MINISTERE DE LA CULTURE
REPUBLIQUE DE COTE D'IVOIRE
ET DE LA FRANCOPHONIE
Union - Discipline - Travail
INSTITUT NATIONAL SUPERIEUR DES
ARTS ET DE L'ACTION CUTURELLE
ECOLE NATIONALE DE THEATRE
ET DE DANSE
(ENTD)
Année académique 2006 -
2007
DEPARTEMENT DE THEATRE
MEMOIRE DE FIN DE CYCLE
en vue de l'obtention du
DIPLOME D'ETUDES SUPERIEURES ARTISTIQUES
(DESA)
Spécialité :
Théâtre
APPROCHE PSYCHANALYTIQUE DE HUGO BARINE DANS LES
MAINS SALES
DE JEAN PAUL SARTRE
Session de juillet 2007
Présenté par :
Sous la
Direction de :
GUEU Gonkapieu Joseph
Kazemi ZEKRULLAH
Etudiant en 4ème année
Docteur en communication
Formation initiale
INTRODUCTION
Les rapports humains sont un besoin impérieux pour
l'homme dont la nature est clairement définie comme un animal social.
Cela signifie tout simplement que toute existence est par essence
coexistence.
En effet, l'homme collabore toujours avec ses semblables. Mais
dans ses rapports avec la communauté ou sa société, c'est
une lutte perpétuelle qu'il mène pour des raisons de leadership
et d'hégémonie. Ainsi pour mieux saisir l'homme, des sciences et
des arts vont collaborer pour le décrirer avec des arguments pertinents.
C'est le cas du théâtre, art de la mimesis et de convergence de
tous les autres arts, avec la psychanalyse.
Le théâtre, à n'en point douter, a pour
vertu d'exhiber l'homme dans tous ses états, en d'autres termes, bien
que le théâtre soit le reflet de la société, il
permet de comprendre l'homme à partir de ses relations avec ses
semblables.
La psychanalyse, quant à elle, a pour objet d'explorer
le système psychique de l'homme pour essayer de fournir des
justifications à ses agissements. Les deux ont en commun l'étude
de l'homme. Ce rapprochement est l'une des raisons qui nous conduit à
réfléchir sur le thème :
``APPROCHE PSYCHANALYTIQUE DE HUGO BARINE DANS
Les Mains Sales
DE JEAN PAUL SARTRE.''
Nous avons choisi ce sujet pour les raisons
suivantes :
Au-delà de l'analyse littéraire du personnage de
théâtre, on pourrait avoir recours à d'autres sciences
(psychologie, sociologie, caractérologie, psychanalyse, etc.) pour
essayer de l'expliquer et l'analyser.
La psychanalyse, science ayant pour domaine d'étude le
système psychique humain et de tous les phénomènes
comportementaux qui en résultent, pourrait être utile à la
compréhension d'un personnage de théâtre en vue de mieux
l'incarner. Cette raison est être notre motivation première.
Aussi, faudra-t-il préciser que le choix du personnage
de Hugo Barine répond singulièrement au besoin de comprendre le
sens caché des motivations intrinsèques qui conditionnent chacune
de ses actions.
A ce niveau de notre investigation, il importe de
préciser d'une part, le véritable rapport entre la psychanalyse
comme approche psychique, et d'autre part, l'étude d'un personnage de
théâtre.
Cette approche aura pour objet de nous permettre de faire une
étude du personnage de théâtre à partir de la
psychanalyse freudienne en vue de découvrir ses lapsus, ses oublis, ses
actes manqués, son caractère, ses paroles et autres
caractéristiques.
Le personnage est un élément incontournable au
théâtre, car c'est lui qui donne un véritable sens à
l'action dramatique. Le personnage en tant qu'entité abstraite est avant
tout une image que le comédien doit incarner. C'est un
élément dynamique. Il se définit par ce qu'il est, mais
aussi par rapport aux autres personnages.
Ainsi, le personnage apparaît comme "un être
de papier" qui renferme la grande énigme dans la connaissance de
l'être humain qu'il conviendrait de connaître par le biais de la
psychanalyse. Son existence est limitée aux oeuvres littéraires.
En tant que "être de papier", il peut paraître surprenant que l'on
porte sur lui une étude psychanalytique.
Alors, que pourrait nous révéler l'exploration
psychanalytique d'un personnage dans la découverte de l'énigme de
l'être humain ?
Pour aboutir à des résultats précis, nous
avons porté notre choix sur une méthode scientifique, la
psychocritique d'où découle la méthode psychanalytique.
Par psychocritique, il faut entendre l'analyse psychologique des états
de conscience, des sentiments, des motivations profondes ou encore, la
réalité psychologique sous-jacente d'une quelconque action.
Maintenant présentons la démarche suivie pour
mener à bien notre travail. Soulignons d'entrée de jeu que notre
étude se subdivisera en trois grandes parties.
La première est relative à l'univers de notre
corpus Les Mains Sales de Jean Paul Sartre. Celle-ci aura pour but de
faire une présentation des repères biographiques de l'auteur et
de l'oeuvre théâtrale Les Mains Sales. Ensuite, nous
essayerons d'étudier les différentes structures de l'oeuvre.
Aussi, au cours de cette partie, ferrons-nous une étude
actantielle, esthétique et idéologique de Les Mains
Sales.
La deuxième partie, intitulée la psychanalyse,
aura pour but de présenter cette discipline scientifique, de faire une
description de l'appareil psychique, de montrer le rôle de la
sexualité dans le développement de caractères et la
conception psychanalytiques des maladies mentales. Enfin, nous
présenterons la méthode d'approche.
Dans la troisième partie, enfin, nous
procéderons à une application de cette méthode d'approche
à l'étude du personnage de Hugo Barine dans Les Mains
Sales de Jean Paul Sartre.
« Le texte est
une machine paresseuse qui exige du lecteur
un travail
coopératif acharné pour remplir les espaces de
non-dit ou déjà
dit restés en blanc, (...) le texte n'est
autre chose qu'une machine
présuppositionnelle ».
Umberto ECO : L'Oeuvre ouverte (1962)
PREMIERE PARTIE
L'UNIVERS DE L'OEUVRE
CHAPITRE I
REPERES BIOGRAPHIQUES DE JEAN PAUL SARTRE
1. Vie et activités politiques de
l'auteur
Né le 21 juin 1905 à Paris, Jean Paul
Sartre, avec ses condisciples de l'Ecole normale supérieure, critiquent
les valeurs et les traditions de sa classe sociale : la bourgeoisie. C'est
surtout par son oeuvre théâtrale que Sartre a été
connu du grand public. Peut-être, ce succès et cette
notoriété rapides sont-ils dus en partie à des
circonstances politiques et sociales favorables, à savoir celles de la
guerre et de l'occupation.
Jean Paul Sartre n'est pas né communiste,
tant s'en faut et l'on sait, en particulier par Les Mots, combien son enfance
fut bourgeoise et choyée. Sartre fut d'abord existentialiste, puis il
fonda la revue Les Temps Modernes en 1945 et s'orienta alors
franchement vers le Parti communiste.
Dans le cadre de notre recherche, nous
essayerons de montrer, à travers sa biographie, les aspects ayant
rapport avec notre corpus Les Mains Sales. L'entrée de Jean
Paul Sartre dans le Parti communiste et ses relations avec celui-ci connurent,
en effet, des fluctuations. C'est parce qu'il lui fut toujours fort difficile
de concilier une sympathie intellectuelle si motivée avec les consignes,
les orientations et les choix toujours imposés d'un Parti
autoritaire.
Aussi les liens, quoique jamais rompus
entre Sartre et le Parti, furent-ils souvent très tendus. Le
problème fondamental pour l'auteur de Les Mains Sales
était celui d'une fidélité, même parfois très
théorique, à ce qui restait pour lui la seule entreprise
politique, l'affranchissement du prolétariat, seule façon, selon
lui de donner un sens réel et concret à ses valeurs essentielles
que sont la vérité et la liberté.
Ainsi, dès 1946, Jean Paul Sartre
écrivit :
« Je sais qu'il n'y a pas d'autre salut pour
l'homme que
la libération de la classe
ouvrière : je le sais sur la seule inspection des faits, je sais
que les intérêts de l'esprit sont sur le
prolétariat»1(*).
L'adhésion de Sartre au Parti communiste
était dominée par son refus de recevoir des ordres. Cette
approche semble s'imposer à des analogies évidentes au personnage
de Hugo Barine et la personne de Jean Paul Sartre.
En effet, Hugo Barine fils de famille riche
(bourgeois) rentre au Parti communiste par souci de justice sociale et y sert
comme secrétaire. Tout en servant le Parti, à des moments, Hugo
refuse de recevoir des ordres. Il se veut être libre et loin de toute
contrainte pour servir.
A titre illustratif on pourrait se
référer aux scènes 2 et 3 du troisième tableau. Ces
scènes sont relatives à la fouille. Hugo Barine s'oppose
farouchement à ce que les gardes fouillent sa valise. Ici il bat tout en
brèche toute idée d'ordre, d'obéissance ou de contrainte
venant d'un ailleurs, il garde cependant sa dignité prétendue au
nom de laquelle « S'il respecte les consignes, il se respecte
aussi lui-même et n'obéit pas aux ordres idiots qui sont faits
exprès pour le ridiculiser ».
De tout ce qui précède, nous
pouvons dire de Sartre qu'il a épousé son temps parce qu'il a
voulu aborder et traiter tous les grands problèmes de son époque.
Surtout ceux qui s'imposaient en quelque sorte et qui étaient
politiques : la guerre, la révolution, le communisme.
Finalement, Jean Paul Sartre est mort
à Paris le 15 avril 1980 à l'âge de 75 ans à
l'hôpital Broussais atteint d'un oedème pulmonaire.
2.
L'existentialisme
Jean Paul Sartre a introduit et
marqué son temps par, une philosophie nouvelle, connue sous le nom de
l'existentialisme. On ne peut comprendre valablement
les idées de Sartre qu'à la lumière de sa
pensée fondamentale qui est l'existentialisme qu'il nous faudra
expliquer brièvement.
2.1. Qu'est ce que l'existentialisme ?
L'existentialisme est une philosophie de
l'être et de l'existence totalement opposée aux philosophies
traditionnelles qui liaient ces notions à l'idée d'un Dieu
créateur et auteur de toute existence. Rappelons au passage qu'en
faisant sienne cette idée, Sartre s'est inspiré du philosophe
allemand Martin Heidegger (1889-1976) dans son ouvrage L'Etre et le
Néant publié en 1943. Les existentialistes estiment que la
liberté est une conquête qui s'impose à tous. Elle ne
dépend d'aucun être (essence = Dieu). Elle est en soi. Donc pour
la rendre manifeste il faut s'engager.
A ce niveau de notre travail il nous incombe
d'expliquer l'idée d'essence et d'existence.
2.2. Essence et existence
L'essence, c'est l'idée
théorique et abstraite d'un être ou d'une chose avant même
que cet être ou cette chose ne soit appelé à l'existence.
Or dans la pensée traditionnelle, les essences sont en Dieu : Ce
sont comme des prototypes résumant en eux toutes les
variétés possibles de créations individuelles.
L'idée d'homme par exemple est en Dieu, et l'acte créateur
consiste à donner l'existence à cette essence.
Mais l'existentialisme s'oppose
formellement à cette conception traditionnelle: il nie l'existence de
Dieu et du même coup celle des essences. Sartre en conséquence
postule que l'existence précède l'essence, affirmant ainsi une
véritable révolution de la pensée. Qu'est-ce que
l'existence ? C'est un évènement qui est sans signification
et ne se réfère à aucune essence.
Au total, pour rendre manifeste l'aspect
existentialiste, il nous faudra nous engager. Mais qu'est-ce que
l'engagement ?
2.3. L'engagement
Selon l'existentialisme professé
par Sartre, l'homme est totalement libre vu qu'il ne peut se
référer à rien ni à personne, que ce soit homme,
Dieu ou système. Cette liberté est donc une charge, car il faut
choisir une conduite sous sa seule responsabilité sans prendre conseil
de qui que ce soit. Pour l'auteur de Les Mains sales, écrire
est en effet un acte important parce qu'il concerne un public, que sont les
lecteurs qui trouveront peut-être dans l'oeuvre qu'on leur propose les
éléments déterminants d'une conduite future.
Aussi, l'écrivain doit-il s'engager. C'est
pour lui une obligation qu'il ne peut esquiver, et qui lui est assignée
par son état même d'écrivain. Si l'existentialisme
professé par Sartre est une donnée existentielle, il lui
reconnaît la liberté qu'il peut véritablement apporter
à la condition humaine.
L'homme selon Sartre est condamné à
être libre. Cette réalité découle en effet de la
volonté propre de l'homme d'exécuter des engagements, de mener
des actions malgré toutes dispositions contradictoires, de remords, de
craintes, etc.
2.4. Le marxisme
Il est bon de rappeler que le marxisme est
une doctrine philosophique de l'Allemand Karl Marx (1818-1883). Le marxisme se
présente comme une méthode d'analyse critique de la
société propre à en faire ressortir les défauts et
les tares, et d'autre part comme un moyen de réaliser à terme la
société idéale. Par l'idée d'une
société idéale il faut comprendre la suppression de
«l'exploitation de l'homme par l'homme» et la
réalisation d'une société sans classe. Or cette
suppression de la société bourgeoise conduira inexorablement
à instaurer un cadre de vie faisant de l'homme un être libre.
Les motifs d'adhésion de Jean Paul
Sartre au marxisme sont d'ordre intellectuel. Mais cette adhésion est
particulièrement intéressante dans la mesure où elle
exprime les notions de vérité et de liberté propres
à Sartre.
La conclusion qui s'impose selon Sartre
c'est que le prolétariat doit se libérer, s'affranchir de
l'oppression bourgeoise, oppression économique certes, mais
également morale, politique et culturelle. Ces pratiques, toujours selon
Sartre, sont les moyens les plus simples pour la bourgeoisie d'affermir et de
perpétuer sa domination sous la forme d'une idéologie dominante
qu'il faut donc à tous prix combattre.
A voir de plus près l'écriture
sartrienne, nous remarquons que l'auteur procède à
l'évidence de son idéologie, car cette idéologie n'est
aucunement gratuite et prétend régir toute conduite humaine. Le
théâtre existentialiste en vérité inspire un genre
particulier d'art dramatique qui se démarque singulièrement de la
tradition parce qu'il se veut loin de toute contrainte en matière de
règles.
Le théâtre traditionnel quant
à lui représentait des personnages et des caractères
impliqués dans une histoire. Cette réalité leur imposait
des épreuves que ces personnages eux-mêmes n'avaient ni
prévues ni choisies et qui étaient le fait du destin ou du
hasard.
3. L'oeuvre
théâtrale
Avant d'aborder son oeuvre Les
Mains Sales qui fait l'objet de notre recherche, nous tenterons
de rappeler au passage les oeuvres théâtrales de Jean Paul
Sartre :
ü 1940 : Bariola, pièce religieuse
écrite pour Noël aux camps des prisonniers
ü 1943 : Les Mouches
ü 1944 : Huis clos
ü 1944 : Morts sans sépulture
ü 1946 : La Putain respectueuse
ü 1948 : Les Mains
Sales
ü 1951 : Le Diable et le Bon Dieu
ü 1953 : Kean (repris d'Alexandre Dumas
Père)
ü 1955 : Nekrassov
ü 1959 : Les Séquestrés d'Altona
ü 1965 : Les Troyennes (adaptation d'Euripide)
Après lecture de l'oeuvre Les Mains
Sales, l'on constate que Jean Paul Sartre présente Hugo Barine,
jeune militant communiste, fils de famille riche, qu'il a cependant
quittée pour s'inscrire au Parti par souci de justice sociale. Son sort
d'enfant « gâté » lui paraît
inacceptable devant la misère du peuple.
Entré au Parti, Hugo se propose
d'assassiner Hoederer l'un des chefs du Parti. Hoederer selon ses camarades du
Parti, est un traître social puisqu'il veut signer une alliance avec les
forces conservatrices.
Hugo accompagné de sa femme Jessica est
introduit auprès de Hoederer comme secrétaire. Après
plusieurs jours d'atermoiement, il est sur le point de se laisser convaincre
par celui-ci du bien fondé de sa politique. Mais coup de
théâtre, Hugo surprend Hoederer embrassant Jessica. Estimant avoir
été trahi, il l'abat. Après deux ans de prison, il se
retrouve chez les militants qui l'ont chargé de l'assassinat. Leur ligne
politique a changé, ils ont adopté celle qui était
préconisée par Hoederer. Sommé par les membres du Parti de
choisir entre l'alignement et la mort, Hugo choisit la mort.
CHAPITRE II
PRESENTATION DE Les Mains
Sales
1. Contexte
socio-historique de Les Mains Sales
L'action se passe de 1943 à 1945, donc en
pleine guerre, dans un pays imaginaire que Sartre appelle Illyrie, pseudonyme
assez transparent qui désigne de toute évidence la Hongrie. Ce
pays était dirigé depuis 1920 par le Régent- Amiral Horthy
von Nagybana.
C'était un «royaume sans
roi ». Le Régent qui avait toujours exercé un
pouvoir discrétionnaire de style assez fascinant, s'est allié
à l'Allemagne nazie et a déclaré la guerre à l'URSS
en 1942, quelque temps après l'attaque allemande contre la Russie du 19
juin 1941. Des contingents anglais se battent aux côtés des
Allemands. Mais en 1944, à la suite des défaites subies par
ceux-ci, sur le front russe et du recul général qui s'ensuit, des
troupes allemandes occupent la Hongrie, et Horthy est remplacé par un
pronazi, fanatique, Szalasi qui fait régner la terreur.
Dès le 30 octobre 1944, les Russes qui n'ont
cessé de progresser vers l'Ouest, bousculent les troupes allemandes,
lancent une attaque contre Budapest qui, en fait ne capitulera qu'en
février 1945. Alors, en mars 1945, la Hongrie est envahie par
l'armée russe et un gouvernement prosoviétique va s'installer.
Le 15 Mars 1945, la Hongrie deviendra pratiquement
communiste et trois millions d'hectare de terre seront confisqués aux
grands propriétaires. Le Parti des petits propriétaires domine au
sein du Front National Hongrois d'indépendance. En Février 1946
la Hongrie est proclamée République populaire et s'en suivent
l'avènement et l'installation du communisme populaire de Hongrie.
2. Le sujet de la pièce. Une
action politique complexe et tendue
Tout en s'inspirant de la
réalité, Sartre nous dit qu'est n é en 1942 dans ce
pays un double mouvement de Résistance contre le gouvernement du
Régent : l'un que l'on pourrait qualifier de nationaliste et qui
est soutenu par le Pentagone, c'est-à-dire par l'Etat major
américain (l'Amérique est en guerre contre l'Allemagne à
cette époque), l'autre de nature et d'obédience nettement
marxiste et visant à installer un régime communiste à la
libération du pays. Toutefois, en mars 1943, le Régent, nous dit
Sartre, doutant de la victoire allemande, autrement dit le Pentagone, et
même avec la Résistance communiste, oeuvre pour proposer à
l'une et à l'autre un projet de gouvernement tripartite qui serait pour
lui une planche de salut. A cet effet, disent les émissaires du
Régent au Parti prolétarien, un comité national clandestin
va se constituer incessamment auquel est invité à ce joindre le
Parti prolétarien. Ce dernier délibère sur la
réponse à donner aux émissaires du Régent. Le
dirigeant communiste Hoederer pense qu'il faut accepter la proposition, et il
est approuvé par quatre voix contre trois, au grand scandale des
« purs ».
