
UNIVERSITE OMAR BONGO
--
FACULTE DES LETTRES ET SCIENCES HUMAINES
DEPARTEMENT DES SCIENCES
GEOGRAPHIQUES, ENVIRONNEMENTALES ET MARINES
Master Recherche Géosciences Politiques du Monde
Contemporain (MR GPMC)
Mémoire de fin de cycle
LES ENJEUX DE L'ÉMIGRATION SCOLAIRE
AU
GABON
Présenté et soutenu publiquement par :
Savin Berthier TSINGA BOUKANGOU
Sous la direction de : Et la codirection de :
M. Serge LOUNGOU
Maître de conférences en Géopolitique
(CAMES)
Année académique : 2022-2023
M. Christian WALI WALI
Maître-Assistant en Géographie de la population
(CAMES)

DÉDICACE
Á mon feu père Gabriel BOUKANGOU NZENGUE Et
à ma mère Anne Josiane KASSA
II
REMERCIEMENTS
Un proverbe gabonais dit ceci : « un seul doigt ne
peut laver la figure ». Cette pensée reflète la
manière dont a été construit ce travail, par la
collaboration de plusieurs acteurs. Ainsi, voudrions-nous, en premier lieu,
remercier nos encadreurs, notamment notre directeur de mémoire, M. Serge
LOUNGOU et notre codirecteur M. Christian WALI WALI pour cette passion
transmise des Géosciences Politiques. Aussi, tenons-nous à leur
exprimer notre gratitude pour les conseils, la rigueur et leurs orientations
scientifiques, indispensables pour la réalisation de ce travail.
Nos remerciements vont également à l'endroit de
tous nos enseignants intervenant au département des Sciences
Géographiques, Environnementales et Marines. Nous exprimons une mention
spéciale aux docteurs Emmanuel ONDO ASSOUMOU, Charles MBOUTSOU et Marius
INDJIELEY, partis durant notre parcours estudiantin.
Nous adressons notre gratitude :
- Au Professeur Marc-Louis ROPIVIA pour ses conseils inestimables
;
- Á la promotion GPMC 2021-2023 ;
- Á la famille volontaire AGP (sud) de 2017 ;
- Á la famille BOUKANGOU NZENGUE ;
- Á nos proches (frères, soeurs et ami(e)s) pour le
soutien indéfectible ;
- Á messieurs TCHAGARA RAOUF, Dimitri BEKALE, Julio
Térence MOULOMBA ;
- Á Madame Clarisse NIENGUI ;
- Á Mademoiselle Pétrouchka MBATA NDOMBY ;
- Au père Médard KAPEND.
Et à tous ceux qui ont pris une part active dans la
réalisation de ce mémoire, puissent-ils trouver dans ces lignes
l'expression de notre profonde reconnaissance.
III
LISTE DES SIGLES ET ABRÉVIATIONS
- AEF : Afrique Equatorial Française
- ANBG : Agence Nationale des Bourse du
Gabon.
- AOF : Afrique Occidentale Française
- ENEF : École Nationale des Eaux et
Forêts
- ENS : École Normale Supérieur
- ENSET : École normale supérieure
de l'Enseignement technique
- FESAC : Fondation pour l'Enseignement
Supérieur en Afrique Centrale
- HCR : Haut-commissariat des Nations unies pour
les réfugiés
- IIEP : Institut international de planification
de l'éducation
- INSG : Institut Nationale des Sciences de
Gestion
- IST : Institut supérieur de
Technologie
- ISU : Institut de statistique de l'UNESCO
- MEFPTFPDS : Ministère de l'Emploi, de
la Fonction Publique, du Travail et de la
Formation Professionnelle, chargé du Dialogue Social
- MEN : Ministère de l'Education
Nationale
- MESRSTT : Ministère de l'Enseignement
Supérieur, de la Recherche Scientifique et
du Transfert des Technologies
- NTIC : Nouvelles Technologies de l'Information
et de la Communication
- OIM : Organisation Internationale pour les
Migrations.
- OIT : Organisation Internationale du
Travail
- ONU : Organisation des Nations Unies
- PSGE : Plan Stratégique Gabon
Émergent
- SOSUP : Secrétariat d'orientation
scolaire, universitaire et professionnel
- UNG : Université Nationale du Gabon
- UOB : Université Omar Bongo
- USS : Université des Sciences de la
Santé
- USTM : Université des Sciences et
Techniques de Masuku
iv
SOMMAIRE
DÉDICACE i
REMERCIEMENTS ii
INTRODUCTION GÉNÉRALE v
PREMIÈRE PARTIE 20
LA GÉOGRAPHIE DE L'ÉMIGRATION SCOLAIRE AU
GABON 20
CHAPITRE 1 : CARTOGRAPHIE DE L'ÉMIGRATION SCOLAIRE
GABONAISE 22
1.1. La géographie des émigrés scolaires
gabonais dans le monde 22
1.2. Les dynamiques migratoires des émigrants scolaires
gabonais à l'étranger 32
CHAPITRE 2 : LES MOBILES DE L'EMIGRATION SCOLAIRE AU
GABON 37
2.1. Les facteurs de l'exode scolaire des étudiants
gabonais à l'international 37
2.2. Stratégies de captation des émigrants et leur
intégration à l'étranger 44
DEUXIÈME PARTIE : 52
L'ÉMIGRATION SCOLAIRE AU GABON : ENJEUX ET ANALYSE
52
CHAPITRE 3 : L'ÉMIGRATION SCOLAIRE AU GABON : UN
FAIT MIGRATOIRE AUX ENJEUX SOCIOÉCONOMIQUES, GÉOPOLITIQUES,
SÉCURITAIRES ET
CULTURELS 54
3.1. Les enjeux socioéconomiques de l'émigration
scolaire 54
3.2. Les enjeux géopolitiques, sécuritaires et
culturels de l'émigration scolaire au Gabon 61
CHAPITRE 4 : LE DOMAINE SCOLAIRE, UN ENJEU DE
SOFTPOWER 69
4.1. Puissance et domaine scolaire 69
4.2. Réflexion autour de la nécessité pour
le Gabon d'améliorer son système éducatif 75
CONCLUSION GÉNÉRALE 80
BIBLIOGRAPHIE 84
ANNEXES 92
TABLE DES ILLUSTRATIONS 101
TABLE DES MATIÈRES 104
V
INTRODUCTION GÉNÉRALE
6
1. Justification du sujet
1.1. Contexte de l'étude
En 2020, le nombre de migrants dans le monde était
d'environ « 281 millions de personnes, soit 51 millions de plus qu'en
2010, 128 millions de plus qu'en 1990 et plus de trois fois plus qu'en
19701 ». Ces chiffres montrant la croissance du
phénomène migratoire, rappellent que les migrations concernent
l'ensemble des régions du monde. L'analyse des récits de
l'actualité à cet effet laisse apparaître l'image d'une
mobilité qui projette tantôt le désespoir tantôt
l'abnégation, le courage, le sacrifice, la persévérance,
l'espoir ou le rejet. Ces expressions montrent à quel point «
la migration est une expression de l'aspiration humaine à la
dignité, la sécurité et un futur
meilleur2». Dans un autre sens, les migrations sont «
aussi causes de divisions entre les États et les
sociétés3».
En effet, depuis les années 2000, les termes
émigration, immigration, émigré, immigré ou migrant
ont un écho particulier dans le monde. Devenues un enjeu central du
débat public et électoral dans certains pays notamment du Nord,
ces facettes de la mobilité introduisent plusieurs
préjugés. Parmi ces derniers, une satire est faite sur la
migration africaine qui s'apparente à un « grand
remplacement4 ». En raison de l'histoire coloniale de nombreux
États européens, les migrations africaines y tiennent une place
importante, particulièrement en France. Cris BEAUCHEMIN et David
LESSAULT affirment à cet égard que « la figure du
travailleur immigré est associée, dans l'imaginaire public,
à celle du travailleur algérien ou malien. La
réalité migratoire est dès lors assimilée à
un flux du Sud vers le Nord5 ». Dans cette perspective,
l'Afrique est vue comme un réservoir massif et problématique de
migrants, à l'égard duquel les Européens devraient avoir
des politiques de contrôle de frontière. La mise
1 Nations Unies, 2018. Paix, dignité et
égalité pour une planète saine. Disponible sur URL :
https://www.un.org/fr/global-issues/migration
(consulté le 14 mai 2023)
2UNESCO, 2019. Migration, déplacement et
éducation : Bâtir des ponts, pas des mûrs. Rapport mondial
de suivi de l'éducation, lieu d'édition, UNESCO, p. 11.
3Idem.
4Le « grand remplacement » est une
théorie du complot d'extrême droite introduite en 2010 par
l'écrivain français Renaud CAMUS. Elle est fondée sur des
impressions qui promeuvent une défiance de nature raciste et
xénophobe à l'immigration d'Afrique subsaharienne et du Maghreb
accusée de vouloir changer l'identité française.
5Cris BEAUCHEMIN & David LESSAULT, 2014. «
Les statistiques des migrations africaines : ni exode, ni invasion »,
e-Migrinter (En ligne). Disponible sur URL :
http://www.journals.openedition.org/e-migrinter/417
(consulté le 1 mars 2023)
7
en place en 2005 de l'Agence Frontex6symbolise bien
la volonté de protection des frontières extérieures de
l'Union européenne de ce que certains qualifient d'une véritable
« invasion africaine7».
Pourtant, ces inquiétudes et préoccupations
politiques semblent très éloignées de la
réalité statistique observée. L'organisation
internationale pour les migrations8 (OIM), le Réseau
Programme point sud et le centre d'étude des migrations de
l'université d'Accra (Ghana), soutiennent que « la migration
interrégionale volontaire ou forcée, représente la forme
la plus courante des déplacements en Afrique lorsqu'on la compare
à la migration africaine vers l'Europe ou d'autres régions du
monde9 ».Sur la proportion d'Africains en mobilité
dans le monde en 2023, près de 80 % étaient sur le
continent10. Dans ce sens, WALI WALI affirme que «
l'Afrique a toujours été un espace de déplacements, de
transhumance, de nomadisme. L'histoire du continent noir est marquée
depuis longtemps par les mobilités de ses
populations11».
Parmi les pays d'arrivés de population sur le continent
africain, on peut mentionner le Gabon, la Côte d'Ivoire, le Ghana et
l'Afrique du Sud12 (carte 1). L'examen de la carte 1 montre que les
principales destinations d'immigration économique à travers le
monde sont les Amériques (nord, sud et centre) notamment les
États-Unis, le Canada, le Venezuela et l'Argentine qui font figure de
pôle d'attraction. En Eurasie13, l'Europe de l'ouest, le Japon
et les États du Golfe Arabo-persique sont prédominants. En
Océanie, l'Australie et la Nouvelle Zélande font figure de pays
d'immigration économique.
6 Agence européenne pour la gestion de la
coopération opérationnelle aux frontières
extérieures des États membres de l'Union européenne
7Selon Hervé Le BRAS, il y a une certaine
peur d'une « invasion africaine » sous prétexte que le
continent africain va voir doubler sa population dans les années
à venir, jusqu'en 2050. Cette peur a été accrue par le
livre de Stephen Smith dont le titre évocateur est « la ruée
vers l'Europe. Dans ses mots il signifie que « la jeune Afrique va se ruer
sur la vieille Europe, c'est dans l'ordre des choses ».On peut retrouver
ces explications sur URL :
https://www.migrationsenquestions.fr/question_reponse/2526-immigration-vers-une-invasion-africaine/(consulté
le 28 novembre 2023).
8 OIM, 2019. Rapport sur la migration en
Afrique : remettre en question le récit, Organisation
internationale pour les migrations, p.2.
9Réseau Programme Point Sud et Centre for
Migration Studies, University of Ghana, Accra, 2018. « École
d'été : La migration intra-régionale en Afrique. Logiques,
pratiques et défis », (en ligne), disponible sur URL :
https://movida.hypotheses.org/3968
.
10Africa CenterFor Strategic Studies, 2023.
Tendances migratoires à surveiller en 2023, (en ligne).
Disponible sur URL :
https://africacenter.org/fr/spotlight/tendances-migratoires-a-surveiller-en-afrique-en-2023/.
11Christian WALI WALI, 2010. Les
réfugiés congolais au Gabon Modes de circulation et
d'installation dans un espace frontalier, p. 28.
12 En plus de ces pays on peut également
mentionner le Nigéria qui constitue selon l'OIM un pays d'immigration en
Afrique de l'ouest
13 L'Eurasie est un terme géographique
désignant conjointement l'Europe et l'Asie en tant que continent unique,
plutôt que deux continents séparés.
8
Carte 1: Les flux migratoires économiques dans
le monde en 201914

Connu comme étant « une destination majeure en
Afrique subsaharienne15 », la
construction de la dynamique migratoire au Gabon s'est
progressivement faite depuis la
14 Cette représentation est tirée des travaux de
Giles PISON dans l'Atlas de la population mondiale, paru en 2019,
p.139.
15Serge LOUNGOU, 2022. « Plaidoyer pour la
création d'un observatoire des migrations internationales »,
L'Union n°14099, p.9.
9
période coloniale. Dans les années
189216, la demande de main-d'oeuvre dans les « chantiers
forestiers dévoreurs d'hommes17 » va avoir un
impact direct sur l'arrivée des populations étrangères. De
même, pour répondre aux projets de construction d'infrastructures,
d'équipements structurels et pour l'exploitation de ses matières
premières, « l'État gabonais, comme avant lui
l'État colonial, a entrepris, durant les années fastes
(1975-1985), d'« importer » des contingents de travailleurs
étrangers, pour la plupart d'origine ouest
africaine18». Cette ouverture et les potentialités
que le Gabon offrait en termes d'emplois, firent de lui, « une
destination sollicitée par des milliers de migrants d'origine africaine
»19. Mais, l'immigration au Gabon n'est pas seulement le
produit de l'activité économique. Les nombreux conflits et crises
dans la sous-région (guerre au Congo, en Centrafrique, au Tchad) ou en
Afrique de l'ouest (crise du Biafra au Nigeria, guerre civile en Côte
d'Ivoire) sont autant de facteurs qui ont fait du Gabon un pays
d'arrivée de populations.
En outre, le Gabon est devenu un pays de transit.
D'après WALI WALI (2010, p.88), « plusieurs personnes viennent
s'installer pendant des mois ou années au Gabon avec l'intention de
terminer en Europe». Il ajoute que de nombreux «
ressortissants de l'Afrique de l'ouest, souvent des Sénégalais ou
des Maliens, qui tenaient des commerces ont fini par partir en Italie ou en
Espagne voire au Canada20 ». Une autre facette du transit
est « celle qui consiste à venir emprunter des avions à
partir de Libreville [...] et s'arrimerait à l'évolution des
politiques migratoires de l'UE21 ».
Par ailleurs, le Gabon n'a pas toujours été
ouvert à l'émigration. A cause de la faiblesse de sa
démographie, les autorités encourageaient les populations
à rester à l'intérieur du pays particulièrement
lors du parti unique (1967-1990). Pendant cette période, «
seuls les diplomates, les hommes d'affaires et les étudiants avaient
la facilité de sortir du pays22».Cependant,
l'émigration va connaitre une réelle dynamique au sortir de la
Conférence nationale de 1990. Cette dernière permettra«
d'accorder plus de souplesse à la circulation et nourrir un désir
de sortir du pays pour les Gabonais afin de visiter d'autres aires
16 Pierre OMBIGATH, 2005. L'exploitation forestière au
Gabon (1892-1973) : impact économique et social,
Thèse de doctorat d'Histoire, Université de Paris
7. Disponible sur URL :
https://www.theses.fr/2005PA070009.
17Roland POURTIER, 1989. Le Gabon : État et
développement, Paris, L'harmattan, tome 2, p.173.
18Serge LOUNGOU, 2003. Immigration et
xénophobie au Gabon, Géopolitique africaine, URL :
https://www.africabib.org/rec.php?RID=258172371
19Christian WALI WALI, 2010. Op cit, p11.
20Christian WALI WALI, 2010. Op cit, p88.
21Idem
22Christian WALI WALI, 2010. Op cit, p85.
10
géographiques23 ». Nous
situerons l'émigration scolaire dans ce contexte (même si elle
constitue l'une des rares émigrations observées lors du parti
unique).
1.2. Intérêt du sujet
Bien que renfermant l'idée de « mobilité
», traiter des enjeux de l'émigration scolaire, c'est en
partie se référer à la question de l'éducation et
de la formation scolaire. En effet, définie comme « l'arme la
plus puissante pour changer le monde24 »,
l'éducation occupe une place significative dans les enjeux de
développement d'un pays. Dans cet ordre d'idées, Séraphin
AKURE-DAVAIN, dans un discours à l'attention du ministre de
l'éducation nationale à l'Assemblée nationale,
déclarait voir dans l'éducation « la priorité des
priorités25 ». Un aspect prépondérant
de cette priorité réside sur le fait qu'un pan du Plan
Stratégique Gabon Emergent traite de la question de la formation
locale.
La question de l'éducation a déjà
été traitée dans plusieurs travaux. En se focalisant sur
la formation des professeurs du second degré au Gabon (1971 à
2010), GALEDI NZEY (2019), revient sur l'histoire de l'école normale
supérieure, son rôle majeur et sa place dans le système
éducatif gabonais. Dans le même élan, MBENGONE EKOUMA
(2016) traite de la question de l'orientation au Gabon et de ses enjeux. En
combinant plusieurs théories, ce livre propose des outils d'aides
à l'orientation pour une construction du projet scolaire des
élèves. Pour sa part, QUENTIN DE MONGARYAS (2014) déplore
l'insuffisance d'écrits scientifiques sur l'école gabonaise
après plus de cinq décennies d'indépendance. Partant d'une
analyse pluridisciplinaire, l'auteur dresse un état de lieu de
l'école gabonaise tout en esquissant des perspectives sur ses
défis futurs.
Par ailleurs, si les migrations scolaires ont fait l'objet
d'une littérature scientifique importante en Afrique, voire dans le
monde (KOUA OBA, 2019 ; TCHEGHO, 1989 ; LEVATINO et AMETEPE26,
BARON27, SAINT-VIL28, etc.), rares et peu connus sont les
travaux qui appréhendent l'émigration des étudiants
gabonais à l'étranger. Partant du contexte sous régional,
KOUA OBA, dans son oeuvre « les migrations scolaires en
République du Congo » fait l'état des lieux du
système éducatif congolais et aborde la question des migrations
scolaires congolaises à l'intérieur et à
l'extérieur du pays. S'agissant de la
23Idem
24Nelson MANDELA, 1990. Discours prononcé au
Madison Park High School, Boston.
25Extrait du discours prononcé par
Séraphin Akure-Davain à l'Assemblée Nationale au titre des
questions au gouvernement le 31 mai 2022.
26
Https://doi.org/10.7202/1020611ar
27
Https://www.cairn.info/revue-d-economie-regionale-et-urbaine-2005-2-page-281.htm
28
Https://www.persee.fr/doc/caoum.
11
première échelle d'analyse, l'auteur soutient
que l'absence du personnel enseignant au sein des collectivités locale
et chefs-lieux de département, a entrainé l'exode des
élèves en milieu rural. Il explique aussi que les facteurs
d'émigration des étudiants (43%) au niveau international sont
liés au manque d'infrastructures d'accueil d'étudiants et
à l'inadéquation de l'offre de formations (prédominance
des filières de formation littéraire) au niveau national. Face
à ces maux, l'auteur présente à la fois les avantages et
les inconvénients de ces mouvements scolaires pour l'économie
congolaise.
Plus éloigné de l'Afrique, Catherine WITHTOL DE
WENDEN (2018) dans « Atlas des migrations, un équilibre mondial
à inventer »29, présente une nouvelle
facette des migrations contemporaines. A cet effet, elle estime que de nos
jours, la configuration des migrations se présente dans le monde sous la
forme « Sud-Sud, Nord-Nord, Nord-Sud, et plus seulement
Sud-Nord30». Ce livre nous a particulièrement
permis de questionner les dynamiques de l'émigration scolaire
gabonaises.
En formalisant une forme d'explication aux déterminants
à l'émigration scolaire, Davis TOOD (1995) nous a permis de
comprendre que les principaux facteurs qui attirent les étudiants vers
un autre pays et qui orientent la direction des flux migratoires sont : des
conditions favorables à la recherche, un meilleur contexte
socioéconomique et la possibilité de vivre une expérience
multiculturelle.
Eugénie TERRIER (2009), dans son article « les
mobilités spatiales des étudiants internationaux.
Déterminants sociaux et articulation des échelles de
mobilité », présente la dynamique migratoire des
étudiants en fonction de leurs géographies de départ.
Enfin les Notes Campus France31 sur « la mobilité
internationale des étudiants africains » nous ont permis
d'avoir les statistiques sur la mobilité internationale des
étudiants africains (Maghreb et Afrique subsaharienne), vers la
France.
Au niveau du Gabon, les publications de LAMIRAL32,
MBENG ESSONE (2021) et de LOUNGOU (2021) sont, à ce jour, les seules
publications disponibles sur ce sujet. MBENG ESSONE, dans son article «
Gabon : l'exode universitaire, un phénomène qui coûte
de plus en plus cher à l'Etat », pose la problématique
du coût de l'émigration scolaire au Gabon. Dans son analyse, il
soutient qu'elle représente « un gouffre à sous » pour
l'Etat, en ce sens
29Catherine Withtol de WENDEN, 2018. Atlas des
migrations, un équilibre mondial à inventer, Autrement,
collection atlas/monde. 95 p.
30Idem.
31 Campus France, 2017. La mobilité internationale des
étudiants africains, hors-série, N° 16, 43p.
32
Https://www.gabonclic.info/formation-de-la-jeunesse-gabonaise-letranger-qui-profite-cette-politique-retrograde
12
que celui-ci est emmené à dépenser chaque
année, environ 60 milliards de FCFA pour les allocations
d'étudiants. Aussi, il estime que dans un contexte de crise,
caractérisé depuis 2018 par des mesures
d'austérité, l'émigration se présente comme un
facilitateur de la fuite des cerveaux.
LOUNGOU (2021, p.12) dans « l'expatriation
précoce des étudiants et ses risques pour le Gabon »,
développe la thématique de l'émigration scolaire
suivant une autre approche. Dans cet article, il affirme que telle qu'elle se
présente aujourd'hui, cette tendance « symbolise une
évolution rétrograde du système éducatif gabonais
». Causée par plusieurs facteurs, l'expatriation
précoce des étudiants expose à la fois la marginalisation
et le rapport de force inversé du Gabon dans le domaine de la formation
scolaire. Décrite plus haut comme potentiellement néfaste, il
revient sur l'utilité de contrôler ce secteur qui
représente « un domaine de souveraineté par excellence
».
Cependant, axés sur les coûts financier et
humain, les facteurs internes ainsi que les dangers que cette mobilité
représenterait pour le Gabon, ces travaux demeurent incomplets. Ils
traitent peu des inégalités sociales dans l'accès à
l'émigration scolaire, des conditions d'étude et de séjour
à l'étranger, du devenir migratoire des étudiants en
mobilité à l'issue de leurs formations et analysent peu la
question relative au domaine scolaire comme enjeu de puissance des
États.
Ainsi, ces raisons nous ont conduit à porter notre
intérêt de recherche sur cette problématique en examinant
notamment les aspects liés à la taille de cette mobilité,
aux facteurs de départ qui démontrent « l'insatisfaction
des gabonais sur leur besoin en éducation33 », aux
coûts de cette mobilité et à la place du Gabon dans la
sphère académique mondiale. Aussi, l'intérêt de ce
travail est d'apporter les éléments permettant de voir les enjeux
de l'émigration scolaire gabonaise.
33Christian WALI WALI & Lionel OSSÉ,
2021. Les Gabonais expriment leur insatisfaction des besoins
d'éducation, Dépêche No. 444, Afrobarometer, URL :
https://www.afrobarometer.org/publication/ad444-les-gabonais-expriment-leur-insatisfaction-des-besoins-deducation/
.
13
1.3. Objet et champ de l'étude
L'objet de notre recherche, qui s'articule autour de deux
concepts centraux, enjeux et émigration scolaire, porte sur
l'émigration scolaire. Ces concepts sont polysémiques. Il importe
de clarifier le sens de leur utilisation.
« En géographie, un enjeu est un objet auquel
des acteurs attribuent une valeur34». Cette valeur peut
être politique, économique, symbolique, stratégique, etc.
Autrement dit, un « enjeu » renvoie à « ce qui est en
jeu, ce qui est misé35 ». A titre d'exemple, «
une ressource ou un espace peuvent être des enjeux, de même que
l'accès ou l'usage de cette ressource ou de cet espace36
». De manière plus large, l'enjeu est ce qui « sera
gagné ou perdu au terme d'une démarche37 ».
Cette définition concerne aussi bien les aspects matériels,
dématérialisés que symboliques. C'est cette
dernière déclinaison que nous considérerons dans la
présente étude.
Avant de définir l'émigration scolaire, il
convient de définir l'émigration. Richard PERRUCHOUD (2017,
p.26.) définit ce terme comme l'« action de quitter son
État de résidence pour s'installer dans un État
étranger ». Dans le même sens, Yves LACOSTE (1994,
p.564.) appréhende l'émigration comme la volte-face de
l'immigration. Il ajoute que ces deux mouvements représentent un
processus : la migration. « On parle d'émigration quand on
considère le territoire de départ, d'immigration quand on
considère le territoire d'arrivée38 ».
Autrement dit, l'émigration se caractérise, du point de vue du
pays qui le subit, par une sortie des populations vers un autre État
alors que l'immigration, du point de vue du pays qui le subit, se
caractérise par une entrée de populations
étrangères.
L'adjectif scolaire est tout aussi difficile à
présenter que la notion d'émigration. Selon le dictionnaire
Le Robert, le scolaire renvoie à tout ce qui est relatif ou
propre aux écoles, à l'enseignement et aux élèves.
Donc il englobe aussi bien les établissements, les programmes que les
apprenants. C'est cette dernière catégorie qui représente
la tranche que nous mettons en valeur. Notre analyse portera essentiellement
sur les étudiants par rapport aux élèves et aux stagiaires
car ils sont les plus concernés par cette mobilité et posent
moins la problématique de l'absence de données statistiques. Au
regard de tous ces critères et définitions, nous
34Pascal BAUD, Serge BOURGEAT, Catherine BRAS,
2022. Dictionnaire de géographie, Hatier,6e
édition, p. 457.
35
Https://www.nutcache.com/fr/blog/difference-entre-enjeux-et-objectifs/
36Géoconfluences, 2022. Enjeu, disponible sur
URL :
http://geoconfluences.ens-lyon.fr/glossaire/enjeu
37Larry Warren DIYEMBOU BOUMAM'HA, 2019. Le
Gabon face à la cybercriminalité : enjeux et défis,
Mémoire de master en géographie, Université Omar
Bongo, p. 5.
38OIM, « Termes clés de
la migration », ONU MIGRATION, Disponible sur URL :
https://www.iom.int/fr/termes-cles-de-la-migration.
14
considérons que le concept « émigration
scolaire » dans cette étude renvoie aux étudiants gabonais
qui partent du Gabon vers l'étranger à des fins
académiques.
La présente recherche a comme objectif principal
d'examiner les éléments internes et externes qui concourent
à l'émigration des étudiants gabonais. Comme objectifs
subsidiaires, ce travail présente, d'une part, les trajectoires
scolaires et les parcours migratoires des étudiants gabonais à
l'étranger et, d'autre part, analyse les enjeux de cette
mobilité.
Notre travail s'inscrit principalement dans le champ des
migrations internationales dans la mesure où les étudiants en
mobilité traversent les frontières d'autres États. De
même, il s'inscrit dans le champ des géosciences
politiques39 puisque la migration, est « un
phénomène complexe, qui peut être attractif ou
répulsif mais n'est jamais neutre en termes
géopolitiques40 ». Pour le traiter, nous nous
appuyons sur une analyse interdisciplinaire réunissant la
géographie, l'histoire, l'économie et la sociologie. La
première discipline citée est utile pour cerner les enjeux et les
facteurs d'émigration scolaire. L'histoire est convoquée pour
étudier la genèse de ce mouvement de populations afin de
comprendre sa réalité actuelle. L'économie permet de
percevoir les coûts et l'aspect commercial de l'émigration
scolaire. Enfin, la sociologie aide à comprendre ce
phénomène social ainsi que le rôle joué par les
anciens émigrants dans le processus d'insertion des nouveaux
arrivés à l'étranger.
2. Problématique et hypothèses de la
recherche
Avec 6,4 millions d'étudiants en mobilité
internationale en 202341, dont près de 430 000
étudiants subsahariens42, les migrations pour étude
ont revêtu une ampleur et une acuité sans précédent
et « font partie des mouvements de populations les plus mobiles au
monde43 ». Au regard de cette croissance, ce
phénomène a suscité de nombreuses inquiétudes dans
certains pays, à l'instar du Gabon. En raison de sa dépendance
envers les pays d'accueils de ses apprenants, les autorités gabonaises
entreprirent depuis la fin des années 1970, plusieurs actions pour
réduire les mobilités externes des étudiants gabonais. La
plus importante de ces
39Concept développé par l'école
gabonaise de géographie et singulièrement de géographie
politique à travers Marc-Louis ROPIVIA. 40
Https://www.huffingtonpost.fr/actualites/article/les-migrations-une-question-geopolitique_76485.html
41Campus France, 2023. Chiffres clés 2023 : 6,4 millions
d'étudiants en mobilité internationale, disponible sur URL
:
https://www.campusfrance.org/fr/actu/chiffres-cles-2023-64-millions-d-etudiants-en-mobilite-internationale
42 Campus France, 2023. La mobilité étudiante
dans le monde, p. 27. URL:
https://ressources.campusfrance.org/publications/chiffres_cles/fr/chiffres_cles_2023_fr.
43Thomas ROULET, 2012. « Les migrations
étudiantes », Regards croisés sur
l'économie, n° 8, p.71. Disponible sur URL :
https://www.cairn.info/revue-regards-croises-sur-l-economie-2010-2-page-71.htm.
15
actions fut la décision de former localement dans
l'enseignement supérieur. Cette affirmation mérite d'être
éclaircie.
A cet effet, la fondation de l'université au Gabon
dérive de deux moments forts. Elle tient à la fois de la
dislocation en 1970 de la Fondation pour l'Enseignement Supérieur en
Afrique Centrale (FESAC) et à l'éclosion de ce que Rose
MEZUI44 nomme comme un « nationalisme universitaire ».
Dans ce contexte, marqué par une volonté d'autonomisation
(limiter l'influence des systèmes étrangers sur leurs
ressortissants) et d'émancipation (sortir de la dépendance envers
les universités extérieures à l'instar de celle d'Abidjan
et de Dakar) des autorités dirigeantes, on assiste au Gabon, à la
construction de plusieurs structures de formation (universités, grandes
écoles, instituts). Parmi les structures construites, on note:
l'Université Nationale du Gabon (UNG en 1970) devenue Université
Omar BONGO en 1978, l'École Normale Supérieure (ENS en 1971),
l'École Normale Supérieure d'Enseignement Technique (ENSET en
1972), l'Institut National des Sciences de Gestion (INSG en 1973),
l'Université des Sciences et Techniques de MASUKU (USTM en 1986),
l'Institut Supérieur de Technologies (IST, 1994), l'Université
des Sciences de la Santé (USS en 2002). Ces établissements
avaient comme objectifs de répondre quantitativement et qualitativement
à la demande locale en matière de formation postsecondaire.
Malgré toutes ces réalisations, « les
progrès accomplis demeurent insuffisants »45.
Aussi, en accédant à la magistrature suprême en 2009, Ali
BONGO ONDIMBA fît le pari de l'éducation. Dans sa vision de faire
du Gabon une destination de référence en matière de
prestation des services intellectuels de haut niveau, il projette, dans son
projet de société, de bâtir la « Cité Verte de
l'Education et du Savoir46 ». Comme gage de cet engagement
à l'éducation, les actions suivantes sont mises en oeuvre :
- L'organisation des états généraux de
l'éducation, de la recherche et l'adéquation formation-emploi en
2010 ;
- Élaboration du Projet de construction de
l'Université de Boué en 2011 ;
- Le début de construction de l'école des
métiers du bois de Boué en 2012 ;
- La mise en place de la « task force » sur
l'éducation en 2018, etc.
Toutefois, malgré cette volonté de redorer le
secteur de l'enseignement, le projet de construction de « la citée
verte de l'éducation et du savoir » resta fictive. En
conséquence,
44Elle fut la première secrétaire de
l'Université National du Gabon en 1971.
45Adrien MAKAYA, 2021. « Le système
éducatif gabonais », Revue internationale d'éducation de
Sèvres, p.1. URL :
http://
www.journals.openedition.org/ries/1081.
46La loi N°12/2011 portant orientation
générale de l'éducation, la formation et de la recherche,
titre VIII.
16
l'éducation au Gabon est toujours confrontée
à des difficultés, conduisant ainsi à alimenter
l'émigration scolaire comme on peut le voir dans le graphique 1
ci-après.
Graphique 1: Courbe d'évolution du nombre
d'étudiants gabonais en situation d'émigration
scolaire

