Université de Kinshasa
Faculté des sciences sociales, administratives
et Politiques
Département de Sociologie et
Anthropologie
EVOLUTION DE LA CONCEPTION ET DE LA PRATIQUE DE LA DOT
DANS LA VILLE DE KINSHASA
ETUDE MENEE AUPRES DES COMMUNAUTES LUBA,
MANYANGA ET YANSI HABITANT LA COMMUNE DE KIMBANSEKE
Par
Nana Nzolani Lusungulu
Graduée en sociologie et Anthropologie
Mémoire
présenté et défendu en vue de
l'obtention
du grade de licenciée en sociologie
Directeur: Dr. Hubert
Ntumba Lukunga
Professeur
Encadreur : Jean Pierre Mpiana Tshitenge wa Masengu
Chef de Travaux
Année académique 2005-2006
INTRODUCTION GENERALE
I. ETAT DE LA QUESTION
Tout chercheur débute son investigation par une lecture
de la littérature spécialisée tant sur les
considérations théoriques du thème retenu que sur les
recherches empiriques menées antérieurement par ses
prédécesseurs.1(*) Cela lui permet de se faire une idée sur la
valeur de sa dissertation et sur les opinions des auteurs afin de
dégager sa modeste contribution à la roue de la recherche
scientifique.
Ainsi, nous conformant à cette
exigence scientifique, nous avons compulsé quelques travaux relevant du
domaine de recherche dans lequel s'inscrit la présente étude.
Nous nous limiterons ici à circonscrire les
problématiques soulevées et les résultats
obtenus.
G. Sacha dans son livre « les femmes et
l'amour » analyse les conceptions des femmes actuelles
vis-à-vis de la dot fixée en espèce. L'auteur constate
à ce propos que dans nos sociétés contemporaines nombre
des femmes déclarent qu'elles ne sont pas à vendre, n'acceptent
pas que leurs familles perçoivent même un centime du
prétendant. C'est pourquoi, il plaide en faveur d'une procédure
juridico-religieuse, rituelle d'abord et coutumière et
institutionnalisée ensuite afin de préserver la cellule familiale
des avatars de la vie en société.2(*)
Dans cette même lancée, M. Bertrand dans le
marché du mariage et de la famille ajoute qu' « il peut
paraître choquant d'évoquer la valeur monétaire d'une femme
dans les sociétés occidentales où l'esclavage a
légalement disparu, car l'achat d'une jeune fille en vue d'un mariage,
s'il s'observe encore reste toutefois exceptionnelle. »3(*)
Si la fixation de la dot en numéraire pose
déjà un problème éthique du fait des allures
mercantiles qu'elle prend dans le contexte actuel, elle ne manque pas de poser
des difficultés surtout au prétendant époux à cause
de la surévaluation de son taux. Abordant cette question, Mafusama
affirme qu'elle n'est pas sans lien avec les unions libres constatées
à Kinshasa.4(*)
A la racine de ce phénomène néfaste
conclut-il, se trouve l'épineux problème de la valeur de la dot
qui pour certaines familles en abusent tout simplement.
Pour sa part, Ludjebunga dans son étude sur la
« bureaugamie » (c'est-à-dire la polygynie
déguisée) dans la Commune de Limete, arrive à la
conclusion que le phénomène « bureagamique »
a comme antécédent l'entrée tardive dans le mariage de la
jeune fille qui est conçue comme une marchandise par son mari.5(*)
Il ressort de ce qui précède que la dot a connu
une évolution dans la société actuelle, les conditions
économiques modernes ont profondément modifié sa
conception traditionnelle. La substitution de paiement monétaire
à la plupart des dons en nature usités autrefois marque le
changement le plus important en matière dotale. Cette évolution
dans la constitution matérielle de la dot ne permet plus la
personnalisation que revêtaient les preuves instrumentales du temps
jadis. C'est pourquoi à travers cette étude, nous nous proposons
de cerner cette évolution dans conception et pratique de la dot en nous
appuyant sur trois ethnies à savoir Luba, Manianga et yansi pour
dégager les lignes de convergence et celles de divergence qui
caractérisent cette évolution.
II. PROBLEMATIQUE
A l'origine, la dot constituait en réalité un
objet symbolique consacrant l'existence et la permanence du mariage. Elle
était constituée par certains biens symbolisant les valeurs
culturelles de la société. Dans les sociétés
où prédominait la chasse, la flèche, le fusil et la peau
de certaines bêtes (léopard notamment) constituaient des biens
dotaux, tandis que dans les sociétés riveraines comme chez les
Lokele de la Province orientale certaines espèces de poissons, la
pirogue et le filet en étaient les éléments constitutifs.
Dans les cultures pastorales, les peuples du Kivu montagneux par exemple, le
grand comme le petit bétail (Vache, chèvre, mouton)
étaient requis comme biens dotaux.
Généralement, ces biens versés à
la famille de l'épouse étaient destinés à marier
les jeunes mâles nubiles célibataires de la famille de la jeune
mariée. Mais avec la pénétration européenne par
l'entremise de la colonisation, la composante monétaire a
été introduite comme partie intégrante de la dot. Mais en
dépit de cette introduction de la monnaie dans la constitution de la
dot, celle-ci a continué à garder sa valeur symbolique. En effet,
le colonisateur en fixait la hauteur pour effectivement éviter les abus
dans ce domaine.
Si la dot congolaise d'antan ne constituait pas un prix,
c'est-à-dire qu'elle n'était qu'une preuve de l'existence de
l'union matrimoniale, il n'en est plus question pour le Congo d'aujourd'hui.
C'est à juste titre que Umezinwa écrit « c'est un
univers déshumanisé où pour survivre il faut exploiter
autrui, c'est un monde matérialiste où la seule valeur sociale
qui compte est l'argent. »6(*)
La dot a, en effet, perdu le caractère symbolique
qu'elle avait à l'origine, la tradition disparaissant devant
l'intérêt, a en vite fait de considérer la femme comme un
bien, un objet mobilier, transmissible, susceptible d'augmentation de valeur et
n'ayant aucun droit.
A ce propos, le mariage qui était symbolique hier est
devenu aujourd'hui une occasion des grandes cérémonies, de
dépenses, d' « enrichissement », certains
parents considérant leurs filles comme des marchandises à vendre
et qui doivent être chères.
Le problème serait relativement simple si notre pas
n'était habité que de quelques ethnies seulement. Mais la RDC et
particulièrement la ville de Kinshasa est habitée par un nombre
fort élevé d'ethnies aux particularités culturelles et
même physiques variées.7(*)
Cette diversité culturelle se répercute
naturellement sur la conception et la pratique de la dot mettant parfois le
prétendant époux devant des situations inconfortables.
Mais l'observation de la vie quotidienne à Kinshasa
montre qu'il y a une perspective d'uniformisation des pratiques de la dot en
dépit de la diversité culturelle dont nous avons fait mention
ci-haut.
Devant cette situation, nous nous demandons si dans
l'évolution de la conception et de la pratique de la dot dans les trois
ethnies retenues pour cette étude (Luba, Manianga et Yansi), il y a des
convergences ou les divergences persistent. En outre, quelles sont les
conditions, les facteurs et les agents à la base de cette convergence ou
divergence.
III. HYPOTHESE
L'hypothèse de travail, dit P. Ronger « est
une proposition de réponse aux questions que l'on se pose dans la
problématique »
A la lumière des faits observés dans la Commune
de Kimbanseke, nous avançons qu'en dépit de la diversité
culturelle et de quelques particularités qui spécifient chacune
des trois ethnies soumises à l'observation, il y aurait à ce jour
une convergence dans la conception et la pratique de la dot. La situation
socio-économique, l'urbanisation et le contact culturel qu'elle favorise
seraient à la base de cette convergence.
IV. APPROCHE METHODOLOGIQUE
a. Des techniques
Disons que les techniques de recherche sont dictées par
la méthode pour aider le chercheur à récolter les
données nécessaires et suffisantes. D'après R. Pinto et M.
Grawitz, les techniques sont des procédés opératoires
rigoureux bien définis, susceptibles d'être appliqués
à nouveau dans les mêmes conditions adoptées au genre des
problèmes.8(*)
Dans le cadre de ce travail, les techniques ci-après
ont été mises à profit : il s'agit de la technique
documentaire, du questionnaire et de l'échantillonnage.
1. Technique documentaire.
Cette technique comme l'indiquent Shomba et Kuyunsa, met en
présence le chercheur d'une part et de l'autre des documents
supposés contenir les informations recherchées. L'observation sur
la réalité sociale transite par la lecture des oeuvres, aussi
bien matérielles qu'immatérielles, produites par l'homme vivant
en société. De l'ensemble de documents existant, nous avons dans
le cadre de cette étude exploité les documents écrits,
c'est-à-dire ceux dont l'information peut être puisée par
la lecture du texte (journaux, articles, mémoires, thèses,
ouvrages, etc.). En rapport avec cette technique, nous avons consultés
des ouvrages, mémoires et TFC et autres documents officiels relatifs
à notre étude. Leurs contenus ont soumis à la critique
afin d'en dégager l'authenticité, la validité et la
véracité des faits rapportés.
2. Echantillonnage.
L'échantillonnage est une technique consistant à
décrire le tout par la partie appelée échantillon. Ce
dernier concept évoque la portion de la population totale qui sera
réellement enquêtée et qui permettra par extension de
dégager les caractéristiques de l'ensemble de la
population.9(*) Cette
technique nous a permis d'extraire de la multitude des sujets constituant notre
univers d'enquête l'échantillon de trente sujets (à raison
de 10 sujets par ethnie) auxquels nous avons soumis notre questionnaire. Nous y
reviendrons largement à la première section du troisième
chapitre consacrée à l'organisation de la recherche.
3. Questionnaire
Un questionnaire est une série des questions auxquelles
l'enquêté doit répondre. « Ecrit ou oral, un
questionnaire de recherche scientifique vise la collecte des informations sur
ce que la population cible sait, croit, ressent, rêve, envisage de faire
ou a fait et sur les explication et les mobiles auxquels elle s'appuie pour
justifier les attitudes sus évoquées suivant leur visées
respectives. »10(*) D'après la liberté laissée
à l'enquêté, on distingue les questions ouvertes,
fermées et à éventail. Dans le cadre de cette
étude nous avons opté pour des questions de type ouvert et
à éventail. Notre questionnaire a été
administré aux 30 enquêtés faisant partie de notre
échantillon. Nous y reviendrons largement à la première
section du troisième chapitre consacrée à l'organisation
de la recherche.
3. Interview
Pour compléter les informations obtenues par le biais
du questionnaire, nous avons recouru à la technique d'interview.
Celle-ci désigne un tête-à-tête au cours duquel
l'enquêté donne oralement des informations à
l'enquêteur. En nous résumant, retenons qu'une interview est une
forme d'interaction verbale entre l'enquêteur et l'enquêté.
Nous avons, dans le cadre de ce travail, recouru à l'interview
semi-dirigée grâce à laquelle nous avons atteint 15 sujets
à raison de 5 par ethnie.
Toutes les informations récoltées grâce
aux techniques ci-haut décrites ont été soumises au crible
de la méthode dynamiste.
b. De la méthode
Les résultats d'un travail qui se veut être
scientifique ne peuvent être les produits d'une recherche
désordonnée, mais plutôt d'une recherche cohérente
et méthodique. Pour arriver à bien vérifier notre
hypothèse de travail, nous avons recouru à une démarche
scientifique, qualifiée de méthode. En tout état de cause,
la méthode se définit comme « l'ensemble des processus
que suit un chercheur pour atteindre ses objectifs et découvrir la
vérité ». Pour le professeur Kalele ka Bila, la
méthode est une opération intellectuelle de traitement des
données relatives à une réalité sociale
étudiée en fonction d'un objet bien précis ;
opération qui, pour être véritablement scientifique, doit
tout au long de son traitement, tenir constamment compte de la double essence
du fait social et de l'objectif poursuivi.11(*)
Les domaines des sciences sociales étant très
vastes et variés, les façons de poser les problèmes sont
nombreuses et les procédés pour obtenir des réponses le
sont aussi. Pour l'élaboration de ce travail, nous avons recouru
à la méthode dynamiste. La méthode dynamiste comme le note
Sylvain Shomba Kinyamba, fonde son originalité sur la saisie à la
fois des facteurs du changement social et ceux de la résistance à
ce changement. En d'autres termes, « la méthode dynamiste
s'intéresse à toutes les forces qui agissent à
l'intérieur d'un système social ou de l'extérieur sur ce
système, pour sa remise en question comme pour son
maintien. »12(*)
A la suite des présupposés de cette
méthode, nous cernons à travers ce travail l'évolution de
la conception et de la pratique de la dot dans la ville de Kinshasa en appuyant
sur les expériences des Luba, Manianga et Yansi habitant la Commune de
Kimbaseke. Il s'agit de relever cette évolution orientée dans le
sens de convergence ou de divergence en dégageant aussi bien les
facteurs, les conditions et les agents qui ont oeuvré dans la
perspective de la convergence que ceux qui s'y opposent. Chemin faisant, nous
relevons les contradictions, les tensions et les conflits que charrie cette
évolution de la conception et de la pratique de la dot dans les trois
communautés sus-mentionnées.
