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Enjeux coopération décentralisée franco-burkinabe dans le développement urbain

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par Oumarou KOLOGO
Institut diplomatique et des relations interntionales de Ouagadougou - Diplome d'études supérieures en diplomatie et relations internationale 2008
  

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ENJEUX DE LA COPERATION DECENTRALISEE FRANCON-BURKINABE DANS LE DEVELOPPEMENT URBAINDE OUAGADOUGOU

CHAPITRE I. CADRE THEORIQUE ET GENERALITES SUR L'URBANISATION DE OUAGADOUGOU,

LA DECENTALISATION ET LA COOPERATION DECENTRALISEE FRANCO-BURKINABE 12

I. La problématique 12

1.1 La revue de littérature 12

1.2 De la définition de la coopération décentralisée 16

1.3 La présentation du problème 18

1.3. ILe problème général 18

1.3.2 Le problème spécifique 20

1.4 Les hypothèses et la méthodologie de recherche 20

1.4.1 L'hypothèse principale 20

1.4.2 Les hypothèses secondaires 20

1.5 La méthode de recherche 20

1.5.1 Les techniques de collecte des données 21

1.5.2 Le déroulement de l'enquête et les difficultés rencontrées 21

IL L'historique de l'urbanisation, de la décentralisation et de la coopération décentralisée 22

2.1. Les origines et l'évolution delà vile de Ouagadougou 22

2.1.1 Ouagadougou durant la période coloniale 22

2.1.2 L'impact des aménagements postcoloniaux à Ouagadougou 23

2.1.3 La Situation géographique et les caractéristiques démographiques de Ouagadougou 24

2.2 L'historique du processus de décentralisation au Burkina Faso 27

2.2.1 Les prémices de la décentralisation avant les indépendances 27

2.2.2 Des indépendances à la décentralisation intégrale : la consolidation du processus 28

2.3 L'évolution delà coopération franco-burkinabé 30

2.3.1 Les grandes étapes de la coopération décentralisée depuis les indépendances 30

2.3.1.1 Les premières tentatives 30

2.3.1.2 Les nouvelles approches 30

2.3.2 L'évolution du cadre institutionnel et les actions en matière de coopération décentralisée en
France 32

CHAPITRE IL ORGANISA TION D U SECTEUR DE LA COOPERA TION DECENTRALISEE A U BURKINA FASO 34

I. Les pouvoirs publics et leurs rôles 34

1.1 L'Etat et les services déconcentrés 34

1.2 Les Directions spécialisées publiques de la coopération décentralisée 35

1.3 Les collectivités territoriales 36

IL Les organisations de la société civile 37

2.1 Les associations ° OIvIEQMdDIsMllMjOIP llBl-coopération 38

Le Comité National de Jumelage 38

Les Comités Locaux de Jumelage 38

2.2 L'Association des Municipalités du Burkina Faso et de la Maison de la Coopération Décentralisée 39

2.3 Les ONG et les autres Association 40

CHAPITRE! PLACE DES ACTEURS ET PORTEE DE LA COOPERATION DECENTRALISEE FRANCO-

BURKINABE 44

I. Le rôle des acteurs 44

1.1 L'impulsion de la coopération décentralisée 44

1.2 La maîtrise d'ouvrage et Vaccompagnement de la coopération décentralisée 46

IL Les domaines d'intervention et les acquis 48

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2.1 Les bases juridiques de la coopération décentralisée 48

2.2. La nature des appuis 49

2.2.1 L'assistance financière et économique 49

2.2.2 L'appui technique 51

2.3 Les domaines d'appuis 52

2.3.1 L'éducation, la formation et la culture 52

2.3.2 Le sport et les loisirs 54

2.3.3 La santé, l'hygiène, l'assainissement et l'action sociale 54

2.3.4 La Sécurité urbaine 55

CHAPITRE II. DIFFICULTES RENCONTREES PAR LA COOPERATION DECENTRALISEE ET
PERSPECTIVES 58

1. Les limites et les travers de la coopération décentralisée 58

1.1. Les Facteurs de blocage 58

1.2. Les non-dits de la coopération décentralisée 59

IL Les perspectives pour améliorer l'impact de la coopération 62

2. 1. Les Insuffisances de la coopération décentralisée 62

2.2 Des propositions d'action de renforcement de la coopération 63

2.2.1 Pour les autorités communales de Ouagadougou, 63

2.2.2 Pour les services techniques en charge de la coopération décentralisée 63

2.2.3 Pour les partenaires français 64

Conclusion 65

BILBLIOGRAPHIE 67

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INTRODUCTION

Les sociétés humaines, interdépendantes les unes des autres, développent des relations réciproques indispensables à leur existence. Dans cette optique, les relations de coopération sont à priori des rapports de solidarité développés entre deux ou plusieurs Etats, collectivités, ONG, ou associations dans le sens de l'amélioration des conditions de vie des populations.

L'exemple de la coopération franco-burkinabé qui est mis en exergue dans ce travail offre l'occasion d'un meilleur cadre d'analyse de ce système de relations humaines entre les sociétés. La coopération franco-burkinabé appelée à s'accroître et à s'intensifier est de l'avis de Goldblatt (2008) « exemplaire et diversifiée ». Le Burkina figurant « dans le top ten des pays les plus aidés par la France1 ». Malgré l'importance capitale de cette coopération, l'évolution des questions de développement et la nécessité d'impliquer toutes les couches sociales dans la gestion des affaires publiques, ont conduit au processus de décentralisation.

Souvent assimilée aux relations extérieures des collectivités, la coopération décentralisée matérialise une volonté de solidarité et d'échanges entre collectivités du Nord et du Sud. Elle résulte souvent de liens historiques, d'amitiés institutionnelles ou personnelles et de l'héritage des flux migratoires. Les actions entreprises prennent des formes et des amplitudes extrêmement variées selon les partenariats, avec un champ sectoriel ouvert2.

Cette nouvelle forme de coopération s'est renforcée suite à l'adoption de la décentralisation par les pays du Sud. Au Burkina Faso, la décentralisation, dans sa forme actuelle a progressivement pris corps avec l'adoption de nombreux textes3. « La décentralisation est avant tout l'affaire de capital social4, c'est-à-dire de ressourcement à la base ; c'est par la mise en place de réseaux de solidarités horizontales5, fondées sur la confiance mutuelle, que doit s'étayer la vie communautaire dans le sens d'une participation plus active aux

1 Voir, « coopération franco-burkinabé ; séculaire et exemplaire », in SIDWAYA n° 6183 du 28mai 2008. P3. Dans ce bilan fait sur cette coopération à l'occasion d'une conférence de presse, l'Ambassadeur Goldblat relève que les chiffres témoignent que les aides budgétaires sont passées de 31 milliards 919 millions en 2007 à près de 50 milliards en 2008.

2 AFP, Partenariat entre l'AFP et la coopération décentralisée, Mars 2005.

3 La révision de la RAF en1996, la création du CONACOP en 2000, l'adoption des TOP en 2002 et la loi N° 055-2004/AN du 21 décembre 2004 portant CGCT.

4 Capital social : ensemble des liens et réseaux qui unissent des groupes et des personnes au sein d'une communauté qu'ils soient géographiques ou professionnels.

5 Solidarité horizontale : solidarité entre secteur public et société civile.

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affaires des collectivités de base ».6 Cette définition qu'on emprunte volontiers à Lemarchand R. amène à s'interroger sur la situation réelle de l'état de cette politique au Burkina Faso.

Bien que le concept de décentralisation se décline d'un pays à l'autre, l'objectif affiché par la décentralisation est une meilleure efficacité dans l'ensemble des aspects économiques et sociaux du développement local. L'atteinte de cet objectif nécessite la prise en compte de certaines conditions : les collectivités doivent disposer sans ambigùité des attributions ad hoc, bénéficier des ressources nécessaires ou pouvoir les lever, avoir accès à des financements, disposer du savoir-faire et des moyens humains nécessaires à la mise en oeuvre des investissements. Force est cependant de reconnaître que les collectivités locales des pays en développement réunissent rarement l'ensemble de ces conditions. Ces collectivités, assez proches des populations, sont chaque fois interpellées par la situation de pauvreté qui frappe la grande partie de cette masse. Cependant leurs ressources si limitées constituent parfois un frein à la construction d'actions plus efficaces.

En outre, la décentralisation est apparue à un moment où les villes du Sud connaissent une explosion sans précédent. En effet, le rythme rapide d'urbanisation des pays en voie de développement et émergents et la montée concomitante des pouvoirs locaux renforcent considérablement le rôle des collectivités locales du Sud dans les services de base aux populations. A l'instar des autres villes, Ouagadougou connaît les mêmes problèmes. Ses limites s'étendent continuellement, impliquant un certain nombre de questions. Quelles sont les implications socioéconomiques et sociopolitiques de cette urbanisation croissante ? Quelles actions entreprennent les collectivités de Ouagadougou pour répondre aux besoins fondamentaux auxquels ses populations font face ?

Conscient de la modicité des subventions accordées aux collectivités territoriales, le législateur burkinabé a formalisé la possibilité pour les communes nationales d'entretenir des liens avec des collectivités territoriales ou ONG étrangères7. Face alors aux échecs de la coopération classique qui a montré ses limites dans les différentes politiques de développement, les différents partenaires au développement ont révisé leurs stratégies d'intervention pour beaucoup plus d'efficacité dans leurs actions, ce qui a débouché sur une nouvelle forme de coopération appelée « coopération décentralisée. »

6 Comprendre la coopération décentralisée et ses enjeux (1999), mise en ligne le 19 juillet 2004 sur le site www.cota.be .

7 Aux termes de l'article 9 al 3 de la loi N° 055-2004/AN du 21 décembre 2004 portant CGCT : « La collectivité peut entreprendre dans les conditions prévues par la loi et dans le cadre de leurs compétences propres, des actions de coopérations qui donnent lieu à des conventions avec des CT de pays étrangers ou organismes internationaux publics ou privés oeuvrant dans le domaine du développement ».

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En effet, le bilan de l'aide apportée à travers la coopération bilatérale et multilatérale, est mitigé. C'est pourquoi la coopération décentralisée est entrée dans la convention de Lomé (IV) de l'UE en 1990 et s'affirme de plus en plus comme une approche mieux adaptée à la mise en oeuvre de la décentralisation et à la lutte contre la pauvreté. Comment s'est développée cette forme de coopération dans le cadre de la ville de Ouagadougou ? Comment fonctionne t-elle dans la pratique au Burkina Faso? Que peut être son apport réel dans le développement de Ouagadougou ?

Cette étude s'articulera essentiellement autour de deux axes. Après la problématique, une description de l'historique de l'urbanisation, de la décentralisation et de la coopération décentralisée sera présentée, ensuite une analyse du cadre juridico- institutionnel des acteurs impliqués dans cette coopération décentralisée sera faite (Partie I). Cette étape donnera suite à l'examen de l'action pratique des acteurs et l'impact de la coopération décentralisée. Enfin, il est important de jeter un regard critique sur l'action de cette coopération (Partie II).

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CHAPITRE I. CADRE THEORIQUE ET GENERALITES SUR L'URBANISATION DE OUAGADOUGOU, LA DECENTALISATION ET LA COOPERATION DECENTRALISEE FRANCO-BURKINABE

/. La problématique

1.1 La revue de littérature

Magnard Franck et Tenzer Nicolas (1988), notent que, «dans les pays en voie de développement, l'urbanisation a toujours précédé l'industrialisation, la croissance des villes africaines est extrêmement forte et les plus grandes d'entre elles doublent et doubleront encore jusque vers les années 2020 tous les 10 ans.>, Selon ces mêmes auteurs, les politiques d'actions urbaines sont difficiles à concevoir pour plusieurs raisons. Il faut reconnaître leur caractère peu opérationnel, faute de moyens financiers suffisants et du fait de pesanteurs sociologiques évidentes. Aussi, font-ils remarquer que : « la coopération est singulièrement limitée dans ce secteur et cherche encore sa voie. >, ils concluent qu'« il est vraisemblable qu'en terre africaine, l'efficacité des actions de protection urbaine est largement conditionnée par l'attention que les citadins pourront eux-mêmes porter à la ville>,.

Jaglin Sylvy (1995) soutient quant à elle que: «dans les expertises internationales, la gestion urbaine n'est encore souvent qu'un "prêt-à-penser" et une bannière idéologique de politiques opérationnelles en quête de réconciliation avec les réalités sociales urbaines des pays en développement. Elle ne parvient ni à un modèle crédible d'administration des cités, à la fois légitime et efficace, ni à une prise en compte pertinente de la vitalité des sociétés africaines, rebelles aux carcans normatifs à l'intégration urbaine standardisée, à la promotion de citadins contribuables, répertoriés et fiscalisés>,8. L'intérêt qu'elle donne à son étude sur la gestion urbaine à Ouagadougou porte moins sur l'analyse des échecs répétés de projets, que sur celles des dispositions qui assurent, en dépit des carences de l'encadrement officiel, comme la crise aiguë des finances publiques, le fonctionnement des cités. Elle reconnait avec nombre d'auteurs qu'à travers la décentralisation, les collectivités locales sont partiellement investies d'une nouvelle responsabilité car étant animatrices du développement, elles sont en effet supposées orchestrer des dynamismes catalyseurs jusqu'alors occultés par des bureaucraties technocratiques et centralisées. Mais la tâche qui incombe à ces collectivités s'est alourdie eu égard au phénomène d'explosion urbaine.

Les villes connaissent en effet, un développement englobant des unités administratives préexistantes. Ainsi, ces dernières trouvent difficilement leur place dans la structure

 

12

Sylw Jaqlin Gestion partagée à Ouagadougou, pouvoirs et périphéries ed Karthala-ORSTOM, Paris, 1995 p1

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territoriale compacte, continue et bornée, des découpages habituels9. Pour Jean Pierre Elong10, les villes et la manière dont elles croissent en dehors de tout contrôle, sont un aveu d'échec des politiques de développement et d'aménagement du territoire énoncées. Dans cette logique, l'auteur soutient que la communauté internationale n'est plus en mesure de proposer des solutions globales comme cela se faisait dans les années 1970 pour canaliser la maîtrise de l'urbanisation. Laisser les villes africaines évoluer en pilotage automatique comme c'est globalement le cas actuellement dans la plupart des pays serait selon lui, courir le risque d'avoir une Afrique ingouvernable à terme. Les politiques de décentralisation se présentent dès lors comme le pilote dans cet avion. Leur nécessité est encore plus évidente quand on sait que la population urbaine se double chaque 18 ans et qu'en 2020, les villes africaines devraient accueillir une population semblable à celle qui s'est installée en ville depuis les 50 dernières années. Or, près de 60% des citadins vit dans des quartiers urbains peu aménagés et sous équipés11.

Jean Michel Severino (2007)12, directeur général de l'AFD remarque que d'ici 2030, le monde comptera cinq milliards d'urbains, soit 60% de la population totale. La majeure partie de cette croissance urbaine se manifestera dans les pays en développement à cause de la « désertification du milieu rural13». En l'espace d'une génération, le nombre d'habitants des villes augmentera de plus d'un milliard en Asie et de 400 millions en Afrique. Son inquiétude porte particulièrement sur les cités urbaines débordées par l'exode rural où, selon lui, « les gourbis l'emportent de plus en plus ; véritables bidonvilles voire "bidonvillages" sans voirie existante ou possible, celles-ci demeurent ingérables sinon dans la dépendance étroite de "l'ingérence humanitaire" selon le modèle de nos Etats euxmêmes adonnés au sérum conditionnel des bailleurs extérieurs. »

L'auteur dénonce ici la fuite de responsabilité de l'Etat qui semble jeter en pâture les communes nouvellement créées en proie à une démographie galopante, à une technologie exponentielle et à un monde globalisant et en perpétuelle mutation vers des cités démiurgiques. Le dossier documentaire n°002 de I'ADP(1995) appuie également cette idée en dévoilant que « le regain d'intérêt pour les reformes et la démocratie émerge alors que l'Afrique de l'Ouest connaît une croissance démographique rapide, concomitante à une

9 Institut de la décentralisation, La décentralisation en France. L'état des politiques publiques, la dynamique des réformes locales, la dynamique européenne, Paris, La découverte, 1996, p90.

10 Jean Pierre Elong M., « Quelle gouvernance pour les villes d'Afrique ? » in Bulletin Ville en développement, N° 67-68 ? Juin-Juillet, 2005, p 6-7.

1 Jean Pierre Elong M., « Le financement de l'urbanisation et de la décentralisation », in Ville en développement, N° 47 de mars 2000, pi

12Jean - Michel severino, Décentralisation et développement urbain, in Ville et développement, n°77, 2007, pi

13 Selon l'institut français de la décentralisation, elle est le corollaire de la croissance urbaine. Elle est le résultat de l'exode rural.

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restructuration du peuplement.». L'auteur du dossier documentaire n°002 s'est appesanti sur l'idée que : « de puissants mouvements de populations de l'intérieur des terres vers les pays côtiers et des zones rurales vers les villes, sont à l'origine d'un taux d'urbanisation de 44% en 1990» et révèle qu'à l'horizon 2020, plus de la moitié des africains de l'Ouest vivront dans une ville.

Ces statistiques renforcent les inquiétudes quant à la question de l'urbanisation galopante des villes du Tiers Monde. Les besoins en investissements qu'implique cette croissance sans précédent s'ajoutent à tous les retards accumulés, que ce soit en matière d'équipements, de services essentiels, d'environnement, d'habitat et de gestion urbaine. «L'explosion urbaine concerne en premier lieu les agglomérations des pays en voie de développement, qui se trouvent ainsi confrontées à des enjeux considérables en matière de logements, d'emplois, de transports, de ressources, d'élimination de déchets, de pollution et d'une façon générale de dégradation des conditions de vie et d'environnement alors que dans le même temps les nouveaux citadins, issus des zones rurales, voient dans la ville la promesse d'un niveau de vie plus élevé14 ». A ce mirage se substitue l'omniprésence du risque qu'il soit technologique, économique, sociétal, sanitaire, voire d'origine naturelle. L'urbain en concentrant la complexité et les problèmes des sociétés contemporaines, devient en effet, un lieu d'incertitudes propice à des événements de grande ampleur aux conséquences parfois catastrophiques. On assiste à une complexification des risques en raison d'activités humaines toujours plus nombreuses et diversifiées, qui interagissent davantage les unes avec les autres à l'échelle d'un territoire15.

