INSTITUT INTER REGIONAL DE FORMATION
EN ERGOTHERAPIE
MULHOUSE
MAINTIEN À DOMICILE DES PERSONNES AGEES ISOLEES
:
PRECONISATION DE ROBOTS « COMPAGNONS »
PAR LES
ERGOTHERAPEUTES
Mémoire d'initiation à la recherche
Stéphane STENGER
Mai 2015
Remerciements
Je remercie
Mon Maître de mémoire, pour le suivi
méthodologique de ce travail,
Mon référent de terrain, pour ses apports
théoriques et pratiques concernant les gérontechnologies,
Les ergothérapeutes qui ont gracieusement consacré
de leur temps pour répondre à mes questions lors des
entretiens,
Ainsi que mon entourage, pour son soutien et sa précieuse
relecture.
Sommaire
1. Introduction 1
1.1. Situation d'appel 1
1.2. Question de départ 1
2. Problématisation 2
2.1. Phase exploratoire 2
2.2. Problématique 5
3. Cadre théorique 5
3.1. Définition des concepts 5
3.1.1. La personne âgée isolée 5
3.1.1.1. Importance des relations sociales 6
3.1.1.2. Influence des relations sociales sur la
mortalité 8
3.1.1.3. Influence des relations sociales sur la qualité
de vie 8
3.1.1.4. Isolement des personnes âgées 9
3.1.2. L'ergothérapeute 10
3.1.3. La robotique d'assistance 12
3.1.3.1. Efficacité des robots d'assistance 14
3.1.3.2. Freins à la préconisation et à
l'acceptation de la robotique d'assistance 15
3.1.3.3. Acceptation des nouvelles technologies par les
personnes âgées 17
3.1.3.4. Quelques robots compagnons actuellement sur le
marché 18
3.2. Hypothèses 20
4. Méthodologie de recherche 20
4.1. Choix de l'outil d'enquête 20
4.2. Procédure de réalisation de l'enquête
20
4.3. Choix des outils de recueil de données 21
5. Présentation et analyse des résultats 22
6. Discussion 39
7. Conclusion 42
8. Lexique 45
9. Bibliographie 47
Sommaire des annexes LI
1. 1
Introduction
1.1.Situation d'appel
Depuis le début de ma formation en ergothérapie,
je porte beaucoup d'intérêt à la question du
vieillissement. Du vieillissement de la personne, tout d'abord, processus
inéluctable vers lequel nous tendons tous depuis notre naissance, qu'il
soit des plus standard ou « normal », modifiant progressivement
l'apparence et le fonctionnement physiologique de l'individu ou, au contraire,
pathologique. Dans ce cas, le corps et l'esprit qui vieillissent peuvent en
plus apporter douleur, souffrance, impotence, isolement...
À une échelle plus vaste, c'est aussi la
question du vieillissement de la population en général qui
m'intéresse, avec ses enjeux démographiques, économiques
et sanitaires, ainsi que les politiques de santé liées aux
questionnements qu'une société vieillissante soulève.
De plus, j'ai à coeur l'idée que chacun puisse
vivre dans l'environnement qu'il a choisi. Quoi de plus agréable que de
vivre chez soi, ou simplement d'avoir le choix de son toit ? Pour cette raison,
j'ai décidé de m'orienter sur le sujet du maintien à
domicile des personnes âgées isolées.
Enfin, pensant que les nouvelles technologies peuvent
répondre à certains de ces questionnements, je souhaite cibler
mes travaux sur la robotique d'assistance.
1.2.Question de départ
Les robots d'assistance sont présentés par leurs
constructeurs et par certains professionnels de la santé comme
étant de véritables solutions d'avenir pour permettre aux
personnes âgées isolées et/ou en perte d'autonomie de
continuer à vivre chez elles.
Pourtant, je n'ai jamais constaté, au cours de ma
formation, un ergothérapeute préconiser ce genre d'appareil.
Ma question de départ est double. La voici :
Les robots d'assistance représentent-ils une solution
efficace pour maintenir à domicile des personnes âgées
isolées et/ou en perte d'autonomie ? Pourquoi l'ergothérapeute,
qui est le spécialiste de la préconisation d'aides techniques
visant à conférer la plus grande autonomie possible à la
personne, n'investit-il pas davantage les solutions de robotique d'assistance
?
Ce travail se compose de trois parties : la première,
la problématisation, présente le cheminement de la
réflexion et l'avancée des recherches et aboutit à la
formulation de la problématique. La deuxième, correspondant au
cadre théorique, définit et développe les concepts de la
problématique. La troisième partie, enfin, décrit la
méthodologie et exploite les résultats de l'enquête
menée sur le terrain.
2. 2
Problématisation
2.1.Phase exploratoire
Aujourd'hui, la France compte 65,8 millions d'habitants. Selon
les projections de l'INSEE1 (Institut National de la Statistique et
des Études Économiques), le pays devrait en compter 70 millions
d'ici 2050, si la tendance démographique actuelle se poursuit.
Selon la même source, en 2050, 22,3 millions de
personnes seraient âgées de 60 ans ou plus contre 12,6 millions
seulement en 2005, soit une hausse de 80% en 45 ans.
Parallèlement à cela, la part de la population
active diminuerait, passant de 59% en 2010 à 51,9% en 2050.
Dans ce contexte de vieillissement de la population
entraînant une saturation des structures d'accueil, l'idée de
maintenir les personnes âgées à domicile prend tout son
sens.
D'autant plus que la majorité des personnes
avançant en âge souhaite vieillir chez elle plutôt qu'en
institution : une enquête d'OpinionWay2 menée en 2012
sur un échantillon représentatif de la population
française composé de 1006 personnes, montre que 90% des
Français souhaiteraient adapter leur domicile dans le cas d'une
dégradation physique liée à l'âge. Ils sont
également 90% à estimer que le maintien à domicile est une
bonne solution face au problème de dépendance lié à
l'âge.
La diminution de la population active entraînant
irrémédiablement une diminution du nombre d'aidants, il convient
de chercher des solutions pour garantir un accompagnement de nos
aînés. Les nouvelles technologies et, en particulier, la robotique
d'assistance représentent des solutions potentielles.
La robotique d'assistance fait partie d'un ensemble plus large
qu'on appelle les gérontechnologies.
Celles-ci permettent « l'assistance aux personnes
âgées et/ou en situation de handicap, par des moyens et une
organisation faisant appel aux nouvelles technologies de l'information, de la
communication, de la mécanique et de la mécatronique »,
selon l'article 2 des statuts de la Société Française
des Technologies pour l'Autonomie et de Gérontechnologie
(SFTAG)3.
1 ROBERT-BOBEE, I., Projections de population pour
la France métropolitaine à l'horizon 2050. INSEE
Première n°1089, juillet 2006, 4p.
2 AUZANNEAU, N., CHARDON, S., Dépendance et
maintien à domicile. Rapport de Mars 2012, OpinionWay, 16p.
3
http://www.sftag.fr/qui-sommes-nous/statuts/
(consulté le 14/09/2014).
3
A ce stade de la phase exploratoire, l'une des
problématiques potentielles de ce travail est alors : « Perte
d'autonomie et maintien à domicile .
· rôles de
l'ergothérapeute dans le développement, la préconisation
et l'adaptation des solutions de robotique d'assistance ».
Celle-ci est cependant rapidement abandonnée car montre
deux défauts majeurs : elle ne présente pas la population
concernée, à savoir les personnes âgées en perte
d'autonomie et est insuffisamment ciblée : le questionnement est trop
large.
Une autre éventuelle problématique est
formulée : « Grand âge et maintien à domicile
.
· rôle de l'ergothérapeute dans la préconisation
et l'adaptation de robots d'assistance aux tâches ménagères
».
Cette dernière est centrée sur le « grand
âge », ainsi que sur la robotique d'assistance aux tâches
ménagères.
On distingue en effet, plusieurs types de robots d'assistance,
répondant chacun à des besoins différents :
- Les robots compagnons - aussi appelés robots «
sociaux » ou « de soutien émotionnel » - qui soutiennent
émotionnellement la personne,
- Les robots d'assistance aux tâches
ménagères, qui réalisent certaines tâches
ménagères,
- Les robots de téléprésence, qui
permettent à la personne d'interagir avec des proches par
visioconférence,
- Les robots « majordomes », qui pourraient à
l'avenir assister la personne dans toutes les tâches de la vie
quotidienne.
Aujourd'hui, en France, ce sont les robots d'assistance aux
tâches ménagères que l'on retrouve le plus
fréquemment chez les particuliers. Ils prennent la forme d'aspirateurs,
de nettoyeurs de piscine ou encore de nettoyeurs de gouttières.
Les robots dits « compagnons », ou ceux de
téléprésence sont pour le moment extrêmement rares
chez les particuliers. On en retrouve dans quelques laboratoires de recherche
et hôpitaux français où ils sont testés et souvent
inclus à des programmes de recherche, visant à prouver leur
efficacité auprès des personnes soignées.
Les robots « majordomes », quant à eux, ne
sont pour la plupart qu'à l'état de projet, ou de prototypes
à l'essai pour les plus avancés.
La robotique d'assistance en France et en Europe en
général, peine encore à se développer, à
l'inverse du Japon où ces technologies sont nées. Le Japon est le
pays au monde où le processus de vieillissement de la population est le
plus avancé. Depuis quelques années, sa population est même
en déclin, alors que la part des personnes âgées
augmente.
4
Pour garantir un accompagnement des aînés, les
pouvoirs publics ont mis en place une ambitieuse politique de
développement de robotique d'assistance, se refusant pour des raisons
culturelles et historiques, à ouvrir les frontières à
l'immigration, solution privilégiée par les pays
européens4.
Ces choix montrent que les Japonais sont plus enclins à
accepter une « robotisation » de la société que les
Européens.
Aujourd'hui, au pays du soleil levant, des robots
équipent de nombreux établissements de santé, comme des
foyers où il n'est plus exceptionnel de rencontrer un robot «
compagnon », remplaçant un animal de compagnie.
Cependant, comme évoqué plus haut, c'est bien le
fait que le robot puisse accompagner la personne isolée et/ou en perte
d'autonomie pour lui permettre de continuer à vivre chez elle, qui
intéresse l'ergothérapie.
En effet, l'ergothérapeute est le spécialiste de
la préconisation des aides techniques et assistances technologiques (cf.
Annexe I : « référentiel de compétences de
l'ergothérapeute - Compétence 4 »5).
De par ses connaissances sur la pathologie et les troubles de
la personne, ainsi que sur son observation de cette dernière en
situation écologique (dans l'environnement de la personne
accompagnée) et sur le matériel existant, il est le professionnel
paramédical le plus à même de préconiser l'aide la
plus adaptée aux besoins de la personne.
Il est, dès lors, concerné par la robotique
d'assistance.
Ce constat a été renforcé lors
d'entretiens exploratoires informels réalisés auprès de
deux ergothérapeutes français et une étudiante belge en
ergothérapie, rencontrés à Paris lors des 4e
Journées Annuelles de la SFTAG6 (Société
Française des Technologies pour l'Autonomie et de
Gérontechnologie), ainsi que par les diverses interventions des
conférenciers. Tous semblent unanimes sur le fait que
l'ergothérapeute doit avoir une place centrale dans la
préconisation des assistances robotiques et des gérontechnologies
en général. Son rôle n'est alors plus une question, mais
une évidence.
Pourtant, les ergothérapeutes ne semblent pas
préconiser, ou très peu, de robots d'assistance aux personnes
âgées dans le but de favoriser leur maintien à domicile. La
question de recherche de ce mémoire se centre dès à
présent sur ce défaut de préconisation de robots
d'assistance par les ergothérapeutes.
4 PANASSIER, C., La robotique d'assistance : un
véritable secteur d'avenir ? Millénaire3, Le Centre Ressources
Prospectives du Grand Lyon, 2011, 48p.
5 Référentiel de compétences
de l'ergothérapeute - Compétence 4 (Extrait de
l'Arrêté du 5 juillet 2010 relatif au Diplôme d'État
d'ergothérapeute).
6 Conférences des 4e
Journées Annuelles de la Société Française des
Technologies pour l'Autonomie et de Gérontechnologie, Paris, les 24 et
25 novembre 2014.
5
De plus, ces mêmes journées, au cours desquelles
de multiples démonstrations de robots ont été faites, ont
engendré, par intérêt, une modification de la population
cible qui n'est plus « la personne âgée en perte d'autonomie
», mais « la personne âgée isolée ».
La question de recherche est alors la suivante : «
Comment expliquer l'absence de préconisation de robots de soutien
émotionnel par les ergothérapeutes, spécialistes de la
préconisation d'aides techniques et d'assistances technologiques, dans
l'objectif de favoriser le maintien à domicile de personnes
âgées isolées ? ».
Les formateurs qui suivent la réalisation de ce
mémoire invitent cependant à la modification de ce
questionnement. En effet, la forme négative de celui-ci pose
problème lors de la réalisation de l'outil d'enquête, car
elle sous-entend que des réponses particulières sont attendues.
La question de recherche est alors reformulée, sans négation
cette fois et devient la problématique définitive.
2.2.Problématique
Quels sont les facteurs qui permettraient aux
ergothérapeutes, spécialistes de la préconisation d'aides
techniques et d'assistances technologiques, de préconiser des robots de
soutien émotionnel à des personnes âgées
isolées, en vue de favoriser leur maintien à domicile
?
3. Cadre théorique
3.1.Définition des concepts
Les mots clés de la problématique sont les
suivants : la personne âgée isolée, l'ergothérapeute
et la robotique d'assistance.
3.1.1. La personne âgée isolée
Avant de nous atteler au concept de « personne
âgée isolée », il nous faut expliquer celui de «
personne âgée ». Définir ce qu'est une personne
âgée n'est pas chose aisée et déterminer l'âge
à partir duquel on est âgé n'a pas vraiment de sens.
L'Organisation Mondiale de la Santé (OMS)
définit comme « âgées » les personnes qui ont 60
ans et plus7, reprenant ainsi l'âge de référence
utilisé par les Nations Unies. En France, les allocations et aides
destinées spécifiquement aux personnes âgées sont
octroyées à partir de
7 Salon des Séniors,
http://www.salondesseniors.com/qui-sont-les-seniors/a-quel-age-est-on-senior-
(consulté le 24/02/2015).
6
60 ou 65 ans8 : 60 ans pour l'Allocation
personnalisée d'autonomie (APA), à partir de 60 ou 65 ans selon
la situation pour l'attribution d'une aide-ménagère à
domicile, ou encore 65 ans pour l'Allocation de Solidarité aux Personnes
Âgées (ASPA).
Ce seuil des 60 ans peut paraître jeune pour un pays
développé comme l'est la France. C'est pourquoi il faut avoir
à l'esprit que l'âge chronologique n'est pas forcément le
meilleur indicateur des changements amenés par le vieillissement.
Si, pour les pouvoirs publics on est sénior à 60 ou
65 ans, on ne l'est que vers 70 ans pour les professionnels de santé,
car la santé ne se dégrade véritablement qu'en moyenne
vers 73 ans. Dans le monde du marketing, on est âgé à
partir de 50 ans, car les comportements de consommation changent
majoritairement à cet âge-là9.
Ainsi l'âge chronologique, bien qu'étant
l'âge réel de la personne, n'est pas forcément le plus
représentatif de son état de santé, de son degré
d'autonomie ou encore de ses habitudes de consommation.
C'est pourquoi, à ce critère, il nous faut
rajouter la notion d'âge social, qui correspond à celui que la
société nous renvoie et celle de l'âge ressenti qui
correspond à l'âge que la personne a l'impression d'avoir. C'est
ce dernier, qui peut être considéré comme étant son
âge psychologique, qui détermine ses habitudes de consommation,
car il motive ses envies, détermine ses besoins et gouverne ses
choix.
L'âge ressenti d'un individu, conjointement à de
multiples autres facteurs, comme par exemple son degré d'autonomie, son
état de santé ou son milieu de vie, influencent en grande partie
sa motivation et son intérêt à rencontrer d'autres
personnes.
A l'inverse, les relations sociales elles-mêmes jouent
un rôle sur l'âge ressenti et l'estime de soi.
3.1.1.1. Importance des relations
sociales
L'Homme est un être social qui doit chercher à
interagir avec ses semblables pour évoluer et s'épanouir.
L'étude menée dans les années 1940 par le
psychanalyste René SPITZ au cours de laquelle il décrit
l'Hospitalisme10 en est un des premiers exemples. SPITZ cherchait
à mettre en évidence le rôle fondamental des interactions
sociales dans le développement d'un enfant.
8 Allocations et Aides aux personnes
âgées,
http://vosdroits.service-public.fr/particuliers/N392.xhtml
(consulté le 24/02/2015).
9 Salon des Séniors,
http://www.salondesseniors.com/qui-sont-les-seniors/a-quel-age-est-on-senior-
(consulté le 24/02/2015).
7
Il a comparé le développement de deux
populations d'enfants : l'une composée d'enfants recevant
régulièrement des soins et de l'affection de la part de leur
mère et d'une soignante, l'autre constituée d'enfants
éloignés de toute relation sociale et affective.
Au cours de leur troisième année, les enfants
ayant grandi avec des relations sociales avaient un développement
psychomoteur et affectif tout à fait classique pour leur âge,
tandis que les autres montraient un important retard de développement,
ne sachant ni marcher, ni parler.
Cet exemple montre à quel point les interactions
sociales sont essentielles pour l'Homme dès son plus jeune âge
pour se construire. Elles le sont également durant toute sa vie en lui
permettant de se développer continuellement et de s'épanouir.
On parle d'isolement social pour désigner le manque
d'interaction d'un individu avec d'autres personnes.
En France, en 2003, la proportion de personnes isolées
s'établit à 10,8%11, si l'on reprend la
définition de la personne isolée de l'enquête « Vie de
quartier ».
Selon cette enquête menée par l'INSEE en 2001,
sont considérées comme isolées les personnes «
n'ayant eu que quatre contacts ou moins d'ordre privé au cours d'une
semaine de référence ».
Solitude / Isolement, quelle
différence ?
La solitude correspond au sentiment d'être seul. Quant
à l'isolement, il est le fait d'être physiquement seul,
éloigné des autres.
Ainsi, on peut se sentir seul, bien qu'entouré d'autres
personnes (solitude) ou ne pas ressentir le manque de présence de son
entourage bien qu'il soit absent (isolement).
Ces deux concepts vont souvent de pair : près d'un
quart des personnes isolées éprouvent un sentiment de solitude ou
d'ennui, alors qu'une seule personne non isolée sur dix y est
sujette10.
10 Larousse Médical, Hospitalisme,
http://www.larousse.fr/encyclopedie/medical/hospitalisme/13612
(consulté le 14/02/2015).
11 PAN KE SHON, J-L., Isolement relationnel et
mal-être. INSEE Première n°931, novembre 2003,
4p.
8
3.1.1.2. Influence des relations sociales sur la
mortalité
Les relations sociales de la personne modèrent les
influences délétères du stress sur sa santé. Le
simple fait de se sentir émotionnellement soutenu conduit aux
mêmes effets. Les relations sociales stimulent les fonctions
comportementales et émotionnelles et entretiennent les fonctions
cognitives et biologiques.
Ainsi, la famille et les proches d'un individu, tout comme le
milieu social dans lequel il vit et avec lequel il interagit, peuvent
l'encourager de manière directe ou indirecte à adopter des
comportements sains favorables à sa santé. L'individu peut, en
effet, ressentir le devoir de se conformer aux normes sociétales ou
être motivé à cela par son entourage pour qui il compte. La
personne qui se sent aimée, qui a une estime de soi et qui a un but
à sa vie est plus encline à adopter des comportements et
habitudes visant à la préserver.
Une méta-analyse12 des
résultats de 148 études, menées en 2010 sur 308849
participants et portant sur les effets des relations sociales sur la
mortalité, indique que les personnes ayant des relations sociales
favorables, ont un taux de survie 50% supérieur à ceux qui ont
des relations sociales médiocres ou insuffisantes.
Toujours selon cette méta-analyse, l'effet positif des
relations sociales favorables est comparable à celui du sevrage
tabagique. Cet effet positif dépasse même l'influence de facteurs
de risque - dont les effets négatifs sur la mortalité sont depuis
longtemps reconnus - comme l'obésité ou la
sédentarité.
3.1.1.3. Influence des relations sociales sur la
qualité de vie
Outre leurs effets sur la mortalité, les relations
sociales influencent également la qualité de vie.
Le concept de qualité de vie est lié à
des éléments objectifs, que mesurent des indicateurs de la
qualité de vie (niveau de revenu, accessibilité aux soins, taux
de chômage...) et subjectifs, que seule une personne est en mesure
d'évaluer pour elle-même.
La perception de la qualité de vie d'une personne est
en effet liée à sa situation et est fonction de ce qui est
important pour elle, de ses valeurs et de ses croyances. La qualité de
vie représente donc un concept abstrait, situationnel et
multidimensionnel.
Selon l'enquête sur la qualité de vie menée
en 2011 par l'INSEE13 en France métropolitaine, le
niveau moyen de satisfaction dans la vie s'établit à 6,8 sur une
échelle allant de 0 à 10. Parmi les facteurs entravant la
qualité de vie, nous retrouvons, entre autres, le stress de la vie
quotidienne, l'insuffisance de ressources financières, un mauvais
état de santé, des conditions
12 HOLT-LUNSTAD, J., LAYTON, J-B., SMITH, T.,
Social Relationships and Mortality Risk: A Meta-analytic Review, 2010, 20p.
13 AMIEL, M-H., GODEFROY, P., LOLLIVIER, S.,
Qualité de vie et bien-être vont souvent de pair. INSEE
Première n°1428, janvier 2013, 4p.
9
de logement dégradées, un sentiment
d'insécurité physique et économique, mais également
: la faiblesse des liens sociaux.
Le rapport STIGLITZ14, rédigé par la
Commission pour la Mesure des Performances Économiques et du
Progrès Social (CMPEPS), souligne même que la faiblesse des liens
sociaux a un effet prépondérant sur le degré de
satisfaction par rapport au critère d'insuffisance financière.
Cependant, les différents facteurs influençant
la qualité de vie agissent sur cette dernière à des
niveaux différents. Leurs effets sur le bien-être faible et le
bien-être fort ne sont pas symétriques. Ainsi, la faiblesse des
liens sociaux est le critère le plus souvent associé au risque
d'être très insatisfait (de 0 à 4 sur l'échelle) et
c'est le stress de la vie courante qui réduit la probabilité de
déclarer un bien-être élevé (9 et 10 sur
l'échelle), devant l'isolement social, qui arrive en deuxième
position.
Ces travaux démontrent que l'isolement social a un
rôle néfaste sur la qualité de vie et qu'il est, en plus,
un des critères qui l'influencent majoritairement.
3.1.1.4. Isolement des personnes âgées
Les statistiques de l'étude « Vie de quartier
»11 , citée plus haut, montrent deux périodes de
la vie où la probabilité d'être isolé augmente.
La première période est celle qui s'étend
de la post-adolescence à environ 45 ans. Durant cette période, la
fondation d'une famille avec l'apparition des enfants amène souvent
à centrer sa sociabilité sur sa propre famille. L'isolement croit
alors, mais dans des proportions moindres et est relatif.
La deuxième période débute aux alentours
de 70 ans. L'isolement augmente alors de manière significative et
ininterrompue.
Ceci s'explique d'une part par le fonctionnement de notre
société actuelle qui se caractérise par une diminution de
la cohabitation intergénérationnelle, une augmentation de la
mobilité sociale, un éclatement et une dispersion des familles
ainsi que par un accroissement des incapacités liées à
l'âge. Tous ces facteurs contribuent à diminuer le nombre de
contacts des personnes âgées. D'autre part, aux âges
avancés de la vie, les couples sont souvent brisés par un divorce
ou par le décès d'un conjoint. Le veuvage incrémente
encore l'isolement et la solitude.
L'ergothérapie peut proposer des solutions aux
situations d'isolement et au sentiment de solitude des personnes
âgées, tout en permettant leur maintien à domicile si leur
état de santé le permet et s'il est souhaité par la
personne.
14 FITOUSSI, J-P., SEN, A., STIGLITZ, J., Rapport
de la Commission sur la mesure des performances économiques et du
progrès social, 2009, 324p.
11 PAN KE SHON, J-L., Isolement relationnel et
mal-être. INSEE Première n°931, novembre 2003,
4p.
10
3.1.2. L'ergothérapeute
L'ergothérapeute est un professionnel
paramédical qui fonde sa pratique sur le lien entre l'activité
humaine et la santé et ne considère pas cette dernière
comme une fin en soi, mais comme une ressource à la vie.
L'exercice de cet auxiliaire médical vise à
permettre à une personne de préserver ou retrouver son autonomie
dans son environnement quotidien et social et ce, d'une manière
sécurisée, autonome et efficace.
Bien qu'il intervienne auprès de tout public, de la
petite enfance au grand âge, nous nous intéresserons, dans la
suite de ce travail, à son exercice auprès des personnes
âgées essentiellement.
L'ergothérapeute est missionné pour prendre en
soins des personnes souffrant de déficiences physiques, cognitives,
sensorielles, psychiatriques et/ou comportementales qui les limitent dans la
réalisation de leurs activités quotidiennes et notamment : les
soins personnels, l'habillage, la toilette, les déplacements, les
transferts, l'alimentation...
Par des entretiens, des évaluations et des mises en
situations écologiques, l'ergothérapeute détermine les
capacités et incapacités, ainsi que les forces et faiblesses de
la personne âgée. Ces informations lui permettent d'établir
un diagnostic ergothérapique et de poser, avec la personne et en
fonction de son projet de vie et de ses priorités, des objectifs de
prise en soins.
Durant tout le processus de prise en soins,
l'ergothérapeute considère la situation de handicap comme
étant une résultante de multiples facteurs inhérents
à la fois à la personne et à son environnement. Sa
démarche, holistique, prend en considération les informations
biologiques, physiologiques et fonctionnelles de la personne âgée
mais également ses habitudes de vie, ainsi que sa place et ses
interactions dans et avec son environnement familial, social,
éventuellement professionnel, etc.
L'ensemble de ces informations permet à
l'ergothérapeute de proposer des activités de
rééducation/réadaptation et des solutions de
réinsertion adaptées qui font sens à la personne.
Le champ d'intervention de l'ergothérapeute est donc
très vaste et l'amène à travailler sur l'environnement de
la personne autant que sur la personne elle-même. Dans le cadre d'un
retour ou d'un maintien à domicile par exemple, il peut conseiller la
personne âgée dans l'aménagement de son domicile et lui
préconiser diverses aides techniques, humaines, animalières, ou
encore des assistances technologiques.
La préconisation peut se définir comme
étant l'acte de conseiller quelque chose, de le recommander
vivement15.
15 Larousse Dictionnaire, Préconiser,
http://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/pr%C3%A9coniser/63377
(consulté le 30/01/2015).
11
L'acte de préconiser un matériel
nécessite de connaître son utilité, ses
caractéristiques, ses avantages et inconvénients et, surtout, sa
capacité à répondre au besoin pour lequel il est
recommandé.
Ce dernier point est essentiel car il légitime le fait
que l'objet préconisé est bien considéré comme une
aide technique. Cela est important pour ouvrir droit à une
éventuelle prise en charge financière de l'aide proposée.
L'ergothérapeute accompagne alors la personne dans les
différentes démarches administratives de demande de
financement.
Une aide technique est définie selon la norme ISO
9999:201116 comme étant « tout produit (y compris
tout dispositif, équipement, instrument et logiciel) fabriqué
spécialement ou généralement sur le marché,
utilisé par ou pour les personnes en situation de handicap,
destiné à prévenir, à compenser, à
contrôler, à soulager ou à neutraliser les
déficiences, les limitations d'activité et les restrictions de
participation.
(Les articles suivants sont exclus de la norme ISO
9999:2011 : les articles utilisés pour l'installation des produits
d'assistance ,
· les solutions obtenues par la combinaison de produits
d'assistance individuellement classés dans la présente norme
internationale ,
· les médicaments ,
· les produits
d'assistance et les instruments que seuls les professionnels de la santé
utilisent ,
· les solutions non techniques, telles que l'assistance
personnelle, les chiens d'aveugles ou la lecture labiale ,
· les
dispositifs implantés ,
· l'aide financière )
».
La préconisation d'une aide par un spécialiste
de la compensation du handicap est nécessaire pour apprécier
toute la complexité et la singularité de chaque situation. Une
même aide peut être proposée à deux personnes ayant
des profils différents et deux personnes aux profils similaires peuvent
avoir des besoins différents. Si, à 40 ans, chacun de nous est
distinct, pourquoi, après 60 ans, la vieillesse ferait-elle de nous des
clones, avec les mêmes besoins ? Une évaluation complète de
chaque situation, par un professionnel formé à cela, s'impose
alors.
Cependant, la préconisation d'une aide sans conseils
avisés et sans accompagnement de la personne à son utilisation
n'a aucun sens. De multiples études démontrent l'abandon d'aides
techniques par leurs bénéficiaires. C'est ainsi qu'en 1983,
HAWORTH17 souligne le fait que 20% des aides techniques sont
abandonnées deux semaines après leur acquisition ; en 1993,
PHILLIPS et ZHAO18 avancent un taux d'abandon de près de 30%
(29,3%) des aides techniques l'année de leur acquisition ; en 1996,
SCHERER et GALVIN19 confirment
16 Norme ISO 9999:2011(fr) relative aux produits
d'assistance pour personnes en situation de handicap - Classification et
terminologie.
17 Dans HUBOT, H., Enquête de satisfaction des
usages d'Aides Techniques, 2010, 31p.
18 PHILLIPS, B., ZHAO, H., Predictors of assistive
technology abandonment. Assistive Technology, 1993, Resna Press, p36 à
45.
19 GALVIN, J.C., SCHERER, M.J., An outcomes
perspective of quality pathways to the most appropriate technology, in: Galvin,
J.C., Scherer, M.J., Evaluating, Selecting and Using Appropriate Assistive
Technology, 1996, Aspen Publishers, p1 à 26.
12
qu'environ un tiers des aides techniques est abandonné
dans le trimestre qui suit l'acquisition...
