![]() |
VIH/sida: défi au développement de l'Afrique. Une étude de l'impact économique et social de la pandémie au Rwanda( Télécharger le fichier original )par Michel Segatagara KAMANZI Université pontificale grégorienne - Licence en sciences sociales 2003 |
Source : Ministère des Finances et de la Planification économique, Direction de la statistique 106 Ibid., p. 774. 107 Cf. Dicionnaire d'Économie et de Sciences Sociales, sous la direction de C.-D. Echaudemaison, Nathan, Paris, 1998, p. 381. 108 Frw: sigle utilisé pour la monnaie nationale, le Franc rwandais. Les statistiques rapportées ici, sont établis en millions de Francs rwandais calculés aux prix constants de l'année 1995. Pour le reste des données que nous reporterons en Francs rwandais (Frw), nous utiliserons les données de la direction de statistique du Ministère des Finances et de la Planification économique (MINECOFIN), que nous supposons actualisés, ainsi nous nous permettrons de faire des comparaisons entre différentes années, assumant que les valeurs ont été actualisées. Ces données des années successives à l'enquête de 1997 sur la situation de l'épidémie du VIH/SIDA au Rwanda, ne nous permettent pas, en effet, de démontrer une quelconque corrélation négative entre la progression du VIH/SIDA et la consommation privée, car, à part une baisse enregistrée en 1999, la consommation privée a augmenté de 1998 à 2000. Faudrait-il alors penser qu'il existe une corrélation plutôt positive entre l'expansion du VIH/SIDA et l'augmentation des revenus des ménages et celui des entreprises, en relation avec la hausse de la consommation privée ? En d'autres mots, pouvons-nous établir que, plus le VIH/SIDA augmente, plus la consommation privée augmente aussi, parce que les revenus ont aussi augmenté ? A part peut-être le cas des entreprises qui oeuvrent dans le domaine du SIDA, comme les entreprises de commercialisation des préservatifs, Centres de dépistage ou quelques pharmacies et hôpitaux privés, nous pensons qu'on ne peut pas arriver à établir une corrélation positive et qu'une conclusion de ce genre est très peu probable. En conclusion, même si nos données sont partielles et insuffisantes pour vérifier le lien véritable entre les deux variables, rien n'empêche, cependant, de penser que, avec l'expansion du VIH/SIDA, nous assisterons à la diminution du revenu national dans son ensemble comme résultat de la diminution des revenus des ménages et des entreprises, et que cela apparaîtra à long terme. 2.2. Les investissementsEn économie, un investissement est une opération par laquelle un particulier ou une entreprise effectue l'achat ou la rémunération des facteurs de production (terre, capital, travail et technologie) en vue de renouveler ou accroître ultérieurement son stock de capital. En macroéconomie, l'investissement est considéré comme étant l'équivalent de l'épargne, c'est-à-dire que les revenus non consommés sont utilisés pour un accroissement ultérieur des revenus. Il faut préciser ici que cette égalité épargne/investissement vaut dans une économie dite fermée, c'est-à-dire qui n'entretient pas de relation commerciale avec l'extérieur. Dans une économie ouverte, par contre, en plus de l'épargne intérieur, il existe aussi des transferts des ressources provenant de l'étranger tels que les recettes des exportations et les investissements étrangers. Le Rwanda ayant une économie ouverte, nous tenterons de voir quel impact le VIH/SIDA pourrait avoir sur les investissements financés par les nationaux ainsi que sur ceux provenant de l'extérieur. Nous le ferons partant des données relatives au budget national consolidé109, reportées ci-dessous. Budget consolidé (en million de Francs rwandais actualisés)
Source : Direction du budget, Ministère des Finances et de la Planification économique (MINECOFIN) Dans le tableau rapporté ci-dessus, on constate toute de suite que le budget est déficitaire car les dépenses sont supérieures aux recettes, on constate par là même combien le budget national dépend énormément des financements extérieurs. 2.2.1. Les investissements nationauxLes investissements nationaux sont financés en grande partie par l'extérieur comme le relève le tableau du budget national consolidé reporté précédemment. La part du financement intérieur est faible, il a même baissé en 2000, tandis que la part de financement extérieur a continué à augmenter, à part la baisse de 1999. L'objectif des investissements, comme nous l'avons dit plus-haut, est celui de renouveler ou d'accroître le capital disponible. En macroéconomie, on considère que les investissements sont fonction du taux d'intérêt, c'est-à-dire qu'ils dépendent du profit que 109 Cf. MINISTERE DES FINANCES ET DE LA PLANIFICATION ECONOMIQUE, Le Rwanda en Chiffres, Edition 2001, p. 28. l'emploi des ressources peut rapporter à l'investisseur. Or, l'expansion du VIH/SIDA, comme nous l'avons vu, comporte des coüts supplémentaires énormes pour les ménages et les entreprises ; il risque donc de décourager les investisseurs car les profits possibles deviennent incertains avec l'expansion de cette maladie. Au niveau intérieur, l'épidémie du VIH/SIDA devrait impliquer une augmentation des dépenses courantes en termes de transferts pour les soins des malades du SIDA, transferts aux ménages affectés par le VIH/SIDA, notamment aux veuves et aux orphelins, dépenses pour la mise en place d'une stratégie de lutte contre le SIDA, etc. Le financement intérieur, déjà faible, risque de se voir encore plus réduit pour d'éventuels investissements en d'autres secteurs tout aussi importants que la lutte contre le SIDA. Vu la croissance de l'épidémie et les risques que cela comporte pour les profits économiques, les financements de l'investissement provenant de l'extérieur pourraient aussi diminuer, car l'intérêt des bailleurs de fonds extérieurs pourrait se réduire en fonction de la perte de productivité due à l'épidémie. A moins que ces bailleurs de fonds extérieurs ne puissent être sensibles au défi apporté par le VIH/SIDA, comme l'est la Banque Mondiale110, et qu'ils continuent à financer le pays malgré le peu de profit prévisible avec l'épidémie du VIH/SIDA. 2.2.2. Les investissements étrangersLes investissements directs à l'étranger (IDE)111 sont, à notre avis, plus à risque que les investissements nationaux. En effet, une fois obtenu le financement extérieur, les investissements nationaux peuvent se réaliser, car en général le gouvernement reste maître des décisions à prendre sur l'allocation des ressources disponibles. Au niveau des IDE, le problème est plus complexe, car ce sont les investisseurs étrangers qui directement achètent ou rémunèrent des facteurs de production locaux, en vue de réaliser des profits ; c'est notamment le cas des sociétés multinationales qui cherchent des marchés où peuvent fleurir leurs activités, et cela à moindre coûts. Comme ils ne cherchent normalement que leurs propres intérêts, ces entrepreneurs étrangers investissent difficilement dans un pays où le VIH/SIDA est en train de faire des ravages, à moins bien sür qu'ils offrent des produits en lien avec le traitement ou la lutte contre le SIDA (antirétroviraux, préservatifs, etc.). Mais, là aussi, le profit n'est pas assuré dans un pays comme le Rwanda, car, comme 110 Cf. THE WORLD BANK, Intensifying Action against HIV/AIDS in Africa, Responding to a Development Crisis, Washington, D.C, 2000. Voir aussi THE WORLD BANK, The Multi-Country HIV/AIDS Program for Africa (MAP), December 2002. 111 Engagements de capitaux effectués en vue d'acquérir un intérêt durable, voire une prise de contrôle, dans une entreprise exerçant ses activités à l'étranger, d'après le FMI. le dit Andrew Smith : « les investisseurs rationnels chercheront à mettre leur capital dans des sociétés politiquement stables et économiquement productives112. » Une baisse des investissements étrangers serait lourde pour l'économie rwandaise qui en a beaucoup profité comme le rapporte cette rubrique de la balance des paiements. 2 Années
Source : Ministère des Finances et de la Planification économique113. Ici aussi les données disponibles, notamment les estimations pour l'année 2000, ne laissent pas entrevoir une chute de ces investissements directs étrangers à cause de l'expansion de l'épidémie du VIH/SIDA. Il est vrai qu'en 1999, on peut constater une baisse vertigineuse des IDE, mais par la suite, la reprise pour l'année 2000 est encore plus impressionnante ; rien ne peut donc être conclu ici également. Toutefois, il y a des facteurs qui expliquent cette hausse des investissements directs étrangers, notamment les privatisations ; celles-ci consistent au transfert du capital des entreprises publiques à des actionnaires privés pour la plupart étrangers. On ne pourrait donc pas dire que le SIDA a attiré les investisseurs étrangers ; à part les cas particuliers mentionnés précédemment, le mérite revient plutôt au gouvernement qui a entrepris ces privatisations. 2.3. Les dépenses publiquesLes dépenses publiques constituent l'ensemble des ressources économiques employées par l'État ou d'autres entités publiques en vue de produire des biens et services 112 A.T. PRICE-SMITH, The Health of Nations, The Massachussetts Insitute of Technology Press, Cambridge, 2002, p. 105. 113 Cf. MINISTERE DES FINANCES ET DE LA PLANIFICATION ECONOMIQUE, Le Rwanda en Chiffres, Edition 2001, p. 25. pour la collectivité ou effectuer des transferts en faveur des citoyens du pays114. Les ressources pour ces dépenses proviennent en général du prélèvement fiscal, des bons du trésor115 ou des différents prêts qui constituent la dette publique. Ces ressources sont généralement employées dans différents secteurs publics comme la santé et l'éducation, elles sont aussi utilisées pour la distribution des revenus (salaires, subventions, transferts, etc.) et le contrôle du cycle économique. Le niveau et la composition des dépenses publiques reflètent les choix opérés par les autorités politiques et administratifs, l'évolution de la structure socioéconomique, les comportements des opérateurs économiques ainsi que ceux des citoyens116. Aux dépenses publiques est, en général, associée la politique fiscale du pays, par laquelle est financée la consommation publique à travers les impôts et les transferts aux citoyens nécessiteux (chômeurs, orphelins, indigents, personnes handicapées, etc.). Est aussi associée aux dépenses publiques l'intervention de l'État dans les différents secteurs économiques et sociaux, en particulier à travers les subventions. Nous nous limiterons ici à voir le lien entre les dépenses associées aux secteurs de la santé et de l'éducation, et la menace posée par l'épidémie du VIH/SIDA. Nous ferons ensuite quelques considérations sur la politique fiscale et économique actuelle dans un contexte où le VIH/SIDA crée et aggrave la pauvreté. 2.3.1 Le secteur de l'éducationLe développement du secteur de l'éducation constitue une priorité pour un pays en développement comme le Rwanda. L'éducation de la population permet de rendre efficiente les ressources humaines qui sont incontournables dans tout processus de développement, car comme disait Jean Bodin, économiste mercantiliste du 16ème siècle, « Il n'y a ni richesse ni force que d'hommes ». Pour arriver à combattre l'analphabétisme, estimée en 2000 à environ 33%117, et faire face à l'insuffisance des infrastructures d'éducation, le gouvernement devrait allouer des ressources importantes à ce secteur. Un effort remarquable a été réalisé ces dernières années par le gouvernement rwandais avec l'augmentation de sa part des dépenses 114 Cf. L'Enciclopedia dell'Economia, Istituto Geografico De Agostani, Novara, 1998, p. 813. 115 Les Bons du trésor sont des titres émis par le Trésor public et destinés à opérer un financement à court terme. 116 Cf. L'Enciclopedia dell'Economia, Istituto Geografico De Agostani, Novara, 1998, p. 813. 117 Cf. BANQUE AFRICAINE DE DEVELOPPEMENT (BAD), Rapport sur le Développement en Afrique 2001. Renforcement de la bonne gouvernance en Afrique, Economica, Paris, 2001, p. 249. publiques destinées à l'éducation nationale. Le gouvernement a pu ainsi démontrer l'importance qu'il accorde à la promotion de l'éducation dans tout le pays. Les statistiques qui suivent l'illustrent éloquemment. Dépenses pour l' éducation118
Source : Ministère de l'Educaion et Ministère des Finances et de la Planification économique . 118 Cf. MINISTERE DES FINANCES ET DE LA PLANIFICATION ECONOMIQUE, Le Rwanda en Chiffres, Edition 2001, p. 11. L'épidémie du VIH/SIDA, comme nous l'avons vu dans le premier chapitre, frappe particulièrement les populations jeunes ; parmi celles-ci se retrouvent en particulier les étudiants et la majorité des professeurs. Vu la vulnérabilité de la population estudiantine et celle chargée de la formation, le secteur de l'éducation se voit aussi sérieusement menacé par l'expansion du VIH/SIDA. Dans ce secteur, comme dans ceux étudiés au niveau microéconomique, les coûts liés au VIH/SIDA sont énormes pour les particuliers et les différents établissements. Ici les coûts retombent particulièrement sur le gouvernement qui dépense et investit beaucoup pour l'amélioration de ce secteur. En plus des investissements importants que le gouvernement perdrait avec l'expansion de l'épidémie du VIH/SIDA dans la population estudiantine, des dépenses supplémentaires s'ajouteraient aussi pour le remplacement des enseignants et le soutien de la scolarisation des orphelins laissés par les parents décédés du SIDA. Ces coûts seraient pesants pour un pays comme le Rwanda qui compte déjà une forte population orpheline suite au génocide de 1994, et il faut reconnaître que le gouvernement fait déjà un gros effort pour soutenir cette population orpheline à travers les transferts effectués par le FARG (Fonds d'Assistance aux Rescapés du Génocide). Avec l'expansion du VIH/SIDA, les orphelins sont en train d'augmenter, et L'État se trouve dans une situation encore plus compliquée où il doit intervenir pour assurer un minimum de vie décente et l'éducation nécessaire aux orphelins laissés par le génocide et ceux laissés par le SIDA. On compte aujourd'hui environ 400.000 orphelins au Rwanda, dont 95.000 orphelins du SIDA119. Le gouvernement, qui est déjà confronté à plusieurs situations dans laquelle il doit intervenir, doit aussi affronter le problème de la diminution des enseignants, qui ne sont pas faciles à remplacer. Comme le constate le Ministère chargé des finances et de la planification économique dans son rapport 2001, « L'épidémie du VIH/SIDA a un impact négatif sur le secteur de l'éducation réduisant ainsi le nombre d'enseignants qui deviennent malades ou qui meurent, et place le poids de la responsabilité sur les 119 Cf. COMMISSION NATIONALE DE LUTTE CONTRE LE SIDA (CNLS), Cadre stratégique national de lutte contre le SIDA 2002-2006, Présidence de la république Rwandaise, Kigali, avril 2002, p. 23. élèves120. » Le vide laissé par le décès d'un professeur est d'autant plus important qu'en général, un enseignant s'occupe de la formation de plusieurs élèves, et, avec sa disparition, les conséquences retombent aussi sur les élèves qui perdent ainsi leur formateur. Vu la forte menace et les coüts énormes que l'expansion de l'épidémie peut comporter pour ce secteur essentiel au développement du pays, il nous semble urgent qu'un programme spécifique de lutte contre le SIDA soit envisagé dans ce secteur et financé par le gouvernement dans le cadre du budget alloué à l'éducation nationale, programme qui inclurait l'information et la communication sur le VIH/SIDA dans le curriculum scolaire. Dans une logique purement économique, nous estimons qu'il s'agirait là d'un moyen de diminuer les risques et garantir l'efficacité des investissements et des dépenses importants que l'État fait en matière d'éducation. 2.3.2 Le secteur de la santéLe secteur de la santé constitue également un secteur clé pour le développement et le bien-être général de toute la population. La bonne santé de la population est une condition sine qua non à toute activité économique car sans hommes sains on ne peut rien envisager en termes de production, distribution et consommation des biens et services en vue de la satisfaction des besoins de la société. Mais pendant longtemps, au niveau international, la dimension santé n'a pas été prise en considération comme un élément essentiel pour le développement d'une nation. C'est seulement au début des années 1990 que le PNUD a intégré, dans son nouvel indicateur du développement humain (IDH), la dimension santé à côté du niveau d'éducation et du traditionnel PIB per capita (Produit Intérieur Brut par habitant). En effet, les institutions financières internationales, notamment le Fonds Monétaire International (FMI) et la Banque Mondiale, ne considéraient que la croissance du PIB par habitant comme indicateur du développement d'une nation. Ils ont souvent négligé les aspects qualitatifs du développement comme l'éducation, la santé et les droits humains. Le PNUD a tenté de remédier à cette situation à travers l'IDH, un indice composite qui, en plus de la croissance du PIB par habitant, prend en compte le taux d'alphabétisation et l'espérance de vie à la naissance. C'est en particulier l'espérance de 120 MINISTERE DES FINANCES ET DE LA PLANIFICATION ECONOMIQUE, Indicateurs de développement du Rwanda 2001, Juillet 2001, p. 291. vie à la naissance qui mesure les conditions générales des populations, notamment les conditions sanitaires. L'espérance de vie au Rwanda est continuellement en baisse depuis les années 1970. Elle était estimée à 44,6 ans entre 1970 et 1975, et 20 ans après, pour la période allant de 1995 à 2000, elle est estimée à 39,4 ans121. Cette baisse de l'espérance de vie à la naissance est en partie due à la guerre et au génocide de 1994, mais aussi à la progression du VIH/SIDA avec ses conséquences directes sur la santé de la population. Une étude de la corrélation existante entre l'expansion du VIH/SIDA au Rwanda et la diminution de l'espérance de vie à la naissance, est en effet positive, montrant clairement, comme cela est d'ailleurs prévisible, que l'épidémie du VIH/SIDA a sérieusement détérioré les conditions sanitaires au Rwanda. En témoigne aussi l'analyse faite par Véronique Mugisha, directrice du service d'épidémiologie et d'hygiene publique au Ministère de la santé, qui constate qu'en 1990, les lits d'hôpitaux étaient occupés à 40% par des malades du SIDA et que, en 2000, au CHK de Kigali, le pourcentage est passé à 80%122. Le secteur de la santé est pratiquement dépassé par la croissance de l'épidémie du VIH/SIDA et ne peut y faire face seul. Et, du côté du gouvernement, la réponse, notamment à travers l'allocation des ressources supplémentaires au secteur sanitaire pour faire face à cette situation d'urgence, semble encore très timide. Voyons de manière synthétique, l'évolution des dépenses publiques en matière de santé au cours de la dernière décennie.
121 Cf. PNUD, Rapport mondial sur le Développement Humain 2002, De Boeck, Bruxelles, 2002. 122 V. MUGISHA, « La situation de l'épidémie du VIH/SIDA et sa dynamique au Rwanda », in actes de l'atelier des ouvriers apostoliques sur la pastorale de lutte contre le VIH/SIDA, Archidiocèse de Kigali, 17- 20 Octobre 2000, p.6.