Ce vote s'explique par le faits que le Parti
prolétarien est composé de plusieurs tendances : il y a en
son sein des sociaux démocrates qui sont majoritaires et ont de ce
fait « affadi » le Parti. Ainsi donc Hoederer a
toute liberté d'engager des pourparlers avec la Résistance
« bourgeoise » tandis que les «
purs » du Parti prolétarien, indignés, vont
décider de l'éliminer comme traître.
CHAPITRE III
ETUDE DES STRUCTURES DE L'OEUVRE :
Les Mains Sales
Tout au long de ce chapitre, il nous sera
nécessaire d'analyser l'oeuvre tant dans son contenu que dans sa
structure. Nous procéderons d'abord dans cette analyse, par la structure
externe avant d'aboutir à sa structure interne que nous essayerons
d'expliquer afin de saisir l'entière signification de l'oeuvre.
1. La
structure externe
Cette structure concerne essentiellement
les formes qui insistent sur les éléments ayant trait aux
modalités de l'écriture et de la représentation de la
pièce. Notre réflexion ici, portera sur le titre, la liste des
personnages et la subdivision de l'oeuvre.
1.1. Le titre de
l'oeuvre
Le titre est un texte extérieur
d'une oeuvre théâtrale. Il est, à cet effet, un
élément didascalique extra textuel ou para textuel. Aussi le
titre annonce-t-il les couleurs et instaure une attente.
1.1.2. La
fonction d'un titre dans une oeuvre théâtrale
Le titre est le miroir d'un texte
dramatique. C'est un élément très important dans la
compréhension d'une pièce de théâtre car il situe le
lecteur sur la fable. Le titre est d'autant plus important que c'est lui qui
donne le ton à l'action dramatique. Pour ce faire le titre d'une oeuvre
doit révéler certaines qualités.
Le titre doit être simple afin d'être
compris immédiatement par tous. Il ne doit pas être trop long pour
éviter de ralentir sa compréhension par le lecteur et il doit
surtout être accrocheur.
En effet un titre, pour être
efficace, doit d'emblée attirer l'attention du lecteur et lui donner
l'envie d'ouvrir la pièce et de la lire.
A en croire Christian Gambotti :
« Le titre d'une oeuvre est toujours
révélateur du mode de fonctionnement des termes essentiels et
du sens de cette oeuvre. Il existe une sorte de contrat entre le lecteur et
l'écrivain. Au terme de ce contrat, le lecteur s'attend à
trouver l'histoire à laquelle le renvoie le titre. »2(*)
Cette attente sera soit
déçue, soit satisfaite ; le lecteur spectateur jugera en
effet si la fable colle à l'étiquette.
I.1.3. Pourquoi
Les Mains sales ?
La connaissance du titre d'une oeuvre
apparaît, de tout point de vue, importante et opportune avant d'envisager
l'étude de l'oeuvre proprement dite. Ainsi le titre de l'oeuvre soumise
à notre étude est « Les Mains sales ».
Ce groupe nominal est constitué d'un
déterminant (les), d'un nom (mains), et d'un adjectif (sales). Avoir les
mains sales, expression courante, veut dire, avoir les mains tachetées,
impropres, impures. Ce titre peut aussi suggérer l'idée d'un
assassinat, d'un meurtre.
I .2 . La
subdivision d'une pièce théâtrale
La subdivision de l'oeuvre renvoie
à son découpage. Selon Claude Brenon :
« Les séquences sont les
caractéristiques des grandes unités (...) qui contrairement
à tous les autres, elles supposent l'interruption visible
figurée par un blanc textuel et par indication textuelle d'un nouvel
acte ou d'un nouveau tableau ».3(*)
I. 2.1 La dramaturgie
en actes
De manière générale, la
dramaturgie en actes présente l'action dans son déroulement
chronologique. L'acte se termine lorsqu'il y a une sortie de tous les
personnages ou qu'il y a un changement dans la continuité
spatiotemporelle ; la fable étant alors découpée en
grands moments ou en coupures narratologiques.
Il est à noter que les coupures
narratologiques représentent le critère essentiel de la division
en actes. C'est pourquoi pour Patrice Pavis :
« Les actes constituent la division externe des
pièces en parties d'importance sensiblement égale en fonction du
temps et du déroulement de l'action ».4(*)
Depuis Aristote, le drame doit
présenter une seule action décomposable en parties organiquement
liées les unes aux autres. Cette structuration est narratologique et le
découpage s'y effectue en fonction des grandes unités du
récit qui sont :
ü La protase : exposition et mise en oeuvre des
éléments dramatiques
ü L'épitase : complication et resserrement du
noeud
ü La catastrophe : résolution du conflit et
retour à la normale
Ainsi, toute pièce de facture
aristotélicienne comme l'énonce Hegel dans sa réflexion
sur la tradition théâtrale comportera trois moments
clé :
ü La naissance du conflit
ü Le choc paroxysme
ü La conciliation
En un mot, l'acte doit faire preuve d'une
cohérence interne et une progression par rapport au
précédent aux fins d'ouvrir l'inévitable suspens quand il
arrive à sa fin.
A l'intérieur de l'acte se
succèdent des scènes sans interruption. La scène se
définit comme une subdivision du découpage interne de
l'action.
I.2.2. La dramaturgie
en tableaux
Le tableau est une unité spatiale d'ambiance.
Il caractérise un milieu ou une époque ; c'est une
unité thématique et non actantielle. Le tableau est une
unité de la pièce du point de vue des grands changements de
lieux, d'ambiance ou d'époque. Chaque tableau correspond, de
façon générale, à un décor particulier.
C'est au XVIIIe siècle que
l'esthétique du tableau va se constituer en rapport avec une vision
picturale de la scène dramatique. Le tableau est une surface beaucoup
plus étendue que l'acte et aux contours imprécis recouvrant un
univers épique de personnages dont les relations assez stables donnent
l'illusion de former une fresque, un corps de ballet ou un tableau vivant. Le
dramaturge installe par le biais des tableaux, le spectateur devant une
gigantesque toile déroulant des petits tableaux.
Les propos de Brecht semblent mieux conclure
les définitions sur le Tableau:
« Le tableau est un fragment
typique mais incomplet sans la
perspective critique et restructurant
du spectateur. Chaque tableau
forme un tout et (...) se projette
dans le suivant ».5(*)
I.2.3. Les Mains
Sales : une structure dramatique ambiguë
L'oeuvre Les Mains
Sales s'inscrit dans la perspective des nouvelles formes de
dramaturgie qui se conçoivent en dehors des actes et des tableaux.
Aujourd'hui avec l'avènement de la
nouvelle dramaturgie, les types classiques de découpage des oeuvres
dramatiques qui recherchent respectivement la continuité de l'action et
le respect de l'ordre chronologique vont faire place à une dramaturgie
subjective et relative.
Selon le Dictionnaire Larousse, ce qui
est subjectif, c'est ce qui est individuel et susceptible de varier en fonction
de la personnalité de chacun. Quant au relatif, c'est ce qui n'a rien
d'absolu, qui dépend d'autres choses.
Ainsi, une dramaturgie subjective et
relative est une dramaturgie qui n'obéit qu'au style du
dramaturge ; une dramaturgie qui rompt d'avec les formes classiques du
découpage pour épouser « les
fantaisies » et les modèles personnels de division, de
découpage de l'oeuvre dramatique.
Cela relève bien entendu des choix
esthétiques de l'auteur.
Notre corpus Les Mains Sales
s'inscrit dans le cadre de cette logique. La nouvelle dramaturgie vise à
donner libre cours à l'écriture théâtrale. En
d'autres termes elle offre à tout dramaturge la liberté
d'écriture.
Cette réalité épouse
tout de même la conception existentialiste sartrienne de l'engagement
littéraire. Etant donné que cet acte humain doit être
volontairement et sciemment assumé, l'acte d'écriture doit en
être autant. A confronter l'objectif que vise la nouvelle dramaturgie
à celle de l'engagement littéraire selon Sartre, nous pouvons
déduire qu'ils ont en commun la création d'un espace
d'épanouissement à tout créateur.
De cette remarque, nous pouvons affirmer
que l'auteur de Les Mains Sales met sa théorie
existentialiste en évidence à travers son écriture.
Essayons autant que possible de
dégager le caractère ambigu de la structuration des tableaux de
Les Mains Sales.
Premier tableau
|
Deuxième tableau
|
Scène I
Scène II
Scène III
Scène IV
|
Scène I
Scène II
Scène III
Scène IV
|
Troisième tableau
|
Quatrième tableau
|
Scène I
Scène II
Scène III
Scène IV
Scène V
|
Scène I
Scène II
Scène III
Scène IV
Scène V
Scène VI
|
Cinquième tableau
|
Sixième tableau
|
Scène I
Scène II
Scène III
Scène IV
Scène V
|
Scène I
Scène II
Scène III
Scène IV
|
Septième tableau
|
Scène unique
|
Comme nous le constatons, la pièce
est divisée en sept Tableaux, regroupant de manière
inégale un ensemble de vingt-neuf scènes (le dernier Tableau ne
comprenant qu'une seule scène).
Les Tableaux un et six se situent dans le
présent et sont l'occasion d'un retour en arrière qui
évoque le meurtre de Hoederer, de sa conception à son
exécution (Tableaux I et VI). Nous avons affaire à du
théâtre dans le théâtre, c'est-à-dire un
procédé insérant un jeu dramatique dans un autre jeu.
Cette technique du théâtre dans le théatre est un
procédé utilisé quand :
« Un élément théâtral
est comme isolé du reste et apparaît à son tour comme
l'objet du regard de spectateurs situés sur la scène, quand le
spectateur de la scène voit des comédiens en face d'un spectacle
que lui-même regarde aussi ».6(*)
Si nous reprenons l'ordre chronologique et
examinons comment le découpage en tableaux regroupe les
évènements, nous obtenons ceci :
Tableau II : Hugo est chargé de tuer Hoederer
Tableau III : Arrivée de Hugo chez Hoederer ;
installation et première rencontre
Tableaux IV, V, VI correspondent respectivement
à la négociation entre Hoederer, Karsky, et le Prince Paul, au
« débat » entre Hoederer et Hugo, au
meurtre de Hoederer. Mais le plus important est de noter qu'ils constituent une
unité temporelle (un jour, une nuit et le lendemain).
Tableaux I et VII : la soirée chez Olga et la mort
de Hugo.
La pièce distingue donc quatre
grands moments entre lesquels s'écoule un temps plus ou moins
déterminé. Ainsi, pouvons-nous voir qu'il y entre :
Les Tableaux II et III: temps déterminé ;
Les Tableaux III et IV : huit à dix
jours ;
Les Tableaux VI et I : deux ans.
I.3. L'incipit
ou la liste des personnages
La liste des personnages est aussi
appelée didascalie d'ouverture qui selon Jean Pierre
Ryngaert : « se démarque de la didascalie
linéaire ordonnant un tableau ou un acte ».7(*)
Dans le cas d'espèce, nous
aborderons uniquement la composition de l'incipit, pour ensuite, situer le
rôle de chaque personnage. Nous consacrerons dans la troisième
partie, une analyse plus détaillée du discours de notre
personnage choisi (Hugo Barine) afin de mieux cerner ses caractères
constituant ainsi un aspect important de notre travail.
Les Mains Sales compte onze
personnages. Ainsi, selon l'ordre chronologique qui nous est
présenté dans notre corpus, nous avons d'abord
Hoederer. Il est l'homme fort de la pièce,
l'antithèse de Hugo, son antipère.
Peut être en ce sens qu'il
désavoue totalement ce pur produit de la bourgeoisie tout en cherchant
sans doute à l'instruire. Hoederer est aussi ce leader qui,
d'après l'avis du cercle communiste auquel il appartient, mène
une politique trop diplomatique et compromettante. Ainsi, dans le
deuxième tableau, scène IV nous remarquons ceci :
Louis
« Nous allons voir ...Hoederer nous a
réuni ce soir parce qu'il veut que le Parti prolétarien
s'associe aux fascistes et au Pentagone pour partager le pouvoir avec eux
après la guerre »8(*).
Ensuite nous avons Hugo
Barine. C'est le premier rôle, celui qui doit accomplir une
mission qu'il a acceptée mais qu'il répugne à
exécuter. Il est le personnage autour duquel se tisse l'intrigue. C'est
aussi ce personnage à qui le cercle communiste a confié la charge
d'assassiner le secrétaire général du parti. Cette
assertion est aussi évidente dans le deuxième Tableau,
scènes III et IV.
Louis
« Très bien, tu partiras demain avec ta
femme. Il (Hoederer) habite à vingt kilomètres d'ici, dans une
maison de campagne qu'un ami lui a prêtée...le soir que nous te
dirons tu ouvriras la porte à trois camarades qui finiront la
besogne... ».
Hugo
« Non pas du tout ...Je ferai l'affaire
moi-même ».
En troisième rôle, nous avons
Olga Lorame. C'est un personnage féminin certes mais
marqué d'une assez forte masculinité. C'est une militante
politique convaincue et rigoureuse, mais non dénuée de
sentiments. Elle est un peu la conscience de Hugo, une conscience aussi
politique que maternelle qui fait tout et use de toutes les instances pour le
sauver, mais sans succès.
En quatrième rôle, nous
trouverons Jessica, c'est une jeune femme d'origine bourgeoise
et aisée, mais beaucoup plus fine et intuitive qu'il n'y paraît.
Elle est l'innocence, à la fois fausse et vraie, la fausse note et le
faux dans le ballet plutôt mal réglé des consciences
politiques qui l'entourent. Mais elle a très vite compris que son mari,
Hugo, était engagé dans une impasse. Pourquoi ? Parce qu'en
dépit de son apparente légèreté elle sait que Hugo
ne peut être un assassin, et elle le lui dit sur un ton moqueur à
plusieurs reprises.
Jessica
« Ma pauvre petite abeille, si tu veux
me convaincre que va devenir un assassin, il faudrait commencer par t'en
convaincre toi-même ».
Hugo
« Je n'ai pas l'air convaincu
hein ».
Jessica
« Pas du tout : tu joues mal ton
rôle ».
Louis est un partisan
extrémiste du cercle communiste. Il est même plus l'incarnation
des désirs égoïstes que collectifs. Louis
préfère imposer aux membres du Parti sa pensée et en
régir leur conduite. C'est pour cette raison d'ailleurs que la
présence de Hoederer au sommet des prises de décisions
apparaît pour lui comme un grand obstacle qu'il faut vaille que vaille
éliminer. A cet effet, voyons de près l'une des répliques
de Louis :
Louis
« Bon. (À Hugo) Tu comprends bien
la situation. Nous ne pouvons ni nous en aller ni l'emporter au comité.
Mais il s'agit uniquement d'une manoeuvre de Hoederer. Sans Hoederer, nous
mettons les autres dans notre poche ».
Le Prince Paul, fils du
Régent d'Illyrie et Karsky, Secrétaire du Pentagone sont les
émissaires de la bourgeoisie. Ce sont donc ces deux émissaires
qui oeuvrent auprès du Parti clandestin pour la constitution d'un
gouvernement « d'union nationale » face aux Russes
qui ne tarderont pas à se présenter aux
frontières.
Slick et
Georges, deux gaillards très
élémentaires, aux muscles d'acier sont les gardes de Hoederer.
Assurément ce ne sont pas des têtes politiques mais au moins
ont-ils trouvé dans le Parti un emploi et du pain, dès lors sans
doute une conviction. Aussi, sont-ils prêts en échange à
appliquer aveuglément les consignes de fouille qui leur sont
données. Ils restent vigilants à toute personne qui entre chez le
vieux Hoederer car selon les propres mots de Slick : « ce
qui est sûr c'est qu'on veut le tuer ».
Ces deux personnages apparaissent comme
les `justiciers' du Parti. Ils sont en effet les émissaires du Parti. Ce
sont eux qui ont été chargés de tuer Hugo à sa
sortie de prison selon l'ordre du Parti.
2. LA STRUCTURE
INTERNE
2.1.
Définition
Si la structure externe s'emploie
plutôt à étudier la forme de l'oeuvre, l'étude de la
structure interne, quant à elle, concerne le fond donc le contenu de la
pièce. Jacques Scherer opposait la structure interne à la
structure externe qu'il définissait comme l'étude
des « problèmes de fond qui se posent à
l'auteur dramatique quand il construit sa pièce avant de
l'écrire ».9(*)
De ce fait une étude approfondie de
la pièce nous semble nécessaire.
Pour mener à bien notre travail,
nous ferons le résumé de chaque tableau pour établir le
schéma actantiel de Les Mains Sales, et ensuite de
préciser les aspects spatiotemporels de l'oeuvre.
2.2.
Résumé des Tableaux
· Premier Tableau (p. 11 à
34)
Ce premier Tableau nous restitue d'abord
une ambiance, qui est celle d'une situation politique et militaire
évoluant presque d'heure en heure. On est, rappelons le en Illyrie,
c'est-à-dire en Hongrie occupée depuis peu par des troupes
allemandes alors que la pression soviétique s'intensifie aux
frontières. La radio soviétique perce le brouillage et devient
assez distincte pour annoncer la retraite allemande « sur toute
la largeur du front », tandis que les troupes russes sont
à quarante kilomètres de la frontière Illyrienne. Bien que
l'occupation touche à sa fin, il faut être prudent : Olga,
qui a sans doute perçu quelque bruit, éteint la radio. On frappe
à la porte et Olga, inquiète, peut redouter une visite toujours
possible de la Gestapo. Aussi, se munit-elle d'un revolver caché sous
une serviette, pour ouvrir brusquement la porte comme on doit le faire en
pareil cas afin d'éviter de se faire surprendre.
· Deuxième Tableau (p. 35 à
55)
Le deuxième Tableau qui montre Hugo
en transit chez Olga est assimilable à un acte d'exposition : Hugo
y apparaît comme un journaliste insatisfait de sa tâche qu'il
considère comme un pis-aller quand il la compare à ce que font
les autres militants. Au lieu de bien jouer le rôle qui lui est
attribué, il envie celui des autres et cherche à s'en accaparer.
C'est pourquoi, au mépris de ses faiblesses et ses aptitudes et
malgré les réticences de Louis, il veut faire le brave en
s'obstinant à perpétrer tout seul l'assassinat de Hoederer qui
devait être confié à plusieurs acteurs, et ce avec la
bénédiction de Olga qui le soutient dans ses choix. Dès ce
premier acte, le spectateur s'aperçoit qu'il sera une entrave au
fonctionnement habituel du Parti.
· Troisième Tableau (p. 57 à
115)
Le troisième Tableau, en
réalité l'acte II, est une première
péripétie qui permet de mieux connaître Hugo. Son
rôle de perturbateur se confirme avec les incidents survenus lors du
rituel de la fouille : la discipline du Parti est pour lui un carcan
insupportable. Dans sa vie privée, ses rapports quotidiens avec sa femme
laisse voir qu'il est un farceur pour qui la vie est un jeu et lorsqu'il de
manière cinglante : « tu joues bien au
révolutionnaire » (III, 1).