V. INTERET DU SUJET
En fait, toute personne qui habite la ville de Kinshasa est
consciente d'une réalité selon laquelle de nos jours le mariage
est en crise, les difficultés financières surtout font que le
mariage se raréfient. Cette situation nous a motivé de
réfléchir afin d'apporter notre modeste contribution sur la
compréhension de ce phénomène.
En tant que sociologue en formation, nous sommes
appelée à faire face aux multiples faits sociaux qui
caractérisent notre société et qui battent en
brèche la quiétude sociale.
Ainsi, l'intérêt face à ce sujet est
double : social et scientifique. Sur le plan social, cette étude
permet de considérer la valeur traditionnel le de la dot en mettant en
relief les conséquence néfastes qu'elle cause au sein des
familles. Ainsi, l'autorité compétente pourra se servir de nos
analyses afin d'agir sur la cause et non sur l'effet du
phénomène pour une meilleure prise en charge sociale. Pour ce qui
est de l'intérêt scientifique, d'autre part, la présente
dissertation s'inscrit dans la logique de l'enrichissement de la théorie
scientifique en la matière.
VI. DELIMITATION DU TRAVAIL
Comme dans tout travail scientifique, il s'est
avéré difficile pour nous d'entreprendre cette étude sans
en fixer le contour spatio-temporel. C'est ainsi que du point de vue spatial,
notre étude porte sur les trois ethnies (Luba, Manianga et Yansi) vivant
à Kinshasa plus précisément dans la Commune de Kimbanseke.
Le choix porté sur cette Commune tient simplement au fait qu'elle
constitue un foyer de concentration de ces ethnies et se trouve être
également le milieu qui se prête le mieux à nos
possibilités en terme des coût et de distance, c'est une question
de réalisme.
Du point de vue temporel, notre étude va de 1990
à nos jours. Cette période est marquée par des mutations
aussi bien politique, économique que sociale et culturelle dans la ville
de Kinshasa en particulier et en RDC en général.
VII. DIFFICULTES
RENCONTREES
Toute investigation scientifique est toujours
émaillée des difficultés. Celles-ci diffèrent
suivant l'objet d'étude, la nature du terrain et l'importance de la
logistique.
Il n'est aisé, dans le contexte actuel de la ville de
Kinshasa marqué par la suspicion, des tensions, des crispations dues
à la basse conjoncture socio-économique, etc., de mener une
étude sur un phénomène qui touche aux
susceptibilités comme celui de la dot. Un tel sujet expose le chercheur
à la méfiance et à l'évitement des
enquêtés déjà traumatisés par les conditions
matérielles d'existence. Au cours de nos enquêtes, nous nous
sommes buté au refus pure et simple de certains enquêtés
qui nous renvoyaient parce que, disaient-ils, ils n'avaient pas de temps et
d'énergie physique nécessaire à nous consacrer. Pour
d'autres par contre, l'annonce de notre sujet de recherche suscitait en eux un
sentiment de frustration et nous demandaient d'aller nous confier auprès
d'autres. Nos explications pour justifier le bien fondé de notre
étude ne rencontraient pas souvent un écho favorables
auprès de cette catégorie d'enquêtés. D'autres
encore exigeaient un verre de boisson ou de l'argent avant de se livrer
à fournir des réponses à notre questionnaire.
Par ailleurs, Kimbanseke, comme les autres communes
populaires de la ville de Kinshasa, est habité par une population qui
vit au jour le jour si bien que la survie des ménages tient à la
débrouille quotidienne appelée « libanga ».
Dans ces conditions, il est difficile de rencontrer pendant la journée
des personnes adultes en leurs résidences. Et parce que nous tenions
d'administrer nous-même le questionnaire pour éviter les pertes
éventuelles des protocoles ou les reports des jours de retrait et que
nos enquêtes se déroulaient dans les après-midi, les
avant-midi étant consacrés à nos obligations
académiques, il nous arrivait de parcourir une avenue de bout en bout
sans trouver une personne adulte à interroger. Ce qui a contribué
à l'échelonnement de l'enquête sur plusieurs jours que
prévus.
Le dérobement de la plupart des femmes à
l'entretien pour des raisons diverses nous a fait perdre d'autres informations
(leur son de cloche) qui seraient utiles pour l'élaboration de ce
travail. Leurs opinions auraient peut-être apporté un
éclairage supplémentaire à la compréhension de
notre sujet d'étude.
Le manque des moyens financiers et matériels a
retardé sensiblement le déroulement de l'enquête et la
rédaction de ce travail. Outre le fait que la modicité de nos
ressources avait différé la confection et l'impression de notre
questionnaire, elle n'a pas permis la constitution d'un grand
échantillon.
Notre abnégation et notre engagement ainsi que le
concours de condisciples qui ont accepté le bénévolat, ont
rendu possible la gestion efficace de toutes ces contraintes ayant
émaillé les investigations dont les résultats sont
présentés dans ce travail.
CHAPITRE I : CADRE CONCEPTUEL ET PRESENTATION DU
MILIEU D'ETUDE.
Dans le présent chapitre, nous allons définir
les concepts de base et présenter le milieu d'étude.
Section 1. Définition des concepts
Emile Durkheim souligne que la « première
démarche d'un chercheur est de définir les choses dont il traite
afin qu'il sache et que l'on sache de quoi il est question.»13(*) C'est ainsi que dans cette
section nous nous employons à définir les concepts de base de
notre étude afin de leur conférer un sens précis et
dissiper tout malentendu à leur sujet. Nous circonscrivons les contours
des concepts d'évolution, de la dot, du mariage et de la ville qui
constituent le socle sur lequel repose la présente dissertation.
1.1. Evolution
Selon le dictionnaire Larousse, le mot évolution peut
désigne une transformation, un changement ou c'est qui est contraire
à l'immobilité. L'évolution signifie aussi devenir,
mouvement, changement des idées, de la conception du groupe ou d'une
personne, changement de caractère, transformation graduelle assez
lente14(*).
Dans le cadre de ce travail, nous considérons
l'évolution comme les changements ou les transformations intervenues
dans la conception et la pratique de la dot dans les trois ethnies Luba,
Manianga et Yansi du fait de leur coexistence avec d'autres ethnies dans la
ville de Kinshasa en général et dans la Commune de Kimbanseke en
particulier.
1.2. Dot
Avant d'aborder le noeud du sujet, précisons d'abord le
contenu que nous donnons au concept Dot. Celle-ci est une notion juridique du
droit matrimonial en Europe et on pourrait croire que la dot africaine et
celle de l'Occident dont deux institutions identiques ou du moins voisines. Il
n'en est rien cependant. C'est pourquoi, certains auteurs, à juste
titre, ont critiqué l'emploi du vocable dot parce qu'il prête
à confusion. Mais les termes inventés en remplacement de celui-ci
ne sont pas plus corrects comme « price » qui laisse penser
à l'achat. En outre, il est tellement ancré dans le vocabulaire
juridique du droit coutumier que malgré les critiques
fondées qu'il provoque, ce terme reste le plus fréquemment
employé du moins chez les coutumistes francophones. Cela étant,
définissons les deux dots et essayons de dégager les
différences essentielles.
La dot est une des institutions fondamentales du droit
africain. Ce sujet a donné matière à plusieurs
études d'observateurs étrangers, la plupart n'ont pas
pénétré la signification profonde de cette institution.
Il s'en sont tenus trop légèrement aux apparences formelles
actuelles et ont conclu que la dot était le prix d'achat d'une femme,
que le mariage chez les noirs était une opération lucrative pour
les parents de l'épouse.
En Occident, la dot est constituée des biens
apportés au mari par la famille de la femme en vue de subvenir aux
charges de ménage et notamment à l'éducation des enfants
et à leur entretien.
Par contre, la dot africaine se réalise en sens
inverse puisque les biens sont apportés par le mari et non pas au profit
du ménage, de sa femme ou des enfants à venir mais en faveur de
la famille de sa femme.15(*)
D'après J. Bineti, la dot est la somme versée
par le fiancé ou par sa famille au père de la fiancée. La
dot peut être parfois en nature, en produits alimentaires ou artisanaux,
parfois en objets traditionnellement réservés à cet
usage : bijoux, objets en cuivre ou en fer.16(*)
La dot est une preuve, publique du libre consentement que les
parents apportent à l'alliance envisagéé.La dot sera enfin
une garantie de la stabilité de l'union des époux et des
alliés.
De ce qui précède, nous constatons que l'objectif
essentiel de la dot africaine n'est pas le même que celui de la dot
européenne, la consolidation des liens matrimoniaux mais aussi entre les
deux familles (celle de l'homme et de la femme) se trouve être le mobile
fondamental. Elle (dot) est en quelques sorte le moyen instrumental
établissant l'alliance alors que la dot classique personnalise le
mariage.
Aujourd'hui, plusieurs parents sont intéressés au
montant de la dot plutôt qu'au bonheur de leur fille, montant et les
modalités de versement se débattent généralement
avant la fixation de la date de cérémonie du mariage. Qui discute
de la dot, qui la fixe et qui la perçoit ?
Autrefois, la dot se payait en valeur consacrées :
grand et petit bétail, fusil, houe, machettes, etc. Ces biens
étaient un gage et devaient en principe rester en possession de celui
qui les recevait.
Les conditions économiques modernes ont
profondément modifié le sens traditionnel de la dot. La dot
ancestrale se présente comme une institution sociale faisant partie d'un
régime juridique, lui-même commandé par une philosophie et
une vision originales du monde.
La dot est en quelque sorte le procédé par lequel
se caractérise le mariage légal et le différencie de
l'union libre ou concubinage. C'est le moyen par lequel le mari acquiert le
transfert de certains droits que la famille de la femme abandonne à son
profit.
Dans ce travail nous considérons la dot comme
l'ensemble des biens que le futur époux et/ou sa famille remettent
à la famille de la future épouse pour consacrer l'existence du
mariage.
1.3. Mariage
Le mariage d'après Frederic est une institution civile
religieuse soumise à des réglementations de la parenté, de
la prohibition de l'inceste, du caractère limitative être
permissive des lois sexuelles, de l'interprétation imposée de
la sexualité, objet de teneur ou d'honneur à des utilisations
aux seules fins sociologiques et capitalistes.17(*)
Le code de la famille congolais dans son article 330
définit le mariage comme étant un acte civil, public et solennel
par lequel ni l'un ni l'autre est uni dans les liens d'un
précédent mariage enregistré, établissent entre
eux, une union légale et durable dont les conditions de formation, des
effets et la dissolution sont déterminées par la loi.
1.4. Ville
La ville est l'un des concepts qui ont suscité moult
controverses entre les spécialistes des sciences humaines en
général et entre sociologues en particulier. La diversité
de la réalité qu'elle désigne est à l'origine de
ces controverses. Cette diversité se rapporte à la taille de la
ville (volume de la population et étendue de la ville), à sa
configuration (infrastructure, équipement matériel,
aménagement de l'espace) et aux types d'activités qui s'y
exercent (administration, commerce, industrie, etc.). Les uns et les autres se
sont appuyés sur un aspect pour faire prévaloir leur vision de
l'espace urbain.
A partir de ces critères, des auteurs ont tentés
plusieurs définitions de la ville. Ainsi, les géographes et les
démographes entendent par là un fait de concentration de la
population et de services. Pour les économistes, il est question surtout
de nouveaux marchés. Pour les politicologues, il s'agit de l'apparition
de nouvelles structures politico-administratives. Les sociologues enfin pensent
pour leur part aux nouvelles modalités d'organisation sociale et aux
nouvelles mentalités afférentes.