Source :Ministère de la santé (MINISANTE) Après une nette augmentation de la part du budget destinée au secteur sanitaire au cours des années allant de 1990 à 1999, on a assisté, par la suite, à une baisse des dépenses du gouvernement pour la santé passant de 3,720 millions de Francs rwandais en 1999 à 3,660 millions en 2000. Au niveau du PIB, il y a eu aussi une baisse de 0,7% en 1999 à 0,6% en 2000, tandis que la moyenne de ces dépenses pour les autres pays de l'Afrique subsaharienne était estimée à 2% du PIB pour l'année 2000124. Les récentes statistiques du Ministère des finances estiment que le pourcentage des dépenses de santé par rapport au PIB est même descendu jusqu'à 0,4% pour l'année 2001125, atteignant ainsi le niveau le plus bas depuis 1990, tandis que la malaria et le SIDA continuent de tuer de nombreux rwandais et rwandaises. En 2000, le Ministère de la santé rapportait que le nombre des personnes atteints de paludisme était d'environ 480 569 et l'ONUSIDA, dans son rapport de l'année 2002, estimait à 49 000, le nombre de décès düs au SIDA à la fin de l'année 2001. Pour cette même année 2001, le nombre des décès général était estimé à 156 000126. Ces quelques chiffres prouvent à suffisance la nécessité d'allouer beaucoup plus de ressources au secteur sanitaire pour combattre de manière plus directe ces maladies qui déciment la population rwandaise. Il est étonnant, en comparant les dépenses nationales, de voir comment celles destinées au service de la dette127 sont supérieures et en augmentation par rapport à celle consacrées à la santé. En effet, le service de la dette est passé de 39,5 million de $US en 1999 à 48,1 million de $US en 2000, tandis que les dépenses de santé 123 Cf. MINISTERE DES FINANCES ET DE LA PLANIFICATION ECONOMIQUE, Indicateurs de développement du Rwanda 2001, Juillet 2001, p. 278. 124 Ibid., p.2. 125 Ibid. 126 Cf. POPULATION REFERENCE BUREAU, 2001 World Population Data Sheet. Disponible sur Internet: < http://www.prb.org/pdf/Rwanda_Fr.pdf> 127 Le service de la dette est la somme versée chaque année au titre des remboursements du capital emprunté (amortissement) et du paiement des intérêts par un pays endetté. par personne, déjà insignifiantes, ont baissé de 1,4 $US à 1,2 $US pour la même période. Cette dernière comparaison nous permettra dans la suite de faire quelques considérations sur la politique économique et fiscale du gouvernement en ce qui concerne les priorités des dépenses publiques, dans le contexte de la pandémie du VIH/SIDA. Ces chiffres et indications nous montrent qu'il existe une certaine incongruité entre les politiques des dépenses publiques en matière de santé et le coüt réel de l'épidémie du VIH/SIDA qui ne cesse d'alourdir sérieusement ce secteur. « Obsédés par l'exigence de limiter les dépenses de santé, nos dirigeants ne se rendent pas compte qu'en soignant les personnes séropositives, on finit à moyen terme par réduire ces dépenses128. » Nous estimons que le gouvernement devrait plutôt, vu l'impact grandissant du VIH/SIDA sur ce secteur, allouer beaucoup plus de ressources, notamment arriver à court terme au niveau de 2% du PIB, moyenne des autres pays d'Afrique subsaharienne. Ces ressources supplémentaires pourraient donc contribuer à mieux soigner les personnes déjà atteintes du SIDA, faciliter l'accès aux antirétroviraux, former davantage du personnel sanitaire et augmenter la capacité des centres de santé et hôpitaux déjà existants ; ces derniers sont les premiers à souffrir de l'impact croissant de l'épidémie du VIH/SIDA. 2.3.3. Politique économique et fiscaleAprès avoir mis en lumière la priorité que constitue l'épidémie du VIH/SIDA pour les choix des dépenses publiques, nous voudrions maintenant faire quelques considérations générales à propos de l'orientation que prend la politique économique et fiscale actuelle du pays. Comme nous l'avons déjà fait remarquer précédemment et nous le verrons de manière plus explicite dans le point suivant, le Rwanda dépend en grande partie pour ses dépenses publiques, des prêts et de l'aide extérieure ; cette situation de dépendance financière fait que le Rwanda, déjà fortement endetté comme la plupart des pays en voie de développement, doit souvent recourir au FMI et à la Banque Mondiale pour financer son activité économique et assurer ses différents investissements. Cette situation de dépendance financière rend le Rwanda pratiquement esclave des conditions des prêts imposés par ces organismes financiers internationaux qui exigent, en contre partie, une 128 Cf. Interview à ZACKIE ACHMAT, «En Afrique du Sud, on a encore rien vu de l'épidémie du SIDA», in Courrier International, 7 février 2003. Disponible sur Internet: < http://www.courrierinternational.com/interview/avec/Achmat.htm> série des mesures de rigueur financière dites « politiques d'ajustement structurel ». Ces mesures, supposées redresser les économies des pays en voie de développement, exigent, entre autres, la diminution des dépenses sociales, la diminution des salaires, la diminution des transferts du gouvernement pour les populations défavorisées, la diminution des subventions, la privatisation des entreprises publiques, l'augmentation des taxes sur la consommation, etc. Au Rwanda, on est en train d'assister à la mise en oeuvre de ces politiques de libéralisation qui signifient en résumé : faible intervention de l'État et libre marché. Cela se constate particulièrement avec la vague des privatisations et la forte augmentation des impôts. Elsa Assidon, économiste du développement, constatait avec raison que « plus faible est le pouvoir de négociation de l'État demandeur, plus le Fonds et la Banque imposent le tout marché. On assiste ainsi au recul de l'État providence dans les pays débiteurs129. » Cela risque d'arriver au Rwanda, tandis que les défis sociaux sont nombreux et ne cessent d'augmenter, notamment avec l'épidémie du VIH/SIDA et les conséquences du génocide de 1994. La politique fiscale expansive que le gouvernement exerce actuellement, à travers l'office Rwandais de Recettes (Rwanda Revenue Authority), nous laisse particulièrement perplexe. Le lourd fardeau des impôts, que la population doit aujourd'hui supporter, risque à moyen terme d'asphyxier les petites et moyennes entreprises et d'anéantir le secteur privé qui est pourtant encouragé par les mêmes institutions financières. Cette situation risque aussi à la longue d'exaspérer la population et la pousser à la révolte, comme cela est arrivé récemment en Bolivie130. Malgré que l'imposition fiscale soit progressive, c'est-àdire que son taux augmente avec le revenu et les recettes obtenues, elle demeure très élevée. La TVA (taxe à la valeur ajoutée)131 a atteint 18% et l'impôt sur le revenu (IR)132 129 E.ASSIDON, Les théories économiques du développement, La découverte, Paris, 2000, p. 68. Ici il s'agit bien entendu du Fonds Monétaire International et de la Banque Mondiale. 130 Cf. «Bolivia» in L'Osservatore Romano, Sabato 15 Febbraio 2003, p. 2. 131 La TVA, Taxe à la valeur ajoutée, est un impôt sur la consommation dont le principe consiste à taxer un produit sur la valeur qui lui est ajoutée par les entreprises qui participent aux différentes étapes de sa production, et à faire payer son montant par le consommateur. 132 L'impôt sur le revenu (IR) est l'impôt dont l'assiette est constituée par le revenu des personnes physiques ou des entreprises constituées sous forme de société. L'IR s'applique non seulement aux salaires, mais à toutes les catégories de revenus perçus par le foyer fiscal : bénéfices industriels et commerciaux, revenus financiers, loyers, etc. est de 35% sur les bénéfices réalisés au cours de l'année133. Cette politique est d'autant plus austere et controversée qu'elle s'applique aussi aux activités qui ne tiennent pas une rigoureuse comptabilité et à certaines activités de l'économie informelle ; ces dernières se voient taxées un montant forfaitaire qui ne tient pas compte de leur faible chiffre d'affaire. Nous estimons donc qu'une population pauvre comme celle du Rwanda ne peut, à moyen terme, soutenir cette imposition fiscale, encore moins dans un contexte pandémique du VIH/SIDA. En ce qui concerne la politique économique de privatisation des entreprises nationales, nous estimons, tout en reconnaissant les bénéfices de celle-ci, notamment pour les caisses de l'État et le progrès des entreprises à travers l'innovation technologique, qu'elle risque de davantage marginaliser les milieux ruraux et aggraver le phénomène de l'exode rural. Cette situation est prévisible car, par souci d'efficience économique, les entreprises devenues privées investiront difficilement dans ces milieux ruraux, à moins qu'ils n'y trouvent une demande et des marchés alléchants qui peuvent leur permettre de réaliser des profits. Et pourtant ce sont ces milieux qui ont le plus besoin d'investissements notamment en infrastructures de base comme l'eau, l'électricité, le transport et la communication, infrastructures qui y font sérieusement défaut. Nous pensons que seul l'État, qui a une vision globale de la réalité nationale et les moyens de faire des gros investissements, peut, tout en impliquant de manière opportune le secteur privé, assurer la satisfaction des besoins d'intérêt public, comme ceux énumérés plus-haut. En se référant à Keynes, Joseph Stiglitz, ancien vice-président de la Banque mondiale et prix Nobel de l'économie 2001, a d'ailleurs affirmé que le marché est irrationnel et que « si la faiblesse du marché des capitaux est une des différences majeures entre pays en développement et pays développés, il n'a jamais cru que la libéralisation financière pouvait en venir à bout134. » En d'autres mots, il n'y a pas de main invisible qui tienne et qui puisse sans le vouloir, programmer et travailler à l'intérêt de la société, comme pensaient Adam Smith et les économistes classiques. Sans pour autant devenir Keynésien, même si cela serait opportun dans une situation de crise comme celle de la pandémie SIDA, nous sommes d'avis que l'État doit continuer à intervenir dans l'économie pour orienter les choix et constituer un « garde-fou » au libre marché. 133 Cf. informations de l' Office Rwandais des Recettes (Rwanda Revenue Authority), disponible sur Internet : < http://www.rra.gov.rw/informations_generales.htm>. 134 Cf. E.ASSIDON, Les théories économiques du développement, La découverte, Paris, 2000, pp. 84 et 86. Nous estimons, en définitive, qu'il ne faut pas, dans le contexte de l'épidémie du VIH/SIDA et celui d'après génocide, laisser les choix des investissements nationaux aux mains des privés, même s'ils peuvent être plus efficients et plus efficaces dans la gestion des entreprises et la maximisation des profits, car ils ne sont pas, en général, mus par l'intérêt général de la société . Il faudra certainement promouvoir l'efficience dans l'économie, en rendant les marchés plus efficaces et en diminuant les coûts de production, comme le suggèrent les politiques d'ajustement structurel du FMI, mais plus encore, et cela est plus important à nos yeux, veiller à maximiser aussi les profits sociaux en investissant pour le bien commun ; et ceci est en premier lieu le rôle de l'État. 2.4. Exportations et importationsLe Rwanda, étant un pays à économie ouverte, entretient des relations commerciales avec d'autres pays, qui sont selon le cas, demandeurs ou offreurs des biens et services. Le Rwanda joue donc les deux rôles dans ses transactions internationales : il offre des biens et services produits localement (café, thé, minerais, peaux, quinquina, électricité, etc.), ce sont les exportations ; et il achète des biens et services produits à l'étranger (biens d'équipements, produits énergétiques et autres biens de consommation), ce sont les importations. Commerce extérieur (en million de $US)135
135 Cf. MINISTERE DES FINANCES ET DE LA PLANIFICATION ECONOMIQUE, Le Rwanda en Chiffres, Edition 2001, p. 26. 136 FOB (Free On Board), méthode de comptabilisation qui consiste à retenir la valeur du produit sans inclure les coüts de transport et d'assurance sur le trajet international.
Sources : Banque Nationale du Rwanda et Ministère des Finances et de la Planification économique Une analyse des rubriques de la balance des paiements138 reportées ci-dessus, révèle un déséquilibre entre les exportations et les importations nationales, du même type que celui que nous avons constaté au niveau du budget national. En d'autres termes, on pourrait dire que le Rwanda consomme plus qu'il ne produit, qu'il achète plus qu'il ne vend. Pour effectuer les importations, le gouvernement doit recourir à l'aide extérieure et aux prêts, qui viennent par la suite gonfler la dette extérieure. Cette situation montre encore 137 CAF (Coüt, Assurance, Fret), méthode de comptabilité qui consiste à retenir leur valeur à l'entrée ou à la sortie du territoire en incluant le coüt de transport et d'assurance. 138 document comptable où sont enregistrés systématiquement l'ensemble des flux réels, monétaires et financiers correspondant aux échanges commerciaux entre les résidents et les non-résidents d'un pays pour une période donnée davantage la dépendance financière du Rwanda par rapport aux bailleurs de fonds extérieurs, comme nous le constations déjà précédemment.
Source : Banque Africaine de Développement (BAD) 2.4.1. Les exportationsDu côté des exportations, source d'entrées et de revenus, nous constations, déjà précédemment, qu'ils reposent essentiellement sur le secteur primaire, en particulier sur la production du café et du thé. Nous l'avions déjà relevé au niveau microéconomique et nous savons quel impact l'épidémie du VIH/SIDA a sur ce secteur en termes de pertes d'agriculteurs et de productivité, ainsi que tous les autres coüts et effets collatéraux. Nous ne reviendrons pas sur cela. Seulement, nous voulons faire remarquer que, étant donné l'impact du VIH/SIDA sur le secteur primaire, sur lequel repose toute l'économie du pays et qui emploie plus de 90% de la population active, les exportations sont davantage menacées de diminuer avec l'expansion de la pandémie du VIH/SIDA. La diminution des exportations augmenterait encore plus le déséquilibre de la balance des paiements en détériorant davantage les termes de l'échange140, et le Rwanda deviendrait davantage dépendant des capitaux extérieurs et donc moins maître de ses décisions de politique macroéconomique. L'expansion du VIH/SIDA dans les zones rurales, où sont produits l'essentiel des biens et services destinés à l'exportation, menace aussi la qualité de la production avec la perte des agriculteurs compétents. Le Rwanda risque ainsi de perdre aussi son avantage comparatif dans la production du thé et du café, principales sources de revenues. Comme la 139 BANQUE AFRICAINE DE DEVELOPPEMENT (BAD), Rapport sur le Développement en Afrique 2001. Renforcement de la bonne gouvernance en Afrique, Economica, Paris 2001, p. 261. 140 Les termes de l'échange indiquent les conditions économiques de l'échange ; appliqué à l'étude du commerce international, il indique les conditions dans lesquelles un pays échange ses importations contre ses exportations. production de ces deux cultures est essentiellement destinée au marché extérieur où règne une grande concurrence, il est crucial de pouvoir maintenir la qualité des produits pour pouvoir rester sur le marché. Vu que c'est grace à cet export du thé et du café que le pays peut obtenir des devises et effectuer l'importation des inputs, machines et biens manufacturés dont il a besoin141, le Rwanda a donc tout intérêt à veiller à la qualité de sa production, surtout que les prix sont fixés selon les critères des pays demandeurs, qui sont pour la plupart des pays à revenus élevés. Par exemple, les trois grands importateurs de café sont l'Union Européenne, les Etats-Unis d'Amérique et le Japon, qui à eux seuls consomment environ 70% de l'offre mondiale142. La demande dépend donc essentiellement de ces pays qui font varier les prix comme ils veulent, sans souvent tenir compte des producteurs locaux ; d'ailleurs ces derniers n'ont pas beaucoup à négocier car ces biens produits sont facilement substituables et ne peuvent faire l'objet d'une consommation importante au niveau local. Avec l'expansion du VIH/SIDA et ses conséquences sur la quantité et la qualité de la production de ces cultures d'exportations, particulièrement le thé et le café, le Rwanda risque de se voir obliger de quitter le marché international car il ne sera plus compétitif et ne pourra plus soutenir la concurrence du côté de l'offre. Nous estimons donc que la lutte contre le SIDA devrait faire partie des mesures destinées à soutenir l'export dont dépend l'entrée des devises. Il faudra inclure ce programme au niveau du secteur primaire d'où proviennent ces cultures et penser aussi de manière parallèle à la diversification de la production nationale, vu surtout la grande fluctuation des marchés de ces cultures d'exportations comme le café et le thé. Avec la diversification des exportations, il faudrait aussi envisager une industrialisation progressive du secteur primaire qui pourrait augmenter la valeur ajoutée des différents biens exportés et les rendre plus compétitifs sur les marchés internationaux. Et afin que ces investissements soient efficaces, il faudrait veiller à les rendre efficients à travers la prévention et la lutte contre la progression du VIH/SIDA. 2.4.2. Les importationsNous avons remarqué que les importations sont beaucoup plus importantes que les exportations. Or, comme nous l'avons dit parlant des exportations, les importations sont 141 Cf. E.R. MSHOMBA, Africa in the Global Economy, Lynne Rienner Publishers, London, 2000, p. 36. 142 Ibid., p. 166. financées essentiellement par les devises obtenues lors des exportations des produits locaux. Mais, nous l'avons vu aussi, comme les bénéfices des exportations ne suffisent pas pour assurer la satisfaction de la demande intérieure, il faut recourir à d'autres formes de financement extérieur. Le Rwanda importe essentiellement des biens d'équipements, des produits énergétiques, et autres biens de consommation. Cette forte dépendance des produits extérieurs, en plus de la dépendance financière, affaiblit encore davantage l'économie rwandaise. La situation est d'autant plus grave que les prix de ces biens importés sont rarement négociables, vu que la demande de ces biens est pratiquement inélastique. Ainsi les producteurs extérieurs en profitent pour varier les prix à leur avantage. C'est, par exemple, le cas des produits énergétiques comme le pétrole qui varient énormément au détriment des pays non producteurs et qui occasionnent une inflation interne dans les pays demandeurs. Comme ces derniers ne peuvent pas faire fonctionner leurs économies sans ces produits, la demande demeure pratiquement constante ; le seul choix qu'ils ont est soit s'adapter aux prix de ces biens, soit diminuer leur consommation, dans le cas extrême, renoncer purement et simplement à leur consommation. L'épidémie du VIH/SIDA a non seulement apporté de nouveaux besoins au niveau des familles atteintes, mais aussi au niveau du secteur sanitaire et nous dirons même au niveau national. Autant il y a une forte demande des médicaments pour soigner les infections opportunistes, autant il y a une forte demande des antirétroviraux et d'autres moyens de prévention contre le VIH, tels que les préservatifs. Cette demande supplémentaire, des biens et services étrangers vient donc augmenter le volume des importations et par conséquent le déficit. On peut même penser que cette demande s'accroîtra puisque les cultures et les ressources internes qui pouvaient la satisfaire sont destinées à diminuer. Cette dernière situation obligera le gouvernement à davantage s'endetter pour rééquilibrer la balance des paiements, mais surtout pour faire face aux nouveaux besoins créés par l'épidémie du VIH/SIDA. A ce niveau, nous nous attarderons un peu sur la question des antirétroviraux qui font partie de ces biens importés dans le contexte de l'épidémie du VIH/SIDA. Ces produits sont jusqu'ici le monopole de quelques firmes pharmaceutiques occidentales surnommées « Big pharma », qui, avec la protection de l'OMC à travers les accords TRIPS143, contrôlent leur offre de ces produits et en fixent les prix. Au Rwanda, ces traitements sont encore inaccessibles à la grande majorité des personnes atteintes par le VIH/SIDA malgré les efforts fournis par le gouvernement. Il n'y a que 3 ou 4 grands hôpitaux situés dans les villes de Kigali et Butare qui offrent ces traitements pour tout le pays. En 1999, le patient payait à peu près 400 $US par mois pour une cure mensuelle ; mais, grâce aux négociations entre le gouvernement rwandais et les firmes pharmaceutiques, le prix des antirétroviraux a été réduit à 100 $US par mois en janvier 2001144. En comparant ces coüts avec le PNB par habitant, estimé à 220 $US pour l'année 2001145, on se rend bien compte que très peu de rwandais peuvent se permettre le « luxe » des traitements antirétroviraux. Au Centre Hospitalier de Kigali (CHK), de janvier 1999 à août 2000, au total 222 patients séropositifs ont suivi le traitement aux antirétroviraux146. Le Ministère de la santé rapporte qu'au 31 décembre 2001, 1507 malades sous antirétroviraux étaient enregistrés au CHK et à l'hôpital Roi Faycal de Kigali147. En dépit de la croissance du nombre des patients qui ont accès aux traitements antirétroviraux, ces derniers demeurent encore inaccessibles pour la grande majorité des personnes séropositives (500 000 selon l'ONUSIDA). Satisfaire la demande croissante de ces traitements voudra dire augmenter sérieusement le budget destiné à la santé et continuer à négocier avec les firmes pharmaceutiques pour obtenir des prix de préférence ou des réductions, en attendant que l'OMC se décide à lever le veto qui pèse sur la production de ces médicaments. De manière courageuse, certains pays en développement ont refusé de ratifier les accords TRIPS. C'est le cas du Brésil, de l'Inde et de l'Afrique du Sud qui produisent déjà des médicaments génériques, c'est-à-dire des médicaments dont le brevet est tombé dans le domaine public et qui sont par conséquent meilleur marché. En espérant que les négociations de l'OMC vont prochainement aboutir, ces nouveaux producteurs pourront donc offrir des médicaments meilleur marché que ceux des firmes pharmaceutiques qui détiennent encore le monopole (jusqu'en 2016 pour les thérapies 143 Les accords TRIPS ( Trade Related Aspects of Intellectual Property Rights) approuvé en 1994 dans le cadre de l'Organisation Mondiale du Commerce (OMC) accordent le monopole de 20 ans aux entreprises ayant inventés des nouveaux produits. 144 Cf. MINISTERE DE LA SANTE, Rapport Annuel 2001, République Rwandaise, Mars 2002, section 4 sur la lutte contre le SIDA. 145 Cf. The World Bank data 2003. Disponible sur Internet: http://www.worldbank.org/data/wdi2003/ 146 Cf. M. TWAGIRUMUKIZA, «Les patients sous anti-rétroviraux au Rwanda», in La Santé Tropicale sur Internet : < http:// www.santetropicale.com/rwanda/antiretro.htm>. 147 Cf. MINISTERE DE LA SANTE, Rapport Annuel 2001, République Rwandaise, Mars 2002, section 4 sur la lutte contre le SIDA. contre le VIH/SIDA148). Et, cela pourra permettre d'importer ces médicaments en quantité consistante et les rendre plus accessibles à la majorité des personnes vivant avec le VIH/SIDA. Il faudrait ajouter ici que, comme l'épidémie du VIH/SIDA cause la perte du personnel local qualifié, on risque d'assister à une autre forme d'importation, celle des ressources humaines qualifiées extérieures. Cela est déjà le cas dans certains pays d'Afrique australe touchés sérieusement par la pandémie, notamment le Botswana. 2.5 Le Produit Intérieur BrutCe point sur le Produit Intérieur Brut veut être une synthèse de cette partie macroéconomique et montrer la complexité qui existe pour évaluer l'impact macroéconomique de l'épidémie du VIH/SIDA. Nous sommes partis de l'équation Keynésienne PNB = C + I + G + NX, et nous avons développé les différents éléments qui la composent. Voyons maintenant l'autre partie de l'équation, la somme des différentes composantes de la production nationale, le PNB, mieux le PIB. En effet, ici au lieu du PNB qui apparaît dans l'équation, nous avons préféré son équivalent, le PIB. Ce dernier nous semble plus adapté à la réalité de l'économie rwandaise car il mesure la production réalisée par les facteurs de production localisés dans le pays, quels que soient les propriétaires149. Vu que le PNB mesure plutôt la production réalisée par les facteurs de production nationaux d'un pays (internes et externes) et qu'il exclut la production locale provenant des facteurs de production étrangers, et vu que le Rwanda ne reçoit pas des revenus significatifs de ses résidants à l'étranger, du moins ils sont difficiles à estimer, le PIB nous semble donc l'indicateur plus adapté pour mesurer les performances de l'économie nationale ; c'est d'ailleurs aussi celui que la comptabilité nationale préfère. PIB (réel) du Rwanda et ses composantes (en millions de Frw constants 1995) 150
148 Cf. A. GINORI, «Veto USA sui farmaci anti-AIDS. No agli sconti per i paesi poveri: Nuova apartheid», in La Repubblica, 22 dicembre 2002, pp. 14-15. 149 Cf. S.FISCHER, R. DORNBUSCH, R. SCHMALENSEE, Economia, HOEPLI, Milano, 1992, p. 773. 150 Cf. MINISTERE DES FINANCES ET DE LA PLANIFICATION ECONOMIQUE, Le Rwanda en Chiffres, Edition 2001, p. 35.