8607
7856
7318
7076 7171
2016 2017 2018 2019 2020
Total
Source : Institut statistique de
l'Unesco (ISU), 2022.
Il ressort de ce graphique que le nombre d'étudiants
gabonais à l'étranger ne cesse de croître d'année en
année. Il est passé de 7076 individus en 2016 à 8607 en
2020, soit une augmentation de 9,56 % de personnes en l'espace de 5
ans47. Face à cette augmentation continue, nous nous sommes
posé la question centrale suivante : Pourquoi l'émigration
scolaire est-elle en évolution constante au Gabon ? A cette question
principale, nous avons formulé les questions secondaires suivantes :
Quels sont les principaux pays de destination des étudiants gabonais
à l'étranger ? Quels sont les enjeux de cette émigration
scolaire ?
A ces interrogations, nous avons formulé trois
hypothèses de recherche. Notre principale hypothèse consiste
à considérer que les grèves répétitives dans
les universités publiques gabonaises, le déficit et la
vétusté des infrastructures, la faiblesse de l'offre de formation
sont, entre autres, les facteurs qui favorisent l'émigration scolaire au
Gabon. Ces facteurs s'inscrivent dans le modèle
d'attraction-répulsion (push-pull) de Michel
BEINE48 qui trouve une corrélation entre la
demande d'éducation supérieure dans les pays d'origine, l'offre
de formation inférieure et le choix de sortir. La mondialisation est
aussi un autre catalyseur de ce processus parce qu'il permet aux populations de
la planète de se fondre dans le « village
47 Nous avons été contraints de
présenter cette dynamique sur l'intervalle de 5 ans à cause de
l'indisponibilité de données au sujet de l'émigration des
étudiants gabonais sur une échelle plus longue.
48Michel BEINE, 2017. Op
cit, pp 3-4.
17
planétaire » par les effets des médias et
des NTIC, moyens qui permettent de voir le fonctionnement d'autres
sociétés et rendent attractives celles-ci.
La seconde hypothèse consiste à penser que
l'Afrique est le premier espace d'accueil des émigrés scolaire
gabonais et les principales destinations des étudiants gabonais sont
disséminées à travers le continent. Cette idée est
soutenue par certains travaux tels que le Rapport sur la migration en Afrique,
le livre de Claudio BOLZMAN et al49, et la
thèse de WALI WALI, qui insistent sur le fait que la migration
intracontinentale est, pour les Africains, la forme la plus courante des
déplacements comparativement aux autres régions de la
planète.
Dans la mesure où elle impacte la société
sur les plans économique, politique, socioculturel, notre
troisième hypothèse postule que l'émigration scolaire
comporte plusieurs enjeux. En effet, représentant un « gouffre
à sous » aussi bien pour l'État que pour les familles qui la
supportent, elle met en exergue plusieurs problèmes. Ces
dernières années, on a enregistré plusieurs
décès d'étudiants gabonais à l'étranger,
causant des drames dans les familles, sans omettre les étudiants qui
sont souvent menacés et incarcérés. A ces enjeux
socioéconomiques, ces départs questionnent la place du
système éducatif gabonais en Afrique et dans le monde. L'enjeu
culturel réside sur la question de l'impact des pays d'accueils sur les
émigrants.
3. Cadre méthodologique
Pour élaborer ce travail, nous nous sommes
appuyés sur la démarche hypothético-déductive. Elle
est une « démonstration dont le point de départ est une
hypothèse, un modèle ou une théorie50
» qui sera soit avalisé ou infirmé après analyse.
Pour ce faire nous avons réalisé des recherches
documentaires en bibliothèque, dans les administrations et sur Internet.
Afin de comprendre le rapport « géopolitique et migration »,
nous avons consulté l'ouvrage d'Adrien BOSCHET & Jean Baptiste
GUEDAN (2017) dont le titre est: Comprendre les migrations.
Contrairement aux préjugés construits autour de la question
migratoire, ce texte nous a permis de bâtir un argumentaire sur les
migrations à partir des chiffres réels de cette mobilité.
Gilles PISON (2019) dans : Atlas de la population mondiale ainsi que
Claudio Bolzman et al (2011): Migrations des jeunes
d'Afrique Subsaharienne nous ont permis de voir les espaces
d'arrivés et de départs de populations au
49Livre dont le titre est « Migrations des
jeunes d'Afrique Subsaharienne ; Quel défit pour l'avenir ?
».
50Hervé GUMUCHIAN, Claude MAROIS &
Véronique FEVRE, 2000. Initiation à la recherche en
géographie, Paris, Economica, p.75.
18
monde. Nous retenons d'ailleurs que l'Afrique constitue le
premier espace migratoire des africains. En outre, WALI WALI (2010) dans:
les réfugiés congolais au Gabon Modes de circulation et
d'installation dans un espace frontalier, nous a montré (dans le
chapitre II de la première partie de sa thèse), l'immigration,
l'émigration et le transit comme aspect du phénomène
migratoire au Gabon. Pour mieux percevoir, l'impact économique de
l'émigration scolaire, nous nous sommes rendu à la
bibliothèque de l'Assemblée Nationale du Gabon où nous
avons consulté le Rapport de la Cour des Comptes (2013) «
relatif à l'audit organisationnel, comptable et financier de
l'Agence Nationale des Bourses du Gabon ». Nous avons
complété ces informations par l'article de MBENG ESSONE (2021)
dont la thématique est : « Gabon : l'exode universitaire, un
phénomène qui coûte de plus en plus cher à l'Etat
». Ainsi, sans être exhaustifs, ces différentes
références nous ont permis de définir nos
hypothèses et construire les outils de collecte des données de
terrain
Notre travail de terrain a été mené
à l'Agence Nationale des Bourses du Gabon (ANBG) où nous avons pu
recueillir certaines informations et eu des entretiens avec deux responsables.
Nos échanges ont porté sur plusieurs points concernant le nombre
d'étudiants boursiers à l'étranger, les pays vers lesquels
ils émigrent, les filières de formation suivies par ces
émigrants, la stratégie de formations de l'État gabonais
derrière la mobilité des étudiants boursiers, etc. Au
Secrétariat d'Orientation Scolaire, Universitaire et
Professionnel51 (SOSUP), nous avons échangé avec un
responsable sur les modalités d'orientation des étudiants
gabonais à l'étranger.
En plus des entretiens menés dans les administrations,
nous avons réalisé un questionnaire (annexe 1) à partir de
la plateforme GoogleForm52 et un guide d'entretien (annexe
2) à partir de Microsoft Word. Nous avons choisi d'utiliser
GoogleForm en ce qui concerne le questionnaire, pour faciliter la
récolte de données à distance car notons-le, plusieurs de
nos répondants se trouvent à l'extérieur du Gabon. Notre
questionnaire a été soumis de manière aléatoire
à 100 émigrants scolaires gabonais dont 52 hommes et 48 femmes.
Le partage du questionnaire s'est fait grâce à un lien que nous
avons bloqué une fois le quorum des 100 enquêtés atteint.
Nous avons eu des réponses d'étudiants gabonais localisés
au : Bénin (1), Brésil (2), Cameroun (4), Côte d'Ivoire
(1), France (28), Ghana (2),
51Il est par décret n°0077/PR/MENFC du 11
juin 2019, un service public à autonomie de gestion technique,
administrative et financière, placé sous l'autorité des
Ministères en charge de l'Education Nationale, de l'Enseignement
Supérieur et de la Formation Professionnelle
52 Google Forms est un éditeur de formulaire
en ligne qui fait partie de G Suite (anciennement Google Apps) et plus
spécifiquement de Google Drive. Google Forms permet de créer des
formulaires en ligne pour des utilisations très diverses :
questionnaires, sondages, enquêtes, collecte d'avis, etc.
19
Mali (1), Maroc (7), Russie (6), Rwanda (2),
Sénégal (36), Togo (6), Tunisie (1) et Turquie (3). En outre,
nous nous sommes entretenus avec 7 parents ayant des enfants non boursiers
à l'étranger. Nous avons fait le choix des non boursiers pour
mesurer le coût de l'émigration scolaire sur les familles des
émigrants. Le fond de nos échanges avec les parents a
porté sur : les éléments qui influencent le choix du pays
vers lequel les parents envoient les enfants, la situation sociale du parent,
le type de structure d'accueil de l'enfant à l'étranger, le
montant déboursé chaque année pour soutenir l'enfant et
les perspectives à l'émigration scolaire. Le traitement et
l'analyse des données se sont faits avec plusieurs outils dont Microsoft
Office Excel et ARCGIS 10.4 (pour l'établissement des cartes).
4. Limites de l'étude et structure du
mémoire
Pour la conduite de cette recherche, nous avons fait face
à de nombreuses difficultés parmi lesquelles l'accès aux
données officielles concernant le coût (annexe 3) et le nombre
actualisé des étudiants boursiers émigrés à
l'étranger, d'une part, et le manque d'ouvrages sur la thématique
de l'émigration scolaire au Gabon, d'autre part.
La présente étude est subdivisée en deux
grandes parties, composées chacune de deux chapitres. La première
partie porte sur la géographie de l'émigration scolaire au Gabon
qui analyse la cartographie de l'émigration scolaire gabonaise (chapitre
1) et les mobiles de l'émigration scolaire au Gabon (chapitre 2). La
deuxième partie, intitulée l'émigration scolaire au Gabon
: enjeux et analyse, traite de l'émigration scolaire au Gabon comme un
fait migratoire aux enjeux socioéconomiques, géopolitiques,
sécuritaires et culturels (chapitre 3) et examine le domaine scolaire
comme un enjeu de soft power (chapitre 4).
20
PREMIÈRE PARTIE
LA GÉOGRAPHIE DE L'ÉMIGRATION
SCOLAIRE AU GABON
Avec 8607 étudiants internationaux répandus
à travers le monde en 202253, les migrations scolaires
externes constituent une part importante des mouvements migratoires de la
population gabonaise. Pour mieux cerner cette mobilité, cette partie a
pour objectif de présenter la géographie de l'émigration
scolaire gabonaise. Il s'agit précisément de dresser la
cartographie de cette émigration scolaire ainsi que d'en examiner les
déterminants.
21
53Données ISU, 2022.
22
CHAPITRE 1 : CARTOGRAPHIE DE L'ÉMIGRATION
SCOLAIRE GABONAISE
La carte constitue un outil central dans l'analyse
géographique parce que « possédant une valeur
heuristique immuable, tout en prenant des formes et des usages
variés54 ». Dans un monde de plus en plus nomade,
cartographier l'émigration scolaire des Gabonais, c'est
représenter la dissémination de cette frange de la population
à l'échelle de la planète. Pour parvenir à cela,
nous présentons dans un premier temps la localisation des
émigrants gabonais dans le domaine scolaire, puis dans un second temps,
nous évoquons les dynamiques de ce mouvement de population.
1.1. La géographie des émigrés
scolaires gabonais dans le monde
La géographie de l'émigration renvoie à
la répartition spatiale des personnes qui sortent du territoire gabonais
pour des raisons scolaires. Mais avant de parvenir à cette
représentation, voyons d'abord l'histoire de l'émigration
scolaire au Gabon.
1.1.1. Histoire de l'émigration scolaire au
Gabon
« Connu pour être une zone d'arrivée des
populations africaines, un pôle d'attraction pour les immigrés
clandestins, le Gabon voit le questionnement autour de l'émigration se
poser timidement55 ». De manière globale, les
connaissances sur l'émigration au Gabon sont embryonnaires. Cette
méconnaissance s'expliquerait par la rareté des études et
des données dans ce domaine. Celles qui existent montrent que lors de la
période postcoloniale, « les diplomates, les hommes d'affaires
et les étudiants56 » étaient les principales
franges de la population à bénéficier d'une
facilité de sortir du pays.
Bien qu'il n'y ait pas de sources fiables qui traitent
directement de la période d'éclosion de l'émigration
scolaire au Gabon, les investigations menées sur la question nous
emmène à retracer l'histoire de ce mouvement de population au
Gabon « dès les premiers contacts avec les navigateurs
européens au XVe siècle ainsi que pendant la traite
transatlantique (du XVIe au XIXe siècle). On
retient qu'à cette époque, de jeunes Africains sont
acheminés en Europe pour devenir enseignants, prêtres ou
pasteurs57 ». Un autre tournant de ce mouvement cadre avec
la période des indépendances. En effet, « dans
ces
54Annette CIATTONI et Yvette VEREY, 2018.Les
fondamentaux de la géographie, Armand Colin, p. 28. 55 Christian
WALA WALI, 2010.Op cit., p. 85.
56Idem
57Anton TARRADELLAS et Romain LANDMETERS, 2021. Les
mobilités des étudiantes et des étudiants africains: une
histoire transnationale de l'Afrique depuis la décolonisation,
Diasporas, [En ligne]. URL :
http://journals.openedition.org/diasporas/6089.
23
prémices, l'école gabonaise sera d'abord aux
mains des religieux protestants, puis catholiques58 ». Ils
vont instaurer une première forme d'éducation laïque et
sécularisée à l'occidental. Vers la fin du XIXe
siècle, on assiste à la création d'écoles et de
centres dont le but était de « civiliser,
franciser59 » et créer une élite capable de
gérer les affaires de la métropole. Ces objectifs vont se
poursuivre, durant les années précédant et
préparant les indépendances par la « création
d'universités à vocation régionale comme
l'université de Dakar, aujourd'hui Cheikh Anta Diop, créée
en 1957. En Afrique centrale, Brazzaville jouait un rôle comparable en
hébergeant les premiers établissements d'enseignement
supérieur60 ».
Ces établissements d'enseignements supérieurs
construits en Afrique occidentale française (AOF) et en Afrique
équatoriale française (AEF) auront pour premier but de former des
individus capables d'assurer et de combler des objectifs assignés par
l'autorité coloniale pour l'éducation. C'est dans cette vision
idéologique mercantile que s'ébauche les prémices de
l'émigration scolaire au Gabon. Pour leurs besoins en éducation
dans l'enseignement supérieur, on va assister à des
départs bien que très limités et encadrés surtout
par l'administration coloniale. « Ces départs serviront
à former un petit contingent d'élites locales 61 »
puisque « pendant la période coloniale, une bonne partie du
flux d'étudiants se faisait des colonies vers les capitales
mondiales62 ».
A partir de 1960, année de l'indépendance du
Gabon, la relation autrefois exclusive entre le Gabon et la France sur la
formation des cadres supérieurs gabonais63 va un peu
s'éroder au profit de relations multiples avec différents pays
comme, les États-Unis, la Russie, etc. Avec la fin de la guerre froide
au début des années 1990, le nombre des bourses
américaines et russes va diminuer. La conséquence directe de
cette situation est la montée d'États jusque-là plus
discrets comme l'Arabie Saoudite, l'Inde, la Malaisie ou la Turquie,
dans des stratégies de lancement des programmes pour faire venir
chez eux des étudiants
58Véronique Solange
OKOME-BEKA, 2020. « L'inspecteur pédagogique Allogho Beka Leon :
histoire d'une vie vouée à l'éducation des jeunes gabonais
», Narrativas de maestras (os) y normalistas en el
girodecolonial, p. 3. URL :
https://www.unilim.fr/trahs-ISSN:2557-0633
59Véronique Solange
OKOME-BEKA, 2020. Op. cit, p3.
60 Roland POURTIER, 2010. « L'éducation, enjeu
majeur de l'Afrique post-indépendances Cinquante ans d'enseignement en
Afrique : un bilan en demi-teinte », Afrique contemporaine,
n°235, p.106. Disponible sur URL :
https://www.cairn.info/revue-afrique-contemporaine-2010-3-page-101.htm
61Anton TARRADELLAS et Romain LANDMETERS, 2021.
Op. cit, p7.
62 N.V. VARGHESE, 2008. Globalization of
Higher Education and Cross-Border StudentMobility, Institut international de
planification de l'éducation (IIEP) de l'UNESCO, URL:
https://www.researchgate.net/publication/44839105_G00lobalization_of_Higher_Education_and_Cross-Border_Student_Mobility
.
63Senat, 1960. Projet de loi portant approbation
des Accords particuliers, conclus le 17 août 1960 entre le Gouvernement
de la République Française, d'une part, et le Gouvernement de la
République Gabonaise, d'autre part, N°7. URL :
https://www.senat.fr/leg/1960-1961/i1960_1961_0007
24
africains. Dans le même élan, «
les mobilités étudiantes au sein même du continent africain
se sont elles aussi intensifiées, en particulier depuis que l'Afrique du
Sud post-apartheid a cherché à devenir le principal pôle
d'éducation universitaire sur le continent. La réorientation des
dynamiques de mobilité des étudiants africains depuis la fin du
XXe siècle est également marqué par l'émergence de
la Chine comme pôle d'attraction majeur64 ».
Partant du contexte africain, on peut retenir que l'analyse de
l'histoire de l'émigration scolaire au Gabon montre que celle-ci a
évolué suivant des contextes globaux. Notamment :
colonisation-décolonisation-période des
indépendances-mondialisation.
1.1.2. Le champ migratoire et les logiques de
répartitions des émigrants scolaires dans le monde
Partant du concept de « champ » qui est une notion
qui a longuement été « théorisée ou
modélisée par différentes disciplines des sciences
sociales65», le champ migratoire peut être
considéré comme une « traduction spatiale des relations
migratoires66 » de « l'ensemble de l'espace
parcouru, pratiqué par les migrants67 ». Sa
conception théorique provient des travaux de la géographie
quantitative suédoise dont Torsten HAGERSTRAND en est une figure de
proue. Repris par Daniel COURGEAU68 dans les années 1970 en
France, le concept de « champ migratoire » émerge comme
concept « charnière » de l'étude sur les questions
relatives aux migrations internationales dans un contexte scientifique
où les théories et les méthodes de la géographie
classique ne « rendaient pas suffisamment compte des rapports à
1'espace, de ceux qui se nouent entre le migrant et les espaces
pratiqués dans le cadre de parcours migratoires69».
Décrivant tour à tour une position scientifique (par rapport aux
notions plus neutres d'espace ou de système migratoire) et s'affirmant
progressivement comme un support théorique, « le champ
migratoire décrit bien ces combinaisons
64Anton TARRADELLAS et Romain
LANDMETERS, 2021. Op. cit., p.10.
65David LESSAULT, William
BERTHOMIÈRE, 2019. « Le champ migratoire : une notion fondatrice
des théories contemporaines des migrations internationales ». In
Yann SCIOLDO-ZÜRCHER, Marie-Antoinette HILY et Emmanuel MA MUNG,
Étudier les migrations internationales, Presses universitaires
François Rabelais, p.2.
66Mohamed KAMEL, Marie-Antoinette
HILY, 2005. « Du champ migratoire aux circulations : une lecture des
migrations internationales », Géographes associés,
p. 2. URL :
https://shs.hal.science/halshs-00687528/document
67Gildas SIMON, 1981. « Réflexion sur la notion de champ
migratoire internationale », Hommes et terres du nord,
numéro thématique issu de : Migrations internes et externes en
Europe Occidentale. Tome 1, p. 85. 68David
LESSAULT, William BERTHOMIÈRE, 2019. Op.Cit, p2.
69Gildas SIMON, 2002. «
Penser globalement les migrations », dans Revue Projet 4, n°
272, p38 (en ligne). Disponible sur URL :
https://www.cairn.info/revue-projet-2002-4-page-37.htm
.
25
géographiques et culturelles très
fluides70» formé d'un ensemble de flux reliant le
pays de départ aux pays d'arrivées. Il intègre à la
fois les éléments liés à la «
localisation, la pratique spatiale, et les logiques de répartitions
des migrants71». De même, un champ migratoire
possède sa propre spécificité qui le singularise et le
différencie d'autres champs. La carte qui suit présente le champ
migratoire des étudiants boursiers gabonais en 2019.
70Guy DI MÉO, 2010. Gildas SIMON, « La
planète migratoire dans la mondialisation », Revue
européenne des migrations internationales (En ligne), vol. 26 -
n°1, p.187. URL:
http://www.journals.openedition.org/remi/5051
71Gildas SIMON, 2000. « La mise en place et l'évolution
du concept de champ migratoire », Géographes
associés, p. 101. Disponible sur URL :
https://www.persee.fr/doc/geoas_1266-4618_2000_num_24_1_2449
26
Carte 2: Les flux d'étudiants boursiers gabonais
à l'étranger en 2019

