C HAPITRE 2
SYSCOA ET PROCEDURES DU CIDR
1. Généralités
L'analyse comparée se donne pour objectif de mesurer
la compatibilité des normes SYSCOA avec celles du CIDR en axant la
recherche sur les principes et les méthodes comptables d'une part ;
l'organisation comptable d'autre part.
Le chapitre 2 de la troisième partie de cette
étude comme le chapitre 1 se subdivise en quatre sections :
- une première section pour l'analyse des principes
comptables, - une deuxième pour celle des méthodes comptables
- une troisième pour l'organisation comptable et
- une quatrième pour l'analyse des états
financiers
2. Principes comptables
2.1. Principe de prudence (articles 3 et 6)
Les procédures comptables du CIDR indiquent en
préambule que les immobilisations ne feront pas l'objet
d'amortissement.
En outre la comptabilité des projets CIDR est une
comptabilité de trésorerie.
Les incertitudes et les risques nés au cours d'un exercice
ne sont pas rattachés par le système de provision à
l'exercice de référence.
Le principe de prudence n'est donc pas systématiquement
appliqué dans les projets CIDR.
2.2. Principe de la permanence des méthodes
(article 40)
Le principe de la permanence des méthodes n'est pas
explicitement mentionné dans les procédures comptables du
CIDR.
La permanence des méthodes connaît une application
assez élargie dans les projets du CIDR tout au moins sur la durée
de vie.
2.3. Principe de la correspondance bilan de
clôture (N-1), bilan N (article 34)
Les projets CIDR ne produisent pas de bilan, mais plutôt
une situation financière emplois-ressources dans laquelle les stocks et
les engagements non liquidés ne sont pas pris en compte.
Mis à part les soldes des comptes de trésorerie,
aucun autre compte d'un exercice ne fait l'objet de report au cours de
l'exercice suivant.
L'application du principe de la correspondance bilan de
clôture (N-1), bilan N est, dans ce contexte particulier, compromise.
2.4. Principe de la spécialisation des
exercices (article 59)
Les procédures du CIDR notifient formellement dans le
préambule que les comptabilités terrains des projets CIDR ne
devraient pas appliquer le principe de spécialisation des exercices.
Ainsi, les charges non payées ne sont -elles pas
provisionnées dans les situations financières de l'exercice.
Une situation extra-comptable de ces charges non payées
est néanmoins tenue et jointe en annexe à la situation
financière (voir préambule)
Elles seront comptabilisées dans la situation
financière de la période de leur règlement.
A l'instar des normes comptables internationales, le SYSCOA
préconise la tenue d'une comptabilité d'engagement qui permet de
tenir compte de la séparation des exercices.
2.5. Principe du coût historique (articles
35 et 36)
Le principe du coût historique n'est pas explicitement
évoqué dans les procédures comptables du CIDR.
Nous notons dans la pratique que les valeurs exprimées
en monnaies (FCFA) de différentes époques sont
additionnées d'où une application implicite du principe du
coût historique.
2.6. Principe de la continuité de
l'exploitation (article 39)
Le bailleur de fonds (CIDR) peut mettre fin au projet avant la
fin prévue de celui-ci et cela en fonction de paramètres convenus
dans l'accord de financement.
Le sort du patrimoine du projet en fin de vie ou en cas
d'arrêt prématuré est également prévu dans
l'accord de financement mais non dans les procédures comptables et de
gestion.
Deux cas essentiels d'arrêt du projet sont prévus
dans les conventions : l'arrêt lié au non-respect de clauses
convenues et la fin programmée.
Les conséquences sont respectivement le remboursement des
fonds investis dans le projet et la donation à titre gracieux du
patrimoine du projet aux derniers bénéficiaires.
Une évaluation, au sens courant du terme, du patrimoine du
projet en fin de vie n'est pas prévue dans les procédures
comptables et de gestion du CIDR.
Cette évaluation n'est pas non plus prévue dans les
conventions sur lesquels nous avons travaillé.
Le principe de la continuité de l'exploitation telle
que stipulé par l'article 39 du règlement du SYSCOA n'est pas
appliqué par lesdits projets, même dans le cas où ils sont
considérés comme « normalement en activité »,
c'est à dire « pouvant continuer à fonctionner dans un
avenir raisonnablement prévisible »
2.7. Principe de la transparence (articles 6, 8,
9, 10, 11)
Le principe de transparence n'est pas évoqué par
les procédures comptables et de gestion du CIDR.
Les objectifs essentiels de régularité et de
sincérité de la comptabilité constituent les
éléments de base de la transparence.
En rappel, dans le cas du SYSCOA la régularité
implique la conformité aux règles et procédures du SYSCOA
au plan comptable et à sa terminologie, à ses
présentations d'états financiers.
Les « règles et procédures comptables du
SYSCOA » inclus les méthodes d'évaluation, les règles
d'organisation comptable, les formes et contenus normalisés des
états financiers...
