FACULTE DE DROIT ET SCIENCES POLITIQUES DE NANTES
& AGENCE UNIVERSITAIRE DE LA
FRANCOPHONIE
__________________________
ANNEE UNIVERSITAIRE 2015-2016
LA DETENTION PREVENTIVE ET LA PROTECTION DES DROITS DE
L'HOMME AU TOGO
MEMOIRE DE RECHERCHE
MASTER 2 SPECIALITE DROIT INTERNATIONAL ET
EUROPEEN
DES DROITS FONDAMENTAUX
Présenté par :
Lar KOMBATE
Tuteur :
Dr. Martial JEUGUE DOUNGUE
Enseignant - Chercheur, Expert en Droits de l'Homme et Droit
Humanitaire
Mai 2016
DEDICACE
Je dédie le présent mémoire :
ü A tous, femmes, hommes et enfants détenus dont
les droits sont violés ;
ü A tous ceux qui ont perdu leur vie ou emploi au cours
de la détention préventive ;
ü A tous ceux qui mènent une lutte acharnée
pour la jouissance effective des droits et libertés fondamentaux des
détenus préventifs dans le monde.
REMERCIEMENTS
Je voudrais ici exprimer ma sincère gratitude à
mon tuteur de mémoire, le Docteur Martial JEUGUE DOUNGUE, pour m'avoir
assuré un enrichissant et indéfectible encadrement.
Toute ma reconnaissance au collège des enseignants et
à l'administration de l'Université de Nantes, pour leur
disponibilité et leurs recommandations, ainsi qu'à l'Agence
Universitaire de la Francophonie pour l'opportunité qu'elle m'a offerte
de poursuivre des études juridiques à distance.
Merci aussi à tout le corps judiciaire et
pénitentiaire du Togo, aux détenus, pour le temps
consacré aux entretiens et pour leurs précieuses suggestions.
Toute ma sympathie aux autres lauréats de la promotion
Master 2 Droit International et Européen des Droits Fondamentaux de
l'Université de Nantes, année 2015 - 2016.
A mes enfants KOMBATE Youmandaan et KOMBATE Damnan et à
mon épouse AKARA Massalo, pour l'amour et le réconfort.
A mesamis, aux familles KOMBATE, KAMBOURE et à tout le
personnel du Tribunal de Première Instance d'Atakpamé pour leurs
encouragements.
A tous ceux qui ont contribué, de près ou de
loin à la réalisation de ce travail, je dis merci.
LISTE DES SIGLES ET
ABBREVIATIONS
AL. : Alinéa
ART. : Article
CEDEAO : Communauté Economiquedes
Etats de l'Afrique de l'Ouest
CEDH : Convention Européenne des
Droits de l'Homme
CPP: Code de Procédure
Pénale
CNDH : Commission Nationale des Droits
de l'Homme
ED. : Edition
EPU : Examen Périodique
Universel
DUDH : Déclaration Universelle
des Droits de l'Homme
HCDH : Haut-Commissariat des Nations
Unies aux Droits de l'Homme
IDH : Indicateur de Développement
Humain
INDH : Institutions Nationales des
Droits de l'Homme
J.O.R.T : Journal Officiel de la
République Togolaise
LGDJ : Librairie
Générale de Droit et de Jurisprudence
NCP : Nouveau Code Pénal
NCPP : Nouveau Code de Procédure
Pénale
ODDH : Organisations de Défense
des Droits de l'Homme
OIF : Organisation Internationale de la
Francophonie
ONG: Organisations Non Gouvernementales
ONU : Organisation des Nations Unies
OSC : Organisation de la
Société Civile
PARA. : Paragraphe
PAUSEP: Projet d'Appui d'Urgence au Secteur
Pénitentiaire
PIDCP: Pacte International relatifs aux
Droits Civils et Politiques
PIDESC: Pacte international relatif aux
Droits Economiques, Sociaux et Culturels
PNMJ: Programme National de Modernisation de
la Justice
PNUD : Programme des Nations Unies pour
le Développement
PUF : Presses Universitaires de
France
SCAPE : Stratégie de Croissance
Accélérée et de Promotion de l'Emploi
UE : Union Européenne
UNICEF : Fonds des Nations Unies pour
l'Enfance
UNESCO : Organisation des Nations Unies pour
l'Education, la Science et la Culture
RESUME
Le Togo est partie à nombreux instruments
internationaux relatifs aux droits de l'homme dans l'administration de la
justice pénale. Des mécanismes et institutions internationaux et
nationaux ont été mis en place ou renforcés afin d'assurer
l'application de ces instruments. Des réformes judiciaires et
pénitentiaires ont également été entreprises.
Malgré les progrès réalisés, le cadre légal
national demeure lacunaire et peu appliqué. Les juridictions et prisons
civiles sont toujours confrontées à des dysfonctionnements
empêchant une prise en charge effective des détenus. Les
mécanismes nationaux présentent des défaillances qui ne
permettent pas de lutter contre les violations récurrentes des droits et
libertés des détenus préventifs. Pour garantir
l'effectivité de ces droits et libertés, il est urgent que l'Etat
se mobilise davantage. De même, l'intervention accrue des organisations
internationales et des organisations de la société civile
togolaise s'avèrent indispensable.
Mots clés :Détention
préventive, Droits de l'homme, Protection, Principe de la
présomptiond'innocence, Togo.
ABSTRACT
Togo is party to many international standards on human rights
relating to the administration of criminal justice. National and international
mechanisms and institutions have been set up or reinforced to ensure the
implementation of these instruments. Likewise judicial and penitentiary reforms
have been undertaken. In spite of some advancement made therein, the national
legal framework is still faulty and poorly applied. Courts and civil prisons
continue to face malfunctions which hinder an effective management of
prisoners. National mechanisms embody deficiencies that do not help fight
against recurrent violations of pretrial detainees' rights and freedoms. To
ensure the effectiveness of these rights and freedoms, there is an urgent need
for the government to be mobilized. Similarly, the increased involvement of
international organizations and organizations of Togolese civil society is
essential.
Keywords: Pre-trail detention, Human rights, Principle
of the presumption of innocence, Togo.
SOMMAIRE
INTRODUCTION GENERALE
07
PREMIERE
PARTIE : UNE PROTECTION LIMITEE DES DROITS DE L'HOMME AU COEUR DE LA
DETENTION PREVENTIVE AU TOGO 27
CHAPITRE
I : UNE PROTECTION MITIGEE DES DROITS ET LIBERTES CIVILS ET POLITIQUES
DES DETENUS PREVENTIFS AU TOGO 29
Section 1: Les limites de la protection des droits
et libertés civils et politiques des détenus
préventifs 29
Section 2 : Les violations récurrentes
des droits et libertés civils et politiques des détenus
préventifs au Togo 35
CHAPITRE
II : UNE PRECARITE DE PRISE EN CHARGE DES DROITS ECONOMIQUES, SOCIAUX ET
CULTURELS DES DETENUS PREVENTIFS AU TOGO 43
Section 1 : Les défaillances des
établissements pénitentiaires et des mécanismes de
contrôle de prise en charge des détenus 44
Section 2: Une prise en charge insuffisante des
droits économiques, sociaux et culturels des détenus
préventifs 50
DEUXIEME
PARTIE : UNE PROTECTION PERFECTIBLE DES DROITS DE L'HOMME AU COEUR DE LA
DETENTION PREVENTIVE AU TOGO 58
CHAPITRE
I : L'URGENCE DE LA MOBILISATION DE L'ETAT TOGOLAIS EN FAVEUR DE LA
PROTECTION DES DROITS DES DETENUS PREVENTIFS 60
Section 1 : L'effectivité des
mécanismes de protection des droits de l'homme dans la phase
procédurale de la détention préventive 60
Section 2 : L'amélioration de la prise
en charge des droits économiques, sociaux et culturels 68
CHAPITRE
II : L'INTERVENTION ACCRUE DES ORGANISATIONS INTERNATIONALES ET DES
ORGANISATIONS DE LA SOCIETE CIVILE 76
Section 1 : L'intervention accrue des
institutions internationales et des partenaires en développement
2
Section 2 : L'intervention accrue des
organisations de la société civile et des Organisations de
défense des droits de l'homme
83
CONCLUSION GENERALE
90
BIBLIOGRAPHIE
95
TABLE DES MATIERES
103
INTRODUCTION
GENERALE
La protection de la dignité humaine au cours d'une
procédure pénale est l'un des fondements de tout système
démocratique respectueux des droits de l'homme1(*). Ainsi, un Etat de
droit n'est-il pas seulement un Etat qui garantit la prééminence
du droit, c'est aussi un Etat qui assure la protection des personnes et
notamment celles impliquées dans des affaires pénales. L'un des
principes fondamentaux en droit pénal, garantissant le respect des
droits fondamentaux des personnes soupçonnées d'avoir commis ou
tenté de commettre une infraction, est la présomption
d'innocence2(*). Ce principe dispose que «
tout prévenu ou accusé est présumé innocent
jusqu'à ce que sa culpabilité ait été
établie à la suite d'un procès qui lui offre les garanties
indispensables à sa défense »3(*). Selon l'article 14,
paragraphe (PARA.) 2 du Pacte International relatifs auxDroitsCivils et
Politiques (PIDCP)4(*) : « toute personne
accusée d'une infraction pénale est présumée
innocente jusqu'à ce que sa culpabilité ait été
légalement établie». La présomption d'innocence
implique en principe, qu'à ce stade les mesures privatives de
liberté ne devaient pas être prises contre le prévenu ou
l'accusé. Mais pour les nécessités de l'instruction et des
mesures de sûreté, toutes les personnes contre lesquelles
pèsent des charges suffisantes susceptibles de motiver leur
culpabilité peuvent être placées en détention
préventive avant jugement.
Mesure grave, mais nécessaire, la détention
préventive doit faire l'objet d'une attention particulière, car
les abus ou atteintes en la matière ont des répercussions
néfastes sur la protection des droits et libertés fondamentaux
des détenus préventifs.
De nos jours, le souci majeur de la Communauté
internationale est sans nul doute une protection efficace des droits de l'homme
dans l'administration de la justice. Ainsi, presque tous les Etats s'efforcent
de réglementer au mieux et de surveiller plus rigoureusement toutes les
mesures qui peuvent porter atteinte aux libertés et droits fondamentaux
au cours de la procédure pénale notamment la garde à vue
et la détention préventive.
Le Togo en tant qu'Etat membre des Nations
Unies5(*),
a fait d'énormes efforts pour introduire dans son droit positif des
normes et mécanismes internationaux et régionaux relatifs aux
droits économiques, sociaux, culturels, civils ou politiques dont t'il
a ratifiés.
La mise en application de ces mécanismes juridiques
nécessite l'intervention d'un grand nombre d'acteurs, l'apport de moyens
et expertises, lesquels concourent à garantir le respect des droits de
l'homme dans le contexte de la détention préventive. A ce titre,
on peut citer le pouvoir exécutif, le pouvoir législatif, les
Organisations non gouvernementales (ONG), la Communauté internationale,
les partenaires en développement et de coopération et bien
entendu le pouvoir judiciaire, notamment les magistrats, les avocats, greffiers
et le personnel de l'administration pénitentiaire. Chacun de ces acteurs
constitue un maillon important dans le processus de protection des droits
fondamentaux des détenus préventifs.
La présente étude analyse les normes
internationales de protection des droits de l'hommeenmatière de
détention préventive, ainsi que le cadre légal et la
pratique en la matière au Togo. Elle propose en outre une
évaluation sur la base de ces considérations juridiques afin de
mieux appréhender le degré d'effectivité des droits
fondamentaux des détenus préventifs. Aussi, «la
détention préventive et la protection des droits de l'homme au
Togo», tel est l'intitulé de la présente
étude.
L'introduction de notre études'articule autour
de trois parties : le contexte et la délimitation (I), le cadre (II) et
la conduite de l'étude (III).
1. I. CONTEXTE ET
DELIMITATION DE L'ETUDE
Dans cette partie, il sera abordé tour à
tour le contexte de l'étude (A) et sa
délimitation(B).
A. CONTEXTE DE
L'ETUDE
Les conditions de détention déplorables et
dégradables observées ces dernières années au Togo
sont consécutives à plusieurs facteurs tels que les
détentions préventives massives et prolongées, cause de la
surpopulation carcérale, à s'en tenir aux statistiques de
l'Administration pénitentiaire du Togo6(*).
Les conditions de détention actuelles laissentcroire
que l'inculpé ou le prévenu subit anticipativement la peine
encourue avant même sa condamnation. Cette situation aussi bien choquante
que révoltante heurte les principes de la présomption
d'innocence, de délais raisonnables, de procès équitables
pourtant prescrits par les instruments internationaux et régionaux
relatifs aux droits de l'homme ratifiés par le Togo.Montesquieu le
relevait déjà : « les peines, les dépenses, les
longueurs, les dangers mêmes de la justice sont le prix que chaque
citoyen donne pour sa liberté »7(*). Comme le dit souvent
« la procédure c'est la prudence, la trêve, la
réflexion. »
Conscient de l'ampleur des mauvaises conditions de
détention, du non-respect des garanties procédurales et de la
lenteur judiciaire ainsi que de leurs impacts, les autorités togolaises
ont initié depuis 2003 des réformes importantes en vue d'assainir
le secteur judiciaire8(*) et pénitentiaire.
Ces dysfonctionnements se justifient par certains
facteurs socio-politiques (1) et économiques (2) qui sont autant
d'obstacles au respect des droits fondamentaux des détenus
préventifs au Togo9(*).
1. Contexte
socio-politique
Longtemps condamné pour son déficit
démocratique, pour les violations des droits de l'Homme et des
libertés fondamentales par la Communauté internationale suite aux
troubles socio- politiques des années 1990 et 2005, le Togo a souscrit
depuis 2006 à plusieurs engagements internationaux et régionaux
afin de refaire son image et de regagner la confiance des opérateurs
économiques.10(*) Cette situation a eu un impact majeur sur
plusieurs aspects du développement économique et social.
Après une longue période d'isolement, marquée par
l'interruption de l'aide au développement et l'absence
d'investissements, l'Etat togolais s'est engagé en 2006 dans une
politique d'ouverture qui a permis la reprise de la coopération
politique et économique avec les partenaires internationaux, notamment
avec l'Union Européenne (UE). C'est dans cette optique que le pays a
signé en 2006 un accord de siège avec le Haut-Commissariat des
Nations Unies aux Droits de l'Homme (HCDH)11(*). La mission du HCDH
était de veiller à la promotion et au respect des droits de
l'homme, à l'instauration de la démocratie et de l'Etat de droit
en apportant à l'Etat togolais son expertise. Ainsi, le premier rapport
présenté en 2011 par le Togo dans le cadre de l'Examen
Périodique Universel (EPU) fait état d'un faible respect des
droits de l'homme dans l'administration de la justice, notamment aux textes
laconiques, aux conditions de détention et la lenteur des
procédures judiciaires, source de la surpopulation carcérale avec
comme corollaire la détérioration des conditions de
détention.
En dépit de l'adhésion du Togo aux conventions
internationales, régionales en matière de la protection et
promotion des droits de l'homme et malgré la mise en oeuvre des
programmes de réformes des administrations de la justice et
pénitentiaire, le régime de la détention préventive
prévu par le Code de Procédure Pénale (CPP) n'a pas connu
de réformes visant à le réajuster ou à le conformer
aux standards internationaux relatifs aux droits de l'homme dans
l'administration de la justice pénale.
L'usage systématique des mandats de dépôt
et mandats d'arrêt justifient les détentions provisoires de
longues durées et arbitraires.
Les détenus préventifs et les condamnés
définitifs partagent les mêmes cellules dans les prisons civiles.
Les conditions de détention ne respectent pas les règles minima
en la matière : ineffectivité de mesures alternatives
à la détention, manque de soins médicaux entrainant
parfois des pertes en vies humaines, surpopulation carcérale,
insuffisance des moyens de subsistance.
Cette situation n'est pas spécifiquement propre au
Togo. Les conditions de détention demeurent, presque partout en Afrique,
déplorables. Tel est, en effet, le constat fait à Kampala les 19,
20 et 21 septembre 1996 par cent trente-trois (133)
délégués venant de quarante-sept (47) pays dont quarante
(40) Etats africains impliqués dans les questions pénales et
pénitentiaires12(*). Après avoir relevé que dans
de nombreux pays d'Afrique, le taux de surpopulation dans les prisons avait
atteint des limites inhumaines, que l'alimentation étaitinsuffisante en
qualité et en quantité, que l'accès aux soins était
difficile, les délégués ont recommandé, «
que soient assurées aux détenus, des conditions de
détention compatibles avec la dignité inhérente à
la personne humaine».
Dans un souci de mise en oeuvre des recommandations de
mécanismes internationaux et institutions en matière de respect
des droits de l'homme dans l'administration de la justice, le Togo a entrepris
entre 2005 et 2010 un vaste Programme National de Modernisation de la Justice
(PNMJ). Cela a été possible grâce à l'appui du PNUD
et de l'UE.
Dix ans après la mise en oeuvre du PAUSEP et PNMJ, on
constate toujours un nombre pléthorique des détenus
préventifs qui sont en attente de jugement depuis plusieurs mois voire
plusieurs années. Selon un rapport établi en 2012 par
l'Inspection générale des services juridictionnels et
pénitentiaires, plus de 70% des détenus dans les prisons sont des
détenus préventifs. En matière criminelle, les
procédures durent au minimum 36 mois et peuvent aller jusqu'à
sept (7) ans13(*). Ce constat dans la mise en oeuvre de la
détention a très souvent des répercussions néfastes
sur le bien-être physique, mental et social du détenu. Cette
situation a longtemps alimenté des critiques des autorités
togolaises et des acteurs de la justice par la communauté
internationale. Les reproches formulés contre le régime de la
détention préventive en vigueur au Togo ont pouressentiels
caractéristiques : le défaut d'obligation de motiver les
décisions de placement en détention, l'usage abusif des titres de
détention, l'absence d'indemnisation des victimes de détention
abusive, la vétusté et à l'exiguïté des
prisons civiles qui ne permettent pas toujours le respect des droits des
prisonniers14(*). Cette situation déplorable n'a pas
laissé le pouvoir législatif togolais indifférent, a
visité plusieurs centres de détention15(*) du 11 au 14 novembre
2015 afin de s'imprégner des réalités.
2. 2. Contexte
économique
La situation économique du Togo est très
défavorable à la protection effective et efficiente des droits
fondamentaux des détenus préventifs. Pays pauvre très
endetté, le Togo a connu depuis les années 1990 jusqu'en 2005 des
troubles socio - politiques qui ont fortement freiné son processus de
développement et ont occasionné une rupture de l'aide
extérieure. La population togolaise était de 6 191 155 habitants
en 201016(*), avec un taux de croissance annuel moyen de
2,84%. Le Produit Intérieur Brut (PIB) est passé de 1 581,3
milliards de FCFA en 2010 (année de référence) à 2
076,6 milliards de FCFA en 2015, soit un PIB par habitant respectivement de
255 419 FCFA et de 291 583 FCFA. Malgré les progrès
réalisés (0,459 en 2012 -Rapport IDH 2013- soit une
amélioration de 0,007 par rapport à 2010), l'Indicateur de
Développement Humain (IDH) du Togo reste faible (159e rang
sur les 187 pays considérés). La pauvreté demeure
très élevée au Togo et concerne encore 58,7% de la
population en 2011 (SCAPE, août 2013) contre 61,7% en
200617(*). Du 166e rang en
2013 au 164e en 2014. Selon le rapport « Doing
Business » 2015, le Togo fait partie des dix économies du
monde dont le climat d'affaires s'est sensiblement amélioré. Il a
fait un bond de quinze places pour être classé à
149e dans le monde.18(*)
A l'heure actuelle, la croissance économique du Togo ne
permet pas de pallier à tous les maux dont souffre le secteur judiciaire
et pénitentiaire. La ligne budgétaire accordée au
Ministère de la Justice pour son fonctionnement est dérisoire.
Elle varie en moyenne entre 0,3 et 1 % du budget général. Les
réformes entreprises dans ce secteur avancent au ralenti ou restent
inachevées à cause de manque de financement. Les juridictions et
les prisons civiles ne disposent pas des moyens financiers et matériels
pour faire face aux besoins urgents dans le cadre de la détention
préventive. Le Ministère de la Justice fait toujours appel aux
partenaires en développement et de coopération pour le soutenir
dans ses différents programmes de modernisation de la justice
respectueuse des droits de l'homme en général et ceux des
détenus préventifs en particulier. Malgré les efforts
remarquables entrepris par les autorités togolaises, les droits
fondamentaux des détenus préventifs demeurent toujours
précaires.
Dans ce double contexte socio-politique et économique,
une réflexion sur la détention préventive et la protection
des droits de l'homme au Togo s'avère indispensable. Aussi, convient-il
de bien circonscrire ce sujet.
3. B. DELIMITATION DE
L'ETUDE
Pour mener à bien notre étude, une
délimitation doit être faite sur trois points essentiels :
matériel (1),temporel (2) et spatial (3).
4. 1.
Délimitation matérielle
Les droits fondamentaux des détenus préventifs
sont multiples. Ils portent sur certains aspects des garanties
procédurales, des conditions de détention et de traitement. Leur
exercice permet d'assurer un procès équitable respectant la
dignité humaine des détenus préventifs. Ces droits sont
méconnus par la majorité des togolais. Pour ces raisons, la
présente étude analyse la protection des droits civils,
politiques, économiques, sociaux et culturels des détenus
préventifs. Elle se fait sous l'angle de l'application effective des
instruments juridiques internationaux, régionaux relatifs à la
protection des droits de l'homme dans l'administration de la justice et de
l'analyse du cadre légalet institutionnel de la détention
préventive au Togo afin de dégager les forces et les faiblesses
des mécanismes nationaux de la détention préventive.
En somme, cette recherche nous permet d'évaluer
l'effectivité de la protection des droits de l'homme dans le contexte de
la détention préventive au Togo afin d'en déceler les
limites ou insuffisances pour envisager de possibles réformes. On a
recours à d'autres disciplines telles que les sciences sociales et le
droit comparé. Notre expérience professionnelle en tant que
greffiermepermet de mieux cerner les contours du sujet.La présente
étude ne prend pas en compte le régime de la garde à vue
et de la détention définitive.
5. 2.
Délimitation temporelle
Depuis son accession à la souveraineté nationale
le 27 avril 1960, le Togo a eu quatre constitutions19(*) et connu un nombre
important de lois.
Mais, l'année 199220(*) est celle qui marque
véritablement l'ère de la promotion et de la protection des
droits de l'homme. Ainsi, les différentes Conventions ratifiées
par le Togo font partie intégrante de la Constitution de 1992. Il faut
toutefois signaler que le Togo fait partie de l'un des tous premiers Etats
africains àcréer une Commission Nationale des Droits de l'Homme
(CNDH)21(*). Il vient d'effectuer une avancée
très remarquable avec l'adoption de la loi n°2O15-10 du 24 novembre
2015 portant Nouveau Code Pénal (NCP) au Togo qui a incorporé pas
moins de trente-huit (38) instruments internationaux relatifs aux droits de
l'homme.
La présente étude porte sur la situation
actuelle des droits fondamentaux des détenus préventifs à
l'heure de l'universalisation. Elle évalue l'arsenal juridiqueet
institutionnel de protection des droits de l'homme dans l'administration de la
justice pénale datant respectivement desannées1978,1983 et
201522(*).
6. 3.
Délimitation spatiale
Le sujet couvre tout le territoire togolais. Ce dernier
dispose de douze (12) prisons civiles et de trente-quatre (34) juridictions.
Toutes ces institutions seront prises en compte dans le cadre de ce travail. Ce
choix se justifie par l'ampleur des violations des droits fondamentaux des
détenus préventifs sur toute l'étendue du territoire
national. L'étude de l'arsenal juridique et de toutes les institutions
de la détention préventive permet donc de rendre amplement compte
du faible respect des droits fondamentaux des détenus préventifs
dans l'administration de la justice au Togo.
Après la précision du contexte et de la
délimitation du sujet, il convient de définir le cadre de cette
étude.
7. II. CADRE DE
L'ETUDE
Le cadre de l'étude est expliqué en
fonction de l'approche conceptuelle (A), de l'intérêt de
l'étude (B), de la problématique et des hypothèses
(C).
8. A. APPROCHE
CONCEPTUELLE
Les concepts à définir sont ceux de
détention préventive (1) et Droits de l'Homme(2).
9. 1.
Définition de la notion de détention préventive
Dans le cadre de cette étude, les terminologies
détention provisoire ou détention préventive sont des
synonymes et font apparaitre le caractère anormal et exceptionnel de la
détention avant le jugement. Les instruments juridiques internationaux
emploient le terme détention provisoire alors que le législateur
togolais a retenu l'expression détention préventive. Ainsi, les
deux termes seront utilisés tout au long de cette étude.
Mesure privative de liberté individuelle, la
détention préventive bien que prévue par le
législateur togolais n'a pas été définie. Pour
mieux cerner cette notion, il faut recourir à la doctrine
française dont le droit togolais s'inspire.
Pour l'opinion courante, la détention provisoire est
l'incarcération d'un prévenu dans une maison d'arrêt avant
son jugement.
Pour le Professeur Jean Pradel, la détention
provisoire s'entend comme l'incarcération de l'inculpé dans une
maison d'arrêt pendant tout ou partie de l'instruction
préparatoire23(*). Elle peut également être
définie comme «l'incarcération dans une maison
d'arrêt d'un individu inculpé de crime ou délit, avant le
prononcé du jugement24(*) ».
Au Togo, avant le 02 mars 1983, la détention
préventive était règlementée par le Code
d'instruction criminelle français, rendu applicable au Togo par
décret du 22 mai 1924. Mais à partir de mars 1983, la
détention provisoire sera consacrée par la loi n° 83 - 01 du
2 mars 1983 portant Code de procédure pénale au Togo. Le
législateur togolais tout comme son homologue français, qualifie
ainsi la détention provisoire de « mesure
exceptionnelle ».
En définitive, il convient de retenir que la
détention préventive est une mesure d'incarcération d'un
inculpé au cours de l'information judiciaire, ou d'un prévenu
dans le cadre de la procédure sommaire. C'est cette dernière
définition qui sera retenue pour la présente étude.
A partir de ces définitions, il ressort que la
détention préventive est une mesure provisoire, et en tant que
telle, elle ne saurait être décidée contre un
prévenu que si elle n'est indispensable. C'est-à-dire qu'elle
doit rester le seul moyen susceptible de faciliter la manifestation de la
vérité. Elle résulte souvent de la délivrance d'un
mandat de dépôt, d'arrêt ou ordonnance pris par une
autorité judiciaire à savoir le ministère public, un juge
d'instruction ou un magistrat du siège25(*).
Quid des droits de l'homme ?
10. 2. Définition de la notion de Droits de l'Homme
Le concept de droits de l'homme est une notion complexe et
diversifiée. Selon Frédéric Sudre, les droits de l'homme
sont : « des droits et facultés assurant la liberté et
la dignité de lapersonne humaine et bénéficiant de
garanties institutionnelles»26(*). C'est également «
l'ensemble de facultés et prérogatives considérées
comme appartenant naturellement à tout être humain dont le droit
public, notammentConstitutionnel, s'attache à imposer à l'Etat le
respect et la protection en conformité avec certains textes de
portée universelle »27(*).Dans le
cadre de ce travail, le concept des droits de l'Homme désigne l'ensemble
des droits fondamentaux inhérents à la personne poursuivie au
cours d'une procédure pénale. En effet, les droits de l'homme
véhiculent des valeurs qui ont une force obligatoire. Ces valeurs sont
entre autres : l'universalité,
l'inaliénabilité,l'indivisibilité,l'interdépendance,
la corrélation,la non-discrimination,l'égalité,la
participation, l'inclusion l'obligation de rendre compte et la primauté
du droit.
L'analyse de la définition et des principes des
droits de l'homme font ressortir que le droit international des droits de
l'homme a une portée générale et universelle. Lorsqu'un
Etat devient partie à un traité, le droit international l'oblige
à respecter, protéger et instaurer les droits de l'homme.
Respecter les droits de l'homme signifie que les Etats évitent
d'intervenir ou d'entraver l'exercice des droits de l'homme. Protéger
signifie que les Etats doivent défendre les individus et les groupes
contre les violations des droits de l'homme. Instaurer c'est-à-dire que
les Etats doivent prendre des mesures positives pour faciliter l'exercice des
droits fondamentaux de l'homme28(*).Les normes internationales
relatives aux droits de l'homme sont supranationales, et de ce fait s'imposent
dans l'ordre juridique interne.
11. B. INTERET DE L'ETUDE
Le thème de cette étude revêt
à la fois un intérêt social (1) et un intérêt
scientifique(2).
