I.S.I.S.
~ NEUILLY SUR MARNE ~
«Pour connaître l'autre, il faut connaître
les prismes à travers lesquels on le regarde
Monique Ouellette
L'APPROCHE INTERCULTURELLE
EN PREVENTION SPECIALISE
JELOUALI yassine
Mémoire présenté en vue de
l'obtention du diplôme d'état d'éducateur
spécialisé ~ Session 2003 ~
Sommaire
Introduction P 5
ChapitreI: L'Identité Culturelle.
I/ L'Immigration P 9
Première vague d'immigration
Deuxième vague d'immigration
Intégration de ces deux vagues d'immigration dans la
société française
L'arrêt de l'immigration
Etat des lieux
II/ Identité et culture P 15
o L'identité
o Les mécanismes d'inclusion
- L'enculturation
- L'adaptation
- L'intégration
- L'acculturation
o Les mécanismes d'exclusion
- Les représentations : stéréotypes et
préjugés
-L'ethnocentrisme
o Les stratégies identitaires
Chapitre II: OBSERVATIONS DE TERRAINS
P 24
I/ Présentation du terrain d'étude
P 24
La prévention spécialisée
o Les principes de la prévention spécialisée
o Le club de prévention Rue Verte P 29
- Dénomination et fonctionnement administratif
- Territoire
- la population
II/ Présentation des situations P
33
o Première situation : A
o Deuxième situation : M.
o situations : Incompréhensions culturelles
ChapitreIII: INTERET ET ENJEUX D'UNE APPROCHE
INTERCULTURELLE
I/ Approche interculturelle P 57
o La décentration
o Le système de référence de l'autre
o Négociation et médiation
II/ Approche interculturelle et catégorisation
P 61
CONCLUSION P 62
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES P 63
ANNEXES P 65
Introduction
Le choix d'un sujet du mémoire n'est jamais anodin. Mon
origine tunisienne a eu sûrement une influence sur ce choix. La migration
de mes parents, ma jeunesse passée dans un quartier dit
« difficile », ma relation avec les éducateurs
durant mon adolescence sont autant de facteurs qui m'ont influés sur ce
thème. Cependant, ce choix résulte également des
différents échanges que j'ai eu avec les travailleurs sociaux et
cela avant et pendant ma formation.
Il est intéressant de voir le vif intérêt
des médias, qu'ils soient sur un support écrit ou audiovisuel,
pour les problèmes qui se posent dans les quartiers dits
« sensibles ». Cependant leur analyse me semble
incomplète.
Il me paraît cependant nécessaire d'aller plus
loin dans l'analyse de la situation, hors les clichés et les opinions,
pour mieux cerner la réalité et s'inscrire dans une
démarche plus constructive.
Nous devrions donc, rendre compte des problématiques
qui Sous-tendent l'intégration et tous problèmes qui y sont
associés. On constate que les significations associées à
la famille immigrée sont dépendantes des
présupposées et des attentes normatives qu'informe une culture
publique des problèmes de l'immigration.
La problématique de mon sujet de mémoire est
née d'un constat que j'ai pu faire dans mes différents lieux de
stages.
En effet, j'ai pu observer au cours de ces trois années
de formation, la difficulté rencontrée par certains
éducateurs dans l'accompagnement des populations ayant vécu une
migration familiale ou personnelle (de nationalité française ou
non).
C'est à a partir de ce constat que j'ai
décidé d'orienter ma réflexion sur notre intervention
auprès des populations issues de l'immigration.
En effet, ayant des origines tunisiennes avec des parents qui
ont vécu une migration, mes collègues me demandaient souvent des
informations sur certaines cultures ainsi que sur la réaction d'enfants
de migrants. C'est à ce moment là que je me questionnais sur
notre intervention et accompagnement avec ces populations.
Cette réflexion, qui a débuté avant ma
formation lorsque j'étais animateur socio-éducatif, a
trouvé certaines réponses et pistes de réflexion dans la
lecture du livre de Gilles Verbunt(1) : « Les obstacles
culturels aux interventions sociales » ainsi qu'auprès des
éducateurs que j'ais pu rencontré sur les différents lieux
de stages.
Enfin, une situation particulière a
entériné mon choix. Durant mon stage à
responsabilité, un jeune français d'origine
sénégalaise (il est née à Dakar) que le club de
prévention accompagnait depuis quelques années a expliquer au
club de prévention sa volonté d'aller voir un marabout afin de
remédier à son problème de dos (problème
chronique). Il s'en est suivi pendant quelques semaines un débat entre
les éducateurs sur ce type de consultations, différentes dans nos
pratiques de soins habituelles.
Malgré ce débat, l'équipe est
restée partagée sur cette problématique : certains
avançaient l'argument de la complémentarité de ce type de
démarche ( avec un rendez-vous chez le médecin) alors que
d'autres estimaient que l'accompagnement de cette personne vers une
intégration dans la société française passait par
un rejet de ces « ...croyances délirantes.../ »
C'est donc à travers ces deux expériences que
j'ai commencé ma réflexion sur ce type de problématique.
Et, cela m'a mené à m'interroger sur la prise en compte des
références identitaires et culturelles dans notre pratique
professionnelle, et, ceci m'a amené à la problématique
suivante : En quoi la rencontre éducative, en prévention
spécialisée, de jeunes migrants ou issue de l'immigration
permet-elle de réinterroger les références de
chacun ? Quels sont les enjeux et les conditions de la prise en compte des
références culturelles dans l'intervention éducative pour
contribuer à faciliter l'accès à une place d'acteur
à part entière ?
Pour travailler cela, je me referai au champ de la
prévention spécialisée et plus particulièrement au
club de prévention ou j'ai effectué mon stage à
responsabilité.
J'ai deux hypothèses de travail :
- L'éducateur doit, dans son accompagnement
éducatif, tenir compte de l'aspect culturel de l'usager.
- l'identité de l'enfant du migrant est
influencée par la culture d'origine des parents.
Les orientations théoriques choisies sont
pluridisciplinaires de par la problématique : Psychologie sociale,
Ethnologie (anthropologie), sociologie, psychologie, droit et histoire.
Afin d'étayer, de confirmer ou de nuancer voire
d'infirmer les hypothèses émises précédemment je me
propose de travailler sur trois axes.
Le premier axe sera un travail d'ordre historique et
théorique ou j'essayerais de regrouper les différentes notions
concernant le processus d'identité. Pour cela je me baserais sur une
approche historique, ethnologique (et anthropologique) et sociologique
(psychosociologique).
Le second axe comprendra, d'une part, une présentation
du terrain d'observation : le club de prévention, et, d'autre part
une présentation des situations rencontrées sur ce terrain.
Enfin, le troisième axe sera une synthèse
analytique du travail effectué dans les deux premières parties
ainsi qu'une réflexion sur la relation éducative basée sur
une approche interculturelle.
Objectifs des chapitres :
n Chapitre I : le premier objectif de ce premier
chapitre est de présenter en quoi consiste la trajectoire migratoire de
la population immigrée et son état actuel. Le second objectif de
ce chapitre sera d'exposer des argumentations théoriques en rapport avec
mon sujet.
n Chapitre II : L'objectif de ce chapitre sera
dans un premier temps d'exposer des situations rencontrées au cours de
ma pratique d'éducateur et dans un second temps de les analyser.
n Chapitre III : Le troisième chapitre
devra me permettre de confirmer ou d'infirmer mes hypothèses de
travail
CHAPITRE I : l'IDENTITE CULTURELLE
Terme récurent au cours de ces dernières
années, l'immigration devient un enjeu politique. Malheureusement,
l'immigration au travers de cet enjeu est pointée du doigt comme une des
causes des difficultés sociales actuelles. Comment en sommes-nous
arrivés à cette situation et surtout pour quelle raison
l'immigration a été choisie comme bouc émissaire.
I/L'IMMIGRATION
« Il y a eu, à travers la Gaule,
indépendamment des invasions une constante perfusion de sang
barbare »
Fernand Brandel
Cette phrase de Fernand Brandel nous révèle que
l'immigration n'est pas un phénomène récent en France mais
plutôt une « vielle » histoire commencée il y
a de nombreuses années : En passant par les Wisigoths, Francs,
Burgondes pour en arrivés à l'immigration limitrophes
(hollandais, anglais, suisses, italiens) en 1850 où l'on recense 380 000
étrangers soit 1 % de la population totale du pays, la France est donc
un carrefour de populations diverses et les deux vagues d'immigration du
20è siècle ne sont que la continuité d'une
histoire riche en migrations.
En raison de la baisse de la fécondité
amorcée au cours du 19è siècle, la croissance
démographique était faible et la main d'oeuvre devenait
insuffisante pour un pays qui s'industrialisait. Les courants migratoires ont
contribués à la richesse et à la diversité de la
population française.
Il est à noter que les deux vagues d'immigrations du
20è siècle ne sont que le résultat des deux
guerres mondiales. Ces flux migratoires répondent à une
démographie « déréglée » et une
croissance économique soutenue.
La première vague d'immigration
On peut la situer entre 1919 et 1930. Elle est le
résultat des milliers de morts de la première guerre mondiale. La
France a donc conclut durant cette période des conventions d'immigration
avec plusieurs pays européens, mais une grande partie des
arrivées est assurée par des organismes privés. Cela lui a
permit de remédier à la pénurie de main-d'oeuvre.
Cette première vague est essentiellement
composée de polonais (mines du nord et nord-est de la France), des
italiens (secteur agricole), des portugais et des espagnols (bâtiments et
secteur agricole).
La crise économique de 1929 a fortement ralenti
l'immigration. D'ailleurs plusieurs lois en 1932 ont été
voté afin de rendre difficile l'installation des populations
immigrées et de favoriser le retour au pays.
Malgré une vague de ressortissants espagnols venus en
France pour échapper au régime Franquiste, il faudra attendre la
seconde guerre mondiale pour voir une nouvelle arrivée massive de
populations étrangères.
La Seconde vague d'immigration
Débutant en 1945, après la seconde guerre
mondiale et ayant la même cause qui vise à la reconstruction du
pays. Cependant, ce flux migratoire fût plus étalé dans le
temps puisqu'il dura jusqu'au premier choc pétrolier en 1973 (en 1974 on
récence 3,5 millions d'immigrés soit 6,5 % de la population).
Elle fût également plus contrôlée grâce
à la création en 1945 de l'ONI (Office national de
l'immigration).
Cette seconde vague d'immigration est principalement
composée de personnes venant d'anciennes colonies française
(Algérie, Maroc, Tunisie, etc...) mais on y trouve également une
forte propension de portugais.
L'intégration de ces deux vagues d'immigration dans
la société française
Ce processus s'inscrit dans la durée, a parfois fait
l'objet de tensions plus ou moins avivées en période de
difficultés économiques.
Autant pour la première que la seconde vague
d'immigration, la société française a
considéré ces immigrants uniquement pour leur force de
travail.
Il existe à l'heure actuelle de nombreux
témoignages1(*)
d'italiens, de polonais révèlent la difficulté de
s'intégrer dans la société française du fait du
racisme ambiant : « ...chaque jour lorsque j'allais
chercher le pain après le travail le boulanger m'appelais Polka et
chaque jour je lui disais que mon prénom était Kalesh mais il en
avait rien à foutre de moi », de l'ignorance des cultures et
de la peur de l'étranger. Cependant cette difficile intégration
s'estompera lorsque la seconde vague d'immigration arrivera. Cette
difficulté sera, en effet, atténué par l'arrivée
d'une population d'un autre continent (Afrique) qui de par son
éloignement géographique et son passé d'anciens
colonisés va rassembler toutes les aversions de la population d'accueil.
Il s'effectue en fait une transition voire une transposition de ce rejet
sociétal pour l'étranger. Cette transition s'explique par une
ethnicité géographique, social et religieuse. En effet, la
première vague d'immigration provient principalement des pays
limitrophes avec des « architectures » de
sociétés similaires. La seconde vague qui provient d'Afrique,
apporte des personnes ayant vécu dans des sociétés
différentes du pays d'accueil (et ceci malgré l'effet
d'acculturation commencé dans le pays d'origine lors de la
colonisation).
L'arrêt de l'immigration
L'immigration contrôlée ne commence qu'en 1974
suite au choc de pétrolier de 1973 qui eu des répercussions
économiques importantes sur la plupart des pays industrialisés.
