L'impact du partenariat Chine-Afrique sur la réalisation des droits économiques et sociaux au Tchad( Télécharger le fichier original )par Aime MBAINDIGUIM GUEMDJE Université Catholique d'Afrique Centrale, institut catholique de Yaounde - Master 2 2008 |
CHAPITRE II : LE PARTENARIAT CHINE-AFRIQUE ET SON IMPACT POSITIF SUR LA REALISATION DU DROIT A LA SANTE AU TCHADLe partenariat sino-tchadien en matière de réalisation du droit à la santé, et notamment l'accès aux soins de santé, s'inscrit dans une politique de co-gestion des problèmes de santé des populations du Tchad. En effet, depuis le rétablissement de leur relation diplomatique, en août 2006, la Chine s'engage à « fournir, dans toute la mesure de ses possibilités, des aides au Tchad, pour contribuer à son développement économique et social »41(*), à encourager et à soutenir la politique publique de santé du Tchad, à investir dans le pays et à développer une coopération mutuellement avantageuse, sous des normes variées. « Les deux pays annoncent leur disponibilité à renforcer aussi leurs échanges ainsi que leur coopération dans les domaines de l'éducation, de la culture et de la santé et de travailler au renforcement de la compréhension mutuelle et des sentiments d'amitié entre leurs deux peuples »42(*). Dans cette logique, il sera question dans cette partie de notre travail de montrer l'apport de la politique publique de la Chine en matière sanitaire dans son partenariat avec le Tchad d'une part (Section I), et d'autre part de montrer l'apport de la Chine en terme de renforcement des capacités du Tchad à la réalisation du droit à la santé (Section II). SECTION I : APPORT DU PARTENARIAT CHINE-TCHAD EN MATIERE DE REALISATION DU DROIT A LA SANTE AU TCHADLa République populaire de Chine, à travers la Déclaration adoptée lors du Sommet de Beijing du Forum sur la coopération Chine-Afrique de 2006, se veut être un partenaire des pays africains dans des domaines multiformes. Toutefois, la Déclaration précise que « la priorité doit être donnée à la coopération dans les domaines de l'éducation, des infrastructures (...), de la santé publique et de la formation du personnel, en valorisant, dans l'intérêt des peuples chinois et africains, la complémentarité de leurs atouts respectifs »43(*). A cet effet, nous ferons la présentation de la contribution de la Chine sur le plan institutionnel et technico-médical, d'une part (Paragraphe I), et nous présenterons la portée du partenariat sino-tchadien qui est inscrit en droite ligne de la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD), d'autre part (Paragraphe II). Paragraphe I : Apport institutionnel et technico-médical de la Chine dans le cadre du partenariat sino-tchadienLa contribution de la République populaire de Chine dans le domaine de la santé publique au Tchad grâce au Protocole d'Accord conclu avec le gouvernement tchadien se situe à un double niveau. Il y a, d'un côté la réalisation d'infrastructures sanitaires (A), de l'autre côté, le déploiement d'une équipe technico-médicale au Tchad (B). A- Apport institutionnel : la réalisation d'infrastructures sanitaires modernes de l'Hôpital de la LibertéDans la politique internationale de la Chine, le partenariat avec les pays africains au plan infrastructurel est fructueux. Pékin est présent quasiment partout dans le bâtiment et les travaux publics au travers notamment du Beijing Urban Contruction Group (BUCG), pour des projets relevant théoriquement de l' « aide ». La construction de stades, de bâtiments gouvernementaux, d'hôpitaux prestigieux, de résidences présidentielles, constitue une forme traditionnelle de la présence chinoise qui demeure d'actualité et nourrit l'amitié entre Pékin et ses partenaires africains. En outre, la construction de routes et ponts, de voies ferrées ou de grands ouvrages hydrauliques, sur des projets d'infrastructures financés par des organisations internationales telles que la Banque mondiale fait partie de la stratégie chinoise de renforcement de sa coopération. Au Tchad, la République populaire de Chine a réalisé plusieurs projets de développement. Au rang de ces réalisations, on peut citer entre autres, la construction de l'Hôpital de la Liberté, le stade Idriss Mahamat Ouya, le somptueux palais du 15 janvier de Ndjaména44(*), etc. La construction de cet hôpital prestigieux est un apport institutionnel inestimable dans la réalisation du droit à la santé, et surtout dans l'accès aux soins de santé au Tchad. C'est un apport inestimable et incontestable dans la mesure où cet établissement hospitalier public occupe la deuxième place après l'Hôpital Général de Ndjaména. Il emploie un staff composé de 308 personnes qui offrent des prestations très prisées par la population ndjaménoise, ainsi que d'autres patients venant des régions environnantes, voire d'autres villes du pays. En effet, au dire de Dionko MAOUNDE, près plusieurs années de guerre fratricide