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Approche psychanalytique de Hugo Barine dans les mains sales de Jean Paul Sartre

( Télécharger le fichier original )
par Gonkapieu Joseph Gueu
Institut National Supérieur des Arts et de l'Action culturelle ( INSAAC- Abidjan-COTE D'IVOIRE) - Maîtrise en Théâtre 2009
  

Disponible en mode multipage

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MINISTERE DE LA CULTURE REPUBLIQUE DE COTE D'IVOIRE

ET DE LA FRANCOPHONIE Union - Discipline - Travail

INSTITUT NATIONAL SUPERIEUR DES

ARTS ET DE L'ACTION CUTURELLE

ECOLE NATIONALE DE THEATRE

ET DE DANSE

(ENTD) Année académique 2006 - 2007

DEPARTEMENT DE THEATRE

MEMOIRE DE FIN DE CYCLE

en vue de l'obtention du

DIPLOME D'ETUDES SUPERIEURES ARTISTIQUES

(DESA)

Spécialité : Théâtre

APPROCHE PSYCHANALYTIQUE DE HUGO BARINE DANS LES MAINS SALES

DE JEAN PAUL SARTRE

Session de juillet 2007

Présenté par : Sous la Direction de :

GUEU Gonkapieu Joseph Kazemi ZEKRULLAH

Etudiant en 4ème année Docteur en communication

Formation initiale

INTRODUCTION

Les rapports humains sont un besoin impérieux pour l'homme dont la nature est clairement définie comme un animal social. Cela signifie tout simplement que toute existence est par essence coexistence.

En effet, l'homme collabore toujours avec ses semblables. Mais dans ses rapports avec la communauté ou sa société, c'est une lutte perpétuelle qu'il mène pour des raisons de leadership et d'hégémonie. Ainsi pour mieux saisir l'homme, des sciences et des arts vont collaborer pour le décrirer avec des arguments pertinents. C'est le cas du théâtre, art de la mimesis et de convergence de tous les autres arts, avec la psychanalyse.

Le théâtre, à n'en point douter, a pour vertu d'exhiber l'homme dans tous ses états, en d'autres termes, bien que le théâtre soit le reflet de la société, il permet de comprendre l'homme à partir de ses relations avec ses semblables.

La psychanalyse, quant à elle, a pour objet d'explorer le système psychique de l'homme pour essayer de fournir des justifications à ses agissements. Les deux ont en commun l'étude de l'homme. Ce rapprochement est l'une des raisons qui nous conduit à réfléchir sur le thème :

``APPROCHE PSYCHANALYTIQUE DE  HUGO BARINE DANS

Les Mains Sales

DE JEAN PAUL SARTRE.''

Nous avons choisi ce sujet  pour les raisons suivantes :

Au-delà de l'analyse littéraire du personnage de théâtre, on pourrait avoir recours à d'autres sciences (psychologie, sociologie, caractérologie, psychanalyse, etc.) pour essayer de l'expliquer et l'analyser.

La psychanalyse, science ayant pour domaine d'étude le système psychique humain et de tous les phénomènes comportementaux qui en résultent, pourrait être utile à la compréhension d'un personnage de théâtre en vue de mieux l'incarner. Cette raison est être notre motivation première.

Aussi, faudra-t-il préciser que le choix du personnage de Hugo Barine répond singulièrement au besoin de comprendre le sens caché des motivations intrinsèques qui conditionnent chacune de ses actions.

A ce niveau de notre investigation, il importe de préciser d'une part, le véritable rapport entre la psychanalyse comme approche psychique, et d'autre part, l'étude d'un personnage de théâtre.

Cette approche aura pour objet de nous permettre de faire une étude du personnage de théâtre à partir de la psychanalyse freudienne en vue de découvrir ses lapsus, ses oublis, ses actes manqués, son caractère, ses paroles et autres caractéristiques.

Le personnage est un élément incontournable au théâtre, car c'est lui qui donne un véritable sens à l'action dramatique. Le personnage en tant qu'entité abstraite est avant tout une image que le comédien doit incarner. C'est un élément dynamique. Il se définit par ce qu'il est, mais aussi par rapport aux autres personnages.

Ainsi, le personnage apparaît comme "un être de papier" qui renferme la grande énigme dans la connaissance de l'être humain qu'il conviendrait de connaître par le biais de la psychanalyse. Son existence est limitée aux oeuvres littéraires. En tant que "être de papier", il peut paraître surprenant que l'on porte sur lui une étude psychanalytique.

Alors, que pourrait nous révéler l'exploration psychanalytique d'un personnage dans la découverte de l'énigme de l'être humain ?

Pour aboutir à des résultats précis, nous avons porté notre choix sur une méthode scientifique, la psychocritique d'où découle la méthode psychanalytique. Par psychocritique, il faut entendre l'analyse psychologique des états de conscience, des sentiments, des motivations profondes ou encore, la réalité psychologique sous-jacente d'une quelconque action.

Maintenant présentons la démarche suivie pour mener à bien notre travail. Soulignons d'entrée de jeu que notre étude se subdivisera en trois grandes parties.

La première est relative à l'univers de notre corpus Les Mains Sales de Jean Paul Sartre. Celle-ci aura pour but de faire une présentation des repères biographiques de l'auteur et de l'oeuvre théâtrale Les Mains Sales. Ensuite, nous essayerons d'étudier les différentes structures de l'oeuvre.

Aussi, au cours de cette partie, ferrons-nous une étude actantielle, esthétique et idéologique de Les Mains Sales.

La deuxième partie, intitulée la psychanalyse, aura pour but de présenter cette discipline scientifique, de faire une description de l'appareil psychique, de montrer le rôle de la sexualité dans le développement de caractères et la conception psychanalytiques des maladies mentales. Enfin, nous présenterons la méthode d'approche.

Dans la troisième partie, enfin, nous procéderons à une application de cette méthode d'approche à l'étude du personnage de Hugo Barine dans Les Mains Sales de Jean Paul Sartre.

« Le texte est une machine paresseuse qui exige du lecteur

un travail coopératif acharné pour remplir les espaces de

non-dit ou déjà dit restés en blanc, (...) le texte n'est

autre chose qu'une machine présuppositionnelle ».

Umberto ECO : L'Oeuvre ouverte (1962)

PREMIERE PARTIE

L'UNIVERS DE L'OEUVRE

CHAPITRE I

REPERES BIOGRAPHIQUES DE JEAN PAUL SARTRE

1. Vie et activités politiques de l'auteur

Né le 21 juin 1905 à Paris, Jean Paul Sartre, avec ses condisciples de l'Ecole normale supérieure, critiquent les valeurs et les traditions de sa classe sociale : la bourgeoisie. C'est surtout par son oeuvre théâtrale que Sartre a été connu du grand public. Peut-être, ce succès et cette notoriété rapides sont-ils dus en partie à des circonstances politiques et sociales favorables, à savoir celles de la guerre et de l'occupation.

Jean Paul Sartre n'est pas né communiste, tant s'en faut et l'on sait, en particulier par Les Mots, combien son enfance fut bourgeoise et choyée. Sartre fut d'abord existentialiste, puis il fonda la revue Les Temps Modernes en 1945 et s'orienta alors franchement vers le Parti communiste.

Dans le cadre de notre recherche, nous essayerons de montrer, à travers sa biographie, les aspects ayant rapport avec notre corpus Les Mains Sales. L'entrée de Jean Paul Sartre dans le Parti communiste et ses relations avec celui-ci connurent, en effet, des fluctuations. C'est parce qu'il lui fut toujours fort difficile de concilier une sympathie intellectuelle si motivée avec les consignes, les orientations et les choix toujours imposés d'un Parti autoritaire.

Aussi les liens, quoique jamais rompus entre Sartre et le Parti, furent-ils souvent très tendus. Le problème fondamental pour l'auteur de Les Mains Sales était celui d'une fidélité, même parfois très théorique, à ce qui restait pour lui la seule entreprise politique, l'affranchissement du prolétariat, seule façon, selon lui de donner un sens réel et concret à ses valeurs essentielles que sont la vérité et la liberté.

Ainsi, dès 1946, Jean Paul Sartre écrivit :

« Je sais qu'il n'y a pas d'autre salut pour l'homme que la libération de la classe ouvrière : je le sais sur la seule inspection des faits, je sais que les intérêts de l'esprit sont sur le prolétariat»1(*).

L'adhésion de Sartre au Parti communiste était dominée par son refus de recevoir des ordres. Cette approche semble s'imposer à des analogies évidentes au personnage de Hugo Barine et la personne de Jean Paul Sartre.

En effet, Hugo Barine fils de famille riche (bourgeois) rentre au Parti communiste par souci de justice sociale et y sert comme secrétaire. Tout en servant le Parti, à des moments, Hugo refuse de recevoir des ordres. Il se veut être libre et loin de toute contrainte pour servir.

A titre illustratif on pourrait se référer aux scènes 2 et 3 du troisième tableau. Ces scènes sont relatives à la fouille. Hugo Barine s'oppose farouchement à ce que les gardes fouillent sa valise. Ici il bat tout en brèche toute idée d'ordre, d'obéissance ou de contrainte venant d'un ailleurs, il garde cependant sa dignité prétendue au nom de laquelle « S'il respecte les consignes, il se respecte aussi lui-même et n'obéit pas aux ordres idiots qui sont faits exprès pour le ridiculiser ».

De tout ce qui précède, nous pouvons dire de Sartre qu'il a épousé son temps parce qu'il a voulu aborder et traiter tous les grands problèmes de son époque. Surtout ceux qui s'imposaient en quelque sorte et qui étaient politiques : la guerre, la révolution, le communisme.

Finalement, Jean Paul Sartre est mort à Paris le 15 avril 1980 à l'âge de 75 ans à l'hôpital Broussais atteint d'un oedème pulmonaire.

2. L'existentialisme

Jean Paul Sartre a introduit et marqué son temps par, une philosophie nouvelle, connue sous le nom de l'existentialisme. On ne peut comprendre valablement les idées de Sartre qu'à la lumière de sa pensée fondamentale qui est l'existentialisme qu'il nous faudra expliquer brièvement.

2.1. Qu'est ce que l'existentialisme ?

L'existentialisme est une philosophie de l'être et de l'existence totalement opposée aux philosophies traditionnelles qui liaient ces notions à l'idée d'un Dieu créateur et auteur de toute existence. Rappelons au passage qu'en faisant sienne cette idée, Sartre s'est inspiré du philosophe allemand Martin Heidegger (1889-1976) dans son ouvrage L'Etre et le Néant publié en 1943. Les existentialistes estiment que la liberté est une conquête qui s'impose à tous. Elle ne dépend d'aucun être (essence = Dieu). Elle est en soi. Donc pour la rendre manifeste il faut s'engager.

A ce niveau de notre travail il nous incombe d'expliquer l'idée d'essence et d'existence.

2.2. Essence et existence

L'essence, c'est l'idée théorique et abstraite d'un être ou d'une chose avant même que cet être ou cette chose ne soit appelé à l'existence. Or dans la pensée traditionnelle, les essences sont en Dieu : Ce sont comme des prototypes résumant en eux toutes les variétés possibles de créations individuelles. L'idée d'homme par exemple est en Dieu, et l'acte créateur consiste à donner l'existence à cette essence.

Mais l'existentialisme s'oppose formellement à cette conception traditionnelle: il nie l'existence de Dieu et du même coup celle des essences. Sartre en conséquence postule que l'existence précède l'essence, affirmant ainsi une véritable révolution de la pensée. Qu'est-ce que l'existence ? C'est un évènement qui est sans signification et ne se réfère à aucune essence.

Au total, pour rendre manifeste l'aspect existentialiste, il nous faudra nous engager. Mais qu'est-ce que l'engagement ?

2.3. L'engagement

Selon l'existentialisme professé par Sartre, l'homme est totalement libre vu qu'il ne peut se référer à rien ni à personne, que ce soit homme, Dieu ou système. Cette liberté est donc une charge, car il faut choisir une conduite sous sa seule responsabilité sans prendre conseil de qui que ce soit. Pour l'auteur de Les Mains sales, écrire est en effet un acte important parce qu'il concerne un public, que sont les lecteurs qui trouveront peut-être dans l'oeuvre qu'on leur propose les éléments déterminants d'une conduite future.

Aussi, l'écrivain doit-il s'engager. C'est pour lui une obligation qu'il ne peut esquiver, et qui lui est assignée par son état même d'écrivain. Si l'existentialisme professé par Sartre est une donnée existentielle, il lui reconnaît la liberté qu'il peut véritablement apporter à la condition humaine.

L'homme selon Sartre est condamné à être libre. Cette réalité découle en effet de la volonté propre de l'homme d'exécuter des engagements, de mener des actions malgré toutes dispositions contradictoires, de remords, de craintes, etc.

2.4. Le marxisme

Il est bon de rappeler que le marxisme est une doctrine philosophique de l'Allemand Karl Marx (1818-1883). Le marxisme se présente comme une méthode d'analyse critique de la société propre à en faire ressortir les défauts et les tares, et d'autre part comme un moyen de réaliser à terme la société idéale. Par l'idée d'une société idéale il faut comprendre la suppression de «l'exploitation de l'homme par l'homme» et la réalisation d'une société sans classe. Or cette suppression de la société bourgeoise conduira inexorablement à instaurer un cadre de vie faisant de l'homme un être libre.

Les motifs d'adhésion de Jean Paul Sartre au marxisme sont d'ordre intellectuel. Mais cette adhésion est particulièrement intéressante dans la mesure où elle exprime les notions de vérité et de liberté propres à Sartre.

La conclusion qui s'impose selon Sartre c'est que le prolétariat doit se libérer, s'affranchir de l'oppression bourgeoise, oppression économique certes, mais également morale, politique et culturelle. Ces pratiques, toujours selon Sartre, sont les moyens les plus simples pour la bourgeoisie d'affermir et de perpétuer sa domination sous la forme d'une idéologie dominante qu'il faut donc à tous prix combattre.

A voir de plus près l'écriture sartrienne, nous remarquons que l'auteur procède à l'évidence de son idéologie, car cette idéologie n'est aucunement gratuite et prétend régir toute conduite humaine. Le théâtre existentialiste en vérité inspire un genre particulier d'art dramatique qui se démarque singulièrement de la tradition parce qu'il se veut loin de toute contrainte en matière de règles.

Le théâtre traditionnel quant à lui représentait des personnages et des caractères impliqués dans une histoire. Cette réalité leur imposait des épreuves que ces personnages eux-mêmes n'avaient ni prévues ni choisies et qui étaient le fait du destin ou du hasard.

3. L'oeuvre théâtrale

Avant d'aborder son oeuvre Les Mains Sales qui fait l'objet de notre recherche, nous tenterons de rappeler au passage les oeuvres théâtrales de Jean Paul Sartre :

ü 1940 : Bariola, pièce religieuse écrite pour Noël aux camps des prisonniers

ü 1943 : Les Mouches

ü 1944 : Huis clos

ü 1944 : Morts sans sépulture

ü 1946 : La Putain respectueuse

ü 1948 : Les Mains Sales

ü 1951 : Le Diable et le Bon Dieu

ü 1953 : Kean (repris d'Alexandre Dumas Père)

ü 1955 : Nekrassov

ü 1959 : Les Séquestrés d'Altona

ü 1965 : Les Troyennes (adaptation d'Euripide)

Après lecture de l'oeuvre Les Mains Sales, l'on constate que Jean Paul Sartre présente Hugo Barine, jeune militant communiste, fils de famille riche, qu'il a cependant quittée pour s'inscrire au Parti par souci de justice sociale. Son sort d'enfant « gâté » lui paraît inacceptable devant la misère du peuple.

Entré au Parti, Hugo se propose d'assassiner Hoederer l'un des chefs du Parti. Hoederer selon ses camarades du Parti, est un traître social puisqu'il veut signer une alliance avec les forces conservatrices.

Hugo accompagné de sa femme Jessica est introduit auprès de Hoederer comme secrétaire. Après plusieurs jours d'atermoiement, il est sur le point de se laisser convaincre par celui-ci du bien fondé de sa politique. Mais coup de théâtre, Hugo surprend Hoederer embrassant Jessica. Estimant avoir été trahi, il l'abat. Après deux ans de prison, il se retrouve chez les militants qui l'ont chargé de l'assassinat. Leur ligne politique a changé, ils ont adopté celle qui était préconisée par Hoederer. Sommé par les membres du Parti de choisir entre l'alignement et la mort, Hugo choisit la mort.

CHAPITRE II

PRESENTATION DE Les Mains Sales

1. Contexte socio-historique de Les Mains Sales

L'action se passe de 1943 à 1945, donc en pleine guerre, dans un pays imaginaire que Sartre appelle Illyrie, pseudonyme assez transparent qui désigne de toute évidence la Hongrie. Ce pays était dirigé depuis 1920 par le Régent- Amiral Horthy von Nagybana.

C'était un «royaume sans roi ». Le Régent qui avait toujours exercé un pouvoir discrétionnaire de style assez fascinant, s'est allié à l'Allemagne nazie et a déclaré la guerre à l'URSS en 1942, quelque temps après l'attaque allemande contre la Russie du 19 juin 1941. Des contingents anglais se battent aux côtés des Allemands. Mais en 1944, à la suite des défaites subies par ceux-ci, sur le front russe et du recul général qui s'ensuit, des troupes allemandes occupent la Hongrie, et Horthy est remplacé par un pronazi, fanatique, Szalasi qui fait régner la terreur.

Dès le 30 octobre 1944, les Russes qui n'ont cessé de progresser vers l'Ouest, bousculent les troupes allemandes, lancent une attaque contre Budapest qui, en fait ne capitulera qu'en février 1945. Alors, en mars 1945, la Hongrie est envahie par l'armée russe et un gouvernement prosoviétique va s'installer.

Le 15 Mars 1945, la Hongrie deviendra pratiquement communiste et trois millions d'hectare de terre seront confisqués aux grands propriétaires. Le Parti des petits propriétaires domine au sein du Front National Hongrois d'indépendance. En Février 1946 la Hongrie est proclamée République populaire et s'en suivent l'avènement et l'installation du communisme populaire de Hongrie.

2. Le sujet de la pièce. Une action politique complexe et tendue

Tout en s'inspirant de la réalité, Sartre nous dit qu'est n é en 1942 dans ce pays un double mouvement de Résistance contre le gouvernement du Régent : l'un que l'on pourrait qualifier de nationaliste et qui est soutenu par le Pentagone, c'est-à-dire par l'Etat major américain (l'Amérique est en guerre contre l'Allemagne à cette époque), l'autre de nature et d'obédience nettement marxiste et visant à installer un régime communiste à la libération du pays. Toutefois, en mars 1943, le Régent, nous dit Sartre, doutant de la victoire allemande, autrement dit le Pentagone, et même avec la Résistance communiste, oeuvre pour proposer à l'une et à l'autre un projet de gouvernement tripartite qui serait pour lui une planche de salut. A cet effet, disent les émissaires du Régent au Parti prolétarien, un comité national clandestin va se constituer incessamment auquel est invité à ce joindre le Parti prolétarien. Ce dernier délibère sur la réponse à donner aux émissaires du Régent. Le dirigeant communiste Hoederer pense qu'il faut accepter la proposition, et il est approuvé par quatre voix contre trois, au grand scandale des « purs ».

