueillir les avis des différentes tendances politiques
de la société, les conceptions distinctes de la gestion du bien
commun et non des ovaires ou des pigments de peau66. De fait, pour
baser la représentation politique sur l'appartenance sexuelle, il
faudrait que celle-ci détermine une catégorie idéologique
ou de pensée politique donnée. Or, si la dualité des sexes
est une norme universelle, la raison l'est aussi et est une
caractéristique propre a la nature humaine et le raisonnement d'un
individu ne saurait en aucun cas varier suivant son sexe. La
représentativité des sexes permet d'accueillir une manière
particulière d'aborder les problèmes suivant les sexes ou pour
permettre la représentation des intérêts particuliers de
l'un ou l'autre des sexes67 . On peut admettre que les individus
d'un même sexe peuvent avoir des intérêts communs qui
transcendent toutes leurs particularités de situation et de condition.
Mais on a du mal a faire valoir l'idée selon laquelle, la vision des
problèmes de la société serait fonction de l'appartenance
sexuelle.
Aussi, la parité en représentation politique
consisterait a asseoir un statut juridique sur une condition biologique, ce qui
aboutit a légitimer le déchaInement de passions identitaires
collectives au détriment de l'usage individuel de la raison
68.
Ce même raisonnement peut être étendu aux
autres domaines de la vie publique tels l'entreprise, les médias,
l'armée qui d'ailleurs contrairement aux assemblées politiques
n'ont pas une fonction représentative dans la société. La
question qui se pose a ce niveau est de savoir si ces organisations
pötissent en
65SLAMA , A. G., op. cit., p. 137.
66 Le POURHIET, AM., op. cit., p.175.
67 DEKEUWER DEFOSSEZ, F., op. cit. p. 91.
68SLAMA, A. G., op. cit., p. 138.
qualité quand les personnes qui y travaillent ne
représentent pas de manière égale les deux sexes.
De plus, l'exigence de parité est percue comme une
contrainte exercée a l'égard de la liberté individuelle
des personnes. Ainsi, la liberté de l'employeur de choisir son
salarié est contrariée par les exigences de
représentativité des sexes au sein de l'entreprise. Il en est de
même pour l'électeur qui est amené a choisir dans une liste
dont la composition sexuelle est prédéterminée a
l'avance.
Par ailleurs, le pourcentage d'hommes et de femmes dans les
entités représentatives pourrait simplement être le fruit
des souhaits et goOts des électeurs. Exiger la parité revient
ainsi a instaurer une présomption de discrimination sur le seul
fondement de la statistique sans s'attaquer aux raisons qualitatives et
objectives qui soutendent cette situation statistique69.
Enfin, la parité est jugée comme une
discrimination positive déguisée, avec toutes les limites
citées précédemment70.
Conclusion de la premiere partie:
L'égalité des sexes a été
consacrée comme principe des droits fondamentaux par les instruments de
la Charte des Nations Unies. Très tot, la problématique de
l'égalité des sexes s'est traduite par une recherche de
l'égalisation des femmes par rapport aux hommes. Ainsi, des conventions
spécifiques ont été prises en faveur de la
réaffirmation des droits des femmes par rapport aux hommes. Dans la
recherche de la jouissance égalitaire des droits fondamentaux, plusieurs
approches ont été expérimentées, les
premières tendant a réaliser l'égalité par
l'assimilation des femmes aux hommes a travers une égalité
formelle et les dernières visant l'égalité dans la
différence a travers une démarche de différenciation voire
de catégorisation.
Mais, si l'égalité formelle ne suffit pas a
éliminer les inégalités qui persistent dans la vie
économique, sociale et politique, les approches
différenciées portent
69 Le POURHIET, A. M., op. cit., p.170.
70 Voir infra pp. 19-22.
atteinte a certaines valeurs des droits fondamentaux et
mènent a d'autres formes d'inégalités.
Aussi est t-il apparu nécessaire d'introduire de
nouvelles approches voir repenser la question de l'égalité des
sexes tel qu'elle a été jusque là abordée par les
droits fondamentaux.
DEUXIEME PARTIE: POUR UNE EGALITE EFFECTIVE DES
SEXES, L'APPORT DE L'APPROCHE SEXOSPECIFIQUE AUX DROITS HUMAINS
FONDAMENTAUX
La persistance des inégalités entre les sexes a
plus que toute autre forme d'inégalité mobilisée
l'attention de la communauté internationale ces dernières
décennies. Aussi, face a la l'incapacité des différentes
approches a réaliser l'égalité des sexes, les
débats ont été se plus orientés vers une nouvelle
approche dite sexsospécifique.
Cette approche qui passe par une prise en compte
systématique des différences a pour ambition d'agir sur les
facteurs créateurs d'inégalités entre les sexes: les
construits sociaux générant des relations sociales
inégalitaires entre les sexes.
Il s'agit là d'une nouvelle approche qui, malgré
toute sa pertinence introduit pour la réalisation de
l'égalité substantielle entre les sexes, introduit certains
bouleversements dans les constructions juridiques traditionnelles sur
l'égalité.
Aussi, est il nécessaire avant d'étudier le
contenu et les conséquences d'une telle approche sur les logiques
juridiques actuelles de l'égalité (Chapitre 4), il faut d'abord
se convaincre de son utilité. Le chapitre 3 sera donc consacré a
analyser l'importance et la spécificité de la question autant en
tant que réalité sociale que comme une problématique
juridique traitée par le système de protection des droits de
l'Homme des Nations Unies.
CHAPITRE 3L'IMPORTANCE DE LA QUESTION DE L'EGALITE DES
SEXES
L'application uniforme de la même règle a tous au
nom de l'égalité intrinsèque de tous les êtres
humains peut aboutir a des inégalités de fait ou produire des
effets discriminatoires envers des individus d'un certain groupe. Ainsi,
parvenir a l'égalité nécessite parfois la prise en compte
par le droit des différences qui existent entre les individus. Mais
cette démarche comporte également le risque de stigmatisation des
membres de ce groupe en les enfermant dans leurs
différences71. Voilà ainsi résumée la
problématique a laquelle est confrontée la question de
l'égalité des sexes pour autant que les groupes se
réduisent a celui des hommes et celui des femmes. Malgré toute
l'attention accordée a cette question de l'égalité entre
les sexes dans les instances des droits de l'homme, il ne faut pas perdre de
vue que la différence des sexes est une des différences parmi
tant d'autres qui existent entre les êtres humains. Il est alors
intéressant avant de chercher des solutions spécifiques a la
question de l'égalité des sexes de s'interroger sur la pertinence
d'une telle démarche. Pourquoi une prééminence de cette
différence entre toutes les autres au point qu'elle fasse l'objet d'une
si grande attention dans les instruments internationaux des droits de l'homme
comme en atteste le nombre de conventions spécifiques consacrées
aux droits des femmes?
Section 1 LA DIFFERENCE DES SEXES MERITE T-ELLE UNE
INSTITUTIONNALISATION DANS LES DROITS FONDAMENTAUX?
L'importance accordée a la question de la
différence des sexes relève de l'universalité de la
problématique et de la fonction structurante que cette différence
a sur le mode de fonctionnement de la société. La
différence des sexes est en effet commune a toutes les
sociétés humaines et elle est utilisée partout comme
facteur fondamental d'organisation de la société et donc de
détermination des droits et devoirs de chacun. e droit des droits
fondamentaux ne sauraient donc rester indifférents a une telle
problématique.
71LOCHJCK Danièle, Les dro its de l'Homme,
Paris, La Découverte & Syros, 2002, P.92.