· Quatrième Tableau (p. 117 à
161)
Ce Tableau équivaut au
troisième acte où l'action se noue dans les pièces
classiques en cinq actes. La rencontre au sommet entre Hoederer et les
bourgeois que Louis voulait éviter a bien lieu parce que Hugo, en proie
au doute, n'a pas osé tirer sur son patron. L'avenir du Parti aurait
été compromis si Olga n'avait pas interrompu les pourparlers en
lançant une bombe dans la salle de conférence.
· Cinquième Tableau (p. 163 à
203)
Correspondant au quatrième acte,
c'est la seconde péripétie dans laquelle Hugo, suivant les
conseils de sa femme, change de tactique : au lieu de tuer Hoederer, ne
vaut-il pas mieux le convaincre de renoncer à sa politique
déviationniste ?
Tentative ratée car Hoederer est un
dur à cuire. Mauvais perdant, Hugo refuse de reconnaître qu'il a
été convaincu par les analyses pertinentes et le pragmatisme du
Secrétaire Général. Il fait cette promesse à sa
femme : « demain je finirai le travail ». (V
5)
· Sixième Tableau (p. 205 à
230)
Ce Tableau est d'ordre plutôt
intimiste et se passe uniquement entre Hoederer, Hugo et Jessica. Il est
dominé par la présence un peu insignifiante de Jessica qui a son
idée. Il se terminera par le meurtre de Hoederer par Hugo sans que l'on
puisse savoir exactement s'il s'agit d'une exécution politique telle
qu'elle avait été décidée au début, ou d'un
crime passionnel causé par la jalousie de Hugo à l'endroit de
Jessica.
· Septième Tableau (p. 231 à
247)
Ce Tableau est le troisième segment
temporel de la pièce. Il est symétrique du premier et constitue
un retour au présent, c'est-à-dire en mars 1945 après le
récit (scénifié) par Hugo des événements qui
se sont déroulés deux ans avant, en mars 1943.
Pour Olga, représentante
autorisée du Parti, un certain nombre de questions relatives à la
« liquidation » de Hoederer se posent, questions
qui avaient été sans doute oubliées jusqu'à un
retour incertain de Hugo. Mais Hugo est donc rentré et il fait à
Olga un récit circonstancié de ce qui s'est passé pendant
cette semaine close par l'assassinat de Hoederer et suivie vraisemblablement
par l'arrestation et la condamnation de Hugo à cinq ans de
détention.
2.3. Les aspects spatiotemporels de
Les Mains Sales
Le traitement du lieu et du temps sont des
signes distinctifs d'une oeuvre dramatique. En effet, une pièce
étant écrite pour être jouée, l'auteur se doit
d'inscrire l'action et les personnages dans un milieu et dans une époque
donnés.
Selon Anne Ubersfeld :
« Si la première
caractéristique du texte de théâtre est l'utilisation
des personnes qui sont figurées
par des existences humaines, la
seconde indissolublement liée
à la première est l'existence d'un
espace où ces êtres
vivants sont présents. » 10(*)
Notons toutefois que l'espace dramatique
n'est pas à confondre avec l'espace théâtral. L'espace
dramatique est l'espace qui se situe au niveau du texte dramatique tandis que
l'espace théâtral c'est le lieu de théâtralité
concrète entendu comme l'aire de jeu. C'est, en d'autres termes,
l'espace physique de la fiction dramatique que les personnages investissent
dans l'accomplissement de leur action.
2.3.1 Espace dramatique
Dans la cadre de Les Mains Sales,
deux espaces dramatiques sont à retenir : il s'agit notamment
de : chez Lorame et chez Hoederer. Dans le premier cas,
c'est-à-dire, « chez Olga Lorame » c'est le
lieu où se tiendront ces différentes actions
dramatiques :
ü La conversation entre Olga et Hugo à sa sortie
de prison
ü L'assassinat de Hugo par Charles et Frantz
ü La rencontre de Ivan et Hugo
ü L'entretien entre Hugo, Louis et Olga au sujet du
projet d'assassinat de Hoederer
ü La réunion du Parti avec les
représentants de Régent et du Pentagone.
En dehors de cet espace nous aurons un
autre espace significatif à savoir « chez
Hoederer » le Secrétaire Général du Parti.
C'est aussi le lieu où se déroulent respectivement ces
différents jeux :
ü Le lieu de travail de Hugo Barine
ü La scène de la fouille
ü Les pourparlers entre le Prince Paul, Karsky et
Hoederer
ü La première tentative d'assassinat de Hoederer
par Olga Lorame
ü Le dénouement de toutes les actions de la
pièce « l'assassinat de Hoederer par Hugo
Barine. ».
2.3.2. Temps dramatique
Dans le fait théâtral, il y
a deux temporalités distinctes à savoir le temps scénique
et le temps dramatique. Ainsi, s'agissant du temps scénique il n'est
rien d'autre que le temps vécu par le spectateur confronté
à l'évènement théâtral, le temps
événementiel lié au hic et au nunc, au déroulement
du spectacle. Ce temps se déroule dans un présent continu car la
représentation a lieu au présent.
Le temps dramatique quant à lui est
le temps de la fiction dont parle le spectacle, la fable et qui n'est pas
lié au hic et nunc mais où s'est passé, ou se passera une
action dans un monde de la fiction.
2.3.3. Temps scénique
L'originalité première de
Les Mains Sales est d'avoir fait du temps, ce cadre obligatoire de
toute représentation, un facteur essentiel de l'action. Dans
Les Mains Sales, cette importance du temps apparaît d'abord dans
le fait que cette pièce se passe sur deux ans, ce qui n'est pas
absolument commun. Les indications précises ne manquent pas. Hugo est
entré au Parti en 1942 et l'action proprement dite commence en Mars
1943. Hugo Barine réapparaît chez Olga en Mars 1945 à 9
heures du soir et à la demande de celle-ci, il raconte son
histoire : l'assassinat de Hoederer qui s'est passé deux ans
auparavant. Ces événements sont
« scénifiés » et constituent le
corps de la pièce. Après quoi nous revenons au présent
dans le dernier tableau et il est minuit : Hugo a donc disposé de
trois heures pour faire son récit. On remarquera que c'est le temps
habituel d'une représentation, mais que les événements
évoqués ont duré dix jours.
En effet, en dehors du temps
scénique, il nous faut souligner que dans l'oeuvre, le temps n'est pas
une dimension d'ordre purement cumulatif où les moments et les jours se
suivent et s'additionnent. Le temps dans cette pièce est d'une toute
autre valeur parce qu'il motive et détermine très
précisément tant les phases générales de l'action
que les comportements individuels des personnages.
3. ETUDE ACTANTIELLE, ESTHETIQUE ET
IDEOLOGIQUE
DE L'OEUVRE : Les
Mains Sales
3.1. Le
modèle du schéma actantiel
Cette notion s'est imposée dans les
recherches sémiologiques et dramaturgiques pour visualiser les
principales forces du drame et leurs rôles dans l'action. Pour les
sémiologues, l'utilisation du modèle actantiel devra faciliter
l'approche immédiate de la structure profonde de l'action. Le
modèle actantiel ou encore code actantiel met en exergue l'actant
(à ne surtout pas confondre au personnage).
L'actant dans la conception de Greimas et
Courtes est celui qui accomplit ou subit l'action indépendamment de
toute détermination.
L'actant selon Anne Ubersfeld peut :
« Être une abstraction
(la cité, les dieux, la liberté) ou un
personnage collectif ( le choeur
antique, les soldats d'une armée) ou
bien une réunion de plusieurs
personnages (...) l'opposant à ce
sujet et à son
action »11(*).
Ainsi dans tout schéma actantiel
d'une oeuvre, devons-nous obtenir cette phrase implicite: Une force ou un
être (D1) appelé destinateur conduisant par son action le sujet
(S) à rechercher un objet (O) dans l'intérêt ou l'intention
d'un destinataire ou un être(D2) concret ou abstrait. Dans cette
recherche, le sujet (S) a des alliés appelés Adjuvants (A) et des
opposants (Op). Cette phrase implicite fait appel au schéma des
six cases correspondant à six fonctions. Greimas les structure en les
subdivisant en trois parties.
S
O
D 2
OP
DI
A
L'axe
destinateur-destinataire contrôle les valeurs et idéologies. Il
concerne également le pouvoir et le savoir. L'axe sujet-objet trace la
trajectoire de l'action et la quête du héros et du protagoniste.
Cette trajectoire est parsemée d'embûches, d'entraves que le sujet
a pour devoir de surmonter et avancer : c'est également l'axe du
vouloir.
L'axe adjuvant-opposant facilite ou
empêche la communication. Il produit les circonstances et les
modalités de l'action et n'est pas nécessairement
représenté par les personnages.
Cependant le schéma actantiel n'est
pas figé. La multiplicité des situations ne saurait le rendre
statique. Ainsi, à chaque situation nouvelle correspond un schéma
actantiel différent dans la mesure où les rapports qui fondent
l'action des actants se transforment nécessairement et évoluent
si bien que dans une pièce de théâtre, il peut y avoir
autant de schémas actantiels qu'il y a d'actions.
3.1.1. Proposition de
schémas actantiels dans Les Mains
Sales.
3.1.1.1 Hugo Barine
l'assassin
D1 : Instance du Parti
D2 : Le parti prolétarien
S : Hugo Barine
O : Prise de pouvoir
A : Olga, Louis
Op : Georges, Slick, Léon
Dans le premier cas, l'instance du Parti (D1) ne
cherche qu'à privilégier ses propres intérêts au
détriment du peuple.
Ainsi, pour atteindre son but, le Parti engage le sujet
(S) Hugo Barine à assassiner Hoederer avant qu'il ne signe l'accord de
paix avec les représentants du Régent et du Pentagone.
Le Parti prolétarien (D2) en adoptant une telle
démarche vise la conquête du pouvoir (O). C'est d'ailleurs pour
cette raison, que Hugo Barine est aidé par Olga et Louis, tous membres
du Parti. Malgré sa détermination à vouloir absolument
tuer Hoederer, Hugo va se heurter à l'opposition de Georges, Slick et
Léon qui sont les gardes corps du vieux Hoederer.
3.1.1.2. Hugo
Barine l'assassiné
D1 : Instance du Parti
D2 : Le Parti prolétarien
S : Charles et Frantz
O : Prise de pouvoir
A : Louis
Op : Olga
Dans ce second schéma, après
l'assassinat de Hoederer par Hugo, l'instance du Parti prolétarien (D1)
cherche à préserver sa crédibilité. C'est pour
cette raison que les membres se méfient de Hugo.
Cette raison conduit le Parti à mandater
Charles et Frantz (S) de tuer Hugo dont la libération inopinée
risquerait fort bien de ternir la crédibilité du Parti
prolétarien (D2) qui oeuvre pour la prise du pouvoir (O).
Dans leur tâche, Charles et Frantz seront
farouchement opposés à Olga (Op) qui voit en Hugo une personne
encore récupérable. En dépit des nombreux efforts
consentis par Olga, Charles et Frantz se verront assistés de Louis
(A).
3.2. ESTHETIQUE
A TRAVERS LES Mains Sales
Nous aborderons ici la notion
d'esthétique dans le sens de réflexion sur l'art quoique toute
réflexion sur l'art ne soit pas toujours appelée ainsi. Le mot
esthétique n'est apparu qu'au XVIIIe siècle, sous la plume de
Baumgarten (1714-1762) et ne signifiait à cette époque-là
que théorie de sensibilité en référence à
son sens étymologique grec aisthesis qui signifie beauté.
Le mot esthétique est en rapport
avec une branche de la philosophie qui a pour objet l'étude du beau, son
essence et sa perception. Ce n'est que récemment qu'elle s'est
établie comme science indépendante comportant une méthode
propre, quittant ainsi la réflexion philosophique, la critique
littéraire et l'histoire de l'art, disciplines auxquelles elle fut
toujours confondue.
Il est important de souligner que notre
étude ne porte que sur une seule oeuvre de Jean Paul Sartre. Par
conséquent, elle ne peut avoir la prétention de dégager
les idéaux artistiques de l'auteur, cela n'étant possible que par
l'étude de l'ensemble de son oeuvre. Toutefois, nous voulons
étudier à l'intérieur de Les Mains Sales quelques
aspects esthétiques qui nous serviront de tremplin à la
compréhension de l'oeuvre.
Par rapport au théâtre
contemporain, Sartre caractérise sa dramaturgie d'abord
négativement par un certain nombre de refus (mais ce rapport vaut aussi
pour son propre théâtre).
Il énonce ainsi :
« Il y a trois refus essentiels dans le
théâtre contemporain : le refus de la psychologie, le
refus de l'intrigue, le refus de tout
réalisme ».12(*)
3.2.1. Le refus de la psychologie
L'homme en effet « est une
mine riche en pierre précieuse d'une valeur
inestimable »13(*). Cette richesse lui permet d'être
maître et possesseur de ce dont-il à besoin. De ce point de vue,
la liberté au sens sartrien apparaît pour l'homme comme un besoin
existentielle. En d'autres termes, l'homme ne se réfère à
rien pour exprimer sa liberté. C'est donc en existant qu'il est libre,
donc libre de se faire un caractère selon ses besoins. Réduire un
personnage à sa « psychologie » ou à
son « caractère », c'est
méconnaître que l'individu est d'abord rapport à autrui.
S'agissant de Les Mains sales, il
est en effet difficile d'assigner « un caractère »
aux personnages. Au cour de sa négociation avec le Prince, Paul et
Karsky (p. 138 à 157), Hoederer se met en colère, tient des
propos agressifs, veut s'en aller. Bref, il fait une scène qui contraste
avec le parfait sang-froid des deux autres. Sans doute pourra-t-on toujours
dire qu'il est coléreux, impulsif ou émotif. Mais ce type
d'interprétation qui réfère le comportement à des
traits de caractère, trahit la pièce.
De même Jessica manie volontiers
l'ironie. Mais le comportement ne renvoie pas, là non plus, à un
trait de caractère (par exemple le sens de l'humour). Il manifeste
l'extériorité du personnage par rapport à un univers qui
apparaît souvent comme un monde à l'envers. Les personnages de
Les Mains Sales sont caractérisés par leur sexe (homme
ou femme) leur origine sociale (bourgeois ou prolétaire), leur âge
(jeune ou vieux) donc par des facteurs biologiques ou sociaux et non par des
facteurs psychologiques.
3.2.2. Le refus de
l'intrigue
Sartre revient plusieurs fois sur
l'absence d'intrigue caractéristique de son théâtre
contemporain et dénonce sa confusion à l'action :
« L'action telle qu'on l'entend maintenant au
théâtre, ça veut dire une construction pratique d'une
intrigue par un auteur. Il faut qu'il y ait de l'action ça veut dire
qu'il faut que les conséquences découlent d'une manière
très vite et très nette de prémices, il faut qu'on devine
un peu ce qui va se passer sans quand même le savoir assez etc., et il
faut naturellement qu'il y ait un commencement, un milieu et une
fin ». 14(*)
L'intrigue selon Sartre a deux
caractéristiques ; elle doit obéir à une
logique ; les événements doivent être semi
prévisibles, ni totalement prévus ni totalement inattendus. Dans
Les Mains Sales l'action repose pour l'essentiel sur des effets de
surprise. Le lien de cause à effet étant soit absent comme c'est
le cas par exemple du meurtre provoqué par le hasard soit n'apparaissant
qu'après comme l'attitude de Jessica durant l'épisode de la
fouille qui sur le moment est incompréhensible.
Nous pouvons, sans trop caricaturer, dire que les
événements se produisent quand on ne les prévoit pas et
qu'inversement, ils ne se produisent pas quand on les attend. Hugo est
chargé de tuer Hoederer ; il repousse le meurtre de jour en jour et
finit par accepter l'aide de celui-ci, c'est-à-dire, en renonçant
au meurtre, c'est alors qu'il le tue.
La pièce obéit à deux
rythmes temporels : l'instantanéité des
événements qui se produisent de façon totalement
inattendue (la bombe lancée par Olga, le meurtre de Hoederer,
etc.) ; un temps vide au cours duquel il ne se passe rien. Ainsi, au fil
des jours, Hugo évoque-t-il constamment son meurtre, sans abandonner le
projet ni l'accomplir. Nous avons alors l'impression d'un ralenti
cinématographique ; quand il ne va pas trop vite le temps va trop
lentement.
3.2.3. Le refus du réalisme
Selon Sartre, le réalisme ne nous
présente pas l'homme agissant, mais passif, mû par des forces qui
le dépassent. Ce théâtre du déterminisme et de
l'impuissance est le contraire du théâtre de la liberté et
de l'action que revendique Sartre. Il précise tout de même que le
théâtre doit refuser le quotidien et l'individuel. Les gestes et
les objets, en effet, jouent un rôle important, bien qu'il soit souvent
fait allusion au comportement quotidien des personnages (Hoederer fait son
café et sa cuisine lui-même, il fume, il boit, etc.) À tel
ou tel trait de leur physique (Hoederer a les yeux vifs, Hugo une mèche)
personnages et objets demeurent cependant indéterminés. La
présence de l'objet sur scène n'est pas, selon Sartre,
nécessaire. Lorsqu'il est là son individualité ne compte
(aucun renseignement sur la cafetière de Hoederer ou le revolver de
Hugo). Nous ne connaissons des personnages qu'un très petit nombre de
caractéristiques corporelles ou biographiques, le plus souvent
disparates.
Lorsque Hugo revient de sa première
visite à Hoederer, Jessica lui demande un portrait de celui-ci. Nous
sommes dans la plus pure tradition théâtrale qui retarde
l'apparition du personnage principal et le présente au spectateur avant
qu'il ne soit là. Seulement à l'inverse de ce qui se passe
ordinairement, le portrait ici en forme de fiche d'identité est vide.
Hoederer n'a pas de «signe distinctifs » (p. 61). Nous savons
que Hoederer est un pseudonyme, qu'il a été député
au Landtag et vivait chez un garagiste. Nous apprendrons qu'il a
été marié et c'est tout.
Biographiquement nous connaissons plus
d'éléments concernant Hugo qui est à cet égard le
personnage le plus `dessiné' : âge, origine,
détails sur son enfance, date de son entrée au Parti et autres.
Mais toutes ces caractéristiques restent dans une grande
indétermination. Nous avons donc affaire à des personnages sans
particularités.
3.2.4. La vertu de l'écriture
Si le théâtre de Sartre est
bien apprécié c'est à son style qu'il le doit, en
particulier dans Les Mains Sales. On a apprécié la
modernité de cette pièce, sa grande puissance d'impact qui tient
avant tout à l'acuité et à l'intensité de la phrase
sartrienne. Cette phrase est très éloignée, bien entendu,
de la redondance15(*) oratoire de la tirade. En fait le style sartrien
est à l'image de la situation de théâtre qu'il veut
exprimer. Le théâtre de situation requiert un certain style qui
n'est pas celui de la tragédie classique.
Quels sont donc les caractères de ce
style ?