Dans certaines circonstances et pour certains emplois les travailleurs
immigrés sont donc devenus des personnes indésirables. En effet,
pour le pays d'accueil, la raison de l'immigration de l'étranger est
économique, c'est une force de travail. Dès que le travail manque
(chômage) son existence sur le territoire n'a plus lieu d'être.
D'ailleurs, initialement le projet migratoire de ces immigrés
était de travailler pendant une certaine période puis de
retourner au pays avec un pécule financier. Mais l'évolution des
moeurs des étrangers et les problèmes économiques de leur
pays d'origine a entraîné une volonté de rester sur le
territoire et d'effectuer ce que l'on a communément appelé dans
le droit français : le regroupement familial. Celui-ci visait
à redonner l'accès à des droits humains (droits de
l'homme, droits des enfants) qui est la reconnaissance de son droit de vivre en
famille et d'élever ses enfants.
A partir de 1974, l'immigration est contrôlée et
on favorise même le retour au pays (moyennant une aide financière)
mais cette initiative controversée a été enlevée
suite à l'arrivée au gouvernement du parti socialiste en 1981.
Ensuite, la législation française s'est durcie
par différentes lois (la loi Pasqua par exemple). Ce qui a eu pour
conséquence d'encadrer l'accès au pays et de limiter
l'immigration mais pas de la stopper. En effet, l'entrée clandestine en
France s'est accentuée et il existe actuellement un grand nombre de
« sans-papiers », c'est à dire sans aucune existence
juridique.
État des lieux
La répartition géographique des immigrés
en France ne suit pas une tendance particulière mais se calque sur la
mobilité de l'ensemble de la population française. C'est à
dire qu'elle tend à s'urbaniser. On peut noter que 38,5 % de l'ensemble
de cette population résident en Île de France. Il est tout de
même à noter que cette répartition, ayant tendance à
s'urbaniser, se concentre essentiellement sur le Centre (Paris et ses environs)
et l'Est de la France.
Les nouveaux arrivants des 20 dernières années
sont plus éloignés de la culture française que ne
l'étaient ceux qui les ont précédés : l'immigration
en provenance des autres pays Européens a diminué alors que
celle venant d'Asie, de l'Europe de l'Est a passablement augmenté.
La population immigrée en France en 1990 est de 4,13
millions de personnes (1)(hors immigration clandestine). De plus, on
dénombre 3,6 millions d'étrangers ayant leur résidence
permanente en France mais qui n'ont pas la nationalité française.
Une autre catégorie de personnes représente 5 millions de
personnes, ce sont les enfants et petits-enfants d'immigrés ( ayant pour
la plupart la nationalité française acquise par leur naissance
sur le territoire). De plus, malgré l'arrêt de la politique
d'immigration, il y a maintenant presque 20 ans, la migration continue et vient
d'horizons variables : Maghreb, afrique noire, pays de l'est, pays
asiatiques, etc... Cette population qui a dû pour venir en France
à dépenser une fortune pour venir découvrir ce qu'il est
pour eux un « eldorado ». Il n'y a d'ailleurs qu'à
voir les trajectoires empruntées pour se rendre dans notre
pays :
- M, un jeune algérien de 20 ans pour venir en France
demande au consulat d'Argentine un visa de tourisme. Après l'avoir
obtenu, il achète un billet d'avion qui a une escale à Paris. Il
prend cet avion et lors de l'escale arrive à se faufiler entre les
mailles de la police douanière et se rend chez de la famille en
attendant de stabiliser cette situation
- T, un jeune mauritanien de 19 ans passe par le Maroc en
compagnie de compatriotes, où il reste 3 mois (durant lesquels il fait
des menus boulots). Après cette période il arrive à se
joindre à un groupe de jeunes africains et s'embarquent avec eux
à bord d'un bateau de pêche (moyennant finance, apparemment
l'équivalent de 5000 francs français) et arrivent tant bien que
mal (un marocain est tombé du bateau et a été porté
disparu) sur la côte espagnole. Il leur faudra un mois pour se rendre
à la région parisienne.
Ces deux cas qui ne sont pas malheuresement exceptionnels
proviennent de témoignages de personnes que j'ais rencontré
durant mes stages (le stage à responsabilité : club de
prévention, association d'aide aux étrangers). L'éducateur
travaille au quotidien.
Après cette présentation succincte qui m'a
permis de vous présenter un historique de l'immigration je vais
maintenant m'intéresser aux interactions entre les migrants ou enfants
de migrants et la population installée en France depuis de nombreuses
générations. Afin de déterminer ces interactions je vous
propose un cadre théorique exposant les notions d'identité et de
culture.
II/ IDENTITE ET CULTURE
La rencontre entre l'usager et l'éducateur
spécialisé apporte des interactions entre ces deux personnes, ces
deux individualités. Chaque individu composé de sa propre
identité. Ce sentiment d'identité est basé sur la
perception de la similitude avec soi-même et la certitude de la
continuité de soi dans le temps.
C'est être un et le même à travers le
temps, l'être en soi, pour soi et pour autrui.
Donc comme le dit Alex muccielli2(*) : « chaque identité trouve son
fondement dans l'ensemble des autres identités s'exprimant à
travers le système de relations ».
Et, pour qu'une identité fonctionne, il faut donc un
équilibre. Car le rapport entre le « je »
(l'être privé) et le « nous » (l'être
collectif) doit être en permanence équilibrée.
L'excès de socialisation (de « nous ») ou le
repli sur la sphère privé (le « je »)
menacerait cet équilibre identitaire.
Dans la conception de l'identité il existe une
dualité entre l'identité personnelle (ou être privé
selon Durkheim) et l'identité sociale (ou être collectif selon le
même auteur).
L'identité personnelle comme nous l'explique Pierre
Tap : « L'identité personnelle s'institue comme valeur et par
des valeurs. Par l'action et l'oeuvre, l'individu se valorise aux yeux, tant il
est vrai qu'il a besoin d'être reconnu, aimé, admiré,
accepté par l'autre pour confirmer ses propres pouvoirs »
résulte de l'expérience propre à un individu de se sentir
exister et reconnu par autrui en tant qu'être singulier mais identique,
dans sa réalité physique, psychique et sociale.
L'identité sociale, elle, est un processus
d'attribution, d'intervention et de positionnement dans l'environnement ; elle
s'exprime à travers la participation à des groupes ou à
des institutions. Comme le dit Joëlle Dutruilh3(*) « les identités
sociales sont multiples :appartenance politique, religieuse, famille,
groupe d'amis, et... Elle se structure donc par des références
identificatoires liées aux expériences partagées avec
d'autres acteurs.
En fait, c'est à travers l'autre et dans ses rapports
avec lui que tout individu construit son identité. La question de la
place et de la représentation de la France est au coeur de
l'identité sociale. En effet, celle-ci est fondée sur une
expérience particulière de la société d'accueil.
Au sein de cette identité sociale se trouve
l'identité culturelle qui se perçoit à travers de
multiples facettes : ethnique, nationale, régionale, religieuse de
la classe sociale. Comme on a pu le voir précédemment les
sociétés à partir du 20è siècle ont vu leurs
relations interculturelles augmentées. Mais avant de voir comment se
déroulent ces interactions il m'a apparu indispensable de définir
ce terme de culture.
Après avoir parcouru de nombreux livres, la
définition de Camilleri me semble la plus pertinente :
« La culture est l'ensemble plus ou moins fortement lié des
significations acquises les plus persistantes et les plus partagées que
les membres d'un groupe, de par leur affiliation à ce groupe, sont
amenés à distribuer de façon prévalente sur les
stimuli provenant de leur environnement et d'eux-mêmes, induisant
vis-à-vis de ces stimuli des attitudes, des représentations et
des comportements communs valorisés, dont ils tendent à assurer
la reproduction par des voies non génétiques ».
Par conséquent, la culture , par exemple du migrant,
est reconnue à travers un agrégat plus ou moins défini de
valeurs, de traditions, de modes de fonctionnements sociaux et de comportements
auxquels on accorde fréquemment une logique forcément
opposée ou du moins différente de celle qui constitue la norme
culturelle de la société d'accueil..
o Les mécanismes d'inclusion des
étrangers
Carmel Camilleri dans son livre « Chocs de
cultures »4(*)
définit les mécanismes d'inclusion des étrangers dans une
nouvelle société, une nouvelle culture.
Ces mécanismes impliquent des processus tels que
l'adaptation, l'intégration et l'acculturation que je vais
retranscrire.
L'enculturation
Avant d'exposer ces mécanismes d'inclusion, il serait
intéressant de voir comment l'individu acquiert cette culture.
L'enculturation est le processus qui débute dès
le plus jeune âge et qui va consister pour le sujet à s'approprier
la culture de son groupe.
L'adaptation
Elle a pour but de réduire la différence
qualitative entre les réalités antérieures connues et
celles précédentes.
« Ce processus n'implique pas la
réciprocité de l'échange, le changement s'effectue avant
tout par le migrant et pour lui tous les segments culturels qui font
références à son existence ». (Joëlle
Dutruilh).
L'intégration
« L'intégration est un processus d'adaptation
multidimensionnel et distinct de l'assimilation. ce processus, dans lequel, la
maîtrise de la langue d'accueil joue un rôle moteur essentiel,
n'est achevé que lorsque l'immigrant ou ses descendants participent
pleinement à l'ensemble de la vie collective de la société
d'accueil et ont développé un sentiment d'appartenance à
son égard ».
Il y a trois niveaux d'intégration :
n intégration de fonctionnement (communiquer, gagner
sa vie, autonomie)
n Intégration de participation (actif dans la
société et jouer un rôle)
n Intégration d'aspiration où il décide
de lier son avenir et celui de ses enfants au projet d'avenir du groupe comme
membre à part entière de la société)
Ce processus long et multidimensionnel est dynamique en
s'inscrivant dans le temps et requiert, de la part du migrant, une
réciprocité dans la société d'accueil pour que
celui-ci puisse exister : intégration linguistique,
socio-économique, institutionnelle, sociale, scolaire, personnelle et
communautaire.
L'acculturation
Cinq paramètres de ce processus :
n origine : à l'intérieur ou à
l'extérieur du groupe
n Sa vitesse ou rythme d'effectuation
n son étendue : sous-systèmes ou traits
atteints
n sa profondeur : selon le noyau concerné
(patriarcal)
n sa réalité
o Les mécanismes d'exclusion
Dans ces mécanismes les rapports interculturels
impliquent de constituer ou d'observer les différences. Ils
supposent : « ...la réduction de l'autre
(stéréotypes) ou la négation de ses particularités
(ethnocentrisme),...5(*)
(Gisèle Legault : l'intervention interculturelle).
Les représentations : stéréotypes et
préjugés
Les stéréotypes sont une catégorie comme
une autre qui permet de classer, grouper des objets, personnes,
évènements en fonction des attributs qu'ils possèdent. Ils
ont la fonction particulière de permettre au sujet d'avoir une image
positive de son groupe et de lui-même.
« Les stéréotypes sont des images
schématiques toutes faites, façonnées par le bain culturel
et concernant les différents groupes sociaux de notre
culture ». Cette définition d'Alex Mucchielli reprend deux
termes importants concernant les représentations : images et
culture.
Par exemple, dans une étude faite par des
étudiants de l'université Paris V en psychosociologie
(basé sur un questionnaire), ils relèvent de ces interviews des
images récurrentes de leurs auditeurs. Sur la question quelles sont
qualités de l'africain noir ?, les personnes interrogées ont
répondus : « ...ils sont sportifs, ils savent très
bien dansés, ils sont fainéants, etc... Ce mélange
d'erreurs, d'exagérations et d'omission est le fruit de ces
stéréotypes formés d'images simplifiées, de
caricatures grossières tendant à dévaloriser le groupe
différent.
La cohabitation des immigrés avec les autres habitants
ne fait pas facilement et le quotidien est ponctué par un racisme. Les
pratiques mutuelles d'évitement entre populations immigrées et
françaises font que les individus ne se perçoivent qu'au travers
du prisme déformant des catégorisations sociales fortement
stéréotypées.
Les préjugés, eux, sont un jugement, une
opinion, une attitude sélective face à des personnes que l'on ne
connaît pas ou peu. Souvent négatif, il tend à imposer une
vision biaisée par nos émotions.