Concernant les risques technologiques, la plupart sont liés aux industries chimiques et principalement pétrolifères, notamment dans les filières de distribution d'essence. Il ne s'agit pas toujours de risques majeurs mais de risques inhérents au fonctionnement des usines, risques pouvant être aggravés par la situation de ces usines ou des lieux de stockage des produits dangereux à proximité des zones d'habitation. La sécurité civile et les risques majeurs font partie mais pas totalement des compétences transférées par l'Etat aux collectivités locales en Afrique. Il s'agit la plupart du temps d'une dévolution faible, les Etats gardant encore de larges pans de responsabilité dans le secteur. D'une façon générale, si à la lecture des textes relatifs à la prévention et à la gestion de risques majeurs, on peut avoir l'impression que les collectivités locales ont des responsabilités plus ou moins cernées, force est cependant de constater qu'elles n'ont pas forcément de moyens spécifiques et suffisants pour y faire face et que le rôle de l'Etat reste

14 Nicole Ameline, Villes et risques, la vile durable, enjeu du XXIe siècle ? in Ville et développement, n°65, 2004, p1.

15 Nicole Ameline, op cit, p2.

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prépondérant. De fait, il apparaît à l'observation que cette préoccupation est relativement nouvelle aussi bien pour les élus locaux que pour les services techniques qui les assistent et que la prévention reste relativement absente des actions des équipes municipales. Les différents auteurs posent ici l'épineux problème de l'exode des populations rurales vers les villes et de l'urbanisation, un phénomène qui ne facilite pas l'aménagement urbain même dans le cadre de la décentralisation.

Les relations de coopération décentralisée entre le Burkina et la France apparaissent aux lendemains des indépendances. Ces relations étaient dès la base créées par les jumelages-coopérations fondées sur des principes de solidarité et d'amitié et organisées autour d'une démarche d'appui ponctuel par projet. La coopération décentralisée est le couronnement du processus de la décentralisation. Elle constitue pour les collectivités territoriales un levier pour la mise en oeuvre des projets et autres politiques publiques qu'ils développent. Dans toutes les régions du monde, au sud et au nord, les gouvernements locaux intensifient leurs partenariats de coopération décentralisée. Cette forme de coopération, souvent appelée une coopération de proximité, est à la fois professionnelle et humaine. Elle vise à toucher réellement les populations démunies en leur apportant ce dont elles ont le plus besoin16.

La coopération décentralisée au Burkina Faso implique les collectivités urbaines et rurales bien que la dimension urbaine de cette coopération soit prédominante. Sous l'impulsion des villes du Sud et des organisations de la société civile, et avec l'appui du sommet Habitat II, les pays réunis à Istanbul en juin 2000 ont reconnu l'importance décisive du niveau local pour le développement. Considérées pendant longtemps comme le lieu du cumul des difficultés, les villes apparaissent désormais comme productrices de ressources et d'opportunités. En même temps, la ville est un échelon essentiel pour progresser vers la démocratie (Cities alliances/objectifs n°48 juin 2000, P1). Ceci montre combien importante est la place occupée par les villes dans le développement des pays. Le présent travail se table sur la coopération décentralisée franco-burkinabé dans sa dimension urbaine. La coopération décentralisée franco-burkinabé est non seulement la plus ancienne mais aussi la plus élaborée au Burkina Faso.

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1.2 De la définition de la coopération décentralisée

La coopération, selon Antoine Vion et Emmanuel Négrier (2002), est le résultat d' « un étagement de la diplomatie 17». La coopération s'inscrivant dans une logique d'apaisement des rapports entre acteurs sociaux, elle est la résultante des rapports diplomatiques ou le moyen de leur construction. L'objet de la diplomatie est la réduction et l'effacement des tensions et crises et l'instauration d'un climat de paix. Le concept de coopération décentralisée est à la fois nouveau et ancien. Nouveau, car peu de théories y sont consacrées, ancien du fait qu'elle a existé d'abord sous la forme de jumelage depuis la fin de la seconde guerre mondiale en Europe pour réconcilier les ex-belligérants. C'est ainsi que les premiers jumelages sont nés entre les villes françaises et allemandes. Ce genre de partenariats s'est étendu aux pays de l'Europe de l'Est pendant la guerre froide. En Afrique, elle a fait son apparition aux lendemains des indépendances pour favoriser la paix à travers des actions d'aides ponctuelles. Au Burkina Faso, le premier jumelage est celui entre la ville de Ouagadougou (capitale politique du Burkina Faso) et celle de Loudun (ville française) qui date de 1967.

La conception qu'on peut qualifier d'extensive, accorde la qualité d'agent de coopération décentralisée à tous les acteurs infra-étatiques, c'est-à-dire toutes les organisations et personnes morales qui ne relèvent pas directement du gouvernement, qu'elles soient publiques ou privées. Il peut s'agir de la sorte aussi bien de collectivités et autorités territoriales, que de chambres consulaires ou de métiers, d'universités, de centres de recherche, d'associations, d'ONG, etc. Dans cette conception, les associations et organisations de solidarité internationale jouent un rôle central dans les relations de l'émergence des collectivités et autorités territoriales de coopération. Ainsi, pour cette conception, la coopération décentralisée comprend toute action internationale mise en oeuvre par des acteurs infra-étatiques. Cette approche est adoptée par la Commission européenne. En revanche, la conception que l'on peut qualifie de restrictive accorde la qualité et le statut d'agent de coopération décentralisée uniquement aux collectivités et autorités territoriales, car on considère qu'il s'agit de relations décentralisées au sens étroit de l'expression. Les acteurs de la coopération, dans ce cadre, sont les collectivités décentralisées et leurs groupements. Ainsi, toute collectivité ou institution publique, disposant d'une assemblée élue au suffrage universel, peut mener des actions de

17 Antoine Vion et Emmanuel Négrier, La coopération décentralisée, un étage du jeu diplomatique, CEPEL Montpellier Contribution à l'atelier Les nouvelles formes de la diplomatie, Congrès AFSP, Lille, 21 septembre 2002. P3. 17 Rapport Sommet Africités, 18-22 septembre 2006, Nairobi, pi

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coopération décentralisée. Ce sont donc les autorités locales élues qui ont par excellence le statut d'agent de la coopération décentralisée. Tous les organismes, qui ne relèvent pas de cette catégorie d'institutions et qui ont des relations avec des organismes étrangers, font de la coopération non gouvernementale. La doctrine française et la pratique des autres Etats en la matière ont tendance à privilégier cette conception.

Il n'existe pas de définition satisfaisante et unique de la coopération décentralisée. Si le terme de « coopération » fait référence à des initiatives et actions menées en collaboration avec des collectivités ou autorités territoriales étrangères, celui de « décentralisée » définit le niveau et le mode de cette coopération, c'est-à-dire celui des collectivités ou autorités territoriales de pays différents pour des initiatives d'intérêt public local. La coopération décentralisée, considérée comme un partenariat solidaire entre collectivités locales, vise essentiellement à favoriser la prospérité commune, consolider le développement local et la gouvernance des territoires. Elle renforce les capacités des autorités locales à assumer les compétences de la décentralisation croissante dans les différentes régions du monde. La coopération décentralisée rentre dans le champ de l'aide publique au développement. Elle est définie par la législation des Etats. Les actions recoupent les champs de compétence des pouvoirs locaux : développement urbain, eau et assainissement, état civil, espaces verts et gestion des services. Elle est mise en oeuvre de différentes manières selon les pays : à travers une aide financière et/ou un échange d'expertise directement par la collectivité territoriale et/ou un opérateur extérieur, en forme bilatérale et/ou à travers des réseaux de collectivités.

Selon l'UE, on entend par coopération décentralisée tout programme conçu et mis en oeuvre dans le pays du Sud ou de l'Est par un acteur de la société civile : ONG, coopérative agricole, groupement féminin, syndicat18, etc. Cette conception vise à intégrer les acteurs non gouvernementaux dans le développement local. Le Burkina Faso à travers la CONACOD et le CNJ a donné une définition qui rejoint cette conception large c'est-à-dire impliquant l'ensemble des relations de partenariats (institutionnel, associatif, privé) d'une part, et d'autre part, l'ensemble des acteurs dans une collectivité locale. Le Club du Sahel19 définit cette notion comme étant la livraison d'aide à tout ce qui n'est pas "centre" dont le pouvoir central. La coopération décentralisée est une forme générale qui englobe les termes de coopération non gouvernementale et de coopération institution/institution. Selon Clément Sawaogo20, ministre d'administration territoriale et de la décentralisation, la

18 V. CUF, CONACOD, Manuel de formation des acteurs de la CD, 2003, p. 55.

19 Créé en 1976, c'est un forum actif des Etats sahéliens regroupés au sein du CILSS.

20 Observateurpaalga, n° 7024 du 03 décembre 2007, p6.

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coopération décentralisée est « l'ensemble des opérations non étatiques qui unissent les collectivités territoriales, les associations et les communautés à la base. Ces liens peuvent se nouer dans un même espace géographique ou dans des espaces complémentaires ou différents, notamment entre structures du Nord et celles du Sud ».

De ce qui précède, la coopération décentralisée entre Ouagadougou et les collectivités françaises peut être comprise comme « un processus par lequel des collectivités et/ou des organisations de Ouagadougou et de a France s'engagent, par la voie et la méthode les plus appropriées à leurs contextes respectifs, à oeuvrer à la réalisation de leurs objectifs de développement au mieux de leurs intérêts mutuels ». Il s'agit donc d'une relation à double sens qui doit se fonder sur la liberté, l'égalité et la démocratie.

1.3 La présentation du problème 1.3.1 Le problème général

La coopération décentralisée, couronnement du processus de la décentralisation, constitue pour les collectivités territoriales un levier pour la mise en oeuvre des projets et autres politiques publiques. Dans toutes les régions du monde, au sud et au nord, les gouvernements locaux intensifient leurs partenariats de coopération décentralisée. Cette forme de coopération, souvent appelée "coopération de proximité", est à la fois professionnelle et humaine. Elle vise à toucher réellement les populations démunies en leur apportant ce dont elles ont le plus besoin21.

Sous l'impulsion des villes du Sud et des organisations de la société civile, et avec l'appui du sommet Habitat II, les pays réunis à Istanbul en juin 2000 ont reconnu l'importance décisive du niveau local pour le développement. Considérées pendant longtemps comme le lieu du cumul des difficultés, les villes apparaissent désormais comme productrices de ressources et d'opportunités. En même temps, la ville est un échelon essentiel pour progresser vers la démocratie (Cities alliances/objectifs n°48 juin 2000, P1). Ceci montre combien, la place occupée par les villes dans le développement des pays est importante. Le présent travail se consacre à la coopération décentralisée franco-burkinabé dans sa dimension urbaine. La coopération décentralisée franco-burkinabé est non seulement la plus ancienne mais aussi la plus élaborée au Burkina Faso.

La ville de Ouagadougou, capitale du pays, concentre la plus grande partie des actions de cette forme de coopération. Le phénomène de croissance urbaine, sans précédent, que

21 Aubourg Guillaume., Gradin Pierre-Marie et al. Guide de la coopération décentralisée pour l'eau potable et l'assainissement, Paris, 2007, P11.

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connaît cette ville, laisse apparaître d'innombrables besoins et contraintes. L'appui des autorités locales et de la société civile s'avère nécessaire pour le développement de la ville. Cependant, les aménagements et réaménagements constants pour répondre aux exigences de l'évolution implique des moyens que ne disposent pas toujours les autorités municipales. La coopération décentralisée franco-burkinabé y trouve, dès lors, un terrain d'expression. Mais quels sont les mécanismes qui sous-tendent cette forme de coopération?

On note que malgré les divers domaines dans lesquels elle s'exprime, la situation de Ouagadougou n'est guère enviable : extension rapide de la ville accompagnée de crises liées à la spéculation foncière, insuffisance ou saturation des services sociaux de base, problème d'accès à l'eau potable, difficulté d'accès à l'électricité par tous, etc. Dès lors, il est justifié de s'interroger sur la portée réelle de la coopération décentralisée et sur les mobiles de tous genres qui la sous-tendent.

Aux côtés des Etats, des instances multilatérales, des bailleurs de fonds, des ONG et des élus locaux coopèrent pour rechercher ensemble les voies et les moyens permettant de réussir le développement. Ils mobilisent toutes leurs expertises pour améliorer les conditions de vie des populations, favoriser leur participation, permettre l'accès du plus grand nombre aux services publics locaux essentiels, les gérer efficacement et ainsi faire reculer la pauvreté.

Cette coopération qui s'est installée au fil des années entre des collectivités françaises et Ouagadougou mérite que l'on s'y penche. En effet, elle suscite de plus en plus des interrogations. Quels sont les déterminants sociopolitiques voire stratégiques qui soustendent cette nouvelle forme de coopération en émergence ? Qui sont les principaux acteurs de cette coopération ? Quels sont les enjeux qui se dégagent de cette coopération pour les partenaires du Nord et les villes du Sud (en particulier Ouagadougou)?

Face à la multiplicité d'actions s'inscrivant dans le cadre de cette coopération, il apparaît nécessaire de jeter un regard scientifique sur les types d'investissements, les domaines d'intervention, les bénéficiaires directs et l'impact des actions issues de cette forme de coopération à Ouagadougou. Cette étude se présente dès lors comme une analyse de l'impact de la coopération décentralisée franco-burkinabé et une analyse critique de cette forme de coopération en vue de cerner, en définitive, l'importance de la coopération NordSud par rapport au développement urbain du Burkina Faso.

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1.3.2 Le problème spécifique

II est apparu dans les recherches que le rapport coopération décentralisée et développement urbain n'a pas été une préoccupation suffisamment analysée. Ceci ouvre grandement la porte à une réflexion scientifique vue l'actualité de la question. Dans le sens de cette étude et pour orienter la réflexion sur cette problématique, il s'impose que des hypothèses soient formulées.

1.4 Les hypothèses et la méthodologie de recherche 1.4.1 L'hypothèse principale

La coopération décentralisée franco-burkinabé est certes un moyen de développement pour la ville de Ouagadougou, mais elle se présente aussi comme un enjeu stratégique pour les partenaires français.

1.4.2 Les hypothèses secondaires

> Les diverses actions réalisées par la coopération décentralisée permettent aux autorités municipales de Ouagadougou de répondre aux besoins sociaux de base des populations et d'en tirer des ressources nécessaires à leur fonctionnement. Cette coopération constitue, en effet, pour la ville Ouagadougou un moyen de réalisation de certains projets d'aménagement et d'assainissement, et donc un instrument de développement.

> La coopération décentralisée franco-burkinabé n'est pas une simple action de soutien ou d'appui des collectivités françaises à l'égard de la commune de Ouagadougou. Elle constitue un enjeu pour certaines collectivités françaises, car apportant à ces dernières, beaucoup plus de bénéfices insoupçonnables que cela paraît pour les collectivités de Ouagadougou

1.5 La méthode de recherche

Le cadre de cette étude est la ville de Ouagadougou. Capitale du pays, elle entretient des liens de partenariat et de coopération avec plusieurs entités/collectivités françaises. Le choix de cette ville s'explique aussi par le fait que l'histoire de ses rapports avec les collectivités françaises est la plus ancienne au Burkina Faso (débuté depuis 1967). Pour la réalisation de ce travail, un certain nombre d'acteurs et de personnes ressources ont été consultés. Il s'agit de :

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La population cible : les responsables de la mairie centrale et les responsables des services municipaux, les membres du bureau du comité national de jumelage. Les personnes ressources rencontrées sont entre autres, le Secrétaire Permanent du Comité National de Jumelage, le Secrétaire Permanent de la Commission Nationale de Décentralisation, le Directeur Général de la Coopération Décentralisée, le directeur des relations extérieures de la mairie centrales et le chargé du partenariat et de jumelages de la DGCOD. Des entretiens semi-structures ont été réalisés avec ces acteurs et les résultats ont été dépouillés suivant une grille d'analyse thématique. Ainsi l'outil de recherche utilisé dans ce cadre est le guide d'entretien. Cet outil vient consolider (confirmer ou infirmer) l'analyse de contenu documentaire.

1.5.1 Les techniques de collecte des données O Outils utilisés

Dans l'optique de confronter nos hypothèses avec la réalité sur le terrain pour une analyse qualitative des données, un guide d'entretien a été élaboré, adressé à la population cible et aux personnes ressources.

Aussi, une observation directe sur le terrain a permis d'avoir un aperçu thématique et synthétique sur le phénomène en vue d'une analyse beaucoup plus édifiante et efficiente.

1.5.2 Le déroulement de l'enquête et les difficultés rencontrées

Pour parvenir à une meilleure collecte des informations, nous nous sommes entretenu avec le public cible directement en prenant des notes. Au cours des recherches, plusieurs difficultés ont été constatées dont les principales sont : Le problème de disponibilité des personnes ressources et de la population cible. Dans la mesure où ces catégories de personnes relèvent à la fois du milieu politique et administratif le manque de temps a été ressenti lors de la réalisation des entretiens. Cela nous a amené à faire de multiples déplacements souvent sans succès.