27
La carte montre que les étudiants boursiers gabonais
sont disséminés à l'étranger sur quatre continents
à savoir l'Afrique, l'Amérique, l'Asie et l'Europe. Ils se
trouvent dans 16 pays d'accueil en Afrique et 8 en Europe. Ces deux continents
regroupent à eux deux le plus grand nombre de pays de destination, soit
24 des 31 pays d'émigration scolaire en 2019 (carte 2). On note 7 pays
en Amérique et 7 autres en Asie. La concentration des cercles
présentant les destinations majeures des étudiants gabonais
montre que la France, le Maroc, la Tunisie et le Sénégal
étaient en 2019 les pôles d'accueil des étudiants
gabonais.
Pour compléter cette analyse, le tableau 1 ci-dessous
présente les cinq destinations majeures des étudiants boursiers
gabonais de 2014 et 2019.
Tableau 1: Les cinq premiers pays d'émigration des
étudiants boursiers gabonais depuis 2015
RANG
|
ANNEES SCOLAIRES
|
2014-2015
|
2015-2016
|
2016-2017
|
2017-2018
|
2018-2019
|
1er
|
France (1845)
|
France (1993)
|
France (1856)
|
France
(1575)
|
France (1333)
|
2e
|
Afrique du Sud (327)
|
Sénégal (368)
|
Maroc (385)
|
Maroc (374)
|
Maroc (424)
|
3e
|
Sénégal (318)
|
Afrique du Sud (265)
|
Sénégal (334)
|
Sénégal
(213)
|
Tunisie (146)
|
4e
|
Maroc (250)
|
Maroc (259)
|
Afrique du Sud (186)
|
Afrique du Sud (121)
|
Sénégal (115)
|
5e
|
USA (146)
|
Cameroun (153)
|
Cameroun (92)
|
Cameroun (88)
|
Afrique du sud (76)
|
Source : ANBG, 2019.
Il apparait dans ce tableau que la France reste nettement en
tête des destinations des étudiants boursiers gabonais même
si ce chiffre est en décroissance. En faisant le cumul sur ces
années, il y a eu 8602 personnes qui s'y sont rendus pour leur formation
entre 2014 et 2019. Cette primauté pourrait s'expliquer par les accords
particuliers conclus depuis 1960 entre le gouvernement de la République
française et le gouvernement de la République gabonaise relatives
à l'orientation et à la formation des futurs cadres gabonais. Les
liens historiques, culturels et diplomatiques entre ces deux États sont
également des facteurs explicatifs de cette situation. Aussi, en
Afrique, la place du Maroc comme destination majeur des étudiants
gabonais s'expliquerait par la croissance des offres de bourse d'étude
du Maroc en faveur du Gabon72, la qualité de ses
universités et la présence d'une plateforme marocaine
72
https://www.maroc-diplomatique.net/le-maroc-est-la-premiere-destination-des-etudiants-gabonais/
(consulté le 28 novembre 2023)
28
d'orientation et d'accompagnement d'étudiants au niveau
du Gabon. En outre, sur l'année académique 2018-2019, on observe
l'entrée de la Tunisie dans le classement des cinq (5) pays
d'arrivés d'étudiants boursiers gabonais à
l'étranger. Dans la même foulée, on peut apercevoir la
disparition du Cameroun de ce classement. Cette situation pourrait s'expliquer
par l'augmentation du nombre de bourse de coopération offert par la
Tunisie à l'endroit du Gabon. De même, il faut signifier que la
présence d'agence d'accompagnements tunisienne au niveau du Gabon ainsi
que l'implication des plusieurs établissement tunisiens au salon
d'orientation organisés chaque années au Gabon, participeraient
à cette dynamique.
Le tableau ci-dessous présente l'évolution des
effectifs des étudiants gabonais par continent sur 5 ans.
Tableau 2: Effectifs des étudiants boursiers
gabonais par continent de 2014-2019
|
|
|
Effectifs
|
|
|
Continent
|
2014-2015
|
2015-2016
|
2016-2017
|
2017-2018
|
2018-2019
|
Afrique (sans le Gabon)
|
1371
|
1339
|
1266
|
1020
|
987
|
Amérique
|
197
|
135
|
115
|
104
|
81
|
Asie
|
93
|
108
|
89
|
63
|
53
|
Europe
|
2069
|
2223
|
2039
|
1723
|
1440
|
Total
|
3730
|
3805
|
3509
|
2910
|
2561
|
Source : ANBG, 2019.
Deux principales informations se dégagent de ce
tableau. La première information concerne la décroissance du
nombre d'étudiants boursiers gabonais à l'étranger entre
2014 et 2019. La seconde expose une concentration du nombre étudiants
gabonais vers l'Europe et l'Afrique. En termes d'effectifs, le tableau montre
que l'Europe a accueilli entre 2014 et 2019 plus de la moitié des
étudiants gabonais. Même si l'Afrique constitue le second espace
d'accueil des étudiants gabonais, les informations de ce tableau
traduiraient « des rapports inégalitaires entre les pays du
Nord et les pays du Sud73» au sujet de la formation. De
même, la mobilité des étudiants gabonais est principalement
marquée par deux tendances « sud-nord et sud-sud ».
73 Eugénie TERRIER, 2009.Op. cit, p.71.
29
1.1.3. Les logiques de répartitions des
émigrants scolaires dans le monde
Les logiques d'émigration scolaire diffèrent
d'un acteur à un autre. Pour comprendre les critères pris en
compte par les étudiants gabonais dans le choix de leur pays
d'émigration scolaire, nous nous focalisons sur deux types de normes.
Les conditions selon l'État et celle des émigrants
eux-mêmes.
? Les conditions d'études à
l'étranger selon l'Etat
Pour bénéficier du soutien de l'État
gabonais pour la formation à l'extérieur du Gabon, le futur
émigrant doit répondre aux critères74
d'éligibilité du SOSUP et de l'ANBG qui sont les organes
chargés de l'orientation.
Le SOSUP est un service de l'État qui veille à
accompagner les élèves et étudiants dans leurs
différents projets scolaires, universitaires et professionnels. Cet
accompagnement passe, entre autres, par des missions d'informations et de
conseils, d'orientations, de propositions d'orientations aux
élèves et étudiants sur les offres de formation, de
bourse, de stage et d'emploi. Avant d'acter l'orientation d'un candidat, le
SOSUP analyse la filière de formation choisie, la moyenne obtenue aux
examens, l'âge, etc.
Le responsable de la commission d'orientation au
secrétariat d'orientation scolaire, universitaire et professionnel nous
a expliqué que l'étudiant qui émet le voeu
d'étudier à l'étranger doit formuler trois propositions
des lieux et établissements vers lesquels il souhaiterait
étudier. Par exemple si un étudiant désire étudier
la médecine à l'étranger, il peut proposer une
école de médecine en Afrique du Sud, en Chine ou à Cuba.
À partir de ses propositions, le SOSUP émet un avis75.
Cet avis est validé ou non par l'ANBG qui, en dernier ressort, en
fonction de ses critères, décide.
Anciennement Direction des Bourses et Stages
(DBS)76, puis Direction Gabonaise des Bourses et Stages (DGBS),
l'ANBG est un établissement public à caractère
administratif doté de la personnalité juridique et de l'autonomie
de gestion administrative et financière. Cet organe veille à
appliquer la politique d'attribution de bourses en République gabonaise.
L'ANBG oriente les émigrants scolaires sur la base d'une politique
d'orientation qui s'appuie
74Conformément au plan stratégique
Gabon émergent l'orientation demeure une question centrale en ce qui
concerne la formation scolaire au Gabon. Cette orientation suit une politique
mise en place à l'ANBG.
75 Cet avis émis vient du fait que le SOSUP est une
commission ad hoc qui est sous la tutelle du ministère de l'enseignement
supérieure. Elle ne décide pas.
76La Direction des Bourses et Stages a
été créée par le décret
n°00963/PR/MINECOFIN du 22 juin 1974. Cette dernière a
été érigée en Direction Générale du
ministère des Finances, de l'Economie, du Budget et des participations
par décret n°00143/PR/MINECOFIN du 30 janvier 1975.
30
sur les filières prioritaires et secondaires de
l'État. Les conditions et critères d'attribution d'une bourse
d'étude pour l'étranger sont présentés dans le
tableau 3 qui suit.
Tableau 3: Les critères d'attribution d'une
bourse pour l'étranger par l'ANBG
Niveaux de formation
|
Critères d'attributions
|
Bacheliers
|
- Être de nationalité gabonaise,
- Obtenir son examen au premier tour (pour les
Bacs scientifiques et techniques et 12 pour les formations
littéraires),
- Avoir au maximum 22 ans.
|
Master
|
- Être de nationalité gabonaise,
- Valider sa licence avec une moyenne minimum de 12,
- Avoir 26 ans au maximum,
- Effectuer sa demande de bourse dans les délais
donnés par
l'ANBG.
|
Doctorat
|
- Être de nationalité gabonaise,
- Valider son master avec une moyenne minimum de 14,
- Avoir 30 ans maximum,
- Faire la demande sur le site de l'ANBG.
|
Source : ANBG (page officiel Facebook), 2023.
Pour bénéficier d'une bourse d'étude pour
l'étranger de la part de l'État gabonais, il faut être de
nationalité gabonaise. En fonction des niveaux d'études, les
conditions diffèrent s'agissant de la moyenne et de l'âge limites
qui sont appliqués en fonction de la filière et assouplis pour
les boursiers handicapés. Pour l'enseignement supérieur
général, l'accès à une bourse en Licence 1 est
possible jusqu'à 22 ans et la limite d'âge de 24 ans est
fixée pour les Licence 2 et Licence 3. Elle est de 26 ans pour le niveau
Master. Les candidats à une bourse doivent entamer leurs études
doctorales avant l'âge de 30 ans et avoir obtenu une mention bien ou
assez bien.
? Les conditions d'études et de séjour
à l'étranger selon les émigrants
Longtemps orientée en grande partie vers les pays du
Nord, la mobilité scolaire gabonaise à l'international connait
une diversité des destinations. Pour comprendre les déterminants
du choix du lieu d'émigration scolaire, nous nous sommes
rapprochés des étudiants gabonais ayant connu cette
expérience migratoire. Les critères de choix sont
consignés dans le tableau 4 ci-après.
31
Tableau 4: Les déterminants du lieu
d'émigration scolaire selon les émigrants gabonais
Critères d'orientation
|
Effectifs
|
Pourcentage (%)
|
Les coûts de formation
|
42
|
42
|
La langue
|
13
|
13
|
Le niveau de vie dans le pays d'accueil
|
6
|
6
|
L'attractivité du pays d'accueil
|
2
|
2
|
La présence d'une forte communauté du pays
d'origine dans le pays d'accueils
|
5
|
5
|
La proximité géographique avec le pays de
départ
|
5
|
5
|
L'orientation est une recommandation
|
3
|
3
|
La réputation du pays d'émigration en termes de
formation
|
24
|
24
|
Total
|
100
|
100
|
Source : Enquête de terrain, 2023.
Le principal critère pris en compte dans le choix du
lieu d'émigration scolaire est le coût des formations. En effet,
selon le tableau ci-dessus, 42 % des enquêtés affirment en avoir
tenu compte. Avec 24 %, le second aspect est la qualité de la formation
qui est présenté sous la dénomination de « la
réputation du pays d'émigration en termes de formation ».
Aussi, 13 % des enquêtés affirment que la langue joue un
rôle important dans le choix de la destination d'étude. Les autres
critères sont le niveau de vie dans le pays d'émigration scolaire
(6 %), la proximité du pays d'accueil avec le pays de départ (5
%), l'attractivité du pays d'arrivée (2 %).
En outre, l'émigration scolaire ne serait pas qu'un
projet résultant de la seule compilation de toutes les informations
objectives, les décisions d'émigrer et l'option de la destination
dépendraient de l'expérience des émigrés
antérieurs. A cet effet, COURGEAU, cité par LESSAULT et
BERTHOMIERE, affirmait dans ce sens que « la majorité des
migrations se dirigent vers un lieu où les individus ont
déjà des connaissances : la migration d'une période
donnée serait ainsi intimement liée aux migrations
antérieures77».
77David LESSAULT & William BERTHOMIERE, 2019.
Op. cit, p.3.
32
1.2. Les dynamiques migratoires des émigrants
scolaires gabonais à l'étranger
L'étude de la dynamique migratoire permet
d'apprécier la complexité de la mobilité entre
l'émigration des étudiants boursiers et le nombre
général d'étudiants gabonais à l'étranger.
En effet, à l'échelle de la planète, les migrations
scolaires semblent connaître une croissance importante et « sont
de plus en plus suivies par les États et les institutions
»78. Selon le graphique 1, sur l'intervalle 2016-2020, le
nombre général des étudiants gabonais à
l'étranger a augmenté de 9,56 %. La courbe qui suit
présente par contre l'émigration des étudiants
boursiers.
Graphique 2: Courbe d'émigration scolaire des
étudiants boursiers gabonais

6000
5000
4000
3000
2000
1000
0
Total
2011-
|
2012-
|
2013-
|
2014-
|
2015-
|
2016-
|
2017-
|
2018-
|
2012
|
2013
|
2014
|
2015
|
2016
|
2017
|
2018
|
2019
|
5582
|
3465
|
2092
|
3730
|
3805
|
3509
|
2910
|
2561
|
Source : ANBG, 2011-2019.
Les informations issues du graphique ci-dessus montrent que le
nombre d'étudiants boursiers à l'étranger ne cesse de
diminuer. Cette dynamique est contraire aux informations du graphique 1 qui
montre l'augmentation du nombre général des étudiants
gabonais tournés vers l'émigration scolaire (estimé en
2016 à 7076, il est passé à 7318 en 2018 puis à
8607 émigrés scolaire en 2020 selon l'ISU). D'après le
responsable technique chargé de l'orientation des étudiants
gabonais à l'ANBG, la baisse du nombre des boursiers à
l'étranger est liée aux facteurs suivants :
- La décision de l'ANBG de prioriser l'orientation des
étudiants dans les établissements d'enseignements locaux
plutôt qu'à l'étranger ;
78Mamadou GANDO BARRY, 2011. La migration pour
études : l'expérience de retour des diplômés
guinéens dans leur pays d'origine après une formation au
Canada, Thèse de sociologie, Université de Montréal,
p.16.
33
- La mise en place des missions de contrôle des
établissements étant en partenariat avec l'ANBG (ces
opérations permettent de déceler des établissements de
qualité secondaire à l'étranger qui seront
supprimés par la suite) ;
- L'application de critères plus élitistes dans
l'attribution des bourses à l'étranger et le respect des secteurs
de formation prioritaire et secondaire de l'État (les secteurs
prioritaires bénéficient d'un accompagnement après
obtention du baccalauréat alors que les secteurs secondaires en
bénéficient après obtention de la Licence) ;
- La restructuration des données de l'ANBG (elle
permettra de déceler des irrégularités sur le nombre
réel d'étudiants pris en charge par l'Etat à
l'étranger) ;
- Le coût élevé des formations à
l'étranger.
1.2.1. Caractéristiques et profils des
émigrants scolaires gabonais
Les émigrants scolaires gabonais sont de trois types :
ceux dont les études sont prises en charge par leurs parents, les
boursiers pris en charge par l'État et ceux pris en charge par les pays
étrangers (ceux qui bénéficient de bourse de
coopération). En dehors des données sur les boursiers, il existe
peu d'informations sur les caractéristiques et profils des
émigrants scolaires gabonais. Au regard de cette absence, nous utilisons
la base de données de l'ANBG dont la répartition par sexe est
présentée dans le tableau 5 suivant.
Tableau 5: Répartition des émigrants
scolaires boursiers par sexe
Année scolaire
|
Hommes
|
Femmes
|
Total
|
Effectifs
|
Pourcentage (%)
|
Effectifs
|
Pourcentage (%)
|
2011-2012
|
2883
|
51,65
|
2699
|
48,35
|
5582
|
2012-2013
|
1833
|
52,93
|
1631
|
47,07
|
3465
|
2013-2014
|
1129
|
53,97
|
963
|
46,03
|
2092
|
2014-2015
|
1957
|
52,47
|
1773
|
47,53
|
3730
|
2015-2016
|
2061
|
54,17
|
1744
|
45,83
|
3805
|
2016-2017
|
1927
|
54,92
|
1582
|
45,08
|
3509
|
2017-2018
|
1669
|
57,36
|
1241
|
42,64
|
2910
|
2018-2019
|
1571
|
61,35
|
990
|
38,65
|
2561
|
Source : ANBG, 2011-2019.
Le tableau montre que le taux de femmes boursières
tournées vers l'émigration scolaire au Gabon ne cesse de
décroitre contrairement à celui des hommes. En 2011-2012, le
pourcentage des émigrés scolaires hommes était de 51,65 %
contre 48,35 % pour les femmes.
34
Celui-ci va connaitre une légère variation
durant l'année académique 2014-2015 avec 52,47 % pour les hommes
et 47,53 % pour les femmes. Par ailleurs, l'écart est le plus important
au cours de l'année 2018-2019. Le pourcentage des hommes à
l'extérieur était de 61,35 % contre 38,65 % pour les femmes, soit
une différence estimée à 22,7 %. Le graphique suivant
expose les formations entreprises par les étudiants gabonais à
l'étranger.
Graphique 3: Typologie des formations suivies par les
étudiants boursiers émigrés

