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La terminologie du sujet en français

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par Lysette Nanda
Université Yaoundé I - Maitrise de langue française 2006
  

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UNIVERSITÉ DE YAOUNDÉ I

DÉPARTEMENT DE FRANÇAIS

FACULTÉ DES ARTS,

LETTRES ET SCIENCES

HUMAINES

LA TERMINOLOGIE DU SUJET EN FRANÇAIS

Mémoire pour l'obtention du Diplôme de Maîtrise en

Lettres Modernes Françaises : Option Langue Française

Présenté par

NANDA Lysette

Licenciée ès Lettres Modernes Françaises
Sous la Direction de et la Supervision du
Ch. ONGUENE ESSONO Pr. L.M. ONGUENE ESSONO

Chargée de Cours Maître de Conférences

Année universitaire 2005/2006

DÉDICACE

A ma mère NJIYANG Alice et à ses petit-fils

REMERCIEMENTS

Ce travail n'a été rendu possible que grâce au concours de certaines bonnes volontés à qui nous voulons exprimer notre gratitude.

Nos remerciements vont d'abord à notre Directeur, Madame Christine ONGUENE ESSONO qui a accepté de guider nos premiers pas sur le chemin de la recherche.

Nous exprimons notre reconnaissance à Monsieur Louis Martin ONGUENE ESSONO pour les multiples séminaires. Séminaires qui ont contribué, à coup sûr, à produire en nous le goût du travail bien fait et la persévérance dans l'entreprise fastidieuse qu'est la recherche.

Nous ne saurions oublier le Groupe d'Etudiants et Chercheurs en Grammaire (GRECG) dont le soutien intellectuel a permis l'aboutissement heureux de ce travail.

A Mesdames NGUEUMBA MBIDA Nathalie et ASSAMA NGOTSOK Marie, pour leur appui intellectuel et moral, nous disons tout simplement merci.

Un merci particulier est adressé à madame MBOUNGUE Anne, qui a connu des nuits d'insomnies pour rendre ce travail sous sa forme actuelle, à Monsieur MELINGUI Ambroise pour ses encouragements, son soutien moral et matériel, à tous ceux qui de près ou de loin ont contribué à la réalisation de ce travail.

INTRODUCTION GÉNÉRALE

Envisager aujourd'hui une recherche sur la fonction sujet peut paraître tout d'abord présomptueux. A priori, ce constituant a déjà été suffisamment visité par les grammairiens. Mais comment passer outre une notion aussi fondamentale de l'énoncé ?

En prenant le risque de suivre les sentiers battus par les auteurs de renom, nous nous sommes rendu compte que la notion de sujet comporte des nuances qui traduisent les différentes perceptions que les chercheurs ont d'elle. Depuis l'Antiquité, cette fonction est définie comme l'élément de l'énoncé sur lequel on porte un jugement. Le sujet répond de ce fait à la question de qui ou de quoi parle-t-on ? La grammaire classique ajoute à cette considération une autre qui y voit la personne ou la chose qui fait l'action exprimée par le verbe de la phrase. Le sujet est aussi le terme qui vient en réponse aux questions qui est-ce qui ... ? Qu'est-ce qui ... ? posées après le verbe.

Sur un tout autre plan, le sujet est perçu comme le groupe nominal qui impose au verbe ses marques morphologiques de genre et de nombre. Toutes ces analyses font que la fonction sujet reçoive plusieurs appellations. Et c'est cette problématique de la terminologie du sujet qui a retenu notre attention dans cette recherche.

1 - PROBLÉMATIQUE

Les appellations du sujet nous replongent très souvent dans nos leçons de grammaire scolaire. C'est le cas des dénominations telles que sujet réel, sujet apparent. D'autres terminologies par contre sont si complexes qu'elles se prêtent à des analyses purement universitaires. Nous le voyons à travers SN1, prime actant, N0. La tendance à l'extension des désignations du sujet dénote, sans aucun doute, des divergences dans la perception de cette fonction. Il est donc évident que les points de vue sur le concept sujet évoluent. Ils évoluent d'autant que les analyses s'affirment et deviennent rigoureuses. A propos, Dubois et alii (1973 :486) affirment que la terminologie d'une science constitue un ensemble de termes définis rigoureusement par lesquels elle (la science) désigne les notions qui lui sont utiles.

La richesse des désignations que nous relevons en grammaire va donc à l'encontre du principe d'univocité souligné par Dubois.

La grammaire étant une discipline scientifique, quels sont donc les critères définitoires des terminologies grammaticales du sujet?

Cette question est le noeud de notre travail dans lequel nous nous proposons d'abord de faire l'inventaire des appellations du sujet, ensuite de chercher à établir un lien entre les désignations de ce constituant et son contenu, de présenter les motivations des terminologies et enfin, de dégager s'il y a lieu les inconvénients liés à la multiplicité de dénominations.

Etant entendu que tout terme est chargé de significations liées à son origine, la diversité des définitions données à un même mot traduit les nuances de perception que les utilisateurs ont eues de lui tout au long de son évolution. Au-delà de cette problématique, quelles sont les motivations qui nous ont poussé à choisir ce sujet ?

2 - MOTIVATIONS

Notre préoccupation est de rechercher les contours de l'éventail des terminologies du sujet et de dégager les facteurs de leur multiplication car le sens et la syntaxe qui influencent la définition du sujet seraient à l'origine de ses appellations. Et les grammaires théoriques qui servent de source aux manuels scolaires rejettent la désignation primitive sujet utilisée par ces grammaires scolaires.

En effet, la grammaire traditionnelle par la voix de Grevisse (1993 : 305), de Chevalier et alii (1989 :176) perçoivent le sujet tel que le définissent Arrivée et alii (1997 :654). Ceux-ci reconnaissent que le sujet est l'être ou la chose qui fait ou subit l'action ou qui est dans l'état exprimé par le verbe.

Mais, Riegel et alii (1994 :130) de même que Gardes-Tamine (1998 : 122-124) trouvent la définition des traditionalistes trop restrictive. En effet, celui qui fait l'action ne saurait être nommé sujet, estiment ces auteurs. Le verbe assigne à son premier actant un rôle sémantique. La fonction sujet s'ouvre alors à diverses interprétations. Elle peut par conséquent prendre plusieurs teintes selon le sens que lui impose son verbe.

Sous un autre angle, Martinet (1979 : 153-158) et Leeman (1990 :77-79) proposent plusieurs critères identificatoires du même concept ; ils reconnaissent que le sujet est le groupe nominal qui s'accorde avec le verbe. Il représente donc le principal terme de la phrase qui modifie le verbe sur le plan morphologique ; il est le terme préposé au verbe et appartient à la catégorie du substantif. Pour Galichet (1971 : 116), si le mot qui énonce cette fonction était subordonné au verbe, il serait possible de le nommer sujet. Or, ce prétendu sujet subordonne le verbe en lui imposant ses caractéristiques morphosyntaxiques. L'auteur propose donc que ce terme soit désigné par régent.

Toutes ces études montrent l'évidence de la problématique que pose le constituant sujet et plus précisément sa terminologie.

D'un ouvrage à un autre, la fonction sujet est abordée dans ses aspects généraux. C'est à croire que les grammairiens se préoccupent surtout de chercher les critères opératoires capables de favoriser une identification du sujet dans une phrase. Ces critères sont ceux qui doivent lever l'équivoque ou le malaise que l'on éprouve à définir cette notion.

La terminologie du sujet qui nous intéresse n'a pas, à l'état actuel de nos recherches, fait l'objet d'une étude. De tous les travaux réalisés à l'université de Yaoundé I concernant la fonction sujet sur lesquels ont porté nos investigations, nous n'avons pas trouvé un seul qui se soit appesanti sur la désignation de ce constituant de phrase. Cependant, il est à signaler les travaux d'Onguéné Essono Ch. (2001 :135-136) sur l'incommunication en discours pédagogique : le cas de l'enseignement de la fonction sujet. L'auteur axe son analyse sur les méthodes d'apprentissage de la notion. L'intérêt de ce travail est donc de lever un pan de voile sur la pléthore des terminologies du constituant sujet. A ce propos, l'auteur déclare

De nombreuses définitions du sujet émaillent ouvrages de grammaire et manuels scolaires. Cet éparpillement est la résultante inévitable d'une divergence d'approches consécutives à une diversification des points de vue par lesquels la notion est appréhendée. On distingue : le sujet psychologique qui se présente comme le point de départ de la pensée, le sujet logique assimilable [...] au thème ou au topic, le sujet sémantique qui fait ou subit l'action [...], le sujet grammatical, élément qui précède le verbe.

La multiplicité d'appellations est une des conséquences des divergences de vues relevées au niveau de la définition du concept sujet.

Dans ce travail, nous nous fixons comme objectifs, sur le plan épistémologique, d'identifier les critères qui influencent les terminologies du sujet, de chercher les motivations de ces différentes désignations et enfin d'amorcer l'élaboration d'un répertoire des appellations de ladite notion.

Par ce travail, nous comptons apporter notre modeste contribution à la connaissance des dénominations du sujet, un aspect du sujet à ce jour occulté.

3 - CADRE THÉORIQUE

Notre étude, faut-il le souligner, porte sur les différentes dénominations qu'utilisent les grammairiens pour désigner le constituant sujet. Etant donné que nous analyserons toutes les appellations du sujet, appellations qui recouvrent d'ailleurs plusieurs théories grammaticales, nos analyses iront de ce fait de la grammaire Antique aux différentes approches modernes de la notion en passant par la grammaire classique. Il ne nous semble donc pas opportun de nous confiner dans une théorie de référence, aucune d'entre elles ne pouvant d'ailleurs couvrir la totalité de notre étude. Néanmoins, pour analyser quelques valeurs sémantiques du sujet, nous nous servirons des travaux de la grammaire casuelle d'Anderson et de la critique que l'auteur fait de l'approche de Charles Fillmore.

Il convient cependant de relever que l'auteur fait une étude sémantique des verbes. Bien que la grammaire des cas ne se préoccupe pas de manière spécifique du constituant sujet, elle nous permet de justifier certaines nuances de la notion que nous avons dégagées au cours de nos lectures.

4 - MÉTHODOLOGIE

Dans la conduite de ce travail, nous avons, sur le plan pratique, exploité plusieurs ouvrages de grammaire. De ces lectures, nous avons tiré dix dénominations du sujet, plusieurs valeurs et autres supports morphologiques dudit constituant. Les appellations identifiées ont fait l'objet d'un dépouillement qui a donné lieu à un classement par tendance. La première relève de la sémantique et la deuxième concerne la syntaxe.

Pour soutenir l'analyse de ces désignations, nous avons constitué un corpus de 1500 occurrences tirées de quelques numéros de Cameroon Tribune de la période d'octobre à décembre 2003 ; les rubriques relatives à l'économie et à la société ont tout particulièrement retenu notre attention, en raison de la richesse et de la diversité des thèmes qui y sont abordés. Par ailleurs, ces occurrences ont été classées suivant les types des dénominations du sujet rencontrées.

5 - PLAN DU TRAVAIL

Notre travail a un plan en trois chapitres. Le premier, qui est un aperçu théorique de la fonction sujet va de la période préclassique à la période moderne en passant par l'âge classique. Ce chapitre se propose d'une part de passer en revue les différentes définitions que le sujet a connues, de circonscrire l'éventail de ses dénominations et d'autre part, d'amorcer l'élaboration du répertoire des appellations. Il se poursuit par la présentation des difficultés rencontrées dans l'application, à certaines de nos occurrences, des définitions que les auteurs donnent du sujet. Il s'achève par une question essentielle : quelles peuvent être les répercutions de cette diversité de vues sur les désignations du constituant sujet ?

Le second débute l'analyse des désignations sémantiques du constituant sujet. Cette description permet de dégager le fondement de chaque appellation ; de rapprocher par la suite le contenant du contenu, c'est-à-dire, d'établir le rapport qui peut exister entre un terme et le nom que le grammairien lui attribue ; et enfin, de rechercher chaque fois les motivations d'une désignation. Ce chapitre présente, lorsque cela est évident, les possibilités de multiplication de ces dénominations.

Le troisième chapitre parachève l'analyse de ces dénominations sur le plan syntaxique. Il a les mêmes préoccupations que le chapitre précédent : regrouper les désignations et vérifier si elles représentent, toutes, des appellations particulières du sujet. Cette étude aboutit à une préoccupation sérieuse : quel nom attribuer au constituant sujet pour le mettre à l'abri des aléas sémantiques, discursives et même stylistiques ?

Ce travail s'ouvre toutefois sur une question délicate : l'impact de la multiplication des appellations sur la recherche et l'enseignement.

CHAPITRE 1 : LA TERMINOLOGIE DU SUJET :

APERÇU THÉORIQUE

Notion ancienne et fondamentale dans l'énoncé, le sujet est le premier des deux éléments nécessaires à la construction d'une phrase. Il est donc impossible de le supprimer sans porter atteinte à la grammaticalité de la phrase. L'étude du sujet présente un grand intérêt tant au niveau de sa définition qu'à celui de ses terminologies. Ce dernier aspect a principalement suscité notre intérêt. Selon l'une des hypothèses de ce travail, les appellations de la notion de sujet reposent sur ses définitions. Aussi, allons-nous consacrer ce premier chapitre à une étude rétrospective des différentes perceptions du sujet. Ce chapitre a donc pour objectif de faire l'inventaire des désignations du sujet, d'établir une relation entre l'évolution des définitions du sujet et celle de sa terminologie.

Pour y parvenir, nous distinguerons dans notre analyse les époques préclassique, classique et structurale.

1 - LA PERCEPTION PRÉCLASSIQUE DE LA FONCTION SUJET

La période préclassique est subdivisée en deux époques : l'Antiquité et le Moyen-Âge. Chacune de ces époques analyse à sa manière la fonction sujet.

1-1. LE SUJET DANS L'ANTIQUITÉ

Nous n'avons pas pu trouver des textes originaux des auteurs que nous avons mentionnés à ce niveau de notre travail. Cependant, Chevalier (1968), Ducrot et alii (1995) retracent les différentes approches des grammaires antiques, et nous avons exploité leurs travaux pour présenter cette étape de notre travail. C'est pourquoi les textes que nous avons cités ici ne sont tirés que des auteurs sus-mentionnés. Ainsi, pour Ducrot et alii (1995 :93), la notion de syntaxe est abordée dans le premier traité grammatical grec de Denys de Thrace au IIème siècle av. J.C. Au Vème siècle de notre ère, Priscien, repris par Chevalier (1968 :28), traite de l'arrangement des mots, arrangement qui vise à l'obtention d'une oraison parfaite. Pour les Anciens, le locuteur et même le grammairien classe les mots dans le but de bâtir une oraison, c'est-à-dire, un discours. Au cours de cette combinaison, on constate une sorte de dépendance entre les termes constitutifs de cette oraison. L'idée de fonction résulte donc de cette relation liant le sujet et le prédicat. De ces deux parties qui se dégagent, Lyons (1968 :12) en rappelle les fondements en ces termes : le sujet d'un prédicat désigne ce dont on dit quelque chose et le prédicat est ce qui est dit du sujet. La dépendance dont parlent les auteurs relève de la logique.

Au terme de la période Antique, le mot sujet constitue l'unique appellation dudit constituant.

1-2. LE CONSTITUANT SUJET AU MOYEN-ÂGE

Dans le sillage de ses prédécesseurs, Chenu repris plus tard par Chevalier (1968 :220), explique au début du XIIème siècle que le sujet précède le verbe parce que le monde des essences précède la création dans le flux du devenir et que Dieu précède sa création. La position du constituant sujet est précisée par Chenu, mais cette place relève de la logique.

Selon Chevalier (1968 :53), la syntaxe médiévale comprend trois axes qui sont la rection, le rôle du verbe et la transitivité. Hélie, cité par Chevalier (op.cit. : 54), affirme que régir, c'est entraîner avec soi un autre mot de discours à l'intérieur d'une construction pour la perfection de cette construction.

La rection décrite par Hélie est d'ordre logique. Aussi, se situe-t-elle en droite ligne de la perception des Anciens. Le verbe de l'énoncé entraîne le sujet en l'influençant par son sens ; il traduit en outre l'action. Nous vérifions le phénomène de la rection et de la suprématie du verbe dans [1] :

1a. Le premier ministre préside ce matin la cérémonie d'ouverture de la conférence [...]

(CT : 7953, n° 21, p 5) ;

1b. La dame, très énervée, lui répond d'une voie cassante (CT: 7953, n° 21, p 5) ;

1c. Le mari travaille à Yaoundé (CT : 7953, n° 21, p 5) ;

Les actions de présider, de répondre et de travailler sont exprimées par leurs verbes respectifs. Ceux-ci emmènent leurs sujets à effectuer l'action qui est décrite. Le sujet se perçoit donc comme une entité linguistique dont le référent est un être animé, capable d'agir. Le verbe régit donc le sujet.

Malgré cette approche sémantique, on se demande pourquoi Chenu maintient l'appellation de sujet à la suite des Anciens.

Par contre, le XIIIème siècle est dominé par l'école dite modiste. Avec les modistes apparaît le concept de mode de signifier. Les modistes reconnaissent l'autonomie de l'expression et de la grammaire par rapport à la logique. Reprenant les modistes, Ducrot et alii (1995 : 96) expliquent que le concept de mode de signifier veut qu'un élément grammatical ne soit pas défini par son signifier (sic), mais par la façon dont ce signifier est visé ; par le type de rapport institué entre mots et choses.

Selon les modistes, il existe certainement un autre type de relation entre les éléments qui forment cette structure à l'instar du sujet et du verbe. Ceci peut être vérifié dans les énoncés [2] ci-dessous :

2a. Essola a vu sa condamnation se dessiner (CT : 7735, n°32, p 9) ;

2b. Les faits remontent à quelques semaines (CT : 7735, n°36, p 9) ;

2c. Les journalistes sont sympathiques (CT : 7735, n°63, p 13).

En [2a] par exemple, Essola est le sujet du verbe a vu non pas seulement parce qu'il est celui qui fait l'action de voir, mais aussi parce qu'il existe entre ces deux termes d'autres types de relation. Les auteurs n'expliquent cependant pas comment se manifestent ces autres relations et ne disent pas non plus comment procéder pour les démêler.

Par là, les modistes affirment que la logique et la structure appartiennent à deux plans distincts de l'analyse. Les auteurs ont toutefois conservé le terme sujet utilisé depuis l'Antiquité. Ce qui nous pousse à nous interroger sur leurs motivations.

La théorie des modistes sera cependant remise en cause par d'autres grammairiens en l'occurrence, Meigret et Paillot. En effet, entre le XIVème et le XVème siècles, la position de Meigret, rappelle Chevalier (1968 :222), est la suivante :

J'appelle le nom surpozé ou appozé celuy qui gouverne le verbe e le souspozé, celuy qui est gouverné [...] Ce qui ne doit pas s'entendre selon l'ordre de paroles, mais selon le sens : car celuy qui gouverne est réputé être verbes actifs, come ajant, et celuy qui est gouverné come pacient e o contrer' é verbes passifs ; car lors le soupozé est le pacient e le surpozé l'ajant. (sic)

Cet auteur décrit ainsi la structure d'un énoncé selon un ordre sémantique. Il précise bien que l'ordre dont il parle n'est pas un ordre syntaxique, mais sémantique ou logique comme on peut le noter en [3] :

3a. La CNPS a effacé son ardoise (CT : 7735, n°18, p.9) ;

3b. Le conducteur est anéanti et abandonné dans le buisson (CT : 7735, n°56, p.11) ;

3c. De son côté, l'accusé rejette ces faits (CT : 7735, n°48, p.9).