Ce vote s'explique par le faits que le Parti prolétarien est composé de plusieurs tendances : il y a en son sein des sociaux démocrates qui sont majoritaires et ont de ce fait « affadi » le Parti. Ainsi donc Hoederer a toute liberté d'engager des pourparlers avec la Résistance «  bourgeoise » tandis que les «  purs » du Parti prolétarien, indignés, vont décider de l'éliminer comme traître.

CHAPITRE III

ETUDE DES STRUCTURES DE L'OEUVRE :

Les Mains Sales

Tout au long de ce chapitre, il nous sera nécessaire d'analyser l'oeuvre tant dans son contenu que dans sa structure. Nous procéderons d'abord dans cette analyse, par la structure externe avant d'aboutir à sa structure interne que nous essayerons d'expliquer afin de saisir l'entière signification de l'oeuvre.

1. La structure externe

Cette structure concerne essentiellement les formes qui insistent sur les éléments ayant trait aux modalités de l'écriture et de la représentation de la pièce. Notre réflexion ici, portera sur le titre, la liste des personnages et la subdivision de l'oeuvre.

1.1. Le titre de l'oeuvre

Le titre est un texte extérieur d'une oeuvre théâtrale. Il est, à cet effet, un élément didascalique extra textuel ou para textuel. Aussi le titre annonce-t-il les couleurs et instaure une attente.

1.1.2. La fonction d'un titre dans une oeuvre théâtrale

Le titre est le miroir d'un texte dramatique. C'est un élément très important dans la compréhension d'une pièce de théâtre car il situe le lecteur sur la fable. Le titre est d'autant plus important que c'est lui qui donne le ton à l'action dramatique. Pour ce faire le titre d'une oeuvre doit révéler certaines qualités.

Le titre doit être simple afin d'être compris immédiatement par tous. Il ne doit pas être trop long pour éviter de ralentir sa compréhension par le lecteur et il doit surtout être accrocheur.

En effet un titre, pour être efficace, doit d'emblée attirer l'attention du lecteur et lui donner l'envie d'ouvrir la pièce et de la lire.

A en croire Christian Gambotti :

« Le titre d'une oeuvre est toujours révélateur du mode de fonctionnement des termes essentiels et du sens de cette oeuvre. Il existe une sorte de contrat entre le lecteur et l'écrivain. Au terme de ce contrat, le lecteur s'attend à trouver l'histoire à laquelle le renvoie le titre. »2(*)

Cette attente sera soit déçue, soit satisfaite ; le lecteur spectateur jugera en effet si la fable colle à l'étiquette.

I.1.3. Pourquoi Les Mains sales ?

La connaissance du titre d'une oeuvre apparaît, de tout point de vue, importante et opportune avant d'envisager l'étude de l'oeuvre proprement dite. Ainsi le titre de l'oeuvre soumise à notre étude est « Les Mains sales ».

Ce groupe nominal est constitué d'un déterminant (les), d'un nom (mains), et d'un adjectif (sales). Avoir les mains sales, expression courante, veut dire, avoir les mains tachetées, impropres, impures. Ce titre peut aussi suggérer l'idée d'un assassinat, d'un meurtre.

I .2 . La subdivision d'une pièce théâtrale

La subdivision de l'oeuvre renvoie à son découpage. Selon Claude Brenon :

« Les séquences sont les caractéristiques des grandes unités (...) qui contrairement à tous les autres, elles supposent l'interruption visible figurée par un blanc textuel et par indication textuelle d'un nouvel acte ou d'un nouveau tableau ».3(*)

I. 2.1 La dramaturgie en actes

De manière générale, la dramaturgie en actes présente l'action dans son déroulement chronologique. L'acte se termine lorsqu'il y a une sortie de tous les personnages ou qu'il y a un changement dans la continuité spatiotemporelle ; la fable étant alors découpée en grands moments ou en coupures narratologiques.

Il est à noter que les coupures narratologiques représentent le critère essentiel de la division en actes. C'est pourquoi pour Patrice Pavis : 

« Les actes constituent la division externe des pièces en parties d'importance sensiblement égale en fonction du temps et du déroulement de l'action ».4(*)

Depuis Aristote, le drame doit présenter une seule action décomposable en parties organiquement liées les unes aux autres. Cette structuration est narratologique et le découpage s'y effectue en fonction des grandes unités du récit qui sont :

ü La protase : exposition et mise en oeuvre des éléments dramatiques

ü L'épitase : complication et resserrement du noeud

ü La catastrophe : résolution du conflit et retour à la normale

Ainsi, toute pièce de facture aristotélicienne comme l'énonce Hegel dans sa réflexion sur la tradition théâtrale comportera trois moments clé :

ü La naissance du conflit

ü Le choc paroxysme

ü La conciliation

En un mot, l'acte doit faire preuve d'une cohérence interne et une progression par rapport au précédent aux fins d'ouvrir l'inévitable suspens quand il arrive à sa fin.

A l'intérieur de l'acte se succèdent des scènes sans interruption. La scène se définit comme une subdivision du découpage interne de l'action.

I.2.2. La dramaturgie en tableaux

Le tableau est une unité spatiale d'ambiance. Il caractérise un milieu ou une époque ; c'est une unité thématique et non actantielle. Le tableau est une unité de la pièce du point de vue des grands changements de lieux, d'ambiance ou d'époque. Chaque tableau correspond, de façon générale, à un décor particulier.

C'est au XVIIIe siècle que l'esthétique du tableau va se constituer en rapport avec une vision picturale de la scène dramatique. Le tableau est une surface beaucoup plus étendue que l'acte et aux contours imprécis recouvrant un univers épique de personnages dont les relations assez stables donnent l'illusion de former une fresque, un corps de ballet ou un tableau vivant. Le dramaturge installe par le biais des tableaux, le spectateur devant une gigantesque toile déroulant des petits tableaux.

Les propos de Brecht semblent mieux conclure les définitions sur le Tableau:

« Le tableau est un fragment typique mais incomplet sans la

perspective critique et restructurant du spectateur. Chaque tableau

forme un tout et (...) se projette dans le suivant ».5(*)

I.2.3. Les Mains Sales : une structure dramatique ambiguë

L'oeuvre  Les Mains Sales  s'inscrit dans la perspective des nouvelles formes de dramaturgie qui se conçoivent en dehors des actes et des tableaux.

Aujourd'hui avec l'avènement de la nouvelle dramaturgie, les types classiques de découpage des oeuvres dramatiques qui recherchent respectivement la continuité de l'action et le respect de l'ordre chronologique vont faire place à une dramaturgie subjective et relative.

Selon le Dictionnaire Larousse, ce qui est subjectif, c'est ce qui est individuel et susceptible de varier en fonction de la personnalité de chacun. Quant au relatif, c'est ce qui n'a rien d'absolu, qui dépend d'autres choses.

Ainsi, une dramaturgie subjective et relative est une dramaturgie qui n'obéit qu'au style du dramaturge ; une dramaturgie qui rompt d'avec les formes classiques du découpage pour épouser « les fantaisies » et les modèles personnels de division, de découpage de l'oeuvre dramatique.

Cela relève bien entendu des choix esthétiques de l'auteur.

Notre corpus Les Mains Sales s'inscrit dans le cadre de cette logique. La nouvelle dramaturgie vise à donner libre cours à l'écriture théâtrale. En d'autres termes elle offre à tout dramaturge la liberté d'écriture.

Cette réalité épouse tout de même la conception existentialiste sartrienne de l'engagement littéraire. Etant donné que cet acte humain doit être volontairement et sciemment assumé, l'acte d'écriture doit en être autant. A confronter l'objectif que vise la nouvelle dramaturgie à celle de l'engagement littéraire selon Sartre, nous pouvons déduire qu'ils ont en commun la création d'un espace d'épanouissement à tout créateur.

De cette remarque, nous pouvons affirmer que l'auteur de Les Mains Sales  met sa théorie existentialiste en évidence à travers son écriture.

Essayons autant que possible de dégager le caractère ambigu de la structuration des tableaux de Les Mains Sales.

Premier tableau

Deuxième tableau

Scène I

Scène II

Scène III

Scène IV

Scène I

Scène II

Scène III

Scène IV

Troisième tableau

Quatrième tableau

Scène I

Scène II

Scène III

Scène IV

Scène V

Scène I

Scène II

Scène III

Scène IV

Scène V

Scène VI

Cinquième tableau

Sixième tableau

Scène I

Scène II

Scène III

Scène IV

Scène V

Scène I

Scène II

Scène III

Scène IV

Septième tableau

Scène unique

Comme nous le constatons, la pièce est divisée en sept Tableaux, regroupant de manière inégale un ensemble de vingt-neuf scènes (le dernier Tableau ne comprenant qu'une seule scène).

Les Tableaux un et six se situent dans le présent et sont l'occasion d'un retour en arrière qui évoque le meurtre de Hoederer, de sa conception à son exécution (Tableaux I et VI). Nous avons affaire à du théâtre dans le théâtre, c'est-à-dire un procédé insérant un jeu dramatique dans un autre jeu. Cette technique du théâtre dans le théatre est un procédé utilisé quand :

« Un élément théâtral est comme isolé du reste et apparaît à son tour comme l'objet du regard de spectateurs situés sur la scène, quand le spectateur de la scène voit des comédiens en face d'un spectacle que lui-même regarde aussi ».6(*)

Si nous reprenons l'ordre chronologique et examinons comment le découpage en tableaux regroupe les évènements, nous obtenons ceci :

Tableau II : Hugo est chargé de tuer Hoederer

Tableau III : Arrivée de Hugo chez Hoederer ; installation et première rencontre

Tableaux IV,  V, VI correspondent respectivement à la négociation entre Hoederer, Karsky, et le Prince Paul, au « débat » entre Hoederer et Hugo, au meurtre de Hoederer. Mais le plus important est de noter qu'ils constituent une unité temporelle (un jour, une nuit et le lendemain).

Tableaux I et VII : la soirée chez Olga et la mort de Hugo.

La pièce distingue donc quatre grands moments entre lesquels s'écoule un temps plus ou moins déterminé. Ainsi, pouvons-nous voir qu'il y entre :

Les Tableaux II et III: temps déterminé ;

Les Tableaux III et IV : huit à dix jours ;

Les Tableaux VI et I : deux ans.

I.3. L'incipit ou la liste des personnages

La liste des personnages est aussi appelée didascalie d'ouverture qui selon Jean Pierre Ryngaert : « se démarque de la didascalie linéaire ordonnant un tableau ou un acte ».7(*)

Dans le cas d'espèce, nous aborderons uniquement la composition de l'incipit, pour ensuite, situer le rôle de chaque personnage. Nous consacrerons dans la troisième partie, une analyse plus détaillée du discours de notre personnage choisi (Hugo Barine) afin de mieux cerner ses caractères constituant ainsi un aspect important de notre travail.

Les Mains Sales compte onze personnages. Ainsi, selon l'ordre chronologique qui nous est présenté dans notre corpus, nous avons d'abord Hoederer. Il est l'homme fort de la pièce, l'antithèse de Hugo, son antipère.

Peut être en ce sens qu'il désavoue totalement ce pur produit de la bourgeoisie tout en cherchant sans doute à l'instruire. Hoederer est aussi ce leader qui, d'après l'avis du cercle communiste auquel il appartient, mène une politique trop diplomatique et compromettante. Ainsi, dans le deuxième tableau, scène IV nous remarquons ceci :

Louis

« Nous allons voir ...Hoederer nous a réuni ce soir parce qu'il veut que le Parti prolétarien s'associe aux fascistes et au Pentagone pour partager le pouvoir avec eux après la guerre »8(*).

Ensuite nous avons Hugo Barine. C'est le premier rôle, celui qui doit accomplir une mission qu'il a acceptée mais qu'il répugne à exécuter. Il est le personnage autour duquel se tisse l'intrigue. C'est aussi ce personnage à qui le cercle communiste a confié la charge d'assassiner le secrétaire général du parti. Cette assertion est aussi évidente dans le deuxième Tableau, scènes III et IV.

Louis

« Très bien, tu partiras demain avec ta femme. Il (Hoederer) habite à vingt kilomètres d'ici, dans une maison de campagne qu'un ami lui a prêtée...le soir que nous te dirons tu ouvriras la porte à trois camarades qui finiront la besogne... ».

Hugo

« Non pas du tout ...Je ferai l'affaire moi-même ».

En troisième rôle, nous avons Olga Lorame. C'est un personnage féminin certes mais marqué d'une assez forte masculinité. C'est une militante politique convaincue et rigoureuse, mais non dénuée de sentiments. Elle est un peu la conscience de Hugo, une conscience aussi politique que maternelle qui fait tout et use de toutes les instances pour le sauver, mais sans succès.

En quatrième rôle, nous trouverons Jessica, c'est une jeune femme d'origine bourgeoise et aisée, mais beaucoup plus fine et intuitive qu'il n'y paraît. Elle est l'innocence, à la fois fausse et vraie, la fausse note et le faux dans le ballet plutôt mal réglé des consciences politiques qui l'entourent. Mais elle a très vite compris que son mari, Hugo, était engagé dans une impasse. Pourquoi ? Parce qu'en dépit de son apparente légèreté elle sait que Hugo ne peut être un assassin, et elle le lui dit sur un ton moqueur à plusieurs reprises.

Jessica

 «  Ma pauvre petite abeille, si tu veux me convaincre que va devenir un assassin, il faudrait commencer par t'en convaincre toi-même ».

Hugo

«  Je n'ai pas l'air convaincu hein ».

Jessica

«  Pas du tout : tu joues mal ton rôle ».

Louis est un partisan extrémiste du cercle communiste. Il est même plus l'incarnation des désirs égoïstes que collectifs. Louis préfère imposer aux membres du Parti sa pensée et en régir leur conduite. C'est pour cette raison d'ailleurs que la présence de Hoederer au sommet des prises de décisions apparaît pour lui comme un grand obstacle qu'il faut vaille que vaille éliminer. A cet effet, voyons de près l'une des répliques de Louis :

Louis

 « Bon. (À Hugo) Tu comprends bien la situation. Nous ne pouvons ni nous en aller ni l'emporter au comité. Mais il s'agit uniquement d'une manoeuvre de Hoederer. Sans Hoederer, nous mettons les autres dans notre poche ».

Le Prince Paul, fils du Régent d'Illyrie et Karsky, Secrétaire du Pentagone sont les émissaires de la bourgeoisie. Ce sont donc ces deux émissaires qui oeuvrent auprès du Parti clandestin pour la constitution d'un gouvernement « d'union nationale » face aux Russes qui ne tarderont pas à se présenter aux frontières. 

Slick et Georges, deux gaillards très élémentaires, aux muscles d'acier sont les gardes de Hoederer. Assurément ce ne sont pas des têtes politiques mais au moins ont-ils trouvé dans le Parti un emploi et du pain, dès lors sans doute une conviction. Aussi, sont-ils prêts en échange à appliquer aveuglément les consignes de fouille qui leur sont données. Ils restent vigilants à toute personne qui entre chez le vieux Hoederer car selon les propres mots de Slick : « ce qui est sûr c'est qu'on veut le tuer ».

Ces deux personnages apparaissent comme les `justiciers' du Parti. Ils sont en effet les émissaires du Parti. Ce sont eux qui ont été chargés de tuer Hugo à sa sortie de prison selon l'ordre du Parti.

2. LA STRUCTURE INTERNE

2.1. Définition

Si la structure externe s'emploie plutôt à étudier la forme de l'oeuvre, l'étude de la structure interne, quant à elle, concerne le fond donc le contenu de la pièce. Jacques Scherer opposait la structure interne à la structure externe qu'il définissait comme l'étude des «  problèmes de fond qui se posent à l'auteur dramatique quand il construit sa pièce avant de l'écrire ».9(*)

De ce fait une étude approfondie de la pièce nous semble nécessaire.

Pour mener à bien notre travail, nous ferons le résumé de chaque tableau pour établir le schéma actantiel de Les Mains Sales, et ensuite de préciser les aspects spatiotemporels de l'oeuvre.

2.2. Résumé des Tableaux

· Premier Tableau (p. 11 à 34)

Ce premier Tableau nous restitue d'abord une ambiance, qui est celle d'une situation politique et militaire évoluant presque d'heure en heure. On est, rappelons le en Illyrie, c'est-à-dire en Hongrie occupée depuis peu par des troupes allemandes alors que la pression soviétique s'intensifie aux frontières. La radio soviétique perce le brouillage et devient assez distincte pour annoncer la retraite allemande « sur toute la largeur du front », tandis que les troupes russes sont à quarante kilomètres de la frontière Illyrienne. Bien que l'occupation touche à sa fin, il faut être prudent : Olga, qui a sans doute perçu quelque bruit, éteint la radio. On frappe à la porte et Olga, inquiète, peut redouter une visite toujours possible de la Gestapo. Aussi, se munit-elle d'un revolver caché sous une serviette, pour ouvrir brusquement la porte comme on doit le faire en pareil cas afin d'éviter de se faire surprendre.

· Deuxième Tableau (p. 35 à 55)

Le deuxième Tableau qui montre Hugo en transit chez Olga est assimilable à un acte d'exposition : Hugo y apparaît comme un journaliste insatisfait de sa tâche qu'il considère comme un pis-aller quand il la compare à ce que font les autres militants. Au lieu de bien jouer le rôle qui lui est attribué, il envie celui des autres et cherche à s'en accaparer. C'est pourquoi, au mépris de ses faiblesses et ses aptitudes et malgré les réticences de Louis, il veut faire le brave en s'obstinant à perpétrer tout seul l'assassinat de Hoederer qui devait être confié à plusieurs acteurs, et ce avec la bénédiction de Olga qui le soutient dans ses choix. Dès ce premier acte, le spectateur s'aperçoit qu'il sera une entrave au fonctionnement habituel du Parti.

· Troisième Tableau (p. 57 à 115)

Le troisième Tableau, en réalité l'acte II, est une première péripétie qui permet de mieux connaître Hugo. Son rôle de perturbateur se confirme avec les incidents survenus lors du rituel de la fouille : la discipline du Parti est pour lui un carcan insupportable. Dans sa vie privée, ses rapports quotidiens avec sa femme laisse voir qu'il est un farceur pour qui la vie est un jeu et lorsqu'il de manière cinglante : « tu joues bien au révolutionnaire » (III, 1).

· Quatrième Tableau (p. 117 à 161)

Ce Tableau équivaut au troisième acte où l'action se noue dans les pièces classiques en cinq actes. La rencontre au sommet entre Hoederer et les bourgeois que Louis voulait éviter a bien lieu parce que Hugo, en proie au doute, n'a pas osé tirer sur son patron. L'avenir du Parti aurait été compromis si Olga n'avait pas interrompu les pourparlers en lançant une bombe dans la salle de conférence.