Ces études affirment que les principales raisons de
l'abandon d'une aide technique sont : le manque de considération de
l'opinion du bénéficiaire lors du choix de l'aide, les
difficultés d'acquisition, l'inadaptation de l'aide aux besoins de la
personne et l'évolution des besoins ou des priorités de
l'utilisateur.
L'ergothérapeute forme et entraîne la personne
âgée, ainsi que son entourage, à l'utilisation et à
l'entretien de son aide technique ou de son assistance technologique. Pour
cela, il peut faire une demande de prêt de matériel aux
fournisseurs ou revendeurs médicaux. Il s'assure également de
réaliser les éventuelles adaptations nécessaires quand
cela lui est possible ou, à défaut, de les faire effectuer par un
autre professionnel.
La préconisation d'aides techniques ou d'assistances
technologiques représente une mission importante du travail de
l'ergothérapeute intervenant auprès des personnes
âgées à domicile. Certaines situations de handicap
pourraient également être minimisées voire
supprimées par des robots d'assistance.
3.1.3. La robotique d'assistance
Un robot peut se définir comme étant un
dispositif mécatronique (alliant mécanique, électronique
et informatique), polyarticulé, contrôlé par un programme
interne et réalisant des tâches de manière
automatique20.
Le mot « robot » a été utilisé
pour la première fois par Karel CAPEK en 1920 dans sa pièce de
théâtre R.U.R. (Rossum's Universal Robots) et
dérive du mot tchèque « robota », qui signifie «
travail, besogne, corvée »21. À
l'origine, les robots ont été inventés et
développés pour effectuer des tâches pénibles,
répétitives ou dangereuses pour l'Homme, ou encore pour
réaliser des actions d'une précision dont l'Homme n'est pas
capable.
Pour être qualifiée de « robot », une
machine doit nécessairement avoir une part d'autonomie dans ses choix
et/ou actions et/ou déplacements. Cette autonomie lui est
conférée par un programme informatique interne ainsi que par des
actionneurs (moteurs). L'autonomie, en robotique est la «
capacité d'exécuter des tâches prévues à
partir de l'état courant et des détections, sans intervention
humaine » (Norme ISO 8373 :2012(fr))22.
20 D'après Wikipédia, Robot.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Robot
(consulté le 06/09/2014).
21 LEBLANC, D., Tutoriel 1 : Qu'est-ce qu'un robot
? 03 février 2013,
http://shyrobotics.com/tutoriel-1-quest-ce-quun-robot_20130203.html
(consulté le 03/02/2015).
22 Norme ISO 8373:2012(fr) relative aux robots et
composants robotiques fonctionnant dans des environnements industriels et non
industriels.
13
Certains robots sont équipés de capteurs, comme
des caméras ou des microphones, qui leur permettent de récolter
des informations sur le milieu dans lequel ils évoluent, afin de pouvoir
interagir avec et d'agir en fonction de celui-ci.
C'est dans les années 1970 que les robots ont
véritablement commencé à être utilisés dans
l'industrie, afin d'accélérer la production en série et
d'améliorer les rendements.
Un robot industriel est une machine poly articulée
programmable et reprogrammable, dont le but est la saisie ou le
déplacement d'objets suivant plusieurs degrés de liberté,
utilisée pour des tâches d'automatisation industrielle
(d'après la norme ISO 8373:2012(fr)).
Les robots de service sont des appareils qui exécutent
des tâches utiles pour l'Homme ou les appareillages et qui ne sont pas
employés à des fins d'automatisation industrielle.
À noter qu'un robot articulé travaillant sur une
chaîne de montage est considéré comme un robot industriel,
alors qu'un robot identique utilisé pour servir le repas à une
personne est considéré comme un robot de service.
Les robots de service sont ensuite distingués selon leur
usage personnel ou professionnel. (cf. Annexe II : « schéma de
classification des différents types de robots »).
Un robot de service professionnel est destiné à
une utilisation professionnelle, pour une tâche commerciale et est
contrôlé par un opérateur spécialisé.
Un robot de service personnel est destiné à une
utilisation individuelle, pour une tâche non commerciale et est
utilisé par des personnes non spécialisées.
C'est dans cette dernière catégorie que l'on
retrouve les robots d'assistance, que l'on peut diviser en quatre
catégories :
- Les robots d'assistance aux tâches
ménagères : ils sont employés pour réaliser des
tâches ménagères diverses comme passer l'aspirateur,
nettoyer les sols, les piscines, les gouttières ou encore tondre la
pelouse. Ils sont aujourd'hui les robots d'assistance les plus souvent
rencontrés chez les particuliers et leur marché est en pleine
expansion depuis quelques années.
- Les robots de téléprésence : ils
permettent à une personne, dont la mobilité est réduite,
d'explorer l'environnement pour elle. Ces machines peuvent en effet soit se
déplacer de manière autonome soit être
contrôlées à distance. Équipés de
caméra(s), ces robots renvoient une image de l'environnement qu'ils
visitent sur un écran que détient la personne.
Les robots de téléprésence sont parfois
directement équipés d'un écran, permettant de contacter
par visioconférence des membres de la famille, des proches ou encore un
professionnel de santé. Certains de ces robots peuvent également
envoyer un message d'alerte à une liste de contacts
préenregistrée, sur ordre de l'utilisateur ou s'il constate que
celui-ci est en danger.
14
- Les robots « majordomes », quant à eux, ne
sont pour le moment qu'à l'état de développement.
D'importants travaux de recherche, dans le monde entier, se concentrent sur ce
type de robots, dans lequel de nombreuses entreprises voient un grand potentiel
: à terme, ces robots pourraient devenir de véritables assistants
de l'Homme, l'accompagnant dans toutes les tâches de la vie quotidienne,
ou presque : aide au ménage du logement, à la préparation
des repas, à la réalisation des courses, à la prise de
rendez-vous, etc.
Alors que les robots actuels ne réalisent que des
tâches très précises et spécifiques comme le
nettoyage des sols ou la facilitation de la communication avec la famille, les
robots « majordomes » pourraient avoir des usages multiples pour des
tâches beaucoup plus complexes.
- Les robots compagnons, enfin, sont développés
à des fins de divertissement, de stimulation cognitive ou physique et de
soutien émotionnel. Il s'agit du type de robots sur lequel se rapporte
ce travail. Pour cette raison, les robots compagnons, qu'on dit aussi « de
soutien émotionnel » ou « sociaux », sont davantage
étudiés dans ce mémoire. Ci-dessous sont
présentées diverses études, passées ou en cours,
visant à démontrer leur influence sur la qualité de vie
des personnes âgées.
3.1.3.1. Efficacité des robots d'assistance
Aux États-Unis, un « chat-robot »
commercialisé dans la grande distribution a été
testé auprès de personnes souffrant de la maladie d'Alzheimer.
Une analyse statistique de cette expérience a permis de mettre en
évidence une baisse de l'agitation ainsi qu'une augmentation du plaisir
et de l'intérêt des malades (LIBIN et COHEN-MANSFIELD,
2004)23.
Des expériences similaires impliquant des « robots
animaux » ont été menées auprès de personnes
souffrant de démences sévères et auprès de
résidents de maisons de retraite. Les résultats démontrent
une amélioration sensible et durable de leur état
psychologique.
Actuellement, en France, nous retrouvons certains de ces
robots dans des établissements de soins, dans un objectif de recherche
visant à prouver leur efficacité, ou à des buts
thérapeutiques.
C'est le cas du robot Paro® par exemple, qui prend la
forme d'un bébé phoque, développé pour reproduire
les effets bénéfiques de la zoothérapie. Une étude
australienne24 menée par le professeur COOKE et son
équipe, conduite auprès de 18 personnes âgées
présentant une
23 COHEN-MANSFIELD, J., LIBIN, A., Therapeutic
robocat for nursing home residents with dementia : Preliminary inquiry,
2004.
24 BEATTIE, E., COOKE, M., MOYLE, W., et all.,
Exploring the effect of companion robots on emotional expression in older
adults with dementia : a pilot randomized controlled trial, 2013,
https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/23506125
(consulté le 26/02/2015).
15
démence modérée à
sévère, a souligné une « amélioration
modérée à significative de la qualité de vie
[et de l'humeur] des patients ayant utilisé Paro® ».
Ces résultats ont été obtenus par un questionnaire de
mesure de la qualité de vie chez des personnes atteintes de la maladie
d'Alzheimer (échelle QOL-AD, pour « Quality Of Life in Alzheimer's
disease ») et par l'échelle OERS « Observed Emotion Rating
Scale ».
De plus, le personnel soignant a constaté une
diminution de l'angoisse des personnes ayant utilisé Paro®.
Enfin, une étude
Néo-Zélandaise25 menée en 2013 avec le
même robot et dirigée par ROBINSON a démontré une
amélioration de la qualité de vie et une diminution significative
du sentiment de solitude. Cette étude, qui a comparé les effets
de l'utilisation du robot Paro® aux effets induits par un vrai chien, a
même démontré que la solitude avait augmenté dans le
groupe qui côtoyait le chien, quand ce dernier n'était pas
là.
Le niveau d'humeur n'aurait quant à lui pas
été différent entre les deux groupes.
En France, ces robots ne sont que très peu
retrouvés chez les particuliers. Il s'agit alors souvent des
modèles les plus simples qui sont considérés par leurs
utilisateurs comme des gadgets ou des jouets améliorés. Les
modèles les plus élaborés pour lesquels des recherches
scientifiques ont démontré leur intérêt
thérapeutique ne sont utilisés qu'en institution. Leur prix,
relativement onéreux, peut expliquer ce constat.
3.1.3.2. Freins à la préconisation et
à l'acceptation de la robotique d'assistance
Hormis leur coût souvent important (de l'ordre de
plusieurs milliers d'euros) qui en freine l'acquisition par des particuliers,
d'autres éléments pourraient limiter leur diffusion et leur
utilisation.
Pour commencer, la science-fiction au travers de la
littérature et du cinéma véhicule depuis de nombreuses
années une image souvent négative des robots. Les robots
présentés sont souvent d'abord conçus pour de nobles
causes, avant qu'ils ne deviennent agressifs et incontrôlables. Parfois
même, la fiction les dote d'une intelligence artificielle sans commune
mesure qui leur permet d'échapper au contrôle des humains et
d'inverser les rapports de force.
Depuis toujours, la technologie nous fait peur autant qu'elle
nous fascine et ces mises en scène sont sans nul doute le reflet des
questionnements et craintes que les robots suscitent. Mais pourquoi les robots
sont-ils représentés ainsi ?
25 KERSE, N., MACDONALD, B., ROBINSON, H.,
et all., The psychosocial effects of a companion robot : a randomized
controlled trial, 2013,
https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/23545466
(consulté le 26/02/2015).
16
La réponse à cette question peut être
apportée par le réalisateur du film Automata, Gabe IBANEZ, qui
disait : « Le robot est une sorte de métaphore de l'Homme, un
miroir déformé dans lequel nous nous regardons et qui nous permet
de parler de l'être humain »26.
Ensuite, la culture et la religion ont également un
rôle important dans l'acceptation ou non de la robotique. La plupart des
pays développés d'Asie sont, par exemple, bien plus favorables
à leur développement, leur utilisation et leur diffusion que les
pays européens. Ces derniers sont attachés aux relations sociales
interhumaines et semblent craindre une déshumanisation des relations.
Au Japon par exemple, le Shintoïsme, qui est la religion
originelle et qui concerne 71% de la population, est une religion animiste qui
accorde une grande importance aux aïeux. Il souligne le caractère
sacré de la nature et le profond respect de chacun à son
égard. La place de l'Homme y est définie. L'être humain est
ainsi considéré comme étant un élément d'un
grand tout, dont la valeur ne serait pas supérieure à n'importe
quel objet inanimé27.
Dans les pays européens, le Christianisme
prédomine. Celui-ci prône la singularité de l'individu et
on comprend aisément que, par rapport au Shintoïsme, le fait que
l'Homme puisse être « remplacé » par une machine soit
plus difficile à accepter.
De plus, la récence de ces technologies fait que nous
n'avons pour le moment qu'assez peu de retours sur leurs effets
bénéfiques ainsi que sur leur capacité à
répondre aux besoins des personnes âgées isolées
à domicile en situation réelle (cf. 3.1.3.1. Efficacité
des robots d'assistance).
Il semblerait que ni la population ni les professionnels de la
santé ne soient suffisamment informés sur ce qui existe en termes
de robotique d'assistance. De plus, bien que la formation des
ergothérapeutes permette d'appréhender des solutions
technologiques comme la domotique par exemple, les étudiants ne semblent
pas sensibilisés à la robotique d'assistance.
Ce désintérêt pour la robotique
d'assistance par les professionnels de la santé pourrait encore
s'expliquer par l'image qu'elle véhicule : la plupart des robots
d'assistance aujourd'hui ont un design travaillé, moderne et sont
esthétiquement désirables. Ces produits, non estampillés
« personne âgée », pourraient alors être
désinvestis par les professionnels qui ne les considèrent pas
comme des aides techniques ou des assistances technologiques.
La nouveauté et la nature de ces technologies limitent
également leurs possibilités d'adaptation et de personnalisation,
ce qui peut être un frein à leur préconisation.
26 Arte, Vox Pop du 22 février 2015, La
robotisation de la société, Interview de Gabe IBANEZ.
27 Larousse Encyclopédie, Japon : religions du
Japon,
http://www.larousse.fr/encyclopedie/divers/Japon_religions_du_Japon/185400
(consulté le 24/02/2015).
17
3.1.3.3. Acceptation des nouvelles technologies par les
personnes âgées
Preuve de la complexité du rapport de notre
société à la robotique, ce qui peut être un frein
à la préconisation d'un robot d'assistance par un
ergothérapeute peut au contraire favoriser l'envie d'une personne
âgée d'en acquérir un. En effet, l'apparence moderne et
enviable de certains robots d'assistance aujourd'hui sur le marché peut
faire que les ergothérapeutes ne les considèrent pas comme des
aides techniques destinées à compenser les difficultés du
grand âge (cf. 3.1.3.2. Freins à la préconisation et
à l'acceptation de la robotique d'assistance). Or, les personnes
âgées seraient plus enclines à accepter des aides qui ne
reflètent pas les stéréotypes que la société
a de ces dernières.
C'est en effet ce que prouve une étude publiée
par NEVEN en 2011, portant sur les représentations des personnes
âgées dans le développement de nouvelles
technologies.28
Selon cette étude, les freins principaux à
l'acceptation d'une technologie nouvelle par une personne âgée
sont :
- les stéréotypes véhiculés par
cette nouvelle technologie selon lesquels la personne âgée est
fragile, dépendante, malade...
- le manque d'information des personnes âgées sur
cette nouvelle technologie.
De plus, NEVEN fait état de deux variables dans son
« Modèle d'acceptation de la technologie », qu'il
présente dans ses travaux :
- celle de l'utilité perçue,
- et celle de la facilité d'utilisation perçue.
Plus la personne âgée juge la nouvelle
technologie qui lui est proposée comme utile, plus les
probabilités pour qu'elle l'accepte sont grandes. Cela démontre
l'importance de l'information délivrée par
l'ergothérapeute à la personne âgée.
De même, plus la personne âgée
considère cette nouvelle technologie comme simple d'utilisation, plus
grandes sont les chances pour qu'elle s'y intéresse et l'accepte. Cela
souligne la nécessité d'effectuer des démonstrations
devant la personne âgée et de lui permettre d'essayer la nouvelle
technologie, après lui en avoir expliqué le fonctionnement.
VAN DIJK29, dans une étude sur le sujet de
la fracture numérique, publiée en 2006, arrive aux mêmes
conclusions que NEVEN. Cependant, dans ses travaux il prend en compte, cette
fois, les facteurs socio-démographiques (sexe, âge...) et les
facteurs individuels (expériences, caractère volontaire de
l'utilisation...) de la personne, ce qui lui permet d'apporter de nouveaux
éléments.
28 NEVEN, L. B. M., Representations of the old and
ageing in the design of the new and emerging: assessing the design of ambient
intelligence technologies for older people, 2011, 228p.
29 VAN DIJK, J. A. G. M., Digital divide research,
achievements and shortcomings, 2006, p221 à 235.
18
Il conclut que :
- les hommes sont plus enclins à utiliser les nouvelles
technologies que les femmes, - les personnes ayant déjà une
expérience avec les nouvelles technologies sont plus
ouvertes à en découvrir et utiliser d'autres
(surtout si l'expérience précédente a été
positive),
- un niveau socio-professionnel élevé ou des
études longues favorisent aussi l'utilisation de nouvelles
technologies.
Ces travaux montrent que, contrairement à l'image que
la société a des personnes âgées, celles-ci ne sont
pas nécessairement immédiatement réfractaires à la
technologie. Si un robot d'assistance est présenté par une
personne compétente, ayant les bons arguments, à une personne
âgée et que celle-ci le trouve utile, le robot a de grandes
chances d'être accepté ou, au moins, essayé. Et ceci
d'autant plus s'il s'agit d'un homme à haut niveau socioprofessionnel,
déjà familier de nouvelles technologies...
3.1.3.4. Quelques robots compagnons actuellement sur le
marché
Un robot « compagnon » a pour but, comme
décrit plus haut, (cf. 3.1.3. La robotique d'assistance) de stimuler la
personne âgée sur le plan cognitif et éventuellement
physique, de la divertir et plus globalement de lui tenir compagnie. Ces robots
sont dits « sociaux ».
Cependant, les robots développés à ces
fins sont en général difficilement catégorisables, car ils
rentrent souvent dans une catégorie mixte en proposant des interactions
sociales mais aussi des services.
C'est ainsi que nombre de ces robots compagnons permettent,
à l'instar des robots de téléprésence,
d'établir une communication à distance entre la personne
âgée et un proche non présent.
La frontière entre les différents types de
robots d'assistance peut donc parfois être floue. Ci-dessous sont
présentés certains de ceux que l'auteur de ce mémoire a
considéré comme étant des robots « compagnons ».
La liste des robots présentés n'est pas exhaustive, l'idée
n'étant pas d'exposer un catalogue de robots d'assistance, mais de
montrer ce qu'ils peuvent apporter concrètement à une personne
âgée qui vit seule chez elle. Les modèles
dévoilés ci-dessous ont été
sélectionnés pour deux raisons : ils sont ceux que l'on retrouve
le plus souvent et sur lesquels des études ont été
menées et ils présentent un large éventail de l'aspect
qu'ils peuvent avoir (cf. Annexe III : « visuel des robots
présentés dans le mémoire ») ainsi que des services
qu'ils offrent.
19
- Paro®
Paro® est un robot thérapeutique ayant l'aspect
d'un bébé phoque. Il a été développé
principalement pour les personnes âgées souffrant de troubles
cognitifs et/ou du comportement. Il est équipé d'actionneurs qui
lui permettent de bouger la tête ainsi que les nageoires et d'ouvrir et
fermer les yeux. Les actionneurs, couplés à de nombreux capteurs,
permettent à Paro® de réagir à son nom, aux caresses
et à l'environnement lumineux et sonore. Grâce à
l'ordinateur qu'il embarque, Paro® est capable de répéter
des comportements qui plaisent à l'utilisateur et d'inhiber ceux qui lui
déplaisent. Enfin, il présente des avantages par rapport à
un véritable animal de compagnie : il n'a pas besoin d'être
nourri, ne doit pas sortir faire ses besoins, ne véhicule pas de
maladies et ne nécessite aucune prise de responsabilité,
habituellement obligatoire envers les êtres vivants.
- Aibo®
Ce robot a été spécialement
développé dans l'optique d'être un véritable chien
robot de compagnie. Il est autonome, mobile et peut repérer et suivre
quelqu'un en suivant ses mouvements ou les bruits qu'il émet. Aibo®
réagit à son nom ainsi qu'à 50 commandes verbales et peut,
en se connectant à internet, renseigner la personne sur
l'actualité ou le temps qu'il fera le lendemain. Enfin, Aibo® peut
repérer des situations de danger et contacter automatiquement un centre
d'urgence à distance, qui peut alors prendre son contrôle.
- Nao®
Nao® est un robot de forme humanoïde,
essentiellement utilisé à des fins de recherche et
d'éducation. Ses capteurs visuels, sonores et tactiles lui permettent de
reconnaître un visage, une voix ou une caresse. Il est capable de se
déplacer, sur ses deux jambes, en évitant les obstacles, mais
aussi de danser sur un air de musique qu'il aura trouvé automatiquement
sur internet, sur demande de l'utilisateur.
- Icat®
Icat® arbore grossièrement l'apparence d'un chat,
capable de se mouvoir grâce à des roulettes. Il est
compétent pour la reconnaissance de visages ou d'objets et peut
communiquer verbalement avec l'utilisateur. Les interactions avec ce dernier
sont favorisées par la possibilité qu'a Icat® d'exprimer des
émotions au moyen de bruits et mimiques.
- Hector®
Hector® est un robot capable à la fois de
contrôler à distance de multiples équipements de la maison
(éclairage, chauffage, volets électriques...) et des services
plus classiquement prêtés à un robot compagnon. Il peut
indiquer à une personne âgée de prendre ses
médicaments, lui rappeler un rendez-vous et peut lui proposer des
exercices de stimulation cognitive.
Bien que pouvant s'exprimer verbalement, Hector est
également équipé d'une tablette tactile à travers
laquelle il peut communiquer avec l'utilisateur. Enfin, s'il détecte une
chute de la personne, il contacte automatiquement une liste de contacts
préenregistrée pour les appeler à l'aide.
20
3.2.Hypothèses
Les hypothèses de réponse à la
problématique :
A) Les robots compagnons devraient être
financièrement accessibles,
B) Les ergothérapeutes pourraient être
formés, ou davantage informés, sur la robotique d'assistance,
C) L'entourage de la personne âgée devrait
être inclus au processus de préconisation d'un robot compagnon,
D) Les personnes âgées ne devraient pas
être considérées comme systématiquement
réfractaires aux nouvelles technologies.
4. Méthodologie de recherche
4.1.Choix de l'outil d'enquête
Afin de valider ou d'invalider les hypothèses et ainsi
de répondre au mieux à la problématique
énoncée plus haut, l'outil d'enquête s'adresse directement
aux personnes qui préconisent les aides techniques : les
ergothérapeutes.
Il est pertinent de cibler des ergothérapeutes
travaillant au domicile de personnes âgées et pour qui la
préconisation d'aides techniques représente une part importante
de leur activité. L'enquête est ainsi réalisée
auprès d'ergothérapeutes exerçant dans des Équipes
Mobiles de Gériatrie (EMG).
Ils sont les plus à même d'énoncer les
éléments qui leur sont ou seraient nécessaires à la
préconisation de solutions de robotique d'assistance.
4.2.Procédure de réalisation de
l'enquête
L'enquête consiste en des entretiens semi-directifs. Ce
type d'enquête est retenu car la robotique d'assistance, sujet
éminemment polémique, ouvre à la discussion. La
proposition d'un questionnaire papier à compléter limiterait sans
doute l'expression des personnes interrogées.
Cet entretien est réalisé auprès de
quatre ergothérapeutes intervenant au sein d'une EMG. Les
ergothérapeutes interrogées, qui sont toutes des femmes,
travaillent sur trois sites différents, en Alsace (Bas-Rhin et
Haut-Rhin). Deux travaillent dans la même équipe.
Les ergothérapeutes interrogées ont entre 26 et
55 ans, ont été formées dans les Instituts de Formation en
Ergothérapie (IFE) de Nancy, Lyon et Montpellier et exercent
l'ergothérapie depuis 5 à 34 ans. Les quatre ont toujours
travaillé dans le domaine de la gériatrie : Soins de Suite et de
Réadaptation (SSR), Établissement d'Hébergement pour
Personnes Âgées
21
Dépendantes (EHPAD), Hôpital De Jour (HDJ),
service de médecine interne gériatrique, EMG...
La grille utilisée pour guider les entretiens comporte
douze questions permettant d'investiguer directement sur le thème de la
problématique et comporte cinq items permettant de connaître plus
précisément la population sondée. Ces items renseignent le
sexe, l'âge, le lieu de formation, la durée d'exercice et le(s)
lieu(x) d'exercice actuel(s) et passé(s) de la personne
interrogée. Ces informations sont recueillies afin de mettre en
évidence une éventuelle corrélation entre le profil des
personnes et leurs réponses.
La première prise de contact avec les personnes
questionnées s'est faite par courriel ou par téléphone
après recherche de leurs coordonnées sur internet.
Leur sont présentés brièvement le sujet
et la problématique du mémoire, ainsi que la population cible de
ces entretiens. Il est indiqué que les entretiens peuvent être
réalisés en face à face, par téléphone ou
par visioconférence, selon les disponibilités de
l'enquêteur et de la personne questionnée ou encore selon la
convenance de cette dernière. Une durée maximale d'entretien,
estimée à 40 minutes, est indiquée lors de cette
première prise de contact.
Durant cette enquête, tous les entretiens sont
finalement réalisés en face à face et sont menés du
12 au 30 mars 2015.
Avant le début d'un entretien, il est
précisé à chaque ergothérapeute interrogée
que l'ensemble de ses réponses sera anonyme, que ces dernières ne
permettront aucunement de l'identifier et que si elle ne souhaite pas
répondre à l'une ou l'autre des questions elle était libre
de le faire, sans aucune justification.
Il est également demandé, avant le début
de chaque entretien, la permission de réaliser un enregistrement sonore
de la discussion, ceci dans le but de permettre la retranscription des
entretiens et de faciliter leur analyse.
L'enregistrement a été accordé par
l'ensemble des personnes interrogées.
À la fin de chaque entretien, la personne est
remerciée et un exemplaire numérique du mémoire lui est
proposé au courant de l'été 2015. Les quatre
ergothérapeutes ont accepté cette proposition.
4.3.Choix des outils de recueil de données
Le recueil de données se fait grâce à deux
outils :
- Une grille d'entretien papier (cf. Annexe
IV : « grille d'entretien ») qui permet de suivre la progression de
l'entretien et de poser les bonnes questions en fonction des réponses
précédentes. Elle autorise également à
l'enquêteur de retranscrire les idées principales et les
éléments-clés émanant du discours de
l'ergothérapeute questionnée. Les informations retranscrites sur
la grille d'entretien permettent à l'enquêteur de
22
pouvoir revenir sur un point précis
évoqué préalablement par la personne interrogée. Y
sont aussi retranscrites des informations qui ne répondent pas
directement à la question posée mais qui ouvrent d'autres
perspectives de recherche, d'autres questionnements, qui pourraient être
utilisés dans le développement de la partie pratique ou lors de
la soutenance de ce mémoire. La grille d'entretien aide ainsi à
guider celui-ci et à favoriser la fluidité et la
spontanéité des échanges.
Enfin, la grille renseigne encore la date et l'heure de
l'entretien, la référence de celui-ci et précise la
réalisation ou non d'un enregistrement audio ainsi que sa durée.
Ces informations permettent à l'enquêteur, lors de l'analyse des
résultats de l'enquête, de replacer chaque entretien dans son
contexte et organisent l'ensemble des données recueillies.
- Un enregistrement audio qui a
été réalisé par un dictaphone, posé sur la
table entre l'enquêteur et la personne questionnée.
L'enregistrement audio rend possible la retranscription de l'ensemble de la
discussion de l'entretien et facilite l'analyse des résultats. De plus,
il permet, à l'instar de la grille d'entretien, de fluidifier le
discours en rendant l'enquêteur disponible, attentif et ouvert face
à la personne qu'il interroge, l'abrogeant d'une prise de notes
intensive. L'enregistrement audio, bien que pouvant être source
d'angoisse pour certaines personnes, est utilisé, dans le cadre de cette
enquête, afin que la prise de notes par l'enquêteur ne soit pas un
frein à la prise de parole de l'ergothérapeute interrogé.
Il favorise ainsi les interactions.
5. Présentation et analyse des
résultats
(cf. Annexes V-I à V-IV « retranscription de
l'entretien effectué avec l'ergothérapeute [_] ».
Question 1 : Avez-vous
déjà préconisé des aménagements de domicile
à une personne âgée isolée afin de favoriser son
maintien à domicile ? De quel(s) type(s) ?
Question 2 : Avez-vous déjà
préconisé une aide technique à une personne
âgée isolée afin de favoriser son maintien à
domicile ? De quel(s) type(s) ?
Ces deux questions sont posées alors même que
leurs réponses paraissent évidentes : les ergothérapeutes
exerçant au sein d'une EMG préconisent forcément des
aménagements de domicile et des aides techniques pour favoriser le
maintien à domicile. Ils représentent la population cible de
cette enquête précisément pour cette raison. Ces questions
leurs sont posées pour deux raisons : la première est de
favoriser la prise de parole et d'instaurer un climat de confiance entre
l'enquêteur et la personne interrogée. La deuxième est
qu'elles permettent d'évoquer des situations, des aides techniques et
des aménagements précis, qui pourraient être mis en
corrélation dans les questions suivantes et avec des solutions de
robotique d'assistance.
23
De plus, une réponse « Oui » aux questions 1
et 2 et une réponse « Non » à la question 4 (cf. infra)
mettrait en évidence un défaut de préconisation de robots
d'assistance par rapport aux aides techniques « classiques » et aux
aménagements du domicile.
Présentation des résultats des
questions 1 et 2 :
Ergothérapeute 1 : L'ergothérapeute 1 a
déjà préconisé et préconise des aides
techniques pour favoriser le maintien à domicile d'une personne
âgée isolée, essentiellement des aides aux
déplacements, aux transferts, aux repas, à la prévention
des chutes : chaussons adaptés ou fauteuil roulant par exemple.
Les aménagements de domicile les plus
fréquemment préconisés sont l'aménagement de la
salle de bains, l'installation d'un monte-escaliers et la mise en place de
barres de redressement ou de maintien. En plus de ces préconisations,
l'ergothérapeute 1 délivre également des conseils
d'aménagement comme le déplacement ou le retrait de meubles, de
tapis...
Ergothérapeute 2 : L'ergothérapeute 2
préconise diverses aides techniques comme des mains courantes dans les
escaliers, des lits médicalisés, des guidons de transferts, des
alarmes anti-feu ou des détecteurs de monoxyde de carbone, des
systèmes de sécurisation des appareils
électroménagers, des chaises percées, etc. ainsi que des
aménagements du domicile et de l'accès extérieur :
remplacement d'une baignoire par une douche, mise en place de
plateformes-élévatrices, etc.