Filières
Sciences économique, Sciences de l'organisation et de
gestion
Langues, Lettres et Sciences Humaines
Sciences Naturelles et Médicales
Droit et sciences politique
Science et Technique
Effectifs
235
357
478
481
1010
Source : ANBG, 2019.
Avec 1010 personnes en 2019, les filières scientifiques
et techniques constituent les domaines les plus fréquentés par
les étudiants à l'étranger. A cause du « faible
financement de la formation technique au Gabon79», ce
secteur reste marginalisé en dépit du fort besoin de techniciens
pour répondre aux défis posés par l'industrialisation au
Gabon. En outre, les sciences naturelles et médicales occupent la
seconde place avec 481 individus. La troisième place est
représentée par la filière des sciences
économiques, de l'organisation et de gestion (478). Les langues, lettres
et sciences humaines (357) occupent la quatrième place avant le droit et
sciences politique (235). Le tableau ci-dessous présente le nombre
d'étudiants en fonction des niveaux de formation.
79 Emmanuel MOUSSONE Prosper METOUGUE NANG, 2018.
Le renforcement de la formation technique et l'industrialisation en Afrique
subsaharienne : le cas du Gabon. Marché et Organisations,
n°32, p.69.
35
Tableau 6: Évolution des étudiants
boursiers émigrés gabonais en fonction du niveau
d'étude
|
Niveaux et pourcentages
|
Années
|
Licence
|
%
|
Master
|
%
|
Doctorat
|
%
|
Total
|
2018-2019
|
1436
|
56,07%
|
853
|
33,31%
|
272
|
10,62%
|
2561
|
2017-2018
|
1652
|
56,77%
|
972
|
33,4
|
286
|
9,83%
|
2910
|
2016-2017
|
2076
|
59,17%
|
1151
|
32,8%
|
282
|
8,03%
|
3509
|
Source : ANBG, 2016-2019.
Sur les trois80 années
présentées dans ce tableau, le niveau licence représente
respectivement 56,07 %, 56,77 % et 59,1 % des mouvements scolaires vers
l'étranger entre 2016-2017 et 2018-2019. En deuxième ressort ce
sont les Master dont la moyenne des départs oscille entre les 32% et
33%. Le niveau doctorat boucle cette tendance à l'émigration avec
9% en moyenne.
1.2.2. Les inégalités sociales dans la
mobilité des émigrants scolaires
En 2020, près de 860781 étudiants
gabonais se trouvaient hors de leur pays dans le cadre de leur projet
académique. Alors que la croissance extraterritoriale des
étudiants gabonais prend de l'ampleur et dissimule une
répartition à travers la planète, la carte de
l'émigration scolaire des étudiants gabonais renferme de
nombreuses inégalités.
L'hétérogénéité du parcours migratoire des
étudiants témoigneraient des origines sociales diverses des
émigrants comme le montre le tableau 7 ci-après.
Tableau 7: Situation sociale des parents
d'émigrés scolaire
Pays d'émigration de l'enfant
|
Niveau d'étude du parent
|
Statut social du parent
|
Tranche salariale du parent
|
Maroc
|
Supérieur
|
Agent du public
|
De 950 000 à plus
|
France
|
Supérieur
|
Agent du Privé
|
De 950 000 à plus
|
Turquie
|
Supérieur
|
Agent du public
|
De 750 000 à 950 000 F
|
Afrique du Sud
|
Supérieur
|
Agent du public
|
De 950 000 à plus
|
Cameroun
|
Secondaire
|
Agent du public
|
De 150 000 à 350 000 F
|
Sénégal
|
Secondaire
|
Agent du public
|
De 350 000 à 550 000 F
|
Rwanda
|
Supérieur
|
Entrepreneur
|
De 550 000 à 750 000 F
|
Source : Enquête de terrain, 2023.
80 Nous avons fait le choix de ces trois années car la
base de données qui nous a été transmise à l'ANBG
avait certaines irrégularités. Elle ne permettait pas de traiter
les données des années précédentes.
81 ISU, 2020.
Le tableau montre que la majorité des parents ont un
niveau d'éducation supérieure et issue du secteur public. Aussi,
le pays d'émigration de l'étudiant serait déterminé
par la situation sociale et la tranche salarial des parents. Ceux dont les
tranches salariales oscillent entre 150 000 et 550 000 FCFA, envoient leurs
enfants au Cameroun, au Rwanda et au Sénégal. Ceux dont les
tranches salariales sont plus importantes envoient les enfants dans le Maghreb,
en Afrique du sud ou en Europe. Ces tendances confirment l'idée que les
enfants issus « de familles aisées rejoignent
généralement un univers académique prestigieux [...]
tandis que les autres se répartissent
ailleurs82».
Parvenu au terme de ce chapitre, il ressort que
l'émigration scolaire remonte à la période coloniale. La
cartographie actuelle de ce mouvement montre une diversité des
destinations des émigrés scolaires gabonais à travers le
monde. Cette répartition est dépendante de plusieurs
déterminants notamment la situation sociale, l'obtention ou non de la
bourse, etc.
36
82 Serge LOUNGOU, 2021. Op. cit, p.12.
37
CHAPITRE 2 : LES MOBILES DE L'EMIGRATION SCOLAIRE AU
GABON
« L'éducation est considérée
comme l'un des secteurs qui fonde le développement d'un pays. Elle
participe à la formation des populations et à la cohésion
sociale d'une nation83 ». Ainsi, pour
s'assurer de meilleurs atouts pour planifier le développement, le Gabon,
à travers la loi 16/66 du 9 août
196684, a mis en place les bases de l'enseignement
public universel. Au regard des investissements qui avaient été
consentis sur l'équipement et la transformation infrastructurelle dans
le domaine scolaire au Gabon (construction d'universités, grandes
écoles, instituts), une volonté manifeste des pouvoirs publics
était de bâtir les fondements d'une école gabonaise
souveraine et se positionner comme vecteur d'influence dans la
sous-région et sur le continent en termes de
formation85.
Toutefois au Gabon, comme dans plusieurs pays d'Afrique
subsaharienne, les attentes en matière d'éducation demeurent
énormes et représentent une véritable problématique
pour les États. Dans ce chapitre, nous examinons les mobiles de
l'émigration scolaire au Gabon, particulièrement les facteurs de
l'exode scolaire des gabonais à l'international. Puis nous verrons les
stratégies de captation des émigrants ainsi que leurs processus
d'intégration à l'étranger.
2.1. Les facteurs de l'exode scolaire des
étudiants gabonais à l'international
Serge LOUNGOU86 a esquissé
l'analyse des facteurs de l'émigration scolaire au Gabon. Notre travail
poursuit et approfondi cette analyse en présentant les facteurs internes
et les facteurs externes de l'émigration scolaire au Gabon.
2.1.1. Les facteurs locaux de l'émigration
scolaire au Gabon
L'émigration scolaire est le point de rencontre entre
l'éducation et la migration des personnes. On ne peut donc pas bien
cerner les enjeux de ce mouvement sans questionner les facteurs de cette
mobilité. Le facteur peut s'entendre comme un ensemble de circonstances
associées à une réalité physique ou anthropique qui
affectent les humains vivant dans une zone spécifique. Cette
réalité physique ou anthropique peut-être incarnée
par un manque
83Christian WALI WALI et Lionel
OSSÉ, 2021. Op. cit, p.1.
84Journal Officiel N°15 du
1er août 1966, loi 16/66 du 9/8/1966, portant organisation
générale de l'Enseignement dans la République du Gabon.
85 Ce désir d'être un pôle
majeur en termes de formation en Afrique avait d'ailleurs été
réaffirmé en 2011 par le président de la République
gabonaise avec le projet de construction de l'école supérieure
des métiers du bois de Bouée.
86Serge LOUNGOU, 2021. Op cit,
p.12.
38
d'infrastructures, une contrainte du milieu naturel, des
guerres ou conflits, des problèmes d'aménagements,
d'insécurité, etc.
Dans l'analyse des facteurs de départ, plusieurs
auteurs se sont penchés sur les théories et les modèles
existants en matière de migration87. Il ressort de ces
études qu'il n'existe pas de théorie propre au processus de la
migration internationale mais plutôt tout un ensemble de théories
et de modèle développés dans la perspective de disciplines
différentes. Au sujet des facteurs internes de l'émigration
scolaire, nous avons utilisé, d'une part, la théorie de l'offre
et de la demande puis, d'autre part, la loi de répulsion pour expliquer
cette mobilité.
La théorie de l'offre et de la demande nous a permis de
comprendre comment l'inadéquation des offres d'équipements et de
formations devant une demande de plus en plus croissante de Gabonais dans les
établissements supérieurs a eu un impact direct sur la
résolution de partir. Face aux difficultés du milieu local, la
loi de répulsion nous a montré comment l'univers
socioéconomique, politique, socioculturel, sécuritaire, devant le
besoin de formation ont été sources de départ.
Pour matérialiser la cohérence de ces
théories, nous nous sommes appuyés sur les données obtenus
à partir du questionnaire administré aux 100 personnes,
constituant notre échantillonnage. Ce dernier consistait à capter
l'avis de certains gabonais sur les facteurs de leurs départs à
l'étranger. Les résultats sont présentés dans le
graphique ci-après.
Graphique 4: Les principaux facteurs de départ
pour étude à l'étranger

Les grèves à répétition dans les
universités au Gabon
Le manque de structures d'accueils
L'absence au niveau local de la formation choisie
La mauvaise qualité de la formation au niveau local
La facilité de trouver un emploie avec un diplôme
étranger
La facilité de réussite à
l'étranger
21
64
5
4
1
5
Source : Enquête de terrain, 2023.
87David LESSAULT, William BERTHOMIÈRE, 2019.
Op cit, p3, rappellent en convoquant les travaux de Daniel COURGEAU
que le phénomène migratoire est commandé par trois types
de variables : la répulsion de la zone de départ, le pouvoir
d'attraction de la zone d'arrivée et l'interaction entre les lieux de
départ et d'arrivée.
39
Sur le graphique, on peut voir que le principal facteur
d'émigration scolaire est le déficit infrastructurel
souligné par 64 enquêtés. En effet, au lendemain des
indépendances, la progression du nombre d'étudiants dans
l'enseignement supérieur va avoir un impact sur les capacités
d'accueil des structures supérieures locales. Le cas de l'UNG devenue
UOB en 1978 en est une parfaite illustration. Ainsi, conçue en 1970 pour
accueillir 8 000 étudiants, l'UOB avoisine aujourd'hui 40 000
étudiants. En octobre 2020, le président de la section UOB du
SNEC affirmait que les maux qui minent les universités gabonaises sont
en grande partie liés à « une énorme crise
infrastructurelle88». Cette crise infrastructurelle est
amplifiée par une insuffisance des ressources financières
nécessaires pour répondre de manière adéquate aux
exigences d'une formation et d'une recherche de qualité. Cette
situation, selon lui, a conduit à la «
détérioration des infrastructures académiques
», favorisant une réduction de la capacité
d'encadrement des étudiants dans les établissements.
Le graphique montre également que le contexte
académique local, propice aux grèves à
répétition aussi bien des enseignants que des étudiants,
favorisant les échecs croissants dans les établissements publics,
est selon 21 enquêtés le second facteur de départ. A cela,
il faut adjoindre la faible diversité de l'offre de formation
énoncé par 5 enquêtés. L'idée qu'il soit plus
facile de réussir à l'étranger est évoquée
par 5 enquêtés et la mauvaise qualité de formation dans les
établissements d'enseignement au Gabon est notée par 4
enquêtés.
Pour compléter cette analyse, nous avons
questionné certains étudiants gabonais partis à
l'étranger afin de percevoir la manière dont ils se
représentent la formation dans les établissements publics et
privés au Gabon. Les résultats sont consignés dans les
tableaux 8 et 9 suivants.
Tableau 8: Avis sur les formations dans les
établissements privés
Niveau de formation
|
Effectifs
|
Pourcentages
|
Excellent
|
1
|
1%
|
Satisfaisant
|
27
|
27%
|
Moyen
|
55
|
55%
|
Insuffisant
|
17
|
17%
|
Total
|
100
|
100%
|
Source : Enquête de terrain, 2023
88Déclaration faite lors d'un point de
presse du Syndicat National des Enseignants-Chercheurs et Chercheurs de
l'Université Omar BONGO.
40
Selon les informations du tableau ci-dessus, 55 %
d'enquêtés considèrent que le niveau de formation dans les
établissements privés au Gabon est moyen. 27 % et 17 % pensent
respectivement qu'il est satisfaisant et insuffisant. De même, 1 % estime
que les établissements privés ont un excellent niveau de
formation. Le tableau suivant renseigne sur les établissements
publics.
Tableau 9: Avis sur les formations dans les
établissements publics
Niveau de formation
|
Effectifs
|
Pourcentages
|
Excellent
|
1
|
1%
|
Satisfaisant
|
15
|
15%
|
Moyen
|
39
|
39%
|
Insuffisant
|
45
|
45%
|
Total
|
100
|
100
|
Source : Enquête de terrain, 2023
Comme il se lit dans ce tableau, 1 % d'enquêté
pense que la formation dans les établissements public au Gabon est
excellente. De même, la formation est jugée insuffisante à
45 %, moyenne selon 39 % de personne et satisfaisante pour 15 % d'entre
elles.
La question des représentations est parfois
négligée dans les analyses des facteurs migratoires, sous
prétexte qu'elles procèdent de la subjectivité et ne
permettraient donc pas une approche objective. Partant de l'émigration
des étudiants gabonais, il serait incongru de traiter des facteurs de ce
mouvement de populations, sans cerner en amont, comment les gabonais se
représentent la formation au niveau local. L'analyse des visions
subjectives des acteurs locaux est un outil indispensable pour
appréhender la motivation d'émigrer.
Lorsqu'on parle de la formation scolaire au Gabon on n'est
presque pas surpris par la considération que les acteurs locaux se font
de l'éducation. Il est courant d'entendre les expressions comme «
au Gabon, on ne fait pas l'école », « on
n'apprend pas à l'UOB » ou « il y a quelle
école au Gabon ! ». La perception de l'éducation au
niveau local semble plus que mitigée. Cette considération est
relayée par les artistes et se traduit par exemple dans cette chanson de
l'artiste gabonais Anelka qui affirme que : « Tom Sawyer a fui les
states pour Schooler au Gabon, everyday les enseignants font grève, mon
ami donc ça l'arrange ».
41
L'image de Tom Sawyer89
rattachée à l'école gabonaise transcrit ce qu'on
décrivait plus haut. On peut alors comprendre «
l'insatisfaction » et « le besoin en éducation
» exprimés par les Gabonais dans l'enquête
réalisée par Afrobarometer90 en 2021. Les caricatures
expriment aussi ces représentations comme on peut le voir sur la photo 1
suivante.
Photo 1: Le besoin en éducation des Gabonais
face aux réalités locales et étrangères

Source :
https://www.gabonmediatime.com
Cette caricature présente la désespérance
de deux personnages, probablement deux parents d'étudiants ou
d'élèves, face à la problématique de la formation.
Confrontés à l'état de délabrement des structures
de formation locale, ils envisageraient l'expatriation de leur
progéniture.
En outre, la mondialisation, l'internationalisation et la
coopération serait aussi des facteurs d'émigration scolaire. En
effet, « comme beaucoup d'autres secteurs, le système
d'enseignement supérieur n'échappe pas au phénomène
de mondialisation et de globalisation. Dans le cadre universitaire, ceci s'est
traduit par une importante
89Tom Sawyer est un dessin
animé où est présenté un jeune orphelin (Tom)
vivant chez sa tante Polly avec son demi-frère. N'aimant pas
l'école, il préfère se promener, jouer et inventer des
histoires tirées de son imaginaire. 90 Cette enquête
fait un état de lieu de l'offre des structures de formation au niveau du
Gabon. Dans la même foulée ce travail présente les
perceptions et les attentes des Gabonais sur la question de l'éducation
qui est jugée insatisfaisante par la majorité.
42
internationalisation des activités d'enseignement
et de recherches91». On a ainsi constaté un rapport
étroit entre ces phénomènes et l'accroissement substantiel
des échanges de connaissances entre universités de pays
différents ainsi qu'une internationalisation des origines des
professeurs d'université et une forte augmentation de la mobilité
internationale des étudiants.
De même, cette internationalisation de l'enseignement
supérieur a été rendu possible grâce à la
mise en place dans certains États des politiques internationales visant
à conforter des liens diplomatiques par la signature d'accords de
coopération académique et d'échanges d'étudiants.
Pour le cas du Gabon, la diversification des offres de bourse de
coopération émanant d'États tiers comme l'Inde et la
France et d'organismes internationaux à l'exemple de
l'UNESCO92ont facilité l'émigration scolaire au
Gabon.
L'émigration scolaire des étudiants gabonais est
plurifactorielle. En plus des facteurs des enquêtés internes, elle
peut s'expliquer par des facteurs externes. Pour appuyer théoriquement
ce point, notre argumentaire repose sur la loi d'attirance (ou d'attraction)
.développé par Gérard-François DUMONT dans les dix
lois de la géopolitique de la démographie93.
2.1.2. Les facteurs externes de l'émigration
scolaire au Gabon
Les facteurs externes reposent généralement sur
l'attraction des pays étrangers. En effet, « avec le tournant
néolibéral des politiques publiques, à toutes les
échelles, à partir du dernier quart du XXe
siècle, l'aménagement du territoire, devenu aménagement
des territoires, est passé d'une logique planificatrice,
centralisée, redistributive, à une logique de
compétitivité, dans laquelle chaque territoire doit valoriser ses
atouts pour améliorer l'attractivité94 ».
Parmi les éléments de cette valorisation, on peut citer le
secteur de l'enseignement. De même, on peut mesurer l'attraction dans la
capacité des territoires à attirer des flux de population. Cette
attractivité repose sur des facteurs d'attractions. Dans ces facteurs
externes, nous identifions trois facteurs d'attractivité :
l'attractivité géographique, l'attractivité
socio-économique et culturelle, et l'attractivité
infrastructurelle.
91Michel Beine, 2017. Op cit, p1.
92 Un accord de coopération de création d'une
Chaire de l'UNESCO a été signé janvier 2022 entre l'UNESCO
et l'Université Omar Bongo dont l'objectif est de promouvoir la
recherche sur le développement social et la démocratie.
93 Gérard-François DUMONT, 2010. Les
dix lois de la géopolitique de la démographie. Diplomatie :
affaires stratégiques et relations internationales, p47 (en ligne).
Disponible sur URL :
https://shs.hal.science/halshs-00827795/document
.
94
http://geoconfluences.ens-lyon.fr/glossaire/attraction-attractivite
43
On entend par attractivité géographique,
l'ensemble des éléments liés à l'espace qui
influence le choix de localisation. Parmi ces éléments spatiaux,
on peut citer deux concepts clés : la position et la situation. En tant
que notion qui exprime ou qualifie les rapports de lieux (rapports d'influence
ou hiérarchiques), la position d'un pays renvoie à ce qui
pourrait être susceptible de retenir l'attention ou ce qui
séduirait. En analysant la géographie de l'émigration
scolaire des étudiants boursiers gabonais, on se rend compte qu'ils sont
généralement orientés vers des pays réputés
pour être des modèles de formation au regard des places qu'ils
occupent dans les classements internationaux des meilleures universités
au monde. Par exemple, les États-Unis, la Suisse, le Canada, la France,
la Brande Bretagne, pour ne citer que ceux-ci, font partie du top 10 des pays
ayant de meilleures formations au monde selon le classement Shanghai 2022. A
eux seuls, ils accueillaient la moitié (1388) des émigrants
boursiers gabonais en 2019 selon les données de l'ANBG.
L'attractivité socio-économique et culturelle
quant à elle s'entend comme l'ensemble des évènements
à haute valeur ajoutée et à fort potentiel d'image,
censés apporter aux pays une certaine renommée, un
supplément d'âme et un impact direct sur les émigrants. Au
regard des informations recueillies au cours de nos entretiens, cette
attraction repose sur :
- Les coûts et la qualité des formations
(présence des programmes innovant) ;
- La rigueur de l'enseignement et le respect des calendriers
scolaires ;
- L'accès à des ressources et des
équipements de pointe, des méthodes d'enseignement innovantes,
- L'accès à une plus grande diversité
culturelle et une ouverture d'esprit favorisant l'échange d'informations
d'idées et la collaboration internationale ;
- L'organisation universitaire (système éducatif)
;
- La possibilité d'avoir des contrats de travail en
alternance pour les étudiants ;
- Le niveau de vie ;
- La possibilité de faire des petits boulots pendant la
formation ;
- Les commodités d'apprentissage, etc.
L'attractivité infrastructurelle dépend des
investissements consentis pour viabiliser le secteur de l'enseignement. La
place des infrastructures et leur organisation sont des clés majeures
pour valoriser un territoire et agir sur son attractivité. Parmi les
éléments de cette attraction on retrouve l'abondance et la
diversité infrastructurelle, et la qualité de l'équipement
pédagogique, etc.
44
2.2. Stratégies de captation des émigrants
et leur intégration à l'étranger
Au Gabon, l'émigration scolaire est le résultat
du jeu de plusieurs acteurs. Ces derniers opèrent sous différents
espaces compris entre le milieu physique et le cyberespace. Il est question ici
de comprendre le rôle joué par ces différents acteurs dans
l'entretien de ce mouvement de population. De même, cette partie traite
de la question de l'intégration des émigrés scolaires
gabonais dans leurs pays d'accueils.
2.2.1 Système de captation de la ressource
estudiantine gabonaise
Le système de captation est l'ensemble des
mécanismes qui participent à l'émigration scolaire des
Gabonais. Ce système est le lien entre le local et international. Il
comprend les outils de communication, les plates-formes d'orientation et
d'accompagnement ainsi que les salons internationaux d'orientation.
2.2.1.1. Les outils de communication et leur impact
Au sens large, les outils de communication jouent un
rôle fondamental dans la stratégie de captation des
étudiants locaux. Ce sont des facteurs décisifs qui facilitent le
phénomène d'émigration scolaire au Gabon en ce sens qu'ils
influencent directement les choix. Parmi ces outils nous avons : la
publicité et les réseaux sociaux.
Concernant la publicité, nous nous sommes
aperçus au cours de nos investigations qu'elle représente un
moyen efficace pour convaincre. Un enquêté nous a rapporté
que : « c'est par une affiche que j'ai réussi à
formaliser mon départ du Gabon pour apprendre en France. En passant un
soir au Trois-quartiers à Libreville, je suis tombé sur une
affiche plaquée sur l'immeuble d'un établissement commerciale au
niveau de la pharmacie Orety. En me rapprochant, j'ai pu enregistrer les
coordonnées qu'il y avait sur l'affiche. Quelques jours plus tard, j'ai
contacté la structure qui n'était tout autre qu'une agence
d'accompagnement des étudiants à l'étranger. Après
création du compte et validation de l'adresse email ainsi que
l'édition des informations d'identification et jonction des
pièces justificatives puis l'édition des parcours et la
sélection des formations, j'ai pu soumettre mon dossier à
l'agence pour validation accompagné des frais de dossier ». En
retraçant cette information, nous sommes parvenus à retrouver
cette enseigne illustrée sur la photo 2 suivante.
45
Photo 2: Enseigne publicitaire

