Année universitaire 2011-2012
Université de Versailles
Saint-Quentin-en-Yvelines Faculté de Droit
Mémoire de Master 2 Droit des Nouvelles Technologies de
l'Information et de la
Communication
Open Data : à la recherche de standards communs
pour la réutilisation de l'information publique
Réalisé par
Josselin Henno
Sous la direction de
Madame Mélanie Clément-Fontaine
2
TABLE DES MATIÈRES
INTRODUCTION 4
TITRE I - LA GENÈSE DE L'OPEN DATA 10
Chapitre 1 - Le champ d'application du régime de
réutilisation de l'information
publique 11
Section 1 - L'information publique : définition
négative 10
I - Les informations expressément exclues du régime
de réutilisation 10
A - Les informations dont la communication ne constitue pas droit
11
B - Les informations produites par les administrations dans
l'exercice d'une mission
de service public à caractère industriel ou
commercial 13
C - Les informations sur lesquelles des tiers détiennent
des droits de propriété
intellectuelle 16
II - Un régime dérogatoire pour les informations
produites par les établissements et
institutions d'enseignement et de recherche et les
établissements culturels 19
Section 2 - L'information publique : définition positive
21
I - Le choix du vocable « information » 21
II - Le caractère public de l'information 23
Chapitre 2 - Les modalités de réutilisation de
l'information publique 26
Section 1 - La généralisation de la licence de
réutilisation 26
Section 2 - Les modalités communes de réutilisation
de l'information publique 28
I - Les obligations de l'administration 28
A - Principes de libre réutilisation et de non
exclusivité 28
B - La tenue d'un répertoire des informations publiques
29
II - Les droits et obligations du Réutilisateur 30
A - Les droits du réutilisateur 30
B - Les obligations du réutilisateur 30
Section 3 - Le cas particulier de la tarification 32
I - Le mode de calcul de la tarification 32
II - La mise à disposition de licences type 33
3
TITRE II - LA STANDARDISATION DE L'OPEN DATA 35
Chapitre 1 - La « Licence Ouverte » du portail «
data.gouv.fr » ou la
simplification de la
réutilisation de l'information publique 37
Section 1 - La synthèse des droits et obligations du
Réutilisateur 38
I - Les droits du Réutilisateur 38
II - Les obligations du Réutilisateur 39
A - La « paternité de l'Information »
39
B - L'intégrité de l'Information 41
Section 2 -La non responsabilité du Producteur : un
ferment d'insécurité juridique 41
I - La non responsabilité du Producteur vis-à-vis
des Réutilisateurs 41
A - Quant à la qualité de l'Information 41
B - Quant à la fourniture de l'Information 43
II - La non responsabilité du Producteur vis-à-vis
des tiers 44
Chapitre 2 - La compatibilité de la Licence Ouverte avec
les autres licences de
réutilisation 45
Section 1 - La compatibilité expresse de la Licence
Ouverte 45
Section 2 - La compatibilité logique de la Licence Ouverte
: l'exemple de la licence OdbL-
Paris 46
CONCLUSION 48
BIBLIOGRAPHIE 50
ANNEXES 54
4
INTRODUCTION
Bien informés, les hommes sont des citoyens ; mal
informés, ils deviennent des sujets.
Alfred Sauvy
L'information en tant que telle a toujours eu une valeur
économique : le meilleur exemple est celui d'une information qui fut
payée trente pièces d'argent ; et ainsi l'ère
chrétienne commença1.
Vittorio Frosini
1 - Open Data -littéralement les données
ouvertes- est le concept selon lequel une information peut être librement
utilisée, réutilisée et redistribuée par n'importe
qui, à la seule condition, tout au plus, d'en mentionner la source et/ou
rediffusant l'information, le cas échéant, selon la même
licence ou une licence similaire2. Appliquée au secteur
public, l'Open Data consiste donc à mettre à la disposition de
tous les informations émanant des personnes publiques, afin d'en
permettre la réutilisation, y compris dans un but commercial. Cette
politique publique d'ouverture des informations, aujourd'hui en pleine
expansion, trouve sa raison dans le constat suivant : à l'occasion de
leurs activités, les personnes publiques produisent et collectent un
grand nombre d'informations diverses et variées (des statistiques
économiques, sociales, environnementales aux chiffres officiels de la
délinquance, des services hospitaliers et de l'éducation
nationale, en passant par des données horaires relatives aux transports
publics...). Or ces informations sont susceptibles d'être
valorisées par leur intégration dans des services tels que des
sites web ou des applications mobiles, que le secteur privé est plus
à même de développer. S'inscrivant dans le paradigme
informationnel, le mouvement Open Data est animé par des enjeux d'ordre
politique et d'ordre économique.
2 - Un mouvement politique. L'ouverture des
informations publiques permet une plus grande transparence et une plus grande
efficacité de l'action publique. Comme le disait le sociologue Dominique
Cardon, « accéder aux données, c'est donner [aux
citoyens] la possibilité de coproduire la décision avec
l'exécutif ». Fort de ce constat, le président Obama a
annoncé, dès son investiture en janvier 2009, la mise en oeuvre
d'une politique publique dite Open Government
1 V. Frosini, Law and Liberty in the Computer
Age. Ici, l'auteur se réfère implicitement au prix
payé par les grands prêtres à Judas Iscariote pour la
trahison de Jésus : voir Evangile selon Matthieu, XXVI, 14-16
2 Traduction libre de la définition
posée par l'Open Knowledge Foundation ;
http://opendefinition.org
5
Initiative, visant à « créer
un niveau d'ouverture du gouvernement sans précédent »,
dans le but de « renforcer la démocratie et promouvoir son
efficacité au sein du gouvernement »3. Cette
initiative s'est traduite par la mise en ligne d'un portail4
rassemblant et mettant à disposition des informations publiques (environ
400 000 jeux de données)5 aussi diverses que
l'évolution de la dette publique, la liste des brevets en cours, le
nombre et la nature des infractions commises sur une année, les taux de
pollution ou encore les subventions publiques versées au secteur
culturel. Ce volontarisme des Etats-Unis en matière d'ouverture des
informations publiques a suscité un engouement mondial, qui s'est
manifesté par des initiatives Open Data tant à l'échelon
local6 que national, dans une perspective de transparence et de
gouvernance participative. L'intérêt manifesté par la
société civile s'est traduit par le développement de
services dont la matière première est l'information. La vie
politique a ainsi vu émerger en son sein des observateurs d'un nouveau
genre, permettant de vérifier les choix budgétaires
(l'application Where does my Money Go au Royaume-Uni),
l'activité des parlementaires (les sites
NosDéputés.fr et
NosSénateurs.fr
créés par le collectif « Regards Citoyens » en France),
l'évolution des travaux des bâtiments publics (l'application
bePart en Allemagne), les résultats de chaque école avec
les moyennes municipales, régionales et nationale (le site
comparatuescuela.org au
Mexique), ou encore les itinéraires conseillés pour les personnes
à mobilité réduite (l'application Handimap à
Rennes). Le gain démocratique et l'optimisation des services publics ont
conféré au mouvement Open Data une légitimité
incontestée.
3 - Un mouvement économique. Les
services de l'information constituent un marché colossal7
dont il faut permettre le développement dans une perspective de
croissance. La volonté de diffuser les informations publiques afin d'en
extraire la richesse économique a été manifestée
par les instances européennes dès la fin des années
808. Le coeur de cette stratégie de diffusion est le principe
de disponibilité des informations publiques, posé à
plusieurs reprises, notamment dans le Livre vert sur l'information
émanant du secteur public dans la société de
l'information9. Cette dynamique a achoppé sur des questions
pratiques liées à la nature des informations publiques.
3
http://www.whitehouse.gov
4
http://www.data.gov
5
http://www.silicon.fr
6 Au 1er juin 2012, quatorze communes
françaises s'étaient engagées dans une démarche
d'Open Data, parmi lesquelles Nantes, Rennes, Bordeaux, Montpellier, Toulouse
et Paris.
7 Le rapport MEPSIR (Measuring European Public
Sector Information Resources) datant de 2006, financé par la Commission
européenne, estimait le marché européen lié
à la réutilisation des informations publiques à 27
milliards d'euros par an. Dans un rapport de août 2011 (Review of recent
studies on PSI re-use and related market developments), ce marché
était évalué à 32 milliards d'euros pour
l'année 2010, soit une augmentation de 7% par an.
8 Décision du conseil des Ministres, 26 juillet
1988
9 Livre vert sur l'information émanant du
secteur public dans la société de l'information - L'information
émanant du secteur public : une ressource clef pour l'Europe, 1998
6
Celles-ci sont en effet susceptibles de contenir des droits de
propriété intellectuelle, ce qui a fait glisser le débat
sur la question de la politique tarifaire à mettre en oeuvre pour
atteindre l'objectif d'accomplissement du marché de l'information, tout
en préservant les intérêts des ayants droit. Par ailleurs,
les opérateurs publics diffusant des données ont pu se voir
reprocher des ententes ou des abus de position dominante. Il était donc
nécessaire de clarifier ces points pour que la politique de
réutilisation mise en oeuvre soit pérenne. Le cadre juridique de
la réutilisation des informations publiques en Europe a ainsi
été posé par la directive du 17 novembre
200310, qui a énoncé des principes juridiques pour la
résolution de ces questions. Néanmoins, la directive laisse une
entière marge de manoeuvre aux États membres sur la politique de
diffusion à mettre en oeuvre, qui relève in fine de la
souveraineté nationale11.
4 - Au plan théorique, les principes de l'Open Data ont
été posés notamment par l'Open Knowledge
Foundation12, organisme de droit anglais qui promeut la connaissance
ouverte dans toutes ses formes. Selon cet organisme, l'Open Data n'est qu'une
composante d'un mouvement plus large d'ouverture (Openness),
comprenant aussi les contenus ouverts (Open Content) et les services
ouverts (Open Service). Ainsi l'ouverture se définit par la
possibilité pour tout un chacun de librement utiliser, réutiliser
et redistribuer un contenu (au sens d'oeuvre de l'esprit) ou une information,
subordonnée tout au plus à la mention de la paternité
et/ou à une clause de partage à l'identique. Autrement dit, le
principe « d'ouverture de la connaissance » s'oppose à
l'exclusivité conférée par les droits de
propriété intellectuelle (droits d'auteur et droits voisins,
droit sui generis des bases de données, marques, brevets,
etc.). Par ailleurs en 2007, le groupe de travail « Open Government
Data »13 définissait les huit qualités
requises pour qu'une information publique soit considérée ouverte
: complète, primaire, opportune, accessible, exploitable, non
discriminatoire, non propriétaire et libre de droits. Les licences
libres14 se sont naturellement imposées comme l'instrument
juridique de cette liberté. Développées initialement pour
le partage d'oeuvres logicielles dans les années 80, les licences libres
se sont peu à peu propagées à tous les champs de la
10 Directive 2003/98/CE du Parlement
européen et du Conseil du 17 novembre 2003 concernant la
réutilisation des informations du secteur public
11 Directive du 17 novembre 2003, considérant
(9)
12 L'Open Knowledge Foundation est une association
à but non lucratif promouvant la culture libre dans des domaines aussi
variés que l'éducation, la science ou tout autre secteur
d'activités produisant des données ouvertes. Elle a
été fondée en 2004 à Cambridge au Royaume-Uni.
13 Le groupe de travail « Open Government Data
» est un groupe d'une trentaine d'activistes et de praticiens de l'open
government qui s'est réuni près d'un an avant l'entrée en
fonction de Barack Obama.
14 « Les licences libres peuvent être
définies comme des licences par lesquelles l'auteur autorise la copie,
la modification et la diffusion de l'oeuvre modifiée ou non, de
façon non exclusive, sans transférer les droits d'auteur qui y
sont attachés et sans que l'utilisateur ne puisse réduire ces
libertés tant à l'égard de l'oeuvre originelle que de ses
dériviés. Les oeuvres ainsi diffusées sont
qualifiées de libres ». M. Clément-Fontaine, L'oeuvre
libre, JurisClasseur PLA, fascicule 1975
7
connaissance. Affûtées pour encadrer la
réutilisation des informations publiques, elles synthétisent par
la voie du contrat les droits et obligations du licencié.
5 - Si l'évolution du rôle assigné
à l'information dans la société peut être
résumée en trois âges : le secret, la transparence et le
marché15, la question de son statut juridique est quant
à elle beaucoup plus problématique. A l'ère de
l'informatique et de la communication, l'information s'est
détachée de son support, se démarquant ainsi par son
« immatérialité radicale »16 :
l'information est un bien qui a une valeur intrinsèque,
indépendamment de son support de diffusion. L'avènement de
l'information réifiée ne permet pas pour autant
d'appréhender son statut, sa polymorphie empêchant de la classer
dans telle ou telle catégorie juridique existante. Entre bien commun et
propriété17, l'information n'est pas une idée
(de libre parcours) mais un bien sur lequel peuvent être assis des droits
de propriété intellectuelle. Ainsi, une information peut
être totalement ou partiellement protégée par le droit
sui generis des bases de données, un brevet ou un droit
d'auteur. Le recours aux licences libres pour encadrer les conditions de
réutilisation des informations publiques souligne cette ambivalence de
l'information publique. Traditionnellement utilisées pour encadrer le
partage des oeuvres de l'esprit, les licences libres se révèlent
être des instruments juridiques efficaces pour régler le sort des
droits de propriété intellectuelle qui peuvent être
attachés aux informations publiques, tout en permettant à ces
dernières d'être diffusées et réutilisées le
plus largement possible. Au niveau du negotium, les licences libres
encadrant la réutilisation d'informations publiques se distinguent des
licences libres classiques par leur terminologie : il n'y est plus fait
référence à la notion d'oeuvre mais à celle «
d'information ». Autrement dit, par souci de simplicité,
l'information est assimilée, par métonymie, aux oeuvres qu'elle
est susceptible de comporter18.
6 - En France, le régime de réutilisation des
informations publiques a été introduit par la directive du 17
novembre 2003, transposée par l'ordonnance du 6 juin 200519.
Le choix du législateur a été d'ancrer le régime de
réutilisation des informations publiques dans la loi du 17 juillet 1978,
qui consacre le droit d'accès aux documents administratifs. Si
l'accès et la réutilisation
15 H. Burkert, From the commercialization of public
information to administration information law, Colloque Informatique et droit,
Montréal, 1992.
16 E. Daragon, Etude sur le statut juridique de
l'information, D., chr., 1998, p.65
17 P. Aigrain, Cause commune : l'information entre
bien commun et propriété, Fayard, 2005
18 La licence OGL pour la réutilisation des
informations publiques est plus explicite que la Licence Ouverte
française sur ce point. Le terme « information » y est
employé comme un synonyme « d'oeuvre protégée »
; « Information means information protected by copyright or by
database right (for example, literary and artistic works, content, data and
source code) offered for use under the terms of this licence »
19 Ordonnance n° 2005-650 du 6 juin 2005
relative à la liberté d'accès aux documents administratifs
et à la réutilisation des informations publiques
8
entretiennent des liens forts, ces deux régimes ne
doivent pas pour autant être confondus, ce qui a fait regretter cet
ancrage à certains auteurs20. Néanmoins, ce choix
permet d'unifier dans un seul et même texte les règles
essentielles relatives aux informations publiques.