Paragraphe 1 La différence des sexes comme
réalité universelle.
Il existe une multitude de différences qui sont sources
d'inégalités entre les personnes humaines. L'utilisation de ces
différences, comme fondement d'une catégorisation ou comme
justificatif d'une inégalité varie suivant la culture et ou la
société a l'intérieur de laquelle on se trouve. Ainsi, si
la différence de couleur de cheveux peut être pertinente dans les
pays du Nord par exemple, cette différence existe moins chez les Noirs
africains et presque pas chez les Asiatiques. Par ailleurs, en prenant deux
sociétés oi les mêmes différences se retrouvent
entre les individus, cette différence peut être source
d'inégalités dans la société A et ne pas
l'être dans la société B. Or, la différence sexuelle
est d'une part une réalité biologique commune a toute
l'espèce humaine et a toutes les sociétés, et d'autre
part, quelles que soient les sociétés, cette différence
est source de catégorisation et d'inégalité dans presque
tous les domaines en faveur de l'une ou l'autre des sexes.
Contrairement aux autres différences dont les
pertinences et les influences en termes d'inégalités peuvent
varier d'un endroit a un autre de la terre, la différence sexuelle est
une réalité universelle et constante qui génère
universellement des inégalités. Toute société
humaine est organisée autour de cette bipolarité qui est la plus
irréductible de la nature humaine car a l'intérieur des groupes
différenciés suivant la couleur de la peau, la langue ou tout
autre différence, on retrouve la distinction entre les individus de sexe
masculin et féminin. Les anthropologues précisent a cet effet que
la différence des sexes est le principe organisateur des
sociétés ((cette difference est inhérente a Ia
pensée eIIe-même; c'est une structure qui gère Ies
systèmes symboIiques et Ies
categories de Ian gage ))72.
Mais cela ne suffirait pas pour justifier la
prééminence de l'égalité des sexes sur
l'égalité d'autres groupes sociaux. La définition de
droits différenciés selon le sexe relèverait d'un choix de
systèmes politico-juridiques et non d'une
72LEVI-STRAUSS, C. cité par Eugénie
Czorny in : Anthropologie du genre et droits de l'Homme, rapport de Working
Group, Forum international du genre, action humanitaire et développement
publié en ligne,
http:IIwww.mdminternational.orgICDROM2FRONTPAGEIversionfrancaiseIconceptspapersIanthropofancaisIAnthropo.ddh.zip
consulté le 10 février 2006.
prééminence de cette dominance sur la nature
humaine car d'autres différences comme la couleur de la peau
relèvent tous autant de la nature humaine et ont été de
tous les temps utilisées comme critères de
discrimination73.
D'une part, l'argumentaire développé plus haut
montre déjà une certaine spécificité de la
différence des sexes dans l'organisation humaine. Il s'agit donc d'une
réalité englobante, valable pour l'ensemble de la population qui
structure les relations de chaque individu par rapport a l'autre. La
différence des sexes transcende toutes les autres différences
observées dans la nature humaine. En clair, la différence des
sexes concerne tout le monde, influe sur tout le monde et détermine les
modes de vie voire les droits et devoirs des personnes. Sa
prééminence sur les autres différences relève donc
d'abord du fait qu'il s'agit d'une problématique qui concerne tous les
groupes organisés des personnes humaines.
D'autre part, la différence des sexes a
été utilisée comme critère de
différenciation des droits dans presque tous les systèmes
juridiques. En France, la Déclaration des droits de l'Homme et du
Citoyen avait exclu les femmes comme sujets de ces droits. En 1841, la loi
interdisait a ces femmes de prendre part aux réunions publiques et
d'assister a des réunions abordant les questions politiques. Les
francaises ont dO attendre l'année 1944 pour obtenir le droit de vote.
Aux Etats-Unis d'Amérique, même après l'adoption de la
clause de protection égale, les femmes n'étaient pas
considérées comme égales aux hommes. Dans ce pays oi les
inégalités raciales constituent l'une des problématiques
les plus importantes, le droit de vote a été accordé aux
femmes 50 ans après l'obtention de ce droit par les esclaves en 1870.
Partout ailleurs dans le monde, le déséquilibre entre les sexes
s'est inscrit peu a peu dans les normes juridiques aussi bien dans le droit des
biens, le droit successoral, la législation sur le mariage ou le divorce
ou encore sur la nationalité.
73 VAIRIKAS, E.,< le principe de la parité entre les
sexes >>. Cahiers du Gedisst, nO 17, < Principes et enjeux
de la parité >>, 1996, P. 35.
Enfin, les procédures et mécanismes
anti-discriminatoires ne jouent pas de la même manière lorsqu'il
s'agit du motif du sexe74. Si par essence, les problématiques
d'égalité sont comparables quel que soit le critère de
différenciation, sur le fond, la résolution des
inégalités fondées sur le sexe nécessite une
approche différente. En effet, si l'égalité de race par
exemple se traduit par une nécessité d'assimilation, la
problématique de l'égalité des sexes exige selon les
circonstances tantôt une notion d'assimilation tantôt une notion de
différenciation75. Ainsi, si l'égalité de droit
de vote nécessite que ne soit pas prise en compte l'identité
sexuelle, l'égalité dans l'emploi demande des mesures
spécifiques pour aménager des congés de maternité
ou des horaires spéciaux aux femmes allaitantes. Ceci explique bien
pourquoi malgré l'affirmation formelle de l'égalité entre
les hommes et les femmes depuis la déclaration des droits de l'homme, la
réalité de l'égalité substantive entre les sexes
dans la jouissance des droits demeure non achevée. Ce non
achèvement de l'égalité substantive des sexes est
d'ailleurs une réalité universellement vécue.
Paragraphe 2 L'universalité des disparités
liées a la différence des sexes.
L'utilisation du sexe comme critère de
différenciation des droits dans presque tous les systèmes
juridiques de part le monde s'est traduite par des disparités
réelles entre les hommes et les femmes et ce, a l'échelle
mondiale. Ainsi:
- les deux tiers des 860 millions d'adultes
analphabètes que compte le monde sont des femmes etles trois
cinquièmes des 115 millions d'enfants non scolarisés sont des
filles;
- seulement 15% des personnes élues dans les parlements
dans le monde sont des femmes;
74 VOGEL-POLSKY, E., op. cit., p. 17.
75 ROSENFELD, M., le principe d'égalité
appliqué aux femmes dans la jurisprudence de la cour supreme
américaine >>, revue du conseil constitutionnel français
http:IIwww.conseilconstitutionnel.frIcahiersIccc5Irosenfield.htm
- en moyenne au niveau mondial, le revenu des femmes est de
50% a 80% inférieur a celui des hommes et dans aucun pays du monde, les
femmes n'ont un revenu égal a celui des hommes76.
Ces chiffres attestent clairement que l'égalité
substantive entre les hommes et les femmes dans la jouissance de leurs droits
sociaux, économiques et politiques est loin d'être atteinte. S'il
est vrai que tous les hommes ne jouissent pas non plus de leurs droits
fondamentaux, les statistiques présentées plus haut montrent que
le plus grand nombre de marginalisés se trouvent parmi les femmes.
Quantitativement, les femmes et les hommes ne jouissent donc pas
également de leurs droits fondamentaux. Les féministes affirment
a ce sujet que l'égalité constitue la promesse la plus
inachevée de la modernité77. En matière
d'égalité des sexes, cette situation découle de deux
situations fondamentales au niveau des Etats.