La phrase est simple, le champ lexical
réduit, les mots sont bruts, sans la moindre valeur suggestive, mais
fortement incisive. Ils expriment des réalités très
nettes, et d'abord les termes précis, soit d'une conduite politique,
soient d'une alternative ou d'un dilemme. Chaque mot de ce fait a une valeur
décisive et exprime de lui-même la totalité de son sens. La
phrase exprime des données d'un problème, le plus souvent sous
une forme disjonctive, c'est-à-dire, en reliant les idées aux
termes ou aux propositions de la phrase.
3.2.5. La valeur incisive et décisive du
mot
On remarquera que seuls sont
évoqués dans la pièce des problèmes. Il n'y a
jamais aucune détente, aucun arrêt, aucun stasimon16(*). Il s'agit de poser les
données d'un problème urgent dont la solution ne souffre guerre
de délais lesquels sont toujours très courts. On ne se
réfère que laconiquement au passé et brièvement
à l'avenir : les échéances les plus longues sont de
dix jours.
Le style de Les Mains Sales,
concis et précis, est l'instrument parfait du jeu tant politique que
psychologique des personnages. Sous leur apparence de langage commun, chacune
des phrases, chacun des mots non seulement sont riches mais définissent
aussi bien un sentiment, un état d'âme qu'une situation
donnée avec l'alternative qu'elle propose. Nous pouvons affirmer qu'avec
Les Mains Sales Sartre a créé une nouvelle forme de
langage, qui est parfaitement un instrument de sa pensée philosophique.
3.3. IDEOLOGIE DE
L'OEUVRE : « Les Mains Sales »
Sidibé Valy définit
l'idéologie comme étant :
« L'ensemble des
idées forces qui fondent et sous tendent l'oeuvre dramatique de
l'écrivain (...) Tout acte et en particulier l'acte de création
est bien élaboré par l'artiste. La modulation des thèmes
au niveau sémantique et l'exploitation que l'écrivain en fait
répondent à une attitude idéologique. Ainsi,
l'idéologie de l'artiste se fera- t-elle sentir souvent en filigrane
sous chaque phrase voire sous chaque mot que l'écrivain produit.
L'idéologie imprègne donc consciemment toutes les
activités humaines aussi bien dans la pratique économique que
dans la pratique politique ».17(*)
Le traitement particulier de l'oeuvre
Les Mains Sales de Jean Paul Sartre traduit une idéologie qui
apparaît de manière explicite et implicite.
Nous abordons maintenant
l'idéologie explicite.
3.3.1. L'idéologie explicite
A la lecture, on constate que l'oeuvre est
une simple mise en page des circonstances politiques et sociales qui
étaient celles de la guerre et de l'occupation. Cette mise en
évidence des conceptions de l'auteur, n'est aucunement gratuite et
prétend régir toute conduite humaine. Mais en fait comment se
traduit cette idéologie à travers l'oeuvre ?
A présent essayons de
présenter l'idéologie de Les Mains Sales.
3.3.1.1. Un théâtre de
situation
Le principe du théâtre
Sartrien se fonde sur le concept de situation et non pas de destin ou de sort.
Le concept de situation s'oppose à celui de caractère chez les
personnages qui sont impliqués dans une histoire, voire une sorte
d'aventure psychologique, morale ou politique qui leur impose des
épreuves que ces personnages n'avaient ni prévues ni choisies et
qui sont le fruit du hasard ou le fait du destin.
La situation elle-même est
l'ensemble des conditions dans lesquelles se trouve quelqu'un à un
moment donné. De là, une extension du concept sous la forme de
l'expression « en situation » abondamment
employée par Sartre. Etre en situation signifie se trouver dans des
circonstances réelles et concrètes, et non dans l'abstrait avec
de surcroît la nécessité le plus souvent de résoudre
au plus vite cette situation. Etre en situation c'est abandonner toute
contrainte, donc d'être libre, quelles qu'en doivent être les
conséquences. Dans le cas d'espèce, Sartre pose à travers
les personnages de Hugo Barine et de Hoederer un dilemme de liberté en
état de situation.
Pour Hugo Barine être en situation
signifie se libérer de toute forme de contrainte, soit-elle
intérieure ou extérieure. Il n'y a pas de contrainte, là
il peut tout faire, il doit seulement s'en convaincre lui-même. Il est
également libre de toute responsabilité, il ne pense au fond
qu'à lui-même. Etre en situation c'est pour lui être en
opposition avec la réalité. La réalité il faut la
surmonter à tout prix sinon on n'est pas libre.
La conception de Hoederer, par contre, est
une conception qui peut fonctionner en collectivité, tandis que celle de
Hugo ne fonctionne que pour l'individu. Pour Hoederer, être en situation
signifie avoir des moyens, des ressources. Etre en situation pour lui c'est
penser non seulement à soi-même mais aussi aux autres. Même
en mourant, il protège Hugo en mentant et en se déclarant
responsable pour un acte qu'il n'a pas commis.
3.3.1.2. Un théâtre
marxiste
Les Mains Sales réunit
tous les traits caractéristiques d'une pièce marxiste. Nous avons
à cet effet tous les fondamentaux du credo marxiste. L'exploitation,
l'injustice, la lutte des classes, l'incarnation du prolétariat dans le
Parti qui de ce fait est infaillible, la nécessaire excommunion des
opposants, la damnation éternelle des dissidents.
3.3.1.3. Un théâtre
tragique
Dans Les Mains Sales, le
héros n'est pas le jouet d'une fatalité aveugle ; il ne
s'avance pas dans la voie qui lui serait assignée par un destin hostile
ou par une imprévisible décision, serait-elle flatteuse. Mais il
est vrai que le tragique c'est lui-même qui le crée par une
volonté parfaitement délibérée et nourrie par la
double ambition d'être et du même coup d'être libre, ce qui
est parfaitement conforme au postulat Sartrien « être,
c'est être libre ».
Cette double ambition l'amène
à prendre ses responsabilités donc à s'affirmer dans un
exploit qu'il lui faut accomplir à tout prix, s'il ne veut pas perdre la
face et la vie. Donc le tragique, ici, est la conséquence d'un choix
assumé et non pas celle du destin.
3.3.2. L'idéologie implicite
L'idéologie implicite d'une oeuvre
dramatique traduit la réalité sous-jacente et subtile du texte.
Cela se perçoit après une analyse minutieuse du texte par le
biais du discours que tiennent les personnages. L'idéologie implicite
est virtuelle, contenue dans l'oeuvre sans être formellement
exprimée. On peut la percevoir par déduction.
A la réflexion, Jean Paul Sartre
pose dans Les Mains Sales les problèmes à un tout autre
niveau. C'est celui d'une stratégie et d'une tactique propres à
réaliser un certain projet dont on pense, à tort ou à
raison, qu'il est bénéfique pour le plus grand nombre donc pour
le pays. Dans Les Mains Sales, le Régent, le Pentagone et le
Parti ont chacun leur conception et cherchent à les appliquer.
Dans Les Mains Sales, nous avons
une illustration vivante du marxisme avec de grandes stratégies
communistes et du socialisme. La pièce présente à cet
effet deux types de classes sociales à savoir la classe bourgeoise
représentée par le Parti au pouvoir et celle des exploités
incarnée par le Parti prolétarien qui se bat pour la
démocratie, pour la liberté, pour une société sans
classes.
La notion de classe sociale est essentielle dans le
marxisme : c'est la base de son analyse critique de la
société. Selon le marxisme, il existe principalement deux classes
dans la société dite bourgeoise et capitaliste, et qui sont
définies par les rapports de production.
La classe des exploiteurs et celle des
exploités, autrement dit la bourgeoisie capitaliste et le
prolétariat. La bourgeoisie possède et détient les moyens
de production, tandis que le prolétariat subit les conditions
draconiennes de travail que lui impose la classe dominante.
Dans cet ordre des principes de la politique marxiste, il
existe une vérité intangible qui a force de postulat ; le
Parti communiste, émanation et incarnation du prolétariat, est
infaillible et ses décisions sont sans appel : quiconque s'y
opposerait en toute bonne foi et pour les raisons les plus valables, serait
réputé traître et traité comme tel. C'est ici le
cas de Hoederer, membre influent et Secrétaire Général du
Parti prolétarien. Ses camarades du Parti ont estimé à un
moment donné qu'il s'éloignait de la droite ligne tracée
par le Parti. Il oeuvrait à ce que le Parti prolétarien s'allie
à la classe bourgeoise en vue de partager le pouvoir avec celle-ci.
Or le Parti prolétarien exige une
fidélité et une soumission aveugle de tous ses membres, en vue de
l'objectif unique qui est la prise du pouvoir. C'est donc pour cette raison que
Hoederer a été qualifié de traître social.
A cette fin, pour la prise du pouvoir, le
seul critère est celui de l'efficacité indépendamment de
toute considération morale ou humaine. De ce fait, les dirigeants du
Parti peuvent se trouver amenés à travestir la
vérité par l'omission, le mensonge et la falsification, et
même s'il le faut la « suppression physique de
l'adversaire », cet adversaire serait-il un militant ou un
dirigeant convaincu. Il peut arriver, en revanche, que le Parti ou certains de
ses membres influents se trouvent dans le cas de transiger et de composer,
momentanément, avec l'adversaire même
« bourgeois ». C'est ce que l'on appellera alors,
dans un cas comme l'histoire de notre corpus, de la part des chefs responsables
du Parti « se salir les mains »,
nécessité à laquelle ils se résignent de plus ou
moins bon gré, sans que leurs scrupules éventuels ne soient
jamais pris en compte.
Quant à l'aspect socialiste de notre corpus,
l'on s'en aperçoit à travers les actions menées par
Hoederer, actions qui ne peuvent se justifier de socialiste qu'en
établissant un rapport avec celles de Hugo Barine.
Etre « socialiste »,
c'est éprouver un sens aigu de l'existence sociale, en
société, et donc une répulsion quasi-instinctive pour tout
ce qui privilégie indûment l'individu et l'individualisme, le
caractère privé de la proprieté, ainsi que la recherche
égoïste par chacun du bonheur individuel. Cet individualisme, c'est
ce qu'affichent les libéraux. Avant tout ils sont pour
l'épanouissement personnel en tous domaines : intellectuel, moral,
économique, politique, culturel et religieux. Ils sont devenus
insensibles aux effets de leur choix idéologique et de leur comportement
pratique.
Pour Hugo Barine, une urgence se fait
voir : sauver et protéger en toute circonstance les
intérêts du Parti, seulement le Parti et rien que le Parti. Hugo,
de ce fait, est en opposition avec la réalité et fait montre de
son individualisme bourgeois qu'il avait avant d'entrer au
Parti. : « Je respecte les consignes, mais je me
respecte aussi moi-même et je n'obéis pas aux ordres idiots qui
sont faits exprès pour me ridiculiser ». Aussi son
individualisme voire égocentrisme se montre tout aussi dans certains
aspects de son discours que nous
évoquons : « Quand l'armée rouge chassera
le régent, nous aurons le pouvoir pour nous seuls ».
A la lecture de ces deux discours et ce, par
contraste, nous constatons que Hugo Barine évoque simultanément
les pronoms « je » et
« nous ». Cette remarque montre combien de fois
Hugo ramène tout à lui. Ces nombreuses énumérations
contrarient du coup la position sinon le désir de Hugo quand il entrait
dans le Parti. : « J'ai adhéré à
ce Parti le jour où j'ai compris ce que c'était l'injustice
sociale... ». Son aspiration en principe était celui
d'oeuvrer pour l'avènement d'une société sans injustice
sociale où chacun serait récompensé en fonction de son
mérite.
La conception de Hoederer, celle qui nous
intéresse le mieux, est celle qui ne peut fonctionner en
collectivité, tandis que celle de Hugo ne fonctionne que pour
l'individu. Hoederer est celui-là même que l'on qualifie de
traître social ; puisqu'il veut collaborer avec le Parti au pouvoir
dans l'intérêt du peuple.
Devant l'avancement de l'armée rouge qui se
traduit par des destructions massives, Hoederer ne voit qu'une seule issue. Son
Parti doit accepter de faire des concessions dans l'intérêt du
peuple : accepter les pourparlers organisés par le Régent en
vue de collaborer avec la classe bourgeoise.
L'avantage pour Hoederer, à travers cet acte,
réside en une simple protection du peuple pour lequel on lutte.
De même, en mourant, il protège Hugo en
mentant, en se déclarant responsable pour un acte qu'il n'ait pas
commis.
A travers cette défense il refuse les
intérêts individualistes et collectivistes aveugles. Il
défend la personne humaine qui n'est pas seulement individualiste mais
aussi sociale.
Conclusion
Partielle
Tout au long de cette première
partie de notre travail, nous avons remarqué que la maîtrise d'un
certain nombre d'éléments techniques ou méthodes d'analyse
contribue à une meilleure compréhension de l'oeuvre
dramatique.
Ainsi, abordant l'oeuvre
théâtrale Les Mains Sales, nous pouvons
révéler dans un premier temps que Sartre a donné une
dimension existentialiste, caractéristique de sa pensée
fondamentale. Selon Sartre la liberté est une donnée
existentielle. C'est en vivant que l'homme donne sens à sa vie. En
dépit de cette considération d'ordre philosophique, nous avons
jugé utile de mettre l'accent sur les éléments
dramaturgiques de l'oeuvre en vue d'en faire une analyse.
L'oeuvre présente une structure
ambiguë. Cette ambiguïté témoigne d'une grande
habileté de la part de l'auteur de se démarquer des règles
classiques dans la perspective d'une nouvelle dramaturgie. De même le
refus de la psychologie, de l'intrigue, du réalisme, la vertu de
l'écriture par l'auteur de Les Mains Sales est une preuve
l'inscrivant véritablement dans la nouvelle dramaturgie. Ce type de
dramaturgie, loin de toute forme de règle en matière
d'écriture, donne la latitude au créateur de ne pas se laisser
guider par une force qui lui est extérieure. Enfin, quant à
l'idéologie qui se dégage, il nous paraît important de
souligner que l'oeuvre présente des traits de caractères propres
au marxisme. A cela s'ajoute aussi les grandes stratégies communistes
qui en résultent.
Avant de développer notre
thème, il nous semble important de donner un aperçu du concept de
la psychanalyse.
« J'ai éprouvé autant de fatigue, de
souci, d'intérêt
et de passion
pour certains personnages de
théâtre que pour les patients que je soignais
comme
psychiatre. »
Yves THORET : La Théâtralité. Etude
freudienne,
Paris, Dunod, 1993.
DEUXIEME PARTIE
BREF APERÇU
DU CONCEPT DE LA PSYCHANALYSE
CHAPITRE I
DEFINITIONS, HISTOIRE ET VOCABULAIRE DE LA
PSYCHANALYSE
Parler de la méthode d'approche
psychanalytique revient à parler de la psychanalyse, Et ce dans le but
de nous permettre de prendre connaissance avec elle pour mener à bien
notre étude.
Partant donc de ce fait, ce chapitre sera
dominé par de différentes définitions et de l'histoire de
la psychanalyse, d'un aperçu des caractéristiques du psychisme
humain, de la signification psychanalytique des actes manqués, de la
sexualité infantile et de la conception psychanalytique des maladies
mentales pour aboutir enfin au choix de la méthode qui nous sera utile
dans notre analyse.
Certes, cette démarche paraît
quelque peu fastidieuse mais nous la jugeons utile. Car elle va nous permettre
de nous familiariser avec un certain nombre de concepts utilisés dans le
domaine de la psychanalyse avant même l'analyse du personnage de Hugo
Barine.
1. Définitions de la psychanalyse
La meilleure définition qu'on puisse
donner de la psychanalyse est sans doute celle qu'avait énoncée
Freud en 1922 :
« La psychanalyse est le nom :1)
d'un procédé d'investigation des processus psychiques qui
autrement sont à peine accessibles ; 2) d'une méthode de
traitement des troubles névrotiques qui se fonde sur cette
investigation ;3) d'une série de conceptions psychologiques
acquises par ce moyen et qui fusionnent progressivement en une discipline
scientifique nouvelle.»18(*)
A la lumière de ces
définitions, le terme désigne tout à la fois une
démarche de connaissance du fonctionnement psychique, une
thérapeutique et une théorie. Chacun de ces concepts demande
cependant à être précisé.
§ La psychanalyse est « Un procédé
d'investigation des processus psychiques qui autrement sont à peine
accessibles».19(*)
Par «processus psychique »,
on entend à peu près tout ce qui se passe au niveau du psychisme.
Mais qu'est ce que le psychisme ?
La meilleure réponse est sans doute de
considérer qu'en tout être humain fonctionne ce que Freud a
à juste titre nommé un « appareil
psychique », c'est-à-dire un système organisé,
qui obéit à certaines lois de fonctionnement et sert un certain
nombre de buts (ce sont ses «fonctions»). Les processus
psychiques, désignent tout ce qui peut survenir au sein de l'appareil
psychique : sensations, émotions, raisonnements logiques, etc.
Aussi faudra-t-il savoir que la démarche
que Freud désigne comme «psychanalyse »
porte sur ces processus dit « autrement à peine
accessibles » parce que, à la différence d'autres
approches, il considère que pour une large part, ces processus sont
inconscients, c'est-à-dire restent inconnus du sujet lui-même.
§ La psychanalyse est « une méthode
de traitement de troubles névrotiques qui se fonde sur cette
investigation ».20(*)
Le terme « névrose » est
hérité de la psychiatrie du XIXe siècle. A
cette époque l'on croyait que ces troubles (de l'humeur, de la
pensée, de la conduite) étaient dus à une
« inflammation des nerfs », mais aujourd'hui cette
conception naïve est abandonnée et le terme
« névrosé » désigne des
troubles de l'appareil psychique. S'agissant des névrosés Freud
fait deux distinctions possibles à savoir, d'une part «les
psychonévroses» (hystérie, phobies) et d'autre part les
«névroses actuelles» développées sous
l'impact d'un traumatisme violent, d'une privation sexuelle insupportable, etc.
§ la psychanalyse est aussi « une
série de conceptions psychologiques acquises par ce moyen et qui
fusionne progressivement en une discipline scientifique nouvelle ».
21(*)Autrement dit,
un corps de connaissances, patiemment élaboré, qui s'efforce de
rendre compréhensibles des phénomènes observables (les
processus psychiques) tout en assurant au mieux sa cohérence
interne ; et ceci par des démarches rationnelles.
Maintenant essayons de donner un aperçu
de l'histoire de la psychanalyse.
2. Histoire
de la psychanalyse
La psychanalyse a pour fondateur Sigmund
Freud, un viennois né en 1856 et mort en 1939. Il est l'inquisiteur de
l'inconscient. Il faut rappeler que pendant ses études, Freud a suivi
le cursus suivant : neurologie, hypnose, étude clinique des
troubles de langage. Il a travaillé avec le Docteur Joseph Breuer
à qui il attribue personnellement la paternité de la
psychanalyse.
Ce ne fut pas facile pour Freud de faire
accepter sa méthode thérapeutique à son entourage. Pour
Freud la méthode cathartique utilisée par Joseph Breuer qui
consiste à mettre le patient sous hypnose afin de découvrir
l'origine des symptômes hystériques est un procédé
incertain car elle ne permet de réduire que temporairement les
contractures hystériques.
Face à une telle position entre Joseph Breuer et Freud
le divorce sera désormais consommé.
A ce procédé Freud va
désormais ajouter la méthode cathartique sans hypnose. Ce
procédé consiste à favoriser la remémoration en
invitant le patient à dire librement ce qui lui vient à l'esprit.