· Cinquième Tableau (p. 163 à 203)

Correspondant au quatrième acte, c'est la seconde péripétie dans laquelle Hugo, suivant les conseils de sa femme, change de tactique : au lieu de tuer Hoederer, ne vaut-il pas mieux le convaincre de renoncer à sa politique déviationniste ?

Tentative ratée car Hoederer est un dur à cuire. Mauvais perdant, Hugo refuse de reconnaître qu'il a été convaincu par les analyses pertinentes et le pragmatisme du Secrétaire Général. Il fait cette promesse à sa femme : « demain je finirai le travail ». (V 5)

· Sixième Tableau (p. 205 à 230)

Ce Tableau est d'ordre plutôt intimiste et se passe uniquement entre Hoederer, Hugo et Jessica. Il est dominé par la présence un peu insignifiante de Jessica qui a son idée. Il se terminera par le meurtre de Hoederer par Hugo sans que l'on puisse savoir exactement s'il s'agit d'une exécution politique telle qu'elle avait été décidée au début, ou d'un crime passionnel causé par la jalousie de Hugo à l'endroit de Jessica.

· Septième Tableau (p. 231 à 247)

Ce Tableau est le troisième segment temporel de la pièce. Il est symétrique du premier et constitue un retour au présent, c'est-à-dire en mars 1945 après le récit (scénifié) par Hugo des événements qui se sont déroulés deux ans avant, en mars 1943.

Pour Olga, représentante autorisée du Parti, un certain nombre de questions relatives à la « liquidation » de Hoederer se posent, questions qui avaient été sans doute oubliées jusqu'à un retour incertain de Hugo. Mais Hugo est donc rentré et il fait à Olga un récit circonstancié de ce qui s'est passé pendant cette semaine close par l'assassinat de Hoederer et suivie vraisemblablement par l'arrestation et la condamnation de Hugo à cinq ans de détention.

2.3. Les aspects spatiotemporels de Les Mains Sales

Le traitement du lieu et du temps sont des signes distinctifs d'une oeuvre dramatique. En effet, une pièce étant écrite pour être jouée, l'auteur se doit d'inscrire l'action et les personnages dans un milieu et dans une époque donnés.

Selon Anne Ubersfeld :

« Si la première caractéristique du texte de théâtre est l'utilisation

des personnes qui sont figurées par des existences humaines, la

seconde indissolublement liée à la première est l'existence d'un

espace où ces êtres vivants sont présents. » 10(*)

Notons toutefois que l'espace dramatique n'est pas à confondre avec l'espace théâtral. L'espace dramatique est l'espace qui se situe au niveau du texte dramatique tandis que l'espace théâtral c'est le lieu de théâtralité concrète entendu comme l'aire de jeu. C'est, en d'autres termes, l'espace physique de la fiction dramatique que les personnages investissent dans l'accomplissement de leur action.

2.3.1 Espace dramatique

Dans la cadre de Les Mains Sales, deux espaces dramatiques sont à retenir : il s'agit notamment de : chez Lorame et chez Hoederer. Dans le premier cas, c'est-à-dire, « chez Olga Lorame » c'est le lieu où se tiendront ces différentes actions dramatiques :

ü La conversation entre Olga et Hugo à sa sortie de prison

ü L'assassinat de Hugo par Charles et Frantz

ü La rencontre de Ivan et Hugo

ü L'entretien entre Hugo, Louis et Olga au sujet du projet d'assassinat de Hoederer

ü La réunion du Parti avec les représentants de Régent et du Pentagone.

En dehors de cet espace nous aurons un autre espace significatif à savoir « chez Hoederer » le Secrétaire Général du Parti. C'est aussi le lieu où se déroulent respectivement ces différents jeux :

ü Le lieu de travail de Hugo Barine

ü La scène de la fouille

ü Les pourparlers entre le Prince Paul, Karsky et Hoederer

ü La première tentative d'assassinat de Hoederer par Olga Lorame

ü Le dénouement de toutes les actions de la pièce « l'assassinat de Hoederer par Hugo Barine. ».

2.3.2. Temps dramatique

Dans le fait théâtral, il y a deux temporalités distinctes à savoir le temps scénique et le temps dramatique. Ainsi, s'agissant du temps scénique il n'est rien d'autre que le temps vécu par le spectateur confronté à l'évènement théâtral, le temps événementiel lié au hic et au nunc, au déroulement du spectacle. Ce temps se déroule dans un présent continu car la représentation a lieu au présent.

Le temps dramatique quant à lui est le temps de la fiction dont parle le spectacle, la fable et qui n'est pas lié au hic et nunc mais où s'est passé, ou se passera une action dans un monde de la fiction.

2.3.3. Temps scénique

L'originalité première de Les Mains Sales est d'avoir fait du temps, ce cadre obligatoire de toute représentation, un facteur essentiel de l'action. Dans Les Mains Sales, cette importance du temps apparaît d'abord dans le fait que cette pièce se passe sur deux ans, ce qui n'est pas absolument commun. Les indications précises ne manquent pas. Hugo est entré au Parti en 1942 et l'action proprement dite commence en Mars 1943. Hugo Barine réapparaît chez Olga en Mars 1945 à 9 heures du soir et à la demande de celle-ci, il raconte son histoire : l'assassinat de Hoederer qui s'est passé deux ans auparavant. Ces événements sont « scénifiés » et constituent le corps de la pièce. Après quoi nous revenons au présent dans le dernier tableau et il est minuit : Hugo a donc disposé de trois heures pour faire son récit. On remarquera que c'est le temps habituel d'une représentation, mais que les événements évoqués ont duré dix jours.

En effet, en dehors du temps scénique, il nous faut souligner que dans l'oeuvre, le temps n'est pas une dimension d'ordre purement cumulatif où les moments et les jours se suivent et s'additionnent. Le temps dans cette pièce est d'une toute autre valeur parce qu'il motive et détermine très précisément tant les phases générales de l'action que les comportements individuels des personnages.

3. ETUDE ACTANTIELLE, ESTHETIQUE ET IDEOLOGIQUE

DE L'OEUVRE : Les Mains Sales

3.1. Le modèle du schéma actantiel

Cette notion s'est imposée dans les recherches sémiologiques et dramaturgiques pour visualiser les principales forces du drame et leurs rôles dans l'action. Pour les sémiologues, l'utilisation du modèle actantiel devra faciliter l'approche immédiate de la structure profonde de l'action. Le modèle actantiel ou encore code actantiel met en exergue l'actant (à ne surtout pas confondre au personnage).

L'actant dans la conception de Greimas et Courtes est celui qui accomplit ou subit l'action indépendamment de toute détermination.

L'actant selon Anne Ubersfeld peut :

« Être une abstraction (la cité, les dieux, la liberté) ou un

personnage collectif ( le choeur antique, les soldats d'une armée) ou

bien une réunion de plusieurs personnages (...) l'opposant à ce

sujet et à son action »11(*).

Ainsi dans tout schéma actantiel d'une oeuvre, devons-nous obtenir cette phrase implicite: Une force ou un être (D1) appelé destinateur conduisant par son action le sujet (S) à rechercher un objet (O) dans l'intérêt ou l'intention d'un destinataire ou un être(D2) concret ou abstrait. Dans cette recherche, le sujet (S) a des alliés appelés Adjuvants (A) et des opposants (Op). Cette phrase implicite fait appel au schéma des six cases correspondant à six fonctions. Greimas les structure en les subdivisant en trois parties.

S

O

D 2

OP

DI

A

L'axe destinateur-destinataire contrôle les valeurs et idéologies. Il concerne également le pouvoir et le savoir. L'axe sujet-objet trace la trajectoire de l'action et la quête du héros et du protagoniste. Cette trajectoire est parsemée d'embûches, d'entraves que le sujet a pour devoir de surmonter et avancer : c'est également l'axe du vouloir.

L'axe adjuvant-opposant facilite ou empêche la communication. Il produit les circonstances et les modalités de l'action et n'est pas nécessairement représenté par les personnages.

Cependant le schéma actantiel n'est pas figé. La multiplicité des situations ne saurait le rendre statique. Ainsi, à chaque situation nouvelle correspond un schéma actantiel différent dans la mesure où les rapports qui fondent l'action des actants se transforment nécessairement et évoluent si bien que dans une pièce de théâtre, il peut y avoir autant de schémas actantiels qu'il y a d'actions.

3.1.1. Proposition de schémas actantiels dans Les Mains

Sales.

3.1.1.1 Hugo Barine l'assassin

D1 : Instance du Parti

D2 : Le parti prolétarien

S : Hugo Barine

O : Prise de pouvoir

A : Olga, Louis

Op : Georges, Slick, Léon

Dans le premier cas, l'instance du Parti (D1) ne cherche qu'à privilégier ses propres intérêts au détriment du peuple.

Ainsi, pour atteindre son but, le Parti engage le sujet (S) Hugo Barine à assassiner Hoederer avant qu'il ne signe l'accord de paix avec les représentants du Régent et du Pentagone.

Le Parti prolétarien (D2) en adoptant une telle démarche vise la conquête du pouvoir (O). C'est d'ailleurs pour cette raison, que Hugo Barine est aidé par Olga et Louis, tous membres du Parti. Malgré sa détermination à vouloir absolument tuer Hoederer, Hugo va se heurter à l'opposition de Georges, Slick et Léon qui sont les gardes corps du vieux Hoederer.

3.1.1.2. Hugo Barine l'assassiné

D1 : Instance du Parti

D2 : Le Parti prolétarien

S : Charles et Frantz

O : Prise de pouvoir

A : Louis

Op : Olga

Dans ce second schéma, après l'assassinat de Hoederer par Hugo, l'instance du Parti prolétarien (D1) cherche à préserver sa crédibilité. C'est pour cette raison que les membres se méfient de Hugo.

Cette raison conduit le Parti à mandater Charles et Frantz (S) de tuer Hugo dont la libération inopinée risquerait fort bien de ternir la crédibilité du Parti prolétarien (D2) qui oeuvre pour la prise du pouvoir (O).

Dans leur tâche, Charles et Frantz seront farouchement opposés à Olga (Op) qui voit en Hugo une personne encore récupérable. En dépit des nombreux efforts consentis par Olga, Charles et Frantz se verront assistés de Louis (A).

3.2. ESTHETIQUE A TRAVERS LES Mains Sales

Nous aborderons ici la notion d'esthétique dans le sens de réflexion sur l'art quoique toute réflexion sur l'art ne soit pas toujours appelée ainsi. Le mot esthétique n'est apparu qu'au XVIIIe siècle, sous la plume de Baumgarten (1714-1762) et ne signifiait à cette époque-là que théorie de sensibilité en référence à son sens étymologique grec aisthesis qui signifie beauté.

Le mot esthétique est en rapport avec une branche de la philosophie qui a pour objet l'étude du beau, son essence et sa perception. Ce n'est que récemment qu'elle s'est établie comme science indépendante comportant une méthode propre, quittant ainsi la réflexion philosophique, la critique littéraire et l'histoire de l'art, disciplines auxquelles elle fut toujours confondue.

Il est important de souligner que notre étude ne porte que sur une seule oeuvre de Jean Paul Sartre. Par conséquent, elle ne peut avoir la prétention de dégager les idéaux artistiques de l'auteur, cela n'étant possible que par l'étude de l'ensemble de son oeuvre. Toutefois, nous voulons étudier à l'intérieur de Les Mains Sales quelques aspects esthétiques qui nous serviront de tremplin à la compréhension de l'oeuvre.

Par rapport au théâtre contemporain, Sartre caractérise sa dramaturgie d'abord négativement par un certain nombre de refus (mais ce rapport vaut aussi pour son propre théâtre).

Il énonce ainsi :

« Il y a trois refus essentiels dans le théâtre contemporain : le refus de la psychologie, le refus de l'intrigue, le refus de tout réalisme ».12(*)

3.2.1. Le refus de la psychologie

L'homme en effet « est une mine riche en pierre précieuse d'une valeur inestimable »13(*). Cette richesse lui permet d'être maître et possesseur de ce dont-il à besoin. De ce point de vue, la liberté au sens sartrien apparaît pour l'homme comme un besoin existentielle. En d'autres termes, l'homme ne se réfère à rien pour exprimer sa liberté. C'est donc en existant qu'il est libre, donc libre de se faire un caractère selon ses besoins. Réduire un personnage à sa « psychologie » ou à son « caractère », c'est méconnaître que l'individu est d'abord rapport à autrui.

S'agissant de Les Mains sales, il est en effet difficile d'assigner « un caractère » aux personnages. Au cour de sa négociation avec le Prince, Paul et Karsky (p. 138 à 157), Hoederer se met en colère, tient des propos agressifs, veut s'en aller. Bref, il fait une scène qui contraste avec le parfait sang-froid des deux autres. Sans doute pourra-t-on toujours dire qu'il est coléreux, impulsif ou émotif. Mais ce type d'interprétation qui réfère le comportement à des traits de caractère, trahit la pièce.

De même Jessica manie volontiers l'ironie. Mais le comportement ne renvoie pas, là non plus, à un trait de caractère (par exemple le sens de l'humour). Il manifeste l'extériorité du personnage par rapport à un univers qui apparaît souvent comme un monde à l'envers. Les personnages de Les Mains Sales sont caractérisés par leur sexe (homme ou femme) leur origine sociale (bourgeois ou prolétaire), leur âge (jeune ou vieux) donc par des facteurs biologiques ou sociaux et non par des facteurs psychologiques.

3.2.2. Le refus de l'intrigue

Sartre revient plusieurs fois sur l'absence d'intrigue caractéristique de son théâtre contemporain et dénonce sa confusion à l'action :

« L'action telle qu'on l'entend maintenant au théâtre, ça veut dire une construction pratique d'une intrigue par un auteur. Il faut qu'il y ait de l'action ça veut dire qu'il faut que les conséquences découlent d'une manière très vite et très nette de prémices, il faut qu'on devine un peu ce qui va se passer sans quand même le savoir assez etc., et il faut naturellement qu'il y ait un commencement, un milieu et une fin ». 14(*)

L'intrigue selon Sartre a deux caractéristiques ; elle doit obéir à une logique ; les événements doivent être semi prévisibles, ni totalement prévus ni totalement inattendus. Dans Les Mains Sales l'action repose pour l'essentiel sur des effets de surprise. Le lien de cause à effet étant soit absent comme c'est le cas par exemple du meurtre provoqué par le hasard soit n'apparaissant qu'après comme l'attitude de Jessica durant l'épisode de la fouille qui sur le moment est incompréhensible.

Nous pouvons, sans trop caricaturer, dire que les événements se produisent quand on ne les prévoit pas et qu'inversement, ils ne se produisent pas quand on les attend. Hugo est chargé de tuer Hoederer ; il repousse le meurtre de jour en jour et finit par accepter l'aide de celui-ci, c'est-à-dire, en renonçant au meurtre, c'est alors qu'il le tue.

La pièce obéit à deux rythmes temporels : l'instantanéité des événements qui se produisent de façon totalement inattendue (la bombe lancée par Olga, le meurtre de Hoederer, etc.) ; un temps vide au cours duquel il ne se passe rien. Ainsi, au fil des jours, Hugo évoque-t-il constamment son meurtre, sans abandonner le projet ni l'accomplir. Nous avons alors l'impression d'un ralenti cinématographique ; quand il ne va pas trop vite le temps va trop lentement.

3.2.3. Le refus du réalisme

Selon Sartre, le réalisme ne nous présente pas l'homme agissant, mais passif, mû par des forces qui le dépassent. Ce théâtre du déterminisme et de l'impuissance est le contraire du théâtre de la liberté et de l'action que revendique Sartre. Il précise tout de même que le théâtre doit refuser le quotidien et l'individuel. Les gestes et les objets, en effet, jouent un rôle important, bien qu'il soit souvent fait allusion au comportement quotidien des personnages (Hoederer fait son café et sa cuisine lui-même, il fume, il boit, etc.) À tel ou tel trait de leur physique (Hoederer a les yeux vifs, Hugo une mèche) personnages et objets demeurent cependant indéterminés. La présence de l'objet sur scène n'est pas, selon Sartre, nécessaire. Lorsqu'il est là son individualité ne compte (aucun renseignement sur la cafetière de Hoederer ou le revolver de Hugo). Nous ne connaissons des personnages qu'un très petit nombre de caractéristiques corporelles ou biographiques, le plus souvent disparates.

Lorsque Hugo revient de sa première visite à Hoederer, Jessica lui demande un portrait de celui-ci. Nous sommes dans la plus pure tradition théâtrale qui retarde l'apparition du personnage principal et le présente au spectateur avant qu'il ne soit là. Seulement à l'inverse de ce qui se passe ordinairement, le portrait ici en forme de fiche d'identité est vide. Hoederer n'a pas de «signe distinctifs » (p. 61). Nous savons que Hoederer est un pseudonyme, qu'il a été député au Landtag et vivait chez un garagiste. Nous apprendrons qu'il a été marié et c'est tout.

Biographiquement nous connaissons plus d'éléments concernant Hugo qui est à cet égard le personnage le plus `dessiné' : âge, origine, détails sur son enfance, date de son entrée au Parti et autres. Mais toutes ces caractéristiques restent dans une grande indétermination. Nous avons donc affaire à des personnages sans particularités.

3.2.4. La vertu de l'écriture

Si le théâtre de Sartre est bien apprécié c'est à son style qu'il le doit, en particulier dans Les Mains Sales. On a apprécié la modernité de cette pièce, sa grande puissance d'impact qui tient avant tout à l'acuité et à l'intensité de la phrase sartrienne. Cette phrase est très éloignée, bien entendu, de la redondance15(*) oratoire de la tirade. En fait le style sartrien est à l'image de la situation de théâtre qu'il veut exprimer. Le théâtre de situation requiert un certain style qui n'est pas celui de la tragédie classique.

Quels sont donc les caractères de ce style ?

La phrase est simple, le champ lexical réduit, les mots sont bruts, sans la moindre valeur suggestive, mais fortement incisive. Ils expriment des réalités très nettes, et d'abord les termes précis, soit d'une conduite politique, soient d'une alternative ou d'un dilemme. Chaque mot de ce fait a une valeur décisive et exprime de lui-même la totalité de son sens. La phrase exprime des données d'un problème, le plus souvent sous une forme disjonctive, c'est-à-dire, en reliant les idées aux termes ou aux propositions de la phrase.

3.2.5. La valeur incisive et décisive du mot

On remarquera que seuls sont évoqués dans la pièce des problèmes. Il n'y a jamais aucune détente, aucun arrêt, aucun stasimon16(*). Il s'agit de poser les données d'un problème urgent dont la solution ne souffre guerre de délais lesquels sont toujours très courts. On ne se réfère que laconiquement au passé et brièvement à l'avenir : les échéances les plus longues sont de dix jours.

Le style de Les Mains Sales, concis et précis, est l'instrument parfait du jeu tant politique que psychologique des personnages. Sous leur apparence de langage commun, chacune des phrases, chacun des mots non seulement sont riches mais définissent aussi bien un sentiment, un état d'âme qu'une situation donnée avec l'alternative qu'elle propose. Nous pouvons affirmer qu'avec Les Mains Sales Sartre a créé une nouvelle forme de langage, qui est parfaitement un instrument de sa pensée philosophique.