12. 1. Intérêt social
Du point de vue social, cette étude contribuera
modestement à promouvoir et à protéger efficacement les
droits fondamentaux des détenus préventifs longtemps
décriés par des Organisations de la société civile
et des Organisations de défense des droits de l'homme comme Amnesty
International Section Togo29(*). Elle permettra de concilier efficacement le
recours à la détention préventive et le respect du
principe de la présomption d'innocence.
Le souci majeur est avant tout, d'essayer à travers
cette étude, d'attirer l'attention des autorités publiques, de la
société civile, les acteurs de la justice et de l'administration
pénitentiaire sur les irrégularités ou atteintes de
garanties procédurales dans la phase de détention provisoire, les
conditions de détention dégradables des personnes privées
de liberté et leurs impacts. Elle s'assigne pour objectif
également d'encourager les décideurs politiques et les ONG
à s'intéresser davantage aux personnes privées de
liberté en mettant les moyens nécessaires pour le bon
fonctionnement des institutions de détention préventive. Cette
étude vise égalementà interpeller les pouvoirs
législatif et exécutif à réformer les principaux
textes régissant les institutions judiciaires et pénitentiaires
en se conformant aux standards internationaux.
Enfin, cette recherchevise à sensibiliser la
société togolaise sur les différents mécanismes
internationaux, régionaux et nationaux relatifs à la protection
et à la promotion des droits fondamentaux des détenus
préventifs.
13. 2. Intérêt scientifique
Dans le cadre de cette étude, il convient de
s'interroger sur l'importance que revêt une telle réflexion sur un
thème relatif à la problématique de la protection des
droits de l'homme au coursde la détention provisoire. Ce thème
est d'actualité car, il a fait l'objet de maintes réflexions et
de plusieurs codifications tant internationales, régionales que
nationales sus -citées.
Cette étude présente un intérêt
scientifique car la production de la recherche scientifique sur la
détention provisoire et la problématique de la protection des
droits de l'homme au Togo est limitée. A part quelques rapports de
séminaires et études relatifs aux conditionsde détention
actuelles, aucune recherche scientifique approfondie traitant
spécifiquement de la problématique de la protection des droits de
l'homme dans le contexte de la détention préventive n'a encore
été entreprise au Togo à notre connaissance.
La présente étude constitue donc une base de
données à même de fournir des informations récentes
et crédiblesaux différents travaux de modernisation de
l'administration judiciaire et pénitentiaire en cours au Togo notamment
: l'élaboration d'une politique sur les conditions de détention
préventive, d'une nouvelle loi portant organisation judiciaire et d'une
nouvelle loi régissant l'organisation et le fonctionnement des prisons
civiles au Togo.
Ce travail de recherche apporte également un nouvel
éclairage sur la question des garanties procédurales en
matière de protection des détenus.
14. C. PROBLEMATIQUE ET HYPOTHESES
La présente recherche traite le problème
relatif à la protection des droits fondamentaux des détenus
préventifs (1). Pour yparvenir, elle formule des hypothèses et
fait des propositions de réponses qui seront confirmées ou
infirmées (2).
15. 1. Problématique
Le Togo tout comme la plupart des pays africains a
ratifié les traités relatifs aux droits humains. Une fois
ratifiés par le Togo, ces instruments intègrent dans le corpus
juridique national et créentune obligation d'assurer, grâce
à des mesures concrètes, la protection effective et efficace
à tout citoyen suspect mais aussi à tout détenu
préventif vivant sur son territoire.
Cependant, les droits et libertés des détenus
préventifs semblent mieux garantis dans les pays
développés que dans les pays en développement, en raison
du fait que ces derniers ne disposent pas assez de moyens pour assurer
l'effectivité de ces droits et libertés. Ainsi, la question de la
protection ou de la prise en charge des droits des détenus
préventifs se pose avec plus d'acuité dans ces pays en
développement à l'instar du Togo. A cet effet, on peut dès
lors se demander :quel est le degré de protection des droits des
détenus préventifs au Togo ? Quelles sont les contraintes
liées à l'exercice de ces droits ?
Autant d'interrogations qui attestent à la fois de la
complexité et de l'intérêt de cette problématique.
Parler de l'effectivité des droits fondamentaux des détenus
préventifs n'est donc pas du tout aisée.
Pour pouvoir atteindre l'objectif de départ, il a
été formulé plusieurs hypothèses qui ont
ensuiteété testées par une enquête sur le
terrain.
16. 2. Hypothèses
Pour répondre à ces questions, nous avons
formulé plusieurs hypothèses qui ont ensuite été
testées par une enquête menée sur le terrain.
Pour mieux appréhender ces questions, nous avons
formulé deux hypothèses, d'une part une hypothèse
principale et d'autre part une hypothèse secondaire. Elles permettent
d'anticiper les réponses relatives au problème de protection des
détenus préventifs que l'étude va aborder.
a. Hypothèse
principale
Le cadre juridique de la détention préventive au
Togo tire son fondement dans sa Constitution. Or les différentes normes
internationales et régionales ratifiées par le Togo sont
incorporées dans cette Loi fondamentale.
Outre le cadre légal, des mécanismes et
institutions de protection des droits fondamentaux ont été mis en
place.
Cela suppose donc que le cadre juridique et institutionnel
estpropice pour garantir une meilleure effectivité de la protection des
droits de l'homme au cours de la détention préventive sur tout le
territoire togolais.
b. Hypothèses
secondaires
Hormis la Constitution et le nouveau Code pénal, la
plupart des instruments juridiques nationaux existants tels que le Code de
procédure pénale et l'arrêté régissant les
prisons civiles, l'ordonnance relative à l'organisation judiciaire sont
un peu en décalage avec les standards internationaux.
Cependant, il existe des écarts entre la
théorie et la pratique de la détention préventive. En
effet, la protection des droits de l'homme au cours de la détention
préventive demeure très limitée et inefficace. Cette
situation confirmerait la nécessité de renforcer la protection
des droits fondamentaux des détenus en général et ceux des
détenus préventifs en particulier. C'est dans ce contexte bien
précis que notre étude a pour objectif d'évaluer le
degré de la protection des droits fondamentaux des personnes
privées de liberté afin d'identifier les moyens pour
améliorer les pratiques de la chaîne pénale en scrutant
tout d'abord les causes et les conséquences des atteintes aux droits de
l'homme.
17. III. CONDUITE DE L'ETUDE
La conduite de l'étude repose sur la revue de
littérature (A) et sur la méthodologie choisie (B) qui
aboutissent à l'articulation et à la justification du plan
(C).
18. A. REVUE DE LITTERATURE
Très peu d'auteurs togolais se sont penchés sur
la question de la protection des droits de l'homme dans le contexte de la
détention préventive. Cette revue de littérature s'appuie
donc sur les documents d'auteurs étrangers, de standards internationaux
et des rapports d'activités en la matière.
Pour le juge togolaisKodjoWoayi, la détention
préventive-t-elle que réglementée par la loi n° 83-1
du 2 mars 1983, portant Code de procédure pénale est conforme aux
standards internationaux et régionaux en matière de respect de la
dignité humaine30(*). Elle reflète « les
réalités togolaises », bien que reprenant à
certains endroits les dispositions françaises. L'auteur estime
qu'afin d'éviter qu'il n'y ait trop d'abus dans la détention, il
faudrait rendre plus efficace les contrôles des juridictions
d'instruction ; outre ce contrôle juridictionnel, des efforts
doivent également être consentis sur le plan d'investissement
humain.
Selon Yves Cartuyvels31(*), historiquement, les droits de l'homme ont
principalement servi de « bouclier » contre les excès
potentiels du droit pénal, en limitant son intervention à un
triple point de vue : normatif - en excluant ou en restreignant toute forme
d'incrimination portant atteinte aux droits de l'homme ; sanctionnateur - en
interdisant toute forme de peine inhumaine et dégradante incompatible
avec le respect fondamental de la dignité humaine ; procédural
enfin - en exigeant un ensemble de garanties liées au droit de
l'inculpé à un procès équitable.32(*)
Cette assertion est d'autant plus vérifiée que
pratiquement tous les pays du monde abandonnent progressivement la
procédure de type inquisitoire au profit de la procédure de type
accusatoire qui est fille du principe du contradictoire. Ainsi, paraphrasant le
célèbre dictum de l'arrêt Campbell et Fell contre
Royaume- Uni, rendu en 1984-« La justice ne saurait
s'arrêter à la porte des prisons », Professeur
Frédéric Sudre a pu affirmer sans crainte que
« la Convention européenne des droits de l'homme ne
s'arrête pas à la porte des
prisons ».33(*)Pour lui, une lecture superficielle de la
jurisprudence de la Cour EDH montre en premier lieu que cette dernière
cherche de manière constante à trouver un juste équilibre
entre le respect de la personne humaine du détenu et de ses droits
fondamentaux d'une part, et la protection de la société et de
l'ordre public d'autre part. Il estime que contrairement à d'autres
traités internationaux de protection des droits fondamentaux, la
Convention européenne des droits de l'homme protège les personnes
privées de liberté exclusivement contre les détentions
arbitraires (article 5). Nonobstant cette lacune textuelle, les personnes
privées de liberté jouissent au sein du système
conventionnel d'une protection effective de leurs droits
fondamentaux.Béatrice Belda34(*) relève en ce sens
que« la problématique relative à la pertinence de
la pénétration des droits de l'homme dans les lieux privatifs de
liberté est, par conséquent, largement dépassé.
Elle laisse à présent place, logiquement, à la question
plus précise de l'effectivité et de l'efficacité de la
protection des droits des détenus»35(*).
Certaines études, relatives à la
détention provisoire ont relevé que les conditions de
détention demeurent, presque partout en Afrique, déplorables.Me
Jean-Marie DadoTossou36(*) précisait ainsi justement que
«l'état sanitaire des détenus dans les lieux de
détention au Bénin très préoccupant
reflète les conditions abominables dans lesquelles
végètent la population
carcérale béninoise». Pour lui, c'est ce qui
explique l'existence des infections qui sont des infections de manque
d'hygiène essentiellement dermatologiques comme la
gale37(*). De même, il estime que c'est dans ces
conditions déplorables de détention, que les justiciables
constatent un recours excessif à la détention
préventive.
D'autres études menées par le système des
Nations Unies et d'autres ONG telles que Amnesty International, Prisonniers
Sans Frontières ont démontré que les longues
détentions provisoires violant le principe de délai raisonnable,
sont souvent sources de surpopulation carcérale. Selon ces mêmes
études, l'usage excessif de mandat de dépôt dans les phases
de procédures sommaire et d'information porte atteinte au principe de la
présomption d'innocence38(*). Pour
MeGilbertCollard39(*), quand la justice va mal, c'est la
société dans son ensemble qui va très mal. Me Guy
Danet40(*) renchérit en disant que la
justice pénale française devient indigne de son pays, terre
présumée de liberté et de respect des?droits de
l'homme?; les motifs prévus et les conditions de mise en?oeuvre de
la détention provisoire ne sont plus acceptables, la
présomption d'innocence est devenue une notion creuse, vide de
toute réalité et de toute signification?; quant
au?secret percé de l'instruction, il ne sert plus qu'à nuire
à ceux qu'il?est censé protéger.
Dans un article, Jean-Manuel Larralde41(*), disait à
juste titre que « les droits despersonnes incarcérées
présentent de nombreuses particularités théoriques, mais
leurexercice concret doit également attirer
l'attention.»42(*)Des réformes, urgentes et
radicales, sont indispensables.
On peut à présent se demander quelles sont les
meilleures garanties substantielles et procédurales en matière de
protection des droits de l'homme au cours d'une détention
préventive ?
Aujourd'hui, le système universel et les
systèmes régionaux de protection des droits de l'homme
privilégient les mesures alternatives à la détention
préventive. En effet, la Commission Européenne des Droits de
l'Homme avait déjà souligné dans sa décision B.
contre la France de 1988, que « l'Etat est tenu de
contrôler en permanence les conditions de détention de
manière à garantir la santé et le bien être des
prisonniers, compte tenu des exigences habituelles et raisonnables de
l'emprisonnement »43(*).Ainsi pour la
Communauté internationale, les Etats ont des obligations de garantir les
droits fondamentaux des détenus préventifs qui sont entre
autres : le droit à la vie, le droit à un logement
carcéral, le droit au respect de son intégrité physique,
le droit à l'information, le droit à la santé, le droit
à une alimentation saine et équilibrée, le droit
d'être jugé dans un délai raisonnable et le droit au
respect de la présomption d'innocence.
En somme, les auteurs suscités ainsi que les
instruments juridiques internationaux44(*) et régionaux45(*) préconisent
que toute législation doit viser l'intérêt supérieur
de l'être humain voire la dignité du détenu
préventif dans une procédure pénale, gage d'un
procès équitable respectueux des droits de l'homme.
C'était déjà l'avis d'un grand juriste, Faustin
Hélie, qui écrivait : «?en Angleterre, la
liberté provisoire n'est pas seulement dans les lois, elle est dans
la «Common law», elle est dans les moeurs, elle est dans
l'état d'esprit du juge ». Qu'en est-il au Togo?? Les
juges togolais ont- ils ce souci des libertés individuelles
à l'instar des juges anglais??
L'originalité de notre étude réside dans
l'évaluation du degré de protection des droits de l'homme au
cours de la détention préventive dans un pays où les
institutions de la République sont en pleine modernisation. Notre
travail consiste à étudier l'impact potentiel des instruments et
mécanismes internationaux relatifs aux droits fondamentaux des
détenus préventifs sur la réglementation de la
détention préventive afin de déceler les forces et
faiblesses. Cela nous permettra d'envisager les perspectives pour une bonne
administration de la justice pénale respectueuse des droits fondamentaux
des détenus préventifs.
19. B. METHODOLOGIE
Il est question ici des méthodes d'analyse (1)
et des techniques de recherche (2).
20. 1. Méthodes
Pour aborder mieux cette étude, nous adoptons la
méthode juridique et la méthode systémique.
La méthode juridique selon le Pr. Charles
Einsenmann46(*), a deux composantes : la dogmatique et la
casuistique. La dogmatique consiste à analyser les textes et les
conditions de leur édiction. Il s'agit de l'étude du droit
écrit, de la norme juridique au sens strict, et plus
spécifiquement du droit positif tel qu'il ressort de l'armature
législative. Elle permettra de s'appesantir sur le sens des lois, la
consistance de la contribution des mécanismes de protection des droits
de l'homme au cours de la détention préventive. Elle permettra
aussi de rechercher les lacunes des textes dans le but d'apporter une possible
amélioration. Cependant, la méthode juridique, dans cette seule
composante se confondrait à une spéculation philosophique.
Pourtant, « la recherche juridique échappe au danger de la
spéculation abstraite »47(*).
La norme juridique nécessite une confrontation aux
réalités sociales, car la fonction essentielle du droit est
d'établir un ordre social. C'est en ce moment qu'interviendra la
casuistique. Cette seconde composante permettra d'apprécier le cadre
légal et institutionnel en vigueur au Togo afin de déterminer si
les différents mécanismes nationaux existants garantissent la
protection des droits de l'homme dans le contexte de la détention
préventive.
L'analyse systémique, nous permettra de
répondre à la question « comment », à travers la
construction d'un cadre théorique adapté à l'analyse de
l'objet d'étude appréhendé comme un « système
». La tendance cybernétique de l'analyse systémique sera
privilégiée et plus précisément l'analyse de David
Easton plus dynamique que celle de TalcottEdger Parsons48(*). Pour D. Easton, tout
système comprend une communauté (membres du système), un
régime (règles du jeu, normes) et des autorités. Il
comporte aussi cinq activités essentielles : la formulation d'exigences
diverses, le choix ou la conversion de ces exigences par la législation
ou la coutume, la prise de décision, l'exécution par les moyens
administratifs ou autres ainsi que les soutiens du système et moyens de
les renforcer.
Cette combinaison de méthodes permettra non seulement
de mieux appréhender les éléments qui permettent d'assurer
la protection des droits du détenu, mais surtout de vérifier
l'effectivité de cette protection.
Nos expériences professionnelles acquises au greffe et
au secrétariat du parquet permettront de faire les suggestions
nécessaires.
21. 2. Techniques d'enquête
Trois techniques de recherche ont été
adoptées ou utilisées au cours de cette étude : la
technique documentaire, l'observation et l'entretien.
Avec la lecture des documents et rapports, nous
avons une vue d'ensemble du système de protection de droits de l'homme
dans l'administration de la justice. Elle consiste à passer en revue les
principes généraux, les textes légaux en vigueur et les
documents de politique pertinents afin d'analyser le fondement juridique de la
détention préventive au Togo, pour avoir un cadre
théorique de référence lorsqu'il s'agissait de faire les
analyses de données.
Des interviews, à la fois structurées et non
structurées, ont été administrées à travers
des entretiens individuels et focus groups, des données
qualitativesont été collectées sur le constat des
écarts existant entre le prescrit de telle ou telle disposition et la
pratique ; les causes et les conséquences des écarts et des
manquements constatés par l'enquêté ; l'efficacité
et/ou l'inefficacité des mesures déjà prises par le
Gouvernement ; et les propositions de solutions pour faire face aux
défis relevés.
Les personnes interviewées ont été
identifiées en fonction de certains critères bien précis
comme la connaissance et leur implication dans la procédure
pénale, l'exposition quotidienne aux problèmes de
détention préventive, leurs conséquences, la
maîtrise des différentes mesures prises ainsi que de la Politique
sectorielle du Ministère de la Justice. Les interviews ont
été accordées par certains acteurs concernés par la
question de la détention préventive et de la surpopulation
carcérale à savoir : les magistrats du siège et du
Parquet, les Chefs secrétariats de parquet et les greffiers en chef des
Tribunaux, des Cours d'Appel et de la Cour suprême du Togo.
Dans le milieu carcéral, des entretiens ont
été organisés avec le directeur de l'Administration
pénitentiaire, les régisseurs des prisons civiles, les greffiers,
les surveillants de prisons et les responsables des différents services
des prisons y compris le service juridique, le service social, le service de
l'approvisionnement et l'infirmerie. Des focus groups ont
été aussi tenus à l'intérieur des prisons. Enfin,
des entretiens avec les détenus préventifs
ontégalementété conduits.
L'ensemble de ces méthodes et techniques a
permis de mesurer le degré de protection des droits fondamentaux des
détenus préventifs dans l'administration de la justice au
Togo.
22. C. ARTICULATION ET JUSTIFICATION DU PLAN
La démarche de cette étude se propose
d'évaluer l'effectivité de la protection des droits de l'homme
dans le cadre de la détention préventive au Togo.
Elle fait donc apparaîtreune protection
limitée des droits de l'homme au coeur de la détention
préventiveau Togo(Première partie).
Cependant,cette protection est perfectibledans la mesure où des
efforts considérables de protection et de promotion des droits de
l'homme seront entrepris sur le plan national et
international(Seconde partie).
PREMIERE PARTIE :
UNE
PROTECTION LIMITEE DES DROITS DE L'HOMMEAU COEUR DE LA DETENTION PREVENTIVE AU
TOGO
« Le principe de traitement humain des personnes
privées de liberté constitue le point de départ de toute
réflexion sur les conditions de détention et la conception des
régimes de détention. »49(*), a martelé
Monsieur Juan Mendez, Rapporteur Spécial des Nations Unies sur la
torture lors de l'Assemblée générale des Nations Unies qui
s'est tenue le 9 août 2013.
Ainsi, les détenus préventifs doivent être
traités avec humanité et avec le respect de la dignité
inhérente à la personne humaine50(*), ce qui est
considéré comme une règle fondamentale d'application
universelle, dont la mise en oeuvre ne dépend pas des ressources
disponibles au sein d'un Etat partie. En effet, les détenus doivent
pouvoir exercer leurs droits sans discrimination d'aucune sorte et sont
égaux devant la loi51(*).Toutefois, l'article 10 para. 2 du PIDCP
établit le droit spécial des prévenus à être
séparés des condamnés et à recevoir un traitement
distinct, approprié à leur condition de personnes non
condamnées. C'est pourquoi, l'Etat assume la responsabilité de
tous les aspects de la vie d'un détenu. Le droit à la
dignité assure des garanties minimales d'un traitement humain en
conjonction avec d'autres droits importants, fréquemment violés
en détention préventive, comme le droit à la vie
privée, y compris le secret de la correspondance, l'interdiction de la
discrimination, ainsi que les libertés de religion, d'expression,
d'information ou le droit de vote.
Cependant, dans la pratique de la détention provisoire,
les différents droits et libertés sus -cités sont
constamment violés sans qu'aucune mesure ne soit
prise.L'évaluation du degré de protection des droits et
libertés fondamentaux des détenus préventifs au Togo
révèle uneprotectionmitigée des droits et
libertés civils et politiquesdes détenus (Chapitre I)et une
précarité de la prise en charge des droits économiques,
sociaux et culturels des détenus préventifs (Chapitre II).
CHAPITRE I :
UNE PROTECTION MITIGEE DES
DROITS ET LIBERTES CIVILS ET POLITIQUES DES DETENUS PREVENTIFS AUTOGO
La nécessité d'assurer l'effectivité des
droits et libertés fondamentaux des détenus préventifs
partout dans le monde est un défi majeur qui pèse sur toute la
communauté internationale, d'autant plus que la garantie de ces droits
et libertés est l'un des fondements des droits de l'homme, reconnu et
consacré par les instruments internationaux relatifs aux droits de
l'homme52(*), notamment la Déclaration Universelle
des Droits de l'Homme (DUDH).Le Togo, tout comme la plupart des pays africains
a ratifié ces traités. En effet, si la grande majorité des
Etats a signé et ratifié les traités internationaux
garantissant les droits et libertés des détenus, peu
ontcréé des cadres législatifs et administratifs
garantissant le respect de ces droits et libertés dans la pratique.
Certains Etats, comme le Togo ont pris des mesures même si elles sont
insuffisantes.
Cependant la question dela protection effective des
droits et libertés civils et politiques des détenus
préventifs se pose avec acuité au Togoen raison de certaines
limites (Section 1). Ces limites sont à l'origine des violations
récurrentes des droits et libertés civils et politiques des
détenus préventifs (Section 2).
I. Section 1:Les limites de la
protection des droits et libertés civils et politiques desdétenuspréventifs
Les limites de la protection des droits et
libertés civils et politiques des détenus préventifs sont
liées aux insuffisances de textes (Paragraphe 1) et aux institutions
(Paragraphe 2).
A. Paragraphe
1 : Les limites textuelles
L'état des lieux du cadre légal (A) a
permis de faire ressortir des insuffisances notoires (B).
23. A. L'état des lieux du cadre légal
Au Togo, le respect des droits de l'homme et des
libertés fondamentales des personnes poursuivies est
spécifiquement inscrit dans la Constitution, qui engage l'Etat à
garantir, entre autres53(*), l'intégrité physique et
mentale des personnes poursuivies, la vie et la sécurité (article
13), la prohibition de l'arrestation ou la détention arbitraire (article
15),le droit du prévenu d'être examiné par le
médecin de son choix, d'être assisté par un avocat et de
bénéficier d'un traitement qui préserve sa dignité,
sa santé physique et mentale et qui aide à sa réinsertion
sociale (article 16), la notification immédiate des charges retenues
contre toute personne suspectée d'avoir commis une infraction (article
17), la présomption d'innocence (article 18), le droit à un
procès équitable et dans un délai raisonnable (article
19), l'interdiction de la torture, des traitements cruels, inhumains et
dégradants (article 21) et l'indépendance du pouvoir judiciaire
(article 113).
En résumé, le droit à un procès
équitable est défini en premier lieu par les dispositions de la
Constitution togolaise. En plus de la loi fondamentale togolaise, le cadre
légal est également constitué d'autres instruments
nationaux qui définissent les droits etlibertés civils et
politiques en matière de la détention préventive. Les
principaux textes sont :l'arrêté n° 488 du
1er septembre 1933 réorganisant le régime
pénitentiaire indigène au Togo,l'ordonnance n°78- 35 du 7
septembre 1978 portant organisation judiciaire au Togo, la loi n° 83 -1 du
2 mars 1983 instituant le Code de procédure pénale au Togo,la loi
n°2007 - 017 du 06 juillet 2007 instituant le Code de l'enfant au Togo et
la loi n° 2015 -10 du 24 novembre 2015 instituant le Nouveau Code
pénal au Togo.
24. B. Les insuffisances inhérentes au cadre
légal
En examinant le cadre législatif et
réglementaire togolais en la matière, on peut soutenir que les
traités relatifs à la protection des droits de l'homme dans
l'administration de la justice pénale ont connu une intégration
constitutionnelle effective, mais paradoxalement sont moins traduites dans les
textes législatifs et réglementaires tels que le code de
procédure pénale, l'ordonnance n°78- 35 du 7 septembre 1978
portant organisation judiciaire au Togo et l'arrêté n°488 du
1er septembre 1933. En effet, l'avancée significative
enregistrée ces dernières années est entre autre
l'adoption du Nouveau Code pénal togolais54(*). Il y a lieu de noter
que la modification du Code pénal de 1980 était nécessaire
pour pallier aux exigences de l'environnement national et international ainsi
qu'à l'évolution de la société togolaise. On
relevait également l'absence de sanctions de nombreuses infractions,
incluant celles résultant de conventions internationales auxquels le
Togo est partie. C'est ainsi qu'il existait de nombreuses dispositions du code
pénal en contradiction avec la plupart des conventions internationales
relatives aux droits humains. A titre d'illustration, le corpus normatif des
droits de l'homme était lacunaire en ce qui concerne les dispositions
pénales relatives à la torture, alors que le Togo est partie
à la convention des Nations unies contre la torture et les traitements
inhumains, cruels et dégradants. Il faut toutefois relever que ce Code
était déjà une avancée lors de sa publication, et
innovateur notammentpar l'intégration dedéfinitions conformes au
droit international des droits de l'homme, des infractions ayant trait à
la torture et aux traitements cruels, inhumains et
dégradants55(*)et des mesures alternatives à la
privation de la liberté. Afin d'éviter les
recours excessifs à la détention provisoire et à la
surpopulation carcérale, le NCPT a prévu des alternatives aux
poursuites pénales (articles 58 à 62). Les articles 93 à
95 du NCPT ont créé une alternative aux poursuites qui constitue
aussi bien une alternative à la détention qu'a la reconnaissance
préalable de culpabilité qui définira le code de
procédure pénale à venir.
L'analyse approfondie du cadre légal togolais a permis
de relever également une série de lacunes notamment :
absence de mesures de substitution à l'emprisonnement, absence
d'institutionnalisation du juge des libertés et de la détention,
du juge de l'application des peines, absence de définition des
délais raisonnables en matière criminelle, l'absence d'un
décret d'application de la loi sur l'aide juridictionnelle, les
délais de procédure trop longs, la non transposition duprincipe
de la présomption d'innocence dans le code de procédure
pénale actuel,l'absence d'harmonisation des textes,l'absence de
garanties contre la torture et les mauvais traitements dans le CPPT, l'absence
d'une disposition expresse imposant de séparer les prévenus des
condamnés, l'absence de limitation de motifs de la détention
préventive pour lesquels le juge d'instruction ou le procureur de la
République peuvent ordonner cette mesure que le CPPT qualifie
d'exceptionnelle.
Au Togo, les prisons civiles continuent d'être
régies par l'arrêté N°488 du 1er septembre
1933 réorganisant le régime pénitentiaire indigène
au Togo. Une lecture attentive de ce texte, permet de noter qu'il est en
déphasage avec le contenu de l'article 16 de la Constitution togolaise
suscitée. Cet arrêté met l'accent sur le châtiment et
certaines autres sanctions56(*). C'est une violation grave du droit au
respect de l'intégrité physique du détenu
préventif.
Il n'existe pas également un règlement
intérieur régissant les prisons civiles togolaises. Ce vide
juridique est souvent source de violences récurrentes,
d'insécurité et d'indiscipline dans les prisons.
Ces insuffisances juridiques ci-dessus constatées
constituent des handicaps pour le bon fonctionnement de l'administration de la
justice pénale togolaise.
B. Paragraphe
2 : Les limites institutionnelles
L'administration de la justice togolaise est
confrontée aux problèmes de dysfonctionnements. Ces dernierssont
liés au système judiciaire (A), aux acteurs judiciaires et
à leurs conditions de travail (B).
25. A. Les dysfonctionnements liés au système
judiciaire
La lenteur judiciaire est un problème crucial qui
affecte toutes les juridictions togolaises. Ce problème est
dénoncé à presque tous les niveaux du système
judiciaireà savoir : les tribunaux de première instance, les
deux cours d'appel et la Cour suprême. Cette lenteur est due au manque de
moyens matériels et de personnel pour permettre le fonctionnement normal
et régulier de l'appareil judiciaire57(*). Pour la CNDH et le
HCDH, la principale conséquence de ces dysfonctionnements est que les
décisions ne sont pas rendues dans des délais raisonnables et les
actes de procédure ne sont pas accomplis dans les délais
légaux.