Ergothérapeute 3 : L'ergothérapeute 3 est
souvent amenée à préconiser des aménagements de
sanitaires, de salles de bains (nécessitant souvent des travaux) ou des
réaménagements de mobiliers dans toute la maison. Les aides
techniques les plus fréquemment préconisées sont les aides
diverses à la marche et aux transferts, les rehausses-WC, les
sièges de bain, les couverts adaptés, les
téléalarmes, etc.
Ergothérapeute 4 : L'ergothérapeute 4
préconise régulièrement des aides techniques à la
marche (ou aux déplacements en général), à la
communication ou à l'alerte, par des systèmes de
téléalarme par exemple. Elle préconise également
des aménagements de domicile.
Analyse des réponses aux questions
1 et 2 :
Les réponses aux questions 1 et 2 indiquent que les
ergothérapeutes interrogées préconisent des aides
techniques et des aménagements de domicile en vue de favoriser le
maintien à domicile des personnes âgées isolées. Ces
aides sont diverses et visent à améliorer l'autonomie et/ou le
confort de la personne âgée (et parfois de son entourage) pour ses
déplacements, ses transferts, sa toilette, son habillage ou encore la
prise de ses repas.
24
Question 3 : Vous êtes-vous déjà
senti(e) démuni(e) face à une situation pour laquelle il ne
semblait y avoir aucune solution pour favoriser le maintien à domicile
d'une personne âgée isolée ?
Cette question vise à mettre en évidence que les
aménagements et les aides techniques possibles/proposés par
l'ergothérapeute peuvent ne pas favoriser le maintien à domicile
d'une personne âgée isolée. Elle permet également de
cibler des types de situation dans lesquels un aménagement ou une aide
matérielle ne peut aider la personne à continuer à vivre
chez elle. Une réponse « Non » à cette question indique
que l'ergothérapeute n'a pas eu besoin de considérer la robotique
d'assistance ou bien, qu'au contraire, elle en a mis une en place et que
celle-ci a permis d'améliorer la situation.
Une réponse « Oui » à cette question,
ainsi qu'une réponse « Oui » à la question 4 (cf.
infra) indique que la robotique d'assistance était une solution
inefficace ou inadaptée.
Une réponse « Oui » à cette question
et une réponse « Non » à la question 4 démontre
que l'ergothérapeute méconnaît la robotique d'assistance
et/ou ne souhaite pas en préconiser. Cela est précisé par
la question 4.2 (cf. infra).
Cela peut également signifier que la robotique
d'assistance représentait une solution jugée comme étant
inadaptée par l'ergothérapeute. Cela peut être
vérifié par la question 7 (cf. infra), portant sur les
connaissances de l'ergothérapeute interrogée au sujet de la
robotique d'assistance.
Présentation des résultats de la
question 3 :
Ergothérapeute 1 : L'ergothérapeute 1 dit
s'être déjà sentie démunie face à certaines
situations. Ceci pour plusieurs raisons : aucune aide matérielle n'est
adaptée à la personne ; la personne n'est entourée d'aucun
aidant lui permettant d'utiliser (ou d'utiliser en sécurité) le
matériel disponible ; les difficultés financières de la
personne ne lui permettent pas l'acquisition d'une aide.
Ergothérapeute 2 : L'ergothérapeute 2 confie
s'être souvent sentie démunie, essentiellement lorsque les gens ne
se rendent pas compte des risques qu'ils prennent. Dans ce cas,
l'ergothérapeute peut faire toutes les préconisations qu'il
souhaite, si la personne n'en voit pas l'utilité, elle ne les acceptera
pas et ne changera pas ses habitudes. Le deuxième problème
rencontré par l'ergothérapeute 2 est induit par les contraintes
architecturales contre lesquelles on ne peut rien faire, alors même qu'un
éventuel déménagement est impossible. Enfin, parfois,
c'est l'entourage de la personne qui refuse l'aide ou les préconisations
de l'ergothérapeute parce qu'il considère que la personne
âgée serait mieux en EHPAD...
Ergothérapeute 3 : La majorité des situations
dans lesquelles l'ergothérapeute 3 s'est sentie ou se sent
démunie sont celles où la personne âgée, qui ne veut
pas changer ses habitudes, refuse une préconisation que
l'ergothérapeute juge pourtant nécessaire.
L'ergothérapeute 3 se sent également
démunie dans les situations où la personne âgée doit
refuser une préconisation par manque de ressources financières ou
parce que la personne
25
considère que les délais d'intervention sont
trop longs, notamment quand il y a des travaux à réaliser.
Ergothérapeute 4 : L'ergothérapeute 4 dit se
sentir démunie principalement dans les situations d'insuffisance
financière de la personne accompagnée. Ce sentiment est
retrouvé quand une personne âgée est isolée, quand
elle n'a pas de personne ressource autour d'elle qui puisse
accélérer les démarches. Les limites du bâti qui ne
permettent plus à l'ergothérapeute de proposer des
aménagements sont aussi évoquées.
Analyse des réponses à la question 3
:
Toutes les ergothérapeutes interrogées se sont
déjà senties démunies dans une situation pour laquelle
elles ne voyaient aucune solution pour favoriser le maintien à domicile
d'une personne âgée isolée. Les raisons sont nombreuses :
inconscience des risques encourus par la personne âgée (de
manière plus large : les troubles cognitifs), refus de changer ses
habitudes, limites du bâti, isolement de la personne, etc. Mais la seule
raison citée par l'ensemble des professionnelles est l'insuffisance
financière de la personne accompagnée. Cette raison semble
être la cause principale de ce sentiment d'impuissance des
ergothérapeutes.
Question 4 : Aviez-vous alors
considéré une éventuelle assistance robotique ?
(cf. question 3)
Présentation des résultats de la
question 4 :
Ergothérapeute 1 : L'ergothérapeute 1 n'a jamais
envisagé de préconiser un robot d'assistance. Elle s'est
déjà questionnée sur la préconisation d'un
système domotique, mais jamais robotique.
Ergothérapeute 2 : L'ergothérapeute 2 avoue n'avoir
jamais pensé à la robotique d'assistance.
Ergothérapeute 3 : L'ergothérapeute 3 n'a jamais
réfléchi à la robotique d'assistance pour répondre
à un besoin d'une personne âgée.
Ergothérapeute 4 : L'ergothérapeute 4 dit
n'avoir jamais pensé à la robotique d'assistance pour favoriser
un maintien à domicile.
Analyse des réponses à la question 4
:
Aucune des ergothérapeutes interrogées n'a un
jour envisagé de préconiser un robot d'assistance. Les aides
techniques classiquement préconisées et d'éventuels
aménagements de domicile, régulièrement
préconisés par les ergothérapeutes (cf. réponses
des questions 1 et 2), ne permettaient pourtant pas de favoriser le maintien
à domicile de personnes âgées isolées (cf.
réponses de la question 3).
26
La réponse négative à cette question,
couplée aux réponses positives des questions 1 et 2 (cf. supra)
démontrent un défaut de préconisation de la robotique
d'assistance par rapport aux aides techniques « classiques » et aux
aménagements de domicile.
Question 4.2 : Si non, pour quelle(s) raison(s)
?
Présentation des résultats de la
question 4.2 :
Ergothérapeute 1 : L'ergothérapeute 1
évoque la méconnaissance de la robotique d'assistance. Elle
s'appuie beaucoup sur les distributeurs quand elle doit mettre en place du
matériel. Or, ces derniers ne lui ont jamais présenté ou
proposé ce type d'aide. Enfin, l'ergothérapeute 1 avoue n'y avoir
simplement jamais pensé.
Ergothérapeute 2 : L'ergothérapeute 2 pense que
faire accepter des solutions de robotique d'assistance à la
majorité des personnes âgées serait très difficile,
les nouvelles technologies ne faisant pas partie de leur quotidien et de leur
façon de vivre. L'ergothérapeute 2 indique que même
certaines aides techniques non technologiques, comme l'enfile-bas de
contention, sont difficiles à utiliser pour une personne très
âgée... et donc à préconiser. Selon elle, dans les
grands âges de la vie, la priorité n'est plus l'autonomie de la
personne âgée, mais la surveillance et le maintien de son
état, la rupture de son isolement. Les aides techniques
préconisées ne sont alors plus vraiment destinées à
la personne âgée, mais davantage à son ou ses aidant(s).
De plus, les robots semblent être de la fiction pour
l'ergothérapeute 2. Quelque chose d'irréel, loin d'être
concret, quotidien et actuel.
Ergothérapeute 3 : L'ergothérapeute 3 n'a jamais
considéré la robotique d'assistance pour deux raisons : la
première est qu'elle pense que la personne âgée ne s'en
sortirait pas avec, ou du moins qu'elle aurait beaucoup de difficultés
à s'y adapter ; la deuxième est qu'elle ne connaît pas la
robotique d'assistance, elle précise ne jamais y avoir été
formée.
Ergothérapeute 4 : Si l'ergothérapeute 4 n'a
jamais préconisé de robots d'assistance c'est, selon elle, par
méconnaissance de ces appareils et de leurs fonctionnalités. Elle
n'en a jamais entendu parler durant sa formation ni au cours de son exercice.
Elle explique également cette absence de préconisation par la
multiplicité des acteurs qui interviennent auprès des personnes
âgées : si de nombreux professionnels doivent intervenir et que
les ressources sont limitées, il faut prioriser les interventions. Ce
serait ainsi que parfois, ce sont les préconisations de
l'ergothérapeute qui soient limitées. D'autre part, l'ensemble
des intervenants (infirmières à domicile, assistantes de vie
sociale...) doit veiller à ne pas surcharger la personne
âgée de recommandations, sans quoi elle risque de ne pas les
suivre.
27
Analyse des réponses à la question
4.2 :
Deux raisons sont systématiquement citées pour
justifier la non considération de solutions de robotique d'assistance
par les ergothérapeutes : la première serait la
méconnaissance de la robotique d'assistance par les
ergothérapeutes (cf. réponses de la question 7) ; la
deuxième est qu'ils pensent que les personnes âgées
auraient des difficultés à accepter et à s'habituer
à ces technologies.
Question 5 : Une assistance robotique aurait-elle pu,
potentiellement, favoriser ce maintien à domicile ?
Une réponse « Oui » à cette question
et une réponse « Non » à la question 4 (cf. supra)
démontre que l'ergothérapeute méconnaît la robotique
et/ou ne souhaite pas en préconiser. Ceci est précisé par
la question 4.2 (cf. supra).
Une réponse « Non » à cette question
et une réponse « Oui » à la question 4 indique que le
robot d'assistance envisagé représentait une solution inefficace
ou inadaptée.
Une réponse « Je ne sais pas » peut
établir que la personne interrogée méconnaît la
robotique d'assistance et qu'elle ne souhaite pas soumettre un avis aussi
tranché sans véritables connaissances sur le sujet. Il lui est
alors demandé de donner son avis avec ses connaissances actuelles.
Présentation des résultats de la
question 5 :
Ergothérapeute 1 : L'ergothérapeute 1 indique ne
pas savoir ce dont sont capables certains robots et donc s'ils pourraient
apporter une solution à une situation difficile. D'après elle,
les situations qui posent problème nécessitent plutôt une
aide humaine.
Ergothérapeute 4 : L'ergothérapeute 4 pense que
la robotique d'assistance peut avoir un réel intérêt
auprès de personnes ayant un début de troubles cognitifs. Les
robots pourraient ainsi jouer le rôle d'agendas, de pense-bêtes
leur rappelant de prendre leurs médicaments, etc. Ils seraient des
appareils centralisant de nombreux outils, de nombreuses fonctions, un peu
à l'image d'un smartphone.
(Cette question n'a pas été posée aux
ergothérapeutes 2 et 3 car a été jugée
inadaptée par rapport aux réponses aux questions
précédentes).
Analyse des réponses à la question 5
:
À cette question, seules deux réponses ont
été récoltées. Les deux ergothérapeutes qui
les donnent ne semblent pas partager le même avis :
La première ne sait pas si une assistance robotique
aurait pu favoriser le maintien à domicile d'une personne
âgée dans l'une des situations pré-citées qui lui
posaient problème (cf. réponses de la question 3). D'après
elle, ces situations nécessiteraient davantage une aide humaine que
robotique.
28
Cette réponse souligne la méconnaissance de la
robotique d'assistance par cette professionnelle.
La seconde ergothérapeute semble être convaincue
que certaines situations délicates auraient pu être
améliorées par une assistance robotique.
La réponse positive ci-dessus couplée à
une réponse négative à la question 4 (cf. supra) peut
indiquer deux choses : soit que l'ergothérapeute méconnaît
la robotique d'assistance, soit qu'elle ne souhaitait pas en préconiser
et ce, quelle qu'en soit la raison. L'hypothèse de la
méconnaissance de la robotique est confirmée par les
réponses de la question 4.2 (cf. supra).
Bien que les réponses des deux ergothérapeutes
à cette même question soient différentes, elles permettent
de corroborer l'hypothèse selon laquelle elles n'ont jamais
envisagé de préconiser une assistance robotique par
méconnaissance de ces technologies.
Question 6 : n'a pas été
posée car n'était pas adaptée aux réponses aux
questions précédentes.
Question 7 : Quel est votre niveau de
connaissance au sujet de la robotique d'assistance ?
Cette question permet de jauger l'état des
connaissances de la personne interrogée au sujet de la robotique
d'assistance.
L'enquêteur encourage l'ergothérapeute à
lui présenter ce qu'elle sait sur le sujet et lui demande si elle en a
déjà entendu parler, où et dans quel contexte.
À partir de cette question et après la
réponse de l'ergothérapeute, l'enquêteur lui
présente brièvement la robotique d'assistance : les
différents types de robots, leurs missions et leurs capacités,
l'état de leur diffusion et les perspectives d'avenir.
Ces explications permettent de s'assurer que les deux
interlocuteurs partagent la même définition de ce qu'est la
robotique d'assistance et permet de nourrir la suite de l'entretien
(particulièrement la question 10).
Présentation des résultats de la
question 7 :
Ergothérapeute 1 : L'ergothérapeute 1
évoque une connaissance « nulle » de la robotique
d'assistance. Les connaissances qu'elle a à ce sujet proviennent
d'articles qu'elle a lus dans le cadre de cet entretien, avant notre rencontre.
Elle sait que certains robots [de téléprésence] permettent
de communiquer à distance, par visioconférence avec un
médecin, un proche, un aidant, etc. Si la personne âgée
chute à domicile, l'aidant non présent sur place peut alors
découvrir la personne âgée à terre, grâce
à la retransmission du robot et appeler les secours.
L'ergothérapeute 1 ne sait pas si le robot n'est qu'une simple interface
de communication ou s'il peut faire autre chose et ignore comment,
concrètement, la personne âgée l'utilise.
Elle a déjà vu une photo d'un robot d'assistance
de forme humanoïde mais ne sait pas à quoi il sert vraiment. Lors
de la discussion autour de cette question, les robots d'assistance aux
29
tâches ménagères sont
évoqués par l'enquêteur. L'ergothérapeute semble
avoir déjà entendu parler de robots aspirateurs, ou robots
tondeuses.
Ergothérapeute 2 : L'ergothérapeute 2 estime le
niveau de ses connaissances sur la robotique d'assistance comme « nul
». Elle évoque tout de même un semainier qui sonne
automatiquement pour rappeler à la personne âgée de prendre
ses médicaments et parle du « robot bébé-phoque
Paro® » dont elle assistera prochainement à une
démonstration. Elle explique que c'est un robot destiné à
des personnes âgées souffrant de la maladie d'Alzheimer et que son
apparence a été particulièrement travaillée afin
qu'il véhicule une image positive, amicale et inoffensive. Quand il lui
est présenté les différents types de robot d'assistance,
elle cite spontanément des robots d'assistance aux tâches
ménagères comme les robots nettoyeurs de piscine ou les robots
tondeuses à gazon...
Ergothérapeute 3 : « Nul ». Tel est
l'adjectif qu'utilise l'ergothérapeute 3 pour renseigner sur
l'état de ses connaissances au sujet de la robotique d'assistance. Au
cours de la brève présentation, l'ergothérapeute
interrogée semblait découvrir la robotique d'assistance pour la
première fois.
Ergothérapeute 4 : L'ergothérapeute 4 dit ne pas
connaître de modèle de robot d'assistance particulier et ne
saurait pas renseigner ou adresser quelqu'un pour qu'il s'en procure un. Elle
en a cependant déjà entendu parler, a déjà vu des
images ou des visuels sur le sujet mais ne s'est pas renseignée
davantage.
Analyse des réponses à la question 7
:
Alors qu'une ergothérapeute sur les quatre semblait
totalement découvrir la robotique d'assistance lors de l'entretien, les
trois autres en avaient déjà entendu parler et pouvaient citer
spontanément un nom ou un type de robot, ou encore une des missions pour
lesquelles ils sont conçus. Cependant, toutes ont avoué avoir des
connaissances très limitées sur la question. Les trois
professionnelles qui avaient une notion de la robotique d'assistance avaient vu
des images, lu des articles ou regardé un reportage à ce
sujet.
Question 8 : Avez-vous
déjà rencontré ou entendu parler d'ergothérapeutes
qui préconisent des robots d'assistance ?
Les ergothérapeutes travaillent souvent en
réseau avec de nombreux autres ergothérapeutes... Cette question
permet à l'enquêteur d'avoir une idée de la diffusion de la
robotique d'assistance autour des personnes qu'il interroge. Il est
précisé par l'enquêteur à la personne sondée
que même des préconisations ponctuelles ou une unique
préconisation d'un robot d'assistance est intéressante à
souligner.
Si la réponse est « Oui », il est
demandé plus de précisions à l'ergothérapeute :
profil de la personne qui préconise ou a préconisé,
contexte de la préconisation, pour quel besoin, etc.
30
Présentation des résultats de la
question 8 :
Ergothérapeute 1 : L'ergothérapeute 1 explique
avoir déjà parlé à une famille d'un
robot-aspirateur. Un confrère en avait préconisé un il y a
quelques années et cela semblait lui être une bonne idée.
L'ergothérapeute 1 dit avoir déjà préconisé
des solutions de domotique, mais jamais un autre robot que le
robot-aspirateur.
Ergothérapeute 2 : L'ergothérapeute 2 dit
n'avoir jamais rencontré ou entendu parler d'un ergothérapeute
qui préconise (ou a déjà préconisé) des
robots d'assistance. Mais elle insiste sur le fait que préconiser ce
genre d'aide est totalement du ressort de l'ergothérapeute. Les
ergothérapeutes préconisent actuellement des aides humaines, des
aides techniques ou animalières... Les robots d'assistance sont des
appareils qui regroupent globalement ces types d'aide. L'ergothérapeute
devrait donc s'y intéresser.
Ergothérapeute 3 : L'ergothérapeute 3 confie
avoir connu un ergothérapeute ayant déjà
préconisé un robot-aspirateur. Elle précise qu'il
s'agissait de sa part d'une véritable préconisation en tant
qu'aide technique et non pas seulement d'un conseil. La préconisation
n'a fait l'objet d'aucun financement extérieur.
Un jour, en repensant à cette situation,
l'ergothérapeute 3 a elle-même parlé d'un robot-aspirateur
à une famille, sans qu'il s'agisse pour autant d'une véritable
préconisation.
Ergothérapeute 4 : L'ergothérapeute 4 indique
n'avoir jamais rencontré ou entendu parler d'un ergothérapeute
qui préconise des robots d'assistance.
Analyse des réponses à la question 8
:
Deux ergothérapeutes ont connu un collègue ayant
déjà préconisé un robot d'assistance (robot
aspirateur) et se sont servi de cette situation comme exemple, puisqu'elles
ont, à leur tour, évoqué ce type d'appareil à une
personne intéressée. Il ne s'agissait pas pour autant d'une
préconisation.
Les deux autres ergothérapeutes n'ont jamais
rencontré ou entendu parler d'un confrère ayant
déjà préconisé ce genre d'aide.
Ces réponses soulignent que les préconisations
d'assistances technologiques sont rares dans l'entourage professionnel des
personnes sondées, mais ne sont pas inexistantes. Elles seraient
ponctuelles (peut-être même ont-elles été uniques ?)
et ne concerneraient que des robots d'assistance aux tâches
ménagères : des robots-aspirateurs.
Question 9 : Selon vous, les ergothérapeutes
sont-ils suffisamment formés ou informés au sujet des robots
d'assistance pour en préconiser ?
Cette question vise directement à valider ou invalider
l'hypothèse selon laquelle les ergothérapeutes pourraient
être formés, ou davantage informés, sur la robotique
d'assistance.
31
Présentation des résultats de la
question 9 :
Ergothérapeute 1 : « Non, pas du tout !
». L'ergothérapeute 1 dit en avoir déjà entendu
parler, mais pas en tant qu'ergothérapeute. Elle en a entendu parler car
« c'est dans l'air du temps », qu'on en rencontre dans les
films, dans des séries télévisées et qu'elle a
regardé deux reportages sur le sujet.
Ergothérapeute 2 : La réponse de
l'ergothérapeute 2 à cette question est clairement « Non
! ». Selon elle, une fois sortie de l'IFE, « les
difficultés quotidiennes » rencontrées sur le terrain
font qu'il est difficile de continuer à se former sur des sujets
innovants. Elle évoque également le programme de formation des
étudiants ergothérapeutes d'avant la réforme, qui
n'incitait pas les étudiants à faire de la recherche et qui ne
leur permettait pas d'avoir l'ouverture d'esprit que favorise la nouvelle
réforme.
Ergothérapeute 3 : L'ergothérapeute 3 pense que
les ergothérapeutes ne sont pas suffisamment formés au sujet de
la robotique d'assistance pour en préconiser.
Ergothérapeute 4 : L'ergothérapeute 4 explique
que les ergothérapeutes ne sont pas suffisamment formés au sujet
de la robotique d'assistance pour en préconiser. Elle précise
cependant que si les étudiants ne sont pas formés sur le sujet
à l'IFE, il faudrait qu'ils puissent par la suite et s'ils le
souhaitent, se spécialiser dans des formations post-diplôme. L'IFE
devrait cependant dispenser les bases de la robotique d'assistance comme il le
fait pour nombre d'autres sujets et que des formations
spécialisées devraient être proposées ensuite
(Master, Diplômes Universitaires (DU), formations de
l'ANFE(*)...). Pour elle, une telle formation serait
nécessaire pour que les ergothérapeutes préconisent des
robots d'assistance. En connaissant leur fonctionnement et en sachant
l'expliquer aux personnes accompagnées ils gagneraient également
en crédibilité.
Analyse des réponses à la question 9
:
L'ensemble des professionnelles interrogées relate un
manque de formation ou d'information des ergothérapeutes au sujet de la
robotique d'assistance : la robotique d'assistance ne serait pas un sujet
abordé dans les IFE. Il en résulte une méconnaissance de
ces dispositifs, ce qui ne permet pas aux ergothérapeutes de
préconiser des solutions de robotique d'assistance.
Une ergothérapeute sur les quatre sondées
évoque la formation des ergothérapeutes «
post-réforme ». Celle-ci octroie, selon elle, une
ouverture d'esprit et davantage de possibilités de poursuites
d'études (et particulièrement dans la recherche) par rapport
à la formation dispensée avant la réforme. Cela pourrait
permettre de travailler et de développer davantage la robotique
d'assistance en ergothérapie.
Une autre ergothérapeute raconte qu'il est normal que
la robotique d'assistance ne soit pas développée dans les IFE. Il
en est de même pour nombre de sujets qui ne sont simplement
qu'évoqués. Il revient à l'ergothérapeute, qui
souhaite se spécialiser dans un domaine, de s'informer ou se former
après l'obtention de son Diplôme d'État en poursuivant ses
études
(*) Lire partout Association Nationale Française des
Ergothérapeutes
32
dans le domaine de la robotique d'assistance. Encore faut-il
qu'il y ait des formations spécialisées en robotique
d'assistance, souligne-t-elle.
Question 10 : Seriez-vous prêt(e)
à préconiser ce genre d'aide à une personne
âgée ?
Cette question intervient après la brève
présentation de ce qu'est la robotique d'assistance par
l'enquêteur (cf. question 7). Elle permet d'évaluer
l'intérêt de l'ergothérapeute pour la robotique
d'assistance ainsi que son opinion au sujet de son éventuelle
efficacité.
Présentation des résultats de la
question 10 :
Ergothérapeute 1 : L'ergothérapeute 1 semble
être prête à essayer la robotique d'assistance et à
la préconiser à une personne âgée. Elle souligne le
fait qu'elle n'y connaît pas grand-chose et qu'elle n'a jamais eu de
retour sur l'utilisation d'une telle aide mais qu'il faut essayer pour s'en
faire une idée.
Ergothérapeute 2 : L'ergothérapeute 2 se montre
encline à préconiser ce genre d'aide à une personne
âgée, si tant est qu'elle y soit un minimum formée, qu'elle
connaisse davantage la robotique d'assistance et que celle-ci soit
financièrement accessible. Le « Oui » n'est pas franc, il
s'agit plutôt d'un « pourquoi pas ».
Ergothérapeute 3 : L'ergothérapeute 3 serait
prête à préconiser un robot d'assistance aux tâches
ménagères mais pas les autres types de robots et en particulier
les robots « compagnons ». L'ergothérapeute 3 estime que les
personnes âgées ont besoin d'un contact humain. Elle dit qu'un
robot d'assistance aux tâches ménagères pourrait être
bien accepté, à l'inverse d'un robot de soutien émotionnel
qui véhiculerait davantage l'image de palliatif d'une incapacité.
Elle se pose également des questions au sujet de l'interprétation
et de la considération du robot par la personne âgée
souffrant de troubles cognitifs : comprendrait-elle ce que c'est et à
quoi ça sert ?
Ergothérapeute 4 : L'ergothérapeute 4 se dit
prête, sans hésiter, à préconiser un robot
d'assistance, quel que soit son type, à une personne
âgée.
Analyse des réponses à la question
10 :
Les quatre ergothérapeutes questionnées se
disent être prêtes à préconiser un robot d'assistance
à une personne âgée isolée afin de favoriser son
maintien à domicile.
Cependant, bien que le « Oui » l'emporte, les
réponses sont nuancées : une ergothérapeute se montre,
d'emblée, très ouverte à une préconisation, deux
autres seraient prêtes à préconiser un robot d'assistance
mais aimeraient être formées avant et la dernière ne serait
encline à ne préconiser qu'un robot d'assistance aux tâches
ménagères. Celle-ci craint qu'un robot compagnon «
déshumanise » la relation et trompe la personne souffrant de
troubles cognitifs sur ce qu'il est réellement : un robot.
Les ergothérapeutes semblent toutes convaincues de
l'intérêt que peut apporter un robot d'assistance à une
personne âgée à domicile et paraissent porter de
l'intérêt pour ces aides.
33
Question 11 : Dans quelle mesure le coût d'une
aide technique préconisée par un ergothérapeute
influence-t-il son acceptation par la personne ?
Cette question cherche à déterminer si une aide
onéreuse - à la charge de la personne âgée - est
refusée bien qu'elle soit sans aucun doute très utile.
Présentation des résultats de la
question 11 :
Ergothérapeute 1 : « C'est quasiment un des
premiers critères ». L'ergothérapeute 1 confie que le
critère principal dans le choix d'une aide technique est son coût,
après celui de son efficacité. Les personnes âgées
qui ont besoin des services d'un ergothérapeute ont pour la plupart des
finances restreintes. Elles ont souvent de petites retraites, vivent seules
après le décès du conjoint, n'ont pas forcément
d'entourage qui peut aider financièrement...
Elle souligne également le fait qu'une aide technique,
bien qu'absolument nécessaire pour la personne, peut être
refusée à cause de son prix, même pour un « petit
dépassement ».
Ergothérapeute 2 : L'ergothérapeute explique que
le coût d'une aide technique influence énormément son
acceptation par la personne âgée. Il est ainsi nécessaire
pour l'ergothérapeute de trouver un juste équilibre entre le
bénéfice attendu de l'aide technique et son coût,
rapporté aux capacités financières de la personne pour qui
l'aide est envisagée. La plupart des personnes âgées qui
voient un ergothérapeute ont des difficultés
financières.
Ergothérapeute 3 : Le coût d'une aide technique
influence « énormément ! » son acceptation par
la personne. Selon l'ergothérapeute 3, les financements
extérieurs destinés à permettre à la personne
d'acquérir des aides sont très insuffisants. Et dans ce contexte
d'insuffisance, les aides doivent être priorisées. Elle
sous-entend alors qu'au lieu de préconiser un robot d'assistance, il
vaudrait mieux préconiser le passage d'une aide humaine. De plus, le
fait qu'une aide technique soit refusée pour raisons financières,
alors même qu'elle est tout à fait nécessaire, n'est pas
rare et est clairement exprimé par la personne.
Ergothérapeute 4 : Selon l'ergothérapeute 4, le
coût d'une aide technique influence grandement son acceptation ou son
refus par la personne. Elle explique qu'en France et particulièrement en
Alsace, les gens sont peu habitués à payer pour leurs soins. Elle
évoque les fréquentes difficultés financières des
personnes âgées et souligne le fait que parfois une personne a les
moyens d'acquérir une aide technique mais la refuse car estime ne pas
avoir à payer pour ses soins. Ce « frein de principe » serait
relativement fréquent.
Analyse des réponses à la question
11 :
La réponse des quatre ergothérapeutes
questionnées est unanime : le coût d'une aide technique influence
de manière significative son acceptation par la personne
âgée.
La majorité des personnes âgées qui font
appel à un ergothérapeute sont polypathologiques et ont de
multiples difficultés, ce qui nécessite souvent l'intervention de
plusieurs professionnels des domaines de la santé et du social
(infirmières, assistantes de vie sociale, assistantes sociales...). Les
personnes âgées ont également généralement de
petites retraites et, par conséquent, des ressources pécuniaires
limitées. Dans ce contexte de limites financières
34
obligeant la personne âgée à prioriser les
aides, une aide technique onéreuse est souvent refusée,
malgré son utilité certaine.