Cliché : B. S. TSINGA
BOUKANGOU, 2023.
Cette photo a été prise à Libreville au
quartier Louis à l'immeuble « 241 store », situé en
face de la pharmacie Orety.
Par ailleurs, à l'ère de la digitalisation et du
développement du numérique, les réseaux sociaux prennent
plus d'ampleur que les plateformes de communication classique (radio,
télévision) du fait que les utilisateurs passent de plus en plus
de temps connectés sur internet. Dans le rapport du GSMA95 et
dans celui de la Commission économique des Nations Unies pour l'Afrique
(CEA), le Gabon figure à la 1ere place en matière
d'accès et d'usage des réseaux sociaux en 2021 en Afrique
centrale. Avec 40% de sa population connectée, les réseaux
sociaux constituent un levier stratégique d'attraction et un
facilitateur important de l'émigration scolaire. Dans nos
enquêtes, nous nous sommes aperçus de la manière dont ces
moyens de communication, notamment Facebook et Google, participent de
manière active à l'émigration scolaire. La mosaïque
ci-dessous montre les nombreuses publicités sur ces plateformes.
95Organisme regroupant les opérateurs
télécoms dans le monde.
46
Photo 3: Les réseaux sociaux, un vecteur de
l'émigration scolaire au Gabon

Source : Le cyberespace (Facebook, Google, WhatsApp)
Réalisation : Savin TSINGA BOUKANGOU, 2023.
A travers cette mosaïque, nous remarquons que les
réseaux sociaux prennent une part active dans le processus
d'émigration scolaire au Gabon. Cette implication passe par des messages
provenant d'agences de conseils et d'accompagnement à l'étranger.
La stratégie de ces derniers consiste à inonder le cyberespace
local « de publicités destinées à appâter
les futur étudiants96 » au sujet du pays mis en
avant sur l'espace médiatique. De même, il faut dire que les
personnes qui sont derrière ces plateformes d'orientation sont
généralement d'anciens émigrants scolaires gabonais,
revenus au pays après leur séjour à l'étranger. Le
choix des réseaux sociaux réside sur le fait qu'ils sont à
la fois un outil d'influence et un moyen d'accès aux étudiants
présent au Gabon.
2.1.1.2. Les plateformes d'orientation et
d'accompagnement
Les plateformes d'orientation et d'accompagnement constituent
l'ensemble de structures, d'agences ou de cabinets de soutien scolaire et de
préinscription pour les élèves et étudiants
désirant poursuivre leurs études à l'étranger. Ils
se présentent aujourd'hui comme les médiateurs entre les futurs
émigrants scolaires et les établissements étrangers. Leur
rôle
96Serge LOUNGOU, 2022. L'expatriation
précoce des étudiants et ses risques pour le Gabon. Libre
propos paru dans l'UNION, dans la rubrique Opinion.
47
consiste à conseiller et orienter les étudiants
dans leurs projets d'études, afin de faciliter leur réalisation.
Dans cette catégorie, deux principales plateformes se dégagent
à savoir les orientations publiques et les orientations privées
comme le montre le tableau 10 suivant.
Tableau 10: Quelques plateformes d'orientation et
d'accompagnement
Types
|
Noms
|
Les plates formes publiques
|
ANBG, SOSUP
|
Les plates formes privées
|
Soluetude, Gabon académie, Ikeza
international, Figs Gabon, Educ assistance, Cori consulting,
Valmastudy...
|
Source : Enquête de terrain, 2023.
Dans ce tableau, nous avons une liste non exhaustive des
plateformes d'orientation et d'accompagnement des étudiants à
l'étranger installés au Gabon. Composées de l'ANBG et du
SOSUP, les plateformes publiques sont des organes qui assurent au nom de
l'État gabonais l'accompagnement des étudiants. Leur politique
d'orientation cadre avec la vision politique des gouvernants en matière
d'éducation. Pour répondre à la demande ainsi qu'aux
besoins des futurs émigrants scolaires gabonais, l'ANBG travaille en
partenariat avec des organismes de gestion97. Ces derniers agissent
auprès des établissements de formation et de l'administration au
bénéfice des étudiants boursiers dans les pays d'accueil.
Les organismes de gestion ont la compétence de répondre à
toutes les questions liées à l'accompagnement des
étudiants au compte de l'ANBG. Parmi ces organismes de gestion on
retrouve le CDC Allemagne, Campus France, Smart Africa Consulting Maroc,
Cegep/Canada, ASA Tunisie.
Les plateformes d'accompagnement privé sont
composées d'agences qui se chargent de l'orientation d'étudiants
boursiers et non boursiers. Leur accompagnement tient compte des besoins des
futurs émigrants et des offres de formation des établissements
à l'étranger. Ainsi, face à l'offre insatisfaisante de
l'enseignement supérieur au Gabon, de « nombreux
étudiants sont amenés à rallier l'étranger dans le
cadre de la poursuite de leurs études98 ». Devant
l'enjeu économique que représente l'émigration scolaire,
cette augmentation a
97Les organismes de gestion renvoient à des
prestataires qui peuvent agir dans le cadre de la gestion administrative,
académique et financière au nom de l'ANBG.
98Henriette LEMBET, 2021. Etudier au Rwanda : gare
aux arnaques! Disponible sur URL :
https://www.gabonmediatime.com/etudier-au-rwanda-gare-aux-arnaques
48
également entrainé la convoitise des agences
d'assistance d'étudiants. Face aux profits générés
dans le processus de traitement de dossier d'étudiants pour
l'étranger, il s'est développé, en marge des
procédures d'accompagnement, des « pratiques
mafieuses99 ». « Entre promesses non tenues,
engagements non honorés, abus de confiance, certains cabinets
d'assistance iraient jusqu'à facturer aux étudiants gabonais des
formalités à coût plus élevé qu'elles ne le
sont réellement100 ». Le quotidien L'Union,
dans sa livraison du mercredi 22 septembre 2021, rapportait dans ce sens
les propos de certains étudiants confrontés aux problèmes
d'escroqueries d'agences d'assistance. L'un d'entre eux affirmait ce qui suit :
« j'ai découvert que l'agence faisait payer à mes
parents en francs CFA le montant du coût de la scolarité et du
loyer qui est en franc rwandais ».
La multiplication d'actes d'arnaque de certaines agences de
suivi d'étudiants doit amener l'Etat à mieux les encadrer et les
contrôler notamment par des campagnes de sensibilisation, en
répertoriant les plus fiables ou en signant des partenariats avec ces
agences privées.
2.1.1.3. Les salons internationaux d'orientation
Organisés depuis quelques années au Gabon, les
salons internationaux d'orientation sont des événements qui
réunissent différents établissements locaux et
étrangers de l'enseignement supérieur. Ces derniers ont pour but
de faire connaitre aux apprenants locaux, les différentes formations
dispensées par les établissements qui y prennent part. L'objectif
visé est celui d'attirer les meilleurs profils de candidats
répondant aux critères de formation proposés dans leurs
écoles et instituts.
A l'issue du salon international de l'orientation
universitaire de Libreville organisé le 22 février 2023, Mohammed
Amine KENDOUSI, chargé des admissions de Al Akhawanyn University
d'Ifrane au Maroc, et Mohammed ABROUK EL ALAMI, responsable de
développement international de Rabat Business School, affirmaient «
être à la recherche d'individus intéressés par
les domaines de la gestion, des finances, du marketing, etc. ». Cette
déclaration montre que le Gabon est assimilé à une «
réserve de chasse101 » dans laquelle les
États extérieurs, par le truchement de leurs écoles et
instituts, siphonnent l'élite scolaire locale.
99
Https://www.gabonmediatime.com/etudier-au-rwanda-gare-aux-arnaques
100Idem
101Serge Loungou, 2021. Op cit, p.12.
49
2.2.2 Processus d'insertion sociale des étudiants
gabonais à l'étranger
La signification étymologique de la notion d'insertion
renvoie à « l'introduction d'une chose dans une autre ou dans
d'autres, celle-ci gardant sa ou ses particularités102
». En étendant ce terme au concept d'insertion sociale,
Catherine DEROUETTE et Stéphane RULLAC l'appréhendent comme
« un concept sociologique qui a dépassé les
frontières de la science sociale, pour s'appliquer à la
société tout entière103». L'insertion
sociale renferme « un ensemble d'activité ayant pour objectif
la socialisation d'un individu pour lui permettre de trouver sa place dans une
société104». Autrement dit, c'est un
processus ou une « action visant à faire évoluer un
individu isolé ou marginal vers une situation caractérisée
par des échanges satisfaisants avec son environnement 105
».
L'intérêt d'étudier le processus
d'insertion sociale des étudiants gabonais à l'étranger
vient de certains travaux, en l'occurrence ceux de Julien BERTHAUD106
pour qui, « il existerait un lien entre réussite scolaire
et les effets de l'intégration sociale ». Même si cette
section n'étudie pas ce rapport, il traite tout de même du
processus d'insertion des étudiants gabonais à l'étranger.
D'ailleurs, dans le contexte de l'émigration scolaire, l'insertion
renvoie à l'ensemble des moyens d'accompagnement par lesquels les
étudiants, émigrants vers l'étranger, parviennent à
réduire les risques d'exclusion. Ces formes d'accompagnement peuvent
être de plusieurs ordres. Il peut s'agir d'un :
? Accompagnement socio-économique par des services
d'accueil et d'hébergement, de soutien moral, de culture et loisirs,
d'aide à la mobilité, aide financière... ;
? Accompagnement académique généralement
encadré par les établissements d'accueil et qui se
caractérise par des services et des programmes d'insertion dans les
établissements (sport, randonnées, voyages...) ;
? Accompagnement administratif qui est l'aide dans
l'établissement et la mise à jour des documents (carte
d'étranger, carte consulaire...).
102Georges BONNEFOND, 2006. Insertion ou
intégration, in De l'institution à l'insertion
professionnelle, p.221. Disponible sur URL :
https://www.cairn.info/de-l-institution-a-l-insertion-professionnelle--9782749205670-page-221.html&lang=fr
103Catherine DEROUETTE, Stéphane RULLAC,
2015. « Insertion sociale », In Stéphane RULLAC,
Dictionnaire pratique du travail social, Paris,
Dunod, Hors collection, p.239.URL :
https://www.cairn.info/dictionnaire-pratique-du-travail-social--9782100725007-page-239.htm
104Pact'Arim, 2021. Qu'est-ce que l'insertion
sociale, URL :
https://www.pactarim.fr/maison/quest-ce-que-linsertion-sociale%E2%80%89/
105Définition de l'Index international et
dictionnaire de la réadaptation et de l'intégration sociale
(L'IIDRIS). 106 Julien BERTHAUD, 2017. Les effets de l'intégration
sociale étudiante sur la réussite universitaire en 1er cycle
sont-ils significatifs? Revue française de pédagogie. URL :
http://www.journals.openedition.org/rfp/7077
(consulté le 03 janvier 2023)
50
Le tableau qui suit présente les moyens d'insertion des
étudiants gabonais à l'étranger.
Tableau 11: Les moyens d'insertion des émigrants
scolaire gabonais
Les moyens d'accompagnement
|
Effectifs
|
Pourcentage (%)
|
Les ami(e)s
|
47
|
47
|
La famille
|
30
|
30
|
Les associations des étudiants gabonais à
l'étranger
|
4
|
4
|
L'établissement d'accueil
|
19
|
19
|
Total
|
100
|
100
|
Source : Enquête de terrain, 2023.
Le tableau montre que 47% et 30% des émigrés
scolaires ont obtenu respectivement l'aide des amis et de la famille pour leur
insertion à l'étranger. Pour soutenir ces données, une
enquêtée nous a affirmé que lors de son arrivée au
Sénégal, « c'était vraiment ma soeur qui m'a
orienté dans tout. Notamment la recherche d'école, dans la mise
à jour des documents administratifs, au sujet des informations
importantes... ». En plus du soutien apporté par les proches,
19 % des émigrés scolaires bénéficient des
programmes des établissements pour leur insertion. Selon un
enquêté, « il peut s'agir des sorties scolaires
(excursion) ou un voyage organisé regroupant une ou plusieurs classes de
l'école ». Enfin, 4 % de répondants nous rapportent que
les associations d'étudiants gabonais à l'étranger
participent également à ce processus par « des conseils,
l'apprentissage de la langue (pour les pays non francophones) ou l'organisation
des évènements festifs107».
Confronté à certaines carences, l'homme a
presque toujours emprunté la voie de la migration pour obtenir gain de
cause à ses insatisfactions. A travers ce chapitre, nous avons pu voir
que l'émigration scolaire au Gabon découle à la fois de
facteurs internes et externes. Face à un système de formation au
niveau postsecondaire « sinistré », l'extérieur se
présente à tous ces Gabonais en quête d'avenir et d'espoir
comme un palliatif à la question de la formation. Toutefois, ce
dévolu jeté par les émigrants scolaires vers les pays
étrangers tient sur le fait qu'ils constituent des espaces attractifs.
Une attractivité qui s'incarne au niveau de l'univers sociétal et
culturel de ces pays sur les coûts de formation, de la stabilité
et la qualité de l'enseignement ou des perspectives après
formation.
107Propos d'une enquêté sur le
rôle des associations d'étudiants gabonais à
l'étranger dans le processus d'insertion social.
51
En poursuivant notre analyse, ce chapitre a permis de
comprendre que l'émigration scolaire au Gabon est entretenue par
plusieurs acteurs. Ils agissent dans le cyberespace et dans le milieu local
à travers les réseaux sociaux, la publicité, les salons
internationaux de l'orientation et participent de manière directe et
indirecte à l'entretien de cette dynamique migratoire de l'élite
intellectuelle locale.
52
DEUXIÈME PARTIE :
L'ÉMIGRATION SCOLAIRE AU GABON :
ENJEUX ET ANALYSE
53
Les universités sont au centre de la puissance et du
rayonnement des territoires. Devant cette considération, la formation
scolaire est devenue un enjeu de rayonnement, de puissance, de
compétitivité entre États. Dans cette forme de «
Guerre des Campus108 », certains pays de
départ, grâce à l'amélioration de leur
système scolaire, sont ainsi devenus des pays d'arrivée
d'étudiants tandis que d'autres sont demeurés des espaces
d'émigration scolaire. Cette partie analyse l'émigration scolaire
au Gabon comme un fait migratoire aux enjeux socioéconomiques et
géoculturels et pose les bases d'une analyse du domaine scolaire comme
aspect du soft power.
108Devenu (les universités) un aspect
culturel de l'influence des Etats, Émilie AUBRYE dans « soft
power : la guerre des universités », présente les
universités comme trait de la puissance "soft". Elle affirme à
cet effet que depuis le "classement de Shanghai" et sur fond de
compétition croissante entre monde occidental et monde asiatique, "la
guerre des facs" s'intensifie, tandis que le nombre d'étudiants
internationaux est en constante augmentation.
54
CHAPITRE 3 : L'ÉMIGRATION SCOLAIRE AU GABON :
UN FAIT MIGRATOIRE AUX ENJEUX SOCIOÉCONOMIQUES, GÉOPOLITIQUES,
SÉCURITAIRES ET
CULTURELS
En tant que territoire vers lequel converge d'importants flux
de populations étrangères, le Gabon, « dans la recherche
légitime de son soft power, aurait logiquement dû constituer un
espace d'immigration académique109 ». Toutefois,
alors que la demande dans l'enseignement supérieur ne cesse de
croître et que les universités sont en concurrence pour attirer
les étudiants partout dans le monde, cette migration n'est pas sans
enjeux. Dans ce chapitre, nous analysons les enjeux de l'émigration
scolaire au Gabon. Pour y parvenir, notre réflexion porte, dans un
premier temps, sur une étude des enjeux socioéconomiques de ce
mouvement de population, puis, dans un deuxième temps, aborde les enjeux
géoculturels et sécuritaire de l'émigration scolaire au
Gabon.
3.1. Les enjeux socioéconomiques de
l'émigration scolaire
Dans de nombreux travaux, les dimensions politique et
culturelle de la mobilité internationale des étudiants ont
longtemps été mises en avant dans les échanges
interétatiques. L'enjeu principal était alors de «
contribuer à accroître l'influence du pays d'accueil sur la
scène internationale en formant les futures élites des pays avec
lesquels des liens privilégiés étaient
entretenus110». Ces enjeux ont aujourd'hui changé
de nature. Avec la montée en puissance du fait capitaliste, l'impact
économique est devenu prédominant. Dans le cas du Gabon,
l'émigration scolaire des étudiants n'est pas sans
conséquences. D'après MBENG ESSONE, cette mobilité «
pèse de plus en plus financièrement111
». Afin de mieux cerner le poids de ce phénomène, nous
examinons le coût de l'émigration scolaire pour l'État
gabonais et les familles qui la supportent.
3.1.1. Le coût financier et humain de
l'émigration scolaire pour l'État gabonais
La formation demeure un enjeu fondamental pour le
développement de tout État et le Gabon n'échappe pas
à cette logique. Mais, face aux carences de son système
éducatif,
109Serge LOUNGOU, 2021. Op. Cit, p.12. 110
Eugénie TERRIER, 2009. Op. Cit, p.74. 111
Https://gabonmediatime.com/gabon-lexode-universitaire-un-phenomene-qui-coute-de-plus-en-plus-cher-a-letat/
55
l'émigration scolaire se présente comme un moyen
nécessaire pour la formation du capital humain. Néanmoins, entre
frais de scolarité, frais de déplacement, frais
d'hébergement et couverture sanitaire, la prise en charge des
émigrants scolaires coûte « cher à
l'État112 ». MBENG ESSONE estimait ces coûts
à « 64 milliards de FCFA pour assurer les études des
ressortissants gabonais113». En fin 2015, le Bureau de
coordination du Plan stratégique Gabon émergent évaluait
ces dépenses à 59 milliards de FCFA. Dans le rapport relatif
à l'audit organisationnel, comptable et financier de l'ANBG, la Cour des
Comptes évaluait à plus de 33 053 294 000 FCFA les
dépenses de l'État gabonais en 2011 pour assurer le paiement des
allocations d'études des ressortissants gabonais à
l'étranger. Le tableau suivant tiré du rapport de la Cour des
Comptes montre l'évolution de ces chiffres de 2011 à 2013.
Tableau 12: Dépenses de l'État en
matière de bourse au Gabon et à l'étranger entre
2011-2013
|
2011
|
2012
|
2013
|
Enseignement supérieur
|
Effectifs
|
Montant (bourses et accessoires)
|
Effectifs
|
Montant (bourses et accessoires)
|
Effectifs
|
Montant (bourses et accessoires)
|
Gabon
|
10 372
|
10 720 421 000
|
10 235
|
16 156 593 560
|
22 651
|
17 748 612 000
|
Etranger
|
4 192
|
33 053 294 000
|
3 422
|
28 465 025 700
|
2 366
|
27 816 342 000
|
Total
|
14 465
|
43 773 715 000
|
13 657
|
44 621 619 260
|
25 017
|
45 564 954 000
|
Source : Rapport relatif à l'audit organisationnel,
comptable et financier de l'ANBG (Cour des
Comptes, 2014).
Le tableau montre qu'entre 2011 et 2013, le nombre
d'étudiants au Gabon dans l'enseignement supérieur a
doublé. Cette tendance est la conséquence de la politique
d'orientation mise en place par l'ANBG en 2012, laquelle consistait à
prioriser les établissements d'enseignement locaux. Ce choix
stratégique a conduit à la baisse du nombre des étudiants
gabonais à l'étranger passant de 4 192 en 2011 à 2 366 en
2013. Malgré ce déclin, les dépenses liées à
l'entretien des étudiants gabonais à l'étranger demeurent
plus onéreuses comparativement au montant de bourses et accessoires des
étudiants qui sont au Gabon. Cela se justifie par le fait qu'à
l'étranger, la prise en charge est plus importante. Pour
112
https://gabonmediatime.com/gabon-lexode-universitaire-un-phenomene-qui-coute-de-plus-en-plus-cher-a-letat/
113Idem
56
un étudiant boursier, l'Etat est emmené à
prendre en charge le logement, le voyage aller-retour, les frais d'inscription
et de formation, la couverture sociale et médicale, les allocations
mensuelles et le trousseau scolaire, etc. Le tableau ci-après
présente les montants mensuels de bourses en fonction des zones
géographiques.
Tableau 13: Montants mensuel des allocations
d'études accordées aux étudiants gabonais au Gabon et
à l'étranger
ZONE ET CATEGORIES
|
C
|
D
|
E
|
F
|
G
|
1er cycle (Prépa, DUT, Licence)
|
2ème cycle (Master, ingénieur)
|
3ème cycle (Doctorat)
|
Bourse de mérite
|
Bourse de l'émergence
|
GABON
|
83 000
|
98 000
|
130 000
|
166 000
|
332 000
|
PAYS HORS ZONE FCFA ET MAGHREB
|
165 000
|
192 500
|
253 000
|
|
|
AFRIQUE AUSTRALE
|
220 000
|
264 000
|
308 000
|
|
|
ASIE 3 ET MOYEN ORIENT
|
275 000
|
330 000
|
385 000
|
|
|
AUTRES PAYS EUROPE ET AMERIQUE DU SUD
|
297 000
|
352 000
|
407 000
|
|
|
ZONE EURO 3 ET ASIE
|
308 000
|
353 000
|
418 000
|
|
|
ZONE EURO 2 AMERIQUE DU NORD ET OCEANIE
|
425 800
|
455 800
|
498 800
|
|
|
ZONE EURO 1 ET PAYS HORS ZONE EURO ET ASIE 1
|
460 100
|
482 000
|
541 200
|
|
|
Source : Journal Officiel de la République Gabonaise
N°124 Bis, du 26 septembre 2012.
Comme on peut le constater, il existe plusieurs
catégories de bourses à savoir la bourse de mérite, la
bourse d'émergence et la bourse classique. La bourse classique qui est
la plus attribuée comporte trois sous catégories. La bourse C qui
est accordée aux étudiants du premier cycle, des écoles
préparatoires aux écoles d'ingénieurs (BTS, DUT Licence,
ENI). La bourse D est accordée aux étudiants de deuxième
cycle (Master), la quatrième et la cinquième année du
cycle ingénieur d'application ou de conception. Enfin la bourse E est
réservée aux étudiants de troisième cycle
(doctorat). Ces catégories de bourses concernent à la fois les
57
étudiants présents au Gabon et à
l'étranger. Cependant, leurs montants diffèrent en fonction des
zones géographiques. Pour prendre l'exemple du trousseau scolaire, il
est établi à 90 000 FCFA dans les zones FCFA et 180.000 hors zone
FCFA pour les catégories de bourse C, D et E.
Sur la base de certains chiffres publiés sur la page
Facebook de l'ANBG et des informations recueillies lors de la recherche
documentaire, nous avons estimé les dépenses des allocations et
de la prise en charge des étudiants boursiers au Gabon et à
l'étranger en 2019. Ces données sont consignées dans le
tableau suivant.
Tableau 14: Estimation du coût financier de
l'émigration scolaire pour les étudiants boursiers
Gabonais
CONTINENTS ET PAYS
|
EFFECTIFS EN FONCTION DES CATEGORIES BOURSE EN
2019
|
MONTANTS
|
C
|
D
|
E
|
F
|
Afrique (sans le Gabon)
|
669
|
283
|
35
|
|
4 827 089 163 FCFA
|
Amérique
|
48
|
21
|
12
|
|
431 064 000 FCFA (estimation)
|
Asie
|
23
|
16
|
14
|
|
319 813 200 FCFA (estimations)
|
Europe
|
696
|
533
|
211
|
|
7 441 807 902 FCFA
|
Gabon
|
30 036
|
5 721
|
319
|
62
|
30 688 798 000 FCFA
|
Total
|
31 472
|
6 574
|
591
|
62
|
43 708 046 530 FCFA (estimations)
|
Source : ANBG (2018-2019) et
interprétation de l'auteur, 2023.
Faute de données, nous n'avons pas pu
répertorier les montants exacts de la prise en charge (paiement de la
bourse, de la scolarité, de la prise en charge sociale, le coût du
transport, l'hébergement, etc.) de l'État en Asie et en
Amérique. Toutefois, en faisant le rapport entre le nombre
d'étudiant (2561) à l'étranger en 2019 et le coût
des allocations qui leurs sont destinées, on se rend compte qu'il fait
presque la moitié (13 019 774 265 FCFA) du montant de bourses
alloué aux étudiants locaux (30 688 798 000 FCFA). Un chiffre
important alors que les personnes en situation d'émigration scolaire
représentent relativement 1/15ème du nombre
d'étudiants boursier au Gabon (36 138 étudiants au Gabon).
Au regard de ces montants élevés, l'État
a pris la décision de revoir, en 2019, les modalités
d'attribution des bourses en abrogeant le décret
n°404/PR/MENESTFPRSCJS de septembre 2012 qui garantissait la «
bourse pour tous ». Dans le même sens, la note
58
n°000576/PR/ANBG/DG/CTM de la Directrice
générale de l'ANBG limitait l'accompagnement de l'État
pour l'année académique 2023-2024 aux étudiants inscrits
à l'étranger, dans les établissements supérieurs
publics.
En dehors de ce levier financier, l'émigration scolaire
expose une autre problématique : celle de la migration de « retour
» ou de « non-retour114 » des étudiants
gabonais dans leur pays d'origine après formation. Pour percevoir les
conditions de ces deux tendances (retour ou non-retour), nous avons
questionné les émigrés scolaires gabonais afin de mesurer
leur intention de « retour » ou de « non-retour ». Les
résultats sont présentés dans le tableau suivant.
Tableau 15: Avis des émigrants gabonais sur
l'intention de retour ou de non-retour
Avis sur la migration de retour
|
Pourcentage
|
Non
|
26%
|
Oui
|
74%
|
Total
|
100
|
Source : Enquête de terrain, 2023.
La majorité des émigrés scolaires
gabonais (74 %) s'inscrivent dans une migration de retour, contre 26 % qui
expriment l'intention de non-retour. Même si la proportion de ceux qui
déclarent ne pas revenir est faible, cela reste malgré tout
préjudiciable puisque cela conduit à une perte de
compétences dans certains secteurs et cela représente un
investissement non rentable.
Notre questionnaire nous a également permis de
recueillir les raisons pouvant expliquer le retour ou le non-retour des
émigrés scolaires gabonais. Le tableau ci-dessous présente
ces données.
114 Le terme non-retour dans cette analyse est rattaché
à la question de la « fuite des cerveaux » qui lui provient de
l'anglicisme « brain drain ». Il est utilisé pour
désigner dans l'ensemble l'émigration des personnes dotées
de qualifications vers d'autres pays.
59
Tableau 16: Les causes de retour et de
non-retour
Types
|
Description
|
Effectifs
|
Pourcentages
|
Les causes de retour
|
La famille
|
7
|
74%
|
L'attachement au pays de départ
|
5
|
Par patriotisme
|
37
|
Pour faire valoir les compétences acquises
|
10
|
Pour l'obtention d'un emploi
|
10
|
Pour investir
|
5
|
Les causes de non-retour
|
Le manque d'opportunité d'emploi au Gabon
|
9
|
26%
|
Le taux de chômage élevé
|
17
|
Total
|
|
100
|
100%
|
Source : Enquête de terrain, 2023.
Au regard de ce tableau, 74 % d'étudiants gabonais
à l'étranger pensent que les causes de la migration de retour
s'expliqueraient par six raisons dont les principales sont le patriotisme (37),
l'espoir d'obtention d'un emploi (10) et la volonté de faire profiter
leur pays de départ des compétences acquises à
l'étranger (10). Par ailleurs, 26 % des enquêtés estiment
que le non-retour pourrait être causé par deux principales raisons
que sont le taux de chômage élevé et le manque
d'opportunité d'emploi (9) au Gabon.
Le défi du développement au Gabon exige un
effort de ramener sur son sol ses ressources humaines. Les intentions de
non-retour, formulées par les étudiants gabonais à
l'étranger, montrent qu'il faudra plus qu'une incitation au patriotisme
ou au référant familial pour dissuader les volontés
d'expatriation. L'État gabonais devrait s'inspirer de la
stratégie qu'avaient mise en place certains pays africains en
l'occurrence « la Côte d'Ivoire, le Ghana, l'Éthiopie ou le
Cap-Vert, pour le retour de leurs migrants hautement qualifiés. Parmi
les politiques de retour, l'Etat devrait « créer des
réseaux locaux par lesquels les migrants qui reviennent trouvent de
réelles opportunités grâce notamment à des
investissements dans les secteurs de la science et de la technologie
»115. Il pourrait également offrir aux
étudiants potentiels à la migration de retour des conditions
satisfaisantes de carrière dans leurs domaines, ce qui suppose un
véritable travail de fond.
115Mamadou GANDO BARRY, 2011. Op. Cit,
p.29.
Ce paragraphe expose les différentes stratégies
développés par la Côte d'Ivoire, le Ghana,
l'Éthiopie ou le Cap-Vert, pour le retour de leurs migrants.
60
3.1.2- L'impact socioéconomique de
l'émigration scolaire au sein des familles gabonaises
Comme nous l'avons vu, le coût des études
à l'étranger est élevé. A partir d'une
enquête qualitative menée auprès de 7 parents qui prennent
en charge (sans l'aide de l'Etat gabonais) les dépenses de leurs enfants
qui apprennent à l'étranger dont 5 en Afrique et 2 en Europe,
nous avons pu avoir une estimation des dépenses en fonction des zones
d'études. Les résultats ont été condensés
dans le tableau suivant.
Tableau 17: Estimation des dépenses selon le
pays, le niveau d'étude et l'établissement d'accueil
entre 2018-2021
Pays
|
Structure fréquentée
à l'étranger
|
Niveau d'étude
|
Estimation des dépenses par an
|
Statut social du parent
|
Tranche salariale du parent
|
Maroc
|
Ecole supérieur privée
|
Master
|
3 600 000 FCFA
|
Agent du public
|
De 950 000 à plus
|
France
|
Université publique
|
Licence
|
4 000 000 FCFA
|
Agent du Privé
|
De 950 000 à plus
|
Turquie
|
Ecole supérieur publique
|
Master
|
5 000 000 FCFA
|
Agent du public
|
De 750 000 à 950 000 F
|
Afrique du Sud
|
Institut supérieur privé
|
Master
|
4 000 000 FCFA
|
Agent du public
|
De 950 000 à plus
|
Cameroun
|
Ecole supérieur publique
|
Master
|
2 500 000 FCFA
|
Agent du public
|
De 150 000 à 350 000 F
|
Sénégal
|
Ecole supérieur privée
|
Master
|
2 500 000 FCFA
|
Agent du public
|
De 350 000 à 550 000 F
|
Rwanda
|
Université publique
|
Licence
|
2 0000 000 FCFA
|
Agent du public
|
De 550 000 à 750 000 F
|
Source : Enquête de terrain, 2023.
Le tableau montre que plus le pays d'étude est
éloigné, plus les coûts sont onéreux et cela
grève les revenus des parents. Face à cette situation, certains
parents solliciteraient que l'État apporte une aide aux étudiants
non boursiers notamment en prenant en charge le trousseau scolaire et les frais
sanitaires. Les dépenses des étudiants tournent globalement
autour de trois secteurs : administratif et scolaire, vie sociale et sanitaire,
et train de vie. Les coûts administratifs et scolaires regroupent les
frais d'inscription dans les établissements (université,
écoles instituts) et les frais relatifs à l'établissement
des documents administratifs (Visa, carte de séjour). La vie sociale et
sanitaire couvre les frais de restauration universitaire, la mutuelle, les
assurances, les dépenses liées au transport du quotidien (pour
les étudiants résidents hors des campus), les dépenses
concernant les frais de santé, etc. Le train de vie
61
concerne les frais de communication (abonnements, Internet,
téléphone), les frais liés aux activités sociales
et de loisirs (sorties, sport ; tourisme, week-ends etc.), les frais de
logement.
Au final, l'émigration des étudiants Gabonais
coûte chère aussi bien à l'Etat qu'aux familles qui la
supportent. Le double impacte de ce mouvement de populations sur l'État
réside sur le fait qu'il constitue un « gouffre à sous
» et représente dans le cas du « non-retour », une perte
en diplômés hautement qualifiés pour répondre aux
enjeux de développement du pays.
3.2. Les enjeux géopolitiques,
sécuritaires et culturels de l'émigration scolaire au
Gabon
Le choix de migrer vers un espace suppose que ce dernier
rempli certaines conditions inexistantes dans l'espace de départ. Dans
le contexte de la mondialisation où la compétitivité et la
quête de puissance sont au centre des relations interétatiques,
l'émigration scolaire croissante des gabonais vers l'étranger
renvoie une image de ce que pourrait être la formation scolaire au niveau
local. Dans cette section, nous analysons les enjeux géopolitiques,
sécuritaires et culturels de ce mouvement de population.
3.2.1. Les enjeux géopolitiques
Du fait de l'internationalisation de l'enseignement
supérieur, presque tous les pays au monde font face à
l'émigration scolaire. L'internationalisation est définie par
Charlotte POURCELOT comme un « processus qui, grâce à la
mobilité internationale des étudiants et des enseignants, conduit
à l'intégration des dimensions internationales et
interculturelles dans les fonctions éducatives des institutions
d'enseignement supérieur ainsi que dans leur gouvernance
»116. Mais, selon qu'on émigre d'un pays du nord ou
du sud, le mouvement n'est pas perçu de la même manière. En
effet, lorsqu'un étudiant américain ou un étudiant chinois
décide d'aller à l'étranger pour sa formation, on avancera
moins comme raisons de départ des problèmes infrastructurels ou
de calendrier scolaire non respecté. Au Gabon, les faits sont tout
autres. Les départs successifs pour besoin éducatif à
l'étranger ne sont pas toujours le résultat d'un choix propre.
Ils sont en grande partie une réponse aux handicaps des pratiques
scolaires au niveau supérieur.
Face aux nombreux problèmes infrastructurels
couplés à la faible diversité d'offres de formation, des
grèves à répétition et d'effectifs
pléthoriques dans les établissements au
116
http://journals.openedition.org/ripes/3248
62
Gabon, l'émigration scolaire s'avère être
une réponse indispensable à la demande des gabonais qui, chaque
année, postulent dans l'enseignement postsecondaire. Ainsi, si ce
mouvement migratoire rend le Gabon dépendant de l'extérieur pour
la formation de son élite intellectuelle, cette dépendance est
une entrave à la souveraineté académique nationale. Elle
traduit l'incapacité du Gabon à assurer l'entièreté
de la demande académique locale.
3.2.1.1. Le Gabon face à la
compétitivité académique étrangère
Terme souvent employé dans plusieurs domaines pour
sous-tendre l'idée de concurrence ou de rivalité, la
compétitivité est une notion d'essence économique qu'il
n'est pas facile de définir et de mesurer. Elle s'apparente toutefois
à la capacité d'une entreprise à affronter la concurrence
d'autres entreprises, en vue de s'assurer une position. Elle est aussi la
« capacité d'une économie nationale à
améliorer durablement le niveau de vie de ses habitants et à leur
procurer un haut niveau d'emploi117 ».
Bien qu'étant « à l'origine une notion
appliquée à des produits ou à des
firmes118 », la compétitivité ne
relève pas seulement du seul domaine des entreprises. Suivant une
approche scalaire intéressante, Jacques Lévy «
considère la compétitivité d'un territoire comme les
effets positifs de son inscription dans un marché d'échelle
supérieure119». Cette esquisse de définition
appelle évidemment de nombreux compléments. Dans une approche
géographique, Olivier DOLLFUS120 rappelle le lien
étroit entre compétitivité et géographie. Il
assimile cette notion à un « processus
darwinien121 » dont l'enjeu est de permettre à des
« groupes d'entreprises ou un pays de gagner des parts de
marché122».
Ainsi, en associant cette notion au domaine académique,
la compétitivité trouve dans la pensée darwinienne une
nouvelle présentation du rapport de force entre pôles
académiques (dominants) et périphéries (dominés).
Cette description suit le principe de Pierre VELTZ pour qui « dans
l'espace globalisé, les territoires, les nations, les villes sont de
plus en plus explicitement mis en concurrence123», dans
plusieurs domaines.
117Luc DENAYER, Siska VANDECANDELAERE, 2012. «
Les défis de la compétitivité, reflets et perspectives de
la vie économique », De Boeck Supérieur, revue
tirée de Reflets et perspectives de la vie économique, p.5.
Disponible sur :
https://www.cairn.info/revue-reflets-et-perspectives-de-la-vieeconomique-2012-1-page-5.htm
118Gilles ARDINAT, 2013. Géographie de la
compétitivité, Paris, Presses Universitaires de France, p.
19. 119Idem
120Olivier DOLLFUS, 1995. « Mondialisation,
compétitivités, territoires et marchés mondiaux »,
L'espace géographique, n°3, p.270.
121Idem
122 Ibidem
123Pierre VELTZ, 2014. « La
compétitivité par l'organisation », dans Mondialisation,
villes et territoire, p.159 (en ligne). Disponible sur URL :
https://www.cairn.info/mondialisation-villes-et-territoires--9782130627760-page-159.htm
.
63
Nous rappelons qu'une éducation de qualité au
niveau local est déterminante pour la compétitivité du
pays à l'international. On peut déterminer qu'un territoire est
académiquement compétitif ou non, par sa capacité à
attirer vers lui des flux. Bien qu'aucune définition et méthode
de mesure précise ne s'est encore imposée au sujet de la
compétitivité, il n'en demeure pas moins qu'elle peut se lire
à la fois sur le niveau d'attraction (dimension qualitative) ainsi que
sur le nombre de personnes attirées (dimension quantitative). De
même, elle peut aussi se lire dans les rapports internationaux où
sont classées les meilleures universités au monde.
3.2.1.2. Les classements internationaux
Nés dans les années 2000, les « ranking
» ou classements d'établissements de recherche et d'enseignement
supérieur, sont des entités établissant des comparaisons
d'établissements selon des critères quantitatifs et qualitatifs.
Ils émergent dans un environnement compétitif entre
établissements favorisant la prolifération de classements
internationaux. Produits par divers entités (sociétés
privées d'analyse d'information, des éditeurs scientifiques
commerciaux ou des groupes publics de recherche), deux principaux types de
classements internationaux se distinguent :
? Les classements intégrant les établissements
publics de recherche, comme Scimago Institutions Rankings (SIR), Nature Index,
Ranking Web of World Research Centers ;
? Les classements uniquement consacrés aux
établissements d'enseignement supérieur (universités,
écoles supérieures), comme Academic Ranking of World Universities
(ARWU) plus connu sous l'appellation classement de Shangaï, Ranking Web of
Universities, CWTS Leiden Ranking, THE World University Rankings, U-Multirank,
QS World University Rankings.
Pour mesurer cette compétitivité, nous nous
baserons sur deux types de classements internationaux à savoir le US
News & World Report et le Academic Ranking of World Universities (ARWU)
plus connu sous l'appellation de classement de Shanghai.
3.2.1.3. Les critères des classements
Les critères quantitatifs et qualitatifs de ces
classements sont les effectifs de scientifiques et d'étudiants, le
volume et la qualité de la production scientifique écrite, la
qualité de l'enseignement, le rayonnement international ou
l'attractivité de l'établissement.
Les critères quantitatifs prennent en compte les
effectifs de scientifiques et d'étudiants, ressources contractuelles de
l'établissement, nombre de prix Nobel et de médailles Fields,
nombre d'articles publiés dans les revues à haut
facteur d'impact, nombre de chercheurs dont les articles sont les plus
cités dans leur domaine, nombre d'articles de revues
référencés dans des bases de données
internationales (Scopus, Web of Science...), nombre de citations reçues
par les articles publiés, nombre de publications scientifiques
citées dans des brevets...
Les critères qualitatifs intègrent les niveaux
des diplômes délivrés, degré de
spécialisation de l'établissement, statut légal de
l'établissement, réputation de l'établissement
auprès des étudiants ou des enseignants-chercheurs ou
d'employeurs et de partenaires...
Ainsi, en mettant en adéquation le Gabon et la
compétitivité extérieure, il ressort du magazine US News
& World Report124 (2022), qu'aucun établissement
d'enseignement supérieur gabonais n'est ni dans le lot des 1750
écoles d'enseignement supérieur répertoriées dans
le monde, ni dans celui des 66 d'Afrique. Le rapport reconnait en l'Afrique du
Sud, la position de pôle de formation sur le continent africain. L'Egypte
« reste cependant le pays le plus représenté avec 22
universités qui figurent dans le classement. Une seule université
francophone (hors Maghreb) apparaît dans ce tableau des meilleures
écoles d'enseignement supérieur africaines. Il s'agit de
l'Université de Yaoundé au Cameroun125 ».
Cette absence est également constatée dans le « classement
Shanghai de 2021 » et elle en dit long sur la place du Gabon dans la
sphère académique mondiale. Serge LOUNGOU parle d'ailleurs de
« rapport de force inversé » du Gabon en ce qui
concerne la formation supérieure. Témoignant ainsi de
l'échec des universités locales à se hisser à un
niveau de reconnaissance international. La figure qui
suit, présente l'analyse que l'on porte sur la place du Gabon dans la
sphère académique mondiale.
64
124 Ce classement est basé sur plusieurs indicateurs
tels que la performance de recherche universitaire et la réputation
mondiale et régionale
125
https://www.gabonreview.com/meilleures-universites-africaines-en-2022-luob-aux-abonnes-absents
65
Figure 1: Le Gabon dans la sphère
académique mondiale