D'abord, dans les pays oC.i formellement
l'égalité de droit est presque achevée, il existe un
écart entre les situations de droit et les situations de fait. En ce qui
concerne l'égalité des sexes, beaucoup de législations
reconnaissent et établissent l'égalité des hommes et des
femmes. Mais dans la réalité de la vie quotidienne, cette
égalité est loin d'être atteinte. Ni
l'égalité devant la loi, l'égalité de traitement ou
les discriminations positives et encore moins les lois sur la parité
n'ont réussi a transformer l'égalité des sexes en une
réalité.
Ensuite, nombreux sont encore les pays membres de
l'Organisation des Nations Unies oC.i l'inégalité entre les sexes
est consacrée par les législations nationales. Ces
inégalités demeurent notamment dans le droit matrimonial, avec la
polygamie, le lévirat, la notion de chef de famille, d'autorité
parentale, du nom des descendants etc. Les droits successoraux ne sont toujours
pas répartis également entre les hommes et les femmes dans
certains pays. Il en est de même pour les pratiques de violences envers
les femmes allant de la limitation
76 Ces statistiques sont tirés du rapport mondial sur le
développement humain 2004, la liberté culturelle dans un monde
diversifié :
http:IIhdr.undp.orgIreportsIglobalI2004IfrancaisIpdfIhdr04 fr HDI.pdf
77 VARIKAS, E., in HIRATA, H.; LABORIE, F.; LE DAORE, H. ;
SENOTIER D. (Coord), Dictionnaire critique du féminisme, Paris : Presses
universitaires de France, 2000, p. 54.
de la liberté d'expression passant par les violences
conjugales, la traite des êtres humains jusqu'aux mutilations
génitales féminines.
En outre, les organes des Nations Unies chargées de
défendre les doits des femmes en particulier la Commission des droits de
l'Homme et la Commission de la condition de la femme n'ont pas pu, depuis leur
création, traiter efficacement la question de l'égalité
des sexes78.
Jusqu'en 199379, la Commission des droits de
l'Homme chargée de réaliser des études, de rédiger
des projets d'instruments internationaux et de rédiger des rapports sur
la situation des droits humains dans les pays signataires de la Charte des
Nations Unies n'a pas pris en compte la problématique homme et femme.
Aucune attention spécifique n'était accordée aux atteintes
portées aux droits des femmes de sorte a faire le lien entre
l'appartenance sexuelle et le type de violation, contrairement a ce qui se
faisait dans le cadre de la discrimination des minorités ethniques par
exemple. Les thématiques spécifiques développées
par cette commission étaient les disparitions forcées ou
involontaires (1980); les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou
arbitraires (1982) ; la torture (1985) ; l'intolérance religieuse (1986)
; la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie impliquant
des enfants (1990) ; la détention arbitraire (1991) ; les personnes
déplacées dans leur propre pays (1991) ; les formes
contemporaines de racisme (1993) ; la liberté d'opinion et d'expression
(1993); l'indépendance et l'impartialité des juges et des avocats
(1994)80. Les problèmes de violation des droits de l'Homme
n'étant pas envisagés sous l'angle du sexe, il était
impossible a cette Commission de se
78AMNESTY INTERNATIONAL, UNE ANNEE REMARQUABLE POUR
LES DRO1TS DES FEMMES? Les Nations Unies, les gouvernements et les droits des
femmes, Londres, janvier 1998, p.8. consulté en ligne,
http:IIweb.amnesty.orgIlibraryIindexIfraior400l2l997
79 En cette année a été tenu la
conférence mondiale de Vienne sur les droits de l'Homme qui a fait
ressortir les spécificités liés aux violations des droits
fondamentaux des femmes et demander leur prise en compte par les organismes
internationaux des droits de l'Homme.
80 AMNESTY INTERNATIONAL, op. cit., p.9.
rendre compte des différences pour pouvoir faire
ressortir la problématique de l'égalité des sexes dans la
jouissance des droits fondamentaux81.
Quant a la Commission de la condition de la
femme82, elle s'est activée avec succès pour la
promotion de l'égalité juridique des sexes dans les droits
sociaux et économiques. Initiatrice de la décennie des Nations
Unies sur les droits des femmes, et des trois (03) conférences qui y
sont associées83, et surtout de la conférence de
Pékin , elle a permis une prise de conscience internationale sur les
inégalités dont sont victimes les femmes. Toutefois, elle n'a pu
mettre en place des mécanismes engageant la responsabilité des
Etats tel que le faisait la Commission des droits de l'Homme. Cela est dO au
fait que les questions concernant les rapports sociaux entre les sexes
étaient considérées au niveau international comme relevant
du domaine privé des Etats car liées a des
spécificités culturelles. Mieux, les Etats n'étaient tenus
que d'ceuvrer a la réalisation progressive des droits économiques
et sociaux politiques et cutureset ne pouvaient en aucun cas être tenu
responsables du défaut de réalisation de ceux-ci. De fait, cette
commission n'a pu aller au-delà de l'égalité formelle pour
travailler sur la réalisation effective de l'égalité des
sexes a l'intérieur des Etats.
Le système de protection des droits de l'Homme des
Nations Unies n'est pas resté longtemps indifférent a la
persistance de la problématique de l'égalité des sexes.
81 A la suite de la conférence de Vienne de 1993 il a
été créé un mécanisme thématique
autour de la violence contre les femmes en 1994.
82 Crée en 1946 par la commission des économique
et social des Nations Unies pour élaborer des recommandations et
rapports concernant la promotion des droits de la femme ainsi que des
recommandations visant a obtenir que les hommes et les femmes puissent avoir
les mêmes droits.
83 Il s'agit des conférences de Mexico en 1975, de
Copenhague en 1980 et de Nairobi en 1985.
Section 2 LA PRISE EN COMPTE DES DIFFERENCES DE SEXES
DANS LE SYSTEME DE PROTECTION DES DROITS DE L'HOMME
DES NATIONS UNIES.
Dans le système des Nations Unies ainsi qu'au niveau
des systèmes régionaux de protection des droits de l'Homme, la
question de l'égalité des sexes a connu une évolution
progressive, a mesure que se dévoilaient l'importance et les
spécificités de cette question. Aussi, outre les instruments
normatifs visant l'égalité juridique des sexes, s'est introduit
progressivement une nécessité d'actions plus spécifiques
orientées par des Plans d'actions.
Paragraphe 1 Les instruments normatifs sur
l'égalité des sexes.
Outre la proclamation de l'égalité des sexes
dans les instruments de la charte des Nations Unies, des instruments
spécialement consacrés aux femmes ont été
adoptés pour assurer une vraie égalité entre les hommes et
les femmes. La première de ces conventions a été la
convention concernant les droits politiques des femmes adoptée en
195284. Il s'agit d'une réaffirmation de
l'égalité entre les hommes et les femmes en matière
politique telle qu'énoncée dans la Déclaration Universelle
des Droits de l'Homme. C'est le premier instrument créant l'obligation
expresse aux [tats d'assurer des droits politiques égaux pour les
femmes. [lle couvre notamment le droit de vote et celui d'être élu
mais également le droit d'occuper tous les postes et fonctions publiques
établis en vertu des législations nationales.
Cette convention a ouvert la voie a l'intégration dans
les législations et politiques nationales des [tats membres de
dispositions sur l'égalité des femmes et des hommes dans les
domaines politiques dans de nombreux pays. Les femmes accédèrent
ainsi aux droits politiques au même titre que les hommes.
84 Ouverte a la ratification par l'Assemblé
générale des Nations Unies dans sa résolution 640 ('ill)
du 20 décembre 1952 ; entrée en vigueur le 7juillet 1954.
