Chapitre
troisième :
Fécondité et
croissance économique en RD Congo : analyse
économétrique
Ce chapitre confronte la théorie
développée au deuxième chapitre et les données
empiriques de la RD Congo pour vérifier nos hypothèses de
départ. Pour mieux appréhender les effets de long terme et ceux
de courte période, un des objectifs majeurs poursuivi dans ce travail,
nous avons fait recours à la cointégration et, donc, au
modèle à correction d'erreur. Tout d'abord, le modèle de
base est spécifié, les variables y contenues décrites et
la source des données précisées. En deuxième lieu,
l'ordre d'intégration des variables, et avec lui le test de
cointégration, est déterminé après que le
modèle d'analyse soit présenté. Il va sans dire que
l'examen de la stationnarité des variables est effectué à
ce niveau. Par la suite, les différentes variables sont décrites
et suivies dans le temps. Les différentes estimations et les tests qui
les sous-tendent sont effectués, avant que les divers résultats
trouvés ne fassent l'objet d'une interprétation et d'une
discussion.
III.1. Présentation du
modèle, mesure et description des variables
En analysant l'influence du taux de fécondité
sur la croissance économique, nous adoptons un point de vue purement
relativiste. Selon ce point de vue la trappe malthusienne se
vérifie à court terme ; il s'y observe une relation
négative entre les variables démographiques et les variables
économiques, la croissance tout singulièrement. A long terme, par
contre, la relation positive se substitue à l'influence négative.
Par ailleurs, en dehors du taux de fécondité, notre modèle
de base comprend d'autres variables traditionnelles, issues de la
théorie de la croissance endogène, qui sont censées
expliquer les mouvements de la production. C'est le cas du capital humain,
capital physique et capital technologique.
Le modèle de long terme s'écrit comme suit:
![](L-impact-de-taux-de-fcondit-sur-la-croissance-conomique-de-la-rdcongo-de-1997--20178.png)
Les variables explicatives sont donc les suivantes :
a) Le taux d'investissement (TI)
Mesuré par le rapport entre le volume des
investissements (privés et publics) et le produit intérieur brut,
la théorie économique suggère que l'accroissement de
l'effort de l'investissement se répercute positivement sur la croissance
économique, du fait qu'il est à la fois une composante de la
demande et accroît l'offre. Par effet de multiplication et effet de
capacité, l'investissement accroît le PIB. L'on s'attend de ce
fait à un coefficient positif.
b) La population active (POPA)
La production étant fonction de la quantité des
facteurs (capital et travail) utilisés, nous nous attendons à ce
que les variations de la croissance se fassent dans le même sens que
celles de la population active, aussi bien à court terme qu'à
long terme. Cette population est la somme de la population employée et
celle n'ayant pas un emploi, mais qui est à la recherche d'un emploi.
c) Le taux de fécondité (TF)
La revue de la littérature fournie ci-haut est pleine
de controverses pour ce qui est de l'influence des variables
démographiques sur la croissance économique. Le signe attendu,
comme dit ci-haut en nous appuyant sur le point de vue des
révisionnistes, est positif à long terme, mais négatif
dans la courte période.
Elément constitutif du capital technologique, les
dépenses engagées en recherche et développement ou leur
accroissement relatif as un effet positif, à l'instar de Paul Romer, sur
la croissance économique. Cet effet est immédiatement moins
significatif, mais plus substantiel dans la longue période.
d) Le taux d'alphabétisation des adultes
(TAA)
Indicateur du capital humain, le taux d'alphabétisation
des adultes a une influence positive sur la croissance économique quelle
que soit la période. Cependant, nous nous attendons à un
coefficient plus important dans la longue période que dans
l'immédiat.
Il s'agit, par ailleurs, des données chronologiques
à fréquence trimestrielle et ( ) sont les paramètres de la régression à estimer et
est le terme d'erreur captant l'influence sur le taux d'inflation de
toutes les variables non retenues dans le modèle spécifié.
Les signes attendus de nombreux paramètres sont décrits dans le
tableau ci-dessous :
A l'exception des taux d'alphabétisation des adultes,
du taux de fécondité et du niveau de la population active qui
sont tirés des rapports de la Banque mondiale, toutes les
données sont exprimées en millions de CDF et sont extraites des
rapports annuels de la Banque centrale du Congo. Ci-dessous la description et
l'évolution de ces différentes variables pendant la
période sous-étude.