7 - A la suite de la mise en oeuvre du régime de
réutilisation des informations publiques, la question de leur mise
à disposition s'est posée avec de plus en plus d'acuité,
de manière à optimiser cette stratégie politique. A la
recherche de standards communs pour simplifier la réutilisation des
informations publiques et en maximiser le potentiel, l'Open Data s'est
doté de principes et de normes pour permettre son
épanouissement.
8 - Nous étudierons dans un premier temps la
genèse de l'Open Data en France, caractérisée par
l'instauration d'un régime de réutilisation des informations
publiques (Titre I) puis nous nous pencherons sur la mise en oeuvre du portail
«
data.gouv.fr » et de la Licence
Ouverte, inscrivant le mouvement Open Data dans un processus de standardisation
(Titre II).
20 J.-M. Bruguière, Données publiques :
la confusion des genres de l'ordonnance du 6 juin 2005, La Semaine Juridique
Entreprise et Affaires n° 46, 17 novembre 2005, 1625
9
TITRE I - LA GENÈSE DE L'OPEN DATA
9 - Se donnant pour objectifs la modernisation politique et le
développement de l'économie numérique, l'Union
européenne a fixé un cadre à la réutilisation des
informations publiques avec l'adoption de la directive du 17 novembre 2003 (la
directive ISP). Les règles qu'elle énonce ont été
transposées par l'ordonnance du 6 juin 2005 et son décret
d'application du 30 décembre 200521, et figurent au chapitre
II de la loi du 17 juillet 1978, intitulé « De la
réutilisation des informations publiques ». Nous
présenterons de manière classique le régime de
réutilisation des informations publiques, en étudiant d'abord son
champ d'application (chapitre 1) puis les modalités de sa mise en oeuvre
(chapitre 2).
21 Décret n° 2005-1755 du 30
décembre 2005 relatif à la liberté d'accès aux
documents administratifs et à la réutilisation des informations
publiques, pris pour l'application de la loi n° 78-753 du 17 juillet
1978
10
Chapitre 1 - Le champ d'application du régime de
réutilisation
10 - La loi du 17 juillet 1978 modifiée par
l'ordonnance de 2005 pose le principe de libre réutilisation des
informations publiques, ce qui signifie que ces informations « peuvent
être utilisées par toute personne qui le souhaite à
d'autres fins que celles de la mission de service public pour les besoins de
laquelle les documents ont été produits ou reçus
»22. Précisée par la Licence Ouverte (voir
Titre II), la notion de réutlisation recouvre plusieurs actions :
reproduire, copier, publier et transmettre l'information ; diffuser et
redistribuer l'information ; adapter, modifier, extraire et transformer
à partir de l'information ; exploiter l'information à titre
commercial. Néanmoins, toutes les informations détenues par les
administrations ne peuvent pas être réutilisées. En effet,
la directive ISP de 2003 et les textes de transposition français
excluent certaines informations du champ de la réutilisation. Suivant
cette exclusion expresse de certaines informations, nous poserons d'abord une
définition négative de l'information publique (Section 1).
Logiquement, nous nous essaierons dans un second temps à une
définition positive de l'information publique (Section 2).
Section 1 - L'information publique : définition
négative
11 - Par souci de clarté, nous distinguerons deux
catégories d'informations ne pouvant pas faire l'objet d'une
réutilisation. D'une part, certaines informations sont
expressément exclues du régime de réutilisation par
l'article 10 de la loi de 1978 modifiée (I). D'autre part, certaines
informations ne sont pas exclues expressément mais n'ont pas le statut
d'informations publiques : ce sont les informations produites par les
établissements et institutions d'enseignement et de recherche et les
établissements culturels, qui suivent un régime
dérogatoire (II).
12 - D'une part, ne sont pas réutilisables les
informations exclues du régime d'accès par la loi du 17 juillet
1978. Ces informations n'étant pas communicables, elles ne
peuvent pas, a fortiori, faire l'objet d'une réutilisation (I). D'autre
part, la directive exclut expressément certaines informations du
régime de réutilisation, que l'ordonnance de transposition a
également exclues dans des termes quasi identiques (II).
I - Les informations expressément exclues du
régime de réutilisation
13 - Certaines informations sont exclues du régime
d'accès institué par la loi de 1978. Ces
22 Article 10 de la loi n°78-753 du 17 juillet
1978 modifiée par l'ordonnance du 2005-250 du 6 juin 2005
informations, dont la communication ne constitue pas un droit
ne peuvent pas, a fortiori, faire l'objet d'une réutilisation (A).
L'exclusion du régime de réutilisation des informations produites
par les administrations dans l'exercice d'une mission de service public
à caractère industriel ou commercial (B) est plus difficile
à justifier, étant donné qu'un grand nombre de ces
informations font l'objet d'un droit d'accès. En outre, le
législateur a également exclu les informations sur lesquelles des
tiers détiennent des droits de propriété intellectuelle
(C), ce qui n'est pas sans poser de difficultés au plan
théorique.
A - Les informations dont la communication ne constitue
pas un droit
14 - La loi du 17 juillet 1978, modifiée par
l'ordonnance du 6 juin 2005, prévoit en son article 10 a) que «
ne sont pas considérées comme des informations publiques
(...) les informations contenues dans les documents dont la communication ne
constitue pas un droit en application du chapitre Ier ou d'autres dispositions
législatives...». Néanmoins, exception de l'exception,
cette exclusion tombe dès lors que « ces informations font
l'objet d'une diffusion publique ».
15 - Le chapitre Ter de la loi de 1978, intitulé «
De la liberté d'accès aux documents administratifs
», prévoit en son article 6 que certaines catégories de
documents suivent un régime dérogatoire du régime
d'accès. Ces documents ne donnant pas lieu à un droit
d'accès, ils ne peuvent, a fortiori, donner lieu à un
droit de réutilisation. L'article 6 distingue entre les informations qui
« ne sont pas communicables » et celles qui « ne
sont communicables qu'à l'intéressé ». Dans le
premier cas, ce sont des impératifs d'ordre public qui justifient le
secret, tandis que dans le second cas, c'est la protection de certaines
données à caractère personnel au sens de la loi du 6
janvier 1978 qui justifie cette communication sélective.
16 - En premier lieu, on trouve parmi les informations non
communicables en toute hypothèse une liste exhaustive de documents
fonctionnels de certaines administrations (les avis du Conseil d'État et
des juridictions administratives, certains documents de la Cour des comptes, de
l'Autorité de la concurrence et des établissements de
santé).
17 - En second lieu, l'article 6 exclut du champ de la
communication -et donc de la réutilisation- les « autres
documents administratifs dont la consultation ou la communication porterait
atteinte » à des intérêts supérieurs. Sont
ainsi énumérés le secret des délibérations
du Gouvernement, le secret de la défense nationale, la conduite de la
politique extérieure de la France,
11
12
la sûreté de l'État, la
sécurité publique et la sécurité des personnes, la
monnaie et le crédit public, la recherche des infractions fiscales et
douanières, les autres secrets protégés par la loi. Cette
deuxième série d'informations non accessibles et non
réutilisables laisse une marge de manoeuvre très importante
à l'administration, qui apprécie de manière
discrétionnaire la demande de communication, étant entendu que
les refus de communication -dans le cadre du régime d'accès-n'ont
pas à être motivés. De façon corrélative,
l'administration pourra faire le choix discrétionnaire de soustraire au
régime de réutilisation les informations jugées sensibles.
L'on voit ici que le mouvement Open Data ne remet pas en cause la
souveraineté de l'Etat ; la réutilisation des informations
publiques se réalise avec le concours de l'Etat, dans une perspective
réformiste. Open Data n'est donc pas une fuite
d'informations23 mais une ouverture régulée.
18 - S'agissant des informations qui ne sont communicables
qu'à l'intéressé (dossier médical,
appréciation ou jugement de valeur sur la personne...), ce sont
là des documents administratifs ayant la nature de données
à caractère personnel24 au sens de la loi du 6 janvier
1978. Ces données à caractère personnel n'ont donc pas
vocation à être communiquées ou
réutilisées.
19 - Néanmoins ce principe de prohibition est assorti
d'exceptions. En effet les informations contenant des données à
caractère personnel ne sont pas exclues en toutes circonstances du champ
des informations publiques. L'article 13 de la loi du 17 juillet 1978
énonce que de telles informations peuvent tout de même faire
l'objet d'une réutilisation « soit lorsque la personne
intéressée y a consenti, soit si l'autorité
détentrice est en mesure de les rendre anonymes ou, à
défaut d'anonymisation, si une disposition législative ou
réglementaire le permet. » En toute hypothèse, «
la réutilisation d'informations publiques comportant des
données à caractère personnel est subordonnée au
respect des dispositions de la loi du 6 janvier 1978 ».
20 - Cette disposition évoque « l'anonymisation
» des informations. Ce traitement peut justifier une tarification de
l'information publique. En effet l'article 15 de la loi de 1978 énonce
que « Pour l'établissement des redevances, l'administration
(...) tient compte (...) du coût d'un traitement permettant de les rendre
anonymes ». Par ailleurs, l'anonymisation ne fait pas l'objet
23 Ainsi Wikileaks ne s'inscrit pas dans le
mouvement Open Data, comme a pu le faire entendre Tim Berners-Lee au W3C le 14
décembre 2010 à Londres. Sur ce sujet, V. l'article du
Hufftington Post daté du 20 décembre 2010, par Alexander Howard
:
http://www.huffingtonpost.com
24 Article 2 de la loi n° 78-17 du 6 janvier
1978 : « Constitue une donnée à caractère
personnel toute information relative à une personne physique
identifiée ou qui peut être identifiée, directement ou
indirectement, par référence à un numéro
d'identification ou à un ou plusieurs éléments qui lui
sont propres. »
13
d'une obligation de résultat à la charge de
l'autorité détentrice, qui « y procède sous
réserve que cette opération n'entraîne pas des efforts
disproportionnés »25. L'on regrettera que la notion
d'efforts disproportionnés n'ait pas été
davantage étayée tant la marge d'appréciation
laissée à l'administration paraît grande. En l'absence de
contentieux sur ce point, il est difficile d'évaluer la portée de
ce pouvoir d'appréciation, dont les contours seront dessinés par
les avis de la Commission d'accès aux documents administratifs
(CADA)26 et la jurisprudence du juge administratif.
21 - En outre, l'article 6 énonce que les documents
mixtes, comportant des informations non communicables et des informations
communicables sont communiqués « après occultation ou
disjonction » des mentions non communicables.
22 - Nous avons vu que certaines informations sont exclues du
régime de réutilisation par ce que leur communication ne
constitue pas un droit, pour des raisons tenant soit impératifs d'ordre
public, soit à la protection des libertés individuelles et plus
particulièrement du droit au respect de la vie privée. Cette
exclusion est facilement compréhensible en ce que les informations
visées étaient déjà exclues du régime
d'accès. S'agissant des informations susceptibles d'intéresser la
sûreté de l'Etat, l'administration apprécie
discrétionnairement la pertinence de leur communication, ce qui nous
permet de conclure que la libération des informations publiques
dépend in fine de la volonté de l'administration.
D'autres catégories d'informations sont exclues du régime de
réutilisation en raison de la valeur économique qu'elles
renferment et qui est le fruit d'un investissement en partie privé : ce
sont les informations produites par les administrations dans l'exercice d'une
mission de service public à caractère industriel ou
commercial.
B - Les informations produites par les administrations
dans l'exercice d'une mission de service public à caractère
industriel ou commercial
23 - Aux termes de l'article 10 b) de la loi du 17 juillet
1978, telle que modifiée par l'ordonnance du 6 juin 2005, « ne
sont pas considérées comme des informations publiques (...) les
informations contenues dans des documents élaborés ou
détenus par les administrations mentionnées à l'article
Ier dans l'exercice d'une mission de service public à caractère
industriel ou commercial ».
25 Article 40 du décret du 30 décembre
2005
26
http://www.cada.fr : «
La Commission d'accès aux documents administratifs a
été créée en 1978 pour assurer la bonne application
du droit d'accès. Elle est pour les citoyens comme pour les
administrations, le premier interlocuteur en la matière. Elle rend des
avis qui constituent une voie de recours précontentieuse »
14
24 - A la lecture de cette disposition, la
réutilisation d'informations produites ou reçues à
l'occasion d'un service public à caractère industriel et
commercial (SPIC) semble prohibée par principe. Cette interdiction
contraste avec la permissivité du régime d'accès sur ce
point. En effet, l'article Ier de la loi du 17 juillet 1978 dispose que sont
considérés comme documents administratifs (...) « les
documents produits ou reçus, dans le cadre de leurs missions de service
public, par l'État, les collectivités territoriales ainsi que par
les autres personnes de droit public ou les personnes de droit privé
chargées d'une telle mission », sans distinguer entre les
services publics à caractère administratif et les services
publics à caractère industriel et commercial. Là où
la loi ne distingue pas... Dès lors, tous les établissements
publics, nationaux ou locaux, et quel que soit leur caractère
-administratif, industriel et commercial ou scientifique et culturel-, seraient
assujettis à l'obligation de communication.
25 - Néanmoins il convient de nuancer cette astreinte
au régime d'accès, qui ne vise en effet que les seuls documents
détenus par les administrations susvisées dans le cadre de leur
mission de service public. Ce critère de destination permet d'exclure du
régime d'accès les documents administratifs27 dont
l'intérêt général commande qu'ils demeurent
occultes. Il en est par exemple ainsi en matière de marchés
publics conclus par les établissements à caractère
industriel ou commercial, où la vie des affaires s'accommode mal des
regards indiscrets. Ainsi, certains documents élaborés ou
détenus par les établissements publics à caractère
industriel ou commercial (EPIC) ne revêtent pas un caractère
administratif. La Commission d'accès aux documents administratifs
précise que l'absence de caractère administratif d'un document
correspond à l'absence de « lien avec l'organisation ou
l'exécution de la mission de service public dévolue à ces
établissements ». C'est ainsi que la CADA a rejeté le
droit d'accès s'agissant de contrats conclus par la SNCF, ayant pour
objet, notamment, la fabrication et la distribution des tenues des agents des
gares28.
26 - Il résulte de ce qui précède 1) que
certains documents administratifs produits ou reçus par les
administrations dans l'exercice de leur mission de service public à
caractère industriel et commercial peuvent être obtenus via le
régime d'accès ; 2) que les informations contenues dans ces
documents administratifs ne peuvent pas faire l'objet d'une
réutilisation29. L'article 10 de la loi de
27 Ce sont en fait les informations contenues dans les
documents administratifs qui sont visées.