Selon une étude réalisée au Togo en 2013,
le HCDH a relevé que : « L'observation de
l'organisation et du fonctionnement des juridictions togolaises et de certaines
réalités du pays, permet de constater que le respect et la mise
en oeuvre des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans
l'administration de la justice ne sont pas totalement effectifs. Les raisons
sont diverses. A travers une observation attentive, il est possible de lier ces
difficultés tout d'abord aux insuffisances relatives à
l'organisation et au fonctionnement défaillant de l'appareil
judiciaire58(*).»
Par ailleurs, l'absence de juges que ce soit le juge des
libertés et de la détention, le juge de la mise en état et
le juge de l'application des peines,aux différents stades de la
procédure constitue un obstacle au bon fonctionnement de l'appareil
judiciaire.Deplus, le principe de la séparation des fonctions de
poursuite, d'instruction et de jugement qui est directement lié au
respect de l'impartialité et de l'indépendance des juges,
consacré à l'article 14 al. 1 du PIDCP, n'est pas toujours
respecté dans certaines juridictions à effectifs
restreints59(*). De nombreuses
dérogations sont apportées à ce principe de la
séparation des fonctions, du fait de l'article 32 al. 2 de l'ordonnance
du 7 septembre 1978 portant organisation judiciaire.60(*) En tout état
de cause, cette situation fait entorse au principe d'impartialité. A
cela s'ajoute le manque de contrôle régulier de ces juridictions.
Tout ceci nuit à un traitement effectif des dossiers et prive le
détenu préventif de son droit à un procès
équitable dans un délai raisonnable (article 14 PIDCP).
26. B. Les dysfonctionnements liés aux conditions de
travail des acteursjudiciaires et pénitentiaires
Les cours et tribunaux, dans leur ensemble, rencontrent
d'importantes difficultés matérielles et financières pour
assurer une justice rapide, efficace et accessible à tous les citoyens.
Sur le plan matériel, on relève l'insuffisance et l'inadaptation
d'infrastructures dans la plupart des juridictions du système
judiciaire. La plupart des bâtiments existants ont été
baillés et le reste, appartenant à l'Etat togolais est
vétuste et dans un état de délabrement total, exposant les
acteurs judiciaires et pénitentiairesaux intempéries et aux
maladies. Les dysfonctionnements de l'appareil judiciaire togolais sont certes
structurels, mais aussi le fait des acteurs qui l'animent, à savoir le
personnel judiciaire et pénitentiaire.
Les conditions de travail dans certains tribunaux et
établissements pénitentiaires tels que le Tribunal et la prison
civile de Tsévié sont précaires en raison de la
défectuosité du cadre de travail61(*).Ces administrations
judiciaires et pénitentiaires sont confrontées au manque de
personnel, aux problèmes de logistiques entre autres.
Ainsi, les administrations judiciaires et
pénitentiaires emploient du personnel bénévole dans
l'exécution des tâches subalternes. Les conditions de vie de ces
bénévoles sont très précaires.
Les causes de la précarité des conditions de
travail sont liées aux réalités socio-économiques
et politiques du pays.
A cela s'ajoute la corruption qui gangrène l'appareil
judiciaire.Les citoyens togolais n'ont plus confiance en la justice togolaise
en raison de son manque de crédibilité62(*).
Par ailleurs, les acteurs judiciaires et pénitentiaires
se plaignent de l'insuffisance de fonds de fonctionnement. Selon
MonsieurleDirecteur de l'administration pénitentiaire, la ligne
budgétaire pour l'achat de produits pharmaceutiques pour toutes les
prisons civiles a été revue à la baisse. Elle est
passée de trente millions (30.000.000) de francs CFA en 2013 à
neuf millions cent quatre sept mille cinq cent (9.187.500) francs CFA en 2016.
Cette baisse a impacté négativement dans l'approvisionnement des
produits pharmaceutiques. Il n'existe pas une ligne budgétaire
destinée pour l'hospitalisation des détenus malades ou les
entretiens des installations électriques et hydrauliques dans les
prisons civiles63(*).
Pour lui, l'insuffisance de ressources humaines,
financières et matérielles pour les administrations
pénitentiaires a un impact considérable sur le non-respect de
certains droits des détenus. Elle porte également atteintes
auxgaranties procédurales en matière de détention
préventive.
II. Section
2 : Les violations récurrentes des droits et libertés
civils et politiques desdétenus
préventifs au Togo
Les limites ci-dessus mentionnées ont pour
conséquences la violation des garanties procédurales (Paragraphe
1) et des droits fondamentaux liés aux libertés civiles et
politiques des détenus préventifs(Paragraphe 2).
C. Paragraphe
1 : La violation des garanties procéduralesen matière de
détentionpréventive
« Pour réaliser une protection efficace
des droits de l'homme, il ne suffit pas de consacrer le droit matériel.
Encore faut-il des garanties fondamentales de procédures de nature
à renforcer les mécanismes de sauvegarde de ces
droits64(*) ».
Dans ce paragraphe, il serait question d'examiner les
entorses aux principes du procès équitable (A) et de la
présomption d'innocence (B).
27. A. Les entorses au principe du procès juste et
équitable
L'une des exigences essentielles caractéristiques d'un
procès juste et équitable est, aux termes de l'article 19 de la
constitution togolaise, le droit de toute personne, objet de poursuites
judiciaires, d'être jugée dans un délai raisonnable par une
juridiction indépendante et impartiale. Les prévenus tirent ainsi
de ce texte deux garanties fondamentales : le droit d'être jugés
dans un délai raisonnable et par une juridiction indépendante et
impartiale.
Dans la pratique, ces droits connaissent des restrictions du
fait des dysfonctionnements de l'appareil judiciaire. Ainsi, la Constitution
togolaise fait du pouvoir judiciaire le garant des droits et libertés de
tous les citoyens65(*). Cependant ce pouvoir judiciaire qui est,
censé protéger tous les citoyens togolais, n'est pas en mesure de
l'assumer. Il est à l'origine même de certaines violations des
droits de l'homme tels que le non-respect des droits civils, politiques,
économiques, sociaux et culturels des détenus
préventifs.
Le Département d'Etat Américain souligne
à cet égard que « bien que la constitution togolaise
prévoit un pouvoir judiciaire indépendant, le pouvoir
exécutif continue d'exercer un contrôle sur le pouvoir judiciaire.
La corruption judiciaire était un problème. Il y avait une grande
perception selon laquelle les avocats soudoient souvent des juges pour
influencer les jugements.Le système judiciaire est resté
surchargé et sous-effectif. La Constitution prévoit le droit
à un procès équitable, mais l'influence de
l'Exécutif sur le pouvoir judiciaire limite ce droit. Les accusés
ont le droit d'accéder à des preuves détenues par le
gouvernement en rapport avec leurs cas, mais ce droit n'a pas été
respecté. Il y avait de nombreux retards dans le système
judiciaire. La constitution et la loi prévoient des recours civils et
administratifs pour des actes répréhensibles, mais le pouvoir
judiciaire ne respecte pas ces dispositions, et la plupart des citoyens ne
connaissaient pas de telles dispositions. Certains cas antérieurs soumis
à la Cour de justice de la Communauté économique des Etats
d'Afrique de l'Ouest ont donné lieu à des décisions que le
gouvernement n'a pas mises en oeuvre, cas des affaires Kpatcha,
Bodjona... »66(*)
En effet, la protection des droits fondamentaux des
détenus est conditionnée par l'existence de plusieurs
éléments mêlés dont la remise en cause de l'un
influe sur tous les autres. Elle subit les soubresauts de son environnement qui
reste lui-même marqué par de profonds
déséquilibres.
Aux termes des dispositions de l'actuel Code de
Procédure Pénale, la détention préventive est
définie comme une mesure exceptionnelle. Contrairement au principe
énoncé dans ledit Code, la détention préventive
n'est pas utilisée comme une mesure exceptionnelle, mais continue
d'être la règle. Cependant, aucune autre base légale n'est
énoncée dans la loi qui justifieraitl'ordre de détention
préventive. Cela constitue une violation du principe de la
présomption d'innocence.
28. B. Les entorses au principe de la présomption
d'innocence
Le principe de la présomption d'innocence est l'une des
garanties fondamentales de la procédure pénale. Il est
consacré par l'article 18 de la constitution togolaise qui dispose
que : « tout prévenu ou accusé est
présumé innocent jusqu'à ce que sa culpabilité ait
été établie à la suite d'un procès qui lui
offre les garanties indispensables à sa défense. Le pouvoir
judiciaire, gardien de la liberté individuelle, assure le respect de ce
principe dans les conditions prévues par la loi. »
L'analyse de cette disposition, fait ressortir deux
caractéristiques : la culpabilité et l'innocence. Par
conséquent, la présomption d'innocence suppose donc la protection
des prévenus préventifs. Toute personne poursuivie pour une
infraction est considérée comme innocente des faits qui lui sont
reprochés, tant qu'elle n'a pas été déclarée
coupable par la juridiction de jugement compétente. Elle implique en
principe, qu'à ce stade les mesures privatives de liberté ne
peuvent pas être prises contre le prévenu ou l'accusé. La
procédure doit être secrète, le prévenu ou
l'accusé ne peut être présenté comme auteur ou
coupable de l'infraction et la charge de la preuve de la culpabilité du
prévenu incombe au ministère public, ainsi, le doute
bénéficie au prévenu ou à l'accusé.
C'est dans cette perspective que, le Comité des droits
de l'homme des Nations-Unies a indiqué dans son Observation
générale sur le droit à un procès équitable
qu'«il est interdit, en tout temps, de s'écarter des principes
fondamentaux qui garantissent un procès équitable, comme la
présomption d'innocence67(*). (...) Les
Etats parties ne peuvent en aucune circonstance invoquer l'article 4 du Pacte
pour justifier des actes attentatoires au droit humanitaire ou aux normes
impératives du droit international, par (...) l'inobservation de
principes fondamentaux garantissant un procès équitable comme la
présomption d'innocence. (...) De l'avis du Comité, ces principes
[les principes de légalité et la primauté du droit] (...)
exigent le respect des garanties judiciaires fondamentales pendant un
état d'urgence. (...) La présomption d'innocence doit être
strictement respectée68(*).»
Mais dans la pratique togolaise, la présomption
d'innocence est constamment violée dans la phase de la détention
préventive. Les magistrats du parquet et les magistrats instructeurs ont
érigé la détention préventive en règle et
non en exception. Ainsi, la détention préventive vient
malheureusement heurter l'essence de ce principe cardinal et sacré de la
procédure pénale puisqu'elle constitue un pré-jugement
pouvant être interpréter comme une répression avant le
jugement. La détention préventive implique à
l'égard de l'inculpé une véritable présomption de
culpabilité entraînant, une augmentation des risques de
condamnation et parfois, un durcissement de la répression, en incitant
le juge à prononcer une peine d'emprisonnement égale à la
durée de la détention69(*). Le Comité des droits de l'homme a
également précisé que la durée de la
détention provisoire ne doit jamais être prise comme une
indication de la culpabilité70(*).
Selon lajurisprudence WairikiRameka et al. Contre la
Nouvelle-Zélande, la détention préventive n'affecte
normalement pas non plus le droit des personnes à être
présumées innocentes car ces formes de détention ne
comportent pas d'accusation en matière pénale contre une
personne71(*). Cependant, dans l'affaire
Cagas contre Philippines, le Comité les droits de l'homme a
estimé qu'une période excessive de détention
préventive, de plus neuf ans dans ce cas, avait porté atteinte au
droit à la présomption d'innocence et, par conséquent,
avait constitué une violation de l'article 14 (2) de le
PIDCP72(*).
Le placement excessif en détention préventive de
personnes soupçonnées n'est seulement pas en contradiction avec
le principe de la présomption d'innocence maisil atteint
psychologiquement ces personnes également. En effet,
l'incarcération de l'individu soupçonné
créée chez celui-ci un choc psychologique par la rupture qu'elle
entraîne avec le milieu familial, social et professionnel, par la
tendance qu'ont beaucoup de gens à croire coupable celui qui est
détenu à titre préventif. Cette détention affecte
gravement l'inculpé qui se voit atteint dans son honneur et sa
réputation. Cela entraîne chez lui un déséquilibre
psychologique avec la perte de son confort moral, qu'aucune décision de
non-lieu rendue à l'issue de l'information ne saurait rétablir.
C'est l'exemple des ex- inculpés dans les affaires d'incendies des
grands marchés de Lomé et Kara. Les 9 et 11 janvier 2013, ces
grands marchés ont été consumés par de terribles
incendies d'origine criminelle. Au lendemain de ces incendies, certains cadres
et militants de l'opposition notamment du Collectif Sauvons le Togo (CST) ont
été appréhendés.Les nommésLomaEssohana,
PanakinaKodjovi, TchisseKokoutsèEklou, KodjoMessanAgbeyomé,
Dogbevi-Nukafu Suzanne, BodeTchagnao et consorts ont été
inculpés pour les faits de groupement de malfaiteurs et
complicité de destruction volontaires.
Dans cette affaire,une ordonnance définitive de
non-lieu partiel, de requalification et de transmission de pièces
à Monsieur le Procureur général près la Cour
d'Appel de Lomé a été rendue par Monsieur IdrissouDjagba,
doyen des juges d'instruction du Tribunal de Lomé. Après quatre
et un (41) mois d'ouverture d'information, le Doyen des juges d'instruction a,
dans son ordonnance en date du 9 mai 2016,estimé que :
« l'information n'a pas permis de mettre en exergue un quelconque
acte matériel de la participation, des inculpés LomaEssohana,
PanakinaKodjovi, TchisseKokoutsèEklou, KodjoMessanAgbeyomé,
Dogbevi-Nukafu Suzanne, BodeTchagnao, Aziadouvo Zeus Komi,
Kpande-AdzaréNyamaRaphaél, AfangbedjiKossi Jil-Bénoit,
KabouaEssokoyo dit Abass, Dupuy Eric Théophile, Ameganvi Henri Claude
Kokouvi, AmevoYaovi, AthileyAyaoviAnaniApolinaire, AkpoviTairou, AmetepeKossi
John Fofo, AkakpoDodji, comme auteurs ou complices ; qu'il ne résulte
donc pas charges suffisantes contre eux d'avoir commis les crimes de groupement
de malfaiteurs et complicité de destruction volontaires », plus
loin, « vu l'article 148 et 150 du Code de procédure pénale,
disons n' y avoir lieu à suivre contre les susnommés de ces
chefs. En conséquence, ordonnons la levée des mesures de
contrôle judicaire qui leur sont imposées à compter de ce
jour. »
Il y a lieu de relever que certains ex-inculpés ont
passé entre douze et trente-huitmois de détention
préventive et ont perdu leur emploien raison de leur
détention.D'autres ex-inculpés ont été mis sous
contrôle judiciaire. Dans cette même affaire, l'inculpé
Etienne Yakanou, a perdu sa vie en détention préventive.
Le dysfonctionnement de l'appareil judiciaire met à mal
les garanties procédurales assurant la protection des détenus
préventifs. Ainsi, le droit à la défense au cours d'un
procès pénal et le droit de toute personne interpellée
d'être traduite devant un juge dans un bref délai et d'être
jugée dans un délai raisonnable, souffrent desérieuses
restrictions. Le délai légalde détention provisoire est
quasi systématiquement inobservé73(*). Cette situation a
pour corollairela violation des droits fondamentaux des détenus.
D. Paragraphe
2 : La violation desdroits civils et politiques au cours de
ladétentionpréventive
Le détenu préventif est la personne qui,
à l'exception de la liberté de circuler, jouit des droits
liés à son statut. Ces droits concernent l'assistance d'un
conseil, la communication avec l'extérieur et l'exercice des autres
droits civils et politiques.
Dans cette partie, il sera abordé tour à
tour le non-respect du droit d'assistance et la communication avec
l'extérieur (A) et le non-respect de l'exercice des droits civils et
politiques des détenus préventifs (B).
29. A. Le non-respect du droit d'assistance d'un conseil et
decommunication avec l'extérieur
Le droit à l'assistance d'un avocat fait parti des
garanties du droit à un procès équitable de toute personne
accusée d'une infraction pénale. L'assistance d'un avocat peut se
faire à tout moment de la procédure. La constitution d'un conseil
dans une procédure est un moyen important pour faire respecter les
droits d'une personne détenue.
Dans la pratique, en raison du manque de moyens financiers,
les prévenus qui sont les plus vulnérables n'ont pas toujours
accès aux services d'un avocat. L'Etat non plus ne satisfait pas
à son obligation de commettre d'office un conseil au prévenu
lorsque ce dernier ne peut se l'offrir lui-même sauf en matière
criminelle. Il faut préciser que cette assistance n'intervient qu'au
cours du jugement. Le droit d'accès à un avocat à toute
étape de la procédure pénale, bien que consacré par
la Constitution,n'est pas toujours effectif dans la pratique. De même, la
loi relative à l'aide judiciaire est ineffective en raison du fait de
l'absence d'undécret d'application et d'un système
opérationnel d'aide juridictionnelle74(*). Cette situation ne
permet pas au détenu de payer les honoraires d'un avocat afin que ce
dernier puisse le défendre.
Le droit de communiquer avec l'extérieur est restreint.
Dans la pratique, Il est conditionné au paiement d'une somme de trois
cent (3.00) F.CFA par jour de visite ou d'une autorisation spéciale
délivrée par le procureur de la République ou par le juge
d'instruction. Il y a lieu de souligner que le paiement de la somme de trois
cent (3.00) F.CFA relève de la pratique et non de la loi. Cette pratique
empêche le détenu de communiquer avec l'extérieur car la
majorité des parents ou alliés des détenus
éprouvent souvent des difficultés à trouver cette somme.
Le paiement du droit de visite est une entorse au droit de visite.
30. B. Le non-respect de l'exercice des autres droits civils
et politiques des détenus préventifs
Le prévenu qui n'a pas été
antérieurement frappé d'une condamnation restreignant sa
capacité civile et politique, jouit de la plénitude de ses droits
civils et politiques. C'est la conséquence logique de la
présomption d'innocence dont il bénéficie. Cette
règle doit être appliquée au prévenu placé
sous mandat de dépôt ou d'arrêt puisque
l'incarcération, pur fait, n'emporte pas, à elle seule de
conséquence juridique.
Le détenu préventif est juridiquement libre
d'agir en matière de droit patrimonial ou extra- patrimonial par le
biais du mandataire. Il faut signaler que l'exercice des droits civils et
politiques se heurte à des obstacles matériels dont le
règlement pénitentiaire doit tenir compte, et qui oblige à
admettre que la détention préventive limite en fait la
capacité d'exercice du détenu.
Quant à l'exercice du droit de vote, les textes sont
muets sur la question. Ce silence dans la législation togolaise fait
pérenniser un usage constant selon lequel les détenus ne votent
pas. Le vote par correspondance ou par procuration ne leur est pas non plus
reconnu.
Cependant, l'analyse du droit comparé fait ressortir
que le droit de vote des détenus est un droit fondamental,
consacré par certaines législations. Elle est effective au
Canada, en Afrique du Sud et dans les Etats du Conseil de
l'Europe75(*).C'est
l'arrêt Scoppola c/ Italie de 2012 qui est venu
clarifier l'interprétation de l'article 3 du Protocole 1 de la
CEDH qui garantit le droit de vote aux citoyens des Etats parties.
La volonté ou le désir seul ne suffit pas pour
réaliser l'effectivité d'unerègle de droit. De même,
la proclamation de celle-ci et l'installation d'organes de contrôle ne
suffisent pas pour atteindre son but social recherché.
Au Togo, les conditions économiques et sociales ne sont
pas des plus reluisantes. Cette situation influence dans une large mesure la
mise en oeuvre des conventions internationales relativesà la prise en
charge des détenus préventifs. Cette situation est partout en
Afrique généralisée, c'est le constat fait par l'Honorable
Med SK Kaggwa76(*):« les détenus
provisoires sont souvent dans l'ombre du système de justice
pénale car leur détention et leur traitement ne sont pas soumis
aux mêmes niveaux de surveillance que les prisonniers condamnés.
Ils subissent des conditions de détention qui ne répondent pas au
droit à la vie et la dignité, et sont vulnérables aux
violations des droits de l'homme, y compris l'arrestation et la
détention arbitraire, le risque de torture et d'autres mauvais
traitements, ainsi que la corruption (où leur libération ou leur
accès au service dépend de leur volonté à
répondre aux demandes monétaires ou autres des officiers). Des
taux élevés de détention provisoire contribuent à
la surpopulation des installations de détention. Les garanties et les
conditions procédurales qui ne sont pas conformes aux normes minimales
convenues et qui portent atteinte à l'Etat de droit, ont un impact
significatif sur le reste de la chaine de la justice pénale, gaspillent
les ressources publiques et mettent en danger la vie des
détenus.»77(*)
Ainsi, l'effectivité de la protection des
droits fondamentaux des détenus préventifs fait aussi appel
à la prise en charge des droits économiques, sociaux et culturels
des détenus.
CHAPITRE II :
UNE
PRECARITE DE PRISE EN CHARGE DES DROITS ECONOMIQUES, SOCIAUX ET CULTURELS DES
DETENUS PREVENTIFS AU TOGO
L'accès aux droits économiques, sociaux et
culturels pour tous les détenussans discrimination est garanti par les
divers instruments internationaux et régionaux des droits de l'homme
tels que les Conventions internationales et régionales78(*) ; et les
standards internationaux et régionaux79(*). Ces droits ont pour
but de traitertoutepersonne privée de liberté avec
humanité et dignité. C'est pourquoi leur instauration est un
défi qui incombe à la Communauté internationale, l'Etat
togolais n'étant pas du reste.L'obligation morale pour l'Etat de
respecter, protéger et réaliser les droits civils et politiques
s'appliquent également à cette catégorie de droits de
l'homme.
Cependant le Comité des droits économiques,
sociaux et culturelsobserve avec préoccupation que :
« les possibilités de recours effectif en cas de
violations de droits économiques, sociaux et culturels sont
réduitesau Togo en raison du coût prohibitif des procédures
judiciaires, de l'absence d'aide juridictionnelle et de la
méconnaissance du Pacte et des voies de recours80(*). »
Ainsi, la problématique de l'effectivité
de ces droits fondamentaux se pose avec acuité au Togo. Elle est dueaux
défaillances des établissements pénitentiaires et des
mécanismes de contrôledans la prise en charge des détenus
(Section 1), justifiant ainsi une insuffisance de prise en charge des
détenus (Section 2).
III. Section 1 : Les défaillances des
établissements pénitentiaireset des mécanismes
decontrôle de prise en charge des détenus
La mise en oeuvre de la détention provisoire au Togo
est attentatoire aux droits économiques, sociaux et culturels des
détenus préventifs.
Cette situation est liéeà l'état
de l'environnement carcéral (Paragraphe I)et aux défaillances des
mécanismes de contrôle de la légalité de la
détention et d'inspection des conditions de détention (Paragraphe
II).
E. Paragraphe
1 : L'état critique de l'environnement carcéral
L'environnement carcéraltogolaisest
caractérisé par une carence et à l'inadaptation des
établissements pénitentiaires (A) etune surpopulation
carcérale(B).
31. A. La carence et l'inadéquation des
établissements pénitentiaires
Les conditions de détention dans les
établissements pénitentiaires togolais restent
préoccupantes malgré la mise en oeuvre du PAUSEP81(*) et du PNMJ. Les lieux
de détention carcérale sont vétustes, exigus et
délabrés. En effet, il existe douze (12) prisons civiles au Togo
réparties sur toute l'étendue du territoire avec une
capacité d'accueil de deux mille sept cent vingt (2.720). Ce nombre est
insuffisant par rapport aux nombresélevés des détenus
enregistrés courant les cinq premiers mois de l'année
201682(*). A cela s'ajoutent l'inadéquation
entre la population carcérale et les infrastructures existantes. Il faut
noter que les capacités d'accueil des différentes structures ne
cadrent plus avec la réalité démographique actuelle et ne
correspondent pas avec le nombre croissant des délinquants. A part la
prison civile de Kpalimé83(*)quivient d'être
construiterécemment, la plupart des prisons civiles datent de
l'époque coloniale et ne sont pas conformes avec les standards
internationaux et régionaux en la matière84(*).
La carencedes prisons civiles et l'inadéquation des
prisons civiles existantes sont des facteurs de la dégradation des
conditions de détention.La conséquence immédiate de ces
conditions de détention déplorablesest à base de
prolifération de certaines maladies telles que la gale, la
diarrhée, la perte en vie humaine, etc. Ces mauvaises conditions de
détention constituent des violations flagrantes et récurrentes
des droits de l'homme dans l'administration de la justice pénale.
D'une manière générale, les
établissements pénitentiaires existants ne répondent plus
aux exigences modernes de conditions de détention dignes et humaines. La
carence de structure d'accueil pour les détenus est également les
autres causes de la surpopulation carcérale.
32. B. La surpopulation carcérale
La lenteur de la procédure judiciaire et le recours
excessif à la détention préventivesont les causes
immédiates de la surpopulation carcérale85(*).Selon les
statistiques de l'administration pénitentiaireen date du 05 mai 2016, le
nombre de détenus s'élevait à quatre mille quatre cent
quatre pour une capacité d'accueil de deux mille sept cent vingt places
soit un taux d'accueil de 162 %.Pour la même période, le nombre
total des prévenus et des inculpés était de trois mille
(3.000) et celui des condamnés est de mille quatre cent quatre (1.404).
Il est à noter que le taux d'occupation national durant le premier
semestre de l'année de 2016 est de : 164 % en janvier, 166 % en
février, 165 % en mars, 164 % en avril 2016.
L'une des causes de surpeuplement des prisons et des retards
constatés dans le procès pénal, est, sans aucun doute, le
nombre élevé des personnes en attente de jugement.Le nombre
élevé de détenus préventifs s'explique en partie
par la lenteur dans la procédure judiciaire86(*). Ceci est une
violation du droit des détenus d'être jugés dans un
délai raisonnable reconnu par l'article 19 de la constitution
togolaise.
Le phénomène et il convient de le rappeler,
n'est pas propre au Togo. Il est commun à tous les Etats, y compris les
Etats développés. Il faut relever que le NCPT a fait allusion aux
mesures alternatives laissant ainsi la place au futur code de procédure
pénale de définir les différentes mesures et leurs
conditions d'application. En raison des lacunes juridiques en la
matière, lesjuges togolais sont souvent contraints de recourir à
un mandat de dépôt violant ainsi le caractère exceptionnel
de la détention préventive87(*). Il découle
duNCPT que le respect de la liberté individuelle doit être une
préoccupation permanente du juge qui doit en faire une règle
sacro-sainte.
Il est courant de constater que le juge d'instruction
lorsqu'il n'a pas l'intention d'inculper, ou le magistrat du parquet qui se
retranche derrière le défaut de temps nécessaire au
traitement du dossier, ont recours à la « note de
service » pour placer en détention l'individu qui leur
est conduit88(*). Il s'agit en fait d'un
procédé illégal, attentatoire à la liberté
individuelle et aux droits de l'inculpé ou du prévenu.
Les abus en la matière sont d'autant plus importants
que le magistrat qui ordonne la détention provisoire se prévaut
de son pouvoir souverain d'appréciation des faits. Aujourd'hui, tout
porte à croire contrairement au principe posé par l'article 112
du CPPT précité, qu'en cas d'infraction grave la détention
devient la règle et la liberté l'exception.
Il y a lieu de signaler que les mécanismes de
contrôle de la légalité de placement en détention
préventive sont défaillants. Pire, l'inexistence des juges de
l'application des peines et des libertés complique la situation des
détenus togolais.
Cependant il faut relever qu'avec la surpopulation
carcérale, il est impossible de contrôler des actes ou des
mouvements de violence déclenchés à partir de
l'intérieur de la prison. Il est très difficile d'identifier et
localiser les provocateurs et de les maîtriser. Interrogé sur les
atteintes à la dignité humaine, un détenu
déclarait: «Chaque détenu, s'il n'est pas innocent,
accepte plus ou moins une punition. Mais si la somme de souffrances et des
atteintes à la dignité dépasse le supportable, il ne se
sent plus coupable mais victime89(*).»Cette citation
interpelle tout le monde et témoigne des défaillances des
mécanismes de contrôle existants.
F. Paragraphe 2 :
Les défaillances des mécanismes de contrôle
Les défaillances des mécanismes de
contrôle de la légalité de détention et d'inspection
des conditions de détention (A) et l'insuffisance des allocations
desétablissements pénitentiaires(B) sont également des
limites à l'effectivité des droits socio-économiques des
détenus préventifs.
33. A. Les mécanismes de contrôle de la
légalité de détention et d'inspection des conditions
dedétention carcérale
Il existedes mécanismes de contrôle
juridictionnels (1) et des mécanismes de contrôle non
juridictionnels (2).
34. 1. Lesmécanismes de contrôle
juridictionnel
Au titre des mécanismes juridictionnels de
contrôle de l'exécution des conditions de détention, le
législateur togolais a prévu deux contrôles internes et un
contrôle externe.