Cette convention fut suivie de la convention sur la
nationalité de la femme mariée en 195785 et de la
convention sur le consentement et l'öge minimum du mariage en
197986 . Si le souci d'égalité des sexes au sein de
l'Assemblée Générale des Nations Unies s'est au
début limité aux droits qui s'attachent aux roles traditionnels
des femmes87, l'Organisation Internationale du Travail s'est
très tOt démarquée de cette vision. Des 1919 et donc avant
même la convention sur l'égalité politique, l'OIT
s'inscrivait dans la lutte pour les droits des femmes dans le milieu
professionnel. Ainsi a-t-elle adoptée plusieurs conventions sur les
droits spécifiques des femmes en matière d'emploi. En 1951, elle
adopte la premiere convention internationale relative a l'égalité
des sexes dans le domaine professionnel88. Cette convention fut
suivie de nombreuses autres traitant spécifiquement de la question de
l'égalité des sexes dans l'exercice des professions.
Au départ, la communauté internationale a donc
entériné une approche spécifique concernant les droits des
femmes en adoptant des instruments dans certains domaines bien précis.
La question de l'égalité des sexes était ainsi
traitée en dehors des instruments généraux des droits de
l'Homme et dans les limites des droits énoncés par les textes
concernés.
Les deux pactes internationaux relatifs aux droits civils et
politiques et aux droits économiques, sociaux et culturels ont
étendu le principe de l'égalité des sexes a tous les
droits fondamentaux. Toutefois, face a la persistance des
inégalités de sexes caractérisées par une
discrimination généralisée et quasi systématique
des femmes, a été adoptée la Convention sur
l'élimination de toutes formes de discrimination a l'égard des
femmes89. Ce texte constitue une étape importante dans la
lutte contre les discriminations basées sur le sexe en
85 Ouverte a la ratification par l'Assemblé
générale des Nations Unies dans sa résolution 1040 (XI) du
29 janvier 1957; entrée en vigueur le 11 aoüt 1958.
86 Ouverte a la ratification par l'Assemblé
générale des Nations Unies dans sa résolution 1763 A
(XVII) du 7 novembre 1962 ; entrée en vigueur le 9 décembre
1964.
87 AJ1NESTYINTEP.NATIONAL, op. cit., p.7
88 Convention n° 100 concernant l'égalité
de rémunération entre la main d'Xuvre masculine et la main
d'Xuvre féminine pour un travail de valeur égale. Adoptée
le 29 juin 1951 par la conférence générale de
l'Organisation internationale du Travail en sa 3'ème session,
entrée en vigueur le 23 mai 1953.
89 Proclamée par l'Assemblée Générale
des Nations Unies le 7 novembre 1967, résolution 2263 (XXII).
ce sens qu'elle consacre d'abord la question de la
différence des sexes et des disparités qui y sont liées
comme des discriminations portant atteinte a la dignité humaine. Des
lors, les Etats sont invités a traiter la différence de sexe
comme un élément fondamental de la construction de la justice.
Aussi la convention appelle t-elle a l'incorporation du principe
d'égalité des sexes dans les constitutions et législations
des Etats membres.
Ce choix politique de la communauté internationale de
faire de la différence des sexes un élément important a
prendre en compte dans la construction de l'égalité a
été codifié par la convention sur l'élimination de
toutes les formes de discrimination a l'égard des femmes90.
Il s'agit là plus que la déclaration précédente,
d'un instrument juridique opposable a tous les Etats en matière
d'égalité des sexes. Comme annoncé dans le chapitre
précédent, il s'agit d'une présentation complete des
divers droits des femmes déjà formulés dans les
instruments précédents des Nations Unies.
Au-delà de l'interdiction de faire des discriminations
basées sur l'appartenance sexuelle, cette convention inscrit
résolument les Etats parties dans une démarche proactive pour la
réalisation de l'égalité des sexes91. Aussi la
convention oblige t-elle les Etats parties a prendre toutes les mesures
nécessaires (législatives et politiques) pour éliminer les
discriminations faites aux femmes et ce, dans tous les domaines92. A
la différence des autres conventions, la CEDAW va très loin en
définissant avec détail toutes les mesures destinées a
éliminer les discriminations envers les femmes au niveau de
l'éducation, de la vie économique et même dans les aspects
sociopolitiques93.
La question de l'égalité des sexes sort ainsi
d'une démarche de codification passive et va dans le sens d'actions
concretes avec des obligations de résultats assez clairement
formulés. Il s'agit là d'une premiere en matière des
90Adoptée et ouverte a la signature, ala
ratification et a l'adhésion par l'Assemblée
générale des Nations Unies dans sa résolution 34I180 du 18
décembre 1979, entrée en vigueur le 3 septembre 1981.
91Article 2 de la convention.
92 Article 3 de la convention.
93 Articles 5a 16 de la convention.
droits fondamentaux qui illustre a la fois l'importance et la
spécificité de la problématique de l'égalité
des sexes.
Cette évolution de la codification de
l'égalité des sexes a été également
observée au niveau des organisations régionales. Ainsi le Conseil
de l'Europe a t-il adopté plusieurs déclarations et
recommandations concernant l'égalité des sexes dans l'Union
Européenne. Il en a été de même dans l'Organisation
des Etats Américains et au sein de l'Union Africaine. La dernière
convention régionale en date étant le Protocole de la Charte
Africaine des droits de l'Homme et des peuples relatif au droit des femmes en
Afrique.
L'évolution de la codification a été
accompagnée de plans d'actions pour inscrire une dynamique plus
concrète a la lutte pour l'égalité des sexes.
Paragraphe 2 Les plans d'actions des Nations Unies.
Pour encourager le respect des diverses conventions et surtout
l'adoption par les Etats des mesures visant a éliminer les
discriminations fondées sur le sexe, les Nations Unies ont pris
plusieurs initiatives. La première de ces actions était la
proclamation par l'Assemblée Générale de l'année
1975 comme année internationale de la femme dont l'un des objectifs
était de promouvoir l'égalité entre les hommes et les
femmes94. Consacrée par la Conférence mondiale de
l'Année Internationale de la Femme, cette année a donné
lieu a l'adoption d'un des premiers plans d'actions pour la réalisation
de l'égalité des sexes par les Nations Unies. Ce plan d'action
qui liait la situation d'infériorité des femmes au
sous-développement socio-économique a suscité la
proclamation de la décennie des Nations Unies pour la femme (1976 a
1985) dont les trois objectifs étaient Egalité,
Développement et Paix. La deuxième conférence mondiale sur
les femmes tenue en 1980 a Copenhague a élaboré le programme
d'action pour la réalisation de ces trois objectifs.
Clôturée par la conférence de Nairobi en 1985,
l'évaluation de la décennie de la femme a engendrée le
plan d'action de Nairobi basé sur le fait qu'une contribution
essentielle au renforcement de la paix et de la sécurité
internationales serait apportée par
94 SYMONIDES, J., VOLVODINE, V., Droits des Femmes, recueil de
textes normatifs internationaux, Paris, UNESCO, 1998, p. 16
l'élimination de toutes les formes
d'inégalité entre les Hommes et les Femmes95. Des
mécanismes spécifiques ont donc été mis en place
pour suivre la mise en ceuvre des stratégies élaborées a
Nairobi et adoptées par l'Assemblée générale des
Nations Unies. Il s'agit de la Commission de la condition de la femme, ainsi
que la mise en place par le Conseil Economique et Social des Nations Unies
d'une procédure de soumission de rapport sur la question.