Parallèlement Freud pense aussi qu'à travers cette
démarche thérapeutique il faudra accepter l'importance de la
dynamique sexuelle dans le développement de la psychopathologie.
Chez Freud il faut faire la
différence entre la sexualité comme processus dynamique qui part
de la naissance à l'adolescence et la sexualité comme union des
sexes.
Cette approche permettait de comprendre
également ce qu'est la phobie nommée hystérie
d'angoisse.
Pour faire émerger sa conception,
Freud s'est mis à former des disciples, et les premières
écoles de psychanalyse commençaient à se créer en
Europe et en Amérique. Depuis lors, la psychanalyse a envahi d'autres
disciplines de connaissances. Ainsi pouvons-nous énumérer entre
autres : l'éducation, la littérature, les arts en
général et le théâtre en particulier. Les travaux
psychanalytiques continuent sans répit dans
toutes les directions.
3. Bref
aperçu du vocabulaire des termes psychanalytiques
En dehors de certains termes que nous
avons définis préalablement nous présentons ici d'autres
termes que l'on rencontre en psychanalyse.
3.1 Le
refoulement
C'est le fait de repousser ou de maintenir
dans l'inconscient des représentations (pensées, images et
souvenirs) liées à une pulsion. Il se produit quand la
satisfaction d'un besoin risquerait de provoquer du déplaisir à
l'égard d'autres exigences. Selon Freud « la
théorie du refoulement est la pierre d'angle sur quoi repose tout
l'édifice de la psychanalyse ».22(*)
3.2. Les
complexes
Ce sont un « Ensemble organisé de
représentations et de souvenirs à forte valeur affective,
partiellement ou totalement inconscient. Un complexe se constitue à
partir de relations interpersonnelles de l'histoire infantile ; il peut
structurer tous les niveaux psychologiques : émotions, attitudes,
conduites, adaptées».23(*)
Il y a des complexes très utiles
pour la psychanalyse : le complexe d'Oedipe (ensemble organisé de
désirs amoureux et hostiles que l'enfant nourrit à l'égard
de ses parents).
Le complexe d'infériorité
(ensemble des attitudes, des représentations et des conduites qui sont
des expressions plus ou moins déguisées d'un sentiment
d'infériorité); le complexe d'Electre (terme employé par
JUNG comme synonyme du complexe d'Oedipe féminin pour une
symétrie chez les deux sexes de l'attitude à l'égard des
parents). Le complexe de castration, celui venant apporter une réponse
à l'énigme que pose à l'enfant la différence
anatomique des sexes (présence ou absence du pénis). Le
garçon subit la menace paternelle en réponse à des
activités sexuelles : d'où une intense angoisse de
castration. Chez la fille, l'absence du pénis est ressentie comme un
préjudice qu'elle cherche à nier, compenser ou réparer.
3.3. Le
rêve
C'est la voie royale qui mène
à l'inconscient. C'est l'accomplissement d'un désir. C'est un
scénario imaginé à l'état de sommeil. L'analyse de
son contenu nous fournit le contenu latent de ce scénario.
3.4. Le
fantasme
C'est la représentation imaginaire de
la réalisation d'un désir, qui ne tient pas compte de la
réalité.
3.5. La
censure
C'est la fonction psychique inconsciente qui
fait barrage à l'entrée dans le système conscient des
formations du système inconscient. Freud rapportera ensuite cette
formation de censure à l'activité d'une instance psychique
particulier : le «surmoi».
CHAPITRE II
CARACTERISTIQUE DU PSYCHISME HUMAIN
Dans le souci de mieux cerner les composantes de
l'appareil ou du champ psychique, nous montrerons ici, à travers un
schéma, ses différentes caractéristiques et leurs
spécificités. Mais bien avant, rappelons qu'en tout être
humain fonctionne ce que Freud a nommé un « appareil
psychique », c'est-à-dire un système
organisé qui obéit à certaines lois de fonctionnement.
Précisons aussi que les découvertes dans le domaine de la
psychanalyse étant évolutives, nous sommes allés d'un
premier schéma appelé «première
topique », chaque topique ayant sa spécificité,
pour aboutir à une seconde topique.
Dans le cadre de notre recherche, et ce
pour des raisons d'objectivités, nous avons opté pour le choix de
la « deuxième topique » que nous essayerons
d'expliquer parce qu'elle traduit le mieux possible les éléments
psychiques que nous recherchons pour déterminer les comportements
humains. En effet par topique, il faut entendre la partie de la théorie
psychanalytique qui envisage la personnalité et la conduite sous l'angle
de trois groupes de motivations et d'actions généralement
opposés dans le conflit : le moi, le ça, et le surmoi.
Précisons à cet égard notre schéma psychique.
1. Description dynamique de deux
topiques
1.2 Description dynamique de l'appareil
psychique selon la première
topique
Conscient
X X
Préconscient
X X
Inconscient
X
X X
X
1.2. Description dynamique de l'appareil
psychique selon la
deuxième
topique.
2. Explication
des caractéristiques psychiques
La seconde topique ne vient pas contredire
la première topique. Elle propose une diversification de l'explication
et peut être superposée à la précédente. Elle
compte trois instances : le "ça", le "moi" et le "surmoi".
§ Le "moi" doit assurer une adaptation à la
réalité, là ou le "ça" ne se préoccupe pas
des contraintes extérieures mais le "moi" est aussi le responsable de
nombreuses « défenses » pathologiques. Il
en est de même de la personne dans sa globalité, la raison et le
narcissisme.
§ Le "ça" est le lieu où éclosent
les pulsions, le réservoir à libido, il est totalement
inconscient.
Freud le définit comme
« La partie obscure,
impénétrable de notre personnalité ; nous nous le
représentons débouchant dans la somatique et y recueillant les
besoins pulsionnels qui trouvent en lui leur expression
psychique»24(*)
§ Le "surmoi" est l'intériorisation de l'interdit.
Le "surmoi" se constitue comme le pôle de l'auto agression, l'auto
critique. Mais le moteur qui dynamise tout cet appareil est la pulsion. La
pulsion elle-même est une énergie animant une poussée.
Autrement dit un déplacement et une direction de ce
déplacement.
L'inconscient, le préconscient, et
le conscient sont les composantes de la première topique. Mais quel
rapport y a-t-il entre les systèmes de la première et les
instances de la seconde topique ?
§ Inconscient- ça:
Au sens « topique »,
l'inconscient désigne l'un des systèmes définis par Freud
dans le cadre de sa première topique. Dans le cadre de la
deuxième topique, le terme inconscient n'est plus le propre d'une
instance particulière puisqu'il qualifie le "ça" et pour une part
le "moi" et le "surmoi". Mais il convient de noter que les caractères
reconnus dans la première topique sont attribués au "ça"
dans la seconde.
§ Préconscient - surmoi et moi :
Le préconscient est le terme employé par Freud
dans sa première topique. C'est un système de l'appareil
psychique. Il est séparé du système inconscient par la
censure qui ne permet pas au contenu et au processus inconscient de passer dans
le préconscient sans subir de transformations. Dans le cadre de la
deuxième topique, il est utilisé pour qualifier ce qui
échappe à la conscience actuelle. Du point de vue
systématique, il qualifie aussi des contenus et des processus
rattachés au "moi" pour l'essentiel et aussi au "surmoi".
3. LA
SIGNIFICATION PSYCHANALYTIQUE DES ACTES MANQUES
3.1. Les lapsus
Ce sont des perturbations dans l'emploi de
notre langue, éventuellement d'une langue étrangère, dont
on va démontrer qu'elles contiennent très
généralement un sens que nous ne souhaitons pas exprimer. Ainsi
allons-nous énumérer à ce sujet quelques exemples,
à savoir :
3.1.2. Erreurs de nom
Il nous est arrivé, et quelle gêne
avons-nous alors ressentie, d'appeler une personne d'un autre nom que le sien,
et c'est justement celui de la maîtresse, alors que l'on s'adressait
à l'épouse. Et pourtant, nous avons précisément
pensé au problème avant la rencontre.
3.1.3. Utilisation d'un mot pour un
autre
Nous accomplissons une tâche pénible, en
présence d'un familier ; et très aimablement, nous lui avons
demandé : « Pourriez vous avoir la gentillesse
de me donner un coup de pied ? ».
On devine l'étonnement de l'interlocuteur.
Bien entendu, nous aurions du dire un coup de main.
Quant au coup de pied, c'est nous qui avions envie de le donner, à ce
paresseux, qui nous regardait travailler si passivement.
3.1 .4 . Remplacement d'un mot par son
contraire
C'est un phénomène
particulièrement fréquent.
Freud cite cet exemple célèbre du
président de la chambre des députés autrichienne, qui
ouvrit la séance par ces mots : « Messieurs, je
constate la présence de tant de députés que je
déclare, par conséquent, la séance close. »
L'hilarité générale que sa déclaration suscite
lui permit de corriger immédiatement son erreur. Il semble ici que ce
président, qui craignait le déroulement de cette séance,
ait laissé échapper une partie de sa pensée. Son
désir secret était de voir cette séance se terminer au
plus vite.
Ces quelques cas nous indiquent déjà
que le lapsus est une manifestation ayant son contenu et sa signification
propre. Cet acte « manqué », ne l'est pas
autant qu'il pourrait y paraître ; il traduit une intention qui
existe réellement chez celui qui s'exprime. C'est souvent une intention
peu avouable, en tout cas peu compatible avec la vie en société,
telle que nous sommes habitués à la concevoir.
3.1.5 Les erreurs d'écriture
La psychanalyse met en évidence les fautes,
que l'on n'a pas grande envie d'écrire et qu'on est impatient d'en
finir.
Par exemple, les fausses dates sur les lettres que
nous écrivons : la fausse date, traduit par le jour, le mois, voire
l'année, une pensée qui nous est chère, parfois
pénible, toujours importante. Un désir de voir approcher les
vacances, la crainte d'une échéance, le regret d'un
événement passé, ou encore ces adresses, qu'on nous avait
correctement communiquées, et que nous avons transcrites de travers.
A l'examen, nous découvrons, la crainte que
nous inspirait cette démarche, une impression déplaisante,
etc.
Il est pratiquement rare que nous commettions ce
genre d'erreurs quand il s'agit d'accomplir une action qui nous est
agréable. Si cela était, nous sommes en mesure d'affirmer que
c'est en raison d'un sentiment de culpabilité lié à ce
plaisir égoïste que nous allons accorder, comme une sorte
d'autopunition.
CHAPITRE III.
LA SEXUALITE INFANTILE ET LA CONCEPTION
PSYCHANALYTIQUE DES MALADIES MENTALES
1. La sexualité
infantile
Chez l'enfant on retrouve en germe, toutes
les caractéristiques de ce qui plus tard sera appelé perversion.
Tous les fantasmes refoulés, des
névrosés, acceptés de l'homme normal, existent tout
d'abord chez l'enfant, et c'est chez lui que se détermine leur
devenir.
Il nous paraît important avant
d'entrer dans le vif du sujet de définir ce que Freud entendait par
sexualité.
Il ne s'agit pas du sens commun
limité aux actes sexuels, aux choses indécentes ou perverses.
Freud rattache la sexualité à la notion de libido, qui est
à la sexualité ce que la faim est à la fonction digestive.
Cet instinct sexuel ou libido pousse l'homme à satisfaire une excitation
qui ne peut être soulagée que par des pratiques d'ordre sexuel.
1.1. Le stade de développement
de la sexualité infantile
Nous allons étudier successivement
quelques phases utiles de développement sexuel de l'enfant et nous nous
devons de souligner ce point particulièrement intéressant.
Chaque phase de son développement
apparaît dominant dans toute l'existence du sujet, définissant
ainsi les différents caractères.
1.2. Le stade oral
« Quand on a vu l'enfant rassasié,
abandonner le sein, retomber dans les bras de sa mère,et (...) avec un
sourire heureux, s'endormir, on ne peut manquer de dire que cette image reste
le modèle de l'expression de la satisfaction sexuelle qu'il
connaîtra plus tard ».25(*)
Ainsi s'exprime Freud quand il traite du
plaisir de la succion, qui caractérise le stade oral. En effet, tous les
caractères du plaisir sexuel se trouvent dans cet acte :
désir, excitation, plaisir, apaisement de l'excitation.
L'enfant éprouve le maximum de
plaisir à ce stade soit en suçotant une partie de
lui-même, soit un objet extérieur à lui, mais qu'il peut
maîtriser : tétine, oreiller, couverture.
On constatera cependant par la suite que
tous ceux qui ont été des enfants suçoteurs seront
intéressés par le baiser mais seront également des
fumeurs, etc.
Cette pulsion pourra aussi parfois
être refoulée c'est-à-dire refusée par l'adulte qui
mettra alors au premier plan toutes les exigences de son milieu
immédiat.
1.3. Le stade anal
Ce stade vient à la suite de la
phase orale. C'est la découverte par l'enfant du plaisir ressenti en
retenant, ou en évacuant au contraire des selles.
Nous trouvons ainsi tous les caractères de l'excitation
par frottements, puis du soulagement par évacuation. Un caractère
est particulier à ce plaisir : l'enfant peut maîtriser son
activité anale qui reste dépendante du rythme qu'il peut choisir
et de son désir.
Toutefois, l'enfant n'est pas
indifférent aux sollicitations de sa mère, par exemple. Il
perçoit rapidement qu'il provoque chez elle l'angoisse en retenant trop
ses selles et au contraire qu'il lui fait plaisir en évacuant ses
selles.
1.4. Le stade
génital
Il est curieux de constater que, au
début de l'existence de l'enfant, les organes génitaux ne sont
pas le siège des sensations de plaisir les plus importantes.
Ils ne viennent qu'en troisième
position, après les lèvres et l'anus.
La découverte du pénis chez le garçon, du
clitoris chez la jeune fille, se fait à l'occasion de l'activité
urinaire, mais aussi par la manipulation par l'enfant lui même ou par sa
mère. Le plaisir découvert, il entraîne le besoin de
répéter l'excitation, qui a donné du plaisir. Celui qui a
connu un plaisir n'a de cesse de le répéter et de
préférence le reproduire par lui-même, c'est à dire
maîtriser la quantité du plaisir qu'il peut se donner.
C'est ce qu'on appelle la
masturbation ou onanisme.
Ces gestes sont reproduits plus tard en
pleine conscience, ce sera la masturbation du garçon, par frottement de
la verge, et pour la fille, par attouchement du clitoris.
Ce processus peut être refoulé,
ce qui entraîne alors souvent des troubles de caractères, des
cauchemars, etc.
1. La conception psychanalytique des maladies mentales et les
traits
de caractères qui en
résultent
Tous les humains ont des traits de
caractères qui rappellent que l'inconscient n'existe pas que chez les
malades mentaux. Ceci a permis d'établir une typologie,
c'est-à-dire de classer les humains en grands types de
caractères.
Très souvent, le caractère
d'une personne présente des traits de plusieurs types. Nous
étudierons successivement les caractères : narcissiques,
phobiques, obsessionnels, paranoïaques, hystériques, cycliques et
shizoïdes.
2.1. Le caractère
narcissique
Il est caractérisé par
l'amour de soi.
Ce sont des sujets confiants en
eux-mêmes, parfois agressifs, arrogants, provocants, parfois
courageux.
Il est curieux de constater que ce sont
les personnes les plus préoccupées d'elles-mêmes qui
déclenchent le plus aisément un réflexe amoureux chez les
autres.
2.2. Le caractère
phobique
Le phobique se conduit dans la vie de
façon à éviter systématiquement les situations
qu'il avait primitivement désirées.
Le comportement phobique traduit un
désir de punition, en s'interdisant une activité qui pourrait
être génératrice de plaisir, donc de culpabilité.
Ainsi certains caractères sont
assimilés à ce type de structure : la timidité, la
difficulté à apprendre, à travailler, à s'exprimer,
le désintérêt pour la musique, la peinture, etc.
2.3. Le caractère
obsessionnel
Ce sont des sujets sur lesquels on peut
compter. Ils sont fidèles, sérieux, tolérants,
travailleurs, méticuleux. Ces sujets sont peu spontanés
réservés, peu chaleureux, peu expansifs. De même, ils ont
un net penchant pour les activités intellectuelles et pour les plaisirs
sublimés, les discussions, les critiques.
Aussi, recherchent-ils souvent la
perfection au détriment du coté créateur, qu'ils
répugnent. Ils font souvent plus que l'on ne leur demande, de
façon à paralyser l'autorité sous une apparente
soumission.
2.4. Le caractère
paranoïaque
L'univers de l'individu est fait de
méfiance, de crainte, de rancoeur, d'inquiétude, de
soupçon, de sentiment pénible d'être incompris par ses
semblables, d'être isolé parmi les hommes.
Le trait commun, dans cette
catégorie est une surestimation de soi. Son raisonnement est faux, mais
il ne supporte pas la contradiction. Il démontrera le moindre fait, pour
prouver une intention cachée plus ou moins malveillante.
Il est évident que les relations
sociales sont difficiles. De même, il se défend de ses propres
désirs, en les prêtant volontiers à son entourage.
S'il se déteste lui-même
d'avoir un amour pour une autre personne, il prêtera à cette
personne les intentions les plus malveillantes.
2.5. Le caractère
hystérique
Si le caractère obsessionnel se
retrouve plus volontiers chez l'homme, la femme a l'apanage du caractère
hystérique. C'est ce que l'on appelle communément une
« nerveuse ». Elle est émotive,
impressionnable, sujette aux crises de nerfs. Elle absorbe
l'intérêt de l'entourage par ses caprices, sa vanité, son
don de raconter une histoire qui va jusqu'à la fabulation et au
mensonge. Les échecs de ses tentatives de séductions se
traduisent souvent par des gestes spectaculaires, du tapage, de la
colère, du désespoir, voire, une tentative de suicide.
Mais il ne faut pas s'y tromper : cette
séduction, ces efforts sont l'unique activité sexuelle
déplacée de ces sujets. En fait, ces manifestations masquent une
peur de réaliser l'acte sexuel lui-même. Elle érotise ses
rapports avec tout son entourage, pour ne pas agir dans la
réalité, pour ne pas faire face aux conséquences logiques
de son attitude ; c'est
une « allumeuse ». Profondément, il y
a donc un conflit entre des pulsions sexuelles exigeantes et des interdits dont
la source remonte à l'enfance.
2.6. Le caractère
cyclique
Ce sont des sujets dont
l'équilibre est très fragile. Ils passent en un instant de la
jubilation et l'excitation joyeuse, à la dépression la plus
noire.
Ce qui les caractérise, c'est un énorme besoin
d'être aimé. Dès qu'ils ont trouvé une affection,
ils ont un sentiment de triomphe, sans pour autant penser à rendre cette
affection. Leur avidité est énorme, et si elle n'est pas
satisfaite, au moindre avatar, ils ressentent une impression douloureuse
d'abandon, de solitude, qui peut disparaître au moindre espoir de
reconquête amoureuse.
2.7. Le caractère
shizoïde
Il est tyrannique et exigeant pour ses
proches.
Dans ses contacts avec autrui, il apparaît bizarre,
fuyant, attirant guère la sympathie. Il a parfois des passions, souvent
rattachées à des idéaux élevés, confus. En
d'autres termes on pourrait dire que c'est l'état du mental
caractérisé par la tendance à la solitude, au repliement
sur soi-même, à la rêverie, et par une difficulté
d'adaptation aux réalités externes.