Ce dernier aspect, celui des nouvelles mentalités
secrétées par la vie urbaine parait intéressant pour notre
étude. En effet, la ville est perçue à travers le
système de valeurs, les attitudes, les comportements, bref la culture
urbaine qu'elle sécrète. P. Georges indique que lorsqu'on parle
de la société urbaine, il ne s'agit pas de simple constatation
d'une forme spatiale. La société urbaine est avant out
définie par une certaine culture, c'est-à-dire par un certain
système de valeurs, les normes et les relations sociales
possédant une spécificité historique et une logique propre
d'organisation et de transformation. Il s'agit d'un milieu artificiel,
grâce à la prédominance d'une activité
dé&terminée et à caractère sociologiquement
hétérogène.18(*)
Analysant les villes africaines à la lumière de
ce critère (culture), Evariste Tshishimbi Katumumonyi estime que
celles-ci n'ont pas encore élaboré leur propre culture à
cause notamment de la persistance des cultures d'origine ethnique qui
continuent à dicter les comportements de leurs habitants. Tout en
prenant en compte l'interférence des cultures ethniques dans la vie
quotidiennes des populations urbaines africaines, il y a lieu de
reconnaître qu'une nouvelle culture est en élaboration en milieu
urbain africain observable dans les comportements des populations qui y
habitent. C'est cette coexistence des cultures ethniques et celles
sécrétées par la ville qui est mise en exergue dans cette
étude. Et ce, à travers la mise en opposition des anciennes et
nouvelles conceptions et pratiques de la dot dans les trois milieux
socio-culturels que nous avons retenus dans cette étude (Luba, Manianga
et Yansi). Il s'agira, en définitive, de voir si la coexistence de ces
trois ethnies dans le milieu urbain de Kinshasa n'a pas
sécrété une nouvelle conception et une nouvelle pratique
de la dot.
En définitive, nous considérons la ville comme
une agglomération comprenant une population d'environ 2000 habitants,
lesquels exercent pour leur survie une multitude des fonctions, partageant une
dynamique culturelle déterminée et caractérisée
par une différenciation sociale.
Après cette discussion sur les concepts de base de la
présente étude passons à la présentation de notre
milieu d'étude, c'est-à-dire la Commune de Kimbanseke. C'est
l'objet de la seconde section de ce premier chapitre.
Section 2 : Présentation de du milieu
d'étude
2.1. Aperçu historique
Kimbaseke vient du mot humbu mbensio dont mbe siggnifie terre et
nsio signifie plane. Littéralement, Kimbanseke veut dire terre plane et
très étendue. Dans le contexte colonial, les agents sanitaires
belges, en mal de prononciation modifièrent le Mbensio en Kimbanseke.
Avant son érection en Commune par l'arrêté
ministériel n°68-026 du 30 mars 195 portant création et
dénomination de nouvelles communes de la ville de Kinshasa, Kimbanseke
était une zone annexe du territoire suburbain de Kinshasa.
A ce titre, elle faisait partie intégrante de
l'administration du district du Bas-Congo devenu Province du Congo central en
1963. Par la suite, Kimbanseke devient zone annexe du poste territorial
administré par un administrateur de territoire dont le premier fut
Monsieur Ngafani et l'actuel Ngataba.
Comme Commune, Kimbanseke est régie par les dispositions
de l'arrêté ministériel n°69-0042 du 23 janvier 1969
du Ministère de l'Intérieur qui a déterminé pour la
ville les limites des communes et par celle de l'Ordonnance-loi n° 82-008
u 25 février 1982 portant statut de la ville de Kinshasa.
2.2 Statut juridique
La commune de Kimbanseke est une entité étatique
à caractère public. Elle est aussi une entité
administrative décentralisée, dotée de la
personnalité juridique à compétence générale
régie par l'arrêté ministériel n° 69-042
du 26 mars 1973 du Ministère de l'Intérieur.
2.3. Situation géographique
La Commune de Kimbanseke couvre une superficie de 237.80 Km2.
elle fait partie des cinq Commune urbano-rurales que compte la ville de
Kinshasa, à savoir : Kinsenso, N'sele, Maluku, Kimbanseke et Mont
Ngafula. Et elle est la plus peuplée de toutes les Communes de la ville
de Kinshasa.
La Commune de Kimbanseke est géographiquement
située à l'est de la ville de Kinshasa, elle est limitée
ainsi : au nord par le tronçon du boulevard Lumumba qui part de la
rivière Nsanga jusquà la rivière Tshwenge. Le boulevard
constitue une limite mitoyenne avec la Commune de Masina. Au sud par la
Province du Bas-Congo, à l'est par la rivière Tshwenge et la
Commune urbano-rurale de N'sele. A l'ouest par la Commune de N'djili.
2.4. Structure administrative et fonctionnement
La structure administrative de la Commune de Kimbanseke se fonde
sur l'Ordonnance-loi n° 82008 du 25 février portant statut de la
ville de Kinshasa. La loi prévoit l'institution au niveau de chaque
Commune et l'exécutif local constitué d'un bourgmestre et son
assistant. L'exécutif comprend également des services
administratifs qui lui permettent d'assurer quotidiennement la tâche de
gestion administrative de la municipalité.
La Commune de Kimbanseke est composée de 30 quartiers
suivants : Bahumbu, Bamboma, Boma, Disasi, Esanga, Kamba-Mulumba,
Mfumu-kento, Mikondo, Malonda, Kasa-vubu, Kikimi, KingasaniI, Kisantu, Luebo,
Mangana, Maviokele, 17 Mai, Ngandu, Ngafani, Nsanga, Nsumubwa, Sakombi,
Salongo, Révolution, Mbwala, Kutu, Ngoma Zita, Mokali, Mulie, Biyela.
2.5 Situation socio-culturel et économique
Sur le plan socio-culturel, la Commune de Kimbanseke en tant
qu'entité urbaine est pluri-ethnique, mais avec une prédominance
des peuples Kongo, Luba et Yansi. Ces différentes ethnies
disseminées à travers la Commune connaissent de concentration
dans certains quartiers notamment.............................
Autant des ethnies qu'il y a autant d'associations culturelles
dont chacune essaie de promouvoir les valeurs culturelles à travers la
musique folklorique, le théâtre... Le mariage interethnique
s'impose de plus en plus en dépit de la contrainte qu'exercent
certains parents sur les jeunes nubiles les obligeants à se marier dans
leurs ethnies respectives.
On dénombre à Kimbanseke des églises
chrétiennes traditionnelles (catholique, protestante et kimbanguiste),
des églises islamique et traditionnelles africaines et plusieurs
églises de réveil.
Des écoles privées et plubliques y reçoivent
les jeunes en âge de scolarité mais on n'y trouve aucun Institut
supérieur ni une Université et moins encore une
bibliothèque publique où peuvent s'instruire des jeunes
adultes.
Les jeunes font la musique moderne à travers les
différents orchestres que compte la Commune.
Sur le plan socio-économique, la Commune de Kimbanseke est
considéré comme une entité urbano-rurale à cause de
la prépondérance des activités agricoles sur la
lisère de la rivière Nsanga occupée par les femmes
maraîchères, alors que les boulangeries de type artisanal et en
semi moderne approvisionnent en pain la population disséminée
ça et là.
Le commerce constitue aussi l'une de leurs activités
attestées par la présence des buvettes, chambres froides,
boutiques, pharmacies, maisons de couture, maisons de communication, maison de
tolérance dans chaque quartier, etc. La Commune de Kimbanseke fait
figure de parent pauvre en ce qui concerne l'industrie, elle ne dispose aucune
unité industrielle pouvant offrir de l'emploi à la
main-d'oeuvre.
Enfin, dans cette Commune urbano-rurale, les facteurs tels que
l'électricité, l'eau, la voirie, etc sont difficiles ou
progressent d'un rythme trop lent.
2.5. Structure administrative
La Commune de Kimbanseke comme d'autres Communes comporte
plusieurs services qui président à son fonctionnement. Au nombre
de ces services citons :
a. Le Bourgmestre
Il est l'autorité politico-administrative de
l'entité. A ce titre, il est le chef de l'exécutif en même
temps autorité suprême de la Commune.
b. Le Chef de Bureau
Il est le Chef de l'administration, celui qui supervise les
travaux de tous les services administratifs.
c. Le Chef du personnel
Il s'occupe de l'affectation et de la mise en place des agents en
service et leur discipline dans la maison communale.
d. Le Secrétariat
S'occupe de l'orientation de l'administration, du courrier, de
classement et de l'expédition de la correspondance. Il est le relais
entre les différents services et l'extérieur.
e. La Police
Elle s'occupe de tous les problèmes de la
sécurité, de l'ordre public,etc. sur l'étendue de la
Commune de Kimbanseke.
f. Le Service de la population
Il est chargé de gérer la population en
procédant par des recensements et délivre des documents
parcellaires, les attestations de perte de pièces, etc.
g. Le Service de l'environnement
S'occupe de la protection de la nature, contrôle et
aménage la Commune en matière d'assainissement,
d'évacuation des immondices, de l'évaluation de la
productivité dans le secteur de la pêche. Il délivre des
Procès-Verbaux de constat de lieu des ateliers, boutiques, pharmacies,
hôpitaux, etc.
h. Le Service de la culture et arts.
Ce service s'occupe du patrimoine culturel, des secteurs
artisanaux et artistiques aussi la promotion des activités
culturelles.
i. Le Service de la jeunesse
Il s'occupe de l'encadrement des jeunes et coordonne leurs
organisations, tels que les cercles culturels, les clubs, etc.
j. Le Service de l'état-civil
Le bureau de l'état-civil est chargé de
l'enregistrement des actes de l'état-civil et la conservation des
archives de l'Etat.
k. Le Service de l'agriculture et élevage
Constitué des techniciens agronomes et des
vétérinaires, le service de l'agriculture et l'élevage a
comme tâche de prodiguer des conseils aux cultivateurs et aux
éleveurs locaux, il délivre aussi des actes d'exploitation
forestière pour la fabrication des braises...
l. Le Service de l'Industrie, Petites et Moyennes
entreprises et Artisanat
L'IPMEA s'occupe de l'encadrement économique du secteur
formel et informel pour la bonne marche de la Commune. Il délivre des
autorisations d'ouverture et d'exploitation des unités de
production.
m. Le Service des affaires sociales
Il s'occupe de l'assistance sociale, de tous les problèmes
sociaux de l'homme et des activités tendant à la promotion
n. Le service juridique et contentieux
Il règle les litiges des administrés. Ces
litiges peuvent être à caractère civil, administratif ou
pénal.
o. Le Service de l'économie
Il contrôle les activités économiques, fixe
les prix des articles et assure l'inspection des marchés.
p. Le service de tourisme
Ce service est chargé du contrôle, de l'inspection
des hôtels et des agences de voyage ainsi que tous les autres
établissements ayant un rapport avec le tourisme.
q. Le Service de sports et loisirs
Il s'occupe du sport et des loisirs en
général.
r. Le Service des Finances
Ce service s'occupe de la gestion financière de
l'entité administrative.
s. Le Service de l'habitat
Il s'occupe de la réglementation des contrats de bail et
de la résolution des conflits entre bailleurs et locataires.
t. Le Service de l'hygiène et santé
Il s'occupe de tout problème qui a trait à
l'éducation sur les maladies endémiques,
épidémiques, etc.
u. Le Service de la DGM
La Direction Générale de Migrations s'occupe des
migrations (sortie et entrée) de la population de la commune de
Kimbanseke.
v. Le Service de Comptabilité
Il s'occupe de recettes, de dépenses de la commune de
Kimbanseke.
Conclusion
Ce chapitre a été consacré à la
discussion des concepts fondamentaux de notre étude. Cette discussion a
été importante pour fixer le contenu que nous avons
attribué à chaque concept étant le contexte particulier de
l'étude. L'exercice ainsi amorcé, pensons-nous, nous a
dédouané des malentendus qu'auraient entraîné
l'équivocité de certains concepts.
Ensuite nous nous sommes attelée à la
présentation de notre champ d'investigation afin de circonscrire
l'environnement socio-culturel dans lequel l'étude a été
menée. Car dit-on en sociologie qu'un fait social n'a de signification
que s'il est replacé dans le contexte de son émergence.
Passons à présent à la description des
conceptions et pratiques traditionnelles de la dot dans les trois ethnies
retenues dans le cadre de cette étude, à savoir Luba, Manianga et
Yansi habitant la Commune de Kimbanseke.
Chapitre II : CONCEPTIONS ET PRATIQUES DE LA DOT
EN MILIEUX TRADITIONNELS LUBA, MANIANGA ET YANSI
Introduction
A travers ce chapitre, nous décrivons les conceptions
et pratiques de la dot dans les trois ethnies retenues pour cette étude.
Cet effort nous permet de nous faire une idée sur la dot dans les
sociétés du hier, afin de les confronter avec les conceptions et
les pratiques d'aujourd'hui et dégager les lignes de convergence et de
divergence. Nous ferons dans la première section un transit par la dot
dans la législation congolaise ensuite nous dirons un mot sur la dot
dans chacune des trois ethnies faisant partie de nos préoccupations dans
ce travail.
Section 1 : La dot dans la législation
congolaise
Le code de la famille fait de la dot la condition
indispensable du mariage. Le futur époux et sa famille doivent convenir
avec les parents de la future épouse d'une remise de biens ou d'argent
qui constituent la dot au bénéfice de ces derniers (parents de la
fiancée).
Le mariage ne peut être célébré que
si la dot a été effectivement versée ou moins en partie.
Nonobstant toute coutume contraire, la dot peut être symbolique.
La coutume applicable au mariage détermine les
débiteurs et les créanciers de la dot, sa consistance et son
montant, pour autant qu'elle soit conforme à l'ordre public et à
la loi, plus particulièrement aux dispositions en la matière.
