b) Dégradation due à l'exploitation
pétrolière
Les causes de dégradation sus
évoquées occultent en effet celle relative à
l'exploitation du pétrole.
L'exploitation du pétrole dans les forêts
tropicales exige des défrichages de certaines zones. Ainsi, au Cameroun
et au Tchad, la forêt a été détruite sur une
longueur de 1070 km afin de faire construire l'Oléoduc sus
évoqué. En dehors de cette dégradation directe, les
forêts d'Afrique centrale subissent également un effet de serre
résultant des torchères des gaz.
Le déversement du pétrole dans le milieu
forestier ne permet pas le développement normal des espèces. En
effet, quand le recouvre les racines aériens des arbres de mangrove, il
empêche l'oxygène de circuler dans les tissus des racines
enfoncées dans les sols anoxiques. Le pétrole peut être
absorbé par les racines, véhiculé jusqu'aux feuilles et
bloquer la transpiration. Le pétrole peut perturber les membranes des
racines, ce qui provoque une concentration mortelle de sel dans les tissus.
Une mortalité soudaine et massive d'arbres de
mangrove provoque une érosion des sédiments. A la suite d'un
déversement de pétrole à Panama en 1986, beaucoup d'arbres
de mangrove ont pourri et sont tombés. Cet exemple est visible aux
alentours de Gamba et du terminal de Djeno. Les sédiments de ces
habitats se sont érodés à des rythmes pouvant atteindre
plusieurs centimètres par jour. Cet impact sur la mangrove atteint les
habitats naturels marins que nous avons vus plus haut.
Paragraphe 2 : Disparition de la diversité
biologique
La convention de Rio de 1992 sur la diversité
biologique définit la diversité biologique comme étant la
« la variabilité des organismes vivants de toute origine y
compris, entre autres, les écosystèmes terrestres, marins et
autres écosystèmes aquatiques et les complexes écologiques
dont ils font partie ; cela comprend la diversité au sein des
espèces et entre espèces ainsi que celle des
écosystèmes » 17.
Il est devenu évident que depuis plusieurs
années, dans les plus grandes zones forestières tropicales
d'Afrique centrale, la diversité biologique se trouve menacée
à la suite de la déforestation et de la dégradation des
forêts. Le problème de l'extinction de la diversité
biologique dans cette région devient ainsi une priorité
internationale.
Les forêts tropicales de l'Afrique centrale
abritent la plus importante réserve de la biodiversité du monde
après les forêts amazoniennes. Elles sont riches en espèces
emblématiques, rares et ou menacées dont les grands
mammifères (Gorilles de plaines, Chimpanzés, etc....) ou les
oiseaux de forêt (Perroquets, Picatharte...). On y dénombre plus
de 10000 espèces de papillons....dont beaucoup sont
endémiques.
Cette importante réserve mondiale est en prise
également à la déforestation suite à l'exploitation
du pétrole, et à la pollution qui en résulte. Cela
entraine une diminution des ressources phitogénétiques.
17 - Convention de Rio de 1992 art.2
a) Disparition de la diversité biologique suite
à la déforestation.
L'exploitation du pétrole impose, à
certains endroits, l'ouverture et/ou le défrichage de massifs forestiers
à grande échelle. Ce défrichage est indispensable pour
l'implantation des installations nécessaires à l'exercice de
l'activité mais également des pistes ou voies où doivent
circuler les engins. La construction de l'oléoduc Tchad / Cameroun en
est une belle illustration.
Ce défrichage et les piste ainsi créées
favorisent un braconnage de plus en plus accrue dans les zones
d'activités. Car ils permettent aux chasseurs de pénétrer
très loin dans la forêt et à des endroits où, sans
ces pistes et ces voies ils ne pouvaient pas y arriver au grand dame de la
diversité biologique18.
Ainsi donc la suite de cette déforestation, la
diversité biologique se trouve menacée 19. Le
problème de l'extinction de la diversité biologique devient ainsi
une priorité politique internationale.
Sur le plan mondial, la disparition de la
diversité biologique a donné lieu à l'adoption de la
convention sur la diversité biologique, dont les objectifs sont la
conservation, l'utilisation commerciale durable et le partage des avantages
découlant de l'exploitation de ces ressources.20
18 - Cf. The Ecologist, 1987, vol. 17, n°4/5. Selon
l'éditorial de ce numéro, chaque jour de déforestation
impliquerait la disparition d'une espèce.
19 - Rapport Brundtland, P. 185
20 - La convention sur la diversité biologique fut
ouverte à la signature le 5 juin 1992 et est entrée en vigueur le
29 décembre 1993. Malgré l'existence de cet instrument
juridiquement contraignant, la disparition des espèces continue à
être l'un des problèmes majeurs de notre temps. Les constatations
à cet égard sont accablantes. Le rapport préparé et
publié par le Programme des Nations Unies pour l'Environnement (PNUE)
confirme la tendance à la disparition accélérée de
la biodiversité dans toutes les régions du monde. Cette tendance
s'est accélérée plus particulièrement en
Amérique du Sud, en Afrique et en Asie ou la dégradation de la
diversité biologique a atteint un niveau très préoccupant.
En dehors de cet aspect, l'exploitation du
pétrole se fait parfois directement dans des zones
considérées comme des réserves nationales ou mondiales de
biodiversité. Les installations pétrolières dans les
champs de Gamba Ivinga et de Rabi-Kounga au Gabon sont une illustration
parfaite de ce cas de figure. C'est à juste titre que Jean BOURGEAIS,
Conseiller Technique Principal de WWF - Gamba, intitule son article
publié le 21 décembre 2001 « Impact de l'exploitation
pétrolière dans le complexe de Gamba : le pire est à
venir ». En effet, dans cet article Jean BOURGEAIS met en
évidence la disparition de la biodiversité et l'impact
socio-sanitaire qui en résulte.
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