SECTION 4.3 : Interprétation des
résultats :
Dans le cadre de cette section nous allons présenter
une interprétation des résultats issus des analyses statistiques
déjà réalisées pour la validation des
différentes hypothèses. Cette discussion comporte
également des comparaisons des résultats obtenus dans notre
recherche avec celles dans la littérature, en plus de quelques
recommandations managériales. Nous traitons tout d'abord les
résultats relatifs aux variables relationnelles, ensuite la relation
entre la valeur perçue et les modalités de la décision
d'externalisation des SI, et enfin les résultats relatifs aux variables
contextuelles.
En premier lieu, concernant les variables
relationnelles, les résultats de cette recherche indiquent que
la confiance envers le prestataire influence positivement et par toutes ses
dimensions la valeur perçue technologique et stratégique de
l'externalisation des SI. Ce résultat concorde avec celui de
Barthélemy (2004a) qui stipule que les relations d'externalisation
caractérisées par la confiance permettent d'atteindre un meilleur
niveau de performance que les celles dans lesquelles la confiance est absente.
En outre, on a également montré que la confiance influence
positivement la valeur perçue économique de l'externalisation des
SI (sauf pour la dimension bienveillance qui s'est avérée non
significative). La confiance apparaît donc comme le gage d'une
coordination plus efficace et moins coûteuse. Comme l'avait
démontré Dyer et Chu (2003), la confiance en tant que mode de
gestion des relations inter organisationnelles permet de combiner les trois
avantages technologiques, stratégiques et économiques. Par
conséquent nous pouvons présenter les mêmes recommandations
avancées déjà dans l'étude de Barthélemy
(2003) où il indique qu'avant de prendre la décision
d'externaliser leurs SI à un prestataire, les entreprises sont
appelées à s'informer sur la fiabilité et les
compétences de ce prestataire auprès des ses clients actuels.
D'autre part, les résultats de notre étude
montrent un impact négatif significatif de la dépendance sur la
valeur perçue technologique et stratégique de l'externalisation
des SI. Ce résultat concorde avec l'étude de Young-Ybarra et
Wiersma (1999) qui ont vérifié empiriquement que la
dépendance est négativement liée à la
flexibilité et à la qualité de la prestation. Cependant,
il s'est avéré, que la dépendance envers le prestataire
n'a aucun effet significatif sur la valeur perçue économique. Ce
résultat diverge avec celui de Barthelemy (2004b), car ce dernier
indique que la dépendance engendre une augmentation des tarifs et permet
au prestataire de s'approprier la quasi-rente du client. Pour cette raison, et
à l'instar de Ryu et al, (2007), nous recommandons aux entreprises de
mettre en place des mécanismes de protection et de surveillance de tels
comportements opportunistes.
Concernant la variable partage des connaissances, l'impact
positif de cette variable sur la valeur perçue technologique et
stratégique est bien vérifié pour les deux dimensions des
connaissances explicites et implicites. Cependant, seule la dimension partage
des connaissances explicites influence la valeur perçue
économique. Ces résultats concordent avec celle de Lee (2001) qui
a montré que les deux dimensions du partage des connaissances ont un
impact significatif, mais toutefois, les connaissances explicites semblent plus
efficaces pour l'atteinte des différents objectifs de l'externalisation
des SI. En fait, ce constat peut être expliqué par le fait que les
connaissances explicites sont plus faciles à comprendre et à
transmettre entre le deux entreprises que celle implicites non encore
formalisées. Par conséquent, les entreprises doivent essayer de
transformer et d'expliciter les connaissances implicites pour mieux garantir un
partage efficace des connaissances.
Une conclusion intéressante peut être
déduite suite à ces résultats, en fait,
toutes les variables relationnelles ont un impact significatif sur
la valeur perçue technologique et stratégique de
l'externalisation des SI. Par contre, lorsque qu'on passe
à l'étude de l'impact de ces variables relationnelles sur la
valeur perçue économique, l'impact est moins important. En fait,
comme l'indique Kern et Willcocks (2000), lorsqu'il s'agit d'une
décision d'externalisation d'un niveau stratégique
élevé, ceci exige de deux parties une vue au delà des
types des relations traditionnelles fournisseur-client, pour se déplacer
vers une relation plus étroite dans le cadre du contrat.
Par ailleurs, en ce que concerne la relation entre la valeur
perçue et les dimensions de la décision d'externalisation des SI,
les résultats de notre recherche montre une association
positive significative entre la valeur perçue économique et
simultanément le degré et la durée d'externalisation des
SI. Par contre, il s'est avéré que la valeur
perçue technologique et stratégique n'a aucun effet sur ces deux
dimensions. Par conséquent, nous pouvons déduire que les
entreprises tunisiennes sont très sensibles aux motivations
économiques lors de la décision d'externalisation des SI. Plus
elles perçoivent que l'externalisation des SI peut procurer des
avantages en terme de réduction des coûts, de contrôle des
dépenses, ou encore de génération des économies
d'échelle, plus les entreprises tunisiennes sont susceptibles à
augmenter le degré et la durée d'externalisation des SI.
L'impact significatif de la valeur perçue
économique est également vérifié dans
l'étude de Barthélemy et Geyer (2004) qui ont prouvé que
les motivations en termes de réductions de coûts influencent
fortement la décision d'externalisation totale des SI. Ce que
coïncide exactement avec nos résultats. Il est également
admit que la décision d'externalisation totale est
généralement accompagnée par un contrat à long
terme (Hormozi et al, 2003).