28 CADA, avis n° 20090372 du 29 janvier 2009
29 Il en va de même pour les documents
détenus par les organismes privés chargés d'une mission de
service public. Ces documents ouvrent un droit d'accès dès lors
qu'ils revêtent un caractère administratif mais ne peuvent
aucunement faire l'objet d'une réutilisation.
15
1978 laissait pourtant, avec sa formulation sans ambages,
entrevoir un destin chantant aux informations issues du régime
d'accès : « Les limites et les conditions de cette
réutilisation sont régies par le présent chapitre,
même si ces informations ont été obtenues dans le cadre de
l'exercice du droit d'accès aux documents administratifs...».
Mais c'était sans compter sur une exclusion expresse des informations
issues des SPIC au b) du même article.
27 - L'exclusion du champ de la réutilisation des
informations produites par les administrations dans le cadre de leur mission de
SPIC est un choix opéré par le législateur national. En
effet, la directive ISP ne marquait pas une telle distinction entre les
différentes natures de services publics mais se contentait d'exclure de
son champ les « documents dont la fourniture est une activité
qui ne relève pas de la mission de service public dévolue aux
organismes du secteur public concernés en vertu de la loi ou d'autres
règles contraignantes en vigueur dans l'État membre ou, en
l'absence de telles règles, en vertu des pratiques administratives
courantes dans l'État membre concerné ».
28 - Cette restriction du champ d'application du régime
de diffusion et de réutilisation est un frein au mouvement Open Data en
ce qu'elle bride le potentiel économique des informations du secteur
public. C'est ce constat qui a conduit le Conseil National du Numérique
a proposer en juin 2012 un élargissement du périmètre des
informations publiques30 en y incluant les informations publiques
issues des SPIC.
29 - L'ouverture des informations produites par les EPIC
participe à l'efficacité de ces établissements en
créant les conditions de l'innovation ouverte31. C'est pour
cette raison que certains EPIC tels que la SNCF32 ont pris
l'initiative de mettre à disposition certaines de leurs informations de
manière à tirer profit de l'ingéniosité des
développeurs, les plus talentueux d'entre eux étant
récompensés. Le concours de la société civile pour
améliorer les services participe du phénomène
crowdsourcing. Ce néologisme issu de la contraction des termes
« crowd » (la foule) et « outsourcing »
(externalisation), qui n'a pas d'équivalent en français, semble
avoir été conçu par Mark Robinson et Jeff Howe, ce dernier
l'ayant popularisé dans un article du Wired magazine
30 Conseil National du Numérique, avis du 5
juin 2012, proposition n° 1
31 Rapport « Pour une nouvelle vision de
l'innovation », de Paul Morand et Delphine Manceau, rendu au Ministre de
l'Économie, de l'Industrie et de l'Emploi en avril 2009 :
www.industrie.gouv.fr/enjeux/innovation/rapport-morand-2009.pdf
32
http://data.sncf.com
16
publié en 200633. Selon
l'encyclopédie libre Wikipédia34, « Le
crowdsourcing (...) est l'utilisation de la créativité, de
l'intelligence et du savoir -faire d'un grand nombre de personnes, en
sous-traitance, pour réaliser certaines tâches traditionnellement
effectuées par un employé ou un entrepreneur
»35. Un bon exemple de crowdsourcing en matière
d'Open Data nous est donné par le projet OpenStreetMap, qui a pour but
de constituer une base de données cartographiques du monde, en utilisant
notamment le système GPS des utilisateurs. La finalité d'un tel
projet est de créer des cartes sous licence libre, afin d'en faciliter
l'exploitation.
30 - Nous avons vu que les informations produites par les
administrations dans le cadre de leur mission de SPIC ont été
expressément exclues du régime de réutilisation par le
législateur national, alors même que ces informations, du moins
celles qui concernent l'activité de service public de ces
établissements, peuvent être communiquées via le
régime d'accès. Une fois communiquées via le régime
d'accès, il semblerait que ces informations puissent faire l'objet d'une
réutilisation, ce qui brouille la distinction entre régime
d'accès et régime de réutilisation. Cette restriction du
champ des informations publiques est préjudiciable pour le mouvement
Open Data. Cependant on constate que des initiatives de mises à
disposition sont prises par les EPIC, qui y voient l'opportunité
d'améliorer la qualité de leurs services à moindre
coût, notamment par le recours au crowdsourcing. En outre, il
convient de rapprocher l'exclusion de ces informations du régime de
réutilisation de l'exclusion des informations sur lesquelles des tiers
détiennent des droits de propriété intellectuelle, qui se
justifie par la protection des intérêts des ayants-droit.
C - Les informations sur lesquelles des tiers
détiennent des droits de propriété intellectuelle
31 - Une des problématiques juridiques majeures
soulevées par l'Open Data est la gestion des droits de
propriété intellectuelle susceptibles d'être
attachés aux informations publiques. Comme énoncé en
introduction, le concept Openness qui sous-tend l'Open Data suppose
que les informations soient « libérées » de tout droit
exclusif. Or la directive ISP prévoit déjà en son article
1er 2. b) que la directive ne s'applique pas « aux documents dont des
tiers détiennent des droits de propriété intellectuelle
». Le législateur communautaire précise dans le
considérant (22) de la directive que la notion de droits de
propriété intellectuelle recouvre uniquement les droits d'auteur
et les droits voisins (incluant les formes de protection sui generis,
ajoutant aussitôt que la directive
33 Jeff Howe, The rise of crowdsourcing,
n°14.06, Juin 2006
34
http://fr.wikipedia.org
35 Wikipédia est donc un très bon
exemple de crowdsourcing. En effet ce projet d'encyclopédie
collaborative est porté par de nombreux contributeurs (plus de 5000
contributeurs actifs pour le Wikipédia français), dont les
connaissances sont agrégées sous forme d'articles
thématiques.
17
n'est pas applicable « aux documents visés par
les droits de propriété industrielle, comme les brevets, les
dessins déposés et les marques et modèles ». En
outre, il est précisé que les obligations imposées par la
directive « ne s'appliquent que dans la mesure où elles sont
compatibles avec les dispositions des accords nationaux sur la protection des
droits de propriété intellectuelle ». Il ne s'agit
là que d'un paradoxe apparent. En effet, le législateur
communautaire a entendu réaffirmer le principe d'exclusivité qui
garantit la protection des droits de propriété intellectuelle.
Dès lors, l'Open Data ne remet pas en cause les fondements juridiques de
la propriété intellectuelle ; il s'agit pour les Etats de
concilier respect des droits de propriété intellectuelle et
ouverture des informations publiques. Ainsi, la mise en oeuvre juridique de
l'Open Data implique une autorisation d'exploiter les droits de
propriété intellectuelle qui peuvent accompagner les informations
publiques (Voir Chapitre 2).
32 - L'ordonnance du 6 juin 2005 a transposé ce
principe d'exclusion des droits de propriété intellectuelle en
son article 10 c), qui modifie insensiblement la formule laconique de l'article
premier de la directive. Ainsi, ne sont pas des informations publiques «
les informations contenues dans des documents (...) sur lesquels des tiers
détiennent des droits de propriété intellectuelle
».
33 - En pratique, les contours de cette exclusion sont
difficiles à cerner dans la mesure où le législateur
semble avoir assoupli cette limite au sein du régime d'accès. En
effet, la protection des droits de propriété intellectuelle
était déjà prévue dans la version initiale de la
loi de 1978 en matière d'accès aux documents administratifs.
Ainsi l'article 10 de la loi prévoyait que « Les documents
administratifs sont communiqués sous réserve des droits de
propriété littéraire et artistique ». Cette
disposition était assortie d'un second alinéa, prévoyant
l'interdiction « de reproduire, de diffuser ou d'utiliser à des
fins commerciales les documents communiqués ». Or le nouvel
article 9 de la loi, issu de l'ordonnance de 2005, a conservé le premier
alinéa mais pas le second. Dès lors, il semblerait que les
documents administratifs obtenus dans le cadre de la procédure
d'accès puissent faire l'objet d'une réutilisation, quand bien
même ils renfermeraient des objets protégés par des droits
de propriété intellectuelle, ou du moins des droits de
propriété littéraire et artistique.
34 - Par ailleurs, les « tiers » de l'article 10 c)
ne font l'objet d'aucune définition. Les informations publiques
étant produites ou reçues par les administrations, il convient
d'envisager la possibilité que les tiers ainsi désignés
soient les fonctionnaires, premiers artisans de l'information
18
publique. Depuis la loi DADVSI36, les
fonctionnaires sont considérés comme étant titulaires
ab initio d'un droit d'auteur sur les oeuvres qu'ils créent, au
même titre que les salariés37. Cette déclaration
ne doit pas masquer le régime des auteurs fonctionnaires, qui demeure
spartiate tant dans ses attributs moraux que patrimoniaux. D'une part,
l'article L. 121-7-1 du code de la propriété intellectuelle
soumet l'exercice de son droit de divulgation par « l'agent » au
« respect des règles auxquelles il est soumis en sa
qualité d'agent », et il ne peut ni « s'opposer
à la modification de l'oeuvre dans l'intérêt du service
», ni « exercer son droit de repentir et de retrait
». D'autre part, l'article L. 131-3-1 du code de la
propriété intellectuelle organise une cession de plein droit
à l'Etat du droit d'exploitation sur l'oeuvre, « Dans la mesure
strictement nécessaire à l'accomplissement d'une mission de
service public ». Néanmoins, si l'Etat souhaite
réaliser une exploitation commerciale de ces oeuvres, il ne dispose plus
envers l'agent que d'un droit de préférence38. Cette
dernière considération est à prendre en compte s'agissant
de la question de la gratuité des informations publiques. En effet,
dès lors qu'une administration39 envisage de commercialiser
des informations publiques contenant une oeuvre créée par un
fonctionnaire, il doit au préalable conclure un contrat avec cet agent,
en usant de son droit de préférence. A défaut de contrat,
l'exploitation commerciale violerait les droits d'auteur de l'agent et la
réutilisation de cette oeuvre serait une contrefaçon.
Néanmoins, le risque pour les réutilisateurs d'informations
publiques est à nuancer : la Licence Ouverte qui en cadre la
réutilisation d'informations en France (Voir Titre II) dispose en effet
que « Le « Producteur » garantit que « l'Information
» ne contient pas de droits de propriété intellectuelle
appartenant à des tiers ». Dès lors, en cas de litige
relatifs à des droits de propriété intellectuelle, les
réutilisateurs d'informations publiques pourraient engager la
responsabilité du Producteur de l'Information.
35 - Il semblerait que le législateur ait
souhaité que les informations publiques et les droits de
propriété intellectuelle n'entretiennent aucun rapport entre eux.
Cette analyse est corroborée par la formule de l'article 10 c) : «
Ne sont pas considérées comme des informations publiques
(...) les
36 Loi du 1er août 2006 relative aux droits
d'auteur et aux droits voisins dans la société de
l'information
37 L'article L. 111-1, alinéa 3, du Code de
la propriété intellectuelle dispose : « L'existence ou
la conclusion d'un contrat de louage d'ouvrage ou de service par l'auteur d'une
oeuvre de l'esprit n'emporte pas dérogation à la jouissance du
droit reconnu par le premier alinéa, sous réserve des exceptions
prévues par le présent code. Sous les mêmes
réserves, il n'est pas non plus dérogé à la
jouissance de ce même droit lorsque l'auteur de l'oeuvre de l'esprit ou
un agent de l'Etat, d'une collectivité territoriale, d'un
établissement public à caractère administratif, d'une
autorité administrative indépendante dotée de la
personnalité morale ou de la Banque de France. »
38 Article L. 131-3-1 alinéa 2 du Code de la
propriété intellectuelle : « Pour l'exploitation
commerciale de l'oeuvre mentionnée au premier alinéa, l'Etat ne
dispose envers l'agent auteur que d'un droit de préférence
».
39 La formulation du deuxième alinéa
de l'article L. 131-3-1 vise « l'Etat ». Il s'agit d'une maladresse
du législateur car la disposition s'applique en fait à toutes les
administrations.
38 - La directive du 17 novembre 2003 exclut de son champ
d'application les « documents
19
informations contenues dans des documents (...) sur
lesquels des tiers détiennent des droits de propriété
intellectuelle ». Mais les innombrables références aux
droits de propriété intellectuelle dans le régime de
réutilisation trahissent l'ambiguïté de ce rapport. Au
soutien de cet argument, l'on citera l'article 25 de la loi de 1978, qui porte
l'art de la contradiction à son climax. Dans un chapitre intitulé
« Dispositions communes » (aux régimes d'accès
et de réutilisation), cet article énonce : « Lorsqu'un
tiers est titulaire de droits de propriété intellectuelle portant
sur un document sur lequel figure une information publique, l'administration
qui a concouru à l'élaboration de l'information ou qui la
détient indique à la personne qui demande à la
réutiliser l'identité de la personne physique ou morale titulaire
de ces droits ou, si celle-ci n'est pas connue, l'identité de la
personne auprès de laquelle l'information en cause a été
obtenue ». Autrement dit, il se peut qu'une information publique soit
grevée par des droits de propriété intellectuelle... Face
à cette contradiction manifeste, la garantie d'absence de droits
propriété intellectuelle qui est fournie par la Licence Ouverte
(Voir Titre II) est une bénédiction.
36 - Nous avons vu que le législateur a
expressément exclu du champ des informations publiques les informations
les informations sur lesquelles des tiers détiennent des droits de
propriété intellectuelle. Il ressort de cette exclusion de
principe que le cadre juridique de l'Open Data ne remet pas en cause le droit
de la propriété intellectuelle. Cependant, la portée de
cette disposition sibylline est difficile à évaluer eu
égard à l'absence de précision quant à la notion de
« tiers » qu'elle évoque. L'article 25 de la loi, qui
évoque l'hypothèse de l'existence de droits de
propriété intellectuelle assis sur un document « sur
lequel figure une information publique » rend d'autant plus opaque
cette exclusion. En somme, le réutilisateur d'informations publiques ne
peut que se parer de la garantie d'absence de droits de propriété
intellectuelle sur les informations publiques mises à disposition.
37 - A mi-chemin entre les informations exclues du champ de la
réutilisation et les informations devant faire l'objet d'une mise
à disposition, on trouve les informations produites par les
établissements et institutions d'enseignement et de recherche et les
établissements culturels, qui font l'objet d'un régime
dérogatoire.