3.3. IDEOLOGIE DE L'OEUVRE : « Les Mains Sales »

Sidibé Valy définit l'idéologie comme étant :

« L'ensemble des idées forces qui fondent et sous tendent l'oeuvre dramatique de l'écrivain (...) Tout acte et en particulier l'acte de création est bien élaboré par l'artiste. La modulation des thèmes au niveau sémantique et l'exploitation que l'écrivain en fait répondent à une attitude idéologique. Ainsi, l'idéologie de l'artiste se fera- t-elle sentir souvent en filigrane sous chaque phrase voire sous chaque mot que l'écrivain produit. L'idéologie imprègne donc consciemment toutes les activités humaines aussi bien dans la pratique économique que dans la pratique politique ».17(*)

Le traitement particulier de l'oeuvre Les Mains Sales de Jean Paul Sartre traduit une idéologie qui apparaît de manière explicite et implicite.

Nous abordons maintenant l'idéologie explicite.

3.3.1. L'idéologie explicite

A la lecture, on constate que l'oeuvre est une simple mise en page des circonstances politiques et sociales qui étaient celles de la guerre et de l'occupation. Cette mise en évidence des conceptions de l'auteur, n'est aucunement gratuite et prétend régir toute conduite humaine. Mais en fait comment se traduit cette idéologie à travers l'oeuvre ?

A présent essayons de présenter l'idéologie de Les Mains Sales.

3.3.1.1. Un théâtre de situation

Le principe du théâtre Sartrien se fonde sur le concept de situation et non pas de destin ou de sort. Le concept de situation s'oppose à celui de caractère chez les personnages qui sont impliqués dans une histoire, voire une sorte d'aventure psychologique, morale ou politique qui leur impose des épreuves que ces personnages n'avaient ni prévues ni choisies et qui sont le fruit du hasard ou le fait du destin.

La situation elle-même est l'ensemble des conditions dans lesquelles se trouve quelqu'un à un moment donné. De là, une extension du concept sous la forme de l'expression « en situation » abondamment employée par Sartre. Etre en situation signifie se trouver dans des circonstances réelles et concrètes, et non dans l'abstrait avec de surcroît la nécessité le plus souvent de résoudre au plus vite cette situation. Etre en situation c'est abandonner toute contrainte, donc d'être libre, quelles qu'en doivent être les conséquences. Dans le cas d'espèce, Sartre pose à travers les personnages de Hugo Barine et de Hoederer un dilemme de liberté en état de situation.

Pour Hugo Barine être en situation signifie se libérer de toute forme de contrainte, soit-elle intérieure ou extérieure. Il n'y a pas de contrainte, là il peut tout faire, il doit seulement s'en convaincre lui-même. Il est également libre de toute responsabilité, il ne pense au fond qu'à lui-même. Etre en situation c'est pour lui être en opposition avec la réalité. La réalité il faut la surmonter à tout prix sinon on n'est pas libre.

La conception de Hoederer, par contre, est une conception qui peut fonctionner en collectivité, tandis que celle de Hugo ne fonctionne que pour l'individu. Pour Hoederer, être en situation signifie avoir des moyens, des ressources. Etre en situation pour lui c'est penser non seulement à soi-même mais aussi aux autres. Même en mourant, il protège Hugo en mentant et en se déclarant responsable pour un acte qu'il n'a pas commis.

3.3.1.2. Un théâtre marxiste

Les Mains Sales réunit tous les traits caractéristiques d'une pièce marxiste. Nous avons à cet effet tous les fondamentaux du credo marxiste. L'exploitation, l'injustice, la lutte des classes, l'incarnation du prolétariat dans le Parti qui de ce fait est infaillible, la nécessaire excommunion des opposants, la damnation éternelle des dissidents.

3.3.1.3. Un théâtre tragique

Dans Les Mains Sales, le héros n'est pas le jouet d'une fatalité aveugle ; il ne s'avance pas dans la voie qui lui serait assignée par un destin hostile ou par une imprévisible décision, serait-elle flatteuse. Mais il est vrai que le tragique c'est lui-même qui le crée par une volonté parfaitement délibérée et nourrie par la double ambition d'être et du même coup d'être libre, ce qui est parfaitement conforme au postulat Sartrien « être, c'est être libre ».

Cette double ambition l'amène à prendre ses responsabilités donc à s'affirmer dans un exploit qu'il lui faut accomplir à tout prix, s'il ne veut pas perdre la face et la vie. Donc le tragique, ici, est la conséquence d'un choix assumé et non pas celle du destin.

3.3.2. L'idéologie implicite

L'idéologie implicite d'une oeuvre dramatique traduit la réalité sous-jacente et subtile du texte. Cela se perçoit après une analyse minutieuse du texte par le biais du discours que tiennent les personnages. L'idéologie implicite est virtuelle, contenue dans l'oeuvre sans être formellement exprimée. On peut la percevoir par déduction.

A la réflexion, Jean Paul Sartre pose dans Les Mains Sales les problèmes à un tout autre niveau. C'est celui d'une stratégie et d'une tactique propres à réaliser un certain projet dont on pense, à tort ou à raison, qu'il est bénéfique pour le plus grand nombre donc pour le pays. Dans Les Mains Sales, le Régent, le Pentagone et le Parti ont chacun leur conception et cherchent à les appliquer.

Dans Les Mains Sales, nous avons une illustration vivante du marxisme avec de grandes stratégies communistes et du socialisme. La pièce présente à cet effet deux types de classes sociales à savoir la classe bourgeoise représentée par le Parti au pouvoir et celle des exploités incarnée par le Parti prolétarien qui se bat pour la démocratie, pour la liberté, pour une société sans classes.

La notion de classe sociale est essentielle dans le marxisme : c'est la base de son analyse critique de la société. Selon le marxisme, il existe principalement deux classes dans la société dite bourgeoise et capitaliste, et qui sont définies par les rapports de production.

La classe des exploiteurs et celle des exploités, autrement dit la bourgeoisie capitaliste et le prolétariat. La bourgeoisie possède et détient les moyens de production, tandis que le prolétariat subit les conditions draconiennes de travail que lui impose la classe dominante.

Dans cet ordre des principes de la politique marxiste, il existe une vérité intangible qui a force de postulat ; le Parti communiste, émanation et incarnation du prolétariat, est infaillible et ses décisions sont sans appel : quiconque s'y opposerait en toute bonne foi et pour les raisons les plus valables, serait réputé traître et traité comme tel. C'est ici le cas de Hoederer, membre influent et Secrétaire Général du Parti prolétarien. Ses camarades du Parti ont estimé à un moment donné qu'il s'éloignait de la droite ligne tracée par le Parti. Il oeuvrait à ce que le Parti prolétarien s'allie à la classe bourgeoise en vue de partager le pouvoir avec celle-ci.

Or le Parti prolétarien exige une fidélité et une soumission aveugle de tous ses membres, en vue de l'objectif unique qui est la prise du pouvoir. C'est donc pour cette raison que Hoederer a été qualifié de traître social.

A cette fin, pour la prise du pouvoir, le seul critère est celui de l'efficacité indépendamment de toute considération morale ou humaine. De ce fait, les dirigeants du Parti peuvent se trouver amenés à travestir la vérité par l'omission, le mensonge et la falsification, et même s'il le faut la « suppression physique de l'adversaire », cet adversaire serait-il un militant ou un dirigeant convaincu. Il peut arriver, en revanche, que le Parti ou certains de ses membres influents se trouvent dans le cas de transiger et de composer, momentanément, avec l'adversaire même « bourgeois ». C'est ce que l'on appellera alors, dans un cas comme l'histoire de notre corpus, de la part des chefs responsables du Parti « se salir les mains », nécessité à laquelle ils se résignent de plus ou moins bon gré, sans que leurs scrupules éventuels ne soient jamais pris en compte.

Quant à l'aspect socialiste de notre corpus, l'on s'en aperçoit à travers les actions menées par Hoederer, actions qui ne peuvent se justifier de socialiste qu'en établissant un rapport avec celles de Hugo Barine.

Etre « socialiste », c'est éprouver un sens aigu de l'existence sociale, en société, et donc une répulsion quasi-instinctive pour tout ce qui privilégie indûment l'individu et l'individualisme, le caractère privé de la proprieté, ainsi que la recherche égoïste par chacun du bonheur individuel. Cet individualisme, c'est ce qu'affichent les libéraux. Avant tout ils sont pour l'épanouissement personnel en tous domaines : intellectuel, moral, économique, politique, culturel et religieux. Ils sont devenus insensibles aux effets de leur choix idéologique et de leur comportement pratique.

Pour Hugo Barine, une urgence se fait voir : sauver et protéger en toute circonstance les intérêts du Parti, seulement le Parti et rien que le Parti. Hugo, de ce fait, est en opposition avec la réalité et fait montre de son individualisme bourgeois qu'il avait avant d'entrer au Parti. : «  Je respecte les consignes, mais je me respecte aussi moi-même et je n'obéis pas aux ordres idiots qui sont faits exprès pour me ridiculiser ». Aussi son individualisme voire égocentrisme se montre tout aussi dans certains aspects de son discours que nous évoquons : « Quand l'armée rouge chassera le régent, nous aurons le pouvoir pour nous seuls ».

A la lecture de ces deux discours et ce, par contraste, nous constatons que Hugo Barine évoque simultanément les pronoms « je » et « nous ». Cette remarque montre combien de fois Hugo ramène tout à lui. Ces nombreuses énumérations contrarient du coup la position sinon le désir de Hugo quand il entrait dans le Parti. : « J'ai adhéré à ce Parti le jour où j'ai compris ce que c'était l'injustice sociale... ». Son aspiration en principe était celui d'oeuvrer pour l'avènement d'une société sans injustice sociale où chacun serait récompensé en fonction de son mérite.

La conception de Hoederer, celle qui nous intéresse le mieux, est celle qui ne peut fonctionner en collectivité, tandis que celle de Hugo ne fonctionne que pour l'individu. Hoederer est celui-là même que l'on qualifie de traître social ; puisqu'il veut collaborer avec le Parti au pouvoir dans l'intérêt du peuple.

Devant l'avancement de l'armée rouge qui se traduit par des destructions massives, Hoederer ne voit qu'une seule issue. Son Parti doit accepter de faire des concessions dans l'intérêt du peuple : accepter les pourparlers organisés par le Régent en vue de collaborer avec la classe bourgeoise.

L'avantage pour Hoederer, à travers cet acte, réside en une simple protection du peuple pour lequel on lutte.

De même, en mourant, il protège Hugo en mentant, en se déclarant responsable pour un acte qu'il n'ait pas commis.

A travers cette défense il refuse les intérêts individualistes et collectivistes aveugles. Il défend la personne humaine qui n'est pas seulement individualiste mais aussi sociale.

Conclusion Partielle

Tout au long de cette première partie de notre travail, nous avons remarqué que la maîtrise d'un certain nombre d'éléments techniques ou méthodes d'analyse contribue à une meilleure compréhension de l'oeuvre dramatique.

Ainsi, abordant l'oeuvre théâtrale Les Mains Sales, nous pouvons révéler dans un premier temps que Sartre a donné une dimension existentialiste, caractéristique de sa pensée fondamentale. Selon Sartre la liberté est une donnée existentielle. C'est en vivant que l'homme donne sens à sa vie. En dépit de cette considération d'ordre philosophique, nous avons jugé utile de mettre l'accent sur les éléments dramaturgiques de l'oeuvre en vue d'en faire une analyse.

L'oeuvre présente une structure ambiguë. Cette ambiguïté témoigne d'une grande habileté de la part de l'auteur de se démarquer des règles classiques dans la perspective d'une nouvelle dramaturgie. De même le refus de la psychologie, de l'intrigue, du réalisme, la vertu de l'écriture par l'auteur de Les Mains Sales est une preuve l'inscrivant véritablement dans la nouvelle dramaturgie. Ce type de dramaturgie, loin de toute forme de règle en matière d'écriture, donne la latitude au créateur de ne pas se laisser guider par une force qui lui est extérieure. Enfin, quant à l'idéologie qui se dégage, il nous paraît important de souligner que l'oeuvre présente des traits de caractères propres au marxisme. A cela s'ajoute aussi les grandes stratégies communistes qui en résultent.

Avant de développer notre thème, il nous semble important de donner un aperçu du concept de la psychanalyse.

« J'ai éprouvé autant de fatigue, de souci, d'intérêt

et de passion pour certains personnages de

théâtre que pour les patients que je soignais

comme psychiatre. »

Yves THORET : La Théâtralité. Etude freudienne,

Paris, Dunod, 1993.

DEUXIEME PARTIE

BREF APERÇU

DU CONCEPT DE LA PSYCHANALYSE

CHAPITRE I

DEFINITIONS, HISTOIRE ET VOCABULAIRE DE LA PSYCHANALYSE

Parler de la méthode d'approche psychanalytique revient à parler de la psychanalyse, Et ce dans le but de nous permettre de prendre connaissance avec elle pour mener à bien notre étude.

Partant donc de ce fait, ce chapitre sera dominé par de différentes définitions et de l'histoire de la psychanalyse, d'un aperçu des caractéristiques du psychisme humain, de la signification psychanalytique des actes manqués, de la sexualité infantile et de la conception psychanalytique des maladies mentales pour aboutir enfin au choix de la méthode qui nous sera utile dans notre analyse.

Certes, cette démarche paraît quelque peu fastidieuse mais nous la jugeons utile. Car elle va nous permettre de nous familiariser avec un certain nombre de concepts utilisés dans le domaine de la psychanalyse avant même l'analyse du personnage de Hugo Barine.

1. Définitions de la psychanalyse

La meilleure définition qu'on puisse donner de la psychanalyse est sans doute celle qu'avait énoncée Freud en 1922 :

« La  psychanalyse est le nom :1) d'un procédé d'investigation des processus psychiques qui autrement sont à peine accessibles ; 2) d'une méthode de traitement des troubles névrotiques qui se fonde sur cette investigation ;3) d'une série de conceptions psychologiques acquises par ce moyen et qui fusionnent progressivement en une discipline scientifique nouvelle.»18(*)

A la lumière de ces définitions, le terme désigne tout à la fois une démarche de connaissance du fonctionnement psychique, une thérapeutique et une théorie. Chacun de ces concepts demande cependant à être précisé.

§ La psychanalyse est « Un procédé d'investigation des processus psychiques qui autrement sont à peine accessibles».19(*)

Par «processus psychique », on entend à peu près tout ce qui se passe au niveau du psychisme. Mais qu'est ce que le psychisme ?

La meilleure réponse est sans doute de considérer qu'en tout être humain fonctionne ce que Freud a à juste titre nommé un « appareil psychique », c'est-à-dire un système organisé, qui obéit à certaines lois de fonctionnement et sert un certain nombre de buts (ce sont ses «fonctions»). Les processus psychiques, désignent tout ce qui peut survenir au sein de l'appareil psychique : sensations, émotions, raisonnements logiques, etc.

Aussi faudra-t-il savoir que la démarche que Freud désigne comme «psychanalyse » porte sur ces processus dit « autrement à peine accessibles » parce que, à la différence d'autres approches, il considère que pour une large part, ces processus sont inconscients, c'est-à-dire restent inconnus du sujet lui-même.

§ La psychanalyse est « une méthode de traitement de troubles névrotiques qui se fonde sur cette investigation ».20(*)

Le terme « névrose » est hérité de la psychiatrie du XIXe siècle. A cette époque l'on croyait que ces troubles (de l'humeur, de la pensée, de la conduite) étaient dus à une « inflammation des nerfs », mais aujourd'hui cette conception naïve est abandonnée et le terme « névrosé » désigne des troubles de l'appareil psychique. S'agissant des névrosés Freud fait deux distinctions possibles à savoir, d'une part «les psychonévroses» (hystérie, phobies) et d'autre part les «névroses actuelles» développées sous l'impact d'un traumatisme violent, d'une privation sexuelle insupportable, etc.

§ la psychanalyse est aussi « une série de conceptions psychologiques acquises par ce moyen et qui fusionne progressivement en une discipline scientifique nouvelle ». 21(*)Autrement dit, un corps de connaissances, patiemment élaboré, qui s'efforce de rendre compréhensibles des phénomènes observables (les processus psychiques) tout en assurant au mieux sa cohérence interne ; et ceci par des démarches rationnelles.

Maintenant essayons de donner un aperçu de l'histoire de la psychanalyse.

2. Histoire de la psychanalyse

La psychanalyse a pour fondateur Sigmund Freud, un viennois né en 1856 et mort en 1939. Il est l'inquisiteur de l'inconscient. Il faut rappeler que pendant ses études, Freud a suivi le cursus suivant : neurologie, hypnose, étude clinique des troubles de langage. Il a travaillé avec le Docteur Joseph Breuer à qui il attribue personnellement la paternité de la psychanalyse.

Ce ne fut pas facile pour Freud de faire accepter sa méthode thérapeutique à son entourage. Pour Freud la méthode cathartique utilisée par Joseph Breuer qui consiste à mettre le patient sous hypnose afin de découvrir l'origine des symptômes hystériques est un procédé incertain car elle ne permet de réduire que temporairement les contractures hystériques.

Face à une telle position entre Joseph Breuer et Freud le divorce sera désormais consommé.

A ce procédé Freud va désormais ajouter la méthode cathartique sans hypnose. Ce procédé consiste à favoriser la remémoration en invitant le patient à dire librement ce qui lui vient à l'esprit. Parallèlement Freud pense aussi qu'à travers cette démarche thérapeutique il faudra accepter l'importance de la dynamique sexuelle dans le développement de la psychopathologie.

Chez Freud il faut faire la différence entre la sexualité comme processus dynamique qui part de la naissance à l'adolescence et la sexualité comme union des sexes.

Cette approche permettait de comprendre également ce qu'est la phobie nommée hystérie d'angoisse.

Pour faire émerger sa conception, Freud s'est mis à former des disciples, et les premières écoles de psychanalyse commençaient à se créer en Europe et en Amérique. Depuis lors, la psychanalyse a envahi d'autres disciplines de connaissances. Ainsi pouvons-nous énumérer entre autres : l'éducation, la littérature, les arts en général et le théâtre en particulier. Les travaux psychanalytiques continuent sans répit dans toutes les directions.

3. Bref aperçu du vocabulaire des termes psychanalytiques

En dehors de certains termes que nous avons définis préalablement nous présentons ici d'autres termes que l'on rencontre en psychanalyse.

