II/ Activités, les Produits et les Services de
l'Epargne
1) Les Activités
L'activité des SFD consiste essentiellement en des
opérations de collecte d'épargne et d'octroi de crédit
à des populations non bancarisées pour des montants modestes,
voire infimes. Cette activité, que l'on appelle usuellement la
microfinance, peut englober des activités annexes : opérations
d'assurance liées au crédit, activités de conseil en
comptabilité ou en gestion, actions d'éducation sanitaire ou
sociale elles aussi liées au crédit.
D'autres produits financiers sont parfois
développés, par les SFD eux-mêmes ou en relation avec des
banques implantées dans l'UEMOA : il s'agit principalement des
opérations de transfert de fonds internationaux, impliquant souvent une
opération de change, et de mise à disposition de chéquiers
en faveur de la clientèle la plus aisée. Ces activités
sont, chacune en ce qui la concerne, soumises à une
réglementation plus ou moins parcellaire, qui a
vocation à régir tout ou partie de l'activité
exercée. Elles demeurent cependant marginales au regard de
l'activité centrale, qui est l'octroi du crédit et, pour une
partie des SFD, la collecte de l'épargne.
2) les Produits et les Services de l'Epargne
La diversité des réseaux de micro finance selon
leur méthodologie et la place qu'ils attribuent à
l'épargne (épargne préalable et exclusive ou concomitante
et secondaire) entraîne une diversité dans les produits et
services d'épargne. Ceux-ci peuvent être appréhendés
sous trois catégories : l'épargne volontaire, l'épargne
obligatoire et l'épargne liée à un service.
a) L'épargne volontaire
L'épargne volontaire est constituée de deux types
de produits :
V' Les dépôts à vue constituent la
catégorie la plus utilisée des produits d'épargne. Ils
sont caractérisés par la souplesse des conditions d'accès
: faible montant exigé pour l'ouverture d'un compte, proximité et
accessibilité des caisses, possibilité d'effectuer de petits
versements et liberté de retraits à tout moment, facilité
d'exécution des opérations. Les dépôts à vue
permettent aux populations de garder leurs économies en lieux
sûrs, à l'abri des pressions familiales. Le livret de compte remis
au déposant lui permet de vérifier les opérations
effectuées et le solde disponible dans le compte ;
V' Les dépôts à terme sont des
dépôts bloqués pendant une période minimum de trois
mois et qui sont rémunérés par un taux
prédéterminé. Les dépôts à vue sont
très peu développés pour au moins deux raisons. D'abord,
les populations ont des revenus très faibles. Ensuite il s'avère
que la motivation
essentielle de l'épargne demeure l'accès au
crédit, même si d'autres motivations comme la
sécurité et la précaution existent.
b) L'épargne obligatoire
L'épargne obligatoire est en relation directe avec le
crédit. On trouve deux types d'épargne obligatoire :
w' L'épargne préalable suit le postulat selon
lequel un demandeur de crédit doit fournir un effort financier minimum
consistant à épargner régulièrement une certaine
somme pendant une période d'au moins trois mois. Ce qui devra prouver
qu'il est capable d'apporter au moment de sa demande de crédit une part
des besoins de financement (au minimum 10 %). Cette épargne est
bloquée et parfois non rémunérée ;
w' L'épargne de garantie sert à garantir le
crédit consenti généralement à un individu ou
à un groupe. L'épargne de garantie est parfois utilisée en
combinaison avec d'autres formes de garanties (cautions solidaires de groupe).
La mobilisation de l'épargne de garantie (ou selon les appellations :
fonds de garantie, fonds de groupe, épargne nantie) se fait selon trois
procédés différents :
- Une constitution préalable de l'épargne par les
moyens propres des demandeurs ;
- Un prélèvement sur le montant du crédit au
moment de la mise en place du prêt. Ce montant prélevé est
bloqué comme garantie ;
- Une constitution de l'épargne au fur et à
mesure que l'on rembourse le prêt. Ceci ne constitue plus une garantie
mais suppose une incitation à l'épargne.
c) L'épargne liée à un service
donné
Ce service n'est pas très répandu mais tend de
plus en plus à être intégré par les SFD. On peut en
citer l'épargne investissement ou l'épargne vieillesse. Par
contre, au Sénégal le service le plus répandu est
aujourd'hui l'assurance-maladie. Des produits micro assurance santé sont
de plus en plus offerts par des mutuelles d'épargne et de crédit.
PAMECAS en a fait l'expérience avec la mutuelle d'épargne et de
crédit Icotaf boubess (MECIB) en installant un dispositif contractuel
entre ses clients et des structures sanitaires (Sine 2003, p. 68).