II - Un régime dérogatoire pour les
informations produites par les établissements et institutions
d'enseignement et de recherche et les établissements culturels
20
détenus par des établissements
d'enseignement et de recherche » et les « documents
détenus par des établissements culturels
»40. Cette exclusion s'est traduite par l'instauration
d'un régime dérogatoire pour la réutilisation de ce type
d'informations. En effet, l'article 11 de la loi de 1978 dispose que les «
établissements et institutions d'enseignement et de recherche
» ainsi que les « établissements, organismes ou
services culturels » peuvent fixer les conditions dans lesquelles les
informations peuvent être réutilisées, le cas
échéant.
39 - Au niveau de l'Union européenne, cette exclusion
de principe des informations culturelles du champ des informations publiques
procède d'une impossibilité pour les Etats membres de s'accorder
une définition des informations émanant des institutions
culturelles : des musées aux archives en passant par les
bibliothèques et les universités, la diversité des
informations culturelles rend complexe la mise au point d'une définition
unitaire et donc d'un régime commun. Par ailleurs, les enjeux
liés aux droits de propriété intellectuelle
attachés à de telles informations à achever de dissuader
le législateur de les intégrer dans le régime de
réutilisation.
40 - C'est le coût lié à la diffusion des
informations culturelles qui représente un frein pour les institutions
détentrices de telles données. Ainsi, dans une communication du 7
mai 2009 relative au réexamen de la directive, la Commission a
constaté que les États membres -à l'exception de la
Lettonie et de la Lituanie- estimaient « que les charges
administratives et les coûts associés ne seraient pas
compensés par les avantages potentiels », faisant état
notamment de droits de propriété intellectuelle détenus
par des tiers sur « une grande partie des données
».
Article premier, 2. e) et f)
41 - La Commission prône au contraire41 la
numérisation des collections culturelles pour
« [favoriser] l'accès à la culture en
rendant le patrimoine culturel détenu par les institutions culturelles
européennes (...) plus facilement accessibles à des fins
professionnelles, éducatives et récréatives ».
La Commission affiche en effet sa volonté de « promouvoir
l'accès aux informations scientifiques et la préservation de ces
dernières ». Pour ce faire, elle prône une ouverture
large de ces informations « à des fins de consultation et de
réutilisation ».
42 - S'agissant du patrimoine culturel, la Commission affiche
également sa volonté de numériser les collections
culturelles, considérant que « la numérisation fait de
ces ressources un
40 Article premier, 2. e) et f)
41 Proposition de directive du Parlement
européen et du Conseil du 12 décembre 2011, modifiant la
directive 2003/98/CE concernant la réutilisation des informations du
secteur public
21
atout durable pour l'économie tout en créant
de nombreuses possibilités d'innovation ». Par ailleurs, ces
objectifs de disponibilité et de numérisation ouverture des
données culturelles seraient « conformes aux objectifs
conformes à l'agenda européen de la culture et au programme de
travail du Conseil en faveur de la culture ».
43 - Dès lors on est en droit d'espérer une
modification de la directive ISP en ce sens. Cette entrée des
informations culturelles dans le champ des informations publiques se traduirait
par une modification de l'article 2. e) de la directive de manière
à réintégrer dans le champ d'application de la directive
les « documents détenus par (...) des bibliothèques
universitaires (...) autres que des documents issus de la recherche
protégés par des droits de propriété intellectuelle
détenus par des tiers ». Si cette proposition aboutissait
à une modification effective de la directive, seraient alors
réutilisables les informations scientifiques universitaires dès
lors qu'aucun droit de propriété intellectuelle n'y fait
obstacle.
44 - Certaines institutions culturelles n'ont pas attendu
l'intervention du législateur pour libérer leurs informations, et
ont fixé elles-mêmes les conditions de réutilisation,
conformément aux dispositions de l'article 11. Cette « exception
culturelle » a par exemple été utilisée par BnF pour
les données bibliographies enrichies42 ou la
bibliothèque nationale et universitaire de Strasbourg43.
45 - Au terme de cette première section, nous avons
écarté du champ de l'information publique les informations dont
la communication ne constitue pas un droit (soit en considération
d'impératifs d'ordre public, soit au nom de la protection des
données à caractère personnel), les informations produites
par les administrations dans l'exercice d'une mission de service public
à caractère industriel ou commercial et les informations sur
lesquelles des tiers détiennent des droits de propriété
intellectuelle. En outre nous avons identifié des informations faisant
l'objet d'un régime dérogatoire à l'endroit des
informations produites par les établissements et institutions
d'enseignement et de recherche et les établissements culturels. Pour ce
type d'informations, les « établissements » mentionnés
ont une liberté de mise à disposition. Cette définition en
creux permet d'aborder à présent l'information publique en en
proposant une définition positive.
42
http://data.bnf.fr
43
http://www.bnu.fr
Section 2 - L'information publique : définition
positive
46 - Nous étudierons dans un premier temps le choix du
législateur de consacrer le vocable « information » (I) puis
nous étudierons le caractère public de l'information (II).
I - Le choix du vocable « information »
47 - Si l'expression « information publique » a
été consacrée en droit interne par l'ordonnance de
transposition du 6 juin 2005, le choix d'ancrer le régime de
réutilisation dans la loi du 17 juillet 1978 est susceptible
d'entraîner une confusion avec les « documents administratifs »
du régime d'accès. Par ailleurs, ce risque de confusion est
entretenu par le choix du législateur communautaire d'introduire la
notion générique de « document » pour désigner
l'objet de la réutilisation, c'est-à-dire « l'information
»... En outre, l'expression « Open Data » est traduite le plus
souvent, et à juste titre, par « données ouvertes » ou
« données publiques », le terme « donnée »
ayant une signification juridique singulière. Face à ce maquis
linguistique, il convient de distinguer chacun de ces termes un par un.
48 - La pluralité de ces termes et leur
polysémie appellent une étude plus approfondie, dont le point de
départ peut être arrêté à l'endroit de la
notion de « document », introduite par la directive ISP de 2003.
Cette notion qui se veut générique couvre, aux termes du
considérant (11), « toute représentation d'actes, faits
ou informations - et toute compilation de ces actes, faits ou informations -
quel que soit leur support (écrit sur papier ou stocké sous forme
électronique ou enregistrement sonore, visuel ou audiovisuel),
détenue par des organismes du secteur public ». De cette
définition naît une double confusion.
49 - D'une part, le choix du terme « document » pour
désigner de manière générique « toute
représentation d'actes, faits ou information » induit une
confusion entre l'information et le support de cette information. Or c'est bien
le contenu du document et pas le support dont la directive entend encadrer la
réutilisation. Par ailleurs, le terme « document » est
susceptible d'être confondu avec l'expression « document
administratif » employée dans le chapitre Ier du titre Ier de la
loi du 17 juillet 1978, relatif à la « liberté
d'accès aux documents administratifs ». S'agissant de du
régime d'accès, l'expression « document administratif »
est justifiée par le contexte historique de ce régime : les
administrations « sont tenues de communiquer les documents
administratifs qu'elles détiennent aux personnes qui en font la demande
». Ce texte est antérieur à l'ère
numérique et par
22
23
conséquent, la communication d'une information
supposait donc nécessairement la communication du support physique sur
lequel elle se trouvait. En revanche, le choix du législateur
européen d'opter pour le vocable « document » ne trouve aucune
justification acceptable. En effet à l'ère numérique
l'information est autonome, détachée de son support. Il eût
donc été préférable que la directive introduise une
notion générique d'« information » plutôt que de
document.
50 - D'autre part, l'emploi de l'expression «
représentation d'actes, faits ou informations » dans la
directive ISP induit une confusion avec la notion de « donnée
», qui est classiquement définie comme la représentation
d'une information sous une forme conventionnelle destinée à
faciliter son traitement. Autrement dit, « la donnée est donc
de l'information, un produit « formaté » pour pouvoir
être traité par un système informatique
»44.
51 - Par ailleurs, l'expression « données ouvertes
» n'a pas de résonance juridique en droit français. Cette
expression a néanmoins le mérite de renvoyer clairement au
mouvement Open Data et aux principes de partage qui le sous-tendent.
52 - Au final, le choix du législateur interne de
privilégier le terme « information » permet de ne pas
restreindre le champ de la réutilisation aux seules informations
formatées -les données publiques- mais d'y inclure
également toute forme d'information. Néanmoins, il convient
également de noter que certains auteurs privilégient l'expression
« données publiques » au motif que les difficultés
juridiques se « posent essentiellement à propos de produits
informatiques intégrant »45.
53 - Il n'existe aucune harmonie sémantique au sein des
textes se rapportant à l'Open Data. Le choix du législateur
français pour le vocable « information » dans la transposition
de la directive ISP est donc louable en ce que ce terme générique
permet d'appréhender l'information sous sa forme physique (au sein d'un
document papier) et sous sa forme numérique (une base de
données). Il est cependant regrettable que le législateur n'ait
pas harmonisé la loi de 1978 sur ce plan en modifiant notamment le
chapitre Ier relatif au régime d'accès, dans lequel le terme
« document administratif » continue de prospérer.
Au-delà de ces considérations terminologiques, dont nous
abstrairons en privilégiant systématiquement le terme «
information », il convient à présent étudier le
caractère public de l'information.
44 Jean-Michel Bruguière, Les données
publiques et le droit, Litec, 2002
45 Philippe Gaudrat, Commercialisation des
données publiques, La Documentation française, 1992
II - Le caractère public de l'information
54 - Le caractère public de l'information peut
être appréhendé soit dans une perspective
matérielle, soit dans une perspective organique. Dans la première
hypothèse, c'est le critère du service public que l'on va
retenir. Partant, on considérera que l'information publique est
l'information produite ou détenue dans l'exercice d'un service
public. Dans la seconde hypothèse, la perspective organique renvoie
quant à elle à l'origine publique de l'information. Ainsi
entendue, l'information publique est l'information produite/détenue
par l'administration.
55 - Par ailleurs, les auteurs ont tergiversé sur le
vocable à employer pour désigner l'action définissant la
relation entre l'administration et l'information. D'une part, le terme «
production » a le mérite de renvoyer à l'activité du
service public, mais restreint le champ de l'information publique en excluant
les informations « détenues » mais non produites par
l'administration. D'autre part, la « détention » suppose
l'existence d'un support incorporant l'information, ce qui ne rend pas compte
de manière satisfaisante de l'autonomie de l'information
vis-à-vis de son support. Néanmoins, on pourrait objecter que,
par métonymie, la « détention de l'information »
signifie la « détention du support sur lequel figure l'information
», étant entendu que le support -papier ou électronique-
n'est pas un élément pertinent dans la perspective de la
réutilisation.
56 - La directive ISP du 17 novembre 2003 a opté pour
l'approche organique, puisqu'elle « concerne la réutilisation
des informations du secteur public ». Dans son article premier
relatif à ses objet et champ d'application, la directive précise
cette approche organique en visant les « documents46
existants détenus par des organismes du secteur public des États
membres ». De manière tautologique, le considérant (11)
énonce qu'un « document détenu par un organisme du
secteur public est un document dont cet organisme est habilité à
autoriser la réutilisation ». Dans le cadre de la directive
ISP, l'article 2. 1) précise qu'il faut entendre par organismes du
secteur public « l'État, les collectivités
territoriales, les organismes de droit public et les associations
formées par une ou plusieurs de ces collectivités ou un ou
plusieurs de ces organismes de droit public ».
57 - L'ordonnance de transposition du 6 juin 2005 a repris
l'approche organique, l'article 10 énonçant que peuvent
être « utilisées47 les informations figurant
dans des documents produits ou
46 Rappelons que le terme « document »
est ici employé comme un terme générique et peut donc
être remplacé par « information » pour plus de
clarté.
47 Il semblerait que l'absence du préfixe
« ré » soit une maladresse du législateur. Le chapitre
II de la loi de 1978 dans lequel figure l'article 10 susvisé est en
effet intitulé « De la réutilisation des informations
publiques » et le terme « réutilisation » y est
employé à de multiples reprises pour définir l'action se
24
25
reçus par les administrations mentionnées
à l'article 1er ». Or l'article premier de la loi du 17
juillet 1978 énumère les administrations concernées par la
liberté d'accès aux documents administratifs : «
l'État, les collectivités territoriales ainsi que (...) les
autres personnes de droit public ou les personnes de droit privé
chargées de la gestion d'un service public ».
58 - L'on peut s'interroger sur la signification du vocable
« document » employé dans l'article 10 susvisé. Il
semble s'agir du support de l'information, ce qui le distingue du «
document » au sens de la directive qui, rappelons-le, vise « tout
contenu quel que soit son support ». Pour autant, s'agit-il d'un
« document administratif » au sens de l'article premier de la loi de
1978 ? Rien n'est moins sûr au vu de la liste - non exhaustive - que ce
dernier dresse : « les dossiers, rapports, études, comptes
rendus, procès-verbaux, statistiques, directives, instructions,
circulaires, notes et réponses ministérielles, correspondances,
avis, précisions et décisions ». Pour certains
auteurs48, cette confusion entre l'information et son support
provient de l'ancrage du régime de réutilisation des informations
publiques dans la loi de 1978, dont l'objet initial est l'accès aux
documents administratifs. En outre, l'on notera que l'expression «
produits ou reçus » pour désigner quels sont les documents
éligibles au régime de réutilisation pourrait
également être employée s'agissant des informations qu'ils
contiennent. En somme, la confusion entre les documents et les
informations est une véritable plaie pour la bonne
compréhension de la loi en ce qu'elle rend la délimitation de son
champ d'application très difficile.
59 - Malgré les incertitudes qui planent sur la
définition des informations publiques, le choix du législateur
d'opter pour une approche organique et une énumération des
informations exclues permet de délimiter le champ d'application du
régime de réutilisation des informations publiques. Il convient
d'étudier à présent les modalités de ce
régime de réutilisation.
rapportant à l'information. Celle-ci ayant
déjà été utilisée par l'autorité
administrative qui l'a produite, elle ne peut donner lieu qu'à une
nouvelle utilisation.
48 J.-M. Bruguière, Données publiques
: la confusion des genres de l'ordonnance du 6 juin 2005, La Semaine Juridique
Entreprise et Affaires n° 46, 17 novembre 2005, 1625
26
Chapitre 2 - Les modalités de
réutilisation de l'information publique
60 - La directive de 2003 permet aux États membres
« [d'autoriser] la réutilisation des documents49
sans conditions ou (...) [d'imposer] des conditions, le cas
échéant par le biais d'une licence réglant des questions
pertinentes »50. N'ayant initialement choisi la licence
que pour la réutilisation payante d'informations publiques, la France a
finalement généralisé ce mécanisme (section 1). La
loi de 1978 modifiée par l'ordonnance de 2005 énonce les
modalités communes de la réutilisation des informations publiques
(section 2) et traite du cas particulier de la tarification (section 3).
Section 1 : La généralisation de la licence
de réutilisation
61 - Le choix d'encadrer la réutilisation par une
licence est clair et non équivoque s'agissant de la réutilisation
payante d'informations publiques51 mais, concernant la
réutilisation gratuite, un doute a longtemps plané sur le point
de savoir si la conclusion d'une licence était nécessaire.