Dans ces situations, une ergothérapeute confie
préférer le passage, même bref, d'un aidant « humain
» à la préconisation d'un robot. Une autre explique que
parfois, bien que la personne âgée ait la capacité
financière de subvenir à ses besoins, elle refuse d'investir pour
suivre la préconisation de l'ergothérapeute, estimant qu'elle n'a
pas à payer pour sa santé. Il s'agit alors d'un « frein de
principe ».
Question 12 : Dans quelle mesure la
famille/l'entourage/le ou les aidant(s) influence(nt) l'acceptation et
l'utilisation des aides techniques proposées ?
Cette question a pour but de valider l'hypothèse selon
laquelle l'entourage de la personne âgée doit être inclus
dans le processus de préconisation d'un robot d'assistance afin que la
personne âgée elle-même, accepte et utilise le robot.
Présentation des résultats de la
question 12 :
Ergothérapeute 1 : D'après
l'ergothérapeute 1, la famille permet, avant toute chose et dans le cas
où la personne âgée souffre de troubles cognitifs, de
« rationaliser » la situation, de raisonner la personne. De
plus, la présence de l'entourage est importante lors de l'essai d'une
nouvelle aide technique, pour rassurer la personne âgée et pour
apprendre à l'utiliser en sécurité. En effet, les aidants
sont, avec la personne âgée, les principaux utilisateurs des aides
préconisées par l'ergothérapeute. La famille participe
également souvent au financement des aides proposées et sont les
garants de son utilisation. Enfin, ils sont parfois les demandeurs de l'aide en
lieu et place de la personne âgée.
Ergothérapeute 2 : Selon l'ergothérapeute 2,
l'inclusion de la famille dans le processus de préconisation d'une aide
technique est fondamentale. Quand une personne, quelle qu'elle soit, a un choix
important à faire dans sa vie, un choix qui potentiellement peut changer
sa vie, elle demande l'avis à son entourage, à sa famille. Si la
famille ou la personne avec qui vit la personne âgée n'accepte pas
l'aide, la personne âgée ne l'acceptera pas non plus.
Ergothérapeute 3 : Selon l'ergothérapeute 3, la
famille ou l'entourage influence considérablement l'acceptation ou le
refus d'une aide technique par la personne âgée. La famille ou
l'entourage peut jouer le rôle de facilitateur, s'il porte le projet
proposé par l'ergothérapeute ou, au contraire, un obstacle s'il
le rejette ou le dénigre. La personne âgée se
réfère souvent à ses proches avant de faire un choix
important.
Ergothérapeute 4 : L'ergothérapeute 4 explique
que la famille et l'entourage influencent de manière importante
l'acceptation et l'utilisation d'une aide technique par la personne
âgée. La personne âgée demanderait l'avis de
personnes extérieures en cas de doutes ou d'un prix jugé trop
élevé. L'entourage peut être facilitateur s'il a compris le
bénéfice de sécurité - permettant le maintien
à domicile - de l'aide technique. Selon l'ergothérapeute 4, il
faut impérativement impliquer la famille dans le processus de
préconisation afin qu'il devienne lui-même porteur
35
de ce projet auprès de la personne âgée.
Ce serait la garantie qu'une aide technique soit utilisée et ne
croupisse pas dans un placard. De manière plus pratique, c'est souvent
la famille de la personne âgée qui cherche ou réceptionne
la livraison de l'aide technique...
Analyse des réponses à la question
12 :
Les quatre professionnelles s'accordent pour dire que la
famille, l'entourage, le ou les aidant(s) influence(nt) considérablement
l'acceptation et l'utilisation par la personne âgée de l'aide
préconisée par l'ergothérapeute. Avant de faire un choix
à enjeu important, nombre d'individus sollicitent leur entourage pour
connaître leur avis. Rares sont les personnes qui s'engagent seules, sans
connaître l'opinion de leurs proches, surtout quand le choix en question
a un coût financier élevé. L'entourage peut être
facilitateur de l'acceptation et de l'utilisation de l'aide : s'il
adhère à la préconisation, il portera la proposition de
l'ergothérapeute auprès de la personne âgée. Il peut
également participer au financement de l'aide ainsi qu'aux
démarches de son acquisition et enfin participer et/ou veiller à
son utilisation et son entretien. Mais l'entourage peut également
être un frein à l'acceptation et à l'utilisation de l'aide
: s'il n'adhère pas à la préconisation, s'il n'en voit pas
l'utilité et s'il dénigre l'aide proposée devant la
personne âgée, celle-ci en aura une image négative et la
refusera. L'entourage peut également dénier de participer
financièrement pour son achat ou s'investir peu dans les
démarches de son acquisition auprès des revendeurs, alors
même que la personne âgée souhaite acquérir
l'aide.
Notes supplémentaires :
En plus des réponses aux questions qui leur ont
été posées, d'autres idées, questionnements et
éléments de réponses ont été
évoqués par les ergothérapeutes au cours des entretiens
:
a) Les professionnels intervenant au domicile de la personne
âgée pourraient, eux aussi, avoir des difficultés à
accepter et à utiliser un robot d'assistance,
b) Qu'en est-t-il de la confidentialité des
données recueillies par certains robots ?
c) La mise en place d'aides robotiques entraînerait une
suppression d'emplois,
d) L'Homme devra s'instaurer des limites et en instaurer aux
robots,
e) Confier nos aînés à des robots «
déshumaniserait » les relations.
Analyse des notes supplémentaires
a) Les professionnels intervenant au domicile de la
personne âgée pourraient, eux aussi, avoir des difficultés
à accepter et à utiliser un robot d'assistance.
Cette idée peut être mise en relation avec
l'étude de PRADIER « Les préjugés des soignants
face aux technologies pour l'autonomie. Souci éthique ou
méconnaissance ? »30, menée en 2014. Au
cours de cette étude il a été demandé à des
rééducateurs de faire un choix entre de multiples aides
proposées, technologiques et non technologiques, dont le but commun est
de favoriser un
30 PRADIER, S., Les préjugés des
soignants face aux technologies pour l'autonomie. Souci éthique ou
méconnaissance ?, 2014 in Recueil des textes scientifiques des JA-SFTAG
2014, p18 à 21.
36
maintien à domicile sécuritaire. Les
rééducateurs ont dû donner leur avis pour une
préconisation à une personne âgée, puis pour
eux-mêmes, comme s'ils devaient en être les
bénéficiaires. Globalement, les professionnels seraient plus
enclins à préconiser des aides peu technologiques ou «
classiques », plutôt que des aides de « nouvelles technologies
». Ils seraient également davantage prêts à
préconiser certaines aides aux personnes âgées,
plutôt que pour eux-mêmes : télésurveillance par
médaillon (46% contre 39%), robot compagnon non humanoïde (62%
contre 56%)...
Il ressort de cette étude que « les
technologies ne rebutent pas les anciens mais les soignants qui doivent les
préconiser ». Les professionnels redouteraient principalement
le manque de contrôle de l'utilisateur sur ces appareils.
Après ce constat, il est pertinent pour
l'ergothérapeute de s'interroger sur l'acceptation des robots
d'assistance par l'ensemble des professionnels intervenant au domicile de la
personne âgée. Une non-adhésion de ces derniers à
une éventuelle préconisation serait un frein à
l'utilisation du robot par les professionnels, ainsi qu'à l'acceptation
et l'utilisation par la personne âgée.
b) Qu'en est-t-il de la confidentialité des
données recueillies par certains robots ?
Certains robots d'assistance collectent des informations sur leur
environnement et sur la personne qui l'utilise via ses caméras,
microphones et multiples capteurs. Ces informations lui servent à se
repérer, à interagir avec l'utilisateur, à le conseiller
et l'informer, ou encore à donner l'alerte en cas de danger.
Les données recueillies peuvent alors être
transmises et communiquées automatiquement via une connexion internet
vers le médecin traitant, par exemple. Il est important de se poser la
question de la réglementation qui encadre cette collecte d'informations.
Est-elle suffisamment élaborée et stricte pour garantir le
respect de la vie privée de la personne âgée ? La personne
est-elle préalablement informée de ce recueil de données ?
Doit-elle donner son accord écrit avant la mise en place d'un robot qui
envoie automatiquement sa température corporelle à son
médecin ? La transmission des informations vers l'extérieur
est-elle cryptée ? Leur stockage est-il sécurisé ?...
La question de la sécurité de la vie
privée de la personne âgée utilisatrice d'un robot
d'assistance doit se poser dès lors que celui-ci collecte et transmet
des informations à caractère médical. Cette question est
vaste et complexe, raison pour laquelle ce mémoire n'a pas la
prétention d'y répondre. Néanmoins, il invite à la
réflexion autour de cette problématique, qu'il est essentiel de
considérer.
c) La mise en place d'aides robotiques
entraînerait une suppression d'emplois.
La suppression d'emplois est une crainte
régulièrement formulée lorsque la robotique est
évoquée. Celle-ci provient sans doute de l'ère
industrielle au cours de laquelle de nombreuses usines se sont dotées de
robots, accomplissant des tâches répétitives plus
rapidement qu'un ouvrier et à moindre coût. De nombreux
travailleurs se sont alors vus remplacer par des robots industriels.
La robotique d'assistance personnelle n'a pas pour vocation
de remplacer ou de diminuer les aides humaines. Elle est vouée à
n'être qu'une aide supplémentaire visant à améliorer
la sécurité et/ou le confort de vie de la personne qui l'utilise.
Son utilisation peut cependant permettre une réorganisation ou une
adaptation des passages de l'aide humaine au domicile de la personne
âgée : le robot peut en effet modifier les priorités des
différentes prises en soins de la tournée du professionnel.
d) L'Homme devra s'instaurer des limites et en instaurer
aux robots
L'évolution rapide des sciences et techniques repousse
sans cesse les limites technologiques. Bientôt, les robots seront
capables d'exécuter tout ce que l'Homme leur demandera de faire. Les
possibilités offertes par la technologie seront énormes et les
limites que cette dernière impose aujourd'hui seront, demain,
très faibles.
Pour garantir de bonnes relations Hommes/machines et assurer
la sécurité de la population, il convient de mettre en place des
limites, autres que technologiques, aux robots.
Aujourd'hui déjà, certains robots d'assistance
sont conçus avec des matériaux déformables sous la
pression et équipés d'actionneurs peu puissants, les
empêchant de blesser la personne en cas de mésusage ou de
dysfonctionnement. Outre le matériel, le logiciel interne au robot peut
être réfléchi et conçu afin de « brider »
volontairement et dans un but de sécurité, les capacités
du robot, ce qui n'est pas sans rappeler les trois lois de la robotique
écrites par le célèbre auteur de science-fiction Isaac
ASIMOV31 :
o Première loi : « Un robot ne peut porter
atteinte à un être humain, ni, restant passif, permettre qu'un
être humain soit exposé au danger ».
o Deuxième loi : « Un robot doit obéir
aux ordres que lui donne un être humain, sauf si de tels ordres entrent
en conflit avec la Première loi ».
37
31
http://isaac-asimov.com
(consulté le 18/04/2015).
38
o Troisième loi : « Un robot doit
protéger son existence tant que cette protection n'entre pas en conflit
avec la Première ou la Deuxième loi ».
Des limites déontologiques et juridiques pourront
également être posées, régissant la robotique
d'assistance de sa conception à son utilisation.
Là encore il s'agit d'une question très vaste
qui sous-entend celle de la responsabilité en cas de dysfonctionnement
ou d'accident : qui est responsable ? L'utilisateur ? Le constructeur ?
L'ergothérapeute qui a préconisé l'aide ? Le robot
lui-même ?... Ce mémoire ne se propose que d'évoquer ces
idées afin de faire émerger des questionnements.
e) Confier nos aînés à des robots
« déshumaniserait » les
relations.
Une ergothérapeute a clairement expliqué que,
dans le contexte actuel de rationalisation voire de réduction des aides
allouées aux personnes âgées à domicile, il valait
mieux préconiser le passage d'une aide humaine, ne serait-ce que
brièvement dans la journée, plutôt qu'un robot
d'assistance, même si celui-ci peut être présent et
opérationnel plusieurs heures. Les interactions interhumaines seraient
bien plus bénéfiques pour la personne qu'une interaction
Homme-machine.
Une autre ergothérapeute pense, au contraire, que dans
certains cas, un robot peut être plus facilement accepté qu'une
aide humaine : le robot, à l'inverse d'un humain, n'a pas
d'émotions, ne perd jamais patience, ne juge pas, peut être
sollicité à n'importe quelle heure, etc.
D'ailleurs, certaines personnes âgées peuvent
avoir plus de réticence à « déranger » une aide
humaine à de nombreuses reprises ou avoir plus de difficultés
à lui « donner des ordres ». Ces barrières tombent avec
un robot.
La préconisation et l'attribution d'un robot compagnon
à une personne âgée ne doit absolument pas entraîner
une suppression ou une diminution de ses aides humaines.
Le robot d'assistance n'est qu'un plus à la prise en
soins de la personne et ne peut se suffire à lui-même. Le robot
compagnon a un rôle de soutien ou d'accompagnement quand l'aide humaine
est absente et permet de rendre la personne âgée plus disponible
sur les plans cognitif et émotionnel pour les interactions sociales
interhumaines. Ainsi, le robot ne remplace pas l'humain mais facilite, au
contraire, les relations interhumaines.
39
6. Discussion
Pour rappel, la problématique de ce travail de recherche
est la suivante :
« Quels sont les facteurs qui permettraient aux
ergothérapeutes, spécialistes de la préconisation d'aides
techniques et d'assistances technologiques, de préconiser des robots de
soutien émotionnel à des personnes âgées
isolées, en vue de favoriser leur maintien à domicile ?
»
Les hypothèses formulées afin d'y répondre
sont les suivantes :
A) Les robots compagnons devraient être
financièrement accessibles,
B) Les ergothérapeutes pourraient être
formés, ou davantage informés, sur la robotique d'assistance,
C) L'entourage de la personne âgée devrait
être inclus au processus de préconisation d'un robot compagnon,
D) Les personnes âgées ne devraient pas
être considérées comme systématiquement
réfractaires aux nouvelles technologies.
Celles-ci sont, ci-dessous et une à une,
confrontées aux réponses obtenues lors de l'enquête de
terrain.
A) Les robots compagnons devraient être
financièrement accessibles.
L'hypothèse est confirmée.
Les quatre ergothérapeutes ayant participé
à l'enquête de terrain ont répété à
plusieurs reprises que le coût d'une aide technique est un critère
prépondérant influençant son acceptation ou son refus. La
majorité des personnes âgées qui font appel à un
ergothérapeute sont en effet limitées financièrement et,
sans aide extérieure, ne peuvent se permettre l'acquisition d'une aide
technique onéreuse. Il n'existe actuellement aucune aide
financière délivrée par les Maisons Départementales
des Personnes Handicapées (MDPH) ou d'autres organismes, pour
l'acquisition d'un robot d'assistance. Seul l'entourage de la personne
âgée, quand il y en a un, peut alors lui venir en aide.
Pistes de réflexion /
Propositions
Pour que les faibles ressources financières de la
personne âgée ne soient plus un frein à l'acquisition d'un
robot d'assistance, il faudrait que ceux-ci soient moins chers. Leur prix
élevé d'aujourd'hui s'explique essentiellement par le fait qu'ils
intègrent des technologies naissantes et qu'ils soient produits en
très faible quantité. Nul doute que dans quelques années
la technologie qui fait « vivre » ces robots sera devenue ordinaire
et que ces derniers seront produits à une échelle industrielle.
Cela devrait avoir pour effet de diminuer leur prix.
Les professionnels de terrain, les établissements de
soins, certaines associations, etc. pourraient également s'allier et
réaliser des achats de robots « en gros », leur permettant
d'avoir des réductions.
40
Enfin, une politique de santé en faveur du
développement et de la diffusion de la robotique d'assistance,
accompagnée des moyens nécessaires, pourrait initier les
démarches sus-citées.
B) Les ergothérapeutes pourraient être
formés, ou davantage informés, sur la robotique
d'assistance.
L'hypothèse est confirmée.
La méconnaissance de la robotique d'assistance par les
ergothérapeutes questionnées est manifeste. Cette
méconnaissance des produits sur le marché et de leur
potentialité ne leur permet pas de préconiser de tels
dispositifs, ni même d'y penser. De plus, si toutefois un
ergothérapeute voulait en préconiser, ou simplement en
conseiller, il ne saurait pas où diriger la personne pour en
acquérir un.
Étonnamment, la récence de ces technologies n'est
jamais citée clairement par les ergothérapeutes
interrogées pour expliquer leur ignorance de la robotique d'assistance.
Elle est tout juste sous-entendue : « Quelque chose d'irréel
», « c'est de la science-fiction ». Cette ignorance est
systématiquement justifiée par un défaut d'information et
de formation à l'IFE et après le diplôme.
Pistes de réflexion /
Propositions
Afin de faire connaître la robotique d'assistance aux
ergothérapeutes, il est pertinent qu'ils y soient sensibilisés
dès leur formation initiale, à l'IFE. La robotique d'assistance
est récente, il peut donc être difficile de dispenser des
enseignements complets à ce sujet, avec des démonstrations de
produits... Néanmoins, il serait intéressant que la robotique
d'assistance soit un sujet évoqué durant la formation et
présentée comme une aide technique sérieuse, que
l'ergothérapeute est en capacité de préconiser.
Les ergothérapeutes voulant se spécialiser dans
le domaine des solutions de robotique d'assistance ou des
gérontechnologies en général, devraient pouvoir avoir
accès à des formations post-Diplôme d'État (DE),
comme des masters, des Diplômes Universitaires, des formations
délivrées par l'ANFE, etc.
Les formations en gériatrie devraient également
systématiquement sensibiliser les ergothérapeutes aux robots
d'assistance.
Enfin, les organismes de diffusion de ces aides, ou leurs
revendeurs, pourraient proposer aux ergothérapeutes des
démonstrations en situation.
C) L'entourage de la personne âgée
devrait être inclus au processus de préconisation d'un robot
compagnon.
L'hypothèse est confirmée.
Lors de chaque entretien, les ergothérapeutes ont
martelé l'importance de considérer l'entourage de la personne
âgée lors de la préconisation d'une aide technique. Chacun
de nous se réfère en effet aux gens qui nous entourent avant de
faire un choix important. Si l'avis de
41
l'entourage est négatif, la préconisation a peu
de chances d'être acceptée. Si son avis est positif, l'acceptation
de l'aide est bien plus probable.
Pistes de réflexion /
Propositions
À chaque préconisation et quand cela est
possible, l'ergothérapeute doit se faire l'allié de l'entourage
de la personne âgée à qui est destinée l'aide
proposée.
Dans la situation d'une personne âgée
isolée qui n'aurait pas d'entourage familial ou d'entourage proche,
l'ergothérapeute, les revendeurs médicaux et les professionnels
intervenant au domicile seraient les personnes ressources de la personne
âgée. Il est donc important que tous les intervenants tiennent le
même discours et portent ensemble le projet proposé. Il incombe
à l'ergothérapeute de se rapprocher des autres professionnels
afin de leur présenter le projet ainsi que le robot d'assistance.
D) Les personnes âgées ne devraient pas
être considérées comme systématiquement
réfractaires aux nouvelles technologies.
L'hypothèse est confirmée.
Deux ergothérapeutes sur les quatre interrogées
explicitent clairement que les personnes âgées seraient peu
ouvertes à l'utilisation d'un robot d'assistance ou auraient des
difficultés à s'en accommoder. Les deux autres évoquent
cette idée ou se questionnent à ce sujet. La technologie ne fait,
en effet, qu'assez peu souvent partie de leur vie quotidienne. Est-il pertinent
de proposer un robot à une personne âgée qui ne
possède ni téléphone, ni ordinateur ? La question est
légitime, même si une réponse tranchée de la part de
l'ergothérapeute sans discussion préalable avec la personne
serait mal venue.
Ces résultats corroborent l'image que la
société véhicule, selon laquelle les personnes
âgées et la technologie sont incompatibles. Les études de
NEVEN et VAN DIJK, citées plus haut dans ce mémoire (cf. 3.1.3.3.
Acceptation des nouvelles technologies par les personnes âgées)
nuancent ces préjugés et dressent le profil des personnes
âgées les plus enclines à accepter un robot
d'assistance.
Une des professionnelles questionnées se pose la
question de l'acceptation d'un robot par une personne souffrant de troubles
cognitifs. Celle-ci comprendrait-elle ce que représente le robot et
à quoi il sert ? Le robot serait-il accepté/refusé pour ce
qu'il est réellement ?
Pistes de réflexion /
Propositions
Bien qu'il faille nous garder d'accorder plus de crédit
aux études menées par NEVEN et VAN DIJK qu'aux
ergothérapeutes qui travaillent tous les jours au côté des
personnes âgées, il serait souhaitable de maintenir à
l'esprit que chaque personne âgée est différente. Ainsi,
même si l'une ou l'autre, ou bien même si la plupart des personnes
âgées refusent qu'un robot « s'occupe d'elles », il
convient aux ergothérapeutes de ne pas généraliser ces
situations et d'en faire une vérité pour toutes les personnes
âgées qu'ils accompagnent.
42
De plus, comme stipulé plus haut, pour qu'une nouvelle
technologie soit acceptée par une personne âgée, celle-ci
doit lui apparaître utile et facile d'utilisation. Il est du ressort de
l'ergothérapeute de présenter le produit, ses
bénéfices, ses avantages et inconvénients ainsi que la
façon dont il s'utilise. Si l'ergothérapeute est convaincu que le
robot qu'il s'apprête à préconiser est l'aide la plus
adaptée aux besoins de la personne âgée, il doit tenter de
la convaincre, sans oublier son entourage dont l'importance dans le processus
d'acceptation d'une aide technique a largement été
soulignée dans ce mémoire.
7. Conclusion
Les recherches menées au cours de la réalisation
de ce mémoire ont permis de répondre aux deux interrogations qui
sont à la base de ce travail, ou tout du moins d'apporter des
éléments de réponse : premièrement, la robotique
d'assistance peut effectivement représenter des solutions efficaces pour
favoriser le maintien à domicile de personnes âgées
isolées.
Il convient néanmoins d'examiner les résultats
des études présentées avec un certain recul. En effet, les
études menées jusqu'ici et visant à démontrer
l'efficacité des robots d'assistance et, en particulier, des robots
compagnons ont été conduites sur des échantillons
réduits et sur des populations vivant principalement en institution. De
plus, les conditions expérimentales n'ont pas toujours été
rigoureusement définies, ce qui rend difficile la reproduction des
expériences et la comparaison des résultats entre les
différentes études.
Des travaux incluant davantage de personnes âgées
et, surtout, des personnes âgées vivant à domicile restent
à mener pour confirmer les résultats des études
menées jusqu'alors.
Deuxièmement, ce travail d'initiation à la
recherche a permis de mettre en avant un défaut de préconisation
de robots d'assistance par les ergothérapeutes au profit d'aides
techniques ou d'assistances technologiques plus classiquement
préconisées. Les raisons de ce constat sont multiples : les
ergothérapeutes méconnaissent la robotique d'assistance ; son
prix est élevé et à l'entière charge de la personne
âgée ; les individus d'un âge avancé sont souvent
jugés « réfractaires » voire directement « inaptes
» à l'utilisation de nouvelles technologies, etc.
Cette question, initiatrice de ce mémoire, a permis
l'élaboration de la problématique suivante :
« Quels sont les facteurs qui permettraient aux
ergothérapeutes, spécialistes de la préconisation d'aides
techniques et d'assistances technologiques, de préconiser des robots de
soutien émotionnel à des personnes âgées
isolées, en vue de favoriser leur maintien à domicile ? »
43
Différentes hypothèses ont été
formulées afin d'y répondre :
A) Les robots compagnons devraient être
financièrement accessibles,
B) Les ergothérapeutes pourraient être
formés, ou davantage informés, sur la robotique d'assistance,
C) L'entourage de la personne âgée devrait
être inclus au processus de préconisation d'un robot compagnon,
D) Les personnes âgées ne devraient pas
être considérées comme systématiquement
réfractaires aux nouvelles technologies.
Les entretiens menés sur le terrain ont validé
chacune de ces hypothèses.
Ceux-ci permettent de conclure que le coût
élevé d'une aide technique est son premier motif de refus. Afin
que les ergothérapeutes puissent en préconiser, il est
nécessaire que leur prix baisse, ou que des aides au financement soient
mises en place.
L'inclusion de l'entourage (essentiellement professionnel
quand la personne est isolée) dans le processus de préconisation
d'un robot d'assistance est primordiale. Les ergothérapeutes
interrogées ont souligné la nécessité de
l'acceptation de la préconisation par la famille/l'entourage/le ou les
aidant(s) pour que la personne âgée l'accepte également.
L'ensemble des professionnels intervenant au domicile de la personne
âgée doit ainsi tenir le même discours concernant le robot
d'assistance et ne doit en aucun cas dénigrer le projet.
Autre constat de cette enquête : les
ergothérapeutes méconnaissent la robotique d'assistance. Les
entretiens expliquent cette méconnaissance davantage par un manque de
formation des étudiants ergothérapeutes et des
ergothérapeutes que par la récence de ces nouvelles technologies.
Des formations à la robotique d'assistance devraient être
proposées aux ergothérapeutes s'y intéressant, ainsi
qu'à ceux souhaitant se spécialiser en gériatrie : on ne
peut préconiser qu'un produit que l'on connaît.
Des réseaux de professionnels travaillant avec la
robotique d'assistance pourraient également communiquer à son
sujet et ainsi la faire connaître à une plus vaste échelle.
Ceux-ci pourraient aussi assurer ou favoriser la mise en place et le maintien
d'une veille technologique, suivant ainsi les rapides évolutions de la
robotique d'assistance.
Les entretiens ont également avancé à
plusieurs reprises l'idée que les personnes âgées sont
réfractaires à la technologie. Il convient aux
ergothérapeutes de s'abroger de toute idée reçue car
chaque situation est singulière.
De plus, nous pouvons penser que si nombre de personnes
âgées d'aujourd'hui seraient contre l'idée d'être
accompagnées par un robot, les personnes âgées de demain,
qui seront nées avec la technologie, en auront une toute autre
vision.
Nul doute que dans 20, 30 ou 40 ans, il sera aussi banal
d'avoir un robot chez soi qu'un téléphone dans sa poche.
44
Nous pouvons imaginer que, dans l'avenir, ces robots qui
occuperont chaque foyer soient ce que les couteaux-suisses étaient hier
et ce que sont les smartphones aujourd'hui : des objets à tout faire.
Ceux-ci réserveront automatiquement, pour vous, une table au restaurant
avec vos petits-enfants, communiqueront avec les radiateurs de votre logement
pour augmenter le chauffage avant votre arrivée et réaliseront
des tâches ménagères diverses. Avec l'avènement de
l'intelligence artificielle, les capacités des robots et leur
utilisation pour notre confort deviendront quasi illimitées.
Mais, attention, ces technologies qui sont
développées pour un « mieux-vivre » et, surtout, «
un mieux-vivre chez soi » ne doivent pas nous ôter de l'esprit
qu'elles ne sont qu'un moyen supplémentaire d'accompagner nos
aînés et ne se suffisent pas à elles seules. Il est
nécessaire d'entretenir des relations sociales interhumaines tout au
long de sa vie et de garder à l'esprit cette citation de Rabelais :
« science sans conscience n'est que ruine de l'âme
»32.
32 RABELAIS, F., Les Horribles et Espoventables
Faictz et Prouesses du très renommé Pantagruel, roy des Dipsodes,
filz du grand géant Gargantua (titre original), Lyon, Nourry, 1530.
(Roman publié sous l'anagramme Alcofribas Nasier).
45
8. Lexique
Actionneur : moteur (en robotique).
Animiste : qui attribue une âme
à toute chose : animaux, objets...
Autonomie : (1) capacité d'un individu
à faire des choix pour lui-même et à agir librement // (2)
Durée de fonctionnement d'une machine ou d'un appareil sur ses propres
réserves énergétiques, sans apport extérieur.
Dépendance : état d'un individu
qui est tributaire d'un tiers sur le plan financier et/ou matériel et/ou
intellectuel, etc.
Domotique : ensemble des technologies
permettant d'automatiser certaines fonctions du domicile en matière de
sécurité, gestion de l'énergie, communication, confort,
etc.
Holistique : qui considère la personne
soignée dans son entièreté : ne se centre pas uniquement
sur la fonction ou l'organe déficient.
Réadaptation : phase de la prise en
soins en ergothérapie visant la reprise des activités de la
personne. C'est au cours de cette phase que d'éventuels
aménagements de l'environnement ou des préconisations d'aides
techniques sont réalisés.
Rééducation : phase de la prise
en soins en ergothérapie visant à récupérer la
fonction déficitaire. Elle se fait essentiellement par un travail
directement sur la personne.
Réinsertion : phase de la prise en
soins en ergothérapie visant à permettre à un individu de
retrouver une place dans son milieu familial, professionnel et plus globalement
dans la société.
Signification des sigles utilisés
ANAH : Agence NAtionale de l'Habitat
ANFE : Association Nationale Française des
Ergothérapeutes
APA : Allocation Personnalisée d'Autonomie
ASPA : Allocation de Solidarité aux Personnes
Âgées
AVJ : Activité de la Vie Journalière
CMPEPS : Commission pour la Mesure des
Performances Économiques et du Progrès Social
DE : Diplôme d'État
DU : Diplôme Universitaire
46
EHPAD : Établissement
d'Hébergement pour Personnes Âgées Dépendantes
EMG : Équipe Mobile de Gériatrie
GIR : Groupe Iso-Ressources (classe la personne dans un groupe
en fonction de son degré de
dépendance. Il existe 6 Gir : Gir 1, Gir 2, ..., Gir 6.
Plus le Gir est petit, plus la personne est
dépendante).