Les noms CNPS, conducteur et accusé sont subordonnés à leur verbe respectif (effacé, anéanti et rejette) parce qu'ils font chacun l'action exprimée par ces verbes. En [3a] et [3c], Meigret les baptise ajants alors qu'en [3b], le conducteur subit l'action effectuée par un tiers. Pour cette raison, l'auteur le nomme pacient. A ces deux valeurs se superposent celles de surpozé et de soupozé, deux mots identiques à ajant et à pacient. Cette conception prévoit plusieurs valeurs du constituant sujet.

Meigret revalorise ainsi la position de ses pairs du XIIème siècle en ménageant toutefois une ouverture aux implications de la perception sémantique sur les désignations de la fonction sujet. Cette ouverture incite à s'interroger sur les rapports susceptibles d'exister entre les désignations de Meigret et les actions qu'il décrit.

A la fin du XVème siècle, Antoine revient sur les propositions des modistes. Cet auteur cité par Chevalier (1968 : 220) assure

qu'au commencement de la matière, il y a ung nom substâtif ou un pronom primitif et après sensuit ung verbe personel de meuf finy requerât avoir un nominatif cas devant luy pour sô suppost si comme on dit magister legit. (sic)

Antoine décrit ainsi la phrase sur le plan de la structure. La matière dont parle l'auteur est la phrase. Celle-ci commence donc par un nom ou un pronom, puis vient le verbe à une forme finie. Et le cas nominatif préposé à ce verbe lui sert de support en même temps qu'il le régit. L'auteur tente d'expliquer ce que les modistes ont énoncé auparavant. Cette approche domine presque le siècle suivant.

En effet, le XVIème siècle conforte le point de vue d'Antoine. D'ailleurs, pour Scaliger, explique Chevalier (1968 : 184) :

Toute phrase, pour exprimer une pensée, doit être référée aux cinq rapports logiques fondamentaux : car dans toute action, il y a ce qui fait, ce qui est fait, ce qui reçoit la chose, la privation et la fin dont elle est cause.

Une pareille perception aurait incité à voir en son auteur un logicien, s'il n'avait lui-même levé l'équivoque en précisant que

le grammairien devra donc toujours soigneusement distinguer le plan des

relations syntaxiques [...] de celui des liens sémantiques qui se dévoilent

dans la réalisation du discours [...].

Si le sens est envahissant, l'auteur craint ses répercussions sur la désignation de la fonction sujet. Le XVIème siècle renforce la perception syntaxique avec une évolution certaine au niveau de la terminologie des fonctions syntaxiques.

En définitive, de l'Antiquité au XIIème siècle, c'est l'immobilisme, la seule appellation de sujet prévaut. Le XIIIème siècle marque le début de l'élargissement des perceptions de la fonction de sujet sans pourtant lui apporter une dénomination nouvelle. Les XIVème et XVéme siècles confirment l'évolution avec l'apparition des valeurs sémantiques du sujet telles que agent, patient. Au XVIème le constituant sujet est nommé primus, le COD segundus et le COI tercius. Ces numéros d'ordre correspondraient à la place de ces éléments dans la phrase. Cette tendance se poursuit même au cours de la période classique.

2 - L'APPROCHE CLASSIQUE DU SUJET

2.1. LA PERCEPTION DU SUJET PAR PORT-ROYAL

Née au seuil de la deuxième moitié du XVIIème siècle, la grammaire générale et raisonnée attribue au sujet les mêmes propriétés sémantiques et logiques que l'Antiquité et le Moyen-Âge. Pour Arnauld et Lancelot (1969 :13)

le jugement que nous faisons des choses ( comme quand je dis : la terre est

ronde) enferme nécessairement deux termes ; l'un sujet, qui est ce dont on

affirme, comme terre ; et l'autre appelé attribut qui est ce qu'on affirme,

comme ronde [...] 

La notion de sujet chez ces auteurs prend racine dans les catégories logiques d'Aristote. Il existe, de ce fait, une analogie interne entre la parole et le contenu qu'elle véhicule. L'énoncé devra alors être analysé non selon sa structure externe, c'est-à-dire, la syntaxe, mais selon la structure de la pensée qu'elle est censée reproduire.

7a - Les autorités essaient d'apporter une réponse (CT 7951, n°50, p.5) ;

7b - La direction [...] demande aux organisations de régler le complément (CT 7951, n°50,

p.7) ;

7c - Les opérations seront facilitées [...] (CT 7951, n°17, p.7).

Nous constatons que dans [7], les groupes nominaux les autorités, la direction et les opérations régissent effectivement leur verbe respectif (essaient, demande et seront facilitées) en leur imposant leurs marques de personne, de nombre et même de genre [7c]. Ce point de vue n'est pas profondément analysé par cette grammaire. Il marque pourtant l'aspect descriptif vers lequel semble tendre cette nouvelle génération des traditionalistes. Parler des marques traduit déjà un regard sur un énoncé non plus seulement sur le plan logico-sémantique, mais aussi sur le plan de la construction. Il existe entre le sujet et le verbe une connexion syntaxique qui se manifeste par les caractéristiques morphologiques du sujet sur le verbe.

La grammaire classique maintient, dans l'ensemble, la position de l'Antiquité. Toutefois, elle ménage à nouveau une ouverture à l'évolution des terminologies par l'adoption des terme et expressions thème, sujet réel, sujet apparent pour désigner le constituant qui assume dans la phrase la fonction sujet. Une même notion présente plusieurs terminologies. Quel est en fait le rapport entre chaque désignation et son contenu ? Pourquoi les auteurs créent-ils d'autres appellations alors que le contenu semble être identique à celles qui existent déjà ? Les néo-classiques amorcent cependant une étude du sujet sur le plan morphosyntaxique. Cette brèche entrouverte par la grammaire traditionnelle sera largement exploitée par la grammaire structurale.

3 - LE POINT DE VUE DU STRUCTURALISME SUR LA NOTION

DE SUJET

Née au début du XXe siècle, la linguistique structurale se propose de rendre compte de la structure des langues avec plus d'efficacité. Elle a donné une nouvelle impulsion à l'activité grammaticale par l'introduction des méthodes capables de décrire le fonctionnement réel des langues. Les écoles linguistiques qui en découlent ont donné naissance à diverses tendances grammaticales qui sont pour l'essentiel : le fonctionnalisme, le distributionnalisme, la grammaire générative et transformationnelle, la grammaire dépendancielle et la grammaire prédicatrive. La grammaire structurale se propose alors de rendre compte de la phrase non plus sur le plan sémantique uniquement, mais aussi sur le plan structural. Cette grammaire se préoccupe donc tout particulièrement de l'organisation des mots et des constituants de phrase. Elle subordonne, sans le négliger, le sens à la syntaxe.

Ce mode de combinaison est la syntaxe. C'est ce que cherche à définir la grammaire structurale. Celle-ci affirme en effet que les propriétés formelles suffisent à expliquer le fonctionnement syntaxique du sujet. Ainsi perçues, l'organisation syntaxique et l'organisation sémantique se situent sur deux schémas distincts et ne peuvent prêter à confusion.

Il ne s'agit pas de faire ici une étude systématique de chaque théorie linguistique. Notre tâche consiste tout simplement à évaluer l'approche de la notion de sujet par chacune d'elle, notamment la définition et le nom qu'elle donne au constituant sujet.

3-1. LE SUJET PERÇU PAR LE FONCTIONNALISME

La perception du sujet par le fonctionnalisme découle de la fonction qu'il donne à la langue. Celle-ci a pour finalité de véhiculer les pensées. Par elle, les hommes communiquent leurs expériences. Cette communication se traduit dans les énoncés qui sont l'objet de diverses études.

Dans ce sens, Martinet (1979 :159) découpe la phrase en deux parties. La première relève du sujet et la seconde, du prédicat. Ce découpage donne des énoncés [8] le schéma suivant :

8a. La brise matinale / souffle (CT n°7946, n°11, p.5) ;

Sujet prédicat

8b. Elle / quitte le lit (CT n°7953, n°99, p.13) ;

Sujet prédicat

8c. Cette richesse / attise des convoitises ( CT n° 7953, n°3, p.5).

Sujet prédicat

Les GN la brise matinale, cette richesse et le pronom personnel elle sont appelés sujet alors que souffle, quitte le lit et attise des convoitises sont des prédicats. Cette bipartition n'est pas fondée sur la logique, mais sur la syntaxe.

Ce genre d'analyse distingue Martinet des Anciens et des Classiques. Pour Martinet (op.cit : 157), le sujet fait partie du noyau nominal ; il reconnaît que le sujet est l'un des compléments qui apporte au procès une information particulière. Il est ce qui demeure après la suppression des expansions non essentielles du prédicat. Entre le sujet et le prédicat, il existe, de ce fait, une relation d'interdépendance. L'un ne peut exister sans l'autre. Le constituant sujet peut subir l'influence du verbe et prendre diverses valeurs.

Par conséquent, si ce constituant est même considéré comme sujet de l'énoncé, on ne saurait lui donner une définition du type le sujet est celui qui fait l'action, estime Martinet. Ceci se vérifie dans [9] :

9a. Les enfants vont à l'école...(CT n°7953, n°11, p.13) ;

9b. Les enfants avaient été brûlés par un incendie ...(CT n°7953, n°64, p.14) ;

9c. Une trentaine d'infirmiers [...] vont être formés (CT n°7951, n°86, p.15) ;

9d. 3% des enfants souffrent de troubles mentaux ( CT n°7951, n°90, p.15).

En effet, dans [9a], enfants assume la fonction d'agent parce qu'il fait l'action d'aller, dans [9d] enfants est patient et dans [9c] infirmiers est bénéficiaire.

Martinet relève que ces nuances ne sont pas spécifiques au sujet. L'agent, le patient ou même le bénéficiaire de l'action peuvent occuper des postes syntaxiques autres que celui du sujet. Dans [9b] par exemple, l'action de brûler est faite par un agent qui n'est pas le sujet du verbe avaient été brûlés ; cet agent (incendie) est au contraire complément d'agent de ce verbe.

A la suite de Martinet, Popin (1993 : 56) reconnaît  que le verbe nomme soit une action, soit un état ou un changement d'état, soit un mouvement.

S'il affirme que celui qui fait l'action peut être l'agent, il nuance cependant sa position par rapport à celui qui la subit. En [9d], Popin trouve que le sujet ne subit pas la souffrance ; il désigne l'endroit où s'exerce la douleur décrite par le verbe ; pour ce faire, il est appelé siège parce que ce terme est sujet du verbe subjectif souffrent. Cependant, l'auteur ne définit pas clairement ce qu'est un verbe subjectif. Il n'en propose pas non plus une liste.

Pour abréger cette polémique, Martinet (1979 : 158) conclut que le sujet n'a pas de valeur propre et c'est le sens du verbe qui va déterminer la valeur de la fonction. Ces valeurs peuvent par conséquent être variées selon le verbe employé. Ce qui présage leur diversification.

Pour la grammaire fonctionnelle, le mot sujet est conservé pour nommer ladite fonction.

3.2 - LE POINT DE VUE DU DISTRIBUTIONNALISME SUR LE SUJET

Le distributionnaliste appréhende la notion de sujet à partir de l'analyse qu'il fait de la parole. Pour lui, un acte de parole n'est ni une expression de la pensée ni un outil de communication. La parole est un comportement d'un type particulier, et ce comportement est humain. Elle devrait, à cet effet, être expliquée à partir des situations dans lesquelles elle apparaît. Pour Dubois et alii (1973 : 164-165) la grammaire distributionnelle

a son origine dans la constatation empirique que les parties d'une langue ne

se rencontrent pas arbitrairement les unes par rapport aux autres [elle se

propose] de décrire les éléments d'une langue par leur aptitude (possibilité ou

impossibilité) à s'associer entre eux [ ...]

L'analyse distributionnelle est donc la tendance de la linguistique structurale qui a pour objet de décrire les unités d'une langue en fonction de la possibilité que celles-ci ont de s'associer entre elles par des procédés de segmentation et de classification. L'analyse distributionnelle se garde de toute considération sémantique. Ducrot et alii (1995 :49-52) rallient cette idée des auteurs du dictionnaire linguistique et s'opposent, sur ce point, au fonctionnaliste et aux mentalistes. Ainsi, dans les exemples suivants :

10a. Kribi a su bâtir son tourisme ( CT 7946, n° 22, p.5) ;

10b. Le maire de Kribi a initié des travaux d'assainissement [...]( CT n° 7946, n° 23, p.5) ;

10c. Le campus d'Ekounou n'héberge que la filière gestion (CT n°7951, n°127,p.17).

les constituants en gras peuvent commuter entre eux tout en respectant la position syntaxique de chacun. Nous pouvons donc avoir en [10'] les structures suivantes :

10'a. Kribi a initié des travaux d'assainissement ...

10'b. Le maire de Kribi n'héberge que la filière gestion

10'c. Le campus d'Ekounou a su bâtir son tourisme

Les expansions occupent dans la phrase les mêmes positions syntaxiques que les constituants initiaux. Ils sont préposés au verbe ; ils sont donc des sujets selon que le reconnaît Dubois (1967 : 17) 

l'ordre des syntagmes nominaux relativement aux verbes permet de distinguer

le syntagme nominal sujet qui lui est préposé et le syntagme nominal objet qui

lui est post posé

Schématiquement, Dubois représenterait [11] de cette manière :

- Le Premier Ministre /...préside / la cérémonie d'ouverture de la conférence.

(SN1) ( V ) ( SN2)

[P1] = [ (SN1) + ([ V ]) + [( SN2 )] où SN1 représente le sujet du verbe, V le verbe et SN2 le complément.

En définitive, le distributionnalisme privilégie l'analyse syntaxique. Il ne fait aucun cas du sens. De ce fait, il attribue des numéros d'ordre aux différents éléments de la phrase ; le chiffre 1 adjoint au premier SN de la phrase fait de lui le SN1. Ce SN1 est donc le nom que cette grammaire donne au constituant sujet. Ce procédé d'analyse dont nous devons l'initiative aux grammairiens médiévaux a été complété sinon enrichi par la grammaire générative.

3.3 - L'APPROCHE DU SUJET PAR LE GÉNÉRATIVISME

L'idée que la grammaire générative et transformationnelle a du sujet résulte de l'intégration de la sémantique à l'ensemble de son modèle linguistique. Il pense de ce fait qu'en négligeant le sens, la commutation peut aboutir à des énoncés ambigus et parfois agrammaticaux. Pour Dubois et alii (1973 : 216), cette grammaire définit la fonction comme la relation grammaticale que les éléments d'une structure entretiennent entre eux dans cette structure.

De manière schématique l'énoncé [12] a la structure suivante :

Le samedi est consacré au grand ménage (CT n°7953, n°105, p.13).

SN SV P SN + SV

Ceci se justifie par le fait que distributionnalisme et générativisme rejettent la langue prise comme expression de la pensée. Cependant, la grammaire générative déplore le fait que la grammaire distributionnelle se contente de décrire les phénomènes syntaxiques sans pour autant les expliquer. Cette grammaire veut donc pallier ces insuffisances. A cet effet, elle intègre la sémantique à l'ensemble de son modèle. Ainsi, les règles de réécriture lui permettent de présenter les constituants et l'ordre dans lequel ils apparaissent dans une phrase. De manière graphique, les règles de réécriture sont représentées sous la forme d'arbres syntaxiques. Avec Roberge, (2002 :3), nous avons ci-dessous une forme simplifiée de cet arbre :

W : représente la phrase

X,Y, Z  : représentent les noeuds

T, U : représentent les branches, c'est-à-dire les syntagmes qui sont une projection de la catégorie. X représente, dans cet arbre, le noeud nominal (SN) sujet.

Dans [13] de Roberge (op.cit)

Son chien mange un os dans la cuisine,

nous avons l'arbre syntaxique suivant :

W = Ph : son chien mange un os dans la cuisine

X = SN : Son chien

Y = SV : mange un os

Z = SP : dans la cuisine

T, U = : Det (son), nom (chien) ou Det (un), nom (os) ou encore Det (la) (cuisine).

Le schéma ci-dessus révèle que SN est un noeud terminal. C'est ce noeud qui est le sujet. Il s'inscrit dans une structure hiérarchisée des constituants de la phrase. Celle-ci comporte à la base les couples (Det+nom), (V+SN) et (P+SN). Ce qui donne respectivement les noeuds SN, SV et SP.

Nous notons plusieurs SN dans la phrase. Ceci pose le problème de l'identification du sujet parmi ces SN. Pour résoudre cette difficulté, Roberge fait une analyse des traits lexicaux de chaque constituant. Ainsi, dans [13], les SN (un os et la cuisine) ne peuvent être sujet de mange. En effet, ce verbe exige comme sujet un être animé humain ou non.

Tout en privilégiant l'analyse structurale de la phrase, la grammaire générative reconnaît un rôle au sens. Cette grammaire ne s'intéresse pas aux différents éléments de l'énoncé parce qu'ils assument des fonctions, mais elle montre comment ceux-ci se combinent entre eux pour former des phrases. Aussi, les désigne-t-elle par des symboles (SN, X, Y...).

En conséquence, le constituant sujet peut, selon l'humeur de l'auteur être nommé SN0, X, etc. La dénomination du sujet est davantage banalisée par cette recherche obstinée de simplification.

3.4 - LE SUJET VU PAR LA GRAMMAIRE DÉPENDANCIELLE

La théorie dépendancielle décrit les fonctions syntaxiques dans un énoncé pour indiquer le réseau de dépendance qui existe entre les éléments de cet énoncé. Ce réseau de dépendance marque la connexion, c'est-à-dire le lien susceptible d'unir les unités d'une phrase : le verbe et son sujet, le verbe et son complément par exemple. Cette grammaire se fonde sur les principaux concepts suivants: la connexion, la translation et la jonction. Tesnière (1976 :11) représente ces relations par un arbre qu'il appelle stemma. Il reconnaît que la phrase est un ensemble organisé dont les constituants sont des mots. Dans la phrase, il étudie les diverses relations à deux niveaux : une relation du premier niveau entre le prédicat et ses subordonnés (ou dépendants) et une relation du deuxième niveau avec les circonstants.

Les subordonnés immédiats du verbe sont appelés actants par l'auteur. Tesnière (op.cit : 205) les considère comme :

des êtres ou des choses qui, à un titre quelconque et de quelque façon que ce

soit, même à titre de simples figurants et de la façon la plus passive, participent

au procès, [...] les actants sont toujours des substantifs ou des équivalents de

substantifs.