3.1 Le refoulement

C'est le fait de repousser ou de maintenir dans l'inconscient des représentations (pensées, images et souvenirs) liées à une pulsion. Il se produit quand la satisfaction d'un besoin risquerait de provoquer du déplaisir à l'égard d'autres exigences. Selon Freud « la théorie du refoulement est la pierre d'angle sur quoi repose tout l'édifice de la psychanalyse ».22(*)

3.2. Les complexes

Ce sont un « Ensemble organisé de représentations et de souvenirs à forte valeur affective, partiellement ou totalement inconscient. Un complexe se constitue à partir de relations interpersonnelles de l'histoire infantile ; il peut structurer tous les niveaux psychologiques : émotions, attitudes, conduites, adaptées».23(*)

Il y a des complexes très utiles pour la psychanalyse : le complexe d'Oedipe (ensemble organisé de désirs amoureux et hostiles que l'enfant nourrit à l'égard de ses parents).

Le complexe d'infériorité (ensemble des attitudes, des représentations et des conduites qui sont des expressions plus ou moins déguisées d'un sentiment d'infériorité); le complexe d'Electre (terme employé par JUNG comme synonyme du complexe d'Oedipe féminin pour une symétrie chez les deux sexes de l'attitude à l'égard des parents). Le complexe de castration, celui venant apporter une réponse à l'énigme que pose à l'enfant la différence anatomique des sexes (présence ou absence du pénis). Le garçon subit la menace paternelle en réponse à des activités sexuelles : d'où une intense angoisse de castration. Chez la fille, l'absence du pénis est ressentie comme un préjudice qu'elle cherche à nier, compenser ou réparer.

3.3. Le rêve

C'est la voie royale qui mène à l'inconscient. C'est l'accomplissement d'un désir. C'est un scénario imaginé à l'état de sommeil. L'analyse de son contenu nous fournit le contenu latent de ce scénario.

3.4. Le fantasme

C'est la représentation imaginaire de la réalisation d'un désir, qui ne tient pas compte de la réalité.

3.5. La censure

C'est la fonction psychique inconsciente qui fait barrage à l'entrée dans le système conscient des formations du système inconscient. Freud rapportera ensuite cette formation de censure à l'activité  d'une instance psychique particulier : le «surmoi».

CHAPITRE II

CARACTERISTIQUE DU PSYCHISME HUMAIN

Dans le souci de mieux cerner les composantes de l'appareil ou du champ psychique, nous montrerons ici, à travers un schéma, ses différentes caractéristiques et leurs spécificités. Mais bien avant, rappelons qu'en tout être humain fonctionne ce que Freud a nommé un « appareil psychique », c'est-à-dire un système organisé qui obéit à certaines lois de fonctionnement. Précisons aussi que les découvertes dans le domaine de la psychanalyse étant évolutives, nous sommes allés d'un premier schéma appelé «première topique », chaque topique ayant sa spécificité, pour aboutir à une seconde topique.

Dans le cadre de notre recherche, et ce pour des raisons d'objectivités, nous avons opté pour le choix de la « deuxième topique » que nous essayerons d'expliquer parce qu'elle traduit le mieux possible les éléments psychiques que nous recherchons pour déterminer les comportements humains. En effet par topique, il faut entendre la partie de la théorie psychanalytique qui envisage la personnalité et la conduite sous l'angle de trois groupes de motivations et d'actions généralement opposés dans le conflit : le moi, le ça, et le surmoi. Précisons à cet égard notre schéma psychique.

1. Description dynamique de deux topiques

1.2 Description dynamique de l'appareil psychique selon la première

topique

 

Conscient

X X

Préconscient

X X

Inconscient

X

X X

X

1.2. Description dynamique de l'appareil psychique selon la

deuxième topique.

2. Explication des caractéristiques psychiques

La seconde topique ne vient pas contredire la première topique. Elle propose une diversification de l'explication et peut être superposée à la précédente. Elle compte trois instances : le "ça", le "moi" et le "surmoi".

§ Le "moi" doit assurer une adaptation à la réalité, là ou le "ça" ne se préoccupe pas des contraintes extérieures mais le "moi" est aussi le responsable de nombreuses « défenses » pathologiques. Il en est de même de la personne dans sa globalité, la raison et le narcissisme.

§ Le "ça" est le lieu où éclosent les pulsions, le réservoir à libido, il est totalement inconscient.

Freud le définit comme

« La partie obscure, impénétrable de notre personnalité ; nous nous le représentons débouchant dans la somatique et y recueillant les besoins pulsionnels qui trouvent en lui leur expression psychique»24(*)

§ Le "surmoi" est l'intériorisation de l'interdit. Le "surmoi" se constitue comme le pôle de l'auto agression, l'auto critique. Mais le moteur qui dynamise tout cet appareil est la pulsion. La pulsion elle-même est une énergie animant une poussée. Autrement dit un déplacement et une direction de ce déplacement.

L'inconscient, le préconscient, et le conscient sont les composantes de la première topique. Mais quel rapport y a-t-il entre les systèmes de la première et les instances de la seconde topique ?

§ Inconscient- ça:

Au sens « topique », l'inconscient désigne l'un des systèmes définis par Freud dans le cadre de sa première topique. Dans le cadre de la deuxième topique, le terme inconscient n'est plus le propre d'une instance particulière puisqu'il qualifie le "ça" et pour une part le "moi" et le "surmoi". Mais il convient de noter que les caractères reconnus dans la première topique sont attribués au "ça" dans la seconde.

§ Préconscient - surmoi et moi :

Le préconscient est le terme employé par Freud dans sa première topique. C'est un système de l'appareil psychique. Il est séparé du système inconscient par la censure qui ne permet pas au contenu et au processus inconscient de passer dans le préconscient sans subir de transformations. Dans le cadre de la deuxième topique, il est utilisé pour qualifier ce qui échappe à la conscience actuelle. Du point de vue systématique, il qualifie aussi des contenus et des processus rattachés au "moi" pour l'essentiel et aussi au "surmoi".

3. LA SIGNIFICATION PSYCHANALYTIQUE DES ACTES MANQUES

3.1. Les lapsus

Ce sont des perturbations dans l'emploi de notre langue, éventuellement d'une langue étrangère, dont on va démontrer qu'elles contiennent très généralement un sens que nous ne souhaitons pas exprimer. Ainsi allons-nous énumérer à ce sujet quelques exemples, à savoir :

3.1.2. Erreurs de nom

Il nous est arrivé, et quelle gêne avons-nous alors ressentie, d'appeler une personne d'un autre nom que le sien, et c'est justement celui de la maîtresse, alors que l'on s'adressait à l'épouse. Et pourtant, nous avons précisément pensé au problème avant la rencontre.

3.1.3. Utilisation d'un mot pour un autre

Nous accomplissons une tâche pénible, en présence d'un familier ; et très aimablement, nous lui avons demandé : « Pourriez vous avoir la gentillesse de me donner un coup de pied ? ».

On devine l'étonnement de l'interlocuteur. Bien entendu, nous aurions du dire un coup de main. Quant au coup de pied, c'est nous qui avions envie de le donner, à ce paresseux, qui nous regardait travailler si passivement.

3.1 .4 . Remplacement d'un mot par son contraire

C'est un phénomène particulièrement fréquent.

Freud cite cet exemple célèbre du président de la chambre des députés autrichienne, qui ouvrit la séance par ces mots : « Messieurs, je constate la présence de tant de députés que je déclare, par conséquent, la séance close. » L'hilarité générale que sa déclaration suscite lui permit de corriger immédiatement son erreur. Il semble ici que ce président, qui craignait le déroulement de cette séance, ait laissé échapper une partie de sa pensée. Son désir secret était de voir cette séance se terminer au plus vite.

Ces quelques cas nous indiquent déjà que le lapsus est une manifestation ayant son contenu et sa signification propre. Cet acte « manqué », ne l'est pas autant qu'il pourrait y paraître ; il traduit une intention qui existe réellement chez celui qui s'exprime. C'est souvent une intention peu avouable, en tout cas peu compatible avec la vie en société, telle que nous sommes habitués à la concevoir.

3.1.5 Les erreurs d'écriture

La psychanalyse met en évidence les fautes, que l'on n'a pas grande envie d'écrire et qu'on est impatient d'en finir.

Par exemple, les fausses dates sur les lettres que nous écrivons : la fausse date, traduit par le jour, le mois, voire l'année, une pensée qui nous est chère, parfois pénible, toujours importante. Un désir de voir approcher les vacances, la crainte d'une échéance, le regret d'un événement passé, ou encore ces adresses, qu'on nous avait correctement communiquées, et que nous avons transcrites de travers.

A l'examen, nous découvrons, la crainte que nous inspirait cette démarche, une impression déplaisante, etc.

Il est pratiquement rare que nous commettions ce genre d'erreurs quand il s'agit d'accomplir une action qui nous est agréable. Si cela était, nous sommes en mesure d'affirmer que c'est en raison d'un sentiment de culpabilité lié à ce plaisir égoïste que nous allons accorder, comme une sorte d'autopunition.

CHAPITRE III.

LA SEXUALITE INFANTILE ET LA CONCEPTION

PSYCHANALYTIQUE DES MALADIES MENTALES

1. La sexualité infantile

Chez l'enfant on retrouve en germe, toutes les caractéristiques de ce qui plus tard sera appelé perversion.

Tous les fantasmes refoulés, des névrosés, acceptés de l'homme normal, existent tout d'abord chez l'enfant, et c'est chez lui que se détermine leur devenir.

Il nous paraît important avant d'entrer dans le vif du sujet de définir ce que Freud entendait par sexualité.

Il ne s'agit pas du sens commun limité aux actes sexuels, aux choses indécentes ou perverses. Freud rattache la sexualité à la notion de libido, qui est à la sexualité ce que la faim est à la fonction digestive. Cet instinct sexuel ou libido pousse l'homme à satisfaire une excitation qui ne peut être soulagée que par des pratiques d'ordre sexuel.

1.1. Le stade de développement de la sexualité infantile

Nous allons étudier successivement quelques phases utiles de développement sexuel de l'enfant et nous nous devons de souligner ce point particulièrement intéressant.

Chaque phase de son développement apparaît dominant dans toute l'existence du sujet, définissant ainsi les différents caractères.

1.2. Le stade oral

« Quand on a vu l'enfant rassasié, abandonner le sein, retomber dans les bras de sa mère,et (...) avec un sourire heureux, s'endormir, on ne peut manquer de dire que cette image reste le modèle de l'expression de la satisfaction sexuelle qu'il connaîtra plus tard ».25(*)

Ainsi s'exprime Freud quand il traite du plaisir de la succion, qui caractérise le stade oral. En effet, tous les caractères du plaisir sexuel se trouvent dans cet acte : désir, excitation, plaisir, apaisement de l'excitation.

L'enfant éprouve le maximum de plaisir à ce stade soit en suçotant une partie de lui-même, soit un objet extérieur à lui, mais qu'il peut maîtriser : tétine, oreiller, couverture.

On constatera cependant par la suite que tous ceux qui ont été des enfants suçoteurs seront intéressés par le baiser mais seront également des fumeurs, etc.

Cette pulsion pourra aussi parfois être refoulée c'est-à-dire refusée par l'adulte qui mettra alors au premier plan toutes les exigences de son milieu immédiat.

1.3. Le stade anal

Ce stade vient à la suite de la phase orale. C'est la découverte par l'enfant du plaisir ressenti en retenant, ou en évacuant au contraire des selles.

Nous trouvons ainsi tous les caractères de l'excitation par frottements, puis du soulagement par évacuation. Un caractère est particulier à ce plaisir : l'enfant peut maîtriser son activité anale qui reste dépendante du rythme qu'il peut choisir et de son désir.

Toutefois, l'enfant n'est pas indifférent aux sollicitations de sa mère, par exemple. Il perçoit rapidement qu'il provoque chez elle l'angoisse en retenant trop ses selles et au contraire qu'il lui fait plaisir en évacuant ses selles.

1.4. Le stade génital

Il est curieux de constater que, au début de l'existence de l'enfant, les organes génitaux ne sont pas le siège des sensations de plaisir les plus importantes.

Ils ne viennent qu'en troisième position, après les lèvres et l'anus.

La découverte du pénis chez le garçon, du clitoris chez la jeune fille, se fait à l'occasion de l'activité urinaire, mais aussi par la manipulation par l'enfant lui même ou par sa mère. Le plaisir découvert, il entraîne le besoin de répéter l'excitation, qui a donné du plaisir. Celui qui a connu un plaisir n'a de cesse de le répéter et de préférence le reproduire par lui-même, c'est à dire maîtriser la quantité du plaisir qu'il peut se donner.

C'est ce qu'on appelle la masturbation ou onanisme.

Ces gestes sont reproduits plus tard en pleine conscience, ce sera la masturbation du garçon, par frottement de la verge, et pour la fille, par attouchement du clitoris.

Ce processus peut être refoulé, ce qui entraîne alors souvent des troubles de caractères, des cauchemars, etc.

1. La conception psychanalytique des maladies mentales et les traits

de caractères qui en résultent

Tous les humains ont des traits de caractères qui rappellent que l'inconscient n'existe pas que chez les malades mentaux. Ceci a permis d'établir une typologie, c'est-à-dire de classer les humains en grands types de caractères.

Très souvent, le caractère d'une personne présente des traits de plusieurs types. Nous étudierons successivement les caractères : narcissiques, phobiques, obsessionnels, paranoïaques, hystériques, cycliques et shizoïdes.

2.1. Le caractère narcissique

Il est caractérisé par l'amour de soi.

Ce sont des sujets confiants en eux-mêmes, parfois agressifs, arrogants, provocants, parfois courageux.

Il est curieux de constater que ce sont les personnes les plus préoccupées d'elles-mêmes qui déclenchent le plus aisément un réflexe amoureux chez les autres.

2.2. Le caractère phobique

Le phobique se conduit dans la vie de façon à éviter systématiquement les situations qu'il avait primitivement désirées.

Le comportement phobique traduit un désir de punition, en s'interdisant une activité qui pourrait être génératrice de plaisir, donc de culpabilité.

Ainsi certains caractères sont assimilés à ce type de structure : la timidité, la difficulté à apprendre, à travailler, à s'exprimer, le désintérêt pour la musique, la peinture, etc.

2.3. Le caractère obsessionnel

Ce sont des sujets sur lesquels on peut compter. Ils sont fidèles, sérieux, tolérants, travailleurs, méticuleux. Ces sujets sont peu spontanés réservés, peu chaleureux, peu expansifs. De même, ils ont un net penchant pour les activités intellectuelles et pour les plaisirs sublimés, les discussions, les critiques.

Aussi, recherchent-ils souvent la perfection au détriment du coté créateur, qu'ils répugnent. Ils font souvent plus que l'on ne leur demande, de façon à paralyser l'autorité sous une apparente soumission.

2.4. Le caractère paranoïaque

L'univers de l'individu est fait de  méfiance, de crainte, de rancoeur, d'inquiétude, de soupçon, de sentiment pénible d'être incompris par ses semblables, d'être isolé parmi les hommes.

Le trait commun, dans cette catégorie est une surestimation de soi. Son raisonnement est faux, mais il ne supporte pas la contradiction. Il démontrera le moindre fait, pour prouver une intention cachée plus ou moins malveillante.

Il est évident que les relations sociales sont difficiles. De même, il se défend de ses propres désirs, en les prêtant volontiers à son entourage.

S'il se déteste lui-même d'avoir un amour pour une autre personne, il prêtera à cette personne les intentions les plus malveillantes.

2.5. Le caractère hystérique

Si le caractère obsessionnel se retrouve plus volontiers chez l'homme, la femme a l'apanage du caractère hystérique. C'est ce que l'on appelle communément une « nerveuse ». Elle est émotive, impressionnable, sujette aux crises de nerfs. Elle absorbe l'intérêt de l'entourage par ses caprices, sa vanité, son don de raconter une histoire qui va jusqu'à la fabulation et au mensonge. Les échecs de ses tentatives de séductions se traduisent souvent par des gestes spectaculaires, du tapage, de la colère, du désespoir, voire, une tentative de suicide.

Mais il ne faut pas s'y tromper : cette séduction, ces efforts sont l'unique activité sexuelle déplacée de ces sujets. En fait, ces manifestations masquent une peur de réaliser l'acte sexuel lui-même. Elle érotise ses rapports avec tout son entourage, pour ne pas agir dans la réalité, pour ne pas faire face aux conséquences logiques de son attitude ; c'est une « allumeuse ». Profondément, il y a donc un conflit entre des pulsions sexuelles exigeantes et des interdits dont la source remonte à l'enfance.

2.6. Le caractère cyclique

Ce sont des sujets dont l'équilibre est très fragile. Ils passent en un instant de la jubilation et l'excitation joyeuse, à la dépression la plus noire.

Ce qui les caractérise, c'est un énorme besoin d'être aimé. Dès qu'ils ont trouvé une affection, ils ont un sentiment de triomphe, sans pour autant penser à rendre cette affection. Leur avidité est énorme, et si elle n'est pas satisfaite, au moindre avatar, ils ressentent une impression douloureuse d'abandon, de solitude, qui peut disparaître au moindre espoir de reconquête amoureuse.

2.7. Le caractère shizoïde

Il est tyrannique et exigeant pour ses proches.

Dans ses contacts avec autrui, il apparaît bizarre, fuyant, attirant guère la sympathie. Il a parfois des passions, souvent rattachées à des idéaux élevés, confus. En d'autres termes on pourrait dire que c'est l'état du mental caractérisé par la tendance à la solitude, au repliement sur soi-même, à la rêverie, et par une difficulté d'adaptation aux réalités externes.

CHAPITRE IV

CHAMP D'ORIENTATION ET PRESENTATION

DE LA METHODE D'APPROCHE

PSYCHANALYTIQUE

En considérant les définitions que nous avons données au sujet de la psychanalyse, nous pouvons retenir que la psychanalyse est une discipline qui vise à expliquer tout ce qui est de l'ordre de l'inconscient dans les paroles, les actions, les productions imaginaires d'un individu donné.

Dès lors « l'approche psychanalytique » serait l'étude explicative des phénomènes inconscients issus de la décomposition des éléments psychiques du sujet.

Parallèlement à d'autres disciplines scientifiques, la psychanalyse a connu une évolution pour parvenir à ce qu'elle soit aujourd'hui. Ses procédés techniques ont eux aussi connu beaucoup de changement.

1. La méthode cathartique et la méthode de la simple suggestion

Dans ses débuts, la psychanalyse était basée sur la méthode cathartique. Celle-ci fut trouvée à la suite de l'examen d'une malade nommée Anna O...

Anna O... fut une hystérique tout à fait exemplaire. Elle était soignée par le Dr Breuer, ami de Freud. Jeune (elle avait vingt et un an), intelligente et belle, elle avait vu ses troubles apparaître après la mort de son père. Le symptôme le plus étonnant était sa capacité de passer d'un état conscient ou elle était normale et pleine de vivacité à un autre état de conscience, où elle avait le comportement d'une petite fille insupportable et mal élevée. Breuer, en examinant sa patiente, avait découvert que chaque fois que Anna O... évoquait un symptôme et qu'elle en trouvait la cause, le symptôme disparaissait.

Ainsi naquit une technique que Breuer appela « catharsis » ce qui signifie « purge de l'âme » ; cette méthode est tirée de la catharsis d'Aristote au sujet de la tragédie. Ce fut la première méthode.