Cette coutume détermine également les témoins matrimoniaux
de la dot.
Les conventions relatives à la dot et les obligations
qui en découlent sont prouvées par les énonciations de
l'acte de mariage. La convention relative à la dot, conclue en vue d'un
mariage non encore célébré ou non enregistré, peut
être prouvée par tous les moyens de droit.
Si la dot est refusée par ceux qui, selon la coutume,
doivent la recevoir, les futurs époux même non
émancipés, soit ensemble soit séparément peuvent
porter le litige devant le conseil de famille. Si le refus persiste, les futurs
époux ainsi que le Ministère public peuvent saisir, par voie de
requête, le tribunal de paix du lieu où le mariage devait
être célébré.
Le tribunal de paix instruit à huis clos la
requête en amiable conciliateur, il convoque soit
séparément, soit ensemble ou les requérants, le
père et la mère de la future épouse et ceux de ses ayant
droit bénéficiaires de la dot et s'il l'estime opportun, un
conseil de famille.
Le tribunal tente, s'il échet, d'obtenir un accord,
soit en présence soit hors de présence des futurs époux.
S'il y a accord, le tribunal prend une décision qui l'entérine.
Dans le cas contraire, il statue par décision motivée accordant
ou non l'autorisation du mariage et fixant le montant de la dot en tenant
compte de la coutume des parties et des possibilités financières
de la future épouse et de sa famille.
En ce cas, le mariage ne peut être
célébré que devant l'Officier de l'état civil qui,
sur base de la décision, recevra le montant de la dot fixée et
veillera à la remettre à ceux qui doivent la recevoir. Si ces
derniers refusent de la recevoir, l'Officier de l'état civil en fera
mention dans l'acte de mariage. Le montant de la dot ainsi versé et non
recueilli sera, après un an à dater de l'acte de mariage, soumis
aux règles relatives aux offres réelles et à la
consignation.
Section 2 : La conception et la pratique de la dot
en milieux traditionnel Luba, Manianga et Yansi
3.1. La conception et la pratique de la dot en milieu
traditionnel Luba
La conception traditionnelle chez le Luba était
telle que le mariage était l'affaire de toute la communauté ou
d'un clan dans lequel le choix du conjoint ou de la conjointe se faisait par
le père ou par un membre de la famille.
Sa validité et sa légitimité sont
déterminées par le versement de la dot par la famille du
garçon à celle de la fille. Il s'agit, en quelque, sorte d'une
compensation faite à la famille de la fille qui perd l'un de ses
membres. Mais, la dot peut également être considéré
comme un cadeau que la famille du garçon offre pour un nouveau membre
qu'elle reçoit et qui s'ajoute à la famille car, la femme
mariée fait partie intégrante du clan de son mari.
La pratique traditionnelle de la dot chez les Luba, concernant
le montant demandé, celui-ci varie selon les parents de la future
épouse. De manière générale, il n'existe pas un
montant fixe. En milieu traditionnel Luba, il n' y a pas de pré-dot
« kanga lopango ». Le jour du versement de la dot, c'est
le jour du mariage. L'homme peut ce jour là partir avec sa femme. Les
cérémonies civiles et religieuses peuvent ne pas venir
directement.
Chez les luba, la dot est traditionnellement constituée
d'un montant en espèce et des biens en nature. . A côté de
la somme d'argent versée, il est demandé des biens en nature dont
les plus courants sont : des vêtements pour les parents comprenant
un costume, une chemise et des chaussures pour le père, un pagne, des
chaussures et un foulard de tête pour la mère ; deux
chèvres dont l'une destinée à la mère pour avoir
allaiter la mariée et l'autre pour le père ; du sel et de
l'huile de palme; un fusil, etc. Il faut noter que la mère de la future
épouse n'a droit à sa chèvre que si sa fille est vierge,
signe d'une bonne éducation qu'elle a reçue de sa mère.
La tradition luba autorise le prétendant à
verser la dot en totalité ou en partie, quitte à continuer le
versement durant la vie conjugale. L'expression consacrée qui traduit
cette pratique est « Ku buku ku diyala », une image qu'on
présente la belle famille comme un dépotoir qui accepte de
recevoir les détritus chaque fois que les gens viennent les
déverser.
En cas de grossesse avant le mariage, l'auteur de la grossesse
prend sa femme et la dot ne sera versée qu'après accouchement.
Mis à part les biens en nature ci-haut cités, la
partie en numéraire n'est pas nécessairement destinée aux
parents directs de la fille. Traditionnellement, le montant reçu doit
constituer la dot pour un autre membre de la lignée paternelle de la
mariée, c'est surtout le cas en ce qui concerne le mariage de
l'aînée de filles. C'est ce qu'on appelle en Tshiluba
« biuma bia milambu » que nous pouvons littéralement
traduire par la dot d'offrande (allusion faite au fait que cette dot doit
être remise à un autre membre de la famille pour son mariage).
3.2. La conception et la pratique de la dot en milieu
traditionnel Manianga
Pour les Manianga, la dot est un symbole que le garçon
verse dans la famille de la fille. La dot représente aussi une garantie
de stabilité de l'union des époux et que la dot est obligatoire
pour la sécurité, la stabilité et la valorisation de deux
familles.
La dot, comme dans les autres ethnies, est un
élément principal du mariage. C'est pourquoi les Manianga
estiment qu'elle doit être versée en totalité,
c'est-à-dire tous les biens dotaux et le montant exigés doivent
être entièrement versés avant la conclusion du mariage.
Dans la tradition manianga, la dot était
constituée de l'argent et des biens en nature. La
pratique de la dot en milieu traditionnel manianga ne connaît pas aussi
un moment particulier lors de la conclusion du mariage. La belle famille du
prétendant monte des enchères exorbitantes, ce qui donne lieu
à une sorte de duel (Kinzonzi) exposant la jeune fille
au marchandage.
Le montant exigé normalement pour la dot c'est plus ou
moins mille dollars américains (1000 $ us). Les Manianga pratiquent la
pré-dot car, elle est d'une grande importance dans la
société manianga dans la mesure où elle constitue un pas
décisif qui conduit au mariage.
Les biens en nature peuvent se mesurer
à l'apport des pièces d'habits de haute qualité telles que
les wax hollandais et super wax. Tandis que ceux en numéraire
s'évaluent en dollar américain. D'autres articles sont à
compter pour compléter la dot, c'est entre autres : noix de cola,
sel, boissons alcooliques et sucrées, grandes marmites, paire de
souliers pour le père et paire des sandales pour la mère, foulard
de tête, etc. A ces biens sont associées une bête (porc ou
chèvre) ou un outil aratoire.
Pour ce qui est des bénéficiaires directs de la
dot, l'oncle maternel est le bénéficiaire
privilégié de la dot.
3.3. La conception et la pratique de la dot en milieu
traditionnel Yansi
La dot est formée de tous les biens constituant le
droit que doit obtenir la famille de la jeune fille de la part du futur
époux et/ou de sa famille. Les parents Yansi soutiennent que le jeune
homme doit restituer les frais scolaires consentis pour la formation de la
jeune fille, si celle-ci a été scolarisée.
La dot est obligatoire car elle rend le divorce plus difficile
et surtout proscrit toute initiative unilatérale de la femme en la
matière. La dot stabilise le lien du mariage, c'est
aussi une valeur pour la femme, si elle est trop minime, la femme va dire
« tu ne m'aime pas puisque tu payes si peu pour moi ».
Dans la tradition yansi la dot est constituée de
l'argent et des biens en nature.
La pré-dot consiste à verser des biens en nature
auprès des parents de la fille. C'est le signe qu'il
désire épouser la famille.
Généralement, le jeune homme présentera auprès de
la famille de la fille avec la bière afin d'officialiser les
fiançailles. A cette occasion les membres de deux familles sont
présents et la famille de la jeune fille, après la
cérémonie invitera le fiancé à venir chercher la
« facture » de la dot. La dot doit être versée
en totalité.
Chez les Yansi, le montant de la dot n'est pas fixe, il varie
d'une famille à une autre, d'une part et selon que la jeune fille est
lettrée ou illettrée d'autre part. Si la fille a reçu une
bonne formation scolaire (5ème ou 6ème des
humanités) le montant de la dot sera plus élevé. Les
valeurs dotales sont arrêtées après débat entre les
parties, elles comprennent essentiellement une somme d'argent qui varie entre
8000 Fc et 15000 Fc, exprimés de fois en dollars américains.
Les familles paternelle et maternelle de la future
épouse sont bénéficiaires de dot. Pour le père de
la fille, un costume, une chemise, une paire de chaussures, une ceinture, une
machette, une lampe Coleman ou une lampe tempête, des paquets de lames de
rasoir, une farde des cigarette, des boites d'allumette, une couverture en
laine (léopard), une cravate, un drap de lit, un sac de sel, des noix de
cola, le vin de palme.
Pour la mère, un mouchoir de tête, une
pièce super wax, des boucles d'oreilles, une paire de chaussures pour
dame, un gros bassin, une marmite, une houe, une chaînette.
L'oncle maternel de la future épouse reçoit de
la part du futur époux les biens ci-après les mêmes
biens dotaux remis à la famille paternelle.
Une fois tous les biens versés, le beau-père
à son tour, donne au futur époux un bouc.
Conclusion.
Au terme de ce chapitre, nous pouvons dire que les conceptions
et les pratiques de la dot dans les trois ethnies (luba, manianga et Yansi)
reflètent les spécificités culturelles de chaque peuple.
La composition, les modalités de versement et les
bénéficiaires de la dot sont différents selon que l'on se
trouve dans tel ou tel milieu socio-culturel. Ces spécificités se
sont-elles maintenues ou ont-elles connues une évolution en milieu
urbain de Kinshasa ? La réponse à cette question constitue
l'objet du troisième chapitre.
Chapitre III : PRESENTATION ET INTERPRETATION DES
RESULTATS
Introduction
Dans ce chapitre, nous présentons les résultats de
nos recherches. Nous exposons dans la première section le processus de
la recherche, puis dans la deuxième les résultats obtenus et
enfin dans la troisième nous les interprétons en les
circonscrivant dans leur contexte.
Section 1. Organisation et
déroulement de la recherche
Cette section revêt une importance capitale. En effet,
elle rend compte de notre cheminement dans la collecte des données qui
ont servi à l'élaboration de ce travail. En d'autres termes, il
s'agit de l'opérationnalisation et de validation des instruments mis en
contribution lors de nos enquêtes. Ainsi, aborderons-nous les points
relatifs à la population d'étude et à son
échantillon, à l'élaboration du questionnaire et à
son administration et, enfin, aux difficultés
rencontrées.
1. Univers d'enquête et
échantillon.
1. Univers d'enquête
En sciences, lorsqu'on parle de l'univers d'enquête, il
faut entendre par là un ensemble fini, délimité dans le
temps et dans l'espace qui fait l'objet d'une étude. Pour les sciences
sociales en général, et en sociologie en particulier, l'univers
ou population d'enquête est un « ensemble humain dont on
cherche à connaître les opinions, les besoins, etc. Elle est
caractérisée, c'est-à-dire qu'elle a en commun des
caractéristiques connues permettant l'identification psychosociale des
individus de ce groupe. »19(*)
En rapport avec cette définition, notre univers
d'enquête (population d'étude) se compose de l'ensemble des
ressortissants des ethnies Luba, Manianga et Yansi habitant la Commune de
Kimbaseke. Cette population a été caractérisée sur
base des variables ci-après : âge, sexe, niveau
d'études, profession, revenu, confession religieuse, ancienneté
dans la ville Kinshasa et ancienneté dans le quartier habité.
L'inexistence des statistiques se rapportant à chacune
de ces variables et l'impossibilité matérielle de les constituer
nous-même nous a conduit à ne pas en tenir compte dans la
constitution de notre échantillon.
En outre, étant donné l'immensité de la
Commune Kimbanseke et l'étendue de la population à étudier
et tenant aussi compte de la modicité de nos moyens et de la
brièveté du temps nous imparti, nous avons prélever un
échantillon en nous limitant aux quartiers Boma et Kutu.
2. Constitution de l'échantillon
L'étude de l'évolution de la conception et de
la pratique de la dot dans les trois ethnies ci-haut indiquées
requérait, pour être exhaustive, que nous passions en revue
chacune des unités constitutives de notre univers d'enquête. En
d'autres termes, il serait nécessaire que chaque sujet de notre univers
d'enquête soit interrogé individuellement. Une telle entreprise
s'est avérée irréalisable à la suite d'une double
difficulté.
D'abord d'ordre temporel. Le temps nous imparti (sept mois)
ne nous offrait pas la possibilité de sillonner systématiquement
toutes les parcelles pour recueillir les informations auprès de chaque
habitant de cette Commune. Ensuite, les maigres moyens financiers à
notre disposition ne pouvaient procurer les outils matériels
indispensables (questionnaire) pour mener une enquête d'une telle
envergure.