Ces différents actants ne remplissent pas les mêmes fonctions. Ils sont classifiés selon un numéro d'ordre, numéro qui reflète leur degré de participation dans la réalisation du procès. Le premier de ces actants est l'équivalent du sujet sémantique (celui qui fait l'action) selon Tesnière (op. cit.:107), il porte le nom de prime actant : il annonce les deux autres (second et tiers) actants. C'est le cas des groupes de mots les enseignants, les étudiants, le champ communautaire dans les énoncés suivants :

14a. Les enseignants apprécient cette ambiance de travail (CT 7953, n°85, p.12) ;

14b. Les étudiants effectuent des stages en entreprise (CT 7953, n°86, p.12) ;

14c. Le champ communautaire a beaucoup produit (CT 7953, n°96, p.13). 

L'auteur attribue à ces syntagmes nominaux le nom de prime actant parce qu'ils participent à la réalisation du procès soit pour apprécier [14a], soit pour effectuer [14b], soit pour produire [14c]. La grammaire dépendancielle voit ainsi l'énoncé comme un drame dans lequel le prédicat représente le procès lui-même. Ce procès, c'est l'action selon la grammaire traditionnelle et les participants à cette action sont les dépendants du procès.

Tesnière enrichit les dénominations des structuralistes en introduisant le terme prime actant pour designer le constituant sujet. L'auteur emploie une appellation complexe. Ce n'est plus une unité lexicale. Il y a lieu de s'interroger sur le lien susceptible d'unir le premier terme (prime) au second (actant).

3.5- LA PERCEPTION DU SUJET PAR LA GRAMMAIRE PREDICATIVE

Il ne s'agit pas de faire une étude profonde de la grammaire prédicative, mais de relever que dans son étude de la phrase, Riegel et alii (1994 :228) et Riegel (2002 : 50) donnent de la phrase la représentation suivante:

N0-V-[N1]-[X] : N0 = constituant sujet

V = Verbe

N1 = COD

X = l'attribut

Ainsi dans les énoncés [15] :

15a. Le gouverneur a mis tous les moyens à notre disposition (CT : 7735, n°70, p9) ;

15b. La police nationale a renforcé sa présence sur les lieux (CT : 7957, n°104, p11) ;

15c. Les exposés ont produit des débats riches (CT : 7957, n°3, p6) ;

15d. Pourquoi les hommes sont-ils si incrédules ? (CT n°7735, n°60, p.7).

Ainsi, la grammaire prédicative donne pour nom au constituant sujet (en gras ) le symbole N0. En [15d], Riegel et alii (1994 : 139 ) reconnaissent au SN les hommes le nom de sujet nominal et à il celui de sujet pronominal. L'analyse que nous comptons faire dans la suite de notre travail dira si ces expressions représentent aussi des désignations de ce constituant de phrase.

Par ailleurs, le sujet est défini suivant les écoles de grammaire. Pour Onguéné Essono Ch. (2001 :135)

Cet éparpillement est la résultante inévitable d'une divergence d'approches consécutives à une diversification de points de vue par lesquels la notion est appréhendée.

Les divergences naissent de l'embarras que les auteurs ont à donner au concept sujet une définition stable. Chaque école présente donc des insuffisances dans ses acceptions. Ce qui risque de provoquer des difficultés dans la dénomination du constituant de ladite fonction. C'est dans ce sens que nous avons jugé nécessaire de faire, à ce niveau, le point sur les définitions du sujet.

4. LIMITES DES DEFINITIONS ET DES MODES D'IDENTIFICATION DU SUJET

Dans l'évolution des différentes perceptions du sujet, on observe des lacunes à tous les âges : période traditionnelle et époque structuraliste. Cependant l'Antiquité et la période classique peuvent être associées puisque leurs vues se recoupent.

4.1. LES INSUFFISANCES DANS LA DEFINITION TRADITIONNELLE

DU SUJET

La perception traditionnelle de la notion de sujet soulève beaucoup de difficultés. Certaines ont été notées par Petiot (2000 :27) en ces termes :

La grammaire scolaire retient traditionnellement une approche notionnelle, peu cohérente, ce que manifeste l'emploi du ou disjonctif dans la définition de la fonction : « le sujet est l'être ou la chose qui fait ou subit l'action ou qui est dans l'état exprimé par le verbe »...Á cet embarras, signalé par le ou, s'ajoutent la confusion entre les signes linguistiques et leurs référents, et la difficulté d'appliquer à toute phrase verbale cette définition.

Ce problème surtout didactique se poursuit par le fait que la grammaire notionnelle affirme que le sujet vient aussi en réponse à une suite de questions. Cette affirmation présente des limites tant au niveau du questionnement qu'à celui de l'action. Ainsi, dans les énoncés ci-après :

16a. L'université connaît beaucoup de difficultés (CT : 7946, n°76, p12) ;

16b. Cet enfant a environ 10 ans (CT : 7945, n°46, p8) ;

16c. Consulter un psychiatre est pour certains s'avouer fou (CT : 7951, n°85, p 15) ;

16d. Qu'il fût plus utile que Katow n'était pas douteux (Chevalier 1989, 111) ;

16e. Les gibiers sont chassés de leur territoire par les lions (CT : 7945, n°2, p14).

les groupes de mots en gras sont dits sujet. Cependant, il n'est pas toujours aisé de voir les actions qu'ils posent. En effet, si l'action exprime un mouvement, un être agissant, les verbes en italique dans [16a, b, c et d] n'ont pas cette propriété. On a plutôt l'impression qu'ils expriment un état. Par ailleurs, l'entité (université) en [16a], avec les traits sémantiques [- Humains + - Animés] n'est pas en mesure d'agir, elle ne subit pas non plus une action ; en [16b], le verbe avoir présente, nous le pensons, une situation. Dans ces conditions, quelles dénominations attribuer aux SN qui assument la fonction de sujet ?

En outre, le sujet est un infinitif en [16c] et une proposition en [15d], aucun de ces éléments n'est capable d'occasionner une action, de la subir ou même d'en bénéficier. Ainsi, dans la logique sémantique, devrions-nous les considérer comme sujet ? Si nous ajoutons à ce problème le cas des énoncés suivants :

17a. Une association de la cathédrale voudrait le réhabiliter [...] (CT : 7951, n°2, p7) ;

17b. Le concours doit se dérouler à Ouagadougou (CT : 7946, n°91,p13) ;

17c. Nos hôtes rencontreront des opérateurs économiques (CT : 7946, n°57,p8).

On peut se demander si la grammaire sémantique peut rendre compte des énoncés dont le verbe exprime une hypothèse comme en [17a] ou une action future comme l'indiquent les énoncés [17b] et [17c]. Il est donc délicat de mettre l'action au centre de l'analyse d'un énoncé. Ceci a poussé Arrivé et alii (1997 :656) à reconnaître qu'en effet, ces notions du « faire », du « subir » et de « l'action » n'ont qu'une pertinence relative.

En ce qui concerne le test de questionnement, le sujet répond à la question de quoi parle-t-on ? qui est ce qui ... ? ou qu'est ce qui... ? Posée avant le verbe. Dans les exemples suivants :

18a. Ma cousine, nous l'avons vue au marché (CT : 7955, n°69, p 13) ;

18b. Les entreprises coupables de fraudes sont sanctionnées par le gouvernement

(CT n°7946,n°115, p14).

A la question qui est ce qui a vu ? La réponse est nous ; et à la question de qui parle - t-on ? On répondra de ma cousine. Il est effectivement dit d'elle qu'on l'a vue au marché. Le test de questionnement n'est pas fiable. En effet, dans l'énoncé [18a], le pronom nous indique l'agent de l'action de voir et le sujet grammatical du verbe avons vue tandis que ma cousine représente le thème du discours. Et pourtant les deux tests de questionnement sont sensés présenter une seule et même réalité. La différence entre le sujet de l'énoncé encore nommé thème et le sujet grammatical se perçoit nettement par le phénomène de topicalisation. Il ne devrait, par conséquent, avoir aucune confusion entre les deux aspects de la notion.

Par ailleurs, l'énoncé [18b] montre qu'il n'y a pas que le sujet pouvant faire l'action. Celle-ci est effectuée par le gouvernement, et le sujet (les entreprises) ne fait que subir. Donc, les différentes valeurs que nous avons relevées au cours de nos lectures ne sont pas propres au constituant sujet.

4.2. LES INSUFFISANCES DANS LA DEFINITION STRUCTURALE

DU SUJET

La fonction sujet se figure parmi ce que Creissels (1995 :203) nomme fonctions argumentales. L'auteur déclare en effet,

Le terme de fonctions argumentales tel qu'il est proposé ici de l'utiliser renvoie à

la possibilité de caractériser les nominaux reliés à un même prédicat selon un

nombre limité de types de comportements syntaxiques.

De manière globale, la grammaire moderne considère que le constituant nominal sujet est celui qui est postposé au verbe à qui il impose ses marques d'accord. Cette vue est parcellaire et ne peut, à notre humble avis, rendre compte de la globalité du sujet. Les phrases [19*] :

19*a. Le marteau ouvre la porte avec une clef ;

19*b. Les oiseaux aboient sur la basse cour.

sont agrammaticales. En effet, les constituants nominaux sujets (en gras) marquent leurs verbes respectifs, chacun à sa manière. Mais ces énoncés sont inacceptables parce qu'au niveau linguistique, ils n'ont aucun sens. En fait, marteau et clef dans [19*a] représentent deux instruments et le verbe ouvrir exprime une action effectuée par un agent. Ce verbe, dans cet énoncé, n'accepte pas deux arguments ayant le rôle sémantique d'instrument.

Par contre, en [19*b], le verbe aboyer dans un emploi propre requiert comme argument l'entité chien. A celle-ci revient la propriété d'aboyer et non aux oiseaux. Même si, sur le plan morphosyntaxique, le SN les oiseaux modifie le verbe, celui-ci n'admet pas ce constituant pour sujet. Ainsi, la place et le type d'argument sont préparés par le sens du verbe ; surtout que Martinet reconnaît que la langue est un moyen de communication. Il existe d'une part, une relation syntaxique qui lie le sujet à son verbe et d'autre part, une relation sémantique que le verbe entretient avec son sujet. Entre le verbe et le sujet existe une relation réciproque. Aucun aspect ne prime sur l'autre. Il ne s'agit pas là d'une relation d'égalité, mais d'une relation de complémentarité. L'un ne peut exister sans l'autre. De ce fait, Petiot (2000 : 168) estime qu'il n'est pas possible de donner au sujet une définition comparable à celle du dictionnaire, c'est-à-dire une définition unique et pertinente.

Un autre aspect de la difficulté vient de ce que la grammaire moderne reconnaît que le constituant sujet est préposé au verbe. Et pourtant dans les productions langagières, il est possible que l'on rencontre des énoncés avec des sujets postposés aux verbes comme le montrent ces échantillons de notre corpus :

20a. En voilà une idée, disent les sceptiques (CT : 7945, n°169, p 13) ;

20b. Tout se déroule bien depuis lundi denier, affirme le docteur (CT : 7735, n°77, p 13).

Les SN (les sceptiques, le docteur), sont respectivement sujet des verbes disent et affirme. Ces constituants respectent les contraintes grammaticales (accord, nature,...) que la grammaire structurale reconnaît au constituant sujet sauf celle de sa place dans la phrase. Pour cela, il est nommé sujet inversé. Les exceptions viennent ainsi brouiller l'harmonie qu'est censé avoir donné au sujet la perception structuraliste.

Au terme du premier chapitre, il ressort que les différentes acceptions que les grammaires donnent au sujet dans la phrase sont également à l'origine de sa terminologie. Les définitions du sujet sont soit logico-sémantique, soit syntaxique.

Sur le plan logico-sémantique, nous avons recensé les désignations qui sont : sujet, thème, sujet réel, sujet apparent.  A tout ceci se greffe une pluralité de valeurs (agent, patient, site, bénéficiare...) qui feront également l'objet d'une analyse. Sur le plan structural, les appellations rassemblées sont primus, SN1, SN0, régent, prime actant, N0. A ceci s'ajoutent d'autres supports morphologiques (sujet pronominal, sujet nominal, sujet inversé ...) qui, sans être considérées comme des dénominations particulières du constituant sujet, feront néanmoins l'objet d'une étude à part en temps opportun. Le constituant sujet se retrouve toutefois avec une dizaine d'appellations, or Creissels (op cit. 12), déclare

qu'une terminologie grammaticale doit s'efforcer d'être le reflet d'un système de définitions qui développe sans cercle vicieux, c'est-à-dire dans lequel la définition d'une notion n1 ne comporte de référence à aucune notion n2 dont la définition ferait elle-même référence à n1.

Le principe d'univocité des terminologies scientifiques est ainsi rappelé pour sous-tendre notre étude. La problématique de ce travail trouve sa justification sur cette affirmation de Creissels. S'agissant du sujet, il résulte du principe d'univocité des terminologies scientifiques un ensemble de questions : pourquoi le constituant sujet possède-t-il tant de dénominations? Quelles en sont les motivations? Quels rapports y a-t-il entre chaque appellation et son signifié ? Quelles difficultés peut engendrer la diversité des désignations ? L'analyse des dénominations recensées, que nous aborderons dans les chapitres suivants, nous permettra d'être fixé sur ces préoccupations.

CHAPITRE II : LES TERMINOLOGIES

SEMANTIQUES DU SUJET

DU SUJET

La fonction sujet suscite un intérêt sans cesse renouvelé. Son importance dans la phrase se manifeste par la diversité d'appellations de ses constituants. A travers la rétrospective des définitions de cette fonction, le premier chapitre nous a donné l'opportunité d'une part, de mettre en lumière la relation étroite qui existe entre l'évolution des définitions de la notion de sujet et la terminologie et d'autre part, d'amorcer un répertoire des terminologies sémantiques et syntaxiques mises en évidence. L'analyse des appellations sémantiques que nous nous proposons de faire au second chapitre a pour but de nous fixer sur les rapports qui existent entre chaque appellation et son contenu ainsi que les motivations des auteurs de ces appellations. Pour Baylon et Fabre (1978 : 10) la sémantique est la discipline scientifique qui étudie le plan du contenu linguistique, en synchronie d'abord en diachronie ensuite. Etant la science des significations linguistiques, elle étudie l'identité des signifiés de même que leur valeur.

Nous examinerons tour à tour les différentes appellations que les auteurs de grammaire attribuent au constituant sujet et nous dégagerons, le cas échéant, leurs limites.

1 - ANALYSE DES TERMINOLOGIES LOGICO-SEMANTIQUES

DU CONSTITUANT SUJET

Les désignations liées au sens et à la logique que nous avons recensées sont : sujet, thème, sujet réel et sujet apparent.

1.1. Sujet

Le terme sujet est employé depuis l'Antiquité pour désigner ce dont on parle. C'est-à-dire le motif du discours, la matière sur laquelle porte l'énoncé. Ce regard est fortement défendu par Wagner et Pinchon (1962, 225). Selon ces derniers, il est question, dans un énoncé de ce à quoi renvoie le signe linguistique (sujet) dans la réalité extra-linguistique telle qu'elle est découpée par l'expérience d'un groupe humain. En clair, dans les énoncés suivants :

21a. Les anglo-saxons utilisent le terme « bancability » (CT : 7951, n°34, p7) ;

21b. Cette situation crée une minoration des cotisations (CT : 7951, n°31, p7) ;

21c. Cette position est constante depuis les enquêtes préliminaires (CT7735, n°49, p9).

anglo-saxons est l'objet du jugement dans [21a]. Il ne s'agit pas du signe graphique qui se trouve dans la phrase, mais du référent de ce signe. Wagner et Pinchon assimilent de ce fait le sujet au thème.

 

1.2. Thème

Le terme thème représente pour Wagner et Pinchon (1967 : 60 et 62) ce dont on parle dans un énoncé. La priorité est offerte à l'information que communique l'énoncé. L'essentiel pour le locuteur et l'allocutaire n'est pas d'analyser le lien syntaxique entre le verbe et son sujet. Mais de décoder le message. Dans les exemples ci-après :

22a. Mais, la tâche est immense (CT : 7951, n°149, p18) ;

22b. Son frère présente encore des signes de vie (CT : 7953, n°77, p 12).

on parle sans distinction de tâche et frère. Chacune de ces entités représente ce qui est communément nommé thème de l'énoncé ; Wilmet (1998 :460) parle de foyer ou topic. Il s'agit du sujet qui anime le discours. La perception linguistique de la notion de sujet est bien distincte de sa perception grammaticale. Mais nous relevons qu'il existe une coïncidence quasi constante entre le thème du discours et le sujet du verbe dans ces énoncés. Ceci brouille davantage la compréhension de ces deux notions. Pour Ducrot e alii (1995 :451) [...] le thème, à la différence du sujet, n'est pas un segment d'énoncé, mais un objet extérieur, auquel l'énoncé fait allusion. Le segment d'énoncé auquel fait allusion les auteurs est le SN sujet, c'est-à-dire le sujet grammatical. Ceci se vérifie dans cet exemple :

23. La retraite, tous les travailleurs y pensent (7951, n°1, p 9).

Il est facile de savoir ce sur quoi porte le discours. On parle de la retraite. La mise en exergue par l'emphase fait de ce terme le thème. Il est repris à l'intérieur de la phrase par le pronom anaphorique y. En effet, la structure canonique de cette phrase est la suivante :

23'- Tous les travailleurs pensent à la retraite.

Le SN la retraite représente un complément prépositionnel. Il n'est donc pas le sujet grammatical du verbe. De retraite est dit quelque chose. Il constitue donc le thème pendant que le SN tous les travailleurs est sujet du verbe pensent.

Deux dénominations (sujet logique et sujet psychologique) se superposent à thème.

 1.2.1. Sujet Logique

La perception logique du sujet date de l'Antiquité. Cette vue a influencé plusieurs générations des grammairiens. A la veille de l'approche classique de ladite notion, Port-Royal prend position. En effet, pour Arnauld et Lancelot (1969 : 17) le sujet dans la phrase se place avant le verbe, parce qu'

il y a un ordre des mots (celui qui place le nom avant l'adjectif et le sujet avant

le verbe) qui est naturel et universel, parce que, pour comprendre l'attribution

d'une propriété à un objet, il faut d'abord se représenter l'objet : ensuite

seulement, il est possible d'affirmer quelque chose de lui.

Ces auteurs confirment la position préverbale du sujet ; position déjà évoquée par les Anciens. En effet, le nom dont parlent les auteurs représente la substance tandis que le verbe exprime l'action. Il n'est donc pas concevable que l'action existe avant la matière ou le corps qui est supposé provoquer cette action. Beauzé, expliquent Ducrot et alii (1995 : 450) renforce cette position d'Arnauld et Lancelot lorsqu'il dit que l'art d'analyser la pensée est le premier fondement de l'art de penser ou en d'autres termes, qu'une saine logique est le fondement de l'art de la grammaire.

Par ailleurs, Le Goffic (1993 : 134) et Ducrot et alii. (op.cit : 450) s'associent à Wilmet (1998 : 461) pour reconnaître que la dénomination sujet logique est adoptée pour décrire l'être ou l'objet dont quelque chose est affirmé ou nié hors focalisation. Aussi, dans [24] :

24a. Les salles informatiques sont équipées (CT : 7953, n°50, p.12) ;

24b. Essola ouvre la portière d'un véhicule (CT : 7982, n°5, p. 9) ;

24c. Les eaux du Wouri scintillent comme une grosse feuille d'agent (CT : 7957, n°65,

p.11).