Tableau élaboré à partir des données statistiques du Ministère des Finances et de la Planification économique. Ici, comme c'était le cas pour les composantes de l'équation Keynésienne que nous avons analysées précédemment, la corrélation négative entre le PIB et la progression de l'épidémie du VIH/SIDA n'apparaît pas sur les données disponibles. Faudrait-il alors conclure que l'épidémie du VIH/SIDA n'influence pas la production nationale et qu'elle n'a aucun impact significatif sur le bien être économique ainsi mesuré? Au début des années 1990, certains économistes s'intéressant à l'épidémie du VIH/SIDA sont arrivés à conclure que l'épidémie n'avait pas d'impact sur l'économie dans son ensemble. Ce fut le cas de Over151 en 1992, et de Bloom et Mahal152 en 1995. Ces derniers estimèrent, à partir de leurs études macroéconomiques, que l'épidémie du VIH/SIDA ne constituait pas une menace au bien être économique. L'étude effectuée par Over, dans le cadre de la Banque Mondiale, a même affirmé que la baisse de la population causée par l'épidémie du VIH/SIDA ne constituait pas une entrave à la croissance économique des pays les plus touchés par l'épidémie. Ces derniers étant pourvus d'un surplus de main d'oeuvre, ils n'auraient pas de difficulté à remplacer les travailleurs atteints par le VIH/SIDA et, par conséquent, il n'y aurait pas de perte de productivité153. Cela pourrait-il se dire aujourd'hui pour le Botswana par exemple? Une telle affirmation a 151 M. OVER, The Macroeconomics Impact of AIDS in sub-Saharan Africa, Technical working Paper Nr.3, World Bank, Washington, 1992. 152 D.E. BLOOM ET A.S. MAHAL, Does the AIDS Epidemic Really Threaten Economic Growth ?, Working Paper 5148, National Bureau of Economic Research Inc., Cambridge MA, 1995. 153 Cf. M. OVER, The Macroeconomics Impact of AIDS in sub-Saharan Africa, Technical working Paper Nr.3, World Bank, Washington, 1992. certainement sous-estimé les effets dévastateurs du VIH/SIDA et s'est limité à considérer des données qui ne reflètent pas toute la réalité économique et sociale. En effet, même si cela n'apparaît pas dans les statistiques macroéconomiques, la Banque Mondiale estime que sur le plan économique, « le SIDA colite chaque année à l'Afrique un point de pourcentage de croissance économique. Dans le cas des pays les plus durement touchés par l'épidémie, ce coüt avoisine les 3 ou 4 points. En l'espace d'une décennie, la production totale de ces pays pourrait être de 35% inférieure à celle qu'elle aurait étésans le SIDA.154 ». En ce qui concerne les données macroéconomiques disponibles, il nous faut faire quelques clarifications pour mieux comprendre la difficulté d'établir une corrélation entre le PIB et l'épidémie du VIH/SIDA. Martha Ainsworth, économiste du groupe de recherche à la Banque Mondiale, a affirmé que les statistiques standard comme le PIB par habitant sont des mauvais instruments pour mesurer l'impact du SIDA en Afrique, et que l'impact de l'épidémie a besoin d'être plutôt considéré dans le contexte plus large du bien-être humain, car le PNB par habitant ou la croissance du PIB ne considère pas la dimension perte de bien-être, et en particulier la perte de bien-être de ceux qui meurent155. Pour David Tarantola, spécialiste en matière de SIDA auprès du centre pour la santé et les droits humains de la Harvard School of Public Health, l'ampleur de l'épidémie est tellement grande aujourd'hui que les chiffres ne sont plus nécessaires pour établir des arguments en faveur des conséquences économiques de l'épidémie156. En plus de ces « arguments d'autorité » que nous venons d'évoquer, il nous faudrait aussi signaler qu'il y a des raisons proprement économiques qui empêchent d'établir une corrélation négative avec l'épidémie du VIH/SIDA. La difficulté naît d'abord du fait que la comptabilité nationale ne considère que les éléments quantitatifs de la production nationale pour mesurer le bien-être économique d'un pays sans tenir compte des activités du secteur informel (secteur important au Rwanda), des coûts sociaux résultant du processus de production (externalités), et d'autres aspects qualitatifs qui contribuent tout aussi au bien- être économique au-delà des simples revenus reçus et distribués. Le PIB comporte donc des 154 G. MUTUME, «Les dirigeants africains partent en guerre contre le SIDA», in Développement et Coopération, Juillet/Août 2001, p. 11. 155 Cf. P. WEHRWEIN, «The Economic Impact of AIDS in Africa», in Harvard AIDS review, Fall 1999/Winter 2000. Disponible sur Internet: < http://www.hsph.harvard.edu/hai/news_publications/har/fallwin_1999/fallwin99-4.html> 156 Ibid. limites comme mesure du bien-être économique et il ne faudrait pas s'étonner qu'il soit inadéquat pour mesurer l'impact macroéconomique du VIH/SIDA qui est à la fois au niveau quantitatif et qualitatif. Abondant dans le même sens, le scientifique canadien Joseph Decosas, lors de la 11ème Conférence internationale sur le SIDA, déclara que « le manque de preuves en faveur d'un impact macroéconomique négatif du SIDA, ou même le fait de suggérer que, dans certaines conditions, le VIH puisse stimuler l'économie, ne devraient au fond surprendre personne (...) les mesures de la performance macroéconomique ne suffisent pas comme indicateurs du bien-être ou du développement d'une société. Les économies peuvent être stimulées par un grand nombre d'événements différents, dont certains sont carrément abominables, comme les guerres et les épidémies. Le fabricant de cercueils contribue autant à l'économie que le fabricant de berceaux157. » Il est aussi intéressant de constater que même ceux qui avaient des doutes sur l'impact économique du VIH/SIDA commencent à changer d'opinion. Bloom , professeur d'économie et de démographie à la Harvard School of Public Health, qui était l'un des irréductibles dans la controverse sur l'impact macroéconomique du VIH/SIDA, est arrivé à reconnaître, notamment après un voyage effectué en Afrique du Sud (pays qui compte le plus grand nombre de personnes vivant avec le VIH/SIDA), qu'avec le VIH/SIDA, c'est toute l'économie qui est en danger158. Over, partant des estimations de la Banque Mondiale, a aussi reconnu les effets négatifs de l'épidémie du VIH/SIDA sur l'économie, notamment il estime que l'épidémie créera un retard dans l'amélioration des conditions économiques des générations futures159. Faudrait-il attendre tout ce temps pour se rendre compte des conséquences néfastes de l'épidémie ? Nous estimons, pour notre part, un peu dans le sens de ce que faisait remarquer David Tarantola, que pour ceux qui vivent et travaillent au Rwanda, l'impact de l'épidémie du VIH/SIDA sur l'économie des individus, des familles et des communautés, est évidente. La maladie, le décès, et la perte des capacités productives dans les communautés 157 J. DECOSAS, Le VIH et le Développement, exposé en plénière dans le cadre de la 11ème Conférence internationale sur le sida, Vancouver, 1996. Disponible sur Internet : < http://www.Ccisd.org/fra/f_documents/decosas.htm> 158 Cf. P. WEHRWEIN, «The Economic Impact of AIDS in Africa», in Harvard AIDS review, Fall 1999/Winter 2000. Disponible sur Internet: < http://www.hsph.harvard.edu/hai/news_publications/har/fallwin_1999/fallwin99-4.html> 159 Ibid. nécessitent à peine d'être appuyés par des statistiques160. Nous estimons alors qu'il ne faudra pas attendre de constater une baisse de la croissance économique au niveau du PIB, qui peut-être n'apparaîtra que à long terme, pour commencer à réagir à la menace que constitue le SIDA. Comme disait Keynes, « le long terme est un mauvais guide pour les affaires courantes. A long terme nous serons tous morts. Les économistes se fixent une tâche (...) peu utile s'ils peuvent seulement nous dire que lorsque l'orage sera passé, l'océan sera plat à nouveau. 161» 160 Ibid. 161 Cf. Citations du Dictionnaire d'Économie et de Sciences Sociales, sous la direction de C.-D. Echaudemaison, Nathan, Paris, 1998. CHAPITRE III
|
Années |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
2001 |
2002 |
2003 |
2004 |
2005 |
2006 |
2007 |
2008 |
2009 |
2010 |
Population séropositive (en milliers) |
|||||||||||||||
Femmes |
113,83 |
148,21 |
168,42 |
180,49 |
192,25 |
209,38 |
221,15 |
232,93 |
250,63 |
269,11 |
282,20 |
295,01 |
314,61 |
348,13 |
369,76 |
Hommes |
141,35 |
142,73 |
160,09 |
170,68 |
180,69 |
195,01 |
204,65 |
215,17 |
231,18 |
249,55 |
262,93 |
275,37 |
293,51 |
324,98 |
345,82 |
Total |
255,18 |
290,94 |
328,51 |
351,17 |
372,94 |
404,39 |
425,70 |
448,10 |
481,81 |
518,66 |
545,13 |
570,38 |
608,12 |
673,11 |
715,58 |
Nouveaux cas de SIDA (en milliers) |
|||||||||||||||
Femmes |
3,91 |
4,50 |
4,40 |
5,71 |
6,14 |
7,86 |
9,74 |
12,35 |
14,17 |
16,72 |
19,67 |
21,45 |
22,99 |
25,01 |
26,84 |
Hommes |
4,09 |
4,71 |
4,66 |
5,07 |
5,83 |
6,37 |
7,92 |
9,60 |
11,67 |
13,87 |
16,38 |
18,88 |
20,60 |
22,69 |
24,86 |
Total |
8,00 |
9,21 |
9,06 |
10,78 |
11,97 |
14,23 |
17,66 |
21,95 |
25,84 |
30,59 |
36,05 |
40,33 |
43,59 |
47,70 |
51,70 |
Naissances séropositives annuelles (en milliers) |
|||||||||||||||
Total |
4,58 |
5,18 |
6,36 |
7,05 |
7,66 |
8,64 |
8,61 |
9,04 |
9,69 |
10,34 |
10,72 |
10,04 |
10,52 |
11,46 |
11,88 |
Décès annuels dus au SIDA (en milliers) |
|||||||||||||||
Femmes |
3,11 |
3,91 |
4,84 |
5,25 |
6,10 |
7,34 |
9,04 |
11,32 |
13,42 |
15,51 |
18,28 |
20,62 |
22,27 |
24,05 |
25,96 |
Hommes |
3,26 |
4,09 |
5,05 |
5,05 |
5,61 |
6,43 |
7,38 |
9,05 |
10,81 |
12,85 |
15,23 |
17,71 |
19,81 |
21,71 |
23,81 |
Total |
6,37 |
8,00 |
9,89 |
10,30 |
11,71 |
13,77 |
16,42 |
20,37 |
24,23 |
28,36 |
33,51 |
38,33 |
42,08 |
45,76 |
49,77 |
Décès cumulatifs dus au SIDA (en milliers) |
|||||||||||||||
Femmes |
3,11 |
7,02 |
11,86 |
17,11 |
23,20 |
30,34 |
39,58 |
50,90 |
64,32 |
79,82 |
98,10 |
118,72 |
140,99 |
165,04 |
191,00 |
Hommes |
3,26 |
7,36 |
12,41 |
17,46 |
23,07 |
29,50 |
36,88 |
45,94 |
56,74 |
69,59 |
84,82 |
102,53 |
122,34 |
144,05 |
167,86 |
Total |
6,37 |
14,38 |
24,27 |
34,57 |
46,27 |
59,84 |
76,46 |
96,84 |
121,06 |
149,41 |
182,92 |
221,25 |
263,33 |
309,09 |
358,86 |
Tableau ré-élaboré à partir des données du bureau régional de l'Organisation Mondiale de la Santé pour l'Afrique (OMS/AFRO) aoIit
2000173
172 Cf. COMMISSION NATIONALE DE LUTTE CONTRE LE SIDA (CNLS), Cadre stratégique national de lutte contre le SIDA 2002-2006, Présidence de la république Rwandaise, Kigali, avril 2002, pp 49-50.
173 Il faut noter que les projections sur le VIH/SIDA sont faites à partir de programmes d'informations intégrant plusieurs hypothèses théoriques et ne peuvent donc être considérées comme des données exactes. Il faut considérer que ces résultats peuvent varier énormément en fonction du poids donné à certains paramètres informationnels du modèle de projection. Ces données sont à prendre donc comme des tendances et des indications qui pourraient varier énormément selon le cours que connaîtra l'épidémie dans les années qui viennent.
La grande majorité de la population rwandaise, comme nous l'avons déjà fait remarquer, habite en milieu rural, environ 85% selon les estimations du 3ème recensement national du mois d'aoüt 2002. Ce dernier recensement constate que la population citadine est en croissance, elle est estimée aujourd'hui à environ 16,7% du total de la population rwandaise174. C'est une augmentation significative si l'on considère les données de 1999 qui estimaient la population urbaine à 6% du total de la population nationale. Ces données font comprendre que le phénomène d'exode rural est en train de prendre de l'importance dans tout le pays ; il y a donc de plus en plus des jeunes qui quittent les villages pour s'installer dans les villes. Or, comme nous l'avons déjà signalé, l'épidémie du VIH/SIDA est plus répandu dans ces centres urbains où les jeunes émigrent. Ceux-ci se retrouvent par conséquent encore plus exposés que dans leurs milieux d'origine, et, vu la baisse du contrôle social et l'anonymat caractéristique des grandes villes, on peut craindre que ces jeunes ne soient hautement à risque face au VIH/SIDA. Le phénomène de la prostitution qui s'est accentué durant ces dernières années175 et qui est particulièrement répandu dans les villes, constitue un autre facteur qui rend l'exode rural dangereux pour les populations qui émigrent. En conséquence, le déplacement de population, en particulier l'exode rural, entraîne un plus grand risque face au VIH/SIDA.
Un autre problème lié à la distribution de la population sur le territoire est celui des populations concentrées dans certains milieux, comme les habitats regroupés (imidugudu), les camps de réfugiés ou encore les prisons. Dans les prisons, par exemple, sur une population estimée à 100 000 prisonniers, on dénombrait 13 000 séropositifs176. Vivant dans une grande promiscuité, les populations de ces milieux à forte densité, sont particulièrement à risque face au VIH/SIDA qui peut facilement être transmis ou contracté. L'expansion rapide de l'épidémie du VIH/SIDA risque de rendre ces milieux encore plus précaires et plus vulnérables aux autres maladies.
174 Cf. Premiers résultats du 3ème recensement national du mois d'aoüt 2002 donnés lors de la conférence de presse du ministre des finances et de la planification économique, Donald Kaberuka, Kigali, le 17 décembre 2002. Disponible sur Internet : < http: //www.rwanda1.com/>.