Partant, certains auteurs ont posé la question de la
licéité d'une licence pour la réutilisation gratuite
d'informations publiques, considérant que cela revenait à ajouter
une condition -la contractualisation- qui ne figure pas dans la
loi52. En effet, l'article 16 de la loi du 17 juillet 1978
prévoit que la réutilisation d'informations publiques soumise au
paiement d'une licence donne lieu à la délivrance d'une licence,
mais ne dit mot s'agissant de la réutilisation gratuite. Partant, l'on
pourrait considérer que la licence gratuite nouvellement introduite
porte atteinte au principe de libre réutilisation érigé
par l'article 10 alinéa 1 de la même loi. Néanmoins, le
décret d'application du 30 décembre 2005 semble faire
référence à une licence générale de
réutilisation en son article 37, évoquant une « demande
de licence » préalable à la réutilisation,
ajoutant que cette demande doit « préciser l'objet et la
destination, commerciale ou non, de la réutilisation envisagée
»53. Puis la circulaire du 29 mai 2006 a en partie
dissipé ce malentendu en énonçant : « Il n'est
pas interdit à l'administration d'utiliser également les licences
en cas de mise à disposition gracieuse ». Mais la circulaire
précise aussitôt que « la licence ne peut dans ce cas
servir qu'à rappeler ou préciser à
49 Au sens générique
50 Article 8.1 de la directive ISP
51 Loi du 17 juillet 1978, article 16 al. 1 :
« Lorsqu'elle est soumise au paiement d'une redevance, la
réutilisation d'informations publiques donne lieu à la
délivrance d'une licence »
52 G. Lambot, Données moi, Revue Lamy Droit
de l'immatériel, 2010, n° 62, à propos de la licence «
information publique librement réutilisable » initiée par le
ministère de la Justice et des Libertés
53 L'article 37 précise en son
deuxième alinéa que « [la demande de licence] peut
être présentée en même temps que la demande
d'accès au document soit ultérieurement ».
27
l'utilisateur les conditions d'usage fixées par
l'article 12 de la loi du 17 juillet 1978 », à savoir le
respect de l'intégrité des informations publiques. C'est ainsi
que le mécanisme de la licence s'est généralisé,
que la réutilisation soit payante ou non, étant
précisé que cette licence ne peut ajouter aucune condition
supplémentaire à la loi de 1978 lorsque la réutilisation
envisagée est gratuite.
62 - Entre le décret d'application de décembre
2005 et l'introduction d'une licence générale de
réutilisation des informations publiques à la fin de
l'année 2011, six années se sont écoulées pendant
lesquelles ont cohabité un principe de libre
réutilisation54 posé par l'article 10 et un recours
effectif aux licences de réutilisation de plus en plus prononcé.
Pendant cette période intermédiaire, les licences émises
par les organismes publics avaient pour finalité de préciser le
régime de réutilisation des informations publiques dans certains
cas particuliers. Ainsi est apparue la « Licence de
réutilisation non commerciale » des informations sur les
chevaux Equipaedia55, ou encore la « Licence information
publique librement réutilisable » (LIP) du ministère de
la Justice56.
63 - La question du recours à une licence gratuite
été simplifiée en octobre 2011 avec l'introduction d'une
licence-type intitulée « Licence Ouverte »,
rédigée pour la réutilisation d'informations provenant du
portail «
data.gouv.fr »
(Voir Titre II) mais applicable à tous types de réutilisation
gratuite. L'APIE57 énonce en effet sur son site que «
lorsque la réutilisation est gratuite ou relève des seules
conditions générales fixées par la loi, il convient de se
reporter à la licence ouverte conçue et publiée par la
mission Étalab ». Puisque la Licence Ouverte s'applique
à toute réutilisation gratuite et qu'elle s'impose comme un
complément des dispositions légales, on peut donc
considérer que la réutilisation gratuite des informations
publiques est le cas général de réutilisation. La
réutilisation payante fait quant à elle l'objet de règles
spéciales avec des licences particulières.
64 - La distinction entre réutilisation gratuite
(Licence Ouverte) et réutilisation payante (licence spéciale)
étant clarifiée, il convient à présent de nous
intéresser aux modalités communes de réutilisation.
54 Principe auquel il est toujours fait
référence par la Commission d'accès aux documents
administratifs : « Le nouvel article 10 pose, au contraire [de
l'ancien qui posait un principe d'interdiction], un principe de libre
réutilisation des informations publiques, sous les réserves et
dans les conditions prévues par le chapitre II de la loi du 17 juillet
1978 »
55 Cette licence émise par l'Ecole nationale
d'équitation concerne exclusivement les informations extraites de la
« base SIRE » et a pour particularité de n'être valable
qu'un an.
56
http://www.rip.justice.fr
57 L'Agence du patrimoine immatériel de
l'État est un service à compétence nationale
rattaché au ministre de l'économie et du budget,
créé en 2007. L'APIE est chargée de la gestion du
patrimoine immatériel de l'Etat (brevets, marques, images, bases de
données....) :
http://www.economie.gouv.fr
58 Communication de la Commission au Parlement
européen, au Conseil, au Comité économique et social
28
Section 2 - Les modalités communes du régime
de réutilisation de l'information publique
65 - Le régime de réutilisation encadre les
modalités de réutilisation tant du côté de
l'administration (I) que du réutilisateur (II).
I - Les obligations de l'administration
A - Principes de libre réutilisation et de non
exclusivité
66 - Si la directive ISP « ne contient aucune
obligation d'autoriser la réutilisation des documents », la
formule générale et abstraite de l'article 10 de la loi de 1978
semble consacrer un principe de libre réutilisation : « Les
informations (...) peuvent être réutilisées ».
67 - Un des corollaires de ce principe de libre
réutilisation est le principe de non exclusivité, introduit par
la directive ISP dans le but de préserver la concurrence sur le
marché des services de l'information. Ainsi aux termes du
considérant (20) de la directive, « les organismes du secteur
public devraient respecter les règles applicables en matière de
concurrence (...) en évitant autant que faire se peut de conclure, entre
eux, et avec des partenaires privés, des accords d'exclusivité
». L'article 11 de la directive est plus ferme sur ce point puisqu'il
pose le principe d'interdiction des accords d'exclusivité, « la
réutilisation des documents [étant] ouverte à tous les
acteurs potentiels du marché ». Ce principe d'interdiction des
accords d'exclusivité est encore plus prégnant dans l'ordonnance
de 2005, qui dispose en son article 14 que « la réutilisation
d'informations publiques ne peut faire l'objet d'un droit d'exclusivité
accordé à un tiers ».
68 - Par exception, il est possible de déroger à
ce principe de non exclusivité « lorsqu'un droit
d'exclusivité est nécessaire pour la prestation d'un service
d'intérêt général », exception reprise par
l'article 14 de l'ordonnance. Le considérant (20) a identifié une
situation dans laquelle un accord d'exclusivité était
envisageable : la publication d'une information par un éditeur
commercial, qui poserait l'octroi d'un droit d'exclusivité comme
condition de son action.
69 - Dans sa communication du 7 mai 200958, la
Commission a relevé que certains pays tels
29
que les Pays-Bas le Royaume-Uni avaient «
effectué des études poussées pour recenser les accords
d'exclusivité conclus entre le gouvernement central et les
autorités locales ». Par ailleurs, « la Lettonie a
lancé une procédure visant à garantir que tous les droits
exclusifs accordés sont conformes à la directive et que les
autorités chargées de la concurrence ont été
consultées au préalable ».
70 - En toute hypothèse, la pertinence de chaque accord
d'exclusivité est amenée à être remise en question
au fur et à mesure puisqu'au terme de l'article 11 de la directive,
« le bien-fondé de l'octroi de ce droit d'exclusivité
fait l'objet (...) d'un réexamen » au moins tous les trois
ans.
71 - Par ailleurs les autorités administratives qui
détiennent des informations publiques doivent mettre à la
disposition du public un répertoire des principales informations
publiques.
B - La tenue d'un répertoire des informations
publiques
72 - Pour que les informations publiques puissent faire
l'objet d'une réutilisation, encore faut-il que les
réutilisateurs potentiels sachent quelles sont les informations
disponibles. Cette méta-information fait donc heureusement
l'objet d'une obligation pour « les administrations qui produisent ou
détiennent des informations publiques », l'article 17 de la
loi de 1978 les enjoignant de tenir « à la disposition des
usagers un répertoire des principaux documents dans lesquels ces
informations figurent ».
73 - Le caractère non exhaustif de ce répertoire
a été confirmé par la circulaire du 29 mai 2006, qui
précise que « les administrations disposent donc d'une marge
d'appréciation pour définir les documents qui doivent y figurer,
en tenant notamment compte de l'intérêt que pourrait
présenter leur réutilisation ». En outre, la CADA a
précisé à ce sujet que l'absence de constitution d'un tel
répertoire n'expose pas la collectivité publique à des
sanctions59.
74 - En somme l'administration n'est soumise à aucune
obligation de mise à disposition mais il découle de la loi de
1978 un principe de libre réutilisation. Par ailleurs, l'administration
doit respecter un principe de non exclusivité et tenir un
répertoire des informations publiques. A ces obligations de
l'administration font face les droits et obligations des réutilisateurs
d'informations
européen et au Comité des régions,
concernant la réutilisation des informations du secteur public et le
réexamen de la directive 2003/98/CE)
59 CADA, conseil n° 20062173 du 8 juin 2006
30
publiques.
II - Les droits et obligations du
réutilisateur
A - Les droits du réutilisateur
75 - Aux termes de l'article 10 de la loi de 1978, les
informations publiques peuvent être « utilisées par toute
personne qui le souhaite à d'autres fins que celles de la mission de
service public ». Cette formule abstraite permet au
réutilisateur une grande liberté quant à la
destinée des informations publiques, y compris dans un but commercial
(développement d'un service de l'information tel qu'une application
smartphone par exemple) ou encore dans le but de critiquer l'administration sur
sa gestion des services publics. Cependant, cette liberté s'exprime dans
le respect de certaines obligations à la charge du
réutilisateur.
B - Les obligations du réutilisateur
76 - Si la réutilisation d'informations publiques est
libre, elle n'est pas pour autant dénuée d'obligations à
la charge du réutilisateur. L'article 10 de la loi de 1978
précise à ce sujet que les « limites et conditions
» de la réutilisation d'informations publiques s'appliquent
non seulement pour les informations publiques mises à disposition par
l'administration mais aussi pour les informations « obtenues dans le
cadre de l'exercice du droit d'accès aux documents administratifs
». Cette disposition fait le lien entre le régime
d'accès et le régime de réutilisation en consacrant un
principe d'unicité des informations publiques : quel que soit le mode
d'obtention -demande d'accès ou mise à disposition- les
informations publiques sont soumises aux mêmes règles au stade de
leur réutilisation.
77 - Une obligation de respect de l'intégrité
des informations publiques est mise à la charge du réutilisateur.
Mais il ne s'agit pas là d'une obligation équivalente au respect
de l'oeuvre de l'auteur60, qui serait trop contraignante en
matière de réutilisation d'informations publiques. L'article 12
de la loi de 1978 dispose que « Sauf accord de l'administration, la
réutilisation des informations publiques est soumise à la
condition que ces dernières ne soient pas altérées, que
leur sens ne soit pas dénaturé et que leurs sources et la date de
leur dernière mise à jour soient mentionnées ».
A contrario, le réutilisateur peut modifier les informations publiques,
les adapter et les traduire sans
60 Article L. 121-1 du Code de la
propriété intellectuelle
31
avoir à en demander l'autorisation, et ce dans les limites
susmentionnées.
78 - La violation de cette obligation est passible de
sanctions aux termes de l'article 18, qui distingue selon que la
réutilisation s'est faite à des fins commerciales ou non. Ainsi,
la réutilisation d'informations publiques à des fins non
commerciales en violation des dispositions de l'article 12 est passible d'une
amende pouvant aller jusqu'à 1 500 euros (contravention de 5e classe).
Lorsque la violation de ces dispositions intervient dans le cadre d'une
réutilisation à des fins commerciales, « le montant de
l'amende est proportionné à la gravité du manquement
commis et aux avantages tirés de ce manquement », dans la
limite de 150 000 euros (amende portée à 300 000 euros en cas de
récidive). Pour les entreprises, un manquement
réitéré est passible d'une amende égale à
« 5% du chiffres d'affaires hors taxes du dernier exercice clos dans
la limite de 300 000 euros ». Si l'omission de la source et/ou de la
dernière date de mise à jour de l'information est facile à
déterminer, il en va autrement de la dénaturation du sens,
laquelle ne fait l'objet d'aucune précision. Cela est regrettable au
plan de la sécurité juridique, d'autant plus que la formulation
de cette obligation laisse entendre que la dénaturation du sens des
informations publiques est une infraction objective. Partant, la bonne foi du
réutilisateur serait indifférente.
79 - En pratique, la CADA peut-être saisie d'une plainte
déposée par l'administration dont les informations ont
été altérées/dénaturées et est
compétente pour appliquer les sanctions de l'article 18 de la
loi61. Au vu de la jurisprudence du Conseil
constitutionnel62, la sanction susceptible d'être
prononcée, en tant qu'elle émane d'une autorité
administrative agissant dans le cadre de prérogatives de puissance
publique, à la nature d'une sanction administrative. En cas de
contestation de la sanction prononcée par la CADA, le
réutilisateur d'informations publiques, devenu justiciable, devra donc
s'en remettre au juge de l'excès de pouvoir pour que soit engagée
la responsabilité de l'administration. Le régime de la sanction
administrative a été défini par la jurisprudence
administrative, qui s'est efforcée de limiter le pouvoir coercitif que
la loi avait
61 Article 22 de la loi du 17 juillet 1978 : «
La commission, lorsqu'elle est saisie par une administration
mentionnée à l'article 1er, peut, au terme d'une
procédure contradictoire, infliger à l'auteur d'une infraction
aux prescriptions du chapitre II les sanctions prévues par l'article 18
».
62 Décision n° 2009-580 DC du 10 juin
2009 relative à la loi dite « HADOPI », considérant 14
: « Considérant que le principe de la séparation des
pouvoirs, non plus qu'aucun principe ou règle de valeur
constitutionnelle, ne fait obstacle à ce qu'une autorité
administrative, agissant dans le cadre de prérogatives de puissance
publique, puisse exercer un pouvoir de sanction dans la mesure
nécessaire à l'accomplissement de sa mission dès lors que
l'exercice de ce pouvoir est assorti par la loi de mesures destinées
à assurer la protection des droits et libertés
constitutionnellement garantis ; qu'en particulier doivent être
respectés le principe de la légalité des délits et
des peines ainsi que les droits de la défense, principes applicables
à toute sanction ayant le caractère d'une punition, même si
le législateur a laissé le soin de la prononcer à une
autorité de nature non juridictionnelle »
32
conféré à certaines administrations afin
de respecter le principe de la séparation des pouvoirs. Ainsi le Conseil
d'Etat fait prévaloir le principe d'interprétation stricte
à propos du principe de légalité63. En toute
hypothèse, le principe non bis in idem trouvera à
s'appliquer, de telle sorte qu'une sanction pénale ne pourra se
superposer à une sanction administrative (et vice
versa)64.