Les constituants salles informatiques, Essola et eaux du Wouri sont appelés sujet logique. Les Le Bidois (1938 :3) expliquent l'origine de l'épithète logique. Il provient en effet de l'ordre sujet + verbe + attribut que le français attribue à la phrase. Cet ordre est inspiré par l'analyse déductive. Le locuteur exprime d'abord le sujet, ensuite le verbe et enfin l'attribut ou l'objet. Ordre logique aussi parce que, selon ces auteurs, on ne peut concevoir une action que s'il y a un agent pour l'exécuter. Dans cette perspective, l'agent et le sujet logique peuvent donc représenter une seule et même réalité comme dans [24]. La propriété logique ne semble pas être coupée du point de vue discursif.

1.2.2. Sujet psychologique

L'expression sujet psychologique est expliquée par Baylon et Fabre (1979 :153) comme l'être qui marque la différence entre ce dont parle le locuteur et l'information qu'il en donne. Il est un sujet intuitif. Dans les phrases [25] par exemple :

25a. Les trois hommes étaient des redoutables bandits ( CT :7735, n°90, p105) ;

25b. Les pauvres bêtes étaient des vedettes inattendues de cette fête ( CT :7735, n°26,

p9) ;

25c. Les photographes ambulants ont envahi les lieux (CT : 7957, n°81, p.11).

la partie en gras représente le sujet du discours, c'est-à-dire le sujet psychologique. Comme le thème, le référent du sujet psychologique n'assume pas forcément la fonction de sujet en syntaxe. D'ailleurs, Wilmet (1998 : 461) prend position en affirmant n'employer le mot thème que dans l'acception très accueillante de sujet logique [...]. Et Ducrot et alii (1995 :452) de renchérir le thème d'un énoncé, c'est ce dont parle le locuteur, ou, comme disaient les linguistes du début du siècle, le sujet psychologique.

Dans son acception logique, les désignations de thème, sujet logique, sujet psychologique sont des équivalents. Entre ces terme et expressions existent une relation d'égalité. Cela devient difficile de considérer le terme thème comme appellation et les autres comme des valeurs. Les appellations se multiplient donc parce que les auteurs pensent chacun rapprocher le mieux possible le contenant du contenu et non pas parce que la dénomination apporte, chaque fois à la notion, une précision particulière.

1.3. Sujet réel/sujet apparent

Aux notions sujet réel et sujet apparent, la grammaire traditionnelle ne donne aucune définition claire. Cependant, les constituants qui représentent ces sujets dans l'énoncé renvoient, en syntaxe, à deux fonctions bien distinctes.

Le sujet réel est une terminologie qui répond à la préoccupation des auteurs pour donner un sens au questionnement qui sert à l'identification du sujet. Arrivé et alii (1987) et même Grevisse (1993 :306) veulent une cohérence entre la question (qui est ce qui... ?) et la réponse qui en découle. La grammaire notionnelle ne dit pas le rapport qu'il y a entre le terme sujet et l'épithète réel. On ne sait pas si le sujet réel vient en opposition à un sujet faux. Sinon quel rapport spécifique existe-t-il entre les deux termes (sujet et réel) ? Ces questions sont aussi valables pour le sujet apparent.

En effet, sachant que l'adjectif apparent est synonyme de vraisemblable, est-il possible de le remplacer par ce synonyme ? Comme le sujet réel, les auteurs de cette dénomination ne la définissent pas. Tout ce qu'ils donnent comme critère d'identification est que le sujet apparent accompagne les verbes impersonnels.

Ainsi, sujet réel et sujet apparent se notent dans les énoncés ci-après :

26a. Il en résulte différentes missions (CT : 7955, n°41, p12) ;

26b. Il faut préparer le travail du lendemain (CT : 7953, n°106, p 13) ;

26c. Il pleuvait des bombes [...] (CT : 1957, n°29, p8).

L'analyse grammaticale des énoncés [26] fait de Il le sujet apparent parce qu'il est placé à gauche du verbe à qui il impose ses marques du genre et du nombre. C'est peut-être pour cela qu'on lui donne ce nom puisqu'en fait, dans la perspective logique ou sémantique, on ne parle pas de il et il ne fait aucune action. Quant au sujet réel (en italique dans l'énoncé), il est celui qui répond à la série de questions (de quoi parle-t-on ? qu'est ce qui.. ?). Ainsi, on reconnaîtrait en [26a-b] qu'on parle de différentes missions et du travail du lendemain, pendant qu'en [26c], l'action de pleuvoir serait faite par bombes.

A cause des difficultés que nous avons soulignées plus haut, l'approche traditionnelle de la notion crée des divergences. Chevalier (1989 :23) trouve même bizarre l'appellation de sujet réel. Il se rapproche de ce fait de Tamine (1998 : 123) pour plusieurs raisons. D'abord, l'aspect morphologique de la définition du sujet est faussé. En fait, avec quel sujet le verbe s'accorde-t-il dans ce cas ? Il est pourtant établi que le verbe ne s'accorde qu'avec son sujet. Le pronom impersonnel il apparaît de ce fait comme l'unique sujet du verbe dans [26c]. Ensuite, ces sujets dits réels ne se plient pas à la transformation passive comme nous le voyons dans [26'c] : des bombes étaient plu. Cette phrase est agrammaticale tandis que l'énoncé des bombes pleuvaient, phrase grammaticalement correcte, ne représente pas la forme passive de l'énoncé [26c], mais une phrase entièrement à part.

Aussi, les notions de sujet réel et sujet apparent prennent-elles des physionomies différentes suivant les auteurs de grammaires. Tamine (op. cit: 124) pense que [...] ce prétendu sujet réel est plus proche des compléments du verbe et peut être appelé séquence de l'unipersonnel.

Pour Galichet (1971 : 118), la notion de sujet réel ne saurait être définie de manière aussi simple. Ce sujet réel peut alors, selon la structure de la phrase, être :

un complément du verbe impersonnel

43a. Il court sur la fontaine une rumeur de paresse et de rêve.

un complément d'objet direct

43b. Il fut décidé qu'on tiendrait séance tenante sans désemparer.

une apposition à il

43c. Il est certain que vous avez raison.

un complément d'existence ou complément existentiel

43d. Il est des hommes bavards.

Ainsi, le malaise que suscitent les désignations de sujet réel et sujet apparent est perceptible. La notion d'action que certains auteurs mettent au centre de la définition du sujet rend son contenu complexe et son contenant inadapté. L'embarras que nous avons observé au niveau des définitions sémantiques du sujet se répercute sur sa terminologie. En fait, on se demande pourquoi chaque auteur, bien que connaissant l'existence d'un phénomène et d'une appellation, choisit de donner une nouvelle appellation alors qu'il n'y a parfois aucun fait nouveau dans sa perception.

Le sens, source génératrice des désignations du sujet, occasionne également diverses valeurs sur lesquelles nous nous attarderons. Pour exploiter ces valeurs sémantiques, nous nous servirons de la grammaire casuelle. Et pour présenter la théorie casuelle, nous allons nous inspirer de l'approche d'Anderson (1975, 1998, 2004) et de la critique faite sur Fillmore et sur les autres auteurs de cette grammaire.

2. PRÉSENTATION DE LA GRAMMAIRE DES CAS

A l'origine, la Grammaire des cas est mise au point par Fillmore (1965). Elle se fonde sur l'analyse sémantique des verbes dans le but de déterminer une liste restreinte des cas sémantiques susceptibles d'être appliqués à toutes les langues. Vu la complexité de sa démarche, l'auteur a lui-même plusieurs fois révisé sa théorie. Ainsi, Fillmore (1968 :5) cité par Essaka, M. (1997 : 5) donne les objectifs de son approche en ces termes :

la Grammaire des Cas est une théorie sémantique qui a pour principe

d'élaborer une liste unique, universelle, minimale et finie des Cas pouvant être

appliqués à toutes les langues.

Fillmore s'atèle donc à élaborer un répertoire de verbes suivant le type et le nombre de leurs arguments. Lorsqu'il parle de type, il s'agit d'étudier les traits sémantiques de ces arguments.

Ainsi, pour la Grammaire des Cas (GC), la phrase constitue une structure logique, c'est-à-dire qu'elle est une unité de sens ayant un prédicat (verbe, V) et un ensemble d'arguments (les noms, C). L'argument n'est pas ici le syntagme nominal qui peut se trouver dans l'environnement d'un verbe et peut, selon le cas, entretenir avec celui-ci une connexion syntaxique comme le pensent Creissels (1995) et Muller (2002) ; mais il représente l'entité qui assure auprès du verbe un rôle sémantique. Selon Habert (2001 :1), la phrase se déploie dans la structure suivante :

P = V + C1 + + C3....Cn. P constitue la phrase.

La GC fait du verbe le pivot de l'énoncé. C'est à partir de ces verbes que l'on définit, au niveau de la structure profonde, les différents rôles, c'est-à-dire les relations casuelles. Il ne se préoccupe pas de la structure syntaxique de l'énoncé. Et Anderson (1975 :6) d'affirmer

les considérations du type sujet/objet ne figurent plus dans les représentations

de structure profonde [...] ces SN peuvent correspondre à diverses fonctions ou

relations casuelles sous-jacentes

Il s'agit par exemple du rôle d'agent, de patient, de bénéficiaire etc. Le nom est considéré comme une entité et non comme une catégorie grammaticale. Nous nous inspirons de l'étude de cet auteur pour analyser les valeurs sémantiques qui s'insèrent dans l'étude de la grammaire casuelle.

Toutefois, avant d'exploiter la grille casuelle, il est nécessaire de rappeler les différents concepts et principes qui la caractérisent.

2.1. LES CONCEPTS DE LA GRAMMAIRE DES CAS

Pour développer sa théorie, Fillmore emploie des termes et expressions qu'il convient d'élucider pour une meilleure intelligence de la notion.

2.1.1. La notion de cas

Le terme cas est utilisé à la fois pour désigner une catégorie grammaticale associée au syntagme nominal dont il traduit la fonction syntaxique dans la phrase et aux différents rôles sémantiques que le verbe impose à ce syntagme nominal. Lorsque le cas relève de la syntaxe, Fillmore parle de cas morphologique et lorsqu'il s'agit de la sémantique, il parle de cas sémantique. Cet emploi est une source de polémique. A ce propos, Anderson (1975 :1) relève que

la terminologie grammaticale de la plupart des langues qui suivent la tradition européenne sur ce sujet (la grammaire des cas) présente une ambiguïté systématique dans l'emploi du terme « cas » [parce que] ce terme est employé pour désigner à la fois une certaine catégorie flexionnelle et l'ensemble des distinctions sémantiques que portent ces formes.

Pour une meilleure compréhension de ces concepts, il apparaît nécessaire d'expliciter ce que les auteurs entendent par cas sémantique et cas morphologique.

2.1.1.1. Le cas morphologique

Dans la conception traditionnelle, Arrivé et alii (1988 :97) affirment que le terme cas représente la catégorie grammaticale associée au nom et traduit la fonction syntaxique dans les langues dites casuelles. Le cas morphologique, encore appelé cas de surface relève de la syntaxe. Dans les langues à cas comme le latin, le cas morphologique était marqué par des désinences à la finale des termes. Cette morphologie variait selon la fonction du mot dans un énoncé. Brunot et Bruneau (1949 :182) reconnaissent qu'

En latin, la distinction était très nette entre les formes du masculin, du féminin

et du neutre [...] entre les différents cas : le nominatif, l'accusatif...

Dans ces exemples des auteurs :

27a. Filius venit (Mon fils vient) ;

27b. Filium video (Je vois mon fils) ;

27c. Filio scribo (J'écris à mon fils).

le SN mon fils occupe différentes positions dans les énoncés en français. En latin, il se traduit en [27a] par filius, en [27b] par filium et en [27c] par filio. On observe donc une variation au niveau des désinences selon que le SN est sujet, COD ou COI. Cette variation ou déclinaison renseigne sur la fonction du mot dans une phrase. Elle aboutit au phénomène de cas. Dans [27], les cas sont, dans l'ordre, au nominatif, à l'accusatif et à l'ablatif. Il existe cependant sept cas dont l'ensemble constitue la déclinaison. Le nominatif correspondant au cas-sujet et la désinence us exprime son masculin singulier. Les cas sont donc des marques distinctives en fin de mot.

Cependant, ces cas se révèlent également insuffisants dans l`interprétation de la phrase. Dans [28] par exemple :

28a. Sans scrupule, Mendzenga ligote la progéniture du procureur (CT : 7735, n°53,

p.11) ; 

28a'. La progéniture du procureur est ligotée par Mendzenga, sans scrupule.

les deux phases expriment le même contenu sémantique. Pourtant, ces constituants assurent des fonctions syntaxiques différentes en surface. En effet, Mendzenga est l'agent de l'action de ligoter et progéniture en est le patient, cette entité subit l'action exprimée par le verbe ligoter. En surface, les SN Mendzenga et la progéniture représentent respectivement les fonctions de sujet et de complément d'objet direct dans [28a]. En [28a'] par contre, il y a inversion de rôles syntaxiques même si les deux constituants continuent d'assumer les mêmes rôles sémantiques. Les rôles syntaxiques ne sont pas fixes, c'est-à-dire, le constituant nominal qui assure cette fonction varie selon la structure de l'énoncé, à la seule condition que cette transformation préserve le sens initial. Le cas morphologique n'est donc pas totalement dépouillé de toute considération sémantique.

2.1.1.2. Le Cas sémantique

Dans le but de déterminer le contenu sémantique des phrases, Fillmore (1968) a reconsidéré la notion de cas qu'il écrit cette fois en majuscule et qui renvoie à une étude sémantique de la phrase.

Le cas sémantique est encore appelé cas profond, rôle sémantique. Dans cette approche, le mot Cas s'écrit avec un « C » majuscule. Fillmore (1968 :5) cité par Anderson (2004 :2) et Essaka, M. (1997 : 8) le définissent comme le rôle que joue les éléments d'une phrase dans l'interprétation de cette phrase en relation avec la prédication de cette phrase. Le rôle sémantique du constituant sujet représente la face linguistique de la notion. Il peut être compris comme la place qu'occupe son référent dans le procès que décrit l'énoncé. En clair, la relation qu'entretient un verbe avec son sujet ou son objet en syntaxe peut créer plusieurs valeurs susceptibles d'être prises par le constituant qui représente, dans l'énoncé, la fonction sujet. Cela s'observe dans les énoncés suivants :

29a. [...] Un policier blesse mortellement un jeune homme (CT : 7951, n°40, p 13) ;

29a'. un jeune homme est mortellement blessé par un policier [...]

Dans l'exemple [29], les variantes active et passive d'un même énoncé sont syntaxiquement différentes : l'objet de la phrase active [29a] devient le sujet de la phrase passive [29'a]. Mais elles sont sémantiquement équivalentes, c'est-à-dire qu'elles s'interprètent de la même manière. La notion de Cas vient donc rendre compte de cette identité d'interprétation.

Pour Anderson (1975 : 40 ), la Grammaire des Cas s'intéresse à la nature sémantique de la structure interne d'une phrase. L'auteur distingue donc deux éléments essentiels dans l'attribution des rôles sémantiques : le Cas propositionnel et le Cas modal.

2.1.1.2.1. Le cas propositionnel

Le Cas propositionnel est celui requis par le verbe. Ce Cas provient de l'analyse de la structure argumentale du verbe. C'est-à-dire, de l'étude des relations sémantiques qui existent entre chaque verbe et les noms qui l'entourent. Ces cas pourraient se dégager dans les énoncés ci-après :

30a. Les personnes en quête de logement donnent une caution [...] (CT : 7957, n°30,

p.8) ;

30b. Après une course-poursuite, le voleur tombe (CT : 7735, n°41, p.9) ;

30c. Plusieurs conflits opposent également ces entrepreneurs [...](CT: 7946, n°81, p.13).

Les verbes donner, tomber et opposer expriment les actions que les constituants en gras dans les énoncés traduisent dans les faits. Selon la sémantèse du verbe, on peut avoir affaire à un agent en [30a], un patient en [30b] et une cause en [30c]. Nous reviendrons plus en détail sur ces notions dans la suite de notre analyse.

Par ailleurs, Chafe (1970 : 100) et Cook (1989 : 195-196) cités par Essaka, M. (1997 :36) classent les verbes suivant les types de relation qu'ils sont susceptibles d'entretenir avec leurs arguments qui lui sont liés. Ils distinguent de ce fait les verbes d'état, qui expriment une situation statique. Les verbes de processus qui expriment un événement dynamique non agentif, les verbes d'action qui décrivent l'action accomplie par un Agent et les verbes ambiants qui ont une structure argumentale vide. Dans il pleut par exemple, le pronom personnel il ne représente pas un argument. Il n'entretient donc aucune relation sémantique avec le verbe.

2.1.1.2.2. Le Cas modal

Le cas modal représente pour Cook (1989 : 189) cité par Essaka, M. (1997 :40) le rôle sémantique dont le verbe n'est pas à la source. L'illustration suivante nous situe sur ce qu'est un cas modal :

31. Le début de l'automne marque souvent le repli des ventes du super (CT: 7946, n°7,

p.5)

Le SN en gras situe le lecteur dans le temps. Il s'agit précisément d'un repère dans une saison de l'année. C'est donc ce SN qui introduit dans l'énoncé la notion de temps et non le verbe.

Les combinaisons des rôles sémantiques à l'intérieur d'une même proposition obéissent, cependant, à certaines contraintes que Fillmore érige en principe.

2.2. LES PRINCIPES DE LA GRAMMAIRE CASUELLE

2.2.1. Un argument ne peut porter q'un seul Cas

Lorsque Fillmore (1968 :5) repris par Anderson et alii (1998: 9) et appuyé par Essaka, M.(1997 : 10) parle du premier principe : One case-per-argument, il pense que dans une proposition simple un argument ne peut porter plus d'un Cas, c'est-à-dire, le même argument ne peut être à la fois agent et patient par exemple. De ce fait, il ne peut y avoir dans un même énoncé un nom ayant à la fois le rôle d'agent et celui de patient.

Pourtant, Fillmore (1971 : 42) toujours cité par Anderson et alii (op. cit.) renonce à ce fondement lorsqu'il constate que certains verbes requièrent des arguments pouvant porter plus d'un cas comme nous le voyons dans cet énoncé emprunté à l'auteur :

32a- Jean regarde la voiture ;

32b- Le mur regarde la mer.

Dans [32a], Jean est perçu comme étant à la fois agent et datif de l'action identifié par le verbe. Il y a lieu de se demander si mur dans [32b] répond aux mêmes critères. Pour mieux comprendre la notion d'agent et de datif, nous y reviendrons plus loin.

2.2.2. Un même cas ne peut apparaître qu'une seule fois dans une

phrase simple

Ce deuxième principe, explique Anderson (1998 :11:), est nommé par Fillmore (1971 : 38) : One-instance-per clause principle. C'est la contrainte d'après laquelle un même Cas ne peut apparaître qu'une seule fois dans une phrase simple si l'on veut éviter des constructions agrammaticales du genre :

33* Le marteau ouvre la porte avec une clef

L'agrammaticalité de cet énoncé s'explique par le fait que, marteau et clef sont tous les deux nommés instruments. Habert (2001 :2) parle à ce niveau de saturation.