175 PNLS/MINISANTE, Définir les voies pour la prévention du VIH/SIDA : leçons apprises sur les aspects comportementaux, revue de la littérature dans la période post-génocide 1994-2000, novembre 2000, p. 11.
176 COMMISSION NATIONALE DE LUTTE CONTRE LE SIDA (CNLS), Cadre stratégique national de lutte contre le SIDA 2002-2006, Présidence de la république Rwandaise, Kigali, avril 2002, p.45.
Ainsi, nous estimons que la politique de décentralisation, initiée par le gouvernement, a un réel défi à relever. Elle doit voir comment redistribuer la population en tenant compte de la menace du VIH/SIDA notamment dans les habitats regroupés, sensibiliser et prévenir la population tout en prenant en charge ceux qui vivent déjà avec le VIH/SIDA.
La principale activité professionnelle au Rwanda est l'agriculture qui occupe environ 91% de la population active tandis que le secteur secondaire n'emploie que 2% et le secteur tertiaire 7%177.
Comme nous l'avons fait remarquer, l'agriculture rwandaise, étant très peu mécanisée, dépend essentiellement de la force physique des agriculteurs (work intensive). L'épidémie du VIH/SIDA, qui tue progressivement, entraîne dans un premier temps l'affaiblissement de la personne malade et, dans un second temps, quand le SIDA se déclare, le décès. Le travailleur voit ses forces décliner graduellement et est obligé de changer d'activité, ne pouvant plus fournir l'effort exigé par le travail des champs. Cette situation peut entraîner l'abandon de certaines cultures, en particulier les cultures de café et de thé, qui exigent un effort physique intense. Bien plus, le décès d'un agriculteur qualifié empêche, comme nous le notions déjà, la transmission de sa compétence aux jeunes générations.
L'épidémie du VIH/SIDA représente donc une menace sérieuse pour le profil professionnel, surtout au niveau du personnel chargé de la formation comme les enseignants. C'est le cas, par exemple, du Botswana qui, du fait de l'incidence du SIDA sur l'offre de travailleurs formés, est contraint d' « importer » du personnel qualifié178. Il est vrai que le secteur primaire ne demande pas une grande compétence et que, à la limite les agriculteurs décédés pourraient facilement être remplacés. Mais il faut considérer aussi le fait que les jeunes générations ne sont pas assurées face au VIH/SIDA, et que, par conséquent, il est difficile de prévoir si ces dernières prendront la relève des générations décimées par le VIH/SIDA.
177 Ibid., p. 19.
178BANQUE AFRICAINE DE DEVELOPPEMENT (BAD), Rapport sur le Développement en Afrique 2001. Renforcement de la bonne gouvernance en Afrique, Economica, Paris, 2001, p. 46.
L'épidémie du VIH/SIDA a mis au grand jour le problème du Genre179, les inégalités sociales qui existent entre les hommes et les femmes. En effet, comme le constate Eleonora Masini, les femmes sont souvent marginalisées en termes d'emploi et de qualité de vie180 ; elles ne jouissent pas des mêmes opportunités socioéconomiques que les hommes. Au Rwanda, ces différences sont assez significatives. Par exemple, en 2002, au niveau de l'instruction, le taux d'alphabétisation des femmes était estimé à 60,2% tandis que celui des hommes est de 73,7%181. Au niveau de l'occupation, le Ministère du commerce, de l'industrie et du tourisme, rapportait, selon ses estimations de l'année 1999, que sur 24 603 employés, 2 174 étaient des femmes 182. Les femmes ont donc peu « de voix au chapitre » et, comme l'affirmait le rapport du PNUD sur le développement humain 2002, « si les femmes sont moins bien loties sous de multiples aspects du développement humain, c'est notamment parce que leur voix se fait moins entendre que celle des hommes dans les décisions qui déterminent leur existence183. »
Cependant, du côté du secteur informel, qui joue un rôle non négligeable dans l'ensemble de l'économie rwandaise, notamment à travers les activités commerciales et artisanales, les femmes sont bien représentées. Le secteur primaire, notamment avec l'agriculture, est aussi porté par les femmes. De même, au niveau des ménages, les femmes jouent un rôle de premier plan ; en effet, on estime environ que 36% des ménages rwandais sont dirigés par les femmes seules184.
Au niveau juridique, le statut de la femme rwandaise est de droit égal à celui de l'homme ; mais, au niveau social, il est en fait inférieur à celui de l'homme. « Malgré les changements introduits dans le code de la famille du Rwanda, notamment en matière de propriété, beaucoup de Rwandais se réfèrent encore à la coutume pour refuser aux femmes
179 Le terme « Genre » sera utilisé ici comme traduction littéraire du terme anglais « Gender », utilisé pour décrire les questions liées aux différents sexes, en particulier à celui des femmes. Plus spécifiquement, il se réfère aux problèmes posés par le statut et le rôle qu'occupe les femmes dans la société.
180 Cf. E.B. MASINI, « Limits to Sustainability in Sustainable and Equitable Development », in The 50th anniversary of the United Nations and the Italian contribution toward the realization of the «Earth Charter», Accademia Nazionale delle Scienze, Roma, 1998, pp. 93-94.
181 Cf. PNUD, Indicateurs du Développement Humain 2002.
182 Cf. MINISTERE DES FINANCES ET DE LA PLANIFICATION ECONOMIQUE, Le Rwanda en Chiffres, Edition 2001, p. 22.
183 PNUD, Rapport mondial sur le Développement Humain 2002, De Boeck, Bruxelles, 2002, p.23.
184 COMMISSION NATIONALE DE LUTTE CONTRE LE SIDA (CNLS), Cadre stratégique national de lutte contre le SIDA 2002-2006, Présidence de la république Rwandaise, Kigali, avril 2002, p.23.
le droit de propriété sur le bétail, sur la terre et sur la gestion des fruits de leur labeur185. »
Cette situation d'inégalité flagrante est d'autant plus préoccupante qu'environ 52,3% de la population rwandaise est féminine. Cette tranche de la population, vulnérable au VIH/SIDA pour des raisons évoquées au premier chapitre, est effectivement la plus touchée par l'épidémie. A la base des problèmes de la condition féminine, se trouve certainement le statut social inférieur attribué à la femme. « Ce statut influence directement la possibilité de prise de décision dans les domaines importants comme la santé (dépistage, traitement des IST, contraception, etc.) où seulement 23% des femmes en union peuvent prendre des décisions concernant leur propre santé alors que dans 48% des cas, c'est le mari seul qui a le dernier mot. La majorité des filles célibataires (52%) voient les décisions sur leur santé prises par quelqu'un d'autres sans les consulter186.» Cette situation fait que l'épidémie du VIH/SIDA touche plus les femmes que les hommes. On peut le constater facilement en se référant au tableau des projections sur le VIH/SIDA au Rwanda reporté plus-haut et au rapport de l'ONUSIDA 2002, qui mentionnait que sur un total de 430 000 adultes vivant avec le VIH/SIDA au Rwanda, 250 000 étaient des femmes187.
Il nous faut aussi rappeler que le génocide de 1994 a constitué un facteur aggravant de l'épidémie du VIH/SIDA dans le pays et que les femmes en ont été les principales victimes. Une enquête menée par l'association des veuves du génocide (AVEGA) démontre bien cela. Cette étude, qui a été faite sur une population limitée à 1125 femmes violées pendant le génocide de 1994, a révélé que sur ces 1125 veuves testées, 70% étaient infectées du VIH/SIDA188. Sachant que des nombreuses femmes ont été violées pendant le génocide de 1994, on peut imaginer combien cette tragédie a contribué à la contamination de nombreuses d'entre elles.
185 Ibid., p. 22.
186 Ibid., p. 23.
187 Cf. ONUSIDA, Rapport sur l'épidémie mondiale de VIH/SIDA, Genève, Juillet 2002, p. 196.
188 COMMISSION NATIONALE DE LUTTE CONTRE LE SIDA (CNLS), Cadre stratégique national de lutte contre le SIDA 2002-2006, Présidence de la république Rwandaise, Kigali, avril 2002, p. 42. Voir aussi l'article paru récemment sur New York Times Magazine : PETER LANDESMAN, « A woman's work », 15 septembre 2002, paru aussi sur la revue Internazionale, « Lo stupro come arma di guerra,», 13/19 dicembre 2002, pp.28-36.
Les différents éléments et données, que nous venons de voir brièvement, montrent l'importance de l'impact du VIH/SIDA sur la condition féminine et la grande vulnérabilité des femmes par rapport à cette épidémie.
Nous considérons par conséquent que le changement du cours de l'épidémie est en grande partie liée à l'importance qu'on accordera aux femmes, et aux moyens qu'on leur donnera pour prendre en main leur avenir et assurer leur protection elles-mêmes. Cela passe nécessairement, à notre avis, par le relèvement de leur niveau d'éducation et la sensibilisation des hommes aux problèmes du Genre. Nous estimons que le cadre juridique et institutionnel rwandais, qui a déjà fait beaucoup en faveur de la femme, ne suffit pas. Il faudra des actions au niveau des communautés locales grâce à la politique de décentralisation et l'implication des nombreuses associations féminines qui sont en train de devenir importantes au niveau de la société civile rwandaise. Il faudrait qu'on arrive, comme on aime dire aujourd'hui, « to empower women », pas seulement en termes de pouvoir de décision au niveau public et institutionnel, mais aussi et surtout - ce qui nous semble le plus important - en termes d'autorité et de pouvoir de décision en ce qui concerne leur propre vie et leur foyer.
En rapport avec l'épidémie du VIH/SIDA, le problème des droits humains a pris une importance particulière ces dernières années. Comme l'épidémie évoluait, on s'est rendu compte que les malades du SIDA étaient de plus en plus stigmatisés et marginalisés par la société. Cette situation de discrimination, que connaissent des nombreuses personnes vivant avec le VIH/SIDA, a commencé à être progressivement reconnue comme un non-respect à la dignité de la personne humaine et une violation flagrante des droits humains. C'est dans ce sens que le Programme commun des Nations Unies sur le SIDA (ONUSIDA) a lancé sa campagne 2002-2003 contre la stigmatisation et la discrimination sociale des personnes vivant avec le VIH/SIDA. En refusant aux personnes atteintes par le VIH/SIDA certains droits humains essentiels, la société risque d'accroître la honte et la peur qui entourent l'épidémie du VIH/SIDA, et occasionner par là même une ultérieure progression de celle-ci. C'est donc avec raison que l'organisation de défense des droits de l'homme,
Human Rights Watch, affirmait dans son rapport 2002 que « Le VIH/SIDA prospère grâce à la discrimination et la répression dont ses victimes sont la cible189.»
L'épidémie du VIH/SIDA constitue ainsi un défi en termes de respect des droits des personnes vivant avec le VIH/SIDA. Celles-ci ont en effet droit à la protection sociale et à l'accès aux traitements disponibles. Si, dans la suite, nous ne montrons que ces deux droits, nous n'oublions pas cependant qu'il est tout aussi important de garantir le droit à la prévention, notamment à travers l'information, l'éducation et la communication adéquate sur la réalité du VIH/SIDA.
La prise de conscience des droits des personnes vivant avec le VIH/SIDA est récente au Rwanda et il nous semble que la question n'a pas encore été traitée, avec tout le sérieux qu'elle requiert par les différents acteurs de la lutte contre le SIDA. En effet, le cadre stratégique de lutte contre le SIDA 2002-2006 mentionne le problème de manière très générale et l'insère dans le cadre de la bonne gouvernance qui doit accompagner la lutte nationale contre le VIH/SIDA. La Commission Nationale de Lutte contre le SIDA (CNLS) reconnaît toutefois la réalité de la stigmatisation et de l'exclusion sociale des personnes atteintes par le VIH/SIDA, affirmant que « la réalisation universelle des droits de la personne et des libertés fondamentales est indispensable si l'on veut réduire la vulnérabilité face au VIH/SIDA. Dans cette optique, le respect des droits des personnes atteintes par le VIH/SIDA entraîne l'adoption des mesures visant à éliminer toutes formes de discrimination pouvant conduire à la stigmatisation et à l'exclusion sociale190. » La CNLS recommande ensuite que la Commission des droits de l'homme au Rwanda (CNDH) puisse, dans le cadre des politiques du gouvernement en lien avec la promotion des droits humains, participer à la protection des droits des personnes vivant avec le VIH/SIDA, en étroite collaboration avec les ONG nationales et internationales191. La CNLS demande en plus que l'environnement juridique pour le respect des droits des
189 Cf. HUMAN RIGHTS WATCH, «SIDA et Droits humains», in Rapport Mondial 2002, disponible sur Internet : < http://www.hrw.org/french/reports/wr2k2/sida.html>
190 Cf. COMMISSION NATIONALE DE LUTTE CONTRE LE SIDA (CNLS), Cadre stratégique national de lutte contre le SIDA 2002-2006, Présidence de la république Rwandaise, Kigali, avril 2002, p. 29.
191 Ibid.
personnes infectées ou affectées par le VIH/SIDA, et particulièrement ceux des populations vulnérables, puisse être redynamisé en un réseau éthique et juridique192.
La stigmatisation associée au VIH/SIDA naît, comme le constatait Peter Piot, directeur exécutif de l'ONUSIDA, de la combinaison de la peur et de la honte qui caractérisent la pandémie193. En effet, il arrive souvent qu'une fois que le statut sérologique d'une personne est connu par la communauté ou parfois seulement suspecté à partir de certains symptômes extérieurs, la personne soit, par peur ou par honte, marginalisée de la communauté. En plus de l'effet psychologique négatif, qui n'est pas d'ailleurs le seul, que cette exclusion sociale provoque chez la personne atteinte par le VIH/SIDA, la discrimination s'étend aussi souvent aux proches membres de famille, épouse (ou mari) et enfants de la victime du VIH/SIDA.
Nous considérons que ces attitudes de stigmatisation, qui se traduisent souvent par la négation des besoins essentiels comme l'accès aux soins de santé, la protection sociale, le droit au travail et le droit à la propriété, sont des violations des droits essentiels de chaque personne humaine. En effet, l'article 7 de la déclaration universelle des droits de l'homme stipule que « tous ont droit à une protection égale contre toute discrimination qui violerait la présente Déclaration et contre toute provocation à une telle discrimination.194 ».
Face à la stigmatisation et à la discrimination qui entourent l'épidémie du VIH/SIDA, nous considérons que le gouvernement et les leaders de la société civile doivent prendre position et dénoncer ces situations. Ils pourraient le faire, comme la CNLS l'a suggéré, à travers la Commission Nationale des droits de l'homme et un cadre juridique clair qui assure la protection et le respect des droits des personnes vivant avec le VIH/SIDA ainsi que celui de leurs membres de famille, en particulier celui des veuves et des orphelins. Ces situations pourraient aussi être confiées à des tribunaux internationaux, vu que la pandémie du SIDA est devenue mondiale.
192 Ibid.
193 Cf. Discours de Peter Piot à la conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l'intolérance, Durban, Afrique du Sud, 5 septembre 2001. Disponible sur Internet : < www.unaids.org/whatsnew/speeches/eng/piot040901racism.htm>
194 ASSEMBLEE GENERALE DES NATIONS UNIES, Déclaraion universelle des droits de l'homme, 10 décembre 1948, article 7.
Une piste de solution, face à la stigmatisation et discrimination des personnes vivant avec le VIH/SIDA, nous semble avoir été tracée par le BIT (Bureau International du Travail) à travers un recueil de directives pratiques sur le VIH/SIDA et le monde du travail. Dans ce recueil, le BIT déclare le principe de non-discrimination face aux travailleurs séropositifs : « dans l'esprit du travail décent et dans le respect des droits de l'homme et de la dignité des personnes infectées par le VIH ou malades du SIDA, les travailleurs ne devraient pas faire l'objet de discrimination au motif de leur statut VIH, qu'il soit réel ou supposé195. » Au-delà de la simple affirmation du principe de nondiscrimination, ce recueil demande même aux employeurs de ne pas exiger le dépistage aux demandeurs d'emploi ni aux personnes occupant un emploi, car, selon le BIT, rien ne justifie cette requête qui concerne des informations personnelles liées au VIH196. Le BIT demande, en outre, que les personnes atteintes par les maladies associées au VIH puissent continuer à travailler aussi longtemps qu'elles sont médicalement aptes à occuper un emploi disponible et approprié197. Le même recueil ajoute que : « tous les travailleurs, y compris ceux qui sont infectés par le VIH, ont droit à des services de santé accessibles. Ni eux ni les personnes à leur charge ne devraient faire l'objet de discrimination dans l'accès aux prestations de sécurité sociale et à celles des régimes professionnels prévus par la loi198. »
L'ONUSIDA affirme dans son rapport 2002 que « le VIH/SIDA a creusé plus profondément les clivages sociaux et économiques des communautés et des sociétés et il continue d'élargir le fossé. Partout dans le monde, ceux qui sont les plus affectés par le VIH/SIDA sont des personnes et des communautés qui ont un accès limité aux droits sociaux et économiques fondamentaux.199 » Cette situation d'accès limité aux droits sociaux et économiques fondamentaux est particulièrement flagrante en ce qui concerne l'accès aux traitements disponibles et l'accès à l'information adéquate pour combattre l'expansion du VIH/SIDA. Sans négliger l'importance du droit à l'information sur le VIH/SIDA, nous nous limiterons ici au problème de l'accès aux traitements
195 BIT, Recueil de directives pratiques du BIT sur le VIH/SIDA et le monde du travail, Organisation Internationale du Travail, Genève, 2001, p.5.
196 Ibid., p. 6.
197 Ibid., pp. 6-7.
198 Ibid., p. 7.
199 ONUSIDA, Rapport sur l'épidémie mondiale de VIH/SIDA, Genève, Juillet 2002, p. 63.
antirétroviraux, problème que nous avions déjà mentionné précédemment, et qui constitue, à nos yeux, l'une des principales entraves à la lutte contre le VIH/SIDA dans la majorité des pays en voie de développement.
Nous avons vu que, malgré les efforts louables du gouvernement rwandais, l'accès aux traitements antirétroviraux demeure limité pour la majorité des rwandais et rwandaises atteints par le VIH/SIDA. Selon le rapport du MINISANTE 2001, au 31 décembre 2001, seuls 1507 malades, enregistrés au CHK et à l'hôpital Roi Faycal de Kigali, avaient accès aux traitements antirétroviraux200. Ce nombre est insignifiant par rapport au nombre de personnes vivant avec le VIH/SIDA au Rwanda.
La raison de ce manque d'accès aux traitements a déjà été évoquée précédemment. Les traitements antirétroviraux sont le monopole de certaines firmes pharmaceutiques internationales des pays industrialisés, monopole que protègent notamment les Etats-Unis et les accords de l'OMC sur la propriété intellectuelle (TRIPS). Ainsi à cause de leurs prix élevés, les antirétroviraux demeurent-ils inaccessibles à la majorité des populations pauvres. Les intérêts économiques ont de fait pris la primauté sur les droits humains. Les différentes firmes pharmaceutiques qui refusent de rendre accessibles ces traitements aux pays pauvres, soit par une baisse significative des prix ou le retrait des brevets qui empêchent aux autres pays de produire ces médicaments à des coûts mineurs, se justifient par le droit à la propriété intellectuelle.