Au fil du temps Freud va renoncer à la méthode hypnotique. Il lui substitue :

« La simple suggestion (aidée par un artifice technique une pression sur la main du patient) destinée à convaincre le malade qu'il va retrouver le souvenir pathogène ».26(*)

Finalement, l'inquisiteur de l'inconscient ne recourra plus à la suggestion ; il se fiera tout simplement à une autre méthode avec de nouveaux procédés techniques : plus d'hypnose, plus de main sur le front. Cette méthode s'appelle la méthode ou la règle de la libre association suivie de l'interprétation.

2. La méthode de la libre association

S'agissant de la méthode de la libre association il convient de mentionner l'origine de ce concept.

 Les idées, disait Aristote, «  sont associées par contiguïté, esimilarité et contraste ».

Plusieurs d'autres philosophes ont, depuis, développé le concept d'association d'idées, mais c'est à Freud que revient le nouvel élan donné à l'usage de ce concept et son utilisation comme technique de base dans la psychanalyse.

Freud « se rendit compte qu'il était possible de déduire des éléments d'information sur les déterminants inconscients du comportement, en encourageant l'association libre et sans restriction chez les patients... »27(*)

La méthode de la libre association, enfin, est la règle fondamentale.

Maurice Bouvet l'énonce ainsi : 

« Le sujet, mis dans les meilleures conditions pour que puisse se dérouler librement le jeu de sa pensée, doit verbaliser sans aucune idée préconçue et sans rien omettre, tout ce qui lui revient à l'esprit : non seulement les pensées, les images, mais aussi les affects, les envois, les sentiments, tout aussi bien d'ailleurs que les impressions sensorielles ou sensitives dont il est objet ».28(*)

De façon plus claire, cette règle consiste à exprimer sans discrimination toutes les pensées qui viennent à l'esprit (mort, nombre, image, rêve, représentation quelconque) soit à partir d'un élément donné soit de façon spontanée.

L'interprétation qui s'en suit désigne une mise en évidence du contenu latent du récit d'un patient. Elle vise le «désir et le fantasme » qui se formulent dans toute production inconsciente.

S'agissant de la libre association, elle fut d'une grande utilité dans l'élaboration de la théorie freudienne. Freud en l'utilisant dans son auto analyse permet à l'humanité de ne jamais s'étonner devant un quelconque comportement mais à travers des procédés techniques résultant de cette méthode de savoir l'interpréter, et ce afin d'y remédier. Elle permet à Freud d'étudier Oedipe-Roi de Sophocle, trouvant là une explication à son comportement d'enfance : l'amour pour le parent de sexe opposé et les sentiments de haine envers le parent de même sexe. C'est en ces termes qu'il s'explique : 

« J'ai trouvé en moi comme partout ailleurs des sentiments d'amour pour ma mère et de jalousie envers mon père, sentiments qui sont, je pense, communs à tous les jeunes enfants. S'il en est bien ainsi, on comprend, en dépit de toutes les injonctions rationnelles qui s'opposent à l'hypothèse d'une inexorable fatalité, l'effet saisissant d'Oedipe-Roi .Chaque auditeur fut un jour en germe, en imagination un Oedipe et s'épouvante devant la réalisation de son rêve transposé dans la réalité, il frémit suivant toute la mesure du refoulement qui sépare son état infantile de son état actuel ».29(*)

Il en est de même pour la dynamique des états psychologiques en clinique. C'est le fait de Le Roi Lear de Shakespeare.

Cette pièce révèle « la mise en oeuvre des mécanismes psychologiques puissants, mobilisant les tréfonds de l'âme».30(*)

Notons que la « folie » du Roi permet d'expliquer ce mécanisme clinique. Ces découvertes sont de l'histoire de Lear, dans l'analyse de son comportement.

Voilà ce qui nous conduit vers la méthode d'approche psychanalytique pour analyser le personnage de théâtre. Ainsi, contrairement au malade en clinique qui raconte tout ce qui lui vient à l'esprit, c'est l'histoire du personnage, ses rapports avec les autres, son cadre de vie, ses actes posés, qui constitueront notre support analytique.

Pour ce faire, une lecture seconde est nécessaire et obligatoire.

Cette technique est analogue à celle de la libre association. Mieux c'est son adaptation à l'étude théâtrale. Ensuite un autre procédé obligatoire s'impose : l'interprétation. Pourquoi un tel comportement ? Qu'est ce qu'il signifie pour le psychanalyste ? Quel rapport peut-il y avoir entre l'inconscient et l'acte posé ?

Conclusion partielle

La psychanalyse a pour domaine d'étude le psychisme humain. Elle apporte une ou des explications aux réactions anormales du psychisme régissant nos comportements. A cette définition, nous avons jugé utile de préciser le rôle déterminant de la sexualité dans le développement des caractères ultérieurs. C'est à travers la cure psychanalytique, au moyen de l'association libre, que le sujet peut retrouver tous ces facteurs qui ont été sur le moment sans importance.

La méthode de la libre association que nous avons choisie est une méthode essentielle dans l'analyse psychique du patient. Cette analyse appliquée au personnage de théâtre ne sera possible que grâce à l'histoire du personnage, et surtout à ses tendances.

La méthode d'approche psychanalytique ainsi présentée, nous ferons son application pratique à l'étude de notre personnage (Hugo Barine). Cette étape constituera la dernière partie de notre étude.

«  Les poètes et les romanciers sont, dans la connaissance de l'âme, nos maîtres à tous (...) notamment en matière de psychologie, parce qu'ils s'abreuvent à des sources que nous n'avons pas encore rendues accessibles à la science. Ce sont de précieux alliés et il faut tenir leur témoignage en haute estime car ils connaissent, entre ciel et terre, bien plus de chose que n'en peut rêver notre sagesse d'école. »

Sigmund FREUD : Délire et rêves dans la

Gradiva de Jensen, Paris, Gallimard, 1986

TROISIEME PARTIE

APPLICATION DE LA METHODE D'APPROCHE PSYCHANALYTIQUE

A L'ETUDE DU PERSONNAGE DE HUGO BARINE

Il s'agit pour nous de faire l'application de la méthode psychanalytique présentée à la fin de la deuxième partie de notre travail. Cette analyse, s'appuyant sur la connaissance de la psychanalyse, des mécanismes psychiques, cherche à ;

- "Fonder dynamiquement la personnalité de l'individu d'après ses réactions";31(*)

- "Dévoiler aussi bien ses forces psychiques, primitives que leurs transformations et développements ultérieurs"32(*)

Ce but visé par l'approche psychanalytique n'est possible que grâce à un certain nombre de données ;

v D'une  part, le hasard des événements et l'influence du milieu ;

v De l'autre, les relations connues d'un individu donnée

Pour notre travail, nous avons choisi la méthode de la libre association. Elle s'effectuera dans l'ordre suivant :

- Elucidation des différentes définitions du personnage et leurs traits de caractérisation.

- Rappel de l'histoire de Hugo Barine.

- Les Grandes tendances de Hugo Barine suivies de l'interprétation psychanalytique.

CHAPITRE I 

LE PERSONNAGE

I. Définitions

Trouver la définition idéale du personnage, c'est partir de plusieurs définitions à son sujet. Cependant, notre étude est basée sur le théâtre. Ainsi la définition idéale se doit bien sûr de se rapprocher d'une définition générale du personnage dans les oeuvres littéraires, car le théâtre est avant tout une oeuvre, un texte. Dans le Dictionnaire Le Robert, le personnage connaît quatre définitions. La première correspond à `'une personne qui joue un rôle social important et en vue `'. La seconde le présente comme étant une `'personne qui figure dans une oeuvre théâtrale et qui doit être incarnée par un acteur ou une actrice `'. La troisième définition le considère comme une personne considérée quant à son comportement. Cette dernière définition dit que c'est un `'être représenté dans une oeuvre d'art `'.

Selon Roland Barthe, c'est un `'être de papier''. C'est donc dire que son existence est limitée aux oeuvres littéraires.

Notons de prime abord que l'expression `'personnage `'est une métaphore, car il n'existe pas en réalité. Toutefois nous retiendrons que le personnage est un être qui a vu le jour sous la plume d'un quelconque dramaturge (ou écrivain en général) en qui l'on voit une personne qui joue un rôle social important ; une personne considérée quant à son comportement; un être humain représenté dans une oeuvre d'art.

Nous venons de définir brièvement le personnage. Mais quels sont les traits de caractérisation du personnage ?

2. LES TRAITS DE CARACTERISATION DU PERSONNAGE

2.1. Une construction textuelle

Dire de quelque chose qu'il est une construction textuelle, c'est affirmer qu'il est créé à partir des écrits d'un écrivain.

Ainsi quand Anne Ubersfeld définit le personnage comme étant `'un être de papier `', elle admet son caractère textuel. En effet, le personnage de théâtre est en premier ressort le produit fini de l'imagination du dramaturge. Il vit donc dans l'oeuvre. Il entretient des rapports avec son environnement ; il parle sans se faire entendre. Il ne communique avec l'extérieur que par la lecture. Dès lors il est discours, signe, élément textuel que la sémiologie se chargerait d'étudier.

Etant construction textuelle le personnage de théâtre possède un « moi », mais un moi de papier car propre à l'être de papier. Un élément important à relever : son monde est un monde du possible.

Vivant dans ce monde, il a un caractère fictif. Phèdre (de Racine), Nahoubou (Bernard Dadier), Prométhée (Eschyle), Tino aga (JP Guingane), Hugo Barine (Jean Paul Sartre) sont avant tout, des êtres de papier ; ils sont fictifs car produits de l'imagination de leurs créateurs.

2.2. Le personnage est toujours joué

Quand le personnage foule le plancher, la scène, il passe du monde du possible au monde du concret, de la construction textuelle à la construction scénique. En ce moment, il « rencontre sa matérialité, le signe sa signification et la parole son destinataire ».33(*)

Cette métamorphose n'est possible que grâce à un être, bien sûr, vivant : le comédien. On parle à cet effet d'incarnation du personnage par le comédien. On entend donc celui-ci rire, parler, crier. Ce mouvement montre que l'auteur dramatique n'écrit pas seulement un texte mais les répliques d'un personnage ; l'auteur crée ainsi « un fantôme provisoire (...) délibérément placé en position d'attente, dans une zone intermédiaire ». 34(*)

Le personnage tisse la ligne personnage -comédien. A cette ligne s'ajoute un troisième pôle, le spectateur grâce auquel se constituera un triangle comédien-personnage-spectateurs. Ce dernier élément va faire naître le spectacle (la participation du spectateur à la représentation théâtrale).

La construction textuelle devient construction scénique par une sorte de magie, un tour de main, par l'imagination d'un élément primordial au théâtre : le metteur en scène. Celui-ci reconstitue le personnage de façon à l'adapter aux besoins de la scène, à sa propre vision selon le but à atteindre, mais tout en le gardant proche du personnage avec la psychologie. Par exemple Hugo Barine dans l'oeuvre dramatique de Jean Paul Sartre, se présente comme un assassin, narcissique, agressif, etc. Nous le préciserons dans le chapitre consacré à l'analyse des caractères de Hugo Barine.

Dans le jeu représentatif, malgré les modifications du metteur en scène afin de le rendre concret, il gardera ses mêmes caractères.

2.3 Le personnage n'est que transposition

Le théâtre à n'en point douter est la représentation de la réalité, une mimésis sociale. Ainsi, la société est-elle sa source d'inspiration. C'est donc une partie sociale.

Ceux qui, au théâtre, actionnent cette imitation à l'exemple des hommes des êtres de chair et d'os sont bien les personnages. Dès lors, nous pouvons admettre que le personnage est la représentions des êtres de la société réelle.

Le personnage de Hugo Barine trouve son semblable dans la société. D'ailleurs son comportement d'assassin et d'égoïste que nous étudierons se décèle dans plusieurs personnages réels. Le personnage n'est pas une manifestation réelle de l'être dans l'ici et maintenant, mais dans un ailleurs qui n'est pas dans l'oeuvre, sur la scène. A cet instant, nous notons que le personnage n'est que transposition. Nous voyons là un trait essentiel entre le théâtre et la psychanalyse.

A la suite d'un tel rapport, une question s'offre à nous : dans quelle mesure l'application de la méthode d'approche psychanalytique à l'étude des personnages de théâtre pourrait-elle nous aider à décortiquer les traits caractéristiques de ces derniers ?

Une application de la méthode d'approche psychanalytique à l'étude de notre personnage nous en situera davantage.

CHAPITRE II

RAPPEL DE L'HISTOIRE DE HUGO BARINE

Hugo Barine âgé de vingt et un ans est entré au Parti en 1942, lorsque le Régent d'Illyrie a déclaré la guerre à l'URSS.

Entré au Parti, Hugo a pour pseudonyme RASKOLNIKOFF. A la question de savoir la signification d'un tel nom, telles sont ses répliques à la demande de Ivan, un camarade du Parti.

Hugo, avec empressement

Moi, je ne demande pas mieux, comment t'appelles-tu ?

Ivan

Dans la clandestinité, je suis Ivan, et toi ?

Hugo

RASKOLNIKOFF....C'est mon nom dans le Parti.

Ivan

Qu'est-ce qu'il fait ?

Hugo

Il tue.

Un tel pseudonyme n'est pas le fait d'un simple hasard, car il collerait bien avec la mission pour laquelle Hugo Barine sera conviée. Dans le Parti prolétarien auquel il appartient, le cercle de camarades estime qu'il faut « éliminer » Hoederer Secrétaire Général du Parti qui veut bien se servir du Parti pour en faire une politique de collaboration de classe dans le cadre de l'établissement d'une économie capitaliste avec le Parti au pouvoir. A cet effet, Hugo Barine offre aux camarades du Parti (Olga et Louis) ses services de tueur. Rappelons au passage que Olga Lorame et Louis sont exactement un couple parental. Il s'agit là, pour Hugo Barine de ses parents d'adoption.

Hugo rappelle à Louis sa détermination à accomplir une telle mission tout en le rassurant et lui demandant d'avoir confiance en lui.

D'abord, Hugo passe en revue ses différentes stratégies pour atteindre sa cible (Hoederer).

Hugo

En Russie, à la fin de l'autre siècle, il y avait des types qui se plaçaient sur le passage d'un grand-duc avec une bombe dans leur poche. La bombe éclatait, le grand-duc sautait et le type aussi. Je peux faire ça.

A travers cette réplique, l'on entend de la part de Hugo Barine de vouloir accomplir un acte de terrorisme. Mais cela ne s'entend pas ainsi.

Louis

......un intellectuel anarchiste. Tu as cinquante ans de retard. Le terrorisme c'est fini.

Hugo

Alors, je prendrais un pétard et j'irai descendre un flic sur la place royale ou avec un peu de chance un milicien.........et puis j'attendrais à coté du cadavre......

Cette seconde proposition de Hugo ne ferra pas bonne route non plus. Le Parti lui demande alors de servir comme secrétaire chez Hoederer.

Hugo Barine considère l'acte d'aller servir chez Hoederer en tant que son secrétaire, comme une occasion qui vient point nommé pour tuer Hoederer dont la politique serait jugée d'« inconcevable ». A cette proposition le Parti ajoute qu'il facilitera la tâche a trois camarades qui achèveront vite la besogne. Mais Hugo se montre catégorique par son refus et se voit à même d'accomplir seul cette mission.

Hugo

Non pas du tout : je ne veux pas faire le mouton. On a des manières, nous autres - un intellectuel anarchiste n'accepte pas n'importe qu'elle besogne ..... Mais voici ce que je propose ....je ferai l'affaire moi-même.

Déterminé à vouloir vaille que vaille tuer, Hugo sur proposition du Parti se rend finalement chez Hoederer avec son épouse Jessica.

A leur arrivée chez Hoederer, arrive la question de la fouille sinon du contrôle. Slick et Georges sont les deux `'garde-corps'' du vieux et sont mandatés par ce dernier de contrôler tous ceux qui franchiraient le grand mur de sa résidence. Mais, Hugo refuse de se faire fouiller, les discussions s'enveniment. Hoederer arrive et joue un rôle de pacificateur.

Les antagonistes se ressaisissent alors. Hoederer, en dehors des clivages politiques, considère le petit Hugo au même titre que ceux qui exercent chez lui. Il le considère comme son enfant. C'est ainsi qu'il cherche à l'instruire, à l'enseigner, à le former et pour tout dire à l'adopter selon son éthique à lui. Devant la ` magie'' et le caractère attrayant de ses mots Hugo Barine, voit en lui un père plutôt qu'un rival au détriment de son père naturel et légal.

Il le hait, refuse de le considérer comme son fils et le quitte. Ceci est souligné par les répliques suivantes :

Karsky

J'ai rencontré votre père la semaine dernière. Est-ce que ça vous intéresse

encore d'avoir de ses nouvelles ?

Hugo

Non...

Karsky

C'est fort possible que vous porterez la responsabilité de sa vie.

Hugo

Il est à peu près certain qu'il porte la responsabilité de ma vie. Nous sommes quittés.

Il est éblouit par l'attitude fascinante de Hoederer. En conséquence (Hugo) commence à perdre de vue son objectif et éprouve plutôt de la sympathie pour le vieux.

Cela ne se passera pas ainsi, Jessica a compris que Hugo était dans une impasse totale et qu'il n'accomplirait sa mission pour les seuls motifs d'ordre politique.

Il faut donc créer non pas un autre motif, mais un autre mobile pour entraîner Hugo à faire son geste. Et ce mobile sera la jalousie, la pure et simple jalousie amoureuse, et ici conjugale, qui cause les crimes passionnels.

Jessica va donc provoquer Hoederer et jouer le grand jeu de la coquetterie. Elle cherchera à cet effet  à tromper la vigilance du vieux en l'embrassant. Sans hésitation le vieux va se laisser prendre au piège. Hugo entre donc dans le bureau de Hoederer. Il trouve Jessica dans les bras de Hoederer et comprend comme un éclair « c'était donc ça ».

Hugo bondit jusqu'au bureau prend le revolver et vise Hoederer tout à loisir pour bien lui montrer parfaitement qu'il est le maître, et capable -malgré

Les dénégations de   son « patron » de faire « en bon assassin ».Trois coups sont tirés. C'est la catharsis totale. Hugo se sent libre d'avoir honoré son engagement. En fait Hugo a-t-il tiré par jalousie par rapport à Jessica, ou un désir d'en finir à tout prix et de sortir de l'impasse où il s'était engagé ? Cette scène nous en situe.

Olga

Est-ce que c'était vrai ? Est-ce que tu l'as vraiment tué à cause de Jessica ?

Hugo

Je .....Je l'ai tué parce que j'avais ouvert la porte....moi. Je vivais depuis longtemps dans la tragédie. C'est pour sauver la tragédie que j'ai tirée.