2.2.3. Seuls les syntagmes nominaux représentant les mêmes Cas

peuvent être coordonnés

Le principe sus évoqué se fonde sur la nature des arguments qui portent un Cas. Par exemple un animé et un inanimé ne peuvent être conjoints pour exprimer une même relation casuelle. Dans ce sens, Fillmore (1968 :22), selon Anderson et alli. (op.cit.) voit dans la structure

33* Jean et un marteau ont cassé la fenêtre

une phrase agrammaticale. En effet, Jean a pour trait sémantique [+ Animé, + Humain] tandis que marteau en a [- Animé, - Humain]. Jean est agent alors que marteau est instrument. La coordination entre les deux arguments reste donc impossible.

Le premier fondement étant discutable, Fillmore s'appuie sur les deux autres principes pour apporter à sa théorie la rigueur nécessaire à l'élaboration de sa liste.

La grammaire casuelle, outre les concepts et les principes que nous venons de dégager offre un cadre idoine pour l'analyse de valeurs sémantiques du constituant sujet. Le terme cas, représentant les différents rôles sémantiques que le verbe impose à ses arguments, on constate qu'il ne génère pas les terminologies du sujet mais ses valeurs.

3. ETUDE DES VALEURS DU CONSTITUANT SUJET

Il ne s'agit pas ici de faire une étude sémantique de la fonction sujet, mais d'analyser quelques valeurs saillantes que nous avons relevées au cours de notre travail. En fait, lorsque la grammaire notionnelle définit le sujet comme l'être ou la chose qui fait ou subit l'action du verbe, elle ne se préoccupe pas du SN en tant que constituant nominal, mais de son référent, de l'entité que ce SN représente dans la réalité extralinguistique. Aussi, dans l'exemple l'enfant mange un gâteau de Creissels (1995 :12), l'auteur ne reconnaît-il pas que

L'évènement manger (plus exactement, l'évènement que l'énonciateur a décidé de représenter au moyen du lexème manger, alors que d'autres auraient éventuellement pu désigner le même évènement : avaler par exemple) ne concerne pas le fragment de phrase l'enfant et le fragment de phrase gâteau, mais leurs référents, c'est-à-dire la personne que l'énonciateur a choisi de désigner comme l'enfant, (alors qu'il aurait pu le cas échéant désigné cette même personne différemment, par exemple en utilisant son nom individuel) et la chose que l'énonciateur a choisi de désigner comme le gâteau.

Ainsi, comme sujet du verbe mange, le constituant sujet (enfant) a une valeur syntaxique ; par contre, sur le plan sémantique, le référent de ce constituant, c'est-à-dire, l'être nommé enfant fait l'action de manger. Le même constituant peut, dans d'autres circonstances, subir l'action ou en bénéficier, alors les valeurs se multiplient selon le sens que le verbe confère à ce constituant. A ce propos,  Benveniste (1996 :290) affirme que le sens d'une forme se définit par la totalité de ses emplois, par leurs distributions et par les types de liaisons qui en résultent. Et Fillmore (1971 :42-43) repris par Anderson (1998 :2) propose la liste des différentes valeurs que peuvent recouvrer les constituants de phrase et notamment celui de sujet. Il s'agit de : agent, objet, datif, Experiencer expérimenteur, bénéficiaire, origine, instrument, factitif, localisation, source, but, temps. Cette liste apparaît restreinte au regard des valeurs que nous avons répertoriées au cours de notre revue de la littérature. Nous nous appuierons néanmoins sur le cadre ainsi défini pour classifier les différentes valeurs de la fonction sujet ; ceci suivant le cas propositionnel et le cas modal.

3.1. Les valeurs du sujet relatives au Cas propositionnel

Le Cas propositionnel représente la valeur que le verbe impose à son argument qui assure, en structure de surface, la fonction de sujet. Nous avons recensé, au cours de nos lectures, les Cas propositionnels ci-après : surpozé, soupozé, agent, patient, bénéficiaire, siège, causateur, cible, sujet sémantique, actant, acteur, Expérient, Origine, Source. Nous en avons dénombré quatorze et la liste n'est pas exhaustive.

3.1.1.Agent (A)

Le terme agent est utilisé par Fillmore (1971 :42) et Cook (1989 :191), tous cités par Anderson (1975 :11) pour exprimer l'instigateur de l'action identifiée par le verbe. Chareaudau (1994 : 302) parle d'actant. Il est donc introduit par les verbes d'action qui sont : courir, casser, acheter, tuer, ouvrir, écouter, regarder, utiliser, terroriser, donner, blâmer, monter, garder, planter, tartiner, mettre.... Cette liste n'est pas close. L'agent est typiquement animé pour Fillmore pendant qu'il englobe, en plus des animés, des inanimés chez Cook. En bref, ce mot regroupe tout ce qui est perçu comme instigateur de l'action décrite par le verbe. Cette perception se dévoile dans les énoncés suivants :

34a. Essola ouvre la portière d'un véhicule (CT : 7982, n°5, p.9) ;

34b. De temps en temps, les chèvres urinent sur les corps (CT : 7735, n° p.16) ;

34c. La pluie détruit les effets des locataires (CT : 7957, n°22, p.8).

Les actions d'ouvrir, d'uriner et de détruire sont faites respectivement par Essola, chèvre et pluie. Le trait sémantique d'une entité n'est pas important dans cette analyse. L'accent est mis sur les rapports divers que le verbe entretient avec son environnement, mais aussi sur les répercussions de ces relations sur les arguments. Ils sont donc tous des agents. Déjà au XIVème siècle et dans les mêmes circonstances, Meigret cité par Chevalier (1968 : 222) attribuait à ces noms le statut de surpozé et précisait ce qui ne doit pas s'entendre selon l'ordre de paroles, mais selon le sens. Dans les mêmes conditions, Baylon et Fabre (1979 : 153) parlent de sujet sémantique.

On note tout simplement que le sujet sémantique et l'agent décrivent une seule et même réalité. L'on ne comprend pas pourquoi chaque auteur préfère attribuer un autre terme alors que le phénomène existe et a déjà été nommé par d'autres auteurs. Il apparaît un phénomène de redondance au niveau des noms qu'on attribue à une même valeur. Cette difficulté a été aussi enregistrée avec les appellations du sujet. L'agent est aussi porteuse d'autres nuances : acteur et causateur, relevées par Muller et Le Goffic.

3.1.1.1 Acteur

Le terme acteur est utilisé par Muller (2002 :118) pour définir un agent involontaire de l'action décrite dans le procès. L'auteur estime que l'agent n'est pas conscient des actions dont il est supposé être l'auteur. Riegel et alii (1994 :229) pensent au contraire que ces entités sont la cause indirecte du phénomène décrit dans l'énoncé. La structure de la phrase est donc [N0 +[---] ou le référent du sujet N0 représente la cause ou l'agent du procès décrit par la phrase originale. Il s'agit dans ces exemples :

35a- Une odeur âcre empêche les secouristes de respirer (CT : 7953, n°82 p.12) ;

35b - L'odontol attaque la bouche (CT : 7899, n°41, p.8) ;

35c - Le sable chaud effleure les pieds des visiteurs (CT : 7957, n°64 p.11).

de odontol, sable et odeur. Ils sont considérés comme des acteurs. Nous aurons, par exemple, de [35'a] la structure suivante :

[une odeur âcre + fait [les secouristes ne respirent pas]

Le référent du sujet est odeur âcre. Il exprime la cause ; mais l'action (respirent) est faite par l'entité secouristes. L'auteur considère le factitif faire comme un opérateur diathétique, c'est-à-dire un quasi-auxiliaire de diathèse qui permet d'augmenter une phrase de départ d'un actant initial représentant l'instance qui est cause du reste du procès. Faire est donc un causatif. La conjonction ou que Riegel emploi dans sa définition n'est forcément pas inclusif. C'est dans ce sens que Le Goffic propose à l'entité odeur la valeur de causateur.

3.1.1.2. Causateur

Pour Le Goffic (1993 : 137), le nominatif qui assure la fonction de sujet est le causateur s'il exprime, dans l'énoncé, un motif, une cause dont le procès développe les conséquences. Dans l'énoncé [35b] par exemple, odontol, tout en étant un agent involontaire de l'action identifiée par le verbe attaquer, constitue aussi la cause de la souffrance que subit le patient (bouche). Pour certaines de ces grammaires, il n'existe donc pas de cloison étanche entre ces valeurs. Chaque auteur de grammaire veut trouver un nom exprimant le mieux possible la sensation qu'il a du référent du syntagme nominal sujet qui subit la sémantèse du verbe. La même difficulté que nous avons relevée au niveau des dénominations du sujet se répercute sur ses valeurs. Ces auteurs ne se préoccupent toujours pas des avancées réalisées par d'autres grammairiens sur la même question. Pourtant, à notre humble avis, le terme d'agent peut regrouper toutes ces nuances puisqu'une action est, de toutes les façons, posée.

Ainsi, l'action définie comme le résultat d'un processus conscient ou non a des répercussions positives ou négatives sur les entités impliquées dans le déroulement du procès.

3.1.2. Patient (P)

Le nom patient est employé par Chafe (1970, 98, 102) repris par Anderson (1975 :24). Le premier affirme que le patient est dans un état ou une condition décrit par le verbe, il décrit également une entité qui change son état ou sa condition dans un processus, ou une entité qui subit l'action d'un agent dans le déroulement du processus. Le terme patient est donc employé pour décrire plusieurs processus. C'est peut-être pour cette raison que l'auteur n'a pu établir une liste des verbes susceptibles de requérir ce Cas. Chafe introduit néanmoins une nuance fondamentale entre le processus qui conduit à une action et ses effets. L'attention est focalisée sur les effets de l'action sur la victime. Celle-ci est un acteur passif. Et nous le remarquons dans [36]

36a. Les gendarmes tombent dans une embuscade (CT : 7899, n°50, p.10) ;

36b. Des frères alcooliques sont morts (CT : 7899, n°16, p.9) ;

36c. Les camionneurs circulant de nuit ont été attaqués à un virage (CT : 7899, n°46,

p.8) ;

36d. Deux enfants périssent dans un incendie (CT : 7953, n°58, p.11) ;

36e. Les uns gémissaient et se tordaient de douleur (CT : 7735, n°108, p.7) ;

36f. Le sol tremble (CT : 7951, n°50, p7).

gendarmes, frères et camionneurs sont nommés patient parce qu'ils subissent l'action du verbe, ou qu'ils changent d'état. Dans [36a], gendarmes subit une action enclenchée par les malfrats. Ceux-ci en sont les instigateurs. Dans [36b], le verbe décrit un état ; l'entité représentée par le référent (frères) change d'état. Elle passe de l'état d'être vivant à celui de mort. Dans [36c], les auteurs de l'action décrite par le verbe ne sont même pas identifiés.

Dans le même ordre d'idée, Meigret, explique Chevalier (1968 : 222) emploie le terme soupozé pour exprimer celui qui subit l'action de l'agent. Onguéné Essono Ch. (1993 :91), parlant dans ces conditions de la diathèse passive explique

ces sujets sont formels et dotés d'un rôle syntaxique sans être les agents véritables de l'action. Les agents réels sont implicitement perçus, mais non exprimés.

L'essentiel, pour les auteurs, n'est pas de voir qui est la cause de l'action ou de l'état, mais d'analyser les conséquences de l'action sur les participants au procès.

3.1.3. Bénéficiaire (B)

Le terme bénéficiaire est utilisé par Fillmore (1971 : 41) et Chafe (1970 : 47), relève Anderson (2004 :13), pour exprimer celui qui bénéficie de tout ce qui est communiqué par le reste de la phrase. Le bénéficiaire reçoit une action ou une offre. Pour Cook (1989 :191), également repris par Anderson (op.cit), ce Cas est introduit par un verbe bénéfactif. A propos, Chafe (op cit. 148, 150) reconnaît que les verbes ayant un trait bénéfactif incluent les verbes de possession (avoir, posséder..), les verbes de propriété transitoire ou non transitoire (bénéficier, recevoir...), les verbes de changement de possession (perdre, gagner, acquérir..). Une étude des traits sémiques de ces verbes nous permettrait peut-être de percevoir la pertinence de ce classement. Les verbes bénéfactifs sollicitent donc des arguments dont le cas enrichit les valeurs de la fonction sujet.

Par ailleurs, Cook explique que le bénéfice peut être positif ou négatif. Le bénéficiaire peut donc être déficitaire. Les énoncés [37] dévoilent les tendances ci-dessus :

37a. Les PVVS reçoivent régulièrement des aides en matériel [...] (CT :7982, n°72, p.15) ;

37b. Quand un fonctionnaire est mis à la disposition d'un organisme, il continue à

percevoir son salaire de la fonction publique (CT :7951, n°38, p.7) ;

37c. Le géomètre bénéficie quasiment de la même primeur (CT : 7957, n°43, p.8) ;

37d. Dans cette transaction, Beyala a perdu 86 millions de francs CFA (CT : 7735, n°19,

p.9).

PVVS, fonctionnaire, géomètres et même Beyala ont, dans ces exemples, le statut de bénéficiaire. Tout se situe au niveau du verbe. Les auteurs n'accordent pas assez d'importance à la nature du don. Cependant, en remplaçant aide par gifle, dans [38a'], l'énoncé devient

37'a. Les PVVS reçoivent régulièrement des gifles

La condition du bénéficiaire n'est plus la même, il subit une action même si celle-ci se présente sous la forme d'un don. Dans ce sens, le statut de bénéficiaire se rapproche de celui de patient. Il serait tout de même intéressant de connaître la différence que ces auteurs établissent entre un don et une sanction. Une étude sémantique du sujet résoudrait, à coup sûr, cette difficulté. La même lecture peut être faite de l'énoncé [37d]. D'ailleurs, Arrivé et alii (1997 : 656) quant à eux, nomment bénéficiaire celui qui profite de l'acte posé par l'agent. Ces auteurs ne reconnaissent ce rôle qu'aux entités décrites dans les énoncés [37a, b, c]. Ces différentes valeurs sémantiques sont donc des notions très subjectives. La cloison entre le patient et le bénéficiaire n'est pas étanche. C'est peut-être pour cela que Fillmore n'a pas jugé utile d'introduire dans sa liste le cas patient.

3.1.4. Datif (D)

Fillmore (1968 :24) cité par Anderson (1975:2) utilise le terme datif pour indiquer l'entité qui subit l'action, l'être animé affecté par l'état ou l'action identifiée par le verbe. Le Cas datif ainsi défini se rapproche du Cas patient. Il apparaît de ce fait que le datif comporte plusieurs autres nuances. C'est ce qui a déterminé l'auteur à le faire éclater en trois cas : l'Expérimenteur, l'Objet et le But.

3.1.4.1. Expérimenteur (E)

Fillmore (1971 :42) cité par Anderson (1998 :3), se sert du mot expérimenteur ou Experiencer : where there is a genuine psychological even or mental verb ; c'est-à-dire le Cas de l'entité impliquée dans un événement psychologique authentique ou dans un état mental. Pour Cook (1989 : 182) toujours cité par Anderson (op.cit), l'Expérimentateur expérimente une sensation, une émotion, une cognition. Il reconnaît que ce Cas est introduit par les verbes expérimentaux : mourir, être triste, écouter, entendre, tuer, aimer, imaginer, avoir chaud, suspecter, espérer, amuser, apprendre, voir, rappeler... Les énoncés ci-après décrivent ces situations :

38a. Les enfants ont aimé la visite du site (CT : 7735, n°108, p.7) ;

38b. D'autres rêvent en contemplant tout simplement le fleuve (CT : 7957, n°56, p.11).

Les verbes aimer et rêver décrivent chacun un événement dont les entités (en gras dans les énoncés) sont les participants. Les êtres animés ou non (enfants, autres) apparaissent comme des réceptacles des sensations qui sont exprimés par les verbes.

Pour Popin (1993 :78) ces termes en gras dans l'énoncé [38] peuvent prendre les valeurs de siège parce qu'ils sont sujets des verbes subjectifs. Cependant, l'auteur ne propose pas la liste des verbes subjectifs. Il ne les définit pas non plus. Quant à Riegel et alii (1994 :125), ces constituants sont nommés siège, parce qu'ils représentent une entité où se manifeste un état physique ou psychique.

Avec Muller (2002 : 39) chaque constituant sujet prend la valeur d'expérient parce qu'il est le support d'une sensation ou d'un sentiment que décrit le verbe. Pour Onguéné Essono Ch.(op cit. : 90) il s'agit du phénomène de diathèse active :

Le sujet présente à la fois comme l'agent et le site d'une action qui se déroule et se ferme sur lui. L'activité du sujet est notée comme interne dans ce procès. Initiateur de l'action, il en est le siège, l'acteur et le support. En se refermant sur elle-même, l'action affecte les verbes du trait intransitif.

Ainsi perçu, le sujet peut prendre à la fois les valeurs de siège, acteur, expérient, support ou expérimenteur. Il existe une sorte de redondance au niveau des différentes valeurs.

3.1.4.2. Objet (O)

Ce terme est employé par Fillmore (1968 :25) cité par Anderson (2004 : 2) pour décrire le cas de la chose représentable par un nom dont le rôle dans l'action ou l'état identifié par le verbe est donné par l'interprétation sémantique du verbe lui-même.

Cette définition rend le cas objet général à tous les autres parce que, de l'interprétation sémantique d'un verbe peut se dégager plus d'un rôle sémantique comme nous voyons dans ces exemples :

39a. Les eaux du wouri scintillent comme une grosse feuille d'agent (CT : 7957, n°65,

p11) ;

39b. Le climat change très rapidement (CT : 7735, n°12, p5) ;

39c. Le ministre est venu (CT : 7955, n°69, p13).

L'interprétation sémantique des verbes scintiller, changer et équiper dans ces énoncés dévoile les contenus sémantiques suivants : en [39a], la chose représentable (eaux) fait une action dont il n'est pas conscient : il est un agent inconscient et Muller (2002 :118) lui reconnaît la valeur d'acteur. Ce Cas se retrouve à la fois comme une nuance d'Agent et d'Objet. Climat dans [39b] subit un changement dans le processus que marque le passage d'une saison à l'autre par exemple ou sous l'effet des intempéries au cours d'une même saison. De ce fait, il peut avoir le statut de patient selon Chafe (1970 : 98) repris par Anderson (2004 :34). Et ministre dans [39c], celui de l'Objet.

Le Cas Objet peut donc regrouper tous les autres rôles sémantiques que Fillmore a identifiés. Ce Cas est une sorte de fourre-tout. Cependant, Cook (1989 :191) reconnaît que l'Objet est le rôle de l'entité décrite par un verbe d'état, de l'objet se déplaçant ou subissant un changement lors d'un processus ou d'une action.

La définition de Cook est plus explicite. Le bénéficiaire par exemple ne peut pas être inclus dans ce Cas parce que les verbes de possession n'expriment pas un état. Dans l'énoncé [40] :

40a. Mais, la tâche est immense (CT : 7951, n°149, p18) ;

40b. La porte s'ouvre ( CT : 7982, n°10, p9) ;

40c. La toiture suinte (CT : 7957, n°25, p9).

l'Objet (tâche) est dans l'état décrit par l'attribut (immense) et par l'intermédiaire du verbe d'état (est) en [40a]. En [40b et c], porte et toiture, qui représentent le Cas Objet, subissent un changement dans l'action (ouvrir) pour le premier et lors du processus  (suinter) pour le second. En effet, toutes ses actions ont une cause. Le causatif faire est sous-entendu dans ces constructions. Il est jusqu'ici difficile de lister les verbes qui introduisent ce Cas. Le rapprochement qui se dégage de cette analyse rend difficile et même discutable le classement des auteurs de la GC.