Par exemple, la vision d'un jeune d'origine
algérienne qui me fait remarquer ou plutôt m'affirme que les juifs
ne pensent qu'à l'argent. Suite à cette allégation, je lui
demande s'il connaît une personne juive dans son entourage. Après
quelques instants de réflexion, il me répond qu'il connaît
une personne qui habite dans son quartier. Je lui redemande de nouveau s'il
connaît cette personne en utilisant cette fois-ci le qualificatif de
« personnellement ». A cela, il me rétorque qu'il ne
le connaît pas personnellement mais que de toute façon tout le
monde savait que les juifs « aimaient » l'argent.
Voilà un exemple du préjugé,
c'est-à-dire une vision biaisée, un jugement sans fondement,
généralisé et sans une connaissance des personnes
visées.
L'ethnocentrisme
Contrairement aux stéréotypes qui visent
à marquer la différence culturelle, l'ethnocentrisme ignore la
différence comme ci elle n'avait pas lieu d'être.
Lévi Strauss définit l'attitude ethnocentrique
qui découle de l'ethnocentrisme comme « la plus ancienne
attitude, (...), qui consiste à répudier purement et simplement
les formes culturelles : morales, religieuses, sociales,
esthétiques, qui sont les plus éloignées de celles
auxquelles nous nous identifions ». Il s'agit donc du refus
d'admettre l'existence d'autres cultures qui diffèrent selon lui
« pas entre elles de la même façon, ni sur le même
plan ».
Les unes et les autres sont reconnaissables par leurs
différences et similitudes (pays européens), selon leur
éloignement géographique (pays maghrébins et
sub-sahariens) et les possibilités de contacts qu'elles ont plus ou
moins induit chez l'autre (phénomène de concurrence, imitation,
intimidation, etc...).
Dès lors, la tentation est grande pour le travailleur
social de valoriser les modèles visant à assurer la promotion de
l'individu tel qu'il est défini par les modèles de
références véhiculés par nos institutions. Mode de
vie qui comprend d'innombrables détails relatifs aux comportements, mais
qui présentent tous certains facteurs communs. Ils représentent
tous une réponse normale et attendue de n'importe quel membre de la
société à une situation donnée. C'est d'une
façon schématique la normalisation de nos interventions en tant
qu'éducateur.
A travers, ces deux mécanismes le migrant ou l'enfant
de migrants va adapter son comportement en mettant en place des
« stratégies identitaires ». Ce terme,
utilisé par Hanna Malewska-Peyre6(*) définit des mécanismes défensifs
agissant à deux niveaux : intérieure (processus
psychologiques destinés à éviter la souffrance et
l'angoisse), et extérieur (stratégies destinées à
changer sa réalité ou celle de son groupe d'appartenance).
o Stratégies Identitaires
· Intérieures
Hanna Malewska-Peyre a déterminé trois postures
ou stratégies afin de palier à la souffrance et angoisse
existante ou potentielle :le refoulement, l'intériorisation de
l'image négative et l'agressivité.
Le refoulement est l'action par laquelle le jeune d'origine
immigrée va ignorer par exemple un acte de racisme en le transformant
donc le rendant moins pénible.
L'intériorisation de l'image négative est
l'action qui pousse la personne à culpabiliser, à accepter le
regard négatif d'autrui en ne se faisant que peut remarquer.
L'agressivité peut autant faire partie des
stratégies intérieures qu'extérieures car elle peut
être dirigée vers soi ou vers autrui. Dans le premier cas
lorsqu'elle mise en place,elle répond plus à une
problématique d'ordre psychiatrique. Le second cas de figure correspond
à une stratégie visant à réagir par la violence
lorsque l'angoisse et la souffrance sont présentes.
· Extérieures
Hanna Malewska-Peyre en détermine trois :
l'assimilation, la revalorisation de sa singularité et les
stratégies intermédiaires.
L'assimilation est une stratégie visant à gommer
partiellement ou entièrement les différences du jeune d'origine
immigrée. Par exemple, la francisation de son prénom ou
l'adoption sans concession de la culture d'accueil.
La revalorisation de sa singularité est une posture
visant à revendiquer et mettre en évidence ses
différences. Par exemple, on rencontre souvent des jeunes
idéalisant son groupe d'appartenance ou le pays d'origine des
parents.
Les stratégies intermédiaires sont une sorte de
compromis qui consiste à mettre en exergue les similitudes du groupe
d'appartenance avec le groupe dominant mais tout en gardant ses
différences. Cela passe par exemple par l'utilisation de valeurs
universalistes comme sujet de concorde.
En conclusion, ce cadre théorique va me permettre de
présenter, dans le chapitre suivant, des situations entre
l'éducateur et des jeunes de l'immigration ainsi que des enfants de
parents ayant vécus une migration récente. Et ceci grâce
aux outils théoriques développés
précédemment tels que le processus d'acculturation ainsi que les
stratégies identitaires mises en place par ces jeunes.
Cela me permettra d'expliciter ces situations à l'aune
de cet argumentaire théorique.
CHAPITRE II : OBSERVATIONS DE TERRAINS ET
INTERVENTIONS EDUCATIVES
L'objectif de ce chapitre est d'exposer des situations
rencontrées notamment durant mon stage de 8 mois dans un club de
prévention.
Mais auparavant, je me propose de vous présenter le
terrain des situations observées : la prévention
spécialisé et ses spécificités
I/ Présentation du terrain d'étude
o La prévention
spécialisée
Historique,
C'est à la fin de la seconde guerre mondiale, qu'on
vit apparaître pour la première fois sous le nom de Clubs
d'Enfants, la première génération d'expériences,
reconnues comme fondatrices de la prévention.
Des initiatives individuelles et locales se font jour,
essayant de répondre aux désarrois et aux difficultés de
tous ordres nés des bouleversements de l'après-guerre
(déracinements - reconstructions). Ces derniers amènent un
changement dans les mentalités, en même temps qu'apparaissent les
premiers effets d'un développement urbain plus ou moins anarchique
(phénomène des bandes d'adolescents, des « blousons
noirs » au cours de l'été 1959).
L'idée d'un nouveau type d'action face aux
difficultés rencontrés par les jeunes, a été
lancée par quelques personnalités, notamment Fernand Deligny, H.
Flavigny à Paris, Robert Chazal (juge des enfants à Paris), P.
Martaguet (juge des enfants à bordeaux), qui aspirent à trouver
des réponses autre que judiciaires et répressives aux
délits causés par les jeunes.
On peut ainsi considérer que la Prévention
Spécialisée est née d'une critique interne de la prise en
charge institutionnelle.
Un peu plus tard l'Ordonnance du 23/12/1958 marque une
étape importante, dans la mesure où elle regroupe en un texte
unique, l'ensemble des dispositions concernant les mineurs en danger, non
délinquants. C'est dans le cadre de leur pouvoir d'assistance
éducative que des juges des enfants ont été amenés
à s'intéressée et à soutenir le
développement des clubs et équipe de prévention.
Cela à amener à la prise d'un
arrêté le 13/05/1963. Le Haut-commissariat à la jeunesse et
aux sports crée un « Comité National des Clubs de
Equipes de Prévention «contre l'inadaptation sociale de la
jeunesse ». Mais finalement, la prévention quitte, peu de
temps après (1970), le giron de la jeunesse et des Sports pour
être rattachée au Ministère de la Santé et plus
particulièrement au secteur de l'Aide Sociale à l'Enfance.
En 1972, l'arrêté du 4 juillet (ainsi que ces
circulaires d'application) marquent la reconnaissance officielle de ce mode
d'intervention, de ses principes et de ses méthodes, sous le vocable de
« Prévention Spécialisée ». En 1972,
les associations de prévention spécialisée sont au nombre
de 98, en 1996 on en dénombre 350 environ.
Le 1er janvier 1984 entre en vigueur la loi du 22 juillet
1983, réalisant les transferts de compétences dans le domaine
sanitaire et social entre l'Etat et les collectivités locales. La
Prévention Spécialisée entre dans les compétences
transférées aux départements.
Enfin, la loi du 6 janvier 1986 adapte la législation
sanitaire et sociale au transfert de compétences en matière
d'Aide Sociale. La Prévention Spécialisée est
rattachée au dispositif administratif départemental de l'Aide
Sociale à l'Enfance (article 45 du Code de la famille et de l'aide
sociale).
La prévention spécialisée peut se
décliné à trois niveaux :
- La prévention primaire : Action éducative
péri et post scolaire
- La prévention secondaire : Prévention
centrée sur les personnes posant une problématique
- La prévention tertiaire : Action
Finalités et principes de la prévention
spécialisée
La finalité première est « d'agir sur
les phénomènes d'inadaptation et les états de souffrance
d'origine sociale, source d'actes de délinquance, de violence
parallèlement au dévellopement d'insécurité de la
population ».7(*)
Les grands qui en découlent :
- mener des actions éducatives visant à aider
les jeunes à se prendre en charge dans le domaine de leur vie
personnelle, de leur travail et de leurs loisirs.
- Participer au dévellopement de la vie sociale d'un
quartier, d'une ville
- Etablir un partenariat actif
La prévention spécialisée s'inscrit dans
le travail social selon six principes d'intervention :
- L'absence de mandat,
- la libre adhésion,
- respect de l'anonymat,
- le partenariat et le support associatif,
- Non-institutionnalisation des activités supports
? Absence de mandat nominatif
C'est de ce principe que vont découler les autres. Ce
ne sont pas des personnes qui sont désignées, mais une
population. C'est aussi une différence fondamentale avec une approche
administrative ou judiciaire. Ainsi, la personne n'est pas stigmatisée
par une problématique
? La libre adhésion
L'absence de mandat implique toute une démarche "pour
aller vers", "à la rencontre de l'autre". Toute liberté doit
être laissée à la personne d'adhérer ou non à
nos propositions, d'élaborer, de maintenir ou de rompre une relation.
Cela permet au jeune d'être acteur.
? Respect de l'anonymat
Il exige discrétion et confidentialité de la
part de l'éducateur. Celui-ci garantit l'efficacité et la
crédibilité d'un travail fondé sur la confiance. La
personne peut venir vers lui librement sans se sentir jugée par un
passé ou par un dossier.
? Le Partenariat et le support associatif
En prévention spécialisé la souplesse, la
proximité, une réaction rapide ainsi qu'une relative autonomie
sont à la base de ses méthodes ou le cadre associatif
paraît le mieux adapté. L'objectif est d'éviter
d'être semblable aux institutions (enfermé dans un cadre rigide)
que les jeunes rejettent.
IL est nécessaire car l'éducateur ne peut agir
seul. Il doit être en contact avec les "institutions" (associations,
mairie, foyer d'hébergement, etc...) afin de faciliter l'accès
des jeunes aux équipements de loisirs, formation et au monde du
travail
Un des objectifs étant de permettre
l'intégration des jeunes dans les structures de droit commun, l'action
s'exerce à deux niveaux :
* Action auprès des jeunes pour aider cette
intégration
* Action auprès des structures pour faciliter leur
adaptation
L'action éducative des équipes nécessite
que soient fédérées les compétences des
différents partenaires de manière à prévenir la
marginalisation, faciliter la promotion et l'insertion sociale des jeunes et
des familles.
Le partenariat s'exerce avec les responsables politiques des
Villes et du Département, d'une part en tant qu'observateurs
privilégiés des besoins de terrain, et d'autre part en tant que
participants à la réflexion et à la mise en place de
réponses adéquates.
Après avoir exposer succinctement les principes de la
prévention spécialisée, je me propose de vous
présenter maintenant le lieu de mes observations : le club de
prévention.
? Non-institutionnalisation des
activités
Cela suppose de la part des éducateurs une
volonté de ne pas faire perdurer les activités mises en place.
Ces outils doivent servir à atteindre des objectifs, cela ne doit pas
devenir des finalités en soi.
o Le club de prévention
En 1985, le CCPD (Conseil communal de la Prévention de
la Délinquance) prend l'initiative de créer un club de
prévention régie par la loi 1901. Le club est né
officiellement en 1985 mais ne commencera son travail qu'en 1986.
· Dénomination et fonctionnement
Le club de prévention se situe dans une ville
située dans le département de l'Essonne (91).
Sa population est d`environ 16500 habitants. La ville a une
particularité géographique car elle est coupée en deux par
l'Autoroute du Sud, ce qui en fait presque deux villes distinctes.
Le club de prévention possède un local
composé de 5 pièces : secrétariat, salle d'accueil,
salle des entretiens, bureau des activités et salle vidéo.
L'exiguïté du local pose certains problèmes pour les
entretiens avec les usagers. De plus l'association possède une salle
acceuillant l'atelier Vélo (réparations de bicycles).