et de récession économique, et malgré la mise en oeuvre des différentes stratégies en matière de santé, la performance du système de santé tchadien reste parmi les plus faibles d'Afrique. Selon lui, quatre facteurs majeurs en sont les causes : « l'insuffisance des infrastructures sanitaires, la mauvaise organisation des soins de santé et l'insuffisance quantitative et qualitative du personnel soignant et le sous-équipement »45(*). C'est pour faire face à cette incapacité du système public de santé à répondre aux besoins des populations que le gouvernement a décidé d'établir la coopération avec la République populaire comme outil, en vue de l'amélioration des conditions de vie des populations en matière sanitaire, en terme de réalisation du droit à la santé, notamment l'accès aux soins de santé. En outre, le partenariat sino-tchadien dans le domaine de la santé publique se renforce dans la lutte contre le paludisme. Conscient du fait que le paludisme constitue la principale cause de morbidité et de mortalité en Afrique en général et au Tchad en particulier, le gouvernement chinois, à travers son partenariat avec le Tchad, décide en effet de s'attaquer à cette maladie endémique qui exerce un impact négatif sur le développement économique et social des populations africaines, et notamment tchadiennes. Le paludisme est la maladie parasitaire la plus répandue dans l'hémisphère sud : les estimations du nombre de personnes contaminées varient entre 300 et 500 ou 660 millions46(*) et il tue plus d'un million de personnes par an, la plupart en Afrique. C'est la principale cause de morbidité et de mortalité des enfants de moins de cinq ans en Afrique. Les femmes enceintes dans les zones endémiques, sont aussi particulièrement touchées par le paludisme car le placenta constitue une cible où les parasites (Plasmodium falciparum) peuvent s'accumuler. Le paludisme, selon l'OMS, est encore la maladie mondiale la plus importante (priorité de 1er rang) tant par ses ravages directs que par ses conséquences socio-économiques : une improductivité aboutissant à la sous-alimentation et au sous-développement. De plus, le Tchad, comme la plupart des pays en développement touchés par la malaria n'a ni les moyens économiques, ni les moyens technologiques de développer une réelle recherche dans le domaine médical. Le Tchad, à l'instar de ces pays aux moyens financiers très limités et croulant sous le poids de la dette extérieure, caractérisé par un manque de solide volonté politique, par un budget recherche bien inférieur aux attentes et une aide internationale dérisoire comparée aux besoins des populations, va ainsi bénéficier d'une assistance vitale de la Chine pour engager une lutte contre cette maladie du sous-développement aux conséquences désastreuses. La matérialisation de cette approche bilatérale de lutte contre cette maladie qui cause de sérieux problèmes de santé publique se traduit donc par la construction d'un centre anti-paludique au sein de l'Hôpital de la Liberté de Ndjaména réalisée par le gouvernement chinois pour l'Etat tchadien. La réalisation de ces infrastructures sanitaires en tant que contribution substantielle apportée par cette puissance émergente aux populations tchadiennes s'inscrit en droite ligne dans la politique internationale de la Chine en faveur de son partenaire, le Tchad. Elle entre aussi dans la modernisation de cet établissement hospitalier situé dans la capitale tchadienne, et est considéré comme pôle d'attraction des patients des différentes régions environnantes de Ndjaména, voire d'autres villes du pays. C'est donc un grand appui pour la rénovation des infrastructures sanitaires, d'une part, et une contribution à l'amélioration de la qualité des conditions de vie des populations en matière sanitaire d'autre part. C'est dans cette logique que la Chine, dans sa coopération sanitaire, va apporter une assistance technique et matérielle au Ministère de la santé publique, notamment à l'Hôpital de la Liberté. * 41 Cf « Concrétisations de reprise de relations : la Chine s'engage à aider le Tchad », in Le Progrès, N° 2292, lundi 24 septembre 2007, p. 1. * 42 Ibidem, p. 3. * 43 Cf. « Le Sommet de Beijing du Forum sur la coopération Chine-Afrique adopte la Déclaration de Beijing », in http://www.french.xinhuanet.com/french/2006-11/06/content_361677.htm (consulté le 28.06.2007). * 44 M. IGRI TAIDA, « Chine-Afrique. Un partenariat fiable pour le développement de l'Afrique », in Infotchad, N° 5633 du 12 juillet 2007, p. 2. * 45 D. MAOUNDE, « Contractualisation et performance du système de santé au Tchad. Thèse de doctorat « Ethique et droit médical », soutenue le 10 décembre 2007 », in http://www.univ-lyon3.fr/120057/0/fiche_71_article/&RH=INS-RECHthes07 (consulté le 12.03.2008). * 46 Cf. « Paludisme », in http://fr.wikipedia.org/wiki/Paludisme (consulté le 12.03.2008). |
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