Il est certes vrai que le paragraphe 2 de l'article 27 de la déclaration universelle des droits de l'homme stipule que « chacun a droit à la protection des intérêts moraux et matériels découlant de toute production scientifique, littéraire ou artistique dont il est l'auteur », mais tout aussi vrai, et à notre avis plus important, est ce que le paragraphe 1 du même article stipule en déclarant que « toute personne a le droit de prendre part librement à la vie culturelle de la communauté, de jouir des arts et de participer au progrès scientifique et aux bienfaits qui en résultent ». Il nous faut aussi faire remarquer que l'article 25 de la même déclaration universelle est encore plus explicite lorsqu'il parle du droit à la santé: « toute personne a droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son bien-être et ceux de sa famille, notamment pour l'alimentation, l'habillement, le logement, les soins médicaux ainsi que pour les services sociaux nécessaires ; elle a droit
200 Cf. MINISTRE DE LA SANTE, Rapport annuel 2001, République Rwandaise, mars 2002.
à la sécurité en cas de chômage, de maladie, d'invalidité, de veuvage, de vieillesse ou dans les autres cas de perte de ses moyens de subsistance par suite de circonstances indépendantes de sa volonté. » Nous considérons que cet aspect doit davantage être présenté face au VIH/SIDA et en particulier dans le cas des traitements antirétroviraux. Il s'agit tout d'abord d'une question de droit à la vie et d'assistance à personne en danger de mort. Le catéchisme de l'Eglise Catholique a des paroles pertinentes à ce sujet : « la loi morale défend d'exposer sans raison grave quelqu'un à un risque mortel ainsi que de refuser l'assistance à une personne en danger~L'acceptation par la société humaine des famines meurtrières sans s'efforcer d'y porter remède est une scandaleuse injustice et une faute grave. Les trafiquants, dont les pratiques usurières et mercantiles provoquent la faim et la mort de leurs frères en humanité, commettent indirectement un homicide. Celui-ci leur est imputable201. »
Toutefois, des signes positifs vers une amélioration de l'accès aux traitements antirétroviraux proviennent des pays en développement comme l'Inde, l'Afrique du Sud qui ont pu produire des médicaments anti-rétrovirus à moindre prix, permettant ainsi de prolonger la vie des personnes atteintes par le VIH/SIDA dans leurs pays respectifs.
Malheureusement, l'OMC n'a pas permis à ces pays d'exporter ces médicaments bon marché vers d'autres pays qui en ont besoin. Ces pays courageux ont même été traînés en justice par les grands laboratoires pharmaceutiques producteurs des antirétroviraux. C'est notamment le cas de l'Afrique du Sud qui s'est vu accuser pour avoir adopté en 1997 une loi facilitant la production nationale et l'importation à moindre prix d'antirétroviraux génériques (non brevetés)202. Grâce à la pression internationale de plusieurs organisations non-gouvernementales, les trente-neuf grandes sociétés pharmaceutiques internationales ont fini par retirer leur plainte contre le gouvernement d'Afrique du Sud. L'exemple sudafricain est assez emblématique de la position des firmes pharmaceutiques et notamment de certains gouvernements qui les soutiennent, en particulier celui des Etats-Unis. Un autre exemple éloquent est celui de mars 2001 lorsque le Brésil présenta une résolution à la Commission des Droits de l'Homme de l'ONU affirmant le droit de toute personne à un traitement contre le VIH/SIDA, y compris les anti-rétrovirus ; la résolution fut adoptée à
201 Catéchisme de l'église Catholique, Editrice Vaticane, 1992, n. 2269.
202 Cf. HUMAN RIGHTS WATCH, «SIDA et Droits humains», in Rapport Mondial 2002, disponible sur Internet : < http://www.hrw.org/french/reports/wr2k2/sida.html>
l'unanimité avec la seule abstention des Etats-Unis203. Cette situation de veto de la premiere puissance économique mondiale, s'est reproduite encore lors de la rencontre de l'OMC à Genève en décembre 2002. Les Etats-Unis avaient carrément empêché l'aboutissement des négociations portant sur l'accès des pays pauvres aux médicaments génériques, en faisant prévaloir le préjudice que cela pourrait porter à l'effort de l'industrie pharmaceutique pour trouver de nouveaux médicaments204.
Nous restons sceptiques au sujet de ce dernier prétexte des Etats-Unis sur la recherche pharmaceutique, car il est suffisamment démontré que très peu de recherches pharmaceutiques sont menées en faveur des maladies qui sévissent dans les pays pauvres. Par exemple, pour la période allant de 1975 à 1997, sur la totalité des médicaments inventés au niveau mondial, seulement 4% des inventions concernaient les maladies qui frappent les populations des zones tropicales205. Dans le même sens, Michael Kremer, professeur d'économie à l'université Harvard de Cambridge (aux Etats-Unis), constate que, on investit davantage dans la recherche des médicaments sophistiqués contre le SIDA, médicaments qui sont utiles et adaptés aux pays développés, mais que très peu est fait pour les pays en développement, notamment avec la recherche des vaccins ; ceux-ci pourraient, pourtant, être plus abordables et bénéfiques que les autres traitements, vu qu'ils n'exigent souvent pas de grande dose et peuvent être administrés par du personnel avec formation médicale limitée206.
Nous assistons donc à une autre forme de stigmatisation et discrimination au niveau international, où, comme diraient les sociologues de la dépendance, le développement des pays du « centre " entraîne le sous-développement des pays de la « périphérie ". Ironiquement, c'est du même « centre " que nous provient la déclaration universelle des droits de l'homme, adopté le 10 décembre 1948, pendant que le Rwanda et plusieurs autres pays africains étaient encore des colonies. Ce sont les mêmes « pères fondateurs " des droits de l'homme qui les violent aujourd'hui, les inventeurs de la « welfare state " qui
203 Ibid.
204 Cf. « les Etats-Unis empêchent d'aboutir les négociations à l'OMC sur l'accès des pays pauvres aux médicaments génériques " disponible sur Internet : < http://fr.news.yahoo.com/021221/5/2wi5s.html>. Voir aussi A. GINORI, «Veto USA sui farmaci anti-AIDS. No agli sconti per i paesi poveri: Nuova apartheid», in La Repubblica, 22 dicembre 2002, pp. 14-15.
205 Cf. B. PECOUL et al., «Access to Essential Drugs in Poor Countries : A lost Battle ?», in Journal of the American Medical Association, January 1999, pp. 361-67.
206 Cf. M. KREMER, «Pharmaceuticals and the Developing World», in Journal of Economic Perspectives, Fall 2002, p. 69.
refusent aujourd'hui le droit universel à la santé, à la participation au progrès scientifique et aux bienfaits qui en résultent, à la dignité et à l'égalité en droits de tous les hommes et toutes les femmes, bref qui refusent le droit à la vie pour une partie importante de l'humanité.
Après avoir vu les répercussions sociales de l'épidémie du VIH/SIDA, qui reprennent pour beaucoup les conséquences que nous avions déjà constatées au niveau économique, nous allons à présent faire des propositions pour la lutte contre le VIH/SIDA au Rwanda. Si nous reprenons ici les paroles de Jean-Paul II, c'est pour exprimer, encore une fois,
notre refus de séparer l'économique de l'humain, car « aujourd'hui plus que par le passépeut-être, on reconnaît plus clairement la contradiction intrinsèque d'un développement
limité au seul aspect économique. Il subordonne facilement la personne humaine et ses besoins les plus profonds aux exigences de la planification économique ou du profit exclusif207. » Nos propositions s'inspirent des trois principes clés de l'enseignement social de l'Eglise Catholique, à savoir les principes de responsabilité, de subsidiarité et de solidarité. Nous estimons que ces principes peuvent animer et orienter les différentes actions du secteur public, privé et communautaire, sans oublier les initiatives au niveau international. C'est à ces quatre niveaux que nous situerons nos propositions en partant chaque fois des initiatives qui existent déjà, mais qui sont à renforcer. Nous recommandons une approche visant à combattre toute forme de marginalisation et de pauvreté qui sont les causes, comme nous l'avons constaté, de la progression de l'épidémie du VIH/SIDA dans le monde et au Rwanda. Il s'agit d'une approche transectorielle qui traverse toutes les sphères de la vie nationale et qui rallie les connaissances pour combattre un ennemi commun, le VIH/SIDA, ennemi qui risque, s'il n'est pas déjà en train de le faire, d'hypothéquer le futur du Rwanda.
Des l'apparition du VIH/SIDA au Rwanda, notamment lors de la déclaration des premiers cas en 1983, les autorités publiques ont commencé à mettre sur pied des projets et des actions pouvant lutter contre la nouvelle inconnue. Mais la progression qu'a connu
207 JEAN-PAUL II, Sollicitudo rei socialis, 1987, n. 33.
l'épidémie dans la suite, a prouvé qu'une action encore plus intensifiée devrait être entreprise par les hautes autorités du pays.
En 1987 fut créé le Programme National de Lutte contre le SIDA (PNLS). Ce dernier, comme nous le faisions remarqué au premier chapitre, s'est surtout occupé de la sphere médicale. Son premier plan d'action (1988-1992) était axé, en effet, sur la transfusion sanguine, la surveillance épidémiologique et les enquêtes CAP (Connaissances, Attitudes et Pratiques) et périnatales ; elle commençait à prévoir la sensibilisation nationale à la réalité du VIH/SIDA. Les années qui suivirent, furent caractérisées par une difficulté d'organiser la lutte contre le SIDA à cause de la guerre du début des années 1990 et le génocide en 1994. Après plusieurs étapes de réorganisation, par le gouvernement, du plan stratégique de lutte contre le SIDA, on est arrivé à l'élaboration d'un cadre stratégique (2002-2006) et à la mise sur pied d'un plan multisectoriel (2002-2006) mis sous la responsabilité de la CNLS qui a de ce fait remplacé le PNLS208.
Le Ministère de la santé (MINISANTE) qui avait la tutelle du PNLS, s'est particulièrement investi dans la lutte contre le SIDA en organisant, depuis 1987, plusieurs programmes, et depuis novembre 2000, des programmes avec la CNLS. Ces programmes consistent essentiellement en la formation du personnel sanitaire en matière de VIH/SIDA, la prise en charge médicale des personnes vivant avec le VIH/SIDA et les campagnes de sensibilisation dans tout le pays209. Dans le cadre des programmes du MINISANTE, il nous semble important de rappeler l'effort que le gouvernement a fourni pour la réduction du prix des traitements antirétroviraux et celui de l'augmentation des centres de conseil et dépistage volontaire (VCT). Le rapport du MINISANTE 2001 rapportait en effet que le nombre des sites VCT n'a cessé d'augmenter, passant de 4 sites en 1997, à 22 à la fin de l'année 2001210.
D'autres Ministères se sont aussi impliqués en développant des programmes de lutte contre le VIH/SIDA. C'est notamment le cas du Ministère de la défense (MINADEF) avec un programme pour les militaires, le Ministère de l'éducation (MINEDUC) avec des programmes et manuels pour les écoles, le Ministère de la jeunesse, sport et loisir
208 Cf. COMMISSION NATIONALE DE LUTTE CONTRE LE SIDA (CNLS), Cadre stratégique national de lutte contre le SIDA 2002-2006, Présidence de la république Rwandaise, Kigali, avril 2002, pp. 52-53.
209 Ibid., p. 53.
210 Cf. MINISTERE DE LA SANTE, Rapport annuel 2001, République Rwandaise, mars 2002.
(MIJESPOC) avec des activités auprès des jeunes. Cependant, il faut aussi faire remarquer, comme le constate la CNLS, que d'autres Ministères n'ont pas encore développé des programmes de lutte contre le SIDA, bien que certains d'entre eux se soient impliqués de manière indirecte dans la lutte contre le VIH/SIDA. C'est le cas du Ministère du Genre et de la promotion de la femme (MIGEPROFE) qui a organisé deux études CAP sur la prostitution et les questions de Genre dans la société rwandaise, le Ministère de l'administration locale et des affaires sociales (MINALOC) qui a intégré la sensibilisation dans ses services sociaux et qui apporte un soutien matériel et nutritionnel à des groupes d'orphelins du SIDA, et le Ministère de la fonction publique et du travail (MIFOTRA) qui continue à faire soigner les travailleurs malades et à leur verser leur salaire jusqu'au décès211. Il faut ajouter, parmi les initiatives au niveau du secteur public, la création récente d'un Ministère d'État chargé du VIH/SIDA et d'autres maladies infectieuses.
On voit bien que la lutte contre le VIH/SIDA a une importance non-négligeable pour le secteur public au Rwanda, notamment avec la création de la CNLS, comme organe de coordination de lutte contre le VIH/SIDA qui dépend directement de la présidence de la république. Cependant, nous estimons que le leadership des autorités publiques n'est pas encore suffisamment incisif pour entraîner des changements dans la progression de l'épidémie, comme cela a été le cas en Ouganda. En effet, les bons résultats enregistrés par l'Ouganda et le Sénégal ont reposé principalement sur la prise de position et l'engagement fort des autorités publiques qui n'ont pas lésiné devant les moyens de lutter contre le SIDA, et cela en collaboration avec différentes forces sociales locales et internationales.
C'est pourquoi nous proposons que toutes les instances gouvernementales puissent s'impliquer de manière explicite dans la lutte contre le VIH/SIDA, notamment tous les Ministères de l'exécutif. Il est par exemple étonnant, vu la menace que l'épidémie apporte au secteur primaire de l'économie, que le Ministère de l'agriculture ne développe pas un programme spécifique pour son secteur, que le Ministère des finances et de la planification économique, ne mette pas explicitement la lutte contre le VIH/SIDA parmi les premiers objectifs de la lutte contre la pauvreté et la « vision 2020 », que le Ministère des infrastructures ne s'implique pas dans la lutte, que le Ministère de la justice n'intervienne pas dans la mesure où le problème du SIDA affecte les droits humains ainsi que la
211 Ibid., p. 54.
nombreuse population carcérale séropositive. Il est également étonnant que le Ministère des affaires étrangères ne s'implique pas dans la négociation des traitements anti-SIDA meilleurs marchés ou dans la coopération internationale pour obtenir du personnel de formation qualifié et autres nouvelles technologies capables de rendre plus efficaces les programmes existants. Ce ne sont là que quelques exemples pour montrer que chaque Ministère a un rôle important à jouer dans la mise sur pied d'une stratégie nationale de lutte contre le SIDA car, comme nous l'avons vu dans le deuxième chapitre et au niveau des incidences sociales, tous les secteurs de la vie nationale sont touchés et donc menacés. Nous pensons alors que la lutte contre l'épidémie devrait clairement faire partie des priorités de l'exécutif et qu'un Ministère d'État ne suffit pas pour résoudre les problèmes causés par la pandémie SIDA au Rwanda. Il faudrait vraiment insérer la lutte contre le VIH/SIDA à tous les niveaux, en faire une priorité commune du gouvernement.
Tout en intervenant pour arrêter l'épidémie du VIH/SIDA et prévenir son ultérieure expansion, le gouvernement devrait veiller à décentraliser son action et à développer les milieux ruraux en adoptant une stratégie de développement rural intégré qui favorise les groupes intermédiaires comme les coopératives, qui crée des nouvelles infrastructures et qui garantit l'accès à l'information. Il nous semble que l'action du gouvernement gagnera encore en efficacité dans la mesure où, dans sa lutte contre le SIDA, elle intégrera toutes les provinces et collaborera avec la société civile. Il s'agit au fond de tenir compte du principe de subsidiarité. Nous pensons aussi que le gouvernement devrait revoir sa politique économique et fiscale actuelle en tenant compte du fait que le VIH/SIDA représente un cas d'urgence pour la société rwandaise. Il y a des grands défis à affronter et on risque de faire des choix inopportuns pendant qu'il y a des énormes besoins sociaux à satisfaire et une épidémie de grande envergure à combattre. Aussi nous estimons que le gouvernement doit d'abord investir dans les personnes, dans les ressources humaines, car, comme disait Bernard Lonergan, « celui qui guérit est essentiellement un réformateur : avant tout et surtout il fait confiance au meilleur qu'il y a dans l'homme212. » A notre avis, la clé de la lutte efficace contre l'impact du VIH/SIDA se trouve précisément dans une politique qui promeut la responsabilité de l'homme et sa solidarité avec ses pairs. C'est dans ce même sens que le Ministre de l'agriculture et de la terre de l'Afrique du Sud, Angela Thoko Didiza, avait déclaré que l'on doit certes investir en infrastructures, mais
212 B. LONERGAN, «Guarigione e creatività nella storia», in La Civiltà Cattolica, 15 settembre 2001, p.503.
que l'on doit - et nous ajoutons surtout - investir en ressources et capacités humaines. En effet, c'est seulement ainsi que l'on peut investir pour le futur213.
D'après la CNLS, l'implication du secteur privé dans la lutte contre le SIDA reste faible. Certaines entreprises ont pu, néanmoins, développer en leur sein des actions de prévention et de prise en charge médicale de leur personnel. La CNLS se félicite du fait que ce secteur commence à s'intégrer davantage dans le forum national de lutte contre le SIDA et devient partie prenante de la commission.
La réponse de ce secteur demeure toutefois timide et limitée à quelques grandes entreprises. Nous estimons, pour notre part, qu'il faut arriver à un engagement de tout le secteur privé pour la lutte efficace contre le VIH/SIDA ; surtout que, comme nous l'avons montré dans le chapitre précédant, la menace est sérieuse au niveau microéconomique des entreprises. Nous pensons que le BIT, comme nous l'avons déjà fait remarquer précédemment, a fourni, à travers son recueil de directives pratiques sur le VIH/SIDA et le monde du travail, un plan d'action intéressant, qui pourrait être repris avec beaucoup de profit par le secteur privé. Comme ce secteur apporte à l'économie nationale une contribution dans le sens des profits à réaliser en termes d'économie d'échelle, nous estimons donc que ces entreprises ont toutes les raisons de s'investir dans la lutte contre le SIDA en faveur de leurs travailleurs et de leurs familles et d'éviter ainsi ou du moins de réduire l'impact négatif de l'épidémie qu'elles pourraient encourir.
Ce secteur pourrait aussi tirer beaucoup de profit à exercer le principe de solidarité envers tous ses travailleurs atteints par le VIH/SIDA et leurs familles. Par solidarité, il faut comprendre ici ce que rappelait Jean-Paul II dans son encyclique Sollicitudo rei socialis de 1987 : la solidarité « n'est (...) pas un sentiment de compassion vague ou d'attendrissement superficiel pour les maux subis par tant de personnes proches ou lointaines. Au contraire, c'est la détermination ferme et persévérante de travailler pour le
213 Cf. INTERNATIONAL FOOD POLICY RESEARCH INSTITUTE, Sustainable Food Security for All by 2020, Proceedings of an International Conference, Bonn, September 4-6 2001, IFPRI, Washington DC, 2002, p. 27.
bien commun ; c'est-à-dire pour le bien de tous et de chacun parce que, tous, nous sommes vraiment responsables de tous214. »
Le secteur communautaire, que nous pouvons identifier ici à la société civile, a été le plus entreprenant dans la lutte contre le SIDA au Rwanda notamment à travers plusieurs projets et initiatives. Ces derniers se sont surtout focalisés dans la sensibilisation et les ateliers de formations suivant la méthode Information, Education et Communication (IEC)215. Il convient ici de souligner particulièrement l'importante contribution des confessions religieuses et des associations nationales comme l'ARBEF et le collectif PROFEMMES TWESE HAMWE qui, déjà engagées dans des programmes de santé pour la Reproduction, ont intégré l'IEC sur les MST et le VIH/SIDA dans leurs programmes d'éducation de base216.