Face à cette double difficulté, et
considérant la possibilité statistique de décrire le tout
par la partie, il s'est imposé à nous la technique de sondage
consistant à observer une partie de la population pour tirer des
conclusions extrapolables à celle-ci en relevant les limites de nos
généralisations, au regard de la taille réduite de notre
échantillon. S'agissant de cette technique
(sondage), « tous les efforts gravitent autour de
l'échantillon. Ce concept évoque une portion de la population
totale qui sera réellement enquêtée et qui permettra par
extension, de dégager les caractéristiques de l'ensemble de la
population. L'apport de cette technique dans les enquêtes des sciences
sociales ne se discute plus. Grâce à elle, on s'autorise de mener
par exemple, une investigation fiable sur l'ensemble de la population à
la fois. »20(*)
Cette technique ayant été adoptée, une
autre difficulté s'est dressée à nous quant à
savoir quelle partie décrire pour espérer élucider le tout
et comment s'y prendre. En termes voisins, qui interroger et selon quel
procédé faut-il le sélectionner dans la multitude pour
échapper à l'arbitraire ?
Considérant notre problématique, nous avons
estimé que seuls les adultes de deux sexes de ces trois ethnies
étaient concernées par notre étude. Et par
conséquent, ils pouvaient bien figurer dans notre échantillon.
Mais comment les extraire et à quel nombre ? Au
sujet du second volet de cette question, M. Grawitz indique que
« tout dépend de la nature des éléments à
observer, c'est-à-dire de l'homogénéité du tout. En
effet, si la dispersion est nulle, toutes les unités auraient la
même valeur égale à la moyenne et le
prélèvement d'une seule unité serait un échantillon
suffisant et représentatif. Si la dispersion est faible,
c'est-à-dire si les valeurs du caractère étudié
sont très groupées autour de la moyenne, l'ensemble est
homogène et un échantillon restreint donnera une précision
suffisante. Au contraire, si la dispersion est élevée, si la
population est très hétérogène, un
échantillon beaucoup plus important s'impose pour obtenir la même
précision »21(*).
Nous considérons que notre population d'étude
du point de vue des caractéristiques socio-économiques et
culturelles n'est pas trop hétérogène. C'est pourquoi nous
avons opté pour un échantillon de 30 sujets.
Comment ces 30 sujets ont-ils été extraits de
la population-mère ?
Il sied d'indiquer qu'il n'existe pas de statistiques
officielles décrivant celle-ci sur base d'autres
caractéristiques, notamment l'âge, le sexe, le niveau
d'études, la profession, la religion, etc. Ce qui rend impossible le
prélèvement de l'échantillon par le procédé
de quota. Il ne nous restait que la possibilité de recourir à
un échantillonnage aléatoire, en accordant à tout sujet de
notre population-mère la même chance de figurer dans notre
échantillon. Nous avons considéré que dans le cadre de
notre étude toute personne adulte, c'est-à-dire dont l'âge
varie entre 20 et 65 ans habitant la Commune, quel que soit son sexe, son
niveau d'études, sa profession, sa religion, son ethnie, etc.
était susceptible de faire partie de notre échantillon.
L'échantillonnage aléatoire renferme plusieurs variantes parmi
lesquelles nous avons opté pour le procédé occasionnel.
Celui-ci consiste à prendre pour unité d'échantillon tout
individu disponible au moment de l'enquête.
Pour arriver à prélever les unités de
notre échantillon, nous avons procédé par un tirage au
sort sans remise des avenues des quartiers Boma et Kutu. Nous avons, sur des
bouts de papier, attribué à chaque avenue un numéro. Ces
bouts de papier ont été introduits dans une urne. Par la suite,
nous avons successivement tiré les avenues où l'enquête
devait se dérouler. A la suite de ce tirage au sort, les avenues
ci-après ont été retenues :
Ainsi, sur chaque avenue, nous interrogions tout individu
disponible, c'est-à-dire tout celui ou toute celle que nous rencontrions
au moment de notre passage et qui acceptait de répondre à notre
questionnaire. Au total 30 sujets ont fait partie de notre
échantillon.
2. Collecte des
données
Collecter les données c'est rassembler les
informations indispensables à la réalisation d'un travail
scientifique. Ces informations peuvent être, soit de première soit
de seconde main. Ce dernier type de données est disponible et
consigné dans des documents sous diverses formes : ouvrage,
article, thèse, mémoire, rapport, etc. L'exploitation de ce type
de données offre le bénéfice de temps, d'énergie et
de moyen. Toutefois, il convient d'indiquer que parce que constituées
pour d'autres objectifs, ces données n'apportent pas toujours
satisfaction aux préoccupations des nouvelles recherches. Raison pour
laquelle les données primaires sont préférables parce que
issues des investigations menées en fonction de la problématique
et des hypothèses soulevées par une recherche en cours.
En pratique, toute recherche se réalise grâce au
recours simultané à ces types de données dont
l'exploitation judicieuse rapporte des résultats féconds.
Dans un cas comme dans un autre, la collecte de
données se réalise grâce à la manipulation des
techniques de collecte de données. Pour notre étude, outre
l'interview réalisée avec 15 sujets, les données (de
première main) présentées dans ce chapitre ont
été rassemblées à l'aide du questionnaire dont le
processus d'élaboration est décrit dans le point suivant.
1. Elaboration du questionnaire.
L'élaboration de notre questionnaire a franchi les
étapes ci-après :
i. Formulation des thèmes.
Cette phase d'élaboration du questionnaire a
consisté en la détermination des principaux sujets devant guider
la conception des items élucidant la problématique et les
hypothèses de cette étude.
Le premier thème se rapporte à l'identification
des enquêtés. Il s'est agi, sous ce thème de décrire
les unités de notre échantillon du point de vue de
l'âge, du sexe, du niveau d'études, de la profession, du revenu,
de la confession religieuse, de l'ancienneté dans la ville Kinshasa et
de l'ancienneté dans le quartier habité.
Le deuxième thème porte sur la conception et la
pratique de la dot dans les sociétés traditionnelles
(évidemment dans les trois ethnies retenues pour cette étude).
Le troisième thème concerne la conception et la
pratique de la dot dans la société d'aujourd'hui et
particulièrement dans la ville de Kinshasa.
C'est en rapport avec ces thèmes que nous avons
structuré et élaboré notre questionnaire.
ii. Nature des questions.
La complexité de notre problématique, les
contraintes matérielles et temporelles ainsi que les exigences de
dépouillement de données nous ont conduit à combiner
à la fois les questions fermées, à éventail et
ouvertes.
Les premières sont celles pour lesquelles
l'enquêté ne peut répondre que par oui ou non. Les secondes
sont celles assorties des assertions parmi lesquelles, l'enquêté
choisit celle qui correspond le mieux à son opinion. Ces deux types de
question ont été retenus d'une part, pour parer aux
réponses « impertinentes » qui résulteraient
d'une mauvaise compréhension des questions et, d'autre part, du fait de
l'avantage qu'elles présentent, notamment la facilité de
dépouillement. Les troisièmes qui laissent à
l'enquêté la possibilité de formuler ses réponses en
ses propres termes, ont été retenues pour obtenir des
enquêtés des réponses détaillées suggestives
des aspects non envisagés par nous22(*).
Le test de fiabilité de notre questionnaire a
été réalisé au cours de l'enquête
préliminaire organisée à ce propos du 9 au 15 mars
2006.
iii. Pré-enquête.
Celle-ci s'est déroulée pendant sept jours dans
les quartier Boma et Kutu et a touché 10 sujets de
notre population-mère.
Deux procédés ont été
exploités à ce niveau. Le premier a consisté à
convier 5 sujets à remplir personnellement le questionnaire. Ce
procédé a eu l'avantage de nous dévoiler les
difficultés de compréhension de certaines questions. Quant au
second procédé, nous avons eu à administrer
nous-même le questionnaire. Cet échange nous a permis de
découvrir certains aspects non prévus dans notre projet de
questionnaire.
Grâce à cette pré-enquête, nous
avons reformulé toutes les questions qui suscitaient des
difficultés de compréhension et en avons ajouté d'autres
pour enrichir notre questionnaire.
iv. Questionnaire définitif
A la suite de la pré-enquête, nous avons
élaboré un questionnaire définitif comprenant 25 questions
dont 7 identifient les enquêtés et 18 scrutent leurs opinions au
regard de notre problématique et de nos hypothèses. C'est ce
questionnaire qui a été administré aux 30 unités
faisant partie de notre échantillon.
2. Administration du questionnaire.
C'est la phase de la collecte proprement dite des
données. Elle s'est concrétisée par notre descente dans
les six avenues de quartiers Boma et Kutu de la commune de
Kimbanseke afin de recueillir, à l'aide du questionnaire, des
informations utiles à la réalisation du présent
travail.
Nous avons mis 15 jours (du 02 au 17 mars 2006) au lieu de 10
initialement prévus. La longueur des entretiens, les explications
à fournir pour nous faire recevoir par les enquêtés et pour
élucider certaines questions, l'approfondissement de certains
détails pertinents, ont été à l'origine de cette
prolongation.
Pour éviter le report des rendez-vous et
éventuellement la perte des protocoles d'enquête, nous devrions
nous-mêmes administrer le questionnaire. Mais, au cours des
enquêtes, certains enquêtés avaient sollicité le
bénéfice de temps pour répondre avec
sérénité à notre questionnaire. Nous avons
accédé à cette requête et revenions 48 heures
après pour le retrait du protocole.
Section 2 : Présentation des
résultats
2.1. Identification des enquêtés
Dans ce point, nous identifions nos enquêtés partant
de quelques caractéristiques notamment l'âge, le sexe,
l'Etat-civil, le niveau d'étude, la profession, l'ethnie et la
confession religieuse.
Tableau I : Répartition des enquêtés
selon l'âge.
Tranches d'ages
|
Effectifs
|
Pourcent
|
30 à 39 ans
|
7
|
23.3
|
40 à 49 ans
|
8
|
26.7
|
50 à 59 ans
|
9
|
30
|
60 et plus
|
6
|
20
|
Total
|
30
|
100
|
Source : Nos enquêtes
Il ressort de la lecture de ce tableau que 30% des
enquêtés ont l'âge variant entre 50 et 59 ans, 26.6% entre
40 et 49 ans, 23.3% entre 30 et 39 ans, 20% ont un âge égal ou
supérieur à 60 ans. La catégorie légèrement
nombreuse telle qu'il apparaît dans ce tableau est celle dont
l'âge varie entre 50 et 59 ans, soit 30% de l'échantillon.
Tableau II : Répartition des enquêtés
selon le sexe.
SEXE
|
Effectifs.
|
Pourcent
|
Masculin
|
20
|
66.7
|
Féminin
|
10
|
33.3
|
Total
|
30
|
100
|
Source : Nos enquêtes
De ce tableau, il ressort que 66.7% des enquêtés
sont du sexe masculin alors que 33.3% sont du sexe féminin. Il s'ensuit
que la majorité (66.7%.) des enquêtés sont du sexe
masculin. Cette représentation inégale des
enquêtés dans notre échantillon est une conséquence
logique du type d'échantillonnage retenu. En optant pour
l'échantillon occasionnel, nous avons, lors de nos descentes sur le
terrain, rencontré plus des hommes que des femmes. Ces dernières
étant souvent absentes du ménage à notre passage. Et
même lors qu'elles étaient présentes, elles souhaitaient
que l'entretien soit tenu avec le mari. D'autre part, des observations faites,
il s'est dégagé que les quelques dames qui ont accepté de
répondre à notre questionnaire ont un niveau d'études
assez élevé, c'est-à-dire allant de diplôme d'Etat
à celui de licence en passant par celui de graduat. Comme nous pouvons
le constater, le niveau d'études a été un facteur limitant
la participation des femmes.
Tableau III : Répartition des
enquêtés selon l'état-civil
Etat-civil
|
Effectifs
|
Pourcent
|
Célibataire
|
3
|
10
|
Marié (e)
|
20
|
66.7
|
Divorce (e)
|
4
|
13.3
|
Veuf (ve)
|
3
|
10
|
Total
|
30
|
100
|
Source : Nos enquêtes
Ce tableau montre que 66.7% des enquêtés sont
mariés, 13.3% sont des divorcés, 10% sont de célibataires
et 10% sont de veufs. Nous constatons que les mariés sont majoritaires
dans notre échantillon. Ils représentent 66.7%
Tableau IV : Répartition des
enquêtés selon le niveau d'études.
