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l'arbitrage et la promotion des investissements dans l'espace OHADA

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par Carole DONGMEZA NAWESSI
Université Hassan II, Maroc - Master en droit des affaires 2008
  

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Section II : la circulation des sentences arbitrales au Cameroun

Notre exposé n'aurait pas été complet sans la présentation d'un cas particulier à savoir celui du Cameroun. Le Cameroun est pays membre de l'OHADA depuis le 20 octobre 1995, traité entré en vigueur le 2 décembre 1996. Il est après la Côte d'Ivoire, le 2ème pays de l'OHADA qui applique les normes de l'OHADA de façon notable151(*). Les sentences arbitrales étrangères ont l'autorité de la chose jugée et peuvent être reconnues et rendues exécutoires au Cameroun par le juge du contentieux de l'exécution dans les conditions prévues par les conventions internationales applicables, et à défaut, dans les mêmes conditions que les celles prévues par les dispositions de l'acte uniforme OHADA relatif à l'arbitrage et la loi N°2003/009 du 10 juillet 2003 désignant les juridictions compétentes visées à l'actes uniforme relatif au droit de l'arbitrage et fixant leur mode de saisine152(*). Il convient de voir ici si celui-ci facilite la circulation des sentences issues du droit OHADA (§I) ou bien issues de pays tiers à l'espace OHADA (§II). A ce stade, la présence du juge est nécessaire car de lui dépendra la portée de la sentence.

§I-) Les sentences arbitrales issues de l'arbitrage de l'espace OHADA

Une sentence arbitrale issue de l'arbitrage ad hoc c'est-à-dire en application de l'acte uniforme est celle qui peut soulever des difficultés d'application. Comme nous l'avons vu, l'arbitre ne jouit pas de l'imperium du juge. Heureusement, le législateur OHADA a pallié à cette incertitude en faisant recourir le juge a tout moment de la procédure arbitrale153(*). Nous allons donc voir le sort réservé aux sentences arbitrales issues de l'arbitrage de l'AUA en ce qui concerne la reconnaissance d'une part et l'exequatur d'autre part.

A-) La reconnaissance de la sentence

Il convient de voir ici la procédure de reconnaissance de la sentence arbitrale de l'AUA (1) parler de l'immunité d'exécution (2).

1-) la procédure de reconnaissance de la sentence arbitrale de l'AUA

La sentence pour être reconnue dans l'espace OHADA conformément à l'article 31 alinéa 2 de l'AUA suppose que la partie qui a eu gain de cause établisse l'existence de la sentence arbitrale. Son existence est établie par la production de l'original accompagnée de la convention d'arbitrage ou des copies de ces documents réunissant les conditions requises pour leur authenticité154(*). Son contrôle doit en effet porter que sur l'existence matérielle de la convention d'arbitrage. Le juge de l'exequatur n'a donc pas à vérifier la validité de la convention d'arbitrage qui accompagne l'original de la sentence. Selon l'article 23 de l'AUA, la sentence arbitrale a dès qu'elle est rendue l'autorité de la chose jugée relativement à la contestation qu'elle tranche. Cette autorité permet par l'exception de la chose jugée, d'éviter qu'une contestation tranchée soit, à nouveau, portée devant une juridiction étatique ou arbitrale. Elle permet également qu'une sentence puisse constituer un titre autorisant la mise en oeuvre de mesures conservatoires. Ce dernier point nous interpelle vivement car il peut se poser un problème si la partie contre la sentence est rendue est une personne morale de droit public (2).

2-) L'immunité d'exécution

L'article 2 alinéa 2 de l'AUA dispose que l'Etat et les collectivités territoriales peuvent être compromises. Ce qui est aussi vrai Occident peut aussi l'être en Afrique à travers l'arrêt Creighton dont voici les faits. Dans cette affaire, le gouvernement de l'État du Qatar avait confié à la société américaine Creighton la construction et l'entretien d'un hôpital. En 1986, ayant été expulsée du chantier pour inexécution du contrat, la société Creighton a initié une procédure arbitrale en application de la clause compromissoire CCI que contenait le contrat de construction. Quelques années plus tard, en exécution de sentences arbitrales devenues définitives, Creighton a fait procéder en France à des saisies-attribution sur des sommes détenues au nom du Qatar par différentes banques. La Cour d'appel a ordonné la main-levée des saisies au motif qu'il n'était pas établi que le Qatar avait renoncé à son immunité d'exécution. La plus haute juridiction de France a cassé l'arrêt de la Cour d'appel et a décidé que la renonciation à l'immunité d'exécution peut être déduite de l'acceptation par l'État à l'occasion de la signature d'une clause d'arbitrage CCI, remettant ainsi en cause les principes établis sur cette question dans l'arrêt Eurodif155(*). Dès lors, l'engagement pris par un État signataire d'une clause d'arbitrage d'exécuter la sentence dans les termes de l'article 28(6)156(*) du Règlement d'arbitrage de la Chambre de commerce internationale (CCI) implique renonciation de l'État à son immunité d'exécution. L'article 28(6) du règlement de la CCI se lit comme suit :

La sentence arbitrale revêt un caractère obligatoire pour les parties. Par la soumission de leur différend au présent Règlement, les parties s'engagent à exécuter sans délai la sentence à intervenir, et sont réputées avoir renoncé à toutes voies de recours auxquelles elles peuvent valablement renoncer.