3.1.5 Source (S) et But (G)

Source et But, souligne Anderson (2004 : 20), sont deux termes employés par Jackendoff (1972 :31) et Fillmore (1971 :41) pour exprimer les entités qui sont, suivant le prédicat, les lieux de provenance et d'arrivée, états de départ et final, le départ et le final, le début et la fin. Le Cas But ne peut donc pas être étudié en dehors du Cas Source. Voilà pourquoi, nous les avons associés dans cette étude. Pour Riegel et alii (1994 :126) le cas source peut être assimilé au cas Origine et même au Cas Agent. L'auteur pense que l'Origine est le rôle sémantique réservé à l'entité externe qui est à l'origine du procès décrit par le verbe. Les verbes qui expriment ces Cas marquent respectivement les changements de lieu (aller), des changements d'état (se transformer) ou des durées (durer). Ces cas ne sont pas marqués dans notre corpus, mais l'état se déploie dans cet énoncé de Fillmore :

41. La chenille s'est transformée en papillon (Fillmore 1968 :3).

En effet, le verbe se transformer présente la condition d'un être (chenille) qui se métamorphose en un être nouveau (papillon). Le premier état est nommé Source, il est le sujet en structure de surface, et le second But ; il représente le complément prépositionnel en syntaxe.

L'analyse des cas propositionnels s'énonce à l'usage très difficile. Les verbes présentent tellement de nuances que la délimitation des critères de classification apparaît laborieux. Ceci se manifeste aussi par le fait que les Cas tendent à se multiplier et rendent, de ce fait, l'ensemble des valeurs sémantiques difficile à cerner. La naissance des valeurs voisines du constituant sujet n'est pas déterminée par des divergences de vue bien marquées. Seulement, une valeur peut sous-catégoriser plusieurs autres. Une étude sémantique du sujet serait passionnante.

3.2. Les valeurs du sujet générées par le Cas modal

Le cas modal représente pour Cook (1989 : 189) cité par Anderson (2004 :34) le rôle sémantique dont le verbe n'est pas à la source. Il est presque à l'opposé du Cas propositionnel. Il s'agit des Cas : instrument, locatif, temporel. Cette liste nous servira de base pour classer et analyser les différents rôles sémantiques que nous avons repérés.

3.2.1. Instrument

Le mot instrument est employé par Fillmore (1968 : 25) et Chafe (1970 : 152),) tous cités par Anderson (op cit) pour exprimer le cas de la force ou de l'objet inanimé impliqué de manière causative dans l'état ou l'action identifié par le verbe. Pour Fillmore (1971:43), l'Instrument représente la cause immédiate dans le déroulement de l'action décrite dans le procès alors que l'Agent en est la cause principale, c'est-à-dire la source de l'action. Cet aspect est très perceptible chez Chareaudau (1994 :305), Riegel et alii (1994 : 136) cela se vérifie dans [42] emprunté à Fillmore (op cit.) :

42a. Le marteau a cassé la fenêtre ;

42b. La clé ouvre la porte.

Marteau et clef sont nommés instruments. L'instrument représente l'Objet qu'utilise l'agent pour accomplir son action. Dans les énoncés, l'agent est implicite. L'instrument est donc un outil de travail. C'est dans ce sens que Fillmore (op cit.) parle de cause immédiate puisqu'il est au contact direct avec l'objet affecté ou effectué. Dans [42a], l'instrument peut également prendre la valeur de cause et même celle d'agent ou même d'acteur suivant les différents points de vue. Les conséquences de l'action de l'instrument sont visibles. Comme nous l'avons déjà souligné, il n'y a pas une cloison nette entre ces valeurs.

Ce cas pose cependant un problème. Dans des énoncés du type :

43a. Cet arsenal donnent des résultats probants (CT :7951, n°183, p.18) ;

43b. L'E.U appuie le Cameroun à concurrence d'environ 13 milliards [...] (CT : 7955, n°25,

p.12) ;

43c. L'assurance paiera vos dettes (CT :7946, n°29, p.6).

arsenal, E.U et assurance peuvent-ils avoir le statut d'Instrument ? Ces éléments sont-ils des outils de travail ? Si oui qui en est l'agent ? La GC ne nous éclaire pas dessus.

3.2.2. Locatif (L)

Pour Anderson (op cit.), le terme locatif ou localisation employé par Fillmore (1968.: 25) et Chafe (op. cit. : 161-162) représente le Cas qui exprime la localisation ou l'orientation spatiale de l'état ou de l'action identifiée par le verbe. Wilmet (1998 : 460-463) emploie le même nom pour désigner le lieu de l'évènement. Notre corpus nous fournit les échantillons suivants :

44a. Kribi compte une soixantaine d'établissements hôteliers (CT : 7646, n°15,p.5) ;

44b. La petite cour était boueuse (CT : 7953, n°70,p.45) ;

44c. Tibati accueille les élites de l'Adamaoua (CT : 7953, n°70,p.45). 

Dans ces énoncés, ce n'est pas le sens du verbe qui fait penser au lieu, mais la sémantèse du substantif qui précède le verbe. Dans [44a], c'est par économie de langage qu'on a parlé de Kribi au lieu de la ville de Kribi, voire même de la population de Kribi. En effet, le mot kribi est utilisé pour représenter le cadre dans lequel on compte les établissements hôteliers. Il en est de même de Tibati en [44c]. Et en [44b], il s'agit de l'état du cadre (la petite cour) de l'évènement.

Toutefois, Habert (2001 :3) note que le type d'un argument peut ne pas être directement celui qu'attend le prédicat. Les attentes du prédicat permettent de dériver le type nécessaire.

Ainsi, dans l'énoncé [45] emprunté à l'auteur :

Paris a vendu des missiles à Buenos-Aires

le verbe vendre attend comme vendeur et comme acheteur des êtres humains. Or, ces deux arguments rappellent, par leur contenu, un lieu. Il n'est pourtant pas question des cadres du déroulement de l'action que décrit le verbe. Mais d'une transaction qui, normalement, doit s'opérer entre deux personnes. Pour Habert, ces deux N renvoient aux personnes typiques de ces lieux (des capitales), donc aux gouvernements. Celui-ci est une personne morale, le problème de valeur se pose. Peut-on dire que Paris constitue un agent, un lieu, un site ? L'auteur explique un fait sans pourtant le nommer. Nous notons l'embarras qu'il y a lorsqu'il faut attribuer une dénomination à chaque fait linguistique.

3.2.3. Temps (I)

Le terme Temps est de Fillmore (1971 :41), souligné par Anderson 1975 :2). C'est le cas qui marque le moment dans lequel l'évènement se situe. Pour Wilmet (op.cit.) le syntagme nominal qui désigne la fonction de sujet dans la structure de surface peut exprimer le temps. Cette perception se manifeste en [46] :

46a. Ce 15 octobre est un jour faste pour le groupe (CT : 7953, n°95, p.13) ;

46b. Samedi est consacré au grand ménage (CT : 7953, n°105, p.13).

Les groupes nominaux (en gras dans l'énoncé) traduisent le temps. Ce temps n'est pas une catégorie grammaticale liée au verbe. Il est celui que le Petit Robert (2000 : 1938) définit comme la mesure de la durée d'un phénomène. C'est-à-dire, celui du déroulement du procès. Il peut être marqué par une date [46a] ou un jour [46b].

L'analyse des cas propositionnel et modal révèle les différentes valeurs que peuvent revêtir les divers rôles sémantiques. En effet, les verbes créent beaucoup de nuances sémantiques qui décuplent les valeurs du constituant sujet. Ceci a poussé Hjelmslev (1935 :4) cité par Anderson (1998 :16) à reconnaître que:

Délimiter exactement une catégorie est impossible sans une idée précise sur les faits de signification. Il ne suffit pas d'avoir des idées sur les significations de chacune des formes entrant dans la catégorie. Il faut pouvoir indiquer la signification de la catégorie prise dans son ensemble.

Et Riegel (1994 :125) de renchérir :

Etablir une liste universellement valable des rôles sémantiques n'aurait guère de sens. Pour une même langue, les inventaires diffèrent quantitativement et qualitativement selon les modèles d'analyse.

Comme exemple nous avons la notion d'Agent qui se subdivise en acteur et en causateur. Celle d'Experimenteur qui se subdivise en plusieurs autres nuances : Siège, Expérient, Patient. Chaque auteur veut rapprocher sa terminologie de la réalité qu'il décrit. Ces valeurs sont susceptibles d'occasionner des difficultés sur le plan didactiques. La Grammaire Casuelle nous a permis de classifier les échantillons des valeurs du sujet que nous avons relevés. Néanmoins, une étude sémantique de la fonction sujet serait très intéressante dans la mesure où elle permettrait de faire une démarcation précise entre la fonction syntaxique sujet et ses différents rôles sémantiques. Dans ce sens, Serbat (1985 :132) cité par Onguéné Essono ch. (2001 :137) reconnaît que

Les notions d'agent, patient, destinataire ou instrument se déduisent du sens de l'énoncé, elles n'ont effectivement rien à voir avec la relation syntaxique entre un terme nominal et un verbe, relation qui reste stable dans tous les cas.

La sémantique rend donc l'interprétation très subjective. Le même constituant sujet voit ses valeurs se décupler comme le traduit ce schéma :

SN

(Sujet) x

x A

x P

x S

A B

A = Agent

P = Patient

B = Bénéficiaire

L'ensemble de départ A (ensemble de constituants représentants la fonction sujet) contient un élément dénommé SN1 susceptible de remplir, dans une phrase, la fonction de sujet. Par contre, l'ensemble d'arrivée B (ensemble des valeurs de SN1) contient trois éléments. Ainsi, à l'unique constituant sujet correspond autant de rôles sémantiques.

Il est apparu au fil de ce chapitre que la sémantique et notamment l'action que les auteurs mettent au centre de l'analyse de l'énoncé motive les terminologies sémantiques et les valeurs du constituant sujet. La pluralité d'appellations répond donc à la préoccupation évidente de donner au sujet une dénomination qui cerne le mieux possible le rôle qu'il joue dans le drame que traduit un énoncé. Ainsi, la notion d'action sur laquelle s'appuient toutes ces analyses rend non seulement son application complexe, mais multiplie les valeurs de ce concept. Nous en avons recensé une trentaine et la liste reste ouverte. Toutes ces valeurs contribuent à embrouiller davantage la compréhension du concept sujet et pourraient même engendrer des difficultés sur le plan pédagogique. L'analyse sémantique n'ayant pu donner à notre problématique une solution satisfaisante, nous nous tournons vers la perception syntaxique. Le sujet étant considéré par la grammaire structurale comme une fonction grammaticale, l'étude sémantique que nous venons de faire sera donc complétée par l'approche structurale du sujet. Ainsi, le prochain chapitre se portera sur l'étude des appellations syntaxiques de la notion.

CHAPITRE 3 : LA TERMINOLOGIE MORPHOSYNTAXIQUE

DU SUJET

L'analyse des terminologies sémantiques du sujet que nous avons faite au chapitre précédent ne permet pas de décrire le fonctionnement réel de ce constituant. Son étude ne peut être totale qu'avec l'analyse des appellations grammaticales du sujet que nous nous proposons de faire dans ce chapitre.

En fait, la grammaire structurale ne donne pas à la notion de sujet une définition unique. Elle présente plusieurs approches qui apportent, chacune au sujet, une terminologie propre. Plus descriptive, la grammaire moderne a recensé les critères d'identification du sujet. Ainsi, Dubois (1976 :17) et Petiot (2000 :28) valident les spécificités formelles que Riegel et alii (1994 : 136) reconnaissent de manière globale à la fonction sujet :

la suppression du sujet rend agrammaticale la phrase ; le sujet appartient à la catégorie du nom ; le sujet est un constituant de la phrase, il est préposé au verbe ; le sujet régit l'accord du verbe en nombre, en personne et parfois en genre ; dans le passage de l'actif au passif, le sujet de la phrase active devient complément d'agent du verbe passif...

Ces caractéristiques sont souvent résumées sous l'unique dénomination de morphosyntaxe que Dubois et alii (1973 : 326) perçoivent comme la description des règles de combinaison des morphèmes pour former des mots, des syntagmes et des phrases, et des affixes flexionnelles (conjugaison et déclinaison). La morphosyntaxe prend en compte divers niveaux d'analyse de la notion, entre autres la morphologie et la syntaxe. Ce chapitre a pour ambition de faire la lumière sur les désignations du sujet relevant de la morphologie, celles relevant de la syntaxe et pour finir montrer l'impact de la perception morphosyntaxique sur les appellations de ce constituant de phrase.

1. LES DONNEES MORPHOLOGIQUES DE LA TERMINOLOGIE DU SUJET

Les données morphologiques représentent les propriétés formelles qui ont amené les auteurs de grammaires à donner certaines appellations au constituant sujet. Ces formes sont liées soit à la nature du constituant qui assure dans la phrase la fonction de sujet, soit aux variations (singulier, pluriel) qu'il connaît dans son rapport avec le verbe. Ainsi, la nature du constituant et les flexions qu'il subit parfois constituent des motifs susceptibles de modifier son appellation. De ce fait, Dubois et alii (1973 :326) expliquent la morphologie comme

[...] des formes diverses que prennent (des) mots selon la catégorie de

nombre, du genre, de temps, de personne et selon le cas (flexion des mots) [...]

Nous avons dénombré deux désignations spécifiques du sujet relatives à la morphologie : SN1 et Régent.

1.1. Le Syntagme nominal 1 (SN1)

L'appellation SN1 est liée à la nature du constituant sujet dans une phrase. Parler de la nature d'un mot revient à dire s'il est un nom, un pronom, un infinitif, une préposition, un adverbe, un article, un adjectif. Dubois (1976 : 17) reconnaît à propos que le constituant qui représente le sujet dans un énoncé appartient à la catégorie du nom, il peut par conséquent recouvrer toutes les configurations ci-dessus mentionnées.

Pour Roberge (2002), dans une phrase, un syntagme correspond à une unité formée d'un groupe de morphèmes. Dans les mêmes circonstances, Muller (2002 : 202) parle d'arguments et Le Goffic (1993 :10), de groupe nominal (GN).

Le SN ou GN a pour tête un nom d'où l'adjectif nominal commun aux deux appellations. Ces morphèmes assument, dans la phrase, différentes fonctions syntaxiques. Et le chiffre 1 que Dubois (1967 :17) associe à l'expression Syntagme nominal détermine donc la place de ce SN sujet dans la phrase comme nous le voyons dans les échantillons suivants :

47a. Ces plantations couvrent à ce jour une superficie d'environ 1500 hectares

(CT : 7955, n°12, p11) ;

47b. Sauvegarder tant d'articles depuis juillet 1974 est réellement incroyable.

(CT: 7735, n°67, p13) ;

47c. Qu'il s'en aille m'étonnerait beaucoup (Dubois et alii, 1973, 467) ;

47d. En général, on cherche un terrain bien placé (CT : 7957, n°58, p9).

Les constituants en gras dans ces énoncés représentent des SN1 en [47a] ou leurs équivalents en [47b, c, et d]. Le GN ces plantations a pour tête plantations qui domine le déterminant ces. Sur le plan paradigmatique, les SN1 peuvent être substitués soit par des noms soit par des pronoms comme en [47']:

47'a. Elles couvrent à ce sujet une superficie...

47'b. La sauvegarde de tant d'articles ...est réellement incroyable ;

47'c. Son départ m'étonnerait beaucoup...

La substitution est nominale en [47'b et 47'c] et pronominale en [47a]. De toutes les façons, le SN1 régit formellement son verbe.

1.2. Régent

Le régent est le constituant qui entretient avec le verbe des contraintes d'accord. En introduisant la terminologie régent pour dénommer le constituant sujet, l'intention de Galichet (1971:116) est d'établir un lien étroit entre le sens du mot désignant ce qui est communément appelé sujet et le rôle de celui-ci dans l'énoncé. En fait, le terme sujet, conventionnellement employé pour traduire la fonction du même nom, est souvent source d'équivoque. Il est tantôt sujet de l'énoncé, tantôt sujet du verbe. Aussi, cet auteur estime-t-il que ce terme est impropre. Il s'agit du constituant sujet qui régit le verbe en lui imposant ses marques de personnes et de nombre comme dans [48] :

48a. Les documents seront analysés (CT : 7946, n°11, p.13) ;

48b. Différents ateliers figurent au menu de la rencontre (CT : 7946, n°112, p.14) ;

48c. Les villageois ont alerté la gendarmerie (CT :7735, n°113, p.17).

Les SN les documents, différents ateliers et les villageois sont des sujets, non parce qu'ils font respectivement les actions d'analyser, de figurer et d'alerter - ils ne seraient alors que des agents - mais parce qu'ils soumettent chacun son verbe en lui imposant ses marques de nombre. Si le verbe figurent prend la marque du pluriel, c'est parce que ateliers, son sujet grammatical, est à la troisième personne du pluriel. Il en est de même pour [48a et 48c] où les sujets grammaticaux (documents et villageois) confèrent aussi à leur verbe leur marque du pluriel. Ainsi, ces termes pourraient être appelés plus justement régent puisqu'ils régissent grammaticalement leurs verbes. Galichet veut rapprocher le signifiant (régent) de la réalité qu'il représente en syntaxe.

En conséquence, nous pouvons affirmer que la nature du mot et le rapport qu'il entretient avec son verbe ont motivé ces deux appellations du constituant sujet. Cependant, nous avons constaté que le SN1 prend diverses formes : un infinitif en [47b], une proposition en [47c] et un pronom indéfini en [47d]. Ce qui laisse présager un impact certain sur les dénominations du constituant sujet.

2. LES MOTIVATIONS SYNTAXIQUES DE LA DENOMINATION

DU SUJET

Les désignations d'origine syntaxique sont issues de l'interprétation de la phrase au niveau de la syntaxe. Et, Dubois et alii (1973 : 480) définissent la syntaxe comme la partie de la grammaire décrivant les règles par lesquelles on combine en phrase les unités significatives.

La syntaxe explique donc d'une part, l'ordre des mots dans la phrase et d'autre part, les relations qui existent entre les éléments qui la composent ; les désignations y relatives sont : Primus, Prime actant et N0.

2.1. Primus

Les grammaires reconnaissent au sujet la place de constituant numéro un. Sur ce point, Le Goffic (1993, 10) explique que toute phrase est constituée d'une séquence ordonnée de constituants formés d'une tête et de ses expansions. L'auteur parle de séquence ordonnée pour montrer que les constituants de la phrase ne sont pas disposés de manière fortuite. Et Dubois (1976 :17) de renchérir l'ordre des syntagmes nominaux relativement au verbe permet de distinguer le syntagme sujet qui est préposé au verbe.