CHAPITRE IV
CHAMP D'ORIENTATION ET PRESENTATION
DE LA METHODE D'APPROCHE
PSYCHANALYTIQUE
En considérant les
définitions que nous avons données au sujet de la psychanalyse,
nous pouvons retenir que la psychanalyse est une discipline qui vise à
expliquer tout ce qui est de l'ordre de l'inconscient dans les paroles, les
actions, les productions imaginaires d'un individu donné.
Dès
lors « l'approche psychanalytique » serait
l'étude explicative des phénomènes inconscients issus de
la décomposition des éléments psychiques du sujet.
Parallèlement à
d'autres disciplines scientifiques, la psychanalyse a connu une
évolution pour parvenir à ce qu'elle soit aujourd'hui. Ses
procédés techniques ont eux aussi connu beaucoup de
changement.
1. La méthode cathartique et la
méthode de la simple suggestion
Dans ses débuts, la
psychanalyse était basée sur la méthode cathartique.
Celle-ci fut trouvée à la suite de l'examen d'une malade
nommée Anna O...
Anna O... fut une hystérique
tout à fait exemplaire. Elle était soignée par le Dr
Breuer, ami de Freud. Jeune (elle avait vingt et un an), intelligente et belle,
elle avait vu ses troubles apparaître après la mort de son
père. Le symptôme le plus étonnant était sa
capacité de passer d'un état conscient ou elle était
normale et pleine de vivacité à un autre état de
conscience, où elle avait le comportement d'une petite fille
insupportable et mal élevée. Breuer, en examinant sa patiente,
avait découvert que chaque fois que Anna O... évoquait un
symptôme et qu'elle en trouvait la cause, le symptôme
disparaissait.
Ainsi naquit une technique que
Breuer appela « catharsis » ce qui
signifie « purge de l'âme » ;
cette méthode est tirée de la catharsis d'Aristote au sujet de la
tragédie. Ce fut la première méthode.
Au fil du temps Freud va renoncer
à la méthode hypnotique. Il lui substitue :
« La simple suggestion (aidée par un
artifice technique une pression sur la main du patient) destinée
à convaincre le malade qu'il va retrouver le souvenir
pathogène ».26(*)
Finalement, l'inquisiteur de
l'inconscient ne recourra plus à la suggestion ; il se fiera tout
simplement à une autre méthode avec de nouveaux
procédés techniques : plus d'hypnose, plus de main sur le
front. Cette méthode s'appelle la méthode ou la règle de
la libre association suivie de l'interprétation.
2. La méthode de la libre
association
S'agissant de la méthode de
la libre association il convient de mentionner l'origine de ce concept.
Les idées, disait
Aristote, « sont associées par
contiguïté, esimilarité et contraste ».
Plusieurs d'autres
philosophes ont, depuis, développé le concept d'association
d'idées, mais c'est à Freud que revient le nouvel élan
donné à l'usage de ce concept et son utilisation comme technique
de base dans la psychanalyse.
Freud « se
rendit compte qu'il était possible de déduire des
éléments d'information sur les déterminants inconscients
du comportement, en encourageant l'association libre et sans restriction chez
les patients... »27(*)
La méthode de la libre association,
enfin, est la règle fondamentale.
Maurice Bouvet l'énonce ainsi :
« Le sujet, mis dans les meilleures conditions
pour que puisse se dérouler librement le jeu de sa pensée, doit
verbaliser sans aucune idée préconçue et sans rien
omettre, tout ce qui lui revient à l'esprit : non seulement les
pensées, les images, mais aussi les affects, les envois, les sentiments,
tout aussi bien d'ailleurs que les impressions sensorielles ou sensitives dont
il est objet ».28(*)
De façon plus claire, cette
règle consiste à exprimer sans discrimination toutes les
pensées qui viennent à l'esprit (mort, nombre, image, rêve,
représentation quelconque) soit à partir d'un
élément donné soit de façon spontanée.
L'interprétation qui s'en suit
désigne une mise en évidence du contenu latent du récit
d'un patient. Elle vise le «désir et le
fantasme » qui se formulent dans toute production
inconsciente.
S'agissant de la libre association, elle
fut d'une grande utilité dans l'élaboration de la théorie
freudienne. Freud en l'utilisant dans son auto analyse permet à
l'humanité de ne jamais s'étonner devant un quelconque
comportement mais à travers des procédés techniques
résultant de cette méthode de savoir l'interpréter, et ce
afin d'y remédier. Elle permet à Freud d'étudier
Oedipe-Roi de Sophocle, trouvant là une explication à son
comportement d'enfance : l'amour pour le parent de sexe opposé et
les sentiments de haine envers le parent de même sexe. C'est en ces
termes qu'il s'explique :
« J'ai trouvé en moi comme partout
ailleurs des sentiments d'amour pour ma mère et de jalousie envers mon
père, sentiments qui sont, je pense, communs à tous les jeunes
enfants. S'il en est bien ainsi, on comprend, en dépit de toutes les
injonctions rationnelles qui s'opposent à l'hypothèse d'une
inexorable fatalité, l'effet saisissant d'Oedipe-Roi .Chaque auditeur
fut un jour en germe, en imagination un Oedipe et s'épouvante devant la
réalisation de son rêve transposé dans la
réalité, il frémit suivant toute la mesure du refoulement
qui sépare son état infantile de son état actuel
».29(*)
Il en est de même pour la dynamique
des états psychologiques en clinique. C'est le fait de Le Roi Lear
de Shakespeare.
Cette pièce révèle « la
mise en oeuvre des mécanismes psychologiques puissants, mobilisant les
tréfonds de l'âme».30(*)
Notons que la
« folie » du Roi permet d'expliquer ce
mécanisme clinique. Ces découvertes sont de l'histoire de Lear,
dans l'analyse de son comportement.
Voilà ce qui nous conduit vers la
méthode d'approche psychanalytique pour analyser le personnage de
théâtre. Ainsi, contrairement au malade en clinique qui raconte
tout ce qui lui vient à l'esprit, c'est l'histoire du personnage, ses
rapports avec les autres, son cadre de vie, ses actes posés, qui
constitueront notre support analytique.
Pour ce faire, une lecture seconde est nécessaire et
obligatoire.
Cette technique est analogue à celle de la libre
association. Mieux c'est son adaptation à l'étude
théâtrale. Ensuite un autre procédé obligatoire
s'impose : l'interprétation. Pourquoi un tel comportement ?
Qu'est ce qu'il signifie pour le psychanalyste ? Quel rapport peut-il y
avoir entre l'inconscient et l'acte posé ?
Conclusion partielle
La psychanalyse a pour domaine
d'étude le psychisme humain. Elle apporte une ou des explications aux
réactions anormales du psychisme régissant nos comportements. A
cette définition, nous avons jugé utile de préciser le
rôle déterminant de la sexualité dans le
développement des caractères ultérieurs. C'est
à travers la cure psychanalytique, au moyen de l'association libre, que
le sujet peut retrouver tous ces facteurs qui ont été sur le
moment sans importance.
La méthode de la libre
association que nous avons choisie est une méthode essentielle dans
l'analyse psychique du patient. Cette analyse appliquée au personnage
de théâtre ne sera possible que grâce à l'histoire du
personnage, et surtout à ses tendances.
La méthode d'approche
psychanalytique ainsi présentée, nous ferons son application
pratique à l'étude de notre personnage (Hugo Barine). Cette
étape constituera la dernière partie de notre étude.
« Les poètes et les romanciers sont, dans
la connaissance de l'âme, nos maîtres à tous (...) notamment
en matière de psychologie, parce qu'ils s'abreuvent à des sources
que nous n'avons pas encore rendues accessibles à la science. Ce sont
de précieux alliés et il faut tenir leur témoignage en
haute estime car ils connaissent, entre ciel et terre, bien plus de chose que
n'en peut rêver notre sagesse d'école. »
Sigmund FREUD : Délire et rêves dans la
Gradiva de Jensen, Paris, Gallimard, 1986
TROISIEME PARTIE
APPLICATION DE LA METHODE D'APPROCHE
PSYCHANALYTIQUE
A L'ETUDE DU PERSONNAGE DE HUGO BARINE
Il s'agit pour nous de faire l'application de la
méthode psychanalytique présentée à la fin de la
deuxième partie de notre travail. Cette analyse, s'appuyant sur la
connaissance de la psychanalyse, des mécanismes psychiques, cherche
à ;
- "Fonder dynamiquement la personnalité de
l'individu d'après ses réactions";31(*)
- "Dévoiler aussi bien ses forces
psychiques, primitives que leurs transformations et développements
ultérieurs"32(*)
Ce but visé par l'approche psychanalytique
n'est possible que grâce à un certain nombre de
données ;
v D'une part, le hasard des événements et
l'influence du milieu ;
v De l'autre, les relations connues d'un individu
donnée
Pour notre travail, nous avons choisi la
méthode de la libre association. Elle s'effectuera dans l'ordre
suivant :
- Elucidation des différentes définitions du
personnage et leurs traits de caractérisation.
- Rappel de l'histoire de Hugo Barine.
- Les Grandes tendances de Hugo Barine suivies de
l'interprétation psychanalytique.
CHAPITRE I
LE PERSONNAGE
I. Définitions
Trouver la définition idéale du
personnage, c'est partir de plusieurs définitions à son sujet.
Cependant, notre étude est basée sur le théâtre.
Ainsi la définition idéale se doit bien sûr de se
rapprocher d'une définition générale du personnage dans
les oeuvres littéraires, car le théâtre est avant tout une
oeuvre, un texte. Dans le Dictionnaire Le Robert, le personnage connaît
quatre définitions. La première correspond à `'une
personne qui joue un rôle social important et en vue `'. La seconde le
présente comme étant une `'personne qui figure dans une oeuvre
théâtrale et qui doit être incarnée par un acteur ou
une actrice `'. La troisième définition le
considère comme une personne considérée quant à son
comportement. Cette dernière définition dit que c'est un
`'être représenté dans une oeuvre d'art `'.
Selon Roland Barthe, c'est un `'être de
papier''. C'est donc dire que son existence est limitée aux oeuvres
littéraires.
Notons de prime abord que l'expression `'personnage
`'est une métaphore, car il n'existe pas en réalité.
Toutefois nous retiendrons que le personnage est un être qui a vu le jour
sous la plume d'un quelconque dramaturge (ou écrivain en
général) en qui l'on voit une personne qui joue un rôle
social important ; une personne considérée quant à
son comportement; un être humain représenté dans une
oeuvre d'art.
Nous venons de définir brièvement le
personnage. Mais quels sont les traits de caractérisation du
personnage ?
2. LES TRAITS DE CARACTERISATION DU
PERSONNAGE
2.1. Une construction textuelle
Dire de quelque chose qu'il est une construction
textuelle, c'est affirmer qu'il est créé à partir des
écrits d'un écrivain.
Ainsi quand Anne Ubersfeld définit le
personnage comme étant `'un être de papier `', elle admet son
caractère textuel. En effet, le personnage de théâtre est
en premier ressort le produit fini de l'imagination du dramaturge. Il vit donc
dans l'oeuvre. Il entretient des rapports avec son environnement ; il
parle sans se faire entendre. Il ne communique avec l'extérieur que par
la lecture. Dès lors il est discours, signe, élément
textuel que la sémiologie se chargerait d'étudier.
Etant construction textuelle le personnage de
théâtre possède un « moi »,
mais un moi de papier car propre à l'être de papier. Un
élément important à relever : son monde est un monde
du possible.
Vivant dans ce monde, il a un caractère fictif.
Phèdre (de Racine), Nahoubou (Bernard Dadier), Prométhée
(Eschyle), Tino aga (JP Guingane), Hugo Barine (Jean Paul Sartre) sont avant
tout, des êtres de papier ; ils sont fictifs car produits de
l'imagination de leurs créateurs.
2.2. Le personnage est toujours
joué
Quand le personnage foule le plancher, la
scène, il passe du monde du possible au monde du concret, de la
construction textuelle à la construction scénique. En ce moment,
il « rencontre sa matérialité, le signe sa
signification et la parole son destinataire ».33(*)
Cette métamorphose n'est possible que
grâce à un être, bien sûr, vivant : le
comédien. On parle à cet effet d'incarnation du personnage par le
comédien. On entend donc celui-ci rire, parler, crier. Ce mouvement
montre que l'auteur dramatique n'écrit pas seulement un texte mais les
répliques d'un personnage ; l'auteur crée ainsi
« un fantôme provisoire (...)
délibérément placé en position d'attente, dans une
zone intermédiaire ». 34(*)
Le personnage tisse la ligne personnage
-comédien. A cette ligne s'ajoute un troisième pôle, le
spectateur grâce auquel se constituera un triangle
comédien-personnage-spectateurs. Ce dernier élément va
faire naître le spectacle (la participation du spectateur à la
représentation théâtrale).
La construction textuelle devient construction
scénique par une sorte de magie, un tour de main, par l'imagination d'un
élément primordial au théâtre : le metteur en
scène. Celui-ci reconstitue le personnage de façon à
l'adapter aux besoins de la scène, à sa propre vision selon le
but à atteindre, mais tout en le gardant proche du personnage avec la
psychologie. Par exemple Hugo Barine dans l'oeuvre dramatique de Jean Paul
Sartre, se présente comme un assassin, narcissique, agressif, etc. Nous
le préciserons dans le chapitre consacré à l'analyse des
caractères de Hugo Barine.
Dans le jeu représentatif, malgré les
modifications du metteur en scène afin de le rendre concret, il gardera
ses mêmes caractères.
2.3 Le personnage n'est que
transposition
Le théâtre à n'en point douter
est la représentation de la réalité, une mimésis
sociale. Ainsi, la société est-elle sa source d'inspiration.
C'est donc une partie sociale.
Ceux qui, au théâtre, actionnent cette
imitation à l'exemple des hommes des êtres de chair et d'os sont
bien les personnages. Dès lors, nous pouvons admettre que le personnage
est la représentions des êtres de la société
réelle.
Le personnage de Hugo Barine trouve son semblable dans
la société. D'ailleurs son comportement d'assassin et
d'égoïste que nous étudierons se décèle dans
plusieurs personnages réels. Le personnage n'est pas une manifestation
réelle de l'être dans l'ici et maintenant, mais dans un ailleurs
qui n'est pas dans l'oeuvre, sur la scène. A cet instant, nous notons
que le personnage n'est que transposition. Nous voyons là un trait
essentiel entre le théâtre et la psychanalyse.
A la suite d'un tel rapport, une question s'offre à
nous : dans quelle mesure l'application de la méthode d'approche
psychanalytique à l'étude des personnages de théâtre
pourrait-elle nous aider à décortiquer les traits
caractéristiques de ces derniers ?
Une application de la méthode d'approche
psychanalytique à l'étude de notre personnage nous en situera
davantage.
CHAPITRE II
RAPPEL DE L'HISTOIRE DE HUGO BARINE
Hugo Barine âgé de vingt et
un ans est entré au Parti en 1942, lorsque le Régent d'Illyrie a
déclaré la guerre à l'URSS.
Entré au Parti, Hugo a pour pseudonyme
RASKOLNIKOFF. A la question de savoir la signification d'un tel nom, telles
sont ses répliques à la demande de Ivan, un camarade du Parti.
Hugo, avec empressement
Moi, je ne demande pas mieux, comment
t'appelles-tu ?
Ivan
Dans la clandestinité, je suis Ivan, et
toi ?
Hugo
RASKOLNIKOFF....C'est mon nom dans le Parti.
Ivan
Qu'est-ce qu'il fait ?
Hugo
Il tue.
Un tel pseudonyme n'est pas le fait d'un simple hasard, car
il collerait bien avec la mission pour laquelle Hugo Barine sera
conviée. Dans le Parti prolétarien auquel il appartient, le
cercle de camarades estime qu'il faut « éliminer »
Hoederer Secrétaire Général du Parti qui veut bien se
servir du Parti pour en faire une politique de collaboration de classe dans le
cadre de l'établissement d'une économie capitaliste avec le Parti
au pouvoir. A cet effet, Hugo Barine offre aux camarades du Parti (Olga et
Louis) ses services de tueur. Rappelons au passage que Olga Lorame et Louis
sont exactement un couple parental. Il s'agit là, pour Hugo Barine de
ses parents d'adoption.
Hugo rappelle à Louis sa
détermination à accomplir une telle mission tout en le rassurant
et lui demandant d'avoir confiance en lui.
D'abord, Hugo passe en revue ses différentes
stratégies pour atteindre sa cible (Hoederer).
Hugo
En Russie, à la fin de l'autre siècle, il y
avait des types qui se plaçaient sur le passage d'un grand-duc avec une
bombe dans leur poche. La bombe éclatait, le grand-duc sautait et le
type aussi. Je peux faire ça.
A travers cette réplique, l'on entend
de la part de Hugo Barine de vouloir accomplir un acte de terrorisme. Mais cela
ne s'entend pas ainsi.
Louis
......un intellectuel anarchiste. Tu as cinquante ans de
retard. Le terrorisme c'est fini.
Hugo
Alors, je prendrais un pétard et j'irai descendre
un flic sur la place royale ou avec un peu de chance un milicien.........et
puis j'attendrais à coté du cadavre......
Cette seconde proposition de Hugo ne ferra
pas bonne route non plus. Le Parti lui demande alors de servir comme
secrétaire chez Hoederer.
Hugo Barine considère l'acte
d'aller servir chez Hoederer en tant que son secrétaire, comme une
occasion qui vient point nommé pour tuer Hoederer dont la politique
serait jugée d'« inconcevable ». A
cette proposition le Parti ajoute qu'il facilitera la tâche a trois
camarades qui achèveront vite la besogne. Mais Hugo se montre
catégorique par son refus et se voit à même d'accomplir
seul cette mission.
Hugo
Non pas du tout : je ne veux pas faire le mouton. On
a des manières, nous autres - un intellectuel anarchiste n'accepte pas
n'importe qu'elle besogne ..... Mais voici ce que je propose ....je ferai
l'affaire moi-même.
Déterminé à vouloir
vaille que vaille tuer, Hugo sur proposition du Parti se rend finalement chez
Hoederer avec son épouse Jessica.
A leur arrivée chez Hoederer, arrive la question de
la fouille sinon du contrôle. Slick et Georges sont les deux
`'garde-corps'' du vieux et sont mandatés par ce dernier de
contrôler tous ceux qui franchiraient le grand mur de sa
résidence. Mais, Hugo refuse de se faire fouiller, les discussions
s'enveniment. Hoederer arrive et joue un rôle de pacificateur.
Les antagonistes se ressaisissent alors.
Hoederer, en dehors des clivages politiques, considère le petit Hugo
au même titre que ceux qui exercent chez lui. Il le considère
comme son enfant. C'est ainsi qu'il cherche à l'instruire, à
l'enseigner, à le former et pour tout dire à l'adopter selon son
éthique à lui. Devant la ` magie'' et le caractère
attrayant de ses mots Hugo Barine, voit en lui un père plutôt
qu'un rival au détriment de son père naturel et légal.