Le local dans un club de prévention permet
d'accueillir un public qui entretient des relations difficiles avec les
institutions ou qui recherche la discrétion. Les temps de
présence fixes instaurés par les éducateurs offre un cadre
à la rencontre puis à la relation éducative.
L'équipe est composée de 5 éducateurs,
un chef de service et d'une secrétaire. C'est une équipe
renouvelée ; deux nouveaux éducateurs sont arrivés
durant l'année 2002. Ce qui a posé quelques problèmes de
fonctionnement entre les « anciens » éducateurs et
les « nouveaux » arrivants. Néanmoins, l'adaptation
des « nouveaux » éducateurs s'est effectué
assez rapidement se qui a permit d'avoir une certaine dynamique
d'équipe.
· Territoire
La ville où intervient le club de prévention
abrite environ 20 0000 habitants. La répartition géographique de
cette population est scindée en deux : une partie de celle-ci vit
dans ce qu'on appelle le bas de la ville qui est une zone presque exclusivement
de propriétaires alors que le reste de la population habite dans le haut
de celle-ci et abrite essentiellement des locataires.
Cette distinction nous permet de voir à quels types de
population nous avons affaire. Le bas regroupe des habitants de milieu
aisé (que l'on pourrait qualifier sur une définition
économique de classe moyenne), le haut de la ville regroupe des
habitants de la classe populaire.
Le club de prévention, bien qu'il soit amener par ses
missions à oeuvrer sur tout le territoire, il intervient essentiellement
sur la population du haut de la ville. C'est-à-dire en direction de la
population, sans vouloir généraliser sa situation, appartenant
à la classe populaire.
Sur le haut de la ville, le club de prévention
travaille principalement sur deux quartiers.
On peut noter également que dans cette partie haute de
la ville se situe un foyer Sonacotra (foyer de travailleurs pour la plupart
étrangers) avec qui le club de prévention travaille
étroitement (le foyer Sonacotra nous réserve deux chambres pour
nos problématiques liées au logement). A travail ce travail
partenariat, le foyer Sonacotra nous envoie régulièrement des
personnes ayant certains problèmes.
· Population
Le travail éducatif pratiqué par les
éducateurs de « Rue Verte » est destiné
à un public âgé de 7 à 25 ans.
La tranche d'âge peut paraître trop
étendue, par rapport à la plupart des clubs de prévention,
mais elle permet de fournir un travail de fond très
intéressant.
Car ce travail s'effectue sur les trois niveaux de la
prévention : primaire, secondaire et tertiaire (définie
précédemment). Par exemple, dans le club de prévention il
existe un atelier de réparations de vélos. Cela permet de
mobiliser la population plus jeune (77/12 ans) et d'instaurer une relation avec
ses enfants, ses jeunes qui peuvent plus tard faire appel aux éducateurs
du club.
Et enfin ce type d'intervention permet tout simplement de
faire un travail éducatif (par exemple amener à une certaine
autonomie par la réparation des de leurs cycles).
· Méthodes d'actions et
d'interventions
L'accompagnement éducatif
En l'accompagnant dans son cheminement personnel,
l'éducateur veille à développer chez l'usager les
motivations susceptibles d'inspirer une projection dans le temps et de
favoriser la formulation, la concrétisation et enfin la
réalisation de ses projets (famille, travail, formation, comportement).
Cela passe par :
- entretien individuel avec l'usager
- accueil et démarches au local
- accompagnement dans les démarches
- contact avec les travailleurs sociaux concernés par
les suivis éducatifs
- travail avec les familles, etc
La présence sociale
Il s'agit de tendre vers une présence fréquente
et régulière, aux moments où les jeunes ont l'habitude de
se retrouver quels que soient le jour et l'heure. L'éducateur dans le
club de prévention s'efforce de cerner les moments à
privilégier en réalisant à échéance
régulière une observation d'amplitude maximale : journées,
soirées, week-ends, jours de fête.
L'éducateur fait ainsi comprendre par son comportement,
et non à partir d'une annonce verbale ou formelle, sa
disponibilité aux moments les plus favorables au développement
des relations. Les saisons ont une influence sur les moments de travail de rue
pour assurer cette présence sociale.
Les espaces non institutionnels constituent les
itinéraires des éducateurs de Prévention
Spécialisée. La rue, les squares, les porches d'immeubles, les
cages d'escaliers, mais aussi les espaces commerciaux ou publics, les
cafés, les salles de jeu, les cafétérias, les gares, les
équipements socioculturels qui disposent d'un lieu d'accueil ouvert
(nous utilisons fréquemment la maison des ados de la ville comme lieu de
présence sociale).
Travailler dans la rue c'est être disponible pour
écouter, observer sans insistance et avec discrétion. Sans
intention autre que d'aller à la rencontre. Proposer trop vite des
solutions aux problèmes énoncés, sans connaissance des
personnes et du milieu, se révèle souvent être une
erreur.
Il faut arriver à faire partie du paysage et avoir
intégré les codes, les rituels autour desquels s'organise la vie
des jeunes sur le quartier.
Le club de prévention où j'ai effectué
mon observation présente un avantage non négligeable qui est son
installation dans la ville depuis de nombreuses années.
De plus, l'équipe présente dans club
possède une éducatrice et un éducateur qui sont en place
depuis environ 8 ans ce qui permet d'une part au reste de l'équipe de
bénéficier de leur connaissance sur ce territoire et d'autre part
d'être accepté par la population de la ville.
C'est donc dans cette structure que j'ai pu observer certaines
situations qui m'ont parus intéressante au vu de mon mémoire et
dont je vais vous retranscrire le contenu.
II/ PRESENTATION DES SITUATIONS
Dans cette présentation, j'exposerai dans un premier
temps la situation d'un jeune français d'origine
sénégalaise, puis, dans une deuxième temps je vous
présenterai l'accompagnement d'une jeune française d'origine
malienne et enfin dans un dernier temps je vous proposerai un florilège
de situations interculturelles.
Les deux premières situations ont été
rencontrées durant mon stage dans le club de prévention, le reste
des situations proviennent des trois stages que j'ai effectués durant ma
formation d'éducateur spécialisé. Concernant mes deux
stages de découverte je les ais effectué dans un institut de
jeunes sourds et dans une association d'aide aux étrangers.
Situation M.
M. est né en 1987 au Sénégal dans une
fratrie de six enfants. Il a une soeur et un frère aîné
ainsi que deux demi-frères en bas âge. Ses parents ne sont pas
divorcés mais le père de M. est polygame et a donc deux femmes
qui vivent au domicile familial.
Son père est arrivé en France en 1964.
Après avoir séjourné pendant 35 ans, seul, dans un Foyer
Sonacotra (foyer de travailleurs étrangers), il décide
d'effectuer un regroupement familial et oient un logement HLM (Habitation
à loyer modéré). M. a deux ans lorsqu'il arrive en
France.
Dès leur arrivée, tous les enfants sont
scolarisés à l'école publique.
M. y suit une scolarité sans problème notoire
jusqu'à la classe de 4e où à la suite d'un
problème il est renvoyé du collège.
Suite à ce renvoi, M. vient nous voir au club de
prévention sur les conseils de l'assistante socialedu collège.
En effet, le club de prévention entretient un
partenariat actif avec le collège qui consiste à diverses
interventions de la part des éducateurs au sein de
l'établissement où à l'extérieur.
Il n'est pas rare de voir des établissements
scolaires faire appel à un club de prévention lorsqu'ils estiment
qu'un suivit individuel est nécessaire. Cependant, dans ce cas M. comme
deux autres élèves durant l'année qui après avoir
été renvoyés par le collège ont été
dirigés par celui-ci vers le club de prévention afin qu'il puisse
d'une part effectuer un suivit éducatif et d'autre part leur trouver un
autre établissement.
Ce qui peut paraître assez bizarre lorsque l'on sait
que l'établissement qui renvoie un de ses élèves
âgé de 16 ans et moins, doit en collaboration avec
l'académie lui trouver un autre collège. De plus, la personne
passe généralement 4 à 5 semaines à attendre
d'être scolarisé. Ce qui être source de marginalisation pour
certains élève.s
M. arrive au club de prévention un jeudi, il a
été renvoyé depuis plus d'une semaine, et nous explique
qu'il a été exclu du collège et qu'il aimerait en trouver
un autre afin de continuer sa scolarisation. Ce premier entretien dure environ
deux heures durant lesquelles il nous explique pourquoi il a été
exclu.
Le collège nous a expliqué que M. a
été exclu car il répondait d'une façon
véhémente voire violente à ces professeurs.
M. nous explique, lui, « je n'ais jamais
insulté un professeur mais c'est vrai que je ne me laissait pas faire
par eux. Je leur ait parlé correctement mais peut être que j'ai
haussé un peu le ton ».
II est à noter que le physique de M. a eu peut
être une influence indirecte sur son exclusion.
M. est un jeune homme physiquement imposant. Il mesure
1.90 et pèse environ 95 kilos. Son physique de
« rugbyman » ainsi que sa voix grave peuvent faire peur
à ses interlocuteurs.
D'ailleurs après le premier entretien, lors d'un
débriefing que l'on fait après chaque rencontre
l'éducatrice avec laquelle je faisais ce suivit m'a dit
« ...il m' a fait flipper lorsqu'il a commencé à
s'énerver en parlant de ces profs ». Cela n'est bien entendu qu'une
hypothèse mais qui a eu a mon avis une influence sur la réaction
des différents professeurs.
Après cette première rencontre nous
décidons de proposer à M. de faire des chantiers afin qu'il ne
reste pas sans occupation tout en nous permettant d'effectuer notre
accompagnement.
Donc, lors de notre seconde rencontre, nous lui proposons
qu'en attendant la réponse de l'académie il pourrai travailler
avec nous ce qui lui permettrait de gagner un peu d'argent et de s'occuper.
M. nous répond positivement à cette proposition
et se montre ravit car il s'ennuie et « ...en a marre de
galérer avec les autres crickets du quartier ».
Ce terme de « criquet » sert à
désigner chez les jeunes de son quartier ceux qui ne sont pas
scolarisés et n'ont pas emplois.
Le lendemain, M. arrive et est ponctuel. Avant de partir faire
le chantier nous discutons ensemble autour d'un café en attendant
l'arrivée de ma collègue. Au cours de la discussion M. me demande
si je suis « muslim » (musulman), je lui réponds par
l'affirmative et s'ensuit une discussion sur notre pratique religieuse. M. me
fait remarquer « que la plupart des jeunes ont oublié
d'où ils venaient et qu'ils ne pratiquent pas la religion de nos
parents ». La discussion continue jusqu'à l'arrivée de
l'éducatrice et nous partons tous les trois pour le chantier.
Comme je voulais expliquer précédemment le
club de prévention utilise comme outil éducatif les chantiers.
Le club de prévention effectue trois types de
chantiers : l'affichage de documents administratifs dans la ville, la
distribution de ces mêmes documents ainsi que le nettoyage des espaces
verts. Nous avons porté notre choix sur ce dernier type de chantier car
le cadre (parc boisé) et la longueur de la tâche (Trois heures)
permettent d'instaurer un dialogue de qualité.
Nous commençons le chantier et M. se
révèle consciencieux dans son travail. Il ramasse tous les
détritus dans le parc et va jusqu'à fouiller dans les buissons.
Cependant, l'échange avec M. est assez limité et répond
à nos différentes questions par des réponses
courtes : « oui, non, etc... ».
Il est vrai que lors des premiers entretiens, comme j'ai
pu le constater au cours de ma formation, l'échange est assez
limité. Ce qui s'explique tout simplement par la méconnaissance
de l'interlocuteur. Et, pour instaurer un dialogue il faut avant tout
installer une relation de confiance. Cela dit Les échanges avec
M. étaient vraiment unilatéraux.
Après une heure de travail nous décidons avec
l'éducatrice que je continuerais seul le chantier avec M.
Il est vrai que lors du premier entretien, nous avions
constaté que M. avait dû mal à s'adresser à
l'éducatrice. En effet aux questions posées M. s'adressait
exclusivement à moi pou y répondre.
En l'absence de l'éducatrice, M. s'exprime plus
facilement et est beaucoup plus disserte. Il m'expliquait que son exclusion
« ...s'était n'importe quoi et qu'il en avait marre des
français qui étaient tous des racistes et des mounafikouns
(non-croyants)... ». Il continua son discours en disant :
« qu'est ce qu'ils nous font chier à nous prendre la
tête avec le foulard, j'ai mit une fois une chéchia et ils m'ont
pris la tête avec ça, qu'est ce que ça peut leur foutre que
je porte ça, ils mettent bien leur croix eux et personne les
soûle ». Pendant une demi-heure M. continua sur le même
ton.