Graphique N°1 : Evolution du PIB de la RD
Congo de 1990 à 2017
![](L-impact-de-taux-de-fcondit-sur-la-croissance-conomique-de-la-rdcongo-de-1997--201717.png)
Cette figure indique que le PIB de la RD Congo est croissance
dans la décennie 1990. Plusieurs situations peuvent expliquer une telle
tendance. Cette période est caractérisée par des pillages,
des guerres (plus précisément la guerre de libération de
1997) qui détériorent considérablement le tissu
économique du pays, en constituant un obstacle pour les investisseurs
tant nationaux qu'étrangers. A partir de 2000, le pays renoue avec la
croissance économique avec un nouveau gouvernement issu des accords de
Sun City. L'expansion de l'activité économique est
caractéristique de cette période ; expansion qui n'occulte
pas tout de même des récessions dues aux chocs exogènes.
L'on peut voir une baisse du PIB en 2009 et 2015, à la suite
respectivement de la crise immobilière qui a commencé aux USA
pour se répandre, par la suite, sur le reste du monde ; et la chute
des cours de produits de base baissant considérablement les recettes
d'exportations du pays au point qu'une loi de finances rectificative est
votée en 2015.
Graphique N°2 : Evolution du taux de
fécondité de 1990 à 2017
![](L-impact-de-taux-de-fcondit-sur-la-croissance-conomique-de-la-rdcongo-de-1997--201718.png)
Cette figure traduit un mouvement de baisse de la
fécondité des femmes congolaises au fur et à mesure que
les années passent. L'on est de ce fait passé de près de 7
enfants par femme à l'âge de procréation à environ 6
enfants. Le développement des méthodes de contraception avec la
médecine moderne couplée à la généralisation
des plannings de naissances peuvent expliquer une telle tendance.
Graphique N°3 : Evolution du taux
d'investissement
![](L-impact-de-taux-de-fcondit-sur-la-croissance-conomique-de-la-rdcongo-de-1997--201719.png)
Cette figure indique combien le taux d'investissement,
investissements nationaux rapportés au PIB, fluctue au gré de la
conjoncture. Ce taux tout en restant inférieur à 30% du PIB, est
croissant à partir de 2000. La politique volontariste visant à
réhabiliter les infrastructures diverses détruites par les
troubles de la décennie 1990 et une politique monétaire
accommodante basée sur des bas taux expliquent en partie cette allure
ascendante. Cette évolution n'occulte tout de même pas les
périodes de retournement de la tendance lié à des chocs
aussi bien exogènes qu'endogènes.
Graphique N°4 : Evolution des dépenses en
recherche et développement
![](L-impact-de-taux-de-fcondit-sur-la-croissance-conomique-de-la-rdcongo-de-1997--201720.png)
La lecture de cette figure indique que les dépenses en
recherche et développement sont relativement faibles jusqu'en 2002. Un
regain d'intérêt s'observe à partir de 2003 pour atteindre
un niveau plus élevé en 2006 et chuter par la suite. Une
précision mérite d'être faite. Ces dépenses sont
celles engagées par le Ministère de tutelle, sans que la
distinction entre les dépenses affectées à la promotion de
recherche et développement soient séparées de celles
liées uniquement au fonctionnement dudit ministère. Une telle
scission serait à même d'améliorer la qualité des
analyses.
Graphique N°5 : Evolution de la population active
![](L-impact-de-taux-de-fcondit-sur-la-croissance-conomique-de-la-rdcongo-de-1997--201721.png)
A l'instar de bien d'indicateurs économiques et sociaux
qui sont au rouge durant la décennie 1990, le pourcentage de la
population active dans la population totale est en baisse pendant cette
période, au point d'être en-dessous de 10%. Par la suite, la
fraction des individus à même de travailler est en hausse
environnant parfois 60% en 2015.
Graphique N°6 : Evolution du taux
d'alphabétisation des adultes
![](L-impact-de-taux-de-fcondit-sur-la-croissance-conomique-de-la-rdcongo-de-1997--201722.png)
La recherche de l'amélioration du capital physique et
technologique n'implique pas la réduction des efforts dans
l'amélioration du capital humain. Ce graphique indique que le taux
d'alphabétisation des adultes est en constante progression. Partant de
20% dans les années 1990, ce taux est actuellement au-dessus de 70%.
Après avoir décrit très brièvement
les variables d'intérêt, analysons de manière statistique
leur stationnarité et, partant, leur degré
d'intégration.
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