Il le hait, refuse de le
considérer comme son fils et le quitte. Ceci est souligné par les
répliques suivantes :
Karsky
J'ai rencontré votre père la semaine
dernière. Est-ce que ça vous intéresse
encore d'avoir de ses nouvelles ?
Hugo
Non...
Karsky
C'est fort possible que vous porterez la
responsabilité de sa vie.
Hugo
Il est à peu près certain qu'il porte la
responsabilité de ma vie. Nous sommes quittés.
Il est éblouit par l'attitude
fascinante de Hoederer. En conséquence (Hugo) commence à perdre
de vue son objectif et éprouve plutôt de la sympathie pour le
vieux.
Cela ne se passera pas ainsi, Jessica a
compris que Hugo était dans une impasse totale et qu'il n'accomplirait
sa mission pour les seuls motifs d'ordre politique.
Il faut donc créer non pas un autre
motif, mais un autre mobile pour entraîner Hugo à faire son geste.
Et ce mobile sera la jalousie, la pure et simple jalousie amoureuse, et ici
conjugale, qui cause les crimes passionnels.
Jessica va donc provoquer Hoederer et jouer
le grand jeu de la coquetterie. Elle cherchera à cet effet
à tromper la vigilance du vieux en l'embrassant. Sans hésitation
le vieux va se laisser prendre au piège. Hugo entre donc dans le bureau
de Hoederer. Il trouve Jessica dans les bras de Hoederer et comprend comme un
éclair « c'était donc ça ».
Hugo bondit jusqu'au bureau prend le
revolver et vise Hoederer tout à loisir pour bien lui montrer
parfaitement qu'il est le maître, et capable -malgré
Les dénégations de son
« patron » de faire « en bon
assassin ».Trois coups sont tirés. C'est la catharsis
totale. Hugo se sent libre d'avoir honoré son engagement. En fait Hugo
a-t-il tiré par jalousie par rapport à Jessica, ou un
désir d'en finir à tout prix et de sortir de l'impasse où
il s'était engagé ? Cette scène nous en situe.
Olga
Est-ce que c'était vrai ? Est-ce que tu l'as
vraiment tué à cause de Jessica ?
Hugo
Je .....Je l'ai tué parce que j'avais ouvert la
porte....moi. Je vivais depuis longtemps dans la tragédie. C'est pour
sauver la tragédie que j'ai tirée.
Hugo Barine a accompli sa mission `'tuer
Hoederer''. Il sera inopinément incarcéré pour cinq ans.
En prison, il est loin de sa bien -aimée. Il a besoin d'affection, mais
n'en trouve pas. Deux ans après son incarcération il est
relâché pour bonne conduite. Il n'a plus d'amis ni même de
logis. Tous ses camarades du Parti le haïssent, ils pensent que Hugo
Barine est un homme dangereux pour la cohésion sociale. En
conséquence, il faut absolument
l' « éliminer ». C'est alors que Olga
Lorame se propose de l'accueillir chez elle où il était avant.
Là, Hugo est traité par cette dernière comme
« un fils à maman » gagnant de plus en plus
l'affection, l'assurance de la part de Olga, Hugo se trouve
« entretenu ».
Olga Lorame apparaît ainsi comme la
conscience maternelle de Hugo qui fait tout et use de toutes les instances pour
le sauver. C'est d'ailleurs l'une des raisons qui justifient la
présence de Hugo chez elle avant qu'il ne soit jugé
« non récupérable » par le Parti.
CHAPITRE III
LES GRANDES TENDANCES DE HUGO BARINE ET LEURS
SIGNIFICATION PSYCHANALYTIQUES
1. LES GRANDES TENDANCES D'HUGO BARINE
L'histoire de Hugo Barine nous révèle
un certain nombre de tendances. Hugo Barine a une passion exacerbée pour
les meurtres. C'est d'ailleurs pour cette raison qu'il a pour pseudonyme
RASKOLNIKOFF ; c'est-à-dire, celui qui aime tuer. Il ne
s'arrêtera pas là, il ira jusqu'à tuer Hoederer. Ce
dernier, en réalité, est celui qu'il aime. C'est donc avec lui
(Hoederer) que Hugo Barine jeune homme a rencontré son vrai père
qui le comprend, l'aime et tente de l'éduquer. Ainsi en tuant Hoederer,
Hugo témoigne de son caractère sanguinaire : avoir les mains
sales.
Hugo Barine simple jeune aime la
politique et est narcissique. En réalité le but inavoué de
sa lutte est de prendre le devant des choses un jour :
Hugo
« L'armée rouge chassera le
régent et nous aurons le pouvoir pour nous seuls »
L'objectif inavoué d'un tel
désir n'est rien d'autre que de faire passer ses convictions
individualistes et égoïstes. De ce point de vue, Hugo se
présente comme un être qui ne pense qu'à lui-même
avant tout. Au-delà de son caractère égocentrique, nous
pouvons dire du personnage de Hugo Barine qu'il a un caractère
narcissique. De même qu'il use de son statut d'enfant de bourgeois pour
narguer les autres.
Cependant, Hugo Barine, en dépit
de ses nombreux exploits, sort le grand perdant de ses projets titanesques.
Après l'assassinat de Hoederer, il est jeté en prison où
il restera éloigné de sa bien aimée et de surcroît
rejeté par ses camarades du Parti. Hugo sera à cet égard
en quête d'amour perdu.
Nous résumons ainsi :
· Hugo Barine, le caractère sanguinaire et la
culpabilité oedipienne.
· Hugo Barine, obsédé par le pouvoir.
· Hugo Barine et l'amour.
Comment expliquer ces différentes tendances ?
2 LA SIGNIFICATION PSYCHANALYTIQUE DES
DIFFERENTES TENDANCES
2.1 Le caractère sanguinaire
de Hugo Barine et la culpabilité
oedipienne.
La jeunesse de Hugo Barine est
émaillée par un caractère qui attire notre attention. Il
est sanguinaire. Il a une forte passion pour le meurtre.
Toute personne qui manifeste un tel
comportement est un être agressif. C'est le fait d'étendre
l'agressivité intérieure vers l'extérieur dans
l'intention d'obtenir une satisfaction. Ceux qui adoptent l'agression sont des
êtres faibles. Ils cherchent à cacher cette faiblesse par
l'agression. Mais l'acte d'agressivité perpétré par Hugo
Barine à l'égard de Hoederer peut s'expliquer comme suit:
l'enfant trouve en Hoederer qu'il tue le père qu'il voudrait remplacer,
et du coup posséder seul la mère qui est l'objet du désir.
Pour nous cet acte représente la manifestation du complexe d'Oedipe
(amour pour le parent de sexe opposé et des sentiments de jalousie
envers le parent de même sexe). Rappelons que dans le cas
d'espèce, c'est-à-dire ce qui est relatif à l'histoire de
Hugo Barine, ce qui nous intéresse c'est l'acte de l'assassinat du
« père Hoederer » par Hugo Barine.
Dans l'histoire d'Oedipe, après avoir
tué son père Laïos, il devait tuer le sphinx qui est la
représentation de l'imago paternelle du fait qu'il doit
répéter le même geste sur l'animal.
D'une autre façon, l'enfant refuse ce
qui vient de l'extérieur. Selon lui il est le centre du monde. C'est
l'égocentrisme. Cependant son égocentrisme rencontre un obstacle
qui est la censure sociale représentée par les parents
(père/mère). Ceux-ci vont lui dicter les normes sociales. Ainsi
tout enfant élevé dans cette situation devient agressif.
Hugo Barine a tué son père
adoptif (Hoederer). Selon la Psychanalyse, cela est le fait de la rupture
entre la personne secourable et l'enfant. Qu'est ce
qu' « une personne secourable » ? Selon
la considération que Freud en fait, c'est une opération qui n'est
possible que si le sujet se trouve rassuré et protégé par
une figure maternelle ou paternelle qui s'appelle « personne
secourable » ambassadeur de la réalité.
C'est donc l'intervention de cette personne
qui permet à l'enfant de sortir de l'angoisse de détresse
à laquelle il est confronté dans ses premières
expériences de la vie.
Voyons par exemple le cas de renversement de
situation avec les « parents politiques » de Hugo
c'est-à-dire le couple Olga Lorame et Louis. Après la
libération inopinée de Hugo de la prison où il devait
rester cinq ans, les camarades du Parti estiment qu'il faut l'abattre parce
qu'il risquerait fort bien de dévoiler la stratégie politique du
Parti qui a consisté à tuer Hoederer. L'attitude de la
mère politique « Olga Lorame » est celle
d'une personne secourable. Elle a accepté de s'opposer à
l'idée de tuer Hugo et elle a protégé l'enfant Hugo en le
gardant dans sa chambre. Mais quand Louis insiste aux pieds de Olga
Lorame :
Louis :
Olga, j'ai peur que tu n'en mettes beaucoup trop, toi
aussi
Olga
Je dis seulement qu'avant de le supprimer on doit
examiner si le Parti peut le reprendre.
Louis
Le Parti ne peut plus le reprendre : plus maintenant. Tu
le sais bien
Par cette attitude, le
« Père politique » Louis proclame qu'il
retire sa sollicitude paternelle à l'endroit de Hugo. Il l'abandonne
ainsi sans protection.
Pareillement, l'acte posé par Hoederer
en embrassant Jessica l'épouse de Hugo est la conséquence de la
haine que Hugo a contre Hoederer. Car il se voit trahi, (privé de
personne secourable) comme un nouveau né qu'on abandonnerait
à la solitude, au silence et à l'obscurité. C'est donc
à cet instant-là que cette séparation, cet abandon, ce
rejet va déterminer l'agressivité de Hugo Barine. Ce
mécanisme d'apparition de haine à l'égard du parent de
même sexe est ce que Freud appelle : «
apparition des pulsions de mort. » 35(*)orientées vers le
père.
La scène de la mort du père
est la représentation de l'accomplissement du désir de
l'enfant ; désir longtemps refoulé dans l'inconscient.
Le revolver utilisé par Hugo Barine
pour causer la mort de son père adoptif (Hoederer) est un symbole :
le symbole phallique. C'est l'image du pénis.
Les balles quittant le revolver
transpercent, pénètrent dans l'objet du sujet transpercé
(Hoederer) comme la pénétration dans l'acte sexuel. L'usage des
balles vient prouver le caractère masculin, viril qui attaque le
père. Cela marque la maturité masculine de Hugo Barine.
Pour nous, cette analogie prise sous un
angle psychanalytique, est, selon Sigmund Freud, comparable au stade
génital dans le processus dynamique sexuel chez l'enfant. A ce stade,
l'enfant a atteint la puberté. De nouvelles pulsions apparaissent
(l'affirmation de soi). L'individu cherche à faire valoir sa libido dans
des conditions sexuelles acceptables.
Le père est l'idéal pour
l'enfant à qui, il voudrait ressembler. Mais au même moment il le
craint parce qu'il possède toutes les forces capables de le
détruire. A ce moment, l'idée d'éliminer le père
s'impose. C'est l'ambivalence dans le comportement de l'enfant. Cela explique
le comportement de Hugo Barine vis-à-vis de Hoederer. Maintenant, voyons
le caractère obsessif de Hugo Barine pour le pouvoir.
2.2 Le caractère obsessif du
pouvoir de Hugo Barine,
Hugo, certes, est envoyé chez
Hoederer dans le but d'accomplir une certaine mission. Là il exerce la
fonction de secrétaire particulier du vieux Hoederer. Cette
responsabilité lui donne l'opportunité d'être au courant
des grandes rencontres politiques que Hoederer entretient avec les hommes du
Régent et du Pentagone. Il participe à cet effet aux grands
débats et stratégies en matière de politique.
A voir les choses de plus près, le but
inavoué que recherche Hugo Barine est de tuer Hoederer qu'il juge de
« traître social » donc ayant une mauvaise
politique, pour être lui-même un jour au commande. Cela
apparaît pour lui comme un rêve. Ainsi, dans sa course à
l'obtention du pouvoir, se montre-t- il véreux, sadique (son attitude
par exemple à l'égard des deux gardes de corps de Hoederer).
Selon la conception freudienne de la
sexualité, l'auteur décrit un stade de la sexualité
infantile. C'est le stade sadico oral. Il se situe entre 1-3 ans. À cet
âge la libido de l'enfant investit la zone du rectum (l'anus) et de ce
fait l'expérience du plaisir se trouve liée à la
rétention de substances fécales au niveau de l'anus. C'est la
période où apparaissent les premiers conflits entre les enfants
et les adultes. La libido devient agressive. Il prend du plaisir à
détruire tout ce qui est à sa portée.
Voyons de même, comment se manifeste le
caractère sexuel infantile chez Hugo Barine lors de sa présence
dans le bureau de Hoederer. Dans ce bureau il occupe un siège un peu
creux avec dossier. Il est plutôt confortable, et le geste de s'y asseoir
et se lever rappelle bien l'acte sexuel : c'est le coït sexuel.
L'on peut dire de Hugo qu'il manifeste le complexe de
caïn ( Génèse 4, V 1 à 15) ; pourquoi pas le
complexe de Hugo ?
Hugo Barine, de peur de voir l'objet de son désir
se détourner (tuer Hoederer pour prendre sa place), souhaite la mort de
celui-ci en qui il voit son sosie venir, son rival. Voilà aussi l'une
des raisons selon l'interprétation psychanalytique qui a conduit Hugo
à tuer Hoederer.
Il faudrait retenir à la suite de cette analyse
que
« Toute tendance dominante nous semble
s'être manifestée dans la plus tendre enfance, et sa
prédominance s'être établie grâce à des
impressions de la vie infantile ».36(*)
2.3 Hugo Barine et
l'amour
Hugo Barine est abandonné et trahi
par sa femme Jessica et ses amis du Parti pendant son incarcération en
prison. Là, il perd cette chaleur conjugale qui régnait entre lui
et Jessica. C'est cette dernière qui lui donnait de la force et qu'il ne
cessait de le louer pendant ces « grandes missions ».
D'un autre côté, aussi, les camarades du Parti étaient
en permanence avec Hugo avant son meurtre. Mais aujourd'hui, tout le monde se
montre hostile à son comportement qu'on qualifie
d'« insensé ». Il est de ce fait
abandonné. Il continue de chercher cet amour perdu après sa
libération.
Une chose importante est à noter. L'homme n'est rien
sans les autres, il lui manque toujours quelque chose. Etre en compagnie d'une
belle femme apporte une grande satisfaction, une grande fierté,
l'équilibre total.
Tous ces facteurs vont permettre à tout
individu la réalisation de la complitude narcissique. Voilà ce
qui explique le comportement de Hugo Barine qui veut se faire de
« nouvelles relations » pour de
« nouvelles amours ». Cela se voit
assurément dans son attitude en allant chez Olga Lorame à sa
sortie de prison. Cette attitude de vouloir être avec Olga Lorame est
celle d'une personne qui est en « quête
d'amour ».
Selon la psychanalyse, le besoin illimité
d'amour perdu « manifesté d'une façon
polymorphe qui rend souvent méconnaissable,
signifie une recherche de sécurité
perdue. » 37(*)
CHAPITRE IV
CORRESPONDANCE ENTRE L'HISTOIRE DE
HUGO BARINE ET LE MYTHE DE LA HORDE
PRIMITIVE
Avant d'entamer cet aspect de notre
analyse, rappelons le mythe de la horde primitive décrit par Freud.
Freud précise qu'il s'est inspiré des travaux de trois
auteurs : Charles Darwin, Atkinson et W. Robertson Smith.
1. La conception de
Darwin
En effet, Darwin avait observé les
moeurs grégaires des singes supérieurs tels que le gorille, et il
en avait déduit l'hypothèse selon laquelle les hommes eux
aussi vivaient primitivement en petites hordes à l'intérieur
de laquelle la jalousie du mâle le plus âgé et le plus fort
empêchait la proximité sexuelle. Darwin ajoutait que, les
jeunes mâles prenant de l'âge, une compétition s'ouvrait
entre eux pour déterminer qui deviendrait le maître de la horde.
Le plus fort tuait ou chassait ses concurrents pour
s'installer à la tête de la communauté. Le modèle
darwinien décrit une organisation patriarcale où le père
primitif règne en maître absolu et se réserve toutes les
femmes de la horde.
2. La conception de
Atkinson
Freud complète ce modèle par celui de
l'anthropologue Atkinson. D'une part, cet auteur confirme l'hypothèse de
Darwin en observant des troupeaux où des boeufs ou des chevaux sauvages
vivaient en hordes. D'autre part, il observe que ces hordes se livrent à
des luttes internes qui aboutissent à la mort du père. Dès
que la horde est constituée, ceux qui sont chassés par le
père (les jeunes frères) vont former une bande qui revient tuer
le père primitif. Pendant leur exil, ils attendent qu'ils soient devenus
assez forts avant de passer à l'acte. C'est donc par la violence qu'on
aboutit à la succession du père.
3. La conception de Robertson
Smith
Dans La religion des Sémites, Robertson
Smith décrit une représentation rituelle de l'animal totem: le
repas totémique
« Au cours de cette cérémonie, les
participants regrettent d'avoir sacrifié leur animal totem. Mais le
climat de fête permet la réconciliation entre les membres du clan
et aussi avec leur dieu. Un lien de solidarité très fort unit
désormais tous les membres du clan. »38(*)
La confrontation de ces différents travaux permet
à Freud d'élaborer un modèle mythique comprenant trois
périodes successives d'organisation sociale ; la horde sous
l'autorité jalouse et excessive du père ; le regroupement
des jeunes hommes chassés qui se rebellent contre le père quand
ils en ont la possibilité ; les membres du clan fraternel
célèbrent ensemble un rite qui rappelle le meurtre du père
par les jeunes rebelles, le repas totémique.
Ce qu'il faut retenir c'est que l'enfant doit ressembler
à son père, de façon symbolique. Il se montre capable de
prendre la place du père. Ainsi l'enfant prend les attributs du
père.
Bien que l'histoire de Hugo Barine ne puisse pas
véritablement présenter tous les tableaux du mythe freudien de la
horde primitive, il y a cependant une correspondance entre la vie de Hugo
Barine et celle présentée par W. Robertson décrit par
Sigmund Freud.
Dans Les Mains Sales de Jean Paul Sartre,
rappelons-le, les camarades du Parti prolétarien veulent
« éliminer Hoederer » à cause de son
idéologie politique. Pour ce faire, le Parti, par le biais de Louis et
Olga, mettra sur pied tous les moyens possibles pour l'abattre.
Hoederer est abattu par Hugo Barine le
mandaté qui lui aussi sera jeté en prison et libéré
deux ans plus tard. Mais un an après l'assassinat de Hoederer, le Parti
prolétarien auquel il appartenait va finalement décider de se
rallier au Régent. En conséquence tous regrettent leur manigance
qui a conduit à la mort de Hoederer. Le Parti, pour se racheter, va
décider de réhabiliter Hoederer en construisant des rues dans
toutes les villes et en mettant son nom dans les livres d'histoire.
Ainsi, l'assassinat de Hoederer va conduire le
peuple illyrien à mettre au coeur de sa tradition un
évènement profondément regretté. Les membres du
Parti, pour préserver les intérêts collectifs du peuple
illyrien, resteront désormais unis quelque soit l'appartenance
idéologique d'un des leurs.