HDJ : Hôpital De Jour
IFE : Institut de Formation en Ergothérapie
INSEE : Institut National de la Statistique
et des Études Économiques
LPP : Liste des Produits et Prestations
MDPH : Maison Départementale des Personnes
Handicapées
OMS : Organisation Mondiale de la Santé
SFTAG : Société
Française des Technologies pour l'Autonomie et de
Gérontechnologie
SSIAD : Service de Soins Infirmiers À
Domicile
SSR : Soins de Suite et de Réadaptation
UMG : Unité Mobile de Gériatrie
USLD : Unité de Soins Longue Durée
47
9. Bibliographie
Ø Livres :
- BUSNEL, M., ENJALBERT, M., GABUS, J.C., Robotique, domotique et
handicap. Paris, Masson, 2001, 115p.
- MEIRE, P., NEIRYNCK I., Le paradoxe de la vieillesse :
l'autonomie dans la dépendance. Paris, De Boeck & Larcier, 1999,
182p.
- RABELAIS, F., Les Horribles et Espoventables Faictz et
Prouesses du très renommé Pantagruel, roy des Dipsodes, filz du
grand géant Gargantua (titre original), Lyon, Nourry, 1530. (Roman
publié sous l'anagramme Alcofribas Nasier).
Ø Articles :
- AMIEL, M-H., GODEFROY, P., LOLLIVIER, S., Qualité de vie
et bien-être vont souvent de pair. INSEE Première
n°1428, janvier 2013, 4p.
- AUZANNEAU, N., CHARDON, S., Dépendance et maintien
à domicile. Rapport de Mars 2012, OpinionWay, 16p.
- BROEKENS, J., HEERINK, M., ROSENDAL, H., Assistive social
robots in elderly care: a review, 2009, 11p.
- CHOUTEAU, M., VIEVARD, L., Représentations des robots :
imaginaire & éthique. Millénaire3, Le Centre Ressources
Prospectives du Grand Lyon, 2011, 80p.
- COHEN-MANSFIELD, J., LIBIN, A., Therapeutic robocat for nursing
home residents with dementia : Preliminary inquiry, 2004.
- FITOUSSI, J-P., SEN, A., STIGLITZ, J., Rapport de la
Commission sur la mesure des performances économiques et du
progrès social, 2009, 324p.
- FORMARIER, M., La qualité de vie pour des personnes
ayant un problème de santé. Recherche en soins infirmiers
n°88, 2007, 94p.
- FRANDORFER, P., Population Ageing and Socially Assistive
Robots for Elderly Persons: The Importance of Sociodemographic Factors for User
Acceptance, 2012, 14p.
- GALVIN, J.C., SCHERER, M.J., An outcomes perspective of
quality pathways to the most appropriate technology, in: Galvin, J.C., Scherer,
M.J., Evaluating, Selecting and Using Appropriate Assistive Technology, 1996,
Aspen Publishers, p1 à 26.
48
- HOLT-LUNSTAD, J., LAYTON, J-B., SMITH, T., Social Relationships
and Mortality Risk: A Meta-analytic Review, 2010, 20p.
- HUBOT, H., Enquête de satisfaction des usages d'Aides
Techniques, 2010, 31p.
- NEVEN, L. B. M., Representations of the old and ageing in
the design of the new and emerging: assessing the design of ambient
intelligence technologies for older people, 2011, 228p.
- PANASSIER, C., La robotique d'assistance : un
véritable secteur d'avenir ? Millénaire3, Le Centre Ressources
Prospectives du Grand Lyon, 2011, 48p.
- PAN KE SHON, J-L., Isolement relationnel et mal-être.
INSEE Première n°931, novembre 2003, 4p.
- PHILLIPS, B., ZHAO, H., Predictors of assistive technology
abandonment. Assistive Technology, 1993, Resna Press, p36 à 45.
- PRADIER, S., Les préjugés des soignants face
aux technologies pour l'autonomie. Souci éthique ou
méconnaissance ?, 2014 in Recueil des textes scientifiques des JA-SFTAG
2014, p18 à 21.
- RAHOLA, A., Synthèse du débat national sur la
dépendance. 2011, 64p.
- RIALLE, V., Technologies nouvelles susceptibles
d'améliorer les pratiques gérontologiques et la vie quotidienne
des malades âgés et de leur famille. Rapport remis au
Ministère de la Santé et des Solidarités, 2007, 74p.
- ROBERT-BOBEE, I., Projections de population pour la France
métropolitaine à l'horizon 2050. INSEE Première
n°1089, juillet 2006, 4p.
- Soins en Gérontologie n°75,
janvier/février 2009, Le maintien à domicile.
- VAN DIJK, J. A. G. M., Digital divide research, achievements
and shortcomings, 2006, p221 à 235.
Ø Documents issus d'un site internet :
- BEATTIE, E., COOKE, M., MOYLE, W., et all., Exploring the
effect of companion robots on emotional expression in older adults with
dementia : a pilot randomized controlled trial, 2013,
https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/23506125
(consulté le 26/02/2015).
- KERSE, N., MACDONALD, B., ROBINSON, H., et all., The
psychosocial effects of a companion robot : a randomized controlled trial,
2013,
https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/23545466
(consulté le 26/02/2015).
Ø Textes législatifs et
réglementaires :
- Norme ISO 8373:2012(fr) relative aux robots et composants
robotiques fonctionnant dans des environnements industriels et non
industriels.
- Norme ISO 9999:2011(fr) relative aux produits d'assistance
pour personnes en situation de handicap - Classification et terminologie.
- Référentiel de compétences de
l'ergothérapeute - Compétence 4 (Extrait de l'Arrêté
du 5 juillet 2010 relatif au Diplôme d'État
d'ergothérapeute).
Ø Sites internet :
- Wikipédia, Robot.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Robot
(consulté le 06/09/2014).
- DEMAS, F., STEPHAN, Q., Robotique d'assistance : enjeux et
perspectives, 30 août 2013,
http://www.themavision.fr/jcms/rw_375612/robotique-d-assistance-enjeux-et-perspectives
(consulté le 14/09/2014).
-
http://www.sftag.fr/qui-sommes-nous/statuts/
(consulté le 14/09/2014).
- Millénaire3, Le Centre Ressources Prospectives du
Grand Lyon, Zoom sur la robotique d'assistance à la personne, 2011,
http://www.millenaire3.com/Zoom-sur-la-robotique-d-assistance-a-la-personne.1174.0.html
(consulté le 14/09/2014).
-
http://www.silvereco.fr
(consulté le 14/09/2014).
-
http://anfe.fr/l-ergotherapie/la-profession
(consulté le 22/01/2015).
- LEBLANC, D., Tutoriel 1 : Qu'est-ce qu'un robot ? 03
février 2013,
http://shyrobotics.com/tutoriel-1-quest-ce-quun-robot_20130203.html
(consulté le 03/02/2015).
- Salon des Séniors,
http://www.salondesseniors.com/qui-sont-les-seniors/a-quel-age-est-on-senior-
(consulté le 24/02/2015).
- Allocations et Aides aux personnes âgées,
http://vosdroits.service-public.fr/particuliers/N392.xhtml
(consulté le 24/02/2015).
49
-
http://isaac-asimov.com
(consulté le 18/04/2015).
50
Ø Autres sources de documentation :
- Arte, Vox Pop du 22 février 2015, La robotisation de la
société, Interview de Gabe IBANEZ.
- Conférences des 4e Journées Annuelles
de la Société Française des Technologies pour l'Autonomie
et de Gérontechnologie, Paris, les 24 et 25 novembre 2014.
- Larousse Dictionnaire, Préconiser,
http://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/pr%C3%A9coniser/63377
(consulté le 30/01/2015).
- Larousse Encyclopédie, Japon : religions du Japon,
http://www.larousse.fr/encyclopedie/divers/Japon_religions_du_Japon/185400
(consulté le 24/02/2015).
- Larousse Médical, Hospitalisme,
http://www.larousse.fr/encyclopedie/medical/hospitalisme/13612
(consulté le
14/02/2015).
Sommaire des annexes
Annexe I : référentiel de compétences de
l'ergothérapeute - Compétence 4 LII
Annexe II : schéma de classification des
différents types de robots LIII
Annexe III : visuel des robots présentés dans le
mémoire LIV
Annexe IV : grille d'entretien LVI
Annexe V-I : retranscription de l'entretien effectué
avec l'ergothérapeute 1 LXI
Annexe V-II : retranscription de l'entretien effectué
avec l'ergothérapeute 2 LXXI
Annexe V-III : retranscription de l'entretien effectué
avec l'ergothérapeute 3 LXXXIII
Annexe V-IV : retranscription de l'entretien effectué
avec l'ergothérapeute 4 XC
Abstract XCVII
LII
Annexe I
Annexe I : référentiel de
compétences de l'ergothérapeute - Compétence 4
Compétence 4
« Concevoir, réaliser, adapter les
orthèses provisoires, extemporanées, à visée
fonctionnelle ou à visée d'aide technique, adapter et
préconiser les orthèses de série, les aides techniques ou
animalières et les assistances technologiques ».
1/ Préconiser des adaptations, des aides techniques ou
animalières et des assistances technologiques, et aménager
l'environnement en conséquence pour un retour à
l'activité, un maintien ou un retour au travail, à domicile, aux
loisirs et dans la chaîne du déplacement.
2/ 0 3/ 0 4/ 0 5/ 0
6/ Évaluer la qualité et l'efficacité de
l'appareillage, des aides techniques et des assistances technologiques et
s'assurer de leur innocuité, notamment en situation
d'activité.
7/ Expliquer à la personne et à son entourage
les buts, la réalisation, la surveillance, la maintenance,
l'hygiène, l'usage et les effets indésirables de l'appareillage
orthétique ou prothétique et de l'aide technique ou
animalière, et de l'assistance technologique.
8/ Sélectionner et préconiser les aides
techniques ou animalières et les assistances technologiques en tenant
compte du recueil d'informations, de l'entretien, des évaluations
préalables, et du projet de la personne et de l'avis de l'équipe
médicale impliquée dans le suivi.
9/ Expliquer la mise en place, l'utilisation et la
surveillance des appareillages, des aides techniques et des assistances
technologiques, au sein de la structure de soins puis dans le milieu ordinaire
de vie.
LIII
Annexe II
Annexe II : schéma de classification des
différents types de robots

LIV
Annexe III
Annexe III : visuel des robots présentés
dans le mémoire

Paro®
Source :
http://www.parorobots.com/photogallery.asp
Aibo®
Source :
http://www.sony-aibo.com/media/
(cf. Paragraphe 3.1.3.4. Quelques robots compagnons actuellement
sur le marché)
Annexe III

Nao®
Source :
https://www.aldebaran.com/fr/qui-est-nao
iCat®
Sources :
http://www.bartneck.de/wp-content/uploads/2009/08/iCat02.jpg
et
http://www.arama.mynet.com/result.html?q=icat&type=pictures&page=3
Hector®
Source :
http://www.humanoides.fr/2012/09/13/hector-le-robot-de-compagnie-europeen/
LV
LVI
Annexe IV Date et heure de l'entretien :
Entretien n° :
Enregistrement audio : OUI / NON | Durée :
Annexe IV : grille d'entretien
Grille d'entretien
Relative à la préconisation de robots
d'assistance par les ergothérapeutes
Et à destination des
personnes âgées isolées,
Dans le but de favoriser leur maintien à
domicile
Informations concernant la personne
interrogée
· Sexe :
· Âge :
· Lieu de formation (IFE) :
· Durée d'exercice :
· Lieu(x) d'exercice actuel(s) et passé(s) :
1) Avez-vous déjà préconisé des
aménagements de domicile à une personne âgée
isolée afin de favoriser son maintien à domicile ?
2) Avez-vous déjà préconisé une aide
technique à une personne âgée isolée afin de
favoriser son maintien à domicile ?
3) Vous êtes-vous déjà senti(e)
démuni(e) face à une situation pour laquelle il ne semblait y
avoir aucune solution pour favoriser le maintien à domicile d'une
personne âgée isolée ?
LVII
Annexe IV Date et heure de l'entretien :
Entretien n° :
Enregistrement audio : OUI / NON | Durée :
4) Aviez-vous alors considéré une
éventuelle assistance robotique ?
4.1) Si oui, pour quel(s) besoin(s) ?
(Passer ensuite directement à la question 6)
4.2) Si non, pour quelle(s) raison(s) ?
(Passer ensuite à la question 5, puis directement
à la question 7)
5) Une assistance robotique aurait-elle pu, potentiellement,
favoriser ce maintien à domicile ?
LVIII
Annexe IV Date et heure de l'entretien :
Entretien n° :
Enregistrement audio : OUI / NON | Durée :
6) Quels éléments vous ont permis de
considérer/préconiser un robot d'assistance ?
7) Quel est votre niveau de connaissance au sujet de la
robotique d'assistance ?
8) Avez-vous déjà rencontré ou entendu
parler d'ergothérapeutes qui préconisent des robots d'assistance
?
9) Selon-vous, les ergothérapeutes sont-ils suffisamment
formés ou informés au sujet des robots d'assistance pour en
préconiser ?
LIX
Annexe IV Date et heure de l'entretien :
Entretien n° :
Enregistrement audio : OUI / NON | Durée :
10) Seriez-vous prêt(e) à préconiser ce genre
d'aide à une personne âgée ? Si réponse «
Non », passer à la question 10.1.
Si réponse « Oui », passer à la
question 11.
10.1) Seriez-vous prêt(e) à préconiser ce
genre d'aide à une personne jeune ? Si réponse « Oui
», passer à la question 10.1.1. Si réponse « Non
», passer à la question 10.1.2.
10.1.1) Pourquoi ? Quelle(s) différence(s) entre la
personne âgée et la personne jeune ?
10.1.2) Pourquoi ne seriez-vous pas prête(e) à
préconiser un robot d'assistance ?
LX
Annexe IV Date et heure de l'entretien :
Entretien n° :
Enregistrement audio : OUI / NON | Durée :
11) Dans quelle mesure le coût d'une aide technique
préconisée par un ergothérapeute influence-t-il son
acceptation par la personne ? (chercher à savoir si une aide
onéreuse - à la charge de la personne - est refusée
malgré qu'elle soit sans aucun doute très utile)
12) Dans quelle mesure la famille/l'entourage/le ou les
aidant(s) influence(nt) l'acceptation et l'utilisation des aides techniques
proposées ? (chercher à savoir si l'acceptation de l'AT par
l'entourage est nécessaire pour que la personne l'accepte
également et l'utilise)
LXI
Annexe V-I Entretien ergothérapeute 1
Durée de l'entretien : 40 min
Annexe V-I : retranscription de l'entretien
effectué avec l'ergothérapeute 1
(Afin de garantir l'anonymat de la personne interrogée,
les informations pouvant permettre de l'identifier ont été
remplacées par « [xxx] »).
Enquêteur / Ergothérapeute
- Est-ce-que je peux vous demander votre âge ?
- Oui, j'ai 33 ans.
- D'accord, c'est pour les statistiques après... Dans quel
institut de formation vous avez
été formée ?
- À Lyon
- À Lyon. Et depuis combien de temps vous exercez en tant
qu'ergothérapeute ?
- Ca va faire dix ans.
- Dix ans. Et est-ce-que vous avez toujours travaillé ici
?
- Non. C'est mon deuxième poste. Vous voulez savoir
où j'étais avant ?
- Oui.
- J'étais sur l'hôpital de [xxx] en gériatrie
également, en SSR-EHPAD et ça fait à peu
près 5 ans aujourd'hui donc
moitié-moitié.
- D'accord. Avez-vous déjà
préconisé des aides techniques à une personne
âgée
isolée en vue de favoriser son maintien à
domicile ?
- Oui.
- De quel(s) type(s) s'il vous plaît ?
- Alors tout ce qui est aides au déplacement, aides aux
transferts, prévention du risque
de chute, enfin l'aménagement du domicile ça peut
être une barre de maintien, une
barre latérale de redressement. Ça peut être
des chaussons adaptés, un fauteuil roulant
évidemment pour les déplacements. Quoi d'autre
comme matériel... Oui ben après
tout ce qui est aides aux transferts et puis un peu d'aides aux
repas de temps en temps.
- D'accord.
- Un peu toutes les aides techniques, c'est très
varié.
- Je m'en doute. Avez-vous déjà
préconisé des aménagements de domicile ?
- Oui. Aménagement de salles de bains,
...
- Architecturaux alors ?
- Oui.
- Et de quel(s) type(s) ?
- Aménagements de salles de bains, monte-escaliers,
après ça peut être aussi du
réaménagement dans une pièce :
déplacer ou retirer un ou deux meuble(s) pour libérer
de la place dans un passage, tirer des tapis, voilà. Mais
ça peut être sinon
effectivement des choses un petit peu plus compliquées
avec des travaux derrière.
- D'accord. Vous êtes-vous déjà
sentie démunie face à une situation pour laquelle il
ne semblait y avoir aucune solution pour favoriser le
maintien à domicile d'une
personne âgée isolée ?
LXII
Annexe V-I Entretien ergothérapeute 1
Durée de l'entretien : 40 min
- Ça arrive. Après, soit parce qu'effectivement
on ne trouvait pas forcément de solution parce que
matériellement, il n'y avait pas de matériel qui était
adapté à la personne ou parce qu'il n'y avait pas d'aidant autour
pour utiliser ou sécuriser le matériel ou alors parce que,
... pour des raisons financières, là où
éventuellement il pouvait y avoir une solution mais que
financièrement ce n'est pas accessible au patient.
- D'accord.
- Et puis des fois juste parce qu'il n'y a pas de solution.
- Effectivement. Aviez-vous alors
considéré une éventuelle assistance robotique ?
Est-ce-que vous vous êtes dit « Ah peut-être qu'il existe un
robot pour ça... » ?
- Euh non, pas en robot... Une fois, je me suis posé la
question de l'aménagement... enfin on va dire que c'était plus de
la domotique. Mais c'était une patiente qui était en EHPAD et du
coup ce n'était pas envisageable dans un établissement.
- D'accord. Et pourquoi n'avez-vous pas pensé
à la robotique d'assistance ? Enfin peut-être que
vous...
- Parce que je ne connais pas. J'ai jamais vu ce que
c'était et parce que je prends souvent appui sur les distributeurs quand
je dois mettre du matériel en place. Alors bien sûr, je sais des
fois ce que je veux mais on ne m'a jamais proposé ce genre d'aide. Et
puis parce que ça ne m'était pas forcément venu à
l'idée, ça me parait très loin. Voilà.
- Ok, et maintenant avec les connaissances que vous
avez, ou pas d'ailleurs, est ce que vous vous dites que peut être un
robot d'assistance aurait pu aider ?
- J'ai juste lu deux articles. Euh moi j'avais souvent des
gens pour qui il aurait vraiment fallu avoir une aide humaine, après je
ne sais pas ce qu'il existe comme robot d'assistance mais par exemple s'il faut
latéraliser quelqu'un ... je ne sais pas si on a des
robots qui peuvent faire une latéralisation en milieu de journée
des choses comme ça, voilà. Réaliser un transfert,
... bon là ça devient peut être un peu
plus compliqué. Euh oui... je ne sais pas.
- D'accord. Alors justement quel est votre niveau de
connaissance au sujet de la robotique d'assistance ?
- Nul.
- Nul, a lu deux articles c'est ça ?
- Ça se résume à ça.
- Et qu'est-ce-que vous avez vu ?
- J'ai vu que principalement, ... Il y avait
deux choses ... Un, je ne sais pas... on appelle ça les
« Girafe® » ou quelque chose comme ça ? Voilà, du
coup il y avait une interface avec l'écran et du coup communication
possible avec le médecin traitant, la famille, un aidant ou voilà
qui pouvait donc se déplacer et que par exemple si la personne chutait
on pouvait aller voir où elle avait chuté. Après je ne
sais pas si c'est juste une interface de communication ou si la personne peut
appeler quelqu'un et comment elle, elle enclenche le truc. Voilà, je ne
sais pas trop...
- D'accord et vous n'avez vu que le fameux « Girafe®
» ?
- Il y avait ça et j'ai vu un truc où
c'était plus sur une forme humanoïde on va dire. Je sais pas du
tout ce que c'était, il y avait juste une photo. Après je ne sais
même pas si
LXIII
Annexe V-I Entretien ergothérapeute 1
Durée de l'entretien : 40 min
la photo correspondait à celui dont on parlait dans
l'article. Je n'ai pas retenu le nom mais du coup ça faisait plus ou
moins la même chose. Ce n'était pas trop
détaillé.
- D'accord. Parce qu'en fait aujourd'hui il existe
différents types de robots d'assistance. Il y a des robots de
téléprésence, le robot que vous avez vu, le «
Girafe® », rentre dans cette catégorie. Il permet de se
déplacer, il permet aussi à la personne d'explorer son
environnement puisque le robot se déplace tout seul et la personne avec
son écran peut voir ce qu'explore le robot.
- D'accord, il y a un autre écran ?
- C'est ça, ou alors il peut entrer en contact
directement avec la famille, un aidant, un soignant. Ce sont aussi souvent des
appareils qui peuvent détecter des chutes ou d'autres situations de
danger et automatiquement prévenir soit les secours soit des personnes
qui sont préenregistrées. On a aussi des robots d'assistance aux
tâches ménagères, je ne sais pas si vous voyez un peu ce
que c'est, c'est par exemple tout bêtement, l'aspirateur qui passe tout
seul.
- Oui, ça oui : l'aspirateur, la tondeuse, oui
...
- On a aussi les robots qui ont une forme plus humanoïde,
alors ceux-là ce sont les moins développés actuellement,
on n'en rencontre pas pour le moment.
- Non.
- Ceux-là sont développés dans le but,
dans un avenir plus ou moins proche, de tout faire : des transferts,
préparer un repas, etc. Il existe déjà aujourd'hui, alors
pas en France mais au Japon, des robots qui permettent de relever une personne
du sol, qui permettent de réaliser des transferts, qui permettent de
déplacer en sécurité des personnes. Mais voilà,
pour le moment, en France, ça n'existe pas. Et puis, il y a les robots
qu'on appelle compagnons ou de soutien émotionnel et donc là ce
sont des robots qui stimulent les fonctions cognitives de la personne, qui les
divertissent. Et ça, c'est surtout à destination soit des
personnes âgées isolées soit des personnes qui ont des
troubles du comportement. Ce sont des robots qui fonctionnent très bien
avec des personnes autistes. Voilà, et on en retrouve dans certains
hôpitaux français, de ces derniers types de robots pour des tests
et des choses comme ça.
- Et du coup, pour une personne âgée, moi
c'était vraiment ma question, c'est comment la personne
appréhende ce type de matériel d'installation chez elle. Parce
que je pense que ça demande aussi beaucoup de paramétrages de la
part de la famille.
- C'est clair que ça peut être un frein.
- Si la personne est complètement isolée
socialement mais pas juste géographiquement mais vraiment socialement,
on ne peut pas mettre en place ce genre de matériel.
- Oui, complètement. Oui, je pense effectivement que la
famille joue un rôle important là derrière. Si, ...
enfin c'est la prochaine question. En tout cas, il est clair que c'est
un sujet qui prête à la polémique : est-ce que c'est une
bonne chose les robots comme ça, dans la vie des gens, etc. Est-ce-que
déjà c'est efficace... ? Et c'est pour ça que je
m'intéresse à ce sujet d'ailleurs.
- Oui, c'est une bonne question.
- Avez-vous déjà rencontré ou
entendu parler d'ergothérapeutes qui préconisent des robots
d'assistance ? Alors, de tout type ça peut être robot
ménager ou n'importe quoi.
LXIV
Annexe V-I Entretien ergothérapeute 1
Durée de l'entretien : 40 min
- Ben, robot ménager j'aurais plus tendance à
dire oui, ça me parle après je ne saurai pas dire exactement mais
je pense que j'ai déjà dû dire à une famille qu'il
existe des aspirateurs. C'est peut-être même pas forcément
moi mais un de mes confrères et j'ai pensé que c'est peut
être une bonne idée. Dans ce cadre-là effectivement, c'est
ce qui paraît le plus accessible et qui d'ailleurs est rentré dans
le quotidien et dans les mentalités des Français. Le reste non,
hormis un peu de domotique, du contrôle de l'environnement et
après ça dépend jusqu'où on va avec la
domotique.
- Effectivement, il y a une bonne différence entre la
robotique et la domotique. La robotique ce sont vraiment des appareils qui ont
une part d'autonomie dans leur fonctionnement ou alors dans les choix qu'ils
peuvent faire. Mais c'est quand même intéressant que vous me
parliez de domotique.
Selon vous, les ergothérapeutes sont-ils
suffisamment formés ou informés au sujet des robots d'assistance
pour en préconiser ?
- Non, pas du tout. Enfin, moi j'en avais entendu parler mais
pas en tant qu'ergothérapeute. On sait parce que c'est dans l'air du
temps, qu'il y a des films, des séries qui parlent de ça, parce
que j'ai vu aussi deux émissions. L'ère des objets
connectés, je pense que c'est un peu le principe au niveau du recueil
des données, stockage des données, transmission des
données, c'est un peu le même principe et comme c'est en plein
essor, c'est vraiment dans l'ère du temps au niveau des sujets, mais pas
en tant qu'ergothérapeute.
- D'accord. Seriez-vous prête à
préconiser ce genre d'aide à une personne âgée
?
Ça peut être de tout, du fameux robot «
Girafe® » par exemple au robot aspirateur, n'importe quoi.
- À essayer, dans certains cas, pourquoi pas... Oui
parce que je n'ai aucune idée de ce que ça peut être, quel
retour il peut y avoir et que je pense que c'est bien de se faire une
idée en essayant. Après il faut trouver le bon cas, la bonne
situation. Par exemple pour un robot d'assistance c'est...
- ... Après c'est comme tout, c'est
comme une aide technique par exemple, elle est vraiment destinée
à une personne, à une situation...
- Oui, tout à fait, il y a un cahier des charges
effectivement.
- D'accord. Dans quelle mesure le coût d'une
aide technique préconisée par un ergothérapeute,
influence-t-il son acceptation par la personne ?
- C'est quasiment un des premiers critères.
- Un des premiers ?
- Oui. Chez moi ça va être le premier ou le
deuxième. Le deuxième c'est-à-dire que le premier on
regarde quand même si ça apporte une efficacité, que
ça aide quand même. Mais la question du prix vient ...
en tout cas moi les patients que je vois... c'est vraiment un
frein.
L'autre jour j'ai un patient, je leur annonçais un
dépassement de 20€ pour un déambulateur, ils ont dû en
parler en famille pour voir si c'était bon et la fille a dit « je
te donne les 20€ »...
- D'accord.
- Pour 20€ quoi !
- C'était des personnes qui étaient plutôt
dans le besoin ou pas vraiment ?
LXV
Annexe V-I Entretien ergothérapeute 1
Durée de l'entretien : 40 min
- J'en sais rien, je n'ai pas leurs relevés...
sûrement, oui ! D'après ce que j'ai vu oui, ils ne roulent pas sur
l'or.
Après moi je vois des gens, la plupart des gens qu'on
voit à l'équipe mobile sont des gens qui se retrouvent en
difficulté, dans des situations particulières, de
détresse, on ne voit pas les gens qui vont bien. Et c'est vrai qu'il y a
le critère de l'isolement social qui est souvent lié à un
faible niveau de revenu. Ce n'est pas que c'est lié, mais on a beaucoup
de gens qui ne roulent pas sur l'or. Des personnes âgées qui sont
veufs ou veuves, beaucoup qui ont été ouvriers, artisans et qui
n'ont pas beaucoup de retraite. Pas forcément de famille autour pour
aider à financer du matériel. Oui, c'est vraiment un frein
énorme !
- D'accord.
- Si, c'est un frein, parce que pour un fauteuil il faut
quasiment toujours viser un fauteuil au LPP, que les options, vraiment, si on
en choisi, faut vraiment montrer au patient ce que ça peut lui apporter
et puis sinon pas d'option... Mais que ce soit pour le matériel ou pour
les aides humaines ! Tu es en train de revoir les plans d'aides avec les
assistantes sociales du Conseil Général, où est-ce qu'on
peut gratter une demi-heure par ci... C'est pour ça aussi je vous dis
des fois ce qu'il manque c'est l'aide humaine parce que la personne a des
escarres, on me demande de mettre en place du matériel pour la
prévention des escarres, donc on fait un bilan, on va mettre des
coussins pour latéraliser et qui c'est qui va latéraliser le
patient ? Et s'il n'y a plus d'argent pour financer les aides et qu'il est au
taquet de son plan d'aide, on n'a plus personne pour latéraliser le
patient. Donc voilà, là aussi c'est de nouveau un frein à
l'aide.
- D'accord, donc une aide technique peut être
refusée à cause de son prix malgré qu'elle soit l'aide
technique idéale...
- ...Oui !
- D'accord.
Dans quelle mesure la famille/l'entourage/le ou les
aidant(s), influence(nt) l'acceptation et l'utilisation des aides techniques
proposées ?
- Déjà parce qu'ils vont plus rationaliser...
Enfin, quand il y a des troubles cognitifs, ça peut être rassurant
pour le patient d'avoir l'aidant, la famille avec lui au moment où on
fait l'essai et où la décision est prise de mettre en place du
matériel. Ils vont permettre l'utilisation du matériel en
sécurité... Ils vont peut-être, justement, aider à
financer le matériel. Voilà, ils sont parfois un peu garant de
l'utilisation, être sûr qu'il pense à l'utiliser,
correctement. Et puis des fois ce sont eux qui sont demandeurs du
matériel, ce n'est pas des fois directement le patient...
- ... Pour les soulager eux c'est ça
?
- Oui voilà ! Parce que j'ai souvent des demandes des
SSIAD ou des différents organismes qui interviennent à domicile
pour justement mettre en place du matériel parce qu'elles ne se sentent
plus très sûres pour un type de transfert et du coup le fait que
ce soit les professionnels ou les gens qu'ils connaissent qui demandent
à ce qu'on mette en place une aide... souvent le patient lui-même
ne va pas y penser, du coup ça légitimise aussi un peu la mise en
place du matériel.
LXVI
Annexe V-I Entretien ergothérapeute 1
Durée de l'entretien : 40 min
- D'accord. Selon vous, quels sont les freins à la
préconisation de robots d'assistance ? Quelles sont les raisons qui font
qu'un ergothérapeute n'en préconise pas ?