La question de l'égalité des sexes était
donc jusque-là traitée par les Nations Unies comme une question
en dehors du système de protection des droits de l'Homme. De plus, la
recherche de l'égalité entre hommes et femmes était
justifiée par des nécessités de développement et/ou
de paix.
Il a fallut attendre 1993, a la conférence de Vienne
sur les droits de l'Homme, pour que les graves violations des droits
fondamentaux des femmes soient reconnues comme faisant partie du programme des
droits fondamentaux des Nations Unies. Le fait que (les droits des femmes sont
des droits fondamentaux a été réaffirmé lors de
cette conférence et toutes les instances des Nations Unies ont
été appelées a éliminer la violence contre les
femmes dans les sphères publiques et privées. La
conférence recommanda a cet effet que les organismes des droits de
l'Homme ainsi que les Etats intègrent une approche sexospécifique
dans leurs programmes et plans d'action. Il s'agit ainsi pour les structures
concernées d'incorporer les questions qui affectaient de manière
différente et disproportionnée les différents sexes et
particulièrement les femmes dans leurs analyses et modes
d'interventions.
Cette tendance a été réaffirmée et
approfondie lors des conférences suivantes des Nations Unies,
particulièrement lors de la conférence internationale sur la
population et le développement du Caire en 1994 et lors de la
quatrième conférence mondiale sur les femmes de Beijing en 1995.
Cette dernière a donnée lieu a un Plan d'actions
internationalement reconnu qui devait permettre d'aboutir a une
égalité substantive des sexes a travers la protection et la
promotion des droits fondamentaux des femmes.
95ibide
Le premier point de ce plan d'action basé sur une
analyse différenciée selon les sexes concerne les droits de
l'Homme. Tout en réaffirmant que les droits des femmes sont d'abord des
droits de l'Homme96, Beijing a mis en exergue les
spécificités féminines dont la protection devrait
découler des mêmes droits reconnus a tous. De ces
spécifiés dues a des roles biologiques mais également a
des construits sociaux se dégageait la nécessité
d'introduire une analyse différenciée suivant les sexes dans les
droits fondamentaux. Pour concrétiser les engagements pris par rapport a
l'égalité des sexes, les Nations Unies devraient intégrer
la problématique homme-femme dans l'analyse des normes et
mécanismes existant en matière de droits fondamentaux et dans
leur application97.
Malgré son caractère essentiellement politique,
le plan d'action de Beijing est une instrumentalisation des dispositions et
mesures exigées par la CEDAW qui est opposable juridiquement aux Etats.
Même si elle n'a pas une force juridique obligatoire, le Plan d'action de
Beijing est un instrument assez contraignant pour les Etats avec un
mécanisme de suivi fonctionnel. Ainsi la conférence de 1995 a
t-elle été suivie de deux autres, une en 2000 a New York et la
dernière en 2005 a Pékin.
Sans être des instruments juridiques en ce qui concerne
l'égalité des sexes, les déclarations de Vienne et de
Beijing ont introduit le débat sur une nouvelle approche de la question
de l'égalité des sexes. Il s'agit de l'approche
sexospécifique formulée pour la première fois dans le
cadre des droits fondamentaux par la déclaration de Vienne. Etroitement
liée au concept genre et développement, cette démarche
dans le cadre de l'égalité des sexes constitue une nouvelle voie
d'instrumentalisation qui a de nombreuses implications sur la
compréhension même de la notion d'égalité.
96 Et ce, malgré la polémique qu'induisait le terme
droits de l'homme >> ainsi que l'existence de texte concernant
exclusivement les droits de la femme.
97 AMNESTY INTERNATIONAL, op. cit., P.5
Chapitre 4
VERS UNE REINVENTION DE L'EGALITE DES SEXES.
Les différentes conférences mondiales dites des
femmes ont conduit a la prise de conscience par la communauté
internationale de l'incapacité des différentes approches
juridiques et mécanismes institutionnels a assurer la réalisation
de l'égalité des sexes. De fait, les réflexions se sont
orientées vers d'autres formes d'instrumentalisation de ce principe pour
aboutir a la réalisation de cette égalité. Introduite par
la conférence de Beijing de 1990, l'approche sexospécifique a
été recommandée dans le cadre de la protection des droits
fondamentaux par la déclaration de Vienne de 1993.
Cette approche basée sur le postulat que le droit
reflète et génère les relations inégalitaires de
genre vise la prise en compte des rapports sociaux de sexe dans
l'instrumentalisation de la notion d'égalité des sexes. Cette
démarche qui résulte de la prise en compte des systèmes de
genre introduit d'autres paradigmes dans la question de l'égalité
des sexes.
Section 1 POUR UNE DEMARCHE SEXOSPECIFIQUE DANS
LA PROTECTION DES DROITS DE L'HOMME.
L'intégration de la démarche
sexospécfique dans les droits fondamentaux relève de la
nécessité de prise en compte des rapports sociaux de sexes qui
fondent les inégalités entre les sexes. Le droit en tant que
héritier et créateur de ces rapports sociaux ne saurait donc
être épargné d'une certaine remise en cause en ce sens.
Paragraphe 1 De la nécessité de prise en
compte des rapports sociaux pour la construction de l'égalité des
sexes.
Essentiellement basée sur la prise en compte des
systèmes de genre, la nécessité de la démarche
sexospécifique a été expliquée par les Nations
Unies en ces termes:
((Le terme "genre" renvoie a la manière dont les roles,
les attitudes et les valeurs concernant les femmes et les hommes, et les
rapports entre eux, sont construits par les sociétés dans le
monde entier. Si le sexe d'une personne est déterminé par la
nature, son genre est un construit social [...J mais presque toujours, le genre
crée la fonction d'une manière qui subordonne les femmes et les
pénalise, les empêchant d'exercer pleinement tous les droits de la
personne. Outre qu'elle se reflète dans les rapports individuels, cette
discrimination imprègne toutes les institutions [...J. La notion de
[...J "démarche tenant com pte des sexospécificités",
[...J plus couramment appelée "démarche sexospécifique",
découle du principe que, dans toutes les situations, la
réalité est interprétée sous un angle donné.
De tout temps, c'est le point de vue des hommes qui l'a
généralement emporté. La plupart des perceptions de la
réalité n 'ont donc pas tenu com pte des vues et des
expériences des femmes, occultant les violations quotidiennes de leurs
droits fondamentaux. 98.
Le système de genre tel qu'est la construction sociale
et culturelle de la différence des sexes affecte donc
l'égalité de jouissance des hommes et les femmes de leurs droits,
le genre. Cette forme de catégorisation désavantage
généralement les femmes dans la jouissance de leurs droits tels
que la liberté, l'autonomie de décision, la capacité
juridique, et la pleine participation dans les secteurs sociaux
économiques et politiques99.
98 Rapport de la réunion d'experts de 1995 sur
l'élaboration de directives concernant l'intégration, dans les
activités et programmes des Nations Unies relatifs aux droits de
l'homme, d'une démarche sexospécifique. Doc. ONU EICN.4I1996I
105; cité par AMNESTY INTERNATIONAL, op. cit., P.5-6.
99 United Nations Committee on Economic, Social and Cultural
Rights, op. cit., p3.
Les inégalités dans la jouissance des droits
universellement reconnus découlent du moins pour ce qui est des
inégalités entre les sexes de l'ensemble des normes et valeurs
qui déterminent les modes de fonctionnement des institutions ainsi que
les rapports sociaux entre les individus. De fait, lutter contre ces
inégalités demande a réinterroger et a remettre en cause
ses normes et valeurs porteuses d'inégalités dans les rapports
sociaux.
