Solidarité, famille et développement socio-économique en ville de Butembo( Télécharger le fichier original )par Muyisa LUSENGE Université catholique du Graben - Licence 2008 |
II.2. LA SOLIDARITE COMME MODE DE DEVELOPPEMENTLe sujet de notre thème étant « solidarité, famille et développement socio-économique », nous voulons à présent voir s'il existe une interaction et le développement à Butembo. Instruit par l'observation et par l'histoire de notre peuple, nous constatons que les hommes sont organisés en famille, tribus ou ethnies, et qu'ils vivent ainsi en ville comme à la campagne, soudés par un même principe moteur à savoir : la solidarité. Notre société YIRA est régie donc par cette valeur communautaire fondamentale, la solidarité, en tant que principe de cohésion ou mieux d'organisation sociale, comprise comme modèle de vie, c'est-à-dire de communication et de production. La solidarité peut alors être posée ici comme fondement éthique à priori du comportement extracorporel. En celui qu'elle peut vraisemblablement se refléter dans l'économie : celle-ci étant compris comme « visualisation » programmée au couple besoins-moyens de satisfaction ou mieux de la double dimension affectivité et discursivité. Les implications de la solidarité classique dans l'économie actuelle mènent à une réévaluation du sens et de contre sens. En allant de l'Ethique solidaire à l'économie solidaire, la contemporanéité de nos citoyens se retrouve déséquilibrée. Les hommes en rupture ou plus précisément en tension avec ce que DIDIER appelle leur « étant central fluctuant »64(*), se surprennent finalement en quête d'un ailleurs pouvant panser, comme dit FLEM65(*), leur indenté meurtrie. Comment alors concilier les exigences du développement avec celles d'une survie culturelle authentique, c'est-à-dire pondre sur une superficie morale Il faut, pensons-nous, envisager un renversement de la situation par une inversion du schéma habituel qui a conduit enfin de compte à un désoeuvrement massif et parasitaire des ressources humaines endogènes. En ce sens que les exigences réelles et présentes de la vie économique concrète influent sur la façon de comprendre et de vivre les relations sociales veut permettre aux membres de la société YIRA de produire et de répartir leur bien d'une manière telle que le bien ou le mieux-être soit possible et renouvelable, souhaitable et poursuivable. Aujourd'hui, il convient d'entasser le compte à rebours vers le point de départ logique et chronologique, c'est-à-dire vers la « capitalisation »de l'Astre « qui selon Homère, vient à l'arrière-saison et dont les feux éblouissants éclatent au milieu des étoiles sans nombres, en plein coeur de la nuit »66(*) cet astre dont parle Homère dans le XXIIe chant de l'Iliade, c'est bien entendu l'homme, et tout homme, ceci pose justement comme nécessaire, la restitution de l'initiative aux individus, seuls capables d'engendrer leur avenir. Lorsque les individus renoncent à leurs charges historiquement humaines, à savoir celle de cultiver la création, plus rien ne sera à sa place. C'est ainsi que la crise (ou le chaos souverain) vient à signifier pour un peuple, sinon l'incapacité, tout au moins l'impossibilité de « savoir créer de nouvelles richesses »67(*) où les gens ne sont pas à leur place. Les besoins sont aussi déplacés et se faisant les moyens d'y parvenir ou mieux littéralement disqualifiés. La solidarité est sûrement distancée par la rigueur des conditions de vie actuelles. C'est ainsi que du rôle pacifique et intégrateur qu'elle jouait, elle est passée à celui des déstabilisateur social des foyers : elle bloque l'organisation rationnelle de la gestion tant publique que privée. C'est le sens que l'on peut donner aujourd'hui à certaines pratiques sociales encore en vigueur dans le comportement de nos citoyens : tribalisme, régionalisme, sectarisme, etc. Ce sont là quelques exemples types d'une solidarité, avertie, stérile et figée. En découle le parasitisme, ou la loi du moindre effort. On en est arrivé à une fossilisation sociale évidente que complète qui retarde le développement. La démission la porte ou le manque d'initiative collective et l'essoufflement de quelques hommes et femmes jusque là producteurs, voilà la crise, c'est-à-dire, l'anti-création ou le contre développement. Cette impasse fait obstacle à toute « traversée » pourtant la solidarité a résisté à l'usure et a survécu au modernisme envahissant. Il se pose donc, pour notre peuple à la fois un problème d'adaptation et de création. En d'autres termes, notre histoire « se faisant » pour emprunter l'expression de Raymond Aron plaide pour un dialogue des cultures d'une part entre tradition et temps moderne et d'autre part entre authenticité et exotisme. Dégeler l'impasse signifiera alors : compter d'abord sur soi en tant que sujet investi de créativité et ensuite, sur l'écoute du monde tant traditionnel que moderne, aussi bien endogène qu'exogène. Ce qui est mis en relief, à ce niveau, c'est l'impact évident de la solidarité d'un côté et de l'autre la nécessité de tenir compte de cet impact pour opérer et expliquer aujourd'hui des changements sociaux en égard des exigences du croisé espace-temps. Ce sont là autant d'agréments qui militent pour une reconsidération du sens ou, pour ainsi dire, de l'au-delà de cette solidarité dans l'intérêt de son meilleur réinvestissement en société car tout en étant informelle, la solidarité réside à la mise en forme de nos besoins, dans leur effective (satisfaisante). En cela, comme structure théorique sociale, elle est une arme pour le Développement de notre peuple. II.2.1. La solidarité comme mode de communicationAutrement dit, ce que la solidarité entraîne dans l'organisation de l'action socio-économique c'est qu'il s'agit là d'abord d'un mode de communication ; la composition, c'est-à-dire l'unification et la complicité qu'elle suscite dans le rassemblement des membres, finissent par faciliter aussi l'échange d'informations et de renseignements utiles au sein de la communauté : on échange ainsi des rêves, des gestes, des faits, etc. Par ailleurs, le sentiment d'appartenance qu'elle crée avec le temps, se révèle fondationnel à la dynamique de la vie sociale. Elle soude finalement les différentes expériences au point de provoquer la réalisation d'une identité référentielle commune chez les membres. En outre, sur le plan de la socialisation des individus, elle facilite sans contrainte la canalisation des biens privés en émoussant l'égocentrisme ou l'individualisme. Il n'est pas dit que la solidarité est un instrument de communication ; elle est plutôt un mode en tant qu'espace nécessairement et toujours déjà plural. Si on admet ici que le langage est un produit social résultant inévitablement d'une rencontre des consciences questionnantes. En cela aussi, la solidarité devient une arme pour la paix ; car en tant qu'ouverture sur « l'autre » et donc sur le monde, elle fait disparaître ou atténue, chez les sujets invités ou face-à-face, la violence originaire : convertissant ainsi l'affrontement en confrontation. * 64 Cf. DIDIER, J.V., Biologie des passions, Odice Jacob/Seuil, Paris, 1986, p. 545. * 65 FLEM, La vie quotidienne de Freud et des ses patients, Hachette, Paris, 1986, p. 59. * 66 HOMERE, L'Iliade, chant XXII, cité par SOLLER, Ph., Théorie des exceptions, Gallimard, Paris, 1986, p. 9. * 67 PISAR, S., La ressource humaine, Paris, Jean-claude Lattès, 1983, 379 p. |
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