- Déjà parce qu'il ne connaît pas, parce
que ce n'est pas forcément, en gériatrie, le public auquel on
penserait en premier pour mettre des robots en fait. On verrait ça plus
vers un public jeune. L'acceptation du matériel par le patient, le
coût que ça peut avoir, je pense que ce n'est pas gratuit....
- ... C'est même très cher...
- ...J'ai vu un article justement, peut être qu'un jour
ça passera au titre de l'APA. Après ce n'est pas tout le monde,
j'ai des gens pour qui y'a pas de soucis financiers mais quand t'as des gens
qui ont du mal pour 20, 30€, enfin voilà, on est hors sujet
complètement.
- Oui effectivement, complètement...
- Voilà, les principaux freins c'est ça.
- D'accord.
- Surtout qu'on ne connaît pas... Moi je ne connais pas
je ne mets pas en place.
- Oui... et vous pensez qu'une personne âgée
pourrait avoir des difficultés à accepter un robot ou la
technologie en général ?
- Mais c'est pour ça que je disais tout à
l'heure que j'aimerais bien faire l'essai parce que je n'en ai aucune
idée en fait. Je n'arrive pas à me situer par rapport à
ça et j'ai juste un retour par... enfin, ce n'est pas un robot mais j'ai
vu une conférence qui parlait de la télémédecine et
du coup effectivement c'était une équipe mobile...
l'équipe mobile de plaie/cicatrisation sur Bordeaux qui...
- De quoi ?
- De plaie-cicatrisation, une équipe
spécialisée dans la cicatrisation de plaies, d'escarres, tout
ça... et du coup, y'a des médecins, des infirmières, des
ergos, une diet' généralement et là en fait ils
étaient souvent appelés sur des EHPAD qui dépendaient du
CHU de Bordeaux et ils ne pouvaient pas aller partout donc ils faisaient en
télémédecine. C'est-à-dire qu'ils avaient sur place
une infirmière avec le chariot et sur le chariot l'ordi', la webcam et
eux ils étaient de l'autre côté, sur leur hôpital et
ils parlaient via un écran au patient. Et ils disaient qu'ils avaient un
retour hyper positif en fait, une très bonne acceptation des patients
âgés de l'interface écran, qu'ils étaient assez
surpris de ça, que ça passait relativement bien, qu'ils avaient
aucun problème pour parler justement à la personne, à
l'infirmière ou au médecin qu'elle voyait à l'écran
et que y'a aucune appréhension... Donc voilà, juste ça
comme retour par rapport à un écran. Après, être
dans un milieu médical, enfin en EHPAD, avec une infirmière qui
apporte un ordinateur, quelqu'un qui parle sur l'écran d'ordinateur et
avoir un robot avec un écran ou alors une forme humanoïde, y'a
quand même une différence... Mais bon, voilà, je serais
curieuse effectivement de voir ou d'avoir un retour... Je n'en ai aucune
idée en fait, je ne sais pas si ça peut être un frein ou
pas.
- D'accord, ok. Donc : méconnaissance, acceptation par
la personne âgée et coût.
- Oui, principalement. Et l'entourage, pour gérer
ça. Je pense que ça marche sur batterie... est-ce que le robot va
se charger tout seul ?
- Souvent oui...
LXVII
Annexe V-I Entretien ergothérapeute 1
Durée de l'entretien : 40 min
- Quand je vois aussi... c'est un exemple mais depuis peu on
peut faire des demandes en EHPAD sur le logiciel « ViaTrajectoire »
... C'est-à-dire que maintenant y'a plus besoin d'aller
chercher des dossiers et de les envoyer un par maison de retraite donc les
familles vont sur internet et cochent les maisons de retraite et voilà.
Et donc y'a la partie médicale qui est à remplir par le
médecin. Et moi j'ai eu récemment deux familles qui m'ont dit
avoir eu un refus du médecin traitant de leur parent qui ne voulait pas
remplir la partie médicale sur internet car trop compliqué. Ils
préféraient remplir le format papier.
- Ah oui ? Trop compliqué ? D'accord, donc ça
pourrait même être un frein au niveau des professionnels ?
- Voilà, donc si on en est à avoir peur de
remplir quelque chose sur internet... Parce que du coup il faut que ce soit
accepté par la famille, mais c'est aussi quelque chose qu'on impose
aussi du coup à tout le réseau socioprofessionnel qui entoure le
patient. Donc si c'est un choix de la famille mais que le médecin
traitant par exemple ne suit pas derrière... Après tout
dépend de ce que c'est comme robot ! Si c'est un robot qui n'a rien
à voir avec le médecin... Après le médecin peut
aussi venir en dehors mais...
- Oui je comprends. Avez-vous des questions sur lesquelles
vous voulez revenir, ou pas ?
- Non, pas particulièrement. Après moi j'avais
des questions... Vous, avez-vous déjà vu des robots... ?
- Oui, j'en ai vu sur Paris lors des 4e
Journées Annuelles de la Société Française des
Technologies pour l'Autonomie et de Gérontechnologie. J'en ai vu
plusieurs. Il y avait un robot qui s'appelle Kompaï®, qui ressemble
grosso-modo au robot « Girafe® », donc de
téléprésence ; il y avait aussi Paro®, c'est un robot
bébé phoque, je ne sais pas si vous avez vu ça sur
internet ? Il est destiné à des personnes âgées ou
à des personnes qui ont des troubles du comportement. Y'a un tas
d'études qui ont été faites au Japon, y'en a aussi qui
sont menées en France actuellement, c'est un robot qu'on retrouve dans
plusieurs établissements français et apparemment ça fait
des « miracles » : ils donnent beaucoup moins de médicaments
aux personnes, elles sont moins stressées, elles ont moins de troubles
du comportement, elles sont beaucoup plus sociales, s'ouvrent vers les
autres...
- En gros ça a une fonction un peu comme un animal de
compagnie ?
- C'est un peu ça. D'ailleurs au Japon il y a des
foyers qui remplacent leur animal de compagnie par un robot comme ça.
Ça se discute ou pas mais...
- ... Oui bien sûr, après il y a
tout le côté éthique. Est-ce que d'une part, les robots,
s'il y a du recueil d'information de la part du robot, où vont ces
informations, qu'est-ce qu'on en fait... ?...
- ... qui les reçoit... ?...
- Et puis l'emploi humain ? Si on remplace tout par des
robots, qu'est-ce qu'on va faire ? Y'aura bientôt des ergos robots...
Après il y aura forcément des limites. Comment
un robot peut-il vraiment tenir compagnie à une personne
âgée ? Comment il peut tenir une conversation... qui a du sens
?
- C'est sûr, ça pose question.
LXVIII
Annexe V-I Entretien ergothérapeute 1
Durée de l'entretien : 40 min
- Justement dans une émission que j'avais vue ils
parlaient, alors, c'était plus dans le futur..., qu'il pouvait avoir un
recueil de tout, des comptes, des réseaux sociaux sur lesquels le
patient a été dans sa jeunesse et qu'il pouvait, comme tout est
gardé..., ça permettait au robot d'avoir une discussion qui
était vraiment personnalisée avec la personne car il avait toutes
les données de la vie de la personne. Donc ça fait un peu peur
!
- Ça fait effectivement peur.
- Mais en même temps ça me parait tout à
fait réalisable vu que toutes les données sont
stockées...
- ... Il existe déjà,
actuellement, des robots capables de tenir une discussion. C'est tout à
fait cohérent, il y a peut-être simplement un petit temps entre ce
que nous on dit et sa réponse et ce ne sont pas des phrases très
compliquées, mais c'est cohérent. Le robot semble comprendre.
- Et après, est-ce qu'il peut tenir une conversation
avec une personne démente ?
- Honnêtement, je ne sais pas.
- Parce que ça aussi ça peut être un frein
: s'adapter à la pathologie de la personne. Si la personne à une
dysphasie ou une aphasie, comment le robot va pouvoir comprendre la
communication ? Y'a plein de choses. Après je ne doute pas qu'avec de la
reconnaissance faciale... bon après on est déjà dans
l'imaginaire !
- Ben en fait pas du tout, la reconnaissance fa...
- Enfin non, pas dans l'imaginaire, mais je veux dire dans
l'application là...
- Effectivement, pour le moment ça n'est fait
qu'à titre expérimental.
- Je sais qu'il n'y aura pas forcément de limite
technologique. C'est plutôt nous, qu'est-ce qu'on met comme limite.
- Oui c'est ça, parce qu'il faut en mettre...
- Oui ! Moi je n'ai pas envie quand je serai vieille d'avoir
que des robots autour de moi. Après je ne sais pas... C'est pareil,
après on a un retour des personnes âgées quand on est
à domicile, quand on a à faire avec une personne, elle a son
caractère, ça se passe pas toujours bien avec les aides humaines,
que ça se passe pas toujours très bien avec l'auxiliaire... et
qu'un robot c'est neutre, il peut s'adapter, mais voilà, dans quelles
mesures c'est bien ? J'ai pas envie que tout soit robotisé parce que je
ne pense pas que ce soit bien. Je pense qu'il faut que l'humain s'occupe de
l'humain. Après je peux comprendre certains arguments pour la mise en
place de ces aides.
- Ok. Alors, peut être que ça vous rassurera : au
cours des conférences auxquelles j'ai assisté pendant les
journées dont je parlais tout à l'heure et sur les
différents articles et études que j'ai lu, le robot n'est pas
là pour remplacer l'humain, il y aura toujours un humain à
côté, c'est simplement une assistance, un petit plus, qui va
rendre la personne disponible.
Parce que par exemple, l'aidant humain n'est pas toujours
là, auprès de la personne. Donc, au cours de ces périodes
où l'aidant humain n'est pas là, le robot serait là pour
solliciter la personne, pour l'accompagner et surtout pour la rendre disponible
quand l'aidant humain arrive. Ça permet de l'éveiller. Dans tous
les cas ce ne serait pas un remplacement. Ce ne serait pas « on met un
robot en place pour qu'on puisse supprimer l'aide humaine ». Enfin,
j'espère en tout cas, ce n'est pas l'objectif.
LXIX
Annexe V-I Entretien ergothérapeute 1
Durée de l'entretien : 40 min
- Après je me dis effectivement que si le patient...
c'est quoi le frein qui fait qu'il n'y ait pas plus d'aides humaines à
la maison ? C'est le frein financier. Donc si un robot est mis en place, il
n'est pas mis en place gratuitement. C'est financé quelque part. C'est
financé ou c'est acheté. Alors après, effectivement,
ça permet d'avoir, plutôt que d'avoir la même personne toute
la journée à domicile, ça permet d'avoir un roulement,
mais ce serait possible d'avoir techniquement des gens avec eux. Il y a aussi
des équipes de nuits, ça s'organise ! Mais après ce serait
peut-être plus facile d'avoir accès à ces aides-là.
Enfin je ne sais pas, je n'en ai aucune idée.
- Pour le moment il n'y a pas d'aides, rien du tout.
- Oui...
Mais c'est sûr qu'on a souvent comme frein, on a des
gens qui sont plus ou moins autonomes mais qui ont des troubles du comportement
ou des troubles cognitifs, qui peuvent se mettre en danger et du coup on va
essayer de multiplier les passages dans la journée mais entre les deux
c'est au petit bonheur la chance. Après, le robot ne va pas
empêcher de tomber mais...à explorer effectivement, c'est une
bonne question !
- Et bien j'ai terminé, à moins que vous ayez
une question, une remarque, quelque chose à dire...
- Non, pas particulièrement, comme dit je n'avais pas trop
d'informations...
- ...Ah non mais c'est normal !
- Je ne pense pas que vous trouviez beaucoup de...
- Je ne pense pas non plus, c'était prévu, je m'y
attendais un petit peu.
- Mais c'est bien de soulever la question !
- C'est surtout qu'effectivement, c'est un sujet très
polémique, on pourrait en parler pendant des heures... C'est très
intéressant. En fait tout cela part d'un constat à la base. C'est
que quand on lit des articles, qu'on entend parfois les gens parler on entend
que la robotique d'assistance c'est vraiment l'avenir, ce sont des solutions
géniales qui fonctionnent... et pourtant je n'ai jamais vu un
ergothérapeute parler de ça. Et du coup je me posais la question.
Est-ce que certains ergothérapeutes en préconisent...
- Ben je pense déjà que l'accès au
matériel et le prix, c'est quand même un frein énorme ! Moi
je vois le casse-tête que c'est pour trouver du matériel pas cher
qui corresponde à la LPP ou alors pour faire un dossier de financement,
faire des courriers aux mutuelles ou aux assistantes sociales pour avoir des
remboursements... c'est une grosse partie de mon travail !
- Oui complètement !
- Donc là on est trop cher. Après c'est
sûr, pour faire réduire un prix il faut que le produit soit
démocratisé.
- Effectivement. Mais avant d'accepter ça en France....
- ... Je pense par des établissements
ou des choses comme ça, peut être que ça peut venir, mais
chez le particulier...
- Oui, car par exemple, le robot bébé phoque
coûte 5.000€ actuellement, donc effectivement...
- C'est clair, par rapport à un chat !
Bon c'est sûr qu'il n'aura pas de maladie, il ne va pas
mordre les gens, y'aura pas besoin de le faire vacciner mais bon...
LXX
Annexe V-I Entretien ergothérapeute 1
Durée de l'entretien : 40 min
Je pense que c'est intéressant mais effectivement, toute
l'histoire des données là, moi
ça m'interpelle pas mal, parce que y'a des données
médicales...
- C'est intéressant que vous le souligniez !
- J'avais vu dans un article là, je ne sais pas si c'est
« Girafe® » ou un autre, qu'il avait
une reconnaissance faciale qui lui permet de voir si la personne
a mal...
- Oui c'est ça, il me semble que « Girafe®
» le fait.
- Après je ne sais pas, par exemple la prise de tension ou
un truc comme ça soit doit se
rajouter en plus...
- Oui, il le fait aussi...
- Et après où vont ces données ? Est-ce
qu'elles sont stockées uniquement dans le
robot ? Et le robot est forcément connecté à
l'extérieur donc qui a accès à ces
données ? Il faut bien qu'elles soient transmises à
un moment donné. Est-ce que le
médecin reçoit un bip sur son ordi, il faut que le
médecin soit aussi connecté si y'a un
problème de tension ou quoi que ce soit ? Et puis
qu'est-ce qu'on fait derrière ? Est-ce
que le médecin peut techniquement aller voir tous ses
patients qui ont une hausse de
tension ou alors le médecin envoie un ordre au robot lui
disant de lui donner tel
cachet ?
- D'accord.
- Bref.
- Intéressant ! Eh bien merci beaucoup !
- Euh... si jamais... s'il est possible d'avoir un retour...
- Absolument ! J'allais vous le proposer.
- Je veux bien.
- Je pourrai vous envoyer mon mémoire, à
l'état final.
- Si ça ne vous dérange pas...
- Pas du tout, il sera disponible à qui le veut !
LXXI
Annexe V-II Entretien ergothérapeute 2
Durée de l'entretien : 50 min
Annexe V-II : retranscription de l'entretien
effectué avec l'ergothérapeute 2
(Afin de garantir l'anonymat de la personne interrogée,
les informations pouvant permettre de l'identifier ont été
remplacées par « [xxx] »).
Enquêteur / Ergothérapeute
- Quel âge avez-vous ?
- J'ai 40 ans cette année.
- D'accord. De quel IFE venez-vous ?
- Nancy.
- Nancy.... Et depuis-combien de temps exercez-vous ?
- 99. Donc ça va faire 16 ans cette année.
- Ok. Quels ont été tous vos lieux d'exercice ?
- Alors... en maison de retraite pour commencer où
j'étais ergothérapeute et animatrice
et hôpital pour personnes âgées, donc à
[xxx], le Centre pour Personnes Âgées de
[xxx] où je suis allée dans tous les services :
moyens séjour, Hôpital de Jour, long
séjour. Ensuite je suis allée à
l'hôpital de [xxx] où j'étais particulièrement en
Hôpital
de jour, court séjour et long séjour et
j'intervenais ponctuellement pour l'équipe
mobile de soins palliatifs. Et maintenant Unité Mobile de
Gériatrie.
- Ok. Donc avec les personnes âgées...
- ... Uniquement oui !
- D'accord. Avez-vous déjà
préconisé des aménagements de domicile à
une
personne âgée isolée afin de
favoriser son maintien à domicile ?
- Oui.
- De quel(s) type(s) ?
- De plein de types. Aménagement de domicile ça
peut passer de la main courante à
mettre dans les escaliers, à la sécurisation des
appareils électroménagers, la mise en
place d'alarmes anti feu ou pour le monoxyde de carbone ou la
mise en place d'un lit
médicalisé pour sécuriser les transferts,
mise en place de guidons, mise en place de
chaise percée pour la nuit, mise en place de barres dans
la douche, dans la salle de
bains, sécurisation de la salle de bains, mise en place de
plateforme élévatrice pour
l'extérieur, amélioration de l'accès
extérieur.... C'est mon lot quotidien !
- Ok. Donc ça se sont en fait plutôt pour les aides
techniques...
- Oui.
- Et est-ce qu'il y a plutôt des
aménagements architecturaux ? De domicile ?
- Des aménagements architecturaux, bien sûr ! Le
fait de pratiquer des aménagements
de salle de bains. Il veut casser la baignoire et mettre une
douche...oui ! Je fais aussi
des cahiers des charges pour demander des subventions de la part
de l'ANAH, de la
part du Conseil Général, de la MDPH.
- D'accord.
LXXII
Annexe V-II Entretien ergothérapeute 2
Durée de l'entretien : 50 min
Vous êtes-vous déjà sentie
démunie face à une situation pour laquelle il ne semblait y avoir
aucune solution pour favoriser le maintien à domicile d'une personne
âgée isolée ?
- Oui, plein de fois !
- Et c'était dans quelles situations ?
- Dans les situations dans lesquelles les gens ne se rendent
pas compte des risques qu'ils prennent. Quand ils vivent au quotidien dans leur
maison, qu'ils sont habitués, qu'ils ont toujours fait comme
ça... Donc y'a une grande différence entre l'inquiétude de
l'entourage, l'évaluation ergo où on peut se rendre compte
effectivement qu'au niveau fonctionnel il y a des troubles qui
nécessitent du matériel à mettre en place ou une
surveillance ou une aide humaine et où les personnes ne se rendent
absolument pas compte des risques qu'elles prennent et du coup on peut faire
toutes les préconisations qu'on veut, ça ne fonctionne pas. Donc
là oui, je me sens complètement démunie et je n'ai pas le
pouvoir de les faire changer d'avis. Ça leur appartient.
- D'accord. C'est essentiellement ce problème en fait
?
- C'est essentiellement ce problème, après il y
a aussi le problème architectural, en clair de l'environnement. Quand
j'étais sur [xxx] je faisais beaucoup de visites dans les maisons des
mines. Les maisons des mines ce n'est juste pas fait pour des personnes
âgées qui ont des difficultés à monter les escaliers
! Et voilà et en fait, les difficultés sont très souvent
financières parce que les gens qui sont dans les maisons des mines ne
paient quasiment rien au niveau du loyer et on ne peut pas leur demander de
déménager parce que financièrement ils n'ont pas les
moyens de déménager. Donc là c'est architecturalement
où c'est un vrai problème parce que tu as une pièce ou
deux par étage, c'est terrible pour eux de vivre dans une seule
pièce. Y'en a qui le font...
- ... Tout est très étroit et
en hauteur ?
- Tout est très étroit et à chaque fois
t'as des escaliers pour aller d'un endroit à un autre, donc là
les patients peuvent très bien se rendre compte des difficultés
mais je ne peux pas enlever les escaliers, ce n'est juste pas possible ! Et
mettre une plateforme élévatrice à chaque escalier c'est
vraiment pas possible !
- Clairement ! Ok...
- .... Après y'a des familles qui bloquent aussi. Y'a
des situations où la personne est en demande et par contre c'est
l'entourage qui refuse parce que l'entourage considère que par exemple
la personne serait mieux en maison de retraite.
- D'accord.
- Et là je suis démunie aussi ! Parce que ce
n'est pas dans le même sens mais les préconisations que je peux
faire ne sont pas entendues et ne sont pas mises en place par la famille, qui
là, est toxique par rapport au projet de vie de la personne.
- Oui complètement...
- Donc y'a dans tous les sens mais... ce sont des
systèmes complexes ! On n'a pas affaire à une personne toute
seule, alors...souvent quand elle est isolée oui, d'accord elle est
toute seule, mais on n'a pas de pouvoir par rapport aux troubles cognitifs, par
rapport aux finances, là on n'a pas de pouvoir !
- Oui !
LXXIII
Annexe V-II Entretien ergothérapeute 2
Durée de l'entretien : 50 min
- On peut préconiser un tas de choses ! Moi je peux
préconiser une aide 24h sur 24 ! Après... qui est-ce qui paie ?
Et on ne peut clairement pas se reposer sur les subventions du Conseil
Général ! À savoir qu'un GIR 2 c'est trois fois une
demi-heure par jour... ça ne permet pas à quelqu'un qui est tout
seul de vivre correctement. Donc c'est tout ça.
- D'accord. Aviez-vous dans certaines de ces situations, ou
d'autres peut être ou ça aurait été possible,
aviez-vous considéré une éventuelle assistance
robotique ?
- Hmm... Pour le moment non...
- Après, dans les situations que vous m'avez
décrites là, ça n'a pas forcément de lien...
ça ne remplacera pas un escalier ou quelque chose comme ça, mais
est-ce que dans certaines situations qui posaient problème, aviez-vous
considéré la robotique d'assistance ?
- Non ! À aucun moment je n'ai pensé à la
robotique... Parce qu'en gériatrie c'est compliqué... Ne
serait-ce que la domotique est compliquée, parce que ça ne fait
clairement pas partie de leur façon de vivre. À savoir que ce
sont des gens qui n'avaient pas du tout accès à cette technologie
à l'époque. Déjà moi ma génération...
Voilà, je suis la génération « X », je ne suis
pas la génération « Y » et tout ça c'est
compliqué. C'est compliqué pour nous... j'ai déjà
vu quand j'étais en stage, des maisons entièrement
domotisées, j'ai trouvé ça formidable, c'était
utilisé par un paraplégique de 30 ans, voilà, j'ai
trouvé que c'était effectivement l'outil indispensable pour ce
genre de personnes, qui s'est appropriée très facilement la
domotique. Après la robotique, pour moi c'est un vaste... un vaste truc
qui a des difficultés à me parler à moi, à savoir
que même les aides techniques c'est compliqué en gériatrie.
Même les aides techniques ! Je prends par exemple l'enfile-bas de
contention : moi je le conseille que très rarement. Parce qu'en fait, ce
n'est pas seulement l'autonomie de la personne qui compte, finalement en
gériatrie... Et moi je suis dans une niche hein !... c'est de la
très grande gériatrie. Nous nos patients ont en moyenne 87
ans...
- ...Ah oui !
- En moyenne... donc ils sont très
âgés.
Donc clairement je ne suis plus dans l'aide technique qui fait
qu'ils soient autonomes après. Moi je suis dans la surveillance, dans le
« faire pour », dans « être avec », dans «
rompre l'isolement », vous voyez ? Je ne suis pas dans la
rééducation...
- ...Bah ça tombe bien, c'est le sujet de mon
mémoire !
- Je vais dire... plus du tout ! Vraiment pas ! C'est vraiment
autre chose, c'est au-delà de tout ça. Donc pour moi, quand je
conseille des aides techniques, c'est rarement des aides techniques qui font
que la personne est autonome avec. Ce sont des aides techniques qui sont
utilisées par un tiers pour que la situation soit plus confortable, par
la soignante, enfin pour l'aidant et pour mon patient. Très rarement
pour qu'il soit autonome. Après, j'en conviens qu'il y a des personnes
qui demandent à être autonomes. C'est compliqué, c'est
franchement compliqué ! Parce qu'il y a de multiples pathologies en
gériatrie ! Et tu ne peux pas passer à côté de
ça. Tu peux leur faciliter juste un petit truc et en fait il va y avoir
autre chose. Les personnes qui souffrent de démence, elles pourraient
encore très bien faire la cuisine, si elles avaient
LXXIV
Annexe V-II Entretien ergothérapeute 2
Durée de l'entretien : 50 min
quelqu'un qui surveille ce qu'elles font... Si elles ont un
appareil qui détecte la fumée si elles ont encore le gaz, etc.
C'est vraiment des choses qui sont très compliquées à
mettre en place à domicile et moi en plus dans ma façon de
travailler à l'UMG, on va chez les gens faire une évaluation, en
fait c'est une « consultation », on va chez les gens,
j'évalue, je conseille, je préconise et je m'arrête
là.
- D'accord.
- Donc je ne fais pas de suivi et je n'y retourne pas 10 fois.
Si je considère qu'il faut que j'y retourne parce que tout ce que j'ai
évalué ça fait beaucoup trop... là cet
après-midi j'ai fait une visite de 2h30 ! C'est énorme pour les
gens ! Moi je suis rétamée après mais ça ce n'est
pas grave... ça n'empêche que c'est trop pour les gens ! Alors
parfois je vois à leur comportement que c'est trop, alors j'y retourne.
Mais je n'y retourne pas pour un suivi ou pour les aider à mieux
utiliser le Rollator® par exemple que je viens de préconiser. Ce
n'est pas mon job. Donc forcément c'est compliqué. Et
effectivement la robotique ça pourrait amener ça. Mais pour le
moment... ça ce sont des idées de la génération
« Y » quoi ! Nous on ne pouvait pas avoir ce genre d'idées !
Ce n'est pas possible ! Pour nous les robots c'est « Transformers
» quoi !
- Oui je vois, ce n'est pas du tout concret, réel,
quotidien.
- Oui complètement et ce qu'on peut voir des images
de...comment ça s'appelle, la super structure... l'exosquelette, c'est
robotisé ça aussi ! Mais ça me parait totalement hors de
portée par rapport à mes petits papys et mamies, qui sont
très vieux ! Et un exosquelette mais c'est hypra cher ! Mais ce sont de
supers innovations, des supers idées, c'est là-dedans qu'il faut
aller c'est sûr, sauf que faut pas oublier l'humain.
- Complètement !
- Et là moi je suis... C'est pour ça que
l'histoire de...du truc de l'innovation, j'avais peur que tout tourne autour de
la technologie « c'est formidable... », oui... mais faut pas oublier
que nous ne sommes pas des machines triviales ! Nous sommes des humains et que
nos personnes âgées, je ne peux parler que d'eux..., elles n'ont
pas besoin que de matériel autour d'elles, elles ont besoin d'humains,
clairement !
- Tout à fait. Ok, intéressant !
Quel est votre niveau de connaissance au sujet de la
robotique d'assistance ? - Ben je pense qu'elle est nulle...
- Oui...
- Parce que je ne vois pas trop, je pourrais peut être
me dire c'est genre... je ne sais pas si c'est ça, par exemple les
semainiers qui bipent, qui font rappeler à la personne qu'il faut
prendre un médicament ou... l'autre fois...on va avoir une
réunion là avec un des revendeurs du phoque Paro®...
- Oui...
- Moi je ne sais pas de quoi... ça me paraît
complètement... absurde, enfin voilà, je suis assez
intéressée mais...
- C'est quelqu'un qui vient ici vous présenter ça
?
- Oui. Mais on fait des trucs nous ergos, on n'est pas
complètement que à la ramasse ! Mais je ne sais pas... Moi j'ai
vu la plaquette... Une collègue a contacté un des revendeurs et
on va le rencontrer le 1er juin. Voilà. Donc c'est
très bizarre pour moi !
LXXV
Annexe V-II Entretien ergothérapeute 2
Durée de l'entretien : 50 min
- Et est-ce que vous connaissez un peu Paro® ? Parce que
forcément vous avez lu la plaquette, j'imagine ?
- J'ai lu la plaquette...
- Et du coup ?
- Du coup, ce que j'en sais, c'est qu'il s'adresse à
des gens étiquetés « Alzheimer », donc
difficulté pour parler, difficulté pour s'exprimer, gros troubles
cognitifs et apparemment, à ce que j'ai compris, y'a eu un travail sur
le physique de ce phoque avec une tête plus ronde pour qu'il soit plus
agréable à regarder, pas agressif...c'est ce que j'ai compris...
ils ont agrandi les yeux, ils ont rétréci la bouche, etc. Ils ont
pris un phoque parce que ça n'avait pas de référence
agressive, à aucun moment par exemple comme un chat ou un chien qui peut
provoquer chez certaines personnes une peur... c'est vrai y'a des gens qui ont
très peur des chats, y'a des gens qui ont très peur des chiens,
voilà, donc ils ont pris totalement autre chose, un bébé
phoque, blanc et à ce que j'ai vu sur la photo il réagit au
niveau de son visage. Donc il était pris dans le bras de quelqu'un et
j'ai vu qu'il avait les yeux fermés. Alors... je ne sais pas...
ça m'interroge !
- D'accord.
- Vraiment !
- Il bouge les nageoires aussi !
- Ah d'accord ! Mais je ne sais pas ce que ça peut
apporter mis à part le fait que, moi ce qui m'a fait, moi ce que j'ai vu
comme référence quand j'ai vu ça, c'est que quand tu te
balades dans les services qui ont beaucoup de personnes qui sont très
atteintes de démence, souvent elles ont des peluches. Les dames...
alors, moi j'étais toujours un peu étonnée. Alors
voilà, les peluches qu'on leur met dans les mains, qu'elles caressent...
je comprends, je ne suis pas complètement débile je pense, mais
je comprends le fait d'avoir quelque chose qu'on peut caresser, surtout que ce
sont des gens, faut quand même dire ce qui est, on ne les touche plus que
pour faire leur toilette, qui n'ont plus du tout le contact que nous on peut
avoir ou dans un couple ou même dans une famille où on est pris
dans les bras... Donc ça je comprends très bien que ça
peut manquer. Donc c'est ce que je disais en manutention, il faut avoir de la
tendresse... j'ai plus le droit de le dire mais je le pense. Je le pense
très fort parce que je pense effectivement que c'est quelque chose qui
manque de façon cruciale à nos personnes âgées et
quand je dis qu'il faut de l'humain, c'est là aussi qu'il faut de
l'humain et que les institutions déshumanisent les choses. C'est pour
ça que moi j'aurais plus envie de travailler sur l'humain dans les
institutions que plutôt rajouter des robots hors des institutions. Donc
voilà, ça c'est vraiment ma façon de voir. Après si
on peut rajouter un robot qui a des compétences relationnelles que la
personne qui a des troubles relationnels, une aphasie, une agnosie, enfin,
quelque chose qui la met en situation de fort handicap au niveau relationnel,
c'est formidable ! Mais je ne demande qu'à voir ! ça m'interroge,
ça m'intrigue, ça m'interpelle !