Si le droit est un ensemble de normes qui visent a
réguler les rapports sociaux entre les individus dans la
société, il est de ce fait constructif de ces rapports en tant
que norme de référence dans un système surtout d'Etat de
droit. Aussi, dans la mesure oi lutter contre les inégalités
entre les sexes demande a redéfinir l'ensemble de ces normes
constructrices des rapports sociaux entre les sexes, le droit nécessite
d'être interrogé et ce, a double titre: en tant que
résultante et déterminant des rapports sociaux de sexes. Car, le
droit ne se contente pas d'interdire ou d'autoriser. Engendré par les
rapports sociaux, il construit la réalité sociale et
politique100. Aussi, dans sa vocation a protéger
l'égalité des sexes, les droits de la personne humaine doivent
êtres repensés de manière a tenir compte d'un des
principaux obstacles de la lutte contre les discriminations qui est notamment
la persistance d'images et de stéréotypes légués
par les traditions séculaires qui influencent les attitudes et com
portements des femmes aussi bien que des hommes et contribuent a
perpétuerla domination d'un sexe surl'autre '$/$.
La démarche sexospécifique permet de remettre en
cause ce statut quo structurel susceptible de reproduire et renforcer les
inégalités entre les sexes.
Paragraphe 2 La démarche sexospécifique
appliquée aux droits fondamentaux
L'introduction d'une démarche sexospécifique dans
la promotion de l'égalité des sexes part de la reconnaissance du
fait que ((la réalisation de l'égalité
100 Cf. Marie LANQUETIN, T., Un autre droit pour les femmes?
>> in Laufer J., Marry C. et Maruani M. (dir.), Genre du travail, la
Découverte-Mage, 2003. Cité par BORGHINO Béatrice,
L'égalité desfemmes et des hommes:une question de genre, Actes de
séminaire Genre et droit >>, Marseille, CIDF, juillet 2004, p.
11.
101NGAJ(ATOU, T., op. cit., P.15.
exige que l~on reconnaisse que les regimes social,
économique, culturel et politique sont marques par les differences entre
les sexes; que la condition inequitable des femmes est de nature
systémique ))102. La démarche
sexospécifique est ainsi fondée sur le postulat que les normes et
les politiques ont des effets différents sur les hommes et les femmes et
ce, en fonction des rapports de sexe qui existent dans la
société. Aussi, les normes quand elles sont formulées de
manière neutre ont automatiquement des effets inégaux sur les
hommes et les femmes. Ceci parce qu'elles seront appliquées dans un
contexte oi le système de genre ou la normalité est empreint
d'inégalité.
La systématisation de la démarche
sexospécifique encore appelée mainstreaming du genre ou approche
transversale de l'égalité des sexes inscrite dans le programme
d'action de la quatrième Conférence mondiale des Nations Unies
sur les femmes en 1995 a Beijing, a été adoptée par plus
de 180 pays. Il s'agit d'une approche stratégique et concrète,
((preventive et a long terme)), qui vise a intégrer le principe
d'égalité entre les hommes et les femmes dans les processus de
l'ensemble des lois et des politiques103
Cela implique que chaque disposition législative
concernant les droits de l'Homme doit être analysée du point de
vue de son implication différentielle sur les hommes et les femmes afin
d'y intégrer les formulations adaptées pour pouvoir garantir par
son application l'égalité substantive entre les hommes et les
femmes dans la jouissance du droit concerné.
Cela veut dire également que les analyses des rapports
sociaux entre les hommes et les femmes doivent engendrer la formulation de
certaines dispositions législatives visant a lever les barrières
empêchant l'un ou l'autre des sexes d'un droit fondamental donné.
Les Nations Unies estiment a cet effet que l'application d'une loi
indifférente a la problématique de genre va perpétuer
102 Condition féminine Canada, A l'aube du
XX(iéme siècle : Le plan fédéral pour
l'égalité entre les sexes, Montréal, 1995, p 17. En ligne
sur le site de la condition féminine du Canada:
http:IIwww.swccfc.gc.caIpubsI066261g51XI1gg508 066261g51X f.pdf
103 Réseau québécois d'action pour la
santé des femmes, Mémoire sur l'Avis du Conseil du statut de
lafemme intitulé ((Vers un nouveau contrat social pour
l'égalité entre lesfemmes et les hommes>>, Montréal,
RQASF, décembre 2004, p. 11. En ligne sur
http:IIwww.rqasf.qc.caIMemoire commission.pdf.
ou exacerber les inégalités
existantes104. Le système de genre affecte en effet
l'égalité de jouissance de leurs droits pour les hommes et les
femmes.
Les droits de l'Homme ne doivent plus être concus
exclusivement dans le rapport de l'individu a l'Etat mais également
prendre en compte le rapport de cette personne aux autres individus de la
société. Il faut de ce fait ((rattacher l'idée même
d'autonomie individuelle a un contexte social qui permet aux êtres
humains d'acquérir une identité pas seulement en tant
qu'individus, mais aussi en tant que membres d'une collectivité
105.
Il ne s'agira plus ici de prendre des mesures
spécifiquement concues pour l'un ou l'autre des sexes mais de
réaménager les dispositions sur la base de l'analyse des
relations de genre. Ici, ce ne sera plus exclusivement les différences
biologiques qui seront prises en compte mais les différences
sociologiques et culturelles qui limitent l'accès et la jouissance des
droits par les individus. Ainsi, au lieu de recourir a la violence des
discriminations positives, elles auraient consisté a sup primer les
discriminations négatives qui empêchent les femmes de s'assumer
comme telle tout en étant, en société, des hommes comme
les autres106. L'approche sexospécifique de
l'égalité des sexes permet que l'on tienne compte et qu'on
évalue de manière égale des différences entre
hommes et femmes plutôt que de maintenir une hiérarchie entre les
sexes107.
Pour ce qui est du système juridique de protection, il
faut un mécanisme de plainte qui prenne en compte autant les besoins des
hommes que ceux des femmes. Les plaintes doivent être analysées de
manière a pouvoir détecter les atteintes aux droits de la
personne humaine qui sont caractérisés par des
104 United Nations Committee on Economic, Social and Cultural
Rights, op. cit.p.5.
105 Comité de America Latina y el Caribe para la
defensa de los derehos de la Mujer (CLADEM), "Human Rights for the 21st
century: contributions to the 50th anniversary of the Universal Declaration of
Human Rights from a gender perspective", cite par Jan BAUER, Seul le silence te
protègera: les femmes, la liberté d'expression et le langage des
droits de l'Homme, Essais sur les droits humains et le développement
démocratique n°6, Montréal, Centre international des droits
de la personne et du développement démocratique, 1996, p. 33.
106 SLAMA, A. G., op. cit., p 140.
107 Conseil de l'Europe, Gender mainstreaming. Conceptual
framework, methodology and presentation of good practices, Strasbourg, mai
1998, p.8.
En ligne sur:
http:IIwww.unhcr.orgIcgi-binItexisIvtxIprotectIopendoc.pdf?tbl=PROTECTION&id=3c160b06a.
sexospécificités. Ainsi, la violence
sexospécifique doit être poursuivie conséquemment et les
règles de procédures et de preuve doivent pouvoir exclure les
stéréotypes de genre. Les règles et procédures de
la Cour Pénale Internationale ont été récemment
soumises a cette démarche d'intégration de l'approche
sexospécifique'°8.