Le Procureur de la République et le Juge d'Instruction
assurent le contrôle des lieux de détention relevant de leur
ressort. Selon les dispositions de l'article 500 du CPPT :
« Le Ministère Public visite périodiquement les
établissements pénitentiaires de sa circonscription. Il
vérifie la situation des détenus et fait élargir tous ceux
qui seraient détenus arbitrairement. Il fait rapport au Ministère
de la Justice du résultat de ses visites, quant à l'application
des dispositions relatives à la condition
pénitentiaire.» Cette mission est également
confiée au Juge d'Instruction. Aux termes des dispositions de l'article
501 du CPPT : «Le juge d'instruction visite au moins chaque
trimestre le quartier des prévenus des établissements de son
ressort et veille au respect des dispositions générales et
particulières applicables aux prévenus. Il dresse rapport de
ses visites et le transmet au Procureur Général par la voie
hiérarchique. »L'objectif de ces visites
périodiques est de permettre à ces acteurs judiciaires, de faire
appliquer dans la mesure du possible la règle 8 de l'ensemble des
règles minimales pour la protection des personnes détenues.
Cependant dans la pratique, ces prescriptions légales
ne sont pas observées. Ces visites périodiques sont inexistantes.
Ainsi, les détenus vulnérables sont laissés à la
merci des détenus plus forts et au personnel pénitentiaire.
Le contrôle juridictionnel externe est effectué
par l'Inspection Générale des Services juridictionnels et
pénitentiaires. L'équipe de l'Inspection Générale
est composée de deux hauts magistrats nommés par décret
présidentiel pris en Conseil des Ministres.
L'Inspecteur général des services
juridictionnels et pénitentiaires a pour attributions de :
contrôler le fonctionnement et la gestion interne des services et
juridictions (organisation, méthodes de travail, manière de
servir du personnel d'appui) ; mener des enquêtes et instruire les
plaintes et requêtes adressées au Garde des Sceaux, centraliser
les rapports des chefs de cours ; exploiter les données et toutes
études nécessaires à une bonne administration de la
justice.
Il existe une défaillance dans le fonctionnement de
l'inspection générale de l'administration des services
judiciaires et pénitentiaires en raison de l'irrégularité
de contrôles. Ce contrôle se fait une fois par an90(*). Cela se justifie par
le manque de ressources humaines et financières. Ces
irrégularités de contrôle contribuent à la lenteur
de l'appareil judiciaire, à la dégradation des conditions de
détention. Elles favorisent également aux détentions
abusives.
35. 2. Les mécanismes de contrôle non
juridictionnel
Le système de justice togolais n'a pas en son sein un
mécanisme séparé uniquement mandaté pour faire des
enquêtes et des poursuites pénales sur des allégations
d'actes de torture, de mauvais traitements et autres formes d'abus commis par
des représentants de l'Etat. Alors que la Commission Nationale des
Droits de l'Homme (CNDH) a pour mandat de «vérifier» et
d'examiner les allégations de violations de droits de
l'homme91(*), elle ne dispose pas de pleins pouvoirs
d'enquête et de poursuites pénales.
Il faut relever que le Mécanisme National de
Prévention contre la Torture n'est pas encore opérationnel au
Togo. Ce mécanisme est intégré à la CNDH.
La commission des droits de l'homme de l'Assemblée
nationale exerce aussi un contrôle non juridictionnel dans les
établissements pénitentiaires.
Cependant, il y a lieu de relever que les différents
mécanismes de contrôle susmentionnés effectuent rarement
des visites dans les lieux de détention afin de dissuader les auteurs de
violation des droits des détenus.C'est dans cette perspective que le
département d'Etat américain a relevé dans son rapport
que : « Il n'y avait pas des inspecteurs pour aider à
résoudre les plaintes des prisonniers et des détenus. Les
plaintes des détenus sont rarement l'objet d'enquêtes, et quand
elles le sont, les résultats ne sont jamais rendus publics. Aussi, les
enquêtes gouvernementales sur les mauvaises conditions de
détention sont-elles rares. Les Organisations non gouvernementales
locales et internationales comme le Comité international de la
Croix-Rouge (CICR) accréditées par le ministère de la
Justice ont, quant à elles, l'autorisation de visiter les
prisons. »92(*)
En plus de ces défaillances de contrôle, il
existe également une insuffisance des allocations de prise en charge.
36. B. L'insuffisance des allocations de prise en charge des
détenus
Malgré la mise en oeuvre du Programme National de la
Modernisation de la Justice et du Plan d'appui d'urgence au secteur
pénitentiaire, les résultats de la prise en charge des droits
socio-économiques des détenus sont toujours mitigés.En
effet, le budget de fonctionnement alloué à l'administration
pénitentiaire est très dérisoire et ne permet pas
d'améliorer les conditions de détention des
détenus93(*).
Ainsi, le manque de moyens financiers et le manque de
volonté politique sont à l'origine des risques de violation de la
plupart des droits humains, surtout les droits à l'alimentation, l'eau,
les vêtements, les soins de santé et un minimum d'espace pour une
existence digne et humaine. L'environnement carcéral togolais constitue
donc un terrain fertile pour les violations des droits humains, de
l'intégrité et de la dignité personnelle.
Pour Me Maître Véronique LAMONTAGNE :
« La réforme du système pénitentiaire est
souvent l'enfant pauvre de réforme de la justice. On observe une
réticence fréquente des gouvernements et partenaires financiers
à agir dans ce secteur et ce malgré, les grands
défis94(*). »Selon l'ONUDC,
il existe cinq failles dans le système pénitentiaire en Afrique
de l'Ouest : « surpeuplement; absence de prisons et centres de
détention conformes à l'ensemble des règles minimales des
Nations Unies pour le traitement des détenus et d'autres
normesinternationales pertinentes; manque de systèmes de gestion des
données; manque de personnel pénitentiaire formé aux
normes et règles pertinentes; manque de programmes de
réadaptation des détenus, de formation professionnelle et de
possibilités de s'instruire en prison.95(*) »
En effet le constat fait par l'ONUDC n'épargne pas le
Togo. Très peu de succès ont été enregistrés
dans l'amélioration des conditions de détention
préventive. La surpopulation imposante dans les établissements
pénitentiaires affecte l'accessibilité de
ressourcesmatérielles et humaines. Elle a toujours entraîné
des effets néfastes pour la société et sur la vie des
détenus.
IV. Section 2: Une prise en charge insuffisante des droits
économiques, sociaux et culturelsdes détenus
préventifs
« Les détenus, qu'ils soient
condamnés, accusés d'un crime en garde à vue et en
détention provisoire, (...) font partie des êtres humains les plus
vulnérables et oubliés dans nos
sociétés. », tels sont les propos de Monsieur
Nowak Manfred, rapporteur spécial des Nations Unies sur la
torture96(*). Pour lui, les détenus sont
vulnérables à la torture ainsi que d'autres formes de mauvais
traitements tels que la malnutrition, la sous-alimentation, manque
d'hygiène et soins.
Ce qui nous amène à parler de
l'insuffisance de la prise en charge des droits économiques, sociaux et
culturels des détenus préventifs(Paragraphe 1) et ses
répercussionssur l'ensemble de la société (Paragraphe
2).
G. Paragraphe 1:
L'insuffisance de la prise en charge des droits socio-économiques et
culturelsdes détenuspréventifs
La précarité des conditions d'hygiène et
leurs impacts sur la santé des détenus, l'insuffisance de
l'alimentation sur le plan qualitatif et quantitatif,
l'insécurité dans le milieu carcéral, l'absence de
formation et d'épanouissement, l'absence de traitement spécifique
des détenus préventifs ; telles sont quelques
réalités auxquelles sont confrontées les détenus
préventifs et qui restent d'actualité.
Il convient d'analyserdans ce paragraphe,
ladétérioration des conditions matérielles de
détention (A) et des conditions religieuses et intellectuelles
(B).
37. A. La détérioration des conditions de
détention et les atteintes auxdroits socio-économiquesdes
détenus
Dans cette partie, il serait question de
démontrer que les mauvaises conditions matérielles de
détention portentsouvent atteintes aux droits socio-économiques
suivants :
38. 1. Les atteintes au droit à l'hébergement
et à laliterie
De nos jours, le nombre de détenus est deux fois
supérieur à la capacité d'accueil des
établissements et il n'est pas rare que des cellules soient
occupées par trois ou quatre fois plus de détenus qu'elles ne
devraient normalement recevoir.
Le manque d'entretien de ces locaux y fait régner une
odeur nauséabonde quasi permanente. Cette insalubrité
conjuguée avec la surpopulation carcérale facilite la
transmission des maladies infectieuses. De plus, l'état
défectueux des toits laisse des fuites d'eau pendant la saison
pluvieuse. Cette situation aggrave les conditions de vie du détenu
préventif présumé innocent.
En ce qui concerne la literie, les détenus ne disposent
pas de lit ni de couverture appropriée. Ils ont des nattes
étalées à même le sol. Ces nattes sont d'une
épaisseur d'un millimètre. Tous les détenus ne sont pas
pourvus de couchette97(*). Dans son rapport d'activités
exercice 2014, la CNDH a relevé que : « les
détenus de la prison civile de Mango dorment dans l'obscurité,
les cellules ne disposant pas d'ampoules électriques ou de tout autre
moyen d'éclairage. »
Personne ne saurait soutenir que le détenu est
traité avec humanité. De même que le problème de
logement, l'eau et l'alimentation constituent aussi des préoccupations
quasi quotidiennes qui ne peuvent pas être exclus de cette
étude.
39. 2. Les atteintes au droit à une
alimentationsuffisante, saine et équilibrée
Les règles minima pour le traitement des détenus
disposent que tout détenu doit recevoir de l'administration aux heures
usuelles, une alimentation de bonne qualité, bien préparée
et servie, ayant une valeur nutritive suffisante au maintien de sa santé
et de ses forces.
Cependant, dans toutes les prisons civiles, la ration
alimentaire est de un repas par jour. Le régime alimentaire est
composé de pâte, de riz, du haricot, du gari et de
protéine. Toutefois les détenus déplorent la
quantité et la qualité des repas servis98(*). Les mouches s'y
posent faisant subsister des risques de maladies.
Tout compte fait, les prévenus ont la
possibilité de se nourrir à leurs frais en se procurant la
nourriture à l'extérieur par l'intermédiaire de leurs
familles ou de ceux qui leur rendent visite99(*). Il est indispensable
d'amener l'administration pénitentiaire à offrir aux
détenus à des heures usuelles une alimentation de bonne
qualité, bien préparée et servie, ayant une valeur
nutritive suffisante au maintien de leur santé et de leur force.
Outre ce qui vient d'être exposé, il importe
davantage de s'appesantir sur la question des soins médicaux à
apporter aux détenus.
40. 3. Les atteintes au droit à la santé et
auxsoinsmédicaux
Les soins médicaux, tout comme l'eau et la nourriture,
participent au maintien de la santé du détenu. Chaque
établissement doit en principe disposer des services d'un médecin
qualifié.
Dans la pratique, certaines maisons d'arrêt ne disposent
que d'une infirmerie animée par un seul infirmier. D'autres prisons
civiles telles que les prisons civiles d'Atakpamé, Bassar, Kantè
n'en disposent même pas de manière permanente, les détenus
ne recevant alors la visite d'un infirmier qu'une fois par semaine ou en cas
d'urgence. En effet, les détenus de la prison civile d'Atakpamé
sont exposés à des maladies dont les plus récurrentes sont
le paludisme et la gale alors même que la prison ne dispose pas d'un
agent de santé permanent.La promiscuité est la cause de plusieurs
maladies telles que les parasitoses et surtout, les dermatoses. Selon le
régisseur de cette prison, les détenus malades sont
consultés et traités par un infirmier
bénévole.100(*)
Les produits pharmaceutiques de premiers soins concernent les
pansements et les maux légers.Toutefois, on note une rupture dans
l'approvisionnement de ces produits dans les prisons du Togo101(*).
Les conditions d'hygiène sont désastreuses dans
nombre de maisons d'arrêt. La conséquence est que certains
détenus sont galleux, maigres et présentent parfois un
état diarrhéique inquiétant.
En ce qui concerne les cas graves de maladie, les
détenus de Lomé sont conduits au Centre Hospitalier Universitaire
SylvanusOlympio où un espace
dénommé« cabanon » est
aménagé pour recevoir les détenus.Après la
consultation ils retournent en prison. Pour certains cas, les frais
pharmaceutiques sont à la charge des parents. Au contraire, ceux qui
n'ont plus de contact avec leurs familles n'échappent pas à la
mort en raison du manque de moyens financiers pour se traiter. Au demeurant,
les demandes de mise en liberté provisoire pour raison de maladie sont
souvent refusées, et lorsqu'elles sont accordées, elles sont
assorties de caution trop élevée.
Par ailleurs, les détenus ont la possibilité de
se faire examiner par leur médecin privé à condition d'en
faire la demande adressée à l'autorité judiciaire
compétente. L'organisation des soins médicaux dans les maisons
d'arrêt au Togo, n'est pas encore satisfaisante et mérite
d'être revue afin de garantir une meilleure sécurité
sanitaire aux détenus.
41. 4. Les atteintes au droit d'accès aux
vêtements
L'administration pénitentiaire met à la
disposition des détenus des costumes pénitentiaires. S'agissant
du détenu provisoire, celui-ci n'est pas tenu au port de ce costume,
mais il peut lui en être fourni.
Le détenu est cependant autorisé à porter
ses vêtements personnels. A cet effet, il conserve ses chemises,
pantalons, vestes, tricots, pagnes, blouses et robes.
Si de façon générale les conditions
matérielles de détention sont déplorables et
méritent d'être améliorées, comment se
présentent alors les conditions intellectuelles et religieuses du
détenu préventif ?
42. B. La détérioration des conditions de
détention et les atteintes auxdroits culturels desdétenus
Il convient d'analyser ici les atteintes au droit
à l'éducation ou à la formation professionnelle et
à la culture.
43. 1. Les atteintes au droit à l'éducation ou
à la formation professionnelle
L'incarcération ne devrait pas fournir l'occasion de
briser la volonté ou le moral d'un détenu. La possibilité
d'étudier ou de se former pendant la détention contribue à
favoriser le sentiment de dignité et d'humanité des
détenus.
En pratique, tous les établissements
pénitentiaires ne sont pas organisés de manière à
assurer le minimum d'éducation ou de formation aux détenus. A la
prison civile de Lomé et de Kara, les détenus
bénéficient d'une petite formation technique. Les femmes peuvent
apprendre la couture et les hommes ont la possibilité de suivre une
formation artisanale notamment la fabrication de paniers, sacs en raphia,
savons liquides, bracelets. Ils ne suivent pas des cours de français
où ils peuvent apprendre à lire et écrire.
S'agissant de la culture en général, les
détenus n'ont pas la possibilité de se cultiver dans la mesure
où les maisons d'arrêt ne mettent pas à leur disposition
des livres ou des journaux quotidiens, de périodiques ou de publications
pénitentiaires spéciales. Néanmoins ils se contentent des
postes téléviseurs mis à leur disposition et de leurs
propres radios.
44. 2. Les atteintes au droit culturel et religieux
Toute personne a la liberté de pensée, de
conscience et de religion ; ce droit implique aussi pour le détenu
provisoire, d'avoir ou d'adopter une religion ou une conviction de son choix
ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa conviction
individuellement ou en commun par le culte et l'accomplissement des rites, les
pratiques et l'enseignement. La possibilité de participer à des
rites religieux constitue un droit fondamental de l'homme. Dans la pratique
carcérale,ce droit connaît une effectivité relative.
A l'analyse de tout ce qui précède, nous sommes
d'accord avec l'équipe de l'ONG Atlas of Torture que la grande
surpopulation carcérale a de lourdes répercussions sur les
conditions de détention carcérale et que cela conduit à
une situation dans les prisons qui est souvent qualifiée
d'inhumaine102(*).
Cette situation déplorable des conditions de
détention carcérale est une violation des dispositions de
l'article 16 de la Constitution togolaise. Pour le constituant togolais «
tout prévenu ou détenu doit bénéficier d'un
traitement qui préserve sa dignité, sa santé physique et
mentale et qui aide à sa réinsertion sociale. »
La pratique de la détention préventive ne porte
pas seulement atteintes aux droits et libertés civils, politiques,
économiques, sociaux et culturels des détenus préventifs
mais elle a également des répercussions socio-économiques
sur l'ensemble de la société.
H. Paragraphe
2 : Lesrépercussions socio-économiques de la
détention préventive
La détention préventive excessive a des
conséquences socio-économiques sur la famille du détenu
préventif (A) et sur la société togolaise (B).
45. A. Les répercussions socio-économiques de
la détentionpréventive sur la familledu détenu
La détention préventive bien qu'étant une
mesure de sûreté et de sécurité a des
répercussions sur le prévenu et sa famille. Elle atteint
socialement ces derniers et les dépouille économiquement. Par
exemple, la détention d'un chef de ménage occasionne une perte de
revenus pour le reste de sa famille. Ainsi,la situation du détenu va
ainsi affecter la vie économique du ménage.
En effet, les défaillances de la prise en charge des
droits sociaux et économiques des détenus
préventifscontraignentla famille du détenu préventif
à venir au secours de leur membre détenu. La famille est
prête à céder tous ses biens matériels afin
d'obtenir la libération ou la mise en liberté provisoire du
détenu préventif. Ainsi, les familles de détenus
supportent une charge économique extrêmement lourde en lieu et
place de l'Etat. Cette situation rend le détenu ainsi que sa famille
plus vulnérable. Une fois sortie de la prison et mal accueilli dans sa
famille voire dans sa société, l'ex-prévenu n'a plus de
joie que de se relancer dans la délinquance. Il devient un cas social et
constitue un danger public.
46. B. Les répercutions socio-économiques de la
détention préventive surl'ensemble de lasociété
La précarité de la protection des droits de
l'homme au cours de la détention préventive et les effetsfont
peser un risque sur l'ensemble de la société togolaise. Il faut
relever que la population carcérale togolaise n'est pas seulement
constituée de grands criminels mais elle regorge aussi de braves
personnes très qualifiées issus des grandes écoles de
formation, des universités et centres de formation. Ces personnes
peuvent contribuées au développement de la société
togolaise.
Selon une étude réalisée en Guinée
par AVOCATS SANS FRONTIERES GUINEE ET SABOU GUINEE, il ressort que :
« la pratique excessive et arbitraire de la détention
provisoire est une forme oubliée de violation des droits humains qui
affecte chaque année des millions de personne, cause et aggrave la
pauvreté, freine le développement économique, propage des
maladies et mine l'état de droit. Les personnes en détention
provisoire courent le risque de perdre leur emploi et leurs habitations ;
contractent et propagent des maladies. Elles sont obligées de payer des
pots de vin pour obtenir une libération ou de meilleures conditions de
détention, subissent des préjudices physiques et psychologiques
qui persisteront longtemps après la fin de leur
détention103(*).»
Selon cette même étude, il ressortque la
détention provisoire occasionne des dépenses exorbitantes aux
Etats. A titre d'exemple le coût de l'emprisonnement à
l'échelle mondiale est difficile à calculer. Mais la meilleure
estimation en 1997104(*), le situe autour de 62,5 milliards de
dollars par an. Dans le même sens, l'ONUDC estime que l'impact
socio-économique de la détention est très énorme
car selon cette institution : « Les coûts directs
comprennent la construction et l'administration des prisons ainsi que
l'hébergement, l'alimentation et la prise en charge des détenus.
Il y a aussi des coûts indirects ou annexes importants, car
l'emprisonnement peut affecter l'ensemble de la collectivité de diverses
manières. Par exemple, les prisons sont des foyers de maladies telles
que la tuberculose et le SIDA, en particulier lorsqu'elles sont
surpeuplées, et lorsque les détenus sont libérés,
ceux-ci risquent de contribuer à leur propagation105(*).»
L'étude de la protection des droits de l'homme à
l'épreuve de la détention préventive au Togo, a permis d'
évaluer le degré de protection et de prise en charge des droits
fondamentaux des détenus préventifs en comparaison avec les
normes internationales en la matière.En effet, le travail a
consisté à examiner les différentes catégories des
droits fondamentaux et garanties procédurales impliqués dans la
détention préventive. Il ressort de cette évaluation que
le système togolais de protection des droits de l'homme au cours de la
détention préventive comporte des lacunes d'ordre textuel et des
pratiques illégales. C'est ce qui explique la précarité de
la protection des droits civils et politiques des détenus et la
défaillance de la prise en charge des droits socio-économiques
des détenus.Il ressort également de cette évaluation quela
détention préventive telle que pratiquée au Togo a des
impacts socio-économiques sur le détenus, sa famille et sur la
société togolaise. Il faut toutefois signaler que les
résultats de cette recherche ont été confortés par
des rapports d'études ci-dessus cités. Lesdits rapports
révèlent que malgré les efforts que le Togo a consentis
dans le domaine de la modernisation de la justice, les résultats sont
toujours mitigés106(*).A la lecture de ce passage, la conclusion
à tirerest que lesystème togolais de protection des droits de
l'homme dans le contexte de la détention préventive est encore
perfectible. D'où la question de savoir : quelles sont les mesures
adéquatesà envisager pour une meilleure protection de ces
droits ?
DEUXIEME PARTIE :
UNE
PROTECTION PERFECTIBLE DES DROITS DEL'HOMMEAU COEUR DE LA DETENTION PREVENTIVE
AU TOGO
La détention provisoire est une mesure
inévitable, selon les cas, dans l'intérêt de la recherche
de la vérité. Si elle consiste à priver de liberté
la personne soupçonnée d'avoir commis une infraction, cependant,
elle n'entraîne pas tout de même à l'aliénation
totale de ses droits. De ce point de vue, le détenu mérite un
traitement adéquat dans un cadre qui n'avilisse pas son
intégrité physique, morale, sa dignité humaine et sa
santé. Cela demeure cependant un idéal à atteindre.
L'inquiétude persiste sur le respect des droits civils, politiques,
socio-économiques et culturels des détenus et la volonté
d'améliorer un système pénitentiaire adapté
à l'évolution du droit et des valeurs humaines.
Aujourd'hui, plus que jamais l'amélioration de la
protection des droits du détenu préventif s'avère
importante dans la mesure où le Togo doit tendre vers un Etat de droit
dans lequel le souhait est de respecter les droits de tous les individus
jouissant ou non de leur liberté d'aller et venir. Afin de maintenir
l'intégrité et la dignité des détenus
préventifs, ces derniers doivent également continuer à
jouir de leurs droits économiques, sociaux et culturels tels que le
droit à l'alimentation, au logement, à l'habillement, à la
santé, au travail et à l'éducation.
L'amélioration souhaitée, de la
protection des droits des détenus passe nécessairement par une
mobilisation urgente de l'Etat togolais (Chapitre I) et une intervention accrue
des Organisations non gouvernementales en faveur de la protection des droits
des détenus préventifs (Chapitre II).
CHAPITRE I :
L'URGENCE DE LA MOBILISATION DE L'ETAT TOGOLAIS EN FAVEUR DE LA PROTECTION DES DROITS DES DETENUS
PREVENTIFS
« Tous les droits humains sont universels,
indissociables, interdépendants et intimement liés. La
communauté internationale doit traiter des droits humains globalement,
de manière équitable et équilibrée, sur un pied
d'égalité et en leur accordant la même
importance107(*). » Ce passage invite
tous les Etats à ne négliger aucun aspect des droits de l'homme
car tous les droits de l'homme même les droits fondamentaux des
détenus se valent. Pour l'ancien Secrétaire général
des Nations Unies Kofi Annan, les droits humains ne sont étrangers
à aucune culture, ils appartiennent à tous les pays, ils sont
universels108(*). L'universalité de ces droits
recommande que chaque Etat prenne des mesures urgentes afin de faire cesser les
cas de violation des droits de l'homme sur son territoire.
Ainsi, une meilleureprotection des droits de l'homme
à l'épreuve de la détention provisoire au Togo implique
l'accélération des réformes juridiques et
institutionnelles entreprises par l'Etat togolais (Section I), mais aussi la
responsabilisation des acteurs intervenants dans ce domaine (Section II).
V. Section 1 : L'effectivité
des mécanismes de protection des droits de l'homme dans laphase procédurale de la détention
préventive
Dans le souci d'assainir l'environnement juridique, judiciaire
et carcéral en matière de la protection des droits de l'homme,
l'Etat togolais a entrepris depuis 2005 de vastes programmes de modernisation
de l'appareil judiciaire. Cependant onze (11) ans après la mise en
oeuvre de ces programmes, le constat est le même : ratio croissance
de la population et croissance de la délinquance, mauvaises conditions
de détention avec pour conséquences pertes en vies humaines,
impacts socio-économiques,etc.
Si le Togo veut soigner son image, il serait urgent de
concrétiser les reformes juridiques et institutionnelles (Paragraphe 1)
et d'instaurer un contrôle judiciaire des décisions de placement
(Paragraphe 2).
I. Paragraphe
1 : La concrétisation attendue des reformes législatives
etinstitutionnellesen matière de la détention provisoire
Une telle concrétisation passe
nécessairement par l'accélération de l'adoption du Nouveau
Code de procédure pénale, de textes réglementaires
régissant l'organisation, le fonctionnement des établissements
pénitentiaires et l'effectivité de l'aide juridictionnelle (A)
ainsi que la modernisation des institutions de placement (B).
47. A. La nécessité d'accélérer
la révision du code de procédure pénale togolais et des
textesréglementaires
Le régime de la détention préventive
prévu par le Code de procédure pénale de 1983 n'a pas
connu de réformes visant à le réajuster ou le conformer
aux exigences de respect des droits de l'homme. En effet, la détention
préventive, dans sa mise en oeuvre, constitue l'un des
éléments les plus fréquents d'atteinte aux droits de
l'homme. Il est urgent de doter l'appareil judiciaire togolais d'un Nouveau
Code de Procédure Pénale du Togo (NCPP) conforme au NCPT et aux
standards internationaux.
Pour le juge togolaisFiawonou109(*), le NCPP prendra en
compte les principes et droits constitutionnels garantissant la protection des
personnes mises en cause pénalement tels que la présomption
d'innocence entre autres.
Ainsi, le législateur togolais devrait insérer
dans le NCPP, un nouveau régime de la détention préventive
et uneduréede détention préventive courte et
desdélaisde déroulement de l'information.
Le placement en détention préventive abusive qui
est une atteinte directe au principe de la présomption d'innocence
résulte aussi bien du mandat d'arrêt que du mandat de
dépôt. Ce mandat de dépôt, en effet, ne mentionne pas
les motifs qui fondent le maintien en détention de l'inculpé.
Dans la pratique les juges font appel à leur intime
conviction et décident en toute souveraineté de la
détention provisoire. De plus, ces mandats ne sont pas pour autant
susceptibles d'appel de la part de l'inculpé.
Dans le souci de lutter contre les détentions
préventives trop longues et pour permettre à l'inculpé de
contester la décision du juge, il est opportun que ce soit une
ordonnance du juge d'instruction qui prescrive la détention
préventive. Cette ordonnance doit être suffisamment motivée
et ne saurait être prise qu'après l'interrogatoire de
l'inculpé. L'ordonnance doit donc être préalable au mandat
de dépôt, lequel n'en est que le titre d'exécution. Tel est
en réalité le souhait de certains auteurs comme Faustin Helie,
lorsque définissant la nature de la délivrance du mandat
d'arrêt, il dit : « c'est un jugement provisoire que
rend le juge, et ce jugement doit être fondé sur des
présomptions sérieuses, puisqu'il place le prévenu en
état de détention. » Il renchérit en
déclarant par ailleurs que : « jamais la loi ne
doit garder le silence sur les motifs de la détention préventive.
Ce serait là une lacune grave et dangereuse. »
L'ordonnance de placement en détention
préventive est en effet une décision susceptible d'appel. En
conséquence, tout moyen de placement en détention contraire
à la loi comme par exemple la note de service devrait disparaître.
Bien qu'elle soit très pratique, elle constitue une véritable
menace pour les droits de l'homme.
En ce qui concerne la durée de la détention
provisoire et les délais pour le déroulement de l'information,
souvent qualifiés de trop longs, le NCPP devrait instaurer de nouveaux
délais plus courts. C'est dans cette optique que l'Avocat
général, Marc YaoviFiawonou soutient que
: « le code actuel ne prévoit aucun délai,
autre que ceux qui résultent des textes sur la détention
provisoire, quant à la durée des procédures de mise en
état des affaires pénales. La lenteur des procédures et
l'incertitude sur leur durée font partie des reproches traditionnels
adressés à lajustice et nuisent tant à son image
qu'à son efficacité sociale et aussi à la
présomption d'innocence.»