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II. L'historique de l'urbanisation, de la décentralisation et de la coopération décentralisée

2.1. Les origines et l'évolution de la ville de Ouagadougou 2.1.1 Ouagadougou durant la période coloniale

Habitats éparses et espace parsemé d'arbustes séparant les concessions, telle était la situation de Ouagadougou à ses débuts. Pour faire main basse sur la propriété foncière, Voulet fait incendier en 1896 le complexe impérial du Moogho Naaba de Ouagadougou et en lieu et place, il fit bâtir en 1899 un camp militaire avec une place d'armes (place de la révolution devenue place de la nation). Les soldats noirs qui l'accompagnaient furent installés dans l'ancien quartier des serviteurs impériaux (ex quartier Bilbambili). L'article 359 du code civil français renforcé par le décret du 3 octobre 1904 et le décret du 24 juillet 1906 facilite l'expropriation foncière de l'espace par le colon22.

C'est à la fin de la première guerre mondiale que commença le développement réel de Ouagadougou. Les soldats revenus de la guerre, décidèrent de s'installer à Ouagadougou, à la recherche d'un travail auprès du colonisateur comme policier, garde de cercle, métiers dans lesquels ils avaient la priorité. Cette époque coïncide aussi avec la période des grands travaux publics devant faire de Ouagadougou la capitale du pays. Les villages et hameaux de cultures furent ainsi peu à peu transformés en agglomérations grâce à ces divers aménagements. Cependant, si l'exploitation intensive des agrégats (gravillons, pierres sauvages et sables)ont entrainé la disparition des collines jouxtant la ville, il faut noter que cela va renforcer l'action de l'érosion hydrique , les inondations, l'ensablement et la disparition de certains sources (Kaboré Salfo, 2001).

A la fin des années 1940, la ville comptait environ 5 000 étrangers africains, soit le tiers des 178 000 habitants et devient dès lors une ville cosmopolite. Après la deuxième guerre mondiale, la France créa le Fond d'Investissement pour le Développement Economique et Social (FIDES) et un Comité d'Urbanisme et de l'Habitat (CUH) afin de piloter l'élaboration des plans d'urbanisme des villes retenues comme Ouagadougou et Bobo Dioulasso. Nonobstant ces efforts notables, Ouagadougou n'aura pas de plan d'urbanisme et ce jusqu'aux indépendances.

22 L'article 539 stipule que « est terre vacante et sans maître, toute terre non immatriculée, non possédée suivant les règles du code civil français par les autochtones ». Le décret de 1904 souligne que « le domaine est propriétaire, en Afrique Occidentale Française de toutes les terres vacantes et sans maîtres ». Le décret de 1906 quant à lui, privatise les terres par immatriculation.

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2.1.2 L'impact des aménagements postcoloniaux à Ouagadougou

Dès l'avènement des indépendances, une nouvelle loi (n°77/60/AN du 12 juillet 1960) sera prise et constituera le cadre juridique traitant de l'aménagement urbain et de la mise en valeur des terres urbaines. Ce texte maintient cependant le principe colonial de la division spatiale entre zone traditionnelle et zone résidentielle. Pour la première zone, aucune règle de construction spéciale n'était édictée en dehors du respect de l'alignement alors que la deuxième zone était soumise a des conditions particulières de mise en valeur.

Selon Kaboré Salfo (2001), les lotissements de la vile étaient de ce fait soumis a des enquêtes préalables et un dédommagement éventuel des propriétaires coutumiers s'imposait. Ce dualisme du droit foncier entrainera par voie de conséquences des blocages dans les opérations d'aménagement, et va introduire le principe de la relation marchande dans le droit foncier coutumier. Ceci conduira dans les années 1970 a la généralisation du système de vente de terrains par les propriétaires coutumiers. Cette période marque aussi l'apparition et la prolifération des zones non loties ou d'habitats spontanés.

Des mesures sont prises dès lors pour un ajustement foncier qui ont consisté a la légalisation des parcelles, a la rénovation d'anciens quartiers et a l'aménagement de zones périphériques a travers trois importants projets23 :

S Le projet du PNUD (entre 1973 et 1977) visant a permettre a chaque ménage d'avoir une parcelle. Les bénéficiaires de ces parcelles sont reconnus comme ayant de faibles revenus et de ce fait, devait contribuer a raison de 25 000 F pour la zone pilote non lotie et 15 000 F pour la zone restructurée qui bénéficie en général de parcellisation avec ouverture de voie mais sans équipement d'assainissement.
·S
Le projet urbain réalisé par la banque mondiale au secteur 15 et 16 et qui pour sa part mis l'accent su les équipements et les infrastructures. La municipalité était chargée de l'entretien ultérieur. Estimée au départ a 25 000 F, la contribution des populations a été largement dépassée, amenant l'Etat et la banque mondiale a intervenir.


·S
Le projet hollandais (de Larlé-extension, Nonsin, Gounghin Sud et Tampouy) de 1978 a 1988 a préconisé la démarche dite Méthode d'Aménagement Progressif (MAP). Elle consistait a attribuer les parcelles, a procéder ensuite a la construction des infrastructures et équipement grâce au versement de 45 000 F, montant de la parcelle a payer sur 5 ans. Il ressort que les aménagements techniques avec installation

23 Salfo Kaboré, Assainissement de la ville de Ouagadougou : la gestion des composantes eaux pluviales et eaux usées, mémoire A.G., ENAM, 2001,p19.

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d'équipements d'assainissement n'étaient pas supportables par les ménages à faibles revenus.

L'adoption de la RAF et sa modification en 1991 donnera de nouvelles orientations au processus d'assainissement en favorisant la généralisation de la MAP. La participation des ménages était estimée à 300F/m2 sous forme de taxes de jouissance avec un paiement étalé sur cinq ans. Les aménagements qui ont suivi porteront sur la confirmation de la propriété de l'Etat sur le domaine foncier national (DFN) avec toutes les possibilités de céder des terres à titre de propriété privée, la délivrance de titres de jouissance à titres onéreux et l'introduction de dispositions relatives à l'environnement et au contrôle de la pollution. Ville au coeur des activités politico-économiques, Ouagadougou a connu de nombreux aménagements coloniaux et post indépendants. Ces aménagements n'ayant pas tenu compte des besoins réels d'assainissement, la ville offre à certains endroits le spectre de désolation dans les anciens quartiers comme Koulouba et Zangouetin (actuel projet Zaca).

Malgré ces multiples aménagements, Ouagadougou est marqué par une insuffisance de canaux d'écoulement des eaux de pluies, entrainant ainsi une stagnation des eaux et la diversification des flaques d'eaux, sources de reproduction des moustiques et autres vecteurs de maladies. Les aménagements post coloniaux furent certes importants mais, il reste qu'ils n'ont pas pu contribuer totalement à faire de la capitale du pays une ville à l'image de ses paires européennes. Pire, certains de ces aménagements (surtout récents) ont contribué à réveiller les soupçons de corruption qui constitue une véritable gangrène de la société burkinabé.

2.1.3 La Situation géographique et les caractéristiques démographiques de Ouagadougou

La ville de Ouagadougou est située au coeur de la province du Kadiogo, elle-même située dans la région du Centre. La commune de Ouagadougou est limitée au Nord par les communes rurales de Pabré et de Lombila, à l'Est par celle de Saaba, au Sud par celle de Koubri et de Komsilga et enfin à l'Ouest par la commune rurale de Tanghin-Dassouri.

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Burkina Faso

IV

A

Réalisation : KABRE Ousmane

Décembre 2007

I I I \

**CO-J 660000 6TO0OO 660000 700000 TI0000

0 2 i 6 5 10 I II:* (ti;

Carte de Situation de la Ville de Ouagadougou

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I

Figure 1 : Situation Géographique de la commune de Ouagadougou

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La commune de Ouagadougou compte trente secteurs et dix sept villages structurés en cinq arrondissements formant la commune urbaine. Il s'agit de l'arrrondissement de Baskuy (3 300 ha) regroupant les secteurs 1 à 12 ; de l'arrondissement de Bogodogo (4 850 ha) composé des secteurs 14, 15, 28, 29, et 30 ainsi que les villages de Balkuy et de Yamtenga ; de l'arrondissement de Boulmiougou (4 780 ha) comprenant les secteurs 16, 17, 18, 19 et les villages de Boassa, de Sandogo, de Zagtouli et de Zongo ; de l'arrondissement de Nongremassom (6 250 ha) constitué les secteurs 13, 23, 24, 25, 26, 27 et des villages de Nioko, de Polesgo, de Sakoula, de Soguedin et de Ramtenga ; de l'arrondissement de Sig-noghin (2 570 ha) regroupant les secteurs 20, 21, 22 et les villages de Basseko, de Bissighin, Darsalam, de Kamboincé, de Silmiougou et de Yagma.

Tableau 1 : Répartition de la population dans les arrondissements.

Localité

Ménage

Population totale

Masculin

Féminin

Rapport de

masculinité

PROVINCE : KADIOGO

310808

1152239MD

7B@455il4

759 426

101

BASKUY

37 879

180 512

89 093

91 419

97

BOGODOGO

81 953

374 473

189 309

185 164

102

BOULMIOUGOU

72 895

366 182

185 969

180 213

103

NONGREMASSOM

38 645

188 329

96 596

91 733

105

SIG-NOGHIN

34 122

163 859

82 924

80 935

102

Source : Résultats préliminaires du recensement général de la population de 2006

Les femmes représentaient selon le recensement de 1996, 49,60 % des habitants de la région du Centre contre 51,40 pour les hommes. Au regard des récents résultats, le nombre des femmes a un peu évolué de 0.23% tandis que celui des hommes a chuté de 1.23%. Le milieu urbain de Ouagadougou regorgeait en 2006, 1.273.355 âmes soit 83.55% de la population totale de la Région du centre. Bogodogo et Boulmiougou sont les arrondissements les plus peuplés avec respectivement 374 473 habitants et 366 182 habitants tandis que parmi les communes rurales, Tanghin-Dassouri avec 55 094 âmes et Komsilga avec 53 255 âmes sont les plus importantes zones périurbaines peuplées. Ce tableau décrit démontre l'existence d'un déséquilibre total entre le peuplement en milieu urbain et celui rural et partant permet de tirer sur la sonnette d'alarme sur l'explosion démographique urbaine à Ouagadougou. Nul doute que l'exode rurale et la quête constante de l'emploi en Afrique et particulièrement au Burkina peuvent justifier cette situation démographique, en outre, la ville détient une part importante d'infrastructures de développement si attrayantes qu'elles suscitent un intérêt particulier pour les populations de toutes les contrées du pays.

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2.2 L'historique du processus de décentralisation au Burkina Faso

2.2.1 Les prémices de la décentralisation avant les indépendances

La décentralisation apparaît pour un très grand nombre d'élus comme un mode de légitimation de leurs aspirations naturelles au localisme. Il faut cependant reconnaître que les prémices de ce phénomène existaient déjà dans la Haute Volta précoloniale où coexistaient deux sortes de sociétés selon l'organisation de la chefferie traditionnelle : les sociétés acéphales au Sud et à l'Ouest et les sociétés à pourvoir centralisé : les royaumes mossi, peuhl et gourmantché respectivement au Centre, au Nord et à l'Est. Pour mieux administrer la colonie, le colonisateur subdivise rapidement le territoire en cercles de commandement tenant compte des entités régionales. Cependant la décentralisation commence à prendre tout son sens le 4 décembre 1926 quand deux arrêtés coloniaux créent deux communes mixtes Ouagadougou, Bobo à compter du 1er janvier 1927. La mixité s'explique par la présence de citoyens français et voltaïque dans le conseil municipal. Par la suite, la loi n°55-1489 du 18 décembre 1955 réorganisant les municipalités permet la mise en place de communes de moyen et plein exercice. Ouagadougou et Bobo Dioulasso acquirent les statuts de communes de plein exercice, tandis que Ouahigouya, Banfora et Koudougou sont érigés en communes de moyen exercice par trois arrêtés du 24 mai 1958. Mais au fait, qu'est ce que la décentralisation ?

Les politiques de décentralisation font partie des initiatives les plus fortes pour soutenir le développement rural. Dans sa définition la plus élémentaire, la décentralisation désigne le transfert d'une partie du pouvoir de l'Etat national à des instances régionales ou locales. Du point de vue de l'action publique, à l'impératif d'unité de cette action correspond la centralisation; à la revendication de diversité, la décentralisation. Toutes les deux coexistent dans les différents systèmes politiques. Un consensus paraît se dégager, plus nettement au cours des années 1980 et 1990, pour reconnaître qu'un excès de centralisation ou une autonomie locale absolue seraient également déplorables et qu'il faut oeuvrer à la mise en place d'une meilleure collaboration entre les centres de décision nationaux, régionaux et locaux.

Le regain d'intérêt pour cette forme d'organisation de l'Etat qu'est la décentralisation, vient de la reconnaissance qu'une prise de décisions moins centralisée permettrait d'améliorer l'efficacité et la responsabilité des institutions publiques nationales ainsi que la capacité des gouvernements locaux et de la société civile à gérer leurs propres affaires. Les recherches récentes de différentes organisations internationales confirment ce point de vue:

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Pour Moussa Traore et Mamoudou Barry (2005, p2), la décentralisation peut être définie comme une modalité, une technique d'organisation du territoire visant à donner naissance à des entités administratives autonomes appelées collectivités territoriales à l'intérieur d'un même Etat. Cette technique qui vise le développement à la base au moyen d'un management efficient de la gestion administrative, sociale et financière des collectivités territoriales doit être connue et maîtrisée par les différents acteurs du développement local. Il convient après cette définition, de présenter les étapes du processus depuis les indépendances.

2.2.2 Des indépendances à la décentralisation intégrale : la consolidation du processus

A l'aube des indépendances les impératifs d'administration, de développement du pays oeuvrent en faveur d'une continuation de la communalisation du territoire. Ainsi la loi n°24- 60/AN du 24 février 1960 permet la mise en oeuvre de deux types de collectivités locales rurales :

· LI les collectivités locales rurales de plein exercice dont les présidents sont élus ;

· LI Les collectivités locales rurales de moyen exercice dont la présidence revient au chef de circonscription administrative la plus proche.

Ces collectivités locales rurales de moyen exercice seront transformées par la loi n°16/AN du 30 novembre 1964 en collectivités locales de plein exercice avec des membres élus et des membres de droit (députés) et passent de 53 en 1960 à 83 en 1964. La chute du gouvernement de Maurice Yaméogo à la suite des événements du 3 janvier 1966 entraîna la suppression des conseils des collectivités locales et leur remplacement par des délégations spéciales dont le commandant de cercle est le président et l'ordonnateur du budget. Cependant, l'avenir des collectivités locales rurales se jouera avec les ordonnances 74-40/PRES/IS/DI du 7 juin 1974 et 74-45/PRES/IS/DI du 2 juillet 1974 qui consacrèrent la départementalisation du territoire. On note que les conseils de départements n'ont jamais fonctionné car les conseillers n'ont jamais été élus. Ces départements ont été dirigés par des délégations spéciales. L'avènement de la révolution d'août 1983, maintient le principe des départements, mais innove avec la mise en place des comités de défense de la révolution. Les départements au nombre de 350 dirigés par des préfets sont regroupés en 30 provinces dirigés chacune à leur tour par des Hautscommissaires.

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La décentralisation telle qu'elle se présente maintenant est l'émanation de la législation nationale, élaborée laborieusement depuis 1991. En effet le principe d'érection des collectivités locales en personnalités morales dotées de l'autonomie financière est d'ordre constitutionnel24. Tirant les conséquences de ces dispositions constitutionnelles cinq séries de lois portant sur la décentralisation sont élaborées25. Par la suite, neuf décrets d'application viennent traduire la réalité de ces lois. Dans un souci de rendre opérationnel ces dispositions juridiques, il est créé la Commission Nationale de la Décentralisation (CND) ayant pour mission de partir des études prospectives faites de façon participative afin de proposer des textes dits Textes d'Orientation de la Décentralisation (TOD26).

Pour la mise en oeuvre de la décentralisation, la loi 043/98/AN portant programmation de la décentralisation indique un échéancier au bout duquel on devrait aboutir à la communalisation intégrale du territoire avec la mise en place des organes élus dans les communes rurales. Dans la pratique et au regard du fonctionnement des premières municipalités, la mise en oeuvre des TOD a rencontré quelques difficultés. L'innovation majeure est la suppression de la province comme collectivité locale décentralisée et l'érection de la région comme une collectivité locale décentralisée. La loi n°55-2004/AN du 21 décembre 2004 portant code général des collectivités territoriales (CGCT) du Burkina Faso détermine l'orientation de la décentralisation, les compétences et les moyens d'action, les organes et l'administration des collectivités territoriales. Un certain nombre d'instruments sont mis en place et concourent à la réalisation de la décentralisation. L'appui financier est apporté par le fonds de démarrage des communes (FODECOM) et le Service d'Appui à la Gestion et au Développement Communal et de stratégie de formation décentralisée (SAGE DECOM). Le FODECOM permet de doter les nouvelles communes d'un minimum de fonds pour leurs installations et équipements, quant au SAGE DECOM, il apporte un appui technique aux communes en matière de financement d'actions de formation et d'études. L'appui s'est fait aussi à travers un renforcement des structures déconcentrées de l'Etat dans les collectivités locales.

24 Titre XI aux articles 143 et 145 de la constitution du 2 juin 1991

25 La loi 003/93/ADP portant organisation de l'administration du territoire ; la loi 004/93/ADP portant organisation municipale ; la loi 005/93/ADP portant statut particulier de la province du Kadiogo et de la commune de Ouagadougou ; la loi 006/93/ADP portant statut particulier de la commune de Bobo-Dioulasso ; la loi 007/93/ADP portant régime électoral des conseillers de village, de secteur communal, de département, au secteur communal, de la province.

26 Les TOD forment 4 lois réglementant le processus de décentralisation. La loi 040/98/AN du 3/8/1998, portant orientation de la décentralisation au Burkina Faso. Cette loi retrace les grands principes devant guider la décentralisation. La décentralisation doit se concevoir en respectant l'unité nationale. La loi 041/98/AN du 6/8/1998, portant organisation de l'administration du territoire du Burkina Faso. La loi 042/98/AN portant organisation et fonctionnement des collectivités locales. Elle fixe les modalités de gestion des collectivités.