NIVEAU D'ETUDES
|
Effectifs
|
Pourcent
|
Sans instruction
|
5
|
16.7
|
Primaire
|
10
|
33.3
|
Secondaire
|
9
|
30
|
Supérieur et Universitaire
|
6
|
20
|
Total
|
30
|
100
|
Source : Nos enquêtes
La lecture du tableau et du diagramme
précédents montre que 33.3% des enquêtés sont du
niveau d'études primaire, 30% ont fait les études secondaires,
20% sont des gradués et licenciés, 16.6% sont sans instruction.
Les enquêtés ayant atteint le niveau d'études primaires
forment le groupe le plus nombreux. Notre échantillon, comme nous
pouvons le constater, est constitué en majorité des personnes
lettrées.
Tableau V : Répartition des
enquêtés selon la profession.
Professions
|
Effectifs.
|
Pourcent
|
Salariés
|
8
|
26.6
|
Indépendants
|
8
|
26.6
|
Etudiants
|
4
|
13.3
|
Sans emploi
|
5
|
16.6
|
Total
|
30
|
100
|
La répartition des
enquêtés sur base de la profession laisse apparaître que
26.6% sont des salariés, 26.6% exercent des activités
indépendantes, 16.6% sont des sans emploi et 13.3% sont
étudiants.
Quelques précisions méritent d'être
apportées au sujet des composantes de certaines catégories
socio-professionnelles. Nous avons regroupé dans la catégorie
« salariés » tous ceux qui ont un travail
rémunéré quels que soient le secteur et la nature de ce
travail. Il s'est agi, dans le cadre de nos enquête, des enseignants du
primaire et du secondaire des écoles privées, confessionnelles et
officielles (13.5%), les chauffeurs travaillant pour le compte des particuliers
ou des entreprises privées (2.5%), les informaticiens des bureautiques
(1.5%), un maçon d'une entreprise de la place (0.5%), des fonctionnaires
(9.5%), des policiers (1%), des cadres scientifiques des Universités et
Instituts supérieurs de la capitale (2.5%) et des médecins
(3%).
A propos des indépendants, nous avons regroupé
dans cette catégorie tous ceux qui exercent une activité pour
leur propre compte. Elle est essentiellement constituée des
opérateurs de la petite économie marchande et des petits
métiers. Dans cette catégorie socio-professionnelle, nous avons
rencontré les tenanciers des boutiques et des pratiquants du petit
commerce (18.5%), des couturières (2%), des tenanciers des maisons de
communication (1%), un cambiste (0.5%) et un cordonnier (0.5%). Rentrent
également dans cette catégorie des indépendants les
pasteurs (1%), les musiciens (2%) et les artistes comédiens (1%) et les
avocats (1%),
Deux enseignements résultent des données
reprises dans le tableau ci-dessus. Elles attestent, en premier lieu, la quasi
inexistence de l'emploi dans le secteur formel de l'économie congolaise.
En effet, comme l'illustre bien ce tableau, une bonne partie des
enquêtés est constituée des sans emploi (35.5%) et des
indépendants (27.5%). En outre, la répartition des professions
par sexe se réalise en défaveur des femmes qui sont toutes dans
les petits métiers et commerce. En second lieu, cette répartition
des enquêtés par profession montre que la Commune de Kimbanseke
est un Espace social hétérogène où coexistent
diverses couches sociales.
Tableau VI : Répartition des
enquêtés selon l'ethnie
Ethnie
|
Effectifs.
|
Pourcent
|
Luba
|
10
|
33.3
|
Manianga
|
10
|
33.3
|
Yansi
|
10
|
33.3
|
Total
|
30
|
100
|
Source :Nosenquêtes
Les données de ce tableau montrent qu'il y a une
répartition égale des enquêtés des trois ethnies.
Tableau VII : Répartition des
enquêtés selon la religion.
Religion
|
Effectifs
|
Pourcent
|
Catholique
|
8
|
26.6
|
Protestante
|
8
|
26.6
|
Kimbanguiste
|
5
|
16.6
|
Eglise de réveil
|
9
|
30
|
Total
|
200
|
100
|
Il s'observe de ce tableau que parmi nos
enquêtés 30% fréquentent des églises de
réveil, 26.6% sont catholiques, 26.6% sont protestants et 16.6% sont
Kimbanguistes. Il s'ensuit que tous nos enquêtés sont des
chrétiens. Parmi eux, les fidèles des églises de
réveil sont plus nombreux que ceux des églises chrétiennes
traditionnelles.
Tableau VIII: Répartition des enquêtés
selon l'ancienneté dans la Commune de Kimbaseke
Ancienneté à Kimbanseke
|
Effectifs
|
Pourcent
|
1 à 5 ans
|
4
|
13.3
|
6 à 10 ans
|
3
|
10
|
11 à 15 ans
|
6
|
20
|
16 à 20 ans
|
6
|
20
|
21 à 25 ans
|
7
|
23.3
|
26 à30 ans
|
8
|
26.6
|
Total
|
30
|
100
|
Les données reprises dans le tableau ci-haut montrent
que la durée du séjour de 26.6% des enquêtés dans la
Commune de Kimbaseke varie entre 26 et 30 ans, entre 21et 25 ans pour 23.3%
des enquêtés, entre 16 et 20 ans pour 20% des
enquêtés, entre 11 et 15 ans pour 20% des enquêtés,
entre 1 et 5 ans pour 1.3% des enquêtés et, enfin, entre 6 et 10
ans pour 10% des enquêtés.
Tableau IX :
Répartition des enquêtés selon l'ancienneté dans le
quartier
actuellement
habité.
Ancienneté dans le quartier
|
Effectifs.
|
Pourcent
|
1 à 5 ans
|
3
|
10
|
6 à 10 ans
|
4
|
13.3
|
11 à 15 ans
|
6
|
20
|
16 à 20 ans
|
7
|
23.3
|
21 à 25 ans
|
8
|
26.6
|
26 à 30 ans
|
6
|
20
|
Total
|
30
|
100
|
Il découle de ce tableau que 26.6% des
enquêtés ont un séjour dans le quartier qu'ils habitent
actuellement variant entre 21 et 25 ans, 23.3% entre 16 et 20 ans, 20% entre 11
et 15 ans, 20% entre 26 et 30ans, 13.3% entre 6 et 10 ans et 10% entre 1 et 5
ans. Dans l'ensemble, la majorité des enquêtés habite
depuis au 10 ans dans le quartier.
II Questions d'opinion : Conception actuelle de la dot
Comment concevez la dot aujourd'hui ?
Tableau X Conception actuelle de la dot
Ethnie
Conception actuelle
|
Luba
Freq. %
|
Manianga
Freq. %
|
Yansi
Freq. %
|
Preuve du mariage
|
20
|
24.4
|
23
|
34.3
|
29
|
32.5
|
Filiation
|
6
|
8.8
|
4
|
5.9
|
10
|
11.2
|
Compensation pour les sacrifices consentis par les parents
|
27
|
39.7
|
22
|
32.8
|
30
|
33.7
|
Honneur à la femme et à sa famille
|
15
|
22.0
|
18
|
26.8
|
20
|
22.4
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Total
|
68
|
100
|
67
|
100
|
89
|
100
|
Source nos enquêtes
Il résulte de ce tableau que la majorité de nos
enquêtés Luba considèrent la dot aujourd'hui comme une
compensation 39.7% de fréquences, d'autres la considèrent comme
la preuve du mariage 24.4% de fréquences, d'autres encore
conçoivent la dot comme l'honneur dû à la femme et à
sa famille22.0% de fréquences, enfin une minorité pensent qu'elle
détermine filiation des enfants dans la famille paternelle 8.8% de
fréquence. Tandis que chez les manianga la majorité des
enquêtés conçoivent la dot comme une preuve de mariage
(34.3 de fréquence), d'autres la considèrent comme la
compensation des sacrifices consentis par les parents pour l'éducation
de leur fille (32.8% de fréquence), d'autres encore trouvent que qu'elle
symbolise l'honneur fait à la femme et à sa famille (26.8% de
fréquence), une minorité considèrent qu'elle assure la
filiation des enfants (5.9% de fréquence). Enfin chez les Yansi la
majorité des enquêtés considèrent la dot comme une
compensation que le jeune homme doit restituer auprès de parents de la
jeune fille (33.7% de fréquence), d'autres considèrent qu'elle
est la preuve du mariage (32.5% de fréquence), d'autres encore estiment
que c'est un honneur à l'endroit de la femme et de sa famille (22.4% de
fréquence) et une minorité la conçoit comme garantissant
la filiation (11.2% de fréquence).
Tableau XI : Représentation actuelle du
caractère obligatoire de la dot
Pourquoi la dot revêt -elle un caractère
obligatoire aujourd'hui ?
Ethnie
Conception actuelle
|
Luba
Fréq. %
|
Manianga
Fréq. %
|
Yansi
Fréq. %
|
Exigence coutumière
|
23
|
38.3
|
25
|
46.2
|
29
|
50
|
Exigence juridique
|
11
|
18.3
|
8
|
14.8
|
13
|
22.4
|
Exigence biblique
|
26
|
43.3
|
21
|
38.8
|
16
|
27.5
|
Total
|
|
100
|
|
100
|
|
100
|
Source nos enquêtes
De ce tableau, il ressort que la majorité des
enquêtés Luba justifie le caractère obligatoire de la dot
par le fondement biblique (43.3% de fréquence), d'autres le justifient
parce que c'est une exigence coutumière (8.3% de fréquence) et
enfin, une minorité pense que la dot est obligatoire parce qu'elle est
une exigence juridique (18.3% de fréquence). Chez Les Manianga, la
majorité des enquêtés pensent que le caractère
obligatoire de la dot aujourd'hui trouve son fondement à la coutume
(46.2% de fréquence), d'autres le lie aux exigences bibliques (38.8% de
fréquence) et une minorité l'attribue aux exigences juridiques
(14.8% de fréquence). Chez les Yansi, la majorité des
enquêtés explique le caractère obligatoire de la dot par
les exigences coutumières (50% de fréquence), d'autres y voient
une exigence biblique ( 27.5% de fréquence) et enfin une minorité
l'explique comme étant une exigence juridique.
Comme nous pouvons le constater, pour la majorité de
nos enquêtés, toutes les ethnies confondues, attribue le
caractère obligatoire de la dot aux exigences coutumières. Mais
une tendance se dessine de plus en plus consistant à considérer
la dot comme un prescrit biblique. Cette tendance s'observe également
dans les trois ethnies sous examen. La conception juridique de la dot n'a pas
encore pénétré la conscience collective. Elle est
néanmoins présente chez quelques intellectuels rencontrés
pendant nos enquêtes.
Tableau XII : Les nouveaux biens dotaux
Quels sont les nouveaux biens qui sont introduits aujourd'hui
dans la composition de la dot ?
Ethnie
Nouveaux biens dotaux
|
Luba
Freq. %
|
Manianga
Freq. %
|
Yansi
Freq. %
|
Appareils électroménagers
|
|
|
|
|
|
|
Les cassiers de bière
|
|
|
|
|
|
|
Argent
|
|
|
|
|
|
|
Vin, Bière, Wisky
|
|
|
|
|
|
|
Total
|
10
|
100
|
10
|
100
|
10
|
100
|
Source nos enquêtes
III.2. Questions relatives à la pratique actuelle de
la dot
Tableau XIII : La pratique de la pré-dot
Exigez- vous la pré-dot?
Ethnie
Pratique de la pré-dot
|
Luba
Eff. %
|
Manianga
Eff. %
|
Yansi
Eff. %
|
Oui
|
6
|
10
|
7
|
70
|
8
|
80
|
Non
|
4
|
90
|
30
|
30
|
2
|
20
|
Total
|
10
|
100
|
10
|
100
|
10
|
100
|
Source nos enquêtes
Il ressort de ce tableau que 60% des enquêtés luba
affirment pratiquer aujourd'hui la pré-dot, 40% l'infirment, 70% de
Manianga sont d'avis que la pré-dot est pratiquée aujourd'hui
dans leur tribu alors que 30% sont d'avis contraire, chez les Yansi 80%
affirment qu'ils pratiquent la pré-dot tandis que 20% le nient.
Il se dégage de ces données reprises dans le
tableau ci-haut la tendance à la généralisation de la
pratique de la pré-dot dans toutes les communautés soumises
à l'examen.
Tableau XIV La pratique de la facture
Demandez-vous la facture pour constituer la dot ?
Ethnie
Pratique de la facture
|
Luba
Eff. %
|
Manianga
Eff. %
|
Yansi
Eff. %
|
OUI
|
3
|
30
|
8
|
80
|
8
|
80
|
Non
|
7
|
70
|
2
|
20
|
2
|
20
|
Total
|
10
|
100
|
10
|
100
|
10
|
100
|
Source nos enquêtes
Il ressort de ce tableau que 70% des enquêtés luba
déclarent ne pas pratiquer la facture alors que 30% affirment la
pratiquer aujourd'hui, 80% des Manianga la pratiquent alors que 20% nient la
pratiquer ; 80% des Yansi la pratiquent et 20% s'y opposent.