Il est intéressant tout d'abord de voir qu'en
l'absence de l'éducatrice M. est beaucoup plus expressif. Cela peut
s'expliquer par sa relation avec le sexe féminin mais il est assez
tôt dans la relation pour savoir si cette hypothèse est pertinente
ou non.
que face à cette exclusion justifiée ou non
M. a réagit en se sentant attaquer sur sa différence. D'une part
sur son origine et d'autre part sur sa religion.
A la fin de ce chantier éducatif, qui m'a permis dans
apprendre davantage sur M., je lui donnais rendez-vous après le week-end
pour poursuivre nos recherches sur le collège.
Puis, une fois rentrer dans le club de prévention, je
fis un point sur la situation avec ma collègue. Après lui avoir
rapporté la situation, elle me dit que : « j'avais
sentis qu'il était mal à l'aise avec moi,on a bien fait de se
séparer comme ça on a pu en apprendre davantage sur sa situation
personnelle ».
Le lendemain, M est toujours aussi ponctuel et je lui propose
que l'on appelle l'académie afin d'avoir des nouvelles. Je lui donne le
numéro de téléphone et, M. me demande :
« Est-ce que vous pouvez les appeler à ma place, vous, vous
parlez bien alors que moi je bafouille ». L'éducatrice lui
répond : « non, c'est à toi d'appeler mais s'il y
a un problème avec eux on pourra t'aider ». M. finalement
accepte et appelle l'académie. Cet entretien téléphonique
s'est bien dérouler car M. a su très bien exprimer sa demande
malheuresement son interlocuteur lui a répondu qu'ils ne lui avaient pas
encore trouvé de collège pour l'accueilir.
M. est déçu de la réponse :
« j'en ai marre c'est quand qu'ils vont me trouver un collège,
mon père n'arrête pas de mettre la pression parcequ'il comprend
pas pourquoi j'ai pas trouvé e collège, il croit que c'est facile
lui ». Devant cette situation l'éducatrice et moi-même
lui proposons s'il veut que nous rencontrions ses parents afin de leur
expliquer la situation. M. répond par l'affirmative :
« ouais ça serait bien comme ça il verra que c'est pas
si facile que çà ». Nous proposons alors à M.
qu'il demande à ses parents de nous appeler pour que nous fixions un
rendez-vous avec eux. M. part et nous dit qu'il dira à son père
de nous appeler dès ce soir.
Il est intéressant de voir que lorsque nous
proposons à M. de rencontrer ses parents, il ne parle que de son
père comme si sa mère était absente.
Le soir même le père de M. nous appelle et est
d'accord pour nous rencontrer, iol nous dit que son fils lui a expliqué
que nous étiojns les personnes qui l'aidions à trouver un nouveau
collège. Le rendez-vous est fixé deux jours plus tard.
Durant les deux jours qui précèdent le
rendez-vous avec les parents, nous continuions avec M. de prendre des nouvelles
avec l'académie (sans succès) et d'effectuer les chantiers
éducatifs.
D'ailleurs les relations entre M. et l'éducatrice
s'améliorent mais M. rest tout de même assez
« timide ».
Le jour du rendez-vous M. vient au club de prévention
pour nous amener chez lui. Nous arrivons chez M., son père nous
accueille et nous fait asseoir dans leur salon. Une fois installé son
père appelle sa femme et lui demande de nous servir des boissons. Le
père nous demande en attendant si notre famille va bien, si nos enfants
vont bien. La mère revient et après nous avoir servit, elle
repart dans une autre pièce. A ce moment là le père nous
demande comment se passe les recherches pour rescoloariser son fils. Ma
collègue lui répond alors : « on va peut
être attendre votre femme pour commencer ». Il lui
rétorque alors en souriant : « ma femme est
occupée, mais vous pouvez m'expliquer pour mon fils, c'est moi qui
m'occupe de son éducation ».
Cette réaction du père peut nous choquer car
nous avons une conception nucléaire de la famille basé sur une
redistribution des rôles plus égalitaire. Néanmoins, dans
la culture africaine la distinction entre la femme et l'homme est très
marquée. Celle-ci se base sur des préssuôsés
idéologiques ou religieux.
Nous n'insistons pas et nous lui présentons les
démarches que nous avons effectué ainsi que la motivation de M
pour trouver un nouveau collège. La discussion continue autour de la
situation de M. et après une heure nous décidons de prendre
congé. Nous donnons rendez-vous à M.pour le lendemain.
Le lendemain, M rappelle l'académie et celle-ci lui
explique qu'il est rescolarisé dans un collège situé dans
une ville liimitrophe et qu'il doit prendre contact avec le proviseur de
l'établissement. Suite à l'entretien téléphonique
M. est content et prend l'initiative d'appeler tout de suite le proviseur pour
prendre rendez vous avec lui. Le proviseur lui propose un entretien
l'après midi même. M. nous demande si nous pouvons l'accompagner
à ce rendez-vous. Nous lui répondons par l'affirmative et partons
l'après midi avec lui.
Le proviseur nous reçoit et après s'être
présenté il s'adresse à
M. : « j'espère que votre intégration ici se
passera bien, j'espère également qu'il n'y aura aucun
problème fâcheux avec vos nouveaux professeurs ? ».
M. lui répond : « vous inquiétez pas il n'y aura
aucun problème tant qu'on me respectera », je prends la parole
et m'adresse à M. : « mais le respect cela marche dans
les deux sens », M. sourit et me dit : « bien
sûr mon frère ». La discussion continue sur les
modalités d'entrée dans le collège et le proviseur donne
rendez vous à M. deux jours plus tard pour intégrer
l'établissement.
Nous nous séparons de M. à la fin de l'entretien
et ce dernier nous remercie de l'avoir aidé.
Un semaine plus tard nous appellons M. pour savoir si tout se
déroule bien dans son nouveau collège, il nous dit :
« ça va pour l'instant, c'est je ne connais pas grand monde
mais tout les profs et les autres sont sympas avec moi ». Nous
demandons à M. de nous tenir au courant de sa situation scolaire et nous
prenons congé de lui.
D'après les informations que j'ais pu avoir ,
après avoir quitté mon lieu de stage, M. continue tranquillement
sa scolarité et malgré quelques difficultés d'adaptation
à son nouveau collège, tout à l'air de se dérouler
convenablement.
Commentaire
Ce cas m'a semblé intéressant car il permet de
voir que certaines situations méritent une adaptation de
l'éducateur permettant d'accéder à une
« vraie » relation.
Ce que je souhaite pointer dans cette situation est la
relation qu'entretient M. avec les femmes.
Dans un premier temps, pendant le chantier éducatif,
nous avons tenter d'adapter notre intervention et d'établir une relation
de confiance avec M..
En effet, en prévention spécialisé,
l'absence de mandat, le principe de la libre adhésion ainsi que celui de
l'anonymat imposent, avant même d'envisager un accompagnement
éducatif, que l'on établisse cette relation de confiance
permettant l'adhésion du jeune.
Ainsi, nous avons décidé que j'effectuerai seul
l'accompagnement éducatif durant le chantier, car sans ça nous
aurions mis sûrement plus de temps à entrer en contact avec lui.
Il arrive fréquemment que les jeunes que nous
accueillons s'adressent plus facilement aux éducateurs du même
sexe. Cependant, concernant ce jeune il m'a semblé que le refus de
s'adresser à l'éducatrice et plutôt s'adresser à
moi, était peut être dû à une donnée
culturelle émanant de son éducation.
Cette donnée culturelle dont je parle est la
représentation symbolique de la femme.
Pour expliquer cette représentation il faut se baser
sur la cellule familiale et les rôles et statuts de ses membres. Dans la
famille traditionnelle, c'est l'homme qui représente la famille dans la
vie publique, la femme, elle, occupe le champ privé. C'est donc à
travers ces représentations que va se construire chez le jeune une
vision inégalitaire des sexes.
Dans la situation de M. ce qui me permet de dire qu'il y a un
aspect culturel dans sa relation avec les femmes provient d'un coté, de
l'épisode qui s'est déroulé durant le chantier
éducatif et d'un autre coté les échanges qui ont eu lieu
au sein du foyer familial.
Comme nous l'avons précédement signalé
(voir situation) l'épisode du chantier éducatif à
révéler l'attitude du jeune vis-à-vis des femmes et nous
avons eu confirmation lors de notre rencontre avec ses parents. Dans cette
dernière, l'attitude de M. semble reproduire celle du père dans
le sens où ce dernier met à l'écart sa femme lorsque nous
entamons la discussion au sujet de son fils (sa scolarité).
On comprend avec ma collègue assez rapidement que le
père de M. « représente la famille vers
l'extérieur, dans la vie publique » comme nous le
suggère Gilles Verbunt8(*) à propos des rôles et statuts dans les
sociétés traditionnelles.
Nous avons été marqués par la
ressemblance d'attitudes entre le père et le fils, ces moments
passés au sein du foyer familial nous ont permis de confirmer le constat
établit lors du chantier éducatif et d'en déduire que M.
se trouve bien dans un schéma de reproduction parentale qui constitue un
trait culturel que l'on retrouve fréquemment.
Situation A.
A. est née en 1982 en France et est originaire du Mali.
Elle fait partie d'une fratrie de 7 enfants tous nés en France et qui y
suivent leur scolarité.
La première rencontre avec A. se déroule au club
de prévention en décembre 2000. Elle y est venue avec une amie
qui connaissait le club puisqu'elle y a été suivie par une
éducatrice.
En arrivant, Aminata paraît triste et sa demande est de
l'aider à trouver un logement afin qu'elle soit plus
indépendante : « j'ai besoin de place, on vit à
sept à la maison, on est les uns sur les autres, j'en ai marre,..., je
veux me barrer ».
Nous prenons rendez-vous avec elle le surlendemain car
d'autres entretiens étaient prévus à ce moment là.
Le lendemain, en réunion de régulation,
l'équipe décide que je ferais le suivi d'Aminata avec ma tutrice
de stage.
Le jour du rendez-vous, Aminata arrive cette fois-ci sans son
amie. Une fois installée, Aminata nous reparle de sa
problématique et nous dit en pleurant : « j'en ai marre,
il faut que je trouve un appartement ». Après l'avoir
réconfortée, nous lui demandons de nous exposer plus calmement
son problème.
Aminata nous décrit sa situation depuis 1999 :
elle part au Sénégal, son pays d'origine, en 1999 en compagnie de
sa mère. La raison de ce départ serait la situation de sa
grand-mère, gravement malade.
En arrivant à Dikha (un village du sud-ouest), elle
trouve sa grand-mère en bonne santé et apprend par sa mère
que ce voyage est : « pour te marier parce qu'il est temps
maintenant ».
Malgré son refus, on l'oblige à se marier avec
un homme : « à qui je suis promise depuis l'âge de
12 ans ». Aminata revient uniquement avec sa mère en France
quinze jours plus tard et refuse de reconnaître son mari.
Elle décide de quitter le giron familial et part
habiter chez une amie dans un département voisin. Quelques jours plus
tard, elle apprend qu'elle est enceinte. Après certaines
démarches auprès de la Mission Locale où elle suit le
programme TRACE, elle va bénéficier, par l'intermédiaire
de l'assistante sociale de cette structure, d'un début d'accompagnement
pour faire une IVG (janvier 2000). Personne n'est au courant dans la
famille : « c'est interdit chez nous d'avorter, on m'aurait
obligé à le garder ».
Quinze jours après son départ du foyer familial,
et une semaine après avoir appris qu'elle était enceinte, Aminata
revient chez ses parents : « je m'étais disputée avec
mon amie pour des conneries et donc je suis partie ». A son retour au
domicile familial, son père est au pays et sa mère l'a
acceptée sans problème d'autant qu'A. travaillait et donnait de
l'argent à sa famille (nous dit-elle).
En effet, Aminata nous dit qu'elle travaille à la
mairie J. dans un service administratif, elle y a signé un contrat CES
(Contrat Emploi Solidarité).