80 - En plus de ces modalités communes à toute
réutilisation d'informations publiques, le législateur a
prévu des règles spéciales pour encadrer leur tarification
le cas échéant.
Section 3 - Le cas particulier de la tarification
81 - Si la gratuité de l'information publique est
revendiquée par les acteurs de l'Open Data, le régime de
réutilisation instauré en 2005 prévoit la
possibilité pour la puissance publique de tarifer certaines informations
(I). Dans cette hypothèse, la réutilisation se fait dans des
conditions prévues par des licences spéciales (II).
I - Le mode de calcul de la tarification
82 - La question de la tarification des informations publiques
a été abordée par la directive ISP, qui a cherché
à limiter le montant des redevances mises en oeuvre par les États
membres : « Lorsque des redevances sont prélevées, le
total des recettes provenant de la fourniture et des autorisations de
réutilisation de ces documents ne dépasse pas le coût de
collecte, de production, de reproduction et de diffusion, tout en permettant un
retour sur investissement raisonnable »65.
83 - L'encadrement de la tarification des informations
publiques a été transposé à l'article 15 de la loi
de 1978, qui énumère les postes qui peuvent être pris en
compte dans le calcul de l'assiette de la redevance. Ainsi, au-delà du
coût marginal de mise à disposition des informations, «
l'administration peut aussi tenir compte des coûts de collecte et de
production des informations » ainsi qu'une «
rémunération raisonnable de ses investissements, comprenant
le cas échéant un part au titre des droits de
propriété intellectuelle ». En toute hypothèse,
l'administration ne doit pas fixer un montant de redevances trop
élevé, au risque de se voir reprocher un abus de position
dominante en application de la théorie des facilités
essentielles.
63 Conseil d'État 4 mars 1960 Lévy
: RDP 1960 p. 1030
64 Ce principe a été rappelé par
l'arrêt de Grande Chambre de la Cour européenne des droits de
l'homme du 10 février 2009, requête n° 14939/03, Sergueï
Zolotoukhine c. Russie
65 Directive ISP, article 6
33
84 - A ces dispositions légales encadrant le mode de
calcul de la tarification font écho des dispositions contractuelles
précisant les modalités de réutilisation payante des
informations, au sein de licences type mises à la disposition des
réutilisateurs.
II - L'élaboration de licences type
85 - Suivant les prescriptions de la directive, le
législateur français a prévu que la réutilisation
d'informations publiques soumise au paiement d'une redevance donne lieu
à la délivrance d'une licence66. « Cette
licence fixe les conditions de la réutilisation des informations
publiques », qui « ne peuvent apporter de restrictions
à la réutilisation que pour des motifs d'intérêt
général et de façon proportionnée. Elles ne peuvent
avoir pour objet ou pour effet de restreindre la concurrence ».
86 - En outre, l'alinéa 3 de l'article 16 enjoint les
administrations de « mettre préalablement des licences types,
le cas échéant par voie électronique, à la
disposition des personnes intéressées par la réutilisation
de ces informations ». Le projet de licence payante, a
été établi par l'administration avec le concours de
l'Agence du patrimoine immatériel de l'État (APTE). Ont ainsi
été élaborés et mis à la disposition des
administrations deux modèles de licences type, qui « ont
vocation à s'appliquer lorsque la réutilisation est soumise
à des conditions particulières et/ou au paiement d'une redevance
»67. S'agissant de « modèles de licences
», les administrations qui souhaitent recourir à la
tarification pour la réutilisation de certaines de leurs informations
publiques ne sont pas tenues de les reprendre mot pour mot, à condition
de respecter les exigences légales. L'un de ces modèles
répond strictement aux exigences de la loi de 1978 (licence avec
livraison unique des informations) tandis que « le deuxième va
au-delà des exigences de la loi et répond aux attentes des
administrations et des opérateurs en organisant des modalités
particulières de mise à disposition des informations publiques,
lorsqu'elles comportent des mises à jour » (licence avec
livraison successive des informations).
87 - Si la diffusion et la possibilité de
réutilisation des informations publiques constituent l'essence de l'Open
Data, le potentiel des informations publiques n'a pu être pleinement
atteint via le régime mis en place par la directive TSP et les textes de
transposition qui l'ont accompagnée. En
66 Loi du 17 juillet 1978, article 16 al. 1 : «
Lorsqu'elle est soumise au paiement d'une redevance, la
réutilisation d'informations donne lieu à la délivrance
d'une licence »
67
https://www.apiefrance.fr
34
effet, le maquis juridique des règles de
réutilisation ainsi que la faible inclinaison de la puissance publique
à diffuser les informations produites ou reçues par les
administrations ont contrarié l'épanouissement du mouvement. Mais
l'Open Data a trouvé un second souffle en 2011, avec la mise en oeuvre
d'un portail mettant à disposition les informations publiques, toutes
réutilisables via une contractualisation standardisée.
35
TITRE II - LA STANDARDISATION DE L'OPEN DATA
88 - Le mouvement Open Data a pris une dimension nouvelle en
France, avec la mise en ligne le 5 décembre 2011 d'un site internet
«
data.gouv.fr » ayant pour
finalité de « rassembler et mettre à disposition
librement l'ensemble des informations publiques »68. Ce
« portail unique interministériel des données publiques
», dont la création a été décidée
par le conseil de modernisation des politiques publiques du 30 juin 2010, a
été réalisé par la mission « Étalab
», organisme ad hoc créé par le décret du 21
février 2011. Ce faisant, la France a emboîté le pas des
États-Unis et du Royaume-Uni, qui ont mis en ligne leur portail des
informations publiques respectivement en mai et septembre 2009.
89 - Le portail «
data.gouv.fr » doit mettre
à disposition « librement, facilement et gratuitement le plus
grand nombre d'informations publiques »69 émanant
« de l'État, des établissements publics administratifs
et, si elles le souhaitent, des collectivités territoriales et des
personnes de droit public ou de droit privé chargées d'une
mission de service public »70. Autrement dit, seules les
administrations centrales et les établissements publics à
caractère administratif ont l'obligation de coopérer avec la
mission Étalab à la mise en ligne de leurs informations publiques
; les autres administrations ne sont qu'incitées à le faire. Le
caractère supplétif de la mise à disposition
d'informations publiques par les collectivités territoriales et les
personnes chargées d'une mission de service public ajourne la question
du sort des initiatives locales qui ont vu le jour ça et
là71.
90 - Une licence gratuite a spécialement
été élaborée pour la réutilisation des
informations publiques mises en ligne sur le portail «
data.gouv.fr ». Cette licence
type marque l'avènement d'une standardisation de la réutilisation
des informations publiques, simplifiant considérablement la
démarche des réutilisateurs (chapitre 1). Néanmoins, le
contenu de la licence et la gestion du portail «
data.gouv.fr » soulève la
problématique de l'articulation de ce régime avec les autres
régimes de réutilisation (chapitre 2).
68 Décret n° 2011-194 du 21
février 2011 portant création d'une mission « Etalab »
chargée de la création d'un portail unique
interministériel des données publiques
69 Circulaire du 26 mai 2011 relative à la
création du portail unique des informations publiques de l'Etat «
data.gouv.fr » par la mission
« Etalab » et l'application des dispositions régissant le
droit de réutilisation des informations publiques
70 Décret du 21 février 2011, article
2
71 Les collectivités territoriales qui ont
ouvert leurs informations publiques ont emprunté des voies
différentes. Ainsi la ville de Rennes a développé sa
propre licence, tandis que Montpellier se réfère aujourd'hui
à la Licence Ouverte et que Paris a opté pour une version
française de la licence ODbL.
36
Chapitre 1 - La « Licence Ouverte » du
portail «
data.gouv.fr » ou la simplification de
la réutilisation des informations publiques
91 - La licence applicable aux informations publiques mises en
ligne sur «
data.gouv.fr » a
été élaborée par un groupe de travail conduit par
« Étalab » et composé de l'APIE, du COEPIA72
et des administrations concernées, conformément aux prescriptions
du Premier ministre73. Cette licence a été
présentée en octobre 2011, soit plus d'un mois avant l'ouverture
du portail «
data.gouv.fr ». Cette «
Licence Ouverte/Open Licence » (ci-après « la Licence Ouverte
» ou « la licence ») se veut un « outil juridique
adapté »74 à la réutilisation
gratuite des informations publiques mises en ligne.
92 - La Licence Ouverte est un contrat conclu entre, d'une
part, le « Producteur », défini comme «
l'entité qui produit « l'Information » et l'ouvre à
la réutilisation dans les libertés et les conditions
prévues par cette licence », et d'autre part le «
Réutilisateur », défini comme « toute personne
physique ou morale qui réutilise « l'Information »
conformément aux libertés de cette licence ». La
licence donne également une nouvelle définition de «
l'Information », qui se distingue de la notion « d'information
publique » au sens de la loi de 1978 puisqu'elle se restreint ici à
« des données ou informations proposées dans les
libertés et conditions de cette licence ». En outre, les
« données ou informations qui ont été
créés75 soit directement à partir «
d'Informations », soit à partir d'une combinaison «
d'Informations » et d'autres données ou informations qui ne
seraient pas soumises à cette licence » sont des «
Informations dérivées » au sens de la licence. On
retrouve ici une approche similaire à celle qui caractérise
l'oeuvre dérivée en droit d'auteur qui rappelons-le, est l'oeuvre
qui incorpore une oeuvre préexistante et qui est créée
sans le concours de l'auteur de l'oeuvre préexistante (le cas
échéant il s'agirait d'une oeuvre de collaboration). Ainsi
l'Information dérivée est à l'Information ce que l'oeuvre
dérivée est à l'oeuvre. La logique du droit d'auteur
irrigue le droit des informations publiques (Voir point 5), au risque
d'entretenir une confusion entre les notions d'oeuvre et d'information.
93 - Mais contrairement au droit d'auteur, le formalisme du
droit des informations publiques est réduit à la portion congrue.
Sur le portail «
data.gouv.fr » et plus
généralement dans le régime de réutilisation mis en
place dans le sillage de la directive ISP, les réutilisateurs
d'informations
72 Conseil d'orientation de l'édition publique
et de l'information administrative
73 Circulaire du 21 février 2011, Annexe III
74 Id.
75 Faute présente dans la licence
37
publiques n'ont pas à demander d'autorisation pour
réutiliser les informations mises à disposition. Ainsi, à
l'instar des contrats de licence proposés sur le portail des
informations publiques du Royaume-Uni («
data.gov.uk »), la Licence Ouverte
fonctionne selon le principe du click and use : la contractualisation
s'effectue par la seule réutilisation des informations mises en ligne,
auxquelles le Réutilisateur accède en cliquant sur le lien de
téléchargement du fichier.
94 - La Licence Ouverte simplifie la réutilisation des
informations publiques en ce qu'elle synthétise les droits et
obligations du Réutilisateur (section 1). Sa compatibilité avec
d'autres licences en fait un outil juridique privilégié pour la
réutilisation d'informations publiques de sources diverses (Section
2).
Section 1 - La synthèse des droits et obligations du
Réutilisateur
95 - Suivant un schéma contractuel traditionnel, la
Licence Ouverte énumère de façon exhaustive les droits (I)
et obligations (II) du Réutilisateur.
I - Les droits du Réutilisateur
96 - La Licence Ouverte permet de réutiliser librement
l'Information obtenue sur le portail «
data.gouv.fr », le
réutilisateur pouvant la reproduire, la copier et la transmettre, la
diffuser et la redistribuer, l'adapter, la modifier et en extraire et
transformer certains éléments, et enfin l'exploiter à
titre commercial. La dimension économique de la réutilisation de
« l'Information » soumise à la licence est soulignée
par deux exemples : la possibilité de combiner « l'Information avec
d'autres « Informations » et la possibilité de l'inclure dans
un produit ou application.
97 - Par analogie avec les oeuvres libres, on peut ici parler
d'information libre. En effet, la Licence Ouverte remplit les conditions pour
recevoir la qualification de licence libre. Plus précisément, il
s'agit d'une licence de type domaine public en ce qu'elle confère «
les libertés de copier, diffuser et modifier l'oeuvre sans qu'il y ait
l'obligation d'accorder les mêmes libertés lors d'une rediffusion
de l'oeuvre [ou l'information] modifiée ou non »76.
98 - Cette liberté sans contrepartie transparaissait
déjà dans l'article 10 de la loi du 17 juillet 1978, les
Informations téléchargées sur le portail «
data.gouv.fr » sont des
informations publiques
76 M. Clément-Fontaine, L'oeuvre libre,
JurisClasseur PLA, fascicule 1975
38
qui « peuvent être utilisées par toute
personne qui le souhaite à d'autres fins que celles de la mission de
service public pour les besoins de laquelle les documents [dans lesquels
figurent les informations publiques] ont été produits ou
reçus ». La Licence Ouverte vient donc confirmer par la voie
contractuelle le choix qui avait été consacré par la voie
légale.
99 - La Licence Ouverte fait expressément
référence à cet article 10 mais, au lieu d'en recopier le
contenu, reformule la disposition en en corrigeant les défauts. Ainsi,
il n'est plus fait référence à de quelconques documents
mais directement aux « informations publiques » que «
les administrations produisent ou reçoivent ». Par
ailleurs, il est préciser que ces informations publiques peuvent
être « réutilisées [et non pas «
utilisées »] par toute personne physique ou morale ». Cet
exercice de réécriture auquel s'est livrée la mission
Étalab ne modifie pas la substance de l'article 10 mais a le
mérite d'employer le vocabulaire idoine en matière de
réutilisation, en dissipant quelque peu la confusion produite par
l'ancrage du régime de réutilisation dans un texte
régissant le droit d'accès. Toujours est-il que ces modifications
stylistiques nous semblent pertinentes et devraient inspirer le
législateur.
100 - Le réutilisateur peut exercer ces libertés
à condition de respecter les obligations que la licence lui impose.
II - Les obligations du Réutilisateur
A - La « paternité de l'Information
»
101 - La réutilisation d'informations publiques dans
les conditions de la Licence Ouverte est possible à condition de «
mentionner la paternité de l'information ». L'emploi du
vocable « paternité » est une nouvelle référence
au droit d'auteur, filant un peu plus l'assimilation de l'information à
l'oeuvre. Pour autant, l'obligation de respect de la paternité de
l'information doit être distinguée du droit au respect de son nom
que détient l'auteur en vertu de l'article L. 121-177. Il
s'agit en effet pour le Réutilisateur de mentionner non pas le nom de
l'auteur mais la « source » de l'information
-précisant que la notion de source recouvre « a minima le nom
du Producteur »- ainsi que « la date de sa dernière
mise à jour ».