- Je comprends, je comprends... d'accord. Alors en fait,
concernant la robotique d'assistance, il y a plusieurs types de robots. Il y a
les robots par exemple comme Paro®, qui sont des robots de soutien
émotionnel, robots sociaux ou robots compagnons encore on les appelle...
et ils sont là justement pour divertir la personne,
LXXVI
Annexe V-II Entretien ergothérapeute 2
Durée de l'entretien : 50 min
pour la rassurer, pour la stimuler aussi cognitivement, etc. Tout
dépend des robots,
Paro® ne fait par exemple pas tout ça !
- Oui voilà, un bébé phoque ne peut pas
stimuler cognitivement quand même !
- Non mais par exemple, il y a des études qui ont
été menées sur Paro® et ils se sont
rendu compte que sur des personnes atteintes de la maladie
d'Alzheimer, qu'avec
Paro® ils prescrivent moins de médicaments, les gens
ont moins mal...
- ... Oui ça agit sur les troubles du
comportement !
- Oui et les personnes sont aussi plus ouvertes aux autres.
- D'accord !
- Elles ne sont pas tournées uniquement vers ce robot. Eh
bien, pour l'avoir déjà testé,
j'étais aux Journées Annuelles de la
Société Française des Technologies pour
l'Autonomie et de Gérontechnologie, à Paris,
où il y avait pas mal de robots, il y avait
Paro® et je me suis rendu compte que ce n'était en
fait pas qu'une simple peluche. Il y
a un véritable retour...
- ... Il y a quelque chose qui se créait,
il y a une véritable relation ?
- Oui voilà, j'étais très sceptique au
départ, je me suis dit « qu'est-ce que c'est que cette
chose ? »... et en fait il y avait deux Paro® sur la
table et tous les gens qui passaient à
proximité, faisaient du bruit,
etc. et les « bébés
phoques » répondaient à ces
stimulations. Par exemple, levaient la tête quand quelqu'un
passait. Alors, forcément,
les gens se rapprochent, sont curieux...
- Ça intrigue...
- Oui et tout le monde, tout le monde, commence à leur
parler directement « Comment
ça va Paro® ? ». Vraiment tout le monde,
c'était incroyable.
- C'est dingue !
- C'est quelque chose qui m'a vraiment surpris... Après je
l'ai testé un peu plus, je l'ai
pris dans mes bras, je l'ai caressé un peu pour voir
comment ça réagit et, au bout d'un
moment, bien que je ne souffre pas de démence, on se
laisse prendre au jeu et on
oublie totalement que c'est un robot.
- D'accord, ok...
- Après on peut se poser des questions : est-ce que ce
n'est pas tromper la personne ou
quelque chose comme ça...
- Bien sûr, bien sûr !
- Mais n'empêche qu'il y a quelque chose...
- C'est intrigant !
- Il y a une relation qui s'installe.
- Et les autres robots c'était quoi ?
- Il y a aussi des robots d'assistance aux tâches
ménagères.
- Oui... ?
- C'est par exemple le robot aspirateur qui passe l'aspirateur
tout seul...
- ...Oui oui, ben oui, la tondeuse à gazon, les trucs
comme ça ! Oui d'accord, on est
d'accord...
- Ça c'est aussi de la robotique d'assistance.
- Ça c'est de la robotique, oui.
LXXVII
Annexe V-II Entretien ergothérapeute 2
Durée de l'entretien : 50 min
- On a des robots de téléprésence aussi. Ce
sont des robots qui peuvent explorer
l'environnement de la personne, ils se déplacent de
manière autonome... Et permettent
à une personne d'entrer en interaction avec un soignant,
un petit fils ou de la famille,
enfin, voilà, quelqu'un d'autre.
- A la place de la personne ?
- Oui, par exemple la personne n'est pas sur place, le soignant
n'est pas sur place, ou un
membre de la famille n'est pas sur place, le robot possède
un écran...
- ... avec une caméra... ?
- Oui voilà et les deux personnes se voient et
communiquent verbalement.
- Oui d'accord, donc là ça rapproche le patient du
soignant ou de sa famille.
- C'est ça.
- Ah oui donc ça c'est intéressant aussi.
- Et en général ce genre de robot, si par exemple
la personne fait une chute ou est en
situation de danger, il y a deux possibilités : soit le
robot alerte de manière
automatique une liste de personnes qui a été
pré enregistrée...
- Oui...
- Ou soit c'est la personne qui demande au robot d'appeler les
secours et le robot
appelle les secours, ou une centrale qui gère les appels
du robot. Et puis il y a encore
une catégorie, celle des robots « majordomes ».
Alors, ces robots n'existent pas
encore, clairement, ils sont testés uniquement dans des
laboratoires ou des choses
comme ça...
- ... Donc là ce sont des «
Androïdes » ?
- Voilà, ils ont souvent l'apparence humaine,
humanoïde est leur but et à terme, d'aider
l'humain dans toutes ses AVJ.
- Oui, c'est intéressant ! Mais c'est vrai que
l'idée du robot, dans ma tête de femme de
40 ans, est très liée à un truc en
métal, complètement déshumanisé qui va avoir du
mal
à entrer en relation avec la personne. Le film
là... Intelligence Artificielle là...
- Ah je ne sais pas...
- IA ? Avec Will Smith...
- Je l'ai peut-être déjà vu mais je ne m'en
souviens pas...
- Ben c'est ça, ce sont des robots qui sont mis chez les
gens.
- Ah oui euh... c'est I-Robot ?
- I-Robot !
- Je l'ai regardé spécialement pour le
mémoire...
- Et ben n'empêche que ce film là il induit quand
même la peur du robot.
- Énormément de films induisent la peur du
robot.
- Énormément ! Parce qu'on se dit à chaque
fois qu'à un moment ils vont penser par
eux-mêmes et ils vont tuer la race humaine.
- C'est ça. Quasiment dans tous les films de
science-fiction avec des robots, les robots,
automatiquement, se retournent contre l'Homme...
- Et c'est vrai que du coup ça fait partie d'un
inconscient collectif qui fait que quand tu
dis robot on n'est pas bien...on n'est pas bien !
LXXVIII
Annexe V-II Entretien ergothérapeute 2
Durée de l'entretien : 50 min
C'est vrai que Paro®, on ne dirait pas que c'est un robot.
C'est pour ça vous dites qu'à
un moment on oublie que c'est un robot. Parce que c'est
totalement déconnecté de
l'inconscient collectif qui tourne autour des robots.
- C'est ça. S'il était carré, s'il
était froid et qu'il avait les boulons apparents...
- ... Ahhh ce serait affreux !
- ... On n'oublierait pas que c'est un robot,
effectivement !
Avez-vous déjà rencontré ou entendu
parler d'ergothérapeutes qui préconisent
des robots d'assistance ?
- Ben non...
- Non... Jamais ?
- Non... Mais je pense que ça serait notre job !
Effectivement. D'où l'intérêt de votre
mémoire. Je pense. Parce que ça fait partie de...
On préconise des aides humaines, on
préconise des aides techniques, on préconise des
systèmes de sécurité genre le tapis
qui est relié à une sonnette pour que quand tu
tombes du lit... je veux dire, si ces
robots-là sont, d'ailleurs ils mélangent ces trois
formes, on préconise aussi d'ailleurs,
enfin je ne préconise pas mais y'en a qui
préconisent l'animal... ça mélange ces
systèmes-là donc évidemment il faudrait
qu'on soit formés à ça !
- En fait c'est la même chose mais sous une autre forme.
- C'est ça ! ça va venir de toute façon,
avec votre génération ça va venir !
- D'accord, c'est intéressant.
Selon vous, les ergothérapeutes sont-ils
suffisamment formés ou informés au sujet
des robots d'assistance pour en préconiser
?
- Non, non, ben non ! Pas encore, non ! Ben non parce que c'est
nouveau et que... une
fois qu'on est sorti de l'école on se débat quand
même avec toutes nos difficultés
quotidiennes et c'est vraiment compliqué de continuer
à se former particulièrement
dans les choses innovantes. Je pense que c'est vraiment la grande
qualité de la
nouvelle façon de vous former à l'école
d'ergos, c'est de vous mettre vraiment le pied
dans la recherche et de vous obliger à être ouverts
au niveau de la lecture, des articles,
en anglais et tout ça et je trouve que c'est vraiment
super parce que nous on n'avait
pas tout ça. On n'avait pas cette ouverture-là.
Surtout là où j'ai été formée...
- Après, rien ne dit qu'ailleurs ils en parlent, de la
robotique. Pour le moment je n'ai
rencontré personne...
- Personne ?
- Non, après je n'ai pas fait toute la France...
- Vous n'avez pas été au Canada ou aux
États-Unis ?
- Personne en France hein, en France ! Ailleurs ça se fait
un peu différemment...
- Au Japon...
- Surtout au Japon.
- Au Japon ils sont très axés là-dessus. Je
pense que c'est culturel et même dans les
anciennes générations. Ça vient
déjà d'avant nous... Je pense que c'est culturel.
- Oui, culturel et politique...
- Politique aussi ?
- Absolument.
LXXIX
Annexe V-II Entretien ergothérapeute 2
Durée de l'entretien : 50 min
- D'accord.
- Oui parce que, chez nous par exemple, s'il y a un manque
d'aidants pour les personnes
âgées, on ouvre les frontières pour faire
arriver des immigrés.
- C'est ça, c'est ça...
- Au Japon, pour des raisons culturelles et géographiques,
ils sont assez limités niveau
place, ils préfèrent fabriquer des robots.
- Ah oui !
- En plus de ça, ça créait de l'emploi. En
fait ils ont une vision totalement différente de
la nôtre. C'est aussi culturel car là-bas, la
religion qui prédomine est le Shintoïsme
selon lequel l'humain n'est qu'un élément parmi un
grand tout. Donc, en gros, entre
guillemets, il est « remplaçable »... ce n'est
pas le bon terme hein, car justement, on
ne remplace pas l'humain par un robot, mais on accepte plus
facilement qu'un robot,
qui est un objet, qui n'a pas de vie, puisse s'occuper des
humains. Chez nous, avec le
Christianisme, c'est totalement différent. Et le
Shintoïsme prête une entité animiste,
donc une âme, à chaque objet.
- Ahhh !
- Même si ce n'est pas vivant.
- Donc un robot...
- Une plante, un caillou, une montagne, un robot...
- Ah oui !
- Et du coup leur vision est très différente.
- Très différente !
- Et c'est pour ça qu'ils acceptent ça aussi
beaucoup plus facilement.
À ce propos, par exemple, le robot Paro®, il y a
énormément de familles, de foyers,
qui prennent un robot Paro®, plutôt qu'un
véritable animal de compagnie, en guise
d'animal de compagnie.
- D'accord !
- Donc on retrouve des Paro® là-bas... je ne dirai
pas à foison, mais comme ça,
simplement, pour tenir compagnie.
- C'est eux qui l'ont construit ?
- C'est un chercheur japonais qui l'a mis au point.
- D'accord ! D'accord, oui ! Ben en même temps on n'a pas
besoin de le nourrir, il ne
fait pas caca, voilà, formidable !
- Il y a des avantages et des inconvénients...
- Il ne meurt pas !
- Bah, à un moment...
- À un moment... oui mais on peut toujours le faire
réparer !
- On peut le faire réparer...
- Oui d'accord, c'est intéressant !
- Seriez-vous prête à préconiser ce
genre d'aide à une personne âgée ?
- Euh... pourquoi pas ! Il faudrait juste que je connaisse mieux,
que je me fasse un peu
former et puis il y a l'histoire du prix quand même.
- C'est vrai que c'est assez onéreux.
LXXX
Annexe V-II Entretien ergothérapeute 2
Durée de l'entretien : 50 min
- Ben j'imagine oui !
- D'accord. Donc ce n'est pas un « oui » franc mais
« pourquoi pas » ?...
- Oui, pourquoi pas.
- Ok.
Dans quelle mesure le coût d'une aide technique
préconisée par un ergothérapeute influence-t-il son
acceptation par la personne ?
- Euh... alors... il faut qu'il y ait toujours, à mon
sens, un équilibre entre le bénéfice et le coût et
après, évidemment, mise en relation avec les capacités
financières de mes personnes, de mes patients. La dernière fois,
il y a une fois j'ai eu un monsieur qui se cassait la figure dans sa piscine,
maison d'architecte, voilà... il a fallu que je lui préconise une
main courante dans sa piscine, bon. Et plein de fois je vais dans les HLM ou
dans les maisons des mines où les personnes âgées ont moins
de 400€ par mois pour vivre. Donc clairement, c'est quand même
à moi qui préconise les choses, d'adapter ce que je
préconise avec ce que je vois dans la vraie vie. Et clairement, il faut
dire les choses comme elles sont, les gens qui ont beaucoup de moyens
m'appellent beaucoup moins. Parce que finalement, eux peuvent se payer les
aides humaines, ils peuvent aller souvent...ben par exemple, j'ai eu une dame
démente, complètement dépendante, avait beaucoup d'argent,
était isolée, la famille a payé quatre auxiliaires de vie
qui tournaient jour et nuit.
- D'accord.
- Et donc là, c'est idéal. Mais c'est tellement
peu souvent. Et elle était installée dans un fauteuil roulant
super... C'est vraiment le pied pour un ergo ! Parce qu'il n'y a pas de frein
financier. Or, nous, généralement, nos patients ont quand
même de gros freins financiers. Et du coup, c'est compliqué avec
la robotique, parce que c'est nouveau encore.
- Et que c'est par conséquent très cher...
- Et que c'est par conséquent très cher !
Mais comme c'était à l'époque avec, je ne
sais pas moi, la télé avec une télécommande... Les
smartphones, c'est déjà quelque chose d'extraordinaire ! Pour
nous maintenant, au niveau de l'agenda, ça sonne quand on a un truc
à se rappeler, je veux dire, ça, ça pourrait être
une aide robotique géniale pour les personnes âgées mais
c'est pas possible, parce que déjà, elles ont du mal à
accepter ce genre de truc et en plus ça coûte ! L'histoire du
phoque Paro® par exemple, peut être dans les institutions, ce serait
les institutions qui l'achèteraient, ça pourrait être une
super idée ! Pourquoi pas !
- Il coûte à peu près 5000€
aujourd'hui.
- Ah oui ce n'est pas possible ! Clairement pas possible !
Après c'est vrai que si on le prend comme animal de compagnie pour les
enfants c'est top parce que tu investis une fois et après t'as pas les
croquettes à acheter, ou la litière à acheter...
- A la longue c'est probablement rentable, y'a pas les vaccins
et tout ça...
- Après dans ma pratique je ne vois pas comment je peux
utiliser ça. J'étais là chez une dame, elle a
installé presque un truc pour ouvrir les portes avec une caméra.
Mais y'en a très peu qui le font ! Alors que c'est vraiment bien parce
que ça lui laisse la possibilité d'ouvrir ou de ne pas ouvrir
alors que les autres, il y a très souvent soit une
LXXXI
Annexe V-II Entretien ergothérapeute 2
Durée de l'entretien : 50 min
boîte à clés, soit les gens ont
carrément la clé et ils rentrent comme si c'était chez eux
quoi !
- Oui...
- Alors que là ça lui laisse son autonomie,
à la personne !
- Ça lui laisse son autonomie de décision.
- Voilà, « j'ai le choix de choisir ». Et
ça c'est super.
- D'accord.
- Mais c'est compliqué tout ça. Faut encore que
ça évolue.
- Et dans quelle mesure, la famille/l'entourage/le ou
les aidant(s) influence(nt) l'acceptation et l'utilisation des aides techniques
proposées ?
- Je pense que c'est fondamental. C'est pour ça que je
suis en train de faire une formation sur les familles.
- Ah oui ?
- Oui...
- Et pourquoi c'est fondamental ?
- C'est fondamental parce qu'ils font partie du système
familial et qu'une personne ne peut pas ou a beaucoup de mal à choisir
seule et que quand tu choisis quelque chose dans ta vie qui va changer ta vie,
même si c'est juste une aide de marche, si la personne avec qui tu vis
n'est pas d'accord, ça va pas marcher. Par exemple, aujourd'hui,
là tout de suite, cet après-midi, une dame qui a de très
grosses difficultés à marcher, eh ben pour elle, c'est
fondamental d'avoir son mari qui l'aide à marcher. Elle lui donne les
mains. Le médecin est passé outre, il a fait carrément
livrer par la pharmacie un Rollator®, et ben elle l'utilise pas le
Rollator®... Parce que ce qui se passe entre eux, la relation qui se passe
entre le mari et la femme, fait que le mari est valorisé par le fait que
sa femme a besoin de lui.
- Oui, je vois.
- Et du coup il a une valeur !
- C'est ça !
- Il n'est pas juste le mari de la femme qui va pas bien. Il
est là, c'est lui qui la fait tenir debout. Symboliquement c'est fort
quand même !
- Ah oui complètement !
- Donc tu ne peux pas mettre un Rollator® entre les deux
!
- Non...
- Ce n'est pas possible ! Donc c'est pour ça que si tu
n'as pas l'entourage avec toi pour ce genre de chose, tu peux te battre mais
ça ne marchera pas. Et quel est l'intérêt en tant qu'ergo
de te battre pour mettre en place quelque chose alors que dans le
système familial ça n'a pas de sens. Moi je pense qu'on fait
fausse route. Et les nouveaux ergos, moi quand j'étais nouvelle ergo
j'ai fait beaucoup fausse route dans ce sens-là. Parce que je pensais
que c'était bien pour la personne, donc ça m'énervait,
j'étais souvent très frustrée de me dire que « mais
enfin, j'ai fait l'évaluation, cette dame elle a besoin d'un
Rollator®, je veux qu'elle ait son Rollator®, ça marche pas
». C'est terrible ! Sauf que je ne voyais pas tout ce qu'il y avait autour
! Donc là je suis en train
LXXXII
Annexe V-II Entretien ergothérapeute 2
Durée de l'entretien : 50 min
de faire une formation sur la thérapie familiale. Pour
comprendre et analyser les
familles.
- Ça a l'air super intéressant ! Parce que
déjà un humain c'est super complexe...
- C'est ça...
- Mais un humain dans son environnement, dans son milieu, avec
d'autres humains...
- Et en fait ce qui nous intéresse dans cette formation,
ce ne sont pas les humains, ce
sont les relations qu'il y a entre eux.
- Oui, ce sont les liens, les rôles de chacun, les statuts,
c'est super intéressant !
- C'est hypra complexe ! Mais du coup ça renforce chez moi
le fait de dire qu'on ne
peut pas faire les choses... « moi ergo, je pense que c'est
bien pour la patiente ». Donc
effectivement, sans la famille, sans le conjoint,
évidemment sans l'accord de la
personne, on ne peut rien faire ! Ça ne sert à
rien, il faut travailler autrement.
- D'accord. Ok, eh bien j'ai terminé, c'était la
dernière question. Merci beaucoup !
- Eh ben de rien.
- Vous m'avez apporté plein d'infos, même sans
connaître la robotique d'assistance !
LXXXIII
Annexe V-III Entretien ergothérapeute 3
Durée de l'entretien : 36 min
Annexe V-III : retranscription de l'entretien
effectué avec l'ergothérapeute 3
(Afin de garantir l'anonymat de la personne interrogée,
les informations pouvant permettre de l'identifier ont été
remplacées par « [xxx] »).
Enquêteur / Ergothérapeute
- Quel âge avez-vous ?
- Ça commence bien !
- Ce sont les questions qui fâchent...
- 55 ans.
- D'accord. Dans quel IFE vous avez été
formée ?
- À Nancy.
- Et depuis combien de temps travaillez-vous en tant
qu'ergothérapeute ?
- 34 ans.
- Et quels ont été tous vos lieux d'exercice, s'il
y en a eu plusieurs ?
- Uniquement la gériatrie, dans différents
services, mais uniquement gériatrie.
- Et quels étaient ces services ?
- En médecine interne gériatrique, en hôpital
de jour et à l'unité mobile.
- D'accord. L'unité mobile d'ici... ?
- Ici.
- Ok. Avez-vous déjà
préconisé des aménagements de domicile en vue de
favoriser
le maintien à domicile d'une personne
âgée isolée ?
- Oui.
- De quel(s) type(s) ?
- Euh la question de départ de... ?
- Les aménagements de domicile.
- Les aménagements, oui.... Ça peut être des
aménagements architecturaux, des
aménagements par rapport au matériel... Je dois
développer ?
- Un petit peu.
- Alors au niveau architecture c'est souvent au niveau des
sanitaires, la baignoire ou la
douche, voire les toilettes, sinon ça peut être sans
qu'il y ait de gros travaux... ça peut
être du réaménagement dans la maison et sinon
de la proposition de matériel.
- D'accord, donc on en vient à ma deuxième question
: avez-vous déjà préconisé une
aide technique en vue de favoriser le maintien à
domicile d'une personne âgée
isolée ?
- Oui.
- Et donc même question : de quel(s) type(s)
?
- Bah les aides techniques ça peut aller du lit
médicalisé aux aides à la marche, aux
aides aux transferts, aux aides techniques type rehausse-WC, ce
genre de choses...
Sièges de bain ou des choses plus..., je ne sais pas, par
rapport à des aides techniques
comme des couverts par exemple, voilà à peu
près. Téléalarme... ce sont les plus
fréquentes on va dire.
LXXXIV
Annexe V-III Entretien ergothérapeute 3
Durée de l'entretien : 36 min
- D'accord. Et vous-êtes-vous déjà
sentie démunie face à une situation pour laquelle
il ne semblait y avoir aucune solution pour favoriser le
maintien à domicile d'une
personne âgée isolée ?
- Oui.
- Et c'était dans quelle(s) situation(s) ?
- Là je n'ai pas d'exemples précis mais...
- Dans ce cas dans quel(s) type(s) de situations ?
- Oui voilà, alors ce sont souvent des situations
où on a une idée, on propose un type de
recommandation et la personne n'accepte pas parce qu'elle ne veut
pas de
changements chez elle à domicile mais on se rend bien
compte qu'elle se mettrait en
danger. Je ne sais pas moi, si ce sont des chutes par exemple, on
se dit qu'il faudrait
quand même proposer quelque chose que la personne accepte
à minima pour limiter à
minima le risque de chutes par exemple.
- D'accord.
- Où ça peut être aussi des limites
financières. Quand on propose une aide technique par
exemple. Ou ça peut être des réticences par
rapport à la durée des interventions. Par
exemple si on propose un aménagement du domicile les gens
nous disent « ah mais ça
prend beaucoup trop de temps, faut que ce soit fait la semaine
prochaine, pas dans
deux mois ».
- D'accord, c'est plutôt le délai des interventions
?
- Le délai des interventions oui. Notamment quand il y a
des travaux...
- D'accord.
Et dans ces situations ou certaines d'entre elles,
aviez-vous alors considéré une
éventuelle assistante robotique ? Est-ce
que vous vous êtes dit que peut-être il existe
un robot qui permet d'aider la personne ?
- Un robot ? Ah j'avoue que non ! Car je trouve que les personnes
âgées, en tout cas
celles dont je m'occupe, si déjà pour leur
préconiser un petit truc qui nous parait nous
tellement simple, je me dis que des choses extraordinaires
ça va pas être évident et
puis en plus vu mon âge et depuis le temps que je
travaille, j'avoue ne pas être
forcément très au point vis-à-vis de tout
ça.
- D'accord.
- C'est peut être aussi une question de formation pour
moi.
- Ok. Donc vous pensez que c'est surtout l'acceptation de la
personne âgée qui pourrait
être un frein à la préconisation... et votre
formation ?
- Oui, oui.
- D'accord. Quel est votre niveau de connaissance
justement au sujet de la
robotique d'assistance ?
- On va dire nul.
- Nul ? C'est ce que toutes les ergo précédentes
m'ont répondu, je vous rassure : nul ! Et
est-ce que vous en avez déjà entendu parler ?
- Ben je ne sais pas ce que ça regroupe ce thème
moi !
- C'est à partir de cette question justement que
j'explique un petit peu parce...
- Oui parce que je ne sais pas !
LXXXV
Annexe V-III Entretien ergothérapeute 3
Durée de l'entretien : 36 min
- Alors, il existe plusieurs types de robots d'assistance : il
y a par exemple les robots d'assistance aux tâches
ménagères. C'est le fameux aspirateur qui passe l'aspirateur tout
seul...
- D'accord.
- Ça c'est déjà considéré
comme étant de la robotique d'assistance. Il y en a aussi qui nettoient
les piscines, les vitres, etc... Il en existe un tas !
On a aussi les robots de soutien émotionnel, qu'on
appelle aussi « robots compagnons » ou « robots sociaux »,
ils ont différents noms...
- D'accord, ouais...
- Ceux-là visent à distraire la personne, voire
à la stimuler cognitivement, à lui faire passer le temps...
- D'accord.
- C'est vraiment un rôle de compagnon. On en retrouve
dans un certain nombre d'hôpitaux français, pour des tests, des
études, etc.
On retrouve également des robots de
téléprésence. Ce sont des robots qui souvent peuvent se
déplacer de manière autonome dans la maison et qui permettent
d'explorer l'environnement d'une personne qui ne peut pas se déplacer.
Qui par exemple est bloquée dans son lit... elle a un écran et le
robot explore la maison avec une caméra et retransmet l'image sur
l'écran...
- D'accord, bah ça je ne connaissais pas du tout !
- Ou alors ces robots-là, ont toujours un écran
et une caméra et du coup permettent à la personne de contacter un
proche, un soignant ou n'importe qui qui n'est pas sur place, à
distance. Donc il s'agit d'une discussion en visioconférence.
- D'accord.
- Et puis ensuite il y a les robots dits « majordomes
». Ce sont des robots, encore à l'état de projets, ou
projets avancés pour certains... Ceux-là pourraient à
terme assister l'Homme dans toutes ses tâches de la vie quotidienne :
préparer à manger, faire les courses, sortir le chien...
- D'accord.
- Voilà. Donc actuellement il existe des robots comme
ça, ce n'est pas de la science-fiction...alors... les robots majordomes
c'est...
- ... c'est encore à l'état
d'ébauche j'imagine.
- Voilà. Il y en a certains au Japon mais surtout
utilisés à des fins de tests et de développement.
Des robots compagnons, je vous le disais, on en retrouve. Je
ne sais pas s'il y a des particuliers en France qui en ont... peut-être,
mais c'est très rare vu le prix.
Et on retrouve en institution, en France, certains robots de
téléprésence qui permettent les communications à
distance et des choses comme ça. C'est sûr que chez nous, en
France, ce n'est pas encore très démocratisé. Au Japon par
exemple, là où ces technologies sont nées, les
particuliers en ont de plus en plus chez eux.
- Alors moi ce qui m'interpelle, c'est par rapport à la
population dont je m'occupe : ce sont des personnes très
âgées, avec très souvent des troubles cognitifs majeurs...
Alors déjà, tout ce qui est technologique ils ne connaissent pas.
Déjà il faudrait devoir s'y
LXXXVI
Annexe V-III Entretien ergothérapeute 3
Durée de l'entretien : 36 min
adapter, l'accepter et puis après, par rapport aux
troubles cognitifs c'est peut-être pas
très évident non plus quoi...
- Effectivement.
- Ah non mais je pense que pour les générations
à venir il y a forcément quelque chose à
travailler mais...voilà.
- Effectivement, ça peut ne pas convenir à tout le
monde... Entièrement d'accord !
Avez-vous déjà rencontré ou entendu
parler d'ergothérapeutes qui préconisent
des robots d'assistance ?
- Hm...
- Ne serait-ce que par exemple le robot aspirateur...
- Ah ça oui ! Le robot aspirateur oui !
- D'accord. Et c'était une véritable
préconisation en tant qu' « aide technique » de la
part d'un ergothérapeute ?
- Oui c'est ça, oui, ça oui ! C'était bien
le seul que je connaisse d'ailleurs !
- C'était une préconisation ponctuelle ou ça
lui arrivait souvent d'en préconiser ?
- Je l'ai entendu par plusieurs collègues et
moi-même du coup en y repensant j'en ai
parlé avec une famille. On avait regardé, on en
avait discuté avec la famille... c'est
pour ça c'était une bonne idée en tout cas
pour cet aspirateur !
- D'accord. Et vous avez des retours de personnes qui l'utilisent
?
- Non, non...
- Ok. Selon vous les ergothérapeutes sont-ils
suffisamment formés ou informés au
sujet de la robotique d'assistance pour en
préconiser ?
- Non je ne pense pas. Bon, ce n'est qu'un avis personnel,
même si je pourrais parler au
nom de ma collègue, je n'ai pas l'impression qu'elle
soit... que ce soit un thème qui
soit bien développé pour tout le monde.
- D'accord.
- Peut-être que pour des personnes plus jeunes, plus ?
- Jusqu'à présent les personnes que j'ai
interrogées m'ont toutes répondu non... et
honnêtement, si j'avais moi-même à
répondre à cette question ce serait non. Parce
qu'on n'en parle jamais, on n'en a jamais parlé, alors que
l'institut est tout récent...
- Ben oui !
- Seriez-vous prête à préconiser ce
genre d'aide à une personne âgée ?
- N'importe laquelle ? De la plus simple à la plus
complexe ?
- Oui. Et vous pouvez détailler : s'il y'a un type d'aide
où ce serait plutôt « oui » et un
autre type d'aide où ce serait plutôt « non
»...
- Bon ben alors déjà, par exemple l'aspirateur,
ça oui... ça, ça peut être facilement
accepté. Après c'est ce que je vous disais tout
à l'heure. Je vois mal un robot
compagnon... nos personnes âgées, qui ne sont pas
toujours dans la réalité concrète du
quotidien, comment elles interpréteraient ça ?
