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De l'être politique au droit à la politique: un essai de compréhension du sens de la politique chez Hannah Arendt

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par Tshis Osibowa Godefroy TALABULU
Faculté de philosophie Saint Pierre Canisius - Bachelier en philosophie 2007
  

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CONCLUSION

Notre travail s'est voulu un essai de compréhension de la pensée politique de H. Arendt afin de faire une relecture de la politique contemporaine. Il s'agissait plus spécialement de reconsidérer, à la suite de Arendt, la place de l'homme face à la politique. Au terme de notre propos, nous nous trouvons, en guise de conclusion, dans l'obligation de récapituler succinctement les grandes étapes du chemin parcouru.

Nous avons essayé de situer dans un premier temps la personne qui a guidé notre réflexion. H. Arendt, l'avons-nous dit, a pensé son temps. Le totalitarisme est l'occasion de sa pensée politique. Elle s'est efforcée de comprendre ce mal politique moderne qui dépasse toutes les catégories humaines de pensée, ce mal banalisé, s'exprimant par une extrême violence et domination. Pour elle, l'auteur principal de ce mal reste l'homme. Ce dernier est caractérisé par une perte du monde commun et du déracinement par rapport à la tradition. Et pour pallier à cette perte, l'époque contemporaine a inventé l'idéologie. Celle-ci nous tient lieu de pensée. En réalité elle traduit notre incapacité foncière à appréhender les évènements historiques et à comprendre le sens des actions humaines autrement qu`en les enfermant dans le carcan de la logique. D'où le souci de H. Arendt de rétablir le statut de l'homme et sa responsabilité vis-à-vis de ce qui constitue le lieu de son épiphanie, la politique. Ce rétablissement est un exercice de pensée. Se livrer à cet exercice nécessite sans doute un recours à la tradition. Telle est la méthode de notre auteur qui fait constamment appel aux Grecs et aux Romains, parce que convaincue que pour mieux penser le nouveau, il faut partir de l'ancien.

Le deuxième temps de notre essai a abordé la question de l'homme et spécialement sous son statut ontologique de l'animal politique. Il revenait à notre auteur, qui veut rétablir la politique moderne, s'appuyant sur Aristote, de réconcilier la pensée platonicienne, voire même heideggérienne (son ontologie) avec le monde. H. Arendt s'oppose à ces philosophes qui affirment le primat de la contemplation pour l'homme. Ils prônent la solitude l'homme, son retrait et son désintéressement des affaires humaines dont on ne peut pas espérer atteindre la vérité. Notre auteur affirme cependant que l'homme est essentiellement un « être-avec » et qu'il est impossible de rencontrer un être humain soustrait complètement de l'exigence de vivre en compagnie des autres. La réalité humaine d' «être avec» est une donnée tout à fait ontologique dans ce sens qu'elle intervient comme élément définitionnel de «l'être homme de l'homme» (de son essence). Aristote dire que l'homme est un zôon politikon. Et H. Arendt d'ajouter qu'aucune vie humaine, fût-ce la vie de l'ermite au désert, n'est possible sans un monde qui, directement ou indirectement, témoigne de la présence d'autres êtres humains. Ceci revient à dire que l'homme, bien que contemplatif, ne s'accomplit que dans une polis. Il est donc par nature porté à y vivre activement. C'est ce que nous avons appelé le droit à la politique comme lieu de l'épiphanie de l'homme. Mais qu'est-ce que cette politique, comment jouir de ce droit ? Ainsi, intervenait le troisième temps de notre propos.

Pour H. Arendt, la question n'est pas : Qu'est-ce que la politique ? , car à cette question, il est relativement aisé de répondre. La question est : La politique a-t-elle encore un sens ? Comment lui redonner sans cesse un espace de déploiement et la faire grandir dans les subjectivités résistantes ? Formulée positivement, la vie politique selon Arendt est à la fois l'institution d'un espace particulier (telle est la leçon romaine de la loi) et la vie des hommes dans cet espace (telle est la leçon de l'Agora homérique et de Solon). Le domaine politique est cet espace institué qui permet aux hommes d'agir et de parler et par là de manifester leur singularité. Il est celui de pluralité humaine qui agit ensemble. Il fait surgir un monde commun où nous débattons de son sens, où nous agissons ensemble, le monde étant cela même qui surgit entre les hommes et où tout ce que chacun apporte, par naissance, peut devenir visible et audible, faisant surgir dans le champ de l'histoire, de situations inédites.

Bref, parler de la politique implique la notion de la pluralité comme condition. Et cette pluralité n'est pas du conformisme ou une masse informe de personnes. Elle nécessite la prise en compte de l'égalité ainsi que de la distinction. Par ailleurs, la pluralité actualise la politique par le moyen de la parole (lexis) et de l'action (praxis) à l'opposé de la violence et de la domination que l'on rencontre dans le totalitarisme. Chaque fois que quelqu'un prend une initiative, que quelque chose de nouveau se produit, c'est de manière inattendue, incalculable. Il produit un commencement absolu. Mais ce faisant, il inaugure une chaîne d'action humaines interdépendantes. C'est à l'agir (et non au faire) qu'il revient d'inaugurer quelque chose de neuf, de commencer par soi-même une chaîne. Et la liberté consiste, pour H. Arendt, en ce pouvoir commencer, d'où il résulte que des initiatives humaines sont sans cesse interrompues par de nouvelles initiatives, qui, dans leur multiplicité et leurs incessants mouvements, forment la base même du vivre ensemble, et nous poussent à débattre de notre devenir commun.

Ainsi, le sens de la politique consiste en ce que les hommes libres, ces hommes qui, par leur agir, font que les choses sont autrement, par-delà la violence, la domination, la contrainte, ont entre eux des relations d'égaux, tout en centrant leur agir commun sur l'expression de la liberté. Différence absolue et égalité relative donc : sans une pluralité d'hommes qui sont mes pairs, il n'y aurait pas de liberté. La question n'est pas seulement que nous soyons tous égaux devant la loi, ou que la loi soit la même pour tous. La question proprement politique est que nous ayons tous les mêmes titres à l'action politique, et aux débats qui doivent l'animer.

Nous avons donc constaté, avec H. Arendt que la politique, dans son vrai sens est biaisée dans les sociétés modernes et particulièrement l'Afrique. Tel était le dernier moment de notre travail avant de critiquer, mieux dépasser la pensée arendtienne. Nous avons loué l'effort de la démocratie moderne de vouloir éradiquer le totalitarisme avec tous les lots de violence et de domination qui l'accompagnent. Et avec le Père Valadier, nous avons montré qu'il importe, pour les contemporains, d'exercer la mémoire, de questionner l'histoire et de faire preuve de responsabilité par rapport à ce qu'ils tirent du passé et par rapport aux actes qu'ils posent au présent en vue de mieux orienter le futur. H. Arendt dirait tout simplement : penser ce que nous faisons.

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"Il faudrait pour le bonheur des états que les philosophes fussent roi ou que les rois fussent philosophes"   Platon