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Produit de l'histoire, le processus de décentralisation au Burkina Faso a connu des péripéties depuis l'époque coloniale à nos jours. Encadrée par un arsenal juridique toujours perfectible, un appui financier relatif, la décentralisation apparaît comme une reforme majeure de politique publique de l'Etat burkinabé. Hormis la décentralisation, la thématique de l'évolution de la coopération décentralisée franco-burkinabé a constitué une préoccupation majeure.

2.3 L'évolution de la coopération franco-burkinabé

2.3.1 Les grandes étapes de la coopération décentralisée depuis les indépendances

2.3.1.1 Les premières tentatives

De 1967, année du premier jumelage franco-burkinabé entre Ouagadougou et Loudun, jusqu'à la fin des années 1980, les relations de coopération nées d'initiatives locales, voire personnalisées étaient généralement le fait d'associations ou comités de jumelages, parfois modestement soutenus par leurs communes. Il s'agissait généralement de localités ayant déjà des relations de jumelage avec des villes européennes et voulant s'ouvrir au Sud, en se référant aux valeurs fondamentales de la Charte de 1957 qui privilégiait la solidarité et l'amitié entre les peuples, le renforcement de la paix et l'exercice des droits de l'homme. Les actions menées avaient surtout un caractère affectif et humanitaire assez semblable à ce qui se pratiquait par nombreuses O.N.G. caritatives. Les actions principales se regroupaient autour de l'envoi de médicaments et de fournitures scolaires, ainsi que la mise à disposition de cofinancements destinés à la réalisation d'infrastructures sanitaires ou scolaires.

2.3.1.2 Les nouvelles approches

La fin des années 1980 est porteuse d'évolution sensible sous l'effet de deux paramètres : d'une part, la généralisation des politiques de décentralisation à l'échelle de l'Afrique de l'Ouest, et d'autre part, de nouvelles approches de coopération décentralisée tournées vers le développement de territoire à territoire. Les relations durables d'amitié, d'estime et de compréhension mutuelle qui se sont tissées au fil de ces années ont permis aux jumelages, d'amorcer le changement de philosophie de l'aide dans un climat de confiance et de franchise.

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Les premières rencontres franco-burkinabé ont lieu à Ouagadougou en février 1990. Elles mettent en évidence la nécessité de remettre en cause certaines actions devant les résultats médiocres, voire décevants, de l'aide ponctuelle par projet27. Des communes et des comités de jumelage du Nord prennent alors conscience que la satisfaction des besoins de leurs partenaires ne doit pas être leur affaire mais celle de ces derniers et que leur façon de procéder entraîne des effets pervers allant à rencontre du but recherché qui est d'aboutir à la prise en charge par les partenaires eux-mêmes de leur propre développement.

Dans les années qui suivent, quelques jumelages pionniers décident alors en accord avec leurs partenaires et avec l'appui d'opérateurs de dépasser le stade des actions ponctuelles inefficaces et de mettre en oeuvre des programmes pluriannuels d'appui au développement local privilégiant la structuration, la participation et la responsabilisation des populations locales et où l'accent est davantage mis sur la formation et l'organisation des partenaires que sur la réalisation de projets « inaugurales »28.

Le Burkina Faso a mis en place, à partir de 1994 - 1995, un processus de décentralisation dans trente trois communes de plein exercice. Ce faisant, tant en France qu'au Burkina-Faso, la coopération entre collectivités territoriales s'inscrit désormais dans un cadre juridique clairement défini. On constate alors une lente évolution des pratiques de coopération. C'est ainsi que plusieurs partenariats s'engagent dans des programmes pluriannuels d'appui au développement local. Avec la généralisation progressive du processus de décentralisation, l'Etat burkinabé décide de compléter le cadre institutionnel de la coopération décentralisée en créant la Commission Nationale de Coopération Décentralisée (CONACOD) instance de concertation, de coordination et d'harmonisation des actions de coopération décentralisée. Parallèlement un décret portant sur l'organisation et le fonctionnement du Comité National de Jumelage (C.N.J.) et des Comités Locaux de Jumelages (C.L.J.) a été promulgué. C'est dans ce nouveau contexte institutionnel, qui devrait permettre une meilleure cohérence, et une plus grande efficacité, que va s'inscrire désormais la coopération décentralisée franco-burkinabé.

Ce nouveau contexte institutionnel doit être l'occasion de faire le point et d'examiner si les objectifs et les méthodes de cette coopération répondent bien à l'enjeu affiché de la

27 Cités unies, la cellule d'animation du groupe-pays Burkina-Faso, La coopération décentralisée franco-burkinabé : vers une coopération de territoire à territoire, rencontre régionale sur la coopération décentralisée, Ouagadougou, le 30 octobre 2000,11p.

28Cités unies, la cellule d'animation du groupe-pays Burkina-Faso, op cit.. Ouagadougou, le 30 octobre 2000, p4.

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décentralisation : « faire de la décentralisation, l'axe fondamental d'impulsion du développement à la base et de la démocratie locale »29.

2.3.2 L'évolution du cadre institutionnel et les actions en matière de coopération décentralisée en France

En 2001, la commission nationale de la coopération décentralisée dénombrait 5891 actions de coopération décentralisée (ACD) en France, à destination de 119 pays30. Ces actions ont trouvé une légitimité probante grâce à la loi de 1992. C'est en effet, en février cette année que le Gouvernement français fixe le cadre juridique de la coopération décentralisée. On voit alors apparaître un engagement massif de collectivités territoriales françaises décidées à mener leurs propres actions, de territoire à territoire, en parallèle à celles de l'Etat. La conception française de la coopération décentralisée est assez clairement reprise par la loi n°92-125 du 06 février 1992 relative à l'administration du territoire de la République. Dans le sens de cette loi, il y'a coopération décentralisée lorsqu'une ou plusieurs collectivités locales françaises développent des relations avec une ou plusieurs collectivités étrangères. Il peut s'agir dans ces cas de relation d'amitié, de jumelage, d'actions de promotion à l'étranger, d'aide au développement de collectivités de certains pays, d'assistance technique, d'action humanitaire, de gestion commune de biens et services ou encore de coopération transfrontalière ou interrégionale.

Toute coopération décentralisée répond à un « contrat ou acte signé entre collectivités territoriales françaises (et leurs groupements) dans les limites de leurs compétences et dans les engagements internationaux de la France. Ces engagements comportent des déclarations d'intensions, des obligations ou droits opposables à l'une ou l'autre partie. Sont visés par la loi, les conventions ayant un caractère déclaratif que celles pouvant avoir des conséquences matérielles, financières ou réglementaires pour les collectivités. Selon l'article 131 de la loi de 1992, la convention est la voie privilégiée pour tous les types d'interventions et la possibilité de passer les conventions est ouverte aux communes, départements, régions et leurs groupements (syndicats mixtes, ententes départementales/régionales et groupements intercommunaux).

La loi Oudin du 9 février 2005 offre une nouvelle opportunité aux collectivités françaises en leur permettant de financer des actions de coopération décentralisée sur leur budget général. Cette loi donne une reconnaissance forte des compétences des autorités

29Cités unies, la cellule d'animation du groupe-pays Burkina-Faso, op cit.. Ouagadougou, le 30 octobre 2000, p6. 30 Antoine Vion etAmmanuel Négrier, La coopération décentralisée, un étape du jeu diplomatique, Paris, 2002, p15.

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décentralisées dans le domaine des services publics de l'eau et de l'assainissement en leur proposant d'affecter volontairement une part du budget pour de telles actions. Elle modifie le code général des collectivités territoriales et celui de l'environnement31.

Antoine Vion et al. en faisant l'état des actions de la coopération décentralisée (ACD) entre les collectivités françaises et celles étrangères remontent dans les années 1947. Les premières actions de coopération décentralisée françaises datent en effet de 1947 mais, au gré de l'évolution institutionnelle, de nombreuses autres ont vu le jour à un rythme lent et régulier jusqu'en 1970. Si les 25% de ces ACD ont été mises en place dans les trente (30) premières années, c'est au cours des « années 0 » (1960, 1970, 1980...) que ces ACD ont chaque fois doublé32. Ceci permet de dire que tous les changements de décennies offrent à voir des doublements par rapport aux années précédentes. Il apparait que dans l'évolution institutionnelle, chaque nouvelle décennie donne l'occasion d'une création ou d'un renouvellement de partenariat. La croissance du nombre des ACD s'explique, à partir des années 1970, par l'entrée en jeu d'autres acteurs que les seuls échelons communaux (syndicats, structures intercommunales, Conseils Généraux, Conseils régionaux avant même leur existence politique comme collectivités territoriales,...).

Avec l'avènement de la décentralisation dès le début 1980 et l'avènement de la loi de 1992 (qui a porté sur la mise en oeuvre du nouveau statut de la coopération décentralisée), le rythme des ACD s'accélère très nettement. La moyenne des actions recensées à cette époque passe d'une soixantaine à plus de 150 dans la décennie qui s'ouvre et ce nombre passe à plus de 200 dès 1990. Depuis 1997, le nombre d'ACD nouvelle diminue sensiblement et semble entériner la fin d'un cycle, où la majeure partie des actions envisagées dans la décennie 1990 ont trouvé leur concrétisation. Ces mutations dans le domaine réglementaire et législatif ont énormément contribué à renforcer les acquis de la coopération décentralisée entre les collectivités françaises et les autres collectivités du monde, en particulier celles du Burkina Faso.

31Article 1 correspondant à l'article L. 1115-1-1 du code général des collectivités territoriales, « Les communes, les établissements publics de coopération intercommunale et les syndicats mixtes chargés des services publics de distribution d'eau potable et d'assainissement peuvent, dans la limite de 1 % des ressources qui sont affectées aux budgets de ces services, mener des actions de coopération avec les collectivités territoriales étrangères et leurs groupements, dans le cadre des conventions prévues à l'article L. 1115-1, des actions d'aide d'urgence au bénéfice de ces collectivités et groupements, ainsi que des actions de solidarité internationale dans les domaines de l'eau et de l'assainissement. ».

Article 2 (l'article L. 213-6 du code de l'environnement est complété par l'alinéa) « Dans le respect des engagements internationaux de la France et dans le cadre de conventions soumises à l'avis du comité de bassin, l'agence peut mener des actions de coopération internationale dans les domaines de l'eau et de l'assainissement, dans la limite de 1 % de ses ressources, le cas échéant et suivant les règles statutaires en vigueur pour chaque catégorie de personnels, avec le concours de ses agents. » Cf., Aubourg Guillaume., Grodin Pierre-Marie et al. Guide de la coopération décentralisée pour l'eau potable et l'assainissement, Paris, 2007, p11. 32 Antoine Vion et al, opcit, p15.

33 Article 3 de la loi N° 055-2004 / AN portant CGCT du 21 décembre 2004.

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CHAPITRE II. ORGANISATION DU SECTEUR DE LA COOPERATION DECENTRALISEE AU BURKINA FASO

I. Les pouvoirs publics et leurs rôles 1.1

L'Etat et les services déconcentrés

L'Etat est la structure centrale qui définit les actions et politiques publiques et veille à leur application. Il délègue des pouvoirs d'exécution à des démembrements que sont les services déconcentrés. On appelle services déconcentrés, les services périphériques de l'Etat qui ont en charge certaines fonctions précises. La décentralisation ne saurait être efficace que si elle est accompagnée d'une déconcentration33. Aux premières heures de la communalisation intégrale, les services déconcentrés de l'Etat se doivent de jouer le rôle de régulation, d'accompagnement et de contrôle des acteurs de la coopération décentralisée au niveau local. Sans être exhaustif, les services pouvant jouer les rôles cidessus évoqués, sont :

> les préfectures : elles ont longtemps joué le rôle de mairies par délégation spéciale. Les préfets sont bien informés de la coopération décentralisée. Avant la communalisation intégrale, ces préfectures avaient en charge de sceller les jumelages entre le département et la ville jumelle. Elles détiennent ainsi, des archives sur le jumelage-coopération ;

> les hauts-commissariats : la disparition de la province en tant que collectivité territoriale le 31 décembre 2006 a fait d'elle une simple circonscription administrative. En plus du rôle que doivent jouer les préfectures à l'heure actuelle, les hauts- commissariats doivent aussi jouer un rôle de contrôle des activités menées par les acteurs de la coopération décentralisée.

> les gouvernorats : bien avant que les conseils régionaux ne se mettent en place, certaines régions avaient scellé des jumelages coopération. Depuis la mise en place effective des conseils régionaux, le rôle du gouverneur est redéfini. Il joue le même rôle que le haut-commissaire mais au niveau régional dans l'accompagnement des acteurs de cette coopération.

> les services relevant des ministères centraux, présents dans les régions, provinces et communes/départements. Les communes rurales n'ayant aucune expérience dans les domaines de l'agriculture, l'assainissement, l'éducation, etc. les services

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déconcentrés de ces ministère peuvent leur apporter des conseils et des appuis techniques.

Hormis les services déconcentrés, le gouvernement intervient dans cette coopération par des structures qu'il a créées à cet effet.

1.2 Les Directions spécialisées publiques de la coopération décentralisée

Le gouvernement à travers le MATD a créé des structures chargées de la coopération décentralisée. Il s'agit de la DCOD/CONACOD (Direction de la Coopération Décentralisée) et de la DGSONG (Direction Générale du Suivi des ONG). La CONACOD est une structure logée au sein de la DCOD dont l'exécution de ses missions incombe au directeur de la DCOD. La DCOD est l'une des directions de la DGCT selon l'organigramme du MATD et lui assigne les attributions suivantes34 : le suivi des activités de la coopération décentralisée, l'appui à l'établissement des relations entre les collectivités locales et les partenaires au développement, l'animation de la coopération décentralisée entre collectivités nationales et étrangères, l'établissement des statistiques et bilans des interventions des partenaires au développement dans le cadre de la coopération décentralisée, le suivi de l'application du code général des collectivités territoriales et des textes régissant la coopération décentralisée et le suivi des accords de partenariat.

La CONACOD, elle a vu officiellement le jour en 200035. Ses attributions sont36 : établir et tenir à jour un état de la coopération décentralisée menée par les coopérations non gouvernementales, formuler toute disposition tendant à renforcer la coopération décentralisée, contribuer au développement de la politique de décentralisation, formuler toute recommandation tendant à coordonner les interventions des différents acteurs de la coopération décentralisée, coordonner les rencontres des partenaires en vue d'échanges et de diffusion d'informations sur la coopération décentralisée, élaborer des programmes de formation des acteurs locaux de la coopération décentralisée ; contribuer à harmoniser les méthodes et/ou principes d'intervention, apporter un appui-conseil approprié visant à l'amélioration générale des dossiers de demande de cofinancement et s'assurer de l'éligibilité des demandes de cofinancement. Il faut noter que la CONACOD est une instance de concertation des partenaires et des acteurs de la coopération décentralisée. L'instance suprême de la CONACOD est l'AG dont le président est le ministre du MATD et

34 Le décret N°2007-306/PRES/PM/MATD du 18 mai 2007.

35 Le décret N° 2000-274/PRES/PM/MATS/MEF du 17 mai 2000. 36L'article 5 du décret N° 2000-274/PRES/PM/MATS/MEF du 17 mai 2000.

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le vice président le ministre de l'Economie et des Finances37 L'AG a pour rôle de définir les grandes orientations, d'adapter les programmes et d'apprécier l'exécution des tâches et missions.

Le secrétariat permanent de la CONACOD (assuré par la DCOD) a pour tâche d'animer, d'exécuter et de suivre les activités de la CONACOD38 La DSONG (ex BSONG) a été créée par le gouvernement de l'époque révolutionnaire en mai 1984 pour mettre de l'ordre au sein des ONG. Le 15 février 2007, elle est devenue officiellement la DGSONG39. Elle comporte en son sein deux directions. Une direction chargée du suivi des interventions des ONG (cadre opérationnel), l'autre chargée du suivi des cadres de coopération avec les ONG (cadre juridique). Cette nouvelle direction générale reprend les attributions de l'ancienne direction de la DSONG, ce sont : l'orientation des activités des ONG, la coordination des activités des ONG, la gestion de l'information sur les ONG et/ou pour les ONG ; le suivi des activités opérationnelles des ONGn, la facilitation de l'exécution des actions des ONG et associations de développement. De façon résumée, la DGSONG est un outil de gestion de la coopération ONG- gouvernement - société civile.

1.3 Les collectivités territoriales

La collectivité territoriale est une subdivision du territoire dotée de la personnalité juridique et de l'autonomie financière. Selon l'article 8 de la loi N° 055-2004/ AN portant CGCT du 21 décembre 2004, elle constitue une entité d'organisation et de coordination du développement. Les collectivités territoriales sont : la région et la commune.

La région en tant que collectivité territoriale a vu le jour à la suite de la communalisation intégrale, c'est-à-dire aux lendemains des élections municipales du 23 avril 2006. Le ressort territorial de la région en tant que collectivité territoriale coïncide avec celui de la région en tant que circonscription administrative. Le ressort territorial de la région est constitué par l'ensemble des territoires des communes qui la composent. Il existe de nos jours treize (13) régions au Burkina Faso. Conformément à l'article 16 du Code de Collectivités, la région a vocation à être un espace économique et un cadre d'aménagement, de planification et de coordination du développement40. Nouvel acteur de la coopération décentralisée, la loi lui donne la possibilité d'entrer en coopération avec des collectivités territoriales étrangères ou nationales. Certaines régions hériteront des partenariats entrepris par les gouvernorats. En rapport avec la coopération décentralisée, le

s? L'Article 2 et 7 du décret N° 2000-274/PRES/PM/MATS/MEF du 17 mai 2000. s» Section 2 du décret N° 2000-274/PRES/PM/MATS/MEF du 17 mai 2000.