En somme, il faut remarquer que l'incitation à
épargner dépend du type de service offert. Dans certains
réseaux, par exemple les fonctionnaires ne sont pas éligibles
pour avoir des prêts. La structure ne leur offre que des services
d'épargne, faisant une priorité aux populations à faible
revenu. Cependant, dans un souci de rechercher des moyens, les SFD font preuve
d'innovation en matière de services et de produits offerts aux clients.
L'ACEP propose des types de comptes d'épargne en dehors de ceux
classiques : les comptes d'épargne entrepreneur, d'épargne projet
ou spécial mettent un procédé beaucoup plus complexe et
ciblent une clientèle donnée.
L'organisation de l'épargne et sa capitalisation plus
que l'octroi de crédit aux pauvres et aux exclus était un
défi que le Sénégal devait relever. Aussi, la mobilisation
de ressources internes, par l'épargne nationale, est apparue comme la
base indispensable de financement de la croissance et du développement
face aux contraintes et aux limites de l'endettement extérieur. Du coup,
le financement décentralisé, contrairement au système
financier institutionnel (banque centrale, banque de développement,
banque commerciale) touche la majeure partie de la population non
bancarisée. Il est caractérisé par la souplesse de son
organisation et
porte l'empreinte de la population pauvre par sa contribution
à son propre financement ou à celui des autres. Il devient
dès lors un réflexe.
Seulement, un niveau d'élaboration de politiques
nationales, reconnaissant leur place dans l'économie, susceptibles de
stimuler leurs actions par des mesures
appropriées, des réglementations bancaires prenant
en compte leur spécificité reste à achever. La petitesse
de la taille et l'impact encore faible de ces systèmes financiers,
même s'ils sont aujourd'hui reconnus, ne leur permet pas encore d'influer
sur la définition des politiques nationales. Cette faiblesse de l'impact
est surtout caractérisée par sa non organisation en union ou en
fédération, mais aussi par une mauvaise capitalisation des
informations au niveau de certaines SFD. Les mutuelles qui sont parvenues
à se créer en union sont devenues les plus performantes, c'est le
cas de l'UNACOIS, du PAMECAS et du CMS.
Les structures financières décentralisées
constituent dès lors une alternative au système bancaire
classique parce que adaptées au contexte socio culturel et aux
aspirations des populations dans la recherche de moyens efficaces de lutte
contre la pauvreté et du financement d'activités productives. La
micro finance constitue ainsi un outil transversal qui peut avoir des impacts
sur différents aspects du développement et pas seulement sur les
activités économiques. En effet, les créations d'emplois
et de revenus, la capacité d'épargner peuvent induire des
changements dans les comportements de ceux qui en bénéficient.
Ces changements peuvent s'opérer dans le sens d'une amélioration
des conditions sanitaires, d'une augmentation du niveau d'éducation,
d'une meilleure gestion de l'environnement, etc.
Ce constat de la micro finance comme pouvant avoir des effets
directs et indirects, s'exerçant à différents niveaux
(individuel, ménager, etc.) et à champs (impacts
sociaux, économiques, etc.) soutenant les
réflexions sur sa pertinence comme outil de développement.
Seulement, tout comme les données de la BCEAO sur le
Sénégal, ceux de l'UEMOA sont à relativiser. Ces
différentes progressions s'accompagnent d'un certain nombre de
dysfonctionnement, notamment au niveau des systèmes d'informations de
gestion et de contrôle interne des SDF. D'abord, parmi les SFD, qui sont
reconnues par la loi, beaucoup ne parviennent pas à fournir
l'information sur leurs états financiers. Ensuite, il existe au
Sénégal des structures qui fonctionnent sans reconnaissances
juridiques et qui ne sont, par conséquent, pas pris en compte.
L'une des recommandations en micro finance consiste à
vérifier la gestion financière d'une institution par des
contrôles internes efficaces avant de lui permettre de mobiliser
l'épargne des populations Elle ne nous semble pas pertinente. Au
Sénégal, on se rend compte qu'une institution peut, dès sa
constitution, commencer à collecter des dépôts. Il revient
à la cellule d'assistance technique de se donner les moyens de les
contrôler. Les dysfonctionnements que pose la collecte de
l'épargne sont de deux ordres :
- Le problème de la sécurisation des
dépôts qui demeure un des handicaps du fait d'un manque de
contrôle à la fois interne et externe ;
- Le coût de l'épargne. Modeste pour les
bénéficiaires, les coûts de l'épargne peuvent
être parfois très élevés, ce qui peut constituer un
frein à la collecte.
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