Les fonctions sociales de la littérature dans l'oeuvre de Simplice Ilunga Monga( Télécharger le fichier original )par Guy KEBA GUMBA Université de Lubumbashi - DEA 2016 |
I.1. CADRE THEORIQUEI.1.1. DEFINITION DES CONCEPTS CLESI.1.1.1. LA LITTERATUREI.1.1.1.1. « LITTERATURE » ET EVOLUTION DU SENSAvouons qu'il est très embarrassant de définir avec exactitude la littérature, étant donné la complexité du terme qui, à la limite, verse dans le générique. Le mot littérature, provient du latin « littera » signifiant « lettre », ou « ce qui est écrit ». Le Dictionnaire encyclopédique des belles lettres(1979 :210) stipule que le terme « littérature » apparaît au début du XIIe siècle avec un sens technique de « chose écrite »,puis évolue à la fin du Moyen-âge vers le sens de « savoir tiré des livres » avant d'atteindre aux XVIIe?-?XVIIIe siècles son sens actuel : ensemble des oeuvres écrites ou orales comportant une dimension esthétique. Le Dictionnaire Gaffiot (1966 : 321) repère plutôt une évolution de sens du mot « littérature » qui désigne d'abord, un ensemble de lettres constituant le fait d'écrire ou un ensemble de lettres constituées en alphabet.Ensuite, le sens s'élargit en renvoyant à celui de grammaire, de philologie, c'est-à-dire, à l'étude technique et érudite des textes écrits. Il aboutit enfin au sens de savoir, d'érudition dans le domaine des textes écrits. Philippe Caron, quant à lui, soutient que « le mot est attesté au début du XIIe siècle avec le sens premier du latin de « chose écrite ». Le mot littérature ne retrouve son sens plein qu'un peu plus tard en déformant la conception latine pour signifier « le savoir acquis par les livres »(Précis de psycholinguistique :1989). A ce sujet, Philippe Caron soutient encore dans La bestiaire(1994 :56) quela stratification de la littérature s'élargitau XXe siècle à toutes les productions écrites. Il parle aussi bien du contenu (sentimentalisme des romans de gare, pornographie et érotisme) que de la forme (roman sans ponctuation, vers libre, écriture automatique). La définition de Philippe Caron s'adapte donc à des catégories affinées telles que le roman historique, la littérature de science-fiction ou paralittérature, sans faire disparaître les désaccords sur la qualification littéraire de certains types d'oeuvres comme le roman de gare, le roman-photo ou la bande dessinée. Il prétend que « La littérature se définit, comme un aspect particulier de la communication verbale, orale ou écrite. La littérature développe une exploitation des ressources de la langue pour augmenter les effets sur le destinataire, qu'il soit lecteur, auditeur ou interprétant. Bien que les frontières de la littérature soient floues et variables selon les appréciations personnelles, cependant elles ne se caractérisent donc pas seulement, par ses supports et ses genres, mais aussi par sa dimension esthétique. La mise en forme du message l'emporte sur le contenu, dépassant ainsi la communication utilitaire limitée à la transmission d'informations même complexes. Aujourd'hui la littérature est associée à la civilisation des livres par lesquels nous parlent à distance les auteurs, mais elle concerne aussi les formes diverses de l'expression orale. Nous avons, en occurrence, le conte et aussi la poésie traditionnelle des peuples sans écriture. Le cas échéant et celui de la chanson qui, dans une certaine mesure, renferme une dimension littéraire. Lethéâtre aussi est destiné à être reçu à travers la voix et le corps des comédiens. Il convient de faire remarquer que la technologie numérique est en train de transformer le support traditionnel de la littérature et sa nature. Le concept de littérature a été revisité plusieurs fois par différentes tendances, différents écrivains et théoriciens. Par conséquent, plusieurs définitions apparaissent au point de prêter même à confusion. Prenons principalement quatre définitions génériquesproposées par le Dictionnaire encyclopédique des belles lettres dans sa version revisitée de 2007 : · ensemble des oeuvres écrites ou orales, considérées du point de vue de la forme et de l'expression ; · ensemble des oeuvres écrites concernant un domaine précis ; · activité de l'homme de lettres; · ce qui est décrit dans les oeuvres littéraires, comparé à la réalité. Par extension, la littérature peut aussi signifier : · ensemble des oeuvres écrites auxquelles on reconnaît une finalité esthétique. Ces oeuvres sont considérées du point de vue du pays, de l'époque, du milieu où elles s'inscrivent, du genre auquel elles appartiennent : exemple, la littérature française du XVIIe siècle qui renvoie à la littérature avec une période précise ; · ensemble des connaissances et des études qui se rapportent aux oeuvres et à leurs auteurs : exemple,Cours de littérature ; · activité, métier de l'écrivain, de l'homme de lettres ; · Ensemble des ouvrages, des articles de journaux, etc., consacrés à quelqu'un, à un sujet. J. H. Fragonard dans la,« La lisseuse »(1769 : 311) pense à son tour que «La littérature est d'abord, la rencontre entre celui qui, par ses mots, représente son monde, et celui qui reçoit et partage ce dévoilement. La littérature apparaît donc comme une profération nécessaire, une mise en mots où se perçoit l'exigence profonde de l'auteur qui le conduit à dire et se redire ». Il est évident qu'aux XVIème et XVIIème siècles, la littérature était considérée comme une branche de la Sociologie et comme tout autre objet social. C'est ainsi que R. Escarpit dans son ouvrage intitulé Le littéraire et le social (1976), pense que la société est indéfectible à la littérature et argumente en ces termes : « La sociologie s'occupe de la littérature comme son objet social, c'est une prise de conscience de sa dimension sociale ou la littérature se considère comme un phénomène social ».(93) Il poursuit en prétendant que la littérature s'est constituée d'abord autour du pouvoir monarchique et ensuite son ascension arrive avec la révolution technique et précisément avec l'avènement de l'imprimerie qui amène le phénomène de multiplication. R. Bernard (1999 :39) stipule que « Les écrits qui jadis étaient des faits de la cour, deviennent publics et à la portée de tout le monde. La première partie du XVIIIème siècle étant dominée par le dogmatisme et l'absolutisme, la deuxième moitié est plutôt une époque de la raison, de la logique ou les élites réclament une explication à tout. Ils soulèvent plusieurs inquiétudes autour du terme « Littérature » qui se manifeste par les questions ci-après : la littérature est-elle enfant de la sociologie ? La littérature est-elle une discipline autonome ? Quel rapport existe-t-il entre texte et société ». Toutes ces questions qui rencontrent les pensées et préoccupations des Lumières du 18ème siècle sont formalisées par Madame de Staël quitente de diachroniser temporellement le parcours de la littérature et ressortir son rôle exact. Vers 1800, la littérature acquiert le sens moderne et désigne les textes auxquels on accorde une qualité esthétique indiscutable. La distinction entre littérature et grammaire arrive un peu tard au milieu du XIXème siècle avec le grammairien B. Jullien dans son article tiré de la collection Que sais-je ?où il pense que « la pointe ultime de la haute grammaire dépasse depuis l'Antiquité, la description des mécanismes de la langue pour aborder les critères du beau dans l'aspect formel et stylistique des textes. La littérature qui classe et étudie les ouvrages (présentant un intérêt de style) va au-delà : elle prend en charge l'étude et le questionnement sur le fond et sur le contenu des oeuvres » (2001 :58). |
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