L'analyse de ce passage qui concorde avec les résultats
de cette présente recherche a permis de suggérer qu'il serait
indispensable quele NCPP mette en exergue à travers les dispositions
bien précises le principe de la présomption d'innocence, le droit
d'assistance à un avocat ainsi que les modalités de sa pratique.
Il devrait également prévoir le droit à l'indemnisation
pour erreur judiciaireet le fonctionnement anormal de la justice avec les
modalités pratiques pour son application.
Enfin, il est urgent que les autorités
compétentes prennent des textes législatifs ou
réglementaires conformes aux règles minima afin de mieux
régir l'organisation et le fonctionnement des établissements
pénitentiaires. Il est également primordialdeprendre, sans
délai, le décret et l'arrêté relatifs à
l'opérationnalisation du Conseil National de l'Aide Juridictionnelle et
des Bureaux d'Aide Juridictionnelle auprès des juridictions et de doter
ces mécanismes de moyens adéquats pour leur fonctionnement
effectif110(*).
L'accélération de la révision du cadre
juridique ne suffit pas à elle seule pour garantir l'effectivité
des droits fondamentaux des détenus préventifs, il faut
également reformer rapidement la chaine pénale.
48. B. Lanécessité d'accélérer
la réforme de la justice pénale
L'amélioration du système de fonctionnement de
la justice pénale passe par la réorganisation des services
judiciaires et de la dotation de ces services des moyens humains et
matériels afin de rendre plus accessible la justice et lutter contre la
lenteur judiciaire. Cela nécessite la mobilisation de beaucoup de fonds
de la part de l'Etat. Il faut rappeler que l'Etat a fait de la modernisation
de la justice l'une de ses priorités. C'est dans cette perspective que
le Togo a inscrit l'accès au droit et à la justice pour tous dans
l'axe quatre de la Stratégie de Croissance
Accélérée et de Promotion de l'Emploi (SCAPE).
Pour l'Etat Togolais,
ils'agitnotamment : « d'améliorerl'efficacitédu
système
judiciaireàtraverslerenforcementdescapacitésd'administrationetdecontrôledesjuridictionsetderenforcerl'accès
audroitetàlajusticeainsi que la justicede proximité à
travers une amélioration de la couverture du territoire des services
judiciaires
etlerenforcementdudispositifd'accèsàl'aidejuridictionnelleauxpluspauvres111(*).»
Cependant à un an de la fin de la SCAPE, la justice
togolaise peine toujours à se relever ; les résultats sont
toujours insuffisants.
Pour notre part, la modernisation de la justice pénale
doit couvrir tous les aspectsde la justice pénale c'est-à- dire
des infrastructures, équipements, ressources humaines et
financières, les campagnes de vulgarisation ou de sensibilisation, la
motivation des acteurs intervenants dans la chaine pénale, le
rapprochement de la justice des justiciables, le renforcement des
capacités des magistrats, régisseurs et l'ensemble du personnel
qui intervient dans ce domaine en somme.
En définitive, l'accélération de la
réforme de la justice pénale constitue un moyen efficace pour
réduire la surpopulation carcérale au Togo. Cette méthode
a d'ailleurs été privilégiée lors de la
déclaration de Ouagadougou, sur les réformes pénales et
pénitentiaires en Afrique. En effet les chefs d'Etats et de
gouvernements avaient convenulors de ce sommet de prendre des mesures
appropriées et urgentes afin de réduire la population
carcérale. Ils avaient estimé que : « les
différents organes de la justice pénale devraient collaborer plus
étroitement afin de moins recourir à l'emprisonnement. La
population carcérale ne peut être réduite que par une
stratégie concertée112(*).»
Aussi, la protection des droits fondamentaux des
détenus rend-elle nécessaire le contrôle judiciaire de la
détention provisoire.
J. Paragraphe
2 : La mise en oeuvre effective des mesures alternatives à la
détention provisoirecomme garantie des droits fondamentaux des
détenus préventifs
Si la détention provisoire entraîne
inévitablement une perte de liberté, dans la pratique, elle porte
aussi régulièrement atteinte à plusieurs autres droits de
l'homme. C'est pourquoi le système de justice pénale ne devrait
recourir à la détention provisoire que lorsque des mesures
alternatives ne peuvent pas répondre aux préoccupations qui
justifient l'usage de cette détention.
Les décisions concernant les mesures
alternatives à la détention provisoire devraient être
prises aussitôt que possible (A). Lorsque la décision est de
maintenir une personne en détention provisoire, cette dernière
doit pouvoir en faire appel auprès d'une autorité
judiciaire113(*)
(B).
49. A. L'efficacité des mesures alternatives à
la détention préventive et du juge des libertés et de la
détention
La détention préventive est une mesure
exceptionnelle114(*). Cela signifie que la libertédoit
être la règle et la détention l'exception. En vertu de
cette règle, des mesures alternatives à la détention
préventiveont été prévues par le législateur
togolais : le contrôle judiciaire115(*) et le
cautionnement.Ainsi, le contrôle judiciaire a été
retenucomme mesure alternative à la détention préventive
par le CPPT116(*). Ces mesuressont ordonnées par le
juge d'instruction.Ellesont pour but de garantir le paiement des
réparations civiles et des frais de justice ou la représentation
de l'inculpé. Il faut noter que ces deux mesures contribuent
également à limiter les temps de détention
préventive cause de la surpopulation carcérale et mieux assurer
le respect de la présomption d'innocence.
Aux termes des dispositions de l'article 123 du CPPT,
« le cautionnement peut être versé par un tiers pour
le compte de l'inculpé. Il est restitué en cas de non-lieu ou
d'acquittement sous réserve des oppositions régulières
formées par les créanciers de l'inculpé. En cas de
condamnation le cautionnement est affecté au paiement des dommages
intérêts et des frais. Le reliquat éventuel est
restitué au condamné ou au tiers ayant payé pour son
compte ».
Quant au contrôle judiciaire, le juge d'instruction peut
subordonner la mise en liberté provisoire de l'inculpé
pardesastreintes telles que l'obligation de résider dans un lieu
déterminé, l'interdiction de fréquenter certains lieux ou
certains établissements, l'exercice d'un travail régulier,
l'obligation de suivre un traitement médical ou une cure de
désintoxication117(*). A cet effet, le juge d'instruction peut
désigner un délégué pour veiller
spécialement à l'exécution des mesures de contrôle
judiciaire conditionnant la remise en liberté. Il peut également
ordonner une remise de détention préventive en cas de tout
manquement aux obligations particulières fixées par
lui118(*).
Cependant au Togo, il existe des écarts entre la
théorie et la pratique des mesures alternatives à la
détention provisoire. Bien que réglementé par le CPPT, le
contrôle judiciaire est presque tombé en désuétude
au profit de la détention préventive. Par fautes de garanties
suffisantes de représentabilité119(*)ou pour des raisons
de sécurité, politiques ou personnelles, le ministère
public privilégie la détention préventive en lieu et place
des mesures non privatives de liberté120(*) telles que la
médiation pénale et le règlement
amiable.Le ministère public et le juge d'instruction
ont tendance à recourir à la détention préventive
comme un moyen pour satisfaire les `'intérêts personnels''. Cette
pratique n'est pas conforme avec l'article 6.2 de l'ensemble des règles
de Tokyo121(*). Aussi, il va falloir que les magistrats
perçoivent leur métier comme un élément capital qui
concourt à la cohésion sociale. Ils doivent cesser d'avoir de
telles appréhensions. Pour ce faire, ils doivent privilégier la
liberté provisoire à la détention préventive qui
constitue un risque pour la santé de la personne mise en
détention préventive122(*).
La recherche d'alternatives à l'incarcération
avant le jugement doit être un des objectifs premiers d'une politique
pénale respectueuse de la présomption d'innocence et de
prévention de la récidive.
Pour la garantie des droits fondamentaux des détenus
préventifs, il est très important que le législateur
togolais institutionnalise le juge des libertés et de la
détention. Le juge des libertés et de la détention
s'occupera désormais des questionsrelatives à la mise en
libertéprovisoire et de la détention préventive.Mais avant
l'institution du juge des libertés et de la détention, la
réforme de l'état civil et l'adressage des villes, communes et
villages s'imposes.
Tout compte fait, le législateur togolais a
prévu des voies de recours en cas de refus de mise en liberté
provisoire du détenu préventif.
50. B. Lerenforcement de l'efficacité des voies de
recours
Le mandat de dépôt n'est pas susceptible d'appel.
Ce mandat n'est pas non plus précédé d'une ordonnance de
placement en détention contre laquelle peut exercer son droit de
recours.
Le législateur togolais a organisé indirectement
le droit de recours en matière de détention provisoire. En effet,
d'une façon générale la loi précise que le
Procureur de la République a le droit d'interjeter appel devant la
Chambre d'Accusation de toute ordonnance du juge d'instruction. Dans tous les
cas, ce droit appartient également au Procureur Général.
Le même législateur mentionne davantage que le droit d'interjeter
appel appartient également à l'inculpé. Ce dernier peut
interjeter appel contre les ordonnances de mise en liberté lorsque cette
mise en liberté est refusée, soit lorsqu'elle est accordée
sous condition123(*).
Ceci suppose que l'inculpé détenu provisoirement
doit d'abord adresser une demande de mise en liberté provisoire au juge
d'instruction. Celui-ci statue sur ladite demande par ordonnance
motivée, l'accordant ou la refusant.
C'est seulement cette ordonnance du juge d'instruction que
l'inculpé peut attaquer.L'appel de l'inculpé doit être
formé dans les trois (03) jours de la notification de l'ordonnance, soit
par lettre recommandée, soit par déclaration faite à
l'officier ou à l'agent de la force publique ou à l'huissier qui
procède à la notification ou à la signification. Toute
manifestation non équivoque de la volonté de faire appel est
valable, qu'elle soit écrite ou verbale, dès lors qu'il est
établi que le greffier en a eu connaissance dans le délai
d'appel.
Le Procureur général met l'affaire en
état dans les quarante-huit (48) heures de la réception des
pièces en matière de détention préventive. Celle-ci
doit, en la matière, se prononcer dans les brefs délais et au
plus tard dans les trente (30) jours de l'appel, sauf si des
vérifications concernant la demande de mise en liberté ont
été ordonnées124(*).
A l'occasion de l'appel d'une ordonnance sur la liberté
provisoire ou la détention, l'inculpé ne peut invoquer une
nullité de procédure ou soulever un moyen touchant le fond de la
poursuite. Si tel est le cas, la Chambre d'accusation ne peut que
déclarer de tels moyens irrecevables. Elle commettrait un excès
de pouvoir si elle statuait sur le fond des moyens ainsi soulevées.
Eu égard à tout ce qui précède,
l'exercice des contrôles judiciaires contribuent à garantir le
principe d'innocence et les droits fondamentaux du détenu
préventif. En effet, le renforcement de l'efficacité des
mécanismes de contrôle au Togo permettra d'éviter les
détentions abusives causes de la surpopulation carcérale,
désengorger les prisons, les dépenses publiques exorbitantes pour
le traitement et l'alimentation des détenus. Il permettra
également aux détenus préventifs de garder leur emploi, de
ne pas être exposés aux maladies, à la torture et aux
traitements cruels, inhumains et dégradants.
Mais une telle effectivité nécessite beaucoup de
ressources tant matérielles, humaines que financières.
En définitive, durant toute la
procédure, le détenu doit être protégé. Cette
protection doit exister également sur les lieux de la détention
par l'amélioration des modalités de traitement.
VI. Section
2 : L'améliorationde la prise en charge des droits
économiques, sociaux etculturels
La prise en charge des droits socio-économiques et
culturels des détenus préventifs doit répondre aux
exigences des règles minima en la matière.
Une meilleure prise en charge passe par
l'amélioration des conditions de détention (Paragraphe I) et
l'effectivité des mécanismes de réparation et
d'indemnisation (Paragraphe II).
K. Paragraphe
1 : L'amélioration des modalités de traitement des
détenus préventifsen milieucarcéral
Les conditions de détention doivent être
améliorées au plan matériel (A) et moral(B).
51. A. Sur le plan matériel
Il s'agit d'améliorer la vie quotidienne du
détenu tant au niveau de son logement que de sa santé en
général.
52. 1. Construction des prisons modernes
Les maisons d'arrêt existantes sont pour la plupart
vétustes et trop exiguës par rapport à la population
carcérale. Elles ne sont pas conformes aux standards internationaux en
la matière. Il faut donc procéder à leur rénovation
pour assurer une meilleure sécurité des détenus.
De plus, il est opportun de construire des maisons
d'arrêt à côté des maisons centrales afin de
séparer les détenus préventifs des condamnés. Les
nouvelles prisons seraient d'une plus grande dimension et dotées de
matériels nécessaires au bien être des détenus en
général et des détenus préventifs en
particulier.
Les locaux de détention doivent répondre aux
exigences de l'hygiène, compte tenu du climat, notamment en ce qui
concerne le cubage d'air, la surface minimum, l'éclairage et la
ventilation. Dans ce cas, les fenêtres doivent être suffisamment
grandes pour que le détenu puisse lire et travailler à la
lumière naturelle. Ces locaux doivent être maintenus en parfait
état d'entretien et de propreté. Il faut également
séparer les différentes catégories de détenus.
53. 2. La séparation des détenus
Les détenus provisoires devraient, en raison de la
présomption d'innocence dont ils bénéficient, être
séparés des condamnés. Pour cela, à défaut
de bâtir une maison d'arrêt pour les détenus
préventifs, il faut prévoir des quartiers distincts pour les
accueillir.
Les détenus devraient aussi faire l'objet d'une
surveillance s'agissant de l'hygiène et des soins médicaux.
54. 3. L'hygiène et les soins médicaux
Ilest exigé des détenus la propreté
personnelle. A cet effet ils doivent disposer d'eau et des articles de toilette
nécessaires à leur santé et à leur
propreté.
Afin de permettre aux détenus de se présenter de
façon convenable et de conserver le respect d'eux-mêmes, des
facilités doivent être prévues pour le bon entretien de la
chevelure et de la barbe, les hommes devraient pouvoir se raser
régulièrement.
L'Etat doit pourvoir à chaque établissement
pénitentiaire au moins les services d'un médecin qualifié,
psychiatre, laborantin, infirmier, sage-femme et sociologue. Les
établissements doivent disposer de matériels, d'un outillage et
des produits pharmaceutiques en permanence afin de donner les soins et un
traitement convenables aux détenus malades. Les détenus doivent
pouvoir bénéficier également des soins d'un dentiste
qualifié.
Par ailleurs, il doit y avoir des installations
spéciales nécessaires pour le traitement des femmes enceintes,
relevant de couche ou convalescentes.
Le médecin doit être chargé de surveiller
la santé physique et mentale des détenus. Il devrait chaque jour
voir les détenus malades, tous ceux qui se plaignent d'être
malades et tous ceux sur lesquels son attention est particulièrement
attirée. Aussi devrait-il surveiller la qualité et la
propriété des aliments et de la literie.
55. 4. La nourriture et le matériel de couchage
Le détenu provisoire, et de façon
générale, tout détenu doit recevoir de l'administration
aux heures usuelles une alimentation de bonne qualité, ayant une valeur
nutritive suffisant au maintien de sa santé et de ses forces. Il est
tout aussi indispensable de permettre au détenu d'avoir la
possibilité de se pourvoir eneau potable lorsqu'il en a besoin.
En outre, à défaut d'un lit et d'une literie
individuelle, l'administration doit s'efforcer de mettre à la
disposition des détenus, des nattes ou couchettes ayant une
épaisseur convenable. Ces couchettes doivent être
remplacées périodiquement.
Tout compte fait, l'amélioration des conditions de vie
du détenu préventif répond aux exigences des droits de
l'homme. Elle l'est davantage lorsque sur le plan moral la personne
détenue bénéficie d'un traitement adéquat.
56. B. Sur le plan moral, intellectuel et religieux
Les établissements pénitentiaires doivent
être dotés de services sociaux. Les fonctionnaires sanitaires
devraient participer à donner du réconfort moral et psychologique
aux détenus. Ils doivent servir d'intermédiaire entre les
détenus et leurs familles.
Dans le cadre des contacts avec le monde extérieur, le
mécanisme à mettre en place consistera à autoriser, sous
la surveillance nécessaire, les détenus provisoires à
communiquer avec leurs familles beaucoup plus facilement à intervalles
réguliers tant par correspondance qu'en recevant leur visite.
Au plan de l'éducation, un programme spécial
doit être élaboré pour favoriser l'épanouissement
des détenus.
Au plan religieux, étant donné que les
détenus sont de religions différentes, chacun doit être
autorisé à pratiquer sa religion sans discrimination. Si
l'établissement contient un nombre suffisant de détenus
appartenant à la même religion, un représentant
qualifié de cette religion doit être nommé afin
d'accompagner ou de guider les autres détenus dans leurs prières.
Le détenu doit être autorisé dans la mesure du possible
à satisfaire aux exigences de sa vie religieuse, en participant aux
services organisés dans l'établissement et en ayant en sa
possession les livres d'édification et d'instruction religieuse de sa
confession.
En somme, l'amélioration des conditions de
détention énoncées ci-dessus garantit le droit à la
santé des détenus qui est un droit fondamental car selon
l'OMS : « La santé est un état de complet
bien-être physique, mental et social, et ne consiste pas seulement en une
absence de maladie ou d'infirmité. La possession du meilleur état
de santé qu'il est capable d'atteindre constitue l'un des droits
fondamentaux de tout être humain, quelles que soient sa race, sa
religion, ses opinions politiques, sa condition économique ou
sociale125(*).»
La seule amélioration des conditions de
détention dans les établissements pénitentiaires n'est pas
efficace pour la garantie des droits fondamentaux des détenus
préventifs. Pour l'effectivité de ces droits, il est
indispensable que l'Etat renforce ses mécanismes de contrôle des
établissements pénitentiaires.
L. Paragraphe
2 : L'effectivité des mécanismes de contrôle des
établissementspénitentiaires et de réparation de
préjudice
La garantie des droits fondamentaux des détenus
préventifs ne sera effective que si les mécanismes de
contrôle des conditions de détention (A) et de réparation
des violations des droits fondamentaux des détenus (B) seront
renforcés efficacement.
57. A. La nécessite de renforcer l'efficacité
des mécanismes de contrôle étatique des
établissements pénitentiaires
Les organes étatiques intervenants dans le
contrôle des établissements pénitentiaires sont de deux
ordres à savoir les organes internes et les organes externes.
58. 1. Le contrôle interne
Il faut comprendre par contrôle interne, le
contrôle effectué par les autorités judiciaires et
pénitentiaires. En effet, l'Inspection générale des
services judiciaires et pénitentiaires, la Direction de l'administration
pénitentiaire, le Procureur de la République, le Juge
d'instruction font souvent des visites inopinées dans les
établissements pénitentiaires afin de s'imprégner des
réalités carcérales. Ils peuvent à la suite de
leurs visites,faire des recommandations au Ministère de la Justice afin
que des mesures urgentes soient prises.
59. 2. Le contrôle externe
Le contrôle externe est exercé par la Commission
Nationale des Droits de l'Homme(CNDH)et la Commission des droits de l'homme de
l'Assemblée Nationale. Ainsi, la CNDHdu Togo a été
créée par la loi N°87-09 du 09 juin 1987 modifiée le
11 mars 2016 par, une loi organique portant composition, organisation et
fonctionnement de la Commission Nationale des Droits de l'Homme. Cette loi
intègre le Mécanisme National de Prévention de la torture
(MNP). C'est une institution constitutionnelle indépendante, ayant en
charge la promotion et la protection des droits de l'homme126(*). Elle est membre du
Comité International de Coordination des institutions de protection et
de promotion des droits de l'homme (CIC) et y est accréditée au
statut A127(*).
Dans le cadre de la protection des droits fondamentaux des
détenus, la CNDH visite les prisons civiles et reçoit les
plaintes des victimes des détentions arbitraires, de torture, de mauvais
traitement. A la fin de sa mission, la CNDH produit un rapport et fait des
recommandations aux autorités compétentes.
Le Comité des droits économiques, sociaux et
culturels, dans son Observation générale n° 10 sur le
rôle des institutions nationales de défense des droits de l'homme
dans la protection des droitséconomiques, sociaux et culturels, a
souligné que ces institutions « pourraient jouer un
rôle capital pour ce qui est de promouvoir et de garantir
l'indivisibilité et l'interdépendance de tous les droits de
l'homme. Trop souvent, malheureusement, ce rôle ne leur a pas
été accordé, ou alors elles s'en sont
désintéressées ou l'ont jugé non prioritaire. Il
importe par conséquent au plus haut point que les institutions
nationales accordent toute leur attention aux droits économiques,
sociaux et culturels dans le cadre de chacune de leurs
activités. »128(*).Les institutions nationales des droitsde
l'homme ne peuvent pas répondre aux besoins des groupes
vulnérables sans tenir compte des droitséconomiques, sociaux et
culturels.
Cependant les contrôles actuellement existants ont
démontré leurs insuffisances alors que du fait de l'augmentation
de la population carcérale, ils deviennent plus impératifs en
raison de la difficulté croissante de la mission pénitentiaire.
L'environnement international incite les Etats à créer un
contrôle spécifique des prisons. Pour que le traitement du
détenu togolais soit donc conforme aux principes fondamentaux d'un Etat
régi par la prééminence du droit et l'objectif primordial
de la garantie des droits de l'homme129(*), il est urgent que l'Etat metteen place les
moyens d'une telle politiqueafin de rendre plus efficace les contrôles
existants. Il doit également renforcer les mécanismes de
réparation.
60. B. La nécessité de renforcer les
mécanismes de réparation et d'indemnisation
Le droit à la réparation et à
l'indemnisation des victimes de violation des droits fondamentaux au cours
d'une instance est garanti par l'article 19 al. 4 de la Constitution
Togolaise130(*). Ainsi le constituant togolais a
répondu aux exigences des normes internationales en la matière.
Dans la pratique, seules les personnes condamnées par erreur peuvent
dans le cadre de la demande en révision solliciter des
dommages-intérêts à l'Etat131(*).
En ce qui concerne les détenus provisoires
bénéficiant d'une décision de non-lieu, l'Etat doit
pouvoir les indemniser. Cette question n'avait pas été la
préoccupation majeure du CPPT car ce dernier est presque muet.
Néanmoins, le CPPT a effleuré un peu ce sujet à travers
les dispositions de l'article 345 : « Le prévenu
acquitté peut solliciter des dommages-intérêts dont le
montant est fixé par le jugement d'acquittement s'il s'avère que
la partie civile a abusé de son droit d'agir en prenant à la
légère l'initiative des poursuites. » Il faut
noter que cette mission a été confiée à la Chambre
administrative de la Cour d'Appel qui entre temps avait fermé ses portes
aux justiciables. Pour rendre effectif cette chambre, le Président de la
Cour d'Appel de Lomé a, par une ordonnance désigné un
conseiller de ladite cour pour présider cette chambre132(*).Il faut
préciser qu'à la date du 18 mai 2016, aucun juge n'a
été nommé comme juge assesseur.Mais cette chambre n'est
pas toujours fonctionnelle.
En droit français, la procédure d'indemnisation
est réglementée par le code de procédure pénale
français et par décret133(*). En effet, l'indemnisation suppose une
détention provisoire ou une incarcération provisoire et non un
placement sous contrôle judiciaire, un non-lieu, une relaxe ou un
acquittement et un préjudice manifestement anormal et d'une
particulière gravité. Cette dernière exigence vise
à exclure à la fois une réparation systématique.
Mais cette dernière condition a été modifiée par la
loi française du 15 juin 2000 qui a assoupli la condition du
préjudice.
Cependant, le besoin se fait sentir aujourd'hui de rendre la
procédure d'indemnisation plus efficace. Il faut aussi prévoir et
simplifier cette procédure c'est-à-dire instaurer une
indemnisation à toute personne victime d'une mesure de privation de
liberté au cours d'une procédure terminée à son
égard par un non-lieu, une relaxe ou un acquittement134(*). La
procédure d'indemnisation peut, par exemple, relever de la
compétence d'une Commission composée de magistrats de la cour
suprême, des agents des finances, des agents de la
Commission Nationale des Droits de l'Homme et la société
civile.
Le contentieux de réparation devrait également
prendre en compte les victimes de torture, des traitements cruels, inhumains et
dégradants. Pour que cela devienne une réalité, l'Etat
devrait responsabiliser tous les acteurs intervenant dans ce domaine. En cas de
manquement, la responsabilité de l'Etat peut être engagée.
Ce dernier à son tour exercera une action récursoire contre
l'agent fautif.
A l'analyse de tout ce qui précède et vue la
complexité des droits de l'homme, il y a lieu de soutenir que la mise en
oeuvre de ces droits exige plusieurs moyens.
Les Principes de Paris reconnaissent que, pour être
efficace, une institution nationaledoit non pas agir seule, mais établir
et entretenir des rapports de coopération avec divers groupes et
organisations135(*). Cette tâche n'incombe pas seulement
à l'Etat togolais mais également à la
société civile et à la communauté internationale.
CHAPITRE II :
L'INTERVENTION ACCRUE DES ORGANISATIONS
INTERNATIONALES ET DES ORGANISATIONS DE LA SOCIETE CIVILE
Pour le Pr. Paul Gérard POUGOUE : « Il faut
bien le dire, il n'y a pas que les juges pour protéger les droits de
l'homme. Dans le domaine des droits de l'homme, il ne faut pas minimiser le
poids de l'opinion publique par exemple comme mécanisme non
juridictionnel de protection des droits de l'homme. A cause de l'opinion
publique internationale, quelqu'un ne peut pas faire certaines choses.
D'où la place des ONG, de la société civile qui peuvent
dénoncer les violations des droits de l'homme. Qu'est ce qui se passe
chez nous ? »136(*)
Ainsi, la protection des droits de l'homme est devenue une
préoccupation planétaire qui ne laisse personne
indifférent. Chaque couche de la société doit apporter sa
pierre pour bâtir un Etat de droit, de paix, de cohésion sociale.
Cette mission incombe en premier lieu aux autorités togolaises.
Mais cela ne serait possible que grâce à
l'intervention accrue des institutions internationales(Section I), aux
Organisations dela société et de la défense des droits de
l'homme (Section II).
VII. Section 1 : L'intervention accrue des institutions
internationales et des partenaires endéveloppement
L'influencedes institutions internationales des droits de
l'homme (Paragraphe I) et des partenaires en développement (Paragraphe
II)sur l'édification de l'Etat de droit au Togo ont contraint les
autorités togolaisesàentamer un vaste chantier de reformes du
cadre juridique et du cadre institutionnel en matière des droits de
l'homme depuis 2004.
Paragraphe 1 : L'influence des institutions
internationales des droits
de l'homme
L'obligation des Etats de protéger les droits et
libertés fondamentaux des détenus préventifs est devenue
un devoir de la communauté internationale. Cette obligation juridiqueet
contraignante s'impose à l'Etat Togolais. En ratifiant les
traités internationaux des droits de l'homme, « les
gouvernements s'engagent à prendre des mesures nationales et à
adopter des lois compatibles avec les obligations découlant des
traités. Lorsque les procédures légales nationales ne
permettent pas à remédier aux violations des droits de l'homme,
il existe des mécanismes et procédures de plaintes individuelles
ou de communications aux niveaux régional et international, qui
permettent de garantir le respect, la protection et l'instauration des normes
internationales des droits de l'homme au niveau
local. »137(*)
A cet effet, la Communauté internationale disposede
puissants mécanismes et institutions pouvant amener le Togo à
garantir l'effectivité de ces droits.
61. A. Les mécanismes et institutions onusiens de
protection des droits de l'homme
La protectionou la sauvegarde des droits et libertés
fondamentaux des détenus préventifs est garantie par plusieurs
mécanismes et institutions internationaux onusiens dont les principaux
sont : le Comité des Droits Economiques, Sociaux et Culturels
(CODESC) qui est l'organe des Nations Unies chargé de surveiller
l'application du Pacte international relatif aux droits économiques,
sociaux et culturels (PIDESC), le Conseil des droits de
l'homme138(*), le Comité pour l'élimination
de la discrimination à l'égard des femmes (CEDAW), le
Comité des Droits de l'Enfant139(*), le Haut-Commissariat des Nations Unies aux
Droits de l'Homme,le Groupe de travail sur la détention arbitraire,
l'UNICEF, le Groupe de travail du Conseil des droits de l'homme chargé
de l'Examen Périodique Universel et des procédures
spéciales140(*)tels que le Rapporteur spécial sur la
torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.
Ces mécanismes ou institutions apportent leur assistance à l'Etat
togolais pour la mise en oeuvre des recommandations qu'ils ont formulées
dans leurs rapports périodiques.