39 Décret N°2006-568/PRES/PM/MEDEV du 22 novembre 2006.

40 Article 16 de la loi N° 055-2004 / AN portant CGCT du 21 décembre 2004.

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président du conseil régional exécute les délibérations du conseil régional. Il est chargé sous le contrôle du conseil d'exercer la maîtrise d'ouvrage des travaux de la région et de veiller à l'exécution des programmes de développement41.

La région apparaît ainsi comme une entité regroupant plusieurs communes, où, doivent être organisées et coordonnées les différentes politiques de développement au plan régional. La communalisation intégrale implique un transfert de compétence au niveau local. La commune est l'un des espaces d'élaboration et d'application de la politique de développement. Dans le sens de la l'article 17 de la loi n°055-2004/AN portant CGCT du 21 décembre 2004, la commune est la collectivité territoriale de base et son territoire est organisé en secteurs et/ou en villages. Quelle différence existe-t-il donc entre une commune urbaine et une commune rurale ?

L'article 19 de la même loi relève que la commune urbaine est une entité territoriale comprenant au moins une agglomération de vingt-cinq mille (25 000) habitants et dont les activités économiques permettent de générer des ressources budgétaires propres annuelles d'au moins vingt-cinq millions (25 000 000) de francs CFA.

La commune rurale est un regroupement de villages qui a une population d'au moins cinq mille (5 000) habitants et dont les activités économiques permettent de générer des ressources budgétaires propres annuelles d'au moins cinq millions (5 000 000) de francs CFA. Nonobstant ces dispositions, les départements existant avant la date d'entrée en vigueur de la présente loi, ont été érigés en communes même s'ils ne remplissent pas les conditions42.

La coopération décentralisée met donc en scène les pouvoirs publics, constitués de l'Etat, de ses démembrements et des collectivités. Ceux-ci ne sont pas les seuls acteurs. En effet selon la conception large de l'UE, les organisations de la société civile occupent une place de choix dans cette forme de coopération.

II. Les organisations de la société civile

La définition de société civile varie de façon significative selon les caractéristiques socioéconomiques de chaque pays. En terme simple, c'est ce qui reste d'une société quand l'Etat se désengage complètement. En d'autres termes, elle est l'opposée de la société politique. Dans le cadre de la coopération décentralisée les organisations de la société

41 Article 122 et 177 de la loi N° 055-2004 / AN portant CGCT du 21 décembre 2004.

42 Article 27 de la loi N° 055-2004 / AN portant CGCT du 21 décembre 2004.

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civile, à savoir les associations oeuvrant dans le jumelage coopération et les ONG et associations de développement feront l'objet de cette analyse.

2.1 Les associations oeuvrant dans le jumelage-coopération

On distingue deux groupes d'associations oeuvrant dans le jumelage-coopération selon le critère temporel : les associations historiques (le Comité National de Jumelage et les Comités Locaux de Jumelage) qui continuent d'oeuvrer dans ce domaine et celles récemment créées. Les Comités de Jumelage sont des associations régies par un texte additionnel43. Il existe au Burkina Faso, deux types de Comités de Jumelage. Au plan national : le CNJ et au plan local le CLJ.

Le Comité National de Jumelage

II a vu le jour en septembre 1968 à la suite d'une AG qui a réuni six (6) CLJ des six (6) premières communes du pays qui sont : Ouagadougou, Bobo-Dioulasso, Banfora, Koudougou, Ouahigouya et Kaya. Le CNJ avait pour mission à cette époque de défendre les intérêts de ces communes, compte tenu du climat politique et économique qui y régnait. En 1968, les caisses de l'Etat étant vides, le ministre des finances et du commerce de l'époque avait mis en place le système de reversement appliqué aux communes du Burkina Faso44. Le CNJ est maintenant chargé de la coordination des actions des comités locaux de jumelage sur l'ensemble du territoire. Le rôle dévolu au CNJ est de conscientiser, de former et d'accompagner les CLJ. Il est institué auprès du CNJ une commission de contrôle des CLJ. Ce contrôle porte sur les fonds et les biens des dits comités. L'organisation et le fonctionnement de la commission de contrôle sont régis par arrêté du Ministre chargé de l'Administration du Territoire45.

Le CNJ est composé uniquement des CLJ. Il comprend un organe décisionnel constitué par une AG qui prend les grandes décisions, un comité directeur composé des présidents des CLJ et un secrétariat permanent qui gère les affaires courantes.

Les Comités Locaux de Jumelage

II existe plus de 180 partenariats officiels avec des pays comme la France, l'Allemagne, l'Italie, la Belgique et les USA dans le domaine de la coopération décentralisée dont, selon

« Décret N°2000-276/PRES/PM/MATS du 21 juin 2000.

44 Félix. I. Boyarm, op. cit., p.5.

45 Article 13 et 14 du décret N°2000-276/PRES/PM/MATS du 21 juin 2000.

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la DCOD, 142 sont des jumelages coopération. Parler de jumelage coopération, c'est évoquer le rôle principal du Comité Local de Jumelage46

Le jumelage avec d'autres partenaires du Nord ou du Sud, obéit à la procédure suivante :

> la recherche du partenariat : elle n'obéit pas à une règle particulière. Le plus souvent tout commence par l'amitié entre deux individus ou le responsable d'une collectivité peut prendre l'initiative mais il lui est conseillé d'avoir en main la monographie de ladite collectivité ;

> une fois qu'une ville candidate est identifiée, il est souhaitable de procéder à des échanges de délégations afin que chacune des parties fasse connaissance avec le futur partenaire ;

> il est recommandé à ce stade de créer un CLJ ;

> le projet de jumelage doit être soumis au conseil municipal ou au conseil régional
pour délibération ; laquelle délibération doit être approuvée par l'autorité de tutelle

> après avis favorable, une date de jumelage est arrêtée d'un commun accord par les deux futurs partenaires ;

> si la cérémonie de jumelage a lieu au Burkina Faso, les organisateurs doivent écrire
au président de l'AMBF afin qu'il désigne le maire qui va célébrer cette cérémonie ;

> le SP/CNJ doit être contacté pour l'achat des protocoles.

Le socle du jumelage est de permettre le rapprochement entre les hommes, de créer une "école de solidarité" et de fournir un "espace de rencontre interculturelle"47. Il va s'en dire que le CLJ ne servira que de cadre institutionnel pour la réalisation de ces objectifs. En outre, il joue un rôle de maître d'oeuvre dans la réalisation des infrastructures en particulier et dans le développement local en général. A la suite des comités de jumelage, d'autres acteurs ont fait leur apparition ; il s'agit de l'AMBF et de la MCD.

2.2 L'Association des Municipalités du Burkina Faso et de la Maison de la Coopération Décentralisée.

L'Association des Municipalités du Burkina Faso a été créée le 2 décembre 1995 à la suite d'un congrès constitutif tenu à Bobo Dioulasso. Cette structure qui regroupait au départ l'ensemble des maires est devenue par la suite une association regroupant l'ensemble des municipalités du Burkina. Elle se présente comme une structure faîtière et a pour missions

46 L'article 128 de la loi N° 055-2004 / AN portant CGCT du 21 décembre 2004.

47 CUF, Objectifs et réalités de la CD, site www.cites-unies-france.org .

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de promouvoir la solidarité, le partenariat et la coopération entre les communes burkinabé d'une part et entre celles-ci et les communes d'autres pays d'autre part, renforcer les capacités des communes membres, accompagner les communes dans l'animation de la vie locale, représenter et défendre les intérêts des communes membres, auprès des pouvoirs publics et des partenaires nationaux et internationaux.

Accordant un intérêt à la coopération décentralisée, il a été créé dans le bureau national de l'AMBF, un poste de secrétariat à la coopération décentralisée et au jumelage.

L'AMBF agit dans le champ de la coopération décentralisée en partenariat avec d'autres structures telles que le CNJ et la Maison de la Coopération Décentralisée (MCD).

La MCD est une structure associative née d'un partenariat entre les collectivités territoriales françaises et l'association burkinabé Acacia,48 qui a pour mission d'appuyer le développement local et la coopération. Régie par la loi N°10-92/ADP du 21 décembre 1992, elle a officiellement ouvert ses portes en fin 2004 et a pour objets de participer à clarifier et à diffuser la notion de coopération décentralisée, de favoriser la concertation et la coordination entre les acteurs de la coopération décentralisée du Nord et du Sud, d'accompagner les acteurs de la coopération décentralisée dans l'appui à la mise en oeuvre de la décentralisation et des dynamiques de développement territorial et de promouvoir le renforcement et la valorisation des capacités d'action des acteurs locaux.

Une collectivité territoriale ne peut y adhérer qu'à la suite d'une signature de convention et du paiement d'un droit d'adhésion. Le partenariat n'étant pas exclusivement détenu par les associations oeuvrant dans le jumelage coopération, il importe de considérer le rôle des ONG et des autres associations de développement.

2.3 Les ONG et les autres Association

Le Burkina Faso, ayant adopté le concept large de la coopération décentralisée, les ONG et associations de développement, sont à prendre en compte. Mais pour éviter l'amalgame entre une ONG et une association, une définition claire des concepts s'impose.

Selon le SPONG, le Burkina Faso compte plus de seize milles (16 000) ONG et associations49. Le terme association peut avoir plusieurs appellations : club, groupement, coopératif, fédération etc. Une association est tout groupe de personnes physiques ou morales, nationales ou étrangères, à vocation permanente, à but non lucratif et ayant pour

48 Elle a pour but, la mise en place et le suivi de projets culturels et l'éducation en Afrique. Elle a également pour objectif le développement d'une meilleure connaissance des réalités sociales, culturelles et politiques africaines en France.

49 Chiffres obtenus auprès du SPONG, les ONG étaient au nombre de sept (7) en 1960. Elles étaient d'aspiration religieuse et menaient des activités humanitaires et caritatives.

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objectif, la réalisation d'objectifs communs notamment dans les domaines culturel, sportif, social, spirituel, religieux, scientifique, professionnel ou socio-économique.50

Pour être reconnue officiellement par l'administration publique, une association doit au préalable suivre les formalités ci après : asseoir une instance constitutive (AG, congrès, etc.), soumettre à cette instance pour adoption les projets de statuts portant l'objet, les buts, la durée, le siège et le règlement intérieur de la future association ; procéder à la désignation des membres dirigeants de l'association ; établir un procès-verbal des travaux de l'instance constitutive avec mentions obligatoires de la composition de l'organe dirigeant, l'indication de l'identité et des adresses complètes de ses membres.51

Le procès-verbal de l'instance constitutive doit être signé par les membres du bureau de séance. La déclaration de l'association est faite dans les huit (8) jours suivant sa constitution, soit auprès du ministère chargé des libertés publiques, pour les associations ayant une vocation nationale ou internationale, soit auprès de l'autorité administrative compétente lorsqu'elles sont régionales ou locales. A coté des associations nationales, il existe sur le terrain des associations étrangères. Selon l'article 17 de la loi N°10-92/ADP du 21 décembre 1992, pour être qualifié d'association étrangère, le regroupement doit remplir les conditions suivantes : avoir son siège ou son principal établissement situé à l'extérieur du Burkina Faso, avoir son organe dirigeant essentiellement constitué d'étrangers, avoir 75 % au moins de ses membres fondateurs de nationalité étrangère.

Il existe plusieurs définitions proposées par la doctrine sur le concept d'ONG. Mais on peut retenir que les ONG sont créées en dehors de toute directive gouvernementale. Ce sont des personnes privées, des individus qui décident librement de la création d'une ONG. A la différence d'une entreprise privée, elle a un but non lucratif et est l'expression de la solidarité. Au Burkina Faso, il existe deux (2) types d'ONG : les ONG étrangères et celles nationales. Le droit burkinabé ne connaissant pas le concept d'ONG, la voie pour créer une ONG nationale, passe d'abord par celle d'une association. En d'autres termes, ce sont des associations burkinabé qui bénéficient du statut d'ONG auprès des autorités. La convention cadre est l'acte par lequel une association accède au statut d'ONG. Cette convention renferme deux appellations, mais, qui théoriquement, ont les mêmes effets. La convention cadre de coopération gouvernement et ONG est appelée convention d'établissement au Burkina Faso quand elle s'applique aux ONG étrangères désirant

50 Art. 1 de la loi N°10-92/ADP du 21 décembre 1992.

51 Les arts. 3 et 4 de la loi N°10-92/ADP du 21 décembre 1992.

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s'installer dans le pays et convention d'agrément lorsqu'elle s'intéresse aux ONG nationales.

Obligations et avantages des associations et ONG.

La convention cadre (d'établissement ou d'agrément) accorde théoriquement les mêmes droits aux ONG nationales et étrangères. Cette convention est valable pour cinq (5) ans et renouvelable par tacite reconduction. Ce contrat conclu entre le gouvernement et l'ONG fait naître des droits au profit de chaque partie. C'est ainsi que le gouvernement s'engage à :

> faciliter l'entrée et à assurer la sécurité au Burkina Faso des ressortissants étrangers engagés par l'ONG pour la mise en oeuvre de ses projets et programmes ;

> accorder l'admission en régime de franchise temporaire des droits et taxes pour les
fournitures et équipements acquis par l'ONG aux fins des projets et programmes.

En retour les obligations dévolues à l'ONG sont :

> mobiliser les ressources humaines, financières et techniques nécessaires à l'appui des projets et programmes de développement initiés et exécutés par les populations des zones rurales et urbaines du Burkina Faso ;

> soumettre au gouvernement le programme d'activités qu'elle compte entreprendre et établir à l'attention du gouvernement son rapport d'activités ;

> designer après consultation du gouvernement un représentant pour superviser l'ensemble des programmes et projets mis en oeuvre ;

> assurer l'africanisation de ses cadres et former des nationaux burkinabé dans les tâches et les domaines de son intérêt.

Obligations et avantages des associations.

Une association reconnue d'utilité publique peut bénéficier de subventions ou tout autre avantage consentis par l'Etat. Selon les articles. 15 et 16 de la loi N°10-92/ADP du 21 décembre 1992 portant liberté d'association au Burkina Faso, une telle association est tenue de fournir chaque année aux ministères chargés des libertés Publiques, du plan de la coopération ou de tout autre ministère intéressé : son programme annuel d'activités et son bilan de l'exercice écoulé. Les ministères ci-dessus cités ont droit de contrôle sur les activités de l'association reconnue d'utilité publique, afin de s'assurer de leur conformité avec les programmes nationaux de développement. A l'instar des ONG, les associations reçoivent des financements et un appui institutionnel de la part des partenaires étrangers.

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CHAPITRE I. PLACE DES ACTEURS ET PORTEE DE LA COOPERATION DECENTRALISEE FRANCO-BURKINABE

/. Le rôle des acteurs

1.1 L'impulsion de la coopération décentralisée

L'impulsion de la coopération est un rôle qui incombe en particulier au chef de l'Etat et au gouvernement. C'est dans ce sens que le Président du Faso assiste aux rencontres d'envergure internationale entre le Burkina Faso et ses partenaires étrangers, organisées sur le territoire burkinabé ou à l'extérieur. C'est aussi ce qui exilique que le premier jumelage (Ouagadougou/Loudun), célébré le 21 Janvier 1967 a été parrainé par le Général Sangoulé Lamizana, Président de la République de Haute Volta en son temps.52 Dans la même logique, sous la quatrième République, le chef de l'Etat, Biaise Compaoré a patronné en 1994 à Saint Fons (France), le premier colloque sur la coopération décentralisée. Au cours de ce colloque, le ministre de l'administration territoriale et de la sécurité a émis les voeux de voir la ville de Ouagadougou jumelée à celle de Lyon. Le deuxième colloque Burkina/France sur la coopération décentralisée tenu à Chambéry en mai 1997, a connu aussi la présence du Président du Faso. Après les élections municipales de 1995 qui ont permis la création de 33 communes urbaines, le Président du Faso a plaidé la cause des nouveaux élus auprès de leurs homologues français afin de renforcer leurs capacités de gestion. Ainsi, cette action a permis le réchauffement des relations de coopération intercommunale entre la mairie de Chambéry et celle de Ouahigouya.53

En 2002, les autorités du Burkina Faso ont décidé d'organiser à leur tour les rencontres franco-burkinabé sur la coopération décentralisée à Ouagadougou. Cela a eu pour conséquence pour les deux (2) partenaires de travailler à arrêter de commun accord leurs attentes. Après cinq (05) ans, soit en 2007, ce sont tenues du 6 au 7 décembre, les deuxièmes assises franco-burkinabé sur la coopération décentralisée à Ouagadougou.54Le chef de l'Etat avait souhaité que les partenaires orientent la coopération décentralisée de plus en plus vers les secteurs sociaux car ce qui importe dans le développement, ce ne sont ni les bâtiments, ni les infrastructures routières et autres mais que l'homme soit libéré de la faim, de la soif et de la maladie. Le Président du Faso fut invité par le président du conseil général de Belfort les 29 et 30 mai 2006. A cette occasion, il s'exprima sur la

52 Félix. I. Boyarm, Histoire de la coopération décentralisée au Burkina Faso, 2005., p.5.

53 Félix. I. Boyarm, op. cit., p.5.

54 CONACOD, CUF, Rencontres nationales sur la CD franco-burkinabé, 2004 Ouagadougou.

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question de "l'immigration choisie" en affirmant que tant que l'Afrique sera pauvre, cette initiative connaîtra un échec.55

Soulignons que la présence du Président du Faso dans les différentes rencontres de la coopération décentralisée, facilite l'accès des collectivités et de la société civile aux financements des partenaires au développement. D'ailleurs, certains partenariats ne sontils pas nés par le biais de cet engagement ? Il n'est cependant pas le seul acteur politique, sa présence engage en outre le gouvernement. Le gouvernement intervient dans le champ de la coopération décentralisée pour mettre de l'ordre dans le jeu du jumelage. Il a pris, par exemple, le décret N°2000-276/PRES/PM/MATS du 21 juin 2000 portant organisation et fonctionnement des CLJ et du CNJ. Il a été créé par décret N°2000- 274/PRES/PM/MATS/MEF le 28 juin, la CONACOD, comme cadre de concertation entre les acteurs. Ces textes s'inscrivaient dans le souci d'apporter de la transparence dans les activités des comités de jumelage, accusés de détournement.