77 Article L. 121-1 al. 1 du code de la
propriété intellectuelle ; « L'auteur jouit du droit au
respect de son nom, de sa qualité et de son oeuvre. »
39
102 - Si un objectif légitime de
traçabilité de l'information semble fonder cette obligation, une
incertitude demeure quant à la portée de celle-ci. En effet, le
Producteur est défini comme « l'entité qui produit
l'information ». Selon cette définition organique, il faudrait
donc mentionner le nom de l'entité dont émane effectivement
l'information. Cette entité est mentionnée dans l'en-tête
de l'Information mise en ligne sur le portail «
data.gouv.fr ». Par exemple,
l'Information intitulée « Financement et dépenses de la
sécurité sociale » émane du Ministère du
Travail, de l'Emploi et de la Santé. Cette donc cette entité
qu'il faudrait mentionner lors de la réutilisation de cette Information.
C'est cette approche que semble privilégier la Licence Ouverte puisqu'il
est précisé que « le Réutilisateur peut notamment
s'acquitter de cette condition en indiquant un ou des liens hypertextes (URL)
renvoyant vers « l'Information » et assurant une mention effective de
sa paternité ».
103 - Mais lorsqu'on observe la seconde partie de la
définition du « Producteur », à savoir «
l'entité qui (...) ouvre [l'Information] à la
réutilisation dans les libertés et les conditions prévues
par cette licence », l'identité de ce dernier est loin de
tomber sous le sens. En effet, l'expression « ouvrir à la
réutilisation » est suffisamment sibylline pour laisser une marge
d'appréciation regrettable du point de vue de la sécurité
juridique. Si l'on s'en tient aux textes régissant la mise à
disposition des informations publiques sur «
data.gouv.fr », c'est la mission
Étalab qui est indirectement chargée de « mettre
à disposition librement l'ensemble des informations publiques
» via la création du portail «
data.gouv.fr ».
104 - Cette question triviale s'agissant de la
réutilisation d'un seul jeu de données s'avère autrement
complexe dans l'hypothèse d'une réutilisation combinant plusieurs
jeux de données émanant de différentes entités
voire obtenues sur différents portails d'informations publiques. Dans le
doute, il est préférable d'indiquer les liens hypertextes
renvoyant vers l'Information, comme suggéré par la licence.
105 - En toute hypothèse, la licence énonce que
« cette mention de paternité ne doit ni conférer un
caractère officiel à a réutilisation de «
l'Information », ni suggérer une quelconque reconnaissance ou
caution par le Producteur, ou par toute autre entité publique, du «
Réutilisateur » ou de sa réutilisation ».
106 - Par ailleurs, le Réutilisateur est soumis
à une obligation de respect de l'intégrité des
informations publiques.
B - L'intégrité de
l'Information
107 - La Licence Ouverte est silencieuse au sujet d'une
obligation de respect de l'intégrité de l'Information qui
pèserait sur le Réutilisateur. Cependant le régime
spécial de licence institué pour la réutilisation des
informations publiques mises en ligne sur «
data.gouv.fr » n'est pas
autonome. En effet si l'on se reporte à la lettre du décret du 21
février 2011, le portail «
data.gouv.fr » a vocation a
« rassembler et mettre à disposition librement l'ensemble des
informations publiques ». Les Informations au sens de la licence
n'étant ni plus ni moins que les informations publiques au sens du
décret (dans la mesure où elles sont réutilisables dans
les conditions de la licence), leur réutilisation ne saurait s'abstraire
des règles générales posées par la loi de 1978.
Dès lors, l'article 12 de cette dernière, qui conditionne la
réutilisation à la non altération des informations
publiques et à la non dénaturation de leur sens, trouve à
s'appliquer.
108 - La Licence Ouverte pose un principe de non
responsabilité du Producteur, ce qui représente un ferment
d'insécurité juridique préjudiciable au
développement de l'Open Data.
Section 2 - La non responsabilité du Producteur
: un ferment d'insécurité juridique
109 - La Licence Ouverte est marquée par la non
responsabilité du Producteur de l'Information tant vis-à-vis des
Réutilisateurs (I) que des tiers (II).
I - La non responsabilité du Producteur à
l'égard des Réutilisateurs
110 - La licence ouverte comporte un volet
responsabilité qui marque un désengagement du Producteur quant
à la qualité de l'information (A) et quant à sa fourniture
(B). Cette non responsabilité du Producteur a pour effet de placer le
Réutilisateur dans une situation d'insécurité juridique.
En effet celui-ci doit assumer seul le risque d'une information erronée
ou d'un problème dans la fourniture des informations sur lesquelles
repose son service.
111 - L'obligation de respect de l'intégrité des
informations publiques posée par l'article 12
40
A - Quant à la qualité de
l'Information
41
de la loi de 1978, et qui a également vocation à
s'appliquer à la réutilisation dans le cadre de la licence, n'est
pas réciproque. En effet, la Licence Ouverte pose un principe de non
responsabilité du Producteur s'agissant de la qualité de
l'Information, qui est « mise à disposition telle que produite
ou reçue (...) sans garantie expresse ou tacite... ». Ce
faisant, le Producteur s'abstrait de toute obligation s'agissant de
l'exploitabilité de l'Information.
112 - Ainsi le portail
data.gouv.fr comporte des informations
publiques qui ne sont pas nécessairement des données78
et qui sont parfois éparpillées entre plusieurs fichiers. Ces
informations publiques, si elles ont le mérite d'exister et d'être
disponibles, nécessitent un traitement pour pouvoir être
réutilisées.
113 - Plus généralement, la problématique
de l'exploitabilité des informations publiques renvoie à la
question des standards ouverts, définis en droit français comme
« tout protocole de communication, d'interconnexion ou
d'échange et tout format de données interopérable et dont
les spécifications techniques sont publiques et sans restriction
d'accès ni de mise en oeuvre »79. Il faut entendre
ici la notion de « format » comme la manière dont les
données sont codées, le fichier étant le support
immatériel de l'information. Les acteurs de l'Open Data revendiquent
à juste titre que les informations publiques soient mises à
disposition « sous un format ouvert et interopérable
»80. Or on remarque en pratique que le portail
data.gouv.fr comporte de nombreux
fichiers sous un format fermé tel que le .xls, qui correspond aux
tableurs de Microsoft Excel, là où des équivalents ouverts
tels que le .ods ou le .xml auraient pu être
privilégiés81.
114 - Les informations publiques mises à disposition
sous un format propriétaire sont susceptibles d'entraîner des
problèmes d'interopérabilité, dans l'hypothèse
où un Réutilisateur souhaiterait combiner de telles informations
avec d'autres informations sous un autre format. L'efficience du régime
de réutilisation des informations publiques du portail «
data.gouv.fr » est donc
directement corrélée avec la mise à disposition de ces
informations sous des standards ouverts.
115 - Malgré l'importance de la question des formats
ouverts pour garantir l'interopérabilité, il résulte de
l'annexe V de la circulaire du 26 mai 2011 que « Les typologies de
formats (...) sont [déterminées] selon un plan d'action et un
calendrier préparé par Etalab en concertation avec
78 Représentation d'une information sous une
forme conventionnelle destinée à faciliter son traitement
79 Loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la
confiance dans l'économie numériques, article 4
80 Déclaration sur l'Open Data en France (juin
2011), rédigée par Creative Commons France, Regards Citoyens,
Open Knowledge Foundation et Veni Vidi Libri
81
http://www.regardscitoyens.org
42
chaque ministère », ces derniers «
[privilégiant] notamment les formats exploitables comme ceux
tabulaires (CSV, ODS, XLS, etc.), textes (ODS, RTF, TXT, etc.),
structurés (XML, etc.), géographiques (GML, KML, etc.),
sémantiques (RDF, etc.), ou calendaires (iCalendar, etc.) » ,
sans distinction entre formats ouverts et propriétaires.
116 - Cette marge de manoeuvre de l'administration est
regrettable eu égard à l'enjeu de
l'interopérabilité et de la combinaison d'informations qu'elle
permet. En outre, ce laxisme est très critiquable eu égard au
Référentiel Général
d'Interopérabilité (RGI)82, qui « a pour
objectif de guider les autorités administratives dans l'adoption de
normes, standards et bonnes pratiques, afin de favoriser
l'interopérabilité de leurs systèmes d'information
». Il serait donc souhaitable de privilégier les formats
ouverts, au besoin en faisant peser sur le Producteur ou sur la mission
Étalab une obligation en ce sens.
117 - Par ailleurs, aux termes de la Licence Ouverte, «
[le Producteur] ne peut garantir l'absence de défauts ou
d'irrégularités éventuellement contenues83 dans
l'Information ». C'est ainsi qu'ont été publiées
en juin 2012 sur le portail
data.gouv.fr des jeux de
données concernant l'attribution des marchés publics
d'État pour les années 2008, 2009 et 2010 comportant de
nombreuses erreurs, comme le rapportait le site d'information «
owni.fr »84. En
définitive, ces fichiers erronés sont inexploitables par les
Réutilisateurs.
118 - Le rapport Mandelkern85 avait
déjà souligné en son temps l'importance de la
qualité des informations publiques, énonçant que «
Les sites diffusant des données publiques se devraient d'être
des références en matière de qualité, pour
défendre le crédit de la puissance publique qui est
attaché aux données, pour assurer la qualité des produits
dérivés ou des activités qui en dépendent, telles
que la recherche et l'enseignement ».
B - Quant à la fourniture de l'Information
119 - La fréquence de mise à jour de certaines
informations publiques est déterminante pour
82 Créé par l'article 11 de
l'ordonnance n° 2005-1516 du 8 décembre 2005, la version 1.0 du RGI
a été publiée le 16 juin 2009 et approuvée
officiellement par un arrêté du Premier ministre du 9 novembre
2009
83 Faute présente dans la licence
84
http://owni.fr
85 Diffusion des données publiques et
révolution numérique : Rapport, Dieudonné Mandelkern et
Bertrand du Marais (1999)
43
leur réutilisation. En effet, le potentiel
économique de certaines informations diminue avec l'écoulement du
temps, et certaines n'ont de valeur qu'à la condition d'être
actualisées à journée voire à la minute (taux de
particules fines dans l'atmosphère, places de parking libres, etc.).
Pour ce type de réutilisation, il est capital d'assurer d'excellentes
conditions de mise à jour de manière à les rendre
attractives. Or la Licence Ouverte a fait le choix d'une non
responsabilité du Producteur, qui « ne garantit pas la
fourniture continue de l'Information ». La Licence Ouverte n'est donc
pas adaptée à la réutilisation d'informations publiques en
temps réel, le risque juridique lié à un défaut de
fourniture de l'autorité administrative étant trop
élevé. Pour ce type d'informations publiques, il faudra recourir
à la licence de l'APIE prévoyant expressément la livraison
successive des informations. Cette « Licence pour une livraison
successive d'informations publiques régulièrement mises à
jour » a été développée dans le but de
« prendre en compte les besoins concrets des opérateurs
privés ». Dans cette hypothèse, des investissements
techniques par la puissance publique tels que la mise en place de serveurs
dédiés justifient une contrepartie financière. Partant, ce
type de réutilisation s'écarte du modèle Open Data et de
son principe de gratuité.
120 - Par ailleurs, la Licence Ouverte pose un principe de non
responsabilité du Producteur vis-à-vis des tiers.
II - La non responsabilité du Producteur
à l'égard des tiers
121 - La Licence Ouverte énonce que « Le
Réutilisateur est le seul responsable de la réutilisation de
l'Information », précisant que « [Le Producteur] ne
peut être tenu pour responsable de toute perte, préjudice, ou
dommage de quelque sorte causé à des tiers du fait de la
réutilisation ». Cette non responsabilité du Producteur
du fait de la réutilisation, si elle est fondée en son principe,
est préjudiciable pour les Réutilisateurs d'informations
publiques. Dans l'hypothèse où les informations
réutilisées s'avéraient fausses et que cela causait un
préjudice à un tiers, le Producteur ne serait pas responsable. Il
serait donc souhaitable que le Producteur soit responsable non pas du fait de
la réutilisation -qui lui échappe- mais de la qualité des
informations qu'il met à disposition, prenant à son compte leur
validité.
122 - Simple à utiliser, la Licence Ouverte encadre les
conditions de la réutilisation des informations publiques. Le
succès de cette licence libre dépend en outre de sa
compatibilité avec d'autres licences de réutilisation.
44
Chapitre 2 - La compatibilité entre la Licence
Ouverte et les autres licences
123 - Le potentiel des informations publiques étant
étroitement lié avec la possibilité des les combiner entre
elles, la compatibilité des licences de réutilisation
s'avère déterminante pour une réutilisation massive des
informations publiques. La Licence Ouverte se veut être un instrument
juridique adapté à une telle réutilisation, en
prévoyant expressément sa compatibilité avec certaines
licences (I) et en étant rédigée de manière
à être logiquement compatible avec de nombreuses autres licences
(II)86.
Section 1 - La compatibilité expresse de la Licence
Ouverte
124 - Face à l'abondance de licences libres qui
inondent le mouvement de l'Open Data, la mission Étalab aurait pu faire
le choix d'utiliser une licence déjà existante. Mais elle a
préféré créé une nouvelle licence, en
prévoyant sa compatibilité expresse et non exhaustive («
notamment compatible ») avec trois licences susceptibles
d'être employées pour la réutilisation d'informations
publiques. Il s'agit des licences « Open Government Licence » (OGL)
du Royaume-Uni, « Creative Commons Attribution 2.0 » (CC-BY 2.0) de
Creative Commons et « Open Data Commons Attribution » (ODC-BY) de
l'Open Knowledge Foundation.
125 - La compatibilité expresse de la Licence Ouverte
avec la licence OGL n'est guère surprenante eu égard à
leurs nombreuses accointances. Développée pour la
réutilisation des informations mises en ligne sur le portail «
data.gov.uk », ouvert en janvier
2010, la licence OGL semble avoir fortement inspiré les
rédacteurs de la Licence Ouverte, tant leur structure et les formules
employées sont similaires87.
126 - Les licences CC-BY 2.0 et ODC-BY 2.0 sont deux licences
libres posant comme seule condition la mention de la paternité. A la
différence de la première qui encadre le partage d'oeuvres en
général, la seconde est spécifiquement
dédiée aux bases de données. Ainsi la licence ODC-BY ne
s'applique qu'à la base données et non à son contenu, pour
lequel le concédant est invité à utiliser
86 Sur la compatibilité expresse et la
compatibilité logique :
http://vvlibri.org
87 A titre d'exemple, la possibilité de
réutiliser l'information publique est étayée par les
mêmes exemples : « ...en la combinant avec d'autres «
Informations », ou en l'incluant dans votre propre produit ou application
», faisant écho à « ...by combining it with
other Information, or by including it in your own product or application
»
45
d'autres licences compatibles avec la licence
ODC-BY88. Cette dernière est donc l'avatar contractuel et
libre du droit sui generis des bases de données89.