En outre, les résultats de notre recherche montre
l'infirmation des hypothèses relatives à l'impact de
la valeur perçue (toutes les dimensions) sur le type stratégique
des fonctions SI externalisées. Sur la base de ces
résultats, nous pouvons confirmer l'idée selon laquelle
l'externalisation des SI ne constitue pas une équation linéaire
croissante en fonction de la valeur perçue. En fait à un certain
niveau, même si l'externalisation présente des opportunités
attrayantes, l'entreprise ne peut pas confier l'exécution de certaines
fonctions SI ayant un poids stratégique important à un
prestataire externe. Sinon, l'entreprise risque le déséquilibre
et la défaillance de son processus stratégique, et la
dépendance envers le prestataire. Ceci concorde avec l'idée assez
courante dans la littérature selon laquelle les activités proches
du coeur de métier ne doivent pas être externalisées
(Prahalad et Hamel, 1990). Mais en même temps, nos résultats
divergent avec celles de Kishore et al, (2003) et de Lee et al, (2003) qui
ont montré qu'afin d'améliorer leur performance et d'introduire
une dynamique et une réactivité, certaines entreprises
décident d'externaliser des fonctions SI ayant un rôle
stratégique important. Cependant, l'observation des résultats
statistiques de classification par groupe montre que lorsqu'il s'agit des
fonctions SI à rôle stratégique traditionnel, la
sensibilité des entreprises aux motivations économiques
(déjà démontrée) se manifeste de nouveau.
Par ailleurs, concernant les variables contextuelles du
modèle conceptuel, les résultats de notre recherche supportent
toutes les hypothèses relatives à l'impact modérateur du
secteur d'activité sur la relation entre la valeur perçue et les
dimensions la décision d'externalisation des SI. Ainsi, nous pouvons
affirmer que les déterminants et les attributs de la
décision d'externalisation des SI varient fortement d'un secteur
à un autre. Ainsi, nous pouvons relever plusieurs
discriminations entre les différents secteurs d'activité. En
effet, nous pouvons remarquer que seulement les entreprises appartenants au
secteur hôtelier sont influencées positivement par la valeur
perçue technologique et stratégique concernant le degré
d'externalisation des SI. Cependant, lorsqu'il s'agit des motivations
économiques, les entreprises appartenant aux secteurs hôtelier et
industriel se comportent de la même façon en termes de
degré d'externalisation des SI. Par contre, même à un
niveau élevé de la valeur perçue économique, les
entreprises financières choisissent de garder leurs SI en interne.
Nous remarquons également que la valeur
perçue économique influence positivement le degré
d'externalisation dans tous les secteurs. En fait, comme le
suggère Barthélemy (2004b), il est recommandé d'espacer au
maximum les renégociations des contrats d'externalisation pour
éviter les coûts de recherche et de négociation avec les
prestataires. Généralement il est moins coûteux de
préserver une relation existante que de rechercher un nouveau
prestataire. De plus, nos résultats montrent que d'une façon
générale, les entreprises appartenants au secteur
financier externalisent moins leurs SI, et accomplissent des contrats sur des
durées moins courtes que les autres secteurs. Ceci peut
être expliqué par le fait que 18 sur 22 entreprises
financières de notre échantillon considère les SI comme
ayant un rôle stratégique intégratif pour son
activité. Ces résultats concordent avec celles de
Barthélemy et Geyer (2004) qui ont démontré que les
banques et les institutions financières n'optent pas à
l'externalisation totale des SI.
Quant à l'impact modérateur de la taille de
l'entreprise, les résultats de notre recherche sont surprenants. En
effet, il s'est avéré que les plus petites
entreprises sont les moins motivées à l'externalisation des SI
que ce soit par la valeur perçue technologique et
stratégique ou économique. En outre, ce type d'entreprises tend
également à accomplir des contrats à court terme. En fait,
à cause de leur petite taille, ces entreprises ne possèdent pas
les moyens et le pouvoir de gérer des telles relations à long
terme. Cependant, nos résultats montrent une relation
significative entre la valeur perçue économique et le
degré d'externalisation des SI pour les entreprises à moyenne
taille. Par ailleurs, pour le cas des entreprises les
plus grandes, il existe une relation positive très significative entre
la valeur perçue et la durée d'externalisation des
SI. Bien qu'ils divergent des résultats de l'étude
de Barthélemy et Geyer (2004) qui a trouvé que la taille est
négativement liée à l'externalisation totale des SI, nos
résultats peuvent être expliqués par le fait que ces
grandes sociétés transforment l'opération
d'externalisation en une forme de partenariat avec des importants partenaires.
(nationaux ou internationaux). Ce genre de relation est
généralement établit sur des longues périodes.
D'autre part, les résultats dégagés dans
notre étude indiquent que la variable taille de l'entreprise
n'a aucun effet de différenciation sur la relation entre la valeur
perçue de l'externalisation et le type stratégique des fonctions
SI externalisées. Ceci veut dire que quelque soit leur
taille, les entreprises se comportent de la même façon concernant
le rôle stratégique de leurs SI. Ainsi, les résultats de
l'approche universelle sont conformes à celle contingente dans ce
point.
Conclusion
Dans le cadre de ce chapitre nous avons procédé
à la vérification des différentes hypothèses de
notre recherche. En effet, suite à cette étape, parmi les six
hypothèses émises dans le cadre du deuxième chapitre, une
seule hypothèse a été totalement validée, les cinq
restantes ont été partiellement validées. Nous avons
également essayé d'interpréter les résultats
dégagés par notre recherche et les comparés à
celles des autres études, sans toutefois oublier de suggérer
quelques recommandations managériales intéressantes.
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