Est-ce qu'elles comprendraient
l'intérêt ? Et moi je trouve que les personnes
très âgées, on a quand même des
personnes très dépendantes nous dans notre
population, moi je trouve que le lien
humain est quand même hyper important et que parfois on
peut même proposer le
passage d'une aide humaine pour trois fois rien, mais parce que
ça va être une aide,
LXXXVII
Annexe V-III Entretien ergothérapeute 3
Durée de l'entretien : 36 min
notamment chez une personne âgée isolée
à domicile, ça va être le lien, l'ouverture à
l'extérieur, ça me paraît très important !
- D'accord.
- Et puis... voilà par comparaison, comme ce que je
vous disais tout à l'heure, par exemple par rapport à un couvert
grossi, parfois, on a du mal à le faire accepter, parce que c'est un
truc étrange, pour nos grand-mères de 92 ans... voilà
« mais qu'est-ce que c'est cette fourchette ? » alors je me dis...
des objets dont elles n'ont pas la connaissance... !
- Oui, j'imagine. Et du coup, dans ce cas-là, de la
fourchette à manche grossi, c'est simplement l'étrangeté
de la chose qui les rebute ?
- Oui et c'est aussi le fait que c'est quelque chose qu'elles
ne connaissent pas, donc l'adaptabilité est difficile et aussi c'est
aussi le fait que voilà, « je voudrais faire comme les autres !
».
- D'accord, c'est aussi par rapport à l'image que
ça véhicule.
- Oui voilà, c'est ça, voilà !
- D'accord. C'est un peu estampillé « Personne
Âgée Dépendante » en fait.
- Oui c'est exactement ça !
- D'accord. Donc, vous seriez plutôt pour un robot
d'assistance aux tâches ménagères, comme un aspirateur,
mais pas plus loin ? Par exemple un robot de soutien émotionnel c'est
plutôt non ?
- Ah m'ouais, de soutien émotionnel là, c'est...
là pour les personnes âgées, pour cette population,
là je serais un peu plus... frileuse mais bon !
- Parce qu'il manque ce lien humain...
- Oui voilà ! Mais après pourquoi pas,
peut-être dans certaines situations... Après on a aussi des gens
qui sont d'une nature très solitaire qui ne rencontrent pas beaucoup de
personnes, peut-être que pour elles ce serait justement plus
intéressant, pourquoi pas ! Je ne suis pas « pour » ou «
contre », ce n'est pas ça le souci, mais voilà... à
étudier quoi !
- D'accord. Dans quelle mesure le coût d'une
aide technique préconisée par un ergothérapeute
influence-t-il son acceptation par la personne ?
- Énormément, énormément ! On a...
donc je parle pour notre population toujours... on a souvent des personnes qui
sont dépendantes cognitivement, physiquement, on a tout un plan d'aides
à mettre en place, qui vont de l'aide humaine à l'aide technique
et tout ça, ça nécessite un plan de financement et parfois
même avec les aides extérieures, du Conseil Général
ou toute autre aide ou que sais-je, tous types d'allocations... eh ben
ça paie pas grand-chose et les gens doivent payer de leur poche et il
faut à ce moment-là prioriser. Donc on en revient toujours
à la même chose : il faut prioriser plutôt le passage de
quelqu'un... Je pense que le frein financier est vraiment quelque chose de
très important, d'énorme.
- D'accord. Et de manière générale,
est-ce que malgré qu'une aide technique soit vraiment hyper importante,
plus que nécessaire, est-ce que son prix peut faire que la personne la
refuse malgré tout ?
- Bien sûr ! Bien sûr ! Et c'est dit très
clairement !
- D'accord.
LXXXVIII
Annexe V-III Entretien ergothérapeute 3
Durée de l'entretien : 36 min
- Et ce n'est pas du tout rare !
- Ok.
Et ce sont surtout des gens qui sont dans le besoin qui
refusent une aide comme ça, trop onéreuse ?
En réalité, nos patients, y'en a peu qui ont une
retraite faramineuse donc voilà quoi, ils ont juste assez pour se
débrouiller...
- D'accord.
- Après c'est vrai qu'on voit aussi des personnes qui
ont des moyens plus importants, c'est vrai que là c'est plus facile !
C'est vrai que l'aspect financier, y'en a certains qui disent « Bah non ce
n'est pas un problème, on va essayer... ».
- D'accord.
- On rentre dans une histoire politique avec la retraite des
personnes âgées... C'est un
autre souci ça. Est-ce qu'on favorise le maintien
à domicile au maximum ? En même
temps les gens ont peu de moyens alors... C'est difficile, il
faut faire avec les deux ! - Oui, complètement...
Dans quelle mesure la famille/l'entourage/le ou les
aidant(s) influence(nt) l'acceptation de l'aide technique et son utilisation
par la personne ?
- Ça, ça dépend. Il y a plusieurs cas de
figure. Soit par exemple il y a des enfants qui sont très... qui sont
prêts à tout pour le maintien à domicile, qui pour que la
maman puisse se débrouiller par exemple et qui disent du coup «
nous on va aider », « on explique ce qu'il faut, expliquer comment
ça fonctionne » etc., donc là on a de vrais partenaires, ou
alors on a l'inverse, y'en a qui disent « Elle est assez vieille alors bon
!... », « elle s'est toujours débrouillée sans...
» donc voilà... on peut un peu tout voir... partenaires ou pas,
aidants ou pas du coup. Mais les aidants eux-mêmes ne sont pas
toujours... alors par exemple, si on fait une visite à domicile et qu'on
montre du matériel, par exemple un guidon de transfert qui est on va
dire tout à fait banal pour nous, on se rend bien compte que ça
faciliterait bien la vie de la personne et l'aiderait... Démonstrations
à l'appui, utilisation à l'appui, essais à l'appui... ben
malgré tout l'aide technique n'est pas forcément acceptée
quoi !
- D'accord... par l'aidant ?
- Par l'aidant parce que « non finalement, avant je me
débrouillais pas si mal que ça », ou bien « si si j'ai
bien vu mais maintenant, c'est trop tôt ! » alors qu'objectivement
quand même, c'est le moment d'introduire l'aide technique. Alors on n'a
pas toujours la vraie raison du refus.
- D'accord, oui si ça se trouve c'est pour une raison
financière qui est cachée.
- Oui tout à fait, parfois elles n'osent pas le dire.
Alors qu'on a beau dire que c'est pris en charge, voilà, on explique
bien les manières de financement et tout, voilà... y'a des gens
aussi qui ne veulent pas être redevables. Enfin pas redevables, mais qui
n'acceptent pas d'avoir un financement quelconque, parce qu'ils n'ont jamais
rien demandé à qui que ce soit...
- Oui ça peut être par fierté personnelle.
- Voilà, un peu d'orgueil, un peu mal placé
d'ailleurs je dirais... Alors on leur explique que... enfin voilà quoi,
déjà qu'on ne reçoit pas grand-chose alors s'il y a
déjà un tout petit peu il ne faut pas le refuser ! Ce n'est pas
si rare non plus ça !
LXXXIX
Annexe V-III Entretien ergothérapeute 3
Durée de l'entretien : 36 min
- D'accord.
Et en général quand la personne, qui est la
première concernée, est plutôt pour une aide mais que la
famille, l'entourage ou l'aidant ne l'accepte pas, qu'est ce qui se passe ?
- On essaie de passer par les aidants professionnels qui
interviennent à domicile à ce moment-là. On peut prendre
l'exemple du guidon de transfert : on essaie de se faire l'allié de
l'infirmière ou de l'aide-soignante qui va faire le lever le matin par
exemple. Ou le kiné à domicile... On essaie de passer par les
professionnels qui eux, sont beaucoup plus sensibilisés et connaissent
déjà le matériel.
- Ok. Et ce que vous aviez des questions, une question sur
laquelle vous voulais revenir, plus de précision, ou simplement quelque
chose à rajouter ?
- Non, rien...
- Eh bien je vous ai posé toutes les questions. Merci
beaucoup !
XC
Annexe V-IV Entretien ergothérapeute 4
Durée de l'entretien : 32 min
Annexe V-IV : retranscription de l'entretien
effectué avec l'ergothérapeute 4
(Afin de garantir l'anonymat de la personne interrogée,
les informations pouvant permettre de l'identifier ont été
remplacées par « [xxx] »).
Enquêteur / Ergothérapeute
- Quel âge avez-vous ?
- J'ai 26 ans.
- D'accord. Dans quel IFE avez-vous été
formée ?
- À Montpellier.
- Et depuis combien de temps travaillez-vous en tant
qu'ergothérapeute ?
- Depuis 2011. Ça fait 4 ans.
- Vous avez travaillé ailleurs avant de travailler ici
?
- Oui, j'ai travaillé en gériatrie à
[xxx]. Donc en EHPAD, USLD, SSR et UMG.
- D'accord, merci.
Avez-vous déjà préconisé
des aménagements de domicile en vue de favoriser le maintien à
domicile d'une personne âgée isolée ?
- Oui. Eh bien il y a déjà tout ce qui est
aménagement de salles de bains... après je ne sais pas s'il faut
que je rentre dans les détails... ? Après dans mon travail actuel
j'ai vraiment des problématiques très larges qui vont être
du petit aménagement à vraiment de gros dossiers
d'aménagement, d'accompagnement de gens, à la prise en charge par
le Conseil Général, etc. donc voilà.
- Même question avec les aides techniques :
avez-vous déjà préconisé des aides
techniques en vue de favoriser le maintien à domicile d'une personne
âgée isolée ?
- Oui !
- Et de quel(s) type(s) ?
- Alors, des aides techniques à la marche qu'il faut
souvent réévaluer parce que soit pas adaptées ou absence
d'aides techniques alors qu'il y a un besoin d'aides techniques... alors
surtout aides techniques à la marche. Bon après moi dans les
aides techniques je mets aussi les fauteuils roulants, alors beaucoup de
fauteuils roulants à mettre en place parce qu'en général
fauteuil pas adapté ou plus adapté à la
situation...voilà. Et des aides techniques aussi plus pour l'alerte, la
communication, en conseillant aux gens de changer de téléphone
pour s'adapter à un problème visuel ou ce genre de chose pour
arriver à prévenir l'extérieur ou des systèmes de
téléalarme, c'est ce qui me vient en tête là.
- D'accord. Vous êtes-vous déjà
senti démunie face à une situation pour laquelle il ne semblait y
avoir aucune solution pour favoriser le maintien à domicile d'une
personne âgée isolée ?
- Oui c'est déjà arrivé, oui,
après là je n'ai pas d'exemple précis... si clairement, il
y a le frein financier, surtout que là il y a l'équipe mobile et
surtout quand il n'y a aucune personne ressource... quand il y a des situations
d'isolement, quand on a personne qui
XCI
Annexe V-IV Entretien ergothérapeute 4
Durée de l'entretien : 32 min
peut accélérer des démarches, qu'on a des
gens qui sont très renfermés chez eux, qui n'ont pas de
possibilité de sortie, pas de possibilité de financement,
là ça devient compliqué quoi !
- D'accord.
- Mais on essaie toujours de se débrouiller...
- Et il y avait des situations comme ça, plus «
matérielles » ?...
- Par exemple ?
- Par exemple la personne avait besoin de quelque chose de
précis mais ni un aménagement de domicile ni la
préconisation d'une aide technique actuelle, connue, n'aurait rien
changé.
- Oui, oui, ça c'est déjà arrivé !
- Mais sans que ce soit non plus un problème de
ressources.
- Ben c'est aussi arrivé que ce soit un problème
purement architectural ou au niveau des adaptations on arrivait, enfin ou moi
j'arrivais à la limite des adaptations que je pouvais proposer.
Voilà, rien que quand...pour la sortie à l'extérieur :
quand il n'y a pas de possibilité d'ascenseur ou de chose comme
ça, enfin, quand il y a vraiment des limites du bâtiment, on est
très vite limité.
- D'accord.
- Ben ça m'est arrivé récemment pour
quelqu'un pour qui la salle de bains était trop exiguë et quand on
est en location, qu'on ne peut pas casser des murs ou des choses comme
ça... Si la personne ne reprend pas un peu plus d'autonomie vous ne
pouvez pas proposer autre chose, elle ne pouvait pas y accéder en
fauteuil, ce n'était pas possible.
- Est-ce que dans certaines de ces situations vous
aviez considéré une assistance robotique ? Est-ce que
vous vous êtes déjà dit « tiens peut-être qu'il
existe une solution robotique pour aider la personne ? ».
- Euh... non.
- Jamais ?
- Non.
- D'accord. Pour quelles raisons ?
- Parce que je pense que je ne connais pas assez les
fonctionnalités de ces nouvelles aides techniques qui apparaissent sur
le marché, que moi dans ma formation c'est quelque chose dont on ne m'a
pas parlé et que pour le moment c'est vrai que... Bon c'est vrai qu'en
plus en équipe mobile on est plus... enfin on va beaucoup prioriser ce
qu'on va faire, parce que les gens ont plein de problématiques
associées, donc y'a pas que l'ergo, il y a aussi du suivi
médical, du suivi social, du suivi sanitaire à mettre en place et
du coup c'est vrai que les préconisations parfois, typiquement
techniques ergos, vont être limitées à une ou deux
chose(s)... Il faut aussi prioriser pour pas que la personne se retrouve sous
plein de recommandations qu'elle n'arrivera pas à faire. Mais du coup
non, pour le moment ce n'est pas arrivé mais c'est aussi certainement
que je ne connais pas ce matériel et du coup je n'y pense pas comme une
autre aide technique à laquelle je pense spontanément.
XCII
Annexe V-IV Entretien ergothérapeute 4
Durée de l'entretien : 32 min
- Ok. Donc, avec ce que vous savez de la robotique
actuellement, ou avec ce que vous croyez savoir, est-ce que vous pensez
qu'une assistance robotique aurait pu aider dans une situation ou une autre
?
- Euh... oui je pense !
- Oui ? Vous avez une idée ou c'est parce que vraiment
vous n'y connaissez rien et que vous vous dites que peut être ça
aurait pu aider ?
- Oui je pense que... ben c'est sûr que dans le cas de
personnes où on n'a pas beaucoup de passages d'aides humaines, je pense,
il y a pas beaucoup de référents extérieurs et puis bon,
c'est pas trop mon cas dans le cadre d'une personne qui a peu de troubles
cognitifs et qui est quand même habituée à utiliser les
nouvelles technologies, je pense que ça peut servir... ou dans le cadre
de... moi je pense qu'il peut vraiment y avoir un intérêt dans les
débuts de troubles cognitifs, tout ce qui est remplacer des agendas type
agendas mémoire, ce genre de choses, faire des rappels de prise de
médicaments, enfin de ce que moi j'en connais c'est cette idée
là que j'en ai, plus du type d'agenda synchronisé, de
téléphone synchronisé... voilà, l'idée moi
que j'en ai c'est que ça centralise à la fois les fonctions d'un
téléphone... enfin ce serait comme un smartphone mais en plus
grand au final.
- D'accord. Alors, justement, quel est votre niveau de
connaissance sur la robotique d'assistance ?
- Euh... je connais... enfin, disons presque quasi nulle !
Enfin, disons que je ne connais pas de modèle particulier, je ne connais
pas, je ne saurais pas adresser quelqu'un pour qu'il en trouve, je ne sais pas
exactement les fonctionnalités...
- ... Et vous en avez déjà
entendu parler ? Est-ce que vous avez déjà lu un article dessus,
ou pas ?
- J'ai déjà vu un petit peu des images, des
visuels, mais je n'ai pas tellement lu dessus non.
- D'accord. Je vais vous expliquer rapidement ce qu'il existe
actuellement. Alors, déjà un robot c'est un appareil qui a une
part d'autonomie. Ça ne peut pas être par exemple, justement, un
smartphone. Ça ne peut pas être considéré comme
étant un robot parce qu'il faut qu'il ait une part d'autonomie soit dans
ses déplacements, soit dans ses choix. Choix entre guillemets, ils ne
font jamais totalement de vrais choix. Par exemple, certains robots, lorsque
leur batterie est déchargée, regagnent leur base de recharge
automatiquement et reviennent lorsqu'ils sont rechargés. Dans la
robotique d'assistance, il y a plusieurs types de robots. Il y a des robots
d'assistance aux tâches ménagères, c'est par exemple le
robot aspirateur qui passe l'aspirateur tout seul, mais il y en a qui nettoient
les vitres, les piscines, les gouttières, il y a des tondeuses à
gazon, etc.
- Ok...
- On a également des robots de
téléprésence. Ce sont des robots qui explorent
l'environnement d'une personne qui ne peut pas se déplacer, qui par
exemple est cloisonnée dans son lit. Cette personne a un écran et
le robot explore, avec une caméra, l'environnement de la personne et la
personne explore, à distance et au travers de son écran, son
environnement. Ce sont des robots qui souvent ont un écran et une
caméra, ce qui permet d'établir des conversations en
visioconférence entre la personne
XCIII
Annexe V-IV Entretien ergothérapeute 4
Durée de l'entretien : 32 min
et de la famille, un aidant, un médecin... à
distance. Ce sont aussi souvent des robots qui peuvent détecter des
situations de danger. Si par exemple il voit la personne à terre, il
peut contacter une liste de contacts pré enregistrées ou
contacter les urgences sur demande de la personne au sol.
On a les robots de soutien émotionnel, qu'on appelle
aussi robots compagnons ou robots sociaux et eux ont pour but de divertir la
personne, de la solliciter cognitivement, etc.
- D'accord.
- Et ensuite on a les robots dits « majordomes »,
qui sont des robots qui pourraient, à l'avenir, tout faire.
C'est-à-dire assister l'humain dans toutes ses tâches de la vie
quotidienne.
- Reprendre un peu toutes les fonctionnalités des
autres...
- C'est ça, mais de manière beaucoup plus
complexe. Les fonctionnalités ne seraient pas détachées
mais inclues dans un tout. C'est préparer à manger, pas seulement
couper des carottes. C'est vraiment suivre une recette de cuisine...
- Et ça, ça n'existe pas encore...
- Ça n'existe qu'à l'état
développemental. Il y a des prototypes qui fonctionnent, surtout au
Japon... Les autres robots on les retrouve en France. Ils ne sont pas encore
démocratisés, on n'en trouve vraiment pas partout, on les trouve
surtout dans des hôpitaux, dans des institutions qui participent à
des programmes de recherche. Ils sont souvent encore testés. Bien que
certains hôpitaux utilisent réellement des robots de
téléprésence dans leur pratique quotidienne. Chez les
particuliers on n'en retrouve quasiment pas.
Voilà, ces informations pourront peut-être vous
servir pour la suite des questions...ou pas...
Avez-vous déjà rencontré ou
entendu parler d'ergothérapeutes qui préconisent des robots
d'assistance ?
- Non.
- Ne serait-ce que par exemple un robot aspirateur ?
- Non, même pas.
- Ok. Selon-vous, les ergothérapeutes sont-ils
suffisamment formés ou informés au sujet de la robotique
d'assistance pour en préconiser ?
- Euh... ben par mon exemple, je vais dire non. Après
je ne sais pas avec la nouvelle réforme ce qu'il en est, moi je suis de
la dernière année ou avant dernière avant la
réforme, avec l'ancien programme... non je pense que... et puis je crois
que même en terme de formations proposées par l'ANFE, je crois que
pour l'instant ça reste très léger dans ce
domaine-là. Alors est-ce que c'est problématique ? Est-ce que les
ergos le prennent pour une aide technique ou pas, je ne sais pas...
Après moi je ne pense pas qu'on soit assez formés. Ben j'en
apprends alors je pense que non !
- Eh bien je vous rassure ou pas en disant ça, mais
j'ai beau être encore à l'institut de formation, on n'en a jamais
entendu parler en fait... Vous avez quand même eu des cours de domotique
j'imagine.
- On a eu des cours de domotique ou de choses comme ça
mais ce n'était pas très... enfin voilà, on sait que
ça existe mais comme je trouve beaucoup de choses dans les
XCIV
Annexe V-IV Entretien ergothérapeute 4
Durée de l'entretien : 32 min
cours d'ergos on a beaucoup... en ce qui concerne la pratique
on va dire « hyper spécialisée » on ne va pas
très loin je trouve dans plein de domaines qui font qu'il faut se
spécialiser par la suite, se professionnaliser quand on
décide...
- ... Vous pensez que ça se fait
après l'institut de formation ?
- Je pense qu'il y a beaucoup de choses qui se font après
oui.
- Ok.
- Je pense qu'on a une formation très large et un
métier qui est déjà dans plein de domaines et qui peut
partir dans plein de formes différentes, je pense qu'on a une formation
de base qui nous permet de nous adapter à plein de situations et qui
nous permet de nous poser les bonnes questions et d'avoir une démarche
qui est transposable dans plein de situations et face à plein de
handicaps, mais après pour être vraiment bon dans un domaine il ne
suffit pas.
- D'accord. Donc vous pensez que par exemple se former
à la robotique de manière plus complète devrait se faire
après le diplôme ?
- Je pense que ça devrait être fait après
oui. C'est une question de crédibilité je pense, quand on
préconise des aides techniques à quelqu'un faut
déjà en comprendre le fonctionnement, savoir l'expliquer...
- C'est clair qu'on ne propose pas des choses dont on ne
connaît pas soi-même le fonctionnement.
- Totalement.
- Ok. Seriez-vous prête à préconiser
ce genre d'aide à une personne âgée ? De
différents types hein, que ce soit d'assistance aux
tâches ménagères, ou autre...
- Oui !
- D'accord...
Dans quelle mesure le coût d'une aide technique
influence-t-il son acceptation par la personne ?
- Dans ma pratique ?
- Oui.
- Beaucoup !
- Beaucoup...
- Est-ce qu'il faut que je développe ?
- Oui.
- Non mais parce que vraiment, nous on est dans un profil de
patients, comme je disais avant qui est multi fragile, multi factoriel et en
général avec une situation sociale difficile et du coup dans ce
cadre-là, en plus je crois qu'en France on est quand même pas
habitués à payer pour nos soins, encore moins en Alsace où
même sans mutuelle les gens ne déboursent pas trop... et du coup
déjà dès qu'on a une aide technique qui n'est pas
totalement remboursé on a des freins... Et même parfois le
frein... c'est plus un frein de principe j'ai l'impression, parce que parfois
même chez des gens qui pourraient payer, le fait que ce soit payant ils
ne trouvent pas ça normal.
- D'accord, c'est le fait de payer qui ne soit pas normal.
XCV
Annexe V-IV Entretien ergothérapeute 4
Durée de l'entretien : 32 min
- Oui. De payer parce qu'on est censé s'occuper de la
personne âgée à domicile, on entend que la politique c'est
le maintien à domicile des personnes âgées donc en gros
pourquoi moi...
- ... D'accord, ça leur est dû
en fait ?
- Oui. Après y'en a qui paient hein ! Mais dans la
majorité des cas... Entre les gens qui ont de gros problèmes
financiers à qui il n'est pas possible de demander même 100€
pour une barre de redressement ou un siège de bain... Où
carrément moi je ne le propose pas... J'ai fait mon évaluation,
j'ai fait mon recueil de données qui me donne... Voilà je sais
que les gens ne vont pas pouvoir se le permettre donc je ne le propose pas. Et
entre les gens à qui je le propose en pensant que ça va
être bénéfique et qui peuvent se le permettre et qui le
refusent, ça fait beaucoup de gens qui le refusent ! Pour des raisons de
manque de finances ou de pas de volonté de payer pour ces aides
techniques.
- D'accord, le frein de principe... C'est intéressant.
Et dans quelle mesure la famille/l'entourage/le ou les aidant(s)
influence(nt) l'acceptation et l'utilisation de l'aide technique par la
personne ?
- Pas du point de vue financier ?
- Non.
- Ben en général beaucoup. Quand il y a une
famille et un entourage, parce qu'on a aussi pas mal de personnes
isolées... Mais c'est vrai qu'en général l'avis de
l'environnement humain, extérieur est quand même important. Alors
parfois c'est par rapport à un avis financier, parce qu'il y en a qui
ont besoin de solliciter les aidants par rapport à ça et leur
avis, si eux ne sont pas conquis... Après ça peut être
facilitateur aussi, dans le sens où si les enfants ont compris le
bénéfice de sécurité, de maintien à
domicile, de l'utilisation de l'aide technique, ça va aussi influencer
dans le bon sens. Mais en tout cas en tant qu'ergo, moi j'en suis convaincu,
c'est qu'il faut à tout prix impliquer l'environnement de la personne et
impliquer l'environnement humain c'est primordial. Enfin voilà, il faut
que les gens soient porteurs de ce qu'on préconise pour que ce soit
utilisé, pour que ce soit mis en place et surtout utilisé parce
que c'est vrai que là, dans le cadre de mon travail ici, on fait un
rappel quelques mois après notre passage, on ne fait pas vraiment un
suivi, on fait une préconisation, en général en tant
qu'ergo moi je sais quand même si c'est mis en place parce que quand il
faut des prescriptions ou quoi, moi je les demande et quand il faut une
livraison en général je m'en charge jusqu'au bout de faire la
commande du matériel. Mais c'est vrai que quand on sent dès le
départ qu'on a une famille qui est avec nous en général on
a pas de surprise de savoir que le matériel n'est pas mis en place et
d'avoir un retour sur le matériel. Quand il n'y a pas de famille ou
qu'il y a une famille qui n'est pas impliquée ou qui n'est pas
convaincue par ce qu'on propose, en général ça met
beaucoup plus de temps. En général c'est notre appel à
deux mois où la famille dit « Ah oui tiens, les barres comme
ça... ». Donc moi je pense que c'est essentiel.
- Donc une personne pour qui une aide technique est
préconisée peut la refuser si l'entourage n'est pas porteur ou
n'accepte pas l'aide technique ?
- Je pense oui. Mais rien qu'en... nous on a beaucoup de gens
qui ne sont plus en capacité de sortir de chez eux, donc mis à
part tout matériel n'est pas livrable, donc
XCVI
Annexe V-IV Entretien ergothérapeute 4
Durée de l'entretien : 32 min
y'a des gens... Moi je propose toujours aux personnes...
Voilà moi je peux m'occuper de tout, c'est-à-dire que je peux
m'occuper de contacter le prestataire de leur choix, de choisir une date de
livraison, d'être à la limite là pour la livraison s'il le
faut, mais en général les gens ne me disent pas « non »
franchement. Ils me disent « c'est bon on s'en occupe » pour ne pas
me dire non et après, dans deux mois quand je rappelle, ça n'a
pas été fait. Et du coup c'est vrai que parfois les gens,
à domicile, ils sont isolés de leur décision du fait
d'être dans leur domicile tout seul et que si quelqu'un ne vient pas
chercher leur barre alors que moi on m'a dit qu'on allait la chercher...
Voilà.
- D'accord.
- Et après ça m'est déjà
arrivé, en situation, en parlant d'une aide technique en entretien suite
à mon évaluation, en présence de la famille, si la famille
décrédibilise ou ne voit pas l'intérêt de l'aide
technique, devant le patient, on sent bien que... alors parfois les patients
vont dire... tout dépend du caractère aussi hein ! Ils vont dire
« Non, moi je veux ça », etc., mais comme nous on est aussi
avec une population qui a en général de légers troubles
cognitifs ou des troubles cognitifs plus importants, une fragilité... en
général y'a quand même beaucoup ce transfert de
décision sur les...
- Oui, ils se réfèrent beaucoup sur les aidants.
- Voilà ! Donc si eux n'en voient pas l'utilité,
ça fait ricochet sur la personne âgée quoi. - Oui,
forcément.
- Donc parfois il vaut mieux convaincre les aidants parce que...
enfin les deux quoi !
- D'accord. Concernant mes questions, on est au bout. Est-ce que
vous avez des
questions ? Des questions sur lesquelles vous aimeriez revenir ?
Des remarques... ? - Non c'est bon je crois... ça va ?
- Impeccable, merci !
- Vous souhaitiez que je développe un peu plus quelque
chose ou... ?
- Non, c'était très bien, merci.
Abstract
Abstract
La société française vieillit. Les
personnes âgées sont de plus en plus nombreuses et la part de la
population active diminue, si bien que, dans quelques années, il faudra
composer avec un manque d'aidants pour assurer un accompagnement optimal de nos
aînés. La robotique d'assistance représente une solution
potentielle à ce problème.
À partir de ces constats, la problématique suivante
a été formulée :
« Quels sont les facteurs qui permettraient aux
ergothérapeutes, spécialistes de la préconisation d'aides
techniques et d'assistances technologiques, de préconiser des robots de
soutien émotionnel à des personnes âgées
isolées, en vue de favoriser leur maintien à domicile ?
»
Quatre ergothérapeutes travaillant en Équipe
Mobile de Gériatrie ont été questionnées, à
ce propos, lors d'entretiens semi-directifs.
Leurs réponses valident les hypothèses
formulées : l'accessibilité financière des robots est
primordiale ; une formation des ergothérapeutes est nécessaire ;
l'entourage de la personne âgée doit être inclus au
processus de préconisation et la personne âgée ne peut
être considérée comme immédiatement
réfractaire aux nouvelles technologies.
Préconiser des robots pour maintenir un lien social de
la personne âgée ? Une idée paradoxale
étudiée dans ce mémoire, qui soulève questions
éthiques et morales.
Mots clés : ergothérapeute, personnes
âgées, maintien à domicile, robotique d'assistance.
Abstract
The French society is ageing. The elderly are more numerous
and the share of the working population decreases, so that, in a few years, it
will deal with a shortage of caregivers to ensure optimal support for our
seniors. Assistive robotic is a potential solution to this problem.
Starting from these observations, the following question was
formulated :
«What are the factors that would allow occupational
therapists, specialists in the prescription of technical aids and technological
assistances, to advocate robots for emotional support to isolated elderly, to
promote their home stay?»
Four occupational therapists, working in geriatric mobile
teams, were questioned about this, during semi-structured interviews.
Their answers validate the assumptions : financial
accessibility for robots is paramount ; training of occupational therapists is
required ; the family circle of the elderly should be included in the process
of recommendation and the elderly should not be considered immediately
refractory to new technologies.
Advocating robots to maintain social relationship for the
elderly? A paradoxical idea studied in this dissertation, which raises ethical
and moral questions.
Keywords : occupational therapist, elderly, home stay, assistive
robotic.