Le ministère en charge des questions des collectivités (MATD) délivre à travers la DCOD des ordres de mission aux acteurs nationaux pour répondre aux invitations de leurs homologues du Nord ou du Sud. Ces ordres destinés aux maires, présidents de conseils régionaux, membres des CNL et CLJ, gouverneurs, hauts-commissaires, préfets, etc. permettent à ces acteurs d'aller à la recherche d'autres partenaires. En 2006 il a été délivré 96 ordres de mission. Avec l'effet de la communalisation intégrale, un bilan partiel de l'année 2007 montre que jusqu'en fin août, plus de 80 ordres de mission ont été délivrés56 La délivrance de ces ordres de mission permet aux intéressés d'avoir dans de brefs délais les visas.

L'organisation des rencontres franco-burkinabé en 2002 sur la coopération décentralisée a été en grande partie l'oeuvre de la DCOD et de la CONACOD. Le gouvernement accorde des subventions à un bon nombre d'acteurs que sont la DCOD, la DGSONG, l'AMBF, le CNJ, etc. En créant la DSONG, le gouvernement s'est décidé à mettre de l'ordre dans le champ des ONG. La DGSONG octroie des exonérations fiscales et douanières aux ONG et associations de développement. Le but des exonérations est de faciliter, aux structures bénéficiaires, l'importation du matériel dans le cadre de leurs activités. Cela constitue une forme de subvention que l'Etat accorde à certaines organisations. En outre, le transfert de compétences et de ressources aux collectivités territoriales, permet à dernières de jouer un rôle accru dans leur développement.

55 Article à la Une paru in bulletin trimestriel d'information de la MCD, N°000 d'octobre à décembre.

56 Chiffres obtenus en août auprès de la DCOD.

57 Clémentine Ouedraogo, présidente du conseil d'administration du SPONG, www.ieune-afrique.com .

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1.2 La maîtrise d'ouvrage et l'accompagnement de la coopération décentralisée
· La maîtrise d'oeuvre des comités de jumelage et des ONG.

Dans les collectivités territoriales où il existe une coopération de commune à commune comme c'est le cas de la ville de Ouagadougou et celle de Ouahigouya, les CLJ interviennent dans la dimension humaine et culturelle. Ce sont les CLJ qui offrent aux communes des chorégraphes, des danseurs traditionnels, des objets d'arts et des guides touristiques aux bénéfices des partenaires extérieurs. A l'inverse, dans les localités où les CLJ sont plus actifs, ils entreprennent de leur propre initiative la réalisation d'infrastructures telles que la construction d'écoles, de CSPS, de forages etc.

Au lendemain de l'indépendance du pays, on a assisté à l'apparition d'ONG à caractère caritatif et humanitaire. Après la grande sécheresse qu'a connue le sahel dans les années 1970, le Burkina Faso a enregistré une centaine d'ONG étrangères57 De l'aide d'urgence, elles sont impliquées dans les opérations de développement. Les ONG et associations ont émergé durant la Révolution. C'est en effet, en 1984 qu'est née la DSONG et dans la même année, furent organisées les premières rencontres ONG/gouvernement. Dans le plan quinquennal de 1991-1995, la contribution des ONG et associations a été estimée, selon le SPONG, à 34 milliards de francs CFA. Soutenues par l'UE, à travers le FED, les ONG et associations ont participé à l'élaboration et à la mise en oeuvre des politiques économiques et sociales. De nos jours, le CSLP est consulté et mis en oeuvre par les ONG. Il existe des collectifs d'ONG et associations de développement qui sont des structures consultatives auprès des instances comme : le CES, le CAPES, Faso Baara, le PNGT, le PNDS, etc.

Le SPONG a obtenu par ses démarches l'exonération de la taxe patronale depuis le 4 juin 1975 de la part du service des impôts. Après de multiples démarches, une fois de plus, il a reçu la convention-cadre le 1er juillet 1977 pour l'exonération des taxes de douanes sur les machines et articles destinés au SPONG et ONG membres et qui, serviront d'utilité publique. En 1975, on dénombrait 17 membres au sein du SPONG. Ce nombre s'est accru au fil des ans. C'est ainsi qu'on est passé à 28 membres en fin 1976, à 36 en fin 1977, à 40 en fin 1978, à 43 en fin 1983 et à 52 en fin 1984. Le SPONG a participé à l'élaboration des textes sur la décentralisation et sur le CSLP. Les membres adhérents s'associent pour mener en commun des projets plus globaux, comprenant les études, les investissements et la formation, en harmonie avec les plans gouvernementaux.

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· Accompagnement de la coopération décentralisée

P lusieurs acteurs dont le CNJ, l'AMBF et la MCD ont signé des accords de partenariats et mènent ensemble certaines activités telles l'organisation des journées sur la coopération décentralisée en vue d'accompagner le processus.

Le Comité National de Jumelage

Le CNJ dispose d'une longue expérience en matière d'accompagnement de cette forme de coopération. A partir de 1993, à l'issue d'une AG, elle a exigé de chaque CLJ un rapport annuel d'activités en vue de suivre leurs projets et de pouvoir planifier les formations selon les difficultés qui leurs sont spécifiques. Le CNJ est sollicité pour le règlement des litiges et pour présider les cérémonies de signature de protocoles d'amitié. Visant constamment le renforcement et l'élargissement du partenariat, ledit comité a adressé des correspondances à toutes les ambassades du Burkina Faso, via le Ministère des Affaires Etrangères. La mémoire de la coopération décentralisée repose sur le CNJ, en la personne de son secrétaire permanent Félix Idrissou BOYARM qui, depuis le premier jumelage (1967) établi au Burkina Faso, continue de s'occuper des questions relatives à la coopération décentralisée.

La Maison de la Coopération Décentralisée et l'Association des Municipalités du Burkina Faso

La Maison de la Coopération Décentralisée (MCD) a permis la diffusion de la notion de coopération décentralisée à travers la création d'un site, d'une base de données et des bulletins trimestriels d'information et de lettres mensuelles d'information. En octobre 2007, cette structure a publié un (1) bulletin trimestriel et dix-sept (17) lettres mensuelles d'information. La Maison de la Coopération Décentralisée a plus des agents chargés de mission qui aident les collectivités territoriales et les CLJ dans l'élaboration des projets. La MCD accompagne les communes dans la recherche de partenariats via Internet, ou, à partir d'une association déjà existante dans ladite localité et qui entretient des relations non officielles avec d'autres associations étrangères. Les agents de la MCD accompagnent les élus locaux, les membres des CLJ dans les missions à l'étranger. Ils jouent aussi un rôle de formateurs. Les collectivités françaises ont été initiatrices de cette structure qui, en réalité, oue le rôle d'interface entre les collaborateurs des deux parties.

L'AMBF quant à elle, a signé une convention avec la MCD. C'est pourquoi, toutes les activités touchant la coopération décentralisée sont orientées vers la MCD. Aujourd'hui, il existe une symbiose parfaite entre les deux (02) structures, car la secrétaire chargée de la

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coopération décentralisée au sein du bureau de l'AMBF est en même temps la présidente de la MCD. Toute chose qui permet d'agir ensemble auprès des communes membres.

//. Les domaines d'intervention et les acquis 2.1 Les

bases juridiques de la coopération décentralisée

Au Burkina Faso, comme partout dans la sous région ouest africaine, les acteurs, à quelque niveau que ce soit, ont pris la pleine mesure de ce que la coopération décentralisée représente pour les défis de développement. Pour les autorités nationales ou locales, il s'agit au vue de cette réalité, d'oeuvrer sans relâche à renforcer les partenariats existants et cela à travers une réelle mobilisation des concitoyens à la base autour des idéaux qui sou tendent la notion de coopération décentralisée. La coopération décentralisée trouve son fondement juridique à travers les lois sur la décentralisation.

Ainsi, en application de l'article 9 du Code Général des Collectivités Territoriales (CGCT), la loi institue pour les collectivités territoriales la possibilité de : « ..., établir des rapports de coopération avec des organisations extérieures au Burkina Faso dans le respect de la souveraineté et des intérêts de la nation » ; « entreprendre dans les conditions prévues par la loi et dans le cadre de leurs compétences propres, des actions de coopération qui donnent lieu à des conventions avec des collectivités territoriales de pays étrangers ou organismes internationaux publics ou privés oeuvrant dans le domaine du développement».

En vertu de l'Article 122 du CGCT, les collectivités territoriales burkinabé peuvent instituer entre elles ou entre elles et des collectivités territoriales étrangères, des relations de coopération. Cette coopération peut se faire au moyen de l'entente ou du jumelage et suivant les intérêts des parties, mais dans le respect strict de la constitution. L'article 124, dudit code élargit cette règle en indiquant que « Les collectivités territoriales burkinabé peuvent instituer entre elles et des personnes morales de droit public ou privé, nationales ou étrangères, des structures de concertation et de coopération sur des questions d'intérêt commun. Lorsqu'un groupement de collectivités territoriales exerce des attributions dans un domaine faisant l'objet d'un transfert de compétences, ce transfert s'opère au profit de cet organisme sur décision des organes délibérants locaux... ». Cet article démontre que la coopération décentralisée, qu'elle soit urbaine ou rurale n'est pas l'apanage des institutions et des ONG/associations seulement, mais implique aussi les individus.

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2.2. La nature des appuis

2.2.1 L'assistance financière et économique

Le Directeur des Relations Internationales de la mairie centrale relève que < plus de la moitié des investissements des partenaires sur le plan international sont des dons en matériel». Le Chef de Service des Collectivités conforte cette analyse lorsqu'il indique que : < l'apport de la coopération décentralisée s'effectue généralement en nature, alors que les dons en nature ne sont pas budgétisés». On comprend toute la difficulté lorsqu'il s'agit d'évoquer les apports de cette coopération. La contribution de la coopération décentralisée s'avère nécessaire, étant donné la situation peu reluisante de l'économie communale.

Par exemple, lorsqu'on examine la situation du budget et la capacité d'autofinancement (CAF) communal, il ressort que l'effort d'investissement de la commune évolue en dent de scie avec toutefois une forte tendance à la baisse. D'un effort d'investissement de 60% en 2001, cet effort passe en 2005 à 19.7%. Si les recettes communales évoluent à la baisse, les dépenses quant à elles enregistrent une augmentation58. Les études (A. Aziz Ouédraogo 2004, G2 conception, 2007) relèvent que les contraintes de mobilisation des ressources communales se situent entre autres au niveau de l'incivisme fiscal et de la forte mobilité des contribuables. Cette situation s'est accentuée avec la fermeture du grand marché en 2002 qui a entrainé une forte dispersion des commerçants alors que plus de la moitié des recettes provenait des taxes perçues au niveau des marchés et des boutiques situées à ses alentours59.

On assiste aussi à la baisse de la capacité d'autofinancement de la commune (CAF). Cette baisse de la CAF, surtout entre 2003 et 2004, est liée à la fermeture du marché ; mais dans l'ensemble, elle a évolué, de manière fluctuante durant les cinq (5) dernières années. Pour permettre à la commune de dégager une épargne suffisante et de pouvoir financer ses projets d'investissement communautaire, la coopération décentralisée se présente comme une solution, au regard de ses contributions financières.

Le Premier Adjoint du Maire de Ouagadougou remarque que < pour réaliser les projets de développement urbain, il faut mobiliser des recettes capables de supporter les dépenses liées à leur exécution, créer des activités génératrices de recettes pour la commune ou des activités rémunératrices». Il y a lieu dans ce sens « de développer des activités telles que

58 G2 Conception, Etude diagnostique de l'agglomération de Ouagadougou, Rapport définitif, Août 2007, p157.

59 G2 Conception, op cit. pll3.

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la réalisation d'équipements marchands, la réalisation d'habitats, la construction de salles de cinémas, de jardins et de boutiques de rue qui seront mis en location et perçus mensuellement» note le Premier Adjoint du Maire. Selon le Secrétaire Général de la commune de Ouagadougou, « les sources de financement de la commune ont évoluées dans le cadre de la décentralisation et surtout avec la coopération décentralisée. Les modes de financements sont surtout d'ordre subventionne! ». Le Directeur des Relations Internationales de la mairie centrale ajoute que « l'intervention financière des partenaires ne consiste pas à donner de l'argent directement à la commune, ils traitent directement avec les entreprises adjudicataires des marchés. Les partenaires interviennent à hauteur de 80% et la commune assure les 20% restants». Le Secrétaire Général du Comité National de Jumelage souligne que « la coopération est un instrument de développement et le mobile principal ». Au titre des exemples, le Directeur Général de la Direction de la Coopération Décentralisée a évoqué le cas de Tanghin- Dassouri et de Komki-lpaala qui reçoivent près de 80 000 000 de frs CFA chaque année dans le cadre de la coopération décentralisée, et de la commune de Ouagadougou qui reçoit au moins 50 000 000/an du jumelage.

Ainsi, sur le plan économique, la coopération décentralisée favorise la mise en oeuvre des projets par le financement des opérations suivant une démarche bien appréciée de toutes les parties. Selon le Secrétaire Permanent du CNJ, « /'/ y a des partenaires qui envoient directement le matériel qu'ils ont acheté à leur niveau, par contre d'autres signent des conventions qui prévoient la mise à la disposition des communes, l'argent nécessaire, et les invitent à rendre compte après exécution des projets. En ce moment, les communes lancent des appels d'offre et le numéro de compte de l'entreprise adjudicataire est envoyé aux partenaires pour le règlement». Il signale que Ouagadougou applique cette modalité d'intervention. Quelle que soit l'option de financement, la mise en oeuvre des actions sous la maîtrise d'ouvrage des communes permet de doter les collectivités des moyens nécessaires pour leur développement. Les projets se formant pour les secteurs qui en ont le plus besoin, il va de soit que leur bonne exécution entraine des avancées notables dans ces secteurs.

Le Secrétaire Permanent du CNJ estime, en effet, que le jumelage investi environ 35 000 000 de frs CFA par an à Ouagadougou et que plus de 1 800 000 000 de frs CFA sont injectés par an sur l'ensemble du territoire burkinabé par les partenaires du jumelage. Les appuis financiers de la coopération décentralisée n'émanent pas seulement des collectivités. La contribution financière des ONG aurait atteint 34 milliards de FCFA entre

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1986 et 1990. En 2003, on évaluait le bilan de la coopération décentralisée à plus de 70,8 milliards de FCFA.

L'exemple du jumelage-coopération entre Loudun et Ouagadougou, donne au titre des interventions ponctuelles de 1967 à 1993, une somme de 62 725 390FCFA (CLJ, 2004). Dans le projet de réhabilitation des quartiers périphériques de Ouagadougou en 2006, le Partenariat Ouagadougou - Lyon - AFD a permis l'obtention d'un montant de quinze (15) millions d'euros soit neuf milliards huit cent millions (9 800 000 000) francs FCFA. Grand Lyon a mis à la disposition de la commune de Ouagadougou un assistant technique auprès du Secrétaire Général. Elle a, en outre, contribué à la création du Centre de formation et de compétences aux métiers urbains, (coût : 0,6 M €). Selon le Secrétaire du CNJ, « du point de vue de l'assistance économique, la réalisation des kiosques et boutiques au bord de certaines artères de la ville, en offrant des cadres d'exercice aux commerçants, fait entrer des revenus dans les caisses de la commune ».

La construction des boutiques de rue par le jumelage-coopération avec Loudun favorise le développement des activités commerciales et le relèvement des revenus au profit des services communaux et des commerçants. Dans la même logique, la coopération décentralisée en facilitant la construction du centre d'accueil pour entrepries (CAE) a offert à la commune un dispositif institutionnel local et aux commerçants et autres entrepreneurs un cadre de promotion des activités économiques.

La dimension genre n'est pas ignorée dans cette coopération. L'appui aux AGR des femmes a été caractérisé par le financement d'achat de broyeurs de moulin à grains aux femmes de Sig-nonghin en 2005 et de fournitures d'équipement et de matériel de transformation du soumbala, beurre de karité et savon local aux femmes de l'Association des Femmes Monoparentales et Enfants en Difficulté de Boulmiougou (AFMEDB) en 2006.

2.2.2 L'appui technique

Les acteurs de la coopération décentralisée ont intégré dans leurs habitudes d'intervention, l'assistance technique. Elle consiste à envoyer des techniciens, des gens formés dans des secteurs précis pour répondre à un besoin spécifique dans le cadre d'une intervention. Cet envoi peut être une exigence des bailleurs ou à la demande des collectivités bénéficiaires pour combler un vide en la matière. Selon le secrétaire permanent du CNJ, cette forme d'assistance est le plus souvent une exigence des bailleurs. Cette pratique a certains avantages pour toutes les parties. Pour le Nord, « Outre l'expertise apportée, mobiliser les compétences locales au Nord (et donc les prestataires de service) est une manière

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supplémentaire de mobiiser les forces vives à l'échelle d'une commune. Une telle démarche permet de fédérer les citoyens, mais aussi les opérateurs économiques sur les problématiques de développement au Sud60 ».

Au regard de la faible compétence technique des acteurs locaux de Ouagadougou, la question du sens de la coopération décentralisée reste posée. En effet, doit-on se réjouir d'une coopération décentralisée qui ferait des collectivités françaises davantage des prestataires que des partenaires ? Continuer de rester dépendant de l'assistance technique des collectivités françaises, est une attitude qui conduit à leur ajouter un rôle de prestataire et démontre constamment l'immaturité des collectivités du Sud. Si la coopération décentralisée se veut le produit de réciprocités, le sens pris par celle-ci semble, dans sa dimension d'assistance technique, s'éloigner de cet objectif.