Il faut noter pourtant qu'il y a encore beaucoup à faire pour la prise en charge communautaire des personnes vivant avec le VIH/SIDA ainsi que celle des personnes affectées indirectement par l'épidémie, en particulier les veuves et les orphelins. On constate, en effet, un faible engagement dans ce sens. Comme le montre l'étude menée conjointement par le MINISANTE, le PNLS et l'OMS sur le rôle des ONG et les associations impliquées dans la lutte contre le SIDA au Rwanda, 46% des interventions de ces différents groupes en 1999 étaient essentiellement des activités d'information, d'éducation et de sensibilisation217 ; mais, par contre, très peu se faisait pour la prise en charge des personnes vivant avec le VIH/SIDA. Toutefois, les intervenants des confessions religieuses, notamment l'Eglise Catholique, les Eglises Protestantes et les Musulmans se sont impliqués, non seulement dans les programmes d'IEC, mais aussi dans la prise en charge médicale, l'appui psychosocial, matériel et nutritionnel des personnes vivant avec le VIH/SIDA et celui de leurs membres de familles218. En ce qui concerne l'Eglise Catholique, par exemple, l'apport de la Caritas-Rwanda depuis 1989 est remarquable et a
214 JEAN-PAUL II, Sollicitudo rei socialis, n.38
215 Cf. COMMISSION NATIONALE DE LUTTE CONTRE LE SIDA (CNLS), Cadre stratégique national de lutte contre le SIDA 2002-2006, Présidence de la république Rwandaise, Kigali, avril 2002, p. 55.
216 Ibid.
217 Ibid.
218 Ibid.
été opportunément relevé par les évêques Catholiques du Rwanda dans leur récente lettre sur la lutte contre le SIDA219.
Les initiatives qui cherchent à impliquer davantage les personnes vivant avec le VIH/SIDA dans les différentes campagnes de lutte contre le SIDA sont à encourager, car elles permettent de combattre d'une part la stigmatisation et la discrimination, et d'autre part, de rendre plus efficace les campagnes d'information et de sensibilisation. Une initiative comme celle du collectif ANSP+, qui regroupe plus de 30 associations de personnes vivant avec le VIH/SIDA au Rwanda et qui plaide pour leurs droits, est à encourager avec tous les moyens disponibles. Ce collectif a pu déjà, grace à l'aide de certains partenaires, apporter un soutien matériel aux personnes séropositives et à leurs familles.
Il nous faut aussi ajouter, même si cela n'entre pas directement dans le secteur communautaire, le rôle important joué par les structures de coordination, comme le PNLS dans un premier temps et maintenant la CNLS. Ces structures ont été essentielles pour la planification et la coordination nationale des différents programmes de lutte contre le SIDA. Elles sont à rendre encore plus efficaces notamment à travers un budget plus consistant et une décentralisation des différents services. C'est dans ce sens qu'il faut signaler la création du TRAC (Treatment and Research on AIDS Center) au niveau du Ministère de la santé. Le TRAC coordonne les activités à orientation médicale, cherchant une plus grande efficacité de ces activités par rapport au passé. Un forum d'ONGs oeuvrant dans le domaine de lutte contre le VIH/SIDA a été aussi créé. Ce forum a l'avantage, en collaborant étroitement avec la CNLS, de faire le trait d'union entre les activités gouvernementales, l'ONUSIDA et les ONGs. S'il est bien géré, il peut constituer une structure décisive pour l'organisation et l'efficacité de la lutte contre le SIDA. Dans l'esprit de la subsidiarité, ces différentes Organisations Non Gouvernementales peuvent ainsi être efficaces dans l'effort national de lutte contre le SIDA, effort qui rejoindrait peutêtre alors tous les milieux, notamment les zones rurales qui sont souvent oubliées.
Toujours au niveau communautaire, une attention particulière devrait être faite aux différents groupes et clubs de jeunes, notamment avec les initiatives comme celle de « peer
219 Cf. Lettre des évêques Catholiques du Rwanda sur la lutte contre le SIDA : « Hitamo Ubugingo ureke Urupfu », Kigali, avril 2003, n. 16.
education », l'éducation des jeunes par les jeunes de la même tranche d'age, où ceux-ci peuvent facilement s'exprimer et poser des questions qui demeurent encore tabous entre les générations. Ces différentes associations ont besoin d'être stimulées et promues que ce soit au niveau des écoles, des paroisses, des clubs sportifs, etc.
Nous avons noté, plus haut, l'engagement significatif des confessions religieuses, et notamment de l'Eglise Catholique dans la lutte contre le SIDA à travers la prise en charge des personnes séropositives. En plus de cet aspect, la récente lettre des évêques Catholiques du Rwanda adressée aux chrétiens dans le cadre de la lutte contre le SIDA cherche aussi, entre autres, à donner des éclaircissements opportuns sur le sujet du préservatif comme moyen de protection contre le VIH. Les évêques du Rwanda, loin d'esquiver cette question, reconnaissent qu'on reproche à l'Eglise Catholique de ne pas faire campagne pour ceux-ci, et ils répondent en rappelant que dans la ligne des enseignements de l'Eglise, la fidélité des couples et la chasteté demeurent les moyens de prévention efficace contre le VIH/SIDA220. Nous estimons que, devant la généralisation de l'épidémie et considérant sa menace pour le développement du pays, l'Eglise Catholique du Rwanda, à laquelle appartient environ 60% de la population, a bien fait de sortir du silence en proposant des principes de réflexions, de critères de jugements et des directives d'action221 en ce qu'elle considère essentielle pour la prévention face au VIH/SIDA, pour favoriser une ligne de conduite en faveur de la vie, comme le suggère le titre de la lettre des évêques. En effet, comme le recommandait les évêques Catholiques du Kenya dans leur lettre de décembre 1999, à laquelle nous avons déjà fait allusion, « Nous devons concentrer nos efforts en éduquant et en informant nos populations sur la prévention. Il est nécessaire d'éviter des certitudes sans fondement ou des peurs inutiles afin que l'information soit disséminée prudemment et avec responsabilité222. » Nous pensons donc que l'Eglise Catholique, en collaboration avec les autres confessions religieuses, pourrait constituer un autre « son de cloche » aux campagnes de sensibilisation pro-préservatif qui ne sont souvent que des campagnes de marketing en faveur de quelques firmes multinationales. Ces confessions religieuses, qui jouissent d'une grande autorité morale et sociale au Rwanda, pourraient donc contribuer à donner l'information adéquate au sujet
220 Cf. Lettre des évêques Catholiques du Rwanda sur la lutte contre le SIDA : « Hitamo Ubugingo ureke Urupfu », avril 2003, n. 11.
221 Cf. PAUL VI, Octogesima adveniens, 1971, n.4.
222 Cf. CATHOLIC BISHOPS OF KENYA, The AIDS Pandemic and Its Impact on our people, Paulines Publications Africa, Nairobi, December 1999, p. 8.
des moyens de protection face au VIH/SIDA et influer sur le changement des comportements.
Nous estimons aussi que, comme le déclarait le docteur Dalil Boubakeur, recteur de l'institut musulman de la mosquée de Paris, repris par la commission sociale de l'épiscopat de France en 1996, « il n'est plus question que le religieux se cantonne dans une attitude moralisatrice, ni de se contenter d'énoncer des permis ou des interdits comme seul système représentant l'attitude spirituelle et humaniste aujourd'hui223. » C'est dans ce sens que nous nous félicitons de la prise de position commune prise en avril 2002 par les évêques Catholiques du Rwanda avec les pasteurs des églises Protestantes dans le cadre de la lutte contre le SIDA. Dans cette déclaration commune, les autorités ecclésiastiques Catholiques et Protestantes du Rwanda, s'engagent à renforcer leur collaboration avec toutes les instances compétentes pour la lutte contre le SIDA, en particulier avec celles qui s'occupent de l'éducation de la jeunesse ; elles s'engagent aussi à établir des bureaux de lutte contre le SIDA au niveau des diocèses, à encourager et recommander la fréquentation des centres de conseil et de dépistage volontaire (VCT) ainsi que le dépistage sérologique volontaire de la population, en particulier pour ceux qui veulent se marier224. Outre à ces recommandations, les pasteurs des églises chrétiennes s'engagent à venir en aide, en collaboration avec le secteur public, aux personnes vivant avec le VIH/SIDA, aux malades du SIDA ainsi qu'aux familles pauvres affectées par la perte des leurs à cause de la pandémie225. Ces initiatives prises au niveau des églises sont louables et elles sont à concrétiser. C'est un exemple de collaboration et communication dans la lutte contre le SIDA et nous la considérons très positive, surtout qu'elle contribue à lutter contre cette culture du silence qui entoure très souvent la question du VIH/SIDA. Nous considérons que, comme le rapportait un pasteur protestant lors d'une rencontre oecuménique sur le VIH/SIDA en Afrique, « il nous faut maintenant parler librement de cette maladie car pour nous ce n'est pas une honte226. »
223 COMISSION SOCIALE DE L'EPISCOPAT, SIDA, la société en question, Centurion, Paris, 1996, p. 120.
224 Lettre des évêques Catholiques du Rwanda sur la lutte contre le SIDA : « Hitamo Ubugingo ureke Urupfu », Kigali, avril 2003, n. 18.
225 Ibid.
226 Cf. WORLD COUNCIL OF CHURCHES, The Ecumenical response to HIV/AIDS in Africa, Plan of Action, Global Consultation on the Ecumenical response to challenge of HIV/AIDS in Africa, Nairobi, Kenya 25-28 November 2001, p.5.
Le secteur communautaire a donc un rôle de premier plan dans la lutte contre le SIDA et dans l'arrêt de son expansion à tous les niveaux. Soutenues concrètement par les secteurs public et privé ainsi que par les structures de coordination, ce secteur peut jouer un rôle important dans le changement de la tendance de l'épidémie, à travers l'information (radio, télévision, journaux, Internet, etc.), l'éducation (parents, éducation des pairs, club des jeunes, paroisses, écoles, etc.), la communication (sites de conseil et dépistage volontaire) et la prise en charge des personnes infectées et affectées par le VIH/SIDA (nutrition, soutien psychosocial, soins de santé, accompagnement spirituel, etc.)
Dans un monde de plus en plus globalisé, il est désormais impossible, de penser pouvoir s'en sortir seulement au niveau local. D'ailleurs comme nous l'avons fait remarquer, le Rwanda dépend beaucoup des relations internationales, notamment de l'appui financier extérieur pour la survie de son économie. Cela est aussi le cas pour la lutte contre le VIH/SIDA. La CNLS constate, en effet, qu'une grande partie des financements des différents projets de lutte contre le VIH/SIDA, provient des bailleurs de fonds extérieurs227. La communauté internationale a donc beaucoup à apporter en termes d'appui financier et technique pour la réalisation de la stratégie nationale de lutte contre le VIH/SIDA.
L'importance donnée au VIH/SIDA par des nombreux dirigeants, lors du sommet du Millénaire en septembre 2000, fait espérer que la communauté internationale se mobilisera concrètement pour combattre le VIH/SIDA qui est devenu une pandémie à échelle mondiale et qui frappe sévèrement les pays en voie de développement. Les objectifs de développement du Millénaire prévoient notamment, d'ici 2015, de réduire de moitié l'extrême pauvreté et la faim, de réaliser l'éducation primaire universelle et l'égalité des sexes, de diminuer de deux tiers la mortalité des enfants de moins de 5 ans et de trois quarts la mortalité maternelle, d'inverser la tendance en matière de propagation du VIH/SIDA et du paludisme, et d'assurer la viabilité de l'environnement. Ces objectifs comprennent aussi l'établissement d'un partenariat mondial pour le développement qui propose une nouvelle vision de l'aide et des échanges et préconise l'allégement de la
227 Cf. COMMISSION NATIONALE DE LUTTE CONTRE LE SIDA (CNLS), Cadre stratégique national de lutte contre le SIDA 2002-2006, Présidence de la république Rwandaise, Kigali, avril 2002, p. 56-58.
dette228. Toutefois, il y a encore beaucoup à faire car, comme le constatait le PNUD dans une publication sur le VIH/SIDA et les stratégies de réduction de la pauvreté, « le peu d'attention accordée au VIH/SIDA par la conférence de Monterrey sur le financement du développement 2002 et le Nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique (NEPAD) est symptomatique de l'incapacité de prendre à bras le corps toutes les répercussions sur le développement de l'épidémie de l'histoire moderne229. »
Rappelons cependant que les résultats positifs réalisés par l'Ouganda et le Sénégal offrent des signes d'espoir sur la possibilité réelle de changer le cours de l'épidémie du VIH/SIDA et de pouvoir relancer le développement, sans trop courir le risque d'annuler les efforts d'une décennie déjà douloureuse pour le pays, décennie caractérisée par la guerre et le génocide de 1994. Reprenant les paroles du premier Ministre sénégalais lors du forum pour le développement de l'Afrique à Addis Abeba en 2000, nous pouvons dire en définitive que « beaucoup d'efforts restent à faire, dans l'implication des communautés de base, des structures traditionnelles, du secteur privé national, des leaders politiques et religieux, et des partenaires au développement, pour renforcer notre capacité de lutte contre le VIH/SIDA230 . »
228 Cf. PNUD, Rapport mondial sur le Développement Humain 2002, De Boeck, Bruxelles, 2002, p.17.
229 Ibid.
230Cf. Allocution de son excellence MOUSTAPHA NIASSE, premier ministre sénégalais lors du forum pour le développement de l'Afrique «le SIDA: un défi sans précédent pour les dirigeants», Addis-Abeba, 3-7 décembre 2000. Disponible sur Internet : < www.uneca.org/adf2000/daily_updates/speeches_and_press_releases/120700stat...>
Tout au long de cette étude, notre propos fut de mettre en évidence la menace réelle que représente l'épidémie du VIH/SIDA pour le développement du pays. Il est apparu que si l'épidémie n'est pas maîtrisée dans les années qui viennent, nous risquons un véritable scénario catastrophe pour l'économie et la société rwandaise dans leur ensemble. Aussi s'avère-t-il nécessaire d'entreprendre une action globale et transectorielle, qui implique tous les acteurs de la vie nationale et internationale. La lutte contre le VIH/SIDA, qui est l'une des priorités nationales, doit s'intégrer dans tous les efforts et plans de développement en y allouant toutes les ressources humaines et financières nécessaires. Le Rwanda, qui doit déjà combattre sur plusieurs fronts après le génocide de 1994, se voit encore dans l'obligation d'intensifier son action pour lutter contre le VIH/SIDA afin de réduire son impact socioéconomique, s'il ne veut pas rendre inutiles tant d'efforts pour la reconstruction et le développement du pays.
Le point de départ de notre étude est la constatation de l'asymétrie qui, 20 ans après l'apparition de l'épidémie, existe encore au niveau de l'information adéquate au sujet du VIH/SIDA, en particulier sur ses modes de transmission, les moyens de prévention et le traitement. C'est pourquoi le premier chapitre s'est proposé comme premiere tâche de donner des éclaircissements sur le Syndrome de l'Immunodéficience Acquise (SIDA), en évoquant successivement son apparition, ses caractéristiques, ses symptômes, les groupes qu'il frappe le plus, les traitements disponibles et les moyens de prévention. Jusqu'à ce jour, il n'existe pas de traitement curatif pour la maladie, aussi la prévention demeure-t-elle le seul moyen de se protéger contre le VIH/SIDA. Les traitements disponibles, pour le moment, permettent simplement de juguler la réplication du VIH (Virus d'Immunodéficience humaine) et, ainsi, de prolonger la vie des personnes atteintes par le VIH/SIDA qui, autrement, mourraient des infections dites opportunistes, une fois le SIDA déclaré. Bien qu'ils soient accolés dans le binôme VIH/SIDA, il existe une réelle différence entre les deux termes, le VIH désignant le virus tandis que le SIDA la maladie proprement dite. Le SIDA se manifeste lorsque le système immunitaire est très affaibli, occasionnant ainsi plusieurs infections comme la tuberculose, le cancer, la diarrhée etc., que le corps ne peut plus combattre et qui, dans la suite, entraînent le décès du patient.
Ces clarifications faites, une deuxième tâche a retenu notre attention toujours dans le cadre du premier chapitre. Il convenait de montrer, à travers les données statistiques sur les taux de prévalence du VIH, l'ampleur mondiale de l'épidémie devenue pandémique et plus particulièrement en Afrique subsaharienne. D'après les données consultées, l'Afrique subsaharienne est effectivement la région qui accuse la plus grande concentration des personnes vivant avec le VIH/SIDA, avec environ 70% des cas. Contrairement à ce que des nombreux chercheurs et experts internationaux pensent, les causes de l'expansion de l'épidémie sur le continent africain sont complexes. Il convient, des lors, d'éviter toute généralisation déplacée et inopportune qui imputerait l'ampleur de l'épidémie à une hypothétique culture africaine, qui favoriserait des comportements sexuels permissifs et dangereux face au VIH/SIDA. Certes, on ne peut nier l'existence des traditions et coutumes qui, dans les nombreuses cultures des peuples d'Afrique, peuvent favoriser la contamination du virus. Mais on ne doit pas négliger l'existence d'autres facteurs tout aussi importants dans la propagation rapide du VIH/SIDA comme la pauvreté, le statut inférieur des femmes, l'environnement socio-politique et le libertinage sexuel résultant de la perte des valeurs sociales. Il est clair, en particulier, que la vulnérabilité économique et sociale expose, comme partout ailleurs dans le monde, à la contamination du VIH/SIDA. En effet, selon le propos de Cheik Hamidou Kane, « lorsque la main est faible, l'esprit court de grands risques, car c'est elle qui le défend...mais aussi l'esprit court de grands risques lorsque la main est trop forte231. »
A la différence de ce que l'on se représentait au tout début de la maladie, le SIDA n'est plus considérée comme une sanction naturelle ou, pour certains, comme une punition divine infligée aux déviants sociaux comme les prostituées, les homosexuels et les héroïnomanes. La diffusion de l'épidémie a très vite montré que le SIDA ne connaissait pas de frontière sociale, surtout dans les pays où la voie hétérosexuelle devenait la principale voie de transmission, tandis que la voie sanguine devenait secondaire. En outre, malgré sa forte expansion dans la population des nombreux pays en développement, l'épidémie du VIH/SIDA est principalement une maladie des marginalisés. Et ceci se vérifie au niveau international que national. Au niveau international parce que c'est surtout dans les pays pauvres que l'épidémie connaît une forte extension. Au plan national comme, par exemple au Rwanda où l'épidémie frappe plus les milieux ruraux - qui sont
231 C.H. KANE, L'aventure ambiguë, Julliard, Paris, 1961, pp.20-21.
marginalisés en termes du développement économique -, les femmes et d'autres groupes socialement et économiquement faibles. Sans vouloir trop généraliser la situation de l'épidémie au niveau mondial, on peut dire que le facteur de marginalisation se retrouve aussi dans les pays développés où la pandémie touche surtout les personnes homosexuelles et les héroïnomanes, ainsi que d'autres populations marginalisées comme les immigrés, les drogués et les prisonniers.
Le premier chapitre avait enfin pour tâche de fournir des informations sur la situation du VIH/SIDA au Rwanda et d'amorcer ainsi l'objet de notre étude. En général les caractéristiques de l'épidémie sont, pour la plupart, semblables à celles des autres pays de l'Afrique subsaharienne. La différence spécifique au Rwanda est l'aggravation qu'a connue l'épidémie dans le pays à la suite du génocide de 1994, en particulier avec les viols des femmes et le déplacement massif des populations.