Dans l'hypothèse d'un produit combinant une Information sous Licence
Ouverte et une base de données sous licence ODC-BY, le
Réutilisateur pourra donc réutiliser librement90 cette
base mais pas les oeuvres qu'elle contient prises de manière
individuelle.
127 - Au-delà de ces licences avec lesquelles la
Licence Ouverte est expressément compatible, il existe d'autres licences
Open Data avec lesquelles la compatibilité de la Licence Ouverte n'est
pas établie.
Section 2 - La compatibilité logique de la Licence
Ouverte : l'exemple de la licence ODbL - Paris
128 - Traduite en anglais et rédigée de
manière à être « compatible avec toute licence
libre qui exige a minima la mention de paternité », la Licence
Ouverte est affûtée pour une compatibilité logique
très large. Mais un examen des deux licences envisagées est
nécessaire pour déterminer si celles-ci sont réellement
compatibles. En l'espèce, la question de la compatibilité entre
deux licences ne se pose que dans l'hypothèse où le
licencié entend distribuer un produit composé d'Informations sous
Licence Ouverte et de contenus (bases de données, autres oeuvres)
placés sous une autre licence.
129 - Nous avons choisi d'analyser la compatibilité
entre la Licence Ouverte et la licence ODbL - Paris, instaurée par la
ville de Paris pour la réutilisation de ses informations publiques sur
son portail «
opendata.paris.fr », ouvert
en janvier 2011. On y trouve notamment des informations relatives à la
liste des équipements de proximité tels que les piscines, les
gymnases et les
88 « ...this licence only governs the rights over the
Database, and not the contents of the Database individually. Licensors may
therefore wish to use this licence together with another licence for the
contents. »
89 En France, c'est l'article L. 341-1 du CPI qui
définit le champ d'application de la protection des bases de
données : « Le producteur d'une base de données, entendu
comme la personne qui prend l'initiative et le risque des investissements
correspondants, bénéficie d'une protection du contenu de la base
lorsque la constitution, la vérification ou la présentation de
celui-ci atteste d'un investissement financier, matériel ou humain
substantiel. Cette protection est indépendante et s'exerce sans
préjudice de celles résultant du droit d'auteur ou d'un autre
droit sur la base de données ou un de ses éléments
constitutifs. »
90 « The rights granted cover, for example : a.
Extraction and Re-utilisation of the whole or a Substantial part of the
Contents ; b. Creation of Derivative Databases ; c. Creation of Collective
Databases ; d. Creation of temporary or permanent reproductions (...) ; e.
Distribution, communication, display, lending, making available, or performance
to the public (...) »
46
bibliothèques, la liste des bureaux de vote ou encore
la liste des écoles maternelles et élémentaires.
L'hypothèse est donc celle d'une personne qui souhaite réutiliser
des informations extraites sur les portails «
opendata.paris.fr » et
«
data.gouv.fr » en vue de les
intégrer dans un produit destiné à être
commercialisé.
130 - La licence ODbL - Paris a été
adaptée de l'Open Database Licence de l'Open Knowledge Foundation, avec
l'aide d'organismes de la société civile91. De
même que la Licence Ouverte, cette licence est libre en ce qu'elle permet
le partage (« copier, distribuer et utiliser la base de données
»), la création (« produire des créations
à partir de la base de données ») et l'adaptation
(« modifier, transformer et construire à partir de cette base
de données »). L'absorption d'une de ces licences par l'autre
est donc possible.
131 - S'agissant des conditions à respecter, les deux
licences obligent leur utilisateur à mentionner la paternité.
Néanmoins, elles se distinguent sur les conditions à respecter
lors du partage. En effet la licence ODbL énonce en son article 4.4 une
obligation de « partage à l'identique des conditions initiales
»92, toute base de données dérivée
utilisée publiquement devant respecter les conditions soit de la licence
ODbL dans sa version actuelle ou dans une version ultérieure, soit d'une
licence compatible. A défaut d'une « déclaration
publique d'acceptation d'une licence compatible »93, il
existe une insécurité juridique quant à la
compatibilité d'une licence avec la licence ODbL. Néanmoins,
l'article 4.5 intitulé « Limitation du Partage à
l'identique aux conditions initiales » précise que
l'intégration d'une base de données sous licence ODbL «
pour réaliser une Création Produite94 n'implique
pas la création d'une Base de données dérivée
». Autrement dit, la personne qui intègre des
éléments d'une base de données sous licence ODbL à
un produit qu'elle distribue n'est pas tenue à l'obligation de partage
à l'identique concernant le produit qu'il a créé. Si cette
interprétation venait à être confirmée par la ville
de Paris, la réutilisation des informations publiques gagnerait en
sécurité juridique.
91
http://www.vvlibri.org ,
http://www.regardscitoyens.org
et Chapitre France de Creative Commons
92 Expression issue du « ShareAlike
» des licences Creative Commons, et qui désigne le
caractère copyleft d'une licence.
93 L'article 4.4.5 de la licence énonce en
effet que « Les Cédants de licences peuvent désigner un
serveur mandataire pour déterminer les licences compatibles au titre de
l'Article 4.4 a iii. Dans ce cas, la déclaration publique d'acceptation
d'une licence compatible émanant du mandataire autorisé Vous
permet d'utiliser ladite licence compatible. »
94 La licence ODbL définit la «
Création produite » comme « une création (tel qu'un
support visuel, audiovisuel ou audio, ou un texte) résultant de
l'utilisation de la totalité ou d'une Partie Substantielle du Contenu
(à travers une recherche ou une autre requête de la
présente Base de données, d'une Base de données
dérivée ou de la présente Base de données en tant
que partie d'une Base de données collaborative »
CONCLUSION
132 - Au terme de cette étude, nous pouvons affirmer
que le mouvement d'ouverture des informations publiques en tant que
stratégie politique fait consensus dans toutes les démocraties
modernes. Les promesses d'optimisation de l'action publique et de croissance
économique louées par les défenseurs de l'Open Data ont
convaincu l'Union européenne dès 2003, qui a lancé un
vaste chantier pour harmoniser la réutilisation des informations
publiques au niveau communautaire. C'est ainsi que la France s'est dotée
d'un régime juridique de réutilisation relativement satisfaisant,
malgré les errements sémantiques engendrés par l'ancrage
du régime de réutilisation dans une loi consacrée à
l'accès aux informations publiques.
133 - Cependant l'Open Data n'a véritablement pris son
essor qu'à partir de 2009, avec le choix opéré par les
Etats-Unis d'encourager la réutilisation en mettant à disposition
sur internet un nombre considérable d'informations réutilisables
très simplement. Ce « passage à l'acte »
matérialisé par l'ouverture d'un portail des informations
publiques a essaimé à travers le monde, convaincant tour à
tour les Etats et les autorités locales.
134 - Ce succès de l'Open Data s'est traduit par une
multiplication inouïe des licences libres, instruments juridiques «
façonnés » pour une telle ouverture. Par ailleurs, les
approches Open Data se sont diversifiées, chacun interprétant le
concept selon ses intérêts. La pluralité de ces initiatives
est ambivalente en ce qu'elle fait s'épanouir le mouvement Open Data
tout en le diluant dans un océan de subtilités.
135 - Mais le propre de l'Open Data, c'est son
caractère global : ce qui fait la force d'une information, c'est sa
capacité à être facilement réutilisée et
combinée avec d'autres informations. Pour ce faire, deux objectifs
doivent être poursuivis : l'harmonisation du cadre légal de la
réutilisation et l'harmonisation du cadre technique. Ce mouvement de
standardisation est le propre d'un phénomène mature et durable.
Ainsi, les initiatives visant à promouvoir la compatibilité des
licences de réutilisation doivent être encouragées, de
même que celles visant à promouvoir la standardisation des normes
techniques. D'une part, il serait donc souhaitable que les institutions mettant
à disposition leurs informations par le biais d'une licence soit
convertissent cette licence en une licence plus reconnue et donc plus
fédératrice, soit déclarent leur licence
expressément compatibles avec les licences mieux reconnues. Cette
seconde hypothèse est davantage souhaitable
47
48
dans le cas de licences spécifiques,
rédigées pour organiser la réutilisation d'informations au
statut particulier. D'autre part, il serait également souhaitable que
des standards soient promus au niveau international, notamment quant au format
des fichiers et à leur qualité, de manière à
simplifier leur réutilisation.
136 - Aujourd'hui en Europe, la proposition de révision
de la directive ISP de 200395 est en marche96. Aux termes
de ce projet, l'ouverture des informations publiques deviendrait un principe
avec l'instauration d'un droit de réutilisation opposable aux Etats
membres. Le champ des informations publiques serait élargi aux
informations culturelles et la tarification reléguée au rang
d'exception. En outre, la qualité des informations mises à
disposition serait mieux contrôlée et le recours aux licences
types mieux encadré, notamment via des lignes directrices. Cette
évolution possible de l'Open Data est souhaitable afin que toute la
richesse des informations publiques puisse être
révélée.
95 Proposition de directive du Parlement
européen et du Conseil modifiant la directive 2003/98/CE concernant la
réutilisation des informations du secteur public, 12 décembre
2011
96 Guy Lambot, Réutilisation des
informations du secteur public : la révision de la directive 2003/98/CE
est en marche, Légipresse septembre 2012, n°297
49
BIBLIOGRAPHIE
OUVRAGES
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publiques et le droit, Litec, 2002
· Guide d'accès aux documents
administratifs, La Documentation française, 2008
ARTICLES
· Herbert Burkert, From the commercialization of public
information to administration information law, Colloque Informatique et
droit, Montréal, 1992
· Mélanie Clément-Fontaine, Les
licences Creative Commons chez les Gaulois, Revue Lamy Droit de
l'immatériel, janvier 2005, n°1
· Benoît Tabaka, De l'accès à la
réutilisation : le nouveau régime applicable aux données
publiques, Revue Lamy Droit de l'Immatériel, juillet 2005,
n°7
· Jean-Michel Bruguière, Données
publiques : la confusion des genres de l'ordonnance du 6 juin 2005, La
Semaine Juridique Entreprise et Affaires n° 46, novembre 2005
· Ruth Martinez et Bernard Marx, La longue marche de
l'information publique, de la liberté d'accès aux documents
administratifs à la réutilisation commerciale des informations
publiques, Documentaliste-Sciences de l'Information, 2007/3 Vol. 44, p.
218-227
· Guy Lambot, Données moi, Revue Lamy
Droit de l'immatériel, juillet 2010, n°62
· Antoine Chéron, La réutilisation des
données publiques : bases de données et open data, AJ
Collectivités territoriales, septembre 2011, n°9
· Olivier P. Hance, L'information et le droit : la
question du statut juridique de l'information, Lamy Droit de
l'Immatériel, octobre 2011, n°75
· Mélanie Clément-Fontaine, L'oeuvre
libre, JurisClasseur PLA, fascicule 1975
· Guy Lambot, Réutilisation des informations du
secteur public : la révision de la directive 2003/98/CE est en marche,
Légipresse septembre 2012, n°297
50
TEXTES
· Loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à
l'informatique, aux fichiers et aux libertés
· Loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses
mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public
et diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal
· Circulaire du 14 février 1994 relative à la
diffusion des données publiques
· Directive 98/CE du 17 novembre 2003 du Parlement
européen et du Conseil concernant la réutilisation des
informations du secteur public
· Ordonnance n°2005-650 du 6 juin 2005 relative
à la liberté d'accès aux documents administratifs et
à la réutilisation des informations publiques
· Ordonnance n° 2005-1516 du 8 décembre 2005
relative aux échanges électroniques entre les usagers et les
autorités administratives et entre les autorités
administratives
· Décret n°2005-1755 du 30 décembre 2005
relatif à la liberté d'accès aux documents administratifs
et à la réutilisation des informations publiques, pris pour
l'application de la loi n°78-753 du 17 juillet 1978
· Loi n° 2006-961 du 1 août 2006 relative au
droit d'auteur et aux droits voisins dans la société de
l'information
· Décret n°2011-194 du 21 février 2011
portant création d'une mission « Etalab » chargée de la
création d'un portail unique interministériel des données
publiques
· Décret 2011-577 du 26 mai 2011 relatif à la
réutilisation des informations publiques détenues par l'Etat et
ses établissements publics administratifs
· Circulaire du 26 mai 2011 relative à la
création du portail unique des informations publiques de l'Etat «
data.gouv.fr » par la mission
« Etalab et l'application des dispositions régissant le droit de
réutilisation des informations publiques
AVIS/CONSEILS CADA
· CADA, avis n°20090372 du 29 janvier 2009
· CADA, conseil n° 20062173 du 8 juin 2006
JURISPRUDENCE
· Conseil d'État 4 mars 1960 Lévy : RDP 1960
p. 1030
· Conseil d'Etat, 29 juillet 2002, n° 200886,
Société Cegedim
· Cour européenne des droits de l'homme, Grande
Chambre, 10 février 2009, requête n° 14939/03, Sergueï
Zolotoukhine c. Russie
· CE, Ass., 10 juillet 1996, Sté Direct Mail
Promotion
51
RAPPORTS :
· Livre vert sur l'information émanant du secteur
public dans la société de l'information - L'information
émanant du secteur public : une ressource clef pour l'Europe - 1998
· Rapport Mandelkern : Diffusion des données
publiques et révolution numérique (1999)
· Rapport MEPSIR (Measuring European Public Sector
Information Resources) de la Commission européenne - 2006
· Partager notre patrimoine culturel - Propositions pour
une charte de la diffusion et de la réutilisation des données
publiques culturelles numériques - 2009
· Pierre Chrzanowski -
data.gov.uk, l'ouverture des
données publiques au Royaume-Uni, Ambassade de France au Royaume-Uni,
Service Science et Technologie, mars-avril 2011
· Déclaration sur l'Open Data en France (juin
2011)
· Pour une politique ambitieuse des données
publiques - Ecole des ponts ParisTech - 2011
· Review of recent studies on PSI re-use and related market
developments, G. Vickery - 2011
SITES INTERNET
·
http://www.data.gouv.fr
· http://www.etalab.gouv.fr/
·
http://www.economie.gouv.fr/apie
·
http://okfn.org
· http://opendefinition.org/
· http://www.donneeslibres.info/
· http://www.regardscitoyens.org/
· http://libertic.wordpress.com/
·
http://blog.vvlibri.org
· http://www.data-publica.com/
· http://fing.org/
· http://owni.fr/
52
ANNEXES :
· Licence Ouverte / Open Licence
· Licence ODbL - Paris
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