CONCLUSION PARTIELLE
L'étude psychanalytique de Hugo Barine a permis
de comprendre le rôle déterminant joué par l'enfance dans
l'élaboration des caractères ultérieurs. Lorsque l'homme
ou l'enfant n'a pas une sexualité bien développée, il peut
connaître des troubles d'ordre psychique qui ont une conséquence
sur son comportement.
En étudiant l'histoire de la vie de Hugo Barine,
nous avons constaté l'ambiguïté de notre personnage. Cette
ambiguïté se trouve à travers ses grandes tendances (un
personnage agressif, parricide obsédé par le pouvoir, en
quête de « personne secourable »). Ainsi,
selon l'approche psychanalytique pouvons-nous dire de Hugo Barine par le biais
des différentes tendances présentées, qu'il fait preuve
d'une immaturité sexuelle et d'un déséquilibre d'ordre
psychique.
CONCLUSION GENERALE
Notre sujet de
recherche : « approche psychanalytique dans
l'étude d'un personnage de théâtre, cas de Hugo Barine dans
Les Mains Sales de Jean Paul Sartre » nous a permis de mettre
l'accent sur l'approche psychanalytique au service de l'étude des
personnages au théâtre.
Le choix de ce sujet répond à un besoin qui
se présente face aux difficultés qu'éprouvent certains
créateurs (comédiens, metteurs en scène, etc.) dans la
représentation d'un personnage de théâtre. Ces
créateurs depuis lors ne recourent sommairement qu'à l'analyse
littéraire du personnage en vue de sa transposition scénique.
Cette attitude n'est pas sans conséquence grave sur la maîtrise
véritable des différentes actions du personnage partant du
discours qu'il tient.
Pour pallier cette situation, nous avons
proposé l'approche psychanalytique en tant qu'une nouvelle approche pour
étudier le personnage au théâtre à la fois dans
l'intérêt du metteur en scène et du comédien.
Pour mener à bien cette étude, notre analyse s'est
articulée autour de trois (3) principaux axes. Le premier axe s'est
consacré à l'analyse dramaturgique de notre corpus. Bien que
cette démarche ne puisse pas apporter une orientation immédiate
à la compréhension de notre thème d'étude, il faut
reconnaître cependant qu'il permet de cerner d'emblée
l'environnement textuel dans lequel évolue notre personnage. Cela a pour
avantage d'appréhender le discours que tient notre personnage, ses
rapports avec ses semblables, ses différentes actions ayant fait l'objet
de ses motivations et tant d'autres.
Au second axe, il a été question de donner
un bref aperçu de la psychanalyse tout en précisant en dernier
chapitre la méthode d'approche psychanalytique. Pour nous, cette partie
semble importante puisqu'elle nous familiarise avec différents concepts
utilisés dans le domaine de la psychanalyse.
Son utilité réside aussi dans le fait
qu'il participe à la maîtrise des mécanismes de
fonctionnement du patient en clinique et particulièrement du personnage
au théâtre.
Le troisième axe, enfin, a été le
lieu d'application de la méthode d'approche psychanalytique au
personnage de Hugo Barine.
A la lumière des différentes analyses
menées sur le personnage, nous comprenons aisément que nous ne
sommes pas maîtres de nos actions qui nous croyons consciemment et
naïvement être les nôtres. Ainsi Freud peut-il
révéler que nous ne sommes pas maîtres de notre
pensée.
C'est pourquoi il écrit avec force
que :
« Tu te comportes comme un monarque absolu qui
se contente des informations que lui donnent les hauts dignitaires de la cour
et qui ne descend pas vers le peuple pour entendre sa voix. Rentre en toi-
même profondément et apprends d'abords à te
connaître, alors tu comprendras pourquoi tu vas tomber malade et peut
être éviteras- tu de le devenir. »39(*)
Aussi, avons-nous compris comment, grâce aux
données de la psychanalyse, le théâtre, à partir du
personnage pourrait devenir la représentation de l'inconscient. Le
dramaturge, au cours de la production de son oeuvre est en rupture avec la
réalité. Il se retrouve dans un monde constitué de
fantasmes, d'éléments refoulés, de rêves, de
souvenirs d'enfance.
Pour nous cette situation est comparable au
mécanisme de l'inconscient dans le psychisme humain. L'inconscient qui
fait office de çà, au sens psychologique est
caractérisé par les désirs refoulés, des
désirs qui ne sont pas compatibles avec la réalité
sociale.
L'auteur se sert de tous ces éléments, les
organise de façon rationnelle, les recouvre de voile, de sorte à
les rendre accessibles à la conscience, et à la
réalité.
L'oeuvre devient alors un texte symptomal, un texte
à déchiffrer. Il est comparable au rêve. Il joue les
fantasmes de son auteur et est écriture du désir. Mais à
la différence du rêve, le dialecte du théâtre doit
pouvoir être compréhensible et communicable car oeuvre culturelle
à fonction sociale.
Grâce au personnage de théâtre, le
clinicien accède à une meilleure compréhension du conflit
pathologique. La réflexion de Sigmund Freud s'enrichit de l'analyse des
oeuvres théâtrales : Oedipe-Roi, Hamlet, Le
roi Lear et tant d'autres. Elles lui ont permis de comprendre
l'énigme comportementale de l'être humain. Nous comprenons combien
il serait important, après analyse, que l'on insert le cours de la
psychologie des personnages du théâtre dans le programme
d'enseignement théâtrale. Cela participerait à la
formation des futurs metteurs en scène, des encadreurs en
interprétation théâtrale et initiation au jeu dramatique,
des dramaturges et même des comédiens.
Ces buts atteints, seront une source véritable au
renforcement de l'identification cathartique dont parle Aristote. Une fois que
le comédien comprend à fond les différentes motivations de
son personnage à incarner, pourra mieux l'incarner avec aisance. En
conséquence, le spectateur essayera de s'investir dans le jeu du
comédien en vue d'obtenir une véritable satisfaction.
Loin de nous la prétention d'avoir
mené une étude complète, nous souhaitons que ce travail
soit une ouverture à d'autres investigations afin de comprendre
l'énigme que constitue le personnage au théâtre par le
biais de la psychanalyse.
Nous pensons pour notre part que la psychanalyse
peut offrir au théâtre des moyens pour conquérir la
cité des coeurs des hommes. A travers le théâtre, l'on se
rend compte que la vie n'est pas que commerce, la vie est savoir faire, savoir,
savoir être mieux, savoir être avec.
Beaumarchais lui comprend aisément la
valeur du théâtre lorsqu'il affirme
que : « Cet art dont la loi première et peut
être la seule est amuser en instruisant. »40(*).
BIBLIOGRAPHIE
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De Bernard B. Dadié (1966-1980),
Thèse de Doctorat
de 3e cycle, Université
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4- Zekrullah kazemi L'Image de la Culture dans
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LA MAISON UNIVERSELLE DE JUSTICE.- Les Tablettes de
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(http://classiques.uqac.ca/classiques/freud_sigmund/ freud.html) du 14/
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2- Freud par les textes (http://
groups.msn.com/freudparlestextes/_whatsnew.msnw) 25/ 11/2OO6
3- Quelques extraits ciblés fondamentaux des
écrits de Freud
(http : //
www.caute.lautre.net/
rubrique.php 3 ? id_rubrique = 37) du 28-11-2006
4- Caractérologie, un article de wikipédia,
l'encyclopédie libre, récupéré de «
http : // fr. wikipédia.org/ wiki/
caractérologie » 29/11/2006
5- Introduction à la psychologie de la
personnalité du (12- 12 2004)* 1
Pour la dernière révision.
(http: //. Er. Uquam.ca/ nobel / r 30034/ PSY4090/ doc/
intro.html)
6- Etude sur l'oeuvre Les Mains Sales de Jean Paul
Sartre en ligne du lundi 10 juillet 2006.
www.yahoo.fr
(http : // revel.unice.fr/ loxias / document. Html ?
Id= 1153) du 29/ 11 / 2006
TABLE DES MATIERES
4
5
6
7
11
12
13
13
15
15
15
16
17
19
21
21
22
24
24
25
25
26
26
26
27
28
32
35
35
35
38
39
39
40
41
41
43
27
28
32
35
35
35
38
39
39
40
41
41
43
DEDICACE ...
REMERCIEMENTS
SOMMAIRE...............................................................................
INTRODUCTION........................................................................
EPIGRAPHE..............................................................................
PREMIERE PARTIE : L'UNIVERS DE
L'OEUVRE.............................
Chapitre I : REPERES BIOGRAPHIQUES DE JEAN PAUL
SARTRE..... 1- Vie et activités politiques de
l'auteur...............................................13
2-
L'existentialisme.........................................................................
2-1- Qu'est-ce que
l'existentialisme.......................................................
2-2- Essence et
existence...................................................................
2-3-
L'engagement..........................................................................
2-4- Le
marxisme...........................................................................
3- L'oeuvre
théâtrale........................................................................
Chapitre II : PRESENTATION DE"Les Mains
Sales"............................
1- Contexte
socio-historique...............................................................
2- Le sujet de la pièce. Une action politique complexe
et tendue..................
Chapitre III : ETUDE DES STRUCTURES DE L'OEUVRE
"Les Mains
Sales"......................................................................................
1- Structure
externe.........................................................................
1.1. Le titre de
l'oeuvre.....................................................................
1.1.2. La fonction du titre dans une oeuvre
théâtrale...................................
1.1.3. Pourquoi Les Mains
Sales ?.........................................................................
1.2. La subdivision d'une pièce
théâtrale................................................
1.2.1. La dramaturgie en
actes...........................................................
1.2.2. La dramaturgie en
tableaux.......................................................
1.2.3. Les mains sales : une structure dramatique
ambiguë............................
1.3. L'incipit ou la liste des
personnages................................................
2. La structure
interne......................................................................
2.1.
Définition...............................................................................
2.2. Résumé des
tableaux..................................................................
2.3. Les aspects spatiotemporels de Les Mains
Sales.......................................
2.3.1. Espace
dramatique..................................................................
2.3.2. Temps
dramatique..................................................................
2.3.3. Temps
scénique.....................................................................
3. Etude actantielle, esthétique et idéologie de
l'oeuvre Les Mains Sales.........
3.1. Le modèle du schéma
actantiel........................................................
3.1.1. Proposition de schémas actantiels dans Les
Mains Sales......................
43
44
44
45
46
47
48
49
50
50
50
52
52
52
57
59
60
61
62
64
65
65
65
66
66
67
68
69
69
70
70
72
72
72
72
73
74
3.1.1.1. Hugo Barine
l'assassin..............................................................................
3.1.1.2. Hugo Barine
l'assassiné.............................................................................
3.2. Esthétique à travers Les Mains
Sales......................................................
3.2.1. Le refus de la
psychologie..........................................................
3.2.2. Le refus de
l'intrigue................................................................
3.2.3. Le refus du
réalisme................................................................
3.2.4. La vertu de
l'écriture...............................................................
3.2.5. La valeur incisive et décisive du
mot.............................................
3.3. Idéologie de l'oeuvre Les Mains
Sales.....................................................
3.3.1. L'idéologie
explicite.................................................................
3.3.1.1. Un théâtre de
situation............................................................
3.3.1.2. Un théâtre
marxiste...............................................................
3.3.1.3. Un théâtre
tragique...............................................................
3.3.2. L'idéologie
implicite...............................................................
Conclusion
partielle.........................................................................
Epigraphe
....................................................................................
DEUXIEME PARTIE : BREF APERÇU DE LA
PSYCHANALYSE..........
Chapitre I : Définitions, historique et
vocabulaire de la psychanalyse..........
1- Définitions de la
psychanalyse.......................................................................
2- Histoire de la
psychanalyse..............................................................................
3- Bref aperçu du vocabulaire des termes
psychanalytiques..........................
3-1- le
refoulement...............................................................................................
3-2- Les
complexes...............................................................................................
3-3- Le
rêve...........................................................................................................
3-4- Le
fantasme...................................................................................................
3-5- La
censure.......................................................................................................
Chapitre II : Caractéristique du psychisme
humain..............................
1- Description dynamique des deux
topiques..........................................
1-1- Description dynamique de la première
topique..................................
1-2- Description dynamique de la deuxième
topique..................................
2- Explication des caractéristiques
psychiques........................................
3- La signification psychanalytique des actes
manqués.............................
3-1- Les
lapsus..............................................................................
3-1-1- Erreurs de
nom.......................................................................
3-1-2- Utilisation d'un mot pour un
autre..............................................
3-1-3- Remplacement d'un mot par son
contraire......................................
3-1-4- Les erreurs
d'écriture..............................................................
75
75
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92
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102
Chapitre III : La sexualité infantile et
la conception
Psychanalytique des maladies
mentales..............................................................
1- La sexualité
infantile.....................................................................
1-1- Le stade de développement de la sexualité
infantile..............................
1-2- Le stade
oral...........................................................................
1-3- Le stade
anal...........................................................................
1-4- Le stade
génital........................................................................
2- La conception psychanalytique des maladies mentales et les
traits
de caractère qui en
résultent...............................................................
2-1- Le caractère
narcissique..............................................................
2-2- Le caractère
phobique................................................................
2-3- Le caractère
obsessionnel............................................................
2-4- Le caractère
paranoïque.............................................................
2-5- Le caractère
Hystérique.............................................................
2-6- Le caractère
cyclique................................................................
2-7- Le caractère
shizoïde................................................................
Chapitre IV : Champ d'orientation et
présentation de la méthode
d'approche
psychanalytique........................................
1- La méthode cathartique et la méthode de la
simple suggestion..................
2- La méthode de la libre
association...................................................
Conclusion
partielle.......................................................................
Epigraphe
...................................................................................
TROISIEME PARTIE : APPLICATION DE LA METHODE
D'APPROCHE PSYCHANALYTIQUE A L'ETUDE DU PERSONNAGE DE
HUGO BARINE..................................................
Chapitre I : Le
personnage.........................................................
1- Définitions
............................................................................
2- Les traits de caractérisation du
personnage......................................
2-1- Une construction
textuelle......................................................
2-2- Le personnage est toujours
joué...............................................
2-3- Le personnage n'est que
transposition........................................
Chapitre II : rappel de l'histoire de Hugo
Barine...................................
Chapitre III : les grandes tendances de Hugo
Barine
et leurs significations
psychanalytiques...............................................
1. Les grandes tendances de Hugo
Barine.................................................................................103
2. La signification psychanalytique des différentes
tendances............... 104
2.1 Le caractère sanguinaire de Hugo Barine et la
culpabilité oedipienne 104
2.2. Le caractère obsessif du pouvoir de Hugo
Barine..................... 107
2.3 Hugo Barine et
l'amour................................................ ...109
Chapitre IV : Correspondance entre l'histoire de
Hugo Barine
et le mythe de la horde
primitive..............................110
1. La conception de
Darwin...................................................... 110
2. La conception de
Atkinson......................................................111
3. La conception de Robertson
Smith.............................................111
Conclusion
partielle...............................................................
114.
Conclusion
générale...............................................................
115
Bibliographie
.....................................................................
119
* 1 Jean Paul Sartre,
cité par Jean Labesse, Etude sur Les Mains Sales, Paris,
Gallimard, 2e édition, 1995, P.25
* 2 Christian Gambotti,
Phèdre de Racine, l'oeuvre au clair, Paris, Bordas, 1989, P.11
* 3 Claude
Brenon, « communications 8 » in Collection Le
Point, Patrice Pavis, 2OO3, P. 11
* 4 Patrice Pavis,
Dictionnaire de théâtre, Paris, éd. Dunod, 1996,
P.38
* 5 Berthold Brecht, L'Achat
du Cuivre, P.131
* 6 Georges Forestier, Le
théatre dans le théatre sur la scène française au
VIIe siècle, Genève, Droz, 1981, cité par Patrice
Pavis in Dictionnaire du théatre, P. 209.
* 7 Jean Pierre Ryngaert,
Eléments pour une Histoire de Texte de Théâtre,
Paris, Dunod, 1997, P.80.
* 8 Jean Paul Sartre, Les
Mains Sales, Paris, Gallimard, 1948, P.49
* 9 Jacques Scherer cité
par Patrice Pavis, Dictionnaire de théâtre, Op.
Cit, P. 247
* 10 Anne Ubersfeld, Lire le
Théâtre, op. cit, P.98
* 11 Anne UBERSFELD, Lire le
Théâtre, Paris, Mossidor, éditions sociales, 1982,
P.61-62
* 12Jean Paul Sartre, Un
Théâtre de Situation, Paris, Gallimard, coll. Idée,
1973, P.190
* 13 La Maison universelle de
Justice, Les Tablettes de Baha'u'llah, Bruxelles, éd. Baha'ies,
1978, P.178
* 14 Jean Paul Sartre, Un
Théâtre de Situation, Op. Cit, P ; 123
* 15
Redondance : Caractère superflu de certains
développements
* 16
Stasimon : Dans la tragédie grecque,
intermède choral qui sépare les différents épisodes
et marque un temps d'arrêt dans le déroulement de la
pièce.
* 17 Sidibé Valy, La
Critique du pouvoir politique dans le théâtre de Bernard B.
Dadié (1966-1980), Thèse de Doctorat de troisième cycle,
Université d'Abidjan, 1984
* 18 Freud cité par
Roger Perron dans Une Psychanalyse Pourquoi ? Paris, Dunod, 2000, P
05.
* 19 Idem
* 20
Ibidem
* 21 Ibidem
* 22 Freud, S,
L'interprétation des rêves, Paris, PUF, 1971, P. 64
* 23 Vocabulaire de la
Psychanalyse, Paris, PUF, 1994, P. 197.
* 24 Freud cite par Roger
Perron in Une Psychanalyse Pourquoi ? Op. cit, P. 263
* 25 Freud Sigmund, Trois
essais sur la théorie de la sexualité, Paris, Collection
« Idées », Gallimard, 1952,
* 26 Vocabulaire de la
Psychanalyse, Op. Cit, P. 61
* 27 Cité par le
professeur Kazemi Zekrullah, L'Image de la Culture dans Fraternité
Matin, Thèse de 3e cycle, Décembre 1989
* 28 Maurice Bouvet, OEuvre
Psychanalytique, T. II « Résistances,
transfert », Paris, Payot, 1968, P. 22
* 29 Freud cité in
Hamlet et oedipe d'Ernest Jones, Paris, éd. Gallimard, 1982
* 30 La
théâtralité. Etude Freudienne, op. Cit, P.
40
* 31 Sigmund Freud, Un
souvenir d'enfance de Léonard de Vinci, Paris, Gallimard, 1927,
P.147
* 32 Idem
* 33 Robert Abirached, La
Crise dans le personnage de théâtre moderne, Paris, Grasset,
1978, P.9
* 34 Idem
* 35 Besoin, désir de
voir mourir le rival.
* 36 R. Deldine et
S.Vermeulen, Le Développement psychologique de l'enfant, Berlin,
3e édition, P.40
* 37 Vocabulaire de la
psychanalyse, op.cit, P. 272
* 38 Robertson Smith, La
religion des sémites, Transaction Publisher, 2002, P.156
* 39 Freud cité par A.
Akoun et G. Veraldi, L'Inconscient, son langage et ses lois, Paris,
Gérard & C°, 1972, P. 30
* 40 Beaumarchais,
Préface de Mariage de Figaro, Paris, éd Gallimard,
1996, P. 8
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