De plus, une démarche sexospécifique suppose
l'abolition de cette démarcation entre les droits des femmes et les
droits de l'Homme qui existe au sens du système de protection des
Nations Unies. Les questions spécifiques liées a l'un ou a
l'autre des sexes doivent pouvoir être traitées avec toutes leurs
particularités a l'intérieur du système
général de protection des droits de
l'Homme. Cela permettrait de dépasser la
marginalisation actuelle dont souffre la question de l'égalité
des sexes qui est plutôt percue exclusivement comme une
problématique de droit des femmes. Dans ce sens, l'ordre du jour des
réunions de la Commission des droits de l'homme des Nations Unies
comporte désormais un point sur les droits des femmes et la
problématique homme - femme. En outre, la Commission souhaite
intégrer la dimension sexospécifique a l'ensemble des points de
son ordre du jour.
Section 2 DE L'EGALITE DES DROITS AU DROIT A L'EGALITE
La prise en compte des rapports sociaux de sexes dans la
problématique de l'égalité des sexes revient a
réaliser non pas l'égalité des droits mais a construire le
droit a l'égalité entre les sexes. Ceci pour dépasser
l'opposition fondamentale entre l'identité et la différence
produite par la bipolarisation classique entre l'universalisme et la
différenciation.
Paragraphe 1 Le droit a l'égalité
L'adoption d'une démarche sexospécifique dans
les droits fondamentaux consiste a dépasser l'égalité des
droits et a construire le droit a l'égalité. A travers cette
recherche de l'égalité ce n'est pas l'uniformité, nile
rejet ou la
108 Lire ace sujet le CAUCUS des femmes pour une justice
basée sur le genre, la CPI mise a l'agenda de BeNjing +5, publié
en ligne ; www.iccnow.orgIfrancaisIopinionIrapportsICaucuso2.pdf
négation des différences entre les hommes et les
femmes109 qui est en jeu, mais au contraire l'acceptation des
différences et l'affirmation, malgré elles de la dignité
égale des individus qui doivent pouvoir effectuer librement leurs choix
de vie.
En ce sens, le concept d'égalité devra prendre
en compte les différences entre les individus que ces
particularités émanent de leur sexe/genre, mais aussi de leur
appartenance ethnique, religieuse etc. Il s'agira de réaliser
l'égalité entre les sexes mais également a
l'intérieur des sexes puisque a l'intérieur des groupes sexuels
les individus subissent plusieurs types de discriminations$$0. Cela
revient a abandonner la neutralité du moins dans l'application des
droits de l'Homme mais surtout dans les juridictions. Le droit a
l'égalité revient donc a la prise en compte appropriée des
différences entre les deux sexes sans pour autant désavantager
l'un ou l'autre de quelque manière que ce soit en fonction de telles
différences.
Les différences entre les sexes ne doivent de fait plus
être évoquées en termes d'infériorité ou de
supériorité. Aussi, le droit a l'égalité n'est pas
basé sur le modèle de déficit du droit a
l'égalité111, qui tente de compenser les
((déficiences)) des caractéristiques du groupe dont les
performances sont jugées moindres$$ 2.
Le droit a l'égalité ne vise nile gommage des
différences nile nivelage de la société. Il se
réfère a la reconnaissance d'une égale valeur des
caractéristiques physiques ou comportementales et aspirations de l'un ou
l'autre des sexes. ((L'idéal d'égalité recherché
entre les femmes et les hommes
109 Héritier, F., Masculin/Féminin La
pensée de la différence, Paris, ed Odile Jacob, 1996, cité
par CESR de Bretagne, Pour l'égalité entre lesfemmes et les
hommes en Bretagne, Rennes, Novembre 2004, p. 1. publié en ligne
http:IIwww.regionbretagne.frICRBIGroupsIconseil economique eIlactualite du
cesr2040Iles etudes du cesr e 10661314606 079Iblock
11327712441048Ifile.
110 RICCI Sandrine, Vers un nouveau contrat social pour
l'égalité entre les hommes et les femmes, mémoire du
Centre des femmes de l'UQUAM sur l'avis du conseil du statut de la femme,
Montréal, 2004, P6, consulté en ligne le 22 mars 2006,
http:IIwww.csf.gouv.qc.caItelechargementIpublicationsIAvisNouveauContratSocialEgalite.pdf
111 T. REES, Mainstreaming equality in the European Union,
Routledge, London, 1998, p.28. Cité par Annie HONDEGHEM et Sarah NELEN,
l'égalité des sexes et la politique du personnel dans le secteur
public, , Paris, l'Harmattan (Logiques Juridiques), 2001,P. 33.
112 HONDEGHEM Annie, NELEN Sarah, l'égalité des
sexes et la politique du personnel dans le secteur public,, Paris, l'Harmattan
(Logiques Juridiques), 2001, p.33-34.
suppose la correction des inégalités et
l'élimination de toutes les discriminations basées sur le sexe.
Il se manifeste, sur le plan formel comme sur celui des résultats, par
une égalité de droits, de responsabilités et de
possibilités. Il implique que la société soit
libérée de la hiérarchisation des rap ports sociaux entre
les femmes et les hommes et que le sexe ne soit plus un marqueur des roles
sociaux113. Le droit a l'égalité requiert ainsi une
attitude plus complexe, que celle de l'égalité des droits. [lle
consiste a penser l'égalité de sexe en fonction des enjeux
concrets des situations''4.
[n effet, prendre en compte les besoins spécifiques
liés a chaque sexe pour la jouissance pleine de ces droits fondamentaux
consiste a ne plus viser l'égalité de droits mais a construire
une égalité de fait quelles que soient les différences des
personnes concernées. Si le système juridique reconnaIt le droit
a l'égalité, l'objet d'analyse ne sera plus la comparaison entre
les manières dont chaque individu parvient a cette égalité
mais la réalisation de ladite égalité. Le droit a
l'égalité constitue une acceptation du fait que ((toute
différence de traitement entre les individus devant la loi ne produit
pas forcément une égalité et aussi un traitement identique
mais peut entraIner de graves inégalitésB''5.
Dès lors que l'on reconnaIt le droit a l'égalité, les
différents modes d'instrumentalisation étudiés dans le
deuxième chapitre, ne seront que des moyens divers pour arriver a
l'égalité et qui seront adaptées suivant les situations
concernées.
Toutefois, la question fondamentale d'une telle construction
revient a déterminer quelles sont les différences pertinentes,
les différences qui relèvent du sexe et qui
génèrent des inégalités. Il s'agit là de
toute la problématique du droit a l'égalité qui doit
être résolu au risque de faire tomber la recherche de
l'égalité des sexes dans des particularismes sans fin ou
même dans l'injustice sociale.
113 Conseil du Statut de la femme, op. cit., p. 33.
114 CF Nathalie Heinich, Les contradictions du
féminisme >>, Esprit, n0 spécial << L'un
et l'autre sexe >>, mars-avril 2000. Cité par Irene THYERY,
<<La valeur dSégalité des sexes suppose-t-elle
un droit de la famille asexué ? >>, L'égalité
desfemmes et des hommes:une question de genre, Actes de séminaire CIDF,
Marseile, juillet 2004, p. 23.
115Condition féminine Canada, op. cit., p.
20.
La première distinction qu'on peut faire entre les
différences est celle qui oppose les différences subies a celles
qui résultent d'un choix personnel. A ce niveau, on ne saurait
construire le droit a l'égalité sur les différences
choisis par les individus ceci pour ne pas porter atteinte a la liberté
et a l'autonomie de la personne humaine. L'inégalité
résulterait donc des différences subies$$6.