Les règles d'organisation comptable, les formes et
contenus des états financiers du CIDR tels que décrit dans le
chapitre 2 de la première partie de notre étude ne sont pas
conformes à règles et procédures du SYSCOA.
Les projets ne produisent pas certains des états
financiers rendus obligatoires par le SYSCOA à savoir le bilan et le
compte de résultat.
Le cadre comptable CIDR est fondamentalement différent
du cadre comptable SYSCOA (voir Première partie chapitre 1,
généralités)
En outre, la tenue du grand livre et de la balance n'est pas
obligatoire dans les projets CIDR.
Il s'ensuit que la régularité, au sens, du
SYSCOA n'est pas une réalité au sein des projets du CIDR.
La sincérité selon le SYSCOA implique la
présentation et la communication claire et loyale de l'information sans
intention de dissimuler la réalité derrière l'apparence et
le respect de la règle de non-compensation.
Cependant certaines règles de comptabilisation
édictées par ces procédures concourent à l'atteinte
de cet objectif.
Dans cette optique toutes les dépenses devraient
être justifiées par des pièces externes en « bonne et
due forme » c'est à dire comporter toutes les mentions obligatoires
susceptibles de leur conférer une valeur probante (voir Première
partie ; chapitre 1, point B.1.3.)
Le contenu de chaque formulaire comptable est formalisé
de même que celui des rapports comptables. Le niveau de détail de
chaque formulaire comptable permet au bailleur de fonds de se procurer
l'information utile.
Le dernier paragraphe du préambule stipule que lorsque
cela s'avère nécessaire, des éléments
d'informations complémentaires seront ajoutés en annexe à
la comptabilité.
L'objectif est de permettre une meilleur lisibilité des
informations fournies dans les comptes.
La définition du principe de transparence donner par le
SYSCOA est très précise et n'autorise pas à notre avis
plusieurs interprétations.
Aussi pouvons nous affirmer sans réserves que le principe
de la transparence « au sens » du SYSCOA n'est pas appliqué
dans les projets CIDR.
2.8. Principe de l'importance significative
(article 33)
Le principe de l'importance significative n'est pas
formalisé dans les procédures du
CIDR.
Les volets des procédures comptables et de gestion du CIDR
portant sur l'audit des projets indiquent que les contrôles sur les
opérations devraient se faire par sondage.
Ces procédures ne définissent pas avec
précision le seuil de sondage, le seuil de signification et /ou le
niveau des contrôles.
Au cours de notre expérience professionnelle (quatre
ans d'audit), nous avons cependant constaté que toute anomalie
portée à la connaissance des bailleurs de fonds pouvait se
relevée « significative» pour peu qu'elle soit pertinente,
bien documentée et explicitée.
Cette situation est liée au fait que les fonds mis
à la disposition des projets proviennent le plus souvent de dons, de
collectes et de prélèvements au niveau des populations du pays du
bailleur de fonds.
La provenance des fonds rend le bailleur de fonds « sensible
» à la moindre anomalie.
Ainsi, toutes les opérations peuvent s'avérer
significatives dans le cadre de ces projets de développement.
2.9. Principe de la prééminence de
la réalité sur l'apparence
Des cinq cas retenus par le SYSCOA pour l'application de ce
principe, seuls deux (2) sont observés dans les projets CIDR :
1. Biens détenus avec réserve de
propriété
2. Biens détenus dans le cadre d'une concession des
services publics
Dans le cas des biens détenus avec réserve de
propriété, à l'instar des procédures du DANIDA les
biens acquis sur le financement du CIDR pour le compte d'un projet demeurent
sous réserve de propriété du CIDR jusqu'au
règlement de leur sort convenu dans les termes des conventions de mise
en oeuvre du projet.
Les comptabilités des projets terrains CIDR
étant des comptabilités de trésorerie, les biens sont
portés dans les situations financières au moment de leur
acquisition et demeurent sur la liste des biens du projet tout le long de la
durée de vie de ce dernier.
Lorsqu'il s'agit des biens acquis par les services publics et
cédés au projet, ceux-ci feront partie de la situation
financière de la période d'acquisition.
Dans le cas de biens provenant des services publics et mis
à la disposition du projet, les situations financières ne
tiennent pas compte de ces biens.
Il s'ensuit que le principe de la prééminence de la
réalité sur l'apparence n'est pas systématiquement
appliqué par les projets CIDR.
3. Méthodes comptables 3.1. Analyse
des charges
Le règlement du SYSCOA impose que les charges soient
analysées par nature juridique.
Les procédures comptables et de gestion des projets du
CIDR ne définissent pas la convention comptable à suivre.
Cependant nous observons sur le terrain que les charges de
fonctionnement sont analysées par destination tandis que les charges
d'investissement le sont par nature juridique.
Le document du projet et les conventions signés entre
le bénéficiaire du projet et le bailleur de fonds sont les
principaux déterminants de l'analyse des charges qui sera adoptée
par la comptabilité.