Cette perception date d'ailleurs du Moyen-?ge lorsque Scaliger, cité par Chevalier (1968 :185) attribue au constituant sujet le nom de primus. Il comptait dépouiller cette fonction du poids du sens et éviter ainsi le métalangage capable de favoriser la confusion entre une étude syntaxique et une analyse sémantique. Il a donc estimé que le nom donné aux cas et aux modes enlise l'analyse dans des emplois particuliers et la détourne d'une étude de la syntaxe, c'est-à-dire des relations.

Le primus représente donc dans les énoncés [49] les SN préposés au verbe. Ces SN sont en gras dans le texte.

49a. Les résultats devraient être connus avant la rentrée (CT : 7946, n°95, p13) ;

49b. Le délégué général explique [...] (CT : 7955, n°39, p12) ;

49c. Mais, le passage du doyen m'a redonné espoir (CT : 7951, n°117, p16).

Le primus constitue l'équivalent syntaxique du SN que Tesnière nomme prime actant.

2.2. Prime actant

L'appellation prime actant est de Tesnière (1976 : 108-110). Le mot actant, l'une des composantes de la dénomination de Tesnière, fait penser à une perception sémantique. D'ailleurs Tesnière (op. cit : 108) reconnaît que le prime actant est l'équivalent du sujet sémantique dans la grammaire traditionnelle.

L'auteur conçoit en effet un énoncé comme un mini drame dans lequel les actants, équivalents des constituants nominaux en syntaxe, prennent part au déroulement de l'évènement décrit par énoncé.

Toutefois, l'appellation actant est globalisante parce qu'elle ne permet pas, au niveau de la structure, de distinguer l'actant qui assume la fonction de sujet des autres. Pour ce faire, Tesnière délimite le nombre de ses actants à trois et pour spécifier le constituant sujet des autres actants, l'auteur adjoint le mot prime, adjectif numéral ordinal, au terme actant.

Ce qui distingue les deux dénominations (primus et prime actant) est que la grammaire dépendancielle considère le verbe comme un atome autour duquel gravitent plusieurs molécules (actants). Le verbe représente ce qu'il nomme noeud central, il est le vecteur directeur de la phrase. Muller (2002 :47) utilise le mot noyau pour dénommer le verbe parce qu'il lui revient d'organiser les positions syntaxiques qu'occuperont ses constituants immédiats ou actants. A travers le stemma, expression graphique de l'ordre structural de la phrase, Tesnière schématise la hiérarchie des connexions. Ainsi, nous aurons de la phrase [50], le stemma suivant :

50- Le bandit sème la panique (CT : 7945 : n°8, p9)

sème

bandit

panique

le la

Cette représentation arborescente laisse apparaître les différents constituants de la phrase et leur hiérarchie. Elle situe le syntagme verbal au-dessus de tous les autres constituants de la phrase. A travers ce schéma en effet, le syntagme verbal sème, noeud central de la phrase, domine deux syntagmes nominaux : le prime et le second actant. Le prime actant, représenté par le groupe nominal le bandit, a une position bien définie. Il est situé à gauche du SV et du second actant la panique. A ce propos Tesnière (1976 : 107) affirme :

Dans la représentation stémmatique, on aura avantage à adopter le principe de toujours disposer le prime actant à la gauche du second actant et celui-ci à la gauche du tiers actant.

Et Onguéné Essono Ch. (2001 :133) renforce cette opinion de Tesnière en reconnaissant que

la fonction grammaticale se présente comme l'expression d'une servitude de position. Elle correspond à la place qu'un lien connexionnel entre A et B assigne à l'unité B pour marquer la nature particulière de la relation de B avec A. De ce point de vue somme toute structural, il y a lieu d'affirmer qu'une fonction grammaticale réfère à un poste syntaxique.

Le rôle syntaxique qui apparaît stable ne semble pas être la garantie de la stabilité des dénominations comme nous ne cessons de le remarquer. Par ailleurs, l'usage quotidien de la langue ne respecte pas toujours la structure canonique (S+v+C) dont parle Tesnière. Le sujet est parfois antéposé au verbe. Ce bouleversement occasionne des difficultés aux niveaux des dénominations comme nous le verrons dans la suite de ce chapitre.

2.3. N0

La dénomination N0 est employée par plusieurs auteurs de grammaire, entre autres Beacco et alii (2001 :43) et Auroux et alii (1996 :100). La lettre N est neutre. Elle n'a aucun sens. C'est un symbole. Il en est de même pour le chiffre 0 ; chiffre dont l'utilisation n'est pas explicitement justifiée. Nous présumons qu'il traduit la position incontestable du constituant sujet ; constituant tellement lié au verbe que sa place est égale à zéro. Ceci rejoint Roberges (2002 :3) qui propose les symboles (SN0, X, Y ou même Z) pour nommer les constituants de la phrase. Cet auteur n'accorde pas l'importance au nom que peut prendre un fait grammatical. L'essentiel est de comprendre le fonctionnement de chaque constituant dans le grand ensemble que forme la phrase. C'est pour cela qu'il propose des symboles pour désigner tant le constituant sujet que les autres constituants de la phrase. Ainsi, dans les énoncés [51] :

51a. Le gouverneur a mis tous les moyens à notre disposition (CT : 7735, n°70, p9) ;

51b. La police nationale a renforcé sa présence sur les lieux (CT : 7957, n°104, p11) ;

51c. Les exposés ont produit des débats riches (CT : 7957, n°3, p6).

tous les groupes nominaux sujet peuvent être désignés par N0, SN0 ou même par X. L'essentiel est de reconnaître qu'il y a un N0 qui gouverne le verbe sur le plan structural. L'important n'est pas de savoir s'il est un être ou une chose ou s'il fait l'action ou la subit. La présentation de N0 ne laisse apparaître aucune nuance sémantique. Petiot (2000 : 115) n'affirme-t-elle pas que

la terminologie s'enracine dans une organisation conceptuelle : elle réfère à des concepts, et non à des objets concrets ; elle permet de parler des objets concrets que l'on observe dans les énoncés, au sein d'une approche théorique qui en rend compte.

Ceci témoigne l'objectif des auteurs de l'appellation N0 : créer davantage un écart entre la syntaxe et la sémantique afin d'éviter toutes les confusions que nous avons jusqu'ici soulignées.

En somme, l'évolution que nous avons notée au niveau des définitions du sujet se reflète sur la dénomination de ce constituant de phrase. La recherche d'un symbole comme terminologie du constituant sujet traduit la volonté de libérer ce constituant de l'impasse que provoque la description traditionnelle. Ainsi, N0 apparaît pour la grammaire moderne comme une terminologie plus opératoire.

Sur le plan morphosyntaxique, toutes les caractéristiques se combinent pour former un tout. Les principales désignations (primus, SN1, régent, prime actant, SN0, N0) qui se dégagent ici se recoupent. Par conséquent, des appellations du constituant sujet qui émanent de l'approche syntaxique, Il n'en existe aucune divergence, si oui au niveau de leurs signifiants respectifs. Toutes ces désignations répondent aux critères inhérents à la fonction sujet. Qu'une dénomination se présente sous la forme d'une expression ou d'un symbole, les critères identificatoires sont les mêmes.

Cependant, l'approche morphosyntaxique soulève quelques difficultés sur lesquelles il convient de revenir.

3. L'IMPACT DES CRITERES IDENTIFICATOIRES DU CONSTITUANT SUJET SUR SA DENOMINATION

Au cours de nos investigations, nous avons rencontré plusieurs expressions qui peuvent être assimilées aux désignations du sujet. Ces différents supports du verbe suivent la même courbe que celle des véritables désignations syntaxiques. Ainsi, les critères morphologiques et syntaxiques en sont à la genèse. Les diverses expressions identifiées qui sont susceptibles de créer la confusion entre les désignations grammaticales du sujet sont liées tantôt à la place du sujet dans la phrase, tantôt à l'accord de ce constituant avec son verbe, tantôt à la stylistique comme l'analyse va le montrer.

3.1. Les problèmes liés à la nature du constituant sujet

Les différents termes qui accompagnent le verbe dans une phrase sont de nature très variée. Et le souci que les grammaires ont d'attribuer un nom à chaque terme en tenant compte de sa nature crée des expressions telles que sujet clitique, sujet pronominal, sujet nominal, sujet relatif, sujet multiple et sujet collectif.

3.1.1. Sujet clitique

L'expression sujet clitique est de Le Goffic (1993 : 146). Cependant, l'auteur n'en circonscrit pas les contours. C'est Muller (2002 : 217) qui reconnaît que

le mot clitique désigne un terme ayant certaines propriétés phonologiques et syntaxiques : forme réduite, parfois décrite comme atone, ou plus exactement dénuée d'accent propre, et liée à une position syntaxique dont le noyau est un autre terme.

A travers les exemples qu'il en donne, l'on identifie le pronom personnel (je, me, le, tu..) dit conjoint. Il est conjoint parce que, contrairement au pronom disjoint (moi, toi, lui..), leur position est fixe dans la phrase. Le pronom conjoint se place devant le verbe alors que les pronoms disjoints ont, dans un énoncé, une position relativement mobile par rapport au syntagme verbale : moi, je le vois venir. On parle de conjoint aussi parce que, dans sa structure arborescente, il ne laisse pas transparaître les différentes sections du mot ou groupe de mots qu'il reprend. En [52] par exemple, Il s'agit de il, nous, je.

52a. Il est titulaire d'un diplôme d'ingénieur (CT : 7955, n°17, p 11) ;

52b. Nous prenons les risques (CT : 7945, n°164, p 13) ;

52c. Je joue avec mes enfants (CT : 7953, n°103, p 13).

Ces pronoms sont dans un emploi anaphorique. Leurs référents peuvent se trouver soit en amont soit en aval du discours. Ils occupent dans l'énoncé les mêmes positions que le SN1. L'expression sujet clitique n'apporte donc à la fonction sujet aucune nuance fondamentale qui l'écarte du SN1. L'auteur a tout simplement voulu rapprocher ce type de sujet à la réalité formelle qu'il représente.

3.1.2. Sujet nominal /Sujet Pronominal

Ces appellations sont de Riegel et alii (1994 :139), Combettes et alii (1977 :79) et Muller (2002 : 122.). Ces auteurs ne les définissent pas. On observe que ces expressions vont toujours ensemble parce que le second vient pallier une insuffisance. En effet, l'inversion du sujet rend complexe la construction de la phrase. Elle produit d'autres structures qui, pour être grammaticalement et sémantiquement correctes, font appel à des outils grammaticaux ayant pour rôle de corriger certaines imperfections. Ainsi, une phrase déclarative [53'a] par exemple, a besoin de ces aménagements lorsqu'elle subit la transformation interrogative [53a] :

53a. Pourquoi la loi n'est-elle pas respectée ? (CT : 7953, n°20, p5) ;

53a'. La loi n'est pas respectée.

53b. Comment les populations vivent-elles l'insécurité [...] ? (CT : 7945, n°163, p 13) ;

53b'. Les populations vivent l'insécurité.

Dans ces structures, loi est appelé sujet nominal et elle, sujet pronominal. Ces désignations se justifient par le fait que le sujet nominal est représenté par un nom et le sujet pronominal par un pronom. Il existe donc un rapport entre le signifiant et le signifié. Par ailleurs, les mots loi et elle en [53a], population et elles en [53b] renvoient à une seule et même réalité ; ils sont dits coréférenciels selon Muller (op.cit.). En plus, nous relevons que le terme sujet est commun aux deux dénominations. Le sujet pronominal duplique les caractéristiques de personne, de genre et de nombre du sujet nominal. Seulement, on ne sait pas si le phénomène de coréférence est valable lorsqu'il s'agit de déterminer le statut syntaxique de chaque constituant. En d'autres termes, si le groupe nominal les populations est sujet du verbe vivent, en est-il de même pour le pronom anaphorique elles ?

3.1.3. Sujet relatif

L'expression sujet relatif est de Combettes et alii (1977 :79). Ils ne l'expliquent pas. Ils semblent laisser le soin à chaque utilisateur de déduire son contenu à travers ces exemples :

54a. Un chiffre qui représente trois fois la moyenne ( CT : 7953, n°42, p11) ;

54b. Du sang qui se coagule progressivement (CT : 7735, n°96, p16) ;

54c. Les personnes qui sollicitent un terrain s'adressent d'abord au chef (CT : 7945, n°72,

p13).

Il s'agit du pronom qui qui reprend son antécédent. Son nom naît de la nature du terme qui le représente. En effet, ce pronom est par nature un pronom relatif. Le verbe prend cependant les marques morphologiques de l'antécédent et non du sujet relatif. Il y a un rapport entre le signifiant (sujet relatif) et son signifié (qui).

Cependant, en se fondant sur la nature des mots pour nommer leur fonctionnement syntaxique, on court le risque de voir ce type d'expressions multiplié à profusion. Ces le cas en [55] où on pourrait, suivant cette logique, avoir affaire à un sujet infinitif en [55a], un sujet propositionnel en [55b], un sujet indéfini en [55c].

55a. Exercer le plus beau métier du monde devient un rêve (CT : 7735, n°68, p13) ;

55b. Qu'il voyage en première est un luxe [...] (CT : 7946, n°126, p14) ;

55c. On se ballade tendrement (CT : 7957, n°80, p11).

Les difficultés de dénomination causées par cette logique s'accroissent.

3.1.4. Sujet multiple

Combettes et alii (1977 : 74) introduisent la dénomination de sujet multiple pour désigner un groupe nominal composé de plusieurs constituants qui occupent le poste syntaxique de sujet. Dans ce cas, le verbe s'accorde avec l'ensemble de ces sujets comme dans [56]

56a. Les problèmes et les défis sont communs à l'ensemble de la population

(CT : 7946, n°88, p13) ;

56b. La machette et la houe peuvent s'avérer traîtresses (CT : 7953, n°121, p13) ;

56c. Heureusement, [...] des numéros et des horaires sont inscrits sur des billets

(CT : 7945, n°55, p 8).

Chaque groupe sujet communique ses marquent au verbe, or, pris isolément, les constituants sujet en [56b] sont chacun au singulier, mais le verbe, lui, s'accordent avec les deux sujets parce qu'ils s'additionnent par l'intermédiaire de la conjonction de coordination et. Par cette addition, les deux constituants représentent désormais deux aspects d'une même entité. De ce fait, Tesnière (1976 : 108) parle de dédoublement et Le Goffic (1993 : 10) de groupe. Ainsi perçu, l'expression sujet multiple pour exprimer un groupe sujet, est discutable.

3.1.5. Sujet collectif

Combettes et alii (op. cit.) emploient sans la justifier l'expression sujet collectif pour nommer le syntagme nominal qui assure la fonction de sujet dans un énoncé. Il n'explique pas non plus l'épithète collectif adjointe au terme sujet. Il n'en donne que des exemples et nous trouvons des cas dans [57] :

57a. La plupart de nos candidats sont en stage bloqué (CT : 7946, n°92, p13) ;

57b. Une vingtaine d'élèves du collège a visité les différents services (CT : 7735, n°57,

p13) ;

57c. Il y a un an, un groupe de PVVS a publié « Remember sida » (CT : 7953, n°63,

p15) ;

57d. La majorité a recours à des produits bon marché (CT :7946 : n°125, p14).

Cette appellation présente une situation équivoque. En considérant que le sujet commande le verbe sur le plan morphologique, l'examen de ces structures pose quelques problèmes. Tantôt le verbe est au pluriel, tantôt il est au singulier. Dans [57a], le SN sujet à pour tête la plupart, ce GN est au singulier, par conséquent le verbe sont qui est au pluriel devait être au singulier. Dans [57b] par contre, nous avons une structure semblable, mais le comportement syntaxique du verbe est différent, celui-ci prend les marques morphologiques de la tête du SN sujet une vingtaine.

Le Goffic (1993 :133) déplore cette ambiguïté et constate tout simplement qu'il existe quelque marge d'hésitations quand il y a conflit entre la pure morphologie du groupe nominal et son sens ou sa référence. L'auteur relève cette difficulté sans pour autant y apporter une solution.

3.2. Les problèmes liés à la place du sujet : le sujet inversé

De manière générale, la grammaire reconnaît au constituant sujet la position préverbale dans la phrase. Cependant dans les usages, il existe des structures où le sujet ne respecte pas ce canon. De là naît le sujet inversé. Riegel et alii (1994 : 134), Combettes et alii (1977 : 78) qui en parlent relèvent que la caractéristique principale du sujet inversé est d'être post-posé au verbe. Dans cette construction, la découverte du sujet peut se faire par le retour à la phrase de base. Dans les énoncés suivants :

58a. Comment s'est faite l'installation sur ses sites à risque ? (CT : 7945, n°169, p 13) ;

58b. Pourtant, estiment les dermatologues, toutes ces pratiques sont dangereuses

(CT : 7946, n°135, p14) ;

58c. C'est là notre contribution, a conclu Marcelline (CT : 7955, n°75, p12).

les GN l'installation, les dermatologies et Marcelline sont nommés sujet inversé parce qu'ils sont postposés à leurs verbes respectifs. Il s'agit de nommer un sujet qui ne tient pas compte de l'ordre canonique de la phrase. Pour les auteurs, cette désignation semble aller de soi. Si le sujet n'est pas préposé au verbe, alors il est postposé. Et cette postposition inverse l'ordre de la phrase et renvoie le sujet à la fin de l'énoncé. Ceci justifie la présence de l'adjectif inversé auprès du mot sujet. A ce propos, Muller (2002 : 132) précise

le terme invers(é) est pris ici dans son sens configurationnel signalant

une position différente de celle qui est la plus usuelle et non dans un sens

dérivationnel.

L'expression sujet inversé exprime un type de sujet qui traduit la modalité de la phrase, en l'occurrence l'interrogation comme en [58a] ou une clause de style comme dans [58b et c]. Le sujet inversé n'est pas un type de sujet particulier. Il n'apporte rien de spécial à la notion. L'auteur a tout simplement voulu adapter la dénomination à la configuration que prend le constituant sujet dans la phrase. En fait, le sujet inversé se plie à toutes les exigences morphosyntaxiques de la fonction sujet.

3.3. La stylistique : source de difficultés dans la désignation du sujet

L'analyse du constituant sujet dans les phrases disloquées est à l'origine de la multiplication des expressions que les grammairiens ont attribuées au constituant sujet. Cette dislocation est la conséquence de tournures stylistiques. En fait, la stylistique est définie par Dubois et alii (1973 : 457-456) comme une

étude des faits d'expression du langage organisé du point de vue de leur contenu affectif, c'est-à-dire l'expression des faits de la sensibilité par le langage et l'action des faits de langage sur la sensibilité.

Ces faits d'expressions se manifestent dans l'énoncé à travers des figures de style que Dubois et alii (op cit.) définissent comme ...les divers aspects que peuvent revêtir, dans le discours, les différentes expressions de la pensée. Il existe donc diverses figures entre autres les figures de construction. Celles-ci s'intéressent à l'ordre des mots dans la phrase. Dans la phrase française, l'ordre naturel des mots est S+V+C dans une phrase simple. Mais si le locuteur désire mettre un accent particulier sur un élément de la phrase, il peut utiliser un procédé nommé emphase. Celui-ci peut être représenté de deux manières : au niveau phonologique, par une intonation sur un mot de l'énoncé et au niveau de la syntaxe, par le détachement en début ou en fin de phrase du mot en question lorsque celui-ci est marqué dans l'énoncé. La stylistique fait donc ressortir deux expressions qui sont appelé groupe sujet repris et sujet sous-entendu.