Après nous avoir raconté cet épisode de
sa vie, elle continue en nous expliquant sa situation actuelle :
« J'en peux plus maintenant, toute la famille fait
pression sur moi : mêmes les cousins d'Espagne et d'Amérique
m'appellent pour que je fasse venir mon mari en France. En plus, j'ai honte de
ce que je vais faire » (concernant l'IVG).
A. continue en nous disant qu'elle a l'impression de tromper
sa famille à propos de l'IVG et se sent très mal, même avec
sa mère. Elle continue néanmoins à s'occuper de ses
frères et soeurs ainsi que de ses cousins. En effet, son père les
a adoptés à la mort de leurs parents (maladie ? en 1993).
Elle nous explique également : « mes
parents ont des problèmes sociaux et je ne veut pas mélanger ma
vie à la leur et je ne veux pas rencontrer l'assistante sociale du
secteur qui ne comprend rien ».
Après tous ces éléments d'information
concernant la vie personnelle et familiale d'A., nous décidons, avec ma
tutrice et avec l'accord de la jeune, de prendre contact avec l'assistante
sociale qui la suivait dans le programme Trace afin de faire le point sur
l'évolution d'A. dans le cadre de ce dispositif et de donner suite
à la demande d'IVG. Suite à ce rendez-vous en présence
d'A., l'assistante sociale nous précise qu'A. suit une formation
d'informatique (en parallèle avec son travail) dans le cadre du
programme Trace.
Au cours de nos échanges, A. reformule sa demande en
vue d'une IVG : « oui, je suis sûr je veux faire
l'IVG, c'est pas mon enfant ».
Nous accompagnons dès le lendemain Aminata à la
PMI et après un entretien avec une conseillère ainsi qu'un
psychologue, une date est arrêtée pour l'IVG.
A. nous raconte après son IVG, que tout s'est bien
passé mais que devoir répondre à tant de questions autour
de ce choix : « c'était pénible, j'ai
beaucoup pleuré avant et après l'intervention, j'avais
peur ».
Après ces propos tenus par la jeune, nous lui demandons
si elle souhaite bénéficier d'un soutien psychologique mais le
refus est catégorique pour le moment.
A. revient très rapidement sur sa demande
initiale,c'est-à-dire son désir de quitter le domicile
familial : « la vie y est de plus en plus difficile, je dois
m'occuper de la maison et de mes frères et soeurs. ».
Nous lui proposons alors de rencontrer sa mère pour
tenter une médiation ce qu'elle refuse immédiatement. En partant
de sa demande, nous commençons à envisager un accompagnement
autour du logement. Nous discutons donc avec elle des différentes
possibilités d'aides pour accéder à un logement : APL
(allocation personnalisée au logement), FAJ (fond d'aide aux
jeunes) ; puis les structures pouvant l'accueillir : Foyer jeunes
travailleurs, Pavillon social de la ville. Nous nous quittons après
avoir repris un rendez-vous pour le lendemain.
A. n'honore pas ce rendez-vous, alors nous l'appelons sur son
portable et elle nous explique, un peu confuse, qu'elle n'a pas pu venir mais
qu'elle sera présente le lendemain à 14 heures.
Ce jour là A. arrive avec une heure de retard. Nous
faisons le point sur sa demande et les démarches effectuées dans
ce sens. Nous lui proposons, après avoir contacté le Pavillon
social de la ville, une chambre. Nous lui en expliquons le fonctionnement et
les modalités d'accès à ce logement.
Après cette proposition, Aminata commence à se
montrer réticente face au projet du départ : « je
sais pas, là ça se passe bien avec ma mère, dans la
chambre je serais toute seule et mes affaires je les mettrai
où ? ».
Devant cette réponse, nous commençons à
nous poser des questions sur la volontée de A. de quitter le giron
familial. La suite n'ayant apporté aucun élément
significatif, j'ai choisit de ne pas les retranscrire.
A l'heure actuelle, le club de prévention n'a aucune
nouvelle de A., l'assistance sociale qui la suit dans le cadre du programme
Trace a indiqué aux éducateurs qu'elle avait arrêté
sa formation qualifiante en informatique mais continue son emploi dans la
mairie.
Commentaire
A la suite de cette rencontre et des actions qui ont
été proposées, plusieurs points d'analyse peuvent se
dégager.
Tout d'abord, nous observons une très grande
instabilité dû sans doute à un défaut de
maturité et à une difficulté à se situer dans une
culture donnée : l'IVG ne se pratique pas dans la
société sénégalaise traditionnelle, pourtant la
jeune fille ici en a le droit et en fait la demande.
Il est à noter que la famille de A. est très
croyante (Confession chrétienne) ce qui « dans le cas de
l'IVG, détruire ce que Dieu a crée »9(*) .
Mais A. est partagée, elle a du mal avec sa demande,
qui est à la fois une aspiration profonde (elle ne veut pas qu'on lui
impose un mari, ni des enfants) en même temps qu'un déni des
valeurs qu'elle a acquises dans son éducation et que véhicule sa
famille. Pour l'aider, peut être fallut davantage prendre en compte la
situation culturelle de la jeune fille et l'aider mieux ainsi à prendre
ses décisions. Il aurait fallu peut être également mieux
l'ancrer dans la réalité, par exemple en lui faisant prendre
conscience des difficultés et des avantages qu'offrit la prise d'un
logement.
Il y a sans doute un peu trop de précipitation pour
établir des véritables méditations avec la famille et ne
pas brusquer la jeune. Rappelons à ce sujet qu'une des
difficultés en prévention spécialisé réside
dans le fait que l'on travaille sans mandat, l'anonymat et sur le principe de
la libre adhésion. A tout moment, la jeune fille peut rompre,
disparaître et mettre en échec ce qui a été
tenté par elle au préalable.
Il faut savoir évaluer quelles sont les réelles
motivations de la jeune fille.
En effet, une fois le logement pour A. trouvé, elle se
fait réticente, signe peut être que sa démarche profonde
résidait ailleurs et que l'on n'a pas su bien la décripter. Peut
être
Situation n° 3 : Incompréhensions
culturelles
Dans ces situations, je ne ferais pas une étude sur une
situation interculturelle particulière. Mais un exposé de
situations d'interactions entre deux cultures : celle de
l'éducateur et celle de l'usager.
Ces situations se sont déroulées dans le club de
prévention, ou j'ai effectué mon stage à
responsabilité, mais également dans les deux autres stages
(Institut de jeunes sourds et association d'aide aux étrangers).
Fuir de chez soi
Durant mon stage dans le club de prévention, une jeune
fille française d'origine marocaine (18 ans) est venue au club de
prévention pour une demande anodine.
Elle nous a expliqué (au second rendez-vous) qu'elle
voulait partir de chez-elle car elle y trouve la vie pénible (son
père et sa mère la dénigre et la traite de
« bonne à rien).
En travaillant sur cette volonté de départ, une
partie de l'équipe voulait accélérer les démarches
pour aider cette jeune fille à quitter le domicile familial.
Cependant, le chef d'équipe, une éducatrice et
votre serviteur avons estimé qu'il fallait peut-être faire des
démarches sans les accélérer.
Notre argumentaire était basé sur un aspect
culturel de cette rencontre éducative : En effet, dans la cellule
familiale maghrébine est un tout formant selon certains ethnologues et
professionnel (Faïza guelamine) une identité familiale ou chaque
membre de la famille participe activement à la formation de celle-ci et
ou cette identité fait partie intégrante de la personne.
La meilleure solution, si tant est qu'il en existe, est
peut-être de ne pas l'éloigner de son milieu familial de peur de
la couper de ces liens intrafamiliaux, indispensable à
l'épanouissement de la jeune fille. En effet, le rôle de cette
jeune fille au sein de sa famille est constitutif de la base de la base de sa
personnalité Néanmoins, un départ peut être
envisagé si la situation peut mettre en danger la jeune fille (autant
physique que morale) mais une période d'observations, d'entretiens bref
d'un accompagnement tenant compte de la personnalité culturelle de la
jeune fille.
Magie et religion
Une grande partie de la population des clubs de
prévention est d'origine immigrée voire étrangère.
La population étrangère selon le pays et la région de sa
provenance va avoir des codes, des modes différents de communication.
Lors d'un entretien qu'a eu un éducateur du club de prévention
avec un jeune d'origine étrangère (de la région de Zarzis,
sud tunisien) qui avait apparemment certaines difficultés
financières.
Au cours de l'entretien (que j'ai pu suivre),
l'éducateur et moi-même l'écoutons avec attention lorsqu'il
nous a dit : « ...on a écrit sur moi, on m'a filé la
poisse ». L'éducateur ne comprenant pas lui demanda ce qu'il
voulait dire par cette phrase. Se sentant mal à l'aise le jeune
répondit : « non mais..., il me faut du travail en fait,
il me faut de l'argent ». L'entretien continua sur les diverses
possibilités pour trouver du travail et s'acheva sur une prise de
rendez-vous ultérieure.
Après le départ de cette personne, nous avons
commencé à discuter de la problématique de ce jeune et
l'éducateur me demanda si j'avais compris ce que le jeune avait voulut
dire par « on a écrit sur moi ».
Le hasard a voulu que ce jeune viennent de la même
région que celle de mes parents. Ce qui m'a permit de saisir la
teneur de sa phrase.
J'expliquai alors à l'éducateur ne comprenant
pas que dans cette région la magie et les marabouts étaient
partis prenante de la vie de ces habitants. Donc, lorsque le jeune dit que
quelqu'un a écrit sur lui, cela veut dire que quelqu'un qui lui veut du
« mal » est parti voir un marabout, un magicien qu'on
appelle plus communément dans cette région :
« quelqu'un qui écrit ».
Après m'avoir écouté l'éducateur
m'a dit : « c'est vraiment n'importe quoi ». Ce
à quoi je rétorquai : « non, ce n'est pas
n'importe quoi car il existe énormément de personne qui croient
dans le surnaturel car il tient une place importante dans la tradition
arabo-musulmane », la discussion a continué sur ce
thème et j'expliquai à l'éducateur qu'il nous fallait
tenir compte de cet aspect culturel en demandant au jeune pourquoi il croyait
qu'on avait écrit sur lui .L'éducateur me répondit que si
on donnait du crédit à la « sorcellerie »,
cela ne ferait que l'enfermé dans ses croyances et nuirait à son
insertion professionnelle.
L'échange a continué sur la façon
d'aborder la problématique mais l'éducateur resta ferme sur ces
convictions.
De plus, le jeune n'est jamais revenu au club de
prévention (c'est d'ailleurs un des avantage mais dans certains cas
comme celui là un inconvénient des clubs de prévention car
le jeune est libre de venir ou de ne pas venir ce qui nécessite
d'instaurer une relation de confiance avec l'usager).
En conclusion, ce cas est intéressant car l'on peut
voir d'une part le malaise de l'usager de parler de certaines de ces croyances
et d'autre part un éducateur qui en se référant à
ces normes, à sa culture aurait pu (si le jeune était revenu) ne
pas tenir compte de cette donnée culturelle et aurait donc
« rater » sa rencontre avec l'usager. Il est vrai que le
surnaturel n'est pas l'apanage de certaines cultures mais il tient une place
importante dans la vie quotidienne des maghrébins.
L'éducateur en niant la particularité culturelle
de l'usager, il aurait à mon sens nié l'identité
même de l'usager car elle est un tout indissociable.
Qu'est ce que la famille ?
Au cours de mon stage dans l'institut de jeunes sourds,
j'avais en référence (en compagnie de ma tutrice) une jeune fille
d'origine ivoirienne arrivé il y a trois ans en France.
Elle a une surdité peu accentuée et s'exprime
par le langage verbal sans trop de difficultés. En discutant avec le
chef de service et ma tutrice j'apprenais que cette personne était venu
en France sans sa famille (resté en Côte d'ivoire) mais habitait
chez son oncle paternel.
Sur ce point mes collègues m'ont dit « qu'il
était tout à fait anormal de laisser cette jeune fille venir
seule dans un pays étranger et que cela pouvait poser certains
problèmes pour son équilibre ».
Cela peut sembler être une difficile épreuve pour
cette jeune fille que de venir en France sans sa famille. Cependant je pense
qu'il faut nuancer ces difficultés car la cellule familiale africaine
est différente de la famille occidentale.
En effet, la cellule familiale ne comprend pas uniquement le
père, la mère et les frères et soeurs mais elle est
élargie à la famille satellite, c'est-à-dire les
grands-parents, oncles et tantes. D'ailleurs en discutant avec la jeune fille,
elle n'utilise pas le terme d'oncle mais celui de « mon
père » pour désigner celui-ci. Je ne tiens pas à
minimiser cet éloignement familial difficile pour tout usager mais
plutôt expliquer qu'en fonction de l'origine des jeunes la conception de
la cellule familiale varie.