Si, guidé par le souci d'informer sur le phénomène du SIDA, le premier chapitre a été descriptif, le deuxième, lui, s'est attelé à analyser les conséquences économiques de l'épidémie au Rwanda. Notre analyse comporte deux niveaux, micro et macroéconomique. Au niveau microéconomique, l'examen a porté d'abord sur le poids de la maladie sur les ménages touchés par l'épidémie et, plus précisément, pour les ménages qui ont au moins un membre vivant avec le VIH/SIDA. Dans ces cas, le SIDA, une fois déclaré, crée une situation qui comporte, d'une part, la perte des revenus du membre malade et, d'autre part, l'augmentation des coüts associés à sa prise en charge médicale et domestique. L'examen a ensuite abordé l'impact de l'épidémie sur les groupes et entreprises des différents secteurs de l'économie, notamment l'agriculture, l'industrie et le secteur tertiaire des services. Il est alors apparu que, à bien des degrés différents, tous les secteurs sont menacés par l'épidémie et risquent de perdre leur productivité et leur compétitivité si cette maladie continue à s'étendre dans la population active d'où proviennent le personnel de ces différents secteurs. En particulier, l'épidémie occasionne des coüts supplémentaires pour les entreprises, notamment ceux associés à la perte de l'expérience d'un travailleur atteint du SIDA et ceux que l'entreprise doit supporter pour son remplacement. Bref, au niveau microéconomique, l'épidémie du VIH/SIDA engendre une situation de perte de revenus et une augmentation des coûts à supporter pour les ménages et les entreprises. Ce niveau microéconomique nous a permis de mieux mesurer combien le VIH/SIDA est un défi pour l'économie nationale. En effet, celle-ci repose essentiellement sur le secteur primaire qui
emploie la majorité de la population rwandaise active , laquelle est précisément la plus frappée par le VIH/SIDA.
Le niveau macroéconomique a été approché à partir de l'équation Keynésienne PNB = C + I + G + NX dont nous avons considéré les différentes composantes. A ce niveau, l'analyse a révélé la difficulté objective d'établir des corrélations entre les données statistiques macroéconomiques et la progression de l'épidémie du VIH/SIDA. C'est pourquoi nous avons émis l'hypothèse d'une corrélation négative entre l'expansion du VIH/SIDA et le rendement des différentes composantes de l'équation - revenu national, investissements, dépenses publiques, exportations et importations - même si cela ne transparaît pas dans les données disponibles. L'examen, dans un dernier point, du Produit Intérieur Brut, considéré par plusieurs économistes comme l'indicateur du bien-être économique, a abouti à la même difficulté d'établir une corrélation négative entre lui et la pandémie SIDA. Cette difficulté explique la réticence de certains économistes à accepter la menace réelle que constitue le VIH/SIDA pour l'économie dans son ensemble, notamment au niveau macroéconomique des pays de l'Afrique subsaharienne. Selon ces économistes, les pays de l'Afrique seraient pourvus d'un surplus de main d'oeuvre qui compenserait les travailleurs décédés à cause du VIH/SIDA. Il est facile de montrer, comme nous l'avons fait, que ces positions ne concordent pas avec la réalité sociale que nous vivons au Rwanda, avec la progression du VIH/SIDA qui décime la population adulte.
Le troisième chapitre a abordé le problème des répercussions sociales du SIDA au Rwanda en trois volets : l'impact démographique, la condition féminine et les droits humains. L'impact démographique du SIDA au Rwanda est énorme. En effet, à la fin de l'année 2001, on estimait à environ 49 000, le nombre de personnes décédées à cause du SIDA et le nombre des adultes vivant avec le VIH/SIDA atteignait le seuil de 430 000 personnes infectées232. Cette situation permet de mieux comprendre les conséquences économiques et sociales de cette épidémie pour toute la société rwandaise. La constatation de la gravité de l'incidence démographique du VIH/SIDA sur les pays les plus touchés a amené les économistes, qui doutaient de l'impact macroéconomique du VIH/SIDA, à se rétracter et à reconnaître la contrainte que l'épidémie fait peser sur le développement économique et social de ces pays. Cet impact démographique prouve suffisamment qu'il
232 Cf. ONUSIDA, Rapport sur l'épidémie mondiale de VIH/SIDA, Genève, Juillet 2002.
ne faut pas séparer l'économique du social, comme le faisait observer pertinemment le pape Jean XXIII en 1961 dans son encyclique Mater et Magistra : « le progrès social doit toujours aller de pair avec le développement économique233. »
Pour ce qui regarde la condition féminine, la situation des femmes face au VIH/SIDA est préoccupante ; elles sont particulièrement vulnérables pour les raisons que nous avons évoquées plus haut, et, de plus, elles sont majoritaires au niveau de la composition de la population. Il s'impose par conséquent de promouvoir la situation économique et sociale des femmes rwandaises pour qu'elles deviennent capables d'assurer elles-même leur prévention face au VIH/SIDA et soient des actrices efficaces dans le changement du cours de l'épidémie au Rwanda. A cet effet, l'éducation et la responsabilisation des femmes sont importantes, notamment à travers l'octroi des moyens économiques et culturels (information adéquate) pour lutter efficacement contre le VIH/SIDA.
Que ce soit au niveau national ou international, l'épidémie du VIH/SIDA constitue un problème de droits humains pour toute société. Le SIDA a provoqué un peu partout la discrimination des personnes atteintes ; et, à cette situation, s'est ajouté le manque d'accès aux traitements antirétroviraux pour nombre d'entre elles surtout dans les pays pauvres. Il est effectivement difficile, comme nous l'avons déjà montré dans les chapitres précédents, pour de nombreuses personnes vivant avec le VIH/SIDA de se payer ces médicaments à cause de leurs prix exorbitants fixés par les firmes pharmaceutiques des pays industrialisés. Ces firmes, surnommées « Big Pharma » et protégées par l'OMC, détiennent le monopole de ces médicaments et s'opposent à ce que d'autres pays les produisent à des prix plus abordables. Pour utiliser des expressions devenues courantes à ce sujet, la question des traitements anti-SIDA est devenue et reste encore une affaire entre les « Big brothers » et les « Big pharma », au détriment des pays pauvres qui ont pourtant la majorité des cas des personnes vivant avec le VIH/SIDA.
Pour finir, quelques propositions pour la lutte contre le VIH/SIDA au Rwanda furent émises en partant des initiatives qui existent déjà localement dans ce domaine. Car, comme disait Emmanuel Ndione en reprenant un proverbe africain, « tu es pauvre parce que tu regardes ce que tu n'as pas. Vois ce que tu possèdes, ce que tu es, et tu te
233 JEAN XXIII, Mater et Magistra, 1961, n. 73.
découvriras étonnamment riche234. » Dans la lutte contre le SIDA, on doit sincèrement se féliciter de nombreuses initiatives, des projets et des réalisations passées et actuelles qui ont lieu au niveau du secteur public, privé et communautaire, notamment avec le programme de coordination nationale de la lutte contre le SIDA (la CNLS). Toutefois, il nous a semblé qu'une action plus coordonnée et plus globale était nécessaire. Une action qui impliquerait tous les secteurs de la vie nationale et toutes les provinces du pays. Bien qu'il faille trouver des moyens de diminuer la grande dépendance de l'extérieur, la collaboration avec l'extérieur, notamment au niveau des bailleurs de fonds et de la transmission des nouvelles technologies, n'est pas à négliger dans cet effort de lutte contre le VIH/SIDA. Bref, au niveau du pays, une plus grande collaboration intersectorielle et une décentralisation plus résolue des différents services et infrastructures sociales pourraient constituer des moyens encore plus efficaces dans la lutte contre le VIH/SIDA. Cela suppose que les principes de responsabilité, de subsidiarité et de solidarité, que nous avons empruntés à l'enseignement social de l'Eglise Catholique, soient à la base de toutes ces actions et projets. Au fond, c'est ce même enseignement social de l'Eglise Catholique qui nous a accompagné tout au long de ce travail, notamment dans sa méthodologie : « voir », « juger » et « agir » . Nous avons voulu, pour notre part, suggérer, face à l'épidémie du VIH/SIDA au Rwanda et sa menace pour le développement économique et social de la nation, des principes d'observation, des critères de jugement et des directives d'action235.
Nous pensons donc que l'heure de la solidarité a sonné et que le moment est venu de relier les connaissances, de passer de l'interdisciplinarité à la transdisciplinarité236 en vue d'une approche qui intègre les différentes disciplines, tous les secteurs et tous les acteurs de la vie nationale et internationale. Selon le propos du professeur Marc Gentilini, repris par la commission sociale de l'épiscopat de France, il nous faut, avec le SIDA, arriver à une nouvelle forme de solidarité, car le « SIDA, maladie de société, est plus qu'aucune autre par son retentissement en cette fin du 20ème siècle, une maladie sans frontières, la maladie de la solidarité obligatoire à tous les niveaux sociaux et sous toutes
234 Cf. G. RIST, Le Développement. Histoire d'une croyance occidentale, Presses des Sciences Po, Paris 1996, p. 400.
235 Cf. PAUL VI, Octogesima adveniens, n.4.
236 Cf. E.B. MASINI, «Transdisciplinarity, Future studies and Empirical Research», in Transdisciplinarity: Re-Creating Integrated Knowledge, edited by M. A. SOMERVILLE and D. J. RAPPORT, EOLSS Publishers, Oxford, UK., 2000, pp. 117-118.
les latitudes237. » Nous pourrions donc dire, en reprenant les catégories d'Emile Durkheim, qu'il ne suffit plus de passer de la solidarité mécanique à la solidarité organique238, il nous faut aujourd'hui, à l'ère de la globalisation et de la pandémie mondiale du VIH/SIDA, passer de la solidarité organique à la solidarité obligatoire. En d'autres mots, il faut nous convertir à la solidarité. Avec Kevin Kelly239, nous affirmons même qu'il nous faut apprendre à vivre positivement avec le VIH/SIDA en effectuant une triple conversion : promouvoir la justice économique pour tous, combattre tout ce qui contredit la pleine et égale dignité de l'homme et de la femme, et arriver à articuler une éthique sexuelle plus adaptée à la complexité de la réalité sociale contemporaine, une éthique qui respecte la personne humaine et promeut sa dignité.
Devant ce syndrome que nous qualifions, en rectifiant un peu les mots, de « syndrome de la déficience humaine acquise » - par référence à la marginalisation économique, sociale et éthique qui sont à la base de l'expansion de l'épidémie -, une action commune et responsable de toute la société s'impose ; une action qui serait passage, pour chacun et tous, des conditions moins humaines à des conditions plus humaines et qui constituerait un échec aux symptômes et signes de la « déficience éthique » caractérisant cette ère de la mondialisation où certains, plus égaux que d'autres, sauvent leurs vies et d'autres, moins égaux, semblent être condamnés à mourir dans le cercle vicieux de la pauvreté.
237 Cf. COMISSION SOCIALE DE L'EPISCOPAT (de France), SIDA, la société en question, Centurion, Paris, 1996, p.123.
238 Solidarité mécanique et solidarité organique sont des termes forgés par E. Durkheim pour saisir l'évolution des liens sociaux parallèle à celle de la division du travail. La solidarité mécanique, typique des communautés traditionnelles de taille réduite, est un lien par similitude ; la solidarité organique, caractéristique des sociétés industrielles, est un lien par complémentarité. Cf. Dictionnaire d'Économie et de Sciences Sociales, sous la direction de C.-D. Echaudemaison, Nathan, Paris, 1998, p. 412.
239 Cf. K. KELLY, «Living with HIV/AIDS», in The Tablet, 13 May 1995, pp.599.
« A tous, nous avons voulu rappeler l'ampleur du drame et l'urgence de l'oeuvre à accomplir. L'heure de l'action a sonné : la survie de tant d'enfants innocents, l'accés à une condition humaine de tant de familles malheureuses, la paix du monde, l'avenir de la civilisation sont en jeu. A tous les hommes et à tous les peuples de prendre leurs responsabilités240. »
240 PAUL VI, Populorum progressio, n. 80.
1. AA VV. , Dictionnaire d'Économie et de Sciences Sociales, sous la direction de C.- D. Echaudemaison, Nathan, Paris, 1998.
2. AA VV., «Rwanda, les leçons du génocide», dossier in Jeune Afrique l'intelligent, N° 2152, du 8 au14 avril 2002, pp.47-98.
3. AA VV., Catéchisme de l'église Catholique, Editrice Vaticane, 1992.
4. AA. VV., L'Enciclopedia dell'Economia, Istituto Geografico De Agostani, Novara, 1998.
5. ACHMAT Z., «En Afrique du Sud, on a encore rien vu de l'épidémie du SIDA», in Courrier International, 7 février 2003. Disponible sur Internet:
http://www.courrierinternational.com/interview/avec/Achmat.htm6. ARCHIDIOCESE DE KIGALI, Atelier des ouvriers apostoliques sur la pastorale de lutte contre le VIH/SIDA, Kigali, 17-20 Octobre 2000.
7. ASSEMBLEE GENERALE DES NATIONS UNIES, Déclaration universelle des droits de l'homme, 10 décembre 1948.
8. ASSIDON E., Les théories économiques du développement, La Découverte, Paris, 2000.
9. ATTAC, Les paradis fiscaux, Mille et une nuits, novembre 2001.
10. ATTAC, Remettre l'OMC à sa place, Mille et une nuits, Paris, juin 2001.
11. ATTAC, Une économie au service de l'homme, éditions Mille et une nuits, Paris, juin 2001.
12. BAJOIT G., « Théories sociologiques du développement», in Antipodes, série outils pédagogiques n° 2, 1997, pp. 3-20.
13. BANQUE AFRICAINE DE DEVELOPPEMENT (BAD), Rapport sur le Développement en Afrique 2001. Renforcement de la bonne gouvernance en Afrique, Economica, Paris 2001.
14. BARDHAN P., «Decentralization of Governance and Development», in Journal of Economic Perspectives, Fall 2002, pp. 185-205.
15. BARNETT T. - WHITESIDE A., AIDS in the Twenty-First Century, Disease and Globalization, Palgrave Macmillan, New York, 2002.
16. BARNETT T., AIDS in Africa: its present and future impact, Belhaven Press, London, 1992.
17. BASTIN J.,» Assez de discours!», in Jeune Afrique l'intelligent, N° 2142, du 29 janvier au 4 février 2002, pp. 46-49.
18. BELTRO P. C., Sociologia dello Sviluppo, editrice PUG, Roma,1988.
19. BELTRAO P.C., Ecologia Umana e valori etico-religiosi, Pontificia UniversitàGregoriana, Roma, 1985
20. BENSMANN V., HIV/AIDS & Conflict, Research in Rwanda, Burundi, and Eastern DRC, Save The Children-UK, UNICEF and UNAIDS, May 30, 2003.
21. BIT, Recueil de directives pratiques du BIT sur le VIH/SIDA et le monde du travail, Organisation Internationale du Travail, Genève, 2001.
22. BLOOM D. et al., Health, Wealth, AIDS and poverty, Harvard School of Public Health, Cambridge, 2002.
23. BLOOM D.E.- MAHAL A.S., Does the AIDS Epidemic Really Threaten Economic Growth ?, Working Paper 5148, National Bureau of Economic Research Inc., Cambridge MA, 1995.
24. BOBBIO A., «Le due facce dell'AIDS», in Italia Caritas, dicembre 2001, pp.20-21.
25. BOËDEC F.- MADELIN H., L'Evangile social. Guide pour une lecture des encycliques sociales, Bayard Editions, Paris, 1999.
26. BOLLINGER L., STOVER J., The Economic Impact of AIDS in Rwanda, September 1999.
27. BONNEL R., HIV/AIDS: Does it Increase or Decrease Growth in Africa?, The World Bank, Washington, 2000.
28. BRAECKMAN C., Rwanda. Histoire d'un génocide, Ed. Fayard, Paris, 1994.
29. CALDWELL J.- CALDWELL P.- QUIGGIN P., «The Social Context of AIDS in Sub-Saharan Africa, in Population and Development Review 15 (2), 1989, pp.185- 234.
30. CALVEZ J.-Y., L'Eglise et l'Economie. La doctrine sociale de l'Eglise, L'Harmattan, Paris,1999.
31. CATHOLIC BISHOPS OF KENYA, The AIDS Pandemic and Its Impact on our people, Paulines Publications Africa, Nairobi, December 1999.
32. COLLINS J.- RAU B., AIDS in the Context of Development, UNRISD Programme on Social Policy and Development, Paper N°4, December 2000.
33. COMISSION SOCIALE DE L'EPISCOPAT (de France), SIDA, la société en question, Centurion, Paris, 1996.
34. COMMISSION NATIONALE DE LUTTE CONTRE LE SIDA (CNLS), Cadre stratégique national de lutte contre le SIDA 2002-2006, Présidence de la république Rwandaise, Kigali, avril 2002.
35. CZERNY M.F., « Il vertice di Johannesburg ", in La Civiltà Cattolica, 18 Gennaio 2003, pp. 118-131.
36. DE GENT R., « Sida, le pire est devant nous ", in Choisir, mars 2002, pp.17-20.
37. DECOSAS J., « Le VIH et le Développement ", 11ème Conférence internationale sur le SIDA, Vancouver, 1996. Disponible sur Internet : http://www.
Ccisd.org/fra/fdocuments/decosas.htm38. DIXON S. et al., «AIDS and economic growth in Africa : a panel analysis», in Journal of International Development, 13, 2001, pp. 411-426.
39. DIXON S.- MCDONALD S.- ROBERTS J., «The impact of HIV and AIDS on Africa's economic development», in British Medical Journal, 26th January 2002, pp. 232-234.
40. ELA J.-M., Afrique L'irruption des pauvres. Société contre Ingérence, Pouvoir et Argent, L'Harmattan, Paris, 1994.
41. FAO, HIV/AIDS, food security and rural livelihoods, World Food Summit, 10-13 June 2002.
42. FHI/IMPACT-RWANDA, Enquête de Surveillance des Comportements (BSS) auprès des Jeunes de 15-19 ans. Rwanda 2000, MINISANTE/PNLS, Kigali, décembre 2000.
43. FHI/IMPACT-RWANDA, Enquête de Surveillance des Comportements (BSS) auprès des Routiers. Rwanda 2000, MINISANTE/PNLS, Kigali, décembre 2000.
44. FHI/IMPACT-RWANDA, Enquête de Surveillance des Comportements (BSS) auprès des Prostituées. Rwanda 2000, MINISANTE/PNLS, Kigali, décembre 2000.
45. FISCHER S.-DORNBUSCH R.-SCHMALENSEE R., Economia, HOEPLI, Milano, 1992.
46. FRANK G. A., Le développement du sous-développement. L'Amérique latine, Maspero, Paris, 1970.
47. GESHEKTER C. L., «Outbreak? AIDS, Africa, and the Medication of Poverty», in Transition, Issue 67, 1995, pp. 4-14.
48. GILLESPIE S., «Potential Impact of AIDS on farming systems: a case-study from Rwanda», in Land Use Policy, October 1989, pp. 301-312.
49. GINORI A., «Veto USA sui farmaci anti-AIDS. No agli sconti per i paesi poveri: Nuova apartheid», in La Repubblica, 22 dicembre 2002, pp.14-15.
