Paragraphe 3 : Brève analyse de la situation
La ville de Cotonou, contrairement à ce qu'on pourrait
penser, ne fourmille pas d'initiatives en matière d'activités de
promotion du patrimoine. La musique et le théâtre prennent le pas
sur les autres domaines. Si des efforts sont consentis aussi bien dans le
privé que dans le public pour améliorer cet état des
choses, ils demeurent insuffisants, surtout dans le secteur public. L'absence
de monuments historiques patrimoniaux ou d'une culture spécifique
attachée à la ville peuvent expliquer les difficultés
liées au développement de certaines formes de pratiques
culturelles liées au patrimoine. Une certaine minorité des
personnes interrogées lors de nos enquêtes, lie d'ailleurs
l'inexistence d'un musée à Cotonou, à cette situation.
Mais on ne saurait s'en tenir à cela car la ville,
quoique cosmopolite, est riche de la diversité culturelle des groupes
socioculturels qui la peuplent et de son histoire coloniale indissociable de
celle de la cité historique d'Abomey et des grandes explorations
européennes du début du XIVe siècle au
début du XVIIe siècle. C'est à ce niveau que
transparaît l'intérêt pour l'Etat de marquer sa
volonté de faire de cette ville, un pôle de promotion des cultures
du Bénin.
SECTION II : NECESSITE DE LA CREATION D'UN MUSEE A
COTONOU
Plusieurs facteurs militent à la création d'un
musée à Cotonou. L'histoire et le rôle
prépondérant de la ville dans le développement
économique national, sa position stratégique par rapport à
l'extérieur, ses multiples potentialités ainsi que les
opportunités qu'elle offre sont autant d'atouts qui militent à la
mise en oeuvre d'un tel projet.
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Paragraphe 1 : La culture démocratique
Le propos ici n'est pas de remettre en question quelque
culture que ce soit, mais de permettre leur égale répartition et
leur accessibilité à tous sur le territoire national.
A. L'amélioration de l'accès au
musée
L'article 27 de la Déclaration universelle des droits
de l'Homme (1948) dispose que « toute personne a le droit de prendre
part librement à la vie culturelle de la communauté, de jouir des
arts et de participer aux progrès scientifiques et aux bienfaits qui en
résultent ». Cet instrument consacre le droit d'accéder
aux musées, aux collections, leur présentation et leur mise en
valeur sans aucune discrimination fondée sur l'âge, le sexe, les
croyances religieuses ou culturelles, le handicap ou l'orientation sexuelle. La
création d'un musée à Cotonou trouve ses fondements dans
ce droit fondamental de l'homme.
Conception de la culture qu'il dénomme lui-même
« démocratique », l'idée de la démocratie
culturelle est apparue avec Malraux (1901-1976) dans la mission qu'il assigna
au ministère français des affaires culturelles en 1959 (Mollard,
1999). Selon la Déclaration de Mexico sur les politiques culturelles
(1982), « la démocratie culturelle repose sur la participation
la plus large de l'individu et de la société au processus de
création de biens culturels et aux décisions qui concernent la
vie culturelle, de même qu'à la diffusion et à la
jouissance de la culture ».
Il s'agit essentiellement de mettre à la disposition
des populations, une institution muséale qui « revitalise les
rites, coutumes, savoirs et savoir-faire, les formes collectives d'expression
symbolique qui ont pour enjeu la construction ou la reconstruction des
identités socioculturelles » (Moulin, 1997 : 91-92). Il est
essentiel de créer ce cadre d'expression des talents artistiques et de
monstration des valeurs endogènes, de favoriser l'éclosion de
l'imaginaire artistique, la création d'oeuvres de l'esprit. Ainsi,
chaque enfant de Cotonou et du Bénin pourra accéder aux objets de
musée, aux tableaux, aux traditions orales, tel que consacré par
l'article 10 de la constitution de la République du Bénin.
L'exercice de ce droit participe pleinement de la vie démocratique.
B. Contribution à la politique muséale
nationale
Le vide culturel observé, relatif à l'absence
d'un musée à Cotonou, constitue un sérieux manque à
gagner aussi bien à l'Etat qu'aux populations. En l'absence d'une
politique muséale véritablement établie, la politique de
fait mise en place sur toute l'étendue
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du territoire par le ministère en charge de la culture,
rend le département du Littoral orphelin. Ce vide ne saute pas aux yeux
au premier regard, mais il interpelle la conscience, une fois rendu à
l'évidence.
A Cotonou, les activités économiques prennent le
pas sur la chose culturelle. Aussi est-il restrictif de penser que l'absence
d'une histoire dense ou d'un site historique attachés à la ville
(comme à Ouidah, Porto-Novo ou Abomey) n'en favorise guère
l'émergence d'un musée. Au contraire, cela devrait susciter
l'intérêt des pouvoirs publics. « Doter la ville de Cotonou
d'un musée est plus qu'une nécessité aujourd'hui », a
déclaré le Directeur du Fonds de Développement du
Patrimoine, lors de l'entretien qu'il nous a accordé. Il s'agit d'un
enjeu à la fois socioculturel, politique et économique. Pour le
Chef du Service des Affaires Culturelles et Cultuelles de la Mairie de Cotonou,
« que Cotonou, ville attractive, ville économique, ne dispose pas
d'un seul musée, c'est un problème ! ». Le fonctionnaire de
la municipalité y voit plutôt un tremplin pour la mise en valeur
des modes de vie et des techniques traditionnelles de pêche des
populations autochtones, ainsi que de l'art contemporain.
L'objectif est de doter la ville-département de Cotonou
d'un musée, à l'instar des autres départements du
Bénin. Un tel établissement permettra par ailleurs de
révéler au grand jour les richesses cachées des
civilisations du Bénin. L'offre muséale ne s'en trouverait
qu'améliorée.
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