Je peux ajouter également, de part mon
expérience personnelle, je suis originaire de la Tunisie, que lorsque
j'étais enfant (6 ans) l'un de mes frères a suivi une partie de
sa scolarité dans le pays. Cette scolarisation en Tunisie n'était
pas un choix de la part de mes parents mais une volonté de l'un de mes
oncles ainsi que de mon grand-père paternel. La famille élargie
se sent responsable de chaque enfant constituant la cellule familiale.
4, 5, 6, 7 enfants !
On a souvent entendu (et on l'entend encore malheureusement)
de la part de certaines que les africains procréaient un nombres
élevé afin de toucher des allocations familiales
conséquentes (certaines personnes appellent cela également
« l'argent braguette »).
Lors de mon dernier stage, dans une association d'aide aux
étrangers, je travaillais souvent avec des bénévoles.
Certains de ces bénévoles étaient d'anciens travailleurs
sociaux et au cours d'une matinée je discutais avec une de ses
bénévoles, une assistante sociale à la retraite. Cette
ancienne assistante sociale a essentiellement travaillé dans une CAF
(Caisse d'allocations familiales), elle y a travaillée durant ses 20
dernières années d'activité professionnelle.
Au cours de cette discussion cette personne me dit :
« c'est dommage que les parents africains fassent autant d'enfants
car c'est difficile de les éduquer après,..., en plus c'est
uniquement pour toucher les alloc (allocations familiales) ». Je lui
rétorquai : « qu'il ne faut pas
généraliser certaines situations ». Il est vrai que
certains ont cet objectif mais ce n'est qu'une infime partie de cette
population. La bénévole me déclara : « oui,
bien sûr mais bon il y en a qui abuse quand même ». La
discussion s'arrêta là et se détourna sur un autre sujet
moins polémique.
Cette vision est malheuresement encore présente chez
certains travailleurs sociaux alors quelle est à mon avis trop
simpliste.
En effet, la famille africaine n'a pas cette
préoccupation, cette planification si précise.
D'une part la femme africaine jouit d'un prestige
proportionné au nombres d'enfants (surtout les garçons) ce qui va
la pousser à avoir un plus grand nombre d'enfants afin d'être
reconnu. D'autre part, les parents pensent également aux enfants en
terme d'investissement. C'est-à-dire que d'un côté les
enfants vont permettre à travers les mariages de nouer des alliances
avec d'autres familles et d'un autre côté les enfants subviendront
aux besoins des parents lorsqu'ils ne pourront plus travailler. Cette
dernière donnée concerne essentiellement les enfants mâles
car les filles lorsqu'elles se marieront n'apparteneront plus à la
cellule familiale malgré l'existence de liens entre les familles, et ne
sera pas considérer comme un investissement financier. Il y a un dernier
aspect culturel, qui a tendance à disparaître, est que la
mortalité infantile dans les pays africains était
élevé, ce qui poussait les parents a avoir plus enfants.
Enfin, ces données sont en train d'évoluer pour
les familles qui se sont installés en France car les mères au
contact de la femme occidentale voient que sa quête de reconnaissance
peut passer par un aspect autre que l'enfantage (le travail par exemple). De
plus, les parents qui travaillent cotisent pour leur retraite et pourront ne
pas compter sur leurs enfants. Cette acculturation va je pense influer sur le
nombre de naissances par familles.
Religion musulmane
Au cours de mon stage à responsabilité, j'ai
été confronté à une situation où l'usager
était un jeune français d'origine musulmane.
T. est un jeune de 17 ans habitant un quartier
défavoriser de la ville et selon les dires de mes collègues
complètement déstructuré.
Il arrive au club de prévention habillé d'une
« djellaba » (habit traditionnel) et d'une
« chéchia » (petite calotte souvent blanche). Ces
deux objets ont une forte connotation religieuse et représente pour le
jeune qui les portent une volonté de montrer son appartenance à
la « oumma », c'est-à-dire la communauté
musulmane. T. en entrant nous salue en nous disant « Al salam
aleïkom », ce à quoi un éducateur lui dit
« ici on est en France, on dit bonjour monsieur », T.
lui rétorque : « bonjour en arabe ou en français,
c'est la même chose mon frère », l'éducateur lui
répond : «oui mais nous on comprend pas l'arabe donc tu nous
parles en français et en plus je suis pas ton frère mais
éducateur ». La discussion continue et T. nous donne de ces
nouvelles. Il nous explique que maintenant il s'est calmé et que
grâce à Dieu il est maintenant sérieux. Il nous explique
que : « maintenant je fais la prière et toutes les
conneries d'avant s'est terminé, j'ai un Taf (travail), la famille
ça va, tout est clean».
Cette rencontre avec T. nous montre que face à ses
différentes difficultés il a mis en avant sa culture en
revendiquant sa spécificité de musulman.
La méconnaissance ou une connaissance tronquée
de l'islam va nous pousser, nous travailleurs sociaux, a estimé que ces
personnes sont inadaptés à la société actuelle.
Pourtant, l'important n'est pas de savoir si l'islam est une
religion adapté ou non à notre société mais
plutôt de comprendre pourquoi cette personne s'est
« islamisé » et ce que peut lui apporter cette
religion. Il ne faut pas regarder la personne à travers un prisme de
représentations mais tenter de comprendre sa relation avec cet aspect
culturel. Il est vrai qu'en ce moment les divers médias nous bombardent
de reportages plus racoleurs que pertinents sur l'islam et qui ont consciemment
ou inconsciemment une influence néfaste sur notre représentation
de cette religion. L'éducateur doit donc remettre en question en
permanence ses représentations afin de pouvoir discerner, comprendre la
vision de l'usager.
CHAPITRE III : OMMENTAIRE ET APPROCHE
INTERCULTURELLE
I/
L'intervention en prévention spécialisée
se fait le plus souvent auprès d'individus ou de groupes d'origine
ethniques variées (Afrique, Maghreb, pays de l'est) et connaissant des
problématiques diverses.
En tant qu'éducateurs, nous sommes amenés
à travailler avec ces jeunes de diverses origines culturelles tout en
prenant en compte leur identité d'adolescent et de personne.
Le phénomène d'acculturation modifient
sensiblement la vie familiale, le rapport aux autres et l'ensemble des
conditions d'existence de la famille d'origine africaine, maghrébine ou
de toute autre origine.
Cependant, les traditions, l'aspect culturel continuent
d'imprégner les individus sur plusieurs générations avant
que la société d'accueil ne modèle les comportements et
efface toute référence à l'histoire particulière de
la famille.
Les nouveaux migrants mais également les enfants des
migrants sont marqués respectivement par leur culture ou par celle de
leurs parents. Les traditions, les coutumes, les rîtes sont plus moins
respectés dans les familles, malgré l'éloignement du pays
et l'espoir qui s`amoindrit d'y retourner définitivement un jour.
Parfois même les traditions se parent d'une aura plus intense,
l'attachement à l'identité culturelle se fait plus sensible.
« Le facteur migratoire qui compromet la
structuration culturelle compromet la structuration psychique » nous
dit C. MESMIN.
Or les enfants migrants sont confrontés à la
réalisation d'un enjeu différent de celui de leurs parents :
En effet , l a plupart sont nés en France et sont
imprégnés à travers les cadres intégrateurs tels
l'école, les loisirs.. etc.. à un autre type d'immersion qui vont
contribuer à réaliser une expérience de
métissage . Selon Pons coté dans l'ouvrage de Marie Rose
MORO10(*): « Pour l'adolescent , fils de
migrants , comme d'ailleurs pour tout enfant, il semble que l'adolescence soit
un moment particulièrement difficile où il doit élaborer
à la fois sa place dans la filiation et ses affiliations, ses
ressemblances et ses différences ; pour échapper au clivage
qui le guette du fait de sa double appartenance, il est condamné
à faire des liens, à inventer des stratégies de
métissage plus ou moins créatives , plus ou moins
douloureuses.. ;ce implique un travail d'élaboration de son
parcours qui contribue à une reconstruction patiente d e l'estime de soi
dans un processus souple.. ; ».
Or si ces stratégies identitaires qui contribuent au
métissage , ne peuvent se mettre en place du fait : ( même
auteur)
-d'exigences insurmontables.
-du refus de reconnaître cette nécessité
par l'environnement et les parents.
-d'un refus de dialogue avec de proches.
-d'une absence de contact avec des tiers qui vont aider
à comprendre le sens et faciliter les accès culturels à la
société d'accueil.
-d'une adaptation insuffisante de la famille dans le nouveau
milieu.
Cela pousse les adolescents à la révolte,
à des symptômes de mal-être et à des conduites
anti-sociales.
En effet cet enjeu est à la fois : - au coeur de
la question identitaire (Selim ABOU)11(*)
-au coeur des pratiques éducatives à mettre en
place .
Celles-ci vont donc directement concerné et
impliqué les éducateurs qui eux même sont porteurs de leurs
propres références culturelles, qui ont aussi leurs histoires,
leurs milieux familiaux et sociaux. Ils sont aussi garants d'une institution,
d'une société, avec ses lois, ses codes, tout ce qu'ils ont
intériorisé. En somme, selon les particularités de leurs
appartenances, ils ont eux-mêmes expérimentés un processus
d'enculturation et de construction identitaire qui varient de l'un à
l'autre. Il arrive que les éducateurs oublient cette donnée et
imposent parfois inconsciemment leur idéal sociétal,
c'est-à-dire qui consistent à choisir un accompagnement
éducatif basé sur leurs propres référents
identitaires sans tenir compte ou sans faire de liens avec celles d'autrui.
C'est donc par cet ethnocentrisme (défini par Strauss)
qui va l'enfermer dans un accompagnement éducatif rigide,
inadapté et peu propice à une relation d'échange, de
partage.
II/ L'approche
interculturelle
Pour Abdallah-Preitceille12(*) « l'interculturel » doit
être vu comme une modalité d'analyse et d'appropriation des
problèmes issus d'une situation pluraliste. Quand à l'approche
interculturelle, elle serait une méthode de communication et
d'appréhension des problèmes débouchant sur un type
d'intervention donnée.
Il existe à l'heure actuelle dix modèles de
cette approche interculturelle. Pour ma part, je retiendrai ici le
modèle proposé par Cohen-Emerique, car outre le fait que ce soit
un modèle spécifique à toute relation d'aide il
amène à une prise en compte de l'identité culturelle
perçue dans ses multiples facettes : ethnique, nationale,
religieuse, etc...
Pour Cohen-Emerique, psychologue française, l'approche
interculturelle est « ...d'abord et avant tout un processus d'aide.
Ce processus se fonde sur le respect de la personne, de sa vision du monde, de
son système de valeurs. Toute relation d'aide, interculturelle ou non,
s'appuie sur les mêmes bases ». cette approche interculturelle
ne focalise pas uniquement son intervention sur
« l'autre », l'usager, l'immigrant mais reconnaît le
subjectif de l'intervenant.
Elle propose d'ailleurs trois étapes à
l'approche interculturelle que je trouve très
intéressante :
- La décentration qui va nous permettre de mieux cerner
notre propre identité (personnelle et sociale).
- La pénétration du système de
référence de l'autre (l'usager).
- La négociation et la médiation
Il est à noter que cette approche est à
concevoir comme un processus, c'est-à-dire comme nous le dit Ghislaine
Roy13(*) , elle n'est pas
linéaire mais peut s'entrecroiser voire se chevaucher selon la
complexité de la situation rencontrée
La décentration
Pour Cohen-Emerique, cette
« décentration » consiste à prendre du recul
par rapport à soi. C'est-à-dire prendre de la distance par
rapport à ses présupposés.
L'éducateur doit donc en permanence remettre en
question ses impressions, ses modèles et ses valeurs qui ne sont pas
dans certains cas les mêmes pour l'usager. Car l'éducateur est
avant tout un individu porteur d'une culture et de sous-cultures (nationale,
ethnique, religieuse, professionnelle, institutionnelle, etc...). Cette
décentration va lui permettre d'accéder à ce qu'appelle
Abdallah-Pretceille une certaine :
« neutralité culturelle ». Cela induira dans le
cas contraire une incompréhension pouvant nuire à la relation,
à l'accompagnement éducatif.