2.3 Les domaines d'appuis

Deux dimensions essentielles sont à observer dans la coopération décentralisée francoburkinabé dans la ville de Ouagadougou : la coopération-jumelage qui est une forme de relation établie entre les peuples et dont la durée est indéterminée et le partenariat qui est issu d'une convention de coopération signée entre deux entités pour la réalisation d'actions ponctuelles dans une durée déterminée. Ouagadougou entretient des relations de partenariat avec quatre villes françaises : Grenoble, Bordeaux, Lyon et Grand Lyon et un jumelage -coopération avec Loudun. En fonction de la dimension prise en compte, on peut déterminer des domaines et des actions spécifiques. Etant donné que Ouagadougou n'entretient qu'un seul jumelage-coopération avec une collectivité française, il est préférable de présenter de manière globale les domaines d'action et les réalisations y afférentes. Vu la diversité des secteurs d'intervention, il sera présenté les plus importants.

2.3.1 L'éducation, la formation et la culture

L'appui aux initiatives communales dans ces domaines se manifeste par le parrainage des enfants déshérités, orphelins et déscolarisés, l'alphabétisation des femmes (205 femmes en 2005§2006) l'équipement en fournitures scolaires, la mise en oeuvre du projet « Espace lecture » pour un encadrement pédagogique des élèves du primaire et du secondaire en difficulté scolaire ( Nongr Maasom). On note aussi la création de centres de formation.

60 Aubourg Guillaume., Grodin Pierre-Marie et al. Guide de la coopération décentralisée pour l'eau potable et l'assainissement, Paris, 2007, p15.

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C'est le cas du Centre International de Formation et Compétences aux Métiers Urbains (CIFCMU), créé pour renforcer les compétences communales. En outre, il y a le recrutement et la formation de certaines catégories de personnes comme les prostituées et les enfants de la rue dans des centres spécialisés pour faciliter leur réintégration socioéconomique. La réalisation d'infrastructures scolaires adéquates et leur équipement en tables bancs et matériels didactiques constitue aussi l'un de ces apports. Cependant, il a été constaté l'envoi de livres scolaires inadaptés au système d'enseignement en vigueur. Il est toutefois indéniable que les actions développées par la coopération décentralisées dans le champ de l'éducation, en intégrant la dimension sociale, permet de réduire la possibilité de la reproduction des inégalités sociales (Pierre Bourdieu 1980, Daniel Gaxie 1996).

Dans le cadre de la formation, la coopération décentralisée couvre plusieurs aspects dont la culture. Un nombre important d'agents communaux sont formés par l'action de la coopération décentralisée afin de faciliter le fonctionnement des services municipaux. On note le cas des secrétaires généraux des mairies, des conseillers sur les techniques de gestion communale, des directeurs de ressources humaines, agents de police municipale et des sapeurs pompiers. L'acquisition de compétences nouvelles par la formation et le recyclage des agents contribue au renforcement de la qualité des services municipaux et partant, permet l'atteinte des objectifs de développement. En outre, par ce canal, des troupes artistiques burkinabé sont formées en France et leur voyage pris en charge. La valorisation des oeuvres locales est aussi assurée par cette coopération par le concours du CCF.

C'est dans le domaine culturel que la commune excelle le mieux. Les apports en France passent par la découverte d'une nouvelle culture sous, de nombreux, aspects (artisanat, art, musique, gastronomie, histoire...). Si la collectivité du Nord peut apporter énormément dans l'accompagnement à la réalisation concrète de projets, inversement, la collectivité du Sud peut lui réapprendre les valeurs d'une société riche de culture, de jeunesse, de dynamisme, de respect des anciens, du sens de l'accueil, de la joie de vivre (...). Les deux collectivités sont alors complémentaires et apprennent à changer le regard qu'elles portent sur elles-mêmes et sur le monde.

Au-delà de la découverte sur le terrain de ceux qui partent en mission ou en échange, la réciprocité s'exprime souvent par des manifestations culturelles sur le territoire français, occasion d'information, de sensibilisation et aussi d'éducation au développement dans les

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écoles. Les échanges d'objets d'art pour l'embellissement (cas des statuts dans les coins de rue) et l'envoi d'objets artistiques en guise de cadeaux sont le fruit de cette coopération.

2.3.2 Le sport et les loisirs

Au niveau du sport et des loisirs, la création du stade Omnisport René Monory est un signe fort de la coopération entre Ouagadougou et Loudun. Ce stade constitue d'ailleurs le produit de la toute première coopération entre Ouagadougou et une collectivité française. En outre, la création d'un club de football municipal (CFO), qui est monté dans les arènes de la première division nationale ouvre la porte pour de nouvelles formes d'appui dans le domaine de cette coopération. On assiste à des productions culturelles de troupes artistiques dans les villes jumelles et à l'équipement de certains clubs en matériels sportifs, et également à un séjour de jeunes joueurs à Loudun. La réalisation de jardins en 1996 et 1998 à hauteur respectivement de 7 800 000 et de 5 800000 viennent renforcer les infrastructures de loisir de la ville et favorise sans doute l'épanouissement des populations. C'est aussi le cas du jardin de la musique qui fait la fierté de la capitale et dont la réalisation a été financée par Grenoble à hauteur de 67 000 000 en 1999.

2.3.3 La santé, l'hygiène, l'assainissement et l'action sociale

Les actions concernent les envois par les collectivités françaises des produits pharmaceutiques, des équipements médicaux pour les centres et l'offre des possibilités de formation et de recyclage du personnel technique. Avec le projet LAMI, nombre d'apports ont été faits par les partenaires français dont la fourniture en médicaments pour les dispensaires de la ville. On note comme autres actions, l'appui aux activités de prévention et de lutte contre le VIH/SIDA ; l'établissement de relations entre le CHU de Ouagadougou et CHU de Grenoble. Des actions non négligeables ont été réalisées dans les localités environnantes de la ville dont, la construction d'officines pharmaceutiques et l'équipement des CSPS en panneaux solaires pour améliorer les conditions de travail du personnel et les conditions de vie des populations. Ainsi, les réalisations infrastructurelles qui s'opèrent dans les localités environnantes de la commune de Ouagadougou et les équipements divers, faits aux services sanitaires de la commune ne sont pas négligeables, car ils soulagent les souffrances des populations, au regard de leur état de pauvreté.

Au niveau de l'assainissement et de l'hygiène, des actions d'envergure importante ont été entreprises. On relève entre autres, la construction de latrines publiques en 1997 et 1998, le don de moustiquaires imprégnés, l'octroi de 5 camions bennes à ordures ménagères et 2

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camions plateaux-grue en 1995 ont permis à la commune de survenir à ses besoins dans le cadre de la collecte et du traitement des ordures ménagères.

Concernant l'action sociale, les domaines d'intervention sont diversifiés. D'abord, la question de l'enfant de la rue est prise à bras le corps par la commune et partant, elle est supportée par ses partenaires dans l'exécution des actions. Il s'agit entre autres des études diagnostiques sur la situation des enfants de la rue et la prise en charge des cas dans des centres spécialisés de la Croix rouge, AMPO, TECHAS, etc. et leur réinsertion socioprofessionnelle. Les prostituées ne sont pas en marge dans cette problématique ; elles sont prises en charges sur le plan médical, et au moins quatre études appuyées financièrement par les partenaires français ont permis de jeter les bases d'une connaissance du phénomène et amené la commune à prendre des actions vigoureuses. Certaines travailleuses du sexe (TS) sont formées et réintégrées sur le plan socioprofessionnel et ces efforts sont appuyés par les collectivités françaises.

L'appui des collectivités françaises aux efforts de la commune de Ouagadougou peut se voir aussi dans l'exécution des projets en faveur des plus démunis (orphelins, veufs et veuves, etc.). C'est le cas de la distribution de vivres et de fournitures scolaires ainsi que l'organisation chaque année de l'arbre de Noël.

2.3.4 La Sécurité urbaine

La question de la sécurité est fondamentale dans les débats sur le développement urbain. Ville en pleine mutation, Ouagadougou connaît un accroissement continu de la criminalité, avec des fréquents vols, viols et cambriolages, des accidents mortels, d'attaques à mains armées, de meurtres et d'assassinats, etc. Les autorités politiques conscientes du poids de cette violence, ont consenti des efforts multiformes pour concentrer un maximum de forces de sécurité sur la ville. En effet, elle compte un (1) commissariat central de police, cinq (5) commissariats d'arrondissements, un commissariat municipal, une compagnie Républicaine de sécurité, un commissariat à Ouaga 2000 et sept (7) brigades de gendarmerie.

Malgré ce dispositif, Ouagadougou n'est toujours pas épargnée par les violences, d'où les actions de la coopération décentralisée en la matière pour former et équiper les forces de sécurité. La convention de coopération avec Lyon a permis l'équipement des agents de sécurité municipaux avec 5 motos et radios en 1995. En 2005, des agents de la police municipale et des sapeurs pompiers ont été formés à Bordeaux. Du matériel d'éclairage public et des feux tricolores ont été octroyés par le biais de cette coopération.

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Le secrétaire permanent du comité local de jumelage explique que depuis 1997, grâce à la coopération décentralisée, les associations travaillant sur la sécurité routière sont accompagnées dans la réalisation de leurs actions par des financements et des équipements adéquats. Etant donné les cas d'accidents fréquents, une telle action contribue à renforcer la sécurité dans la ville.

Indépendamment de ces conventions de coopération et de jumelage entre les villes françaises avec Ouagadougou, des collectivités françaises entretiennent des relations de coopération avec certaines localités proches de la ville et faisant partie du Grand Ouaga. Tanghin Dassouri et Komki Ipala entretiennent avec Belfort (territoire de Belfort-Franche Comté) des relations de jumelage-coopération respectivement depuis 1982. Tanghin Dassouri est aussi jumelé avec La Rochelle (Charente-Maritime, Poitou-Charentes) depuis 2000; Nioko II entretient ces mêmes relations avec Eragny sur Oise depuis 1983. Les domaines d'action sont presque les mêmes que ceux observés à Ouagadougou : Education, santé, hydraulique et tourisme.

Les autres apports non négligeables de la coopération décentralisée sont liés aux réciprocités dont bénéficient les partenaires coopérants. Entre autres, on peut citer :

les échanges d'expériences et de compétences qui sont formateurs sur le plan professionnel et humain ;

· le rapprochement des peuples par la création de relations d'amitié ;

· la sensibilisation aux problèmes mondiaux par l'écoute des difficultés rencontrées ;

· enfin l'émergence d'une citoyenneté mondiale qui se construit via les projets de développement.

Le tableau suivant fait un récapitulatif des intervenants français dans la ville de Ouagadougou et les domaines d'actions et quelques actions entreprises.

Le tableau suivant présente un récapitulatif des intervenants français dans le cadre de la coopération décentralisée à Ouagadougou. Il y ressort que la date de démarrage des relations de jumelage ou de partenariat diffère selon la collectivité.

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Collectivités françaises

Date de
création

Domaines d'intervention

Réalisations

Loudun (jumelage)

1967

Assainissement ; - éducation et

alphabétisation ; santé ; jeunesse et emploi

Parrainage scolaire (2000-2005) ;

Construction d'un point de lecture (2005) ; Projet moustiquaires imprégnés (LAMI)

Lyon

1995

Police municipale ; Eclairage public ; Espaces verts, parcs et jardins, - NTIC

Deux camions-échelles ; Feux tricolores : 10 carrefours équipés ; Matériel d'éclairage public ; 5 motos et équipements radio pour la police municipale Opérations Lyon aux couleurs de lion Stages de formation et missions d'experts

Le Grand

Lyon

1995

Propreté, collecte et

traitement des déchets ; déplacement et
signalisation lumineuse ; Parc

automobile et ateliers ; - eau
potable - formation

- 5 bennes à ordures ménagères, - 2 camions plateaux-grue ; - 8 forages hydrauliques (60.000EU) ; - Réalisation du schéma directeur informatique ; - Fourniture de deux autobus ; - Création du CIFCMU ; - Stages et missions d'experts

Grenoble

1999

Aménagement paysager et parcs urbains; archives municipales culture

Jardin de la musique (67.000.000) ; Animation du DESS sur le développement local ; Mise en relation CHU de Ouagadougou et CHU

de Grenoble ; Union de quartiers Gounghin Tanghin Fourniture de 7 autobus

Bordeaux

2005

Formation des élus et

fonctionnaires municipaux ; Aménagement des
espaces publics ;

Echanges culturels

formation des secrétaires généraux des

mairies ; formation conseillers sur les techniques de gestion communale ; Formation des Directeurs de ressources humaines ;
Formation agents de police municipale sur la prévention et la surveillance de l'ordre public, la

sécurité et la salubrité publique ; Formation sapeurs pompiersdans la prévention

incendie bâtimentaire et industrielle ;
Prévention et lutte contre le VIH/SIDA

Conseil Général de Vienne

 

Formation professionnelle ; insertion sociale et secours d'urgence

Equipement des classes en matériel de

travail ; équipement du Centre de formation

des jeunes filles en machines à coudre et à tisser

 

Source : recherche de terrain, Novembre 2008.

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CHAPITRE II. DIFFICULTES RENCONTREES PAR LA COOPERATION DECENTRALISEE ET PERSPECTIVES

I. Les limites et les travers de la coopération décentralisée

1.1. Les Facteurs de blocage

On évoque souvent le problème de démocratie au sein des acteurs du Sud ainsi qu'entre ces acteurs et ceux du Nord. Les intérêts divergents des élus du Sud les conduisent parfois dans des conflits de positionnement. Par exemple, au Burkina Faso, le MATD par le biais de la DGCOD, chargée de l'exécution de la politique en matière de coopération décentralisée, s'indigne du fait que certains intervenants et bénéficiaires refusent de rendre accessibles les données relatives aux activités mises en oeuvre. En effet, les structures (CNJ, CLJ et collectivités territoriales) exécutant les activités au profit des populations gardent jalousement leur documentation et ne produisent pas de données pour la direction de la coopération décentralisée. Selon le chargé de jumelages et de partenariats de cette direction, « après les aspects administratifs des accords dans lesquels on est impliqué, le reste, bien que nous intéressant, se passe entre les collectivités. Nous leurs avons souvent exigé des documents afin de suivre leurs actions, mais c'est toujours le silence ». Mais ne disposant pas les ressources (matérielles, humaines) nécessaires pour aller vers les autres acteurs, la direction éprouve d'énormes difficultés pour assurer son rôle.

En plus du problème de communication entre les acteurs de la coopération décentralisée, on évoque souvent les difficiles rapports entre certains acteurs (collectivités et société civile). Selon le secrétaire permanent du comité national de jumelages, malgré les efforts dudit comité qui fait entrer au minimum 50 millions pour la commune de Ouagadougou chaque année, les besoins de fonctionnement de la structure ne sont pas comblés. La commune de Ouagadougou n'accorde que 1 million par an à ce comité pour son fonctionnement. En outre, les rivalités entre acteurs locaux se transportent souvent dans leurs rapports avec les collectivités françaises et elles sont souvent stratégiquement exploitées par ces dernières (le Responsable du service chargé de jumelages et de partenariats du MATD). La perception des avantages diffère d'un acteur à l'autre. Certaines relations qui auraient pu rapporter plus sont abandonnées au profit d'autres. Le secrétaire du comité national de jumelages note le cas d'une ville française qui a fait le premier pas vers Ouagadougou et qui n'a pas reçu réciproquement l'intérêt de cette dernière. Selon ses termes, « Ouagadougou a toujours clamé qu'elle n'a pas les ressources nécessaires pour payer le voyage du comité de jumelage afin de sceller

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définitivement cette relation ». Si pour la mairie de Ouagadougou, cette relation paraît peu importante, pour le CNJ, c'est une opportunité à exploiter.

Les difficultés ainsi mentionnées entachent la synergie d'action et remet en cause la compétence des acteurs de Ouagadougou. Il faut souligner aussi le problème de ressources humaines que connaissent les mairies de Ouagadougou. Malgré les efforts de formation et de recyclage, la diversité des actions, l'envergure de la mairie centrale et des autres mairies et les moyens dont elles disposent, exigent plus de personnels qualifiés. « On relève le peu de personnels qualifiés et l'insuffisance de personnels comme l'une des difficulté de la mise en oeuvre de la coopération décentralisée » (Secrétaire du CNJ). L'absence de spécialistes de certaines questions impose dans les accords, la mise en oeuvre de la dimension technique de la coopération (l'envoi par la collectivité « bailleur» d'un conseiller technique).

Le faible nombre de collectivités françaises (5) intervenant à Ouagadougou constitue un défi à relever par les autorités communales. Il est certes vrai que le nombre de collectivités françaises intervenant à Ouagadougou est plus important que celui des autres pays, mais il reste encore faible pour la ville. Si pour une raison quelconque, certaines collectivités cessaient de coopérer, les conséquences seront, sans doute, importantes. En effet, le retrait d'un ou de plusieurs acteurs peut causer des dommages énormes pour la collectivité de Ouagadougou, si celle-ci ne trouve pas d'autres partenaires. On constate aussi que malgré les 5 jumelages-coopérations, c'est seulement le jumelage avec Loudun (France) qui fonctionne bien. Ce faible nombre de partenariat et son faible fonctionnement constitue une limite que la commune doit travailler à combler pour faciliter son développement.

Enfin, les difficultés observées relèvent de la faible implication des populations. « Malgré les nombreuses sensibilisations, la base semble ignorer l'existence de cette forme de coopération » (Secrétaire CNJ). Le désintérêt constaté de la population par rapport aux activités de la coopération décentralisée montre certainement que les sensibilisations qui leur sont adressées ne sont peut être pas encore bien comprises. Ainsi, les premiers responsables de la commune doivent s'investir au mieux pour trouver la formule la plus commode de les y intéresser.