En cas de violation des droits de l'homme, le Système
des Nations Unies a pour rôles d'ordonner, de contrôler, et de
sanctionner les violations des droits des individus. Ainsi saisi pour violation
des droits et de libertés fondamentaux dans l'affaire d'atteinte
à la sûreté nationale, le Groupe de travail sur la
détention arbitraire a, dans son avis N° 45/2014, qualifié
la privation de liberté de Kpatcha Gnassingbé,
OugbakitiSeïdou, Esso Gnassingbé, et consorts, d'arbitraire et de
violation des droits et libertés proclamés dans les articles 9,
10 et 11 de la Déclaration universelle des droits de l'homme ainsi que
dans les articles 9 et 14 du Pacte international relatif aux droits civils et
politiques141(*). Par conséquent, le Groupe de
travail « prie le Gouvernement togolais de procéder sans
attendre à la libération de Kpatcha GNASSINGBE, OUGBAKITI
Seïdou, Esso GNASSINGBE et consorts et d'ordonner une enquête
indépendante et impartiale sur les actes de torture dont ces derniers
auraient fait l'objet pendant leur détention au secret, d'en tirer
toutes les conséquences légales relativement à ses
engagements internationaux, en révisant leur procès ou en
procédant à la réparation intégrale de leur
préjudice, conformément à l'article 9, paragraphe 5, du
Pacte international relatif aux droits civils et politiques. »
Ne disposant pas de force juridique contraignante, ledit avis est resté
lettre morte. Aucune mesure n'a été prise par les
autorités togolaises afin que les victimes rentrent dans leurs droits.
Les auteurs de ces exactions ont étésimplementmutés de
leurs postes de travail et promus ailleurs. Cet exemple n'est pas l'unique cas
de violation des droits des prévenus. Les conditions de détention
actuelles dans les établissements pénitentiaires sont très
déplorables et constituent un danger pour la santé publique.
Le système universel de protection et de garantie des
Droits de la personne humaine ne prévoit pas un contrôle
juridictionnel, ce rôle étant dévolu plutôt au
Comité des Droits de l'homme, organe du système des Nations
unies. Il s'appuie sur l'action des cours régionales à savoir la
Cour européenne des Droits de l'homme, la Cour interaméricaine
des Droits de l'homme et laCour africaine des Droits de l'homme et des peuples.
Lesdites cours assurent déjà un contrôle juridictionnel
effectif parl'application de leurs dispositions conventionnelles respectives.
Bien que la convention européenne ne soit applicable qu'aux pays membres
du Conseil de l'Europe, la jurisprudence de ces organes de contrôle que
sont la Cour et la Commission, est d'une telle richesse qu'il est tout
indiqué de s'en inspirer.
Les organisations de la société civile et le
système des Nations-Unies doivent faire pression morale sur le Togo afin
qu'il réinstaureles droits et libertés fondamentaux des
détenus préventifs. Il est urgentque les mécanismes
onusiensinterviennent davantage et de façon régulière dans
lesétablissements pénitentiaires togolais.
Hormis l'influence du Système des Nations Unies, il
existe d'autres institutions de défense des droits de l'homme qui
interviennent au Togo.
62. B. Les institutions internationales non onusiennes des
droits de l'homme
Plusieurs organismes internationaux et ONG internationales ou
régionalesoeuvrentinlassablement pour la protection des droits humains
en général et des personnes vulnérables comme les
détenus. Il s'agit de :l'Organisation Mondiale de la Santé,
Comité International de la Croix-Rouge pour personne en détresse,
PenalReform international pour les conditions de détention, la
Fédération internationale de l'Action des chrétiens pour
l'abolition de la torture, Prisonniers sans frontières et Amnesty
international, HumanRights Watch,Union Chrétienne de Jeunes
Gens142(*), la Commission africaine des droits de
l'homme et des peuples, le Rapporteur Spécial des Prisons et Conditions
de Détention en Afrique143(*), le Comité de prévention de
la torture en Afrique et le Réseau des Institutions Nationales
Africaines des Droits de l'Homme.Il faut préciser que cette liste n'est
pas exhaustive.
Dans le cadre de la protection des Droits de l'homme, la
Charte africaine des droits de l'homme et des peuples a mis en place la
Commission Africaine des Droits de l'homme et des Peuples. Cette Commission a
crée quinze mécanismes spéciaux de protection des droits
de l'homme. Les principaux mécanismes spéciaux intervenants dans
l'administration judiciaire et pénitentiaire sont : Rapporteur
spécial sur les prisons, les conditions de détention et l'action
policière en Afrique, Rapporteur spécial sur les défenses
des droits de l'homme, Comité pour la prévention de la torture en
Afrique, Groupe de travail sur la peine de mort et les exécutions
extrajudiciaires sommaires ou arbitraires en Afrique.144(*)Depuis 1998, elle a
été renforcée par le protocole instituant une Cour
africaine des Droits de l'homme et des peuples.
Toujours dans le cadre régional de protection des
droits de l'homme, le Togo est membre de l'Union africaine et de la
Communauté Economique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO). Cette
dernière est devenue une communauté des droits de l'homme sans
renoncer à l'esprit communautaire initial qui la sous-tendait. Elle
s'est inscrite dans un processus d'intégration plus dynamique dont les
fonds baptismaux ont été posés par le Protocole
Additionnel A/SP.1/01/05 du 19 Janvier 2005, portant amendement du Protocole
A/P /17 /91, relatif à la Cour de justice de la Communauté. Ce
qui confère un droit d'accès direct des justiciables au
prétoire du juge communautaire de la CEDEAO. En effet, la nouvelle
mission de la Cour de justice de la CEDEAO est de trancher des
différends relatifs aux droits de l'homme c'est-à-dire des droits
dont les individus sont directement titulaires. Cette institution sous
régionale a été saisie à plusieurs reprises par les
citoyens togolais pour violation des droits de l'homme. En effet, la Cour de
Justice de la CEDEAO a, dans l'affaire Pascal BODJONA et autres, poursuivis des
faits d'escroquerie internationale, affaire KpatchaGNASSINGBE et autres,
inculpés pour atteinte à la sûreté nationale, et
dans l'affaire incendies du grand marché de Lomé et celui de
Kara, condamné l'Etat togolais pour violation des droits de l'homme dans
l'administration justice pénale notamment pour détention
préventive arbitraire et de longue durée, procès
inéquitable, pour traitements cruels, inhumains et dégradants.
L'analyse de la jurisprudence de la Commission africaine et de
la Cour de Justice de la CEDEAO font ressortir que ces instances
régionales de protection des Droits de l'homme sont en quelque sorte
boudées par des justiciables parce qu'elles sont inféodées
à la Conférence des chefs d'Etat et de Gouvernement. Elles ont
donc montré leurs limites. Les espoirs suscités par l'institution
de ces Cours, en vue de pallier aux insuffisances des Commissions,
s'émoussent face à la résistance des Etats membres
à ratifier les textes relatifs à la création de ces Cours
et à exécuter les décisions et arrêts desdites
Cours, comme se fût le cas dans les affaires Kpatcha GNASSINGBE et Pascal
BODJONA. La Cour régionale ne dispose pas de pouvoir coercitif afin de
faire exécuter ses décisions.
Néanmoins, ces institutions et ONG apportentà
l'Etat togolais leur assistance et coopération technique en
matière de la protection des droits de l'homme.Ilsjouent un rôle
prépondérant. Ils dénoncent les cas de violation des
droits humains. Leur présence sur le territoire togolais, oblige les
autorités à ne pas négliger les questions de
détention.
Le recours à ces institutions
spécialisées est indispensable pour la mise en oeuvre du droit
à la santé pour tous en général et du droit
à la santé des détenus en particulier. En effet, en
matière de la protection des droits de l'homme, la priorité est
donnée aux groupes vulnérables ou aux groupes marginalisés
de la population parmi lesquels se trouvent les détenus, en
matière d'aide médicale, de répartition et de gestion des
ressources comme l'eau potable, les denrées alimentaires et des
fournitures médicales.145(*)
Le Togo devrait profiter au maximum de leurs expertises afin
d'améliorer la prise en charge et la protection effective des droits
fondamentaux des détenus préventifs.
Ces actions en faveur du respect des droits fondamentaux des
détenus sont également impulsées par les partenaires en
développement.
M. Paragraphe
2 : L'influence des partenaires en développement et de
coopération
Comme l'a s y bien constaté, Docteur Martial JEUGUE
DOUNGUE146(*), « L'influence de la
communauté internationale valide et légitime donc
l'internationalisation de la protection des droits de l'individu, fonde et
justifie l'adoption et l'imposition en politique internationale (politique
d'aide au développement, aide à la démocratie) des
conditionnalités comme moyens de contrainte employés par la
communauté internationale pour faire respecter les droits de l'homme,
sans pour autant exclure les devoirs de l'individu147(*). »
Il convient dans ce paragraphe d'examiner
l'influence des institutions financières et de coopération (A),
l'Organisation de la Francophonie et sur la protection des droits fondamentaux
des détenus au Togo (B).
63. A. Les institutions financières et de
coopération
Le respect des droits de l'homme, de la démocratie et
de la bonne gouvernance sont descritères d'éligibilité de
l'aide au développement. Ces critères constituent des armes
très puissantesque les institutions financières et de
coopérationtellesque la Banque Mondiale, le Fonds Monétaire
International, l'Union Européenne et les Etats Unis d'Amérique
retiennent pour conditionner l'octroi de l'aide au développement dans
les pays en développement.Ces institutions sont très rigoureuses
sur leurs conditions d'éligibilité. Pour qu'un pays puisse
bénéficier de ces aides, il doit répondre
impérativement à l'ensemble des critères définis
par ces institutions.
Il faut relever que les principaux mécanismes des
droits de l'homme interagissent avec des agences et partenaires des Nations
Unies et des institutions de coopération tels que : PNUD, l'UNHCR,
l'UNESCO, l'ONUDC, le FNUAP, l'UNIFEM, l'ONUSIDA148(*). La plupartde ces
organisations interviennent ou sont présentes au Togo où elles
participent à la promotion et à la protection des droits de
l'homme.
Longtemps accusé de déficit démocratique,
de violations des droits de l'homme, de détentions arbitraires, les
partenaires en développement ont fait pression sur l'Etat togolais afin
qu'il entame des reformes.
Dans le cadre de la modernisation de la Justice togolaise, le
Togo a bénéficié de l'appui technique et financier du
PNUD, de la Coopération Française, de la Coopération
allemande, de l'Union Européenne et de l'Ambassade des Etats Unies
d'Amérique. Ces financementsontpermisà l'Etat togolais de mettre
en oeuvre certaines reformes des cadres juridique et institutionnel telles que
l'adoption du Nouveau Code pénal, la construction d'une nouvelle prison
civile à Kpalimé, la construction des deux Cours d'Appel du Togo
et l'aménagement des Tribunaux d'Aného et d'Atakpamé.Ces
réalisations ont eu un impact considérable dans le traitement des
dossiers des détenus ainsi que l'amélioration des conditions de
détention des zones bénéficiaires. En effet, la prison
civile de Kpalimé a permis de désengorger la prison civile de
Lomé. Le Togo devrait désormais compter sur l'appui de ces
partenaires afin de parachever les reformes qu'il a entreprises depuis 2005.
Le Togo devrait également compter sur l'appui des
autres organisations internationales comme l'Organisation Internationale de la
Francophonie (OIF) dont il est membre depuis 1970.Pour garantir le respect des
libertés et la sauvegarde de la démocratie dans l'ensemble de
l'espace francophone, des structures de défense des droits de l'Homme
sont mises en place ou renforcées. Les acteurs gouvernementaux et
non-gouvernementaux dans chacun des pays sont encouragés à
intégrer les normes et les instruments internationaux dans leur
système. A cet effet, le Togo a bénéficié de
l'expertise de l'OIF afin de rendre plus crédible le fichier
électoral pour les présidentiels de 2015. L'OIF appuie
également l'Etat togolais dans l'élaboration de son
deuxième rapport relatif à l'EPU qu'il présentera devant
le Conseil des Droits de l'Homme en octobre 2016.
Les organisations internationales, à travers leurs
observatoires, groupes de travail et mécanismes sur les droits de
l'homme et de la démocratie, suivent la situation des droits de l'homme
dans le pays.
64. B. L'impact des organisations internationales
L'action des organisations internationales en faveur de
l'amélioration, de la protection et de la prise en charge des droits
fondamentaux des détenus préventifs n'est plus à
démontrer. Le bilan est positif. L'influence de ces organisations
internationales a eu un impact considérable sur le fonctionnement de
l'appareil judiciaire et pénitentiaire.
En effet, il existe une complémentarité avec les
actions en cours de l'Union Européenne et celles des Etats-Unis,
principaux partenaires avec le PNUD dans ce secteur. L'UE prévoit des
actions futures en milieu carcéral : assainissement, santé
et activités génératrices de revenus. En matière
d'accès à la justice, l'Ambassade des Etats-Unis oeuvre pour
l'instauration de Cliniques d'aide juridique à l'université de
Lomé et de l'aide juridictionnelle aux détenus
nécessiteux. Ces institutions ont également apporté leurs
appuisau Centre de Formation des Professions de Justice149(*). Les Etats-Unis
amorcent quant à eux un appui à l'aide juridictionnelle en
collaboration avec le Barreau.
La dynamique régionale pourrait aussi être
accrue. Plusieurs initiatives ont permis de définir les normes
applicables à la détention150(*).
Pour éviter tout chevauchement, une coordination
étroite doit être maintenue et renforcée avec les
organisations de la société civile et aux Organisations non
gouvernementales de défense des droits de l'homme du Togo.
VIII. Section 2 : L'intervention
accrue des organisations de la société civile et desOrganisationsdedéfense des droits de
l'homme
Les organisations de défense des droits de l'homme
(ODDH) et de la société civile (OSC)sont des partenaires
essentiels du Togo. Leurs actions contribuent efficacement à
l'éclosion de la démocratie et l'état de droit
garantissant ainsi la protection de tous les citoyens sans discrimination
(Paragraphe 1). Pour une meilleure protection des droits fondamentaux des
détenus, les ODDH et OSC ont un rôle correctif majeur(Paragraphe
2).
N. Paragraphe
1 : La contribution des organisations de la société civile
et de défensedes droits de l'homme
Les organisations de la société civile et de
défense des droits de l'homme constituent des acteurs très
importants non négligeables dans la protection et la promotion des
droits de l'homme en général et des droits et libertés du
détenu préventif en particulier.
Pour la garantie des droits des détenus
préventifs, les OSC et ODDH ont formé une coordination nationale
(A). Elles constituent des mécanismes de contrôle externe de la
détention (B).
65. A. La Coordination des Partenaires des Prisons du
Togo
Plusieurs OSC et ODDHcontribuent d'une manière ou d'une
autre à garantir la protection des droits civils et politiques des
détenus d'une part et la prise en charge effective des droits
économiques, sociaux et culturels des détenus préventifs
d'autre part.
Les principales ODDH intervenant en milieu carcéral
sont entre autres : l'Action des Chrétiens pour l'Abolition de la
Torture (ACAT), Amnesty international section togolaise, le Collectif des
Associations Contre l'Impunité au Togo (CACIT), l'Union
Chrétienne de Jeune Gens (UCJG), la Ligue Togolaise des droits de
l'Homme (LTDH) et le Bureau National Catholique pour l'Enfance (BNCE). Elles
participent activement par différentes actions, à l'instauration,
à la promotion et à la protection des droits des détenus
préventifs au Togo.
Pour une meilleure protection des détenus, les OSC et
ODDH togolaises ont décidé de se mettre en synergie. Ainsi,une
vingtaine d'ONG regroupées au sein de la Coordination des partenaires
des prisons du Togo (COPAPTO) a vu le jour à Lomé le04 juillet
2015. Cette nouvelle coordination s'est fixée pour objectif d'aider le
gouvernement et la société civile à améliorer les
conditions de vie des détenus dans les prisons du Togo. Pour
MonsieurEwoénam DIAM, président de la nouvelle
structure : « la COPAPTO vise à alléger
auprès des autorités publiques les difficultés
liées à la mise en oeuvre des actions des acteurs , consolider et
promouvoir l'assistance nécessaire aux associations et organisations
intervenant dans les prisons ; améliorer entre autres l'esprit de
collaboration, de communication et d'harmonisation dans leurs
différentes interventions afin que la vie des détenus soit moins
pénibles possibles ».
Ainsi,la COPAPTO constitue également une force externe
en matière de la violation des droits de l'homme dans l'administration
de la justice pénale.
66. B. Les OSC et ODDH : desmécanismes efficaces
de contrôle externe et indépendant des lieuxde
détention
Les organisations de la société civile et de
défense des droits de l'homme travaillent aussi bien pour la protection
que pour la prévention de violation des droits humains y compris
l'interdiction de la torture151(*).Afin de garantir un
maximum de contrôle externe et indépendant des lieux de
détention, ces organisations s'investissent davantage dans les
activités de monitoring. Elles disposent habituellement de bons
réseaux sur le terrain, de bonnes connaissances du contexte local, de
sources directes de renseignement et peuvent intervenir rapidement en cas
d'urgence.La plupart de leurs activités sont concentrées dans la
capitale et les villes environnantes. Dans les campagnes, les défenseurs
sont moins visibles.
Dans le souci de rendre la justice togolaise plus efficace,
plus indépendante, avec un accès amélioré pour tous
les citoyens en général et pour les détenus en
particulier, les organisations de la société civile et leurs
alliés multiplient les actions. Ces actions sont : l'assistance
juridique, assistance juridictionnelle, l'assistance financière et
plaidoyers auprès des autorités togolaises. A cet effet, elles
ont élaboré des guides pratiques sur le monitoring
préventif des lieux de détention, créé des clubs
juridiques152(*)de la prison, aménagé des
infrastructures existantes. Elles veillent également sur la santé
et l'hygiène des détenus.
Il est à noter que les actions de certaines confessions
religieuses sont aussi très salutaires car elles soutiennent moralement
et spirituellement les détenus.
Grâce aux actions de dénonciation de violation
des droits de l'homme dans l'administration de la justice pénale, les
organisations de défense des droits de l'homme ont amené les
autorités togolaises à prendre conscience de la situation qui
prévaut dans les prisons civiles togolaises.
Les OSC peuvent également jouer un rôle
correctif majeur en abordant des questions que d'autres organismes de
monitoring pourraient avoir négligées, ou en remédiant
à des lacunes potentielles dans l'efficacité du travail des
Mécanismes Nationaux de lutte contre la Torture153(*).
Pour Madame NavanethemPillay154(*), Haut- Commissaire
des Nations-Unies aux droits de l'homme, les défenseurs des droits de
l'homme, les organisations non gouvernementales et toutes les autres parties
prenantes de la société civile exécutent leur mission de
défense des droits de l'homme de diverses
manières« en se communiquant des informations, en
préconisant et en suivant scrupuleusement la mise en oeuvre des droits
de l'homme, en révélant des violations, en aidant les victimes
d'abus et en menant des campagnes en faveur de l'élaboration de
nouvelles normes relatives aux droits de l'homme. Ce faisant, elles prennent le
pouls de leurs communautés et des groupes d'intérêt
qu'elles représentent et donnent la parole aux impuissants dans des
enceintes qui pourraient, sinon, être hors de portée des victimes,
notamment dans les forums et les mécanismes internationaux de
défense des droits de l'homme. »155(*)
Des actions devraient donc être entreprises pour donner
plus de force aux organisations de la société civile et des
organisations de défense des droits de l'homme. Cela milite en faveur
d'un suivi des actions, d'une recherche de synergie, d'une meilleure
coordination nationale dans ce secteur pour l'avenir.
O. Paragraphe
2 : Le développement de la coopération pour mieux garantir
lesdroits économiques, sociaux et culturels des détenus
préventifs
Le renforcement de la coopération est un moyen efficace
pour combattre les maux dont souffre la garantie des droits fondamentaux des
détenus.
Il convient dans cette partie de démontrer les
bénéfices de la coopération entre le ministère de
la justice et d'autres ministères togolais (A), les OSC et les
institutions internationales (B).
67. A. La coopération entre le ministère de
la justice et d'autres ministères
La garantie des droits civils, politiques,
socio-économiques et culturels des détenus relèvent des
attributions du Ministère de la Justice. Dans la pratique, la prise en
charge de tous ces droits n'est pas aisée en raison de la
complexité de certaines catégories de droit, tel que le droit
à la santé. Les autorités togolaises devrait initier une
coopération entre le ministère de la justice et le
ministère de la santé, du bien-être, de l'action sociale et
de la formation professionnelle, afin de garantir respectivement le droit
à la santé, le droit d'assistance sociale et à la
réinsertion des détenus.
En France, la prise en charge des détenus est
réglée par la loi du 18 janvier 1994156(*).Trois mesures
complémentaires ont été prises afin d'atteindre cet
objectif : « le transfert de compétence au service public
hospitalier, l'affiliation de tous les détenus aux assurances maladie et
maternité du régime général de la
sécurité sociale et une augmentation significative des moyens qui
conduit, au plan national, à un doublement des effectifs médicaux
et infirmiers. »
Le Togo devrait emboiter le pas de la France en adoptant le
modèle français au contexte local. Pour la réalisation de
ces objectifs, le ministère de la justice devrait signer un partenariat
avec l'Institut National d'Assurance Maladie du Togo afin d'étendre la
couverture sanitaire dans tous les établissements pénitentiaires.
Cette couverture devrait être automatique une fois entrée en
prison. Il devrait également signé un partenariat avec le
ministère de la santé afin que ce dernier affecte des agents de
santé dans toutes les prisons civiles.
La politique de la réinsertion sociale des
détenus devraient être confiée aux ministères de
l'action sociale et celui de la formation de l'alphabétisation et de la
formation professionnelle. Ces ministères auront pour missions de former
des détenus, de préparer le terrain par leur réinsertion
sociale.
Mais pour que ces partenariats soient
efficaces, des tâches doivent être bien définies et une
structure de coordination et de suivi doit être mise en place.
68. B. La coopération entre les OSC,les institutions
nationales etles institutionsinternationales des droitsde l'homme
Les OSC togolaises travaillent régulièrement
avec d'autres institutions internationales et régionales en vue d'une
plus grande efficacité dans la mise en oeuvre de leurs actions. Ce
travail de collaboration revêt différentes formes qui vont de la
mobilisation et de l'appui en ressources humaines, à la création
de réseaux, ou encore de coalitions, en passant par des partenariats et
des appuis techniques, matériels et financiers avec lesdites
institutions. Dans le cadre de leurs missions de protection et de protection
des droits de l'homme, les OSC et ODDH reçoivent des financements de la
part des partenaires en développement. Ainsi, dans le cadre de l'Examen
Périodique Universel, les OSC et ODDH sont associées dans le
contrôle de l'exécution des recommandations formulées
à l'endroit du pays.
A la 12e Conférence internationale des
institutions nationales de promotion et de protection des droits de l'homme qui
s'est tenue à Merida en Mexique du 8-10octobre2015, les participants ont
convenus que : « les INDH peuvent influencer le processus
national de mise en oeuvre et d'obligation de rendre compte afin de faire en
sorte que les droits de l'homme soient intégrés dans le processus
d'adaptation et de suivi des objectifs, cibles et indicateurs à
l'échelle nationale. Elles peuvent aussi conseiller le gouvernement sur
l'adoption d'une approche de mise en oeuvre des Objectifs Développement
Durable axée sur les droits de l'homme, en veillant tout
particulièrement à ce que les principes d'égalité
et de non-discrimination soient respectés.»157(*)
A l'heure de la mondialisation, les organisations de la
société civile sont en train de devenir des acteurs importants
des relations internationales. Dans cet ordre d'idées, lesPrincipes de
Paris reconnaissent la nécessité pour les Institutions Nationales
des Droits de l'Homme(INDH) d'interagir étroitement avec les
organisations de la société civile (OSC)et d'autres organisations
des droits de l'homme dans leurs efforts pour promouvoir et protéger les
droits de l'homme. En effet, la collaboration entre les INDH et les OSC est une
occasion unique d'ancrer une culture des droits de l'homme au sein de chaque
État. Ces partenariats, lorsqu'ils sont robustes, débouchent sur
des progrès en matière de promotion et de protection des droits
de l'homme158(*)
CONCLUSION
GENERALE
« Il n'y a pas de développement sans
sécurité, il n'y pas de sécurité sans
développement, et il ne peut y avoir ni sécurité, ni
développement si les droits de l'homme ne sont pas respectés
(...) ».159(*)Cette citation de Kofi Annan, qui invoque la
triple nécessité, pour les Nations Unies d'assurer la
sécurité, le développement et les droits de l'homme,
lève en réalité le voile sur un grand débat qui
porte sur la relation qu'entretiennent ces trois notions. Ainsi à
l'heure de la mondialisation, l'effectivité des droits de l'homme est un
défi majeur.
Pour la Communauté internationale, toute personne
privée de liberté doit être traitée avec
dignité.160(*)Il va sans dire que la détention
provisoire est une mesure exceptionnelle, et c'est à ce titre que peut
être affirmée son interprétation restrictive. Elle a pour
finalité le maintien de la personne suspectée pour les
nécessités de l'instruction, la préservation de l'ordre
public et la protection de l'individu lui-même161(*).
La durée de la détention tient compte de la nature de
l'infraction commise et de la peine correspondante162(*).
Mesure grave mais nécessaire, la détention
préventive doit faire l'objet d'une utilisation raisonnable, car il
paraît contradictoire de priver une personne de sa liberté pour la
commission d'une infraction dont on n'a pas la certitude qu'elle en soit
l'auteur alors que la présomption d'innocence nous impose de penser
qu'en effet, elle ne l'est pas, tout du moins pour le moment. Il est important
de noter que la détention provisoire excessive est un problème
mondial qui affecte tant les pays développés que ceux en
développement.
C'est pourquoi il incombe à chaque Etat de prendre des
mesures adéquates afin de garantir l'effectivité des droits
fondamentaux dans l'administration de la justice pénale. A cet effet, le
législateur togolais a su comprendre cette philosophie des droits de
l'homme. Il n'a pas hésité à intégrer dans sa
Constitution les différents instruments internationaux et
régionaux relatifs aux droits de l'homme163(*).
Ce travail de recherche tout en traitant de façon
générale la protection des droits de l'homme dans le
régime de la détention préventive au Togo comporte
cependant des limites liées aux questions de l'enfance. La
détention provisoire des mineurs en conflit avec la loi n'a pas
été abordée spécifiquement dans le cadre de ce
travail. L'approfondissement de ce sujet pourrait faire l'objet d'une autre
recherche vue la complexité de cette procédure.
Au terme de la présente étude, il ressort que
bien consacrée par les instruments juridiques internationaux et
régionaux faisant partie intégrante de la Constitution
togolaise164(*), la protection des droits des
détenus préventifs est précaire et limitée en
raison des défaillances textuelles et institutionnelles. En effet, la
détention provisoire est réglementée au Togo par la
Constitution, Code pénal et le Code de procédure pénale.
Il faut noter que ce dernier n'a pas connu beaucoup de réformes visant
à réajuster ou à conformer la détention
préventive aux exigences de respect des droits de l'homme. Dans la
pratique, beaucoup de défis restent à être
relevés165(*) : l'absence de motivation du mandat de
dépôt, les détentions abusives de longues durées,
les conditions de détention dégradantes et déplorables, la
surpopulation carcérale, les pertes en vies humaines, les droits et
libertés élémentaires des détenus bafoués,
l'ineffectivité d'indemnisation des détenus
bénéficiant d'une décision de non-lieu, de relaxe ou
d'acquittement. A tous ces problèmes, doivent être trouvés
rapidement des remèdes.
A qui incombe la responsabilité de cette
situation ?
A priori, il est probable de l'imputer au corps judiciaire.
Cependant, il convient de relever que la responsabilité
doit être partagée entre tous ceux qui interviennent dans la
conception des mécanismes et l'exécution de la mesure de la
détention provisoire au Togo.
En premier lieu, le législateur n'a pas pris assez de
dispositions pour mieux protéger les droits des personnes
détenues provisoirement. A titre d'exemple, l'actuel Code de
procédure pénale et l'ordonnance portant sur l'organisation
judiciaire au Togo sont en écart avec la Constitution et le Nouveau Code
pénal. L'absence d'institutionnalisation des juges des libertés
et de la détention ne garantit pas le respect des droits fondamentaux
des détenus préventifs.
En deuxième lieu, l'exécutif ne met pas à
la disposition des acteurs judiciaires et pénitentiaires des moyens
matériels, institutionnels et humains suffisants pour leurs missions.
En troisième lieu, les acteurs judiciaires,
l'Inspection Générale des Services Judiciaires et
Pénitentiaires, les mécanismes chargés de contrôle
des conditions de détention font preuve d'un manquement grave dans
leurs tâches d'exécution et de contrôle.
Alors, que faire pour mettre fin à toutes ces
défaillances ? La présente étude est opportune et
pourrait contribuer à améliorer la protection des droits
fondamentaux des détenus préventifs au Togo. A cet effet, elle
suggère donc :
Sur le plan législatif, une révision du Code de
procédure pénale du Togo s'avère indispensable. Le nouveau
Code de procédure pénale devrait introduire les mesures
alternatives non privatives de liberté d'une part, et d'autre part
institutionnaliser le juge des libertés et de la détention. Il
est impérieux que le législateur redéfinisse clairement
les délais et motifs de la détention provisoire.