Dans la lecture de ces données, il se dégage que
la pratique de la facture de la dot s'implante dans toutes les
communautés faisant objet de notre étude.
Tableau XV : Modalité de versement de la dot
Ethnie
Modalités de versement de la dot
|
Luba
Eff. %
|
Manianga
Eff. %
|
Yansi
Eff. %
|
En totalité absolument
|
1
|
10
|
2
|
20
|
3
|
30
|
En totalité ou en partie
|
5
|
50
|
6
|
60
|
3
|
30
|
Progressivement
|
2
|
20
|
1
|
10
|
2
|
20
|
Ça dépend
|
2
|
20
|
1
|
10
|
2
|
20
|
Total
|
10
|
100
|
10
|
100
|
10
|
100
|
Source nos enquêtes
Les résultats du tableau ci-dessus indiquent que 50% des
enquêtés luba affirment que la dot aujourd'hui est versé
soit en partie soit en totalité ; 20% déclarent qu'elle est
versée progressivement, 20% autres nuancent leur réponses alors
que 10% déclarent que a dette est absolument versée une seule
fois en totalité. Chez les Manianga, 60% affirment qu'elle peut
être versée en totalité ou en partie, 20% avancent qu'elle
doit être absolument versée en totalité, 10% sont d'avis
qu'elle peut être versée progressivement et 10% nuancent leurs
réponses. Chez les Yansi, 30% déclarent qu'elle doit être
absolument versée en totalité alors 30% disent qu'elle peut
être versée en partie ou en totalité, 20% disent qu'elle
peut être versée progressivement et 20% autres nuancent leurs
réponses.
Section 3 : Interprétation des
résultats
La présente section est consacrée à
l'interprétation des résultats obtenus de l'analyse des
données récoltées sur le terrain. Il s'agit d'une
tentative de restitution des faits dans le contexte de leur production afin
d'accéder à leur intelligence, mieux de les saisir dans la
perspective des acteurs que nous avons interviewés au cours de nos
investigations. Nous allons dégager les évolutions qui
s'observent dans la Commune de Kimbaseke en ce qui concerne la conception et
la pratique de la dot, en recherchant les facteurs, les conditions et les
agents à l'origine de ces mutations socio-culturelles. Bien entendu, un
regard sera également porté sur les éléments de la
situation qui ont résisté au changement.
1. La dynamique de la conception de la dot en milieu
socio-culturel Luba, Manianga et Yansi de la Commune de Kimbaseke.
De manière générale et tel qu'il se
dégage des données de nos enquêtes, la conception
traditionnelle de la dot dans les trois milieux socio-culturels
enquêtés n'est pas antinomique. Les Luba, les Manianga et les
Yansi ont la même conception de la dot. Tous considèrent que la
dot est une preuve et gage de stabilité du mariage. En effet, la
tradition dans ces trois milieux socio-culurels requiert la dot comme symbole
qui certifie l'existence du mariage. Son acceptation par les parents de la
future épouse témoigne leur consentement au mariage et leur
volonté de s'allier à la famille du prétendant. Car, comme
partout en Afrique, le mariage n'est pas seulement l'affaire des deux
époux, mais aussi de deux familles respectives.
En outre, la dot, dans ces trois milieux socio-culturels
traditionnels, offre la garantie de stabilité du mariage. Elle inscrit,
du fait de son versement, le mariage dans la durée et alourdit le
processus de divorce, protégeant ainsi la famille (la cellule de base de
la communauté) contre les aléas de la vie conjugale. Comme nous
pouvons le constater, cette garantie de stabilité qu'offre la dot
résulte de son caractère contraignant et prohibitif pour
l'épouse dans la mesure où non seulement elle limite l'initiative
unilatérale de la femme en matière de divorce, mais aussi elle
proscrit pour elle toute possibilité de commerce sexuel avec un autre
homme, cause irrévocable de la rupture du mariage dans les trois
ethnies.
En dépit de cette similitude dans la conception de la
dot chez les Luba, les Manianga et les Yansi, il sied de remarquer
néanmoins qu'à la différence des deux autres ethnies
matrilinéaires, les Luba considèrent que la dot assure la
filiation paternelle de la progéniture. C'est du fait de la dot que les
enfants nés du mariage appartiennent au clan de leur père.
La coexistence de ces trois ethnies en milieu urbain,
l'influence du droit moderne et la prolifération des églises
néo-pentecôtistes, appelées communément
églises de réveil, ont entraîné une évolution
notable dans la conception de la dot qui se répercute sur sa pratique
comme nous le verrons dans le point suivant. En effet, ainsi que l'ont
montré les données de nos investigations, la tendance actuelle
dans les trois milieux socio-culturels de la Commune de Kimbaseke consiste
à considérer la dot comme une obligation biblique et juridique,
une compensation des efforts des parents et un honneur fait à la femme
et à sa famille.
1. Obligation biblique et juridique
Une frange importante de nos enquêtés ont
affirmé qu'ils perçoivent aujourd'hui la dot comme une obligation
biblique. Ils avancent que la Bible recommande dans exode chapitre
.....Verset....que le mariage soit honoré de tous.
Par ailleurs, une autre frange des enquêtés de
toutes les ethnies ont estimé, tel que le révèlent les
données reprises dans le tableau X, que le caractère obligatoire
de la dot résulte des règles de droit. Ce sont les dispositions
légales reprises dans le code de la famille qui rendent la dot
obligatoire. Pour cette catégorie des enquêtés, dans la
société moderne du type juridico-légal, tout est
réglementé par la loi. Ainsi, l'obligation de la dot ne saurait
se justifier par le seul fait de la coutume ni de la religion, elle trouve son
fondement dans les lois qui régissent la RDC.
A ce niveau, nous pouvons voir dans ces résultats,
l'influence du droit écrit dans certains milieux, surtout de ceux qui
sont instruits, qui pensent même que la dot doit cesser d'être
considérée comme une pratique coutumière, mais
relevée au rang de coutumes juridiques. D'autres vont plus loin en
estimant que l'Etat en légalisant la dot, légalise par
conséquent la domination de la femme par son mari et doit en
conséquence prendre des lois qui l'abolissent.
2. La dot comme une compensation des efforts des parents
Une autre idée force qui ressort des données de
nos enquêtes est qu'aujourd'hui prévaut la conception
d'après laquelle la dot est une compensation que le futur époux
effectue au bénéfice des sacrifices consentis par les parents
pour leur fille. Cette conception se trouve partagée par une bonne
partie de nos enquêtés, surtout chez les enquêtés
adultes qui ont déjà marié une fille. Ils avancent que le
versement de la dot est un acte par lequel le futur époux
reconnaît l'effort fourni par les parents pour « faire
grandir » leur fille.
Constatons ici que l'idée de la compensation n'est pas
nouvelle. Nous la retrouvons dans la conception traditionnelle africaine de la
dot. En Afrique traditionnelle, l'on considérait que la dot permettait
à la famille ou au clan de combler le vide crée par le mariage de
la jeune fille en épousant une femme à un autre jeune nubile de
la famille ou du clan. C'est ainsi que dans cette Afrique traditionnelle, la
dot n'était pas directement consommée par le(s)
bénéficiaire(s), celui-ci la transmettait à celui qui
devait se marier. Aussi, la dot était-elle versée en signe de
droit d'acquisition par le mari de la richesse que la femme allait produire
dans son clan ou dans sa famille, entendez par là les enfants et autres
biens (produits agricoles, de la chasse, de la pêche, etc.)
Ce qui est nouveau aujourd'hui c'est que les parents
voudraient, par le versement de la dot, se faire
« rembourser » les frais qu'ils auraient investis,
notamment pour la scolarité de la fille, les différents soins de
santé lui apportés depuis son jeune âge, son habillement,
etc. Cela transparaît dans la pratique surtout lorsque la fille qui est
mariée a terminé les études secondaires,
supérieures ou universitaires. Les parents montent les enchères
en exigeant des montants et biens exorbitants à titre de dot. C'est
cette conception qui est à la base du dérapage observé
dans la fixation de la dot par certains parents. Cette conception de la dot
qui tient à l'urbanisation, à la scolarisation des filles et
à la paupérisation de la plupart des familles dans ville de
Kinshasa ne considère pas le fait que ces
« sacrifices » consentis par les parents relèvent
bel et bien de leurs devoirs. Il ne s'agit pas des avantages ou des
privilèges accordés à la fille, mais plutôt de ses
droits inaliénables dont elle doit jouir dans la société
moderne.
3. Honneur fait à la femme et à sa famille
Enfin, la dernière conception en émergence dans
les milieux de nos investigations est que la dot est un honneur que le futur
époux fait à la future épouse et/ou à sa famille.
Nous la trouvons déjà en filigrane en milieu socio-culturel
traditionnel Yansi où l'homme pour montrer qu'il aime bien sa femme doit
verser une dot d'une grande valeur. Elle s'étend aujourd'hui à
toutes les communautés investiguées dans le cadre de ce travail.
Cette conception est à l'origine de l'exhibitionnisme
que l'on remarque à ce jour. Pour témoigner leur puissance
matérielle, certains prétendants ne s'empêchent d'attirer
l'attention et l'admiration des voisins en s'amenant dans la belle famille
avec des biens de luxe qu'ils exhibent tout au long de leur parcours. (ils
louent les véhiculent, remplissent les biens dotaux et chantent à
la gloire du nouveau marié une fois arrivés dans le quartier ou
avenue de future épouse).
En somme, nous pouvons retenir que la conception de la dot
chez les Luba, Manianga et Yansi, en dépit d'une certaine
résistance de la conception traditionnelle, connaît une
évolution qui se répercute dans la pratique de la dot comme nous
verrons dans le point suivant.
2. Dynamique de la pratique de la dot chez les Luba, Manianga
et Yansi de la Commune de Kimbaseke.
Comment se pratique la dot aujourd'hui dans la ville de
Kinshasa en général, et dans la Commune de Kimbaseke en
particulier ? C'est bien là la problématique qui se pose
à tous les jeunes Kinois qui voudraient contracter un mariage de nos
jours, surtout lorsqu'il s'agit d'un mariage interethnique. Faut-il recourir au
mariage civil, religieux, ou traditionnel ? Si l'éventail est si large,
le choix n'est en revanche pas toujours aisé, pour une jeunesse perdue
dans cette ville pluriculturel. La plupart des jeunes adoptent les usages
prévalant dans le contexte social où ils vivent. Mais par respect
des traditions familiales, ou par simple besoin de retrouver leurs
repères, ou leur identité propre, ils sont conduits à
s'engager sur le parcours sinueux du mariage coutumier.
C'est pourquoi, en dépit de la convergence dans la
pratique de la dot constater lors de nos enquêtes, il sied d'observer que
nombre d'entre ces pratiques sont restées marquées par les us et
coutumes prévalant en milieu traditionnel. Ce qui permet à
chaque groupe ethnique de demeurer elle-même, de garder son
identité, de développer sa conscience de soi et de l'autre dans
un environnement qui tend de plus en plus à s'unifier.
Dans cette entreprise de conservation de son identité,
Les Luba, par exemple, tiennent à leur « mbuji wa
nyima » (littéralement traduite par la
« chèvre du dot », allusion faite à la
virginité de la future épouse) dans la constitution des biens
dotaux. Cette chèvre destinée à la maman de la fille
symbolise l'idéal luba de la prohibition du commerce sexuel
pré-conjugal pour la fille. Son octroi à la mère est une
sorte de gratitude lui témoignée pour la bonne éducation
assurée à sa fille.
Cette pratique persistante en milieu luba est néanmoins
soumise à la pression de la dynamique insufflée par
l'urbanisation. Quand bien même la « mbuji wa nyima »
soit toujours exigée comme bien dotal, on ne tient plus compte
aujourd'hui de la virginité de la future épouse. Dans le contexte
urbain actuel de Kinshasa, la virginité de la future épouse ne
constitue plus une condition de fond dans la conclusion du mariage. Elle
paraît même minimisée.
D'autres pratiques traditionnelles ont connu la même
évolution sinon ont disparu notamment en ce qui concerne la suspension
de versement de la dot pour une fille qui tombe enceinte avant le mariage.
Alors que la tradition veut que pour une telle fille que la dot soit
versée après la maternité, à ce jour les parents
perçoivent la dot même s'ils sont informés de l'état
de grossesse de leur fille. En outre, la remise d'un bouc au gendre par les
parents de la mariée après le versement de la dot, comme chez les
Yansi, a disparu dans la pratique de la dot en milieu socio-culturel luba.
Certains biens dotaux traditionnels sont remplacés étant
donné le contexte urbain. C'est ainsi qu'en lieu et place du fusil, les
luba demandent aujourd'hui un appareil électroménager par exemple
une radio, un réchaud ou une télévision.