Source : Classement Shanghai et magazine US News &
World Report/ Orientation : Serge LOUNGOU
L'examen de cette figure montre que le système
académique mondial est structuré en zones académiques
d'influences. Cette structuration cadre quelque peu avec la structure
économique des pays à l'échelle mondiale. Au premier rang,
on retrouve les pays du centre. Il s'agit des pays d'Europe de l'ouest, des
États-Unis, du Canada, etc. Á eux seuls, ils détiennent
les meilleures universités au monde et occupent les premières
places dans les différents classements internationaux. La seconde
catégorie est dominée par les pays Émergents ainsi que les
nouveaux pays industrialisés. Ils disposent d'une
représentativité qui n'est pas des moindre. Dans ce groupe on
peut citer les BRICS, Israël, l'Arabie Saoudite, etc. Enfin, la
dernière est une catégorie qui fait office de
périphérie. Bien qu'elle englobe des pays engagés dans un
processus de progression de leur domaine scolaire, il n'en demeure pas moins
qu'elle reste sous-représentée. Dans cette
périphérie, on retrouve le Gabon. Une périphérie de
la périphérie. Au regard de sa place inexistante dans le
classement des établissements perçu comme référence
de formation au monde, il « apparait ainsi relégué au
rang de périphérie de
66
troisième niveau. Une sorte d'angle mort à
la remorque d'autres pays africain auquel il sert de réserve de chasse
aux étudiants126 ».
3.2.2. L'enjeu sécuritaire de l'émigration
scolaire au Gabon
L'émigration scolaire des étudiants gabonais
cristallise un enjeu sécuritaire voire humain. On peut justement le
constater à travers les décès de Christ Dorient
DIVOKO127, de Ketch OBORO en 2020 (en Russie) ainsi que Jeannah
Danys DINABONGHO en 2023 (Turquie) dans leurs pays de formation. Le cas de la
jeune étudiante DINABONGHO dite « Dina », avait
provoqué de vives émotions et entrainé de nombreuses
mobilisations aussi bien dans son établissement à Karabük,
à l'ambassade de Turquie au Gabon ainsi que sur la « toile ».
Faisant corps avec cette tragédie qualifiée par certains comme
une « noyade » ou un « assassinat », le ministère
gabonais des affaires étrangères avait fait part, via un
communiqué à GabonTélévision de « sa
consternation et sa vive préoccupation après l'assassinat »
de sa jeune compatriote.
Aujourd'hui encore, des voix continues de retentir face
à ce décès. Dans un point de presse tenu en le 21 juillet
2023, une organisation féministe organisée autour du collectif
« Féministe pour Dina » dénonçait certains abus
dont sont victimes plusieurs immigrés. Á cet effet, le collectif
estimait que « Dina a été victime du racisme qui fait de
tous les réfugiés et immigrés des cibles » et
rejetait le qualificatif de « mort suspecte » retenu par les
autorités turques128.
Ainsi, garantir la sécurité des populations est
une prérogative des dirigeants de chaque État. Ces pertes qui,
dans certains cas, évoquent la question négrophobe et raciale,
sont des interpellations à l'endroit des autorités gabonaises sur
les accords de coopération tissés entre le Gabon et certains pays
où émigrent les étudiants.
3.2.3 Les enjeux culturels de l'émigration
scolaire
Au-delà de l'impact socioéconomique et
géopolitique, l'accueil des étudiants a un enjeu culturel
notamment en prenant en compte des aspects liés à
l'identité nationale et d'acculturation. En effet, en allant à
l'étranger, les étudiants gabonais partent avec des valeurs qui
reflètent les pensées, les traditions, les croyances, la culture
voire l'identité gabonaise.
126Serge LOUNGOU, 2021. Op. Cit, p.12.
127Morel MONDJO MOUEGA, 2017. Un étudiant
gabonais trouve la mort en Afrique du Sud.URL :
https://www.gabonmediatime.com/un-etudiant-gabonais-trouve-la-mort-en-afrique-du-sud/
128
Https://information.tv5monde.com/afrique/gabon-selon-la-maman-de-dina-le-gouvernement-turc-sait-quelle-ete-assassinee-2659475
67
Toutefois, « si l'identité peut se
définir par rapport à la façon dont un individu se
perçoit, se présente et se représente, elle est bien
évidemment influencée par des paramètres socioculturels,
et géographiques par rapport à l'endroit où il
vit129».
Sous l'influence d'un environnement différent de leur
espace de départ, l'arrivée et l'installation à
l'étranger pourraient entraîner chez les émigrés
scolaires, des modifications substantielles, étant donné que la
migration, constitue un moment de brassage (social, culturel), d'interactions,
d'influences réciproques. Elle est un moment, propice à la
construction d'une interculturalité entre l'émigrant et son pays
d'accueil. Ainsi, cette forme de « malléabilité
identitaire130» résultante des interactions entre «
émigrés scolaires » et espaces d'accueils « permet
bien souvent de dépasser l'étape de la migration pour entrer dans
une dynamique d'évolution identitaire131».
En favorisant les relations interculturelles, l'accueil
favoriserait l'acculturation qui est définie comme « l'ensemble
des phénomènes et des processus qui accompagnent la rencontre
entre deux cultures différentes132» qui peut se
traduire par « l'intégration, l'assimilation, la
séparation et la marginalisation133». Concernant
les étudiants gabonais à l'étranger, le sentiment
d'appartenance de ces derniers au pays d'accueil ainsi qu'à leur pays
d'origine (Gabon) est mentionné dans le tableau ci-dessous.
Tableau 18: Avis des émigrés scolaires
gabonais sur leur attachement au pays d'accueil
Attachement au pays d'émigration
scolaire
|
Effectifs
|
Pourcentage (%)
|
Oui
|
51
|
51
|
Non
|
43
|
43
|
Abstention
|
6
|
6
|
Total
|
100
|
100
|
Source : Enquête de terrain, 2023.
129Olivier DAMOURETTE, 2022. De l'importance de la
géographie dans l'étude du lien entre mouvements de populations
et transformation culturelle. Francophonie(s) africaines(s) : langues, culture
et identités au prisme de l'interculturel, Université Sultan
Moulay Slimane. URL :
https://shs.hal.science/halshs-04087052
130 Idem.
131Ibidem
132
http://geoconfluences.ens-lyon.fr/glossaire/acculturation
133 John BERRY, 1997. Immigration, acculturation and
adaptation, Applied psychology, Volume 46, issue 1, pp5-34. URL :
https://iaap-journals.onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1111/j.1464-0597.1997.tb01087.x
68
Ce tableau montre que la majorité des
émigrés gabonais (51 %) estiment avoir un attachement particulier
avec leur pays d'accueil. Près de l'autre moitié, 43 % pensent ne
pas en avoir et 6 % se sont abstenus sur la question. Les données
collectées montrent que cet attachement est justifié par : la
durée du séjour, les liens socioculturels (création de
famille avec les nationaux, amis, le train de vie dans les pays d'accueil,
accueil des populations locales, la langue, etc.), la reconnaissance de la
formation reçue, l'environnement politique et le projet
professionnel.
En outre, dans le contexte global d'accroissement des
interdépendances socio-économiques entre les États de la
planète, la mobilité scolaire «favorise la
compréhension interculturelle et la valorisation de la
diversité134 ». Les expériences de
mobilité permettent aux étudiants d'apprendre davantage des
autres cultures du monde. « Ainsi, l'appréciation et la
compréhension des enjeux internationaux par les étudiants
constituent le principal bénéfice attendu de la mobilité
scolaire135 ». Dans le même élan,
l'émigration scolaire est une façon de former des citoyens plus
ouverts à la diversité culturelle.
Bien qu'étant bénéfique pour
l'État en ce sens qu'elle participe à la formation de
l'élite intellectuelle gabonaise et la prépare à
répondre aux défis posés par le développement,
l'émigration scolaire au Gabon comporte plusieurs enjeux. Dans son volet
socio-économique, elle met en exergue l'épineuse
problématique des coûts de ce mouvement de populations. Il ressort
de celui-ci deux volets. D'une part l'émigration scolaire coûte
cher à l'Etat, d'autre part elle pèse sur les finances des
familles qui supportent son poids. En dépit de cet impact financier, il
pose un enjeu sécuritaire, si non humain. Par ailleurs, ces enjeux sont
aussi d'ordre géopolitique et culturel. Ces derniers soulèvent
les problématiques de dépendance, de rapport de force
inversé, de faible compétitivité et d'acculturation.
134Groupe d'étude sur l'éducation
mondiale, Éducation mondiale pour les Canadiens : Outiller les jeunes
Canadiens pour leur réussite au Canada et à l'étranger,
novembre 2017, p. 11.
135 Eva EGRON-POLAK, Ross HUDSON, 2014. Executive summary -
Internationalization of Higher Education: Growing expectations, fundamental
values, International Association of Universities 4th Global Survey.
69
CHAPITRE 4 : LE DOMAINE SCOLAIRE, UN ENJEU DE
SOFTPOWER
L'éducation est reconnue comme un droit fondamental par
les Nations Unies et constitue un facteur important de développement des
États. Dans un monde en perpétuel compétition,
l'éducation est à la fois un aspect fondamental de l'influence
d'un pays et un moyen pour accéder à la puissance. Ce chapitre
analyse la question scolaire comme enjeu de soft power, d'une part, et
examine la nécessité d'améliorer le système
scolaire gabonais, d'autre part.
4.1. Puissance et domaine scolaire
La géopolitique est définie comme l'étude
des « dimensions géographiques de la
puissance136». Dans sa démarche, elle analyse les
« rivalités de pouvoirs ou d'influences sur des territoires et
des populations qui y vivent137 ». Á travers ces
deux déclinaisons, cette notion semble revêtir un
intérêt particulier pour cette discipline scientifique. D'ailleurs
pour percevoir cette réalité, Fréderic ENCEL affirme que
« la question de la puissance est à la fois le coeur et le fil
rouge de la géopolitique138 ». Notion complexe et
polysémique, la puissance pourrait s'entendre comme la capacité
qu'a un acteur à imposer ses choix aux autres acteurs. Autrement dit,
elle est « le fait d'agir en toute
souveraineté139 ».
Traditionnellement, on distingue la puissance dure (hard
power) et la puissance douce (soft power)140. La
première a longtemps été déterminée par la
capacité militaire, l'économie, la démographie, la
géographie et les ressources naturelles. Avec le temps, la notion de
puissance s'est élargie. Elle a eu comme déterminant l'industrie,
la finance, la culture, les nouvelles technologies et
l'éducation141.
Contrairement aux idées reçues, la puissance
n'est pas simplement un « phénomène foncièrement
négatif qui renverrait seulement à l'idée de
violence142 ». Être en mesure d'offrir un
enseignement supérieur de qualité est devenu un enjeu de
puissance pour les États car la reconnaissance au niveau international
des universités d'un pays participe à l'influence de ce dernier
sur la scène internationale.
136Frédéric MUNIER, 2021. Puissance
et Géopolitique, in « Géopolitique et
Géoéconomie du monde contemporain», la
Découverte, p9. Disponible sur URL:
https://www.cairn.info/geopolitique-et-geoeconomie-du-monde-contemporain--9782348070037-page-9.htm
137Idem
138Ibidem.
139 Frédéric ENCEL, 2022. Les voix de la
puissance : penser la géopolitique au XXIème siècle
», ODILE JACOB p 10.
140A ces deux formats de puissance, on a également le
smart
power.
141www.vie-publique.fr/fiches/38150-quels-sont-les-elements-de-la-puissance-des-etats
142 Frédéric ENCEL, 2022. Op cit, p7.
70
4.1.1 L'éducation au fondement de la puissance des
États
« Il n'est de meilleures ressources que la
valorisation du savoir143 ». En interrogeant la
téléologie de l'éducation, COMENIUS144 pense
que son but est celui de « former l'homme ». Fondamentalement, former
c'est éduquer, façonner ou instruire. Plus explicitement, «
c'est traiter les apprenants comme des élèves,
c'est-à-dire comme des êtres en devenir qu'on élève
à la condition d'Hommes par l'instruction145 ».
Suivant cette approche, former un homme c'est potentiellement transmettre
à celui-ci des connaissances et des valeurs, de sorte que les
compétences acquises soient profitables à lui et sa
communauté.
De même, l'école est un levier nécessaire
au développement d'une nation car c'est elle qui bâtit les hommes
et participe à la construction identitaire d'un pays. Par les
différents mécanismes d'instruction, l'éducation permet
non seulement de comprendre les fondements historiques d'un pays mais participe
à « son émancipation, sa libération, à la
maîtrise de ses moyens, de son destin, à la gestion de ses
possibilités, de ses ressources, à la transmission de ses
structures économiques et sociales146 », donc
à la production des richesses diverses.
Aussi, la production des connaissances peut être
considérée comme le principal facteur de l'essor
économique et social. A cet effet, l'histoire de l'évolution des
sociétés renseigne d'ailleurs que, même si « dans
les pays industrialisés, le développement économique a
précédé le développement éducatif, la
séquence a été en partie inversée depuis la Seconde
Guerre mondiale dans les nouveaux pays industrialisés et les pays
émergents147 ». Dans ces espaces, « la
croissance économique rapide, accompagné d'une
amélioration du niveau de vie des populations, est concomitante à
un développement sans précédent de la
scolarisation148 ». Même si le processus de
développement ne renvoie pas au mimétisme, force est de
constater, en analysant les trajectoires de développement des
sociétés humaines, le rôle tenu par l'école.
Au Gabon, l'éducation demeure indéniablement un
facteur de développement et d'ascenseur social. Pour cela, il est
essentiel que ce pays fasse « la politique de sa
143 Frédéric ENCEL, 2022. Op cit, p108.
144COMENIUS (en tchèque Jan Komensky) passe
pour être le fondateur, le père de la pédagogie de la
modernité. Il composa sa Didactica Magna (Grande Didactique) entre
1628-1632, avec une édition complète en 1657. Il promet « un
art universel de tout enseigner à tous ». 145
https://cahigec.e-monsite.com/pages/espace-libre-propos/l-ecole-au-gabon-la-crise-du-sens.html
146Ces propos ont été tirés du
résumé de Vincent ESSONO ASSOUMOU sur « L'école
gabonaise et ses reformes cosmétiques ».
147 Philippe HUGON, 2005. « La scolarisation et
l'éducation : facteurs de croissance ou catalyseurs du
développement ? ». Article tiré dans Mondes en
développement, N°132, p.22.
148Nolwen HENAFF, 2017. Le financement de
l'éducation en Asie : mythes et réalités, Revue
internationale d'éducation de Sèvres, n°68, p.112 (en
ligne). URL :
http://journals.openedition.org/ries/4363
71
géographie149 » tout en
restant ouvert aux secteurs innovants. Cela suppose que le Gabon doit planifier
son modèle académique en tenant compte de sa géographie
à la fois physique et humaine. Ses formations doivent prendre en compte
son domaine forestier150 immense, son sol et sous-sol riche et
diversifié et son espace maritime aux ressources naturelles
importantes.
Partant de ces caractéristiques, un modèle de
développement économique qui passe par la formation, doit reposer
sur les domaines inscrits ci-dessus. Dans le Plan Stratégique Gabon
Emergent, ce modèle est en quelque sorte pris en compte dans le «
Gabon vert, le Gabon industriel et le Gabon des services ». En
consacrant des efforts budgétaires conséquents à la
formation scientifique, technologique, minière, médicale et
universitaire, le Gabon peut fonder « les voies de sa puissance ».
La première mesure qui pourrait aller dans ce sens
serait déjà de réformer intégralement le
système de formation gabonais. Dans un Café mathématique
tenu en 2018 par l'Organisation des mathématiciens et enseignants du
Gabon (Omega), les organisateurs soulignaient que le système
éducatif actuel au Gabon, n'accordait que très peu d'importance
aux séries scientifiques. Sur l'année académique
2016-2017, les statistiques montrent que 12 781 élèves
étaient inscrits dans les terminales littéraires contre 2 236
élèves dans les terminales scientifiques, soit seulement 15 % des
élèves dans les terminales scientifiques151.
Etant donné que le Gabon est un pays à fort
potentiel maritime, minier, pétrolier et forestier, ces proportions ne
permettent pas d'avoir des ressources humaines compétentes, essentielles
à répondre aux défis de la transformation de ces secteurs.
Ainsi, pour de meilleurs rendements, il serait souhaitable d'inverser les
normes de formation locale. Cela passe par l'amélioration des
capacités d'accueil dans les établissements d'enseignement, la
restructuration de l'offre de formation nationale par l'introduction des
formations techniques et scientifiques depuis l'école primaire,
l'investissement dans des secteurs porteurs d'avenir, la formation des
enseignants et des élèves dans les domaines des sciences et
l'amélioration des conditions d'enseignement des enseignants. Le Gabon
tirerait ainsi profit de son école en appliquant des politiques et des
stratégies propres et en orientant son système de formation
149Napoléon BONAPARTE rappelle sous cette
citation, la prégnance de la géographie, du territoire dans la
modélisation des actions politique des Etats.
150 Recouvert par 23 millions d'hectares de forêt
humide, soit 85% de sa superficie et des mers (les eaux représentent 42%
du territoire gabonais.), le Gabon dispose d'un territoire aquatique
estimé à 210 000 km2, possède un réseau
hydrographique de 10 000 km2 destinée à irriguer la forêt
tropicale.
151Cafés mathématiques : Valoriser
les filières scientifiques, Publié le lundi 17 septembre 2018 par
GabonReview. URL :
http://www.news.alibreville.com/h/83880.html
. Consulté le 29 mai 2023
72
vers une école qui s'appuie sur le substrat
géographique et non plus qu'exclusivement sur la demande du
marché.
4.1.2. L'émigration scolaire au Gabon
obéit-elle à une stratégie de l'État ?
Pays à revenus intermédiaires, le Gabon est
caractérisé depuis des années par une dépendance
à ses ressources naturelles (pétrole, manganèse, bois...).
Ayant pris conscience de cette dépendance, le Gabon a
élaboré en 2010, une stratégie de transformation
économique, industrielle, au sein de laquelle, l'agriculture et le bois
jouent un rôle central dans la diversification de son économie.
Malgré ce projet ambitieux, le Gabon doit faire face à un
déficit en personnes qualifiées dans les domaines
précités.
Au regard de ces difficultés, les autorités
gabonaises ont entrepris depuis 2012, comme ce fut le cas en
1960152, de mettre la formation au coeur de la stratégie de
développement économique et social du Gabon. Cette
stratégie se retrouve dans le troisième pilier du PSGE qui
définit la formation comme facteur essentiel au développement du
capital humain gabonais. Dans sa visée, la formation doit permettre
d'offrir une « éducation de qualité à tous pour
favoriser l'ascension sociale, de doter la nouvelle économie du Gabon
Emergent, des qualifications et compétences dont elle a
besoin153 ».
Pour la formation de cette élite intellectuelle,
indispensable à sa transformation économique, sociale et
industrielle, plusieurs ministères et agences sont impliqués dans
la réalisation de ce projet. Il s'agit notamment du ministère de
l'éducation Nationale (MEN), du ministère de l'enseignement
supérieur, de la recherche scientifique et du transfert des technologies
(MESRSTT) et du ministère de l'emploi, de la fonction publique, du
travail et de la formation professionnelle, chargé du dialogue social
(MEFPTFPDS). L'ANBG et le SOSUP veillent à l'application des
instructions édictées par l'État au sujet de la formation
et l'orientation scolaire. Ces dernières s'appuient sur une politique
qui tient compte des besoins de l'État et des entreprises gabonaises.
Dans son plan de formation des boursiers à
l'étranger, la politique d'orientation tient compte des filières
inscrites comme prioritaires et secondaires pour l'État. Les formations
prioritaires concernent en majorité les secteurs scientifiques et
technologiques. Les filières secondaires regroupent les enseignements
issus des secteurs littéraires, des sciences humaines et sociales, du
droit et de l'économie. Le tableau suivant présente les domaines
prioritaires de l'État gabonais.
152 Mesmin-Noël SOUMAHO, 2004. Éducation, tiré
de « Atlas du Gabon », éditions J.A, p48.
153 Plan Stratégique Gabon Emergent
73
Tableau 19: Les filières et les
spatialités prioritaires de l'État Gabonais
FILIERES
|
SPECIALITES
|
NIVEAU D'ACCES
|
Aviation et Navigation aérienne
|
Pilote, Contrôleur Aérien
Météorologie Navigateur Aérien
|
Baccalauréat scientifique, Technologique
et Licence scientifique
|
Agriculture et Agronomie
|
Agronomie Production Animale et Végétale
Agronomie Ingénieur Industrielle Et Alimentaire
Génie Rural
|
Baccalauréat scientifique DUT, Licence
Professionnel ou équivalent
|
Bois et Environnement
|
Systèmes constructif Bois et Habitat, Génie Bois
et Ameublement, Production Bois et Ameublement
|
Baccalauréat scientifique et Technologique
|
Informatique et Nouvelles technologies de
la communication
Relations
publiques stratégiques internationales et intelligence
économique
|
Informatique MIAGE (Maîtrise Informatique
Appliquée à la Gestion des
Entreprises), Réseaux et Telecom Informatique de Gestion,
Infographie et Multimédia Analyse Programmeur
Relations publiques, Relations internationales, relations
publiques, stratégies internationales et intelligence
économique
|
Baccalauréat scientifique DUT, Licence
Professionnel ou équivalent
Baccalauréat littéraire et économique
|
Information et communication
|
Science de l'information et communication, Journalisme,
Création publicitaire, Audiovisuel,
responsable d'édition,
Communication multimédia
|
Baccalauréat littéraire et économique
|
Éducation et enseignement
|
Enseignement, Science de l'éducation,
Education physique et sportive
|
Baccalauréat littéraire, scientifique et
économique
|
Mécanique et
technologie industrielle
|
Mécanique, Électromécanique,
Electrotechnique, Génie Industriel et Maintenance,
Diagnostics et interventions sur équipement et systèmes,
Génie Mécanique et Productique
|
Baccalauréat Scientifique
et Technologique, Bac+2/3
|
Architecture et conception
|
Architecture, Urbanisme, Gestion Urbaine, Art et
Décoration, Architecture d'intérieure
|
Baccalauréat scientifique, technologique
et économique
|
Bâtiment- Pont et Chaussée
|
Bâtiments et Travaux Publics, Ponts et
Chaussées, Génie et
Infrastructures, Topographie, Construction Métallique
|
Baccalauréat Scientifique
et Technologique, Bac+2/3
|
74
Mines et Pétrole
|
Ingénierie Pétrolière, Ingénierie
des Mines,
Géophysique de Surface et Subsurface, Génie
Pétrochimie, Génie Géologie et Pétrole
|
Baccalauréat Scientifique
et Technologique, Bac+2/3
|
Biologie-Biotechnologie médicale
|
Imagerie Médicale, Biotechnologie, Génie
Biologie, Biologie Industrielle, Biologie
Médicale, Bioproduction, Chimie
Biologie Géologie
|
Baccalauréat scientifique, technologique, Bac+3/4
|
Sciences et Environnement
|
QHSE, Géosciences et Environnement,
Ingénierie de l'eau et de
l'environnement, Mécanique Ingénierie environnement,
Géologie
|
Baccalauréat scientifique/ Bac+3/4
|
Médecine et santé
|
Médecine, Génétique, Ophtalmologie,
Pharmacie, Pharmacologie Science du médicament
vétérinaire, Technicien de Biologie Médicale
|
Baccalauréat scientifique
|
Source : Site officiel de l'ANBG, 2023.
Après la présentation de filières
considérées comme prioritaires pour l'État, le tableau
suivant montre les filières secondaires de l'État
gabonais.
Tableau 20: Les filières de formation et
spécialités secondaire de l'Etat
FILIÈRES
|
SPÉCIALITÉS
|
NIVEAU D'ACCES
|
Économie-Commerce-Marketing
Marketing et
Management
|
Commerce, macro économie, statistiques, Gestion et
pilotage des projets, Commerce et distribution, et stratégies
commerciales, Commerce internationale et marketing, Management, sciences
économiques, gestion de ressources
humaines, marketing et communication
|
Baccalauréat Technologique, Scientifique et Economique
|
Lettres-Sciences Humaines
|
Lettres modernes, sociologie, anthropologie,
psychologie, philosophie, science du langage,
Géographie, Sciences politiques,
Langues étrangères appliquées, Sciences sociales,
Histoire et Archéologie,
|
Baccalauréat Littéraire et Economique
|
Droit et Sciences Juridiques
|
Droit public et privé, Droit des affaires et
fiscalité, Carrières juridiques, Notariat
|
Baccalauréat Littéraire et Economique
|
Source : Site officiel de l'ANBG, 2023.
Les tableaux montrent que l'émigration scolaire des
étudiants boursiers est codifiée par une politique d'orientation
même s'il est difficile d'affirmer que cette politique obéit
à une stratégie. Il y a certes des filières qui figurent
comme prioritaires ou secondaires pour l'État, mais cela ne suffit pas
pour que l'on parle de stratégie car la stratégie renvoie
à la manière d'élaborer, de diriger et de coordonner des
plans d'actions afin d'aboutir à un objectif déterminé et
programmé sur le court, le moyen ou le long terme.
75
L'État devrait donc se fixer de réels objectifs.
Le premier d'entre eux serait d'étendre sa stratégie à
l'enseignement secondaire. Penser à une stratégie de formation de
l'émigration scolaire sans gérer le rapport entre le nombre
d'élèves formés dans les sciences et celui formé
dans les séries littéraires, c'est agir de manière
spontanée. Résoudre l'inadéquation entre le nombre de
scientifiques formé et celui des littéraires serait un pas vers
une vision plus construite. Aussi, l'État devrait fixer des quotas de
personnes à former dans les secteurs qu'il estime stratégique, de
même qu'il devrait préparer un cadre permettant à ceux qui
sont formés de mettre en valeur leurs connaissances.
En outre, il faut souligner que la politique d'orientation de
l'État est restreinte, c'est-à-dire qu'il n'applique pas à
tous les émigrants scolaires les mêmes mesures d'encadrement. De
ce fait, il arrive que certains choix de formation des étudiants
gabonais à l'étranger s'écartent des filières dites
prioritaires ou secondaires de l'État. Il serait judicieux de mettre en
place une plateforme globale d'orientation prenant en compte les
étudiants boursiers et non boursiers.
In fine, le domaine scolaire peut être source
de puissance si et seulement s'il bénéficie d'un réel
investissement des autorités étatiques. Par des actions
coordonnées et structurées, il peut engendrer de meilleurs
résultats sur la formation, les projets de développement et la
vie socio-économique. Pour cela, l'émigration scolaire doit
suivre une stratégie efficace de l'État.
4.2. Réflexion autour de la
nécessité pour le Gabon d'améliorer son système
éducatif
Le développement de la scolarisation a
débuté au Gabon dès l'époque précoloniale
avec « la création en 1844, des premières écoles
par les missions évangéliques américaines, puis par la
Société des Missions évangéliques de
Paris154 ». Mais l'école comme institution a fait
son apparition au moment de la colonisation française. Elle est donc le
résultat d'une transplantation du système éducatif
français. Touchée par plusieurs maux, son développement
est remis brutalement en cause au cours de la période1980-1985 par la
crise économique et financière qui a secoué l'ensemble des
pays africains. « Cette crise va entrainer un recul de la
scolarisation et elle aura pour conséquence l'intervention accrue des
bailleurs de fonds qui tenteront par des aides financières d'impacter
les politiques d'éducation des pays
africains155».
Face à cela, d'importantes conférences
internationales sur l'éducation ont eu lieu au cours de ces
années. Ces rencontres qui font office « d'agendas
internationaux pour
154Mesmin-Noël SOUMAHO, 2004. Op. Cit,
p.48.
155 Marie-France LANGE, 2006. « École et
mondialisation », Cahiers d'études africaines, p146 (En
ligne). Article disponible sur URL :
http://
www.journals.openedition.org/etudesafricaines/194
76
l'éducation156» cadrent avec
le processus de « mondialisation qui marque la mise en place d'un
nouveau système de domination fondé sur l'imposition de la
logique de marché à toutes les sphères de la
société (économique, sociale, politique, culturelle,
éducative...)157 ». A cet effet, à travers
les aides publiques au développement de certaines organisations
internationales (ONU, Banque Mondiale, etc.), on va assister à la
production et la diffusion de plusieurs nouvelles normes scolaires d'essence
néolibérale à l'instar de celle du capital humain. Cette
théorie qui est mise en évidence dans le PSGE, cadre avec
« un processus de globalisation qui contribue à une certaine
forme de standardisation des politiques éducatives au niveau
mondial158 ».
4.2.1 L'école gabonaise, un aspect de la
souveraineté nationale
L'émigration scolaire évoque l'idée de
mouvement, tout en renvoyant aux notions d'éducation et de formation. Ce
terme est étroitement rattaché aux concepts de puissance et de
souveraineté. Du latin « superus » qui veut dire
« dessus », la souveraineté désigne
initialement « l'exercice du pouvoir sur une zone géographique
et sa population159». Elle est considérée en
droit comme étant la « qualité de l'État de
n'être obligé ou déterminé que par sa propre
volonté, dans les limites du principe supérieur du droit, et
conformément au but qu'il est appelé à
réaliser160 ». D'autres auteurs comme Stephen
KRASNER voient dans ce concept deux idées principales :
l'autorité et le contrôle. Mais, la souveraineté sous-tend
également l'idée d'autonomie et d'indépendance,
c'est-à-dire la capacité à dépendre d'abord de soi
et de n'être contraint par rien d'extérieur.
Le Gabon, « au sortir de
l'indépendance en 1960, les finalités assignées par les
pouvoirs publics à l'enseignement convergent vers l'idée d'une
éducation pour le développement économique et
social161 ». Mais, bâti sur des bases pas
suffisamment endogènes, il n'y a pas eu une «
décolonialité éducative162 ». De
même, en raison du malaise
156
https://www.cairn.info/quelle-coherence-pour-l-education-en-afrique--9782804189471.htm
157Marie-France LANGE, 2006. Op cit, p.43.
158Hhttps://
corafrika.org/chapitres/souverainete-educative-des-pays-africains-linfluence-de-la-france-a-travers-le-pole-de-dakar/
159Le blog Juridique, 2022. Quelles sont les
limites de la souveraineté ? Cours de Droit. URL :
https://www.doc-du-juriste.com/blog/conseils-juridiques/quelles-limites-souverainete-05-12-2022.html
160Idem
161Mesmin-Noël SOUMAHO, 2004. «
Éducation », In Atlas de l'Afrique : Gabon,
Éditions J.A, p48.
162Cheikh FAYE, 2021. « Souveraineté
éducative des pays africains : l'influence de la France à travers
le Pôle de Dakar », in Kously LAMKO, Amy NIANG, Ndongo Samba. SYLLA,
Lionel ZEVOUNOU (dir.), De Brazzaville À Montpellier. Regards critiques
sur le néocolonialisme français. Collectif pour le Renouveau
Africain - CORA Éditions, Dakar, p.147 (en
ligne). Disponible sur URL :
77
auquel elle est confrontée, l'école gabonaise
n'arrive toujours pas à engendrer le développement, ceci
malgré la tenue des états généraux de
l'éducation (1983 et 2010) ainsi que la création de task-force
sur l'éducation en 2018. Au regard de cela, la formation au niveau local
se trouve sinistrée.
Face à cela, le Gabon est tenu de composer avec les
pays étrangers pour répondre aux besoins éducatifs de ses
apprenants. Pourtant, « on dit bien éducation nationale comme
on dit défense nationale163 ». L'éducation
est un aspect important de la souveraineté d'un État. Dans cette
mesure, il conviendrait à l'État gabonais de mettre en place, sur
le plan local, les conditions d'une école souveraine. Ces conditions
pourraient s'appuyer sur deux formes d'autonomisations : l'autonomisation
structurelle et l'autonomisation substantielle.
L'autonomisation structurelle peut renvoyer à un
processus au cours duquel l'État sort affranchi d'une situation de
sujétion. Dans le cas de notre sujet, il s'agit de sortir de la
dépendance envers les pays d'émigration scolaire des
étudiants gabonais. L'autonomisation structurelle viserait à
atteindre l'autosuffisance infrastructurelle au niveau postsecondaire qui
passerait par la réfection des structures de formation existantes et la
construction de nouvelles structures de formation. Concrètement, il
conviendrait de « réaménager et agrandir les 3
universités publiques existantes sur le territoire et relancer les
projets de construction d'universités à Port-Gentil, Mouila et
Oyem où pourraient être créées de nouvelles
filières professionnelles164». Ainsi, la
création de plusieurs pôles académiques sur
l'étendue du territoire aura un impact sur la mobilité
académique locale. Elle contribuera aussi à la redistribution des
apprenants vers l'hinterland qui souffre depuis des années d'un
dépeuplement.
L'autonomisation substantielle peut-être perçue
comme un processus idéologique d'émancipation dans les choix
fondamentaux qu'un État s'est donné en matière
d'éducation. « Ces choix visent à construire une
identité académique locale en conformité avec les valeurs
constituant l'âme de la société
indexée165 ». Il est bien connu, «
l'école instruisait avant-hier ; depuis hier on lui demande
d'éduquer ; aujourd'hui sa mission se limiterait à
déverser les jeunes dans le monde du travail166».
L'autonomisation substantielle peut se faire par la restructuration des
contenus des programmes et contenus d'enseignements, la mise en place
https://corafrika.org/chapitres/souverainete-educative-des-pays-africains-linfluence-de-la-france-a-travers-le-pole-de-dakar/
163Serge LOUNGOU, 2021. Op. Cit, p.12.
164
https://www.mays-mouissi.com/2018/08/24/education-quelles-solutions-pour-sortir-lecole-gabonaise-du-marasme/
165
Https://cahigec.e-monsite.com/pages/espace-libre-propos/l-ecole-au-gabon-la-crise-du-sens.html
166Idem
78
d'un système de formation hybride, flexible entre une
éducation traditionnelle et une éducation moderne. Cela permettra
aux apprenants d'être sensible aux valeurs universelles de l'enseignement
et prompt à l'acquisition des valeurs traditionnelles.
4.2.2. Les avantages d'une formation locale de
qualité au niveau postsecondaire
Au Gabon, le système éducatif est
hiérarchisé en quatre niveaux distincts que sont l'enseignement
préscolaire, l'enseignement primaire, l'enseignement secondaire et
l'enseignement supérieur. Ce dernier regroupe les enseignements
généraux, techniques et professionnels. Pour comprendre les
avantages que pourrait engendrer la mise en place de meilleures conditions
d'apprentissage au niveau postsecondaire, il faudrait rappeler les fonctions
des établissements qui composent ce niveau de formation. Les
établissements d'enseignement supérieur ont les fonctions
d'éducation, de formation et de développement de la recherche. Au
regard de ces attributs, ces établissements seraient des cadres pour les
idées nouvelles et favoriseraient l'innovation et la recherche. De
même, tout en agissant sur les hommes par l'acquisition des
qualités et compétences, ils ont un impact sur les
différents secteurs de vie d'un pays.
S'agissant du Gabon, l'amélioration des conditions
d'apprentissage au niveau postsecondaire pourrait jouer sur la qualité
de ses structures d'apprentissages. Dans un tel cadre, le Gabon
réduirait les départs de ses étudiants et sortirait du
rang dévaluant de pays « pourvoyeur de matière
première intellectuelle ». Par ailleurs, sans véritablement
représenter un espace où converge d'importants mouvements
d'étudiants, le Gabon reste sevré de l'apport que pourrait
représenter l'accueil d'étudiants étrangers. A cet
égard, l'amélioration des conditions d'apprentissage dans
l'enseignement supérieur au niveau local peut avoir un écho
favorable sur l'attractivité de cet espace. En bénéficiant
d'une telle attractivité, le Gabon pourrait répondre au rapport
de force et à la compétitivité des pays étrangers
dans le domaine scolaire. Aussi, en devenant un pays d'accueil, le Gabon
engrangerait des ressources économiques non négligeables puisque
de nombreuses études à l'instar de celle de Campus France portant
sur « l'impact économique des étudiants internationaux
en France167 » révèlent l'importance du
phénomène de la mobilité entrante d'étudiants
étrangers sur l'économie.
167 Campus France, 2022. L'impact économique des
étudiants internationaux.
URL :
https://ressources.campusfrance.org/publications/observatoire/fr/impact_economique_etudiants_internatio
naux fr
79
Aussi, l'impact des universités sur l'économie
locale repose sur la fonction de consommation. En effet, la présence
d'étudiants et du personnel encadrant sur un territoire permet à
la zone considérée de compter une part élevée de
jeunes et donc de personnes qui vont consommer des biens et des services sur le
territoire. Elle participe au développement d'une économie
transversale autour des établissements d'enseignements supérieurs
construits pour l'accueil des étudiants. La figure ci-dessous montre
quelques activités générées par l'implantation des
établissements d'enseignement supérieurs.
Figure 2: Quelques activités transversales
générées par l'implantation d'un
établissement d'enseignement supérieur