3.2. Méthodes d'évaluation
3.2.1. Immobilisations
Les procédures comptables et de gestion du CIDR ne
décrivent pas la méthode d'évaluation des
immobilisations.
En pratique, les immobilisations sont comptabilisées dans
les formulaires comptables, les cahiers de banque, de caisses à leur
prix d'acquisition.
Elles ne subissent pas d'amortissements conformément aux
prescriptions des procédures comptables CIDR.
Les charges relatives à ces immobilisations sont
présentées dans les fiches de décaissements de la
période de règlement et uniquement celles - ci.
L'entrée des immobilisations dans le patrimoine
à leur coût d'acquisition réel (article 36 du
règlement du droit comptable du SYSCOA) n'est pas d'application dans les
projets CIDR.
3.2.2. Stocks
Le traitement comptable et l'évaluation des stocks n'ont
pas été codifiés dans les procédures comptables du
CIDR.
Les projets CIDR ne comptabilisent pas les stocks dans leur
situation financière.
Ces situations financières enregistrent uniquement la
charge d'achat des stocks dont la comptabilisation s'effectue au prix
d'achat.
Nous n'avons pas observé l'utilisation de normes
d'évaluation des sorties, situation qui est justifiée par
l'absence d'une tenue de stocks dans la comptabilité.
3.2.3. Opérations en
devises
Un taux de change moyen pondéré est
déterminé pour convertir les comptes en devises en monnaie
locales selon les prescriptions des « procédures
particulières de vérification arithmétique pour les
comptabilités ayant des comptes en devises » du CIDR.
Les pertes ou gains de changes sont déterminés en
appliquant la variation du taux de change moyen pondéré au solde
de début des comptes de devises.
Cette méthode d'évaluation n'est pas conforme aux
stipulations des articles 51 à 58 du règlement du droit comptable
du SYSCOA.
4. Organisation comptable
Les « procédures comptables et formulaires » du
CIDR autorisent la tenue d'une comptabilité pluri - monétaire
(page 3, fiche de décaissement, paragraphe 2)
La tenue d'une telle comptabilité est contraire aux termes
de l'alinéa 1 de l'article 17 du règlement du SYSCOA qui exige
que la comptabilité soit tenue en FCFA.
Selon le point II, paragraphe c) des procédures
d'organisation comptables du CIDR, une « attestation de dépense
» peut être est établie pour les dépenses dont le
justificatif n'a pu être obtenu.
L'établissement de telles attestations n'est pas conforme
aux termes de l'article 17, alinéa 3 car elles ne sont pas susceptibles
de servir comme moyen de preuve
Les dépenses de faibles montants de même nature
peuvent être regroupées sur des attestations de dépenses
(Procédures d'organisation comptable, point II.)c) )
Cette pratique est contraire aux stipulations de l'article 17,
alinéa 4 qui exigent que les dépenses soient de même
nature, réalisées en un même lieu le même jour avant
d'être regroupées.
Les procédures comptables et de gestion du CIDR rendent
obligatoires la tenue des formulaires comptables en lieu et place des livres
comptables exigés par le SYSCOA (article 19)
Les cahiers de banques et de caisse sont tenus uniquement dans
l'objectif de répondre aux exigences des auditeurs financiers et de
permettre la mise à jour des mouvements de la trésorerie et des
soldes disponibles (page 8 des procédures comptables et formulaires)
Les procédures « comptables et formulaires »
du CIDR ont uniformisé le plan des comptes auxquels les
comptabilités devraient avoir recours. Ce plan n'est pas tiré de
la liste des comptes du SYSCOA comme institué par l'article 17,
alinéa 7du règlement du droit comptable du SYSCOA.
5. Etats financiers
Les états financiers au sens du SYSCOA sont obligatoires
dans leur forme et dans leur contenu pour toutes les entités incluses
dans le champ d'application.
Au sens des procédures du CIDR, les états
financiers s'entendent : - le tableau des emplois - ressources ;
- le récapitulatif des dépenses mensuelles par
poste budgétaire ; - état des cautions versées ;
- inventaire des équipements du projet ;
- détail des comptes de tiers mouvementés pendant
la période ;
- liste des dépenses non comptabilisée et restant
dues en fin d'exercice.
Dans le cas des projets CIDR comme dans le cas des projets
financés par le DANIDA, les informations sur le flux de
trésorerie rendues obligatoires par l'établissement du TAFIRE
(SYSCOA) et la norme comptable internationale IAS 7 ne sont pas exigées
par le bailleur de fonds.
Ces informations ne sont par conséquent pas produites
à l'instar des informations sur les performances contenues dans le
compte de résultat au sens du SYSCOA (article 8 et article 13 du
règlement du droit comptable)
L'analyse des performances desdits projets s'effectue dans le
cadre d'une évaluation globale du projet qui est axée sur les
résultats socio-économiques et non sur la rentabilité
financière.
La situation financière de ces projets ne permet pas
une analyse de l'activité en « éléments courants
» et « éléments non courants » comme l'exigent le
SYSCOA et les normes internationales (IAS)
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