Les Manianga, pour leur part, marquent leur identité
culturelle par la pratique de « Kinzonzi » lors du
versement de la dot et cette dernière, contrairement aux Luba et Yansi,
est destinée à l'oncle maternel de la future épouse.
Chez les Yansi, d'après nos enquêtés, la
remise du bouc au gendre par ses beaux-parents après versement de la dot
est toujours de mise. Aussi, le gendre est-il appelé à verser la
dot aussi bien à la famille paternelle que maternelle de la future
épouse. Faute de quoi, la partie lésée,
c'est-à-dire, celle qui n'a pas bénéficier de sa part de
la dot, considère que le mariage n'a pas eu lieu. Ces pratiques
sauvegardent et maintiennent l'identité Yansi dans cet archipel culturel
qu'est devenue la Commune de Kimbeseke.
Ces mutations dans les pratiques de la dot dans les
communautés Luba, Manianga et Yansi habitant la Commune de Kimbaseke
tendent à instituer certaines convergences. Nous voyons, par exemple, se
généraliser la pratique de la pré-dot, de
l'établissement de la liste de biens dotaux, communément
appelée facture et la dollarisation de la partie numéraire de la
dot.
1. La pré-dot
Les données des enquêtes démontrent que la
pratique de la pré-dot (Kanga lopango en lingala) n'est pas connue dans
les milieux traditionnels luba et Manianga. Elle est l'apanage des Yansi qui
la pratiquent depuis des lustres. Elle s'est répandue dans toutes les
communautés que nous avons investiguées, comme le
démontrent les données reprises dans le tableau XIII.
Elle consiste en la remise par le fiancé des quelques
présents notamment d'une somme d'argent variant entre 50 et 100 usd,
d'un certain nombre des cassiers de bière en guise d'officialisation des
fiançailles. Le versement de la pré-dot constitue un pas
décisif dans le processus de conclusion du mariage. Il représente
le ferme engagement du futur mari à faire aboutir les fiançailles
au mariage, ce qui rassure la fille et sa famille, au même moment il met
fin à toutes les sollicitations que pourrait faire objet la fille de
la part des autres prétendants. Il sert en quelque sorte de haie que
la fille ne pourrait franchir ainsi que le témoigne sa
dénomination en lingala (kanga lopango, c'est-à-dire
clôture).
2. La « facture »
Traditionnellement, selon les informations recueillies
pendant nos enquêtes, la pratique de la « facture »
est usage spécifique aux Manianga, non connue de deux autres groupes
ethniques étudiés dans ce travail.
La dénomination on ne peut plus péjorative de
cette pratique (facture) fait penser à un acte de vente. En
réalité, cette pratique consiste pour la belle famille à
établir la liste des biens dotaux et de la somme à verser
qu'elle communique au fiancé ou à sa famille. Cette liste est
transmise soit à l'occasion de la pré-dot, soit par le biais de
la fiancée, soit encore à l'occasion séance
organisée à cet effet.
La réception de cette liste déclenche les
tractations entre les deux familles qui entrent en pourparlers (Kinzonzi) pour
finalement arrêter le montant de la dot à verser par le futur
époux et/ou sa famille.
La généralisation de cette pratique dans la
Commune de Kimbaseke nous semble procéder de l'ignorance qu'ont la
plupart des prétendants des biens dotaux exigés dans la tradition
de leurs fiancées. En demandant la « facture », le
futur époux voudrait tout simplement connaître les biens
constitutifs de la dot dans la tradition de sa fiancée.
3. La dollarisation de la dot
Les résultats des enquêtes attestent la
généralisation du dollar américain comme signe
monétaire en cours dans le marché matrimonial non seulement dans
la Commune de Kimbaseke, mais aussi dans toute la ville de Kinshasa. Toutes
les ethnies étudiées dans ce travail fixent le montant de la dot
en dollar américain, même si dans certaines circonstances elle
est versée dans son équivalence en Franc congolais. Cette
pratique est une conséquence de la dollarisation de l'économie
congolaise depuis le début de la transition démocratique en 1990
à la suite l'instabilité du Zaïre monnaie d'abord et du
Franc congolais ensuite. Et selon nos enquêtés, le recours au
dollar permet de maintenir la valeur de la dot.
Même si toutes les trois ethnies ne fixent pas la
même hauteur de la dot remarquons qu'elle varie entre 250 et 1000 usd.
Comme nous pouvons le constater, le montant de la dot, de plus en plus
exorbitant, devient hors de portée des prétendants. Il serait bon
de s'interroger sur l'origine d'un tel dérapage :
- le coût de la vie ? - la baisse, ou la disparition
du pouvoir d'achat ? - la cupidité, et le manque de scrupules de
certains parents ?
La dot offre aujourd'hui parait une occasion
inespérée à certains chefs de famille peu scrupuleux et
cupides, d'en faire un véritable fonds de commerce. La tentation est
certes grande dans un contexte de crise socioéconomique
sévère.
Conclusion
Ce chapitre a été centré sur la
présentation et à l'interprétation des résultats
de nos enquêtes. Il nous est revenu également, à travers ce
chapitre, de décrire le cheminement de nos investigations car pensons
nous les résultats d'une recherche valent ce que valent les instruments
utilisés.
Au vu de ces résultats, nous pouvons affirmer à
ce jour que la conception et la pratique de la dot dans les milieux
socio-culturels Luba, Manianga et Yansi sont en train de subir des mutations
qu'imposent l'acculturation résultant de la vie urbaine, la crise
socio-économique, la prolifération des églises de
réveil et le droit moderne.
Conclusion Générale
La présente étude qui touche à son terme
a eu comme centre de préoccupation l'analyse de l'évolution de la
conception et de la pratique de la dot dans les communautés Luba,
Manianga et Yansi de la Commune de Kimbaseke. Cette préoccupation a
été traduite en terme d'un questionnement :
nous nous sommes demandée si la conception et de la pratique de la
dot dans les trois ethnies retenues pour cette étude (Luba, Manianga et
Yansi) qui coexistent dans la Commune de Kimbaseke depuis des décennies,
induisent des convergences ou les divergences. En outre, quelles sont les
conditions, les facteurs et les agents à la base de cette convergence ou
divergence ?
A la lumière des faits observés dans la Commune
de Kimbanseke, nous avons avancé l'hypothèse selon laquelle en
dépit de la diversité culturelle et de quelques
particularités qui spécifient chacune des trois ethnies soumises
à l'observation, il y aurait à ce jour une convergence dans la
conception et la pratique de la dot. La situation socio-économique,
l'urbanisation et le contact culturel qu'elle favorise seraient à la
base de cette convergence.
Pour vérifier cette hypothèse, nous avons
recouru à la méthode dynamiste. A la suite des
présupposés de cette méthode, nous avons cerné
à travers ce travail l'évolution de la conception et de la
pratique de la dot dans la ville de Kinshasa en nous appuyant sur les
expériences des Luba, Manianga et Yansi habitant la Commune de
Kimbaseke. Cette évolution orientée dans le sens de convergence
ou de divergence en dégageant aussi bien les facteurs, les conditions et
les agents qui ont oeuvré dans la perspective de la convergence que ceux
qui s'y opposent.
Au service de cette méthode, nous avons mis à
contribution les techniques ci- après : la technique documentaire,
du questionnaire et de l'échantillonnage.
L'analyse des données récoltées au cours
de nos investigations a confirmé notre hypothèse. En effet, nous
avons trouvé que les trois ethnies retenues pour cette étude
conservent encore quelques pratiques de la dot de leurs terroirs respectifs. Il
s'agit notamment de la « mbuji wa nyima » chez les Baluba,
de « kinzonzi » chez les Manianga et de la remise du bouc
au gendre chez les Yansi. Ce « conservatisme » tient
à la conscience d'identité et d'altérité que ces
communautés ont développée suite à leur coexistence
dans un même environnement social.
Avec la dynamique actuelle, il reste à résoudre
l'épineuse équation de la conciliation entre tradition et «
modernité ». Faut-il ranger ces usages jugés d'un certain
âge, au placard des reliques de notre prestigieux patrimoine, comme le
souhaitent les adeptes des églises de réveil ou les jeunes ?
Cette question met en perspective les mutations qui caractérisent la
société congolaise actuelle, dont l'issue se veut multiple et non
téléologique.
En dépit de ce conservatisme, certains aspects de la
conception et de la pratique de la dot dans les trois communautés ont
été soumis à la pression de l'environnement
socio-culturel généré par l'urbanisation ou la
modernité. C'est ainsi que chez les Baluba, par exemple, la
« mbuji wa nyima » fait toujours partie des biens dotaux
quand bien même la future épouse ait déjà connu des
hommes avant le mariage.
En outre, nous avons que l'évolution enregistrée
dans ces trois milieux socio-culturels a instauré la convergence dans
la conception et la pratique de la dot. Raison pour laquelle nous constatons
qu'à ce jour la dot est perçue comme une obligation biblique et
juridique que un simple usage coutumier. Elle est en outre
considérée comme une compensation et un honneur fait à la
famille de l'épouse.
En plus certaines pratiques se généralisent dans
toutes les ethnies, notamment la pré-dot, l'établissement de la
liste des biens dotaux malencontreusement appelée
« facture » et la dollarisation de la dot avec toutes les
conséquences qui en résultent.
Toute cette évolution fonde notre espoir de la
fondation d'une nation surtout avec le mariage interethnique qui facilite le
brassage culturel dont le Congo a besoin aujourd'hui pour conjurer le
démon de division qui hante et déchire la RDC. C'est à ce
prix que le Congo résistera comme nation dans le concert des nations.
Bibliographie
I. Ouvrages
1. Bertrand M., Le marché du mariage et de la
famille, PUF, Paris, 1988.
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Noire, CVA, Paris, 1973.
3. Durkheim E., Règles de la méthode
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perspectives, M.E .S, Kinshasa, 2003.
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II. Article
1. LESBAUM, N. et alii, « Professeur mène
l'enquête », in Rencontre
pédagogique, n°16, INRP, Paris, 1987.
III. Thèses, Mémoires, TFC et Cours
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connaissance, notes de cours destinées aux
étudiants en L2 sociologie, Unikin , 2005-2006
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TFCen sociologie, FSSAP, Unikin, 2003.
3. Mafusama M., Phénomène d'union
libre et scolarisation des enfants, TFC en sociologie, FSSAP,
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* 2 G.Sacha , Les
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* 3 M. Bertrand, Le
marché du mariage et de la famille, PUF, Paris, 1988.
* 4 M. Mafusama,
Phénomène d'union libre et scolarisation des
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* 5 Ludjebunga, La
« bureaugamie » dans la Commune de Limete,
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* 6 W. A. Umezinwa,
La religion dans la littérature africaine,
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* 7 S. Shomba K. et G. Kuyunsa
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RDC, PUC, Kinshasa, 2000, p......
* 8 R. Pinto, et M. Grawitz M.,
Méthodes des recherches en sciences sociales,
Dalloz, Paris, 194, p.318.
* 9 Shomba K. et Tshon'Olela G.,
Méthodologie de la recherche scientifique. Etapes,
contraintes et perspectives, M.E .S, Kinshasa, 2003, p.1.
* 10 Idem, p.53
* 11 M. Kalele ka Bila,
Sociologie de la connaissance, notes de cours
destinées aux étudiants en L2 sociologie, Unikin ,
2005-2006
* 12 S. Shomba K. et G.
Tshun'Olela., op-cit, p.92.
* 13 E. Durkheim,
Règles de la méthode sociologique, PUF,
Paris, 1973, p.22
* 14 Nkwanzaka I.,
Système de parenté, cours inédit
L1 Anthropologie, FSSAP, Unikin, 1998-1999
* 15 S. Shomba K. et G. Kuyunsa
B., Dynamique sociale et sous-développement en
République Démocratique du Congo, PUC, Kinshasa,
2000, p.77
* 16 J. Bineti,
Mariage en Afrique Noire, CVA, Paris, 1973, p.11
* 17 Frederic,
Précis de l'éducation sexuelle
laïque, Tome 1, Maloines, Paris, 1977, p.493.
* 18 P. Georges cité par
E. Tshishimbi K., Une ville et ses élites. Kananga
1960-1996, Thèse de doctorat en sociologie, Unikin, 1999,
p.34
* 19 LESBAUM, N. et
alii, « Professeur mène l'enquête », in
Rencontre pédagogique, n°16, INRP, Paris,
1987.
* 20 KUYUNSA, B. et SHOMBA, K.,
Initiation aux méthodes de recherche en sciences
sociales, PUK, Kinshasa, 1995, p.76.
* 21 GRAWITZ, M.,
Méthodes des sciences sociales,
11ème éd. Dalloz, Paris, 2001, p.542.
* 22 Se rapporter à ce
sujet à SHOMBA K. et TSHUND'OLELA, Méthodologie de
la recherche scientifique. Etapes, contraintes et perspectives,
Kinshasa, M.E.S., 2004.
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