Source : Rapport Campus France, 2022.
Cette figure présente les activités connexes
à l'implantation d'un établissement d'enseignement
supérieur dans un espace. Ces activités sont en liées
à la fonction de consommation des personnes présentes dans les
sites de construction des établissements.
Au final, en « consacrant des efforts
budgétaires substantiels à la recherche physique, technologique,
médicale, spatiale et universitaire de façon
générale privilégie clairement un plus en matière
de ressources et, in fine, de puissance potentielle168». A
travers la recherche, les établissements supérieurs agissent sur
l'économie locale à travers leurs fonctions d'éducation,
de formation et de développement des synergies de recherche et de
développement avec les entreprises. Aussi, ces établissements
agissent comme moteur de l'économie tant au niveau de sa consommation
brute (étudiants et personnel inclus) que de sa contribution à
l'amélioration du capital humain.
168Frédéric ENCEL, 2022. Op
cit, p108
80
CONCLUSION GÉNÉRALE
81
Parvenu au terme de ce travail, les principaux objectifs de
cette recherche étaient d'analyser la géographie, les facteurs et
les enjeux de l'émigration scolaire gabonaise. Il ressort des principaux
résultats obtenus au cours de nos enquêtes, que les
étudiants gabonais sont disséminés à travers
l'Afrique, l'Amérique, l'Asie et l'Europe. De même, le choix du
lieu d'orientation peut dépendre des offres de bourse, des coûts
des formations à l'étranger, de la condition sociale des parents,
de la langue, de la distance entre le pays de départ et le pays
d'arrivé, de la réputation du pays d'accueil en termes de
formation.
Aussi, l'émigration des étudiants gabonais est
liée à un phénomène de répulsion
découlant de la crise structurelle et conjoncturelle qui sévit
l'école gabonaise. En dehors de cela, nous avons montré que
l'attractivité géographique, socioculturelle et infrastructurelle
des pays étrangers pouvait expliquer la dynamique de cette
mobilité.
En outre, les enjeux socioéconomiques,
géopolitiques, sécuritaires et culturels de l'émigration
scolaire des étudiants gabonais, ont un effet direct, sur les finances
de l'Etat ainsi que sur celles des familles qui ont des enfants
émigrés. En plus, ils exposent la dépendance du Gabon face
aux pays d'accueil de ses étudiants. De même, les pays d'accueil
ont un impact sur la personnalité voir l'identité des
émigrants et sont source d'acculturation.
Le chapitre 4, a été axé sur la notion de
puissance et son rapport avec le domaine scolaire. Dans celui-ci, nous avons
montré que l'éducation constitue un aspect de la
souveraineté et un levier indispensable à la transformation
sociale, économique, industrielle d'un pays. Pour tirer profit des
effets de l'éducation, le Gabon à un intérêt
particulier à améliorer qualitativement et quantitativement ses
infrastructures et son offre de formation au niveau postsecondaire.
Au terme de ce travail, notons que les trois (3)
hypothèses émises au début de cette analyse ont
été vérifiées. La première hypothèse
(les grèves répétitives dans les universités
publiques gabonaises, le déficit et la vétusté des
infrastructures, la faiblesse de l'offre de formation, la mondialisation, les
effets des médias et des NTIC, favorisent l'émigration scolaire
au Gabon) est confirmée. Toutefois, il faut ajouter que les salons
internationaux d'orientation, les agences d'accompagnement encouragent les
départs massifs des étudiants gabonais à
l'étranger. La seconde hypothèse (le principal espace d'accueil
des émigrés scolaires gabonais est le continent africain. De
même, les destinations des étudiants gabonais sont en grande
partie disséminées à travers l'Afrique) est en partie
confirmée. Dans le corps de notre travail nous avons vu que l'Europe est
le continent vers lequel convergent la majorité des étudiants
gabonais. Même si la France constitue la destination la plus
sollicitée par les étudiants gabonais, l'Afrique, avec seize (16)
pays d'accueils est l'espace qui a le plus de
82
destinations d'arrivées. Parmi ces destinations on peut
hiérarchiquement citer : le Maroc, la Tunisie, l'Afrique du Sud, le
Ghana, le Sénégal, le Cameroun. De même, la
troisième hypothèse (Dans la mesure où elle impacte la
société sous les plans économique, politique, social et
culturel, l'émigration scolaire comporte des enjeux
socioéconomiques, géopolitiques, sécuritaires et
culturels) a été vérifiée. L'émigration
scolaire des étudiants représente sous son volet
socioéconomique, un facteur de dépense pour l'Etat que pour les
familles des émigrants. Sur le plan culturel, ce mouvement de population
est source d'acculturation et d'altération identitaire. En plus,
l'émigration scolaire marque la dépendance du Gabon face aux pays
d'accueils de ses ressortissants et cristallise un enjeu sécuritaire
après les décès de plusieurs étudiants gabonais
à l'étranger.
Si cette recherche a contribué à mieux
comprendre les enjeux de l'émigration scolaire au Gabon, elle
n'épuise pas toutes les questions ayant trait à
l'expérience des émigrés scolaire gabonais. Comme on l'a
vu, les problématiques du retour et du non-retour constituent des
questions importantes d'analyse de la mobilité des étudiants qui
restent peu étudiées. Dans un contexte d'austérité,
caractérisé depuis 2018 par un gel de recrutement dans
l'administration gabonaise, traiter de cette problématique participerait
à l'approfondissement de ce travail sur l'émigration scolaire,
d'autant plus que le chômage est un des catalyseurs du non-retour.
Partant de cela, on peut s'interroger sur les perspectives de retour et de non
retour des étudiants gabonais à l'issue de leur formation
à l'étranger.
83
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comment faire ? URL :
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de la puissance des États ? Disponible sur URL :
https://www.vie-publique.fr/fiches/38150-quels-sont-les-elements-de-la-puissance-des-etats
.
92
ANNEXES