1.2. Les non-dits de la coopération décentralisée

Dans les relations entre communautés humaines, tout acte posé ne saurait être une simple manifestation de charité, car comme le reconnaît le sociologue (Marcel Mauss avec le don.), il n'ya pas de don sans contre don. En d'autres termes, il n'existe pas d'action neutre

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ou de charité désintéressée entre collectivités, surtout quand on sait que chacune vise la réalisation de ses intérêts propres. La coopération décentralisée apparaît dès lors comme un investissement stratégique pour les collectivités du Nord. Pour l'analyse de ces points, nous ferons cas des formes de réciprocités qui sont développées et les non-dits de cette coopération qui se manifestent dans la pratique.

La coopération se déclenche sur l'initiative d'élus ou d'acteurs par des échanges mutuels mais souvent, elle se fait dans un seul sens. Dans ce denier cas, la coopération décentralisée se transforme en assistance ou aide, car la réciprocité qui est souvent évoquée n'y est pas un concept opératoire. Ousmane Syll (2005) n'hésite pas à parler de coopération à sens unique, puisque, seule une partie (les acteurs du Sud) bénéficie des actions développées. Cette analyse est assez simplificatrice et peu fondée car les formes de sociabilités que crée la coopération décentralisée sont fonction des enjeux géostratégiques des acteurs. Tout en reconnaissant le caractère stratégique de la coopération décentralisée Nord-Sud, Ousmane Syll (2005) remarque que certains acteurs du Nord n'évoquent le principe de réciprocité que de manière philosophique. Cependant, il estime que cette forme de coopération Nord-Sud n'est porteuse de développement que lorsque la relation de réciprocité est assurée.

La coopération décentralisée n'est qu'un pan de la coopération entre Etats et de ce fait, elle répond aux mêmes logiques : la construction ou le maintien des rapports stratégiques répondant aux intérêts spécifiques des acteurs. En d'autres termes, derrières les intérêts dits communs sur lesquels se fondent officiellement la coopération, se trouvent les véritables mobiles inavoués. Comme le souligne le chargé de jumelages et de partenariats de la direction de la coopération décentralisée, « certaines actions sont posées par les partenaires hors de toute médiatisation parce que ces partenaires exigent cette démarche sans que l'on sache la raison ». Il est étonnant cette attitude, ci-dessus soulignée, car, en général, les partenaires prennent les médias pour témoins de leurs actions. En effet, par l'intervention médiatique, les actions réalisées sont immortalisées. En outre, les images rapportées servent d'outils pour montrer la fidélité des partenaires auprès de leurs contribuables locaux. Vu l'importance de la médiatisation dans la mise en évidence de la crédibilité des partenaires, ces derniers ne peuvent déroger, à son utilisation, que s'ils ont des justifications plus pertinentes. En effet, sans toute fois vouloir nous verser dans des jugements de valeur, il apparaît qu'il y a anguille sous roche dans l'attitude des collectivités françaises. Des sociétés ont souvent été créées en Afrique pour assurer le blanchiment d'argent. En outre, certains acteurs du Nord ont souvent profité de leurs bonnes relations

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avec le Sud pour écouler des produits défendus (la drogue par exemple). Soulignons que les produits acheminés par les partenaires arrivent hors taxe, hors douane, ce qui signifie que des esprits malins pourraient faire venir des colis spécifiques destinés à d'autres fins. Cette analyse s'inscrit juste dans une tentative de compréhension de l'attitude des partenaires français et non une incrimination, voire une confirmation de ce qui est fait. Il demeure cependant que cela peut être une explication du maintien des relations entre les collectivités françaises et Ouagadougou qui n'a pratiquement rien à donner mais qui passe son temps à recevoir.

Le secrétaire du comité national du jumelage, interpelé sur cette question, reconnaît le caractère flou des interventions de certains partenaires, mais s'empresse de signaler que « lorsque les attitudes des partenaires ne portent pas atteinte à notre dignité, on peut les accepter ».

L'atteinte à la dignité humaine peut être diversement appréciée, mais il est évident que la satisfaction d'un intérêt inavoué passe par une attitude consistant à passer sur les attentes des autres. A quoi sert-il d'ailleurs à une communauté de tirer profit d'une action dans l'immédiat, et d'y rester continuellement dépendante?

La coopération décentralisée franco burkinabé apparaît pour les partenaires français comme un moyen de recherche des opportunités d'emplois pour leurs populations. Cette perspective a été développée aussi bien par des auteurs (Antoine Vion et Emmanuel Négrier, 200261) que par les résultats des entretiens. La question de l'emploi se pose avec acuité dans nombre de pays occidentaux et la France n'échappe pas à cette réalité. C'est ainsi que les voies ouvertes par les collectivités dans leurs rapports avec les partenaires du Sud constituent pour les responsables politiques français une voie pour résoudre cette problématique. En effet, l'envoi d'assistants techniques dans l'exécution des projets permet de trouver quelques postes d'emploi aux diplômés du Nord. Tout personnel technique envoyé laisse un poste libre à combler dans les collectivités du Nord. Il facilite en outre, le rapatriement, vers le Nord, d'une part important du capital investi au Sud.

Le Secrétaire du comité national de jumelage souligne par ailleurs qu'à travers la cellule SCAC (service de la coopération et de l'action culturelle) de l'ambassade, l'Etat français forme ses futurs agents. Ce service reçoit, en effet, chaque année des jeunes diplômés français. Ces derniers sont formés à travers l'intervention dudit service dans la coopération

61 Antoine Vion et Emmanuel Négrier, La coopération décentralisée, un étape du jeu diplomatique, CEPEL Montpellier Contribution à l'atelier Les nouvelles formes de la diplomatie, Congrès AFSP, Lille, 21 septembre 2002.

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décentralisée. Ces stages une fois terminés, ces jeunes sont rappelés pour occuper des postes de responsabilité dans l'administration française.

Outre cet aspect, l'accompagnement par le volet technique de la coopération décentralisée ouvre des portes d'emploi aux diplômés français. Les collectivités du Sud en général n'ont pas les ressources humaines nécessaires au suivi et contrôle d'exécution, ou même lorsqu'elles en disposent, celles-ci ont un niveau faible dans les domaines techniques. C'est ainsi qu'elles ont souvent recours aux spécialistes que proposent ou imposent certaines collectivités finançant les activités. Par ce canal, les collectivités françaises profitent pour résorber le problème de chômage, en intégrant dans leurs interventions, l'appui technique par l'envoi d'experts.

Il est ressorti dans l'analyse que la commune a bénéficié d'un important appui en équipements et consommables. Grâce aux dons, aux tarifs préférentiels qui sont plus bas que les tarifs locaux, les partenaires français préfèrent envoyer ces équipements et consommables de la France. Si l'intention est bonne, les implications ne sont pas toujours positives pour les bénéficiaires et leur environnement. La recherche d'une pièce quelconque de rechange implique nécessairement un recours aux partenaires qui maintiennent ainsi les ficelles de la dépendance. Une telle attitude n'est pas de nature à faire émerger des structures de vente fiables et un service après vente de qualité au Sud.

II. Les perspectives pour améliorer l'impact de la coopération

2.1. Les Insuffisances de la coopération décentralisée

A l'issu de cette analyse, on retiendra que malgré les efforts de partenariat entre Ouagadougou et les collectivités françaises, certains maux continuent de miner les rapports des acteurs. Ces maux, si importants soient-ils réduisent l'efficacité des actions de la coopération.

Les insuffisances suivantes peuvent être répertoriées :

- le faible niveau de la maîtrise d'ouvrage de la commune de Ouagadougou ;

- le problème de ressources humaines (insuffisance de personnel et absence de personnel qualifié) que connaît la mairie de Ouagadougou ;

- le faible nombre de partenaires français (5) intervenant à Ouagadougou ; - la difficulté de coordination des activités par la DGCOD ;

- l'absence de transparence de certains intervenants et acteurs locaux ;

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- l'insuffisance de ressources financières;

- le problème d'entente au sein des acteurs de la coopération décentralisée; - le problème de communication entre les acteurs ;

- l'insuffisance dans la fourniture de services de bases aux populations ;

- la faible implication des populations dans les actions de la coopération décentralisée.

- Etc.

Des efforts importants doivent être faits par tous les partenaires et acteurs afin de rendre la coopération décentralisée plus bénéfique. Ainsi, quelques propositions ont été faites en vue d'améliorer l'impact de la coopération décentralisée entre Ouagadougou et les collectivités françaises.

2.2 Des propositions d'action de renforcement de la coopération 2.2.1 Pour les autorités communales de Ouagadougou,

- renforcer la maîtrise d'ouvrage de la collectivité (notamment par la formation et le

recrutement d'un personnel qualifié pour faciliter la gestion et l'exécution des projets);

- améliorer les rapports entre les acteurs locaux et leur adhésion par le renforcement des activités de concertation ;

- rechercher l'adhésion des populations dans la définition des actions et leur mise en oeuvre ;

- accroître l'investissement dans la réalisation des services sociaux de base afin d'améliorer leur offre, surtout, dans les périphéries de la ville ;

- augmenter le nombre de partenaires français par la signature de nouvelles conventions de coopération ;

- rechercher des mécanismes facilitant la participation tels que : le partage de l'information, le partage de la décision, le partage des responsabilités dans l'exécution, la mise en place de comités conjoints (Commune-populations- partenaires, etc.) de pilotage.

2.2.2 Pour les services techniques en charge de la coopération décentralisée

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- renforcer l'arsenal juridique contraignant tout intervenant et acteur de la coopération décentralisée au respect de la clause de la transparence. Ceci impliquera que les données (rapports d'activités, rapports techniques, etc.) soient transmises à la DGCOD;

- veiller à ce que la DGCOD soit consultée au début et à la fin de l'action de l'intervenant ;

- impliquer les services de la DGCOD dans la mise en oeuvre des actions. Une telle

option suppose que ladite direction dispose de toutes les compétences nécessaires pour assurer le suivi-contrôle. Les entretiens ont cependant révélé que cette direction est très peu fournie en personnel et en matériel roulant. Il s'impose la nécessité d'augmenter le personnel de la DGCOD, de lui apporter un matériel répondant à ses tâches ;

- promouvoir la culture de l'évaluation ;

- renforcer la concertation entre la DGCOD et les acteurs locaux pour faciliter la communication entre acteurs et résoudre ainsi, les tensions.

2.2.3 Pour les partenaires français

- rechercher la transparence dans les interventions par la médiatisation des actions et la mise à disposition des services techniques d'appui, des informations nécessaires ; - privilégier les achats locaux d'équipements et de consommables;

3. Synthèse des propositions selon les insuffisances

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insuffisances

Solutions proposées

Le faible niveau de la maîtrise d'ouvrage de la commune de Ouagadougou ;

Formation des agents de la maîtrise à la maîtrise d'oeuvre

Le problème de ressources humaines

(insuffisance de personnel et absence de personnel qualifié) que connaît la mairie de Ouagadougou ;

Recrutement et la formation de personnels

le faible nombre de partenaires français (5) intervenant à Ouagadougou

Rechercher de nouveaux partenaires en vue de

renforcer les opportunités de ressources pour la ville de Ouagadougou

La difficulté de coordination des activités par la DGCOD

· Améliorer la capacité de suivi-contrôle de la DGCOD par le recrutement du personnel

· Rendre le dépôt des rapports d'activités
obligatoires pour tout intervenant

L'absence de transparence de certains

intervenants et acteurs locaux

Etablir un cahier de charge clair et contraindre les acteurs à un respect rigoureux

Le problème d'entente au sein des acteurs
de la coopération décentralisée Le

problème de communication entre les
acteurs

Améliorer l'état des rapports entre les acteurs par la création d'un cadre de concertation qui aura des rencontres périodiques

L'insuffisance dans la fourniture de services de bases aux populations

Améliorer les services de base par un investissement stratégique

La faible implication des populations dans les actions de la coopération décentralisée.

· Renforcement de la sensibilisation

· L'implication des populations dans les
décisions communales par la prise en compte de leurs points de vue

 

Conclusion

Ce travail a permis de faire un état des lieux des différents intervenants et les facilités
institutionnelles mises sur pied par ceux-ci dans le sens de l'amélioration de la coopération

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décentralisée. Un autre aspect a consisté à faire un diagnostic de cette coopération. De ce travail, il se ressort que la coopération décentralisée permet le rapprochement entre les peuples. En outre, la diversité des actions réalisées, en répondant aux besoins des populations, influence le développement de leurs environnements. Les retombées financières et économiques issues de ces réalisations renforcent les capacités de fonctionnement de la commune. L'hypothèse secondaire n°1 se trouve ainsi justifiée.

Cependant, loin de se présenter comme un simple cadre de manifestation de la solidarité Nord-Sud, la coopération décentralisée, telle que pratiquée, semble pour certaines collectivités françaises, apporter beaucoup plus de bénéfices que cela paraît pour Ouagadougou. Cette analyse trouve tout son sens dans la mesure où la réciprocité n'est pas toujours observée dans les relations entre Ouagadougou et les collectivités françaises. Tandis que celles-ci sont des pourvoyeurs en ressources, la part contributive de Ouagadougou est presque insignifiante, axée surtout sur les échanges culturels. Les entretiens montrent que contrairement à l'idée répandue selon laquelle seules les collectivités du Sud (comme celle de Ouagadougou), tirent réellement partie de cette coopération, les collectivités françaises n'en ressortent pas perdantes.

D'abord, comme le dit la sagesse populaire, « la main qui donne est toujours au dessus de celle qui reçoit », ce qui confirme l'analyse sociologique du don source de pouvoir. Donner c'est marquer une position de force que celui qui reçoit doit reprendre en rendant. Sur ce point, les collectivités françaises occupent une meilleure position grâce à leurs dons, soutiens et réalisations visibles. Donner, recevoir et rendre, participent d'un même phénomène, car étant trois dimensions inséparable d'un acte social apparemment banal mais coercitif. N'est-on donc pas en droit de s'interroger sur ce que Ouagadougou donne pour compenser ce qu'elle reçoit ? En effet, incapable elle-même, de réunir les ressources indispensables à son développement, l'évolution de Ouagadougou reste tributaire de l'intervention des partenaires. Le matériel et autres ressources envoyés par ces derniers, constituent cependant, une source de perpétuation de la dépendance lorsqu'ils ne peuvent être trouvés à Ouagadougou. Il est évident qu'à leur expiration, la commune doit faire recours à ces mêmes partenaires pour les remplacer. Dès lors, l'hypothèse n°2 formulée dans ce travail se trouve confirmée par cette analyse.

Outre cela, les collectivités du Nord, en refusant souvent que certaines de leurs actions de solidarité soient médiatisées, prouvent qu'elles cachent certaines intentions.

Du point de vue institutionnel, plusieurs efforts sont faits de part et d'autre pour rendre cette forme de coopération plus opérationnelle. Nonobstant ces apports, des mesures

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complémentaires devraient être prises par la commune pour permettre à cette coopération d'avoir plus d'impact. On note entre autres mesures, le renforcement des compétences des acteurs communaux, le recrutement et la formation de personnels qualifiés pour le montage des projets, et le suivi de l'exécution.

Un constat a cependant été fait que les populations de la commune sont faiblement impliquées dans cette coopération. Ce désintéressement est-il le fait d'un manque d'appropriation de la décentralisation et du développement local par les populations ou le fait d'une expropriation de ces questions par les techniciens locaux ? Une analyse poussée, répondant à ces questions, permettra de situer les responsabilités : les habitants sont-ils associés à l'élaboration des budgets et à la mobilisation des ressources ? Sont-ils informés de l'utilisation des ressources de la commune ? Ont-ils connaissance des réalisations effectuées par leur commune sur la base de l'impôt qu'ils paient ? Les élus rendent-ils compte de leur gestion aux populations ?

BILBLIOGRAPHIE

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III. MEMOIRES, REVUES ET COMMUNICATIONS

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MEMOIRE DE DESDRI DE KOLOGO OUMAROU. Contact : +226 70224179 ; mail : kologo_jean@yahoo.fr Page 64

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Observateur paalga, n° 7024 du 03 décembre 2007 IV-

LEGISLATION ET CONVENTIONS

Constitution du 02 juin 1991, J.O. BF du 13 juin 1991, p794.

Loi N°10-92/ADP du 21 décembre 1992 portant liberté d'association au Burkina Faso.

Décret N°92-131 du 26 mai 1992 portant autorisation et création des Etablissements Publics Communaux de Développement.

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Décret N° 2000-274/PRES/PM/MATS/MEF du 17 mai 2000 portant création, attributions et fonctionnement de CONACOD.

Décret N° 2000-276/PRES/PM/MATS du 21 juin 2000 portant organisation et fonctionnement des comités de jumelage.

Loi N° 055-2004/ AN du 21 décembre 2004 portant code général des collectivités territoriales au Burkina Faso et textes d'application.

Décret N° 2006-568/PRES/PM/MEDEV du 22 novembre 2006 portant organisation du Ministère de l'Economie et du Développement.

Décret N° 2007-306 /PRES/PM/MATD du 18 mai 2007 portant organisation du Ministère de l'Administration Territoriale et de la Décentralisation au Burkina Faso.

Délibération n° 2006-3590, du 11 septembre 2006, portant Coopération décentralisée avec la ville de Ouagadougou - Programme et convention de coopération décentralisée 2007-2009.

IV. SITES WEB

www.cites-unies-france.org www.resacoop.org

www.cercoop.org

www.mcdburkina.bf

www.lefaso.net

www.cota.be.

www.ecdpm.org

www.ong.ngo.org

www.diplomatie.gouv.fr






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"Soit réservé sans ostentation pour éviter de t'attirer l'incompréhension haineuse des ignorants"   Pythagore