50. GREEN E.C., AIDS and STDs in Africa: Bridging the Gap between Traditional Healing and Modern Medicine, University of Natal Press, Pietermaritzburg, South Africa, 1994.
51. GUERRIEN B., La théorie économique néoclassique, tome 1 : Microéconomie, La Découverte, Paris, 1999.
52. GUERRIEN B., La théorie économique néoclassique, tome 2 : Macroéconomie, théorie des jeux, La Découverte, Paris, 1999.
53. GUINNESS L.- ALBAN A., The economic impact of AIDS in Africa : A review of the literature, Document de fonds de l'ONUSIDA pour le Forum pour le Développement de l'Afrique, Addis Abéba, 2000.
54. HENRICI P., «Il senso del tempo e la società sostenibile», in La Civiltà Cattolica, 4 gennaio 2003, pp.36-44.
55. HERZLICH C., « Vingt ans après. .l'évolution d'une épidémie », in Etudes, février 2002, pp. 185-196.
56. HOPE K. R., AIDS and Development in Africa: A social science perspective, The Haworth Press, New York, 1999.
57. HUBER J.- SCHNEIDER B.E., The social context of AIDS, Sage Publications, New Park, California, 1992.
58. HUGON P., Economie de l'Afrique, 3ème édition, La Découverte, Paris, 2001.
59. HUMAN RIGHTS WATCH, «SIDA et Droits humains», in Rapport Mondial 2002. Disponible sur Internet : http://www.hrw.org/french/reports/wr2k2/sida.html
60. INTERNATIONAL FOOD POLICY RESEARCH INSTITUTE, Sustainable Food Security for All by 2020, Proceedings of an International Conference, Bonn, September 4-6 2001, IFPRI, Washington DC, 2002.
61. IRONS-GEORGES T. (project editor), Health Issues, vol.1, Salem Press, California, 2001.
62. JACKSON H., AIDS Africa, Continent in Crisis, SAfAIDS, Harare, Zimbabwe, 2002.
63. JEAN XXIII, Mater et Magistra, 15 mai 1961.
64. JEAN-PAUL II, Sollicitudo rei socialis, 30 décembre 1987.
65. KABALISA PACIFIQUE, La réhabilitation psycho-sociale des victimes survivantes du génocide de 1994 au Rwanda, Université Catholique de Louvain, Louvain-laNeuve, 1999.
66. KANE C.H., L'aventure ambiguë, Julliard, Paris,1961.
67. KEENAN J.F., Catholic ethicists on HIV/AIDS prevention, Continuum, New York, 2000.
68. KELLY K., «Living with HIV/AIDS», in The Tablet, 13 May 1995, pp.597-599.
69. KRAMER J. M.- JOHNSON C.- KAMAU N., «The AIDS Pandemic and the Sustainability of African Communities», in Social Development Issues, 22, 2000, pp. 86-96.
70. LAMPTEY P.-WIGLEY M.- CARR D.-COLLYMORE Y., «Facing the HIV/AIDS Pandemic», Population Bulletin, vol.57, No.3, September 2002.
71. LANDESMAN P., « Lo stupro come arma di guerra», in Internazionale, 13/19 dicembre 2002, pp.28-36.
72. LEBRET L.-J., Dynamique Concrète du développement, Economie et Humanisme, Les Editions Ouvrière, 1961.
73. LEONE A. D. (editor), The Spread of AIDS, Greenhaven Press, San Diego, California, June 1997.
74. LES EVEQUES CATHOLIQUES DU RWANDA, « Hitamo Ubugingo Ureke Urupfu », lettre des évêques Catholiques du Rwanda sur la lutte contre le SIDA , Kigali, avril 2003.
75. LONERGAN B., «Guarigione e creatività nella storia», in La Civiltà Cattolica, 15 settembre 2001, pp. 492-504.
76. M. KREMER, «Pharmaceuticals and the Developing World», in Journal of Economic Perspectives, Fall 2002, p. 67-90.
77. MASINI E. B., « Limits to Sustainability in Sustainable and Equitable Development », in The 50th anniversary of the United Nations and the Italian
contribution toward the realization of the «Earth Charter», Accademia Nazionale delle Scienze, Roma, 1998, pp. 89-95.
78. MASINI E. B., Penser le futur : l'essentiel de la prospective et de ses méthodes, Dunod, Paris, 2000.
79. MINISTERE DES FINANCES ET DE LA PLANIFICATION ECONOMIQUE, Indicateurs de Développement du Rwanda 2001, Direction de la Statistique, Kigali, juillet 2001.
80. MINISTERE DES FINANCES ET DE LA PLANIFICATION ECONOMIQUE, Le Rwanda en Chiffres, Direction de la Statistique, Kigali, Edition 2001.
81. MINISTRE DE LA SANTE, Rapport annuel 2001, République Rwandaise, Kigali, mars 2002.
82. MORIN E., La tête bien faite, Seuil, Paris, 1999.
83. MORIN E., Sociologie, Seuil, Paris, 1994.
84. MSHOMBA E. R., Africa in the Global Economy, Lynne Rienner Publishers, London, 2000.
85. MUTUME G., «Les dirigeants africains partent en guerre contre le SIDA», in Développement et Coopération, Juillet/Août 2001, pp. 11-15.
86. NATIONS UNIES, VIH/SIDA: Impact sur la population et politiques suivies, Département des affaires économiques et sociales, Division de la population, New York, 2001.
87. NDIONE S. E., Le don et le recours. Ressorts de l'économie urbaine, ENDA, Dakar, 1992.
88. NDIONE S. E., Réinventer le présent. Quelques jalons pour l'action, ENDA, Dakar, 1994.
89. ONUSIDA - OMS, Le point sur l'épidémie de SIDA, Genève, décembre 2002.
90. ONUSIDA, Rapport sur l'épidémie mondiale de VIH/SIDA, Genève, juillet 2002.
91. ONUSIDA, Rapport sur l'épidémie mondiale de VIH/SIDA, Genève, Juin 2000.
92. OVER M., The Macroeconomics Impact of AIDS in sub-Saharan Africa, Technical working Paper Nr.3, World Bank, Washington, 1992.
93. PAUL VI, Octogesima adveniens, 14 mai 1971.
94. PAUL VI, Populorum Progressio, 26 mars 1967.
95. PECOUL B. et al., «Access to Essential Drugs in Poor Countries : A lost Battle ?», in Journal of the American Medical Association, January 1999, pp. 361-367.
96. PHILIPSON T.J., Private choices and public health: the AIDS epidemic in an economic perspective, Harvard University Press, Cambridge, 1993.
97. PNLS/MINISANTE, Définir les voies pour la prévention du VIH/SIDA : leçons apprises sur les aspects comportementaux, revue de la littérature dans la période post-génocide 1994-2000, novembre 2000.
98. PNUD, Rapport mondial sur le Développement Humain 2002, De Boeck, Bruxelles, 2002.
99. PRICE-SMITH A.T., The Health of Nations, The Massachusetts Institute of Technology Press, Cambridge, 2002.
100. PRZYBOROWSKI K., Il problema dell'AIDS nel Magistero della Chiesa cattolica, Pontificia Università Lateranense, Roma, 1999.
101. RAEN K., Où est le Bon Samaritain. Un défi à relever pour combattre le SIDA, publication de L'Aide de l'Eglise Norvégienne et l'Alliance Biblique Universelle, Kigali, 2002.
102. REYNTJENS F., Rwanda. Trois jours qui ont fait basculer l'histoire, L'Harmattan, Paris, 1995.
103. RIST G., Le Développement. Histoire d'une croyance occidentale, Presses des Sciences Po, Paris, 1996.
104. ROBERTS T. J.- HITE A. (eds.), From Modernization to Globalization. Perspectives on Development and Social Change, Blackwell Publishers, Oxford, March 2000.
105. ROCHER G., Introduction à la sociologie générale, tome 1: L'action sociale, tome 2 : L'organisation sociale, tome 3 : Le changement social, Seuil, Points, Paris, 1968.
106. ROSENBERG Z.- BROWN G., «Placing HIV Prevention in the Hands of Women: The promise of Microbicides», Family Health International, Arlington, VA, 2002.
107. ROSENTHAL E., «AIDS Scourge in Rural China leaves villages of Orphans», in New York Times, August 25th 2002, pp.1 et 4.
108. RWELAMIRA J. B., AIDS pandemic in East Africa: a moral response, CUEA Publications, Nairobi, 1999.
109. SACHS J.D., Macroéconomie et santé : Investir dans la santé pour le développement économique, rapport de la Commission Macroéconomie et Santé, OMS, Genève, 2001.
110. SALVINI G., «Sviluppo e libertà», in La Civiltà Cattolica, 21 dicembre 2002, pp.575-582.
111. SCHOUB B.D., AIDS and HIV perspective: a guide to understanding the virus and its consequences, Cambridge University Press, New York, 1999.
112. SEN A., Un nouveau modèle économique. Développement, Justice, Liberté, Editions Odile Jacob, Paris, août 2000. (traduction française de « Development as Freedom »).
113. SHORTER A.- ONYANCHA E., The church and AIDS in Africa. A case study: Nairobi city, Paulines Publications Africa, Nairobi,1998.
114. SINGER M. (editor), The political economy of AIDS, Baywood Publishing Company, Amityville, New York, 1998.
115. SMITH R. A. (editor), Encyclopedia of AIDS: a social, political, cultural and scientific record of the HIV epidemic, Fitzroy Dearborn, Chicago, 1998.
116. SOMERVILLE M. A.- RAPPORT D.J. (eds.), Transdisciplinarity: Re-Creating Integrated Knowledge, EOLSS Publishers, Oxford, UK.,2000.
117. STIGLITZ E. J., In un mondo imperfetto, Donzelli editore, Roma, 2001.
118. TEVOEDJRE A., La pauvreté, Richesse des peuples, Les éditions ouvrières, Paris, 1978.
119. THE ECONOMIST, « AIDS in Uganda. Was the miracle faked? No, but possibly exaggerated», August 17th 2002, pp. 38-39.
120. THE WORLD BANK, Can Africa Claim the 21st Century? , Washington, 2000.
121. THE WORLD BANK, Confronting AIDS: public priorities in a global epidemic, Oxford University Press for the World Bank, New York, 1999.
122. THE WORLD BANK, Intensifying Action against HIV/AIDS in Africa, Responding to a Development Crisis, Washington, D.C, 2000.
123. TODARO M. P., Economic Development, New York University, seven edition, Addison-Wesley, 2000.
124. TWAGIRUMUKIZA M., «Les patients sous anti-rétroviraux au Rwanda», in La Santé Tropicale. Disponible sur Internet : http://
www.santetropicale.com/rwanda/antiretro.htm125. ULACK R.- SKINNER W. (eds.), AIDS and the Social Sciences: common threads, The University Press of Kentucky, Lexington, KY, 1991.
126. UNAIDS, Paying for HIV/AIDS services. Lessons from National Health Accounts and community-based health insurance in Rwanda 1998-1999, UNAIDS Best practice collection, Geneva, September 2001.
127. UNDP (United Nations Development Programme), Human Development Report 2001, Oxford University Press, New York, 2001.
128. UNDP (United Nations Development Programme), Human Development Report 1998, Oxford University Press, New York, 1998.
129. USAID, HIV/AIDS in the developing world, U.S. Agency for International Development, Washington, D.C, 1999.
130. UTZ A. F., Dottrina sociale della chiesa e ordine economico, Edizioni Dehoniane, Bologna, 1993.
131. VANSON J. J., AIDS a challenge to the modern society, Università Urbaniana, Roma,1996.
132. VON RÖNNE A., « Empowerment of girls in Africa », in Development and Cooperation, February 2003, pp. 64-66.
133. WEHRWEIN P., «The Economic Impact of AIDS in Africa», in Harvard AIDS review, Fall 1999/Winter 2000. Disponible sur Internet:
http://www.hsph.harvard.edu/hai/news_publications/har/fallwin_1999/fallwin99- 4.html134. WELLER S. C., «A meta-analysis of condom effectiveness in reducing sexually transmitted HIV», in Social Science & Medicine, Volume 36, Issue 12, June 1993, pp.1635-1644.
135. WHITESIDE A., «Poverty and HIV/AIDS in Africa», in Third World Quarterly, Vol. 23, N°2, 2002, pp.313-332.
136. WHITESIDE A.-LOEWENSON R., HIV/AIDS. Implications for Poverty Reduction, PNUD, New York, 2001.
137. WORLD COUNCIL OF CHURCHES, The Ecumenical response to HIV/AIDS in Africa. Plan of Action, Nairobi, Kenya, 25-28 November 2001.
1. AJAN: African Jesuit AIDS Network.
2. ANSP + : Association Nationale de Soutien aux personnes vivant avec le SIDA.
3. ARBEF : Association Rwandaise pour le Bien-être Familial.
4. ARV : Médicaments Antirétroviraux.
5. ATTAC : Association pour la Taxation des Transactions financières pour l'Aide
aux Citoyens.
6. AZT: Azidothymidine ou Zidovudine.
7. BAD : Banque Africaine de Développement.
8. BIT: Bureau International du travail.
9. BNR: Banque Nationale du Rwanda.
10. BRALIRWA : Brasserie et Limonaderie du Rwanda.
11. BRD: Banque Rwandaise de Développement.
12. CAP : Connaissances, Attitudes et Pratiques.
13. CHK: Centre Hospitalier de Kigali.
14. CNLS : Commission Nationale de Lutte contre le SIDA.
15. CRIS : Centre Rwandais d'Information sur le SIDA.
16. ESDR-II : 2ème Enquête Démographique et de Santé au Rwanda, 2000.
17. FAO : Fonds des Nations Unies pour l'Alimentation et l'Agriculture.
18. FHI : Family Health International.
19. FMI: Fonds Monétaire International.
20. FNUAP: Fonds des Nations Unies pour la Population.
21. Frw : Franc Rwandais
22. HAART : Higly Active Antiretroviral Therapy.
23. IEC : Information, Education et Communication.
24. IMPACT : Implementing AIDS Prevention and CARE Project.
25. IR : Impôt sur le Revenu.
26. IST: Infection Sexuellement Transmissible.
27. KIST : Kigali Institute for Science and Technology.
28. MIFOTRA: Ministère de la Fonction Publique et du Travail.
29. MIGEPROFE : Ministère du Genre et de la Promotion de la Femme.
30. MIJESPOC : Ministère de la Jeunesse, des Sports et de la Culture.
31. MINADEF : Ministère de la Défense.
32. MINALOC : Ministère de l'Administration Locale et des Affaires Sociales.
33. MINECOFIN : Ministère des Finances et de la Planification Economique.
34. MINEDUC : Ministère de l'Education, de la Science, de la Technologie et de la Recherche Scientifique.
35. MINISANTE : Ministère de la Santé.
36. MST: Maladie Sexuellement Transmissible.
37. OCIR-Café:Office de Culture Industrielle du Rwanda (Café).
38. OCIR-Thé : Office de Culture Industrielle du Rwanda (Thé).
39. OMC: Organisation Mondiale du Commerce.
40. OMS : Organisation Mondiale de la Santé.
41. OMS/AFRO : Bureau régional de l'Organisation Mondiale de la Santé pour l'Afrique.
42. ONAPO : Office National de la Population ;
43. ONGs : Organisations Non Gouvernementales.
44. ONUSIDA: Programme commun des Nations Unies sur le SIDA (UNAIDS en anglais).
45. PIB: Produit Intérieur Brut.
46. PME : Petites et Moyennes Entreprises.
47. PNB : Produit National Brut.
48. PNLS : Programme National de Lutte contre le SIDA.
49. PNUD: Programme des Nations Unies pour le Développement (UNDP en anglais).
50. PRB : Population Reference Bureau.
51. PUG : Pontificia Università Gregoriana.
52. SIDA : Syndrome de l'Immunodéficience Acquise.
53. TRAC : Treatment and Research on AIDS Center.
54. TRIPS : Trade Related Aspects of Intellectual Property Rights.
55. TVA : Taxe à la Valeur Ajoutée.
56. UNRISD : United Nations Research Institute for Social Development.
57. USAID: United States Agency for International Development.
58. VCT : Voluntary Counselling and Testing.
59. VIH : Virus de l'Immunodéficience Humaine.
DEDICACE 2
REMERCIEMENTS 3
INTRODUCTION 4
CHAPITRE I LE VIH/SIDA 9
1. Clarifications sur le VIH/SIDA 9
1.1 La découverte de la maladie 9
1.2 Caractéristiques 9
1.3 Symptômes 10
1.4 Voies de transmission du VIH 11
1.4.1 La voie sanguine 11
1.4.3 La grossesse et l'allaitement 12
1.4.4 Autres voies 12
1.5 Groupes vulnérables 13
1.6 Traitements disponibles 13
1.7 La prévention 15
2. Une pandémie mondiale 17
2.1 Les estimations au niveau mondial 17
2.2 La situation de l'Afrique subsaharienne 19
2.2.1 L'expansion de l'épidémie 19
2.2.2 La situation des différentes régions du continent 20
2.2.3 Spécificité de la transmission du virus 22
2.2.4 Causes de la grande expansion du VIH/SIDA sur le continent 22
2.2.5 limites des statistiques 28
2.2.6 Conclusion 29
2. 3 Le reste du monde 32
2.3.1 Asie du sud 32
2.3.2 Europe de l'Est 32
2.3.3 Caraïbes et Amérique latine 33
2.3.4 Amérique du Nord 33
2.3.5 Europe occidentale 34
2.3.6 Océanie 34
2.3.7 Afrique du Nord et Moyen Orient 34
2.4 Conclusion 36
3. Rwanda 36
3.1 Quelques données de base 37
3.2 Données sur le VIH/SIDA 38
3.3 Tendances et évolution de l'épidémie 40
3.4 Conclusion 42
CHAPITRE II IMPACT ECONOMIQUE DU VIH/SIDA 44
1. Au niveau microéconomique 44
1.1 Les ménages 45
1.2 Les différents secteurs 49
1.2.1. L'agriculture 49
1.2.2. L'Industrie 52
1.2.3. Les services 54
2. Au niveau macroéconomique 56
2.1. Le revenu national 57
2.2. Les investissements 58
2.2.1. Les investissements nationaux 59
2.2.2. Les investissements étrangers 60
2.3. Les dépenses publiques 61
2.3.1 Le secteur de l'éducation 62
2.3.2 Le secteur de la santé 65
2.3.3. Politique économique et fiscale 68
2.4. Exportations et importations 71
2.4.1. Les exportations 73
2.4.2. Les importations 74
2.5 Le Produit Intérieur Brut 77
CHAPITRE III INCIDENCES SOCIALES ET PROPOSITIONS 82
1. Incidences sociales 83
1.1 Au niveau démographique 83
1.1.1. la dynamique démographique 83
1.1.2. la distribution de la population sur le territoire 87
1.1.3. le profil professionnel 88
1.2 Au niveau de la condition féminine 89
1.3 Au niveau des droits humains 91
1.3.1 Stigmatisation et discrimination des personnes vivant avec le VIH/SIDA 92
1.3.2 Droit aux traitements. 94
2. Propositions 98
2.1 Au niveau du secteur public 98
2.2 Au niveau du secteur privé 102
2.3 Au niveau du secteur communautaire 103
2.4 Au niveau international 107
CONCLUSION 109
BIBLIOGRAPHIE 117
SIGLES ET ABREVIATIONS 125
TABLE DE MATIERES 128