Grâce à cette décentration
l'éducateur spécialisé va pouvoir pénétrer
le système de référence de l'usager, de la personne.
La pénétration du système de
références de l'autre
La pénétration du système de
références de l'usager passe avant tout par l'écoute. Une
écoute sans jugements, sans interprétations.
Cette écoute sera la base du travail de
compréhension, l'éducateur pourra interroger le cas
échéant s'il n'a pas saisit la vision de l'usager. C'est
également aux travers de ses différentes rencontres que
l'éducateur acquérra une certaine compréhension du
système de références d'autres cultures.
Cette pénétration du système de
références de l'autre va permettre à l'éducateur de
créer un lien avec la personne basé sur une compréhension
mutuelle.
Il s'agira pour l'éducateur de tenter d'établir
une relation d'échanges réciproques.
Ainsi l'éducateur est en mesure d'accomplir un
accompagnement et de mettre en place des médiations, des
négociations avec l'usager.
Médiation et Négociation
La médiation est un processus par lequel un tiers
tente, à travers l'organisation d'échanges entre les parties, de
permettre à celles-ci de confronter leurs points de vue et de rechercher
une solution.
Cette phase débute dans la résolution des
problématiques. En effet, cette phase consistera pour l'éducateur
à trouver avec l'usager un terrain d'entente et envisager une
démarche contractuelle permettant d'établir le projet
individualisé.
Par exemple, si l'éducateur se trouve face à
une jeune fille musulmane qui dit ne pas pouvoir aller à la piscine
à cause du refus des parents dans le cadre des activités
scolaires, quel rôle pourra-t-il jouer entre cette jeune fille,
l'institution scolaire et les parents ?
En effet, nous avons donc d'une part le refus des parents qui
semble motivé par le fait d'une mixité de l'activité et
qui de plus porterait préjudice à l'honneur de la jeune fille et
sa la famille, et d'autre part l'école qui impose l'activité
piscine.
Dans de telles situations l'éducateur peut jouer un
rôle de médiateur entre la jeune fille, les parents et
l'école. Cela va se traduire pour ce cas précis par exemple par
une rencontre avec la famille afin de pointer les enjeux de ce refus pour la
jeune fille en termes d'exclusion. En parallèle, l'éducateur se
rendra à l'école afin d'organiser une rencontre entre les parents
et l'institution. C'est ainsi que, peu à peu, un espace de
médiation où un compromis sera peut être possible, pourra
se créer.
Il est clair que chaque situation met en jeu des acteurs
différents avec des systèmes de références plus ou
moins variées et de ce fait, la médiation à trouver sera
adaptée à chaque situation.
Ce travail de médiation peut être entrepris avec
des partenaires tels que les associations communautaires pouvant aider à
une meilleure compréhension de l'usager tant au niveau de la langue que
dans le travail de décodage des propos tenus.
Le travail de négociation est donc avant tout un
travail de compromis acceptable par tous. Cela permettra d'éviter d'une
part « ...l'imposition de règles et de prévenir
l'exclusion et la marginalisation.... » et d'autre part
« ...de respecter l'empreinte identitaire de la
personne »14(*)
Dans l'approche interculturelle l'éducateur, dans son
accompagnement, peut aider l'usager, en valorisant sa culture, à
construire son identité. A ce propos pour Selim Abou il serait
d'ailleurs préjudiciable au migrants ou à l'enfant des migrants
de « ...refouler son origine, son histoire, sa culture pour
intérioriser d'emblée le monde de l'autre car c'est le plus
sûr moyen de s'exposer aux dissociations psychiques qui
caractérisent les maladies mentales ». En effet, si la culture
de la personne est dénigrée ou montrée
négativement, cela peut se traduire chez l'usager par une
stratégie identitaire de repli pouvant être problématique
si elle perdure (voire la première partie du mémoire). Le
travailleur social devra lorsqu'il : « ...rencontrera la
problématique de la différence et de l'identité chez les
jeunes migrants et, à ce moment, il devra aider les jeunes à
traiter leur différence et à éviter les pièges de
l'intériorisation de l'image négative, du refoulement et de
l'agressivité... »15(*).
III/ Approche interculturelle et
catégorisation
L'approche interculturelle est certes un outil très
intéressant pour l'éducateur dans la rencontre et cela qu'il soit
marocain, malien, roumain, vietnamien ou même breton (en effet à
l'intérieur même des cultures ils existent des sous-cultures plus
ou moins affirmés) néanmoins cette approche doit être une
prise en compte du particularisme culturel de l'usager et non une
catégorisation, une stigmatisation de la personne. Il est vrai qu'une
dérive de l'approche interculturelle serait de réduire l'usager
à un être culturel.
D'ailleurs, selon Cohen-Emerique, une approche unidimensionnel
de l'identité d'autrui serait réductrice et enfermerait la
personne dans une identité assignée, une catégorisation.
Faïza Guelamine souligne également cette
dérive : « Il paraît donc opportun de se
méfier des positions qui, en se voulant respectueuse des
identités culturelles, finissent par classer des individus dans des
catégories réductrices. Faut-il rappeler que ces derniers
demeurent, malgré leurs caractéristiques communes, des individus
au parcours singulier ».
Il m'est d'ailleurs arrivée au cours de ma courte
expérience professionnelle de prendre, dans certaines situations, trop
en compte cette dimension culturelle alors qu'elle ne constitue qu'un aspect
singulier qui définit le sujet.
De plus, la construction identitaire est un processus ce qui
implique une évolution, une dynamique, et par conséquent, la
dimension et l'appartenance culturelle ne peuvent être envisagées
par le travailleur social comme un aspect figé lors d'un accompagnement
auprès des usagers.
Enfin, la culture d'origine est une notion trop large qui peut
dans certains cas être mal interpréter. Par exemple, la culture
d'un algérien musulman n'est pas la même qu'un français ou
qu'un pakistanais musulman. Car bien qu'ils partagent certaines
caractéristiques culturelles, ici, l'islam, d'autres
spécificités culturelles peuvent les séparer. Il serait
donc inapproprié de ne tenir compte que de certaines
caractéristiques culturelles dans la relation éducative.
La relation éducative dans l'accompagnement de l'usager
doit donc être une approche tenant compte de la globalité
identitaire de l'individu. L'approche interculturelle peut se
révéler un outil intéressant si l'on ne réduit pas
l'usager à un être porteur de certaines particularités
culturelles.
CONCLUSION
Le secteur du travail social qui concernait d'abord le
problème des intégrations insuffisantes de certaines couches
sociales défavorisées s'est ouvert progressivement sur les
problèmes de l'inter culturalité.
En effet, la crise économique mondiale et les crises
politiques associées ont entraîné de nombreux
phénomènes migratoires. Les couches sociales
défavorisées et mal intégrées sont devenues
à la fois plus nombreuses et plus diversifiées quant à
leur appartenance nationale et culturelle.
Dès lors, un intense travail interculturel est devenu
nécessaire pour éviter les deux extrêmes opposés de
l'assimilation réductrice (qui est la forme d'intégration
à la française) et une ghettoïsation (voir annexe 1).
Les travailleurs sociaux sont confrontés dans la
relation avec l'usager migrant ou enfant de migrants à une position
ambiguë ou se mêlent attirance et répulsion,
intérêts et incompréhensions. Néanmoins, à la
décharge des professionnels leur formation ne les prépare pas
toujours à la confrontation interculturelle bien que certains efforts
soient faits ces dernières années dans les centres de
formations.
J'en arrive à la fin de ce travail de réflexion
et il est temps pour moi de faire le point sur mon mémoire. A travers
toute la réalisation de ce mémoire je n'avais qu'un seul but en
tête, celui de confirmer les hypothèses que j'avais émises.
Si, pour l'existence d'une influence de la culture d'origine des parents sur
leurs enfants, nés et vivants en France, se vérifie, en revanche
ma seconde hypothèse doit être nuancée.
En effet, la lecture de nombreux ouvrages, les échanges
avec Joëlle Dutruilh, l'analyse à postériori des situations
sont autant de données qui m'amènent à nuancer mon
hypothèse initiale. Par conséquent, la prise en compte des
aspects culturels de l'usager dans la relation éducative me semble
importante cependant elle ne doit pas les enfermer dans leurs
particularités culturelles.
Ce travail de réflexion qu'est le mémoire m'a
surtout permis de saisir la spécificité et la complexité
de chaque situation. En effet, les aspects culturels peuvent être
partagés par un groupe donné mais l'appropriation de la culture
est avant tout un processus individuel où la personne est acteur dans
son enculturation et son acculturation.
J'ai pu également apprécier le processus de
transformation intellectuelle qu'a induit la poursuite d'un tel travail, qui
m'a permis d'affiner mon regard sur notre pratique d'éducateur.
Par ce travail, j'espère avoir contribué
à valoriser une pratique professionnelle qu'est l'approche
interculturelle que j'estime importante dans nos relations éducatives
avec les usagers.
Je tiens à rappeler que ce travail ne prétend ni
à la scientificité, ni à l'exhaustivité, c'est en
toute modestie qu'il rend compte d'un éclairage sur la
réalité du métier d'éducateur dans un club de
prévention.
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES :
Ouvrages :
Abdallah-Preitcelle : « Interculturel en
éducation et science sociale », Editions Le Mirail, Toulouse,
1985
Camilléri Carmel: « Les
stratégies identitaires », Editions PUF, Paris,1998
Camilleri Carmel / Cohen Emmerique, « Chocs des
cultures : concepts et enjeux pratiques de l'interculturel», Editions
L'Harmatan, Paris, 1989
Faïza Guelamine, Intervenir auprès des
populations immigrées, Paris, Dunod, 2000
Gisèle Legault : « L'intervention
culturelle », Editions ..., Montréal,
Jacques Marpeau : « Le processus
éducatif », éditions Eres, Paris
H.. Malewska, C. Gachon, « Le travail social et les
enfants des migrants », Paris, éditions L'harmattan, 1988
Muccielli Alex, « L'identité »,
Editions PUF, Paris 1986
Schnapper Dominique, « la France de
l'intégration », , éditons Gallimard, Paris 1991
Gilles Verbunt : « Les obstacles culturels aux
interventions sociale »s, guide de réflexion, Montrouge,
éditions CNDP, Paris, 1996
Filmographie
Yamina Benguigui, « Mémoires
d'immigré », 1995
Est-il important d'établir OUI et
maintenir des relations avec d'autres groupes
NON
NON
Intégration Assimilation
Séparation/ Marginalisation
Ségrégation
Question : Est-il important de conserver son
identité et ses caractéristiques culturelles ?
OUI NON
Annexe 1
Le processus d'acculturation
Les options prises par les individus restent des sources
possibles de confrontation (conflits, etc...) entre les membres, les familles
et la société d'accueil
ouhiukhigijhy
* 1 « Les
immigrés en France », éditions INSEE Contours et
caractères, Paris, 1997
* 2 Alex Muchielli :
« l'indentité », éditions PUF, Paris, 1986
* 3 Joëlle Dutruilh :
« Approche interculturelle et chic culturel, Isis-creiai, 2000
* 4 C Camilleri, Chocs de
cultures », Editions L'Harmatan, 1989
* 5 Gisèle Legault :
« l'interven,tion culturelle, Editions, Montréal
* 6 Hanna Malewska-Peyre :
« chocs de culture », chapitre travail social, Editions
l'Harmatan
* 7 Chartre du CNLAPS
(comité national de liaison des associations de prévention
spécialisée, 1997
* 8 Gilles Verbunt : Les
obstacles culturels aux interventions sociales, CNDP, 1996, P96
* 9 Gilles Verbunt,
« les obstacles culturels aux interventions sociales », P
129, éditions CNDP
* 10 Marie rose Moro :
« Psychothérapie transculturelle des enfants
migrants », édition DUNOD, 1998, p88
* 11 Sélim Abou,
« L'identité culturelle » édit Hachette 1981)
« Qui suis-je ? , Qui suis-je pour les autres et qui sont les
autres pour moi ?
* 12 Abdulah-Preitceille :
« l'interculturel en éducation et sciences humaines, editions
Le mirail 1985
* 13 Gisèle
Legault : « L'intervention culturelle »,Chapitre 5
Editions ..., Montréal,
* 14 Gisèle
Legault : « L'intervention culturelle »,Chapitre 6,
Editions ..., Montréal,
* 15 Hanna
Malewska-Peyre : « choc de cultures », éditions
l'Harmattan, p 131