Le nouveau Code de procédure pénale devrait
instituer un recours juridictionnel afin que les détenus
préventifs puissent contester les mandats de dépôt
décernés par le ministère public pendant leur
détention.
Aussi une révision de l'arrêté colonial
régissant les prisons civiles au Togo s'avère-t-elle
nécessaire. Le nouveau texte devrait prendre en compte les
règles minimales de Tokyo et autres textes relatifs à la
détention provisoire. Chaque juridiction doit être dotée
d'une prison civile ou au moins une maison d'arrêt respectant les normes
internationales.
Le législateur devrait revoir l'ordonnance N°78-
35 du 7 septembre 1978 portant organisation judiciaire au Togo afin de
régler le problème de juge unique qui ne garantit pas souvent le
principe d'impartialité. Les règlements intérieurs des
juridictions relatifs à l'organisation des audiences doivent être
repensés car ces règlements contredisent les délais
légaux (48 à 72 heures) que le Code de procédure
pénale a prévu pour qu'une affaire soit appelée à
l'audience.
Sur le plan pratique, les pouvoirs publics doivent
accroître le budget de fonctionnement alloué à
l'administration pénitentiaire afin d'améliorer les conditions
matérielles et morales d'exécution de la mesure de
détention provisoire. Les pouvoirs publics doivent également
augmenter le nombre d'acteurs judiciaires, les surveillants de l'administration
pénitentiaire et le personnel pénitentiaire. Leur niveau
d'instruction doit être amélioré par des cours et des
stages de recyclage sur la protection des droits de l'homme dans
l'administration de la justice, sur l'éthique et la
déontologie.
Les magistrats doivent faire preuve de sagesse et
d'éthique dans l'usage de la détention provisoire. Avant de
recourir à un mandat de dépôt, ils devront se demander si
c'est l'unique moyen pour parvenir à la manifestation de la
vérité. Pour certaines infractions moins graves, ils doivent
procéder à la médiation pénale en s'inspirant de
celle des enfants en conflit avec la loi166(*).
Sur le plan du contrôle de la mesure de
détention provisoire, l'Inspection Générale des Services
Judiciaires et Pénitentiaires et les Organisations de défense des
droits de l'homme doivent faire régulièrement des visites
inopinées dans les juridictions et dans les lieux d'exécution de
la détention provisoire afin de toucher du doigt les
réalités du terrain et par conséquent prendre des mesures
appropriées s'il y a lieu. Ceci contribuerait également à
dissuader les magistrats et le personnel pénitentiaire véreux,
et partant à mieux garantir la protection des droits des détenus
provisoires.
A moyen terme, les Cours d'appel doivent organiser des
audiences d'assises foraines au moins six à sept assises par an en
matière criminelle au lieu d'une seule session ; les tribunaux
doivent tenir des audiences de jugement au moins sept à huit audiences
par mois en matière correctionnelle. Ces audiences foraines permettront
de désengorger les prisons civiles togolaises voire réduire le
nombre des prévenus ou inculpés préventifs.
A long terme, les autorités publiques devraient
conclure des partenariats publics-privés d'une part, et d'autre part
instituer la coopération entre les services publics dans la gestion des
prisons civiles à savoir : Ministère de la santé,
Ministère de la justice, Ministère de l'Action sociale. La
nécessité d'étendre la couverture sanitaire aux personnes
privées de libertés s'avère très indispensable.
Il en va de l'intérêt des pouvoirs publics, car
une détention préventive faite dans de bonnes conditions et dans
les délais réguliers constitue également un indice de
respect des droits de l'homme et permet ainsi d'apprécier le
degré de libéralisme et la capacité du pays au respect du
droit et à la mise en oeuvre d'une justice saine et efficace.
Pour que la garantie des droits fondamentaux des
détenus préventifs devienne une réalité, il faut
une intervention accrue de la Communauté internationale, des
organisations de la société civile et des organisations de
défense des droits de l'homme.
Aujourd'hui, la justice togolaise a besoin d'actes pour
écrire au fronton des palais de justice, prisons civiles et en lettre
d'or, cette phrase qui est inscrite à l'entrée du Palais de
l'Europe à Strasbourg « Là où les hommes
sont condamnés à vivre dans la misère, les Droits de
l'Homme sont violés. S'unir pour les faire respecter est un devoir
sacré ». Les citoyens togolais notamment les
autorités politiques, les ONG, les ODDH, la CNDH, la
société civile, les acteurs judiciaires et pénitentiaires
doivent pouvoir faire leurs ces mots du Père Joseph
WRESINSKI167(*) et prendre conscience de leur devoir
sacré de garantir et de protéger les Droits de l'Homme au
Togo.
BIBLIOGRAPHIE
MANUELS
-CABRILLAC (R), FRISON-ROCHE (M-A) et REVET (T),
Libertés et droits fondamentaux, 16e éd, Revue et
augmentée, Paris : Dalloz, 2010, 875 p.
-DAILLIER (P), FORTEAU (M), PELLET (A), Droit
international public, 8e éd, Paris : L.G.D.J, 2009,
1673 p.
-HAUT-COMMISSARIAT DES NATIONS UNIES AUX DROITS DE L'HOMME,
Les droits de l'homme et les prisons, Manuel de formation aux droits de
l'homme à l'intention du personnel pénitentiaire, série
sur la formation professionnelle n°11, New York et
Genève : Nations Unies, 2004, 261 p.
-HAUT-COMMISSARIAT DES NATIONS UNIES AUX DROITS DE L'HOMME,
Les droits économiques, sociaux et culturels, Manuel destiné
aux institutions nationales des droits de l'homme, série sur la
formation professionnelle n°12,New York et Genève :
Nations Unies, 2004, 158 p.
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CHRETIENNE DE JEUNES GENS, Manuel d'observation des droits humains dans les
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OUVRAGES
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détention :Guidepratique,Genève : Nations
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-HAUT-COMMISSARIAT DES NATIONS UNIES AUX DROITS DE L'HOMME,
Les droits de l'homme et les prisons : Guide de formation aux droits
de l'homme à l'intention du personnel pénitentiaire, série
sur la formation professionnelle n°11, Genève et New
York : Nations Unies, 2005, 208 p.
-JACOPIN (S), Procédure pénale,
éd, Montchrestien, Paris : 2005, 211 p.
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THESES ET MEMOIRES
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Faculté de droit de Montpellier I, année 2006 - 2007, 729 p.
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enfants placés en institution en HAITI, Mémoire
présenté en vue de l'obtention du Diplôme de Master 2 droit
international et européen des droits fondamentaux, Université de
Nantes, 2014, 150 p.
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à la Santé des détenus préventifs dans les prisons
du BENIN, Mémoire présenté en vue de l'obtention du
Diplôme de Master 2 droit international et européen des droits
fondamentaux, Université de Nantes, mai 2013, 87 p.
-JEUGUE DOUNGUE (M.),Réflexions sur l'avenir des droits
fondamentaux au Cameroun au regard de l'évolution de leurs garanties
depuis 1996, Mémoire présenté en vue de l'obtention du
Diplôme de Master 2 droit international et européen des droits
fondamentaux, Université de Nantes, 2007, 179 p.
-PHI (T T L), La détention provisoire étude de
droit compare droit français et droit vietnamien, Thèse de
l'école doctorale de droit (E.D.41) de la faculté de droit et de
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l'obtention du Diplôme du Cycle III,Ecole Nationale d'Administration du
Togo, section magistrature, 1989, 53 p.
TEXTES INTERNATIONAUX ET REGIONAUX
-Charte Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples
(CADHP), adoptée le 27 juin 1981 à Nairobi (Kenya) lors de la
18e Conférence de l'Organisation de l'Unité Africaine
et entrée en vigueur le 21 octobre 1986, ratifiée le 5 novembre
1982.
-Convention internationale sur l'élimination de toutes
les formes de discrimination raciale, adoptée le 21 décembre 1965
et entrée en vigueur le 4 janvier 1969, ratifié le 1er
septembre 1972.
-Convention contre la torture et autres peines ou traitements
cruels, inhumains ou dégradants, adoptée le 10 décembre
1984 et entrée en vigueur le 26 juin 1987, ratifiée le 18
novembre 1987.
-Convention Internationale relative au Droit de l'Enfant,
adoptée le 20 novembre 1989 et entrée en vigueur le 2 septembre
1990, ratifiée le 1er août 1990.
-Convention sur l'élimination de toutes les formes de
discrimination à l'égard des Femmes, adoptée le 18
décembre 1979 et entrée en vigueur le 3 septembre 1981,
ratifiée le 26 septembre 1983.
-Déclaration Universelle des Droits de l'Homme (DUDH),
Adoptée par l'Assemblée générale des Nations Unies,
adoptéele 10 décembre 1948.
-Déclaration et Programme d'Action de Vienne
adoptée le 25 juin 1993 par la conférence mondiale sur les droits
de l'homme.
-Déclaration de Kampala sur la santé en prison en
Afrique, adoptée par les participants à l'atelier sur la
santé en prison en Afrique : le 13 décembre 1999.
-Ensemble de principes pour la protection de toutes les
personnes soumises à une forme quelconque de détention ou
d'emprisonnement, adopté par résolution 43/173 du 9
décembre 1988.
-Ensemble des Règles minima pour le traitement des
détenus, adoptés à Genève en 1955 et
approuvés le 31 juillet 1957.
-Les Lignes directrices sur les conditions d'arrestation, de
garde à vue et de détentionprovisoire en Afrique (les Lignes
directrices Luanda), adoptées par la CommissionAfricaine des Droits de
l'Homme et des Peuples au cours de sa 55èmeSession Ordinaire
à Luanda, Angola du 28 avril au 12 mai 2014.
-Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques
(PIDCP) adopté le 16 décembre 1966 et entrée en vigueur le
23 mars 1976, ratifié le 24 mai 1984.
-Pacte International relatif aux Droits Economiques, Sociaux
et Culturels (PIDESC) adopté le 16 décembre 1966 et entrée
en vigueur le 3 janvier 1976,ratifié le 24 mai 1984.
-Principes fondamentaux relatifs au traitement des personnes
détenues Adoptés par l'Assemblée générale
des Nations Unies dans sa résolution 45/111 du 14 décembre
1990.
-Les Principes de Paris relatifs au statut et au
fonctionnement des institutions nationales pour la protection et la promotion
des droits de l'homme, recommandations approuvées par la Commission des
droits de l'homme en mars 1992, (résolution 1992/54) et par
l'Assemblée générale (résolution A/RES/48/134 du 20
décembre 1993)
-Protocole relatif à la Cour de Justice de La CEDEAO,
signé le 1991 et entré en vigueur le 5 novembre 1996.
-Protocole relatif à la Charte africaine des droits de
l'Homme et des peuples portant création d'une Cour africaine des droits
de l'Homme et des peuples, signé le 10 juin 1998 et entré en
vigueur le 25 janvier 2004, ratifié le 23 juin 2003.
-le Protocole Additionnel A/SP.1/01/05 du 19 Janvier 2005
portant amendement du Protocole A/P /17 /91 relatif à la Cour de justice
de la Communauté.
-Protocole facultatif se rapportant au Pacte international
relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, adopté par
l'Assemblée générale, adopté le 10 décembre
2008.
-Règles minima des Nations Unies pour
l'élaboration des mesures non privatives de liberté
(Règles de Tokyo), adoptées par la résolution 45/110 du 14
décembre 1990.
-Résolution A/RES/56/161 du 20 février 2002 de
l'Assemblée générale des Nations Unies, relative à
la place des droits de l'homme dans l'administration de la justice.
-Résolution sur les lignes directrices et mesures
d'interdiction et de prévention de la torture et des peines ou
traitements cruels, inhumains ou dégradants en Afrique, adoptée
le 23 octobre 2002 par la Commission africaine des droits de l'homme.
TEXTES NATIONAUX
-Constitution de la IVe République, adoptée par
Référendum, le 27 septembre 1992, promulguée le 14 octobre
1992 et révisée par la loi n° 2002 - 029 du 31
décembre 2002.
-Loi n° 83 -1 du 2 mars 1983 instituant le Code de
procédure pénale au Togo, J.O.R.T, N°32 du 03 mars 1983.
-Loi n° 87-09 du 09 juin 1987 instituant la Commission
Nationale des Droits de l'Homme au Togo.
-Loi n°2007 - 017 du 06 juillet 2007 instituant le Code
de l'enfant au Togo.
-Loi N°2013-010 du 27 mai 2013 portant sur l'aide
juridictionnelle.
-Loi n° 2015 -10 du 24 novembre 2015 instituant le
Nouveau Code pénal au Togo.
-Ordonnance N°78- 35 du 7 septembre 1978 portant
organisation judiciaire au Togo, J.O.R.T, N° 21 bis spécial du 11
septembre 1978.
-Arrêté n° 488 du 1er septembre 1933
réorganisant le régime pénitentiaire indigène au
Togo ; J.O du territoire du Togo placé sous mandat de la France, du
16 septembre 1933.
RAPPORTS
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des droits humains dans le monde, 502 p,
(http//amnistie.ca/sites/default/files/upload/.../rapport_annuel_-_air1415.pdf)
(consulté le 18 novembre 2015) ;
-AMNESTY INTERNATIONAL, Rapport 2015/16 sur la situation
des droits humains dans le monde, 485 p ;
-Bureau du Haut-Commissariat des Nations Unies aux Droits de
l'Homme au Togo, Compilation des travaux des ateliers régionaux de
renforcement des capacités des magistrats et officiers de police
judiciaire sur le respect des droits de l'homme dans l'administration de la
justice, éd l'Harmattan : Togo, 11 octobre 2011 au 23 mars
2012, 237 p.
-Bureau du Haut-commissariat des Nations unies aux droits de
l'homme au Togo,Rapport sur le respect et la mise en
oeuvre des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans
l'administration de la justice au Togo : décembre 2013, 55
p.
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sur la situation des droits de l'Homme au Togodans le cadre de l'examen du
rapport du Togo, 50e session, Banjul, la Commission africaine
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système pénitentiaire : Compilation d'outils
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-OPEN SOCIETY FOUNDATIONS et PNUD, Rapport de la campagne
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-PenalReform International, Recommandations africaines
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Civile togolaise, Rapport sur la situation des Droits de l'Homme de 2005
à 2010, présenté devant le Conseil des Droits de
l'Homme des Nations Unies dans le cadre de l'Examen périodique
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AUTRES DOCUMENTS
-CORNU (G) ET ASSOCIATION HENRI CAPITANT, Vocabulaire
juridique, QUADRIGE : 10e édition, PUF,
10e édition mise à jour ;
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www.pulp.up.ac.za).
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http://www.achpr.org/fr/instruments/achpr.
TABLE DES MATIERES
DEDICACE
2
REMERCIEMENTS
3
LISTE DES SIGLES ET
ABBREVIATIONS
4
RESUME
5
ABSTRACT
5
SOMMAIRE
6
INTRODUCTION GENERALE
7
I. CONTEXTE ET DELIMITATION DE L'ETUDE
8
A. CONTEXTE DE L'ETUDE
8
1. Contexte socio- politique
9
2. Contexte économique
11
B. DELIMITATION DE L'ETUDE
13
1. Délimitation matérielle
13
2. Délimitation temporelle
13
3. Délimitation spatiale
14
II. CADRE DE L'ETUDE
15
A. APPROCHE CONCEPTUELLE
15
1. Définition de la notion de
détention préventive
15
2. Définition de la notion de Droits
de l'Homme
16
B. INTERET DE L'ETUDE
17
1. Intérêt social
17
2. Intérêt scientifique
18
C. PROBLEMATIQUE ET HYPOTHESES
18
1. Problématique
19
2. Hypothèses
19
a. Hypothèse principale
19
b. Hypothèses secondaires
20
III. CONDUITE DE L'ETUDE
20
A. REVUE DE LITTERATURE
20
B. METHODOLOGIE
24
1. Méthodes
24
2. Techniques d'enquête
25
C. ARTICULATION ET JUSTIFICATION DU PLAN
26
PREMIERE
PARTIE : UNE PROTECTION LIMITEE DES DROITS DE L'HOMME AU COEUR DE LA
DETENTION PREVENTIVE AU TOGO
27
CHAPITRE
I : UNE PROTECTION MITIGEE DES DROITS ET LIBERTES CIVILS ET POLITIQUES
DES DETENUS PREVENTIFS AU TOGO
29
Section 1: Les limites de la protection des droits
et libertés civils et politiques des détenus
préventifs
29
Paragraphe 1 : Les limites textuelles
30
A. L'état des lieux du cadre
légal
30
B. Les insuffisances inhérentes au
cadre légal
30
Paragraphe 2 : Les limites
institutionnelles
32
A. Les dysfonctionnements liés au
système judiciaire
32
B. Les dysfonctionnements liés aux
conditions de travail des acteurs judiciaires et pénitentiaires
34
Section 2 : Les violations récurrentes
des droits et libertés civils et politiques des détenus
préventifs au Togo
35
Paragraphe 1 : La violation des garanties
procédurales en matière de détention préventive
35
A. Les entorses au principe du
procès juste et équitable
35
B. Les entorses au principe de la
présomption d'innocence
37
Paragraphe 2 : La violation des droits civils
et politiques au cours de la détentionpréventive
40
A. Le non-respect du droit d'assistance d'un
conseil et de communication avec l'extérieur
40
B. Le non-respect de l'exercice des autres
droits civils et politiques des détenus préventifs
41
CHAPITRE
II : UNE PRECARITE DE PRISE EN CHARGE DES DROITS ECONOMIQUES, SOCIAUX ET
CULTURELS DES DETENUS PREVENTIFS AU TOGO
43
Section 1 : Les défaillances des
établissements pénitentiaires et des mécanismes de
contrôle de prise en charge des détenus
44
Paragraphe 1 : L'état critique de
l'environnement carcéral
44
A. La carence et l'inadéquation des
établissements pénitentiaires
44
B. La surpopulation carcérale
45
Paragraphe 2 : Les défaillances des
mécanismes de contrôle
47
A. Les mécanismes de contrôle
de la légalité de la détention et d'inspection des
conditions de détention carcérale
47
1. Les mécanismes de contrôle
juridictionnel
47
2. Les mécanismes de contrôle
non juridictionnel
48
B. L'insuffisance des allocations de prise
en charge des détenus
49
Section 2: Une prise en charge insuffisante des
droits économiques, sociaux et culturels des détenus
préventifs
50
Paragraphe 1: L'insuffisance de la prise en charge
des droits socio-économiques et culturels des détenus
préventifs
51
A. La détérioration des
conditions de détention et les atteintes aux droits
socio-économiques des détenus
51
1. Les atteintes au droit à
l'hébergement et à la literie
51
2. Les atteintes au droit à une
alimentation suffisante, saine et équilibrée
52
3. Les atteintes au droit à la
santé et aux soins médicaux
52
4. Les atteintes au droit d'accès aux
vêtements
54
B. La détérioration des
conditions de détention et les atteintes aux droits culturels des
détenus
54
1. Les atteintes au droit à
l'éducation ou à la formation professionnelle
54
2. Les atteintes au droit culturel et
religieux
55
Paragraphe 2 : Les répercussions
socio-économiques de la détention préventive
55
A. Les répercussions
socio-économiques de la détention préventive sur la
famille du détenu
55
B. Les répercutions
socio-économiques de la détention préventive sur
l'ensemble de la société
56
DEUXIEME
PARTIE : UNE PROTECTION PERFECTIBLE DES DROITS DE L'HOMME AU COEUR DE LA
DETENTION PREVENTIVE AU TOGO
58
CHAPITRE
I : L'URGENCE DE LA MOBILISATION DE L'ETAT TOGOLAIS EN FAVEUR DE LA
PROTECTION DES DROITS DES DETENUS PREVENTIFS
60
Section 1 : L'effectivité des
mécanismes de protection des droits de l'homme dans la phase
procédurale de la détention préventive
60
Paragraphe 1 : La concrétisation
attendue des reformes législatives et institutionnelles en
matière de la détention provisoire
61
A. La nécessité
d'accélérer la révision du code de procédure
pénale togolais et des textes réglementaires
61
B. La nécessité
d'accélérer la réforme de la justice pénale
63
Paragraphe 2 : La mise en oeuvre effective des
mesures alternatives à la détention provisoire comme garanties
des droits fondamentaux des détenus préventifs
64
A. L'efficacité des mesures
alternatives à la détention préventive et du juge des
libertés et de la détention
65
B. Le renforcement de l'efficacité
des voies de recours
67
Section 2 : L'amélioration de la prise
en charge des droits économiques, sociaux et culturels
68
Paragraphe 1 : L'amélioration
des modalités de traitement des détenus préventifs en
milieu carcéral
68
A. Sur le plan matériel
68
1. Construction des prisons
modernes
69
2. La séparation des
détenus
69
3. L'hygiène et les soins
médicaux
69
4. La nourriture et le matériel de
couchage
70
B. Sur le plan moral, intellectuel et
religieux
70
Paragraphe 2 : L'effectivité des
mécanismes de contrôle des établissements
pénitentiaires et de réparation de préjudice
71
A. La nécessite de renforcer
l'efficacité des mécanismes de contrôle étatique des
établissements pénitentiaires
71
1. Le contrôle interne
72
2. Le contrôle externe
72
B. La nécessité de renforcer
les mécanismes de réparation et d'indemnisation
73
CHAPITRE
II : L'INTERVENTION ACCRUE DES ORGANISATIONS INTERNATIONALES ET DES
ORGANISATIONS DE LA SOCIETE CIVILE
76
Section 1 : L'intervention accrue des
institutions internationales et des partenaires en développement
76
Paragraphe 1 : L'influence des institutions
internationales des droits de l'homme
76
A. Les mécanismes et institutions
onusiens de protection des droits de l'homme
77
B. Les institutions internationales non
onusiennes des droits de l'homme
79
Paragraphe 2 : L'influence des partenaires en
développement et de coopération
81
A. Les institutions financières et de
coopération
81
B. L'impact des organisations
internationales
83
Section 2 : L'intervention accrue des
organisations de la société civile et des Organisations de
défense des droits de l'homme
83
Paragraphe 1 : La contribution des
organisations de la société civile et de défense des
droits de l'homme
84
A. La Coordination des Partenaires des
Prisons du Togo
84
B. Les OSC et ODDH : des
mécanismes efficaces de contrôle externe et indépendant des
lieux de détention
85
Paragraphe 2 : Le développement de la
coopération pour mieux garantir les droits économiques, sociaux
et culturels des détenus préventifs
86
A. La coopération entre le
ministère de la justice et d'autres ministères
87
B. La coopération entre les OSC, les
institutions nationales et les institutions internationales des droits de
l'homme
88
CONCLUSION GENERALE
90
BIBLIOGRAPHIE
95
MANUELS
95
OUVRAGES
96
THESES ET MEMOIRES
96
TEXTES INTERNATIONAUX ET REGIONAUX
97
TEXTES NATIONAUX
99
RAPPORTS
100
AUTRES DOCUMENTS
102
TABLE DES MATIERES
103
* 1Déclaration
Universelle des Droits de l'Homme adoptée par l'Assemblée
générale des Nations Unies le 10 décembre 1948.
* 2 Le principe de la
présomption d'innocence est inscrit dans la Déclaration
Universelledes droits de l'homme (art.11) et dans la Constitution togolaise
(art. 18).Ce principe est aussi garanti par le Pacte international relatif
auxdroits civils et politiques (art. 14, para. 2), par la Charte africaine
desdroits de l'homme et des peuples (art. para. 1 b), la Convention
américaine relative aux droits de l'homme (art. 8, para. 2) et la
Conventioneuropéenne des droits de l'homme (art. 6, para.2).
* 3 Art. 18
al.1er de la Constitution togolaise du 14 octobre 1992,
modifiée le 31 décembre 2002.
* 4Pacte International
relatif aux Droits Civils et Politiques (PIDCP) adopté le 16
décembre 1966 et entrée en vigueur le 23 mars 1976.
* 5Le Togo est membre de
l'ONU depuis le 20 septembre 1960.
* 6Statistiques des
détenus : Au 04 décembre 2015, sur un effectif total de 4518
détenus, on dénombre 3013 détenus préventifs et
1505 détenus condamnés soit un taux de 66,69 % et 33,31
% ; au 1er décembre 2014, sur un effectif total de
4231 détenus, on retrouve 2596 détenus préventifs et 1635
détenus condamnés soit un taux de 61,36 % et 38,64 %.
* 7Montesquieu,
« de l'esprit des lois », nouvelle édition,
Paris, Garnier, 1871, p. 72.
* 8Projet d'appui d'urgence
au secteur pénitentiaire (PAUSEP) et Programme national de modernisation
de la justice (PNMJ) financés par l'Union Européenne et
PNUD.
* 9République du
Togo, Rapport national de mi-parcours dans le cadre de l'EPU, 2011,
p.20.
* 10 Accords politiques
global avec les 22 engagements, signés le 14 avril 2004 auprès de
la Commission de l'Union européenne, la Déclaration de Kampala
sur la détention en Afrique des 19-21 septembre 1996, la
Déclaration d' Ouagadougou sur l'accélération de la
réforme pénale et pénitentiaire en Afrique des 18 et 20
septembre 2002.
* 11 Accord entre le
Haut-Commissariat des Nations Unies aux Droits de l'Homme et le Gouvernement
de la République togolaise relatif à l'établissement d'un
bureau du HCDH au Togo, signé le 10 juillet 2006.
* 12Déclaration de
Kampala sur la santé en prison en Afrique tenu à Kampala les 12
et 13 décembre 1999.
* 13 Haut- Commissariat des
Droits de l'Homme, Rapport sur le respect et la mise en oeuvre des droits
de l'homme et des libertés fondamentales dans l'administration de la
justice au Togo, Décembre 2013, p. 26.
* 14 Le taux d'occupation
totale des prisons civiles au Togo est de 166 % au 04 décembre 2015 et
de 156 % au 1er décembre 2014. Dans les prisons civiles de
Lomé, Aného, Tsévié, Notsè, Atakpamé
et Dapaong, ce taux varie entre 191 % à 326 %. (Source :
Statistiques de la Direction de l'Administration Pénitentiaire et de la
Réinsertion du Togo).
* 15 Les douze centres de
détention du Togo sont : Dapaong, Mango, Kanté, Kara,
Bassar, Sokodé, Atakpamé, Notsè, Tsévié,
Lomé, Vogan et Aného.
* 16 4e
Recensement Général de la Population et de l'Habitat, 2010.
* 17 Contribution
prévue déterminée au niveau national (CPDN) dans le cadre
de la convention cadre des nations unies sur les changements climatiques
(CCNUCC), septembre 2015, p.21.
* 18 Groupe de la Banque
Mondiale, Rapport « Doing Business » relative à
l'évolution de la règlementation des affaires dans le monde,
éd. 2015, p.4.
* 19Depuis son
indépendance en 1960, le Togo a connu une première Constitution
en 1961, puis une deuxième Constitution en 1963, la troisième
Constitution n'a cependant été adoptée qu'en 1979. La
Constitution de la quatrième République a été mise
en place, en 1992.
* 20 L'année 1992,
correspond à l'année d'adoption de la Constitution de la quatre
République togolaise. C'est à partir de cette date que les
traités ratifiés par le Togo ont été
incorporés dans la Constitution. Cette constitution procède
visiblement à une reconnaissance plus claire et plus directe des droits
fondamentaux proclamés par les textes internationaux, et institue des
instances et des procédures visant à contrôler, et
éventuellement à censurer toute violation desdits droits.
* 21La CNDH du Togo a
été créée en 1987.
* 22 Les années
1978, 1983 et 2015 correspondent respectivement aux dates d'adoption des textes
suivants : Ordonnance N°78- 35 du 7 septembre 1978 portant
organisation judiciaire au Togo, J.O.R.T, N° 21 bis spécial du 11
septembre 1978, loi N°83 -1 du 2 mars 1983 instituant le code de
procédure pénale au Togo, et la loi n° 2015 -10 du 24
novembre 2015 instituant le Nouveau Code pénal au Togo.
* 23 Jean Pradel,
Procédure pénale, 14e éd, CUJAS,
2008/2009, p.678.
* 24 Gérard CORNU,
Association Henri Capitant, « Vocabulaire
juridique », 10e éd, QUADRIGE, mise à
jour, Puf, IMPRIM VERT, juillet 2015, p.340.
* 25 Art.112 du C.P.P.T
* 26Frédéric
Sudre, « Droit européen et international des droits de
l'homme », 7e éd, Coll. Droit fondamental,
Paris, PUF, 2005,cité par Eric MONDIELI, Droit international des
droits de l'homme, Syllabus de cours 2013-2014, p. 34.