Hugo Barine a accompli sa mission `'tuer Hoederer''. Il sera inopinément incarcéré pour cinq ans. En prison, il est loin de sa bien -aimée. Il a besoin d'affection, mais n'en trouve pas. Deux ans après son incarcération il est relâché pour bonne conduite. Il n'a plus d'amis ni même de logis. Tous ses camarades du Parti le haïssent, ils pensent que Hugo Barine est un homme dangereux pour la cohésion sociale. En conséquence, il faut absolument l' « éliminer ». C'est alors que Olga Lorame se propose de l'accueillir chez elle où il était avant. Là, Hugo est traité par cette dernière comme « un fils à maman » gagnant de plus en plus l'affection, l'assurance de la part de Olga, Hugo se trouve « entretenu ».

Olga Lorame apparaît ainsi comme la conscience maternelle de Hugo qui fait tout et use de toutes les instances pour le sauver. C'est d'ailleurs l'une des raisons qui justifient la présence de Hugo chez elle avant qu'il ne soit jugé « non récupérable » par le Parti.

CHAPITRE III

LES GRANDES TENDANCES DE HUGO BARINE ET LEURS SIGNIFICATION PSYCHANALYTIQUES

1. LES GRANDES TENDANCES D'HUGO BARINE

L'histoire de Hugo Barine nous révèle un certain nombre de tendances. Hugo Barine a une passion exacerbée pour les meurtres. C'est d'ailleurs pour cette raison qu'il a pour pseudonyme RASKOLNIKOFF ; c'est-à-dire, celui qui aime tuer. Il ne s'arrêtera pas là, il ira jusqu'à tuer Hoederer. Ce dernier, en réalité, est celui qu'il aime. C'est donc avec lui (Hoederer) que Hugo Barine jeune homme a rencontré son vrai père qui le comprend, l'aime et tente de l'éduquer. Ainsi en tuant Hoederer, Hugo témoigne de son caractère sanguinaire : avoir les mains sales.

Hugo Barine simple jeune aime la politique et est narcissique. En réalité le but inavoué de sa lutte est de prendre le devant des choses un jour :

Hugo

 « L'armée rouge chassera le régent et nous aurons le pouvoir pour nous seuls »

L'objectif inavoué d'un tel désir n'est rien d'autre que de faire passer ses convictions individualistes et égoïstes. De ce point de vue, Hugo se présente comme un être qui ne pense qu'à lui-même avant tout. Au-delà de son caractère égocentrique, nous pouvons dire du personnage de Hugo Barine qu'il a un caractère narcissique. De même qu'il use de son statut d'enfant de bourgeois pour narguer les autres.

Cependant, Hugo Barine, en dépit de ses nombreux exploits, sort le grand perdant de ses projets titanesques. Après l'assassinat de Hoederer, il est jeté en prison où il restera éloigné de sa bien aimée et de surcroît rejeté par ses camarades du Parti. Hugo sera à cet égard en quête d'amour perdu.

Nous résumons ainsi :

· Hugo Barine, le caractère sanguinaire et la culpabilité oedipienne.

· Hugo Barine, obsédé par le pouvoir.

· Hugo Barine et l'amour.

Comment expliquer ces différentes tendances ?

2 LA SIGNIFICATION PSYCHANALYTIQUE DES DIFFERENTES TENDANCES

2.1 Le caractère sanguinaire de Hugo Barine et la culpabilité oedipienne.

La jeunesse de Hugo Barine est émaillée par un caractère qui attire notre attention. Il est sanguinaire. Il a une forte passion pour le meurtre.

Toute personne qui manifeste un tel comportement est un être agressif. C'est le fait d'étendre l'agressivité intérieure vers l'extérieur dans l'intention d'obtenir une satisfaction. Ceux qui adoptent l'agression sont des êtres faibles. Ils cherchent à cacher cette faiblesse par l'agression. Mais l'acte d'agressivité perpétré par Hugo Barine à l'égard de Hoederer peut s'expliquer comme suit: l'enfant trouve en Hoederer qu'il tue le père qu'il voudrait remplacer, et du coup posséder seul la mère qui est l'objet du désir. Pour nous cet acte représente la manifestation du complexe d'Oedipe (amour pour le parent de sexe opposé et des sentiments de jalousie envers le parent de même sexe). Rappelons que dans le cas d'espèce, c'est-à-dire ce qui est relatif à l'histoire de Hugo Barine, ce qui nous intéresse c'est l'acte de l'assassinat du « père Hoederer » par Hugo Barine.

Dans l'histoire d'Oedipe, après avoir tué son père Laïos, il devait tuer le sphinx qui est la représentation de l'imago paternelle du fait qu'il doit répéter le même geste sur l'animal.

D'une autre façon, l'enfant refuse ce qui vient de l'extérieur. Selon lui il est le centre du monde. C'est l'égocentrisme. Cependant son égocentrisme rencontre un obstacle qui est la censure sociale représentée par les parents (père/mère). Ceux-ci vont lui dicter les normes sociales. Ainsi tout enfant élevé dans cette situation devient agressif.

Hugo Barine a tué son père adoptif (Hoederer). Selon la Psychanalyse, cela est le fait de la rupture entre la personne secourable et l'enfant. Qu'est ce qu' « une personne secourable » ? Selon la considération que Freud en fait, c'est une opération qui n'est possible que si le sujet se trouve rassuré et protégé par une figure maternelle ou paternelle qui s'appelle « personne secourable » ambassadeur de la réalité.

C'est donc l'intervention de cette personne qui permet à l'enfant de sortir de l'angoisse de détresse à laquelle il est confronté dans ses premières expériences de la vie.

Voyons par exemple le cas de renversement de situation avec les « parents politiques » de Hugo c'est-à-dire le couple Olga Lorame et Louis. Après la libération inopinée de Hugo de la prison où il devait rester cinq ans, les camarades du Parti estiment qu'il faut l'abattre parce qu'il risquerait fort bien de dévoiler la stratégie politique du Parti qui a consisté à tuer Hoederer. L'attitude de la mère politique « Olga Lorame » est celle d'une personne secourable. Elle a accepté de s'opposer à l'idée de tuer Hugo et elle a protégé l'enfant Hugo en le gardant dans sa chambre. Mais quand Louis insiste aux pieds de Olga Lorame :

Louis :

Olga, j'ai peur que tu n'en mettes beaucoup trop, toi aussi

Olga

Je dis seulement qu'avant de le supprimer on doit examiner si le Parti peut le reprendre.

Louis

Le Parti ne peut plus le reprendre : plus maintenant. Tu le sais bien

Par cette attitude, le « Père politique » Louis proclame qu'il retire sa sollicitude paternelle à l'endroit de Hugo. Il l'abandonne ainsi sans protection.

Pareillement, l'acte posé par Hoederer en embrassant Jessica l'épouse de Hugo est la conséquence de la haine que Hugo a contre Hoederer. Car il se voit trahi, (privé de  personne secourable) comme un nouveau né qu'on abandonnerait à la solitude, au silence et à l'obscurité. C'est donc à cet instant-là que cette séparation, cet abandon, ce rejet va déterminer l'agressivité de Hugo Barine. Ce mécanisme d'apparition de haine à l'égard du parent de même sexe est ce que Freud appelle : «  apparition des pulsions de mort. » 35(*)orientées vers le père.

La scène de la mort du père est la représentation de l'accomplissement du désir de l'enfant ; désir longtemps refoulé dans l'inconscient.

Le revolver utilisé par Hugo Barine pour causer la mort de son père adoptif (Hoederer) est un symbole : le symbole phallique. C'est l'image du pénis.

Les balles quittant le revolver transpercent, pénètrent dans l'objet du sujet transpercé (Hoederer) comme la pénétration dans l'acte sexuel. L'usage des balles vient prouver le caractère masculin, viril qui attaque le père. Cela marque la maturité masculine de Hugo Barine.

Pour nous, cette analogie prise sous un angle psychanalytique, est, selon Sigmund Freud, comparable au stade génital dans le processus dynamique sexuel chez l'enfant. A ce stade, l'enfant a atteint la puberté. De nouvelles pulsions apparaissent (l'affirmation de soi). L'individu cherche à faire valoir sa libido dans des conditions sexuelles acceptables.

Le père est l'idéal pour l'enfant à qui, il voudrait ressembler. Mais au même moment il le craint parce qu'il possède toutes les forces capables de le détruire. A ce moment, l'idée d'éliminer le père s'impose. C'est l'ambivalence dans le comportement de l'enfant. Cela explique le comportement de Hugo Barine vis-à-vis de Hoederer. Maintenant, voyons le caractère obsessif de Hugo Barine pour le pouvoir.

2.2 Le caractère obsessif du pouvoir de Hugo Barine,

Hugo, certes, est envoyé chez Hoederer dans le but d'accomplir une certaine mission. Là il exerce la fonction de secrétaire particulier du vieux Hoederer. Cette responsabilité lui donne l'opportunité d'être au courant des grandes rencontres politiques que Hoederer entretient avec les hommes du Régent et du Pentagone. Il participe à cet effet aux grands débats et stratégies en matière de politique.

A voir les choses de plus près, le but inavoué que recherche Hugo Barine est de tuer Hoederer qu'il juge de « traître social » donc ayant une mauvaise politique, pour être lui-même un jour au commande. Cela apparaît pour lui comme un rêve. Ainsi, dans sa course à l'obtention du pouvoir, se montre-t- il véreux, sadique (son attitude par exemple à l'égard des deux gardes de corps de Hoederer).

Selon la conception freudienne de la sexualité, l'auteur décrit un stade de la sexualité infantile. C'est le stade sadico oral. Il se situe entre 1-3 ans. À cet âge la libido de l'enfant investit la zone du rectum (l'anus) et de ce fait l'expérience du plaisir se trouve liée à la rétention de substances fécales au niveau de l'anus. C'est la période où apparaissent les premiers conflits entre les enfants et les adultes. La libido devient agressive. Il prend du plaisir à détruire tout ce qui est à sa portée.

Voyons de même, comment se manifeste le caractère sexuel infantile chez Hugo Barine lors de sa présence dans le bureau de Hoederer. Dans ce bureau il occupe un siège un peu creux avec dossier. Il est plutôt confortable, et le geste de s'y asseoir et se lever rappelle bien l'acte sexuel : c'est le coït sexuel.

L'on peut dire de Hugo qu'il manifeste le complexe de caïn ( Génèse 4, V 1 à 15) ; pourquoi pas le complexe de Hugo ?

Hugo Barine, de peur de voir l'objet de son désir se détourner (tuer Hoederer pour prendre sa place), souhaite la mort de celui-ci en qui il voit son sosie venir, son rival. Voilà aussi l'une des raisons selon l'interprétation psychanalytique qui a conduit Hugo à tuer Hoederer.

Il faudrait retenir à la suite de cette analyse que

« Toute tendance dominante nous semble s'être manifestée dans la plus tendre enfance, et sa prédominance s'être établie grâce à des impressions de la vie infantile ».36(*)

2.3 Hugo Barine et l'amour

Hugo Barine est abandonné et trahi par sa femme Jessica et ses amis du Parti pendant son incarcération en prison. Là, il perd cette chaleur conjugale qui régnait entre lui et Jessica. C'est cette dernière qui lui donnait de la force et qu'il ne cessait de le louer pendant ces « grandes missions ». D'un autre côté, aussi, les camarades du Parti étaient en permanence avec Hugo avant son meurtre. Mais aujourd'hui, tout le monde se montre hostile à son comportement qu'on qualifie d'« insensé ». Il est de ce fait abandonné. Il continue de chercher cet amour perdu après sa libération.

Une chose importante est à noter. L'homme n'est rien sans les autres, il lui manque toujours quelque chose. Etre en compagnie d'une belle femme apporte une grande satisfaction, une grande fierté, l'équilibre total.

Tous ces facteurs vont permettre à tout individu la réalisation de la complitude narcissique. Voilà ce qui explique le comportement de Hugo Barine qui veut se faire de « nouvelles relations » pour de « nouvelles amours ». Cela se voit assurément dans son attitude en allant chez Olga Lorame à sa sortie de prison. Cette attitude de vouloir être avec Olga Lorame est celle d'une personne qui est en « quête d'amour ».

Selon la psychanalyse, le besoin illimité d'amour perdu « manifesté d'une façon polymorphe qui rend  souvent méconnaissable, signifie une recherche de sécurité perdue. » 37(*)

CHAPITRE IV

CORRESPONDANCE ENTRE L'HISTOIRE DE

HUGO BARINE ET LE MYTHE DE LA HORDE

PRIMITIVE

Avant d'entamer cet aspect de notre analyse, rappelons le mythe de la horde primitive décrit par Freud. Freud précise qu'il s'est inspiré des travaux de trois auteurs : Charles Darwin, Atkinson et W. Robertson Smith.

1. La conception de Darwin

En effet, Darwin avait observé les moeurs grégaires des singes supérieurs tels que le gorille, et il en avait déduit l'hypothèse selon laquelle les hommes eux aussi vivaient primitivement en petites hordes à l'intérieur de laquelle la jalousie du mâle le plus âgé et le plus fort empêchait la proximité sexuelle. Darwin ajoutait que, les jeunes mâles prenant de l'âge, une compétition s'ouvrait entre eux pour déterminer qui deviendrait le maître de la horde.

Le plus fort tuait ou chassait ses concurrents pour s'installer à la tête de la communauté. Le modèle darwinien décrit une organisation patriarcale où le père primitif règne en maître absolu et se réserve toutes les femmes de la horde.

2. La conception de Atkinson

Freud complète ce modèle par celui de l'anthropologue Atkinson. D'une part, cet auteur confirme l'hypothèse de Darwin en observant des troupeaux où des boeufs ou des chevaux sauvages vivaient en hordes. D'autre part, il observe que ces hordes se livrent à des luttes internes qui aboutissent à la mort du père. Dès que la horde est constituée, ceux qui sont chassés par le père (les jeunes frères) vont former une bande qui revient tuer le père primitif. Pendant leur exil, ils attendent qu'ils soient devenus assez forts avant de passer à l'acte. C'est donc par la violence qu'on aboutit à la succession du père.

3. La conception de Robertson Smith

Dans La religion des Sémites, Robertson Smith décrit une représentation rituelle de l'animal totem: le repas totémique

« Au cours de cette cérémonie, les participants regrettent d'avoir sacrifié leur animal totem. Mais le climat de fête permet la réconciliation entre les membres du clan et aussi avec leur dieu. Un lien de solidarité très fort unit désormais tous les membres du clan. »38(*)

La confrontation de ces différents travaux permet à Freud d'élaborer un modèle mythique comprenant trois périodes successives d'organisation sociale ; la horde sous l'autorité jalouse et excessive du père ; le regroupement des jeunes hommes chassés qui se rebellent contre le père quand ils en ont la possibilité ; les membres du clan fraternel célèbrent ensemble un rite qui rappelle le meurtre du père par les jeunes rebelles, le repas totémique.

Ce qu'il faut retenir c'est que l'enfant doit ressembler à son père, de façon symbolique. Il se montre capable de prendre la place du père. Ainsi l'enfant prend les attributs du père.

Bien que l'histoire de Hugo Barine ne puisse pas véritablement présenter tous les tableaux du mythe freudien de la horde primitive, il y a cependant une correspondance entre la vie de Hugo Barine et celle présentée par W. Robertson décrit par Sigmund Freud.

Dans Les Mains Sales de Jean Paul Sartre, rappelons-le, les camarades du Parti prolétarien veulent « éliminer Hoederer » à cause de son idéologie politique. Pour ce faire, le Parti, par le biais de Louis et Olga, mettra sur pied tous les moyens possibles pour l'abattre.

Hoederer est abattu par Hugo Barine le mandaté qui lui aussi sera jeté en prison et libéré deux ans plus tard. Mais un an après l'assassinat de Hoederer, le Parti prolétarien auquel il appartenait va finalement décider de se rallier au Régent. En conséquence tous regrettent leur manigance qui a conduit à la mort de Hoederer. Le Parti, pour se racheter, va décider de réhabiliter Hoederer en construisant des rues dans toutes les villes et en mettant son nom dans les livres d'histoire.

Ainsi, l'assassinat de Hoederer va conduire le peuple illyrien à mettre au coeur de sa tradition un évènement profondément regretté. Les membres du Parti, pour préserver les intérêts collectifs du peuple illyrien, resteront désormais unis quelque soit l'appartenance idéologique d'un des leurs.

CONCLUSION PARTIELLE

L'étude psychanalytique de Hugo Barine a permis de comprendre le rôle déterminant joué par l'enfance dans l'élaboration des caractères ultérieurs. Lorsque l'homme ou l'enfant n'a pas une sexualité bien développée, il peut connaître des troubles d'ordre psychique qui ont une conséquence sur son comportement.

En étudiant l'histoire de la vie de Hugo Barine, nous avons constaté l'ambiguïté de notre personnage. Cette ambiguïté se trouve à travers ses grandes tendances (un personnage agressif, parricide obsédé par le pouvoir, en quête de « personne secourable »). Ainsi, selon l'approche psychanalytique pouvons-nous dire de Hugo Barine par le biais des différentes tendances présentées, qu'il fait preuve d'une immaturité sexuelle et d'un déséquilibre d'ordre psychique.

CONCLUSION GENERALE

Notre sujet de recherche : « approche psychanalytique dans l'étude d'un personnage de théâtre, cas de Hugo Barine dans Les Mains Sales de Jean Paul Sartre » nous a permis de mettre l'accent sur l'approche psychanalytique au service de l'étude des personnages au théâtre.

Le choix de ce sujet répond à un besoin qui se présente face aux difficultés qu'éprouvent certains créateurs (comédiens, metteurs en scène, etc.) dans la représentation d'un personnage de théâtre. Ces créateurs depuis lors ne recourent sommairement qu'à l'analyse littéraire du personnage en vue de sa transposition scénique. Cette attitude n'est pas sans conséquence grave sur la maîtrise véritable des différentes actions du personnage partant du discours qu'il tient.

Pour pallier cette situation, nous avons proposé l'approche psychanalytique en tant qu'une nouvelle approche pour étudier le personnage au théâtre à la fois dans l'intérêt du metteur en scène et du comédien. Pour mener à bien cette étude, notre analyse s'est articulée autour de trois (3) principaux axes. Le premier axe s'est consacré à l'analyse dramaturgique de notre corpus. Bien que cette démarche ne puisse pas apporter une orientation immédiate à la compréhension de notre thème d'étude, il faut reconnaître cependant qu'il permet de cerner d'emblée l'environnement textuel dans lequel évolue notre personnage. Cela a pour avantage d'appréhender le discours que tient notre personnage, ses rapports avec ses semblables, ses différentes actions ayant fait l'objet de ses motivations et tant d'autres.

Au second axe, il a été question de donner un bref aperçu de la psychanalyse tout en précisant en dernier chapitre la méthode d'approche psychanalytique. Pour nous, cette partie semble importante puisqu'elle nous familiarise avec différents concepts utilisés dans le domaine de la psychanalyse.

Son utilité réside aussi dans le fait qu'il participe à la maîtrise des mécanismes de fonctionnement du patient en clinique et particulièrement du personnage au théâtre.

Le troisième axe, enfin, a été le lieu d'application de la méthode d'approche psychanalytique au personnage de Hugo Barine.