93
Annexe1 : Questionnaire utilisé pour le travail
de terrain

94
95

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96
97


98

99
Annexe2 : Guide d'entretien utilisé
100
Annexe3 : Aperçu de difficultés
rencontrées dans la récolte de données

101
TABLE DES ILLUSTRATIONS
102
Liste des cartes :
Carte 1: Les flux migratoires économiques dans le monde en
2019 8
Carte 2: Les flux d'étudiants boursiers gabonais à
l'étranger en 2019 26
Liste des figures
Figure 1: Le Gabon dans la sphère académique
mondiale 65
Figure 2: Quelques activités transversales
générées par l'implantation d'un établissement
d'enseignement supérieur 79
Liste des graphiques
Graphique 1: Courbe d'évolution du nombre
d'étudiants gabonais en situation d'émigration
scolaire 16
Graphique 2: Courbe d'émigration scolaire des
étudiants boursiers gabonais 32
Graphique 3: Typologie des formations suivies par les
étudiants boursiers émigrés 34
Graphique 4: Les principaux facteurs de départ pour
étude à l'étranger 38
Liste des photos
Photo 1: Le besoin en éducation des Gabonais face aux
réalités locales et étrangères 41
Photo 2: Enseigne publicitaire 45
Photo 3: Les réseaux sociaux, un vecteur de
l'émigration scolaire au Gabon 46
Liste des tableaux
Tableau 1: Les cinq premiers pays d'émigration des
étudiants boursiers gabonais depuis 2015
27
Tableau 2: Effectifs des étudiants boursiers par continent
de 2014-2019 28
Tableau 3: Les critères d'attribution d'une bourse pour
l'étranger par l'ANBG 30
Tableau 4: Les déterminants du lieu d'émigration
scolaire selon les émigrants gabonais 31
103
Tableau 5: Répartition des émigrants scolaires
boursiers par sexe 33
Tableau 6: Évolution des étudiants boursiers
émigrés gabonais en fonction du niveau d'étude
35
Tableau 7: Situation sociale des parents
d'émigrés scolaire 35
Tableau 8: Les établissements privés 39
Tableau 9: Les établissements publics 40
Tableau 10: Quelque plateformes d'orientation et
d'accompagnement 47
Tableau 11: Les moyens d'insertion des émigrants
scolaire gabonais 50
Tableau 12: Dépenses de l'État en matière
de bourse au Gabon et à l'étranger entre 2011-2013
55 Tableau 13: Montants mensuel des allocations
d'études accordées aux étudiants gabonais au
Gabon et à l'étranger 56 Tableau 14:
Estimation du coût financier de l'émigration scolaire pour les
étudiants boursiers
Gabonais 57
Tableau 15: Avis des émigrants gabonais sur l'intention
de retour ou de non-retour 58
Tableau 16: Les causes de retour et de non-retour 59
Tableau 17: Estimation des dépenses selon le pays, le
niveau d'étude et l'établissement
d'accueil entre 2018-2021 60
Tableau 18: Avis des émigrés scolaire gabonais
sur leur attachement au pays d'accueil 67
Tableau 19: Les filières et les spatialités
prioritaires de l'État Gabonais 73
Tableau 20: Les filières de formation et
spécialités secondaire de l'Etat 74
104
TABLE DES MATIÈRES
105
DÉDICACE i
REMERCIEMENTS ii
LISTE DES SIGLES ET ABRÉVIATIONS iii
SOMMAIRE iv
INTRODUCTION GÉNÉRALE v
1. Justification du sujet 6
2. Problématiques et hypothèses de la recherche
14
3. Cadre méthodologique 17
4. Limites de l'étude et structure du mémoire
19
PREMIÈRE PARTIE 20
LA GÉOGRAPHIE DE L'ÉMIGRATION SCOLAIRE
AU GABON 20
CHAPITRE 1 : CARTOGRAPHIE DE L'ÉMIGRATION
SCOLAIRE GABONAISE 22
1.1. La géographie des émigrés scolaires
gabonais dans le monde 22
1.1.1. Histoire de l'émigration scolaire au Gabon 22
1.1.2. Le champ migratoire et les logiques de
répartitions des émigrants scolaires dans le monde 24
1.1.3. Les logiques de répartitions des
émigrants scolaires dans le monde 29
1.2. Les dynamiques migratoires des émigrants scolaires
gabonais à l'étranger 32
1.2.1. Caractéristiques et profils des émigrants
scolaires gabonais 33
1.2.2. Les inégalités sociales dans la
mobilité des émigrants scolaire 35
CHAPITRE 2 : LES MOBILES DE L'EMIGRATION SCOLAIRE AU
GABON 37
2.1. Les facteurs de l'exode scolaire des étudiants
gabonais à l'international 37
2.1.1. Les facteurs locaux de l'émigration scolaire au
Gabon 37
2.1.2. Les facteurs externes de l'émigration scolaire
au Gabon 42
2.2. Stratégies de captation des émigrants et
leur intégration à l'étranger 44
2.2.1 Système de captation de la ressource 44
2.2.1.1. Les outils de communication et leur impact 44
2.1.1.2. Les plateformes d'orientation et d'accompagnement
46
2.1.1.3. Les salons internationaux d'orientation 48
DEUXIÈME PARTIE : 52
L'ÉMIGRATION SCOLAIRE AU GABON : ENJEUX ET
ANALYSE 52
106
CHAPITRE 3 : L'ÉMIGRATION SCOLAIRE AU GABON : UN
FAIT MIGRATOIRE
AUX ENJEUX SOCIOÉCONOMIQUES ET
GÉOCULTURELS 54
3.1. Les enjeux socioéconomiques de l'émigration
scolaire 54
3.2. Les enjeux géopolitiques, sécuritaires et
culturels de l'émigration scolaire au Gabon 61
3.2.1.1. Le Gabon face à la compétitivité
étrangère 62
3.2.1.2. Les classements internationaux 63
3.2.1.3. Les critères des classements 63
CHAPITRE 4 : LE DOMAINE SCOLAIRE, UN ENJEU DE
SOFTPOWER 69
4.1. Puissance et domaine scolaire 69
4.2. Réflexion autour de la nécessité
pour le Gabon d'améliorer son système éducatif 75
CONCLUSION GÉNÉRALE 80
BIBLIOGRAPHIE 84
ANNEXES 92
TABLE DES ILLUSTRATIONS 101
TABLE DES MATIÈRES 104
107
RÉSUMÉ
L'émigration des étudiants est un
phénomène qui se pose depuis des décennies au Gabon. Pour
répondre à la demande locale (lié à l'augmentation
du nombre de nationaux souhaitant étudier chez eux) et dans le but de
répondre à la compétitivité étrangère
dans le domaine académique, les autorités gabonaises entreprirent
dans les années 1970, de grands travaux de construction, de plusieurs
établissements d'enseignement postsecondaires. Toutefois, malgré
ces réalisations et du fait d'une école gabonaise qui ne cesse de
s'étioler, l'émigration scolaire des étudiants se pose
avec acuité depuis quelques années. Entre enjeux
socioéconomiques, géopolitiques, sécuritaires et
culturels, les départs des étudiants à l'étranger
sont sujets à plusieurs représentations. Tout en transcrivant, la
place dévalorisante du Gabon dans la sphère académique
mondiale, cette tendance migratoire rappelle aux autorités dirigeantes,
la nécessité de valoriser le secteur éducatif qui
constitue un domaine de puissance et de souveraineté par excellence.
Mots-clés : Émigration - Gabon -
Enjeux - Éducation - Soft power
SUMARY
Student's emigration has been a problem in Gabon for decades.
To respond to local demand (linked to the increasing number of nationals
willing to study home) and in order to respond to foreign competition in the
academic field, the Gabonese authorities embarked on the construction on
several universities and colleges in the 1970s. However, in spite of these
achievements and because the Gabonese school system continues to decline, the
emigration of students has soared in recent years. Between socio-economic,
geopolitical, security and cultural issues, the departures of students abroad
is subject to a number of representations. While displaying Gabon's devalued
place in the global academic sphere, this migratory trend reminds those in
power of the need of enhance the value of education which is on of the
foundations of national glory and sovereignty.
Keywords: Emigration - Gabon - Issues -
Education - Soft power
|