* 27 Gérard CORNU,
Association Henri Capitant, « Vocabulaire
juridique », 10e éd, QUADRIGE, mise à
jour, Puf, IMPRIM VERT, juillet 2015, p.375.
* 28 Source : site des
Nations Unies : « Documents de base concernant les droits de
l'homme »http://www.ohchr.org/english/bodies/treaty/index.htm
(consulté le 17 mai 2016).
* 29Amnesty International
Section Togo, Rapport relatif au respect des droits humains au Togo,
publié le 05 mai
2016.https://www.amnesty.org/.../2016/05/togo(consulté le 29 mai
2016).
* 30KodjoWoayi,La
règlementation de la détention préventive dans le Code de
procédure pénale de la loi n°83 - 1 du 2 mars
1983,Mémoire présenté en vue de l'obtention du
Diplôme du Cycle III, Ecole Nationale d'Administration du Togo, section
magistrature, 1989, p. 45-47.
* 31Juriste, criminologue,
philosophe et Professeur ordinaire à la Faculté de Droit de
l'Université Saint-Louis - Bruxelles (USL-B).
* 32 Yves Cartuyvels,
« Droits de l'homme, bouclier ou épée du droit
pénal », éd. Facultés Universitaires
Saint-Louis Bruxelles - F.U.S.L., Bruylant, 2007, p.23.
* 33Frédéric
Sudre, op. Cité dans la préface de l'oeuvre de
BéatriceBelda : Les droits de l'homme des personnes
privées de liberté, Contribution à l'étude du
pouvoir normatif de la Cour européenne des droits de l'homme, Prix de
thèse de la Faculté de droit de Montpellier I, p. 2.
* 34 Maître de
Conférences de Droit public à l'Institut de Droit Européen
des Droits de l'Homme.
* 35 Béatrice
Belda : Les droits de l'homme des personnes privées de
liberté, Contribution à l'étude du pouvoir normatif de la
Cour européenne des droits de l'homme, Prix de thèse de la
Faculté de droit de Montpellier I, p.24.
* 36Greffier au Tribunal de
Parakou (R/Bénin).
* 37 Jean-Marie
DadoTossou : La garantie du droit à la
santé des détenus préventifs dans les prisons du
Bénin », Mémoire de recherche, Université de
Nantes, 2012 - 2013, p.56.
* 38Haut-commissariat des
droits de l'homme au Togo, Rapport sur le respect et la mise en oeuvre des
droits de l'homme et des libertés fondamentales dans l'administration de
la justice au Togo, décembre 2013, p. 26 ;
* 39 Gilbert Collard, Les
dérives judiciaires ; et si ça vous arrivait ?
Eyrolles, 2011, p.193.
* 40Me Guy Danet,
Président du Conseil national des barreaux, Gazette du Palais, 30
juillet 1996.
* 41Maître de
conférence en droit public à l'Université de Caen
Basse-Normandie.
* 42Jean-Manuel Larralde,
Les droits des personnes incarcérées : entre punition et
réhabilitation, CRDF, n°2, 2003, p. 73.
* 43 CEDH, 10 mars 1988,
décision B. c/RFA, DR 55. p 271, p. 290.
* 44 Déclaration
Universelle des Droits de l'Homme, le Pacte international relatif aux droits
civils et politiques (PIDCP) (adhéré le 24 mai 1984) ; le Pacte
international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels
(PIDESC) (adhéré le 24 mai 1984), la convention contre la torture
et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants
(signé le 25 mars 1987 et ratifié le 18 novembre 1987) et son
protocole facultatif (signé le 15 septembre 2005 et ratifié le 20
juillet 2010), la convention relative aux droits de l'enfant (signé le
26 janvier 1990 et ratifié le 1er août 1990) et les
conventions de Genève de 1949 et les Règles minima des Nations
Unies pour l'élaboration de mesures non privatives de liberté
(Règles de Tokyo) adoptées par l'Assemblée
générale dans sa résolution 45/110 du 14 décembre
1990.
* 45 Convention de
sauvegarde des droits de l'homme et des libertés
fondamentales, Convention européenne des droits de l'homme, La
Déclaration américaine des droits et des devoirs de l'homme, La
Convention américaine relative aux droits de l'homme, la Charte
Africaine des droits de l'Homme et des peuples ; l'Acte constitutif de l'Union
africaine, la Charte Africaine des Droits et du Bien-être de l'enfant,
le protocole à la charte africaine des droits de l'homme et des peuples,
relatif aux droits de la femme, le protocole relatif à la charte
africaine des droits de l'homme et des peuples, relatif à la cour
africaine des droits de l'homme et des peuples.
* 46 Charles EISENMANN,
Cours de droit administratif, Paris, Les cours de droit, L.G.D.J., 1969,
cité par NACH MBACK C, Démocratisation et
décentralisation, Paris, Karthala, PDM, 2003, p. 45.
* 47 Henri BATTIFOL, Aspects
philosophiques du Droit international privé, Paris, Dalloz, 2002,
p.6.
* 48 Auteur de la tendance
structuro-fonctionnaliste de l'analyse systémique.
* 49 Rapport
intérimaire du Rapporteur spécial sur la torture et autres peines
ou traitement cruels, inhumains ou dégradants, A/68/295, 9 août
2013, para.35.
* 50 Art. 10, para.1 du
PIDCP, Art. 5 de la CADHP.
* 51 Art. CESCR, Art.26
PIDCP; Art.15 CEDAW et Art.5, 12 CDPH.
* 52Pacte international
relatif aux droits civils et politiques, 1966 ; Convention relative aux
droits de l'enfant, 1989 ;Charte africaine des droits de l'homme et des
peuples, 1986 ; Convention sur l'élimination de toutes les formes
de discrimination à l'égard des femmes, 1979.
* 53Sous - titre 1
intitulé Droits et libertés tirés du Titre
« des droits, libertés et devoirs des
citoyens »de la Constitution Togolaise de 1992, p.6 et 7.
* 54Loi n° 2015 -10 du
24 novembre 2015 instituant le Nouveau Code pénal au Togo.
* 55Articles 198 à 206 de laSection 1
intitulé « De la torture et des autres mauvais
traitements tiré du Chapitre
IV « Des atteintes à l'intégrité physique
de la personne » du NCPT, p. 38 - 39.
* 56Art. 32 de
l'arrêté n°488 du 1er septembre
1933 :« toute faute commise par un détenu est
sanctionnée par l'une des punitions suivantes infligées par le
directeur de la prison assisté du surveillant - chef : suppression
des pauses dans le travail, corvée supplémentaire le dimanche,
demi-ration sans viande ni poison ; pour une durée maximale de 40
jours à ration normale ; cellule pour une durée maxima de
trente jours ; salle de discipline, pour une durée maxima de trente
jours ; mise aux fers en cellule en cas de fureur ou de violence grave.
Les détenus qui se sont déclarés malades et n'ont pas
été reconnus tels par le médecin de la prison sont punis
soit de corvée supplémentaire le dimanche, soit desuppression,
pendant un jour, de ration de viande ou de poisson. Les
détenus qui n'ont pas exécuté le
travail qui leur avait été imposé n'ont droit qu'à
la demi-ration sans viande ni poisson. »
* 57Commission Nationale des
Droits de l'Homme, Rapport d'activité d'exercice 2014, Togo,
p. 33-40.
* 58 Haut-commissariat des
Nations unies aux droits de l'homme, Rapport sur le respect et la mise en
oeuvre des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans
l'administration de la justice au Togo, décembre 2013, p.32.
* 59 Les tribunaux à
effectif restreint sont à ce jour : Amlamé, Elavagnon,
Guérin Kouka, Bafilo, Pagouda, Niamtougou, Tandjouaré, Agou et
Mandouri, Dany et Tohoun.
* 60Aux termes de cet
article, « le Tribunal de Première Instance peut toutefois si
le nombre des affaires ne justifie pas l'affectation de trois magistrats,
comprendre un président du tribunal, un juge d'instruction chargé
du parquet ou un juge unique qui cumule les fonctions de président, de
juge d'instruction et de procureur de la République.»
* 61CNDH, Rapport
d'activités exercice 2014, p.36.
* 62République
Togolaise, Rapport national relatif à l'examen périodique
universelle, présenté conformément au paragraphe 15A
de l'annexe à la résolution 5/1 du Conseil des Droits de l'Homme
de l'ONU, 2011, p.7.
* 63Propos de Monsieur
IdrissouAkibou tenus lors de l'entretien du jeudi 12 mai 2016.
* 64 Jacques VELU etRusen
ERGEC, La Convention européenne des droits de l'homme, Bruylant,
Bruxelles, 1990, p.435. Le but est, pour citer la Cour « de
protéger des droits non pas théoriques illusoires mais concrets
et effectifs», Cour Européenne des Droits de l'Homme,
arrêt du 9 octobre 1979, Airey, para.24. Cité par François
BERNARD et Antoine BERTHE, tous doctorants, dans « Les garanties
procédurales en matière de reconduite à la
frontière au regard de la Convention européenne des droits de
l'homme », p.1.
* 65Article 113 al. 3 de la
Constitution togolaise.
* 66 Etats-Unis
d'Amérique, 40e Rapport sur la situation des droits humains
au Togo, avril 2016. Cité le 3 mai 2016 par une presse privée,
Liberté -Togo ;
http://www.27avril.com/
(consulté le 14 mai 2016).
* 67Comité des droits
de l'homme des Nations Unies, Observation générale 29 relative au
PIDCP (2007), para. 6.
* 68 Comité des
droits de l'homme des Nations Unies, Observation générale 32
relative au PIDCP (2007), para. 11.
* 69 Jean PRADEL, Droit
pénal, procédure pénale. Tome II, 2e
édition. CUJAS Paris 1976, p.482.
* 70Comité des droits
de l'homme des Nations Unies, Observation générale 32 relative au
PIDCP (2007), par. 30. Voir aussi Comité des droits de l'homme des
Nations Unies Observations finales du Comité des droits de l'homme:
Argentine, UN Doc CCPR/CO/70/ARG (2000), para. 10.
* 71WairikiRameka et al.
Contre Nouvelle-Zélande, Comité des droits de l'homme (HRC),
Communication 1090/2002, UN Doc CCPR/C/79/D/1090/2002 (2003), par. 7.4.
Cité dans Recueil juridique des standards internationaux relatif au
droit à un procès équitable, p. 92 ; OSCE/ODIHR
2013 ; osce.org/odihr(consulté ce 19 avril
2016).
* 72Lutz c. Allemagne [1987]
CEDH 20, par. 63.
* 73Conseil des droits de
l'homme, Rapport de suivi de la mise en oeuvre des recommandations de l'EPU
du 1er cycle au Togo, 11 février 2015.
* 74 Ibid.,
précité.
* 75 L'article 3 (droit
à des élections libres) du Protocole n° 1 à la
Convention européenne des droits de l'homme dispose que : « Les
Hautes Parties contractantes s'engagent à organiser, à des
intervalles raisonnables, des élections libres au scrutin secret, dans
les conditions qui assurent la libre expression de l'opinion du peuple sur le
choix du corps législatif. »
* 76Commissaire à la
Commission Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples et Rapporteur
Spécial des Prisons et Conditions de Détention en Afrique.
* 77La Commission Africaine
des Droits de l'Homme et des Peuples, les Lignes directrices sur les
conditions d'arrestation, de garde à vue et de détention
provisoire en Afrique, Luanda : Angola, du 28 avril au 12 mai 2014,
p.38.
* 78Pacte international
relatif aux droits économiques, sociaux et culturels de 1966 ; la
Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains
ou dégradants de 1984 ; la Convention relative aux droits de
l'enfant ; la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples de
1986 ; etc.
* 79Ensemble de
règles minimales pour le traitement des détenus : ONU,
1957 ; Ensemble de règles minima concernant l'administration de la
justice pour mineurs : ONU, Beijing, 1985 ; Principes fondamentaux
relatifs au traitement des détenus : ONU, 1990 ;
Déclaration de Kampala sur les conditions de détention dans les
prisons civiles en Afrique, 1997 ; Déclaration d'Arusha sur la
bonne pratique en matière pénitentiaire, 1999 ; Plan
d'Action de Ouagadougou sur la réforme pénale et
pénitentiaire en Afrique, 2002 ; etc.
* 80 Le Comité des
droits économiques, sociaux et culturels a examiné, rapport
initial du Togo sur l'application du Pacte international relatif aux droits
économiques, sociaux et culturels (E/C.12/TGO/1) à ses
12e à 14e séances (E/C.12/2013/SR.12
à 14), les 6 et 7 mai 2013, et a adopté, à sa
28e séance, le 17 mai 2013.
* 81Financée par
l'Union européenne, ce projet a permis la réhabilitation de la
prison civile de Lomé. Mais la surpopulation carcérale demeure un
sujet d'inquiétude. A titre d'illustration, la prison civile de
Lomé construite depuis plus de 50 ans pour abriter 666 personnes en
compte à la date du 1er décembre 2014 un effectif de
2144, soit le triple (Source : Direction de l'Administration
pénitentiaire et de la réinsertion).
* 82 Statistiques des
détenus dans les douze prisons civiles du Togo : 05 janvier 2016
(4.452), 02 février 2016 (4.523), mars 2016 (4.493), avril 2016 (4.471)
et mai 2016 (4.404).
* 83 Financée par
l'Union européenne dans le cadre du Programme national de modernisation
de la justice au Togo. Elle n'est pas encore opérationnelle.
* 84 Ensemble des
règles minimales pour le traitement des détenus adoptées
par le premier Congrès des Nations Unies pour la prévention du
crime et le traitement des délinquants, tenu à Genève en
1955 et approuvées par le Conseil économique et social dans les
résolutions 663 C (XXIV) du 31 juillet 1957 et 2076 (LXII) du 13 mai
1977.
* 85Les prisons civiles les
plus surpeuplées dans la période janvier- mai 2016 sont :
Dapaong (le taux d'occupation varie entre 202 % et 222 %) ; Bassar (152 %
et 187 %) ; Atakpamé (152 % et 295 %) ; Notsè (264 % et
311 %) ; Tsévié (329 % et 421 %) ; Aného (196 %
et 221 %) et Lomé (le taux d'occupation varie entre 310 % et 324
%).Source : Direction de l'administration pénitentiaire.
* 86CNDH : Rapport
d'activités exercice 2014, p. 39.
* 87 Art.112
« La détention préventive est une mesure
exceptionnelle. Lorsqu'elle est ordonnée, les règles
ci-après doivent être observées » du
CPPT.
* 88 Ibid., p.43.
* 89GAMATHO (P.),
« le respect des droits de l'homme dans l'administration de la
justice Togolaise », Ateliers régionaux de renforcement
des capacités des magistrats et des officiers de police judiciaire sur
le respect des droits de l'homme dans l'administration de la justice, 2012,
p.32.
* 90Ibid.,p.43.
* 91Article 2 lit c) et
Articles 17 ff. de la Loi Organique No. 96-12 of 11 Décembre 1996
relative à la composition, l'organisation et au fonctionnement de la
CNDH, modifiée et complétée par la Loi Organique No.
2005-004 du 9 février 2005 (ci-après «Loi Organique de la
CNDH»).
* 92Gouvernement des
Etats-Unis, 40e Rapport sur la situation des droits humains au
Togo, avril 2016.
* 93Les lignes
budgétaires pour l'alimentation des détenus des 12 prisons
civiles du Togo pour les quatre dernières années sont de :
380.000.000 (année 2013) ; 400.000.000 (année 2014) ;
300.000.000 (année 2015) et 300.000.000 (année 2016).
Source : Direction de l'administration pénitentiaire du Togo.
* 94PNUD, Rapport final sur
Évaluation du projet «Recours au volontariat pour un appui
juridique aux groupes vulnérables en milieu carcéral au Togo
» 11 février 2014.
* 95 Ibid.,
précité.
* 96NOWAK
Manfred, « Etude sur les phénomènes de
torture, de traitements cruels, inhumains ou dégradants dans le monde,
incluant une évaluation des conditions de
détention », 5 février 2010, A/HRC/13/39/Add.5.
* 97CNDH : Rapport
d'activités exercice 2014, p. 35.
* 98CNDH : Rapport
d'activités exercice 2014, p. 35.
* 99Source : Directeur
de l'administration pénitentiaire lors de l'entretien du 12 mai 2016.
* 100Entretien avec le
régisseur de la prison civile d'Atakpamé, le 26 mai 2016.
* 101Ibid.,
précité.
* 102Atlas of Torture,
Contrôle et Prévention de la Torture dans le Monde, rapport
d'évaluation de la République Togolaise 2012 : Analyse des
problèmes et des besoins dans le domaine de laprévention de
torture, p.14.
* 103PNUD, OPEN SOCIETY
JUSTICE INITIATIVE,AVOCATS SANS FRONTIERES GUINEE ET SABOU GUINEE, Rapport
de la Campagne mondiale sur les mesures judiciaires
avant-procès : « L'impact
socio-économique de la détention provisoire »,
Guinée Conakry, 2013, op. cit. p.7.
* 104G. Farrell et K.
Clark, What does the world spend on criminal justice? (HEUNI Paper No. 20) The
European Institute for Crime Prevention and Control, affilié à
l'Organisation des Nations Unies (Helsinki, 2004). Cité dans Manuel des
principes fondamentaux et pratiques prometteuses sur les alternatives à
l'emprisonnement de l'Office contre la drogue et le crime des Nations
Unies ; p.10.
* 105Ibid., p.79.
* 106 Ibid., p.83
* 107Déclaration et
Programme d'Action de Vienne, 1993.
* 108 Allocution
prononcée à l'Université de Téhéran, en
décembre 1997.
* 109 Marc Yaovi FIAWONOU,
Avocat Général près la Cour Suprême du Togo
« la présomption d'innocence et ses implications dans les
différentes étapes de la procédure judiciaire
pénale », thème développé au cours
des ateliers régionaux de renforcement des capacités des
Magistrats et OPJ en matière de la protection des droits de l'homme dans
l'administration de la justice pénale au Togo ; op. Cité.
p.66.
* 110Conseil des droits de
l'homme, Rapport de suivi de la mise en oeuvre des recommandations EPU 1er
cycle au Togo, 11 février 2015, p.4.
* 111Ibid., p.75.
* 112Source: PenalReform
International, cité dans Manuel des principes fondamentaux et pratiques
prometteuses sur les alternatives à l'emprisonnement de l'Office contre
la drogue et le crime des Nations Unies, p.11.
* 113La règle 6.1
des Règles de Tokyo et l'article 14.3 du PIDCP.
* 114 Ibid., p.71.
* 115 une mesure mise
à la disposition du magistrat instructeur, de la chambre d'accusation ou
du tribunal correctionnel, avant le jugement, alternative à la
détention provisoire et assortie de moyens coercitifs importants, visant
à maintenir sous-main de justice, et en milieu libre, des personnes qui,
sinon, auraient fait l'objet d'un mandat de dépôt.
* 116 Articles 19-24 du
CPPT.
* 117 Article 19
alinéas 2-4 du CPPT.
* 118 Article 121 du
CPPT.
* 119En quoi consiste
concrètement la non-garantie de représentabilité ?
Nous pouvons citer entre autres : un véritable problème
d'adressage ; un problème lié à l'état
civil ; l'inculpé Kodjo pouvant être véritablement
Kpatcha alors que le juge ne dispose d'aucun moyen pour y vérifier. Par
ailleurs, le manque de moyen de recherche de l'inculpé laissé en
liberté et non comparant.
* 120 L'ensemble des
Règles des Nations Unies pour l'élaboration des mesures non
préventives (Règles de Tokyo) adoptées par
l'Assemblée générale dans sa résolution 45/110 du
14 décembre 1990.
* 121« Aucun
prévenu ne doit être placé en détention provisoire,
à moins que les circonstances ne rendent cette détention
strictement nécessaire. La détention provisoire doit ainsi
être considérée comme une mesure exceptionnelle et ne
jamais être obligatoire ni utilisée à des fins
punitives. »
* 122Ibid., p.72.
* 123Art. 159-2 du CPPT.
* 124Art. 166 du CPPT.
* 125La Constitution a
été adoptée par la Conférence internationale de la
Santé, tenue à New York du 19 juinau 22 juillet 1946,
signée par les représentants de 61 Etats le 22 juillet 1946
(Actes off. Org. mond. Santé, 2,100) et est
entrée en vigueur le 7 avril 1948. Les amendements adoptés par la
Vingt-sixième, la Vingt-neuvième,la Trente-neuvième et la
Cinquante et Unième Assemblée mondiale de la Santé
(résolutionsWHA26.37, WHA29.38, WHA39.6 et WHA51.23) sont entrés
en vigueur le 3 février 1977, le 20 janvier1984, le 11 juillet 1994 et
le 15 septembre 2005 respectivement; ils sont incorporés au
présent texte.
* 126 Sous-titre I
intitulé « de la commission nationale des droits de
l'homme » de la Constitution togolais.
* 127 Conformément
aux Principes de Paris et aux Statuts du CIC, les différentes
classifications utilisées par le Sous-comité pour
l'accréditation sont les suivantes: A: Membre votant-Conformité
avec les Principes de Paris; B: Membre sans voix délibérative-la
conformité avec les Principes de Paris est incomplète ou les
renseignements fournis sont insuffisants pour prendre une décision; C:
Sans statut - non-conformité avec les Principes de Paris.
* 128Haut-Commissariat des
Nations Unies aux Droits de l'Homme, Les droits économiques, sociaux
et culturels, Manuel destiné aux institutions nationales des droits de
l'homme, série sur la formation professionnelle n°12, New York
et Genève ,Nations Unies : 2004, p.10.
* 129« La punition, la
privation de liberté ne peut faire du prisonnier un rebut humain, le
prisonnier reste un sujet de droit » (P. THIBAUD, Revue Esprit,
numéro consacré à la prison, nov. 1979, introduction).
Toute personne privée de sa liberté doit être «
traitée avec humanité et le respect de la dignité
inhérente à la personne humaine » (Pacte relatifs aux
droits civils et politiques, art. 10).
* 130 Article 19 al. 4 de
la Constitution Togolaise : «Les dommages résultant d'une
erreur de justice ou ceux consécutifs à un fonctionnement anormal
de l'administration de la justice donnent lieu à une indemnisation
à la charge de l'Etat, conformément à la
loi. »
* 131 Articles 408-412 du
CPPT.
* 132La
cérémonie de réouverture de la chambre administrative de
la Cour d'appel de Lomé a été lancée le 05
décembre 2015.
* 133 Articles 149 et 150
du CPPF et Décret N°71-5 du 04 janvier 1971 ; op.cité
Jean Pradel, procédure pénale, 14e édition
Cujas, 2008/2009, p.709.
* 134 Ibid., op. cit.
p.82.
* 135Principes concernant
le statut et le fonctionnement des institutions nationales pour la protection
et la promotion des droits de l'homme. Ces principes ont été
approuvés par la Commission des droits de l'homme en mars 1992,
(résolution 1992/54) et par l'Assemblée générale
(résolution A/RES/48/134 du 20 décembre 1993).
* 136Paul Gérard
POUGOUE, « La problématique des droits de l'homme », p. 205
cité par Martial JEUGUE DOUNGUE dans son Mémoire pour l'obtention
du master 2 de droit international et européen des droits fondamentaux
de l'université de Nantes, p. 117.
* 137Source site Nations
Unies (http://www2.ohchr.org/english/bodies/treaty/index.htm), cité par
le professeur Eric MONDIELLI dans le cours droit international des droits de
l'homme du master 2 droit international et européen des droits
fondamentaux, p.14.
* 138Le Togo a
été élu membre du Conseil des droits de l'homme en octobre
2015.
* 139 Organe des Nations
Unies qui est chargé de surveiller l'application de la Convention
relative aux droits de l'enfant.
* 140Procédures
spéciales" est le terme généralement attribué aux
mécanismes mis en place par le Conseil des droits de l'homme, qui
s'occupent de la situation spécifique d'un pays ou de questions
thématiques dans toutes les régions du monde. Il existe
actuellement 38
mandats
thématiques et 14
mandats
par pays.
* 141 Conseil des droits de
l'homme, Avis adoptés par le Groupe de travail sur la détention
arbitraire à sa soixante et onzième session, 17-21 novembre 2014,
A/HRC/WGAD/2014/45, Distr. Générale 11 février 2015.
* 142Union Chrétienne
de Jeunes Gens joue un rôle remarquable en matière de monotoring
dans les lieux de détention dans le monde.
* 143La fonction de
Rapporteur spécial sur les prisons et les conditions de détention
a été créée lors de la 20e session ordinaire de la
Commission, à la suite du Séminaire sur les conditions
carcérales en Afrique (Kampala, 19-21 septembre 1996). Il est donc
un des plus anciens mécanismes spéciaux. Le Rapporteur
spécial est habilité à examiner la situation des personnes
privées de leur liberté dans les territoires des Etats parties
à la Charte africaine sur les Droits de l'Homme et des Peuples.
* 144 Source : site de
l'Union Africaine, http://www.achpr.org/fr/instruments/achpr/,
(consulté le 29 mai 2016).
* 145Observation
générale N°14 du CODESC sur le droit de la santé,
§ 64.
* 146Enseignant-chercheur et
expert en droits de l'homme et droit humanitaire au Cameroun.
* 147 Ibid.,
précité.
* 148Fonds des Nations
Unies pour la population (FNUAP), Fonds de développement des Nations
Unies pour la femme (UNIFEM), Programme commun des Nations Unies sur le
VIH/SIDA (ONUSIDA).
* 149 Ibid.
* 150La
Déclarationd'OuagadougouetsonPland'actionpourl'accélérationdesréformespénitentiairesetpénalesenAfrique.http://www.achpr.org/instruments/ouagadougou-planofaction.
* 151Union
Chrétienne de Jeunes Gens-Togo, vue d'ensemble des mécanismes de
la société civile faisant le monitoring préventif de lieux
de détention au Togo, p.72.
* 152 Cette action est
l'oeuvre de l'Union Chrétienne de Jeunes Gens-Togo
* 153 Ibid., p. 96.
* 154Le Haut-Commissaire
actuel, Mme NavanethemPillay, a pris ses fonctions en septembre 2008. Mme
Pillay a été précédée à ce poste par
Mme Louise Arbour (2004-2008), M. Sergio Vieira de Mello (2002-2003), Mme Mary
Robinson (1997-2002) et M. José Ayala Lasso (1994-1997). Mr. Bertrand G.
Ramcharan a été Haut -Commissaire en exercice de 2003 à
2004.
* 155Haut-Commissariat des
Nations Unies aux Droits de l'Homme, Travailler avec le programme des
Nations Unies pour les droits de l'homme: un Manuel pour la
société civile, Palais des Nations CH-1211 Genève 10,
Suisse, p.iii.
* 156La loi du 18 janvier
1994 a confié au service public hospitalier la prise en charge des
personnes détenues, qui étaient assurée auparavant par
l'administration pénitentiaire.
* 157Note conceptuelle,
12e conférence internationale des institutions nationales de
promotion et de protection des droits de l'homme : « les
objectifs de développement durable : quel rôle pour les
institutions nationales des droits de l'homme ? », Merida :
Mexique, 8-10octobre, 2015, 9 p.
* 158Voir par exemple CHRI:
A Partnership for HumanRights: Civil Society and National HumanRights
Institutions (2011)
http://www.humanrightsinitiative.org/programs/CHOGM/CHRI%202011%20CHOGM%20Report.pdf.Cité
dans note conceptuelle, 12e conférence internationale des
institutions nationales de promotion et de protection des droits de
l'homme : « les objectifs de développement durable : quel
rôle pour les institutions nationales des droits de l'homme
? », Merida : Mexique, 8-10octobre, 2015, p.6.
* 159 Dans une
liberté plus grande : développement, sécurité
et respect des droits de l'homme pour tous, Rapport du Secrétaire
général, 24 mars 2005, A/59/2005.
* 160Article 10 par.1 du
PIDCP.
* 161Jean PRADEL,
procédure pénale, Editions CUJAS, 14è édition
2008/2009, 678 p.
* 162 Article 113 du Code
de procédure pénale du Togo.
* 163Les différents
instruments internationaux et régionaux des droits de l'homme
ratifiés et signés par l'Etat togolais font parties
intégrante à notre Constitution.
* 164La Constitution du 14
octobre 1992, modifiée le 31 décembre 2002 et 2007.
* 165Bureau du
Haut-commissariat des Nations unies aux droits de l'homme au Togo :
Rapport sur le respect et la mise en oeuvre des droits de l'homme et des
libertés fondamentales dans l'administration de la justice au Togo,
publié en Décembre 2013, p. 26.
* 166La loi n°2007 -
017 du 06 juillet 2007 instituant le Code l'enfant au Togo.
* 167Joseph WRESINSKIest
un
prêtre
diocésain français, fondateur du Mouvement des
droits de
l'homme
ATD Quart
Monde, initiateur de la lutte contre l'
illettrisme.