Conclusion générale
Depuis l'avènement des théories de la
croissance endogène, l'Etat est reconsidéré comme un
acteur principal de la vie économique. On assiste à une
réhabilitation du rôle de l'Etat dans l'économie à
travers la fourniture des biens publics indispensables à
l'amélioration de la productivité du secteur privé.
Plusieurs études empiriques ont tenté d'évaluer, à
la suite de l'article de BARRO (1990), l'mpact des dépenses publiques
sur la croissance économique.
Deux remarques importantes peuvent être faites à
partir de l'analyse des résultats de l'ensemble de ces études
empiriques. La première a trait à la diversité et à
l'hétérogénéité des résultats obtenus
et la seconde tient au fait que très peu de ces études
considèrent la manière plus ou moins efficace que les
dépenses publiques sont employées. Or l'impact positif des
services publics sur la croissance économique peut dépendre en
large partie de l'efficacité des dépenses engagées.
C'est pourquoi, dans le cadre de notre mémoire de
DEA/Master en Economie publique, nous nous sommes penchés sur la
question de l'efficience des dépenses publiques dans l'espace UEMOA. Il
s'est agit de dégager dans cette étude des éléments
de réponse aux deux interrogations suivantes :
· les dépenses publiques d'éducation et de
santé sont-elles efficientes dans les pays de l'UEMOA?
· l'efficience de ces dépenses ne permet-elle pas un
accroissement de la production plus vite que le volume des dépenses
engagées?
Pour répondre à ces deux interrogations, nous
avons d'abord procédé à l'estimation des scores
d'efficience avant d'étudier l'impact de ces scores estimés sur
la croissance à travers un modèle de croissance endogène.
Les scores d'efficience ont été estimés au moyen de la
méthode d'enveloppement des données à la Malmquist
(DEA-Malmquist), technique non paramétrique ayant l'avantage de ne pas
exiger de spécification explicite de la relation liant l'input à
l'output et de considérer l'évolution de l'environnement
technologique pouvant influencer sur l'efficience. Nous avons
réalisé cette étude sur une période de 35 ans (1970
à 2004).
Les résultats de ces estimations montrent qu'en moyenne
sur la période considérée, les dépenses socio-
publicques d'éducation et de santé ne sont pas efficientes
même si les degrés d'efficience ne sont pas très faibles et
que les dépenses publiques sont gaspillées à près
de 27% et de 55% en moyenne respectivement pour l'éducation et la
santé. Ces résultats présagent que les dépenses
sociales en matière d'éducation et de santé sont plus ou
moins rationnelles. Mais ce résultat peut être dû à
la non prise en compte de l'effet du secteur privé. En effet, les
domaines de la santé et de l'éducation sont deux domaines qui
sont considérablement explorés par le secteur privé. Or
dans notre étude nous avons considéré d'une part, les
niveaux globaux
des taux de scolarisation dans le primaire, le secondaire et
le supérieur et d'autre part l'espérance de vie et le taux de
mortalité (indicateurs globaux) sans prendre en compte - faute d'une
technique de quantification- les dépenses engagées dans ces deux
domaines par le secteur privé. Cette ignorance peut sans doute
surestimer les scores d'efficience.
Les résultats des estimations de nos modèles de
croissance ne sont pas conclusifs en terme de niveau mais sont significatifs
lorsque la performance est mesurée par l'efficience ; ce qui signifie
que l'efficience des dépenses sociales d'éducation et de
santé favorisent la croissance économique plus vite que le volume
des dépenses engagées.
Au total, nos résultats montrent d'une part que les
dépenses socio-publiques sont peu efficientes dans l'espace UEMOA durant
la période considérée et d'autre part que c'est une
utilisation efficiente des ressources consacrées à
l'éducation et à la santé qui est plus importante que le
volume de ces dépenses en tant que facteur contribuant à la
croissance. Ces conclusions rejoignent celles de EBERT, SCHUKNECHT et THONE
(2005) et celle de SAOUSSEN BEN ROMDHANE (2006), qui ont montré que si
les dépenses publiques sont de bonne qualité, les services qui en
résultent sont de nature à accélérer la
croissance.
Dans ces conditions, pour permettre aux dépenses
sociales d'éducation et de santé engagées d'atteindre des
objectifs économiques plus positifs, les Etats de l'UEMOA devront mettre
en place des politiques visant à créer un environnement politique
et socio-économique sain. Un plan de sécurité publique
national en vue d'améliorer le climat sécuritaire et un plan
global de développement afin d'assurer la croissance économique,
améliorer la distribution de la richesse et des revenus, et
réduire le niveau de la pauvreté. Ce plan de développement
devra se focaliser sur des politiques visant à favoriser la
stabilité politique et macro-économique, la réduction de
la corruption privée comme publique, la réhabilitation des
infrastructures socioéconomiques, le renforcement des institutions et le
développement des investissements.
Cependant, notons que la présente étude souffre
de quelques insuffisances tant au niveau de la spécification des
modèles qu'au niveau de l'analyse quantitative des résultats.
Pour des raisons d'orientation de recherche, de la non disponibilité de
certaines données et aussi pour réduire le champ de l'analyse,
l'étude a occulté certaines variables dont l'influence est sans
doute non négligeable dans l'analyse de l'efficience des dépenses
publiques. Pour les memes raisons, l'étude a ignoré l'influence
du secteur privé. Au niveau de l'analyse, une limite tout aussi
importante est que l'impact des dépenses publiques sur la croissance ne
doit pas etre recherché seulement dans la propension marginale de cette
variable à la production. L'ac-
tion publique développe un certain nombre
d'externalités qui sont malheureusement difficiles à quantifier.
Ces externalités se trouvent à travers l'assainissement de
l'environnement socio-économique.
Nous souhaiterions ainsi voir des études
ultérieures sur la question de l'efficience des dépenses
publiques dans l'union prenant en compte la spécificité du
secteur privé et avec des techniques d'évaluation beaucoup plus
élaborées.
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