Mais il faudra encore distinguer entre les différences
subies, ce qui relève de la (( nature et ce qui relève de la
société. De ce point de vue, l'inégalité
résulterait d'une différence socialement produite que subit un
individu ou un groupe d'individus. ici résidera le cceur du
problème : quelle est la part de la # nature )) et du choix qui
intervient dans cette différence sociale subie ))1 1~?
Aussi, le défi du droit a l'égalité est
de déterminer avec discernement les différences qu'il faut
consacrer et celles qu'il faut ignorer$$8.
Paragraphe 2 L'équité au service de
l'égalité
L'instrumentalisation du droit a l'égalité fait
appel a la notion d'équité qui est un principe
d'appréciation des situations concrètes fondé sur un
sentiment du juste, qui implique la prise en considération (...) des
inégalités de fait dans la garantie des droits en amont comme en
aval11=. Cette approche est un mode de prise en compte des
inégalités de fait qui, sans créer des mesures
spécifiques tel que c'est fait dans les actions positives permet de
corriger les effets pervers de l'égalité formelle.
Loin de créer des normes particulières,
l'équité est une règle accessoire, un ensemble de lignes
de conduites, un moyen d'interprétation des autres règles de
droit120qui permet la prise en compte des différences. Il
s'agit donc là, dans la mesure oi les différences a prendre en
compte sont identifiés avec
116 Observatoire des inégalités, Penser les
inégalités, mise en ligne le 3 octobre
2003, http:IIwww.inegalites.frIarticle.php3?id article=137
117 IDEM
118 Lire a cet effet, Le POURHIET, AM., op. cit., p. 168 - 170
119 MAJZA, B., équité et droits fondamentaux
>>, Cahiers de la Recherche sur les droits fondamentaux, n°i, la
garantie juridictionnelle des droits fondamentaux, Paris, éd. Seuil,
2002, P. 84. En ligne www.unicaen.frImrshIcrdfIpdfIc1Majza.pdf
120MAJZA , B., op. cit., p. 88.
discernement du moyen le plus juste de contextualiser
l'égalité des sexes sans tomber dans les écueils de la
discrimination positive et de la parité.
L'équité est ainsi un mode de
rééquilibrage qui permet de ne pas perdre de vue la norme de
l'égalité comme objectif121. Toutefois, le sentiment
du juste sur lequel est fondé la notion d'équité n'est pas
une norme juridique ayant un contenu précis. Aussi,
l'équité ne peut être utilisée de manière
autonome comme la parité ou la discrimination positive. [lle doit
s'inscrire a l'intérieur et dans le cadre d'un droit positif. [t pour ce
qui est de l'approche sexospécifique, ce cadre doit être celui des
différences que la loi aura explicitement consacrées comme
méritant une analyse dans le cadre de la réalisation de
l'égalité des sexes. De fait, il reviendra a identifier a
l'intérieur de chaque loi, les aspects sur lesquels il faudra faire
intervenir cette approche et en préciser la finalité.
Cela permet de dépasser la conception de
l'équité comme une notion de la justice naturelle dans
l'appréciation de ce qui est dO a chacun-e; justice naturelle qui
n'existe pas dans les lois en vigueur. Cette conception de
l'équité exigerait qu'on traite de la même manière
celles et ceux qui sont semblables, et de manière différente
celles et ceux qui sont différents, ce au nom de la justice.
L'[quité dans une démarche sexospécifique n'est donc pas
cette notion ambiguë qui renvoie a un monde hiérarchisé oi
l'on recherche l'amélioration des conditions et non leur
transformation122.
L'équité, telle qu'envisagée ici a
été évoquée dans le droit international de la
personne humaine dans l'article 4 de la Convention relative a
l'élimination de toute forme de discrimination a l'égard des
femmes. La charte sociale européenne du 18 octobre 1961, la charte
communautaire des droits sociaux des travailleurs du 9 décembre 1989
(article 16) y font également référence pour l'application
des droits qu'ils protègent. Il en est de même pour la Cour
Internationale de Justice qui de part l'article 16 de son statut a la
faculté de statuer en toute équité.
121 Idem, p. 88.
122i.ence International de la francophonie, op. cit.,
p. 41.
L'équité dans le cadre d'une démarche
sexospécifique peut être utiliséé a plusieurs
niveaux: dans la formulation de la norme, dans son interprétation et
lors de son application. Lors de la formulation de la norme, elle consiste a
concevoir des mesures générales qui prennent en comte les besoins
des hommes et des femmes. Mesures générales qui seront
accompagnées de mesures complémentaires spécifiques pour
éliminer les obstacles identifiés a l'égalité.
CONCLUSION
La recherche de la réalisation de
l'égalité des sexes par les droits fondamentaux a emprunté
plusieurs chemins au fil des temps. Des progrès ont été
réalisés non sans mal. Mais force est de constater que les moyens
juridiques utilisées pèchent par leur incapacité a
réaliser l'égalité des conditions pour les hommes et les
femmes. Ceci parce qu'elle ont une démarche limitative ou parce que les
méthodes utilisées sont en contradiction avec les postulats
généraux de l'égalité des droits. Dans ses
expressions et dans sa mise en ceuvre, les approches pour
l'égalité des sexes sont ainsi caractérisées par
des ambigultés. Celles ci tiennent en réalité aux
conceptions mêmes qui le fondent ou aux contraintes d'ordre structurel
auquel il se heurte123.
La conception juridique actuelle de l'égalité
des droits est incapable de réaliser l'égalité des sexes.
[lle ne permet pas de prendre en compte de manière adéquate les
différences particularités de la problématique de
l'égalité des sexes. C'est ce qui explique les limites
constatés dans les divers modes d'instrumentalisation juridique de
l'égalité des sexes.
De nouvelles perspectives intéressantes sont
envisagées par l'intégration de l'approche
sexospécifiques. Mais une telle approche ne serait juridiquement
possible sans une réinterprétation de l'égalité des
sexes en termes de droit a l'égalité. L'approche
sexospécifique nécessite en effet un abandon de la
neutralité qui caractérise l'égalité des droits.
Neutralité dela quelle résulte l'incapacité a construire
l'égalité dans la différence que nécessite la
résolution de la problématique de l'égalité des
sexes.
Seul un changement de la conception juridique actuelle de
l'égalité permettrait une intégration de la
démarche sexospécifiques dans les droits fondamentaux sans porter
atteinte aux principes cardinaux de l'égalité des droits. Aussi,
les tentatives actuelles de la prise en compte des rapports sociaux
123 COMMAILLES, J., < les régimes de genre dans les
politiques du droit, en guise de conclusion >>, in DEVILLE, Anne, PAYE,
Olivier, (dir.), Les femmes et le droit- Constructions idéologiques et
pratiques sociales, Bruxelles, Publication des facultés universitaires
de Saint-Louis, 1999, p.264.
de sexes par le biais de l'intégration de cette
approche dans les droits fondamentaux, même si elles gardent toutes leur
pertinence pour la réalisation effective de l'égalité des
sexes constituent une remise en cause de la signification juridique de
l'égalité.
De fait, pour le succès et la cohérence
même d'une telle démarche avec les principes des droits
fondamentaux, il est nécessaire cela fasse l'objet d'une construction
juridique clairement formulée et qu'en soient analysées avec
soins les implications. Plus qu'une nouvelle forme d'instrumentalisation de
l'égalité des sexes, l'intégration l'approche
sexospécifiques dans les droits de la personne humaine porte en elle de
nouveaux paradigmes insuffisamment explorés et analysés.
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