Compte tenu de l'apport et de l'influence du règlement de la CCI dans la rédaction l'AUA, on pourrait logiquement penser retrouver une disposition similaire à l'article 28(6) de la CCI l'AUA pour ensuite transposer le raisonnement de l'arrêt Creighton à l'exécution d'une sentence contre un État membre de l'OHADA ayant souscrit au l'AUA.

Cela ne suffit pas car s'il y a une sentence contre eux, ils peuvent invoquer l'immunité d'exécution, ce qui entraverait malheureusement la circulation des sentences arbitrales car ce sont des obstacles juridiques et politiques dont la pratique est constante. La contrainte sur l'Etat et l'administration fait presque partout l'objet de réserve, de réticence. De ce fait l'exécution forcée est difficilement envisageable au Cameroun le principe découle de l'interprétation de l'article 13 de la loi de 16-24 Août 1970 qui interdit au juge de troubler de quelque manière, que ce soit, les opérations du corps administratif, le Cameroun ayant en grande partie un droit d'obédience française. Les règles de domanialité publique ont donc consacré le principe d'insaisissabilité des biens de l'Etat157(*), dont la méconnaissance aurait pour conséquence d'introduire le trouble, le désordre, dans le fonctionnement des organismes publics. Critiquant le caractère absolu de cette immunité d'exécution qui restreint l'efficacité du titre exécutoire, la doctrine camerounaise a suggéré de restreindre la portée de l'immunité d'exécution des personnes publiques, lorsque la saisie est pratiquée sur des biens affectés à une activité industrielle ou commerciale, celle-ci relevant des règles de droit privé158(*). Finalement, dans l'éventualité où un État membre de l'OHADA soulèverait son immunité d'exécution, l'arrêt Creighton159(*) de la Cour de cassation française semblerait à priori apporter un élément de réponse.

* 151 F. ONANA ETOUNDI, «L'état de la jurisprudence de la Cour Commune de Justice et d'Arbitrage en matière d'interprétation et d'application des Actes uniformes OHADA», Visioconférence organisée par l'Agence Intergouvernementale de la Francophonie, Abidjan (25 juillet 2005), cité par ONANA ETOUNDI, « Les Principes d'UNIDROIT et la sécurité juridique des transactions commerciales dans l'avant-projet d'Acte uniforme OHADA sur le droit des contrats » Revue de droit uniforme, 2005-4, 682-718

* 152 Article 11 de la Loi N°/2007/001 du 19 avril 2007 instituant le juge du contentieux de l'exécutif et fixant les conditions de l'exécution au Cameroun des décisions judiciaires et actes publics étrangers ainsi que les sentences arbitrales étrangères.

* 153 En effet, le juge intervient dans l'arbitrage ad hoc à plusieurs niveaux :

Ø Pour la constitution du tribunal arbitral (le juge intervient dans les articles 5 et 8 de l'AUA en cas d'indécision des parties sur un arbitre)

Ø Pour la récusation et le remplacement des arbitres qui est décidée par le juge compétent de l'Etat partie et aucun recours ne peut être exercé contre sa décision (article 7 de l'AUA)

Ø Pour l'instance arbitrale ou la présence du juge est nécessaire pour assurer son efficacité a travers les mesures conservatoires, l'administration des preuves (art. 14 al 7) et aussi au niveau du délai d'exécution de la mission de l'arbitre qui ne peut excéder 6 mois (art. 12).

* 154 Art. 31al. 2 de l'AUA.

* 155 République Islamique d'Iran c. Eurodif, (1983), J.D.I. 145. cité par BOIVIN et PIC, op. cit.

* 156 Anciennement art. 24 du règlement de la CCI

* 157 L'article 537 alinéa 2 du code civil camerounais justifie l'insaisissabilité des biens du domaine public

* 158G. KENFACK DOUAJNI, L'immunité d'exécution des personnes morales de droit public, in Revue camerounaise de l'Arbitrage, n° 18, précitée ; Félix ONANA ETOUNDI, L'incidence du droit communautaire OHADA sur le droit interne de l'exécution des décisions de justice dans les Etats parties : cas du Cameroun, Thèse d'Etat en droit des affaires, Yaoundé, janvier 2005, p. 467., cité par MAIDAGA dans « Le défi de l'exécution des décisions de justice en droit OHADA » op. cit.

* 159 Sté Creighton limited c. Ministre des Finances de l'État du Qatar et ministre des Affaires municipales et de l'agriculture du Gouvernement de l'État du Qatar, (2000) 3 J.D.I. 1054. Voir également, Ambassade de la Fédération de Russie en France c. Noga, (2001) 1 J.D.I. 116, voir BOIVIN et PIC op. cit.

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"L'ignorant affirme, le savant doute, le sage réfléchit"   Aristote