3.3.1. Groupe sujet repris

Cette terminologie est de Bonnard (1989 : 282). Elle est le résultat d'une construction stylistique surtout observée dans le français courant oral. C'est une construction disloquée qui substitue à l'ordre grammatical, un ordre logique et psychologique. Il s'agit, dans cet exemple de l'auteur

59. Ta cousine, nous l'avons vue à Hendaye, mon frère et moi

du groupe nominal mon frère et moi, rejeté en fin de phrase. Nous sommes en présence d'un énoncé qui contient deux éléments ayant la même valeur. Cependant, l'intention de l'auteur est d'établir une relation d'équivalence entre le groupe nominal (mon frère et moi) que reproduit le pronom personnel nous. Suivant l'ordre de leur apparition dans la structure de la phrase, l'un est sujet nous et l'autre est groupe sujet repris, mon frère et moi. Celui-ci apporte au sujet une précision. Le pronom personnel nous n'est plus ambigu parce que son référent est connu. Les constituants sont dont dits coréférenciels. Bonnard ne propose aucune désignation au pronom personnel nous qui modifie pourtant la morphologie du verbe avons vu. Selon la logique de l'auteur, peut-on l'appeler sujet anticipé ?

La même interrogation est perceptible dans ces énoncés de Bonnard (op.cit.) :

Le groupe substantival en gras est repris à l'aide d'un pronom personnel parce que le nom n'est pas à mesure d'attribuer au verbe ses marques. Ceci arrive généralement lorsque le verbe est soit à la première, soit à la deuxième personne du singulier et du pluriel. Sur le plan discursif, les auteurs traditionnels appellent thème les groupes nominaux Pierre et moi, Paul et Pierre, Jacques. Il y a lieu de se demander si les pronoms personnels qui assurent le relais et aident à pallier les insuffisances pourraient être appelés sujet relais ou tout simplement co-thème selon l'approche de l'auteur.

Bonnard fait ici une étude structurale qui confirme l'idée selon laquelle la grammaire traditionnelle n'est pas qu'une grammaire prescriptive, elle est aussi descriptive.

3.3.2. Sujet sous-entendu

La désignation sujet sous-entendu est employé par Le Goffic (1993 :140). Pour lui, l'épithète sous-entendu, ajoutée au terme sujet est sans doute assez significative et suffisante pour l'expliquer. Il n'en donne que des exemples. On identifie ce type de sujet dans les phrases impératives, le style télégraphique, les registres familiers, les archaïsmes, le style impersonnel et dans les énoncés où le constituant sujet est implicite. Quelques échantillons sont reconnus dans [61]

61a. Reste que, malgré ces problèmes de réseau, les abonnés ont les yeux rivés sur les

tarifs (CT : 7951, n°169, p.18) ;

61b. Rappelons que le mondial Afrique est organisé par une ONG (CT : 7951, n°47, p11) ;

61c. Loin s'en faut. (CT : 7735, n°177, p 19) ;

En effet, les verbes en italique n'ont pas de sujets matérialisés dans les énoncés. Pourtant, leurs finales nous amènent à voir en [61a] un sujet impersonnel il et en [61b] une structure à la première personne du pluriel de l'impératif.

Par ailleurs, dans les exemples [62] empruntés à Creissels (1995 :225),

62a. Achète cette voiture

62b. Vends cette voiture

L'auteur pense qu'il serait difficile de procéder à une analyse grammaticale du sujet dans ces énoncés. En d'autres termes, même si on reconnaît à un énoncé à l'impératif un sujet sous-entendu, cet impératif a une valeur pragmatique et non grammaticale. En clair, l'objectif est d'exécuter l'ordre qui est donné à travers ces phrases. A ce sujet, Creissels (op cit ) affirme :

En réalité, [62a] est une mise en demeure d'assumer le rôle que doit assumer le référent de A pour que l'on puisse asserter A achète cette voiture, et [62b] est une mise en demeure d'assumer le rôle que doit assumer le référent de A pour que l'on puisse asserter A vend cette voiture

Au terme de ce chapitre dans lequel nous avons examiné l'approche morphosyntaxique du sujet, une conclusion persiste. En se fondant sur la nature du mot, sur sa place dans la phrase ou sur la stylistique pour attribuer des noms aux différents supports du verbe, on court le risque de voir ces désignations se multiplier à l'infini.

Aussi, les terminologies issues de la description syntaxique du sujet sont tributaires de son comportement au sein de la phrase. Sujet grammatical, relatif, clitique, sous-entendu...ont pour but de lever le flou occasionné par les valeurs sémantiques relevées au deuxième chapitre : patient, agent, siège...

L'ambition de la grammaire structurale est de conférer à la fonction sujet une dénomination stable, caractéristique des propriétés syntaxiques et opératoires du support verbal. Voilà pourquoi elle est passée progressivement des unités lexicales comme syntagme nominal sujet, primus, prime actant... vers des symboles tels que SN1, SN0, N0. Mais, cette symbolisation ne peut-elle pas avoir un impact sur l'enseignement de la notion de sujet ?

CONCLUSION GENERALE

Notre objectif était de chercher les fondements des appellations du constituant sujet, de voir les motivations des auteurs des appellations, d'établir, s'il y a lieu, les rapports entre chaque désignation et son contenu et de relever les difficultés inhérentes à l'utilisation efficiente de ces dénominations.

Dans nos investigations relatives à la recherche des fondements des désignations du sujet, il a été établi que la volonté des auteurs de grammaire de traduire, en des termes et expressions toujours plus précis leur perception de la notion, est à l'origine de la création de nouvelles terminologies. Par conséquent, l'apparition de nouvelles appellations du sujet est étroitement liée à celle de ses définitions, c'est-à-dire qu'elles sont relatives soit à la sémantique, soit à la syntaxe.

L'exploitation conjointe des deux sources de définition du sujet qui alimentent simultanément ses terminologies révèle des ambiguïtés résultant de ces définitions. La source sémantique, la plus féconde, apparaît souvent peu informative. Elle est constante. Elle présente entre autres inconvénients, les exceptions auxquelles se heurtent les définitions qui en découlent. A tout ceci, il convient d'ajouter que la sémantique crée les différentes valeurs du sujet qui contribuent à perturber davantage l'intelligence de la notion.

La source syntaxique se révèle par contre plus informative sur le plan du fonctionnement de la langue. Pour la grammaire structurale, le terme sujet ne correspond pas à la définition que la grammaire traditionnelle lui donne. Les auteurs de la grammaire moderne s'attardent sur la perception linguistique du terme sujet, perception qui le rend impropre dans le contexte grammatical. C'est ce qui a déterminé la recherche des terminologies et a conduit à la multiplication des désignations de ce constituant.

Il s'est donc révélé, le long de notre étude, que les deux critères fondamentaux de définition du sujet sont également les fondements de ses terminologies.

Notre revue de l'aperçu théorique de cette notion nous a permis de relever dix désignations du sujet. Ces appellations sont surtout fondées sur le sens, la syntaxe et le discours.

Nos investigations relatives à l'identification des désignations liées au sens en ont révélé quatre auxquelles peut s'ajouter une longue suite de valeurs sémantiques. Dans l'optique sémantique, le constituant sujet subit ou profite de l'action décrite dans le procès. Ce mot est influencé soit par la sémantèse du verbe comme nous l'avons constaté plus haut, soit par sa propre sémantèse.

Nos recherches nous ont montré en outre que d'autres catégories syntaxiques peuvent faire l'action ou même la subir. Dans l'approche sémantique, seul le verbe soumet le sujet dans une relation univoque. Il est par conséquent difficile d'épuiser l'inventaire des différentes valeurs du sujet qui tendent à troubler la compréhension du concept. Seul le contexte est susceptible d'expliquer toutes les nuances de sens que peut avoir cette fonction.

La perception sémantique du sujet nous apparaît ainsi peu fiable car elle relève beaucoup plus du plan infra-grammatical que grammatical. De ce fait, le rapport entre l'appellation sémantique est la réalité qu'elle représente est sujette à caution. Les bases du sujet, mises sur pied depuis la période préclassique, se sont enrichies de la perception classique bien que ses fondements soient également fort critiqués par la grammaire moderne.

Sur un autre plan, la syntaxe ne propose pas, à proprement parler, une définition du sujet. Les auteurs de la grammaire moderne donnent plutôt les caractéristiques formelles pouvant permettre une identification de ce constituant de phrase. Ces caractéristiques se situent au niveau paradigmatique, morphologique, et syntaxique. En effet, la nature du constituant sujet, son accord avec le verbe et sa place dans la phrase sont autant des raisons qui poussent les auteurs de grammaires à le nommer. Cependant, les multiples expressions que nous avons notées çà et là ne sont pas toutes considérées comme des appellations particulières du sujet, certaines d'entre elles ne représentent que des formes diverses que peut prendre le constituant sujet dans un énoncé. Nous en avons néanmoins distingué qui reprennent, de manière systématique, le terme sujet. Les auteurs ne justifient pas toujours les adjectifs qu'ils adjoignent à ce mot. Il est par ailleurs toujours le premier constituant dans les dénominations composées.

Même si certaines de ces dénominations sont considérées comme des indicateurs des différents supports morphologiques de la fonction, un élément essentiel mérite d'être souligné : ils ont les mêmes propriétés syntaxiques que les désignations grammaticales du sujet. Mais, ils n'apportent au sujet aucune nuance particulière qui puisse permettre de les classer au rang d'appellations. Dans ce sens, nous ne les considérons pas comme des dénominations particulières du sujet. L'inquiétude qui se dégage est que ces expressions peuvent occasionner une confusion réelle avec les dénominations authentiques du sujet. Nous craignons qu'elles ne constituent une source de difficultés sur le plan pédagogique.

Six dénominations syntaxiques du sujet ont donc été identifiées. La différence entre les appellations d'origine syntaxique se situe au niveau du signifiant, elles se rapprochent, pour la plus part, au niveau du signifié.

Par ailleurs, il est établi que la stylistique multiplie les faits de langue de même que les expressions pour les nommer. Ainsi, le thème habituellement perçu comme l'objet du discours devient, selon la structure de la phrase, un groupe sujet repris ou même un sujet nominal.

Toutefois, nous relevons que la prolifération des terminologies n'est pas un phénomène de mode ; chaque terminologie traduisant, à notre avis, une volonté d'établir avec plus de cohérence une liaison toujours plus étroite entre le signifiant et le signifié. Et cette préoccupation, faut-il le souligner, n'est pas propre à la fonction sujet.

Toutes les appellations utilisées ne sont pas les termes propres à la grammaire. Mais celle-ci a affecté à chacune d'elles une signification particulière. C'est-à-dire, une acception grammaticale. Des notions de la langue qu'elles étaient, elles sont devenues des notions de grammaire. On parle de ce fait du phénomène de factualisation ou de grammaticalisation.

En somme, tous les auteurs de la grammaire reconnaissent la fonction sujet comme une fonction indispensable. Le problème de terminologie que nous avons mis en lumière dans ce travail n'est que la résultante des difficultés que les grammaires ont à donner une définition adéquate au sujet. Dès lors, il ne suffit pas seulement d'affecter des noms à ce constituant, mais surtout de reconnaître son fonctionnement dans la phrase. La grammaire se trouvant à la frontière de plusieurs théories linguistiques, elle empiète sur celles-ci. Pour une étude complète de la notion de sujet, il est intéressant de procéder à son analyse profonde en prenant en compte les différents niveaux qui interfèrent afin d'attribuer à chacun d'eux une terminologie. Ainsi, l'approche sémantique pourrait rester avec ses multiples valeurs, au niveau communicationnel ou discursif, le terme thème serait conservé, quant à la fonction syntaxique sujet, la terminologie de sujet serait conservée pour désigner aisément le constituant sujet, surtout que nous convenons avec Martinet que la terminologie est un problème de convention.

L'intérêt de ce travail est de mettre à la portée des utilisateurs des terminologies que sont les chercheurs et les formateurs, un outil de travail. C'est dans ce sens que nous avons amorcé ce bilan des appellations du sujet. Ceci pourrait même s'étendre à d'autres notions.

Toutefois, ce travail s'ouvre sur une autre préoccupation : l'impact des appellations du sujet sur l'enseignement.

 

TABLEAU RECAPITULATIF DES DIFFERENTES TERMINOLOGIES DU CONSTITUANT SUJET

A la suite d'une présentation littérale de l'inventaire des terminologies, nous avons jugé opportun de faire une synthèse de nos investigations sous forme de tableau dans la perspective de mettre en lumière les éléments saillants du bilan de la terminologie du constituant sujet.

Terminologie

Auteur

Ouvrage

Editeur et ville

Année

1. Terminologies sémantiques

1.1. SUJET

ARRIVE, M et alii

La grammaire d'aujourd'hui : Guide alphabétique de linguistique française

 

1997

MARTINET, A

Syntaxe structurale

 
 

GREVISSE, M.

 
 
 

1.2. THEME

WAGNER et PINCHON

 
 
 

1.3. SUJET APPARENT /

SUJET REEL

GREVISSE, M.

 
 
 

BAYLON ET FABRE

Op cit.

 
 

2. Terminologies Morphosyntaxiques

2.1. SN1

DUBOIS

 
 

1976

2.2. PRIME ACTANT

TESNIERE, L.

 
 

1976

2.3. PRIMUS

SCALIGER cité par CHEVALIER, J.

Op cit

 

1968

2.4. RÉGENT

GALICHET

 
 

1971

2.5. SN0

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Grammaire d'enseignants et grammaire d'apprenants de langue étrangère, in Langue française n° 131

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4. THÈSE

BANDOLO, Ch. R. épouse

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de F. SAGAN, Thèse de Doctorat 3è cycle de grammaire

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5. DICTIONNAIRES

DUBOIS, J. et alii (1973) Dictionnaire de linguistique, Paris, Larousse.

DUCROT, O. et alii (1995)

Nouveau dictionnaire des sciences du langage, Seuil.

TABLE DE MATIERES

DÉDICACE

REMERCIEMENTS

INTRODUCTION GÉNÉRALE......................................................... 1

CHAPITRE 1 : LA TERMINOLOGIE DU SUJET : APERÇU THÉORIQUE.6

1 - LA PERCEPTION PRÉCLASSIQUE DE LA FONCTION SUJET...... 6

1-1. Le sujet dans l'Antiquité....................................................6

1-2. Le constituant sujet au Moyen-Âge.................................... 7

2 - L'APPROCHE CLASSIQUE DE LA FONCTION SUJET..................10

2.1. La perception du sujet par Port-Royal......................... .......10

2.2. La théorie des néo-classiques................................. . .......11

3 - LE POINT DE VUE DU STRUCTURALISME SUR LA NOTION

DE SUJET........................................................................... ..14

3-1. Le sujet perçu par le fonctionnalisme.......................... .......15

3.2 - Le point de vue du distributionnalisme sur le sujet...... ....... 16

3.3 - L'approche du sujet par le générativisme................. ....... . 18

3.4 - Le sujet vu par la grammaire dépendancielle............. ........19

3.5 - La perception du sujet par la grammaire prédicative.............21

4 - LIMITES DES DEFINITIONS ET DES MODES D'IDENTIFICATION

DU SUJET...................................................................................22

4.1. L'insuffisance dans la définition traditionnelle du sujet...........22

4.2. L'insuffisance dans la définition structurale du sujet... ... ......24

CHAPITRE II : LES TERMINOLOGIES SEMANTIQUES DU SUJET......27

1. ANALYSE DES TERMINOLOGIES LOGICO-SEMANTIQUES DU

SUJET........................................................................... 27

1.1. Sujet ............................................................................27

1.2. Thème...........................................................................28

Sujet logique...............................................................29

Sujet psychologique......................................................30

1.3. Sujet réel/Sujet apparent...................................................31

2. PRESENTATION DE LA GRAMMAIRE DES CAS..............................33

Les concepts de la grammaire des cas...................................34

La notion de Cas............................................... .......... 34

Le cas morphologique.................................. .......34

Le Cas sémantique............................................. 36

2.1.1.2.1.Le cas propositionnel..................................... 36

2.2.1.2.2. Le Cas modal.............................................. .37

2.2. Les principes de la grammaire casuelle ...................................... 38

2.2.1. Un argument ne peut porter q'un seul Cas ............. ...... 38

2.2.2. Un même cas ne peut apparaître qu'une seule fois dans

une phrase simple.......................................................38

2.2.3. Seuls les syntagmes nominaux représentant les mêmes cas

peuvent être coordonnés.............................. ...... . ........39

3. ANALYSE DES VALEURS DU CONSTITUANT SUJET.......................39

Les valeurs du sujet relatives au Cas propositionnel....................40

3.1.1. Agent (A)............................................................... 40

3.1.1.1 Acteur ................................................ .. 41

3.1.1.2. Causateur ............................................ 42

3.1.2. Patient (P)................................................................ 43

3.1.3. Bénéficiaire (B) .......................................................... 44

3.1.4. Datif (D)................................................................... 45

3.1.4.1 Expérimenteur (E)......... .........................45

3.1.4.2. Objet (O)............................................ . 46

3.1.5 Source (S) et But (G).................................................... 47

3.2. La valeurs du sujet générées par le Cas modal.......................... 48

3.2.1 Instrument (I)......... ................................................... 48

3.2.2. Locatif (L). ......... .................................................... 49

3.2.3. Temps (T)................................................................ 50

CHAPITRE 3 : LA TERMINOLOGIE MORPHOSYNTAXIQUE

DU SUJET............................................................. .... 53

1. LES DONNEES MORPHOLOGIQUES DE LA TERMINOLOGIE DU

SUJET .......................................................................... 54

1.1. Le Syntagme nominal 1 (SN1)............................................ 54

1.2. Régent............................................................................55

2. LES MOTIVATIONS SYNTAXIQUES DE LA DENOMINATION DU

SUJET................................................................................. 56

2.1. Primus ...........................................................................56

2.2. Prime actant.....................................................................57

2.3. N0..................................................................................59

3. IMPACT DES CRITÈRES IDENTIFICATOIRES DU CONSTITUANT SUJET

SUR SA TERMINOLOGIE ...............................................................60

3.1. Les problèmes liés à la nature du sujet.....................................60

3.1.1. Sujet clitique.................................................................. 60

3.1.1.2. Sujet nominal /Sujet Pronominal..................................... 61

3.1.1.3 Sujet relatif................................................................ 62

3.2. L'accord du sujet avec le verbe........................................ ...... 63

3.2.1 Sujet multiple ................................................................ 63

3.2.2 Sujet collectif.... ....................................................... 63

3.3. La place du sujet dans la phrase : le sujet inversé ....................... 64

3.4.La stylistique : source de difficultés dans la désignation du sujet......65

3.4.1. Le groupe sujet repris .......................... ........................ 66

3.4.2. Le sujet sous-entendu........................................... ...... .. 67

CONCLUSION GENERALE......................................................... . ........69

TABLEAU RECAPITULATIF DES DIFFERENTES TERMINOLOGIES DU CONSTITUANT SUJET..........................................................................73

BIBLIOGRAPHIE................................................................................. 74

TABLE DES MATIERES............................................................... .........77






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"Ceux qui vivent sont ceux qui luttent"   Victor Hugo