A la lumière des différentes analyses menées sur le personnage, nous comprenons aisément que nous ne sommes pas maîtres de nos actions qui nous croyons consciemment et naïvement être les nôtres. Ainsi Freud peut-il révéler que nous ne sommes pas maîtres de notre pensée.

C'est pourquoi il écrit avec force que : 

« Tu te comportes comme un monarque absolu qui se contente des informations que lui donnent les hauts dignitaires de la cour et qui ne descend pas vers le peuple pour entendre sa voix. Rentre en toi- même profondément et apprends d'abords à te connaître, alors tu comprendras pourquoi tu vas tomber malade et peut être éviteras- tu de le devenir. »39(*)

Aussi, avons-nous compris comment, grâce aux données de la psychanalyse, le théâtre, à partir du personnage pourrait devenir la représentation de l'inconscient. Le dramaturge, au cours de la production de son oeuvre est en rupture avec la réalité. Il se retrouve dans un monde constitué de fantasmes, d'éléments refoulés, de rêves, de souvenirs d'enfance.

Pour nous cette situation est comparable au mécanisme de l'inconscient dans le psychisme humain. L'inconscient qui fait office de çà, au sens psychologique est caractérisé par les désirs refoulés, des désirs qui ne sont pas compatibles avec la réalité sociale. 

L'auteur se sert de tous ces éléments, les organise de façon rationnelle, les recouvre de voile, de sorte à les rendre accessibles à la conscience, et à la réalité.

L'oeuvre devient alors un texte symptomal, un texte à déchiffrer. Il est comparable au rêve. Il joue les fantasmes de son auteur et est écriture du désir. Mais à la différence du rêve, le dialecte du théâtre doit pouvoir être compréhensible et communicable car oeuvre culturelle à fonction sociale.

Grâce au personnage de théâtre, le clinicien accède à une meilleure compréhension du conflit pathologique. La réflexion de Sigmund Freud s'enrichit de l'analyse des oeuvres théâtrales : Oedipe-Roi, Hamlet, Le roi Lear et tant d'autres. Elles lui ont permis de comprendre l'énigme comportementale de l'être humain. Nous comprenons combien il serait important, après analyse, que l'on insert le cours de la psychologie des personnages du théâtre dans le programme d'enseignement théâtrale. Cela participerait à la formation des futurs metteurs en scène, des encadreurs en interprétation théâtrale et initiation au jeu dramatique, des dramaturges et même des comédiens.

Ces buts atteints, seront une source véritable au renforcement de l'identification cathartique dont parle Aristote. Une fois que le comédien comprend à fond les différentes motivations de son personnage à incarner, pourra mieux l'incarner avec aisance. En conséquence, le spectateur essayera de s'investir dans le jeu du comédien en vue d'obtenir une véritable satisfaction.

Loin de nous la prétention d'avoir mené une étude complète, nous souhaitons que ce travail soit une ouverture à d'autres investigations afin de comprendre l'énigme que constitue le personnage au théâtre par le biais de la psychanalyse.

Nous pensons pour notre part que la psychanalyse peut offrir au théâtre des moyens pour conquérir la cité des coeurs des hommes. A travers le théâtre, l'on se rend compte que la vie n'est pas que commerce, la vie est savoir faire, savoir, savoir être mieux, savoir être avec.

Beaumarchais lui comprend aisément la valeur du théâtre lorsqu'il affirme que : « Cet art dont la loi première et peut être la seule est amuser en instruisant. »40(*).

BIBLIOGRAPHIE

OUVRAGES SUR LE THEATRE

1- ABIRACHED. R.- La Crise des personnages dans le théâtre moderne, Paris,

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2- FORESTIER Georges.- Le Théâtre dans le théâtre sur la scène française au

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3- N'GANDU N'KASHAMA Piris.- Théâtres et scènes de spectacle, Paris,

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5-THORET Yves.- La Théâtralité. Etude freudienne, Paris, Dunod, 1993.

6- UBERSFELD Anne.- Lire le Théâtre, Paris, Edition sociale, 1982

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1- AKOUN (A) et VERALDI G.- L'Inconscient, son langage et ses lois, Paris,

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2- DACO Pierre.- Les Prodigieuses victoires de la psychologie moderne,

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.3- FREUD Sigmund

- Cinq leçons sur la psychanalyse, Paris, PUF, 1954

- Correspondance 1873 - 1939, Paris, Payot, 166 pages.

- Essais de psychanalyse, Paris, Payot, 1981

- Introduction à la psychanalyse, Paris, Payot, 1965

- L'Interprétation des rêves, Paris, PUF, 3ème édition, 1971

- Le Délire du rêve dans la Gradiva de Jensen, Paris,

Gallimard, 1986

- Totem et Tabou, Paris, Payot, 1956

4- FREUD Sigmund et BREUER Joseph- Etudes sur l'hystérie, Paris, PUF,

1971

5- GREEN André.- Hamlet et Hamlet, une interprétation psychanalytique de la

représentation, Paris, Ballard, 1982

6- PERRON Roger.- Une Psychanalyse Pourquoi ?, Paris, Dunod, 2000, 268

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ARTICLES ET ACTES

1- MAUGENEST Denis- « Comprendre N°1 », L'Idéologie des idéologies,

Abidjan, les Editions du CERAP, 2004, 63 pages.

2- NJIKE Emmanuel.- « La Dérive de l'engagement politique dans Les Mains

Sales de Jean Paul Sartre » in Théâtre du monde,

Cahier N°8, 1998.

3- Théâtre africains, Actes du colloque sur le théâtre africain, Ecole Normale

Supérieure de Bamako, 14 - 18 novembre, 1988, Ed silex,

Paris, 1990.

4- Théâtre d'Afrique Noire, février 1984, 28 pages

MEMOIRES ET THESES

1- ABBAS Komenan H. F.- Etude contrastive de deux pièces de DADIE ; Les

voix dans le vent et Mhoi-ceul ; Mémoire de fin de

cycle (DESA), Option théâtre, Abidjan INSAAC,

juillet 2001.

2- N'GOUANDI Ehui Georges. La Dramatisation du Tokpê : une contribution

du théâtre à la cohésion sociale en Côte

d'Ivoire, Mémoire de fin de cycle (DESA) 3- VALY Sidibé, La Critique du Pouvoir Politique dans le

Théâtre De Bernard B. Dadié (1966-1980),

Thèse de Doctorat de 3e cycle, Université

D'Abidjan, 1984

Option théâtre, Abidjan, INSAAC, juillet

4- Zekrullah kazemi L'Image de la Culture dans Fraternité Matin,

Thèse de Dotorat de 3e cycle, Décembre 1989

DICTIONNAIRES

1- LAPLANCHE Jean et PONTALIS J.B.- Vocabulaire de la psychanalyse,

Paris, PUF, 1ère édition, 1994.

2- PAVIS Patrice.- Dictionnaire du théâtre, Paris, Dunod, 1996, 447 pages.

3- PIERON Henri.- Vocabulaire de la psychologie, Paris, PUF, 3ème édition

« Quadrige », 2000, 587 pages.

OUVRAGES RELIGIEUX

LA MAISON UNIVERSELLE DE JUSTICE.- Les Tablettes de Baha'U'llah,

Bruxelles, Maison d'Editions

Baha'ies, 1978, 320 pages.

SITES INTERNETS

1- Textes de Freud en ligne (http://classiques.uqac.ca/classiques/freud_sigmund/ freud.html) du 14/ 09/2006.

2- Freud par les textes (http:// groups.msn.com/freudparlestextes/_whatsnew.msnw) 25/ 11/2OO6

3- Quelques extraits ciblés fondamentaux des écrits de Freud

(http : // www.caute.lautre.net/ rubrique.php 3 ? id_rubrique = 37) du 28-11-2006

4- Caractérologie, un article de wikipédia, l'encyclopédie libre, récupéré de «  http : // fr. wikipédia.org/ wiki/ caractérologie » 29/11/2006

5- Introduction à la psychologie de la personnalité du (12- 12 2004)* 1

Pour la dernière révision.

(http: //. Er. Uquam.ca/ nobel / r 30034/ PSY4090/ doc/ intro.html)

6- Etude sur l'oeuvre Les Mains Sales de Jean Paul Sartre en ligne du lundi 10 juillet 2006.

www.yahoo.fr

(http : // revel.unice.fr/ loxias / document. Html ? Id= 1153) du 29/ 11 / 2006

TABLE DES MATIERES

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DEDICACE ...

REMERCIEMENTS

SOMMAIRE...............................................................................

INTRODUCTION........................................................................

EPIGRAPHE..............................................................................

PREMIERE PARTIE : L'UNIVERS DE L'OEUVRE.............................

Chapitre I : REPERES BIOGRAPHIQUES DE JEAN PAUL SARTRE..... 1- Vie et activités politiques de l'auteur...............................................13

2- L'existentialisme.........................................................................

2-1- Qu'est-ce que l'existentialisme.......................................................

2-2- Essence et existence...................................................................

2-3- L'engagement..........................................................................

2-4- Le marxisme...........................................................................

3- L'oeuvre théâtrale........................................................................

Chapitre II : PRESENTATION DE"Les Mains Sales"............................

1- Contexte socio-historique...............................................................

2- Le sujet de la pièce. Une action politique complexe et tendue..................

Chapitre III : ETUDE DES STRUCTURES DE L'OEUVRE

"Les Mains Sales"......................................................................................

1- Structure externe.........................................................................

1.1. Le titre de l'oeuvre.....................................................................

1.1.2. La fonction du titre dans une oeuvre théâtrale...................................

1.1.3. Pourquoi Les Mains Sales ?.........................................................................

1.2. La subdivision d'une pièce théâtrale................................................

1.2.1. La dramaturgie en actes...........................................................

1.2.2. La dramaturgie en tableaux.......................................................

1.2.3. Les mains sales : une structure dramatique ambiguë............................

1.3. L'incipit ou la liste des personnages................................................

2. La structure interne......................................................................

2.1. Définition...............................................................................

2.2. Résumé des tableaux..................................................................

2.3. Les aspects spatiotemporels de Les Mains Sales.......................................

2.3.1. Espace dramatique..................................................................

2.3.2. Temps dramatique..................................................................

2.3.3. Temps scénique.....................................................................

3. Etude actantielle, esthétique et idéologie de l'oeuvre Les Mains Sales.........

3.1. Le modèle du schéma actantiel........................................................

3.1.1. Proposition de schémas actantiels dans Les Mains Sales......................

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3.1.1.1. Hugo Barine l'assassin..............................................................................

3.1.1.2. Hugo Barine l'assassiné.............................................................................

3.2. Esthétique à travers Les Mains Sales......................................................

3.2.1. Le refus de la psychologie..........................................................

3.2.2. Le refus de l'intrigue................................................................

3.2.3. Le refus du réalisme................................................................

3.2.4. La vertu de l'écriture...............................................................

3.2.5. La valeur incisive et décisive du mot.............................................

3.3. Idéologie de l'oeuvre Les Mains Sales.....................................................

3.3.1. L'idéologie explicite.................................................................

3.3.1.1. Un théâtre de situation............................................................

3.3.1.2. Un théâtre marxiste...............................................................

3.3.1.3. Un théâtre tragique...............................................................

3.3.2. L'idéologie implicite...............................................................

Conclusion partielle.........................................................................

Epigraphe ....................................................................................

DEUXIEME PARTIE : BREF APERÇU DE LA PSYCHANALYSE..........

Chapitre I : Définitions, historique et vocabulaire de la psychanalyse..........

1- Définitions de la psychanalyse.......................................................................

2- Histoire de la psychanalyse..............................................................................

3- Bref aperçu du vocabulaire des termes psychanalytiques..........................

3-1- le refoulement...............................................................................................

3-2- Les complexes...............................................................................................

3-3- Le rêve...........................................................................................................

3-4- Le fantasme...................................................................................................

3-5- La censure.......................................................................................................

Chapitre II : Caractéristique du psychisme humain..............................

1- Description dynamique des deux topiques..........................................

1-1- Description dynamique de la première topique..................................

1-2- Description dynamique de la deuxième topique..................................

2- Explication des caractéristiques psychiques........................................

3- La signification psychanalytique des actes manqués.............................

3-1- Les lapsus..............................................................................

3-1-1- Erreurs de nom.......................................................................

3-1-2- Utilisation d'un mot pour un autre..............................................

3-1-3- Remplacement d'un mot par son contraire......................................

3-1-4- Les erreurs d'écriture..............................................................

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Chapitre III : La sexualité infantile et la conception

Psychanalytique des maladies mentales..............................................................

1- La sexualité infantile.....................................................................

1-1- Le stade de développement de la sexualité infantile..............................

1-2- Le stade oral...........................................................................

1-3- Le stade anal...........................................................................

1-4- Le stade génital........................................................................

2- La conception psychanalytique des maladies mentales et les traits

de caractère qui en résultent...............................................................

2-1- Le caractère narcissique..............................................................

2-2- Le caractère phobique................................................................

2-3- Le caractère obsessionnel............................................................

2-4- Le caractère paranoïque.............................................................

2-5- Le caractère Hystérique.............................................................

2-6- Le caractère cyclique................................................................

2-7- Le caractère shizoïde................................................................

Chapitre IV : Champ d'orientation et présentation de la méthode

d'approche psychanalytique........................................

1- La méthode cathartique et la méthode de la simple suggestion..................

2- La méthode de la libre association...................................................

Conclusion partielle.......................................................................

Epigraphe ...................................................................................

TROISIEME PARTIE : APPLICATION DE LA METHODE

D'APPROCHE PSYCHANALYTIQUE A L'ETUDE DU PERSONNAGE DE HUGO BARINE..................................................

Chapitre I : Le personnage.........................................................

1- Définitions ............................................................................

2- Les traits de caractérisation du personnage......................................

2-1- Une construction textuelle......................................................

2-2- Le personnage est toujours joué...............................................

2-3- Le personnage n'est que transposition........................................

Chapitre II : rappel de l'histoire de Hugo Barine...................................

Chapitre III : les grandes tendances de Hugo Barine

et leurs significations psychanalytiques...............................................

1. Les grandes tendances de Hugo Barine.................................................................................103

2. La signification psychanalytique des différentes tendances............... 104

2.1 Le caractère sanguinaire de Hugo Barine et la culpabilité oedipienne 104

2.2. Le caractère obsessif du pouvoir de Hugo Barine..................... 107

2.3 Hugo Barine et l'amour................................................ ...109

Chapitre IV : Correspondance entre l'histoire de Hugo Barine

et le mythe de la horde primitive..............................110

1. La conception de Darwin...................................................... 110

2. La conception de Atkinson......................................................111

3. La conception de Robertson Smith.............................................111

Conclusion partielle............................................................... 114.

Conclusion générale............................................................... 115

Bibliographie ..................................................................... 119

* 1 Jean Paul Sartre, cité par Jean Labesse, Etude sur Les Mains Sales, Paris, Gallimard, 2e édition, 1995, P.25

* 2 Christian Gambotti, Phèdre de Racine, l'oeuvre au clair, Paris, Bordas, 1989, P.11

* 3 Claude Brenon, «  communications 8 » in Collection Le Point, Patrice Pavis, 2OO3, P. 11

* 4 Patrice Pavis, Dictionnaire de théâtre, Paris, éd. Dunod, 1996, P.38

* 5 Berthold Brecht, L'Achat du Cuivre, P.131

* 6 Georges Forestier, Le théatre dans le théatre sur la scène française au VIIe siècle, Genève, Droz, 1981, cité par Patrice Pavis in Dictionnaire du théatre, P. 209.

* 7 Jean Pierre Ryngaert, Eléments pour une Histoire de Texte de Théâtre, Paris, Dunod, 1997, P.80.

* 8 Jean Paul Sartre, Les Mains Sales, Paris, Gallimard, 1948, P.49

* 9 Jacques Scherer cité par Patrice Pavis, Dictionnaire de théâtre, Op. Cit, P. 247

* 10 Anne Ubersfeld, Lire le Théâtre, op. cit, P.98

* 11 Anne UBERSFELD, Lire le Théâtre, Paris, Mossidor, éditions sociales, 1982, P.61-62

* 12Jean Paul Sartre, Un Théâtre de Situation, Paris, Gallimard, coll. Idée, 1973, P.190

* 13 La Maison universelle de Justice, Les Tablettes de Baha'u'llah, Bruxelles, éd. Baha'ies, 1978, P.178

* 14 Jean Paul Sartre, Un Théâtre de Situation, Op. Cit, P ; 123

* 15 Redondance : Caractère superflu de certains développements

* 16 Stasimon : Dans la tragédie grecque, intermède choral qui sépare les différents épisodes et marque un temps d'arrêt dans le déroulement de la pièce.

* 17 Sidibé Valy, La Critique du pouvoir politique dans le théâtre de Bernard B. Dadié (1966-1980), Thèse de Doctorat de troisième cycle, Université d'Abidjan, 1984

* 18 Freud cité par Roger Perron dans Une Psychanalyse Pourquoi ? Paris, Dunod, 2000, P 05.

* 19 Idem

* 20 Ibidem

* 21 Ibidem

* 22 Freud, S, L'interprétation des rêves, Paris, PUF, 1971, P. 64

* 23 Vocabulaire de la Psychanalyse, Paris, PUF, 1994, P. 197.

* 24 Freud cite par Roger Perron in Une Psychanalyse Pourquoi ? Op. cit, P. 263

* 25 Freud Sigmund, Trois essais sur la théorie de la sexualité, Paris, Collection « Idées », Gallimard, 1952,

* 26 Vocabulaire de la Psychanalyse, Op. Cit, P. 61

* 27 Cité par le professeur Kazemi Zekrullah, L'Image de la Culture dans Fraternité Matin, Thèse de 3e cycle, Décembre 1989

* 28 Maurice Bouvet, OEuvre Psychanalytique, T. II « Résistances, transfert », Paris, Payot, 1968, P. 22

* 29 Freud cité in Hamlet et oedipe d'Ernest Jones, Paris, éd. Gallimard, 1982

* 30 La théâtralité. Etude Freudienne, op. Cit, P. 40

* 31 Sigmund Freud, Un souvenir d'enfance de Léonard de Vinci, Paris, Gallimard, 1927, P.147

* 32 Idem

* 33 Robert Abirached, La Crise dans le personnage de théâtre moderne, Paris, Grasset, 1978, P.9

* 34 Idem

* 35 Besoin, désir de voir mourir le rival.

* 36 R. Deldine et S.Vermeulen, Le Développement psychologique de l'enfant, Berlin, 3e édition, P.40

* 37 Vocabulaire de la psychanalyse, op.cit, P. 272

* 38 Robertson Smith, La religion des sémites, Transaction Publisher, 2002, P.156

* 39 Freud cité par A. Akoun et G. Veraldi, L'Inconscient, son langage et ses lois, Paris, Gérard & C°, 1972, P. 30

* 40 Beaumarchais, Préface de Mariage de Figaro, Paris, éd Gallimard, 1996, P. 8






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"Piètre disciple, qui ne surpasse pas son maitre !"   Léonard de Vinci